Rapport d`activite de l`Observatoire de la

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Rapport d`activite de l`Observatoire de la
Publication annuelle
de l’Observatoire de la Corruption et
du Développement de la Transparence
Lutte contre la corruption en 2013 :
sous le signe de l’impunité ?
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Projet financé par Transparency International
Association reconnue d’utilité publique
Publication annuelle
de l’Observatoire de la Corruption
et du Développement de la
Transparence
Lutte contre la corruption en 2013 :
sous le signe de l’impunité ?
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
3
4
Table des matières
La corruption au Maroc : sous le signe de l’impunité ?
7
Chronologie des faits marquants
8
1. La campagne de sensibilisation anti-corruption du gouvernement jugée
mauvaise8
2. La mission d’assainissement du gouvernement Benkirane cantonnée à une
simple publication de listes 8
3. Appel d’offre visant à élaborer «une stratégie nationale de prévention et de
lutte contre la corruption » lancé par le gouvernement sous la pression de la
société civile
9
4. La réforme du système judiciaire contestée par les professionnels du secteur 9
5. Le projet de loi sur le droit d’accès à l’information du gouvernement et les
propositions de lois jugés lacunaires par les acteurs de la société civile
11
6. L’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) :
à quand la réforme ?
12
7. Le Dialogue national sur la société civile boycotté par plusieurs associations
dont Transparency Maroc : 13
8. Réforme du Conseil de la concurrence : l’adoption de la loi traîne 14
9. La mise en œuvre de la Constitution de 2011 laisse à désirer
15
10. L’entrée en vigueur de la réforme des marchés publics reportée à 2014
16
11. Baisse du prix des médicaments : sous la puissance de feu des lobbies ? 16
12. Des témoins et dénonciateurs de la corruption poursuivis en justice
17
13. La réforme du code pénal en matière des peines encourues
pour corruption jugée insuffisante
18
14. La décision controversée du Conseil constitutionnel d’exonérer du contrôle
du Parlement les conseils royaux et certaines instances de gouvernance 19
15. Le projet controversé du gouvernement d’accorder une prime
de départ aux détenteurs d’agréments de transport, avorté
20
16. La campagne de communication « Non à l’impunité » lancée par
Transparency Maroc censurée
21
17. Amnistie sur les avoirs illégalement détenus à l’étranger : la mesure de la
discorde 22
Lutte contre la corruption : les rapports qui accablent le Maroc
24
Actes de corruption et infractions apparentées :
apercu des secteurs les plus touchés
34
Prix de l’Intégrité 2013 de Transparency Maroc
47
Indicateurs statistiques 47
1. Rapports internationaux
2. Rapports nationaux
24
28
1. Gouvernance locale et les méfaits de la corruption
34
2. Système judiciaire : la réforme impossible?
39
3. Police, gendarmerie, forces auxiliaires et douane 41
4. Corruption dans le secteur du commerce : le cas du marché de gros de fruits
et légumes à Casablanca, une foire aux dysfonctionnements et des procédures
interminables43
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La corruption au Maroc : sous le signe de l’impunité ?
L’année 2013 s’en est allée en laissant derrière elle un lot de déceptions et le sentiment
d’une corruption désormais bien installée et semble-t-il pour longtemps encore.
De nouvelles affaires sont venues alourdir un passif déjà très lourd face à une justice
rendue impuissante par sa lenteur (délibérée?). Ainsi des procès portant sur le détournement d’importantes sommes d’argent n’en finissent pas de traîner (CNSS, marché de
gros, Mutuelle Générale des administrations publiques etc.) au point de douter du rôle
dissuasif d’un système judiciaire de plus en plus affaibli et que 70% des marocains considèrent comme corrompu selon le dernier baromètre de Transparency international.
Cette justice censée punir le corrompu et sévir pour dissuader ne fait peur à personne
tant elle paraît désarmée et incapable.
Tous les indicateurs accablent le Maroc ; baromètres, indices et rapports internes et
internationaux confirment que la corruption manque d’adversaires et de réelle volonté
de la combattre.
Si Transparency Maroc a placé cette année son combat sous le signe de « non à l’impunité », c’est qu’elle considère l’impunité persistante comme l’un des facteurs principaux
encourageant la corruption, et ceux qui ont saboté cette campagne en arrachant les
affiches s’abritent derrière cette impunité dont ils savent tirer avantage et qu’ils ne
souhaitent pas voir disparaître.
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Chronologie des faits marquants
Les évènements ayant marqué l’année 2013 sont résumés dans cette publication annuelle et concernent principalement :
1. La campagne de sensibilisation anti-corruption du gouvernement
jugée mauvaise
Début 2013, L’Economiste daté du 07 janvier qui a consacré sa rubrique Analyse, au
ministère en charge des affaires générales et de la gouvernance, a passé en revue les
détails des chantiers que Najib Boulif, ministre de tutelle à l’époque, a jugés prioritaires.
Revenant sur la campagne anti-corruption lancée par le gouvernement en décembre
2012, M. Boulif avait lui-même reconnu que « la publicité qui passe actuellement sur
la corruption est mauvaise. Le message n’est pas assez clair et l’on risque d’avoir l’effet
inverse. » M. Boulif aurait souhaité que cette campagne à l’initiative du ministère de
la fonction publique et de la modernisation de l’administration, mette en avant l’existence d’une loi, de sanctions et le fait que la corruption peut conduire en prison. Pour
M. Boulif, au-delà des stratégies, la lutte contre la corruption nécessite un changement
de mentalité ainsi que le respect des lois.
Déjà en décembre 2012, dans une lettre ouverte, Transparency Maroc avait fustigé
l’équipe Benkirane, pour son absence de stratégie claire et son inaction face à la corruption. La campagne de sensibilisation (spots TV, affichage) a été jugée «inappropriée»
et «contre-productive» par Transparency Maroc en l’absence d’une stratégie claire. «Le
contenu des spots est médiocre. Il jette la responsabilité surtout sur le citoyen et ne
tient compte que de la petite corruption. C’est une insulte à l’intelligence des Marocains» estimait à l’époque A. Saddouq, secrétaire général de Transparency Maroc (Lakome, 22/08/2013).
2. La mission d’assainissement du gouvernement Benkirane
cantonnée à une simple publication de listes
La liste des résidents des cités universitaires dévoilée par le ministère de l’éducation
nationale : après Aziz Rabbah et sa liste des agréments en 2012, Lahcen Daoudi, ministre
de l’enseignement supérieur, a rendu publique en janvier 2013 la liste des résidents des
cités universitaires du pays. Promise par M. Daoudi en décembre 2012, la liste avait
pour but de révéler les étudiants matériellement « non éligibles » à bénéficier d’un lit
dans une cité universitaire. Les étudiants de familles aisées étaient dans le collimateur
du ministère (Le Soi échos, Haraka, Attajdid, Akhbar Al Yaoum, Sahara Maghribia, Al
Nahar Al Maghribia, Assabah, Al Akhbar, 07/01/2013).
Publication de la liste d’entreprises susceptibles d’être exclues des marchés publics
par le ministère de l’éducation nationale : le ministère de l’éducation nationale a publié une liste de 44 entreprises susceptibles d’être exclues temporairement (31 entreprises) ou définitivement (13 entreprises) des marchés publics dans le cadre de l’audit
du programme d’urgence 2009-2012. Selon un communiqué du ministère publié mardi
08 janvier 2013, une opération d’audit, élaborée en coordination avec les académies
régionales de l’éducation et de la formation, a permis « de déceler un ensemble de
dysfonctionnements lors de l’exécution des marchés au niveau régional et national,
résultant du non-respect des termes des contrats établis ». La décision de publier cette
liste intervient à la suite « des dysfonctionnements et de leurs répercussions négatives
8
sur le cours normal du processus éducatif ou sur la garantie des conditions de scolarité dans les établissements scolaires », explique le ministère. Les déséquilibres ont
concerné 124 marchés publics confiés à 74 entreprises pour une enveloppe financière
estimée à 400 millions DH, ajoute la même source (Infomédiaire, L’Economiste, Libération, 08/01/2013).
Le ministre de l’éducation nationale s’attaque aux académies régionales : Mohamed
El Ouafa, ministre de l’éducation nationale, a continué sa mission d’assainissement en
s’attaquant aux trésoreries des académies régionales d’éducation. Cette décision fait
suite aux recommandations relevées par l’audit 2009/2012 qui constate la mauvaise gestion des budgets au sein de ces entités. Le ministre a ainsi décidé que son département
ne débloquera désormais les budgets qu’en fonction de l’état d’avancement des projets
de construction des écoles (Challenge, 11-17/01/2013).
Publication de la liste des fédérations sportives bénéficiant des subventions de l’Etat :
Mohamed Ouzzine, ministre de la jeunesse et des sports, a publié en janvier 2013 sur
le site web de son département la liste des fédérations sportives qui bénéficient des
subventions financières de l’Etat. Ouzzine a déclaré au Parlement que « désormais,
toutes les fédérations sportives seront contrôlées et qu’il n’y aura plus de népotisme ni
de clientélisme» (Al Khabar, 09/01/2013).
3. Appel d’offre visant à élaborer «une stratégie nationale
de prévention et de lutte contre la corruption » lancé par le
gouvernement sous la pression de la société civile
Lutte contre la corruption : une «stratégie nationale» livrée début 2015 : le ministère
délégué chargé de la fonction publique et de la modernisation de l’administration,
rattaché à la primature et dirigé à l’époque par Abdelâdim El Guerrouj, a lancé le 16
août 2013 un appel d’offre visant à élaborer «une stratégie nationale de prévention et
de lutte contre la corruption». L’ouverture des plis avait été prévue pour octobre 2013.
Cette stratégie nationale était réclamée depuis longtemps par les acteurs de la société
civile comme Transparency Maroc ou l’Instance Centrale de prévention de la corruption
(ICPC). «Nous considérons que c’est la priorité des priorités et qu’il était plus que temps
de s’y atteler. Nous comptons y apporter notre contribution engagée, vigilante et de
qualité», explique à Lakome le président de l’ICPC, Abdeslam Aboudrar. Selon le cahier
des charges, l’étude «portera sur toutes les dimensions de la société marocaine (secteur
public, secteur privé et société civile)» et sera divisée en quatre phases : état des lieux,
conception de la stratégie et du mécanisme de suivi puis accompagnement des projets
pilotes. Le délai total de réalisation est fixé à 15 mois (Lakome, Les Eco, 22/08/2013).
4. La réforme du système judiciaire contestée par les professionnels
du secteur
A l’issue du Dialogue national sur la réforme de la justice, le gouvernement a présenté sa feuille de route qui doit permettre de renforcer l’indépendance de la justice
et de combattre plus efficacement la corruption. La Charte de la réforme du système
judiciaire, dévoilée jeudi 12 septembre à Rabat, comprend six points stratégiques.
Elle consiste notamment à renforcer l’indépendance et l’efficacité du pouvoir judiciaire, moraliser son fonctionnement ou encore à consolider la protection des droits de
l’Homme et des libertés. « C’est une plateforme pour le futur, qui dépasse les ministres
et les gouvernements », a déclaré le ministre de la justice et des libertés, Mustafa Ramid. La Charte est intervenue au terme d’un processus de dialogue national inauguré
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en mai 2012, et mené par la Haute instance du dialogue national sur la réforme de la
justice, composée de 40 membres, dont M. Ramid, mais aussi de magistrats, de juristes,
d’enseignants, d’ONG et d’experts. Le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, a
estimé que la Charte constituait une feuille de route, et que le gouvernement mettrait
en œuvre tous les outils nécessaires pour faire réussir ce chantier. « On ne peut concevoir l’évolution d’un pays sans un système judiciaire dont les maîtres mots sont l’indépendance, la moralisation et la transparence », a déclaré M. Benkirane (Jeuneafrique,
MAP, Le Matin, Infomédiaire, L’Economiste, Al Bayane, La Tribune, Al Massae, Assabah,
Attajdid, Akhbar Al Yaoum, 16/09/2013).
S’agissant de la concrétisation des recommandations de cette réforme, les rédacteurs
de la Charte ont apporté des réponses détaillées dans le cadre de ce qu’ils appellent le
« Plan opérationnel pour l’exécution de la Charte de la réforme du système judiciaire. »
Le plan pour la réalisation des propositions émises dans la Charte s’étend jusqu’à la fin
de l’année 2020. Mais, la plupart des axes de la Charte seront exécutés entre 2013 et
2015 selon Mustafa Ramid, ministre de la justice et des libertés. « Environ 90% de la
réforme du système judiciaire seront réalisés entre 2014 et 2015. Une seule partie de
la réforme sera réalisée définitivement en 2020 et concerne la juridiction numérique.
C’est un chantier qui avait été lancé bien avant l’élaboration de la Charte, mais que
nous allons accélérer pour qu’il soit réalisé en 2018, c’est-à-dire bien avant la fin de
2020. Ce projet demande du temps parce qu’il implique plusieurs professions : avocats,
notaires, police judiciaire. L’objectif de la juridiction numérique est de pouvoir se passer
du papier », a souligné M. Ramid qui a également indiqué que la mise en œuvre de la
réforme coûtera plus de 2 milliards de DH (Le Matin, Aujourd’hui Le Maroc, 16/09/2013).
Les professionnels ont critiqué la Charte de la réforme du système judiciaire. A la suite
de la publication à la mi-septembre des résultats de la Charte, une salve de critiques
de la part des professionnels a immédiatement suivi. Avocats, magistrats et greffiers se
sont attaqués à la mouture, présentée par le ministère de la justice et des libertés, tant
sur le plan de la forme que du fond. Les professionnels de la justice ont engagé une
véritable offensive à l’encontre du département dirigé par Mustafa Ramid. (Les Eco,
07/11/2013)
Les avocats ont également manifesté leur colère. Ils ont organisé un sit-in devant le
Parlement, vendredi 29 novembre, à l’appel de plusieurs organisations syndicales du
secteur. Selon les organisateurs, près de 2 000 avocats ont fait le déplacement à Rabat
(L’Economiste, Aujourd’hui Le Maroc, Le Reporter, Al Massae, Assabah, 02/12/2013).
En dehors de la Charte de la réforme du système judiciaire, les projets de loi organiques proposés par le ministre concernant le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire
et le statut des magistrats sont également contestés. Le projet de loi sur la profession
de magistrat et celui portant sur le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire sont ainsi
jugés « insatisfaisants » par les associations représentatives des magistrats. (L’Economiste, 07/11/2013).
Le ministère de la justice a pris soin de remettre les deux projets de loi au Conseil supérieur de la magistrature pour avis et à plusieurs organisations pour consultation. Les
grandes lignes du texte élaboré par le ministère relatif au Conseil supérieur du pouvoir
judiciaire couvrent une dizaine de volets. Les plus importants concernent : la garantie de
l’indépendance de ce Conseil ; les mécanismes de l’élection de ses membres, y compris
la place accordée aux femmes magistrats ; les mesures disciplinaires ; le rôle du Conseil
dans la moralisation de la justice ; la garantie de l’indépendance des magistrats. Quant
au deuxième texte relatif au statut des magistrats étroitement lié au premier, il insiste
sur l’unité de la magistrature, les principes et les critères de l’accès à la magistrature,
l’organisation de l’évolution des magistrats, l’évaluation du rendement des magistrats,
10
leurs devoirs et obligations, ainsi que le régime disciplinaire. » (Le Matin, Aujourd’hui
Le Maroc, Libération, 26/10/2013).
Par ailleurs, une étude réalisée par l’Association « Justice : pour le droit à un procès
équitable » et rendue publique en octobre 2013 notait qu’une réforme générale qui
garantit l’indépendance de la justice requiert le développement, la moralisation et la
mise à niveau des capacités du système judiciaire à même de permettre aux magistrats
d’être capables de remplir leur fonction en toute indépendance. La proclamation de
l’indépendance du pouvoir judiciaire devrait signifier non seulement l’indépendance
des institutions judiciaires, mais aussi l’indépendance des personnes qui exercent le
pouvoir judiciaire ou qui rendent la justice, a indiqué Mohamed Bouzlafa, auteur de
l’étude sur « L’indépendance du pouvoir judiciaire au Maroc », présentée vendredi 11
octobre à Rabat. Selon l’étude, les juges doivent non seulement être indépendants,
mais être perçus comme tels, car il existe un rapport étroit entre l’indépendance d’un
juge pris individuellement et celle du tribunal où il siège (Al Bayane, 14/10/2013).
Statut de la magistrature, réorganisation de l’expertise judiciaire, réforme de la loi sur
la profession d’avocat… beaucoup de textes sont attendus et le débat promet d’être
houleux.
5. Le projet de loi sur le droit d’accès à l’information du
gouvernement et les propositions de lois jugés lacunaires par les
acteurs de la société civile
Le 26 mars 2013, le gouvernement Benkirane a publié sur le site du Secrétariat général
du gouvernement l’avant-projet de loi sur le droit d’accès à l’information (DAI). Le
projet comporte 13 restrictions alors que l’article 27 de la Constitution a mentionné
uniquement « la défense nationale, la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat, ainsi
que la vie privée des personnes ». Le gouvernement a ajouté « les relations avec un Etat
tiers ou une organisation internationale », les informations pouvant porter préjudice à
la « capacité de l’Etat à gérer sa politique monétaire, économique et financière », « les
délibérations du gouvernement », « les enquêtes et les investigations administratives
» et « une politique gouvernementale en phase de préparation qui ne nécessite pas
une consultation des citoyens ». Le texte entend donner à une commission de onze
membres la mission de répondre aux demandes des citoyens. Elle est composée d’un
juge du tribunal administratif et d’un autre de la Cour de cassation, proposés par le
Conseil supérieur de la magistrature, deux représentants de la fonction publique désignés par le chef du gouvernement, deux membres du Parlement, et des délégués de
l’Instance centrale de prévention de la corruption, des Archives du Maroc, du CNDH, de
la société civile proposés par le président du CNDH et de la Commission nationale de
protection des données personnelles (Yabiladi, Al Akhbar, Akhbar Al Yaoum, Al Massae, Attajdid, 28/03/2013).
La société civile critique l’avant-projet du gouvernement relatif au droit d’accès à l’information : l’UNESCO et Transparency Maroc ont été les premiers à manifester leurs
réserves quant au projet de loi no 31-13 sur le droit d’accès à l’information à la suite de
sa publication le 26 mars 2013 sur le site du Secrétariat général du gouvernement. Le
Réseau marocain pour le droit d’accès à l’information (REMDI) leur a ensuite emboîté le
pas en affirmant aussi ses réticences. Lors d’une journée d’étude organisée vendredi 19
avril 2013, le REMDI a évoqué le volet de la méthodologie qui, selon lui, pose problème.
Abderrahim Foukahi, coordinateur du réseau, martèle que « la société civile n’a pas été
consultée pour l’élaboration du texte et qu’il a été préparé à l’insu de la majorité des
forces de proposition qui militent pour ce droit depuis bientôt 10 ans. ». Si toutes les
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informations relatives à la sécurité de l’Etat et relevant de la défense nationale ne sont
pas forcément secrètes, l’intégration des libertés fondamentales dans les exceptions
de l’article 19 « n’est pas compréhensible et ne repose sur aucun fondement juridique
constitutionnel » (L’Economiste, Aufait, Le Matin, 22/04/2013).
