La vulnérabilité de la personne cérébro-lésée, aspect

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La vulnérabilité de la personne cérébro-lésée, aspect
Trévise (Italie) - EBIS - Journée d’étude du 25 novembre 2011 - « La vulnérabilité de la personne cérébro-lésée : de la bienveillance à la
maltraitance. Aspects médicaux, légaux, psychologiques, éthiques »
Maître Laurence Azoux Bacrie - Docteur en Bioéthique et en Biologie - Avocate à la Cour - Médiatrice (F)
La vulnérabilité de la personne cérébro-lésée, aspect bioéthique,juridique
dans le droit international des droits de l’Homme.
Laurence AZOUX BACRIE [1]
Introduction : « La vulnérabilité est sans doute le propre de l’homme, elle
apparaît en effet comme l’essence même de sa vie »[2].
Vulnérabilité et maltraitance sont souvent imbriqués dans le cadre de la
discrimination.
1.
La question posée nécessite une approche sociétale, et internationale.
Si la maltraitance des personnes handicapées vulnérables a longtemps été un
phénomène sous-estimé, voir un tabou, la vulnérabilité de la personne cérébrolésée dont l’aspect est souvent invisible, constitue un phénomène méconnu.
Les personnes handicapées par leur dépendance, leur fragilité, peuvent être
victimes de maltraitance dont les auteurs se trouvent souvent dans leur
entourage proche.
Les actes de maltraitance revêtent différentes formes :
·
maltraitance passive : non respect de la dignité, langage
dévalorisant, abus d’autorité.
·
maltraitance active :violences intentionnelles , non prise en
compte de la douleur, violation des droits .
La plupart du temps ces faits sournois sont ignorés car les victimes
handicapées n’osent pas se plaindre , il s’agit de leur consacrer du temps
par le biais de la médiation.
2° La reconnaissance d’un nouvel outil, la comédiation juriste, médecin.
Aujourd’hui, le besoin de médiation et de solidarité s’est accru du fait des
nouveaux enjeux médicaux, la légitime montée en force des droits des patients
rendent nécessaire la solidarité dans le domaine médical. L’humain est fragile
et sa vulnérabilité oblige que chaque geste donné permette à cet autre,de se
sentir grandi en humanité
Après avoir définit la vulnérabilité et précisé ses aspects juridiques nous
verrons leur mise en œuvre en France et en droit international.
I Les grands principes qui régissent la protection des personnes vulnérables
et cérébro-lésée victimes de discrimination :
La bioéthique s’appuie sur des principes intangibles [3]
·
Respect de la dignité de la personne humaine,
·
Respect de son autonomie, de son indépendance.
·
Respect de son inviolabilité, respect mutuel, ne pas nuire
·
Principe de bienfaisance, non malfaisance
·
La bioéthique s’appuie sur des valeurs de justice,
d’égalité et
d’équité
1
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maltraitance. Aspects médicaux, légaux, psychologiques, éthiques »
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1° Aspect éthique et juridique, des principes de bienfaisance et de nonmalfaisance [4] dans l’acte médical sont au cœur des dilemmes éthiques :
·
Le bien du patient a été de tout temps le principe directeur
de l'action médicale et de la relation médecin-patient (cf. le Serment
d'Hippocrate):
Sauver la vie, surmonter le handicap, rééduquer,conseiller le patient sur sa
santé, ménager son confort, écouter, être présent.
·
L’action médicale au bénéfice du patient est inévitablement liée à des
risques, d'où le principe de non- maléficience souvent évoqué par la maxime
primum non nocere (tout d'abord, ne pas nuire).
·
Ces deux principes sont donc le plus souvent à considérer ensemble ,ils
sont associés à l'acte médical.
On interprète de nombreux dilemmes éthiques comme résultant d'un conflit entre
les principes de bienfaisance et d'autonomie.
·
Le « bien du patient » dans une situation concrète donnée.
(exemple: faut-il parler avec franchise de son diagnostic à un patient
dépressif atteint d'un traumatisme de la personne cérébro- lésée ?Le faire,
c'est respecter son autonomie, mais la vérité fera peut-être mal, tout au
moins sur le moment: quel est alors l'enjeu éthique à privilégier ?
