Qu`est-ce qu`un Afrikaner ? Un blanc raciste et

Transcription

Qu`est-ce qu`un Afrikaner ? Un blanc raciste et
Régie du secteur socioculturel
Activité cinéma
Loriol sur Drôme
N° 37 - MARS 2010
Qu’est-ce qu’un Afrikaner ? Un blanc raciste et
rétrograde, un fermier fier de son identité et de son
indépendance ou le simple membre d’une communauté vivant dans une Afrique du Sud arc-en-ciel ?
Tout cela à la fois serait-on tenté de répondre. La
réalité est complexe, elle ne se laisse pas enfermée
dans des clichés.
Un Afrikaner est avant tout un africain blanc,
membre d’une communauté de 3 300 000 individus qui habitent majoritairement dans le sud de
l’Afrique, en Afrique du Sud, en Namibie (ex Sud
Ouest africain) et au Kenya. Il est issu d’une communauté de colons calvinistes non anglophones
arrivés au Cap en 1652 avec la compagnie néerlandaise des Indes orientales. Il peut être d’origine
hollandaise mais aussi française (les Huguenots)
ou allemande. Sa langue, l’afrikaans, issue du
néerlandais, appartient au groupe des langues germaniques.
Cette communauté grâce à son courage et à sa ténacité, malgré l’adversité, a fondé l’Afrique du
Sud moderne et dynamique que nous connaissons.
La naissance d'une nation
Le terme Afrikaner est apparu pour la première
fois au début du XVIII° siècle pour supplanter, au
XX° siècle, celui de Boer (mot signifiant « paysan
» ou « fermier » en afrikaans). Sa première utilisation est attribuée à un certain Hendrik Bibault en
1707. Ce dernier, arrêté pour scandale public, est
condamné au fouet. Il revendique son africanité
en déclarant : « Ek been ein Afrikaaner ! » (« Je
suis un Afrikaner »), refusant ainsi de se soumettre
à l'autorité du bourgmestre de Stellenbosch et donc
aux lois venues d'Europe…
Cette déclaration illustre une première rupture entre colons blancs, entre ceux fraîchement débarqués d’Europe et les autres, citoyens libres, nés en
Afrique et fiers de cette identité. Du reste, ce particularisme va s’affirmer de manière exclusive par
rapport aux autres qu’ils soient noirs ou blancs, de
Film américain – 2009 – 2h12 –
Drame réalisé par Clint Eastwood. Avec Morgan Freeman,
Matt Damon, Scott Eastwood.
En 1994, l'élection de Nelson
Mandela consacre la fin de
l'Apartheid, mais l'Afrique du
Sud reste une nation profondément divisée. Pour unifier le
pays et donner à chaque citoyen un motif de fierté, Mandela mise sur le sport, et fait cause commune avec le capitaine de l’équipe de rugby sud-africaine. Leur pari : gagner la Coupe du Monde 1995...
Séances
Horaires
Mercredi 10 mars
20h30
Vendredi 12 mars
18h00
Samedi 13 mars
19h00
Dimanche 14 mars
16h30
Lundi 15 mars
17h30
Mardi 16 mars
20h30
souche anglaise.
Ce groupe d’abord hétérogène va constituer un
ensemble homogène ou un bloc à travers trois
caractéristiques : son africanité, sa langue et sa
religion réformée qui le désigne comme le peuple
élu.
Deux évènements vont consolider cette identité : le
grand trek et, en 1875, la parution des premiers
journaux en afrikaans puis, en 1877, celle du premier livre d’histoire des Afrikaners, également en
afrikaans, par Stephanus Jacobus Du Toit.
NE PAS JETER SUR LA VOIE PUBLIQUE
Une histoire mouvementée
L’histoire des Afrikaners commence au début du
XVII° siècle avec la fondation du Cap par quatrevingt-dix pionniers et seulement huit femmes. Au
départ, cette ville ne devait être qu’un établissement relai vers la route des Indes. Jan Anthoniszoon van Riebeeck, le chef de ces colons, demande à leurs employeurs de les libérer de leurs obligations pour qu’ils puissent s’installer comme fermier (boers) ou commerçants dans la localité. En
1706, ces paysans néerlandais expriment pour la
Monument retraçant l’histoire des Boers
durant le Grand Trek
première fois leur défiance envers le gouvernement
colonial. A l’image des colons américains écrasés
par la fiscalité et l’administration de la métropole,
ils cherchent à s’en affranchir. Ils dépassent les
frontières de la Compagnie pour s’établir en dehors
de sa juridiction. Ils s’installent dans les grandes
étendues semi-désertiques du Karoo. Ils développent une culture originale fondée sur un égalitarisme total entre pairs, au nom des valeurs chrétiennes,
sûrs d’appartenir à un peuple élu comparable à celui
des Hébreux dans la Bible. Cet égalitarisme s’accompagne d’un sentiment de supériorité par rapport
aux noirs. Cette société paysanne et traditionnelle
est fort éloignée de la philosophie des Lumières qui
rayonne en Europe à la même époque.