Par ailleurs, l’avant-projet du gouvernement a retenu l’attention même sur la scène
internationale. En effet, l’ONG britannique « article 19 » s’est invitée au débat. L’ONG
qui a fait une analyse détaillée de l’avant-projet du gouvernement marocain sur le DAI
sur la base des normes internationales, à l’instar des avis des ONG marocaines qui n’ont
pas été consultées et des partis de l’opposition, reproche à ce texte ses nombreuses
restrictions qui ne sont pas faites pour faciliter la mise en application de l’article 27
de la Constitution. Tout en se félicitant d’un certain nombre d’éléments positifs dans
ce projet de loi, « Article 19 » a émis quelques recommandations dont notamment la
révision de ce texte pour qu’il concorde avec les normes internationales. Il recommande
que le droit d’accès à l’information et aux documents ne soit pas limité aux seuls citoyens marocains et personnes morales, mais aussi à toute personne, physique ou morale, quelle que soit sa nationalité. Pour demander une information, « Article 19 » juge
qu’une nouvelle disposition devrait être ajoutée au projet de loi, soulignant que nul ne
peut être obligé de fournir une justification ou une raison pour ce faire. Entre autres
recommandations, l’ONG britannique souligne que toutes les personnes devraient être
autorisées à déposer une demande par voie orale, et pas seulement celles qui sont incapables de le faire par écrit (Libération, L’Economiste, 07/05/2013).
La société civile et les spécialistes ont également relevé les ambiguïtés de la proposition de loi de l’USFP sur le droit d’accès à l’information. Dans une déclaration à L’Economiste daté du 26 août 2013, Abdellah Harsi, professeur de droit public et membre
du Conseil national de Transparency Maroc, a critiqué la proposition de loi de l’USFP
sur le DAI. Selon M. Harsi « dans la deuxième partie, il y a confusion à partir de l’article
6 entre les informations qui doivent être fournies sur demande et celles que les organismes assujettis doivent publier de manière proactive. Or, les deux sont différentes
tant du point de vue de la procédure applicable que du droit des citoyens à les réclamer et porter des recours. La place réservée dans la proposition de loi à la publication
proactive des informations est très importante quant à sa portée, mais très réduite. »
« S’agissant des exceptions au droit d’accès à l’information, affirme M. Harsi, la proposition de loi adopte une démarche absolue, en ajoutant même les délibérations du
conseil des ministres. En effet, les informations relatives aux domaines de la défense
nationale, de la sécurité de l’Etat, aux relations extérieures ou à tout ce qui revêt un
aspect stratégique – autre expression ambiguë et trop généralisante -, sont exclues
du droit d’accès à l’information, sans que la proposition de loi ne mette à part celles
relatives à ces domaines et qui peuvent être divulguées si cela ne porte pas atteinte à
l’intérêt général. Autrement dit, il faut opter pour les exceptions relatives, comme c’est
le cas dans les législations comparées. »
D’une manière plus globale, le projet du gouvernement tout comme la proposition de
l’UFSP en matière du DAI n’ont pas échappé aux critiques des observateurs avertis qui
se posent aujourd’hui des questions. En attendant que le texte sur le DAI soit définitivement adopté et promulgué, le débat se poursuit.
6. L’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) : à quand
la réforme ?
Des débats animés ont eu lieu en 2013 autour des attributions de l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption consacrée par
12
la Constitution de 2011. Après l’atelier organisé le 22 janvier 2013 par Transparency
Maroc sur le projet de loi devant régir l’Instance nationale de la probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption, une journée d’étude a été organisée mercredi
30 janvier à Rabat autour de la même question. C’est l’Instance centrale de prévention
de la corruption (ICPC) qui a été à l’origine de cette rencontre à laquelle ont pris part
les représentants de la société civile et des médias. L’objectif, selon Abdeslam Aboudrar,
président de l’ICPC, est de mener une réflexion concertée autour du nouveau cadre
juridique en gestation censé renforcer les pouvoirs de l’instance. Pour Aboudrar, « cette
rencontre constitue pour l’ICPC, une étape importante entrant dans le sillage de la
démarche participative qui, d’une part, encadre le travail de l’instance et, d’autre part,
répond aux impératifs de la gouvernance participative, plus que jamais nécessaire pour
le fonctionnement des institutions » (Le Matin, Les éco, Aujourd’hui Le Maroc, Le Soir
échos, L’Economiste, Infomédiaire, Libération, Aufait, Attajdid, Al Mounataf, Rissalat
Oumma, Al Ahdath Al Maghribia, 31/01/2013).
Depuis lors, la réforme de l’Instance traîne. Aucune date précise n’est fournie quant à
l’adoption de la loi sur la nouvelle Instance nationale de la probité, de la prévention et
de la lutte contre la corruption.
7. Le Dialogue national sur la société civile boycotté par plusieurs
associations dont Transparency Maroc :
Le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, a procédé, mercredi 13 mars 2013 à
Rabat, au lancement officiel du Dialogue national sur les nouvelles prérogatives constitutionnelles de la société civile, qui ambitionne de consacrer les principes de la démocratie participative, d’élaborer une charte d’éthique nationale en la matière et d’élargir
la participation des composantes de la société civile dans la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques. A l’occasion de cette cérémonie, il a été procédé à l’installation des membres de la Commission du dialogue national sur la société civile, dont
la présidence a été confiée à Ismaïl Alaoui, et qui comprend parmi ses membres des
représentants de départements gouvernementaux et de la société civile (Infomédiaire,
L’Economiste, Akhbar Al Yaoum, Ittihad Al Ichtiraki, Al Akhbar, 14/03/2013).
Cependant, le ce dialogue national a été boycotté par plusieurs associations. Invités
à rejoindre la commission du dialogue national sur la société civile, les représentants
de certaines associations ont choisi de le boycotter. L’Association démocratique des
femmes du Maroc (ADFM) en fait partie. Khadija Rebbah, membre de l’ADFM explique
que la décision de refuser la participation à la commission vient du fait que le ministère a nommé des personnes physiques et non pas des associations. Khadija Rebbah
faisait partie de la commission de préparation du dialogue national sur la société civile
mais a choisi de se retirer « à cause du manque de transparence » et du fait que « les
recommandations de la commission de préparation n’ont pas été prises en compte ».
« Nous boycottons la commission, non pas le dialogue », a précisé Khadija Rebbah.
Contacté par Le Soir échos, le président de la commission, Ismaïl Alaoui, a estimé que
les personnes désignées « ne peuvent pas se défaire de leur identité liée à leur rôle dans
leurs associations respectives. » « Le choix est peut-être arbitraire, mais j’estime qu’il est
pertinent », conclut Alaoui (Le Soir échos, Les éco, 14/03/2013).
Transparency Maroc ainsi que d’autres ONG ont également dénoncé un dialogue contre
la société civile. Les ONG qui ont en tout cas un poids, une visibilité et un vrai bilan ne
participent pas au Dialogue national sur la société civile lancé par le gouvernement.
Elles ont claqué la porte pour protester contre l’exclusion et un dialogue sur mesure,
taillé par le ministère des relations avec le Parlement et la société civile, commente un
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acteur associatif. Dans un communiqué daté du 19 mars 2013, le bâtonnier Abderrahim
Jamaï, fondateur de l’Observatoire marocain des prisons et coordinateur de la Coalition
marocaine contre la peine de mort, a fustigé la méthode « Choubani » et a dit refuser
catégoriquement de se faire complice d’une initiative qui a décidé de marginaliser la
société civile et d’un dialogue « en complète contradiction avec les acquis du 20 février
». (Libération, La Vie éco, La Tribune, 21/03/2013).
Dans un entretien accordé au quotidien arabophone Al Massae daté du 14 mars 2013,
Rachid Filali Meknassi, membre de Transparency Maroc, interrogé sur sa décision de
boycotter le dialogue national sur la société civile, souligne : « d’abord, il faut savoir
que j’étais convoqué en tant qu’expert pour participer au dialogue. Cependant mes
collègues qui ont participé aux réunions préparatoires de la première rencontre du dialogue m’ont informé qu’ils se sont retirés car les conditions du dialogue n’étaient pas
réunies ». « La décision prise par plusieurs associations de boycotter le dialogue national témoigne des conditions de tenue de ce dialogue. Car il s’agit bien d’associations
qui militent pour la défense de la citoyenneté et la gestion participative de la chose
publique comme le prévoit la Constitution.
Malgré le boycott de nombreuses associations, la commission du dialogue national sur
la société civile, présidée par Moulay Ismaïl Alaoui, a présenté sa plateforme et son programme lors d’une conférence de presse tenue mardi 28 mai 2013 à Rabat. La fin des
travaux du dialogue national sur la société civile est prévue pour 2014. En outre, le ministère chargé des relations avec le Parlement prévoit d’organiser des assises consacrées
à la société civile en 2014. En attendant, Moulay Ismaïl Alaoui, qui était accompagné
du ministre chargé des relations avec le Parlement et la société civile, Lahbib Choubani,
a présenté le mode d’organisation de la commission qu’il préside. Celle-ci a été scindée
en trois sous-commissions : la première dite « législative » devait interpréter les articles
de la Constitution de 2011 relatifs à la société civile et proposer des textes qui seront
par la suite élaborés sous forme de projets de loi ou de propositions de lois… ; la deuxième sous-commission devra mener les consultations avec les militants associatifs. Les
citoyens seront également impliqués dans les débats via des séances d’écoute… ; quant
à la troisième sous-commission, elle devra élaborer la charte nationale de la démocratie
participative (L’Economiste, Le Matin, Al Bayane, Akhbar Al Yaoum, 29/05/2013).
La détermination de la commission n’empêchera pas la société civile de créer un mouvement alternatif. En effet, le réseau des ONG qui ont boycotté le Dialogue national sur
la société civile a décidé de lancer ses propres consultations. Quelques mois seulement
après le lancement officiel du dialogue national sur la société civile, initié par le gouvernement, un dialogue parallèle a été prévu à partir du 22 juin par une autre composante
de la société civile qui, visiblement, n’est pas très convaincue par l’approche adoptée
par le département de Lahbib Choubani. C’est une initiative qui vise à « contourner les
velléités que le gouvernement pourrait avoir sur les associations », estime Kamal Lahbib, président du Forum des alternatives du Maroc. Il s’agit d’une opération réfléchie
par de nombreuses associations qui agissent à travers le Forum des alternatives du Maroc et bien d’autres ONG qui avaient signé ce qu’elles avaient appelé, le 11 avril 2013
« l’appel de Rabat. » Les ONG regroupées dans le cadre de l’appel de Rabat ont lancé
un cycle d’assises régionales sur le thème « Le mouvement associatif à la lumière des
nouvelles dispositions constitutionnelles : enjeux et défis. » Ces rencontres régionales
seront clôturées par une rencontre nationale qui devra permettre la formulation des
conclusions de toutes ces assises (Le Matin, Libération, 21/06/2013).
8. Réforme du Conseil de la concurrence : l’adoption de la loi traîne
14
Le conseil du gouvernement a examiné et adopté, lors de sa réunion hebdomadaire
tenue jeudi 31 janvier 2013 à Rabat, le projet de loi n° 13-20 relatif au Conseil de la
concurrence. Présenté par le ministre délégué auprès du chef du gouvernement chargé
des affaires générales et de la gouvernance, ce projet de loi vise à conférer au Conseil
de la concurrence le rôle qui lui échoit en matière de régulation du marché. Ce projet
de loi s’inscrit dans le cadre de la déclinaison des dispositions de la Constitution, notamment l’article 166, qui a érigé le Conseil en institution constitutionnelle indépendante.
L’adoption de ce texte de loi représente un pas important dans le processus de mise en
œuvre de la Constitution compte tenu du fait que le Conseil de la concurrence est une
instance indépendante chargée de garantir la transparence et l’équité en matière de
relations économiques. Cet organisme est également appelé à analyser et réguler les
relations au sein des marchés (Le Matin, Attajdid, 02-03/02/2013).
Cependant, depuis l’adoption du projet de loi en Conseil du gouvernement, son évolution au niveau du Parlement prend énormément de temps. L’année 2013 s’est achevée
sans que la loi n’ait pu être adoptée. Le conflit de compétences entre le Conseil de
la concurrence et l’Agence nationale de règlementation des télécommunications sont
évoqués comme l’une des raisons qui bloquent l’évolution du texte dans le processus
législatif. (Les Eco, Le Matin, MarocHebdo, Challenge, 28/05/2013).
9. La mise en œuvre de la Constitution de 2011 laisse à désirer
Bilan de la mise en œuvre de la Constitution de 2011 : deux ans pour rien. TelQuel du
28 juin au 04 juillet 2013, a établi un bilan de la mise en œuvre de la Constitution de
2011 dans un dossier intitulé « Constitution : deux ans pour rien ». TelQuel y souligne
notamment : « un paradoxe illustre assez bien le degré de volonté politique qui a présidé à la réforme constitutionnelle : il nous a fallu moins de 4 mois pour élaborer et adopter un nouveau texte, mais il nous faut plus de 2 ans pour le mettre en application. C’est
qu’au Maroc, le temps est une arme à double tranchant que seul le Makhzen semble
manier avec adresse » « Le fait est que l’euphorie réformatrice d’il y a deux ans est
sensiblement retombée. A certains égards, en raison du retard accumulé dans la mise
en œuvre des aménagements institutionnels induits par la réforme de la Constitution,
le pays vit même une situation de vide juridique. Le nouveau texte constitutionnel est
en effet censé être précisé par une série de lois organiques dont la plupart sont encore
au point mort », relève TelQuel qui parle d’une réforme par procrastination et affirme
que « tout se passe en fait comme si la nouvelle Constitution n’avait été octroyée que
dans le but de calmer les ardeurs d’une foule qui risquait de se radicaliser. Comme si
l’objectif n’était que de faire semblant de tout changer pour que rien ne change. D’où
une réforme qui semble s’être arrêtée en milieu de gué, remettant à plus tard des choix
pourtant essentiels pour l’avenir du pays. »
Le mensuel Zamane de juillet 2013 qui a consacré sa rubrique « Polémique » à la Constitution de 2011, soulignait aussi notamment qu’il est « difficile pour les experts de dresser un jugement unanime sur le nouveau texte constitutionnel marocain. » « Fruit du
climat régional marqué par les révolutions arabes, et du mouvement de contestation
populaire que le Maroc a connu au début 2011, l’adoption de la Constitution a d’abord
rassuré la majorité des avis politiques, avant de susciter le scepticisme de certains »,
affirme Zamane qui note que « deux ans après le referendum qui l’a consacré, son
usage est aujourd’hui sujet à débat…» Selon Zamane, « plusieurs interrogations font
aujourd’hui leur apparition. Car « dans un corps constitutionnel, les lois organiques
font office d’ossature. Or, la plupart d’entre elles ne sont toujours pas rédigées, dont
celle, prioritaire de la primature du chef du gouvernement. Les délais d’attente sont-ils
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
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anormalement longs ? Par ailleurs, les juristes relèvent l’incohérence de la traduction
en version française des statuts juridiques prônés par la Constitution, ainsi que des
failles dans l’interprétation juridique du texte. »
10. L’entrée en vigueur de la réforme des marchés publics reportée à
2014
Présenté comme l’une des plus importantes réformes en matière d’instauration des
règles de transparence de la commande publique, le décret relatif aux marchés publics
n’entrera pas en vigueur le 1er septembre 2013 mais en janvier 2014. La décision a été
prise lors d’un conseil du gouvernement qui a adopté un projet de décret proposant le
1er janvier 2014 comme date d’entrée en vigueur du décret. La note de présentation
de ce projet présenté par le ministère des finances explique que le délai d’entrée en
vigueur a été différé afin de garantir « un bon départ des réformes programmées par
ce texte en ce qui concerne les marchés de l’État, des collectivités locales et des établissements publics » (Le Matin 16/08/2013).
11. Baisse du prix des médicaments : sous la puissance de feu des
lobbies ?
Dans un entretien accordé à La Vie éco du 7 juin 2013, Abdelaziz Adnane, directeur
général de la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS), dénonce
notamment le prix élevé des médicaments au Maroc et accuse les laboratoires pharmaceutiques de s’enrichir au détriment de la santé des Marocains. Il assure que si la situation reste inchangée, le régime de l’assurance maladie obligatoire sera menacé. Pour
M. Adnane, les relations entre médecins et laboratoires gagneraient à être régies par
une loi comme en Europe ou aux Etats-Unis pour lutter contre les pratiques malsaines.
Dans un contexte de polémique persistante sur la cherté des médicaments, le gouvernement décide en 2013 de réduire les prix de 1 000 médicaments. Après cette première
décision de réduction, le ministre de la santé prend les lobbies à revers : le ministre de la
santé, El Hossein El Ouardi, décide enfin de “trancher” concernant l’affaire des prix du
médicament et le décret fixant les nouveaux barèmes devrait être bientôt disponible.
Cependant, le ministre a d’abord pris la décision de dissoudre les conseils régionaux des
pharmaciens du Nord et du Sud. La nouvelle a fait l’effet d’une bombe dans le milieu
(Les Eco, 11/11/2013).
Après plusieurs mois de tergiversations, le décret sur la fixation des prix du médicament
a été enfin adopté, vendredi 13 décembre 2013, en conseil du gouvernement. Le décret
permettra une révision du prix du médicament à la lumière d’un prix moyen international fixé par un benchmark de plusieurs pays (France, Espagne, Portugal, Belgique,
Arabie saoudite et Turquie). Il fixe de manière claire les marges respectives des pharmaciens d’officine, des grossistes et des fabricants. Il distingue en outre pour la première
fois le médicament princeps et le générique en fixant des pourcentages de réduction
entre les deux types de médicaments. La révision des prix du médicament se fera à un
rythme quinquennal. La baisse sera de 50 à 60% et concernera les prix de plus 800 médicaments (Les Eco, Aujourd’hui Le Maroc, L’Economiste, TelQuel, Le 20heures, La Tribune, Finances News, Sahara Maghribia, Al Ahdath Al Maghribia, Attajdid, 16/12/2013).
Cependant, les industriels contestent le décret sur la baisse des prix. Ils ont même
sollicité une consultation auprès du cabinet Naciri et Associés Allen & Overy. Selon les
conclusions de cette étude, le ministère de la santé réglemente les prix des médica16
ments conformément à l’article 17 de la loi 17-04. Or, ce pouvoir de réglementation
devrait être régi par un décret. Le cabinet cite le cas de la France, où les prix des médicaments sont réglementés, « du moins ceux remboursés par l’assurance maladie », et
où les ministres des finances et de la santé disposent d’un pouvoir de réglementation.
Le législateur a pris soin de définir des principes visant à concilier l’objectif de réduction des dépenses de l’assurance maladie et les intérêts légitimes des professionnels
du secteur. Au Maroc, la loi 17-04 confie à l’autorité réglementaire de droit commun
(le chef du gouvernement et le ministre de la santé), le pouvoir de définir par décret,
les principes encadrant la réglementation des prix des médicaments. Le cabinet Naciri
estime que le décret ne respecte pas cette logique en fixant directement les prix au lieu
de s’en tenir à un schéma général (L’Economiste, 23/12/2013).
