Présence et Mission – Sainte Edith Stein
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Présence et Mission – Sainte Edith Stein
Le Bulletin de San Damiano Media N° 27 - 2e Tr 2006 Email : [email protected] Ascension Jésus monte au Ciel après avoir donné sa Parole, sa Vie et sa Résurrection à l’humanité. Il envoie ses disciples dans une mission universelle et les assure de sa présence parmi eux. Il donne ses pouvoirs à l’Église et il annonce son retour glorieux. Chacun de ces chapitres est l’occasion pour nous d’approfondir et de mieux comprendre le message de Notre-Dame des Roses à San Damiano. Mission Universelle Jésus, avant de monter au Ciel, donne à ses apôtres sa dernière directive : Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit (Mt 28, 19). Et comme ils étaient là, les yeux fixés au ciel pendant qu'il s'en allait, voici que deux hommes vêtus de blanc se trouvèrent à leurs côtés ils leur dirent : Hommes de Galilée, pourquoi restez-vous ainsi à regarder le ciel ? (Ac 1,10-11) Notre saint Père le Pape Benoît XVI a justement commenté ces paroles lors de son voyage en Pologne. Il explique la mission : Moi aussi, Benoît XVI, Successeur du Pape Jean-Paul II, je vous prie de regarder le ciel depuis la terre, de fixer Celui qui - depuis deux mille ans - est suivi par les générations qui vivent et qui se succèdent sur notre terre, en retrouvant en Lui le sens définitif de l'existence. Fortifiés par la foi en Dieu, engagez-vous avec ardeur pour consolider son Royaume sur la terre: le Royaume du bien, de la justice, de la solidarité et de la miséricorde. Je vous prie de témoigner avec courage de l'Evangile face au monde d'aujourd'hui, en apportant l'espérance aux pauvres, aux personnes qui souffrent, aux laisséspour-compte, à ceux qui ont perdu l'espoir, à ceux qui ont soif de liberté, de vérité et de paix. En faisant le bien à l'égard de votre prochain et en vous montrant attentifs au bien commun, vous témoignez que Dieu est Amour (homélie de Benoît XVI à Cracovie le 28 mai 2006). Le jour de Noël 1969, à San Damiano, comme dans bien des messages, la Madone nous exhorte dans les mêmes termes : Que cette journée ne soit que pour Jésus. Offrez-là toute à Jésus pour vous, pour vos chers, pour le monde entier, pour l’Eglise, pour les nations. Que tous reviennent à la paix, cette paix d’amour de Jésus, cette paix qui doit régner dans les cœurs. Qu’il n’y ait que paix, amour et foi. Tous unis à mes côtés (SD jeudi 25 décembre 1969). Comme ces paroles sont d’actualité dans des temps si troublés! Évangéliser, c’est aider notre frère à approfondir ses expériences passées jusqu’au moment où il reconnaîtra en la personne du Christ, en sa mort et sa résurrection, la vérité qui illumine sa propre vie (commentaire de la Bible des Peuples Ed Sarment). La mission, c’est aussi réaliser cette harmonie avec Jésus et entre les hommes comme le désire Marie : Que dans votre famille règne la paix, l’harmonie de Jésus, l’amour de Jésus dans votre famille, dans les nations et dans le monde entier (SD jeudi 25 décembre 1969). Présence perpétuelle Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu'à la fin du monde (Mt 28, 20). Si, avant de partir pour le Ciel, Jésus nous assure de sa présence parmi nous jusqu’au bout, il est normal et consolant que sa Mère en fasse autant à San Damiano : Ici est un lieu de prière et ce sera un lieu de prière jusqu’à la fin du monde (SD jeudi 16 septembre 1965). Moi, Je serai toujours au milieu de vous, Je l’ai promis : Je ne vous abandonnerai pas ! Sur toute personne quelle qu’elle soit qui est à coté de ce petit jardin de Paradis, Je la bénis et Je répands des grâces ! Même si vous ne me voyez pas, même si Je ne parle pas, ma présence est toujours au milieu de vous que j’aime tant ! C’est ma joie et mon réconfort d’être au milieu de mes enfants, spécialement ceux qui m’aiment et me consolent. Mais je veux aussi tous ceux qui ne m’aiment pas (SD vendredi 19 juillet 1968). Les Miracles Avant de rejoindre son Père, Jésus remet sa puissance à l’Église Et voici les signes qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom ils chasseront les démons, ils parleront en langues nouvelles, ils saisiront des serpents, et s'ils boivent quelque poison mortel, il ne leur fera pas de mal ; ils imposeront les mains aux infirmes et ceux-ci seront guéris (Mc 16, 17-18). Cette parole pose le problème des miracles et prodiges dans l’Eglise. A San Damiano de nombreux pèlerins et fidèles attestent avoir vu des signes, avoir été guéris, comme autant de prodiges qu’ils attribuent à la puissance de l’Esprit par Marie. D’autres se plaignent de ne rien voir, de n’être pas guéris suffisamment vite, ou ont constaté ces prodiges dans les premiers temps de l’apparition et regrettent qu’ils se raréfient. D’autres encore critiqueraient volontiers les autorités de l’Eglise qui ne reconnaîtrait pas suffisamment vite tous ces fruits. Une parole de saint Grégoire va nous permettre de prendre du recul par rapport à ce débat : " Ils imposeront les mains sur les malades, " etc. Notre foi est-elle donc moins vive, parce que nous ne sommes pas témoins de semblables prodiges ? Non, mais ils étaient nécessaires à l'Eglise naissante. La foi des chrétiens a du, pour se développer, être nourrie par des miracles. Ainsi, lorsque nous plantons des arbustes, nous les arrosons jusqu'à ce qu'ils se soient incorporés à la terre, et nous cessons de les arroser lorsqu'ils ont pris racine. Mais ces miracles et ces prodiges ont une signification mystérieuse qui ne doit pas nous échapper; car la sainte Église accomplit tous les jours dans les âmes ce qu'elle faisait alors par les Apôtres pour les corps. Lorsque les prêtres, en vertu du pouvoir qu'ils ont reçu d'exorciser, imposent les mains sur les chrétiens, et qu'ils défendent aux esprits mauvais d'habiter dans leur âme, que font-ils autre chose que de chasser les démons ? Ainsi les fidèles qui renoncent au langage du siècle 2 pour consacrer leur parole à la prédication des saints mystères, parlent de nouvelles langues ; et ils prennent les serpents comme avec la main, lorsque par leurs sages exhortations ils arrachent le mal du cœur de leurs frères. Ceux qui résistent aux pernicieux conseils qui voudraient les entraîner dans ses actions criminelles, boivent un breuvage empoisonné sans en recevoir de mal. Ceux qui, toutes les fois qu'ils voient leur prochain chanceler dans la voie du bien, le fortifient par l'exemple de leurs vertus, imposent les mains sur les malades et les guérissent. Or, ces miracles sont d'autant plus grands, qu'ils appartiennent au monde spirituel, et qu'ils ont pour objet de rendre la vie non aux corps, mais aux âmes (S. Gregoire. hom. 29). A San Damiano, la Madone, au début, à donné beaucoup de signes afin d’enraciner notre foi ; elle en donne peut-être moins actuellement, mais c’est pour la faire grandir. Le chapelet qu’elle nous met en main n’est-il pas l’arme la plus puissante et fait fuir les forces du mal. Renoncer au langage du siècle c’est aussi s’éloigner de l’influence pernicieuse des médias et de l’évolution des mœurs. C’est