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LA MONTAGNE MARDI 1ER OCTOBRE 2013
LA ÇÉDILLE
LA CLINIQUE CHANGE DE NOM
ne voit pas
tout rouge
SANTÉ. St-François. Depuis
hier, la polyclinique Saint­
François s’appelle l’hôpital
pr ivé Saint­François. Le
groupe Vitalia souhaitait lui
donner un « nom fort » qui
incarne « davantage ce
qu’elle représente : une
structure hospitalière pluri­
disciplinaire » accueillant
25 000 patients par an. L’éta­
blissement vient aussi
d’achever la rénovation de
son service d’urgences.
Il faut toujours encourager les personnes qui acceptent
de donner leur sang pour sauver la vie des autres.
C’est sans doute ce qu’a pensé l’Amicale des donneurs
de sang bénévoles de la région de Montmarault en
offrant un chèque cinéma aux jeunes nouveaux
donneurs. La Cédille salue ce geste tout en espérant
que les bénéficiaires n’en profiteront pas pour aller
voir un nouvel opus de la saga Twilight. Jusqu’à preuve
du contraire, aucun vampire n’a jamais donné son
sang. Même au cinéma !
Montluçon
11
■ LA PHRASE DU JOUR
‘
J'ai la nostalgie de ma petite
ville de province, même si je dis
qu’elle est moche et qu’elle n’a
pas d’attrait.
Jean-Claude Fournier, écrivain, à propos de Montluçon
Vivre sa ville
L’INVITÉ DE LA RÉDACTION ■ Jean­Claude Fournier publie son premier roman « Le prince des parquets­salons »
« Des ch’tits gars » à l’assaut des filles
Dans son premier roman,
Jean-Claude Fournier
relate les aventures
sentimentales d’une
bande de jeunes écumant
les bals de la région
montluçonnaise. Entre
fiction et réalité.
I
■ SIXTIES EXPRESSION
Le vezon et le via
« Ce sont les deux blues
montluçonnais. Le vezon, c’est le
spleen du bocage, un certain
mal-être existentiel. Le via, c’est
plus un mal-être gastrique »
Gouiller
« J’essaye de passer une rivière
en sautant sur les pierres. Je
glisse et je tombe. Donc, j’ai
gouillé »
Fabrice Redon
ls sont jeunes et ne pensent
qu’aux filles. Ou presque. En
1962, une bande de joyeux
drilles écume les bals de la
région montluçonnaise. C’est la
trame du premier roman de
Jean­Claude Fournier « Le prin­
ce des parquets­salons ».
Rabiller le gamin
« C’est remettre sa tournée »
Le bounhoume
« Le paysan »
Ça me pelle dans le ventre
■ Pourquoi avez-vous écrit un ro-
man qui a pour cadre les bals de
campagne ? Parce que c’est votre
jeunesse ? C’est un peu ça. Les
bals de campagne, c’est ce qui
constituait l’essentiel de la vie
d’un petit montluçonnais à
l’adolescence. A l’époque, il y
avait deux dancings à Montlu­
çon : la Chorale pour le tout­ve­
nant et le Lion d’Or pour les
bourgeois. Comme il n’y avait
pas de salle des fêtes dans les
villages, les jeunes des champs
allaient s’encanailler dans les
bals de campagne sur des struc­
■ BIO EXPRESS
JEAN-CLAUDE FOURNIER
Naissance
En 1942 à Montluçon. Il y passe
son enfance et son adolescence
avant d’être admis à l’école normale d’instituteurs de Moulins,
puis de Clermont-Ferrand.
Professeur
Premier poste dans la montagne
bourbonnaise avant son service
militaire en Allemagne. Il
s’oriente ensuite vers l’enseignement de l’anglais qui le conduire
à Londres, aux États-Unis, en région parisienne, en Algérie et en
Nouvelle-Calédonie.
Roman
Après plusieurs nouvelles, il
vient d’écrire son premier roman.
« C’est avoir très envie de faire
quelque chose »
Ravasser
« C’est traîner dans tous les
coins sans but précis. Aller dans
le garage chercher un objet
sans plan établi »
Sangouiller
ÉCRIVAIN. « Les jeunes gens des champs allaient s’encanailler dans les bals de campagne », relate Jean-Claude
Fournier. PHOTO : BERNARD LORETTE
tures que l’on montait et dé­
montait. La plus grande difficul­
té, c’était de trouver un ami
plus âgé que nous qui avait une
voiture.
■ Ils avaient lieu où ces bals de
campagne ? Un peu partout. A
part quelques communes qui
avaient une salle des fêtes com­
me Vallon­en­Sully, tous les
bleds étaient concernés. C’était
souvent à l’occasion d’une fête
patronale. Il y avait le stand où
on dégommait les boites de
conserve, un manège éventuel­
lement et le parquet­salon. On a
aussi connu les parquets­salons
à Montluçon lorsqu’il y avait la
Fête de la septembre où dans
mon quartier lors de la Fête du
Pont­Neuf.
