Note de la Confédération Construction

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Note de la Confédération Construction
Note de la Confédération Construction
Mise en œuvre de l’accord de gouvernement
Actions prioritaires pour le secteur de la construction
Avant-propos
Le secteur de la construction a mieux résisté que d’autres secteurs d’activité aux effets de la crise
économique et financière. C’est incontestablement le résultat de l’application du plan
gouvernemental de relance mis en œuvre au début de l’année 2009 et des mesures de soutien de
l’activité de la construction inscrites dans ce plan. Le plan de relance a ainsi permis au secteur de
passer le cap difficile des années de crise, avec des pertes d’emploi et de parts de marché
relativement limitées, et de renouer ensuite avec la croissance dès l’année 2010.
La reprise de la croissance n’aura malheureusement été que de courte durée. La persistance de la
crise économique et l’instabilité financière des derniers mois freinent fortement l’investissement
immobilier. En outre, la décision du gouvernement de supprimer les avantages fiscaux pour les
travaux économiseurs d’énergie et l’incertitude liée au transfert aux Régions de la compétence en
matière de déductibilité des prêts hypothécaires accentuent encore plus gravement la tendance au
report ou à l’abandon des projets immobiliers des ménages.
Ainsi, le secteur de la construction se retrouve-t-il aujourd’hui dans une situation sans doute plus
précaire que celle qu’il a connue à la fin de l’année 2008 lors de l’éclatement de la crise économique.
Pour le logement neuf, le nombre des autorisations de bâtir a diminué de 20% en 2011 par rapport à
l’année précédente; au cours de la même période, la rénovation, a reculé de 7,5% et le non résidentiel
neuf s’est réduit, en volume, de près de 10%. Des mesures de soutien de l’activité s’imposent dès lors
tant pour éviter ou limiter la récession attendue pour 2012 que pour promouvoir de manière plus
structurelle une croissance durable.
Le soutien de l’activité suppose bien entendu l’adoption de mesures d’incitation à l’investissement
immobilier. Il suppose aussi une action plus large qui passe par l’émergence de cadres socioéconomique et juridiques favorables aux entreprises. Sous cet angle, la mise en œuvre de l’accord
gouvernemental doit se faire en tenant compte des intérêts légitimes des entreprises.
La présente note souligne les actions prioritaires que la Confédération attend du gouvernement au
cours des prochains mois. Une note de calcul des incidences budgétaires des actions proposées est
également jointe en annexe.
Sommaire
1.
Une politique de soutien à l’investissement immobilier .............................................. 3
Une réduction progressive de l’avantage fiscal lié aux investissements économiseurs d’énergie
dans les bâtiments........................................................................................................................................... 3
La réintroduction d’un avantage fiscal pour l’isolation des murs et des sols .......................................... 3
La garantie de la pérennité d’un régime de réduction fiscale pour les prêts hypothécaires ................ 3
Une réduction ciblée du taux de TVA ........................................................................................................... 4
L’octroi d’avantages fiscaux pour promouvoir l’investissement de capitaux privés dans le logement
neuf .................................................................................................................................................................... 4
Une norme pour les investissements publics .............................................................................................. 5
2.
Une politique efficace de lutte contre le travail illégal et la fraude sociale .................. 5
La régime de la responsabilité pour les dettes sociales et fiscales ......................................................... 5
L’introduction d’un régime de responsabilité pour les salaires ................................................................. 6
La lutte contre les faux indépendants ........................................................................................................... 6
Le suivi des modifications dans la structure des sociétés ......................................................................... 6
Un meilleur contrôle du chômage temporaire ............................................................................................. 7
Une attestation de la régularité de l’entreprise ............................................................................................ 7
3.
La recherche des équilibres dans la création d’un statut unique pour les travailleurs .. 7
4.
Une révision optimale de la réglementation des marchés publics ............................... 8
La nécessaire restauration des équilibres fondamentaux dans le projet d’arrêté royal d’exécution ... 8
L’actualisation de certains aspects du régime de l’agréation des entrepreneurs .................................. 8
5.
Des garanties de qualité pour la protection du consommateur ................................... 9
Une meilleure connaissance de la loi "Breyne" et un meilleur contrôle de son application ................. 9
Un examen approfondi et objectif de l’opportunité d’une assurance obligatoire de la responsabilité
des entrepreneurs ........................................................................................................................................... 9
La nécessité de veiller à la cohérence dans les règles d’accès à la profession .................................. 10
6.