pourquoi si Marie invite à fuir la télévision, les théâtres, les cinémas, ce n’est pas pour fuir la culture, mais pour s’éloigner de ce qui mène les âmes à la perdition. Marie invite les prêtres, les mamans, les papas et les fidèles au bon exemple des vertus, et cela guérit les consciences et les âmes : Mamans, Papas, rappelez vos enfants auprès de vous comme Moi je vous rappelle. Vous, rappelez-les par l’amour, rappelez-les par la prière. Sauvez vos enfants, sauvez-les. Avec mon aide, vous pouvez tout faire (SD vendredi 4 juillet 1969). Et lorsque nous prenons l’eau de San Damiano c’est la guérison de « l’âme et du corps » que nous demandons, c’est cette guérison qu’elle nous promet : Jeunesse, jeunesse,… je vous donne tant d’amour, je donne tant de paix à votre cœur et vous appelle au salut d’âme et de corps (SD samedi 24 mai 1969). Quand à ce qui concerne la reconnaissance de ces fruits, Marie se désole surtout de nos futilités et de notre infidélité : Je donne beaucoup de grâces, beaucoup, en ce lieu, mais personne ne les annonce ! Personne ne veut mon triomphe ! Vous demandez tant… mais ne voulez que ce qui est vain… Mais si vous annonciez les grâces que vous recevez, ce serait la confirmation de ma présence. J’ai donné tant de conversions ! J’ai mis tant de joie dans les cœurs, j’ai mis tant d’âmes sur la voie de la sainteté (SD vendredi 27 septembre 1968). 2 ment de l'histoire (Rm 11,31) à sa reconnaissance par "tout Israël" (Rm 11,26 Mt 23,39) dont "une partie s'est endurcie" (Rm 11,25) dans "l'incrédulité" (Rm 11,20) envers Jésus. Saint Pierre le dit aux juifs de Jérusalem après la Pentecôte: "Repentez-vous et convertissez-vous, afin que vos péchés soient effacés et qu'ainsi le Seigneur fasse venir le temps de répit. Il enverra alors le Christ qui vous est destiné, Jésus, celui que le Ciel doit garder jusqu'au temps de la restauration universelle dont Dieu a parlé dans la bouche de ses saints prophètes" (Ac 3,19-21). Et saint Paul lui fait écho: "Si leur mise à l'écart fut une réconciliation pour le monde, que sera leur admission, sinon une résurrection d’entre les morts?" (Rm 11,15). L'entrée de "la plénitude des juifs" (Rm 11,12) dans le salut messianique, à la suite de "la plénitude des païens" (Rm 11,25 cf. Lc 21,24), donnera au Peuple de Dieu de "réaliser la plénitude du Christ" (Ep 4,13) dans laquelle "Dieu sera tout en tous" (1Co 15,28) (CEC n° 674). Il était donc naturel d’étudier la vie de sainte Thérèse Bénédicte de la Croix (Edith Stein) dans ce numéro consacré à l’Assomption. Avec elle nous pensons aux Ratisbone, Max Jacob, le rabbin Zolly et autres Lustiger ; autant de grands juifs convertis qui annoncent ces temps nouveaux. Marie descendra du Ciel : Le Triomphe ? Etant donc réunis, ils l'interrogeaient ainsi : "Seigneur, est-ce maintenant le temps où tu vas restaurer la royauté en Israël ?" Il leur répondit : "Il ne vous appartient pas de connaître les temps et moments que le Père a fixés de sa seule autorité. Mais vous allez recevoir une force, celle de l'Esprit Saint qui descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre" (Ac 1, 6-8). Les pèlerins de San Damiano sont très sensibles à ce thème du retour du Christ car Marie parle souvent de son Triomphe et de celui de son Fils. Le Catéchisme de l’Eglise Catholique donne une explication très précise des circonstances de ce retour: Le Christ a affirmé avant son Ascension que ce n'était pas encore l'heure de l'établissement glorieux du Royaume messianique attendu par Israël qui devait apporter à tous les hommes, l'ordre définitif de la justice, de l'amour et de la paix. Le temps présent est, selon le Seigneur, le temps de l'Esprit et du témoignage, mais c'est aussi un temps encore marqué par la "détresse" (1Co 7,26) et l'épreuve du mal (Ep 5,16) qui n'épargne pas l'Eglise (1P 4,17) et inaugure les combats des derniers jours (1Jn 2,18 4,3 1Tm 4,1). C'est un temps d'attente et de veille. (CEC n° 672) Depuis l'Ascension, l'avènement du Christ dans la gloire est imminent (Ap 22, 20) même s'il ne nous "appartient pas de connaître les temps et les moments que le Père a fixés de sa seule autorité". Cet avènement eschatologique peut s'accomplir à tout moment même s'il est "retenu", lui et l'épreuve finale qui le précédera (CEC n° 673). La venue du Messie glorieux est suspendue à tout mo- Jean XXIII avait prédit une nouvelle Pentecôte d’Amour sur l’humanité. Nous vivons depuis deux siècles une ère mariale avec des interventions où Marie annonce partout ces temps nouveaux. Gardons nous cependant de chercher un triomphe matériel et politique au travers des communications du Ciel. En effet, l'Eglise enseigne qu’elle n'entrera dans la gloire du Royaume qu'à travers une ultime Pâque où elle suivra son Seigneur dans sa mort et sa Résurrection (Ap 19,1-9). Le Royaume ne s'accomplira donc pas par un triomphe historique de l'Eglise (Ap 13,8) selon un progrès ascendant mais par une victoire de Dieu sur le déchaînement ultime du mal (Ap 20,7-10) qui fera descendre du Ciel son Epouse (Ap 21,2-4). Le triomphe de Dieu sur la révolte du mal prendra la forme du Jugement dernier (Ap 20,12) après l'ultime ébranlement cosmique de ce monde qui passe (2P 3,12-13) (CEC n° 677). C’est bien le même langage que tient la Madone : Courage mes enfants, courage. Le démon fait rage mais Je triompherai. J’écraserai l’ennemi, mais mon Cœur doit triompher sur le monde entier (SD 25 octobre 1968). Je suis Votre Maman qui vous appelle à la prière et à la pénitence pour éviter les châtiments et que vienne Mon Triomphe de joie et d’amour dans le monde (SD vendredi 27 décembre 1968). Vous ne devez pas craindre ; c’est Moi qui viens. Je suis la Reine de la miséricorde, et mes enfants, je les veux tous sur mon Cœur ! Soyez-moi unis, soyez-moi unis et ne craignez pas. C’est Moi qui vous appelle. C’est Moi qui vous inspire pour vous embrasser et vous presser sur mon Cœur, Moi qui vous aime tant ! (SD vendredi 26 juillet 1968). ■ 3 Jean-Romain Fabrikant 3 Le Poirier de San Damiano, signe de présence trinitaire Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit (Matt Ce sont les dernières paroles de Jésus avant l’Ascension et la première fois qu’il est question dans les évangiles, en une même occasion, des trois personnes trinitaires, comme si Jésus laissait à l’Église le soin d’en établir le dogme. Le message de San Damiano fait souvent référence à cette réalité trinitaire du divin, ne serait-ce que dans l’envoi final de chaque message sous forme d’une bénédiction faite par Marie au nom de son Fils, du Père Éternel et de l’Esprit Saint. Les citations dans ce domaine sont nombreuses mais nous verrons que le signe de la présence trinitaire peut être retrouvé sur les lieux mêmes de l’apparition, au Jardin de Paradis. 