Les pharmaciens marocains également refusent la baisse des prix. Ils sont entrés en
campagne contre le projet de décret instituant la baisse des prix d’une nouvelle fournée de 800 médicaments. Et pour informer de leur point de vue sur les conséquences du
nouveau texte proposé par le ministère de la santé, les conseils du Nord et du Sud ont
organisé une conférence de presse fin décembre 2013 à Rabat. Pour les pharmaciens,
il n’est pas seulement injuste, mais économiquement risqué de dévêtir les uns pour
habiller les autres. « Nord et Sud confondus, les 12 000 officines que compte le Maroc
ne réalisent en moyenne qu’un chiffre d’affaires annuel de 650 000 dirhams (DH). Cela
laisse à peine au pharmacien un revenu mensuel moyen de 3 000 à 4 000 DH » (Infomédiaire, 27/12/2013).
La position de Transparency Maroc (TM) : Abdessamad Saddouq, secrétaire général
de TM, a signé, pour les besoins du dossier de Challenge daté du 11 au 24 novembre
2013 sur les médicaments, un article intitulé « Gouvernance du secteur du médicament
: point de vue de TM. » M. Saddouq qui revient notamment sur le rapport 2009 de la
mission parlementaire sur le prix du médicament, note que ce rapport « a levé le voile
sur les dérives d’un secteur, mis à mal par un grave déficit de gouvernance et longtemps protégé par un silence coupable. On y apprend que les médicaments au Maroc
sont excessivement chers, que les marques prolifèrent, que les prix changent dans des
proportions injustifiées, selon les marques et les canaux de distribution, que ce sont
les marques les plus chères qui sont les plus vendues…» « Bref, le secteur est livré à la
cupidité d’intérêts privés sous le regard complaisant, si ce n’est complice, de l’Etat…
Derrière une façade libérale, c’est une véritable économie de rente qui a pris racine
», assène M. Saddouq qui rappelle aussi que TM a organisé en en mai 2010 une table
ronde qui a réuni l’ensemble des acteurs concernés, manifestant la volonté de l’ONG
de contribuer au débat. La rencontre avait permis d’obtenir du ministère de la santé
des engagements de réforme. « Mais plus de trois ans plus tard, où en sommes-nous ?
», s’interroge M. Saddouq qui note : « le chantier avance lentement, très lentement.
Les prix des médicaments restent encore très élevés malgré l’annonce de baisse d’une
première liste de produits… »
12. Des témoins et dénonciateurs de la corruption poursuivis en
justice
Affaires des primes
Deux fonctionnaires poursuivis dans l’affaire de fuite de documents administratifs du
ministère des finances : le tribunal de première instance de Rabat a poursuivi, le 17
mai 2013, l’audition des plaidoiries de la défense dans le cadre de l’affaire de fuite de
documents administratifs relatifs aux primes perçues par l’ancien ministre de l’éconoPublication annuelle - Observatoire de la Corruption
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mie et des finances et le trésorier général du Royaume. Le tribunal a suivi vendredi 03
mai 2013 la plaidoirie de la défense qui a affirmé que le dossier est entaché de plusieurs irrégularités qui portent notamment sur la poursuite des accusés, la violation du
secret des correspondances électroniques et les témoignages contradictoires, sollicitant
l’acquittement de ses clients en l’absence de preuves. La défense de la partie civile
avait réclamé, au cours de la séance précédente, le dirham symbolique de dommagesintérêts. Deux personnes sont poursuivies dans cette affaire (un haut responsable de la
Trésorerie générale du Royaume et un ancien fonctionnaire) pour notamment « divulgation du secret professionnel » (L’Opinion, Libération, 06/05/2013).
La plainte d’une quinzaine d’ONG déposée auprès du procureur général du roi pour
obtenir l’ouverture d’une enquête dans cette affaire : plus d’une quinzaine d’ONG
regroupées dans un Comité de solidarité, constitué pour soutenir les deux personnes
poursuivies dans le cadre de l’affaire des primes perçues par l’ancien ministre des finances Salaheddine Mezouar et le trésorier général du Royaume Noureddine Bensouda, avaient déposé une plainte auprès du procureur général du roi de la cour d’appel
de Rabat pour l’ouverture d’une enquête sur les échanges de faveurs entre Mezouar et
Bensouda. Le procureur du roi du tribunal de première instance de Rabat a accepté de
recevoir la plainte du Comité de solidarité après l’avoir initialement refusé (Akhbar Al
Yaoum, 20/05/2013).
Le procès des deux fonctionnaires a connu plusieurs reports au cours de 2013. La prochaine audience dans cette affaire est prévue pour le 7 mars 2014. Dans cette affaire
des primes échangées entre Salaheddine Mezouar, ex-ministre ministre de l’économie
et des finances, et Noureddine Bensouda, trésorier général du Royaume, seuls les deux
fonctionnaires font l’objet de poursuites judiciaires alors que M. Mezouar et M. Bensouda ne sont nullement inquiétés.
Affaire BaySys
Dans cette affaire, le secrétaire particulier du roi porte plainte en diffamation contre
le quotidien français Le Monde et Ahmed Benchemsi. En effet, le journal électronique
Lakome daté du 15 mai 2013 a révélé qu’une plainte en diffamation déposée à Paris par
les avocats de Mounir Majidi, secrétaire particulier du roi Mohammed VI, vise le quotidien français Le Monde, qui a publié en juin 2012 un article d’Ahmed Benchemsi intitulé « La grande corruption règne en maître au Maroc. » Le journaliste marocain est lui
poursuivi pour complicité. Le Figaro avait révélé lundi 13 mai 2013 que M. Benchemsi,
qualifié par ce journal « d’opposant marocain », était convoqué le 16 mai devant un
juge d’instruction parisien. L’article incriminé porte sur l’affaire BaySys, une enquête
publiée par Ahmed Benchemsi sur son blog et dans laquelle le journaliste accuse Mounir Majidi de trafic d’influence ainsi que d’être plus généralement « au cœur de la corruption d’Etat au Maroc. » La compagnie aérienne nationale, impliquée dans l’affaire,
avait de son côté très vite communiqué en affirmant « qu’aucune influence extérieure
aux intérêts de Royal Air Maroc n’est intervenue dans le cas de ce projet » (Lakome,
15/05/2013).
13. La réforme du code pénal en matière des peines encourues pour
corruption jugée insuffisante
Réforme du code pénal : renforcement des peines sanctionnant la corruption pour les
magistrats et les fonctionnaires : publiés au Bulletin officiel (en langue arabe) du 12
août 2013, les amendements de certaines dispositions du code pénal sont venus renforcer la responsabilité pénale des magistrats et des fonctionnaires en matière de corrup18
tion. Dans les dispositions relatives aux infractions de détournements et de concussions
commises par des fonctionnaires (articles 241-247), l’article « 242-bis » vient aggraver la
responsabilité pénale des magistrats et des fonctionnaires, notamment pour « dissipation, détournement, rétention indue de deniers publics... ». Le nouvel article introduit
désormais la notion de négligence « grave. » Le coupable encourt une peine de 1 à 6
mois d’emprisonnement et 2 000 DH d’amende. L’article 242-bis ajoute que la peine est
doublée si la valeur des biens détournés est supérieure à 100 000 DH. L’article 248 qui
incrimine la corruption et le trafic d’influence a également été amendé : l’amende est
passée d’une fourchette de « 250-5 000 DH » à « 5 000 – 100 000 DH. » Si la valeur des
biens perçus au titre de l’acte de corruption est supérieure à 100 000 DH, l’amende est
de 100 000 à 1 million de DH (L’Economiste, Yabiladi, 02/09/2013).
La protection des témoins et des dénonciateurs de la corruption renforcée : la réforme
du code pénal a instauré également un « traitement de faveur » pour les dénonciateurs
de la corruption. L’article 251 du code pénal incrimine celui qui use « de voies de fait
ou menaces, de promesses, offres, dons ou présents… »… « Pour l’accomplissement ou
l’abstention d’un acte […] ou qui a cédé à des sollicitations tendant à la corruption,
même s’il n’en a pas pris l’initiative. » Si la responsabilité de l’usager est maintenue,
de nouveaux alinéas ont été ajoutés à l’article 256. Dorénavant, « il ne peut y avoir
de poursuites à l’encontre du corrupteur si celui-ci informe les autorités judiciaires de
l’infraction de corruption lorsque demande en est faite par le fonctionnaire » ; et si
c’est le cas « preuve doit en être faite. » (L’Economiste, Yabiladi, 02/09/2013).
La réforme du code pénal reste insuffisante selon l’ICPC : cette réforme du code pénal
qui condamne désormais plus sévèrement la corruption est une avancée réelle dans
la lutte contre ce fléau, mais elle reste en deçà des attentes. Selon Jamal Moussaoui,
responsable à l’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC), « tous les amendements au code pénal relatifs à la corruption sont tirées des recommandations du rapport 2009 de l’ICPC, mais toutes ses recommandations n’ont pas été retenues pour autant. Loin s’en faut. » Selon M. Moussaoui, certaines propositions essentielles de l’ICPC
n’ont toujours pas été prises en compte dans la réforme. « Nous pensons qu’il faut
élargir le champ des sanctions aux tentatives de corruption, aux intermédiaires, aux
agents publics étrangers », explique-t-il. La réforme ne touche pas non plus à la durée
de prescription des actes de corruption. « Elle doit être allongée, voire simplement supprimée. Elle s’élève à 5 ans aujourd’hui, c’est trop court », estime M. Moussaoui. Aucun
amendement n’a été apporté pour réduire les inégalités de traitement. « Toutes les
situations de corruption, quel qu’en soit l’objet, doivent être pénalisées de la même
manière, aujourd’hui il y a un décalage entre les peines encourues pour corruption dans
l’administration, par exemple, et celles risquées dans le cadre d’une campagne électorale », affirme M. Moussaoui (Yabiladi, Afriquinfos, 05/09/2013).
14. La décision controversée du Conseil constitutionnel d’exonérer du
contrôle du Parlement les conseils royaux et certaines instances de
gouvernance
Le principe de reddition des comptes, tel qu’annoncé dans l’article 1er de la Constitution
a subi un sérieux camouflet à la suite de la décision 924/2013 du Conseil constitutionnel
datée du 22 août 2013. Le Conseil constitutionnel a en effet annulé quelques articles du
règlement intérieur de la Chambre des représentants, approuvés lors de la plénière du
1er août 2013, portant sur le contrôle des conseils royaux ou de certaines institutions
de bonne gouvernance. Les articles 65, 129 et 214 ont été jugés « non-conformes à la
Constitution »... Cette mesure conforte, en effet, Driss El Yazami, président du Conseil
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de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), dans son refus, en juillet 2012, de
comparaître devant une commission du Parlement. Cette décision bénéficiera également aux présidents du Conseil de la concurrence (Abdelali Benamour), du Conseil économique, social et environnemental (Nizar Baraka), du Conseil national pour les droits
de l’Homme (Driss El Yazami) ou encore de l’Instance centrale de prévention de la corruption (Abdeslam Aboudrar)... Cette décision irrévocable du Conseil constitutionnel
dresse un véritable mur entre le Parlement et ces conseils dont les présidents sont désignés directement par le roi Mohammed VI. Elle vient, d’autre part, d’accorder une sorte
d’immunité aux responsables de ces institutions (Yabiladi, 27/08/2013).
Interrogé sur cette décision du Conseil constitutionnel, Ahmed El Bouz, professeur de
sciences politiques à l’université Mohammed V de Rabat, souligne : « le Conseil constitutionnel argue de « l’indépendance » de ces conseils ou instances pour dire que l’institution législative n’a pas le droit de les contrôler ou de les interpeller. J’estime que
ça se discute. Car il faut préciser que l’indépendance de ces structures ne signifie pas
nécessairement qu’elles peuvent être exonérées du suivi et du contrôle de l’institution
législative. Dans plusieurs pays démocratiques (Suède, Espagne, Argentine) ayant des
constitutions avancées, de telles instances n’échappent pas aux contrôles des parlements de ces pays. Le Haut commissariat des Nations Unies aux droits de l’Homme et le
Conseil international des droits de l’Homme ont souligné que le contrôle de ces conseils
et de ces instances renforce leur efficacité, précisant que le contrôle doit être fait par
un pouvoir autre qu’exécutif. » M. El Bouz souligne par ailleurs que « le budget annuel
des conseils et instances de gouvernance est discuté dans le cadre du budget du chef
du gouvernement et est donc soumis au même contrôle que les budgets sectoriels.
Comment se fait-il alors que les députés puissent avoir un droit de regard sur les recettes et les dépenses de ces entités et qu’il leur soit interdit d’évaluer le travail qu’elles
font ? » (Le Matin, 11/09/2013).
15. Le projet controversé du gouvernement d’accorder une prime de
départ aux détenteurs d’agréments de transport, avorté
Le gouvernement a envisagé lors de l’élaboration de la loi de finances la possibilité
d’accorder une prime de départ aux titulaires d’agréments de transport. Selon les dispositions du projet de budget, les personnes physiques devaient disposer d’un délai de
trois ans (2014-2016) pour restituer leurs agréments de transport routier de voyageurs
moyennant une indemnité de départ. « La limitation de ce dispositif aux personnes
physiques avait d’ailleurs été perçue comme une aberration par certains professionnels qui reprochaient en effet à l’Etat de n’avoir pas intégré les petites sociétés où
se cachent bien des rentiers. D’après le dispositif qui avait été prévu par le projet de
budget, les rentiers allaient être indemnisés en fonction de la distance couverte par
l’agrément dont ils sont détenteurs (L’Economiste, 21/11/2013). Les détenteurs d’agréments de transport devraient bénéficier à partir de 2014 de la possibilité de vendre
leurs agréments à l’Etat. Or, d’après des spécialistes, cette mesure serait favorable aux
rentiers les plus importants, qui monopoliseraient le secteur (MarocHebdo, 29/11/2013).
A la suite des contestations de cette mesure de la part des bénéficiaires eux-mêmes et
des parlementaires qui, eux, considèrent ce dédommagement comme une deuxième
rente servie par les pouvoirs publics aux anciens bénéficiaires, le gouvernement Benkirane s’est ravisé. Il a décidé de ne plus racheter les agréments de transport (grimates)
à leurs détenteurs. L’Etat comptait débourser environ 930 millions de DH pour dédommager les bénéficiaires de ces autorisations de transport, octroyées autrefois à des
ministres, et hauts commis de l’Etat, mais aussi à des artistes et des sportifs. La mesure
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proposée dans le cadre de la loi de finances 2014, a été contestée par les partis de la
majorité et de l’opposition au Parlement. « Adopter une telle mesure serait cautionner
l’économie de rente », s’indigne un député de l’USFP. Un amendement a été voté mardi
17 décembre 2013 par les groupes parlementaires des partis de la coalition et de ceux
de l’opposition. Ces derniers ont estimé qu’il est inconcevable d’accorder des millions
de DH aux bénéficiaires des agréments, sachant qu’ils sont tous des personnes nanties. Le gouvernement comptait accorder par exemple au controversé cheikh Abdelbari
Zamzami, 1,75 millions de DH en contrepartie de son agrément, l’ancien international
marocain Noureddine Naybet (742 000 DH), le footballeur Youssef Chippo (2,26 millions
de DH), l’ancien lion de l’Atlas Mohamed Timoumi (2,90 millions DH) et la chanteuse
Latifa Raafat (812 000 DH) (Bladi.net, 19/12/2013).
16. La campagne de communication « Non à l’impunité » lancée par
Transparency Maroc censurée
Parallèlement à la Journée mondiale de lutte contre la corruption célébrée chaque 9
décembre, une campagne de communication et de mobilisation contre l’impunité a été
lancée par Transparency Maroc (TM). Organisée à l’occasion de la publication par Transparency International de l’Indice de perception de la corruption au titre de l’année
2013, cette campagne incluait plusieurs activités de communication via les supports
audiovisuels en langues arabe, française et amazighe et sur les sites internet, en plus de
la réalisation d’interviews de membres de l’association sur la lutte contre la corruption
au Maroc. Au programme de cette campagne a figuré également l’organisation de la
2ème édition de la manifestation artistique « Paroles urgentes » qui a eu lieu du 29
décembre 2013 au 2 janvier 2014 avec la participation d’un groupe d’artistes venant
de cinq villes marocaines, à savoir Casablanca, Sidi Bennour, El Jadida, Safi et Benguerir
(L’opinion, Maghress, Infomédiaire, Aufait, Al Alam, 09/12/2013).
Malheureusement, les affiches de la campagne de Transparency ont été découpées
par des « inconnus ». « C’est un retour en arrière, à une époque où régnait le nondroit », c’est ainsi que Abdelaziz Messaoudi, membre dirigeant de Transparency Maroc
a dénoncé la destruction « d’une manière systématique » des affiches posées par TM à
Rabat le vendredi 6 décembre dans le cadre de sa campagne de communication sur le
thème « Non à l’impunité ». Les responsables de Transparency Maroc ont été surpris par
le fait que les affiches qui ont été posées par une entreprise d’affichage ayant pignon
sur rue, en des endroits « hyper surveillés », aient été « soigneusement lacérées au cutter et enlevées » durant la nuit du vendredi 6 au samedi 7 décembre.
TM a publié, jeudi 12 décembre 2013, un communiqué de presse dans lequel les faits
sont relatés. « Avant de communiquer, Transparency Maroc a cherché à connaître les
raisons de ces suppressions, mais n’a pu obtenir aucune explication. Les agences de
communication en charge de l’opération ont accompli toutes les démarches requises
par la loi avant de procéder à l’affichage », précise le communiqué de presse. Et d’ajouter qu’à Casablanca « des agents disant être de la wilaya ont empêché la mise en place
de l’affichage et les messages posés sur les autobus ont également été arrachés ». TM
« estime avoir été une nouvelle fois censurée et s’élève avec vigueur contre cette interdiction usant de méthodes insidieuses et condamnables ». A noter que TM avait également été victime en 2013 de la censure puisque les autorités avaient interdit la projection d’un film en marge d’un évènement que l’association avait organisé place Moulay
Hassan à Rabat (Libération, L’Economiste, Les Eco, Aujourd’hui Le Maroc, 13/12/2013).
Dans un entretien accordé à MarocHebdo du 13 décembre 2013, Abdessamad Saddouq,
secrétaire général de TM, interrogé sur l’opportunité de la campagne de sensibilisation
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contre la corruption lancée par TM, souligne : « c’est une campagne de mobilisation
contre l’impunité, que nous considérons comme cause première de la persistance de
la corruption dans notre pays.» Son message est clair : non à l’impunité et il s’adresse
d’abord aux pouvoirs publics… et il semble que cette campagne dérange. « Nos affiches
ont été retirées de Rabat, non autorisées d’affichage à Casablanca… Voilà où nous
en sommes. » A la question pensez-vous réellement que les corrompus sont impunis
au Maroc, M. Saddouq réplique : « oui… sinon nous n’aurions pas lancé cette campagne. Dans la gestion de la chose publique, l’impunité est entretenue, consciemment
ou inconsciemment. Rappelez-vous Driss Basri, en 1995 ou 96, déclarant devant des
parlementaires pétrifiés et devant les caméras de télévision qu’il disposait de centaines
de dossiers de corruption concernant des conseillers municipaux et députés et qu’il
ne les présenterait pas à la justice. C’est l’utilisation de la corruption comme arme de
dissuasion politique. Et puis, tout récemment, la fameuse déclaration du chef du gouvernement, qui érige l’impunité en philosophie d’action contre la corruption. » « Tout
en appelant à mettre fin à l’impunité, nous insistons sur la présomption d’innocence et
sur les garanties du procès équitable », a aussi tempéré M. Saddouq.