La bioéthique est en perpétuelle évolution comme
la vulnérabilité
d’ailleurs.
2° Les grands principes concernant la vulnérabilité et la lutte contre les
discriminations.
Le concept de vulnérabilité apparaît dans le Rapport Belmont (Etats- Unis
d’Amérique) dès 1978, [5]
La vulnérabilité est à géométrie variable .
On oppose la vulnérabilité universelle à
individuelle
la
vulnérabilité
relative
et
·
la vulnérabilité à une vocation universelle :
Etre de chair et de sang , la condition d’homme le rend éminemment
vulnérable, l’homme n’existerait alors que par la vulnérabilité, « la
possibilité d’une blessure qui ne prévoit aucune parade ».
Cette vulnérabilité universelle construit notre identité et lui appartient
fatalement..[6]
·
la vulnérabilité à une vocation relative ou la
vulnérabilité
particulière de quelques uns. La vulnérabilité est stigmatisée par
la
souffrance, la peur et la douleur, l’épreuve du désarroi.
3° La protection du malade par le droit[7] - le droit à l’égalité et
principe cardinal du consentement
le
·
La protection du malade par le droit est perçue comme
l’obligation du médecin d’obtenir un consentement « libre et éclairé. » sans
pression d’aucune sorte, après avoir fourni une information loyale, complète
et dosée au malade ou à son représentant. Etendre l’application du
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consentement aux personnes cérébro-lésée, renvoie au droit à l’égalité des
personnes.
·
Fondé sur les principes de la liberté individuelle et de la
dignité de l’être humain, le traitement médical doit être dispensé dans
l’intérêt du malade. [8]
II La mise en œuvre de ces principes dans le cadre légal :
A En France, la loi 2005-102 du II février 2005 pour l’égalité des droits et
des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées .
Cette loi a pris effet au Ier janvier 2006, et ses dispositions relatives aux
principes de non discrimination et obligations qui en sont issues incluent la
mise en place d’aménagement raisonnables en matière d’emploi , d’accès à la
cité et aux biens et services ainsi que de l’intégration des enfants
handicapés .
Cette mise en place est à destination, tant des services publics que des
prestataires et employeurs privés . La médiation constitue le moyen
d’appliquer la loi sur l’égalité des droits et des chances des personnes
handicapées .
1° La reconnaissance d’un nouvel outil, la comédiation juriste, médecin.
La médiation est un mode de construction et de gestion du conflit par
l’entremise d’un tiers qualifié et indépendant accepté par les parties . En
cas de discrimination, si le demandeur prend l’attache de la HALDE devenue le
défenseur des droits , le médiateur devra être accepté par l’institution. Le
défenseur des droits est prévu par la loi du 29 mars 20II.[9] Toute personne
s’estimant victime d’une discrimination directe ou indirecte, prohibée par la
loi ou un engagement international , que l’auteur présumé de cette
discrimination soit une personne privée ou publique peut saisir par courrier
postal 11 rue Saint Georges 750I3 Paris.
Soulignons que la loi du II février 2005 , affirme le droit à la compensation
des conséquences du handicap .
La compensation est un terme qu’il faut entendre en un sens très large.
Elle consiste à répondre aux besoins de la personne en situation de handicap
et de sa famille, qui n’ont pas à supporter les charges occasionnées par cette
situation, et elle vise à assurer l’accès de l’enfant, de l’adolescent ou de
l’adulte handicapé aux institutions ouvertes à l’ensemble de la population et
son maintien dans un cadre ordinaire de scolarité, de travail et de vie.[10]
La médiation présentera la particularité de prendre en compte la souffrance de
la personne morcelée et vulnérable. Le médiateur doit permettre, non seulement
de restructurer l’individu dans son handicap physique ou mental , mais aussi
rétablir la communication défaillante .La finalité est de restaurer l’homme .