Des outils pour accompagner les entreprises dans leur développement .................... 10
Le soutien dans l’accès au crédit ................................................................................................................ 10
L’aboutissement de la réforme de la mercuriale des matériaux de construction ................................. 11
Mise en œuvre de l’accord de gouvernement - Actions prioritaires pour le secteur de la construction - p. 2
1. Une politique de soutien à l’investissement immobilier
Une bonne politique de soutien de la croissance n’est pas incompatible avec un objectif de réduction
du déficit des finances publiques. La construction est un des moteurs de notre économie nationale et
le fait de stimuler de manière intelligente son activité, en particulier le logement neuf, entraîne en
effet des retombées positives sur le budget de l’Etat. En outre, il importe de privilégier l’adoption de
mesures qui ont un coût limité, voire nul, sur les finances publiques. Il convient également de cibler
les mesures de manière à leur donner un effet positif maximal sur la croissance et un effet négatif
minimal sur le déficit public.
Enfin, il faut aussi tenir compte de la durée d’application des mesures. Certaines seront limitées dans
le temps, de manière à donner le coup de fouet nécessaire, et d’autres pourront être appliquées de
façon permanente comme soutien structurel de l’activité.
 Une réduction progressive de l’avantage fiscal lié aux investissements économiseurs
d’énergie dans les bâtiments
La décision gouvernementale de suppression avec effet immédiat de la réduction d'impôt pour les
investissements économiseurs d'énergie repose sur une estimation budgétaire largement
surestimée. La Confédération a calculé que l’économie budgétaire issue de la mesure de suppression
ne sera pas de 780 millions €, comme estimé par le gouvernement, mais bien de 240 millions €
seulement. Cette différence se justifie par l’important recul de l'activité de construction - et donc par
les moindres recettes fiscales et parafiscales - que la mesure de suppression engendra en 2012 et
dont il n’a pas été tenu compte dans l’estimation gouvernementale relative à cette année.
Dans ce contexte, l’application d’une mesure de réduction progressive de l’avantage fiscal - en lieu et
place de la suppression immédiate - est une alternative qui, tout en ayant un effet similaire sur le
budget, maintient un niveau d’activité élevé en 2012. Calculés sur une période de 3 ans, les effets de
la mesure de réduction progressive (30% en 2012 et 20% en 2013 et 2014) sont, à tous points de vue,
plus intéressants que ceux issus de la suppression immédiate de ces avantages.
 La réintroduction d’un avantage fiscal pour l’isolation des murs et des sols
La réintroduction, pour les travaux réalisés dès 2012, d’un avantage fiscal comparable à celui prévu
par le plan de relance pour l’isolation des murs et sols entraînerait des recettes supplémentaires
nettes pour le budget de l’Etat en 2012 sans créer de dépenses supplémentaires (puisque l’avantage
est calculé pour l’exercice fiscal 2013). La dépense supplémentaire issue de l’application effective de
l’avantage en 2013 sera de toute manière largement compensée par les recettes issues de la
croissance de l’activité.
 La garantie de la pérennité d’un régime de réduction fiscale pour les prêts
hypothécaires
La décision de transfert aux Régions des compétences relatives aux avantages fiscaux en matière de
crédits hypothécaires s’est accompagnée, à la fois, d’une réduction immédiate de l’avantage fiscal
pour de nombreux contribuables (la conversion de la déduction actuelle pour habitation propre et
unique en une réduction d'impôt forfaitaire) et d’une grave incertitude quant au maintien de
l’avantage après le transfert.
Mise en œuvre de l’accord de gouvernement - Actions prioritaires pour le secteur de la construction - p. 3
Il est essentiel pour l’activité dans le secteur du logement de garantir la pérennité du régime de la
réduction fiscale pour les prêts hypothécaires et du montant de l’avantage actuel. Il importe, à cet
effet, de transférer aux Régions les moyens suffisants pour leur permettre de développer une
politique qui tienne compte de cette nécessaire pérennité.
 Une réduction ciblée du taux de TVA
L’élargissement de l’application du taux réduit de TVA au logement neuf par le plan de relance a
entraîné des effets positifs incontestables sur le développement de l’activité durant la période la plus
critique de la crise. De manière générale, l'application d'un taux réduit de TVA sur les travaux
immobiliers a toujours eu des effets bénéfiques sur le développement de l'activité et de l'emploi
dans le secteur du logement et sur la diminution du travail au noir.