28, 19). Les pèlerins ont vu ces dernières années la lente agoIl est possible de comparer ce poirier avec la plante dont on lit dans le Cantique des Cantiques (Ct 2, 3) : nie d’un arbre, ce poirier qui fut le socle de la grande « Comme le Pommier parmi les arbres d’un verger, apparition du 16 octobre 1964. Cette plante restera le symbole du 16 Octobre, or, nous savons que cette date ainsi est mon bien-aimé parmi les jeunes hommes ». Des commentateurs célèbres de l’écriture Sainte, est aussi au centre de la vie de Jean-Paul II qui a été notent que le pommier se trouve là en tant que plante élu pape un 16 octobre ! Cet arbre est mort pendant l’année du Rosaire, ellequi porte du fruit. Un tel arbre qui répand son ombre même initiée un 16 octobre ; il meurt la vingtagréable et saine, est un symbole de Jésus Christ, de sa cinquième année du pontificat de ce Pape (2003). On croix, de la vertu de laquelle vient l’efficacité de la aura beau dire que « ce n’est qu’un arbre », il restera un prière et l’assurance de la victoire4. symbole fort, lié aux apparitions de San Damiano, et lié Il est vrai que le poirier, s’il est inconnu dans la biau règne de Jean-Paul II. Il marque symboliquement la ble, est cependant universellement symbolique de féfin d’un temps. Et lorsque nous parlons de symcondité, que son fruit est doux au bole, cela veut dire, non pas figuration d'une abpalais, et que, poirier ou pommier sence, mais ouverture vers une présence, vers la (les deux arbres appartiennent à la vie. famille botanique des rosacées… Le retour au Père de Jean-Paul II est une mort encore des roses…!), sa présence au centre du Jardin de Paradis n’est qui donne la vie. De même la mort de cet arbre ne tue pas le symbole : si le grain de meurt (Jn 12, pas sans enseignement. 24)… Sicut malus inter ligna silvarum, Pour approfondir ce symbolisme reprenons littéralement « Comme un pommier notre lecture du Cantique des Cantiques1, notamparmi les arbres de la forêt » : les ment au troisième verset du deuxième chapitre: arbres de la forêt ne donnent pas de fruits, ils sont stériles d’une cerComme le pommier parmi les arbres d'un vertaine manière, alors que le pomger, ainsi (est) mon bien-aimé parmi les jeunes hommier produit un fruit délicieux ; le mes. 16 oct. 1964 contraste est donc grand et cette J'ai désiré m'asseoir à son ombre, détail de la floraison image signifie : au milieu d’un et son fruit est doux à mon palais2. instantanée du poirier monde stérile, mon Bien Aimé est le Le Bien-Aimé est comparé à un pommier, arbre extrêmement rare dans la Bible puisqu’il n’en est seul à donner un fruit de Vie (CBA70). question que dans le Cantique et dans le prophète Joël. Et Origène dira : Le Bien-Aimé est l’Unique et c’est pourquoi l’épouse le Tous les arbres sont forêts stériles en comparaison compare à un arbre quasiment unique dans la Bible. Par du Verbe de Dieu. Comparé au Christ tous (les autres) ailleurs les rabbins font le rapprochement entre le nom manifestent leur improductivité (CCO48). du pommier (en hébreux) et le mot “haleine”, du livre A la lumière de ces méditations, pourquoi le poirier de la Genèse où il est écrit : Le Seigneur souffla dans ses de San Damiano ne symboliserait-il pas cette présence de Jésus qui est au centre de tout le message ? narines une haleine de vie et Adam devint un être vivant (Gn 2, 7) (CBA69). En effet la Madone affirme : Réunissez-vous tous, sous ce petit arbre, ici en ma présence avec foi, avec Présence du fils amour, avec (une) grande pénitence. Jésus aura (de la) A San Damiano, point de pommier, seulement un pitié et (de la) miséricorde pour tous. Le Père Eternel poirier, accompagné d’un prunier, au sein d’un verger étendra ses bras et répandra sa miséricorde sur le (les autres arbres fruitiers ont été retirés). monde (SD vendredi 10 février 1967). Dans un songe de Don Bosco que nous avons déjà On notera que Marie nous invite près d’Elle, à l’omcommenté, il était question d’un poirier, lieu d’attache bre de cet arbre, comme en écho au Cantique où il est d’une corde symbolisant le chapelet, pour la destruction dit que la bien aimée est assise à son ombre. Ce qui du serpent maléfique3. Il nous plaît de relire l’explicasignifie donc qu’avec Marie, nous sommes tous invités tion du commentateur de Don Bosco qui écrivait : à nous blottir à l’ombre de Jésus. 1. Dans le 4Numéro 10 de nos Bulletins nous avons médité sur les deux premiers versets du 2e chapitre du Cantique. 2. Ct 2, 3 3. Cf. Bulletin N° 5 4. Memorie Biografiche di Don Bosco: volume VII cap. XXIV, p 238-39. 5. Ct 2, 3 4 Présence de l’Esprit Mes enfants, Je suis en ce lieu, ce lieu tout mien, que Je veux enrichir de grâces et de trésors célestes. En ce lieu est mon Jardin de Paradis. Un jour vous comprendrez ! (SD 20 mars 1967). Le Jardin de Paradis est une icône vivante où cet arbre indique la présence de l’Esprit. En effet les rabbins comme on l’a dit plus haut, tiennent pour synonyme l’arbre, et l’haleine, celle qui donna vie à Adam, donc le souffle, donateur de vie qui vient de la bouche du Seigneur, qui vient de l’Esprit-Saint. Cela signifie que, quand Adam a ouvert les yeux pour la première fois, il a vu, tout proche de sa bouche, la bouche de Dieu qui soufflait sur lui ! Nous avons tous été créés dans un bouche à bouche avec Dieu… Et il est écrit au livre de Nombres : « Pour mon serviteur Moïse, toute ma maison lui est confiée, Je lui parle bouche à bouche (Nb 7, 7-8). On dit qu’il est mort «sur la bouche de Dieu » (Is 58, 14) (CBA31). A San Damiano, les enfants de Marie sont aussi comme au “bouche à bouche” avec le Seigneur car Marie est messagère de l’Esprit Saint et c’est dans ce sens qu’il faut comprendre les baisers qu’elle nous réserve : Je donnerai bientôt un signe, mes enfants, et vous étreindrai très fort, entre mes bras... et je vous envoie une grande couronne de baisers, à tous les présents et à ceux qui sont loin. Vous, par l’entremise de votre ange gardien, envoyez à tous, dans toutes les parties du monde, en mon nom une forte bénédiction et une couronne de baisers. Que la joie et la grâce que je donnerai dans les cœurs soient à tous un gage pour l’éternité (SD vendredi 9 sept 1966). Présence du Père Dans cette exploration trinitaire, cherchons aussi avec ce poirier, le signe de la présence du Père. Pour cela nous pourrions méditer sur un autre verset du Cantique : Sous le pommier je l’ai réveillée, là même où ta mère t’a conçue, où devint enceinte celle qui t’enfanta (Ct 8, 5). Chouraqui explique que le BienAimé est aussi le Père de la BienAimée ; c’est lui qui l’arrache au sommeil naturel pour lui donner la vie de grâce que permet l’éveil à l’amour absolu (CCA77). Ce que perçoit Chouraqui comme « amour absolu », nous le traduirions par « Miséricorde ». C’est bien le sens du message qu’on déjà cité : Réunissez-vous tous sous ce petit arbre en ma présence avec foi, avec amour, avec une grande pénitence. Jésus aura pitié, miséricorde pour tous, et le Père Éternel étendra ses bras et répandra sa miséricorde sur le monde (SD vendredi 10 février 1967). Il y a dans cette citation, comme une confirmation de la présence Trinitaire à San Damiano : en ma présence, (présence de l’Esprit qui vit en Marie) … et Jésus (présence du Fils) aura pitié et miséricorde de tous et le Père Eternel (présence du Père) étendra ses bras… Les paroles de Marie, dans ce même message, se terminent dans l’espérance : Quand vous êtes dans l’angoisse, venez là, sous