1791 le roi s`enfuit

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1791 le roi s`enfuit
1791
LE ROI S'ENFUIT
Finalité du plan de fuite : Passé la frontière, il serait possible d'obtenir le
soutien de troupes étrangères. Loin de la capitale, le roi trouverait un soutien
populaire massif et pourrait alors négocier les termes de la Constitution et
mettre fin à la Révolution.
Le point le plus périlleux de l'entreprise fut sans nul doute la sortie du
palais des Tuileries et de la capitale. Le plan exigeait que les troupes
autrichiennes massées à la frontière soient en assez grand nombre pour servir
de soutien à tous les gens bien intentionnés.
Bouillé et Fersen – le compagnon suédois de la reine – avaient imploré la
famille royale de voyager séparément dans des véhicules légers et discrets afin
de gagner au plus vite la frontière. Mais le roi et la reine refusèrent de voyager
séparément – cette obstination sera leur perte
La berline, qui se devait discrète, avait été commandée par la baronne de
Korff. Spécialement conçue pour la mission, elle demanda 3 mois pour être
construite. Elle était dotée de grandes roues et de suspensions à ressorts
exceptionnellement grandes.1
Pour sortir du palais, il fallut prévoir d'emprunter toute une série de
couloirs peu connus et les pièces vides.
Le dauphin de 5 ans, sera habillé avec une petite robe et le roi, d'une
tenue d'agent comptable. La reine avait pris grand soin de faire passer une
garde robe entière, ses diamants et bijoux, un coffre fabriqué pour l'occasion.
Malheureusement, la fabrication de ce coffre éveilla les soupçons de l'une de ses
domestiques, une "patriote". Et enfin, la famille allait prendre la fatale décision
de repousser le départ au lendemain afin de profiter du jour de congé de cette
domestique.
1
L'intérieur était de cuir. Il y avait de nombreux compartiments à bagages, un service à
pique-nique, un casier à bouteilles, un pot de chambre sous une housse de cuir, et un
nécessaire pour les réparations de secours.
Extraits de : Le Grand livre du Mois
Timothy Tackett
1791
LE ROI S'ENFUIT
Pendant ce temps, le général Bouillé ne restait pas inactif; la 1e tâche
avait été de choisir une position fortifiée dans laquelle le roi pourrait se retirer;
le choix se porta finalement sur Montmédy ou plus exactement dans le château
de Thonelle à moins de 3 km de la frontière autrichienne, le monarque serait
protégé par environ 10.000 hommes de troupe.
L'épreuve à laquelle le roi et la reine devaient faire face le jour de la fuite
était claire, mais d'une extrême difficulté ; sortir du palais avec toute leur
famille sans se faire remarquer d'un palais dans lequel allaient et venaient pas
moins de 2.000 personnes.
La tâche était d'autant plus redoutable que des rumeurs de fuite ou
d'enlèvement, circulaient depuis un certain temps à Paris. A la suite de la
dénonciation de la femme de service de la reine, de nouveaux gardes avaient
été postés.
Le 20 juin vers 10 heures et demie, le coup d'envoi de l'évasion fut donné.
Après le dîner, Louis embrassa son jeune frère qui fuyait vers Bruxelles,
puis Marie-Antoinette réveilla les enfants et informa leurs gouvernantes du
départ le soir même. Le dauphin et sa sœur, habillés en fille, sortirent avec
leurs gouvernantes et montèrent dans un cabriolet qui les mena à Claye.
La reine fit sa sortie qui coïncida avec l'heure où de nombreux
domestiques sortaient du palais et passa inaperçu.
Le roi était censé sortir après, mais, à la dernière minute, La Fayette et
Bailly (le maire de Paris) arrivèrent, et Louis fut obligé de s'entretenir avec eux.
Ce n'est finalement que vers 11h30 que le roi rejoignit son fiacre. On dit aussi
que c'est la reine qui sortit la dernière – elle faillit même se trouver nez à nez
avec La Fayette.