2° Restaurer l’homme dans la plénitude de ses droits et assurer ainsi, la
promotion de l’égalité .La mise en application des droits fondamentaux dans
l’espace de médiation est un élément déterminant, le médiateur doit agir
efficacement et avec énergie pour traiter des discriminations.Il devra mettre
en évidence toutes les discriminations directes ou indirectes prohibées par la
loi ou par un engagement international auquel la France est partie prenante,
notamment, celles relatives à l’origine, le sexe , la situation de famille,
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l’apparence physique, l’état de santé,
génétiques …..pour appliquer la loi.
le handicap, les caractéristiques
Le respect de la dignité humaine sous-tend le principe de non discrimination.
Le droit de la discrimination est un droit nouveau.Soulignons que dans le
cadre d’une médiaton, les parties pourront être assistées de leur avocat, de
leur médecin, d’un expert .
Exemple: Afin de clarifier le rôle du défenseur des droits ou du médiateur
conventionnel , nous vous relatons le cas d’une jeune fille de I7 ans atteinte
de l’ataxie de FRIEDREICH et qui souhaitait poursuivre normalement ses études
avec le même potentiel de chances que ses camarades.
Il s’agit d’une maladie neurologique rare, d’origine génétique, évolutive,
incurable actuellement. Elle se manifeste par des troubles progressifs de
l’équilibre et de la coordination des mouvements, des difficultés d’élocution,
une scoliose et des pieds creux, souvent une cardiomyopathie et parfois un
diabète. Les facultés intellectuelles sont intactes. L’évolution est
progressive et variable d’une personne à l’autre.
La prise en charge est pluridisciplinaire : neurologique, cardiologique,
orthopédique, diabétique La jeune fille a une plus grande fatigabilité, un
manque de précision et une lenteur d’exécution dans les mouvements.
Face à ces difficultés, de nombreuses solutions existent et vont permettre aux
enfants de s’intégrer correctement.
Cette jeune fille a besoin pour passer son bac d’une tierce personne.
Elle rencontre toute difficulté pour instaurer un dialogue avec le chef
d’établissement et les enseignants qui ne comprennent pas son handicap. Sa
famille n’a pas plus de succès, ils vont donc contacter le défenseur des
droits ou un médiateur conventionnel .
Le médiateur va donc prendre le contact avec l’enseignant référent qui fait le
lien entre l’établissement scolaire et la maison départementale des personnes
handicapées, mais aussi le rectorat afin de mettre en place en urgence un
aménagement : à savoir la présence auprès de la jeune fille, d’un auxiliaire
de vie scolaire AVS. Il pourra ainsi intervenir pour : la prise de notes et
les travaux pratiques, aider aux changements de salle etc… L’AVS doit
respecter la sphère privée et se tenir à l’écart.
Toutes les décisions doivent être prises en concertation et en accord avec la
jeune fille, en fonction de l’ évolution de son handicap.
Après avoir donné l’exemple de la France évoquons la situation en Europe.
B
Le contenu normatif de l’exigence de non discrimination dans le droit
international appliqué au handicap des personnes cérébro- lésée.
L’interdiction de discrimination dans le droit européen des droits de l’homme
: [11] L’égalité de traitement des personnes ayant un handicap invisible dans
l’emploi et le travail peut être éclairé par la jurisprudence pertinente de la
Cour Européenne des droits de l’Homme.
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Les textes constituant les principaux traités de défense des droits de l’Homme
du Conseil de l’Europe garantissant la protection des droits de l’Homme sont
les suivants :
Il s’agit de la protection contre la discrimination en vertu :
de la Convention européenne des droits de l’homme de I950 et de la charte
sociale européenne de I961 ainsi que de la Charte sociale européenne révisée
de I996, et de la convention de biomédecine du Conseil de l’Europe.
·
Quelle est la méthode utilisée par la CEDH dans l’examen des
différences de traitement qui sont dénoncées comme discriminatoires ?
Le degré de contrôle exercé par la Cour variera en fonction d’une hiérarchie
largement implicite et évolutive .Par exemple les différences de traitement
fondées sur les motifs « non suspects » ceux-ci étant une catégorie résiduaire
qui inclut le handicap doivent avoir une justification objective et
raisonnable , c’est à dire qu’il doit exister un rapport de proportionnalité
entre les moyens utilisés et l’objectif poursuivi.