Il importe bien entendu de tenir compte, dans l’appréciation de la mesure d’extension du taux
réduit, des moindres rentrées fiscales directement liées à la réduction du taux de TVA. Dans ce
contexte, on relève que l’incidence négative sur le budget s’estompe avec le temps au fur et à
mesure de l’application du taux réduit et de ses effets sur l’augmentation du volume d’activité.
Afin de limiter au maximum l’incidence "court terme" et son impact sur le déficit public, il convient
d’opter pour une application ciblée du taux réduit de TVA. Le taux réduit devrait ainsi être appliqué à
l’avenir aux travaux suivants débutant à une date à définir:

Les travaux de démolition suivis de la reconstruction d’un logement utilisé comme résidence
principale sur l’ensemble du territoire du pays, et non plus seulement sur le territoire de 32
zones urbaines comme c’est le cas aujourd’hui. Cette mesure permettrait en outre la
réalisation d’une large politique de lutte contre les taudis et de revalorisation des quartiers
défavorisés. La mesure devra également être étendue aux nouveaux logements mis en vente
après reconstruction.

Les travaux de construction d’un logement neuf qui répond à certains critères et conditions à
définir dans le cadre d’une politique sociale. Ces critères et conditions peuvent par exemple
être établis sur la base de la superficie du logement.
 L’octroi d’avantages fiscaux pour promouvoir l’investissement de capitaux privés dans
le logement neuf
L’offre de logements disponibles est aujourd’hui inférieure aux besoins de la population. Or ces
besoins, liés aux évolutions démographiques et sociologiques, croîtront de manière significative aux
cours des prochaines années. Il est essentiel de pouvoir répondre à la demande croissante en
stimulant l’investissement de capitaux des ménages dans la construction de logements neufs,
notamment sur le marché locatif. Deux mesures doivent être retenues à cet effet:

L’octroi d’un avantage fiscal aux particuliers qui acquièrent ou font construire une maison ou
un appartement) pour le louer non meublé et sur le long terme à titre de résidence
principale du locataire. L'avantage pourrait consister en une réduction d'impôt
correspondant à un pourcentage du prix d'achat ou de la valeur de l'habitation.

L’octroi d’un avantage fiscal aux particuliers qui, lors du départ à la retraite, décident
d’investir tout ou partie des capitaux issus de leur pension complémentaire (deuxième et
troisième piliers dans un nouveau logement destiné à l’occupation au titre de logement
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principal. L'avantage pourrait consister en l'application d'un taux d'imposition moins élevé
sur les capitaux versés.
 Une norme pour les investissements publics
La Confédération a pris connaissance avec intérêt de la déclaration de politique générale du
22/12/2011 sur le fonctionnement de la Régie des bâtiments, ses objectifs stratégiques et ses actions
prioritaires pour les prochains mois. Le gouvernement fédéral ne peut sans doute pas, dans le
contexte actuel de rigueur budgétaire, se doter d’une politique d’investissements publics plus
ambitieuse à court terme.
Il importe toutefois de se projeter à plus long terme et de ne pas perdre de vue que des
investissements publics dans les bâtiments, comme dans les infrastructures, contribuent fortement à
l’emploi et à la croissance.
A l’inverse, comme l’a souligné la Banque nationale à plusieurs reprises, le pays se voit confronté au
développement d’une dette cachée à partir du moment où les investissements publics ne suffisent
plus à assurer l’entretien des bâtiments et des infrastructures.
Sous cet angle, on ne peut que rappeler la faiblesse du taux moyen des investissements publics en
Belgique (1,7%) depuis plus de 20 ans, comparé à la moyenne européenne (2,8%).
La Confédération demande au gouvernement fédéral de mener une politique d’impulsion et de
coordination avec les pouvoirs régionaux conduisant à l’adoption, à moyen terme, d’une norme
nationale de référence en matière d’investissements publics de l’ordre de 3%.
2. Une politique efficace de lutte contre le travail illégal et la fraude
sociale
Malgré les efforts déployés par le secteur lui-même et par les pouvoirs publics, la construction reste
un secteur sensible au travail au noir, à la fraude sociale et à la concurrence déloyale. Il convient de
mener une politique globale de lutte contre la fraude dans la construction qui repose notamment sur
une meilleure coordination des acteurs, sur un renforcement de l’efficacité des contrôles et sur des
mesures d’accompagnement qui découragent le recours au travail illégal.
