l`influence du parrainage sportif sur le cours de bourse

Transcription

l`influence du parrainage sportif sur le cours de bourse
L’INFLUENCE DU
PARRAINAGE SPORTIF SUR
LE COURS DE BOURSE DES
PARRAINS : UNE ETUDE
D’EVENEMENTS
Sébastien SOULEZ
Maître de Conférences
Université de Haute-Alsace
IUT de Colmar - Département TC
34 rue du Grillenbreit 68000 Colmar
Université de Lorraine
CEREFIGE
Cahier de Recherche n°2012-04
CEREFIGE
Université Nancy 2
13 rue Maréchal Ney
54000 Nancy
France
Téléphone : 03 54 50 35 80
Fax : 03 54 50 35 81
[email protected]
www.univ-nancy2.fr/CEREFIGE
n° ISSN 1960-2782
L’influence du parrainage sportif sur le cours de Bourse des
parrains : une étude d’événements
Sébastien SOULEZ
Maître de Conférences
Université de Haute-Alsace
Laboratoire CEREFIGE
IUT de Colmar - Département TC
34 rue du Grillenbreit 68000 Colmar
Tél : 06.06.82.76.34
[email protected]
2
L’influence du parrainage sportif sur le cours de Bourse des parrains : une étude
d’événements.
Résumé :
L’objectif de cet article est de mesurer l’influence du parrainage sportif sur le cours de
Bourse du parrain. Une étude d’événements révèle que, globalement, ni l’annonce d’un
contrat de parrainage ni l’annonce du non renouvellement d’un contrat de parrainage
n’affectent significativement le cours de Bourse du parrain. En revanche, l’annonce
d’un contrat de parrainage avec une équipe sportive engendre des rendements anormaux
de +1,60% sur la fenêtre [-5 ; 5] alors que l’annonce d’un contrat de parrainage d’un
événement engendre des rendements anormaux de -0,48% sur la fenêtre [0 ; 1]. Les
résultats montrent également que le parrainage de sports ayant une bonne image (rugby,
voile) engendre des rendements anormaux positifs alors que le parrainage de sports
ayant une image dégradée (football, cyclisme) aboutit à des rendements anormaux
négatifs. Enfin, une stratégie de parrainage mono-sport est valorisée par les marchés
(rendement anormal de +1,09% sur la fenêtre [-5 ; 5]). Ces résultats, qui
approfondissent et remettent parfois en cause les résultats des recherches précédentes,
permettent de discuter de l’efficacité du parrainage sportif d’un point de vue financier.
Mots clés : parrainage sportif, marketing du sport, études d’événements, cours boursier,
valorisation financière du marketing.
The relationship between sports sponsorship announcements and the stock prices
of sponsors: an event study
Abstract:
The aim of this paper is to measure the relationship between sports sponsorship
announcements and the stock prices of sponsors. The results of an event study show
that, overall, the announcement of a sponsorship agreement, as well as the
announcement of the non-renewal of a sponsorship agreement, do not significantly
affect the stock prices of sponsors. However, the announcement of a sponsorship
agreement with a sports team generates abnormal returns of 1.60% over the [-5; 5]
window while the announcement of a sponsorship agreement for an event generates
abnormal returns of -0.48% over the [0; 1] window. The results also show that the
sponsorship of sports with a good image (rugby, sailing) generates positive abnormal
returns while the sponsorship of sports with a poor image (football, cycling) results in
negative abnormal returns. Finally, a strategy of single-sport sponsorship is valued by
the market (RAMC of 1.09% on the [-5, 5] window). These findings, which deepen and
sometimes challenge the results of previous research, can discuss the effectiveness of
sports sponsorship from a financial point of view.
Keywords: sports sponsorship, sports marketing, event studies, stock prices, financial
value of marketing.
3
L’influence du parrainage sportif sur le cours de Bourse des parrains : une étude
d’événements.
Introduction
Le sport constitue aujourd’hui une véritable activité économique se traduisant dans les
économies nationales par la récurrence d’événements qui se déroulent en quasi
continuité au cours de l’année et qui génèrent annuellement en France, selon les
statistiques du Ministère des Sports, plus de 33 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Le marché du sport représente en outre un excellent moyen, pour les entreprises, de
communiquer autour de leurs valeurs et de toucher des consommateurs a priori
réceptifs. Les chercheurs en marketing s’intéressent donc depuis longtemps, au sein des
outils de communication, à la notion de sponsoring, ou parrainage sportif. Le parrainage
peut être défini comme un outil de communication qui consiste, pour une organisation,
une marque ou un produit, à créer ou à soutenir directement une activité socio
culturellement indépendante d’elle-même et à s’y associer médiatiquement, en vue
d’atteindre des objectifs de communication marketing (Derbaix, Gérard et Lardinoit,
1994 ; Ganassali et Didellon, 1996). Ce champ a suscité un grand nombre de recherches
ces dernières années (Cornwell et Maignan, 1998 ; Walliser, 2003). Celles-ci se
concentrent surtout sur l’évaluation de l’influence du parrainage, soit sur la notoriété,
soit sur l’image de marque (Walliser, 2003 ; Cornwell, Weeks et Roy, 2005). Une autre
approche, financière, consiste à étudier l’influence du parrainage sur le cours de Bourse
du parrain.
La valeur économique et financière des décisions de marketing stratégique occupe en
effet de plus en plus de place dans la littérature en marketing (Agrawal et Kamakura,
1995 ; Srivastava, Shervani et Fahey, 1998). Le parrainage représentant des dépenses
importantes pour les entreprises, la question de la rentabilité de cette forme de
communication se pose avec acuité. Cet article s’intéresse donc à l’influence du
parrainage sportif sur le cours de Bourse des parrains. En effet, la rentabilité directe des
opérations de communication et leur effet sur les ventes étant difficiles à mesurer, une
alternative est de chercher à évaluer les profits espérés liés au parrainage qui sont
reflétés dans un rendement anormal du cours de Bourse du parrain. Ces rendements
anormaux peuvent être calculés grâce à la méthodologie des études d’événements
(Delattre, 2007). Cette méthodologie permet ici d’évaluer les effets financiers d’une
décision stratégique particulière en marketing, la stratégie de communication et, en son
sein, des dépenses de parrainage.
Cet article n’est pas le premier à s’intéresser à cette problématique. Néanmoins, les
recherches sur ce thème, presque toutes anglo-saxonnes, souffrent de nombreuses
limites. Tout d’abord, la fiabilité de la plupart de ces études peut être discutée du fait de
la faible taille des échantillons ou des sous-échantillons utilisés. Ainsi, c’est à partir
d’un échantillon restreint (53 annonces) que Cornwell, Pruitt et Clark (2005) observent
un rendement anormal significatif consécutif à l’annonce d’un contrat de parrainage. La
mise en lumière d’effets significatifs par type de fédération parrainée ne peut donc se
faire, dans cet article, que sur des sous-échantillons très faibles (entre 8 et 14 annonces).
Certaines recherches, par exemple celle de Spais et Filis (2008) ou celle de Kim (2010),
sont en outre très critiquables en ce qu’elles utilisent la méthodologie des études
d’événements pour ne traiter qu’un seul événement, ce qui semble peu à même de
fournir des résultats fiables. Toutes ces recherches sont également difficilement
comparables entre elles car elles ne s’intéressent pas toutes au même type de parrainage.
Il est donc difficile de savoir quel est, globalement, l’influence du parrainage en tant
4
que stratégie de communication. En outre, même lorsque les études se concentrent sur
un même type de parrainage, les résultats observés sont parfois contradictoires. Ainsi,
concernant le parrainage des Jeux Olympiques, Farrell et Frame (1997) et Tsiotsou et
Lalountas (2005) mettent en lumière un rendement anormal négatif important (entre 0,43% et -2,13% selon l’étude) alors que Miyazaki et Morgan (2001) ne trouvent pas
d’effet significatif et que Kinney et Bell (2003) trouvent un rendement anormal de
+1,39% sur une fenêtre comparable. Une autre limite dont souffrent ces recherches est
qu’à l’intérieur d’une même étude, des formes très variables de parrainage, voire même
du mécénat, peuvent être prises en considération. Par exemple, Mishra, Bobinski and
Bhabra (1997) ont mélangé le parrainage de différents sports avec celui de stades, des
Jeux Olympiques ainsi que différentes formes de mécénat (exhibitions, opérations de
charité et concerts). Enfin, la stratégie de parrainage mise en œuvre ou le statut de
l’annonce sont rarement étudiés.