1° La Convention européenne des droits de l’homme de I950 et son protocole
avril 2005
·
Il faut prendre en compte la valeur ajoutée du Protocole N°
12 à la CEDH, ouvert à la signature en 2000 entré en vigueur en
2005, dans la mesure où cet instrument prévoit une clause générale
d’interdiction de la discrimination pour le Etats parties audit protocole
·
L’article 8 de la CEDH le droit au respect de la vie privée
et familiale
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale , de son
domicile et de sa correspondance …»Il interdit tout examen qui constitue une
ingérence injustifiée dans la vie privée.
La jurisprudence de la CEDH garde cependant une marge d’appréciation, il faut
souligner que l’interprétation des dispositions concerne l’obligation imposée
aux employeurs de prévoir un aménagement effectif afin d’assurer que les
travailleurs atteints d’un handicap puisse être recrutés et maintenus dans
leur fonction à moins que cela n’impose une charge disproportionnée aux
employeurs concernés.[12]
Les exigences de l’article 8 peuvent avoir un rôle décisif à jouer pour
contrer le risque de discrimination pratiquée à l’encontre de travailleurs
handicapés afin de tenir compte des exigences en matière de santé et de
sécurité, créant un obstacle à leur recrutement ou à leur maintien en fonction
, lorsque la crainte est émise que leur activité professionnelle les
exposerait à un risque, ou exposerait à un tel risque leurs collègues ou le
public.
·
Interdiction de la discrimination article 14 combiné avec
l’article 8 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme. La
détermination de l’applicabilité de l’article 14 sur l’exigence de non
discrimination Article 14 «
la jouissance des droits et libertés reconnus
dans la présente convention doit être assurée sans distinction aucune fondée
notamment sur le sexe, la race, la religion, les opinions politiques ou toutes
autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité
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nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation »
combiné à
l’article 8 et l’article 1er du protocole N° 12 additionnel à la convention.
Le handicapé cérébro-lésé peut être source d’une discrimination indirecte
dans la jouissance du droit au respect de la vie privée et familiale
·
(Art. 14 combiné à l’article 8). Pour parvenir à cette
solution protectrice des personnes handicapées, la Cour européenne des droits
de l’homme a développé une argumentation remarquable à plus d’un titre, ne
serait-ce que par les techniques interprétatives mobilisées à cette occasion.
2° La charte sociale Européenne
revisitée en I996
·
L’article 15 de la charte sociale européenne revisitée en
I996
renforce le droit des personnes handicapées à l’indépendance, à
l’intégration sociale et à la participation dans la vie de la communauté et
d’aller au-delà d’une approche centrée sur la réhabilitation et la réinsertion
sociale. Elle permettait la progression du changement de la politique en
matière de handicap qui s’était développée au cours de la dernière décennie.
En conséquence, il considère que l’article 15 de la
CSE révisée renferme une exigence de non-discrimination. Par exemple : Exiger
des systèmes d’enseignements spéciaux ou séparés et garantir un recours
effectif à ceux qui se sont trouvés illégitimement exclus ou mis à l’écart ou
se sont vu autrement refuser une droit effectif à l’éducation.
Il convient de concilier les attentes des patients et les exigences de la
santé et de la sécurité En ce qui concerne les personnes handicapées, le
principe d’égalité de traitement ne fait pas obstacle au droit d’adopter, de
faciliter et d’encourager des mesures appropriées à la protection de la santé
et de la sécurité sur le lieu de travail visant leur insertion dans le monde
du travail.
Il convient d’imposer
des mesures visant à créer la sécurité et des
protections concernant l’aménagement effectif afin d’éviter les obstacles au
recrutement ou au maintien dans leur emploi de travailleurs qui présentent
certains handicaps les exposant, ou exposant d’autres travailleurs ou le grand
public à un risque. [13]
·
Ces questions sont développées en détail dans le rapport
commandité par le réseau des experts sur la discrimination fondée sur un
handicap de la CE pour la commission des Communautés européennes.[14]
Une réglementation adéquate des questionnaires et examens médicaux préalables
à l’embauche a un rôle crucial de façon à éviter les barrières et les
réactions injustifiées de la part des employés.