La Confédération soutient la politique que le gouvernement entend mener dans le cadre de la lutte
contre la fraude sociale et elle se réjouit des concertations bilatérales que le gouvernement souhaite
organiser avec les différents secteurs d’activité. Elle tient cependant à souligner, dans les points qui
suivent, l’importance qu’elle accorde à certains dispositifs anti-fraude.
 La régime de la responsabilité pour les dettes sociales et fiscales
Le régime de la responsabilité solidaire pour les dettes sociales et fiscales, également connu sous
l’appellation du régime de l’article 30bis, est appliqué de manière efficace et à la satisfaction des
entreprises et de l’administration depuis plusieurs années. Les composantes de ce régime, dont le
mécanisme de la retenue sur factures, contribuent à l’efficacité de la mesure en tant qu’outil de lutte
contre la fraude tout en donnant aux entreprises la sécurité juridique dont elles ont besoin.
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Ce régime devrait idéalement être maintenu. La Confédération ne s’oppose cependant pas au projet
du Secrétaire d’Etat à la lutte contre la fraude sociale et fiscale d’insérer dans le régime de l’article
30bis un système de responsabilité subsidiaire ascendante, à condition que la mise en œuvre de ce
régime s’accompagne de garanties suffisantes pour préserver la sécurité juridique des entreprises
dans la chaîne. Une des conditions de base à cet égard est le maintien de la constatation de
l’existence de dettes sociales ou fiscales au moment de la conclusion du contrat d’entreprise comme
unique élément déclencheur de la responsabilité solidaire.
 L’introduction d’un régime de responsabilité pour les salaires
Les salaires définis par les conventions collectives du secteur sont appliqués dans la toute grande
majorité des entreprises de construction établies en Belgique. Ce n’est pas toujours le cas des
entreprises étrangères qui détachent du personnel sur des chantiers en Belgique. Partant de ce
constat, le Secrétaire d’Etat à la lutte contre la fraude sociale et fiscale entend introduire un régime
légal de responsabilité solidaire des entreprises pour les manquements en matière de paiement du
salaire aux travailleurs.
La Confédération ne s’oppose pas à l’application d’un régime de responsabilité pour les salaires pour
autant que le régime puisse fonctionner, ici aussi, dans des conditions qui offrent une sécurité
juridique suffisante aux entreprises. Ceci suppose notamment de veiller à ce que les cocontractants
ne soient rendus responsables qu’après avoir été informés, par un acte formel de l’inspection sociale,
d’un grave manquement en matière de paiement du salaire par un sous-traitant, de limiter la
responsabilité aux paiements des salaires pour des périodes postérieures à la notification de
l’inspection et de donner aux cocontractants des moyens légaux permettant d’éviter l’application de
la responsabilité, comme par exemple la consignation d’une partie des sommes dues à
l’entrepreneur défaillant.
 La lutte contre les faux indépendants
Le cadre législatif adopté en 2006 pour lutter contre l’utilisation abusive du statut d’indépendant
n’est pas approprié et n’a jamais donné satisfaction, d’autant que son application a été largement
tenue en échec par des mesures d’exécution prises tardivement ou encore en suspens.
La Confédération demande de revoir ce cadre juridique et d’en faire un outil de lutte qui soit
réellement adapté aux réalités du terrain et aux abus les plus criants qui s’y manifestent dans
l’utilisation du statut d‘indépendant. Le libre choix du statut et la liberté des relations contractuelles
doivent être intégralement préservés mais l’inspection sociale doit pouvoir disposer, sous le contrôle
des cours et tribunaux, d’un pouvoir de requalification de la relation contractuelle lorsque des
preuves suffisantes de l’abus d’utilisation du statut d’indépendant sont réunies.
 Le suivi des modifications dans la structure des sociétés
De nombreuses carences sont constatées dans le suivi des modifications apportées à la structure des
sociétés (changement de gérant, d'adresse,...). Ces carences facilitent la survenance de situations de
fraude.
Il est essentiel que toute modification structurelle soit enregistrée dans la BCE par l’intermédiaire
exclusif des guichets d’entreprises. En outre, pour les entreprises soumises à l’application de la loi sur
la continuité des entreprises, aucune modification aux données de l’entreprise ne peut être admise
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sans une autorisation expresse du tribunal. Enfin, l’identité des associés actifs d’une entreprise
devrait également être mentionnée à la BCE.