Le plan avait déjà prit 2 heures de retard. Les fugitifs arrivèrent à Claye
où ils rejoignirent leurs enfants et les gouvernantes.
Extraits de : Le Grand livre du Mois
Timothy Tackett
1791
LE ROI S'ENFUIT
La grande berline n'était guère discrète avec son châssis jaune et les 3
gardes en livrée de même couleur – proche de la livrée du prince de Condé –
que suivait le cabriolet jaune et qui attirait l'attention des gens sur leur passage.
Le voyage se passa jusqu'alors sans histoire. Comme il faisait de plus en
plus chaud, le roi et la reine baissèrent les stores, enlevèrent leurs
déguisements et regardaient les paysans qui les regardaient à leurs tours.
Les souverains allèrent même jusqu'à descendre de la berline. De fait, le
roi fut bel et bien reconnu.
Arrivés
à
Châlons,
l'équipée
fut
aussi
reconnue,
mais
le
maire,
immédiatement informé ne sut que faire. Avec 2 heures de retard, le roi arriva
en vue du petit relais de poste de Somme-Vesle; mais le détachement de
cavalerie qui devait attendre les voitures, avaient quitté les lieux 1 heure plus
tôt, harcelés par les paysans.
A Varennes, les habitants s'inquiétaient des mouvements de troupes
inexpliqués dans la région au cours de ce mois de juin. L'histoire du coffre-fort
ne trompait guère, et la rumeur courait que la reine faisait passer le "trésor" en
question à son frère, l'empereur d'Autriche, ou que le trésor était la reine ellemême.
Pendant ce temps là, Choiseul attendait non pas en ville, mais en pleine
campagne – Au début de la Révolution, les paysans s'étaient montrés réticents
à payer l’impôt, aussi, lorsque les cavaliers arrivèrent, terrifiants avec leur
casque à plumet, la panique s'empara du village et les gens arrivèrent avec
fourches et faux à la main.
Choiseul était de plus en plus inquiet du retard du roi; finalement, il prit la
résolution de se retirer … à 80 km de là.
Le maître de poste, Jean Baptiste Drouet, entra en scène une fois que les
garçons d'écurie eurent terminé le changement de chevaux. Agé de 28 ans, il
avait servi dans la cavalerie 7 ans avant de revenir dans sa ville natale. Alors,
Extraits de : Le Grand livre du Mois
Timothy Tackett
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LE ROI S'ENFUIT
quand il vit la berline, il fut stupéfait de reconnaître la reine de France, qu'il
avait vue une fois à Versailles; quant au roi, qu'il n'avait jamais vu, il paraissait
ressembler à l'image imprimée sur les billets.
Après avoir vu les voitures s'éloigner, il commença à dire à tout le monde
que le roi venait de passer. Soudain tout le monde comprit: si le roi avait quitté
Paris, c'était pour aller à la frontière, et revenir envahir le pays à la tête d'une
armée étrangère pour mettre un terme à la Révolution.
La fuite du roi devait être stoppée. Drouet, excellent cavalier et son ami
Jean-Guillaume furent désignés par le conseil municipal pour stopper la fuite du
roi.
Les voyageurs arrivèrent à Varennes vers 11 heures. Malgré tous leurs
efforts, ils ne purent trouver l'attelage promis par Bouillé et Choiseul, et durent
s'arrêter devant l'auberge du Bras d'Or.
A 7h30 du matin, les voyageurs furent menés dans les voitures qui
avaient été tournées dans la direction de Paris.
Le général, alerté du désastre, fit remettre en selle les quatre-cent
cavaliers allemands et les dirigea vers Varennes. Mais en approchant du village,
ils rencontrèrent des centaines de paysans et de gardes mobiles; ils furent
forcés de tirer leur sabre et de charger la foule.
Vraisemblablement informé de l'avance qu'avait le roi; ils n'allèrent pas
plus loin.
Extraits de : Le Grand livre du Mois
Timothy Tackett