17. Amnistie sur les avoirs illégalement détenus à l’étranger : la
mesure de la discorde
Pour faire face au manque de liquidité de l’Etat de plus en plus inquiétant, le gouvernement Benkirane a introduit un amendement à la loi de finances 2014 promettant à une partie des Marocains ayant acquis illégalement des biens (argent, actions et
immobiliers) à l’étranger, une amnistie en échange du rapatriement au Maroc d’une
partie de ces avoirs achetés par de l’argent détourné. Pour séduire davantage sa cible,
le cabinet Benkirane n’hésite pas à exempter de toute poursuite judiciaire les fraudeurs
en échange du paiement d’amendes ou selon l’expression du ministère des finances de
« contribution libératoire » dont le montant est fixé en fonction des avoirs : 10% de la
valeur des biens immobiliers, de la valeur d’acquisition des biens immeubles détenus à
l’étranger et des actions, 5% du montant du compte en devises. L’amendement qui a
de fortes chances d’être adopté par les députés, même si les conseillers pourraient s’y
opposer, sera la première concrétisation de l’appel lancé, en juillet 2012, par Benkirane
à l’adresse des prévaricateurs et des fraudeurs, pour tourner la page et commencer à
zéro car « Dieu est clément et miséricordieux » (Yabiladi, Infomédiaire, Le 20heures,
Libération, Le Matin, Bladi, Al Alam, Al Massae, Assabah, 16/12/2013).
Cette proposition d’amnistie sur les avoirs des Marocains détenus illégalement à l’étranger est à examiner sous différents angles. De la part de l’exécutif, cet amendement à
la loi de finances sonne comme un aveu de l’ampleur de la crise que nous traversons.
C’est connu, nos réserves de changes fondent comme neige au soleil, depuis plusieurs
années… Aujourd’hui, il devient donc urgent d’engranger un maximum de devises
fortes (3oumla sa3ba), quitte à dérouler le tapis rouge aux fraudeurs. Le gouvernement
espère ainsi renflouer les caisses des banques, augmenter les avoirs de garantie et récolter au passage des centaines de millions de dirhams en impôts grâce à la contribution
libératoire associée à cette amnistie. Vue ainsi, la mesure semble avantageuse. Dans un
entretien accordé à L’Economiste daté du 16 décembre 2013, Jaouad Hamri, directeur
général de l’Office des changes, qui approuve cette mesure, explique son timing et ses
enjeux. M. Hamri souligne notamment que « le projet de texte relatif à cette mesure est
une opportunité sans précédent pour remettre tout le monde dans la légalité d’autant
que ces mêmes dispositifs ont déjà été mis en œuvre dans beaucoup de pays à travers
le monde. » « A l’échelle mondiale, les tensions subies par les économies poussent les
gouvernements à rapatrier les avoirs liquides ou à comptabiliser les actifs détenus à
22
l’étranger. Dans les deux cas, cela permet de revitaliser l’économie, d’améliorer la position du pays et d’augmenter les réserves de changes », a affirmé M. Hamri.
Sauf qu’en adoptant cette démarche, le gouvernement donne le signal qu’il est désormais prêt à composer avec une classe des affaires qui, depuis des années, exfiltre une
partie de sa richesse au mépris total des lois sur le change. Les adversaires politiques de
Benkirane estiment, à juste titre, que cette approche est un aveu d’impuissance. C’est,
pour eux, la preuve que l’exécutif est incapable de démanteler les circuits de fuite de
capitaux et encore moins de sanctionner les fraudeurs (TelQuel, 20-26/12/2013).
Le parti de l’Istiqlal s’est élevé contre la loi sur l’amnistie relative aux avoirs extérieurs.
Le comité exécutif du parti estime notamment que cette loi « est en totale contradiction
avec le programme électoral et les slogans serinés » par le gouvernement, et trahit le
discours qui lui a permis d’obtenir la confiance de la Chambre des représentants. Dans
un communiqué paru mardi 17 décembre 2013, le comité invite plutôt le gouvernement
à publier la liste des détenteurs des avoirs à l’étranger, que le gouvernement déclare
avoir à sa disposition. « Le parti de l’Istiqlal note que ce gouvernement et sa présidence
recourent à la pression et l’extorsion afin de proclamer une amnistie générale en faveur
de ceux qui ont commis des crimes et des irrégularités légalement répréhensibles… »,
affirme le communiqué du comité qui ajoute : « le fait de supplier nombre de ceux qui
se sont rendus coupables de corruption et de fraude, notamment dans des affaires de
fuite de capitaux vers l’étranger, dévoile une fois de plus la faiblesse du gouvernement
et son incapacité à imaginer des solutions aux grandes problématiques économiques
et il est vraiment risible de le voir se prosterner, profondément humilié, devant ceux
qui ont violé la loi organisant la déclaration des biens à l’étranger dans l’espoir de faire
bénéficier le Trésor de 4 milliards de dirhams » (L’Economiste, L’Opinion, Akhbar Al
Yaoum, Al Akhbar, Sahara Maghribia, Al Alam, 18/12/2013).
Le véritable coup de théâtre est venu de la Chambre des conseillers au Parlement. Alors
que le ministre de l’économie et des finances, Mohamed Boussaid, se félicitait lundi 16
décembre 2013 des échos positifs qu’avait suscité le projet d’amnistie sur les avoirs à
l’étranger des Marocains, auprès des députés du Parlement, la Commission des finances
relevant de la Chambre des conseillers a rejeté cet amendement mardi 17 décembre.
D’après le journal électronique Le 360, qui a rapporté l’information, ce projet, qui devait être introduit dans la loi de finances 2014, a été rejeté par 11 voix contre 7. Les
députés de l’USFP, de l’Istiqlal et de l’UC ont voté contre, tandis que le PAM et le syndicat FDT, proche de l’USFP, ont refusé de participer au vote, selon la même source. » (Le
20heures, Le 360, Finances News, Al Massae, Al Nahar Al Maghribia, 19/12/2013).
Mais, la Chambre des représentants a finalement donné son feu vert concernant cette
mesure d’amnistie. Les députés se sont en effet prononcés mercredi 25 décembre 2013
pour la proposition gouvernementale visant à amnistier les avoirs illégalement détenus
à l’étranger. Après le revers essuyé à la Chambre des conseillers qui a rejeté la mesure,
le gouvernement a été conforté dans un premier temps par la Commission des finances
de la Chambre des représentants. L’amendement en question a été adopté par 25 voix
contre 11. Ensuite, la Chambre des représentants dans son ensemble a adopté cette
mesure qui est entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2014. Elle devrait permettre de
rapatrier au Maroc 4 milliards de dirhams, selon certaines estimations. Le gouvernement propose aux personnes physiques ou morales en infraction de déclarer, durant
l’année 2014, leurs biens en contrepartie d’un pourcentage symbolique de la valeur de
ces biens. Passé ce délai, les contrevenants s’exposeraient à des poursuites judiciaires
(Aujourd’hui Le Maroc, Infomédiaire, Yabiladi, Le Matin, 26/12/2013).
En définitive, l’on constate que le gouvernement Benkirane qui avait fait de la lutte
contre la corruption une priorité, a fini par mettre de l’eau dans son vin. Les slogans du
gouvernement dans la lutte contre la corruption sonnent désormais faux.
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
23
Lutte contre la corruption : les rapports qui accablent le
Maroc
1. Rapports internationaux
Les résultats du Baromètre mondial de la corruption 2013 : police, justice
et santé, les secteurs les plus corrompus au Maroc selon le sondage de
Transparency International
Mercredi 09 juillet, Transparency International (TI) a rendu public son Baromètre mondial de la corruption 2013. Il s’agit d’un rapport sur un sondage effectué par l’ONG dans
107 pays. Pour 28% des nationaux, le phénomène a enregistré une nette hausse durant
les dernières années. Une large majorité des Marocains, 76%, s’accorde à qualifier le
fléau de « sérieux problème » contre 17% qui affirment qu’il est juste un « problème. »
En revanche, une minorité, 5%, estime qu’il s’agit d’un « léger problème. » Dans l’ensemble, les Marocains sont assez sévères concernant la stratégie anti-corruption du
gouvernement et 72% la considèrent « inefficiente. » Pour 79% des Marocains, la police est le secteur le plus corrompu. La santé, talonne de très près la sûreté, avec 77%.
Vient ensuite la justice avec 70%. Ces trois secteurs vitaux occupent le podium alors que
le reste est réparti comme suit : les partis politiques, 67%, le parlement, 65%, l’enseignement, 60%, le monde des affaires, 56%, les médias, 44%, les associations, 42%. Et
contre toute attente, c’est l’armée qui arrive en dernière position avec seulement 37%
qui pensent qu’elle est corrompue (Yabiladi, Bladi, Aujourd’hui Le Maroc, Le Soir, Al
Massae, Assabah, Attajdid, Al Khabar, Al Akhbar, Akhbar Al Yaoum, 09/07/2013).
Transparency Maroc appelle le gouvernement à ériger la lutte contre la corruption en
priorité : les résultats du Baromètre mondial de la corruption 2013 publiés par Transparency International, qui montrent notamment que 72% des personnes interrogées au
Maroc jugent inefficace l’action du gouvernement dans la lutte contre la corruption,
ont fait réagir Transparency Maroc qui, dans un communiqué de presse daté du 09 juillet 2013, souligne : « face à cette situation et à la lecture de ces résultats qui confirment
la persistance d’une corruption endémique dans notre pays, nous appelons de nouveau
le gouvernement à ériger la lutte contre la corruption en priorité et à traduire dans les
faits les déclarations d’intention maintes fois reprises par ses différentes composantes
(Aujourd’hui Le Maroc, Hespress, 12/07/2013).
Le rapport mondial 2013 de Transparency international sur la corruption
dans l’éducation : 16% des Marocains ont déjà donné un pot-de-vin
Transparency International a publié en 2013 un rapport sur la corruption dans l’éducation nationale dans la région MENA. Le document, présenté mardi 1er octobre 2013,
relève l’ampleur de la perception de la corruption dans ce domaine. Au Maroc, 40% des
personnes interrogées estiment que le système national est extrêmement corrompu.
Le Royaume est classé 8ème avec 16% de Marocains qui affirment avoir déjà versé un
pot-de-vin pour accéder aux services de l’éducation. Cela s’est notamment manifesté
lors de la passation des marchés portant sur la construction d’écoles « fantômes » ou
encore au niveau du détournement des ressources prévues pour l’acquisition des fournitures et des manuels scolaires. Le rapport relève d’autres types de corruption qui ne
gangrènent pas que le Maroc. Il s’agit notamment du versement d’un pot-de-vin pour
accéder à une école donnée, pour avoir de meilleures notes ou carrément pour s’ache24
ter un « prestigieux » diplôme. D’ailleurs, une enquête réalisée auparavant auprès de
8 500 parents et enseignants, de sept pays africains dont le Maroc, a relevé que 40% des
parents versaient des frais de scolarité illégaux. A ces failles s’ajoute aussi la corruption
pour bénéficier du logement universitaire (L’Economiste, H24info, Les Eco, Akhbar Al
Yaoum, Al Mounataf, Assabah, Attajdid, Hespress, Al Akhbar, Al Khabar, Haraka, Al
Ittihad Al Ichtiraki, Rissalat Oumma, 02/10/2013).
L’Indice de perception de la corruption 2013 de Transparency international : le Maroc qui occupe la 91ème place dégringole dans le classement
mondial
Transparency International (TI) a rendu public, mardi 03 décembre 2013, l’Indice de
perception de la corruption (IPC) 2013 dans le monde. Transparency Maroc l’a présenté
mardi 03 décembre à Casablanca. Sur un total de 177 pays, le Maroc est 91ème, reculant, ainsi, de trois places par rapport à l’édition de 2012. En revanche, il garde la même
note : 37 points sur 100. Visiblement, la politique menée, tambour battant dans les
médias officiels, par le gouvernement sur les dangers de la corruption n’a rien donné.
Le Maroc avait pourtant réussi à remonter légèrement la pente entre 2009 et 2011. Le
Royaume avait alors réussi à réaliser un bond en avant de neuf places pour finir 80ème
alors qu’en 2009 il était 89ème. Mais, depuis la tendance s’est de nouveau inversée. Il
faut remonter assez loin, précisément en 2002 pour tomber sur la meilleure position
du Royaume dans le classement de l’IPC de TI, jamais rééditée jusqu’à présent : 52ème.
Depuis, c’est la chute. Au niveau du Maghreb, comme d’habitude la Tunisie, 77ème, fait
mieux que le Maroc, alors que l’Algérie est 94ème, la Mauritanie 119ème et la Libye
172ème. Dans la région MENA, le Qatar arrive en tête, occupant la 28ème position. Le
petit émirat devance même Israël, arrivé 36ème. Le Bahreïn est 57ème, l’Arabie saoudite est au 63ème rang et l’Egypte est 114ème (Yabiladi, Les Eco, Al Bayane, Aufait, Al
Massae, Assabah, Attajdid, Al Nahar Al Maghribia, Al Khabar, Al Akhbar, 03/12/2013).
Selon Abdessamad Saddouq, secrétaire général de TM « l’IPC de cette année confirme
la place du Maroc dans la catégorie des pays où sévit une corruption endémique » et
cette situation résulte de « l’absence de volonté de lutter contre ce fléau. Les pouvoirs
publics, dépourvus de toute stratégie pour mener le combat contre la corruption, se
cantonnent dans un discours stérile et entretiennent l’impunité » ; ils se contentent
de mener une campagne de communication « coûteuse et contre-productive » et de
« culpabiliser les citoyens », alors qu’ils disposent de tous les moyens et leviers pour
enquêter et combattre la corruption (Libération, Al Bayane, Aujourd’hui Le Maroc,
H24info, 04/12/2013).
L’Instance centrale de prévention de la corruption (ICPC) critique également l’absence
de stratégie en matière lutte contre la corruption : dans un entretien accordé à MarocHebdo du 20 au 26 décembre 2013, Abdeslam Aboudrar, président de l’ICPC, souligne
que si les efforts fournis ne produisent pas d’effets positifs sur le comportement des
gens, c’est « parce que nous manquons de stratégie et d’une vision claire avec des objectifs précis. La lutte contre la corruption est un combat de longue haleine qui repose,
entre autres, sur l’éducation, la sensibilisation mais aussi la sanction. »
Rapport de Transparency International sur le secteur de la défense : le
Maroc classé parmi les pays les plus corrompus
Transparency international (TI) a publié, mardi 29 janvier 2013, un rapport portant sur
la corruption dans le secteur de la défense. Selon les résultats de ce rapport, le Maroc
est classé parmi les 18 pays considérés comme étant à « risques très élevés » de corruption. Selon le rapport, le gouvernement marocain n’exerce qu’un contrôle modéré sur
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
25
le secteur de la défense. Selon TI, 70% des pays où les risques de corruption sont très
élevés connaissent des détournements de biens publics à cause du déficit des moyens de
lutte contre la corruption dans le secteur de la défense. Or, ces pays représentent 94%
des dépenses mondiales militaires en 2011 soit un équivalent de 1,6 trillion de dollars.
Les pays sont classés dans des groupes allant du taux de risque le plus bas (A) au taux le
plus élevé (F) correspondant à des évaluations détaillées couvrant 77 indicateurs répartis sur cinq zones à risque du secteur : politique, financier, personnel, opérationnel et
approvisionnement (Al Akhbar, Hespress, Lakome, 31/01/2013).
Rapport de l’institut britannique Legatum : 70% des Marocains affirment
que la corruption sévit encore dans le pays
D’après un rapport de l’institut britannique Legatum publié en 2013, les Marocains
n’auraient plus confiance en leur gouvernement et 70% d’entre eux disent que la corruption sévit encore au sein des organismes étatiques et financiers du Royaume, malgré les efforts entrepris par l’exécutif en matière de gouvernance. Par ailleurs, 84%
des Marocains questionnés affirment que la séparation des pouvoirs est inexistante
dans le Royaume, notant au passage la relation d’interdépendance entre les différentes
autorités du pays. Les Marocains pensent également qu’ils n’ont aucun droit de participer à la vie politique de leur pays, révèle l’institut Legatum, selon lequel seuls 4% des
Marocains croient jouir de leurs droits politiques, et peuvent en conséquence participer
à la vie politique du Royaume. L’institut britannique nous apprend que seuls 50% des
Marocains ont confiance dans le gouvernement Benkirane en 2013, contre 65% en
2012 ; ces indices réunis placent le Maroc à la 69ème position mondiale en matière de
gouvernance. Le Maroc serait le quatrième pays le plus prospère du monde arabe, après
les Emirats-Arabes Unis, le Koweït et l’Arabie Saoudite (Bladi.net, 12/11/2013).
L’indice annuel de l’Economic freedom : le Maroc parmi les derniers de la
classe en matière de liberté économique
La version 2013 de l’indice annuel de l’Economic freedom publiée conjointement par le
Wall Street Journal et la Heritage Foundation a paru en février 2013. Le Maroc arrive
à la 90ème place dans ce classement qui mesure la liberté économique dans le monde.
Avec un score global de 59,6 sur 100, l’économie marocaine a régressé de 0,6 point, et
de trois places par rapport à l’année dernière. Cette régression est due, entre autres, à
des baisses importantes enregistrées en termes de maîtrise des dépenses publiques et
de liberté du commerce qui l’emportent sur les gains de la liberté d’investissement et
celle du travail. Sur le plan régional, le Maroc est classé 9ème sur les 15 pays de la zone
MENA. Les auteurs de ce rapport estiment que le Royaume a plusieurs défis de développement « critiques » à relever et des anomalies à corriger qui comprennent, entre
autres, la persistance d’une corruption généralisée et des dépenses publiques relativement élevées. L’étude souligne, par ailleurs, que les déficits budgétaires se poursuivent,
que la dette publique a dépassé 50% du PIB et que le système judiciaire demeure inefficace et vulnérable face à l’influence du politique, ce qui rend la lutte contre la corruption de plus en plus difficile (Libération, Yabiladi, Infomédiaire, Rissalat Oumma, Al
Mounataf, 17/02/2013).
Rapport du World Economic Forum : la corruption limite le développement
de la compétitivité du Maroc
Le Maroc a été classé à la 70ème place avec un gain de 3 places par rapport à 2012
dans le classement établi par le World Economic Forum (WEF) dans un rapport publié
en 2013 sur la compétitivité en Afrique pour l’exercice 2013. Le Maroc qui poursuit son
26
avancée en matière de compétitivité se classe 4ème sur l’échelle africaine devançant
ainsi l’ensemble des pays nord-africains sur cet indicateur de compétitivité selon un
communiqué du ministère des affaires générales et de la gouvernance. Toutefois, le
même rapport a relevé certains aspects qui limitent le développement de la compétitivité au Maroc, notamment la corruption, la bureaucratie, la lourdeur des procédures
administratives ainsi que l’accès difficile au financement (Al Bayane, Aujourd’hui Le
Maroc, 16/05/2013).