Cette recherche vise donc à pallier ces différentes limites et à vérifier et compléter les
résultats des études précédentes sur le sujet. L’étude de l’influence du parrainage sportif
sur le cours de Bourse des parrains, problématique centrale de l’article, conduit en outre
à s’intéresser à d’autres questions connexes non abordées dans la littérature : quelle est
l’influence de l’annonce du non renouvellement d’un contrat de parrainage ? L’effet de
l’annonce d’un contrat de parrainage dépend-il du type de parrainage (une fédération,
une équipe ou un événement), du statut de l’annonce (première annonce ou
renouvellement), de la stratégie de parrainage (sport unique ou multisports) ou encore
du sport parrainé ?
Dans un premier temps, une revue de la littérature sur l’influence financière du
parrainage fournira un support théorique et empirique aux hypothèses de recherche. La
méthodologie des études d’événements, ainsi que les choix méthodologiques retenus
pour cette recherche, seront détaillés dans un second temps. Enfin, dans un troisième
temps, les résultats seront présentés avant d’être discutés.
1. Revue de la littérature et hypothèses de recherche
Les objectifs du parrainage sont divers : développement de la notoriété, amélioration de
l’image de marque ou encore accroissement des ventes (Cornwell et Maignan, 1998).
On peut ajouter également un objectif financier de retour sur investissement. Les
parrains souhaitent en effet, davantage que par le passé, obtenir des preuves tangibles de
l’efficacité du parrainage (Meenaghan, 1998). L’étude de la performance du parrainage
passe donc par plusieurs approches, en particulier des approches liées au consommateur
(Cornwell, Weeks et Roy, 2005). La première approche quantifie ainsi l’audience
obtenue par l’opération de parrainage. La seconde approche étudie son effet sur les
attitudes et comportements des consommateurs. Il est également possible d’étudier
l’influence du parrainage sur les ventes. Mesurer l’influence du seul parrainage sur ces
variables marketing est toutefois difficile (Calderón-Martínez, Más-Ruiz et NicolauGonzálbez, 2005) et, en tout état de cause, insuffisant (Cornwell, Weeks et Roy, 2005).
La pression des indicateurs financiers sur les services marketing des entreprises est, en
effet, de plus en plus prégnante. Plusieurs études récentes ont donc choisi une approche
innovante qui consiste à se concentrer sur les aspects financiers du parrainage (Walliser,
2003), étudiés par le biais de la méthodologie des études d’événements (Delattre, 2007).
D’un point de vue théorique, il s’agit de comprendre comment la politique de
parrainage peut influencer la valeur financière d’une entreprise. La littérature en
marketing a mis en évidence un effet de la politique de marketing sur le cours de Bourse
des entreprises. Par exemple, les stratégies de marque sont vues comme une source de
valeur pour les actionnaires et le capital marque se reflète dans le cours de Bourse de
5
l’entreprise (Changeur, 2004). Le mécanisme théorique est alors que la marque est à
même de générer des flux financiers additionnels car les ventes de produits portant la
marque seront supérieures aux ventes des mêmes produits sans marque (Simon et
Sullivan, 1993). Ces flux financiers représentent la valeur financière de la marque qui
fait partie intégrante de la valeur de l’entreprise. Par extension, il est possible d’adopter
le même type de raisonnement pour toutes les stratégies de marketing, en particulier la
stratégie de communication. Ainsi, le parrainage ayant, notamment, pour objectifs
d’accroître la notoriété et d’améliorer l’image d’une marque (Cornwell et Maignan,
1998), les dépenses de parrainage sont susceptibles, via ces variables médiatrices, de
provoquer des ventes supplémentaires et donc d’améliorer la valeur financière de
l’entreprise. Ces flux financiers supplémentaires peuvent se refléter dans le cours de
Bourse de l’entreprise car les investisseurs interprètent chaque nouvelle information
susceptible d’affecter les profits futurs de l’entreprise et réagissent en procédant à des
achats ou des ventes de titres. La modification du cours de Bourse reflète alors
l’analyse, de la part des investisseurs, de l’influence de la nouvelle information sur la
richesse des actionnaires (Brown et Warner, 1980 et 1985).
D’un point de vue méthodologique, le recours aux études d’événements permet
d’appréhender l’influence d’une information marketing sur la valeur financière de
l’entreprise. Cette méthodologie a en effet déjà été appliquée pour vérifier l’influence
sur les cours de Bourse de diverses activités marketing, comme la communication
média (Bobinski et Ramirez, 1994 ; Mathur et Mathur, 1995 ; Kim et Morris, 2003), le
lancement de nouveaux produits (Chaney, Devinney et Winer, 1991 ; Kelm, Narayanan
et Pinches, 1995 ; Hendricks et Singhal, 1997), les stratégies de marque (Lane and
Jacobson, 1995 ; Changeur, 2004) ou les partenariats avec des célébrités (Agrawal and
Kamakura, 1995 ; Russell, Mahar et Drewniak, 2005). En termes de communication
hors média, il a été montré que le mécénat n’avait aucun effet significatif sur le cours de
Bourse du mécène alors que l’annonce d’un contrat de parrainage provoquait une
hausse du cours de Bourse du parrain (Calderón-Martínez, Más-Ruiz et NicolauGonzálbez, 2005).
Par rapport au parrainage sportif, plusieurs recherches ont examiné son effet sur le cours
de Bourse des parrains en appliquant la méthodologie des études d’événements. La
majorité de ces études a trouvé des effets positifs significatifs (Mishra, Bobinski et
Bhabra, 1997 ; Clark, Cornwell et Pruitt, 2002 ; Pruitt, Cornwell et Clark, 2004 ;
Cornwell, Pruitt et Clark, 2005 ; Spais et Filis, 2008). Certaines recherches ont
cependant mis en lumière des effets négatifs significatifs (Farrell et Frame, 1997 ;
Tsiotsou et Lalountas, 2005) alors que d’autres n’ont trouvé aucun effet global
significatif (Cornwell, Pruitt et Van Ness, 2001 ; Miyazaki et Morgan, 2001 ; Kinney et
Bell, 2003). Il semble donc que les marchés considèrent globalement le parrainage
comme un bon investissement. Cette assertion semble d’autant plus vérifiée que les
deux seules études ayant trouvé des rendements anormaux négatifs concernaient le
parrainage d’un type d’événement particulier : les Jeux Olympiques. Outre le fait que le
parrainage des Jeux Olympiques ait fourni des résultats contradictoires, cela signifie
surtout que le parrainage d’autres événements conduise à des rendements anormaux
positifs. Enfin, lorsque l’on étudie en même temps le parrainage des Jeux Olympiques et
d’autres types de parrainage, comme l’ont fait Mishra, Bobinski and Bhabra (1997) par
exemple, le résultat global est positif.
Nous établissons donc la première hypothèse suivante :
H1 : L’annonce d’un contrat de parrainage est liée positivement à des rendements de
marché anormaux pour le parrain.
6
Aucune recherche n’a pour le moment étudié l’effet de l’annonce de la rupture d’un
contrat de parrainage ou de son non renouvellement. Si les marchés valorisent
globalement le parrainage, il pourrait sembler logique que, symétriquement, ils
sanctionnent l’arrêt du parrainage. De plus, dans le domaine de la communication
média, des recherches empiriques ont montré que le cours de Bourse a tendance à
diminuer lors de la rupture des relations entre un annonceur et une agence de publicité
(Hozier et Schatzberg, 2000) et lors du choix d’une nouvelle agence (Mathur et Mathur,
1996). De telles annonces pourraient, selon ces chercheurs, constituer un signal de
discontinuité ou d’échec de la stratégie de communication. Le même raisonnement
semble pouvoir être tenu pour la stratégie de parrainage. D’où l’hypothèse 2 :
H2 : L’annonce de l’arrêt ou du non renouvellement du parrainage est liée
négativement à des rendements de marché anormaux pour le parrain.
Les recherches menées dans le passé ont parfois abusivement mélangé des types de
parrainage pourtant fort différents. En effet, il existe trois types de parrainage sportif :
l’événement sportif, le sportif individuel ou l’équipe (Moinier, 2005). On peut y ajouter
le parrainage des fédérations sportives, sous la forme d’un fournisseur ou partenaire
officiel ou d’un produit officiel (Cornwell, Pruitt et Clark, 2005). Si ce mélange peut
paraître logique lorsque l’on souhaite étudier l’influence globale du parrainage, pris
dans son acception la plus large, cette manière de procéder empêche d’observer
d’éventuels effets contradictoires selon le type de parrainage. Elle contrevient en outre
aux recommandations méthodologiques que l’on observe dans la littérature (Delattre,
2007).
