Andrew Quilty « Afghanistan : après l`opération «Liberté
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Andrew Quilty « Afghanistan : après l`opération «Liberté
Andrew Quilty AGENCE VU’ Photo #1 Andrew Quilty Afghanistan : après l’opération « Liberté immuable » © Brickwood Agence VU’ Après un périple de 30 000 km en Australie avec un vieil appareil que lui a donné son oncle, Andrew Quilty entreprend des études en photographie à Sydney. Il commence sa carrière pour Fairfax Media en 2004. En 2007, il est invité à rejoindre le collectif photographique australien Oculi. En 2010, il travaille comme pigiste à Sydney avant de partir pour New York en 2012. Fin 2013, Quilty voyage pour la première fois au Moyen-Orient et en Afghanistan. Il choisit alors de s’installer de façon permanente à Kaboul, d’où il couvre la montée de l’État islamique en Irak, en Turquie et en Syrie. LIEU Couvent des Minimes En 2001, dans le cadre de leur guerre contre le terrorisme, les ÉtatsUnis prennent la tête d’une coalition internationale en Afghanistan pour une opération modestement baptisée « Liberté immuable ». Au cours des dix années suivantes, l’Afghanistan va faire la une des journaux ; les organisations humanitaires, les sociétés de sécurité privée et les médias y accourent. Une attention dont n’avait jamais bénéficié ce pays, pourtant rongé par le conflit depuis déjà vingt ans. Bien après, alors que l’année 2014 s’achève, le président Barack Obama annonce la fin de la mission de combat de l’OTAN en Afghanistan, tournant ainsi la page de la plus longue guerre de l’histoire des ÉtatsUnis. Les troupes américaines sont parties pour l’essentiel et le pays suscite de moins en moins d’intérêt, pourtant sur place les combats se poursuivent et se font de plus en plus violents. Rien qu’en 2015, les forces de sécurité afghanes ont eu à déplorer plus de victimes que les forces étrangères pendant toute la guerre. Le bilan humain parmi les civils s’alourdit lui aussi. Prise dans la tourmente de ce dernier chapitre de la guerre d’Afghanistan, la population, lassée par des années de conflit, est également dans une impasse économique et politique. Le gouvernement d’unité nationale, formé en 2014 sous l’égide du secrétaire d’État américain John Kerry, est gangrené par des luttes intestines. Le retrait des troupes étrangères et la fin de l’aide extérieure ont fait grimper le taux de chômage et porté un coup dur à l’économie. Des millions de réfugiés afghans sont rentrés chez eux après la chute du régime taliban en 2001, mais près d’un million sont désormais des déplacés internes, deux fois plus qu’il y a trois ans. Des centaines de milliers d’Afghans ont entrepris un périple dangereux, en quête d’une vie meilleure en Europe, souvent en vain. Parmi la nouvelle classe de citadins instruits, beaucoup partent, mus par un sentiment accru de désespoir et par l’absence de débouchés professionnels. D’autres fuient les zones rurales où les talibans continuent de gagner du terrain. Ces derniers contrôlent – du moins ils l’affirment – pas moins de la moitié du pays. Leur victoire la plus écrasante est survenue en septembre 2015, lorsqu’en l’espace d’un jour à peine plusieurs centaines de combattants ont tenu en échec les forces gouvernementales et se sont emparés de Kunduz, dans le nord du pays. Pour la première fois depuis 2001, bien que brièvement, une capitale provinciale tombait entre les mains des talibans. L’un des épisodes les plus tragiques de la guerre s’ouvrait avec la chute de Kunduz. Aux premières heures du 3 octobre, répondant à une demande de soutien aérien des forces afghanes qui tentaient de reprendre la ville, un avion américain AC-130 bombarde un hôpital de MSF, faisant 42 morts parmi les patients et le personnel soignant. Avant la fin de l’année, les talibans ont lancé deux autres attaques contre des capitales provinciales, notamment dans la province du Helmand, d’où provient près de la moitié de l’opium produit dans le monde, un commerce qui génère chaque année des centaines de millions de dollars pour les talibans. À Kunduz et ailleurs, ces derniers ne sont plus qu’à quelques kilomètres de ces capitales provinciales. Face à la montée en puissance des talibans, l’espoir d’organiser des pourparlers de paix sous l’égide de la communauté internationale s’étiole, et les fractures au sein du gouvernement se creusent de jour en jour. Plus de dix ans après le début de l’opération « Liberté immuable », le bruit des armes continue de retentir en Afghanistan. Andrew Quilty Commissaire de l’exposition : Olivier Laurent Andrew Quilty / Agence VU’ Photo #1 Une petite fille grièvement brûlée chez elle par une chaudière à l’huile. Hôpital Boost, Lashkar Gah (capitale de la province du Helmand), Afghanistan. Février 2014. © Andrew Quilty / Agence VU’ A baby girl who suffered burns from an oil heater at home. Boost Hospital, Lashkar Gah (capital of Helmand Province), Afghanistan. February, 2014. © Andrew Quilty / Agence VU’ Une mère et sa fille en attente de soins urgents. Hôpital Boost, Lashkar Gah (capitale de la province du Helmand), Afghanistan. Février 2014. © Andrew Quilty / Agence VU’ A mother with her daughter waiting for emergency treatment. Boost Hospital, Lashkar Gah (capital of Helmand Province), Afghanistan. February, 2014. © Andrew Quilty / Agence VU’ Des membres de l’armée nationale afghane se reposent lors d’une opération de déminage au cours des derniers jours de la contre-attaque menée par les forces gouvernementales pour reprendre la ville de Kunduz aux talibans. 