3° La« Convention pour la protection des Droits de l'Homme et de la dignité de
l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine.
»[15] ou Convention sur les droits de l’Homme et la biomédecine du Conseil de
l’Europe a été signée le 4 avril
1997 à Oviedo et est entrée en vigueur le 1er décembre 1999. La France l’a
signée le 4 avril 1997 et le processus de ratification a été initié cette
année.
Le préambule de la Convention souligne que les Etats membres du Conseil de
l’Europe sont « résolus à prendre, dans le domaine des applications de la
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biologie et de la médecine, les mesures propres à garantir la dignité de
l’être humain et les droits et libertés fondamentaux de la personne ».
Le texte expose ensuite les principes les plus importants en matière de
protection des droits de l’Homme face à la biologie et à la médecine.
L'homme a toujours été la principale préoccupation de ce texte.Humanisme et
humanité sont au cœur de la convention.
Cette convention appuie son phare éclairant sur des valeurs universelles plus
qu'européennes à savoir protéger la dignité humaine et garantir l'intégrité
de la personne humaine.
Elle prévoit un certain nombre de situations concernant les personnes
incapables de consentir à savoir : les mineurs, les majeurs souffrant d’un
handicap mental ou d’une maladie empêchant le consentement ; les personnes
souffrant d’un trouble mental grave et les situations d’urgence.
·
La Convention interdit toute forme de discrimination à
l'encontre d'une personne en raison de son patrimoine génétique et n'autorise
des tests prédictifs de maladies génétiques qu'à des fins médicales.
Les dispositions générales
·
L’objet et la finalité de la Convention est de protéger «
l’être humain dans sa dignité et son identité et garantir à toute personne,
sans discrimination, le respect de son intégrité et de ses autres droits et
libertés fondamentales »
·
Sont ensuite évoqués le principe de la primauté de
l’être humain, il s’agit de l’article sur la primauté de l'être humain Cet
article affirme la primauté de l'être humain sur le seul intérêt de la société
ou de la science. Priorité est donnée au premier qui, en principe, doit
l'emporter sur l'autre lorsqu'ils se trouvent en compétition.
Information et son corollaire le consentement irradient tout le droit de la
bioéthique.
Il convient de citer le principe du consentement qui est au cœur de notre
sujet.
·
Selon l’article 5, « une intervention dans le domaine de la santé ne
peut être effectuée qu’après que la personne concernée y a donné son
consentement libre et éclairé ». Ce texte protège les personnes capables de
consentir ainsi que celle dites incapables, comme les mineurs ou les personnes
ayant des troubles mentaux plus ou moins graves. Il énonce toutefois une
possibilité d’exception en cas d’urgence.
·
Selon l’article 7, Protection des personnes souffrant d'un
trouble mental« La personne qui souffre d'un trouble mental grave ne peut être
soumise, sans son consentement, à une intervention ayant pour objet de traiter
ce trouble que lorsque l'absence d'un tel traitement risque d'être gravement
préjudiciable à sa santé et sous réserve des conditions de protection prévues
par la loi comprenant des procédures de surveillance et de contrôle ainsi que
des voies de recours. »
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4° La Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme
d’octobre 2005 traite de la vulnérabilité, en tant que risque encouru par tout
individu d'être lésé dans son intégrité physique et mentale, est un élément
propre à la condition humaine.
·
La vulnérabilité particulière, envisagée dans l’article
8 de la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l'homme,
signifie qu’il existe des individus et des groupes qui sont spécifiquement
susceptibles à la violation de l'intégrité personnelle ou au manque de respect
de leur autonomie ; ceci par le moyen d’exploitation, d’escroquerie, de
coercition et d’indifférence dans le cadre de l’application et de l'avancement
des connaissances scientifiques, de la pratique médicale et des technologies
qui leur sont associées.
·
Les individus peuvent être particulièrement vulnérables
pour plusieurs raisons : leur âge comme dans le cas des enfants, leur type de
maladie comme dans le cas des maladies rares ou négligées, leur manque d'accès
aux soins de santé dû au système de santé de leur pays, leur propre éducation
ou la formation des médecins et des chercheurs.
