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4e éd it LA io n MONDIALISATION Origines, développement et effets Sous la direction de James D. Thwaites LA MONDIALISATION Origines, développements et effets LA MONDIALISATION Origines, développements et effets Quatrième édition Sous la direction de James Thwaites Les Presses de l’Université Laval reçoivent chaque année du Conseil des Arts du Canada et de la Société de développement des entreprises culturelles du Québec une aide financière pour l’ensemble de leur programme de publication. Nous reconnaissons l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada pour nos activités d’édition. Maquette de couverture : Laurie Patry Mise en pages : In Situ © Presses de l’Université Laval. Tous droits réservés. Dépôt légal 3e trimestre 2014 ISBN 978-2-7637-1845-3 PDF 9782763718460 Les Presses de l’Université Laval www.pulaval.com Toute reproduction ou diffusion en tout ou en partie de ce livre par quelque moyen que ce soit est interdite sans l’autorisation écrite des Presses de l’Université Laval. Pour Lois Enid Boyd et Cécile Belley, femmes de courage et de vision Table des matières Autour de la mondialisation : éléments d’introduction....................................................1 James D. Thwaites PREMIÈRE PARTIE GRANDS THÈMES D’ENSEMBLE L’économie, le commerce et l’entreprise Les mutations des stratégies d’entreprise.........................................................................17 Michel Capron La mondialisation : nouveau souffle du capitalisme contemporain..................................36 Daniel Mercure Blocs économiques et libéralisation du commerce.........................................................................................45 Joseph Pestieau Un regard critique sur la mobilité internationale : modèles, tendances et composantes....62 Tania Saba, Esther Fernandez-Burgaleta et Igor Volkov La mondialisation de l’économie : options des travailleurs et stratégies des entreprises dans les pays à coûts salariaux élevés...............................................................................85 Gijsbert van Liemt Les syndicats dans le domaine international Le syndicalisme mondial : un partenaire potentiel...........................................................107 Andreas Breitenfellner Antimondialisme, altermondialisme et le troisième Sommet des Amériques D’autres Amériques sont possibles..................................................................................137 James D. Thwaites, La « Guerra Sucia » en Argentine, l’affaire « No Candu », et le mouvement syndical canadien.........................................................................................................................171 James D. Thwaites VIII La mondialisation – Origines, développements et effets Le syndicalisme mondial : la raison d’être, le processus et la signification de la fondation de la Confédération syndicale internationale..................................................................199 James D. Thwaites L’emploi et les relations du travail dans un contexte mondial Les accords-cadres internationaux : enjeux et portée d’une négociation collective transnationale.................................................................................................................221 Renée-Claude Drouin Emplois précaires, emploi normal et syndicalisme.........................................................263 Christian Dufour et Adelheid Hege L’internationalisation de la politique du chômage...........................................................283 Travis William Fast Le travail et l’emploi après la crise financière mondiale : émergence d’un nouveau programme de recherche dans un monde en état de choc...............................................300 Anthony Gould Emploi, justice sociale et bien-être..................................................................................325 Joseph E. Stiglitz La solidarité sociale et la mondialisation Label social et lutte contre le travail des enfants : quelques réflexions..............................349 Janet Hilowitz L’envers des marques : Conditions de travail et droits des travailleurs dans les zones franches d’exportation...........................................................................................370 Sarah Perman, avec Laurent Duvillier, Natacha David John Eden et Samuel Grumiau Coordination éditoriale : Natacha David La Première Conférence de la Paix de La Haye : la révision des règles de la conduite de la guerre, et la fondation de la Cour permanente d’arbitrage (CPA)...........................394 James D. Thwaites L’« autre économie » : la définition et l’effet d’une réalité économique..............................432 James D. Thwaites La « clause sociale » : protection de droits humains ou protectionnisme économique ?.....454 James D. Thwaites Normes internationales du travail et droits de l’homme : Où en est-on à l’approche de l’an 2000 ?..................................................................................................................475 Nicolas Valticos Table des matières IX DEUXIÈME PARTIE RÉGIONS DU MONDE Observations sur l’Amérique du Nord Perspective américaine sur l’ALENA et le mouvement syndical......................................493 Lance Compa L’intégration économique en Amérique du Nord et les relations industrielles : Défis de gestion, de représentation et de régulation........................................................499 Anthony Giles, Dalil Maschino Le libre-échange et le milieu des affaires.........................................................................532 James D. Thwaites Les centrales syndicales canadiennes et les accords de libre-échange Canada, États-Unis, Mexique.......................................................................................................548 James D. Thwaites Le mécanisme de règlement des différends prévu par l’Accord nord-américain de coopération dans le domaine du travail : un outil timide de protection des droits du travail ?......................................................................................................................560 Nadine Thwaites Mexique : régionalisation, ouverture et modifications de la spécialisation industrielle.....604 Stéphanie Treillet Observations sur l’Amérique du Sud et les Antilles Le droit de grève et les services essentiels dans les pays du Mercosur...............................631 Mario E. Ackerman L’évolution sociale et les relations professionnelles en Amérique latine : Bilan et perspectives.......................................................................................................649 Arturo S. Bronstein La mondialisation et la réforme de l’État dans les pays en difficulté : le cas d’Haïti..........674 Louicius Michel, Jude Jean-Gilles et Zhan Su Le Mercosur : histoire et espoirs......................................................................................705 Santiago Perez del Castillo Les défis de la Communauté andine dans le contexte de la globalisation et de l’intégration économique................................................................................................721 Natalia Sandoval Peña X La mondialisation – Origines, développements et effets Observations sur l’Europe Construction européenne et syndicalisme européen : un aperçu de trente-quatre ans d’histoire (1958-1991)...................................................747 Corinne Gobin La dimension conventionnelle de l’Europe sociale sur la base du traité de Maastricht.....778 Gabriel