■ Votre roman relate les aventures
d’une bande de six à sept jeunes
gens dans les années 60. Quelle
est la part d’histoire vraie ? Ce ro­
man est en partie autobiogra­
phique. Je mets en scène des
jeunes qui sont loin d’être des
gendres idéaux. Ils parlent des
choses de leur âge, le sexe, les
filles, avec le machisme propre
à cette époque. Après, il ne faut
pas penser que c’est la vision de
l’auteur sur les femmes et les
filles.
■ Les héros de cette histoire, Côte-
lette, Beau parleur, Pépé Boss, ils
existent ? Certains personnages
peuvent se reconnaître. Pour
Pépé Boss par exemple, j’ai pen­
sé à certains jeunes que j’ai ren­
contrés dans ces bals. Pépé
Boss, c’est le queutard par ex­
cellence. Dans toutes les petites
bandes, il y en a un comme ça.
Un gars qui est plus beau gosse
que les autres et qui rafle toutes
les filles.
■ Côtelette, le fils du boucher,
c’est vous ? C’est vrai qu’il res­
semble assez bien à l’auteur
même si le Côtelette de l’épo­
que n’était pas aussi cultivé que
le Côtelette d’aujourd’hui. Côte­
lette, c’est un peu l’Assurance­
tourix du groupe. A défaut de
conclure comme Pépé Boss, lui,
il se verrait bien comme le bar­
de qui raconte l’épopée de la
bande.
plus gros baiseur de la bande
avec un barème assez strict. La
dépose du soutif, un point, etc...
Tout ça, je ne l’ai pas vécu. Ce
que j’invente aussi, c’est la bé­
taillère qui servait de baisodro­
me. En revanche, les vantardises
sur une fille culbutée, c’était un
grand classique. Tous ces petits
mâles, ils affichent un cynisme
de façade envers les copains. En
fait, ils rêvent tous à une rela­
tion stable.
■ Il y a aussi beaucoup de nostal-
■ C’est compliqué pour Côtelette
a v e c l e s f i l l e s ? Fo rc é m e n t
d’autant plus qu’il y avait la
crainte de la grossesse. Cela
veut dire que ces jeunes filles
n’étaient pas pressées de se faire
culbuter à l’arrière d’une voitu­
re. Il fallait leur raconter plein
d’histoires pour pouvoir arriver
à nos fins.
gie dans votre roman… J’ai la
nostalgie de ma petite ville de
province même si je dis qu’elle
est moche et qu’elle n’a pas
d’attrait. Par exemple, le narra­
teur regrette que l’on ait bouché
le canal de Berry. Il aurait bien
imaginé des plages sur l’ancien
emplacement des usines Saint­
Jacques. J’ai aussi la nostalgie
de la langue que nous parlions
à l’époque avec ses expressions
patoisantes (voir ci­contre). Ce
livre, ça fait longtemps que je le
porte en moi. Il fallait que cela
sorte. J’ai voulu décrire ma ville
et les petites gens qui habitaient
les quartiers avec le plus de ten­
dresse possible.
■ Les « ch’tis gars » que vous dé-
■ C’était une période heureuse les
crivez dans votre roman, ils sont
un peu particuliers avec les filles...
Ils ont inventé le concours du
années 60 ? Oui malgré le fait
que nous étions très modestes.
Il y avait de l’insouciante, une
« Faire quelque chose sans goût.
C’est une expression que j’aime
bien »
relative innocence, de l’empa­
thie entre copains. Montluçon
sortait de la guerre et rentrait
dans la période des trente glo­
rieuses. Les gens achetaient des
voitures, il y avait une foi en
l’avenir qui n’existe probable­
ment plus aujourd’hui. La seule
peur, c’était de mettre enceinte
une fille. Un des copains que je
décris dans le livre a été obligé
d’épouser une fille avec qui il
sortait. Ce garçon existe, il se re­
connaîtra certainement.
■ Les discothèques ont remplacé
les bals de campagne. Quel regard
portez-vous sur la jeunesse
d’aujourd’hui ? A cette époque de
la vie, les jeunes garçons et les
jeunes filles recherchent tou­
jours à la même chose : les jeux
de l’amour et du hasard. Ce qui
a changé, c’est la violence.
Avant, il y avait des bandes que
l’on craignait et de belles bagar­
res. Mais tout se réglait à la sa­
vate. Le premier qui était à ter­
re, on ne s’acharnait pas. ■
(*) « Le prince des parquets­salons »,
édition Marivole, collecte années 60.
■ SALON DU LIVRE
Ce week-end. Jean-Claude Fournier sera présent au Salon du livre, les 5 et 6 octobre, à Athanor.
Montlu