 Un meilleur contrôle du chômage temporaire
Le formulaire numéroté C 3.2 A émis par le Fonds de Sécurité d'Existence, qui doit être complété
chaque jour par l'ouvrier, n’est pas le meilleur moyen de lutter contre les abus (chômage et travail
concomitant) qui résultent d’une complicité entre l’employeur et le travailleur. Cette procédure
devrait être remplacée par l'instauration d’une obligation pour l’employeur de communiquer à
l’ONEm par voie électronique tous les jours de chômage temporaire.
 Une attestation de la régularité de l’entreprise
La suppression prochaine du régime de l’enregistrement rend nécessaire la mise à disposition au
profit des particuliers d’un système simple d’attestation prouvant que l’entrepreneur auquel il est
fait appel dispose de l’accès à la profession - et donc des compétences professionnelles - requis pour
le type de travaux à exécuter et qu’il n’a pas de dettes sociales ni fiscales au moment de la conclusion
du contrat.
3. La recherche des équilibres dans la création d’un statut unique pour
les travailleurs
Le rejet du projet d’accord interprofessionnel de janvier 2011 - et des pistes intéressantes qu’il offrait
pour l’harmonisation des statuts de l’ouvrier et de l’employé - a fortement réduit les chances de
régler la question du statut unique du travailleur salarié par la voie d’un accord social.
La Confédération reste cependant persuadée que la concertation entre les partenaires sociaux est la
voie la plus indiquée pour harmoniser les statuts de l’ouvrier et de l’employé et elle s’efforcera de
contribuer à l’adoption d’un accord social interprofessionnel sur ce dossier au cours des prochains
mois.
A défaut d’un accord social, il importe que le gouvernement prenne ses responsabilités et soumette
au parlement, au plus tard au printemps 2013, un projet de loi portant création d’un statut unique du
travailleur salarié. Dans ce contexte, le gouvernement est invité à innover en créant un statut
moderne, équilibré et qui s’inscrit dans la logique des niveaux de protection sociale en vigueur dans
les autres pays de l’Union européenne.
Outre le caractère équitable et réaliste des droits et obligations constituant le nouveau statut,
l'harmonisation des statuts actuels n'est envisageable pour les secteurs ouvriers que si elle
s'accompagne de dispositions transitoires et, surtout, de mécanismes de compensation des coûts
additionnels issus de l'opération. La compensation des coûts est un élément primordial pour la
compétitivité d'un secteur comme celui de la construction qui est composé à 85% de personnel
ouvrier. Le gouvernement doit être conscient des enjeux que représentent la création d’un statut
unique pour les secteurs ouvriers.
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4. Une révision optimale de la réglementation des marchés publics
La Confédération a longuement et activement participé aux travaux de révision de la législation et
des réglementations sur les marchés publics que la Commission des marchés publics a menés au
cours des dernières années dans le cadre du processus de transposition des directives européennes
en droit interne.
Certains points très précis - mais d’une importance cruciale - doivent toutefois être revus car ils ne
répondent pas aux intérêts légitimes des entreprises.
Par ailleurs, certains aspects de la réglementation pourraient utilement être actualisés pour mieux
répondre aux besoins des entreprises et des pouvoirs adjudicateurs.
 La nécessaire restauration des équilibres fondamentaux dans le projet d’arrêté royal
d’exécution
Le projet de nouvel arrêté d’exécution, issu des travaux de révision menés au sein de la Commission
des marchés publics, comporte certaines dispositions qui remettent fondamentalement en cause
l’équilibre des intérêts des parties contractantes, tel qu’il avait été conçu lors de l’adoption des
réglementations initiales.
C’est le cas de la disposition relative à l’indemnisation du préjudice important subi par l’entreprise en
raison de la survenance de circonstances imprévisibles. Cette disposition, qui tend à imposer
l’application d’un seuil (montant minimum du dommage) pour la mise en œuvre du principe de la
réparation, doit être supprimée et remplacée par une disposition qui maintient l’application du
régime actuel, à savoir l’appréciation au cas par cas de la notion de préjudice important. Il en va,
pour certaines entreprises, de leur survie économique.
