Parlement wallon - Groupe PS

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Parlement wallon - Groupe PS
Parlement wallon
Groupe Socialiste
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Question orale de la Députée Sophie Pécriaux à Madame Eliane Tillieux, Ministre de la Santé, de
l’Action sociale et de l’Egalité des chances sur « la présence concomitante de victimes et d'auteurs
au sein des services d'aide sociale aux justiciables »
Madame la Présidente, Madame la Ministre, chers Collègues, les services d’aide sociale aux
justiciables ont pour mission d’aider aussi bien les victimes d’actes délictueux que leurs auteurs.
L’article 16 de l’Arrêté du Gouvernement wallon du 20 décembre 2001 portant exécution du
décret du 18 juillet 2001 relatif à l’aide sociale aux justiciables stipule que « Le service dispose
au moins d’une salle d’attente et de locaux de consultation adaptés aux missions. » et qu’« Une
séparation est prévue entre les locaux destinés, d’une part, à l’accueil des victimes, et, d’autre
part, des inculpés, condamnés et ex-détenus. »
Malgré cette précaution prise en son temps par le Gouvernement wallon, des rencontres entre
victimes et auteurs sont rendues possibles : dans certains services, des victimes partagent la
même salle d’attente que leurs auteurs ; des services possèdent une porte d’entrée unique ;
certains services ne disposent que d’un seul bureau d’accueil, ce qui implique que des rendezvous se déroulent au même endroit.
Cette notion de séparation, prévue dans l'arrêté du 20 décembre 2001 reste donc relativement
vague, et sans doute fort difficile à mettre en œuvre.
On peut se poser la question de l’opportunité d’accueillir à la fois les victimes et les auteurs de
violences au sein des mêmes locaux, la rencontre de ces justiciables pouvant être problématique,
voire traumatique, pour certains d’entre eux.
Mon intervention ne remet nullement en doute la nécessité de ces services, ni le
professionnalisme reconnu des intervenants psycho-sociaux œuvrant dans le domaine.
Par ailleurs, j'ai pu prendre connaissance d'un rapport réalisé par le Relais social de Charleroi
sur les difficultés et les besoins des personnes sortant de prison. Ce rapport formule quelques
recommandations à destination des autorités locales, mais aussi régionales.
Madame la Ministre, pourrions-nous avoir votre avis sur l’inconfort que peut générer une
présence simultanée au sein des mêmes locaux de victimes d’auteurs de violences ou autres
actes délictueux ? Quelles solutions structurelles envisagez-vous afin de tenter de mettre un
terme à ces situations parfois difficiles ?
Avez-vous pu prendre connaissance du rapport consacré à la sortie de prison, établi par le Relais
social de Charleroi ? Quelles suites comptez-vous y apporter ?
Réponse
Tout d'abord, permettez-moi de vous remercier pour votre question qui va me permettre de
mettre en lumière un secteur de l'Action sociale qui est relativement méconnu et dont nous
parlons peu.
Les Services d'aide sociale aux justiciables sont au nombre de 13 en Région wallonne, hors
Communauté germanophone. Sans compter les aides à l'emploi, ils occupent en moyenne deux
équivalents temps plein. Leur mission est de garantir l'exercice du droit à l'aide sociale aux
victimes d'infractions, mais aussi aux inculpés, aux condamnés et aux ex-détenus.
La gestion de ces situations s'inscrit dans un cadre, il faut bien l'admettre, de complexité
institutionnelle du pays : le Fédéral garde les prisonniers, la Communauté française apporte aux
prisonniers un ensemble de services et la Région prend en charge, en plus des victimes, les
détenus à leur sortie des établissements pénitentiaires.
Concrètement, vu la surpopulation carcérale — ce n'est un secret pour personne -, le personnel
pénitentiaire n'est pas toujours en mesure d'accueillir au sein des prisons, le personnel de
différents services de la Communauté française. De ce fait, les détenus ne sont toujours en
mesure non plus de préparer leur sortie de prison. J'ajoute que contrairement à ce que beaucoup
peuvent penser, le passage d'un univers fermé à la liberté, qui nécessite des choix et implique
une responsabilité, est extrêmement difficile, voire impossible pour une partie importante d'exdétenus.
Aussi, avec le Fédéral et les autres gouvernements francophones du pays, un accord de
coopération est en préparation qui mettra en œuvre la loi dite « de principes » — cette loi qui
avait été votée en février 2005 et qui définit les devoirs et les droits des détenus, dont celui de
préparer la sortie de l'établissement pénitentiaire -.
Dans l'attente de la finalisation d'un autre accord de coopération entre le fédéral et les entités
fédérées, un protocole d'accord organise à titre transitoire la collaboration entre la police via
l'assistance policière aux victimes, les Services d'aide sociale aux justiciables et la Justice.
L'accord de coopération devrait être signé cette année encore, et les décrets d'assentiment seront
proposés au Parlement wallon dans la foulée.
J'en viens maintenant à vos questions. Pour accueillir leur public, et éviter toute rencontre
embarrassante, la réglementation des Services d'aide sociale aux justiciables prévoit une salle
d'attente et des locaux de consultation adaptés à leur mission.
Concrètement, certains services disposent de salles d'attente et de locaux d'accueil dédicacés soit
aux victimes, soit aux auteurs. Les services ne disposant pas de ces infrastructures ont
développé des procédures — il faut être créatif — pour éviter la mise en présence d'un auteur et
de sa victime.
Ainsi, certains fixent des permanences pour les auteurs à des jours bien déterminés. D'autres
fonctionnent sur base de prise de rendez-vous.
De manière générale, les mesures de prudence sont mises en œuvre pour éviter toute rencontre
inopportune.
À ce jour, aucun incident n'est à déplorer. Toutefois je suis bien consciente que la situation n'est
pas idéale et mon Cabinet, en concertation avec l'ensemble des services, étudie les moyens de
rencontrer cette difficulté.
En me posant la question du suivi du rapport établi par le Relais social de Charleroi, et
concernant la prison, vous attirez l'attention sur un travail exemplaire qui débouche sur un
certain nombre de propositions concrètes, propositions qui pourront être mises en oeuvre
localement ou pourquoi pas, à l'échelle de la Région. Si un relais social s'est penché sur la
question de la prison, c'est qu'un certain nombre de personnes libérées se retrouvent à la rue,
sans ressources. Elles accroissent ainsi le nombre des sans-abri et risquent dès lors très vite de
se retrouver à nouveau dans la spirale de la délinquance.
J'ai donc décidé de mettre sur pied un groupe de travail auquel j'inviterai des magistrats, des
représentants de Services d'aide sociale aux justiciables, des représentants de relais sociaux, des
Maisons de Justice, et des acteurs de terrain.
Diverses réunions préparatoires ont déjà eu lieu. Ce groupe sera chargé de me proposer des
pistes pour l'accueil des personnes à leur sortie de prison. Les conclusions de ce groupe de
travail seront attendues pour décembre 2010.