Guéry Succès, faiblesses et perspectives d’avenir du mouvement syndical suédois......................797 Rudolf Meidner Observations sur l’Asie et l’Océanie Standards internationaux et mise en œuvre du droit du travail dans un pays en développement : l’exemple du Cambodge..................................................................819 Marie-Cécile Escande-Varniol Les relations d’emploi et le marché du travail : similarité apparaissant dans six pays asiatiques...................................................................................................838 Anthony M. Gould Organisation du travail et flexibilité interne dans les relations professionnelles au Japon.........................................................................................................................880 Kazutoshi Koshiro Le système productif Japon-Asie : quelle division internationale du travail ?....................906 Claude Pottier L’Inde entre globalisation et tentations identitaires : Économie et humanisme................................................................................................930 Entretien avec Jean-Luc Racine Singapour : de la cité marchande à la cité-État................................................................938 Philippe Régnier Hong Kong : Évolution, conscientisation et innovation dans un contexte de transition ..................................................................................................................951 James Thwaites La grande mutation des relations professionnelles en Chine...........................................991 Ying Zhu Table des matières XI Observations sur l’Afrique Industrialisation des pays africains dans le contexte de la mondialisation : défis stratégiques et organisationnels...............................................................................1007 Alexis Abodohoui et Zhan Su Quatre ans après la dévaluation du franc CFA : intégration et libéralisation économiques à l’ordre du jour........................................................................................1031 Patrick Bollé La marginalisation de l’Afrique.......................................................................................1051 Paul Collier Autour de la mondialisation : éléments d’introduction James D. Thwaites1 UN CONCEPT À FACETTES MULTIPLES C’est Marshall McLuhan qui nous donna le concept du « Global Village ». Ce concept évoque l’image d’un contact immédiat et continu avec le monde entier, de la région la plus proche à celle la plus éloignée. Cela fut rendu possible, dans un premier temps, par diverses phases de découvertes scientifiques dans le domaine de la communication, de la diffusion de la page imprimée à la transmission de signaux, de la voix humaine et enfin de l’image. Aujourd’hui, ce monde rapproché s’aborde sous ses diverses dimensions : culturelle, sociale, économique, politique, etc. Pour décrire ce monde nouveau, en expansion et en interaction, il fallait soit adapter un vocabulaire existant, soit forger un nouveau vocabulaire approprié. Ce dont nous nous servons aujourd’hui est issu de ce double courant de connotation2 et de néologisme. On décèle une certaine continuité entre le « national » et l’« international ». Le terme « mondial » est utilisé tantôt en tant que synonyme d’« international » tantôt comme quelque chose de distinct. Aussi, avec le temps, les termes se transforment. Prenons par exemple la question nationale. Elle occupait le discours de l’humanité pendant une bonne partie des deux derniers siècles et continue à l’occuper. Pendant ce temps, elle évoluait d’une façon substantielle et couvre encore plusieurs réalités de nos jours3. De la même manière, le concept « international » possède sa propre complexité issue de plusieurs décennies d’utilisation. Le concept « mondial » est le plus jeune des trois et il évolue toujours. En effet, l’utilisation du concept soeur, la « mondialisation », se manifeste de plus en plus depuis environ une vingtaine d’années. Notons que le Petit Robert de 1973 traitait « international » et « mondial » comme des synonymes4, tandis que Le Dictionnaire des Mots 1. Professeur titulaire au Département des relations industrielles, Université Laval, Sainte-Foy, Québec, Canada. 2. Pour une discussion sur l’importance de la connotation, voir les études suivantes : Richard Koebner, Empire, Cambridge, Cambridge University Press, 1966 ; Richard Koebner et Helmut Dan Schmidt, Imperialism : the Story and Significance of a Political Word, 1840-1960, Cambridge, Cambridge University Press, 1965. 3. Pour une discussion pertinente de la question nationale, voir à titre d’exemple : Elie Kedourie, Nationalism, New York-Washington, Frederick A. Praeger, 1967. 4. Paul Robert, Le Petit Robert : Dictionnaire alphabétique et analogique de la langue française, Paris, Société du Nouveau Littré, 1973. 2 Autour de la mondialisation : origines, développements et effets contemporains de 1991, du même éditeur, présentait une véritable famille de mots associés au dernier terme : « mondialisation », « mondialiser », « mondialisme », « mondialiste » et « mondialité »5, exemples à l’appui. On nous explique, entre autres, que la « mondialisation » décrit les fluctuations du phénomène appelé le « mondialisme ». Enfin, dans une édition récente encore du Petit Robert, on confirme cette avancée et on va plus loin. On identifie également un anglicisme en utilisation, soit la « globalisation ». Quant au concept clé, la « mondialisation », on la définit de la façon suivante : (…) de mondial. Le fait de devenir mondial, de se répandre dans le monde entier. La mondialisation d’un conflit. (…) Phénomène d’ouverture des économies nationales sur un marché mondial, lié au progrès des communications et des transports, à la libéralisation des échanges, entraînant une interdépendance croissante des pays6. On définit souvent un concept en le comparant à d’autres. Ce fut le cas avec « national » et « international ». En ce moment, on le fait avec « international » et « mondial ». Certains auteurs récents identifient ce premier en fonction de relations bidirectionnelles ou mutuelles entre par exemple deux États, et ce dernier en fonction de relations multidirectionnelles entre plusieurs États, ou encore entre tous les États du monde7. Pourtant dans la pratique actuelle, on continue à parler des ministères aux affaires « internationales », des organisations « internationales », de profils « internationaux » d’études, etc. Enfin les programmes d’études « mondiales » paraissent très rarement dans les listes de cours de nos universités. Ainsi la mondialisation en tant que concept est relativement nouveau. Cependant, derrière ce concept se trouvent des racines très profondes. De nos jours, sans doute à cause des débats entourant les ententes commerciales contemporaines, on y prête souvent une coloration économique et commerciale. En effet, l’idée du commerce entre des nations est très ancienne. On n’a qu’à penser aux histoires séduisantes, qu’on nous racontait dans notre enfance, des navigateurs-marchands grecs ou romains de l’antiquité, ou, plus tard, des voyages de Marco Polo en Orient, de la route de la soie, des caravanes de chameaux traversant les déserts nord-africains avec leur marchandise. Également, nos manuels scolaires nous racontaient divers événements significatifs comme : la « réouverture » de la Méditerranée après l’ère de l’expansion de l’Islam ; la mise sur pied de la Ligue hanséatique dans les ports du nord de l’Europe ; l’élaboration du régime mercantiliste au sein de l’Empire britannique ; ainsi que du projet du libre-échange 5. Pierre Gilbert, Dictionnaire des Mots contemporains, Paris-Montréal, Les Usuels du Robert, 1991. 