cet arbre, serrez-le entre vos bras, vous trouverez le courage en tout et pour tout (SD vendredi 10 février 1967). Il est évident qu’il ne s’agit d’embrasser cet arbre qu’au sens figuré. Embrasser un morceau de bois serait insensé. Mais, ce bois, fut-il mort, s’il symbolise la vivante présence trinitaire alors embrassons-le. En effet : si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul ; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit (Jn 12, 24). Si ce bois symbolise la Croix de Jésus alors embrassons-là, car là est la consolation : Que celui-là, que cet homme, que cette femme rare… prenne avec joie, embrasse avec ardeur, et porte sur ses épaules avec courage sa croix… Qu'il la porte sur ses épaules à l'exemple de JésusChrist, afin que cette croix devienne l'arme de ses conquêtes et le sceptre de son empire. Enfin, qu'il la mette dans son coeur par l'amour, pour la rendre un buisson ardent qui brûle jour et nuit du pur amour de Dieu sans se consumer. (St L-M Grignion de Montfort ; Lettre aux Amis de la Croix). JRF Bibliographie CBA : Le chant du Bien aimé, Claire Patier. Ed Le livre ouvert 2000. CCO : Le Cantique des Cantiques d’Origène à saint Bernard. Ed. DDB 1983. CCA : Le Cantique des Cantiques André Chouraqui. PUF 1970. 5 5 LE MIRACLE DU FIL ROUGE Le vendredi 16 octobre 1964, la Madone s’est montrée à Rosa Quattrini dans une apparition prestigieuse, amplement décrite par la voyante en différentes versions qui se révélèrent complémentaires (San Damiano, Histoire et document Roland Maisonneuve ed Téqui p 34+). Pour résumer, disons que la Madone s’est manifestée au sein d’une lumière merveilleuse accompagnée d’un grand globe rouge qui s’est posé entre les branches du poirier du verger de Rosa. Ensuite, la Vierge Immaculée s’est adressée à Rosa pour lui confier son premier message. Elle lui annonce qu’elle doit faire connaître ses messages au monde. Rosa s’écrie qu’elle ne pourrait pas annoncer ces choses et qu’on ne la croirait pas. Alors, en guise de confirmation et de garantie, la Madone fait fleurir instantanément le poirier de ses fleurs blanches en plein automne, ainsi qu’une branche du prunier que sa robe avait effleurée. Cette floraison “miraculeuse” dura plusieurs semaines, jusqu’aux premières neiges ! Irma Barattini, amie et voisine de Rosa, qui, la première, accourut voir le phénomène, dira : « l’arbre était tout blanc, cela ressemblait à de la neige » (film vidéo “Il a parlé par les prophètes” SD Media 1997). Il y a dans ce récit beaucoup de symbolismes, et une parole du prophète Isaïe devrait nous aider à en tirer des lumières : « Quand vos péchés seraient comme l’écarlate, comme neige ils blanchiront ; quand ils seraient rouge comme la pourpre, comme laine ils deviendront » (Is 1, 18). En effet, dans les tableaux de l’apparition du 16 octobre, il y a successivement un globe rouge, puis la présence de Marie Immaculée dans sa robe blanche, mais que seule Rosa contempla, et enfin une floraison toute blanche, comme de la neige, visible de tous. Comment, alors, ne pas penser à la phrase d’Isaïe ? Une histoire juive Une belle histoire issue de deux textes juifs, le Zohar et reprise par le Talmud, vient encore agrémenter ce passage d’Isaïe. (Le Zohar est un texte juif non canonique du IIe siècle de notre ère et le Talmud est un texte juif composé entre le IIe siècle avant J-C et le Ve après J-C. Ils comportent des explications de la Torah et des lois juives.) R.H. Schoeman rapporte l’histoire du miracle du fil pourpre : Ces livres contiennent des récits de l’époque du temple, décrivant comment le grand prêtre entrait une fois par an (le jour du Yom Kippour ou jour du “Grand Pardon”) dans le saint des saints, afin d’offrir le sacrifice pour le pardon de tous les péchés d’Israël. Il décrivent le « miracle du fil écarlate » : un fil virait du rouge au blanc pour signifier miraculeusement que Dieu avait accepté le sacrifice: “En ce jour tous les péchés sont remis […] la souillure de l’âme et du corps, tous, ce jour-là. Dieu pardonne à Israël et le purifie de ses péchés et nul n’est accusé devant lui […]. Le prêtre expie pour lui-même, pour sa maison, les prêtres, le sanctuaire, ainsi que tout Israël. On savait, par le changement de couleur d’un certain fil écarlate qui devenait blanc, si le prêtre avait réussi, et l’on se réjouissait partout. Si la transformation ne se produisait pas, tous se désespéraient de savoir que leur prière n’avait pas été acceptée” (récit du Zohar Vayikra 3). 6 D’après le Talmud ce miracle avait cessé de se produire quarante ans avant que ne soit détruit le temple. Le passage du Talmud constate: “A l’origine, on attachait le fil écarlate sur la porte extérieure donnant sur la cour (du Temple). S’il devenait blanc le peuple se réjouissait, et s’il restait rouge, ils étaient tristes […]. Pendant quarante ans avant la destruction du temple, le fil écarlate ne devint jamais blanc, mais demeura rouge” (Rosh Hashanah 31b). Pratiques caduques Le temple fut détruit autour de l’an 70 de notre ère. Le miracle cessa de se produire vers l’an trente, époque de la crucifixion, l’évènement qui remplaçait le sacrifice de l’ancienne alliance par celui de Jésus sur la croix. Selon le Nouveau Testament, au moment même où Jésus expirait, le rideau du Temple qui séparait le Saint des Saints de l’assistance se déchira, symbolisant ainsi la fin de l’efficacité des sacrifices de l’Ancienne Alliance (extrait de : Le salut vient des juifs » R.H. Schoeman ed F.X.de Guibert 2006 p 97). Le Talmud étant un livre écrit par des non-chrétiens, cette histoire en prend d’autant plus de valeur ! En effet, le sacrifice du Christ rendait caduques les pratiques des rabbins car saint Paul écrit : En effet, le sang de taureaux et de boucs est impuissant à enlever les péchés. C'est pourquoi, en entrant dans le monde, le Christ dit : Tu n'as voulu ni sacrifice ni oblation ; mais tu m'as façonné un corps… Sacrifices, oblations, holocaustes, sacrifices pour les péchés, tu ne les as pas voulus ni agréés, et cependant ils sont offerts d'après la Loi, alors il déclare : Voici, je viens pour faire ta volonté. Il abroge le premier régime pour fonder le second. Et c'est en vertu de cette volonté que nous sommes sanctifiés par l'oblation du corps de Jésus Christ, une fois pour toutes. Car par une oblation unique il a rendu parfaits pour toujours ceux qu'il sanctifie (He 9, 4… 14). Le signe du Pardon Ainsi semble plus évident le symbolisme du globe rouge de l’apparition du 16 octobre, suivie de la présence de l’Immaculée et du poirier tout fleuri en blanc, visible de tous. Ce tableau voudrait signifier que Marie est venu porter un message de Pardon. Le Pardon pour l’humanité toute entière par le sacrifice de son Fils, dont son Immaculée Conception est le premier fruit, selon qu’il est écrit dans l’Apocalypse : Ces gens vêtus de robes blanches, qui sont-ils et d'où viennent-ils ?... Ce sont ceux qui viennent de la grande épreuve : ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l'Agneau (Ap 7, 14). Epanchez-vous en Jésus, car il est tout amour et miséricorde. Jésus attend avec tant de désir. Il vous attend à ses pieds car il veut vous pardonner. Il veut vous prendre dans ses bras et il veut s’épancher cœur à cœur, amour avec amour… (SD vendredi 20 décembre1968). 