Rapport du Forum mondial économique sur la compétitivité : le Maroc
perd 7 places dans le classement
Le World Economic Forum a publié, mardi 03 septembre 2013, sur son site internet,
le rapport annuel sur la compétitivité mondiale 2013-2014. Selon l’étude, le Maroc a
reculé de 7 places, en se positionnant au 77ème rang, alors qu’il était 70ème dans le
rapport de l’année dernière. Le classement du WEF se base sur 12 indicateurs. Il donne
un aperçu global sur l’évolution de la situation économique du pays et son potentiel
de croissance. Cette année encore, les facteurs qui font obstacle au développement
des affaires au Maroc demeurent l’inefficacité de la bureaucratie gouvernementale, la
corruption ainsi que l’accès au financement (Aufait, Challenge, Les Eco, Aujourd’hui Le
Maroc, L’Opinion, Al Bayane, Al Massae, Lakome, 06/09/2013).
Bilan de la politique européenne de voisinage avec le Maroc : le Royaume
appelé à lutter résolument contre la corruption
Le Maroc est plus ou moins un bon voisin de l’Europe, mais il doit faire plus de progrès.
C’est ce qui est formulé dans le bilan 2012 de la mise en œuvre de la politique européenne de voisinage (PEV), dévoilé, mercredi 20 mars 2013, à Bruxelles. En matière de
lutte contre la corruption, les responsables de l’Union européenne rappellent que le
Maroc occupe en 2012 la 88ème place sur 176 pays au niveau de l’Indice de perception de la corruption de Transparency International. Ils appellent ainsi le Royaume à
lutter résolument contre la corruption, notamment sur la base d’un renforcement des
compétences et capacités de l’Instance centrale de prévention de la corruption et de
l’adoption d’une stratégie nationale en la matière (Aujourd’hui Le Maroc, 21/03/2013).
Rapport du Global Financial Integrity sur la fuite de capitaux : le Maroc
perd 1,3 milliard de dollars par an
Un rapport du think-tank américain Global Financial Integrity publié en janvier 2013 a
révélé qu’avec une fuite de capitaux estimée à 1,3 milliard de dollars annuellement, le
Maroc se classe 45ème sur un total de 143 pays. Le classement est dominé par la Chine
(2,74 mille milliards de dollars). Selon le même rapport, entre 2001 et 2010, ce sont
environ 6 000 milliards de dollars qui ont échappé aux contrôles des Etats et c’est la
région MENA qui arrive en tête avec plus de 26,3% des fuites (Infomédiaire, Libération,
Al Mounataf, Bayane Al Yaoum, 11/01/2013).
Fuite des capitaux : le Maroc, un champion selon un rapport de la Banque
africaine de développement
Le Maroc est un champion de la fuite des capitaux. Selon un rapport émis par la
Banque africaine de développement (BAD), en collaboration avec le groupe Global
Financial Integrity (GFI), 50 milliards de dollars ont échappé aux contrôleurs de l’Office
des changes entre 2000 et 2009. Cela représente 430 milliards de dirhams, soit l’équivalent de la moitié des richesses créées annuellement au Maroc (le PIB du Royaume étant
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
27
estimé à quelque 800 milliards de dirhams). Selon la BAD, qui organisait ses assemblées générales fin mai 2013 à Marrakech, ce chiffre fait du Royaume le 6ème pays de
l’évasion fiscale du continent, derrière le Nigéria, l’Afrique du Sud, l’Egypte, l’Algérie
et la Libye. Pour rappel, en juin 2012, le cabinet de conseil américain Boston Consulting Group (BCG) pointait déjà du doigt les fuites illégales de capitaux. Dans la même
étude, le BCG assurait que 30% de l’argent détenu par les riches familles marocaines
était déposé dans des banques étrangères, à priori de manière frauduleuse (TelQuel,
Panoramaroc, Al Khabar, 07-13/06/2013).
Données de la Banque des règlements internationaux : la fuite des capitaux au Maroc atteint des sommets
Le patron de l’Office des changes, Jawad Hamri, a révélé en 2013 que plus de 34 milliards de dirhams dorment dans des comptes étrangers. Cela équivaut à 4% du PIB, et
cela représente aussi 5 milliards de plus que les bénéfices dégagés en 2012, par l’ensemble des sociétés cotées à la Bourse de Casablanca. Pour avancer ce chiffre énorme,
Jawad Hamri s’appuie sur les statistiques de la Banque des règlements internationaux,
la banque centrale des banques centrales du monde, qui ne prend toutefois pas en
compte les biens immobiliers et autres titres de propriété détenus par les Marocains à
l’étranger. Ces chiffres confirment un peu ceux du cabinet américain Boston Consulting
qui estime, dans un rapport, que plus de 30% des fortunes des millionnaires marocains
sont déposées dans des comptes à l’étranger, notamment en Suisse et en Grande-Bretagne (TelQuel 26/04/2013).
Rapport du Centre de la transparence financière internationale : 1,2 milliards de dollars sortis illégalement du Maroc
Selon le dernier rapport du Centre de la transparence financière internationale publié
en décembre 2013, les montants des capitaux qui ont été sortis illégalement du Maroc ont atteint 1,2 milliard de dollars (10 milliards de DH). Le Royaume arrive ainsi en
10ème position dans la région MENA, derrière l’Arabie Saoudite, les Émirats Arabes
Unis, le Qatar, l’Égypte, le Soudan, le Koweït, la Syrie, le Liban, et l’Algérie. Et au niveau
mondial, c’est la Chine qui arrive en tête du classement, suivie de la Russie, du Mexique,
de la Malaisie, de l’Inde, de l’Arabie Saoudite, du Brésil, de l’Indonésie, de l’Irak et du
Nigéria (1er pays africain du classement) (Infomédiaire, 16/12/2013).
2. Rapports nationaux
Le rapport 2011 de la Cour des comptes
La Cour des comptes a publié fin janvier 2013 son rapport annuel 2011. C’est le premier
rapport publié sous l’ère Driss Jettou, président de la Cour des comptes qui a remplacé
Ahmed El Midaoui en 2012. Le rapport 2011 a dévoilé comme à l’accoutumée des informations inédites sur la gestion des comptes et des établissements publics. L’une des
nouveautés concerne la publication par la Cour des comptes de données sur les déclarations de patrimoine et la vérification des comptes des partis politiques. Il en ressort
que sur les 35 partis politiques, seuls 18 ont présenté leurs comptes au titre de l’année
2010. Et sur les 18 partis qui se sont prêtés au jeu de la transparence, 15 seulement ont
présenté des comptes certifiés par un expert-comptable. S’agissant des déclarations de
patrimoine, la Cour des comptes a recensé fin décembre 2011 quelque 15 693 déclarations, dont 8 395 ont été déposées dans le délai et 7 298 hors délai. Selon le rapport de
28
la Cour des comptes, tous les ministres, aussi bien de l’ancien que du nouveau gouvernement, ont déposé leurs déclarations, respectivement pour les mandats 2007-2011 et
2011-2016. De leur côté, les membres de la Chambre des représentants pour le mandat
législatif 2011-2016 ont tous déclaré leur patrimoine sauf un seul parlementaire. Dans
la deuxième chambre, 13 conseillers n’avaient pas déposé leurs déclarations de patrimoine à la date de publication de la Cour des comptes (Aujourd’hui Le Maroc, Yabiladi, Les éco, Le Soi échos, Al Massae, Assabah, Akhbar Al Yaoum, Attajdid, Al Akhbar,
28/01/2013).
Insuffisances et dysfonctionnements relevés par le rapport 2011 de la Cour des
comptes : à la lumière des résultats des différentes missions de contrôle menées par la
Cour des comptes au titre de l’année 2011, il ressort que les insuffisances et les dysfonctionnements dans la gestion des deniers publics portent essentiellement sur : - la fiabilité des systèmes de contrôle interne et leur capacité à garantir une gestion optimale
des ressources et des emplois et la protection du patrimoine des entités publiques ;
- la régularité et la sincérité des opérations réalisées qui sont parfois bafouées notamment dans des cas de commandes publiques ; - la fiabilité du processus de choix des
investissements et des projets publics ainsi que la capacité des entités publiques à les
mettre en œuvre dans de bonnes conditions d’efficacité et d’efficience. Ces remarques
se retrouvent en filigrane au niveau des services administratifs ou financiers qui ont été
contrôlés par les magistrats de la Cour (Al Bayane, Les éco, L’Economiste, Le Reporter,
Al Ittihad Al Ichtiraki, Hespress, Sahara Maghribia, 28/01/2013).
Des poursuites engagées contre des responsables et agents : à la suite de la publication
du rapport 2011 de la Cour des comptes, le parquet a déféré devant les juridictions
financières 19 nouvelles affaires de discipline budgétaire et financière. Le nombre de
personnes poursuivies devant ces juridictions a atteint 288 responsables et agents. De
plus, la Cour des comptes a saisi le ministre de la justice de 8 affaires relatives à des faits
qui paraissent de nature à justifier une sanction pénale et qui concernent 27 personnes
(Infomédiaire, Le Matin, Al Bayane, Rissalat Oumma, Al Khabar, 28/01/2013).
Transparency Maroc commente le rapport 2011 de la Cour des comptes : dans un entretien accordé à l’hebdomadaire Al Ayam du 1 au 7 février 2013, Abdessamad Saddouq,
secrétaire général de Transparency Maroc, interrogé sur le rapport 2011 de la Cour
des comptes, souligne : « ce premier rapport annuel, publié durant le mandat de Driss
Jettou, a été préparé pendant le mandat de l’ancien président de la Cour des comptes
Ahmed El Midaoui. Deuxièmement, ce rapport a été publié relativement tôt par rapport aux rapports précédents. Troisièmement, le rapport 2011 de la Cour des comptes
a été élaboré dans un contexte où existait un mouvement populaire de lutte contre la
corruption, pour la réforme constitutionnelle et pour des changements politiques. » «
Et Il est très important de noter que la Cour des comptes n’a enregistré que trois cas de
poursuites dans le domaine de la discipline financière, alors qu’elle en avait enregistré
20 en 2010 », a ajouté M. Saddouq. En ce qui concerne les décisions à prendre après la
publication du rapport, M. Saddouq a déclaré qu’ « il faut mettre en œuvre le principe
de la responsabilité et de la reddition des comptes». Il a aussi noté que Transparency
Maroc a déjà recommandé de donner à la Cour des comptes la possibilité d’engager
des poursuites directes sans passer par le ministre de la justice (Al Ayam, 01-07/02/2013).
Le président de la cour régionale des comptes de Casablanca démis de ses fonctions :
la publication du rapport 2011 de la Cour des comptes a mis son président Driss Jettou
sur la sellette. Et pour cause, le rapport a éludé les activités de la cour régionale de
Casablanca surtout celles concernant le conseil de la ville présidé par Mohamed Sajid.
Lahcen Fellah, président de la cour régionale des comptes de Casablanca a été démis de
ses fonctions au motif qu’il n’a pas fait son travail en matière de contrôle de la gestion
du conseil de la ville. Mustapha Rahin, conseiller indépendant au conseil de la ville de
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
29
Casablanca, a remis en question la version étayée jeudi 07 février 2013 par un journal
casablancais, qui défendait Driss Jettou, président de la Cour des comptes. M. Rahin a
accusé ouvertement Driss Jettou de ce ratage et soutient que la destitution de Fellah
est une manœuvre pour cacher d’autres vérités. « 2011 est l’année catastrophique et
noire dans la gestion du conseil de la ville de Casablanca. C’était aberrant que le rapport de la Cour des comptes ait évité, sciemment, d’en parler », a martelé M. Rahin. Et
d’ajouter que Fellah est un « bouc-émissaire » et que « le responsable en fin de compte
de ce ratage, c’est le président de la Cour des comptes lui-même, car les cours régionales envoient tous leurs rapports d’inspection à la Cour des comptes et c’est celle-ci
qui choisit les rapports qui doivent faire partie du rapport final. Démettre le président
de la cour régionale de Casablanca, c’est de la poudre aux yeux » (Libération, Akhbar
Al Yaoum, 08/02/2013).
Le rapport de la Cour des comptes transmis aux magistrats chargés des crimes financiers : le quotidien Rissalat Al Oumma daté du 4 mars 2013 a rapporté des révélations
du journal électronique Goud, selon lesquelles le ministère de la justice et des libertés
a transmis le rapport 2011 de la Cour des comptes à un comité de juges spécialistes
des crimes financiers afin qu’ils puissent examiner les irrégularités contenues dans le
rapport concernant les différents établissements publics (Rissalat Oumma, 04/03/2013).
Rapport de la Cour des comptes sur les comptes des partis politiques pour
l’année 2011
Partis politiques : la transparence, juste dans les discours : transparence et reddition
des comptes sont des slogans exploités à tort et à travers dans les discours politiques.
Car la réalité est très différente, d’après ce qui ressort du rapport sur les finances des
partis politiques pour l’année 2011 rendu public par la Cour des comptes en novembre
2013. Une situation embarrassante, pour des formations loin d’être en règle, en termes
d’utilisation et de justification des financements reçus dans le cadre du soutien public.
Le rapport de la Cour des comptes a été réalisé à la suite de trois missions. La première
a visé la vérification des comptes des partis politiques et de leurs dépenses, dans le
cadre du soutien annuel à la couverture des frais de gestion en 2011. Il en ressort que
sur les 35 partis officiels, seuls 21 ont présenté leurs comptes à la Cour. Pire, seulement
8 d’entre eux l’ont fait dans les délais légaux, et 14 formations n’ont pas jugé utile de
présenter leurs comptes. Le rapport de la Cour des comptes précise également que les
49,44 millions de Dh de soutien ont été répartis sur 8 partis politiques. Il s’agit des principaux partis représentés au Parlement, à savoir : le PJD, l’Istiqlal, le PAM, le RNI, l’USFP,
le MP, le PPS et l’UC. Ces partis s’appuient essentiellement sur cette aide publique. Cette
dernière représente 88% du total de leurs ressources (L’Economiste, Les Eco, Al Bayane,
MarocHebdo, Al Massae, Assabah, Akhbar Al Yaoum, 11/11/2013).
Les partis politiques devront restituer plus de 15 millions de dirhams au Trésor : la deuxième mission réalisée par la Cour des comptes a consisté à vérifier l’utilisation des montants accordés par l’Etat aux partis politiques. La Cour fait savoir que sur les 29 partis
politiques ayant bénéficié de la contribution étatique (219,74 millions de DH), seuls 18
ont adressé à la Cour des comptes les pièces justificatives de leurs dépenses électorales
dans les délais règlementaires. Les partis bénéficiaires de la participation étatique au
financement de leurs campagnes électorales ont déclaré plus de 205 millions de DH de
dépenses. Après vérification, la Cour affirme que le montant de la participation insuffisamment justifiée s’est établi à 49,845 millions de DH. Alors que le montant à restituer
au Trésor a été arrêté à environ 15,805 millions de DH. La troisième mission réalisée par
la Cour des comptes a concerné les dépenses engagées par les candidats aux élections
législatives pour leur campagne électorale et les pièces justificatives afférentes. Le rap30
port fait état de 7 102 candidats, alors que 2 328 seulement ont déposé leurs déclarations à la Cour, soit un taux de dépôt de 32,78% (Le Matin, L’Economiste, Al Ahdath Al
Maghribia, Attajdid, Sahara Maghribia, Al Khabar, Al Akhbar, Al Haraka, 12/11/2013).
Abdessamad Saddouq, secrétaire général de Transparency Maroc : « les partis politiques sont loin de donner l’exemple » : dans un entretien accordé à l’hebdomadaire
Le Temps du 22 novembre, Abdessamad Saddouq, secrétaire général de Transparency
Maroc, interrogé sur le rapport de la Cour des comptes sur les comptes des partis politiques, souligne : « le constat dressé par la Cour des comptes est déconcertant car on réalise qu’il y a une déperdition des fonds publics par les partis politiques qui sont tenus,
en plus du respect de la loi, à un devoir d’exemplarité. Ce sont les formations politiques
qui, à travers le Parlement et l’Exécutif, édictent les lois, gouvernent, prennent les décisions stratégiques. Pourtant, elles sont loin de donner l’exemple. Ces formations qui se
gargarisent de discours sur la transparence sont celles-là mêmes qui ne donnent pas
l’exemple. » Selon M. Saddouq, le fait que la moitié des dépenses liées aux subventions
électorales ne soient pas justifiées, « renvoie simplement à la mauvaise gouvernance. »
« Cela dit, il faut, à mon avis, différencier les jugements. Les partis ne doivent pas être
logés à la même enseigne et il ne faut pas les mettre dans le même sac. Il y a des partis
qui ont fourni des comptes détaillés et certifiés. D’autres ont déposé leurs dossiers hors
délai. Certains n’ont même pas jugé utile de justifier les dépenses des fonds publics »,
ajoute M. Saddouq qui note : « il y a, à mon sens, un réel problème de gouvernance,
surtout quand il s’agit de fonds publics. L’Etat doit prendre des décisions pour mettre
fin à ces dérives. » « Il faut appliquer la loi, c’est une question de principe. Il faut, le cas
échéant, que la justice, censée être indépendante, se saisisse de ces dossiers et statue
dessus », conclut M. Saddouq. »
Le plan du Conseil économique, social et environnemental sur la gouvernance des services publics
Services publics : la grave crise de confiance : la relation à l’administration est vécue par
le citoyen comme un rapport de force qui lui est défavorable même quand il obtient
gain de cause. Toute démarche administrative est perçue comme un pénible parcours
d’obstacles où le service rendu devient une faveur qui s’octroie au lieu d’un droit que
l’on est en mesure de revendiquer. Ce sont là quelques constats relevés par le Conseil
économique, social et environnemental (CESE) dans un avant-projet de rapport sur le
« La gouvernance des services publics » révélé en juin 2013. Ses conclusions s’apparentent à une instruction à charge de l’immobilisme de l’administration. Dans son diagnostic, le CESE s’est basé sur les résultats d’une étude nationale menée par un cabinet.
Des enquêtes de terrain et des focus groupes ont été organisés. Il en ressort des griefs
aussi nombreux qu’alarmants. Le travail du CESE rend compte du climat de méfiance
qui caractérise la relation avec le citoyen. « L’usager se défie de l’agent qu’il pense systématiquement corrompu, incompétent, paresseux et l’agent se défie de l’usager qu’il
considère comme un contrevenant en puissance », souligne le document (L’Economiste,
25/06/2013).
Rapport sur le coût de la rente à Casablanca
Une commission d’élus s’est penchée sur le patrimoine de la ville de Casablanca. Après
des mois de travail, elle a publié en septembre 2013 son rapport qui révèle que la ville
de Casablanca perd près d’un milliard de dirhams par an au profit de rentiers qui, parfois, n’ont même pas la décence de s’acquitter du loyer symbolique fixé par des contrats
léonins quand ils existent (Challenge 13-19/09/2013).
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
31
Rapport 2012 de l’Unité de traitement du renseignement financier
L’Unité de traitement du renseignement financier (UTRF), créée en 2009, a présenté
en octobre 2013 son rapport annuel 2012 au chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane. Il en ressort que l’Unité a transmis 14 dossiers au procureur du roi du tribunal de première instance de Rabat. Neuf de ces dossiers ont été transmis au cours de
l’année 2012, comme le précise le rapport de l’UTRF contre cinq en 2011. Les dossiers en
question concernent le détournement d’argent via des transferts frauduleux, le dépôt
bancaire d’argent lié au trafic de drogue, l’escroquerie à travers des transferts frauduleux au profit d’entreprises sans activités, la falsification et l’utilisation de documents
douteux… Les autres opérations menées par l’UTRF ont connu aussi une importante
évolution, notamment en termes de nombre de déclarations de soupçon reçues. Le rapport fait état de 169 déclarations en 2012 contre 11 en 2009, 70 en 2010 et 102 en 2011.