6. Le Nouveau Petit Robert, Paris, Dictionnaires le Robert, 2002, p. 1660. 7. Cette même nuance se manifeste également entre les concepts « international » et « global » en langue anglaise. Voir, à titre d’exemple : Robert O. Keohane et Joseph S. Nye Jr., « Globalization : What’s New ? What’s Not ? (And So What ?) », Foreign Policy, printemps 2000, p. 104-119. Ces auteurs ajoutent la notion de « interdependence » entre ces deux termes et interprètent la mondialisation comme une extension et une amplification de ce dernier. D’autres études pertinentes de Keohane et Nye, qui œuvrent dans le domaine de la science politique, comprennent : Transnational Relations and World Politics, Cambridge, Harvard University Press, 1972 et Power and Interdependence : World Politics in Transition, Boston, Little, Brown and Company, 1977 (nouvelle édition en préparation : New York, chez Longman) Autour de la mondialisation : éléments d’introduction 3 promu au XIXe siècle par la Grande-Bretagne. Aujourd’hui, dans nos journaux et revues populaires, on discute constamment du libre-échange « mondial » ou « universel », et des regroupements économiques « régionaux8 » comme l’Union européenne, l’Aléna et le Mercosur qui, tout en créant des zones particulières, se déclarent fidèles aux mêmes principes et à la même vision du monde. Souvent, de nos jours, on emprunte le mot anglais « globalization » pour décrire les aspects économiques et financiers de cette sorte de développement. La version française de ce terme, « globalisation », semble faire abstraction du développement social, culturel, etc., ou même se positionner contre l’importance de cette sorte de développement.9 Pour revenir à la « mondialisation », elle n’est pas uniquement économique et financière. En effet, elle constitue un phénomène à facettes multiples : économique, sociale, culturelle, militaire, etc. Les diverses organisations de la famille de l’ONU illustrent abondamment ce point : le FMI et la Banque mondiale (économique), l’UNICEF (social), l’UNESCO (culturel), etc., disposent de mandats, chacune dans son domaine d’expertise, dans le monde entier. Certaines organisations sont plus que bilatérales, sans pour autant être mondiales. En même temps, elles sont à vocations multiples, comme le Commonwealth britannique, l’Organisation internationale de la francophonie, l’Organisation des États américains (OEA) ou l’Union africaine (UA). À titre d’exemple, l’Empire britannique, qui a précédé le Commonwealth, constituait un lieu de concertation politique, économique et sociale qui chevauchait plusieurs continents. Le Commonwealth britannique, quoique à caractère très différent, continue à jouer cette sorte de rôle aujourd’hui. Le Commonwealth trouve un certain parallèle dans l’Organisation internationale de la francophonie. Pour sa part, l’Organisation de l’unité africaine (OUA), malgré ses racines fermement ancrées dans le mouvement de la décolonisation de l’Afrique, reproduisait au niveau d’un continent ce que fait l’ONU au niveau mondial. Au cours des dernières années, cette organisation s’est rebaptisée l’Union africaine (UA). Cette sorte d’organisation englobe plusieurs pays, regroupés en fonction de leurs liens historiques, leurs expériences communes, ou leur proximité géographique. L’Organisation des États américains (OEA), également d’envergure continentale, joue un rôle à la fois similaire et différent aux Amériques à cause des réalités de cette partie du monde. D’autres organisations, à vocation unique, sont plus que bilatérales, sans pouvoir se prétendre mondiales. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), issue de la réflexion autour du Plan Marshall et de la création de l’Organisation européenne de coopération économique (OECE), regroupe maintenant les nations les plus industrialisées du monde pour des fins essentiellement économiques. 8. Voir : Joseph Pestieau, Les citoyens au bazar : mondialisation, nations et minorités, Sainte-Foy, Les Presses de l’Université Laval, 1999. 9. Pour une discussion très pertinente des concepts qui sous-tendent ce terme, consultez : Jacques Delcourt et Philippe de Woot (dir.), Les défis de la Globalisation : Babel ou Pentecôte ? Louvain-la-Neuve, Presses universitaires de Louvain, 2001. 4 Autour de la mondialisation : origines, développements et effets L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) constitue une alliance à caractère militaire, issue de la turbulence qui a suivi la Seconde Guerre mondiale et la création du bloc soviétique. Traditionnellement elle regroupait des nations de l’Amérique du Nord et de l’Europe occidentale, de l’Europe du Sud, ainsi que la Turquie. Actuellement, sans changer de mission, elle entreprend une certaine expansion de par ses nouveaux membres en Europe centrale et de par ses interventions, en ex-Yougoslavie par exemple10. Récemment, l’OTAN s’est manifestée en Afghanistan en collaboration avec l’ONU, très loin de sa zone initiale d’activité. Plusieurs nations ont contribué à créer une organisation semblable au sud-est asiatique et en australasie, l’Organisation du traité de l’Asie du Sud-Est (OTASE), devant l’expansion du communisme dans cette région du monde, mais elle a disparu vers la fin des années 1970. Pour revenir encore à la mondialisation, elle touche de nos jours certains des aspects les plus intimes de notre vie, y compris la langue, la culture et la musique. Dans l’industrie de la publication (livres, revues, journaux), les produits sont couronnés par des prix prestigieux et diffusés dans le monde entier par des réseaux efficaces. Les films et documentaires produits aux États-Unis d’Amérique et en Europe occidentale trouvent partout leur marché. La popularité des chanteurs et des musiciens de l’Occident comme Céline Dion et Brian Adams se répand sur tous les continents par l’intermédiaire de l’industrie du disque, des concerts et de la musique en feuilles. En outre, la position dominante des langues occidentales, et parmi elles surtout la langue anglaise, se manifeste dans le monde des affaires et sur Internet, aussi bien que dans l’édition, le cinéma et la musique11. Une organisation de la famille de l’ONU, l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), oeuvre dans ce domaine et s’attaque aux problèmes associés au respect des droits d’auteur. La question de la santé joue aussi un rôle mondial. Aux pestes historiques, transportées souvent en compagnie de marchandises sur les routes du commerce, paraissent les pestes modernes : la grippe dite « espagnole » après la Première Guerre mondiale, ainsi que le SIDA et l’ÉBOLA au cours des dernières décennies et, plus récemment encore, le SRAS. Ces maladies se répandent, encore plus rapidement aujourd’hui, grâce aux moyens de transport plus rapides et plus directs. Devant ces nouveaux problèmes d’envergure, ainsi que d’anciens qui persistent à faire des ravages comme le paludisme, on favorise la création de remèdes et de vaccins appropriés pour utilisation dans le monde entier. Actuellement, plusieurs pays possèdent des laboratoires spécialisés dans le dépistage et la prévention de maladies contagieuses. Au niveau mondial, l’Organi- 10. Pour un essai de classification de telles organisations, voir : Marie-Claude Smouts, Les organisations internationales, Paris, Armand Colin Éditeur, 1995. 