L’article 8 : Respect de la vulnérabilité humaine et de l’intégrité
personnelle
«
Dans
l’application
et
l’avancement
des
connaissances
scientifiques, de la pratique médicale et des technologies qui leur sont
associées, la vulnérabilité humaine devrait être prise en compte, les
individus et les groupes particulièrement vulnérables devraient être protégés
et l’intégrité des personnelles des individus concernés devrait être
respectée. »
Cet article exige que nous protégions les individus, les familles et les
groupes vulnérables.Vulnérabilité et intégrité personnelle évoqués à l’article
8 sont liés.
La déclaration enjoint les gouvernements, mais aussi les institutions
publiques et privées et les individus de faire preuve d’une plus grande
vigilance en matière de protection du bien être des êtres humains au regard
des avancées dans le domaine de la médecine, des sciences de la vie et des
technologies.
L’accent est mis sur deux catégories fondamentales auxquelles s’appliquent ces
responsabilités et obligations particulières :
1° Les handicaps particuliers (temporaires ou permanents) maladies et limites
imposées par les étapes de la vie humaine.
2° Les déterminants
sociaux politiques et environnementaux ex les
catastrophes naturelles
Le rôle spécifique de cet article est d’aborder le problème des vulnérabilités
particulières
résultant
d’une
incapacité
personnelle,
de
contraintes
environnementales ou de l’injustice sociale, dans des contextes tels que les
soins de santé, la recherche et les technologies émergentes appliquées aux
sciences biomédicales.
La vulnérabilité peut résulter ou être exacerbée par un manque de moyens ou
une incapacité à se protéger, comme par exemple :
relations d’ordre hiérarchique (par exemple, situations où la sécurité des
conditions de travail n’est pas garantie.
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S’agissant de la vulnérabilité dans le domaine des soins de santé,. La
vulnérabilité du patient peut être encore aggravée par sa maladie : la
douleur, l’inconfort ou le désir d’aller mieux peuvent obscurcir le
raisonnement et le jugement. Ceci est vrai a fortiori pour les patients dont
les capacités physiques ou cognitives sont sérieusement diminuées, à tel point
que leur aptitude à décider par eux-mêmes est limitée voire inexistante. Dans
tous les domaines des soins, le patient est dépendant, à un degré plus ou
moins élevé, des compétences, de l’expertise, du jugement et de la bonne
volonté du professionnel par lequel il est traité.
Individuellement et
Tous ces exemples aident à situer le problème de la vulnérabilité et du
respect deSHS/EST/CIB-17/10/CONF.501/Rev. 2 – page 5 collectivement, les
patients sont ainsi exceptionnellement vulnérables.
L’article 8 attire notre attention sur ce point et enjoint les décideurs à y
apporter des réponses appropriées. Une possibilité serait pour les Etats
d’élaborer une charte des droits du patient contribuant à protéger ceux qui
sont particulièrement vulnérables dans le contexte des soins de santé.
·
Les rapports du comité international de l’UNESCO :
Le respect de la vulnérabilité humaine et de l’intégrité personnelle[16] face
à la discrimination se trouve exposé dans les
rapports du comité international de l’UNESCO
: le Rapport du
Comité International de Bioéthique, il fournit à la fois un compte rendu
théorique sur le principe du respect de l'intégrité personnelle et la
nécessité de protéger ceux qui sont particulièrement vulnérables, ainsi qu'une
série d'exemples pratiques.
Le Comité international de bioéthique de l’UNESCO (CIB) a consacré ses deux
récents Rapports aux principes du consentement (article 6 de la Déclaration)
et de la responsabilité sociale et la santé (article 14). Le rapport sur
l’article 8 de la Déclaration a pour objectif d’examiner l’étendue et le
contenu du principe de respect de la vulnérabilité humaine et de l’intégrité
personnelle.
Il s’agit de son dernier rapport du CIB de l’UNESCO du 22 Juin
2011 sur le principe du au principe de respect de la vulnérabilité humaine et
de l’intégrité personnelle.