Ce qui présente une évolution de l’ordre de 62,7% entre 2011 et 2012. Le rapport de
l’UTRF montre que les déclarations proviennent de trois principales entités : les banques
et les sociétés de transfert de fonds essentiellement (2009-2011) et accessoirement des
notaires (2012) (Le Matin, L’Opinion, Al Khabar, 21/10/2013).
Maroc : rapport alarmant du Conseil économique, social et environnemental sur l’accès aux soins de santé
C’est un constat des plus affolants en matière de santé qu’a effectué le Conseil économique, social et environnemental (CESE). Celui-ci a publié en octobre 2013 un rapport
commandité par le chef du gouvernement sur la situation de l’accès des marocains aux
services de santé. Le bilan de ce diagnostic est loin d’être reluisant : le secteur de la
santé est toujours plombé par ses maux ordinaires : manque criant de moyens humains
et matériels, cherté des soins, corruption, absence de coordination entre le public et
le privé. Si aujourd’hui cela ne semble plus une surprise, le constat du CESE a de quoi
susciter des inquiétudes. D’après son rapport, le secteur est marqué par une pénurie du
personnel soignant et une répartition très inégalitaires en fonction des régions (Yabiladi, Aujourd’hui Le Maroc, L’Economiste, Le Matin, Libération, La Vie éco, Al Massae,
Al Ahdath Al Maghribia, 10/12/2013).
Des médicaments chers : à la suite de la publication du rapport alarmant du Conseil
économique, social et environnemental (CESE), sur l’accès aux soins, Hakima Himmich,
rapporteur de la Commission permanente chargée des affaires sociales du CESE fait
savoir, concernant l’accessibilité des médicaments, que le budget que le ministère de
la santé réserve aux médicaments est passé de 1,6 milliard de DH en 2012 à 2,2 milliards en 2013. Objectif : couvrir les besoins en médicaments des bénéficiaires du régime
d’assistance médicale. Les arrêtés qui déterminent les modalités de fixation des prix des
médicaments sont, eux aussi, qualifiés d’obsolètes et ils contribuent à leur prix élevé.
Les marges de distribution sont élevées et ne sont pas dégressives en fonction du prix
du médicament, ce qui constitue, selon Mme Himmich, une aberration. Le système de
santé au Maroc est également caractérisé par le fait que le stockage et la distribution
des médicaments du secteur public sont très centralisés, posant d’énormes problèmes,
comme en témoignent les difficultés de stockage et de conservation, les grandes quantités de médicaments périmés, les retards de livraisons et les ruptures de stock (L’Opinion, Aujourd’hui Le Maroc, L’Economiste, Aufait, Libération, Attajdid, Rissalat Oumma, 10/12/2013).
Les recommandations du CESE concernant l’accès aux soins : si le CESE reconnaît « la
difficulté d’accès équitable à des soins de qualité, en raison des nombreuses contraintes
qui pèsent sur le secteur », le rapport adressé au chef du gouvernement propose
32
quelques pistes de réforme. Celles-ci « doivent être prises dans leur globalité, dans la
mesure où les problèmes sont fortement liés ». Il s’agit notamment de l’amélioration
de l’accès aux soins de base, à travers la réorganisation du réseau des centres de santé.
Cela devra passer par la mise en place d’une carte sanitaire nationale, prévue par la
loi 34-09 relative au système de santé et à l’offre de soins. A cela s’ajoute le renforcement de la couverture, via une stratégie sanitaire mobile, adaptée aux spécificités géographiques locales. Parallèlement, le CESE a recommandé l’amélioration de l’accès aux
médicaments, à travers une nouvelle politique globale, et la promotion des génériques.
Il s’agit également d’investir massivement dans le développement des ressources humaines, et dans la lutte contre la corruption, très élevée dans le secteur (L’Economiste,
Aufait, Aujourd’hui Le Maroc, 10/12/2013).
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
33
Actes de corruption et infractions apparentées rapportés
par la presse : apercu des secteurs les plus touchés
Les actes de corruption et infractions assimilées rapportés par la presse durant l’année
2013 confirment le diagnostic des rapports internationaux et nationaux, accablant pour
le Maroc en matière de lutte contre la corruption. L’Observatoire de la corruption de
Transparency Maroc vous rapporte, certains des actes de corruption et infractions apparentées révélés par la presse nationale. L’accent est mis sur quatre secteurs les plus
touchés selon la presse en 2013 : les collectivités territoriales ; la justice ; la police, la
gendarmerie et les douanes ; enfin le secteur du commerce notamment le cas du marchés de gros de fruits et légumes à Casablanca.
1. Gouvernance locale et les méfaits de la corruption
S’agissant de la corruption qui gangrène la gestion locale, le constat demeure inchangé : les années se suivent et se ressemblent car les actes de corruption, de dissipation
de deniers publics et de détournements de fonds persistent. Des cas de condamnation
d’élus pour corruption et des affaires encore en cours devant les tribunaux illustrent
parfaitement la situation. Ces cas ont été rapportés par la presse nationale en 2013.
En matière de condamnations, en début d’année 2013 déjà, le tribunal de première
instance de Marrakech a condamné (mercredi 16 janvier 2013) un moqadem et deux
agents d’autorité de la commune de Harbil (province de Marrakech), impliqués dans
une affaire de corruption, à six mois de prison ferme. Ils avaient été arrêtés en flagrant
délit de corruption alors qu’ils percevaient une somme de 5 000 dirhams pour faciliter
les procédures d’acquisition d’un lot de terrain par un citoyen (Al Massae, Al Ahdath Al
Maghribia, 11/01/2013). En février 2013, ce fut au tour de deux agents d’autorité de la
commune rurale de Riah (province de Berrechid), impliqués dans une affaire de corruption et de chantage, d’être condamnés à quatre mois de prison ferme par le tribunal de
première instance de Settat. Les accusés avaient reçu un pot-de-vin de 10 000 dirhams
d’un investisseur de la région. A la suite d’une plainte de ce dernier, les fonctionnaires
avaient été arrêtés en flagrant délit grâce au piège tendu par la gendarmerie en coordination avec la victime (Al Khabar, Al Akhbar, Al Massae, 22/02/2013).
L’affaire la plus emblématique a été sans aucun doute, la condamnation, lundi 27 mai
2013, du président du conseil municipal de Sidi Yahya el Gharb, Mohamed Hsaïni, à
une peine de 1 an et demi de prison ferme, assortie d’une amende de 10 000 dirhams
ainsi qu’à 20 000 dirhams de dommages et intérêts au profit de la partie civile, par la
chambre criminelle chargée des crimes financiers de la cour d’appel de Rabat. L’accusé,
qui est également membre de la chambre des conseillers, était poursuivi pour corruption et trafic d’influence. Il a été arrêté sur ordre du parquet général, début janvier
2013, en flagrant délit de corruption, en possession de 200 000 dirhams qui lui auraient
été remis par un entrepreneur chargé des travaux de revêtement des chaussées dans la
ville de Sidi Yahya el Gharb, relevant de la province de Sidi Slimane (infomédiaire, Aufait, Le Reporter, Al Khabar, Al Akhbar, Al Haraka, Al Ahdath Al Maghribia, 29/05/2013).
M. Lahssaini a vu sa peine aggravée en appel. En effet, la chambre criminelle chargée
des crimes financiers de la cour d’appel de Rabat a condamné M. Lahssaini à deux ans
de prison ferme dans cette affaire (Al Ahdath Al Maghribia, 01/11/2013).
La décision du ministère de l’intérieur de limoger plusieurs élus locaux, intervenue en
septembre 2013, confirme le fait que la corruption constitue un handicap dans la gestion des collectivités territoriales. En effet, un grand nettoyage a été effectué par Mo34
hand Laenser, ministre de l’intérieur à l’époque, dans plusieurs collectivités territoriales.
Pas moins de 18 conseillers locaux ont été relevés de leur fonction par le ministère qui a
aussi dissout un conseil communal en entier. Selon la décision du ministre de l’intérieur,
publiée au Bulletin officiel numéro 6186 daté du 12 septembre 2013, 7 conseillers communaux ont été démis de leurs fonctions dans la préfecture de Salé et 6 autres à Azilal.
Le président et trois de ses vice-présidents de la commune de Smia dans la province de
Taza ont été également démis de leurs fonctions. De même, le président de la commune de Taoughilt dans la province de Sidi Kacem, a été relevé de ses fonctions. Une
mesure aussi valable pour le président de la commune de Mers El Kheir dans la préfecture de Skhirate-Temara. La plus grande action a été opérée dans la province de Settat
où tout le conseil communal de Bni Khloug a été dissout. Les nombreuses irrégularités
notées dans le rapport de l’Inspection générale relevant de l’administration territoriale
sont les raisons de ce coup de balai (Yabiladi, Al Bayane, Les Eco, 18/09/2013).
Par ailleurs, le ministère de l’intérieur a également décidé en novembre 2013 de révoquer onze élus locaux. Sept présidents de communes et d’arrondissements dans différentes régions du Royaume figurent dans la liste des révoqués. Les autres élus limogés
sont des adjoints des présidents. La décision a été prise par le chef du gouvernement
Abdelilah Benkirane et son ancien ministre de l’intérieur, devenu entre temps ministre
de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire national, Mohand Laenser... Les personnes limogées étaient élues dans les communes suivantes : Aferkat dans la province
de Guelmim, l’arrondissement Sebata dans la préfecture de Ben M’sik, Sidi Boubker El
Haj à Kenitra, la commune de Sidi Dahbi à Settat, la commune Imoukazane à Al-Hoceima et la commune Ait Baza dans la province de Boulmane. Les sanctions prononcées
contre ces élus ont été prises sur la base des rapports effectués par l’Inspection générale
de l’administration territoriale du ministère de l’intérieur. Certains des faits reprochés
à ces élus sont particulièrement graves et peuvent même faire l’objet d’une instruction
judiciaire. Cependant, la décision gouvernementale rendue publique par le Secrétariat
général du gouvernement ne précise pas si des poursuites judiciaires seront engagées.
Les enquêtes menées ont révélé notamment chez certains élus des manquements à la
procédure des appels d’offres, des dépenses injustifiées et l’absence d’une comptabilité
ainsi que des recrutements douteux (Aujourd’hui Le Maroc, Les Eco, Yabiladi, Ittihad Al
Ichtiraki, Bayane Al Yaoum, Al Alam, Hespress, Al Ahdath Al Maghribia, 29/11/2013).
Vendredi 27 septembre 2013, le ministère de l’intérieur a également destitué un
conseiller municipal de la commune d’Inezgane après son inculpation dans une affaire
de corruption. Le conseiller a en effet été pris en flagrant délit par la police judiciaire
d’Inezgane, alors qu’il recevait une somme de 350 dirhams d’un citoyen pour faciliter
l’acquisition d’un compteur électrique. Les services de la police judiciaire ont tendu un
piège à l’accusé à la suite de la plainte adressée au parquet général d’Inezgane par le
citoyen, qui a déclaré avoir subi un chantage de la part du conseiller municipal (Rissalat
Oumma, Al Massae, 30/09/2013).
S’agissant des affaires encore pendantes devant les tribunaux, elles sont nombreuses.
Par exemple, la Cour de cassation s’est prononcée, vendredi 07 juin 2013, sur la recevabilité du pourvoi du procureur général du roi de la cour d’appel d’El Jadida et de
l’avocat de l’Etat marocain dans l’affaire de l’extension du siège de la province d’El
Jadida... Pour rappel, la chambre criminelle de la cour d’appel d’El Jadida avait acquitté
en juillet 2012 les accusés poursuivis dans cette affaire pour détournement de fonds
publics et falsification du procès-verbal déterminant les prix des travaux et du matériel.
Sont poursuivis dans ce dossier l’entrepreneur Mahfoud Ouâl, l’ex-chef de la division de
l’urbanisme et de l’environnement de la province actuellement chef de la division des
études et de la programmation, Mhamed Farès, Abderrahim Terrache, l’ex-responsable
de la division du budget de la province, l’architecte Mohamed Amine Essanhaji, resPublication annuelle - Observatoire de la Corruption
35
ponsable du bureau d’études, Mustapha Lahkik, ingénieur d’Etat retraité, et des techniciens de la division de l’urbanisme de la province Abdellah Teffani, Bouâzza Ouazzaâ
et Abderrahim Chafiî ainsi que Naîma Addabdi, régisseur communal. En première instance, l’accusé Mahfoud Ouâl avait été condamné à 2 ans de prison ferme et à restituer
la somme détournée (3 329 000 DH) pour falsification d’un PV officiel et pour détournement de fonds publics. Abderrahim Terrache avait été condamné à 2 ans et demi de
prison ferme pour les mêmes motifs et Mohamed Amine Essanhaji à un an et demi pour
complicité et à verser à l’Etat marocain, solidairement, 2 000 000 DH. Les autres accusés
avaient été acquittés. »
Parmi les poursuites judiciaires en cours contre les élus locaux, on peut citer :
La police de Martil a arrêté, lundi 28 janvier 2013, un agent d’autorité de la préfecture
de M’diq-Fnideq en flagrant délit de corruption. L’agent aurait été surpris par le pacha
de la ville au moment où il percevait une somme de 1 000 DH. L’agent d’autorité négociait avec certains propriétaires des cafés de Martil pour qu’il ferme les yeux sur l’usage
du Chicha dans leurs cafés (Al Massae, Al Ittihad Al Ichtiraki, 28/01/2013).
La chambre criminelle de la cour d’appel de Settat a renvoyé, à la demande du ministère public, le dossier des personnes poursuivies pour détournement de biens publics
dans la commune de Sidi El Aidi, devant la chambre criminelle chargée des crimes financiers près la cour d’appel de Casablanca. Dans ce dossier, le président de la commune
qui est en liberté provisoire, est poursuivi pour détournements de fonds à la suite du
rapport de la cour régionale des comptes de Settat, qui a relevé des irrégularités dans la
gestion de la commune de Sidi El Aidi en 2007. Le rapport avait également mis l’accent
sur l’absentéisme des fonctionnaires et des agents de la commune, des irrégularités
relatives à l’urbanisme et sur la conclusion de marchés fictifs. Les poursuites auraient
été déclenchées à la demande du ministre de la justice (Al Akhbar, 14/02/2013).
Abdelkader Zaher, président istiqlalien de la commune rurale d’Aïn Baïda à Fès, a été
arrêté vendredi 22 février 2013 au moment où il s’apprêtait à corrompre deux conseillers du Parti authenticité et modernité, afin, semble-t-il, d’obtenir leur vote en faveur
du compte administratif du conseil lors de la session de février. Le politicien, proche
du chef de l’Istiqlal et maire de Fès Hamid Chabat, a été piégé par les deux élus et le
procureur général de la ville. La gendarmerie royale l’a arrêté alors qu’il remettait 40
000 dirhams à l’un des élus. Relâché dimanche 24 février 2013 après le paiement d’une
caution, Abdelkader Zaher est interdit de quitter le territoire marocain jusqu’à son procès prévu le 2 avril 2013. Avocat au barreau de Fès, Abdelkader Zaher a nié tout en bloc.
L’argent trouvé dans son véhicule n’aurait aucun lien avec une quelconque affaire de
corruption, clame-t-il. L’Istiqlal, qui a organisé un sit-in devant le tribunal de première
instance de Fès à l’initiative de Fatima Tarik, députée et épouse de Hamid Chabat, crie
au complot (Bladi, Le Soir échos, Le Reporter, Attajdid, Al Massae, Akhbar Al Yaoum,
Assabah, Al Ahdath Al Maghribia, 26/02/2013).
La chambre criminelle chargée des crimes financiers de la cour d’appel de Fès devrait
statuer le 8 mai 2013 dans le dossier concernant des irrégularités financières dans la
commune urbaine d’Oujda. La cour a convoqué 29 témoins, dont cinq femmes, des
fonctionnaires et des élus de la commune. Un parlementaire et son cousin sont également poursuivis dans cette affaire pour dissipation de deniers publics, faux et usage de
faux (Assabah, 29/04/2013).
Les sources du quotidien Al Akhbar daté du 18 mai 2013 ont rapporté que Khadija Labdar, conseillère à la commune d’Essaouira, aurait reçu une lettre du procureur général
de Safi l’informant que sa plainte contre le président de la commune d’Essaouira, Mohamed El Ferraâ, et qu’elle a été transmise au procureur général du roi de Marrakech.
Pour rappel, la conseillère accuse Mohamed El Ferraâ d’avoir vendu à des responsables,
36
des biens immobiliers de la commune à des prix inférieurs à ceux du marché (Al Akhbar,
18-19/05/2013).
Il est impossible de passer sous silence l’Affaire « Casino Es Saâdi » à Marrakech. Le
juge d’instruction de la cour d’appel de Marrakech a décidé en octobre 2013 de renvoyer devant la juridiction de jugement les personnes impliquées dans ce scandale,
dont des élus et des promoteurs immobiliers. Il a transmis le dossier au procureur général aux fins de citation devant la chambre criminelle. Les accusés sont poursuivis notamment pour corruption, dissipation de deniers publics, trafic d’influence et faux et usage
de faux (Al Ahdath Al Maghribia, 13/08/2013). La première audience du procès dans
cette affaire a eu lieu le 24 Octobre 2013 (Al Khabar, Al Massae, Akhbar Al Yaoum, Al
Ahdath Al Maghribia, 24/09/2013). Le juge chargé de statuer dans l’affaire à la cour
d’appel de Marrakech a décidé, jeudi 24 octobre 2013, de reporter le procès au 28
novembre 2013. Il a convoqué pour la prochaine audience Fatima Zahra El Mansouri,
maire de Marrakech, qui devra témoigner. Transparency Maroc s’est constitué partie
civile dans cette affaire (Al Massae, 23/10/2013). Au cours de l’audience qui a eu lieu
jeudi 27 novembre 2013, la cour d’appel de Marrakech a décidé de reporté le procès au
9 janvier 2014 (Attajdid, 29/11/2013).
L’affaire « City One » a également intéressé la presse. Dans cette affaire, le juge d’instruction à la troisième chambre de la cour d’appel de Marrakech a décidé, mardi 24
septembre 2013, de placer le premier adjoint du maire de Marrakech, Abdelaziz Bennine, sous contrôle judicaire en lui interdisant de quitter le territoire national et en
confisquant son passeport. A. Bennine est poursuivi pour dissipation de deniers publics
et falsification de documents officiels (Al Ittihad Al Ichtiraki, Rissalat Oumma, Attajdid, Al Alam, Assabah, Al Khabar, Al Massae, Akhbar Al Yaoum, 26/07/2013). Lors de
l’audience du jeudi 26 septembre 2013, Me El Ghaloussi, avocat, militant des droits de
l’homme et président de la section de Marrakech de l’Instance nationale de la protection des biens publics, a demandé la convocation des membres de la commission ad
hoc qui avait autorisé par dérogation Abdelaziz Banine, élu et promoteur immobilier,
à construire, à travers sa société de promotion immobilière City One, deux complexes
résidentiels et commerciaux et un immeuble R+5 sur un terrain lui appartenant sur le
boulevard Mohammed VI. Me El Ghaloussi, principal plaignant dans le dossier « City
One », a confirmé lors de la séance d’écoute, selon les sources d’Al Massae, que l’ancien
Wali était alors président de la commission ad hoc (Al Massae, 26/09/2013).