11. Voilà autant de preuves de ce qu’avançait McLuhan à partir des années 1960. Voir à ce sujet : Philip Marchand, Marshall McLuhan : the Medium and the Messenger, New York, Ticknor and Fields, 1989. Autour de la mondialisation : éléments d’introduction 5 sation mondiale de la santé (OMS) joue un rôle de premier plan dans tous les aspects du domaine de la santé12. Parmi les aspects les plus désagréables de la mondialisation se trouvent les guerres « mondiales » du XXe siècle (1914-1918, 1939-1945) qui coûtèrent des millions de vie humaines. Déjà lors des Conférences de la Paix13 à La Haye aux Pays Bas en 1899 et 1907, on discutait, de façon prophétique, du danger qui confrontait l’humanité. À partir du cataclysme de la Première Guerre mondiale, on tenta l’expérience de créer une organisation de concertation à vocation mondiale, la Société des Nations. Après son échec dans la turbulence de la fin de la dépression des années 1930 et la Seconde Guerre mondiale, on érigea l’Organisation des Nations Unies à sa place. Cette organisation fut accompagnée et épaulée par plusieurs institutions spécialisées en matière économique, sociale, médicale, militaire, etc. Ensemble, ces organisations associées à l’ONU visent la coexistence pacifique et le développement, sous toutes ses formes, ainsi que l’empêchement du conflit militaire pour le monde entier. Pour aider à résoudre des conflits entre les nations, sans avoir recours à la guerre, on créa des instances juridiques, initialement la Cour permanente d’Arbitrage après la première Conférence de la Paix, et ensuite la Cour internationale de Justice lors de la formulation du Traité de Versailles, toutes les deux situées à La Haye. Plus tard, devant les atrocités perpétrées en Bosnie-Herzégovine et au Rwanda, on lança de nouvelles initiatives, cette fois-ci en droit pénal international, en poursuivant les auteurs de génocides et de crimes contre l’humanité14. La communauté internationale a donné une forme spécifique à cette dernière initiative par la création de la Cour Pénale internationale également située à La Haye15. À LA RECHERCHE DE SOLUTIONS PERMANENTES Le nationalisme économique, l’agression militaire et la violation des droits humains pendant les années 1930 et la Seconde Guerre mondiale constituent le point de départ des grands débats et des grands plans d’ensemble des années 1940. Ces initiatives – la Charte de l’Atlantique (1941), la Déclaration de Philadelphie (1944), la 12. Pour une bonne discussion de cette sorte de question, voir : Christopher Wills, Yellow Fever, Black Goddess : the Coevolution of People and Plagues, Reading, Mass., Helix Books-Addison-Wesley, 1996. 13. Cette édition comprend un nouvel article sur le premier Congrès de la Paix de 1899 et la fondation de la Cour permanente d’arbitrage qui illustre un des premiers efforts d’établir des institutions mondiales, dans ce cas comme solution de remplacement à la guerre. 14. Pour des renseignements pertinents à ce sujet, consultez : Michel Virally, Le droit international en devenir : essais écrits au fil des ans, Paris, Les Presses universitaires de France, 1990. 15. On trouve ces trois instances juridiques à La Haye, ainsi qu’une quatrième, Eurojust. Ce dernier est l’œuvre de l’Union européenne. Eurojust a comme mission actuelle l’intégration des systèmes nationaux du droit criminel européen et effectue des interventions juridiques auprès des pays membres de l’Union européenne dans certains domaines. 6 Autour de la mondialisation : origines, développements et effets Déclaration universelle des droits de l’homme (1948), et d’autres de même envergure – affecteront l’après-guerre d’une façon décisive. Par la suite, on mit sur pied une panoplie d’institutions à caractère humanitaire et économique, autour d’un pôle central, l’Organisation des Nations Unies (ONU). Jamais de nouveau, voulait-on revivre l’expérience tragique des années 1929-1945. L’aspect économique fut une partie très importante de ce nouveau monde en devenir. Lors du congrès de Bretton Woods, un centre de villégiature situé dans le nord de l’état de New Hampshire aux États-Unis d’Amérique, on mit sur pied le Fonds monétaire international (FMI) ainsi qu’une autre organisation, plus tard appelée la Banque mondiale16. Le troisième pilier qui devait compléter ce triumvirat institutionnel fut l’Organisation internationale du commerce (OIC). Devant l’opposition surtout manifestée par les ÉUA, on opta pour l’adoption d’un accord – le General Agreement on Tariffs and Trade (GATT), connu habituellement sous son titre en langue anglaise. L’Organisation mondiale du commerce (OMC), le successeur du GATT, ne verrait le jour qu’en 1995. Ainsi, ces institutions économiques d’après-guerre, intégrées dans la famille de l’ONU, permettaient à la communauté internationale de s’attaquer d’une façon structurée à divers problèmes, notamment : aux taux d’échanges, au développement et aux échanges commerciaux. La prépondérance des États-Unis d’Amérique se manifestait dès le départ. L’approche prônée par Keynes, d’une monnaie nouvelle et unique, fut écartée. La monnaie des États-Unis jouerait désormais un rôle primordial après la guerre. D’ailleurs, les institutions de Bretton Woods devaient accepter une certaine concurrence en matière de la stabilisation et du relancement de l’Europe occidentale, sous forme du Plan Marshall, conçu et financé principalement par les États-Unis. En définitive, on commença dans une certaine dualité entre cette prépondérance des États-Unis et les institutions de l’ONU. Cependant, dès le début de l’après-guerre, il parut un autre genre de dualité. Un problème de taille se manifesta dans la nonadhésion des pays du bloc sino-soviétique au FMI, à la Banque mondiale et au GATT. D’ailleurs, la Chine ne fut même pas représentée à l’ONU. Associés par les Soviétiques aux orientations de l’« économie de marché », ils remplacèrent les institutions de Bretton Woods par des institutions compatibles avec les zones d’« économie centralement planifiée ». On regroupa cette sorte d’activité, dans le cas soviétique, sous diverses organisations telles que le Conseil d’assistance économique mutuelle (CAEM), la Banque internationale de coopération économique (BICE), et la Banque internationale d’investissement (BII). Cette situation ne changerait pas, en fait, avant le régime Gorbatchev. 16. Initialement appelée la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD). Actuellement, il s’agit d’un ensemble de cinq institutions internationales interreliées. Autour de la mondialisation : éléments d’introduction 7 En outre, derrière cette divergence économique se trouva une réalité bouleversante, une confrontation militaire « est-ouest » en temps de paix qu’on surnomma la « Guerre froide », caractérisée par ses batailles de propagande, ses incidents d’espionnage et le danger constant d’un conflit nucléaire à l’échelle mondiale. Les deux groupes se rangèrent respectivement sous la bannière de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et sous celle du Pacte de Varsovie, l’OTAN regroupant la plupart des pays de l’Amérique du Nord, de l’Europe non communiste ainsi que la Turquie, et le Pacte de Varsovie regroupant l’URSS et ses alliés du Centre et de l’Est de l’Europe. Pour rendre la situation plus complexe encore, le monde de l’après-guerre fut la scène d’un mouvement grandissant de décolonisation à partir de 1947, la date de l’indépendance de l’Inde et du Pakistan. Ce vaste mouvement se déroula sur plusieurs continents en même temps. Il eut lieu surtout entre le milieu des années 1940 et le milieu des années 1960, augmentant considérablement le nombre de pays indépendants et, par conséquent, le