Au-delà, il importe également de procéder, là où cela s’impose, à une simplification des formalités
administratives, comme par exemple dans les dispositions du projet d’arrêté qui traitent de la
libération du cautionnement, du dépôt de plaintes ou encore de la charge de la preuve. Enfin, il
convient d’inscrire dans le projet d’arrêté les sanctions que la jurisprudence applique en cas de
violation de l’obligation précontractuelle, ainsi que des limitations pour toute forme d’abus.
 L’actualisation de certains aspects du régime de l’agréation des entrepreneurs
L ’agréation pour les marchés publics est accordée aux entreprises de construction qui répondent à
un ensemble de critères techniques, financiers, économiques et administratifs. Outre son rôle
premier de système de présélection, le régime de l’agréation est aussi un outil d’audit périodique
pour la gestion des entreprises et pour le respect de leurs obligations légales dans de nombreux
domaines. C’est dire l’importance qu’il convient d’accorder à ce régime et à son maintien à l’avenir.
Les critères pour l’octroi de l’agréation n’ont pas été actualisés depuis leur adoption dans la loi de
1991 et ses arrêtés d’exécution.
Il convient dès lors de réfléchir à l’opportunité et à la manière d’actualiser ces critères (références en
travaux, chiffre d'affaires, effectifs des ouvriers et des cadres, fonds propres,...) et de revoir leur
pondération de façon à les adapter aux réalités actuelles du secteur de la construction.
Les modes de communication ayant par ailleurs fortement évolué depuis l’adoption du régime, les
textes légaux devront être adaptés afin de permettre que la collecte des pièces justificatives pour
l’établissement du dossier d’agréation se fasse par voie électronique.
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5. Des garanties de qualité pour la protection du consommateur
Le droit de la construction, les normes techniques, les règles de l’art et les conditions d’accès à la
profession qui sont d’application en Belgique constituent ensemble une protection efficace du client
de l’entrepreneur contre les malfaçons et autres vices de construction. Certes, tout n’est pas parfait
dans ce domaine. Des manquements graves sont parfois constatés dans les mécanismes de
protection, mais ils sont la plupart du temps le résultat d’une mauvaise information du
consommateur. Des solutions peuvent être apportées à ces situations sur la base des propositions
suivantes:
 Une meilleure connaissance de la loi "Breyne" et un meilleur contrôle de son
application
La loi Breyne a pour but d’assurer la protection du candidat bâtisseur ou de l’acquéreur d’une
habitation à construire. Les dispositions de cette loi, dont la plupart sont impératives (et donc non
sujettes à dérogation dans les contrats individuels) offrent au consommateur un niveau élevé de
protection. Cette loi ne requiert dès lors aucune adaptation de fond pour protéger le consommateur
de manière adéquate.
La pratique a toutefois révélé de nombreux exemples de situations dans lesquelles la loi n’a pas été
appliquée ou respectée dans sa totalité, parfois de manière délibérée mais généralement par
ignorance.
Une double action s’impose dans ce contexte: d’une part mieux faire connaître la loi et la portée de
ses mécanismes protecteurs auprès du public et, d’autre part, instaurer un contrôle de la conformité
à la loi du contrat signé par le consommateur, plus particulièrement par rapport à la constitution des
garanties de solvabilité que la loi impose aux entrepreneurs et promoteurs de fournir.
Un tel contrôle pourrait notamment être exercé lors de la passation de l’acte d’emprunt
hypothécaire relatif à un contrat d’entreprise visé par la loi Breyne, la majorité des contrats de
construction passés avec un particulier faisant l’objet d’un financement par une institution agréée.
Ce dispositif, dont la mise en œuvre est simple, présente l’avantage de renforcer la protection des
consommateurs tout en préservant un juste équilibre des intérêts en présence.
 Un examen approfondi et objectif de l’opportunité d’une assurance obligatoire de la
responsabilité des entrepreneurs
Une initiative parlementaire en 2010 a permis de rassembler les opinions de différents milieux
(entrepreneurs, architectes, assureurs, promoteurs,…) sur l’introduction en droit belge d’une
obligation d’assurance de la responsabilité professionnelle de l’entrepreneur, en ce compris sa
responsabilité décennale, et des autres intervenants dans l’acte de construire.
La Confédération doute qu’une obligation d'assurance de la responsabilité des entrepreneurs offre
une garantie utile au consommateur, dans la mesure où une assurance obligatoire a un effet
déresponsabilisant sur les parties au contrat et qu’elle entraîne des coûts supplémentaires très
élevés, comme certains exemples à l'étranger le confirment.