Il existe une relation intrinsèque entre d’un côté le respect de l’intégrité
et de la dignité des personnes, et de l’autre la vulnérabilité de celles-ci.
L’article 8 de la Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de
l’homme (2005), renforce cet engagement en le liant au respect de l’intégrité
personnelle et à la nécessité de protéger les individus et les groupes
vulnérables:
Illustrations par un cas
: Les personnes défavorisées dans les pays
développés :
Une femme de 24 ans, sujette aux maux de tête, consulte un médecin pour
obtenir un traitement. Le premier diagnostic met en évidence la nécessité de
conduire des tests de diagnostic approfondi onéreux et non couverts par
l’assurance de la patiente. Dans ces conditions, ces tests ne lui sont pas
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proposés. Quelques mois après, un nouvel examen révèle une tumeur cérébrale à
un stade avancé avec un pronostic pessimiste.
·
Nature de la vulnérabilité : non-accès à des tests de diagnostic ayant
provoqué le retard d’un traitement vital pour la santé de la patiente.
·
Cause ou contexte de la vulnérabilité : des tests de
diagnostic approfondi auraient permis un diagnostic rapide et peut- être un
meilleur pronostic.
Le système de santé n’offre cependant pas l’accès à des tests ou à des
traitements que les patients ne peuvent pas payer, directement ou par le biais
d’une assurance. Les patients ne sont donc pas toujours informés des
possibilités techniques ou des traitements disponibles.
·
Mesures correctives : Ressources adéquates en matière de
santé permettant de répondre aux besoins des patients quelles que soient leurs
capacités financières. Une information complète devrait aussi être offerte aux
patients sur les possibilités alternatives de diagnostic et de traitement.
CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES :
1°Renforcer le débat public au niveau international s’impose pour nous
éclairer :
Pour conclure, il me semble que des initiatives telles que celles qui nous
réunit aujourd’hui et qui permettent de mieux faire connaître la problématique
de la personne cérébro lésée au regard de la législation interne et
internationale sont les bienvenues pour renforcer et permettre un dialogue
entre les médecins , les juristes et les citoyens . Mais comme toujours, le
dialogue implique le débat public.
2° La reconnaissance d’un nouvel outil : la comédiation juriste, médecin.
Elle a pour objectif de mettre en relief les nouveaux enjeux de la fonction de
médiateur dans le dispositif de lutte contre les discriminations, notamment
dans le domaine de l’état de santé et du handicap de la personne cérébro-lésée
.
L’humain est fragile et sa vulnérabilité oblige que chaque geste donné
permette à cet autre de se senti grandi en humanité. Dans le domaine sensible
de la santé et du handicap, la finalité essentielle sera de restaurer la
dignité de la personne vulnérable dans sa globalité.
La médiation dans ce domaine particulièrement sensible doit développer le sens
de l’altérité, de l’acceptation de la différence et faire prévaloir
l’humanisme.
[1] Avocat , docteur en bioéthique , responsable de la commission ouverte
santé de l’Ordre des Avocats Paris , récent ouvrage : la Convention sur les
Droits de l’Homme et la biomédecine. Hector Gros ESPIELL, Jean MICHAUD ,
Gérard TEBOUL ,Coordinatrice éditoriale Laurence AZOUX BACRIE ECONOMICA Nov
2009
[3] Dictionnaire de la laïcité sous la direction de Martine CERF et de Marc
10
Trévise (Italie) - EBIS - Journée d’étude du 25 novembre 2011 - « La vulnérabilité de la personne cérébro-lésée : de la bienveillance à la
maltraitance. Aspects médicaux, légaux, psychologiques, éthiques »
Maître Laurence Azoux Bacrie - Docteur en Bioéthique et en Biologie - Avocate à la Cour - Médiatrice (F)
[5] Dans la convention sur les droits de l’homme et la biomédecine de (1997Il
s’agit de la protection des personnes souffrant d'un trouble mental
·
dans les Lignes directrices internationales d’éthique pour la
recherche biomédicale impliquant des sujets humains du Conseil des
organisations internationales des sciences médicales (CIOMS) 2007
·
dans la dernière version (2008) de la Déclaration
d’Helsinki, qui fait spécifiquement référence à la vulnérabilité dans ses
articles 9 et 17.