nombre de pays représentés au sein de l’ONU et de ses institutions spécialisées. Malheureusement, en cours de route, il y eut des déboires significatifs : la guerre d’Indochine, la guerre d’Algérie et l’affaire de l’OAS en Afrique du nord, la crise congolaise impliquant la Belgique en Afrique centrale, les guerres coloniales opposant le Portugal aux mouvements indépendantistes en Angola et au Mozambique, etc. Autant d’occasions pour retarder le nouvel ordre, pour risquer des ruptures ou pour envenimer la confrontation soviétique-occidentale par « personne interposée17 ». En 1989, après plus d’un demi-siècle de tension constante, deux signaux diamétralement opposés émergèrent du bloc sino-soviétique : le massacre de la place « Tien Anmen » à Beijing pendant l’été et la chute du mur de Berlin pendant l’automne. L’URSS sous Mikhaël Gorbatchev, dans un geste historique, renonça à l’intervention militaire dans les pays du Pacte de Varsovie18, permit la réunification de l’Allemagne et chercha la détente avec l’Ouest tout en redéfinissant l’URSS19. Son successeur, Boris Eltsine, choisit la transformation rapide vers l’économie de marché, mais la route fut semée d’embûches. Pendant ce temps, la Chine choisit la voie de l’étapisme vers l’économie de marché et la réintégration des ses anciens territoires : Hong Kong, Macao et Taïwan. Malgré ces avancées, souvent difficiles, un autre défi majeur se présente dans chacun de ces pays : l’expansion de la criminalité et de la corruption. Histoire à suivre... À cause de cette nouvelle conjoncture, croyait-on, le visage de l’ONU changerait et les institutions de Bretton Woods pourraient enfin devenir vraiment mondiales. Curieusement, pendant cette période de consensus sur l’économie de marché qui débute 17. Pour d’autres renseignements sur ce sujet, voir les études classiques : Henri Grimal, La décolonisation : 1919-1963, Paris, Librairie Armand Colin, 1965 et John Plamenatz, On Alien Rule and Self Government, London, Longmans, 1960. 18. Évitant ainsi d’autres crises comme celles de la Hongrie, la Tchéchoslovaquie et la Pologne au cours des années 1950, 1960 et 1980, respectivement. 19. Voir à ce sujet le film/documentaire : Jérôme Bellay (production), Jean-François Delassus (directeur), Les dernières heures du mur, France, Maximal Productions / FR-2, 2009, 90 minutes. 8 Autour de la mondialisation : origines, développements et effets avec les années 1990, on commençait à se poser de plus en plus de questions au sujet du FMI, de la Banque mondiale et de l’OMC. Sont-ils toujours fidèles à leurs objectifs du début ? Sont-ils neutres ou porteurs d’une idéologie particulière ? Leurs conseils sont-ils efficaces ? Leurs directives aux pays en développement sont-elles justes ? Et, devant un nouveau venu sur la scène internationale, l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI), que fait-on de la souveraineté nationale ? Par extrapolation, on remet en question de plus en plus le nouvel ordre sous toutes ses formes. Serait-il uniquement axé sur une vision néo-libérale du monde à l’exclusion d’autres visions ? Serait-il lié à l’expansion de la précarité, de la pauvreté et de l’exclusion ? Serait-il à la source d’une nouvelle dualité caractérisée par le déséquilibre de la richesse, des opportunités, des services et des soins ? Renforcerait-il le clivage entre les systèmes officiel et officieux de l’économie ? Finalement serait-il une source de discorde plutôt que d’intégration dans le monde ? Cette sorte d’interrogation nous amène directement à une réflexion sur la nécessité de certains contrôles, apparentés à la réglementation et à la législation nationales touchant la tendance vers le monopole, l’abus de pouvoir et les activités contre l’humanité. En outre, la contestation est descendue dans la rue à Seattle, à Québec, à Gênes, à Toronto et ailleurs mêlant deux tendances qui se sont ajoutées à notre vocabulaire sur la mondialisation : l’« antimondialisme » et l’« altermondialisme ». Le premier terme est associé aux tactiques violentes du Black Bloc et au vandalisme de protestation lors de manifestations, souvent par opposition à la mondialisation économique et financière. La tendance altermondialiste commençait à se structurer grâce aux expériences comme Porto Alegre et Mumbai. Elle visait la proposition, et l’exigence d’adoption, de solutions de rechange humanistes aux politiques économiques et financières actuellement dominantes. Enfin, un autre défi émerge de nos jours, le terrorisme mondial, un phénomène énigmatique et destructeur, lié à divers problèmes complexes impliquant des torts historiques, des crises humanitaires provoquées souvent par la négligence et l’abus, et inspiré du fondamentalisme religieux. En ce début du XXIe siècle, nous nous trouvons dans un tourbillon de changements, évoquant diverses hypothèses et solutions, que les auteurs de cet ouvrage s’appliquent à clarifier et à résoudre dans la mesure du possible. Par leurs origines, leurs spécialisations et leurs expériences diverses, ainsi que par les sujets multiples qu’ils abordent, ces auteurs nous fournissent un remue-méninges d’un niveau tout à fait « mondial ». LE CONTENU ET L’UTILISATION DE L’OUVRAGE Initialement, nous avions conçu cette collection de lectures pour les participants d’un nouveau cours sur la mondialisation offert au Département des relations indus- Autour de la mondialisation : éléments d’introduction 9 trielles de l’Université Laval. À vrai dire, la nature de son contenu la rend accessible et pertinente à un auditoire plus vaste composé de tous ceux et celles qui s’intéressent à ce phénomène qui nous affecte de plus en plus dans divers aspects de nos vies. En effet, de nos jours, connaître la mondialisation est plus qu’un simple intérêt, connaître la mondialisation devient une nécessité. Pour favoriser l’apprentissage de la mondialisation, cette collection contient quarante-cinq articles de grand intérêt. Parus à divers moments pendant les deux dernières décennies, ou encore inédits, l’ensemble de ces articles nous révèlent une vue longitudinale du phénomène de la mondialisation sous divers aspects. Les critères qui ont guidé notre choix se manifestent à deux niveaux. Sur le plan individuel, soulignons la qualité de l’article ainsi que l’importance et l’envergure du sujet. Sur le plan collectif, soulignons la variété et la représentativité des sujets et des régions traités aussi bien que la variété de formation et d’expérience des auteurs. Ce faisant, nous avons mis l’accent sur le social, la politique et l’économique, tout en réservant une place particulière aux relations professionnelles. Les textes sont présentés de façon thématique et géographique. La première partie du volume est composée de quatre grandes sections, à caractère thématique, notamment : (1) l’économie, le commerce et l’entreprise ; (2) les syndicats dans le domaine international ; (3) l’emploi et les relations de travail dans un contexte mondial ; (4) la solidarité sociale et la mondialisation. Dans ces sections, le but poursuivi consiste à fournir une toile de fond contextuelle et conceptuelle au lecteur ainsi qu’une vue d’ensemble de thèmes et de problèmes majeurs associés à la mondialisation. La seconde partie du volume comprend cinq sections composées de vignettes de diverses parties du monde : (5) observations sur l’Amérique du Nord ; (6) observations sur l’Amérique du Sud ; (7) observations sur l’Europe ; (8) observations sur l’Asie et l’Océanie ; (9) observations sur l’Afrique. Dans cette partie l’on veut sensibiliser le lecteur aux