La majorité des recherches s’est cependant centrée sur un type de parrainage particulier.
Par exemple, Cornwell, Pruitt et Clark (2005) ont étudié l’influence du parrainage de
fédérations sportives. Ils trouvent un rendement anormal moyen cumulé de +1,11% sur
la fenêtre [-2 ; 2]. D’autres recherches ont également trouvé un effet positif du
parrainage de fédérations sportives (Pruitt, Cornwell et Clark, 2004). Le parrainage
d’équipes sportives semble aussi valorisé par les marchés financiers. Ainsi, Clark,
Cornwell et Pruitt (2002) ont montré que le parrainage de stades appartenant à une
équipe sportive donnait lieu à des rendements anormaux de +1,65% sur la fenêtre [-1 ;
1]. Concernant le parrainage d’événements, les résultats sont plus mitigés puisque les
études produisant des résultats négatifs (Farrell et Frame, 1997 ; Tsiotsou et Lalountas,
2005), qui concernent cependant exclusivement les Jeux Olympiques, côtoient des
études ne trouvant aucun résultat significatif (Cornwell, Pruitt et van Ness, 2001 ;
Miyazaki et Morgan, 2001).
Les résultats observés dans la littérature permettent donc d’établir les hypothèses
suivantes :
H3a : L’annonce d’un contrat de parrainage avec une fédération est liée positivement
à des rendements de marché anormaux pour le parrain.
H3b : L’annonce d’un contrat de parrainage avec une équipe est liée positivement à
des rendements de marché anormaux pour le parrain.
H3c : L’annonce d’un contrat de parrainage pour un événement est liée
négativement à des rendements de marché anormaux pour le parrain.
A ce jour, aucune recherche n’a étudié l’effet de l’annonce d’un contrat de parrainage
selon qu’il s’agisse du premier contrat signé par le parrain ou du simple renouvellement
d’un contrat antérieur. Pourtant, le risque associé à ces statuts différents semble
clairement très dissemblable. Le renouvellement d’un contrat qui fonctionne ne devrait
pas être vu par les marchés comme un événement majeur, les retombées espérées
pouvant même être anticipées de longue date. A l’inverse, la signature d’un tout
nouveau contrat constitue un événement risqué. Dans le domaine de la communication
7
média, Kim et Morris (2003) ont d’ailleurs montré que les nouvelles publicités diffusées
pendant le Super Bowl aux États-Unis sont davantage perçues par les investisseurs
comme des dépenses excessives plutôt que comme des investissements efficaces. D’où
les hypothèses suivantes :
H4a : L’annonce d’un premier contrat de parrainage est liée négativement à des
rendements de marché anormaux pour le parrain.
H4b : L’annonce du renouvellement d’un contrat de parrainage n’est pas liée à des
rendements de marché anormaux pour le parrain.
La question du sport dans lequel investir concerne tout responsable de la
communication qui souhaite engager de l’argent dans du parrainage. Or, si des études
ont été menées aux Etats-Unis sur l’influence du parrainage de tel ou tel sport sur le
cours de Bourse du parrain, aucun équivalent ne peut être trouvé en Europe. Sur
données américaines, Cornwell, Pruitt et Clark (2005) trouvent un effet positif du
parrainage du golf, du basket-ball et du hockey. Le football américain et le base-ball ne
donnent lieu à aucun effet significatif. Leurs échantillons sont cependant très restreints
(entre 8 et 14 annonces). Selon Kinney et Bell (2003), il existe un effet positif pour le
baseball, pas d’effet significatif pour les courses automobiles, le basket-ball, le hockey
et le golf, un effet négatif non significatif pour le football américain et le tennis et,
enfin, un effet négatif significatif pour le football (soccer).
L’influence, positive ou négative, du parrainage de sports semble devoir dépendre d’au
moins deux facteurs (Cornwell, Weeks et Roy, 2005) : d’un côté, l’efficacité du sport
parrainé en termes d’atteinte des objectifs quantitatifs du parrain, en particulier
l’amélioration de la notoriété, qui passe par la plus grande exposition possible. Selon ce
premier argument, le football par exemple devrait générer des rendements anormaux
positifs car il demeure de loin le sport le plus diffusé en Europe. D’un autre côté, l’un
des objectifs majeurs des parrains concerne l’image de marque. Or, les différents sports
qui peuvent fournir le support à un parrainage ne sont pas équivalents, ni sur l’image
intrinsèque du sport qui peut être transférée sur le parrain (Ganassali et Didellon, 1996 ;
Gwinner, Larson et Swanson, 2009), ni sur la cible touchée par différents sports qui
peut plus ou moins convenir à la stratégie de ciblage du parrain. Ainsi, le football, pris
dans divers scandales, possède une image dégradée face à des sports comme le rugby ou
la voile. En outre, il est le sport populaire par excellence, là où d’autres sports (golf,
tennis) sont plus élitistes.
Comme le coût du parrainage est généralement lié à l’exposition médiatique, et comme
les investisseurs développent un raisonnement patrimonial, ils devraient plutôt se méfier
des sports nécessitant de lourds investissements en parrainage pour une amélioration de
l’image de marque incertaine lorsque l’image du sport est dégradée, d’autant plus si le
parrain possède déjà un taux de notoriété élevé. Les marchés pourraient donc privilégier
des contrats de parrainage dans des sports ayant une bonne image, surtout si le parrain
peut améliorer son image de marque en investissant dans des sports peu coûteux,
Ces arguments, ainsi que les résultats observés dans la littérature, permettent de poser
les deux hypothèses suivantes :
H5a : L’annonce d’un contrat de parrainage dans un sport ayant une bonne image
(voile, rugby, tennis, golf) est liée positivement à des rendements de marché
anormaux pour le parrain.
H5b : L’annonce d’un contrat de parrainage dans un sport ayant une image dégradée
(football, cyclisme) est liée négativement à des rendements de marché anormaux pour
le parrain.
8
La stratégie de parrainage a fait l’objet de nombreuses recherches (Cornwell, Weeks et
Roy, 2005). Celles-ci intègrent diverses variables explicatives, en termes d’entreprise
(taille, fréquence des activités de parrainage, etc.) ou d’événement (importance de
l’événement, couverture médiatique, lien avec l’activité de l’entreprise, etc.). Cette
recherche s’est intéressée à la question stratégique de l’association entre parrain et
événement. Le postulat du parrainage est en effet que le parrain (son nom, sa marque
et/ou ses produits) va bénéficier de son association avec un événement, qui peut être lié
à un sport (Fleck et Quester, 2007). Dans ce cadre, une entreprise, pour atteindre ses
objectifs de marketing, pourrait avoir intérêt à être fortement associé à un seul
événement, à un seul type de parrainage ou à un seul sport, plutôt que de multiplier ses
efforts sur différents événements, types de parrainage ou sports (Cornwell, Weeks et
Roy, 2005 ; Fleck-Dousteyssier, 2007). D’où les hypothèses suivantes :
H6a : L’annonce d’un contrat de parrainage par un parrain qui adopte une stratégie
mono-sport est liée positivement à des rendements de marché anormaux pour ce
parrain.
H6b : L’annonce d’un contrat de parrainage par un parrain qui adopte une stratégie
multisports est liée négativement à des rendements de marché anormaux pour ce
parrain.
Cette recherche cherche donc à répondre à ces diverses hypothèses par la mise en œuvre
d’une méthodologie d’étude d’événements qui est présentée dans la partie suivante.
2. Méthodologie
2.1. Les études d’événements
Les études d’événements ont pour but de mesurer l’influence spécifique d’événements
sur le cours de Bourse des entreprises (Delattre, 2007). Le modèle des études
d’événements est fondé sur trois hypothèses théoriques majeures (Brown et Warner,
1980 et 1985) : l’efficience des marchés, la non anticipation des événements mesurés et
l’absence d’autres événements venant polluer l’influence de l’événement mesuré. Le
cours boursier est supposé refléter la valeur réelle de l’entreprise parce qu’il traduit la
valeur actualisée des cash-flows futurs et qu’il incorpore toute l’information pertinente.
L’hypothèse centrale qui supporte la méthodologie des études d’événements reste celle
de l’efficience des marchés en ce que le cours boursier à l’instant t incorpore toute
l’information pertinente nécessaire aux acteurs du marché dans leurs procédures
d’arbitrage (McWilliams et Siegel, 1997). Cependant la fiabilité des études
d’événements suppose, en sus des hypothèses mentionnées, de porter toute son attention
sur quatre points principaux (McWilliams et Siegel, 1997) : la taille de l’échantillon, les
tests statistiques, la durée de la fenêtre d’événement et sa justification, les éventuels
effets polluants.