L’arrivée des Britanniques et le Grand Trek
En 1806, le pouvoir colonial néerlandais est remplacé par l’Empire britannique qui va s’employer très
rapidement, comme à son habitude, à faire table
rase de l’identité et de la culture locale. Cette campagne de « destruction » commence par l’économie.
Les Anglais donnent d’abord des droits aux indigènes Hottentots et aux métis, souvent salariés des
Boers, pour supprimer ensuite, en 1833, l’esclavage
Jan
van Riebeeck
(1619 – 1677)
a établi pour la
Compagnie
néerlandaise
des
Indes orientales
la première
implantation
européenne en
Afrique du
Sud, près du
Cap.
Bataille de Blood River (gravure du XIXème siècle)
sans justes compensations pour les propriétaires. La seconde attaque a lieu dans le domaine
linguistique. En 1822, les autorités coloniales
retirent au néerlandais son statut de langue
officielle tout en marginalisant l’afrikaans
dans un processus d’anglicisation forcée. Cette politique touche très durement les paysans
du Karoo alors que les bourgeois afrikaners
libéraux des centres urbains restent sensibles
au prestige culturel du conquérant. La révolte
gagne les fermes boers en 1833. Le leader de
ce mouvement, Piet Retief, dénonce les injustices dont son peuple est victime et évoque
une terre promise où les Boers pourront vivre
libres. C’est le début du Grand Trek (1835).
Les populations franchissent le fleuve Orange.
Après de nombreux accrochages très violents
entre paysans et Zoulous au cours desquels
Retief trouve la mort, les Boers l’emportent à
la bataille de Blood River (16 décembre 1838)
malgré la disproportion des forces en présence
(15 000 zoulous contre 500 Boers repliés derrière leurs chariots rangés en cercle). Cette
victoire consacre la foi des Boers en leur destin biblique. C’est aussi l’acte de naissance de
la nation afrikaner. La République boer de Natalia est alors proclamée mais les Britanniques refusent de la reconnaître. Dès 1842, un corps expéditionnaire anglais débarque à Port Natal et
affronte les Boers qui capitulent (1843). Les
Boers reprennent alors leur route vers le nord
pour s’installer sur les plateaux austères du Veld
où ils écrasent les Ndebele et les Sotho. Ils créent
deux républiques indépendantes dont les Anglais
reconnaissent
l’indépendance :
la
Zuidafrikaansche Republiek (Transvaal) en 1852 et
l'Oranje Vrystaat (État libre d'Orange) en 1854.
Cette renaissance par la conquête et le retour à
l’esprit pionnier ne pouvait être complet sans une
réappropriation de sa propre langue et de son
identité. Stephanus Jacobus Du Toit en sera le
symbole en fondant, au Cap, un mouvement de
revendications culturel : "Die Genootskap van
Regte Afrikaners" (l'« Association des vrais Afrikaners ») dont l'objectif est de défendre et d'imposer l'afrikaans au côté de l'anglais comme langue officielle de la colonie. Cette reconquête
commence par l’impression de revues dans cette
langue et la parution, en 1877, d’un livre d’histoire sous le titre Die Geskiedenis van ons Land in
die Taal van ons Volk (L'histoire de notre pays
dans la langue de son peuple), véritable manifeste politique empreint de mysticisme.
A la fin du XIX° siècle le Transvaal entre dans
l’ère industrielle avec la découverte de gisements
aurifères sur son territoire. C’est le début d’une
ruée vers l’or avec son corolaire, l’afflux de milliers d’individus, majoritairement en provenance
de Grande-Bretagne, perçu comme une menace
par les Boers et leur président, Paul Kruger. Le
gouvernement du Transvaal refuse le droit de
vote aux étrangers (uitlanders) et taxe lourdement les industries aurifères. Ce sujet alimente
les tensions entre Boers et Britanniques.
Mais il s’agit moins d’une guerre que d’actions
sporadiques parfois retentissantes comme la
bataille de Majuba Hill (27 février 1881) perdue
par les Britanniques. Ceux-ci comprennent qu’il
n’est pas souhaitable pour l’heure de prolonger
cette guerre. L’enjeu de l'or justifiera l’emploi
d’autres moyens un peu plus tard...