Autres affaires : le parquet de la cour d’appel de Marrakech a engagé des poursuites
contre le président de la commune de Ktaoua, province de Zagora, pour une affaire de
dissipation de deniers publics, faux et usage de faux. Le procureur général de la cour
d’appel de Marrakech a saisi le juge d’instruction de la troisième chambre chargée des
crimes financiers de la juridiction (Akhbar Al Yaoum, 12/08/2013).
Le procureur général de la cour d’appel de Marrakech a décidé de poursuivre en justice Omar Jazouli, ancien maire de Marrakech, son adjoint, un conseiller municipal
ainsi que certains fonctionnaires pour dissipation de deniers publics et faux et usage
de faux (Al Alam, Al Massae, 09/09/2013). A l’issue de son interrogatoire qui a eu lieu
lundi 26 novembre, Omar Jazouli, est interdit de quitter le territoire national. Tel est la
décision du juge d’instruction de la chambre criminelle chargée des crimes financiers
de la cour d’appel de Marrakech comme l’a rapporté le quotidien Akhbar Al Yaoum
dans son édition du mercredi 27 novembre. Le juge d’instruction a également ordonné le placement de M. Jazouli sous contrôle judiciaire et le retrait de son passeport.
L’ex-maire de Marrakech est poursuivi par le parquet pour notamment « dissipation
de deniers publics », « faux et usage de faux ». L’affaire, rappelle le quotidien arabophone Al Massae, remonte au 6 août 2012 lorsque la cour régionale des comptes a
condamné Omar Jazouli et ses proches collaborateurs à des sanctions financières pour
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
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des « irrégularités » commises dans la gestion communale entre 2003 et 2009 (Le 360,
Akhbar Al Yaoum, Al Massae, Al Bayane, Yabiladi, MarocHebdo, Assabah, Attajdid, Al
Akhbar, 26/11/2013). Dans la même affaire, le juge d’instruction de la chambre criminelle chargée des crimes financiers à la cour d’appel de Marrakech a décidé de retirer
le passeport du parlementaire Abdallah Reffouch, ancien maire adjoint de Marrakech,
et l’a placé sous contrôle judiciaire. M. Reffouch interrogé mardi 10 décembre 2013, est
inculpé pour son implication dans l’affaire des « pourboires » versés à des responsables
du ministère de l’intérieur et à des universitaires et des journalistes étrangers. Cette
affaire qui remonte à l’époque où Omar Jazouli était maire de Marrakech, concerne
des dépenses faramineuses pour l’hébergement dans des hôtels de luxe d’un certain
nombre de personnes n’ayant aucune relation avec le conseil (Al Massae, Akhbar Al
Yaoum, 11/12/2013).
Vendredi 20 septembre 2013, un ancien ministre du gouvernement Karim Amrani (19831985) a été envoyé par le procureur général de Marrakech devant un juge d’instruction
de la ville pour dissipation de deniers publics lors de son mandat en tant que président de la commune urbaine d’Essaouira entre 1997 et 2003. L’ex-président du conseil
municipal d’Essaouira est poursuivi ainsi que dix autres personnes, dont des élus, des
promoteurs immobiliers et le président d’un club sportif d’Essaouira, notamment pour
corruption, dissipation de deniers publics, faux et usage de faux. Le principal accusé, qui
devait être entendu lundi 23 septembre par la chambre criminelle chargée des crimes
financiers de la cour d’appel de Marrakech, aurait transformé un terrain initialement
destiné à un projet de construction de stade de football en un important complexe
immobilier. L’affaire a éclaté en 2003, quand Asmaa Chaabi, fille du milliardaire Miloud
Chaabi et présidente du conseil de la commune urbaine d’Essaouira, a émis des réserves
en signant le procès verbal de passation des pouvoirs avec le président sortant, avant
de l’accuser de dissipation de deniers publics (Bladi.net, 23/09/2013).
A Essaouira, onze élus et fonctionnaires de la commune sont poursuivis pour corruption
et falsification de documents officiels. En effet, le procureur du roi de la cour d’appel
de Marrakech a décidé de les poursuivre après l’enquête de la police judiciaire menée
à la suite de la plainte déposée par l’Instance nationale de protection des biens publics.
Les inculpés seront interrogés par le juge d’instruction de la cour d’appel de Marrakech.
Selon les sources d’Al Massae, Tahar Afifi, ex président de la municipalité d’Essaouira
fait partie des personnes poursuivies (Al Massae, Akhbar Al Yaoum, 24/09/2013).
A Sidi Kacem, à la suite de l’arrestation du président de la commune rurale de Al Haouafate, accusé d’avoir détourné 101 millions de centimes, une somme qui représente les
revenus de location du souk hebdomadaire de la commune, le juge d’instruction de la
cour d’appel de Rabat a convoqué 14 membres du conseil communal soupçonnés d’être
impliqués dans cette affaire (Al Massae, 14/12/2013).
Sans nul doute, le point culminant en matière de gouvernance locale en 2013, a été
la critique adressée par roi Mohammed VI concernant la gouvernance de la ville de
Casablanca. Lors de son discours prononcé vendredi 11 octobre à l’occasion de l’ouverture de l’année parlementaire, le roi a critiqué ouvertement la gestion de la ville de
Casablanca en soulignant notamment que la capitale économique est classée dans la
catégorie des collectivités territoriales qui « pâtissent d’une gestion défectueuse de la
part des instances élues ». Le conseil de la ville présidé par Mohamed Sajid, membre
de l’Union constitutionnelle (UC) et également député, a été la cible des critiques du
roi Mohammed VI. « Casablanca est la ville des disparités sociales les plus criantes, où
se côtoient les catégories riches et les classes pauvres ». Le monarque conclut que le
problème «tient essentiellement à un déficit de gouvernance », causé, en partie, par le
« cumul des responsabilités » (Yabiladi, Infomédiaire, Le Matin, L’Economiste, Les Eco,
Le Reporter, Al Bayane, MarocHebdo, La Tribune, 12/10/2013).
38
Par ailleurs, lors d’une réunion des élus de Casablanca, le nombre des fonctionnaires
municipaux, sujet tabou jusqu’ici, a été enfin dévoilé : 17 000 salariés pour une masse
salariale de 1,3 milliard de dirhams, apprend-on de source médiatique. Ce chiffre représente environ la moitié du budget de fonctionnement (2,35 milliards de DH) et le tiers
du budget général de la ville. A noter que, toujours selon la même source, 40% du personnel (7 000 personnes) sont des fonctionnaires... fantômes (Infomédiaire, 25/10/2013).
Après le discours du roi, le ministère de l’intérieur a décidé d’auditer les finances de la
ville de Casablanca. Les finances du conseil de la ville sont sous la loupe de l’Inspection
générale de l’administration territoriale (IGAT) du ministère de l’intérieur. L’IGAT envisagerait de procéder à une vaste opération d’audit de la gestion communale de la capitale économique, notamment des dossiers relatifs à l’assainissement, aux panneaux de
publicité, à l’urbanisme ainsi qu’aux secteurs de la gestion déléguée. Des responsables
du ministère de l’intérieur ont par ailleurs entendu le maire de la ville de Casablanca,
Mohamed Sajid, et lui ont signifié qu’une équipe de l’IGAT allait faire le point sur les
états financiers de la ville (La Tribune 28/11/2013).
En dehors de Casablanca, lors de la présentation du budget sectoriel du ministère de
l’intérieur au Parlement, Charki Draiss, ministre délégué auprès du ministre de l’intérieur, a affirmé que l’Inspection générale de l’administration territoriale (IGAT) du
ministère de l’intérieur a exécuté 71 missions sur la gestion financière et administrative
des communes durant l’année 2013. M. Draiss a également affirmé que l’IGAT a mis en
place 59 procédures pour traiter les irrégularités relevées dans la gestion des communes
(Al Khabar, 02-03/11/2013).
Refermons cette longue liste de cas de corruption dans la gouvernance locale par un
cas emblématique d’impunité : vingt organisations, partis politiques, syndicats et associations d’Essaouira ont, dans un communiqué adressé en avril 2013, appelé Abdelilah
Benkirane, chef du gouvernement, à respecter ses promesses électorales relatives à la
lutte contre la prévarication. Les signataires du communiqué sont scandalisés par le
cas de Mohamed El Ferraâ qui, un an après sa condamnation à 5 ans de prison ferme
dans l’affaire de la Mutuelle générale des fonctionnaires des administrations publiques,
continue à exercer ses fonctions en tant que président du conseil municipal d’Essaouira.
Un fait qualifié d’insoutenable et de provocateur par les signataires qui, au nom des citoyens de la ville, s’indignent du maintien de Ferraâ à la tête de la commune d’Essaouira qui se trouve dans une situation critique, précise le communiqué. Partis politiques,
syndicats et associations appellent également le ministre de la justice et des libertés
à dévoiler les dessous de cette affaire, et le ministre de l’intérieur à intervenir pour
protéger les biens publics et les droits des citoyens à Essaouira (Libération, 03/05/2013).
2. Système judiciaire : la réforme impossible?
En 2013, la presse nationale a révélé des cas de corruption de magistrats, d’avocats ainsi
que de fonctionnaires qui œuvrent afin que la justice soit rendue. Quand l’institution et
les professionnels chargés de veiller à la bonne administration de la justice apparaissent
parmi les secteurs les plus touchés par la corruption, c’est que l’heure est grave. Le fléau
de la corruption est en effet systémique au Maroc.
En début d’année 2013, le mardi 26 mars précisément, un greffier de la cour d’appel de
Taza a été condamné par la chambre correctionnelle du tribunal de première instance
de Fès, à trois ans d’emprisonnement pour corruption et abus de pouvoir. Le prévenu
a reconnu avoir donné 45 millions de centimes à deux juges pour qu’ils prononcent un
jugement en faveur d’une famille dont les membres résident en Europe et aux EtatsUnis (Assabah, Al Ahdath Al Maghribia, 28/03/2013).
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
39
Dans la même ville de Taza, la chambre criminelle chargée des crimes financiers de la
cour d’appel de Fès a condamné un secrétaire-greffier de la cour d’appel de Taza à deux
ans de prison ferme. Il était impliqué, avec deux juges de la même cour, dans une affaire
de corruption. Le secrétaire-greffier a avoué avoir donné une somme de 54 millions de
centimes aux deux juges pour qu’ils se prononcent en faveur d’une famille dans le cadre
d’un litige immobilier. Quant aux deux juges corrompus, le procureur général de la
cour d’appel de Fès a soumis leur dossier au Conseil supérieur de la magistrature. Pour
rappel, le tribunal de première instance avait condamné le secrétaire-greffier à trois
ans de prison ferme et une amende de 5 000 dirhams (Akhbar Al Yaoum, 28/06/2013).
Un ancien magistrat a été condamné mardi 30 avril 2013 à deux ans et demi de prison
ferme, par le tribunal de première instance de Casablanca, pour fraude aux examens du
baccalauréat. L’affaire remonte à près de deux ans, quand une commission d’enquête
avait émis des soupçons concernant les notes obtenues par le fils de l’ancien magistrat,
lors des épreuves du bac. L’élève avait eu 20 en physique, en mathématiques et en
sciences. Une enseignante en charge de la correction des épreuves, avait remarqué que
l’écriture changeait d’une copie à l’autre. L’ex-juge, reconnu coupable d’avoir transmis
les réponses à son fils dans le centre d’examen, a été destitué de son titre de magistrat
(Bladi.net, 03/05/2013).
Par ailleurs, des magistrats ont été sanctionnés par le Conseil supérieur de la magistrature notamment pour corruption. Les sanctions disciplinaires ont été prises lors de
la session d’avril 2013 du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) à l’encontre de
juges qui ont enfreint la loi dans l’exercice de leurs fonctions. Le rapport détaillé a
été publié dimanche 1er septembre 2013. 4 juges ont été limogés, 5 mis à la retraite,
tandis que 9 autres ont été suspendus de leurs fonctions. D’autres magistrats ont été
moins lourdement sanctionnés : avertissement pour 2 d’entre eux et suspension de la
promotion d’un seul magistrat. Le CSM précise que 2 autres cas n’ont pas encore été
tranchés ; 3 autres juges ont été exemptés de toute sanction. Les motifs de la procédure
disciplinaire engagée à l’encontre de ces magistrats sont liés notamment à leur implication dans des “actions dangereuses portant atteinte à l’honneur de la justice” et au
“manquement à l’obligation de réserve”. Ces infractions ont été sanctionnées par la
révocation des juges impliqués. Les cas de mise à la retraite sont liés à la “négligence
et au manquement aux obligations professionnelles”, à la “corruption” ou encore à
l’enrichissement illicite (L’Economiste, Le Matin, Aujourd’hui Le Maroc, Les Eco, Yabiladi, Libération, La Tribune, Al Massae, Attajdid, Assabah, Sahara Maghribia, Al Ahdath
Al Maghribia, 03/09/2013).
S’agissant des affaires encore pendantes devant les tribunaux, on peut citer : l’arrestation d’un avocat pour détournement de fond. En effet, le juge d’instruction du tribunal
de première instance de Khenifra a placé sous mandat de dépôt un avocat inscrit au
barreau de Meknès, et qui exerce son métier à Khenifra ; il est inculpé de détournement de fonds, abus de confiance et corruption. L’avocat qui préside l’association de
bienfaisance islamique «Dar Talib » avait déposé une plainte contre des membres de
l’association les accusant de détournement des biens de l’association. Après enquête, le
juge d’instruction a décidé de poursuivre non seulement le comptable de l’association
ainsi que des conseillers communaux, mais aussi l’avocat plaignant. Tous sont détenus à
la prison locale de Khenifra (Assabah, Al Massae, 08/01/2013).
A Casablanca, un magistrat arrêté en flagrant délit de corruption. Il s’agit du substitut
du procureur général de la cour d’appel d’El Jadida, qui a été arrêté samedi 16 mars
2013 en flagrant délit de corruption à Casablanca, après avoir reçu la somme de 10 000
dirhams à l’intérieur du véhicule d’un citoyen. Le magistrat piégé par la police judiciaire et l’Inspection générale du ministère de la justice devant son appartement, au
quartier Oulad Ziane à Casablanca, a été interpellé en possession de l’argent, dont les
40
numéros de série correspondaient à ceux fournis par le plaignant. Placé en détention
préventive dans l’attente de son procès, il devrait être déféré devant le Conseil supérieur de la magistrature. En décembre 2012, deux magistrats avaient été interpellés de
la même façon, en flagrant délit de corruption, alors qu’ils recevaient 20 000 dirhams
de l’épouse d’un juge décédé, pour qu’ils interviennent dans une affaire traitée par le
parquet de Rabat (Bladi, Al Ahdath Al Maghribia, Akhbar Al Yaoum, Assabah, Bayane
Al Yaoum, 19/03/2013).
Le procureur général du roi de la cour d’appel d’El Jadida est accusé d’avoir touché un
pot-de-vin estimé à 78 millions de centimes pour classer sans suite une enquête sur une
personne poursuivie pour trafic international de drogue. Cette affaire sera instruite par
le juge d’instruction de la cour d’appel de Marrakech (Akhbar Al Yaoum, 12/08/2013).
La police judiciaire de Midelt a arrêté un secrétaire greffier au tribunal de première
instance de la ville impliqué dans une affaire de corruption. Le secrétaire greffier aurait
été arrêté à la suite d’une plainte déposée par le greffier en chef du tribunal de Midelt
pour dénoncer des actes douteux (Attajdid, 03/09/2013).
Au vu des affaires de corruption qui touchent la justice, la moralisation du secteur
demeure hypothétique. En effet, lundi 04 octobre 2013, lors de la présentation du budget du ministère de la justice devant la Commission de la justice, de la législation et des
droits de l’Homme, Mustafa Ramid, ministre de la justice, a évoqué l’axe stratégique
de la Charte de la réforme du système judiciaire concernant la moralisation du secteur.
M. Ramid a souligné que l’Inspection judiciaire générale et spéciale a été activée à la
suite d’une plainte contre des juges ou des greffiers impliqués dans des agissements
touchant à l’intégrité. L’Inspection a reçu, entre le 1er janvier et le 15 octobre 2013,
33 plaintes contre des magistrats dont 16 se sont soldées par l’établissement de rapports, 141 plaintes contre des fonctionnaires dont 77 ont été classées faute de preuves.
Concernant les greffiers, le ministère de la justice a transmis 22 dossiers à la justice, en
plus de 11 liés à des manquements professionnels. Mais pour l’instant, seuls 4 d’entre
eux ont été suspendus. Pour les autres professions judiciaires, 46 avocats (sur 10 790 que
compte le Maroc) ont fait l’objet de procédures disciplinaires, en plus de 49 notaires, 31
experts, 28 adouls et 10 délégués judiciaires. Parallèlement, des poursuites ont été lancées contre certains de ces professionnels. Il s’agit de 72 avocats, 13 notaires, 16 adouls,
5 experts (L’Economiste, Al Khabar, Al Alam, Al Mounataf, 07/11/2013).
3. Police, gendarmerie, forces auxiliaires et douane
Les forces de sécurité (police, gendarmerie, forces auxiliaires, douane) sont gravement
touchées par la corruption. En témoignent les cas recensés par l’observatoire de la corruption d’après les révélations de la presse nationale en 2013.
S’agissant des condamnations : un gendarme qui avait été arrêté dans une affaire de
corruption dans la province de Chtouka Aït Baha, a été condamné à six mois de prison
ferme et 10 000 dirhams d’amende, ainsi qu’à 5 000 dirhams de dommages intérêts
pour la partie civile par le tribunal de première instance d’Inezgane. C’est à la suite
de la plainte déposée par un citoyen auprès du procureur général de la cour d’appel
d’Agadir, que les agents de la gendarmerie de la province de Chtouka-Ait Baha et le
procureur du roi de la cour d’appel d’Agadir avaient tendu un piège au gendarme et
l’avaient arrêté en flagrant délit de corruption alors qu’il recevait une somme de 2 000
dirhams de la victime. Cette dernière avait affirmé avoir subi un chantage de la part du
gendarme dans le cadre d’un litige concernant un lot de terrain (Al Khabar, Al Ahdath
Al Maghribia, 04/02/2013).
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
41
La chambre criminelle chargée des crimes financiers de la cour d’appel de Rabat a
prononcé en avril 2013 des sentences allant de l’acquittement à 4 ans de prison ferme
contre 18 personnes, dont 16 agents de la police de Skhirat-Témara, impliqués dans une
affaire de corruption. L’accusé principal, le trafiquant de drogue Miloudi Zahaf (surnommé Ould Haiboul), a été condamné à 4 ans de prison ferme, assortis d’une amende
de 10 000 DH pour corruption. La cour a également condamné un agent de la police de
Skhirat-Témara, poursuivi dans cette affaire, à 18 mois de prison ferme, alors que 3 de
ses collègues ont été condamnés chacun à une année de prison ferme, assortie d’une
amende de 5 000 DH. Onze autres agents de la police ont été condamnés à des peines
allant de 3 mois de prison avec sursis à 8 mois de prison ferme, assortis, pour chacun
d’entre eux, d’une amende de 5 000 DH. Le tribunal a acquitté un autre agent de la
police poursuivi dans cette affaire et qui était en détention préventive (Infomédiaire,
Le Soir, Aujourd’hui Le Maroc, Al Bayane, Libération, Aufait, Al Massae, Al Khabar,
Assabah, Al Akhbar, 17/04/2013).