6 Vocations sacerdotales à San Damiano: Un beau témoignage à l’occasion du 30e Rassemblement International de la Jeunesse et des Familles Nous sommes heureux de reproduire ici un texte de notre ami Marcel Mora qui a fait le compte rendu de ces journées mémorables. Beaucoup d’entre vous savent déjà que lors du Rassemblement International de la Jeunesse et des Familles de début mai 2005 lors de la messe du dimanche dans l’église de San Damiano, deux prêtres, l’un français et l’autre italien, ont pris la parole au moment de l’homélie. Tous deux ont témoigné avoir reçu à San Damiano leur premier appel au sacerdoce et affirmé que de ce Lieu jaillira une génération de prêtres qui participera au développement de la Nouvelle Civilisation de l’Amour dans le monde Ce mois de mai 2006, le dimanche 7 mai, à l’occasion du Rassemblement International des Jeunes et des Familles, le curé de la paroisse, dom Pietro Dacrema présidait une messe concélébrée sur le parvis de l’église, devant une foule internationale considérable, à majorité italienne. Au cours de son homélie enflammée, il rendait grâce à Dieu en fêtant le 50e anniversaire de son ordination sacerdotale qu’il a tenu à célébrer avec les pèlerins et il exprimait sa joie d’en accueillir un si grand nombre. Après lui un prêtre français de la communauté saint Jean, fondée par le père Marie-Dominique Philippe, a donné le témoignage suivant : « C’est ici, à San Damiano qu’à l’âge de 36 ans, j’ai reçu pour la première fois mon appel à la prêtrise et je certifie que dans ma communauté, soixante prêtres ont entendu ici leur premier appel au sacerdoce ». L’évangile nous apprend qu’un bon arbre produit de bons fruits dans de multiples domaines utiles au salut des hommes. L’examen du caractère surnaturel des faits de San Damiano relève de la compétence des autorités ecclésiastiques responsables du diocèse. Nous devons leur faire entièrement confiance parce que l’Esprit Saint leur a promis sa permanente assistance et ne manquera pas, le moment voulu par Dieu, de mettre à leur disposition un « microscope électronique » assez puissant pour leur faire proclamer ce caractère surnaturel. L’Eglise pratique la vertu de prudence à un degré héroïque. On attribue à un Cardinal de la Curie romaine, le mot suivant : « Ici, à Rome, nous avançons avec aux pieds, des chaussures de plomb ! Mais nous avançons » ! Pèlerins de Notre Dame des Roses, nous devons avoir Foi en la Promesse de notre Maman du Ciel. Elle nous dit : « Faites et Je ferai », « Je compte sur votre fidélité, souffrez tout, pour faire connaître Ma Présence en ce Lieu », « Jour et nuit, Je serai avec vous, en ce Lieu sacré, dans ce Petit Jardin de Paradis, Je vous attends ici ». Le président d’honneur Mr Marcel Mora Association des amis de Notre Dame, à Castets, le 13 juillet 2006 Votre Panier d’intentions de prières - Prions pour le Liban si tragiquement torturé. - Prions pour ce Moyen Orient toujours ensanglanté. - Prions pour le retour d’Israël au Christ seule solution apaisante pour cette terre assoiffée de Pardon. - Prions pour nos amis pèlerins et sympathisants qui sont malades, pour J. M. un père de famille qui est à l’agonie. - Prions pour tous les prêtres qui ont eu leur vocation à San Damiano ou qui ont connu ce Lieu, notamment ceux qui sont en mission (Burundi, Taiwan, Israël...). Jubilé de Rosa Le 5 septembre prochain, nous fêterons de 25e anniversaire de la montée au Ciel de Notre chère Rosa Quattrini. Sachons marquer ce jour-là d’une prière spéciale. Une commémoration particulière sera organisée par l’association Ospizio Madonna delle Rose les 2 et 3 septembre sur le lieu et de nombreux pèlerins ont choisi de s’y rendre. Demandons avec foi, à Rosa, d’intercéder pour la venue du Triomphe de Marie et du Règne de Jésus, en ce Lieu et dans le 7 monde entier. 7 Message du vendredi 13 juin 1969 donné à Rosa di Gesù-Maria Au Jardin de Paradis, à San Damiano 8 Je vous appelle ici, en ma Présence 8 9 9 « Vérité et Pardon » SAINTE EDITH STEIN Sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix 12 octobre 1891 - 9 août 1942 - canonisée 11 oct 1998 par JPII. Patronne de l’Europe Aux côtés de saint Benoît, de sainte Brigitte de Suède et sainte Catherine de Sienne Lors de son voyage en Pologne, à la visite au camp de concentration d’Auschwitz, le saint Père nous confie : … J’ai ressenti comme un profond devoir de m’arrêter de façon particulière devant la stèle en langue allemande. De là apparaît devant nous le visage d’Edith Stein, Thérèse Bénédicte de La Croix : juive et allemande, disparue, avec sa sœur, dans l’horreur de la nuit du camp de concentration allemand-nazi ; comme chrétienne et juive, elle accepta de mourir avec son peuple et pour son peuple. Les allemands qui furent alors déportés à Auschwitz-Birkenau et qui sont morts ici étaient considérés comme Abschaum der Nation - Déchets de la Nation - . Mais aujourd’hui, nous les reconnaissons en revanche avec gratitude comme les Témoins de la Vérité et du bien, qui, même au sein de notre peuple, n’avaient pas disparu. Remercions ces personnes, car elles ne se sont pas soumises au pouvoir du mal, et elles apparaissent à présent devant nous, comme des lumières dans une nuit de ténèbres. Avec profond respect et gratitude, nous nous inclinons devant tous ceux qui, comme les trois jeunes face à la menace des fournaises de Babylone, surent répondre : Seul notre Dieu est capable de nous délivrer. « Mais s’il ne le fait pas, sache, ô roi, que nous ne servirons pas ton Dieu, ni n’adoreront la statue d’or que tu as élevée »(Dn 3, 17 sq.). Sa Sainteté le Pape Benoît XVI,Le 28 mai 2006 Selon notre habitude nous méditerons sur la vie d’Edith Stein en parallèle avec le message de San Damiano. Les phrases en italiques sont d’Edith Stein Enfance Edith Stein naît le 12 octobre 1891, jour de Yom Kippour (jour du grand pardon), à Breslau, dans une famille juive pratiquante allemande. Son père décède alors qu’elle n’a que deux ans. Elle est élevée par sa mère, Augusta, qui prend en main la famille et l’entreprise de commerce de bois de son mari. Elle a déjà perdu quatre enfants et doit élever seule les deux fils et les cinq filles qui lui restent; Edith est la petite dernière. Frappe le roc et la sagesse en jaillira avait dit le directeur du lycée à sa mère en parlant d’Edith. Malgré son gros travail, Augusta est d’une vigilance extrême dans la formation et l’éducation de ses enfants. Très tôt, Edith Stein manifeste un grand désir d’apprendre. A six ans, elle demande de pouvoir aller à l’école et y découvre l’antisémitisme : Le chef de l’établissement la considère comme insignifiante et la relègue constamment à la seconde place, malgré sa vivacité et ses efforts. Profondément marquée par les décès successifs de deux de ses oncles, elle ne trouve finalement plus aucun réconfort 10 dans la foi. Edith cesse de prier et se détache progressivement de la religion. Elle perd la foi de ses ancêtres et devient athée. Choyée dans son milieu bourgeois, elle s’y sent très tôt à l’étroit et mal à l’aise. Elle rêve d’espace, de dépassement. Discipline, honnêteté, culture, indépendance, tel est son lot. A 14 ans, elle interrompt inopinément ses études et séjourne un an à Hambourg chez sa sœur aînée, Else. Edith est calme, jolie, sportive, populaire, déterminée et surtout, elle a confiance en sa destinée ! Coup de foudre intellectuel Elle reprend ses études et obtient brillamment à 19 ans son abitur, l’équivalent allemand du baccalauréat. Aspirant à la carrière d’enseignante, elle s’inscrit à l’université de Breslau. Les matières sont l’allemand, l’histoire, la philosophie. La psychologie expérimentale l’intéresse particulièrement ; mais elle déchante bientôt, l’essence de l’être humain y étant négligée. Dans ses lectures, elle découvre le grand philosophe Edmund Husserl, père de la phénoménologie, professeur à l’université de Göttingen. Coup de foudre intellectuel. Elle quitte Brelau pour poursuivre ses études à Götttingen. (int). 