Si ces hypothèses sont correctement remplies, il est possible de définir le rendement
normal et le rendement anormal d’un titre. Par rendement normal, on entend celui qui
aurait été observé si aucun événement n’était survenu pendant la période étudiée et par
rendement anormal, la différence entre le rendement effectif constaté et le rendement
normal calculé, le plus souvent, à l’aide d’un modèle de marché (Delattre, 2007). Pour
chaque événement (i.e. toute chose qui correspondrait à une nouvelle information
pertinente) sont donc calculés, sur une fenêtre d’événement spécifique, des rendements
anormaux qui représentent l’écart entre le cours de Bourse constaté de l’entreprise i le
jour t et un cours de Bourse théorique calculé dans cet article sur la base du modèle de
marché (MEDAF), le modèle le plus utilisé pour les études d’événements (Delattre,
2007). Les α et les β du modèle ont été estimés à partir de cours de clôture quotidien sur
9
une période de 160 jours qui précède la fenêtre d’événement. Le modèle de marché est
de la forme classique :
Rit = αi + βi . Rmt + εit
où Rit et Rmt sont respectivement le rendement du titre i et le rendement moyen du
marché sur la période t.
Le rendement anormal permet d’estimer la réaction non anticipée du marché (par le
biais de l’évolution du cours des actions) générée par un événement. Ce rendement
anormal est alors la différence entre le rendement observé du titre sur une période et son
rendement normal, correspondant au rendement qui aurait été celui de ce titre sur cette
période si l’événement n’était pas survenu. Le rendement normal, pour chaque titre et
sur chaque période de la fenêtre de l’événement, est le rendement du titre évalué à l’aide
du modèle de marché précédemment estimé. On a ainsi pour chaque titre i et chaque
période t de la fenêtre de l’événement :
RAit = ROit – RNit
avec : RNit = Rit = αi + βi . Rmt
où RAit, RNit et ROit sont respectivement le rendement anormal, le rendement normal et
le rendement observé du titre i sur la période t.
Il faut ensuite définir une fenêtre de l’événement à prendre en compte, période de temps
entourant la date de l’événement durant laquelle sera recherchée l’influence de
l’événement sur les cours. Les résultats sont ici analysés sur la fenêtre [T = 0], c’est-àdire le cours de clôture du titre le jour de l’événement, mais aussi [0 ; 1], [–2 ; 2] et [–5 ;
5] pour tenir compte des éventuelles fuites de l’information et du fait que l’impact d’un
événement se concentre rarement sur une seule séance de Bourse. Ce choix suit la
recommandation de Delattre (2007) de choisir de préférence des fenêtres d’événements
étroites.
Des rendements anormaux moyens (RAMt) sont alors calculés par la moyenne des
rendements anormaux des différents événements de l’échantillon pour chaque type
d’événements à chaque période t de la fenêtre de l’événement. Ces rendements
anormaux moyens mesurent la variation moyenne des cours due à l’événement à une
distance donnée t de la date de l’événement. Ces rendements anormaux moyens sont
ensuite cumulés sur la fenêtre de l’événement. La significativité de ces rendements
anormaux moyens cumulés est ensuite testée, suivant la méthodologie adoptée par
Hubler, Meschi et Schmidt (2001). On peut conclure à l’existence d’une influence d’un
événement sur le cours boursier d’une entreprise lorsque le rendement effectif est
différent du rendement normal au cours de la fenêtre d’événement retenue.
2.2. Données de la recherche
Les événements étudiés dans cette recherche sont l’annonce du contrat de parrainage et
l’annonce de l’arrêt du parrainage par des entreprises françaises cotés en Bourse. Plus
précisément, cette recherche étudie le parrainage d’équipes, de fédérations ou
d’événements sportifs de 1998 à 2010 sur le marché français. Le choix de cette durée
s’explique par la nécessité de recueillir un grand nombre d’événements pour pouvoir
obtenir des résultats valides statistiquement. D’autres recherches sur le même thème ont
fait un choix similaire (par exemple, Agrawal et Kamakura (1995) ont travaillé sur des
annonces faites entre 1980 et 1992, soit sur treize années). Le choix du début de la
période d’étude s’explique par le fait que l’année 1998 marque un tournant dans le
parrainage sportif en France suite à la victoire de l’équipe de France de football lors de
la Coupe du Monde (Walliser et Nanopoulos, 2002).
Une base de données comprenant, pour chaque événement, les variables susceptibles
d’influencer le cours de Bourse des parrains, a été constituée. Outre la date de
10
l’événement et le nom du parrain, quatre variables ont été prises en compte : le sport
parrainé, le statut de l’annonce (première annonce ou pas), l’entité parrainée (fédération,
équipe ou événement sportif) et la stratégie de parrainage (sport unique ou multisports).
D’autres variables testées préalablement dans la littérature ont également été recueillies:
il s’agit de la taille et du secteur d’activité du parrain et, lorsque l’information était
disponible, du montant investi.
Conformément à la recommandation de Delattre (2007), plusieurs sources
d’information ont été utilisées pour déterminer les dates d’annonce : des sources
internes à l’entreprise (communiqués de presse), des sources issues de la presse et des
médias (le journal Les Echos) et des sources professionnelles (les sites Internet des
associations sportives concernées). La date d’annonce retenue est la première des dates
où l’événement est évoqué publiquement.
Les cours de Bourse, collectés sur la période d’étude, soit de 1998 à 2010, sont issus de
deux bases de données : Datastream et JCF Quant. Ce recours à deux bases de données
différentes a permis de valider la définition des données nécessaires (il s’agit pour
chaque jour des cours de clôture) et de nous assurer de la qualité et de la pertinence des
données collectées. L’indice SBF250, qui est couramment utilisé dans les études
d’événements sur données françaises (Changeur, 2004 ; Delattre, 2007), a été retenu
comme indice de marché.
La base de données élaborée à l’occasion de cette recherche contient les informations
sur 294 événements, à savoir 262 annonces de contrats de parrainage et 32 annonces de
retrait ou de non renouvellement d’un contrat de parrainage, concernant 67 entreprises
françaises cotées à la Bourse de Paris. Afin de respecter, au plus près, les règles établies
par McWilliams et Siegel (1997), la dépollution de la base a été entreprise pour éviter
les effets croisés (amplification ou contraction des rendements anormaux) liés au
recouvrement de plus d’un événement au cours de la fenêtre d’événement retenue : tout
événement, par exemple l’annonce de résultats financiers, survenant dans les cinq jours
qui précèdent et qui suivent un événement retenu a ainsi conduit à retirer ce dernier de
la base. En définitive sont conservés pour les traitements statistiques les seuls
événements qui n’entrent pas en concurrence avec d’autres événements concernant la
même entité parrainée dans un délai de cinq jours avant et après l’événement observé :
152 événements (132 annonces de contrats de parrainage et 20 annonces de retrait) sont
finalement utilisés pour tester les deux premières hypothèses (soit la moitié de la totalité
des événements recueillis au départ). Afin de tester les hypothèses 3 à 6, l’échantillon
d’annonces de contrat de parrainage a été divisé en sous-échantillons pour lesquels la
recherche d’un rendement anormal a été effectuée, comme pour l’échantillon dans sa
globalité. En effet, il ne s’agit pas ici de comparer les modalités de variables
explicatives mais bien d’observer l’influence de ces modalités, prises indépendamment,
sur le cours de Bourse du parrain. Ces tests ne concernent pas l’échantillon d’annonces
de non renouvellement d’un contrat de parrainage, ce dernier étant trop petit pour être
divisé en sous échantillons.
Les résultats, présentés dans la section suivante, concernent donc, pour les quatre
fenêtres testées, des rendements anormaux moyens cumulés (RAMC) destinés à estimer
l’influence globale de chaque type d’événements sur l’ensemble de la période
considérée. L’hypothèse de normalité de la distribution de ces RAMC ne pouvant être
rejetée, leur significativité statistique a été systématiquement testée à partir de tests
paramétriques (test t de Student). Des tests non paramétriques, parfois utilisés dans ce
type de recherche (Changeur, 2004), ont toutefois été réalisés mais, ne fournissant pas
des résultats différents des précédents, ils ne sont pas présentés.