En 1899 éclate la Seconde Guerre des Boers.
Cette guerre s’avère meurtrière. L’armée anglai-
La politique de terre brûlée pratiquée contre les
fermes des Boers par les soldats britanniques
Les guerres anglo-boers
En 1877, la situation économique du Transvaal
est critique. Par ailleurs les armées zoulous en
provenance du Natal sont sur le pied de guerre.
Lord Carnavon, le ministre des colonies britanniques, pense que le moment est venu d’annexer le
Transvaal. C’est chose faite le 12 avril 1877 à
l’issue de discussions avec le gouvernement boer.
Paul Kruger s'y oppose mais la menace zouloue
lui fait préférer le statu quo. Cette menace
concerne également les Britanniques qui vont
mettre un terme à l’indépendance zouloue (juillet
1879). Une fois cette menace écartée, les Boers
passent à l'action le 16 décembre 1880 : ils attaquent la colonne britannique 94th Foot arrivée
pour renforcer Pretoria. Du 22 décembre 1880 au
6 janvier 1881, les garnisons de l'armée britannique de tout le Transvaal se retrouvent assiégées.
Femmes et enfants boers en camp
de concentration (vers 1900)
Entre 28000 et 30000 civils boers périrent dans les
camps de concentration britanniques.
se utilise des méthodes radicales pour annihiler
la résistance des Boers en pratiquant la politique de la terre brulée et en ouvrant, pour la première fois dans l’Histoire, des camps de
concentrations où périssent des milliers de civils : au total, sur 136 000 boers détenus, 28
000 mourront essentiellement des femmes, des
personnes âgées et des enfants ainsi que 15000
noirs et métis… Ce procédé sera imité quelques
années plus tard et sous d’autres cieux par des
régimes tristement célèbres. Ce conflit entretiendra un vif ressentiment antibritannique et
renforcera le républicanisme boer. Un traité de
paix est signé à Pretoria le 31 mai 1902. Les
Paul Kruger, président du Transvaal,
icône boer et internationale de la
résistance à l’impérialisme britannique
Boers perdent leurs républiques et deviennent des
sujets britanniques. Le Royaume-Uni crée un
dominion. La constitution de l'Union de l'Afrique
du Sud du 31 mai 1910 va permettre aux Afrikaners de conquérir le pouvoir politique…
L’identité afrikaner à travers le rugby
Cette volonté des Afrikaners d’affirmer leur propre identité passe également par le sport. Dès les
années 1920, ils vont donner au rugby, sport importé par les Britanniques, une place privilégiée.
A leurs yeux, le rugby fait écho aux fondements
identitaires de leur peuple, au rude mode de vie
des Boers. L’université de Stellenbosch, de langue afrikaans, illustre la stratégie des élites afrikaners : elle devient une référence. Mieux encore
les membres du Broederbond (organisation secrète d’entraide dédiée à la promotion des intérêts de
la communauté Afrikaner) vont diriger la South
African Rugby Board (fédération sud-africaine de
rugby). Entre 1960 et 1972, sur un total de 58
rencontres, les 52 titulaires du capitanat springboks sont des Afrikaners. Plus que tout autre
sport, le rugby a été le miroir d’une société sudafricaine dominée par les blancs notamment par
les Afrikaners. Le rugby a même fini par devenir
un symbole sportif constitutif de leur identité
presque au même titre que la langue ou la religion. L’embargo sportif décrété en 1984 à l’encontre de l’Afrique du Sud est levé en 1992 suite
à l’abolition de l’Apartheid. En 1995, lors de la
coupe du monde de rugby, la victoire finale des
Springboks est marquée par le geste symbolique
de Nelson Mandela qui revêt le maillot du capitaine afrikaner François Pienaar. Une page est
tournée.
Synthèse réalisée par François DEYDIER
Libraire à Montélimar
Le prochain journal du cinéma sera consacré
au réalisateur américain Martin Scorsese.
Tarif plein : 7 euros - Tarif réduit : 6 euros
Films « jeune public » : 5 euros - Abonnement de 10
places : 55 euros - Abonnement de 5 places : 30 euros
Nous acceptons les chèques vacances, les chèques cinéma, les ciné chèques, les chèques sport culture Drôme
(TOP DEP’ART) et la Carte M’ra !
Le Springbok ( gazelle d’Afrique méridionale) a été adopté sur le maillot de la
sélection sud africaine lors de la tournée en Grande Bretagne de 1906-1907.
Programme disponible sur camerapress, allocine.fr
& loriol.com
Info. / horaires : 08 92 68 07 46 (0,34 € / mn)