10 Docteur en philosophie 1914 : La première guerre mondiale éclate, les amphithéâtres se vident : Edith Stein s’inscrit bénévolement dans un hôpital militaire. Aux médecins, étonnés de la voir interrompre ses études, elle explique : Mes camarades sont sur le champ de bataille, je ne vois pas pourquoi je devrais avoir la vie plus facile qu’eux ! Elle aime particulièrement soigner les patients en situation de grande détresse, avec qui elle a des contacts privilégiés (C28) [1]. Après quelques mois au front comme infirmière, elle suit Edmund Husserl à Fribourg et obtient en 1916 son doctorat en philosophie avec la plus haute mention : summa cum laude. A 25 ans Edith devient sa principale collaboratrice ! La thèse d’Edith Stein : L’“Einfühlung” (fuhlen, toucher) : Toucher de l’intérieur, c’est une étude de la vie intérieure,. A l’origine, le mot “Einfuhlung” renvoie au contact avec des objets sensibles et ce n’est qu’au courant du XVIIe siècle qu’il commence à être employé pour des sentiments psychologiques (A96). Edith a définit l’Einfühlung comme un acte fondamental dans la relation à l’autre et le décrit comme un acte d’amour. L’Einfühlung doit donc appartenir aussi par essence à l’acte d’amour de Dieu pour l’homme et, en conséquence, à l’oraison par laquelle s’actualise l’amour pour Dieu [2]. Ce n’est que par l’Einfühlung que je me sens personnellement concerné par l’autre, et notamment par Dieu, par sa valeur, par sa personne. Sinon la piété court le danger de devenir utilitariste, d’une manière que M. Eckhart (1260-1328) avait déjà stigmatisée en termes cinglants : Certaines personnes veulent contempler Dieu avec les yeux qui leur servent à contempler et aimer Dieu comme elles aiment une vache : On l’aime à cause du lait et du fromage, et d’une manière générale pour le profit qu’on en retire. C’est ainsi que se comportent tous les gens qui aiment Dieu, pour le désir des richesses extérieures ou de consolations intérieures ! Concrètement, l’Einfühlung à l’égard de Dieu s’accomplit sous la forme de méditation qui est une Écoute avant d’être un discours (…) il s’actualise dans la prière silencieuse, contemplative, dans une attention amou1. Priez pour tous. Apportez à tous une parole de réconfort, surtout aux malades, aux éprouvés, aux prisonniers, aux affligés… SD 1er novembre 1969 2. Faites des heures d’adoration, même à la maison. Unissez-vous à Jésus-Hostie… SD vendredi 26 septembre 1969 3. Je suis au milieu de vous pour vous combler de grâces, pour reuse à la présence cachée de Dieu, selon l’expression de Jean de La Croix, une attention par laquelle le priant est réceptif au déversement de Dieu en l’âme, à cette science que Dieu (lui-même) communique mystérieusement à l’âme et qu’il lui enseigne dans la perfection de l’amour, celle que les contemplatifs appellent contemplation infuse ou bien théologie mystique (A117). En Jésus de Nazareth, Dieu se rend perceptible à nous par Einfühlung, il peut être authentiquement connu. Notre amour de Dieu et notre amour du prochain auront la forme que nous leur donnerons – ou non – par notre Einfühlung . La pensée d’Edith Stein n’avait rien de pieux au début de sa rédaction (A124). Parallèlement à ses nombreux travaux relevant du domaine de la pure rationalité, elle poursuit inlassablement une quête métaphysique qui l’approche lentement vers le Christ. Edith cherche Celui qui l’attend Malgré la foi profonde de sa mère, Edith n’avait visiblement jamais intériorisé la foi juive et n’en a gardé que les aspects extérieurs qui la rebutaient plutôt, ainsi que le montre sa description de l’enterrement d’un oncle : J’ai entendu bien des discours semblables. Ils reprennent tous la vie du défunt, mettent en avant ce qu’il a fait de bien, ils n’ont rien de consolant, mais il n’y a derrière cela aucune foi en une vie personnelle qui continue, ni en des retrouvailles après la mort (A26). Il y avait cependant un monde caché au plus profond de moi. Ce que je voyais et entendais au cours de la journée y était comme assimilé et médité (A25). Aucun doute qu’elle ait traversé une nuit intérieure : Vouloir croire et ne pas pouvoir. Une foi qui vient et qui s’en va [3]; un pressentiment intellectuel de la vérité en Dieu mais sans pouvoir en faire l’expérience encore de façon existentielle ; se sentir attirée par elle mais sans en être encore complètement pénétrée(A33). Le goutte-à-goutte de la foi La foi rend les hommes capables de s’engager dans des chemins qui les condamneraient à l’échec du point de vue strictement humain. On s’y engage en solitaire, car la masse des gens n’y comprend rien. Le chemin de la foi mène vers le silence [4] et la solitude, mais Dieu laisse l’âme y trouver du goût, car c’est là que coulent les “sources de l’Eau vive” : des clairvoyances et des vérités qui sont un don de Dieu. La joie qui s’y rattache procure une force intérieure qui relève les hommes lassés et accablés. La certitude intérieure renforce dans l’âme le sentiment d’être sur le bon chemin, celui de l’imitation de Jésus-Christ, qui sait dédommager l’âme en un instant pour tout ce qu’elle a enduré pour Lui (C40). vous donner une foi ferme, une ardente charité et un vrai repentir de vos péchés… SD lundi 11 mai 1970 4. En avant, en avant. Avec la patience, la résignation et le silence, vous trouverez tout. Dans le silence, vous trouverez les grâces, dans le silence, le démon ne peut pas vous prendre parce 11 que je suis à vos côtés et je vous inspire… SD vendredi 31 janvier 1969 11 Cheminement vers la Vérité Trois évènements clefs touchent son âme : Edith Stein visite en juillet 1916 la cathédrale de Francfort ; elle est extrêmement surprise de voir une femme agenouillée pour prier. Ici, au beau milieu des affaires du quotidien, quelqu’un pénétrait dans une église vide pour un échange confidentiel. Cela, je n’ai jamais pu l’oublier (E18)! En 1917, meurt au front un ancien assistant du philosophe et ami d’Edith Stein, Adolph Reinach. Venue pour réconforter sa femme Anna, Edith est profondément impressionnée par l’attitude courageuse et