11
3. Résultats
Le tableau 1 indique l’effet global de l’annonce d’un contrat de parrainage sur le cours
de Bourse des parrains, à partir des 132 événements retenus. Les rendements anormaux
sont très faibles et aucun résultat significatif ne peut être relevé, quelle que soit la
fenêtre retenue. Ce résultat, qui conduit à rejeter l’hypothèse H1, correspond aux
résultats des études menées sur des types de parrainage divers, ce qui est le cas ici
puisque nous mélangeons le parrainage d’événements, de fédérations et d’équipes
sportives. Globalement, il est donc impossible d’affirmer que le parrainage possède un
effet positif sur le cours de Bourse des parrains et la valorisation par les marchés
financiers de ce type d’événements semble négligeable.
Tableau 1 : Effet global de l’annonce d’un contrat de parrainage
Annonce d’un contrat
de parrainage
RAMC (%)
[0]
-0,17 %
[0 ; 1]
-0,17 %
[-2 ; 2]
-0,28 %
[-5 ; 5]
0,53 %
T-test
-1,2692
-1,0288
0,9756
1,3639
N
132
* P < 0.1 ; ** P < 0.05 ; *** P < 0.01
Symétriquement, l’hypothèse 2 s’intéresse à l’influence de l’annonce d’un retrait ou du
non renouvellement d’un contrat de parrainage. Le tableau 2 montre que les rendements
anormaux demeurent non significatifs, comme pour les annonces de contrats de
parrainage. Ce résultat semble logique compte tenu du résultat précédant et conduit à
rejeter l’hypothèse H2. L’influence financière du parrainage, en termes d’annonce de
nouveau contrat ou de retrait, s’avère donc limitée.
Tableau 2 : Effet global de l’annonce du non renouvellement d’un parrainage
Annonce du retrait
du parrainage
RAMC (%)
[0]
-0,05 %
[0 ; 1]
-0,39 %
[-2 ; 2]
0,67 %
[-5 ; 5]
1,71 %
T-test
-0,1084
-0,5183
0,5245
1,1465
N
20
* P < 0.1 ; ** P < 0.05 ; *** P < 0.01
L’hypothèse 3 porte sur l’effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon le type de
parrainage : parrainage d’une fédération sportive, d’une équipe ou d’un événement (cf.
Tableau 3).
Tableau 3 : Effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon le type de parrainage
Parrainage d’une
fédération
RAMC (%)
[0]
-0,12 %
[0 ; 1]
-0,10 %
[-2 ; 2]
-0,40 %
[-5 ; 5]
-0,19 %
T-test
0,4075
-0,3828
-0,8606
-0,2650
Parrainage d’une
équipe
RAMC (%)
-0,24 %
0,07 %
-0,00 %
1,60 %
T-test
-1,0249
0,1965
-0,0003
Parrainage d’un
événement
RAMC (%)
-0,31 %
-0,48 %
-0,50 %
2,1983**
-0,11 %
T-test
-0,2114
RAMC (%)
-2,2376**
-0,53 %
-1,0894
dont parrainage
des JO
-1,7108*
-0,28 %
-1,43 %
-1,95 %
T-test
-0,8724
-1,5315
-1,7137
-2,2358**
N
34
51
47
11
* P < 0.1 ; ** P < 0.05 ; *** P < 0.01
Conformément aux hypothèses émises, l’annonce d’un contrat de parrainage pour un
événement engendre bien des rendements anormaux négatifs significatifs (-0,48% sur la
fenêtre [0 ; 1]) alors que l’annonce d’un contrat de parrainage d’une équipe sportive
12
provoque des rendements anormaux positifs significatifs importants (+1,60% sur la
fenêtre [-5 ; 5]). On peut en outre remarquer que, sur la fenêtre [-5 ; 5], le parrainage
d’une équipe est le seul type de parrainage qui engendre des rendements anormaux
positifs. Contrairement à l’hypothèse émise, le parrainage d’une fédération provoque
des rendements anormaux négatifs mais non significatifs. Les hypothèses H3b et H3c
sont donc validées alors que l’hypothèse H3a est rejetée.
Enfin, on notera que, conformément à la majorité des résultats observés dans la
littérature, le parrainage des Jeux Olympiques, un type d’événement particulier,
provoque des rendements anormaux négatifs significatifs, ici de -1,95% sur la fenêtre [5 ; 5].
L’hypothèse 4 porte sur l’effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon qu’il
s’agisse d’un premier contrat ou d’un simple renouvellement. Les résultats, synthétisés
dans le tableau 4, montrent que l’effet est négatif (rendement anormal de -0,33% le jour
de l’annonce) et significatif au seuil de 10% pour l’annonce d’un premier contrat alors
qu’il est non significatif pour le renouvellement d’un contrat de parrainage. Les
hypothèses H4a et H4b sont donc validées.
Tableau 4 : Effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon le statut de l’annonce
[0]
-0,33 %
[0 ; 1]
-0,15 %
[-2 ; 2]
-0,34 %
[-5 ; 5]
0,56 %
-0,6426
-0,8644
1,0427
-0,20 %
-0,19 %
0,49 %
-0,9319
-0,4581
0,8900
Premier contrat
de parrainage
RAMC (%)
Renouvellement
d’un contrat
RAMC (%)
-1,8829*
0,07 %
T-test
0,3391
T-test
N
81
51
* P < 0.1 ; ** P < 0.05 ; *** P < 0.01
L’effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon le sport parrainé constitue le socle
de l’hypothèse 5. Cinq sports ont été testés : le football, le rugby, le tennis, la voile et le
cyclisme (cf. Tableau 5). D’autres sports, comme le golf ou le basket-ball, sont
parrainés par des entreprises françaises mais les échantillons étaient trop faibles pour
pouvoir fournir des résultats fiables.
Tableau 5 : Effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon le sport parrainé
Football
Rugby
Tennis
Voile
Cyclisme
RAMC (%)
[0]
-0,48 %
[0 ; 1]
-0,80 %
[-2 ; 2]
-1,01 %
[-5 ; 5]
0,63 %
T-test
-1,0160
-1,1968
0,5013
RAMC (%)
0,31 %
-2,5225**
0,34 %
1,17 %
1,69 %
T-test
0,8354
0,8151
RAMC (%)
-0,42 %
-0,36 %
1,7828*
-0,41 %
2,1403**
-0,19 %
T-test
-1,2440
-0,9113
-0,4711
-0,1724
RAMC (%)
0,16 %
0,60 %
0,41 %
1,71 %
T-test
0,5885
1,9752*
0,8194
RAMC (%)
T-test
-0,37 %
-1,5870
-0,44 %
-1,8917*
-0,49 %
-0,5030
2,5592**
-1,02 %
-0,7335
N
25
18
16
22
10
* P < 0.1 ; ** P < 0.05 ; *** P < 0.01
Conformément à l’hypothèse H5a, les sports qui possèdent une bonne image auprès du
public et des investisseurs génèrent des rendements anormaux positifs significatifs :
+1,69% pour le rugby et +1,71% pour la voile sur la fenêtre [-5 ; 5]. A contrario, les
13
sports qui possèdent une image dégradée auprès du public et des investisseurs génèrent
des rendements anormaux négatifs significatifs : -0,80% pour le football et -0,44% pour
le cyclisme sur la fenêtre [0 ; 1]. Seul le tennis ne génère aucun rendement anormal
significatif. Les hypothèses H5a et H5b sont donc validées.
Enfin, l’hypothèse 6 s’intéresse à l’effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon
la stratégie de parrainage. Si la stratégie multisports n’engendre pas de rendements
anormaux significatifs, une stratégie mono-sport provoque bien des rendements
anormaux positifs significatifs, de +1,09% sur la fenêtre [-5 ; 5] (cf. Tableau 6). H6a est
donc validée alors que H6b est rejetée.
Tableau 6 : Effet de l’annonce d’un contrat de parrainage selon la stratégie de parrainage
Stratégie
mono-sport
RAMC (%)
[0]
0,22 %
[0 ; 1]
0,61 %
[-2 ; 2]
0,16 %
[-5 ; 5]
1,09 %
T-test
0,8609
1,6843
0,2939
Stratégie
multisports
RAMC (%)
-0,22 %
-0,26 %
-0,34 %
1,8378*
0,46 %
T-test
-1,4764
-1,4750
-1,0553
1,0809
N
14
118
* P < 0.1 ; ** P < 0.05 ; *** P < 0.01
D’autres variables ont été testées sur les 132 événements constituant la base d’annonces
de contrats de parrainage. En effet, les résultats présentés plus haut pourraient dépendre
de la date de l’annonce, de la taille ou du secteur d’activité du parrain ou encore du
montant investi. Ces quatre variables ont été testées et il s’avère qu’elles ne possèdent
pas (ou peu pour la taille du parrain) d’influence. L’effet de l’annonce d’un contrat de
parrainage est faible et non significatif pour des annonces anciennes comme pour des
annonces plus récentes, pour des annonces faites par des entreprises de divers secteurs
ou pour différents montants investis. Seule la taille du parrain semble avoir une
influence puisque, si les résultats sont très faibles et non significatifs pour les
entreprises du CAC40, il est possible de mettre en lumière des rendements anormaux
négatifs (-0,96%) et faiblement significatifs (au seuil de 10%) sur la fenêtre [-2 ; +2]
pour les plus petites entreprises de notre échantillon.