questions majeures associées à la mondialisation qui affectent les diverses régions du monde. À l’intérieur de chaque section, les articles paraissent par ordre alphabétique des auteurs. Il est difficile de suggérer une façon précise et uniforme de se servir du contenu du présent ouvrage, ou encore une séquence donnée de lecture, car chacun des articles qui le composent constitue une étude unique en soi. Aussi, il faut noter qu’il n’y a pas 10 Autour de la mondialisation : origines, développements et effets nécessairement d’uniformité ni dans l’approche ni dans les opinions exprimées par ces auteurs. Il est évident que le contenu de chaque section peut se prêter à un exercice particulier, à titre d’exemple dans celle traitant du contexte nord-américain20, mais les multiples liens entre les articles dans les diverses sections de l’ouvrage plaide en faveur d’une certaine expérimentation selon les intérêts du lecteur. Ainsi, l’ordre de la lecture des textes, dans chaque partie et section, variera selon les préoccupations du lecteur. Les textes présentés ici constituent à ce jour la collection la plus considérable diffusée sur ce sujet. Néanmoins, malgré l’envergure de cet ouvrage, il est impossible d’être exhaustif devant un sujet d’une telle ampleur. Il s’agit d’un échantillonnage, quoique bien nanti, qui permettra au lecteur de cerner globalement la mondialisation, de développer et de poursuivre ses intérêts en connaissance de cause. REMERCIEMENTS Évidemment, une collection de cette envergure ne pourrait se réaliser sans collaboration. Par conséquent, nous voulons signaler la contribution des diverses revues, maisons d’édition et organisations ainsi que des auteurs qui y diffusent leurs écrits. En même temps, soulignons l’importance de la contribution des auteurs des articles qui paraissent ici pour la première fois. Ainsi, nous remercions sincèrement : REVUES, MAISONS D’ÉDITION, ORGANISATIONS : La Revue internationale du Travail (OIT) (Genève) ; La Revue de l’IRES (Paris) ; Les Cahiers de droit (Montréal) ; Chronique internationale de l’IRES (Paris) ; Cité Libre (Montréal / Québec) ; Le Département des Relations industrielles, Université Laval (Québec) ; Économie et humanisme (Lyon) ; FOPES (Louvain-la-Neuve) et EVO (Bruxelles) ; Les Presses de l’Université Laval (Québec) ; Les Presses de l’Université du Québec (Québec). L’Organisation de coopération et de développement économique (Paris). AUTEURS Alexis Abodohoui, Mario E. Ackerman, Patrick Bollé, Andreas Breitenfellner, Arturo S. Bronstein, Michel Capron, Paul Collier, Lance Compa, Renée-Claude Drouin, Christian Dufour, Marie-Cécile Escande-Varniol, Travis William Fast, Anthony Giles, Corinne Gobin, 20. Ainsi, on peut commencer par les lectures de James Thwaites dont les sujets se situent surtout au début du processus de l’adoption et l’intégration de l’Alé et de l’Aléna au Canada, suivi de l’article de Lance Compa qui discute de la situation aux États-Unis au départ et par la suite. L’article d’Anthony Giles et de Dalil Maschino ainsi que celui de Stéphanie Treillet présentent une vue d’ensemble des résultats, le premier concernant les trois pays impliqués et le dernier sur le Mexique. Enfin, l’article de Nadine Thwaites fournit une analyse sur une des ententes « parallèles » entre les trois pays, celle touchant le travail c’est-à-dire l’Anact. Un article dans une autre section du livre est également pertinent. Il s’agit de l’étude de James Thwaites au sujet du Sommet des Amériques à Québec sur la ZLÉA et les mouvements d’opposition. Toutefois, cette séquence ne conviendra pas nécessairement à tout lecteur. Autour de la mondialisation : éléments d’introduction 11 Anthony Gould, Gabriel Guéry, Adelheid Hege, Janet Hilowitz, Jude Jean-Gilles, Kazutoshi Koshiro, Michel Louicius, Dalil Maschino, Rudolf Meidner, Daniel Mercure, Santiago Perez del Castillo, Joseph Pestieau, Claude Pottier, Jean-Luc Racine, Philippe Regnier, Natalia Sandoval Peña, Tania Saba, Joseph Stiglitz, Zhan Su, James Thwaites, Nadine Thwaites, Stéphanie Treillet, Nicolas Valticos, Gijsbert Van Liemt, Ying Zhu. Nous avons également bénéficié d’excellents services éditoriaux de l’équipe des Presses de l’Université Laval et de madame Yolande Perron dans la préparation de cet ouvrage. Nous les en remercions sincèrement. UN CHEMINEMENT PERSONNEL L’idée derrière cet ouvrage est d’abord issue d’un amalgame d’expériences personnelles : de formation, d’enseignement, d’intervention et de recherche. Le processus débuta à l’University of Toronto dans un cours avancé sur le Commonwealth britannique sous la direction de A. P. Thornton. Il continua, dans d’autres universités, à Queen’s University sous la direction d’Arthur Keppel-Jones et à l’École nationale d’Administration publique sous celle de Louis Sabourin, où ces chercheurs nous initièrent respectivement à l’évolution et à la transformation du Commonwealth britannique, à la fascinante réalité de l’Asie du Sud et à celle de l’Afrique ainsi qu’aux espoirs et complexités des nombreuses organisations internationales. Elle fut initialement mise en pratique à l’Université du Québec dans le cadre d’un cours sur la décolonisation, et surtout à l’Université Laval dans un cours sur la mondialisation. La préoccupation grandissante pour le développement d’un profil international chez nos étudiants nous a servi de motivation additionnelle et a mené en parallèle à la conclusion d’ententes d’échanges avec des universités en Belgique, en France, au Mexique et des centres de recherche à l’étranger ainsi que l’amorce d’autres projets de cette sorte, par exemple en Australie et à Hong Kong. D’autres influences diverses contribuèrent à ce projet. Parmi elles figurent des interventions diverses en Union européenne, en Amérique du Nord, en Amérique latine, aux Antilles, en Afrique et en Asie, ainsi que des recherches effectuées avec la collaboration des organismes suivants : l’Université Laval (Québec), l’Organisation internationale du Travail (Genève), le Palais de la Paix (La Haye) et la Confédération syndicale internationale (Bruxelles et Hong Kong). James Thwaites Cap-Rouge, Qc, Canada Automne-hiver 2013-2014 PREMIÈRE PARTIE GRANDS THÈMES D’ENSEMBLE L’économie, le commerce et l’entreprise Les mutations des stratégies d’entreprise1 Michel Capron2 Depuis la crise pétrolière de 1973, le monde du travail a connu un ensemble de mutations qui y ont opéré des changements en profondeur. Je voudrais mettre en évidence des tendances lourdes qui ont émergé progressivement et contribué à remodeler sa physionomie. C’est pourquoi je distinguerai d’une part, la mondialisation de l’économie et ses incidences sur la configuration et les stratégies des grandes entreprises et, d’autre part, les modifications qui ont affecté l’organisation du travail proprement dite et exercé une influence sur le profil des emplois dans l’industrie et les services. Le cumul de ces différentes mutations fait que le travail en usine ou dans les entreprises de services n’a plus grand-chose en commun avec ce qu’il était à la fin des « Trente Glorieuses ». Il en découle que, comme on le verra par ailleurs, la nature des problèmes auxquels sont confrontées les organisations syndicales3 a également changé et que, face à des situations nouvelles, il leur faut créer des réponses adaptées, dans un cadre économique et socio-politique fondamentalement modifié. C’est en premier lieu ce cadre qu’il s’agit d’appréhender correctement pour mieux baliser les nouveaux terrains de l’action syndicale. LA MONDIALISATION ET LES STRATÉGIES DES ENTREPRISES Si la mondialisation n’est qu’un des aspects du nouveau régime de croissance caractérisé comme « patrimonial », son importance croissante et son impact sur les stratégies des entreprises obligent à la prendre en considération. En soi, ce phénomène n’est pas nouveau : le commerce international, l’essor mondial de l’industrie et les firmes multinationales ne datent pas d’hier 4. Ce qui est nouveau, depuis la fin des années 80, 1. Texte tiré du livre : Michel Capron et Georges Liénard (dir.), Face à la mondialisation : justice sociale, développement économique et contre-pouvoirs, Louvain-la-Neuve-Bruxelles, FOPES-EVO, 2000, p. 61-78, et reproduit ici avec permission. 