En outre, neuf gendarmes arrêtés sur ordre du Roi Mohammed VI en été 2012, ont
été condamnés à des peines allant de six mois à un an de prison ferme, par le tribunal
militaire de Rabat. Les gendarmes qui appartenaient à la brigade de Melloussa, relevant du commandement régional de Tanger, étaient poursuivis pour avoir enfreint le
règlement militaire. Leurs agissements avaient été dénoncés par des Marocains résidant
à l’étranger dans une plainte adressée au roi Mohammed VI. Accusés notamment de
« corruption et de harcèlement », au poste frontière du port Tanger Med, les fonctionnaires avaient été filmés par des caméras de surveillance. Une vingtaine de policiers,
de gendarmes et de douaniers, qui exerçaient aux postes frontières des ports de Tanger, Nador et Al Hoceima, avaient été dénoncés par des MRE lors de leur entrée au
Maroc. Plusieurs d’entre eux ont depuis été acquittés (Bladi.net, 16/04/2013).
En ce qui concerne les affaires encore pendantes devant les tribunaux, elles sont multiples : trois policiers corrompus ont été arrêtés en flagrant délit de corruption, grâce
à des caméras de surveillance placées non loin du centre-ville de Rabat. L’un d’eux a
été révoqué, après avoir été filmé recevant de l’argent d’automobilistes. A défaut de
preuves suffisantes, les deux autres agents ont été mutés à titre de sanction disciplinaire vers d’autres villes (Bladi, Assabah, Al Akhbar, Akhbar Al Yaoum, 13/02/2013).
A la suite de la plainte déposée par un citoyen auprès du procureur général de la cour
d’appel d’Agadir, les agents de la gendarmerie de la province de Chtouka-Ait Baha ont
arrêté un gendarme impliqué dans une affaire de corruption. Le plaignant a affirmé
avoir subi un chantage de sa part , dans le cadre d’un litige concernant un lot de terrain.
Les agents de la gendarmerie et le procureur du roi de la cour d’appel d’Agadir, qui ont
tendu un piège au gendarme, l’ont arrêté en flagrant délit alors qu’il percevait une
somme de 2 000 dirhams des mains de la victime (Al Ittihad Al Ichtiraki, 19-20/01/2013).
Deux gendarmes ont été arrêtés en flagrant délit de corruption, fin février 2013 à Tizi
n’isly, dans la région de Beni Mellal, par une commission d’enquête de la gendarmerie
royale. Les gendarmes ont éveillé les soupçons des enquêteurs, en quittant leur poste
de contrôle. Ils ont été interpellés au moment où ils recevaient de l’argent d’un camionneur. Les deux hommes, qui seront déférés devant le tribunal militaire de Rabat, ont été
placés en détention provisoire dans l’attente de leur procès (Bladi, Al Khabar, Al Ahdath
Al Maghribia, Hespress, 22-28/02/2013).
A Casablanca, deux gendarmes ont été arrêtés en flagrant délit de corruption en mai
2013, alors qu’ils recevaient un pot-de-vin de la part d’un ferrailleur, dans une stationservice, non loin de l’aéroport Mohammed V. Les agents ont été piégés par le plaignant
qui en avait informé le commandement régional de la gendarmerie et le procureur
général. Ils auraient menacé le ferrailleur de lui faire porter la responsabilité d’un délit
42
qu’il n’a pas commis, s’il refusait de leur donner la somme de 20 000 DH. Les gendarmes
ont été placés en garde à vue dans l’attente de leur jugement. Ils auraient, selon les
premiers éléments de l’enquête, tenté de soutirer de l’argent au commerçant chez qui
ils avaient trouvé une importante quantité de cuivre volé (Bladi.net, Al Ahdath Al Maghribia, Assabah, Al Massae, 20/05/2013).
Le parquet de Taroudannt a ouvert une enquête à l’encontre de trois gendarmes soupçonnés de corruption et d’extorsion envers un citoyen accusé à tort de trafic de drogue.
Le plaignant, propriétaire d’un véhicule de transport de marchandises affirme avoir
été interpellé par les gendarmes dans une station-service de Oulad Berhil, à 45 km
de Taroudannt, d’où il a été conduit au commandement régional de la gendarmerie.
L’homme aurait été contrôlé en périmètre urbain, contrairement au règlement de la
gendarmerie, dont le champ d’intervention se limite aux zones rurales. La perquisition
de son véhicule avait permis de découvrir du cannabis et des feuilles de tabac, dans un
sac de légumes. Une vidéo mettant en scène la tentative d’extorsion du conducteur
sert de pièce à conviction. Toutefois, il n’apparaît nulle part que les accusés aient reçu
de l’argent du conducteur. Les gendarmes auraient chargé un complice de réclamer
15 000 DH au plaignant pour intervenir afin qu’il soit relâché (Bladi.net, Al Massae,
23/07/2013).
Le tribunal militaire de Rabat est saisi du dossier des deux gendarmes arrêtés dans une
affaire de corruption à Témara. Selon des sources dignes de foi, les deux gendarmes
seraient complices d’un groupe des malfaiteurs et de dealers de drogues qui leur versaient des pots-de-vin en échange de leur protection (Al Massae, 28/10/2013).
Des agents de l’inspection générale de la Sûreté nationale ont arrêté deux policiers en
flagrant délit de corruption à Salé en décembre 2013. Le procureur du roi du tribunal
de première instance de Rabat a décidé de poursuivre pour corruption les deux policiers
détenus à la prison Zaki (Al Massae, 30/12/2013).
A Marrakech, le quotidien Al Akhbar daté du 30 décembre 2013 a rapporté que l’administration de la Sûreté nationale a ordonné l’arrestation et la suspension de leurs fonctions pour 6 mois de deux policiers à Marrakech pour corruption et chantage sur des
citoyens.
Enfin, des révélations scandaleuses ont été faites en mars 2013 par un policier concernant la corruption qui gangrène le secteur. Il s’agit d’Hassan Bellouti, le policier qui a
tué trois de ses collègues le 10 mars 2013 dans un commissariat de Mechra Bel Ksiri. Il
a fait des révélations retentissantes sur la corruption et les passe-droits qui sévissent au
sein du corps de la police dans la région. D’après Bellouti, policier depuis 1982, le commissaire et le commandant de la gendarmerie régionale, reçoivent chacun de 10 à 15
000 DH de pots-de-vin par mois de contrebandiers et autres trafiquants qui traversent
la région. Incarcéré à la prison de Kénitra, Bellouti affirme ne pas avoir mis fin à ses
jours, pour pouvoir dénoncer la corruption et les pratiques mafieuses qui gangrènent
la police nationale (Bladi, 26/03/2013).
4. Corruption dans le secteur du commerce : le cas du marché de gros
de fruits et légumes à Casablanca, une foire aux dysfonctionnements
et des procédures interminables
L’un des grands scandales de corruption au Maroc concerne l’affaire du margé de gros
de fruits et légumes à Casablanca. Cette affaire remonte au 8 septembre 2010 quand la
Brigade nationale de la police judiciaire, à la suite d’une plainte déposée par Mourad
Gartoumi, a débarqué au marché de gros. Les investigations qui ont ciblé les services de
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
43
contrôle et de pesage ont permis aux enquêteurs de découvrir une fraude dans les services de pesage et de taxation. Mourad Gartoumi qui est dénonciateur des détournements et irrégularités du marché de gros des fruits et légumes à Casablanca a d’ailleurs
reçu le prix de l’Intégrité 2011 de Transparency Maroc.
Début 2013 (lundi 25 février), la chambre correctionnelle du tribunal de première instance de Casablanca a tranché, dans un premier dossier concernant cette affaire. Elle a
condamné à une amende de 5 000 DH onze prévenus, dont l’ex-président du marché,
l’actuel directeur adjoint, le chef et quatre agents du service contrôle, trois agents du
service pesage et enfin un commerçant. (Aujourd’hui Le Maroc, Al Massae, Assabah,
Akhbar Al Yaoum, Attajdid, Al Akhbar, Sahara Maghribia, 26/02/2013).
Mais, M. Gartoumi a dénoncé en 2013 de nouvelles irrégularités car il aurait découvert
que les taxes appliquées aux marchandises importées par les commerçants du marché
étaient inférieures aux tarifs en vigueur. Gartoumi a essayé de contacter la police et le
maire de la ville, mais personne ne lui aurait répondu. Le silence des autorités de la ville
a poussé Gartoumi à alerter Karim Ghellab, président de la Chambre des représentants
et un conseiller du roi, qui l’auraient écouté et promis de trouver une solution à ce
problème (Al Alam, 15/03/2013).
Lors de l’audience du mardi 19 mars, la défense de Mourad Gartoumi a demandé à la
cour de convoquer le maire Sajid ainsi que d’autres membres du conseil de la ville de
Casablanca. Dans une déclaration au quotidien Al Massae, Mourad Gartoumi, a souligné que les accusés dans ce dossier confirment que Sajid est le premier responsable de
toutes les irrégularités de ce marché puisqu’il n’a pas pris les dispositions nécessaires
pour les empêcher. D’autre part, Gartoumi qui aurait été victime d’un accident de voiture lundi 18 mars, a accusé certaines personnes impliquées dans l’affaire du marché de
gros de Casablanca de vouloir attenter à sa vie.
Mardi 26 mars 2013, la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca décide, de
reporter au 30 avril l’examen de cette affaire où 26 personnes laissées en liberté sont
poursuivies pour dissipation de deniers publics et corruption. Le report a été décidé
pour permettre de convoquer tous les témoins, absents lors de la séance du 26 mars (Al
Massae, Al Akhbar, 21/03/2013) (Sahara Maghribia, 28/03/2013).
En avril 2013, Transparency Maroc (TM) qui s’est constitué partie civile dans l’affaire du
marché de gros des fruits et légumes à Casablanca a réclamé le versement du dirham
symbolique à titre de dommages et intérêts à la partie civile. Le représentant de Transparency Maroc dans ce procès a confirmé que tous les actes attribués aux accusés sont
accrédités par des preuves, des documents et des pièces jointes aux dossiers. Par ailleurs,
le ministère public a joint sa voix à celle de la défense afin que le local commercial de
Morad Gartoumi, dénonciateur des irrégularités au sein du marché, lui soit restitué
(Bayane Al Yaoum, Al Massae, Al Ahdath Al Maghribia, 17/04/2013).
Lors d’une autre audience tenue en juillet 2013, la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca a décidé de reporter au 13 septembre l’examen du volet concernant
les irrégularités dans cette affaire et ordonné deux expertises (une technique et une financière) qui devraient durer trois mois. La cour a également décidé qu’une somme de
50 000 dirhams, payée par les onze personnes poursuivies dans cette affaire, soit allouée
au budget de ces expertises (Sahara Maghribia, Al Massae, 13/06/2013). La chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca a accepté également de convoquer plus de 40
témoins dans l’affaire. Dans la nouvelle liste des témoins figurent notamment les personnes suivantes : Tarek Sbaï, président de l’Instance nationale de protection des biens
publics, qui a déposé une plainte auprès du procureur général du roi pour dénoncer des
détournements estimés à plusieurs milliards de centimes ; un responsable administratif
du marché ; quatre anciens responsables du marché déjà condamnés sur un volet de
44
cette affaire à huit mois de prison avec sursis ; l’ancien chef du service informatique,
ainsi que des gérants de carreaux (Sahara Maghribia, 19/06/2013).
Toujours pendant le mois de juillet 2013, le procureur général du roi de la cour d’appel
de Casablanca a demandé à la police judiciaire d’enquêter une nouvelle fois sur des détournements de biens publics et d’autres irrégularités constatées au marché de gros des
fruits et légumes de Casablanca. La police judiciaire aurait auditionné des commerçants
et des responsables dans le cadre de son enquête sur l’évasion fiscale et des irrégularités
financières (Al Akhbar 12/07/2013).
Mardi 24 septembre 2013, la chambre criminelle chargée des crimes financiers de la
cour d’appel de Casablanca a décidé de reporter au 8 octobre l’audience sur le premier dossier de détournements dans l’affaire. Le tribunal a pris cette décision afin de
pouvoir convoquer les avocats qui ne se sont présentés à l’audience, et de se donner
du temps pour retrouver les accusés en fuite. En outre, le tribunal a décidé de reporter
au 29 octobre l’examen du deuxième dossier traité séparément dans cette affaire où
sont poursuivis 10 accusés (Sahara Maghribia, Bayane Al Yaoum, Al Khabar, Al Massae,
Akhbar Al Yaoum, Al Akhbar, Al Ahdath Al Maghribia, 26/09/2013).
A l’audience du 03 décembre 2013, la chambre criminelle de la cour d’appel de Casablanca a décidé de reporter au 07 janvier 2014 le procès à cause de l’absence de deux
accusés, fonctionnaires aux services des impôts. La cour a décidé que la présence de
ces deux accusés au procès est obligatoire (Assabah, Al Ahdath Al Maghribia, Sahara
Maghribia, 05/12/2013)
En attendant la poursuite du procès dans cette affaire, on apprend, d’après des sources
dignes de foi, qu’une commission d’audit financier mise en place par le ministère des
finances en accord avec l’administration des impôts de Casablanca, procède à des
enquêtes sur des irrégularités financières constatées au marché de gros des fruits et
légumes de Casablanca. D’après les sources du quotidien Sahara Al Maghribia, la commission d’audit a rencontré le directeur actuel du marché de gros et lui a demandé de
fournir les dossiers concernant des commerçants, des agents, et 19 magasins qui ne se
sont pas acquittés des impôts depuis plusieurs années (Sahara Maghribia, Al Khabar,
07-08/12/2013).
D’une manière plus globale, corruption, abus de pouvoir, anarchie et malversations
sont les graves accusations qui fusent dès que le marché de gros de Casablanca est
évoqué. Aujourd’hui, cinq affaires au total sont en justice en lien avec ce marché et une
longue liste de personnes sont impliquées. C’est un feuilleton plein de remous, dont
le prologue a été entamé il y a une douzaine d’années, lorsqu’un commerçant de ce
marché a ouvert la boîte de pandore sur plusieurs pratiques qu’il qualifie « d’illégales ».
« Des millions et des millions de dirhams ont été détournés depuis 1986. J’adresse des
réclamations depuis une douzaine d’années et ce dossier a tellement fait couler d’encre
qu’il est aujourd’hui un scandale connu de tous », commente Mourad Gartoumi. Au
fil des années, les dossiers se sont accumulés devant la justice. À coups de preuves,
d’expertises, de dénonciations et de dénégations, ces dossiers suscitent aujourd’hui la
colère de nombreux intervenants en raison de la lenteur des procédures judiciaires (Les
Eco, 17/12/2013).
Dans un entretien accordé au quotidien Les Eco du 17 décembre 2013, Abdessamad
Saddouq, secrétaire général de Transparency Maroc (TM), interrogé sur ce que pense
TM du dossier du marché de gros des fruits et légumes de Casablanca, souligne : « Nous
suivons ce dossier , nous nous sommes constitués partie civile et nous avons attribué le
prix de l’Intégrité de l’année 2011 à l’un des dénonciateurs des pratiques illégales dans
ce marché, Mourad Gartoumi. Ce qui caractérise ce dossier, c’est sa lenteur. Depuis plus
de dix ans, il est devant les tribunaux. Il est incompréhensible que cela dure autant. »
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
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Invité à commenter le fait que TM se soit constitué partie civile dans ce dossier, M. Saddouq déclare : « c’était la première fois que nous nous constituions partie civile depuis
que l’association a acquis le statut d’utilité publique en 2009. Nous avons demandé le
versement du dirham symbolique, mais nous considérons qu’on ne peut clore ce dossier sans que toute la lumière ne soit faite sur les montants détournés et sans que les
inculpés ou du moins ceux qui auront été jugés coupables, ne restituent les sommes
illégalement acquises. »
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Prix de l’Integrité 2013 de Transparency Maroc
Le prix de l’Intégrité 2013 de Transparency Maroc (TM) a été attribué au directeur de la
Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS), Abdelaziz Adnane. « Le
jury a décidé d’attribuer cette distinction au directeur de la CNOPS en reconnaissance
de son engagement et de ses positions courageuses contre les abus qui caractérisent
les secteurs du médicament et des prestations médicales ainsi qu’à son action, à la tête
de la Caisse, pour améliorer sa gouvernance et la qualité des services rendus », selon le
communiqué de TM daté du 11 décembre 2013. Instauré en 2009 par TM, le « prix de
l’Intégrité » vise à promouvoir la culture de la transparence. Il consiste à attribuer un
trophée symbolique aux individus ou aux associations qui par leur action contribuent à
la lutte contre la corruption. Le premier prix a été décerné en 2010 à Chakib El Khyari,
président de l’association Rif des droits de l’homme. Le deuxième prix a été accordé
à Mourad Gartoumi, un commerçant qui a dénoncé « les pratiques frauduleuses » au
marché de gros des fruits et légumes à Casablanca. Enfin, le troisième prix est revenu
à Mouad Belghouat, alias «Al Haked». Le jeune rappeur dénonçait la corruption dans
ses chansons (Le 360, Aujourd’hui Le Maroc, Le Matin, Yabiladi, Les Eco, TelQuel, Infomédiaire, 16/12/2013).
Indicateurs statistiques
Les indicateurs statistiques ci-dessous ont été élaborés sur la base des informations
rapportées par la presse nationale en 2013. Ils ne reflètent pas forcément le degré de
corruption par secteur, mais ne font que récapituler les cas révélés par la presse. ils n’ont
pas la prétention de mesurer la prévalence de la corruption par secteur. Les collectivités
territoriales 27% ; la police-gendarmerie-forces auxiliaires 12% ; la santé 11% ; la justice 9% ; commerce-industrie 7% ; établissements publics 7% ; fonction publique 6% ;
le sport et le secteur privé ferment la marche avec 4%.
Ci-dessous le tableau récapitulatif des secteurs les plus touchés par la corruption selon
les révélations de la presse :
Publication annuelle - Observatoire de la Corruption
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Observatoire de la corruption
SECTEUR
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NOMBRE
POURCENTAGE
Collectivités territoriales
61
27%
Police-gendarmerie-forces auxiliaires
27
12%
Santé
25
11%
Justice
20
9%
Commerce - industrie
16
7%
Etablissements publics
15
7%
Fonction publique
14
6%
Sport
9
4%
Secteur privé
8
4%
Impôt/finances
2
1%
Transports
2
1%
Habitat – immobilier - foncier
2
1%
Douanes
2
1%
Secteur pénitentiaire
2
1%
Autre
17
8%
TOTAL
222
100%
Casablanca : siège
24, bd Khouribga, 3e étage.
E-mail : [email protected]
Tél. : 0522.54.26.99
Fax : 0522.45.13.91
Rabat
28, rue Oum Errabiaa. Agdal.
E-mail : [email protected]
Tél. : 0537.77.80.01
Fax : 0537.68.36.82