Les implications de ces résultats sont à présents discutées au regard de la littérature. Ils
permettent d’affiner la connaissance de l’efficacité du parrainage et de fournir des
recommandations managériales à destination des gestionnaires de la politique de
communication de l’entreprise.
4. Discussion
Les implications, théoriques et managériales, des résultats de cette recherche concernent
tout à la fois l’efficacité du parrainage au sein des outils de communication hors média,
le choix du sport dans lequel une entreprise peut avoir intérêt à investir une partie de
son budget de parrainage et les stratégies de parrainage les plus appréciées par les
investisseurs.
4.1. La performance financière du parrainage
Les décisions marketing en général ne sont pas sans conséquences sur les marchés
financiers. Les décisions liées à l’innovation, à la communication et à la stratégie de
marque sont plus particulièrement susceptibles de faire évoluer le cours de Bourse
d’une entreprise (Delattre, 2007). La littérature en marketing a ainsi mis en évidence
que le parrainage sportif avait globalement tendance à améliorer le cours de Bourse du
parrain. Cependant, les résultats obtenus dans cet article remettent en question cette
assertion, puisque des résultats de faible ampleur et, en tout état de cause, non
14
significatifs, ont été mis en lumière pour les annonces de contrats de parrainage comme
pour l’arrêt du parrainage ou le non-renouvellement d’un contrat. Plusieurs explications
peuvent être données à ces résultats. Tout d’abord, certaines annonces de contrat de
parrainage pourraient paraître trop peu importantes aux yeux des investisseurs pour
qu’ils les prennent en considération dans leurs arbitrages financiers. Dans ce cas, la
valeur du parrainage ne se reflète tout simplement pas dans le cours de Bourse du
parrain. Le parrainage pourrait ainsi pâtir de son image de « danseuse du président »
aux yeux des marchés financiers (Fleck-Dousteyssier, 2007). Ensuite, l’efficacité du
parrainage pourrait paraître trop incertaine pour faire varier la valeur d’une entreprise, et
donc son cours de Bourse. En effet, le parrainage est une tâche secondaire (peu
d’attention accordée au parrain), dotée d’un message implicite (simple association entre
parrain et entité parrainée) et ce dans cadre non commercial (Fleck et Quester, 2007).
En outre, le nombre de parrains parfois trop élevé nuit à leur visibilité (FleckDousteyssier, 2007). D’un point de vue méthodologique, le décalage entre la date de
l’annonce d’un contrat et le début d’un événement pourrait conduire les marchés
financiers à ne pas valoriser tout de suite cette information dans le cours de Bourse du
parrain, en attendant de savoir si l’événement permettra, ou pas, d’atteindre les objectifs
du parrainage. Dans ce cas, la méthodologie des études d’événements est démunie et ne
permet pas de mesurer l’effet du parrainage sur le cours de Bourse. Enfin, la façon
d’annoncer une information aux investisseurs peut influencer la manière dont elle est
analysée, et donc le cours de Bourse (Mathur et Mathur, 1996). Or, l’annonce de
contrats de parrainage est rarement une information traitée de manière expansive dans
les médias, ce qui peut réduire son impact sur les investisseurs.
Pourtant, plusieurs recherches ont montré qu’il pouvait exister un lien positif entre
annonce d’un contrat de parrainage et évolution du cours de Bourse du parrain (Mishra,
Bobinski et Bhabra, 1997 ; Clark, Cornwell et Pruitt, 2002 ; Pruitt, Cornwell et Clark,
2004 ; Cornwell, Pruitt et Clark, 2005 ; Spais et Filis, 2008). Il faut cependant peut-être
tenir compte des études qui « restent dans le tiroir » du fait de leur absence de résultats
significatifs (Rosenthal, 1979). Selon cet argument, il pourrait exister des recherches
prouvant que le parrainage ne modifie pas la valorisation boursière d’une entreprise
mais qui ne seraient pas publiées du fait de résultats non significatifs. L’explication que
nous retenons est cependant d’une autre nature : la plupart de ces recherches ont porté
sur un type de parrainage particulier. Or, le parrainage est divers. Seul le choix
d’évènements homogènes est pourtant à même de mettre en lumière des réactions
boursières significatives (Delattre, 2007). Comme l’indiquent les résultats de cette
recherche, c’est donc bien le type de parrainage qui constitue la bonne unité d’analyse.
Le parrainage d’événements (y compris celui des Jeux Olympiques) fournit des
rendements anormaux négatifs alors que l’on observe le résultat inverse pour le
parrainage d’équipes sportives : l’absence d’effet significatif global du parrainage est
donc due à des effets contradictoires selon le type de parrainage.
Il reste à comprendre pourquoi parrainer une équipe est davantage valorisé par les
investisseurs que parrainer un événement. Tout d’abord, on observe un effet temporel
très différent entre ces deux types de parrainage : il existe un effet à plus long terme
pour le parrainage d’équipes (au moins une saison sportive pour le parrainage d’une
équipe, alors que l’événement a lieu dans un temps limité). Or, les objectifs de notoriété
et d’image de marque dépendent de la durée d’exposition du message (Walliser, 2003).
En outre, l’effet sur les ventes est a priori favorisé par le long terme. Une autre
explication serait également que des montants plus élevés sont souvent engagés pour
parrainer un événement, ce qui correspond à un risque plus élevé pris par le parrain.
15
Il faut insister sur le fait que la méthodologie des études d’événements permet de
mesurer les perceptions des investisseurs. Or, ces derniers peuvent se tromper ou être
mal informés. Ainsi, la valorisation du parrainage d’équipe et, surtout, la dévalorisation
du parrainage d’événements, peuvent-elle sembler excessives au regard des résultats de
la littérature en marketing. En effet, si la performance du parrainage d’événements
apparaît relativement faible, notamment en termes de mémorisation (Quester, 1997 ;
Johar et Pham, 1999 ; Walliser et Nanopoulos, 2002 ; Johar, Pham et Wakefield, 2006),
cette mémorisation est également faible pour le parrainage d’équipes sportives
(Cornwell, Maignan et Irwin, 1997). Quant au parrainage de fédérations sportives, qui
ne donne pas de résultats significatifs dans cet article, il procède pourtant des mêmes
ressorts que le parrainage d’équipes (parrainage à long terme notamment). Néanmoins,
il semble plus facile pour une marque d'être associée à un club qu’à une fédération car
cette dernière ne permet pas toujours d'utiliser l'image d’un joueur. Or les acteurs du
terrain sont les meilleurs représentants des valeurs d’un sport. Il n’en reste pas moins
que, s’il est impossible d’affirmer que le parrainage améliore la valorisation boursière
du parrain, certaines formes de parrainage peuvent significativement améliorer ou
dégrader cette valorisation boursière, ce dont les décideurs marketing se doivent de tenir
compte.
4.2. Le choix du sport à parrainer
Les résultats de cet article démontrent que tous les sports ne sont pas analysés de la
même manière par les investisseurs. Certains sports génèrent des rendements anormaux
positifs (rugby, voile) alors que d’autres génèrent des rendements anormaux négatifs
(football, cyclisme). Ces résultats correspondent à certains résultats fournis dans la
littérature en marketing, en particulier ceux de Kinney et Bell (2003) pour qui il existe
un effet négatif significatif sur le cours de Bourse du parrain pour le parrainage du
football. Le fait que Cornwell, Pruitt et Clark (2005) trouvent un effet positif du
parrainage du golf sur la valorisation boursière du parrain est également cohérent avec
l’hypothèse testée dans cet article, à savoir la prééminence de l’image de marque sur la
simple exposition médiatique (qui influence la notoriété) du point de vue des
investisseurs. Cette hypothèse se trouve vérifiée par notre recherche. Il est possible de
l’expliquer par la théorie du transfert d’image via le parrainage (Ganassali et Didellon,
1996 ; Gwinner, Larson et Swanson, 2009) : mieux vaut en effet que le sport parrainé
ait une bonne image pour que celle-ci se transfère sur le parrain. Il apparaît donc que
l’objectif d’image domine celui de notoriété du point de vue financier : le football ou le
cyclisme (Tour de France) sont ainsi plus médiatisés que les autres sports et donc plus à
même d’accroître la notoriété du parrain. Ce sont pourtant des sports un peu moins
médiatisés, comme le rugby ou la voile qui permettent de valoriser le cours de Bourse
du parrain. Cette hypothèse semble logique dans la mesure où la plupart des parrains
sont des grandes entreprises cotées en Bourse et déjà connues du grand public (FleckDousteyssier, 2007). De ce fait, on peut imaginer que l’effet éventuel du parrainage sur
les ventes, et donc sur la valeur financière de l’entreprise, passe davantage par l’image
que par la notoriété.