·
L’UNESCO
·
(Déclaration universelle sur le génome humain et les droits
de l'homme, 1997).a reconnu l’importance du principe selon lequel les États «
devraient respecter et promouvoir une solidarité active vis-à-vis des
individus, des familles ou des populations particulièrement vulnérables ,
s’agissant des maladies ou handicaps de nature génétique .La vulnérabilité
particulière est envisagée dans l’article 8 de la Déclaration universelle sur
la bioéthique et les droits de l'homme,2005
2 [6] Université de Limoges la notion de vulnérabilité de la personne physique
en droit privée
textes juridiques et legislatifs législatifs.
Réglementation de la création et du fonctionnement des établissements médicosociaux pour enfants et adolescents handicapés Annexes XXIV, décret du 9 mars
1956 Loi n°57-1223 sur le reclassement des travailleurs handicapés 23 novembre
1957 Loi d’orientation n°75-535 en faveur des personnes handicapées 30 juin
1975 Loi n°75-536 relative aux institutions sociales et médico-sociales 30
juin 1975 Loi de décentralisation n°83-1186
1983
Loi n°87-517 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés 10 juillet 1987
Loi n°89-486 d’orientation sur l’éducation 10 juillet 1989 Obligation pour les
établissements médico-sociaux d’actualiser leurs projets en fonction de
l’évolution des besoins sociaux, des pratiques professionnelles et leur propre
fonctionnement Annexes XXIV, décret n°89-789 du 27 octobre 1989 [7] Frédérique
FIECHTER-BOULVARD, La notion de vulnérabilité et sa consécration par le droit,
In : Vulnérabilité et droit, Le développement de la vulnérabilité et ses
enjeux en droit, Colloque sous la direction et la coordination de Frédérique
COHEY-CORDET, Grenoble, Presses Universitaires de Grenoble, 2000, pp. 13-14.
[8] Novembre 2009 « La convention sur les Droits de l’Homme et la biomédecine
Analyses et commentaires » sous la direction de Hector Gros ESPIELL, Jean
Michaud, Gérard TEBOUL Coordinatrice éditoriale Laurence AZOUX BACRIE aux
éditions ECONOMICA page 132 Mme Thomais DOURAKI
[9] Le défenseur des droits succède au Médiateur de la République , au
Défenseur des enfants, à la Haute autorité de lutte contre les discriminations
et pour l’égalité HALDE et à la commission nationale de déontologie de la
sécurité CNDS à compter du Ier mai 20II [10] L’article 1 stipule que la
personne handicapée a droit à la compensation des conséquences de son handicap
11
Trévise (Italie) - EBIS - Journée d’étude du 25 novembre 2011 - « La vulnérabilité de la personne cérébro-lésée : de la bienveillance à la
maltraitance. Aspects médicaux, légaux, psychologiques, éthiques »
Maître Laurence Azoux Bacrie - Docteur en Bioéthique et en Biologie - Avocate à la Cour - Médiatrice (F)
que soient l’origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de
vie. Cette compensation consiste à répondre à ses besoins…….
[11] L’interdiction de discrimination dans le droit européen des droits de
l’homme rapport thématique [12] CEDH
4ème section déc du 9 mars 2004,
wretlund c Suède irrecevabilité de la requête introduite par un responsable du
nettoyage d’une
centrale nucléaire obligé de se soumettre à un test de
consommation de drogues destiné à détecter la présence de cannabis .
[13] DG Emploi et Affaires sociales O. de Schutter, enquêtes et examens
médicaux d’embauche comme obstacle à l’emploi des personnes handicapées,
[15] Novembre 2009 «
La convention sur les Droits de l’Homme et la
biomédecine Analyses et commentaires » sous la direction de Hector Gros
ESPIELL, Jean Michaud, Gérard TEBOUL Coordinatrice éditoriale Laurence AZOUX
BACRIE aux éditions ECONOMICA
[16] Le
dernier rapport du CIB de l’UNESCO du
22 Juin 2011
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