digne de la jeune femme, catholique pratiquante : Pour la première fois, je rencontrais la Croix et la force qu’elle donne [5] à ceux qui la portent. Quatre ans plus tard, en 1921, elle lit chez une amie la biographie de sainte Thérèse d’Avila : Je pris un livre volumineux. Il portait le titre de Vie de sainte Thérèse d’Avila, écrite par elle-même. Je commençai à lire, je fus saisie aussitôt et ne m’arrêtai plus avant la fin. En fermant le livre, je me dis : Là, est la Vérité. La Vérité, non pas au sens philosophique du terme mais au sens existentiel. Edith Stein s’est directement exprimée sur Thérèse dans trois écrits : - Amour pour amour : Vie et œuvre de sainte Thérèse de Jésus. - Une virtuose dans l’art d’éduquer et de former. - Le château intérieur. Le fait le plus marquant pour Edith est l’insistance de Thérèse sur la prière, plus exactement l’Oraison : La prière est une échelle de Jacob par laquelle l’esprit de l’homme va vers Dieu en s’élevant, et la grâce de Dieu vers l’homme, en descendant (…) C’est le dialogue intérieur de l’âme avec Dieu (A42). Le centre de l’âme étant le lieu où la voix de la conscience se laisse entendre, et le lieu de la libre décision personnelle (A43). Je compris combien il est avantageux de ne faire aucun cas de tout ce qui ne sert pas à nous rapprocher de Dieu. Par là aussi, je compris ce que c’est que de marcher dans la vérité, en présence de la Vérité. Et Notre Seigneur me fit connaître qu’il est Lui-même cette Vérité (A 48). Entre Saint Jean de la Croix, lié à l’œuvre de Thérèse d’Avila, et soeur Thérèse-Bénédicte de la Croix, il y a un lien mystérieux et providentiel. Edith est née lors du troisième centenaire de la mort de Jean et elle est morte l’année du quatrième centenaire de sa naissance ! Elle éprouvait envers lui comme un lien de parenté, voire d’identification (A65). Grand saint et docteur de l’Église, saint Jean de la Croix était un homme de prière surnaturellement éclai5. Mais vous, tenez-vous prêt avec Jésus dans votre cœur, alors vous aurez la force de porter la croix et avec la récitation du saint rosaire que je demande nuit et jour à mes enfants… SD vendredi 24 avril 1970 6. Veillez12à rester petits, mes enfants chéris ! Humiliez-vous, pas d’orgueil, ni de superbe, seulement l’amour avec tous ! Pardonnez ré. Comme il jouissait depuis sa plus tendre enfance de la protection particulière de la Mère de Dieu, il était attiré dès l’éveil de sa raison à la pratique de la pénitence, à la solitude, au détachement de tout le créé et à l’union à Dieu. Il a modelé spirituellement, en union avec la sainte mère Thérèse, la première génération de carmes et carmélites déchaussés(A73). Si tu veux arriver à être tout, désire n’être rien : C’est cette phrase de lui qu’elle écrira dans l’image souvenir de sa prise d’habit ( A70) [6]. Ce questionnement et ce cheminement personnel aboutissent à son baptême, le 1er janvier 1922. Elle a trente ans (int). Un pédagogue modèle En 1923, Edith Stein est nommée professeur au lycée de fille de Spire et à l’établissement de formation des maîtres du monastère SainteMadeleine. Elle y reprend en même temps son travail scientifique. Il importe d’avoir surtout un coin tranquille permettant d’entrer plusieurs fois par jour en contact avec Dieu (…) La prière est le sommet de l’accomplissement pour l’être humain. Elle passe d’ailleurs des heures agenouillées sur son prie-Dieu, se cachant de préférence dans un coin de l’église (C51). L’une de ses plus jeunes élèves écrit : Nous avions 17 ans, le professeur Stein nous donnait des cours d’allemand. En réalité, elle nous apportait tout. Nous étions encore très jeunes mais personne d’entre nous n’a oublié l’attrait de sa personnalité. Chaque jour, nous la voyions s’agenouiller sur son prie-Dieu, pendant la messe. C’est là que nous eûmes l’idée de ce que signifiait de faire concilier à la perfection la foi et la vie. Pour nous, à l’âge critique où nous étions, elle était le modèle à suivre rien que par son attitude. Je serais incapable de répéter une quelconque parole sentencieuse émanant d’elle parce que c’était une personne calme, silencieuse, qui nous guidait simplement par sa manière d’être [7]. Quand elle formulait une critique, elle alliait de manière parfaite la bonté et la justice. Jamais nous n’avons vu chez elle autre chose que le calme, la délicatesse et la paix ( C53). à tous et donnez-moi beaucoup d’amour… SD samedi 2 août 1969 7. Jésus veut régner au centre de votre cœur. Il veut enflammer votre cœur d’amour pour lui. Si vous vivez avec Jésus, vous serez sereins…SD jeudi 25 décembre 1969 12 Le prix de sa conversion L’annonce à sa famille de sa conversion s’avère déchirante. Elle voit pleurer pour la première fois sa mère qui accepte sans comprendre la décision de sa fille adorée. «Passe encore la religion luthérienne, respectable en Allemagne, mais l’Église catholique ! [8] Cet éteignoir de la pensée et ses pratiques absurdes ! Reniement de la foi d’Abraham »! Vous ne savez pas ce que c’est pour moi d’appartenir au Christ non seulement par l’esprit mais aussi par le sang (int) ! Une femme engagée et combative Husserl refuse à Edith Stein l’habilitation – nécessaire pour une femme – qui lui permettrait d’enseigner la philosophie à l’université. Elle sera donc la première à demander officiellement que les femmes soient admises à présenter une habilitation au professorat. Après maintes réunions, résolutions, pétitions, les portes de l’université allemande s’ouvrent enfin aux femmes (E29). Edith est une femme engagée. Le sort de la femme l’intéresse et c’est vers ce thème qu’elle concentre ses efforts. La nature de la femme est conforme à sa vocation d’origine, qui est d’être épouse et mère. L’un et l’autre état sont étroitement liés. Le corps de la femme est formé pour être une seule chair avec un autre et pour nourrir en soi une nouvelle vie d’homme. (…) Elle est par ailleurs destinée à être, pour d’autres âmes, un refuge et une terre où elles puissent s’épanouir. Le compagnonnage spirituel et la maternité spirituelle, ne se limitent pas au domaine des relations charnelles, maritales et maternelles, mais s’étendent à tous ceux que la femme peut rencontrer.(…) L’âme de la femme doit être large [9] pour s’intéresser aux personnes et aux situations humaines (E22). 