En sus, il se pourrait que les résultats de cette recherche ne reflètent que la simple
rationalité des investisseurs : en effet, les droits de parrainage versés par les entreprises
sont beaucoup plus élevés pour le football que pour le rugby par exemple. Compte tenu
de la notoriété et de de l’image des différents sports, les investisseurs pourraient
considérer que le parrainage du rugby est tout simplement plus rentable que celui du
football. Dans une logique purement financière, ce dernier présente en effet différents
défauts : le football n'apparaît pas comme le meilleur support de communication pour
16
les entreprises car il attire trop d'annonceurs, ce qui affecte la part de voix de chaque
parrain. En outre, peu de marques arrivent à être mémorisées comme le parrain du
football du fait de l’éparpillement du parrainage entre de nombreuses compétitions. Par
exemple, les trois opérateurs de téléphonie (Orange, SFR et Bouygues Telecom)
parrainent le championnat de France pour le premier, l’équipe de France pour le
deuxième et la Coupe de la Ligue pour le dernier. Le parrainage de sports moins
exposés médiatiquement mais également moins chers et possédant une image forte et
positive semble donc un choix rationnel pour les managers en charge du parrainage.
4.3. Le choix de la stratégie de parrainage
La stratégie de parrainage peut s’entendre de diverses façons. Dans cet article sont
traitées deux décisions stratégiques : lancer un contrat de parrainage avec une entité
nouvelle ou bien prolonger le parrainage d’entité déjà parrainées, d’une part, et ne
parrainer qu’un seul sport ou plusieurs sports à la fois, d’autre part.
D’après les résultats de cette recherche, il apparait tout d’abord que lancer un nouveau
contrat de parrainage est une stratégie vue comme risquée par les marchés financiers
puisqu’elle génère des rendements anormaux négatifs. Ce résultat peut s’expliquer de
plusieurs manières : un contrat de parrainage totalement nouveau induit, tout d’abord,
une forte incertitude sur les résultats, ce qui est rarement apprécié par les marchés
financiers. Un nouveau contrat de parrainage constitue en effet une opération risquée
car, compte tenu des montants en jeu, un échec serait couteux pour l’entreprise Les
investisseurs peuvent ensuite éprouver une inquiétude sur la pertinence des dépenses de
parrainage par rapport à d’autres outils de communication. Les simples renouvellements
de contrats de parrainage apparaissent, quant à eux, comme des informations de
moindre importance puisque leur annonce ne provoque pas de modification de la
valorisation boursière des parrains, sans doute du fait d’un risque d’échec moindre.
Ensuite, cette recherche permet d’établir qu’une stratégie de parrainage mono-sport est
valorisée par les marchés financiers. Celle-ci permet en effet une meilleure association
de l’image du sport et du parrain, et donne en outre une image de fidélité au parrain,
image probablement valorisée par les consommateurs. L’exemple typique est celui de
BNP Paribas avec le tennis : c’est le parrain français de loin le mieux mémorisé . Avec
un partenariat vieux de 30 ans, la BNP est clairement vue comme le sponsor du tennis
en France. Cette stratégie qui consiste à concentrer les budgets de parrainage sur un seul
sport apparaît donc, d’un point de vue financier comme d’un point de vue marketing,
comme une stratégie cohérente, d’autant plus si elle est développée sur la durée. En
revanche, la stratégie multisports n’est pas attaquée par les investisseurs qui se
contentent de ne pas survaloriser le cours de Bourse du parrain (rendements anormaux
non significatifs).
Finalement, cette vision financière de la politique de communication hors média, via la
politique de parrainage, à laquelle le marketing a de plus en plus recours, apparaît
comme relativement rationnelle et davantage attachée à des critères financiers que
marketing. Ainsi, c’est le retour sur investissement probable qui semble être calculé par
les investisseurs, ceux-ci valorisant le parrainage d’équipes sportives dans des sports
dont le parrainage est peu cher du fait de leur moindre médiatisation mais qui peuvent
améliorer l’image de marque via le transfert des valeurs de ces sports sur les parrains, ce
qui peut avoir des conséquences bénéfiques sur les ventes et donc sur la valeur de
l’entreprise.
17
Conclusion
Cette recherche est la première à mesurer la valorisation financière du parrainage sportif
dans un contexte français. Elle établit qu’il existe bien une influence du parrainage sur
le cours de Bourse du parrain, différente selon le type de parrainage, le sport parrainé, le
statut de l’annonce et la stratégie de parrainage. Ces résultats fournissent un moyen
inédit aux investisseurs et aux responsables de marketing de confronter leurs points de
vue. Du point de vue du marketing, l’efficacité du parrainage est largement analysée via
l’atteinte d’objectifs tels que la notoriété et l’image de marque. Du point de vue
financier, l’idée d’un retour sur investissement strictement monétaire semble primer.
Ces deux visions sont néanmoins complémentaires, et non concurrentes, et les
responsables de marketing devraient pouvoir s’appuyer sur cette recherche pour justifier
leurs dépenses de communication hors média.
Cette recherche présente, comme toute recherche, des limites qu’il convient d’exposer.
Tout d’abord, les entreprises présentes dans l’échantillon sont toutes, compte tenu de la
méthodologie d’étude d’événements employée, des entreprises cotées en Bourse, en
majorité des très grandes entreprises, ce qui limite la validité externe des résultats
présentés. Ensuite, le petit nombre d’annonces de retraits ou de non renouvellement de
contrats de parrainage ne permet pas d’approfondir les résultats sur ce point. Il serait
également pertinent d’approfondir la façon dont les investisseurs évaluent les signaux
que constituent les annonces liées à la politique de marketing. Enfin, cette recherche n’a
pas pu étudier tous les sports parrainés par des entreprises françaises, du fait de
l’échantillon limité d’annonces. Il a donc fallu se restreindre à l’analyse de cinq sports,
qui représentent tout de même les sports les plus pratiqués, et parrainés, en Europe.
De nouvelles recherches sont donc souhaitables sur ce thème, en particulier par rapport
aux arbitrages réalisés dans les budgets des entreprises : en termes de communication
hors média, elles peuvent, notamment, choisir de parrainer des équipes ou des
fédérations. Mais ces mêmes entreprises pourraient également investir dans des clubs
sportifs, soit en achetant des actions de clubs cotés en Bourse (Allouche et Soulez,
2008), soit en achetant le droit de donner leur nom à un stade (Clark, Cornwell et Pruitt,
2002). Dans le premier cas, il s’agit d’une opération financière (espérer gagner des
dividendes et faire un profit en revendant les actions) et marketing (faire savoir que l’on
est actionnaire d’un club permet, comme le parrainage, d’opérer un transfert d’image
entre le club et le parrain). Dans le second cas, il s’agit d’une forme particulière de
parrainage à long terme qui permet d’accroître la notoriété et d’améliorer l’image du
parrain. Des recherches dans ces deux voies seraient certainement fructueuses. Une
autre voie de recherche pourrait consister à analyser le parrainage d’événements pris
individuellement. En effet, même si le parrainage du tennis en général ne génère pas de
rendements anormaux significatifs dans cette recherche, il se pourrait que le parrainage
de certains tournois de tennis soit valorisé par les investisseurs.
Les études d’événements constituent un des moyens d’évaluer la stratégie marketing de
l’entreprise du point de vue des marchés financiers. Ce type de mesures, qui permet de
prouver l’efficacité de la politique de marketing aux financiers, est sans doute
nécessaire pour que le marketing conserve un certain pouvoir décisionnel dans les
entreprises, et doit donc être encouragé dans les recherches françaises en marketing.
18
Références bibliographiques
Agrawal J. et Kamakura W.A. (1995), The economic worth of celebrity endorsers: an
event study analysis, Journal of Marketing, 59, 2, 56-62.