Le gouvernement devrait utilement mener une réflexion approfondie sur la valeur ajoutée que peut
présenter une assurance obligatoire de la responsabilité professionnelle par rapport au mode actuel
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de réparation en nature, par l’entrepreneur lui-même, dans le cadre de son obligation contractuelle
de fournir un travail de qualité effectué selon les règles de l’art.
Dans ce contexte, la Confédération se déclare ouverte au dialogue sur toute initiative susceptible de
renforcer les garanties de protection du consommateur dans le respect de l’équilibre des intérêts des
parties au contrat.
 La nécessité de veiller à la cohérence dans les règles d’accès à la profession
La législation relative aux conditions d’établissement est incontestablement, par le biais des
connaissances techniques qu’elle impose aux futurs entrepreneurs, un outil de protection du
consommateur.
Le transfert des compétences en matière d’accès à la profession aux Régions suscite une inquiétude
légitime dans le chef des entreprises de construction, qui sont nombreuses à travailler dans les
différentes régions du pays et qui craignent de se voir imposer des traitements différenciés selon la
région de la prestation ou de voir s’amenuiser les conditions de qualification.
Il importe, tant pour des raisons de concurrence entre entreprises que pour la garantie de qualité à
offrir aux consommateurs, de maintenir des règles uniformes d’accès à la profession dans les trois
régions. Le gouvernement fédéral, dans l’application des compétences résiduaires qu’il conserve en
matière d’accès à la profession, est invité à prendre les initiatives qui s’imposent pour aboutir aux
objectifs souhaités.
6. Des outils pour accompagner les entreprises dans leur
développement
 Le soutien dans l’accès au crédit
La crise des années 2009-2010 a montré que l’entrepreneur confronté à un refus de sa demande de
crédit a abandonné la plupart du temps le projet pour lequel il recherchait des moyens de
financement.
La situation actuelle en matière de crédit n’est pas totalement comparable à celle des années
précitées, caractérisées par une véritable pénurie des financements ("credit crunch"). Elle présente
toutefois de nombreuses similitudes, sous l’angle plus particulièrement du renforcement des
conditions de crédit. La persistance des difficultés économiques et les règles de gestion plus strictes
imposées au monde financier ont amené les prêteurs à se montrer plus exigeants dans leurs critères
de sélection et leurs demandes de garanties.
Des solutions existent pour éviter que les entreprises confrontées à un refus de crédit ne renoncent
immédiatement à leur projet. Le recours au médiateur de crédit est une de ces solutions, dont
l’efficacité a été prouvée lors de la crise des années 2009-2010.
Afin de faire connaître aux entreprises l’existence de cette voie de recours, il est essentiel d’imposer
que toute décision de refus de crédit s’accompagne à la fois d’une mention bien visible informant
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l’entreprise de la possibilité d’un recours devant le médiateur de crédit et d’un document annexé
décrivant la mission et les interventions du médiateur.
 L’aboutissement de la réforme de la mercuriale des matériaux de construction
La mercuriale des matériaux de construction note l'évolution du prix de divers matériaux et permet
ainsi le bon fonctionnement des formules de révision, qui sont notamment utilisées dans les marchés
publics de travaux.
Le Conseil central de l’économie a procédé à un examen approfondi de la mercuriale dans un objectif
de réformer un outil bien utile mais qui avait vieilli. Le Conseil, après avoir actualisé la liste des
matériaux de référence, a conclu, dans un avis circonstancié, à la nécessité de maintenir un système
performant de suivi de l'évolution des prix des matériaux de construction et a proposé un ensemble
de mesures qui constituent un véritable cahier des charges pour une réforme de la mercuriale.
Il est grand temps, après la longue période de gestion des affaires courantes de l’ancien
gouvernement, de donner enfin suite à l’avis du Conseil central de l’économie et de mettre en œuvre
la réforme de la mercuriale, sur la base des propositions inscrites dans cet avis. La Confédération
invite dès lors le gouvernement à entamer ce travail de réforme dans les meilleurs délais.
On rappellera utilement dans ce contexte que les pouvoirs publics sont tenus de mettre à disposition
des indices de prix qui permettent d’établir des formules de révision reflétant les coûts du marché. La
nouvelle règle qui autorise, par exception, et donc dans des conditions très strictes, d’établir une
révision sur la base de l’indice des prix à la consommation ne change rien au principe général de la
révision sur la base des coûts du marché.
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