2. Économiste, Responsable du Centre de documentation de la Faculté ouverte de politique économique et sociale (FOPES) de l’Université catholique de Louvain. 3. Voir, dans l’ouvrage par Michel Capron et Georges Liénard (dir.), Face à la mondialisation : justice sociale, développement économique et cotre-pouvoirs, Louvain-la-Neuve-Bruxelles, FOPES-EVO, 2000, l’article de M. MOLITOR et P. REMAN, « Syndicalisme belge entre citoyenneté et modernité ». 4. Voir DEGAVRE, F., 1998, p. 2-18. 18 Partie 1 : Grands thèmes – L’économie, le commerce et l’entreprise c’est le rythme de mise en place et de diffusion de la mondialisation et la manière inégale dont elle s’opère. UN SYSTÈME DE PRODUCTION MONDIALISÉ Dans le domaine de la production de biens et services, on peut relever plusieurs caractéristiques propres à l’émergence d’un marché et d’un système de production mondialisés. On observe notamment une tendance accrue à la concentration et à la centralisation du capital. Elle implique une prédominance des flux d’investissements directs à l’étranger (IDE) dans les pays de la Triade USA-Union E uropéenne-Japon, soit la concentration de capitaux de nationalités différentes pour constituer des systèmes d’oligopoles au niveau mondial. Le phénomène des fusions et mégafusions nationales et transnationales est significatif à cet égard (voir ci-dessous). La concentration du capital va de pair avec la centralisation du pouvoir de décision : même là où les filiales des groupes sont constituées en « business units », les décisions stratégiques sont l’apanage de la direction de la maison-mère, c’est-à-dire de leurs conseil d’administration et managers dans le cadre de l’émergence du « gouvernement d’entreprise »5. Et ce d’autant plus que les nouvelles technologies de l’information et de la communication facilitent ce contrôle centralisé. L’évolution des stratégies des grands groupes relègue les États nationaux dans le rôle subordonné de promoteurs des activités économiques sur leur territoire, qu’il s’agisse d’infrastructures, de mise à disposition d’une main-d’œuvre hautement qualifiée, de potentiel de recherche et de salaires « compétitifs ». Ce « repositionnement » des États est accru par les politiques nationales et supranationales de privatisation de services de base pour lesquels les États nationaux constituaient des opérateurs importants : services d’utilité publique, transports, communications, banques et assurances, etc. Autre phénomène : la constitution de blocs ou de marchés régionaux à l’échelle mondiale. C’est que le rôle du pouvoir politique et des États nationaux reste néanmoins important et ce pour une double raison. D’une part, les grands groupes, quelque multinationaux qu’ils soient, gardent des liens significatifs avec leur pays d’origine, sa culture, ses traditions de relations sociales, etc. D’autre part, la constitution de blocs économiques régionaux et / ou continentaux est la résultante d’accords interétatiques qui ont structuré ces regroupements autour d’États dominants, qu’il s’agisse des USA pour l’Aléna, des grands pays européens (Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie) 5. Le « gouvernement d’entreprise » consiste à ne plus donner aux dirigeants des firmes qu’un seul et unique but, celui de maximiser le profit et les dividendes. Les actionnaires renforcent leur pouvoir en se donnant les moyens de contrôler étroitement les comptes grâce, en particulier, à la nomination de comités d’audit externes », ALBERT, M., in la Revue d’Economie Financière, 1994, p. 11. Voir, dans cet ouvrage, l’article de R. COBBAUT, « Mondialisation, structuration des sociétés et perspectives pour l’action sociale ». Les mutations des stratégies d’entreprise 19 pour l’Union Européenne ou du Japon dans le Sud-Est asiatique, regroupements par rapport auxquels s’accroît la dépendance des pays du Sud. On note par ailleurs l’apparition d’évolutions significatives dans l’organisation du travail, telles que le rôle de l’informatique, de la robotique et de la p roductique dans les processus de production, le recours massif aux nouvelles technologies de la communication, la délocalisation d’activités productives et le développement de la soustraitance dans le cadre d’entreprises-réseaux. Ces différents phénomènes ne sont pas sans exercer une influence déterminante au niveau de la gestion des « ressources humaines » : je reviendrai plus en détail sur les différents aspects de cette problématique dans la deuxième partie. Enfin, la financiarisation de l’économie exerce une influence croissante, via l’emprise des marchés financiers internationaux dont les agissements spéculatifs sont à l’origine d’une forte accumulation de capital-argent et d’une instabilité récurrente. Cette sphère financière comprend l’ensemble des actifs financiers (devises, obligations d’État, actions des entreprises, produits dérivés) et est le champ d’affrontement de stratégies d’acteurs privés – investisseurs institutionnels, fonds de pensions ou fonds d’investissement collectifs (Sicav – Sociétés d’investissement à capital variable). Ces acteurs gèrent d’énormes stocks d’actifs dans le seul objectif d’accroître leur portefeuille par la valorisation de ces actifs à court terme. La majeure partie de ces stocks d’actifs est composée d’actions détenues dans le capital de grands groupes d’entreprises. Ce type d’acteurs constitue donc, dans bien des cas, un actionnariat majoritaire ou de référence pour qui compte essentiellement la rentabilité maximale à court terme – c’està-dire la croissance de la valeur de l’action en Bourse6 – des entreprises contrôlées : telle est la contrainte imposée à leurs managers et le cadre dans lequel ceux-ci doivent insérer leurs décisions stratégiques. Cette contrainte de rentabilité m aximale fait également sentir ses effets au niveau des conditions de travail, du statut, des salaires et de l’emploi des travailleurs de ces groupes multinationaux. Or, si l’on considère, par exemple, les fonds de pension américains, on constate que, si les organisations syndicales ont le pouvoir d’intervenir au niveau des prestations à fournir à leurs affiliés par ces fonds de pension, la gestion de ceux-ci – qui est aux mains des employeurs et des institutions financières – est censée s’effectuer dans l’intérêt des bénéficiaires (affiliés actifs ou retraités). Or cet intérêt se limite aux seules performances financières des fonds, dont la fonction consiste dès lors à rentabiliser leurs placements compte tenu d’un degré acceptable de risque. Et même dans le cas « ... où ils ont un pouvoir considérable sur la gestion de ces fonds, les syndicats tendent de plus en plus à les placer suivant la même logique »7 que les gestionnaires financiers. Paradoxe éminent que de voir les conditions 6. Dans ce cadre, la norme d’appréciation de l’entreprise aux yeux des opérateurs financiers, c’est la valeur qu’elle crée pour l’actionnaire, générée par la productivité de son capital, et non plus la valeur fondamentale de l’entreprise liée à son résultat net, reflet de la productivité du travail. Or cette valeur pour l’actionnaire est sujette à une grande volatilité sur les marchés boursiers. 