Allouche J. et Soulez S. (2008), Determinants of share price variations of listed football
clubs: Reference to English clubs, in Myths and facts about football: The economics
and psychology of the world's greatest sport, P. Andersson, P. Ayton, and C.
Schmidt (Eds.), Cambridge Scholars Press, 371-392.
Bobinski G.S. et Ramirez G.G. (1994), Advertising to investors: the effect of financialrelations advertising on stock volume and price, Journal of Advertising, 23, 4, 13-28.
Brown S.J. et Warner J.B. (1980), Measuring security price performance, Journal of
Financial Economics, 8, 3, 205-258.
Brown S.J. et Warner J.B. (1985), Using daily stock returns: the case of event studies,
Journal of Financial Economics, 14, 1, 3-31.
Calderón-Martínez A., Más-Ruiz F.J. et Nicolau-Gonzálbez J.L. (2005), Commercial
and philanthropic sponsorship: direct and interaction effects on company
performance, International Journal of Market Research, 47, 1, 75-99.
Chaney P.K., Devinney T.M. et Winer R.S. (1991), The impact of new product
introduction on the market value of firms, Journal of Business, 64, 4, 573-610.
Changeur S. (2004), Stratégies de marque et richesse des actionnaires : une approche
financière du capital-marque, Recherche et Applications en Marketing, 19, 4, 23-38.
Clark J.M., Cornwell T.B. et Pruitt S.W. (2002), Corporate stadium sponsorships,
signaling theory, agency conflicts, and shareholder wealth, Journal of Advertising
Research, 42, 6, 16-32.
Cornwell T.B. et Maignan I. (1998), An international review of sponsorship research,
Journal of Advertising, 27, 1, 1-21.
Cornwell T.B., Maignan I. et Irwin R. (1997), Long-term recall of sponsorship sources:
an empirical investigation of stadium and sport cafe audiences, Asia-Australia
Marketing Journal, 5, 1, 45-57.
Cornwell T.B., Pruitt S.W. et Clark J.M. (2005), The relationship between major-league
sports’ official sponsorship announcements and the stock prices of sponsoring firms,
Journal of the Academy of Marketing Science, 33, 4, 401-412.
Cornwell T.B., Pruitt S.W. et Van Ness R. (2001), The value of wining in motorsports:
sponsorship-linked marketing, Journal of Advertising Research, 41, 1, 17-31.
Cornwell T.B., Weeks C.S. et Roy D.P. (2005), Sponsorship-linked marketing: opening
the black box, Journal of Advertising, 34, 2, 21-42.
Delattre E. (2007), La méthodologie des études d’événements en marketing, Recherche
et Applications en Marketing, 22, 2, 57-76.
Derbaix C., Gérard P. et Lardinoit T. (1994), Essai de conceptualisation d’une activité
éminemment pratique : le parrainage, Recherche et Applications en Marketing, 9, 2,
43-67.
Farrell K.A. et Frame W.S. (1997), The value of Olympic sponsorships: who is
capturing the gold?, Journal of Market Focused Management, 2, 2, 171-182.
19
Fleck N. et Quester P. (2007), Birds of a feather flock together… Definition, role and
measure of congruence: an application to sponsorship, Psychology and Marketing,
24, 11, 975-1000.
Fleck-Dousteyssier N. (2007), Le parrainage : d’une intuition à une stratégie de
communication, Décisions Marketing, 47, 7-20.
Ganassali S. et Didellon L. (1996), Le transfert comme principe central du parrainage,
Recherche et Applications en Marketing, 11, 1, 37-48.
Gwinner K.P., Larson B.V. et Swanson S.R. (2009), Image transfer in corporate event
sponsorship: assessing the impact of team identification and event-sponsor fit,
International Journal of Management & Marketing Research, 2, 1, 1-15.
Hendricks K.B. et Singhal V.R. (1997), Delays in new product introductions and the
market value of the firm: the consequences of being late to the market, Management
Science, 43, 4, 422-436.
Hozier G.C. et Schatzberg J.D. (2000), Advertising agency terminations and reviews:
stock returns and firm performance, Journal of Business Research, 50, 2, 169-176.
Hubler J., Meschi P.X. et Schmidt G. (2001), Annonce de suppressions d’emplois et
valeur boursière des entreprises, in La gestion des Sureffectifs - Enjeux et pratiques,
G. Schmidt (Ed.), Economica, Paris.
Johar G.V. et Pham M.T. (1999), Relatedness, prominence, and constructive sponsor
identification, Journal of Marketing Research, 36, 3, 299-312.
Johar G.V., Pham M.T. et Wakefield K.L. (2006), How event sponsors are really
identified: a (baseball) field analysis, Journal of Advertising Research, 46, 2, 183198.
Kelm K.M., Narayanan V.K. et Pinches G.E. (1995), Shareholder value creation during
R&D innovation and commercialization stages, Academy of Management Journal,
38, 3, 770-786.
Kim J.W. (2010), The worth of sport event sponsorship: an event study, Journal of
Management and Marketing Research, 5, 1-14.
Kim J. et Morris J.D. (2003), The effect of advertising on the market value of firms:
empirical evidence from the Super Bowl ads, Journal of Targeting, Measurement
and Analysis for Marketing, 12, 1, 53-65.
Kinney L. et Bell G. (2004), Do sports sponsorship announcements influence firm stock
prices?, in Sports Marketing and the Psychology of Marketing Communication, L.R.
Kahle et C. Riley (Eds.), Lawrence Erlbaum Associates, Mahwah, New Jersey.
Lane V. et Jacobson R. (1995), Stock market reactions to brand extensions
announcements: the effect of brand attitude and familiarity, Journal of Marketing,
59, 1, 63-77.
Mathur L.K. et Mathur I. (1995), The effect of advertising slogan changes on the market
value of firms, Journal of Advertising Research, 35, 1, 59-65.
Mathur L.K. et Mathur I. (1996), Is value associated with initiating new advertising
agency-client relations?, Journal of Advertising, 25, 3, 1-11.
McWilliams A. et Siegel D. (1997), Event studies in management research: theoretical
and empirical issues, Academy of Management Journal, 40, 3, 626-657.
20
Meenaghan T. (1998), Current developments and future directions in sponsorship,
International Journal of Advertising, 17, 1, 3-28.
Mishra D.P., Bobinski G.S. et Bhabra H.S. (1997), Assessing the economic worth of
corporate event sponsorships: a stock market perspective, Journal of Market Focused
Management, 2, 2, 149-169.
Miyazaki A.D. et Morgan A.G. (2001), Assessing market value of event sponsoring:
corporate Olympic sponsorships, Journal of Advertising Research, 41, 1, 9-15.
Moinier X. (2005), E-parrainage sportif : une pratique efficace ?, Décisions Marketing,
38, 21-29.
Pruitt S.W., Cornwell T.B. et Clark J.M. (2004), The NASCAR phenomenon: auto
racing sponsorships and shareholder wealth, Journal of Advertising Research, 44, 3,
281-296.
Quester P.G. (1997), Awareness as a measure of sponsorship effectiveness: the
Adelaide Formula One Grand Prix and evidence of incidental ambush effects,
Journal of Marketing Communications, 3, 1, 1-20.
Rosenthal R. (1979), The ‘file drawer’ problem and tolerance for null results,
Psychological Bulletin, 86, 638-641.
Russell M., Mahar J. et Drewniak B. (2005), Examination of stock market response to
publicity surrounding athletic endorsers, Marketing Management Journal, 15, 2, 6779.
Simon C.J. et Sullivan M. (1993), The measurement and determinant of brand equity: a
financial approach, Marketing Science, 12, 1, 28-52.
Spais G.S. et Filis G.N. (2008), Measuring stock market reaction to sponsorship
announcements: the case of Fiat and Juventus, Journal of Targeting, Measurement
and Analysis for Marketing, 16, 3, 169-180.
Srivastava R.K., Shervani T.A. et Fahey L. (1998), Market-based assets and shareholder
value: a framework analysis, Journal of Marketing, 62, 1, 2-18.
Tsiotsou R. et Lalountas D. (2005), Applying event study analysis to assess the impact
of marketing communication strategies: the case of sponsorship, Applied Financial
Economics Letters, 1, 259–262.
Walliser B. (2003), L’évolution et l’état de l’art de la recherche internationale sur le
parrainage, Recherche et Applications en Marketing, 18, 1, 65-94.
Walliser B. et Nanopoulos P. (2002), Déterminants et importance de l’association
durable des sponsors à l’événement : le cas de la coupe du monde de football 1998,
Revue Française du Marketing, 186, 89-108.
21