10 octobre 2015. © Andrew Quilty / Agence VU’ Afghan National Army officers resting during a clearing operation in the final days of the counter-offensive by government forces to retake Kunduz City from Taliban insurgents. October 10, 2015. © Andrew Quilty / Agence VU’ Andrew Quilty Afghanistan: After Enduring Freedom © Brickwood Agence VU’ Andrew Quilty first set off on a journey around Australia, traveling 30 000 kilometers with a camera his uncle had given him, then studied photography in Sydney. He started at the Fairfax press in 2004; in 2007 he was invited to join the Australian photographic collective Oculi. He worked freelance in Sydney from 2010 until 2012 when he went to New York. In late 2013, Quilty made his first trip to the Middle East and Afghanistan, and chose to settle in Kabul where he has covered the development of the Islamic State in Iraq, Turkey and Syria. VENUE Couvent des Minimes In 2001, as part of the war on terror, the United States went into Afghanistan at the head of an international coalition bombastically named Operation Enduring Freedom. For the next decade, unprecedented attention (from aid agencies, private security contractors and media) was given to a country that, despite having been in conflict for more than two decades, had struggled to attract international interest. Winding forward, as the clock ticked down to New Year’s Eve 2014, President Barack Obama announced the end to the NATO combat mission in Afghanistan, and America’s longest war. However, while the United States’ war in Afghanistan is ostensibly over and international interest on the wane, the fight for Afghanistan becomes more violent every year. In 2015 alone, Afghan security forces had more fatalities than foreign forces during the entire war. Civilian casualties are also on the rise. Amidst the tumult of this latest chapter in Afghanistan’s constantly evolving war, the war-weary population also has to contend with political and economic paralysis. The national unity government, brokered in 2014 by U.S. Secretary of State John Kerry, is mired in internecine conflict. The withdrawal of foreign troops and donor money has sent unemployment rates soaring and has stifled economic activity. Millions of Afghan refugees returned home following the ousting of the Taliban regime in 2001, but as many as one million are now internally displaced, twice as many as three years ago. Hundreds of thousands have made desperate, often futile or deadly journeys in search of better lives in Europe. Many among the new educated class in cities undertake this journey because of a growing sense of hopelessness and a lack of professional opportunities. Others flee rural areas where the Taliban continue to gain territory. The militant movement now controls or is staking a claim to as much as half the country. The most significant territorial victory for the Taliban came in September 2015 when, in less than a day, several hundred insurgents overwhelmed government forces to take control of the northern city of Kunduz. Though the capture was temporary, it was the first time a provincial capital had been under Taliban control since 2001. The fall of Kunduz also led to one of the biggest tragedies of the war when, in the early hours of October 3, in response to an Afghan Special Forces request for air support during operations to re-take Kunduz, a U.S. AC-130 gunship razed the fully functioning Médecins Sans Frontières (MSF) Kunduz hospital to the ground, killing 42 staff, patients and caretakers. Before the year was over, the Taliban staged two more major assaults on provincial capitals, including the capital of Helmand province, the source of nearly half the world’s opium, pumping hundreds of millions of dollars into Taliban coffers every year. In Kunduz and elsewhere, Taliban positions are only a few kilometers from provincial capitals. In the face of this Taliban momentum, any prospects of holding internationally sponsored peace talks are floundering, and dissent within the government is growing by the day. Afghanistan, after more than a decade of Enduring Freedom, is yet again looking down the barrel of a gun. Andrew Quilty Exhibition curated by Olivier Laurent