7. ROBERTS, L., 1999, p. 17. 20 Partie 1 : Grands thèmes – L’économie, le commerce et l’entreprise de travail et d’emploi de milliers de travailleurs déterminées, au moins indirectement, par des fonds alimentés par les cotisations de milliers d’autres travailleurs ... C’est dans ce contexte de mondialisation que prend tout son sens l’explosion du phénomène de fusions auquel on assiste à l’heure actuelle. LA COURSE AU GIGANTISME : FUSIONS ET MÉGAFUSIONS L’ampleur du phénomène Durant l’année 1999, on a assisté, au sein de la Triade, à une véritable explosion du phénomène des concentrations d’entreprises et / ou de groupes d’entreprises8. Cette concentration s’est effectuée essentiellement sous forme de fusions-absorptions ou de fusions à parité et a touché un grand nombre de secteurs économiques. Les techniques les plus communément utilisées sont l’OPA9, l’OPE10 ou un dosage des deux11. Par ailleurs, la stratégie des alliances entre groupes pour la réalisation de synergies ou la mise en commun de certaines de leurs activités, reste d’actualité12. Ce qui est nouveau, c’est à la fois le montant des sommes engagées dans les transactions et la largeur du spectre des secteurs concernés. Les principaux secteurs actuellement touchés par ces opérations de fusion sont le secteur bancaire, les médias et les télécoms, en liaison avec des sociétés gérant l’Internet, le secteur pharmaceutique et, dans une moindre mesure l’énergie et les services aux collectivités (les « utilities »), où le phénomène est appelé à se développer, vu notamment les perspectives ouvertes par la libéralisation du secteur au sein de l’Union Européenne. Dans le secteur bancaire, la majorité des opérations s’est effectuée jusqu’à présent au niveau national, notamment en Italie, aux Pays-Bas, en France, en Belgique, en 8. Ce phénomène n’est pas nouveau, mais il connaît depuis 1996 une nette recrudescence. Pour se limiter aux pays de la Communauté européenne, le nombre de fusions et acquisitions impliquant une entreprise communautaire est passé de 6.327 en 1996 à quelque 7.600 en 1998 et connaîtra une nouvelle croissance en 1999. Voir Économie Européenne, 1999. 9. Offre Publique d’Achat ou d’Acquisition : une société s’engage à racheter contre numéraire, pendant une période déterminée, la totalité ou la majorité des actions d’une société-cible, généralement en offrant un prix par action supérieur au cours en Bourse, de manière à attirer les actionnaires. La transaction est, dans ce cas, purement monétaire. 10. Offre Publique d’Échange ; une société propose d’échanger, pendant une période déterminée, la totalité ou la majorité des actions de la société-cible contre ses propres actions selon un taux fixé en fonction de la valorisation boursière des deux sociétés. L’offre est en général libellée de manière à offrir une plus-value aux actionnaires de la société-cible. La transaction porte sur des titres et non sur des montants monétaires. 11. Il s’agit d’une OPA / OPE : en plus de l’échange de titres à un taux attractif pour les a ctionnaires de la société-cible, il leur est proposé une soulte par action, en numéraire. Remarquons qu’OPA et OPE peuvent être amicales ou hostiles, selon qu’elles s’effectuent avec l’accord ou malgré le refus des dirigeants de la société-cible. 12. Un exemple récent est fourni par la mise en commun des actifs de la CLT-UFA (contrôlée à parité par Bertelsmann et GBL) et de Pearson TV en une structure unique nouvelle (appelée provisoirement « Audiofina ») en vue de constituer le premier groupe audiovisuel européen. Les mutations des stratégies d’entreprise 21 Espagne, en Allemagne, au Japon et aux USA, en liaison avec un double phénomène : d’une part, dans un certain nombre de pays, la p rivatisation des établissements publics et la libéralisation du secteur – sans compter les possibilités offertes par Internet – et, d’autre part, l’apparition de la bancassurance, à savoir l’adjonction des divers services d’assurance aux activités proprement financières, afin d’offrir aux clients des possibilités intégrées de services bancaires, de crédits et de produits d’assurance. La conjonction de ces deux phénomènes a induit, au sein de l’Union Européenne13, au Japon14 et aux USA15 une multitude d’opérations de concentration nationales constituant une étape préliminaire à des opérations de fusion au plan transnational. En Belgique16, des exemples récents concernent les regroupements s uivants Axa Banque, issue de la fusion entre Anhyp et Ippa, sous la houlette de l’assureur français Axa ; le groupe de bancassurance KBC, résultat de la fusion entre Kredietbank, Banque Cera et les Assurances du Boerenbond (ABB) ; la création de la Fortis Banque regroupant, en Belgique, la Générale de Banque et la CGER et, aux Pays-Bas la Generale Bank, VSB et MeesPierson ; le groupe ABC (Artesia Banking Corporation), qui regroupe les banques Bacob et Paribas (Belgique et Pays-Bas) et les Assurances Populaires. Au niveau des télécoms et des médias, l’accélération des mouvements de f usion est encore plus nette. En effet, en l’espace de quelques mois, ces secteurs ont été le théâtre de plusieurs fusions et mégafusions. Aux USA, en septembre 1999, Viacom lance une OPE sur CBS à concurrence de BEF 1.361 milliards, Bell-Atlantic annonce un projet de fusion avec GTE et Motorola lance une OPE sur General Instruments. En octobre apparaît une première mégafusion : MCI WorIdCom lance une OPE sur Sprint pour un montant équivalant à quelque BEF 5.018 milliards. En décembre, le consortium formé par KPN (Pays-Bas, pour 77,5 %) et BeIlSouth (USA, pour 22,5 %) lance une OPA sur E-Plus, troisième opérateur allemand. Au Japon, trois opérateurs de télécoms fusionnent pour contrer le numéro un, NIT. Autre projet de mégafusion : l’OPE hostile de Vodafone AirTouch (Grande-Bretagne) sur Mannesmann (Allemagne)17 à hauteur 13. Limitons-nous à deux cas qui ont agité le monde bancaire. En France, à l’issue d’un conflit de quelque six mois, la BNP a réussi son OPE sur Paribas, mais a échoué à mettre la main sur sa cible première, la Société Générale. En Grande-Bretagne, la Bank of Scotland et la Royal Bank of Scotland se disputent, via des OPA hostiles, le contrôle de la troisième banque du pays, la NatWest (National Westminster Bank). À la mi-février 2000, la Royal Bank l’emporte pour un montant de BEF 1.422 milliards et, du même coup, la Bank of Scotland devient une proie toute désignée pour la nouvelle entité fusionnée : la spirale des fusions est enclenchée. 14. Au Japon, le premier groupe bancaire, Mizuho Financial Group, résulte de la récente fusion entre l’Industrial Bank of Japan, la Dai-Ichi Kangyo Bank et la Fuji Bank et dispose de BEF 2.349 milliards de fonds propres. 15. Aux USA, la nouvelle loi bancaire de novembre 1999 abolit les cloisons entre banques, maisons de titres et compagnies d’assurance, préludant ainsi à de futures concentrations au sein du monde financier. 16. LEBEGGE, C., 1999. 17. Simultanément, Mannesmann a réussi son OPE sur Orange (Grande-Bretagne) à hauteur de BEF 1.270 milliards. Début février 2000, Mannesmann cède devant l’OPE de Vodafone, ouvrant la porte à des fusions à venir, vu que l’Union Européenne ne peut accepter la restriction de concurrence résultant du contrôle de Vodafone sur Orange, pour le rachat de laquelle les paris sont ouverts.