8. Vous devez être une seule famille, tous unis avec l’Église de Pierre, dans la foi et dans l’amour chrétien. SD dimanche 2 février 1969 9. Écoutez-moi, Écoutez-moi, Mamans. Éclairez vos enfants. Donnezleur l’amour chrétien et fortifiez-les toujours plus dans la foi et vous vaincrez tout et vous aurez tout… SD jeudi 11 octobre 1969 Il en est tant qui ne se comprennent plus! tant qui ne s’aiment plus! Mais moi, je veux donner tout mon amour car tous mes enfants doivent s’aimer, doivent se pardonner et tous doivent rentrer au Ciel parmi les anges et les saints… SD jeudi 16 octobre 1969 Réhabilitation de la femme Psychologue d’une grande finesse, Edith Stein a su, grâce à son expérience, donner une réponse sérieuse au problème de l’essence et de la vocation de la femme, sans céder à l’esprit du temps (C67). Dans le premier quart de siècle, les femmes étaient assimilées aux mineurs, c’est-à-dire aux enfants; et aux personnes souffrant de retard mental. Et ce n’est qu’en 1919 que la constitution du Reich mettra la femme sur un pied d’égalité, avec un statut de citoyenne à part entière (C70). L’homme et la femme sont appelés à garder leur propre ressemblance avec Dieu, à dominer ensemble la terre, à propager le genre humain. Mais chacun doit le faire à sa propre manière ! C’est-à-dire que chacun doit respecter et développer les caractéristiques propres au fait d’être homme et femme, tout en restant dans le cadre d’une vocation commune (int) [10]. Vocation de la femme dans l’église L’Église des origines avait admis les vierges consacrées et les veuves à certaines formes de participation dans le cadre du service de l’Église et elle avait reconnu le diaconat féminin avec une “consécration” spéciale. Mais l’histoire a imposé une limitation des ministères confiés aux femmes. Les temps actuels, au contraire, marquent une montée de la femme, due à son juste désir d’occuper dans l’Église une place correspondante à ses propres dispositions. La femme,dit Edith Stein, sent la nécessité d’édifier la réalité ecclésiale avec une contribution active, spécifiquement féminine. De telles aspirations pourront un jour être accueillies et réalisée avec la reconnaissance officielle de certains ministères. Cependant, pour ce qui concerne le sacerdoce, Edith n’a aucune difficulté à le reconnaître réservé à l’homme, [11] en considération du fait que Dieu s’est incarné sur la terre dans la personne de Jésus de Nazareth, homme de Dieu (int). 10. Réfléchissez, Mamans et Papas, réfléchissez ! Pour tenir unie la famille, il faut l’amour de Jésus, mon amour, la prière et la pénitence. Alors, la famille sera sainte, la famille amènera les âmes au Ciel et la Paix sur la terre. SD samedi 6 décembre1969 11. Courage, mes fils, courage, mes fils de prédilection ; prenez la croix sur vos épaules, parce que votre mission est d’être SEULS pour sauver les âmes et les préparer à l’éternité. Plus d’orgueil, plus de 13 est ce superbe. Ne demandez pas de richesse parce que la richesse qui porte à la perdition ; Pauvreté, pauvreté… SD vendredi 28 juin 1968 13 Plus une femme est sainte, plus elle est mère L’âme est un château intérieur avec de nombreuses demeures où le moi peut se mouvoir, soit pour sortir au dehors, soit pour rentrer à l’intérieur, au plus profond de soi. Le moi n’est pas vraiment chez lui qu’au plus intime de l’âme. Il peut vivre là une vie en plénitude et se hausser au plus haut niveau de son être, lorsqu’il vient à vivre en union avec les trois personnes divines (B27). Marie : Image originelle de la féminité La Bonne Nouvelle commence par une conception virginale : Pour s’incarner, Dieu choisit de naître du sein d’une mère humaine, qu’il nous présente comme l’image accomplie de la mère. Edith Stein voit en Marie, la nouvelle Ève qui participe à l’œuvre du Sauveur et prend place à ses côtés. Tous deux sont issus de la race humaine, mais l’un et l’autre sont libres de ce lien qui ne permet pas à l’homme de voir l’accomplissement de la vie ailleurs que dans l’union charnelle avec un être et par celle-ci. Marie et Joseph ne font qu’une seule chair sans avoir connu l’union charnelle, car la reproduction n’est pas le sens de ce mariage. Par l’institution idéale de la virginité, la règle de l’Ancien Testament, selon laquelle la femme ne pouvait accéder au salut qu’en assurant une descendance à son mari, est interrompue. Marie choisit librement la chasteté et en cela apparaît comme un modèle pour l’homme et la femme, et plus particulièrement pour cette dernière puisqu’elle représente l’image originelle de l’être féminin (dans sa virginité, elle est la pure et primitive image de la femme). Sa maternité spirituelle, qui dépasse l’ordre charnel, est une voie précieuse pour les femmes puisqu’elle les conduit à une image du Christ qui est propre à leur féminité. Si Marie est l’image originelle de la pure féminité, l’imitation de Marie devra être le but de l’instruction des jeunes filles. L’imitation de Marie n’est pas différente de l’imitation du Christ : pour la simple raison que Marie fut la première à imiter le Christ, qu’elle fut le premier et le plus parfait portrait du Christ. C’est pour cette raison que l’imitation de Marie n’est pas seulement affaire de femmes, mais le devoir de tous les chrétiens (int). Le don de soi : un devoir ? C’est en servant l’homme, par le don total de sa personne, que l‘être humain, tant la femme que l’homme, parvient à son plein accomplissement. Celui qui voit la vie de cette manière la reçoit en plénitude, grâce à la source jaillissant en nous et par nous (C70) [12]. C’est mon secret, à moi. 12. Je suis ici pour vous donner tant d’amour, de joie, de sérénité … SD vendredi 14 juin 1968 13 Allez souvent trouver mon Fils Jésus, le recevoir dans votre cœur. Il vous purifiera et vous sanctifiera. Il vous illuminera de tant de Lu14 donnera tant d’amour et enflammera votre cœur d’amière, vous mour pour Lui… SD 2 juillet 1968 Edith évite de parler de son expérience spirituelle à ses amis. C’est plus tard qu’elle parlera de l’heure de grâce, de sa vocation particulière, don de Dieu faisant d’elle une prisonnière d’amour, qui l’a remuée et saisie comme un coup de foudre [13] et lui a permis de reconnaître en toute clarté la vérité dont elle suivait la trace. Cette expérience divine va changer radicalement le cours de sa vie (C44). La vérité bâillonnée Dès 1933, la montée au pouvoir d’Hitler et du National socialisme interdit à Edith Stein d’enseigner et de parler. Elle écrit immédiatement au pape Pie XI pour qu’il rédige une encyclique condamnant l’antisémitisme (lire l’encadré ci contre p 15 Mit Brenender Sorge). Elle commence la rédaction de la Vie d’une famille juive. Encerclée par l’Amour La même année, le 14 octobre 1933 s’ouvrent pour Edith Stein les portes du carmel dans la banlieue de Cologne. Voilà douze ans que j’y pensais ! Le 15 avril 1934, l’épouse du Christ deviendra sœur ThérèseBénédicte de la Croix : Une telle vie, de l’amour divin en plénitude, éveille, nourrit, préserve et fait s’épanouir la vie divine ; c’est le summum de l’élévation dans la maternité, de son caractère sacré, et de l’accomplissement de la destinée humaine (C86). Seul Dieu peut recevoir le don d’une personne ; celle-ci ne perd pas pour autant son âme, bien au contraire ! Et Dieu seul peut s’offrir à une personne, qui sera alors comblée et ne perdra donc rien d’ellemême (C89) [13]. Le 14 septembre 1936, jour de la fête de l’Élévation de la Croix, sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix renouvelle ses vœux comme tout le monde ce jour-là. Peu après, elle dira à sa compagne de confiance : Quand mon tour de renouveler mes vœux est venu, j’ai très nettement senti que ma mère était auprès de moi. Or un télégramme parvenu le même jour confirmera que c’est au moment où sœur Teresia Benedicta renouvelait ses vœux que sa mère était morte, à 87 ans, coïncidence qui va être un grand réconfort pour elle (C93). 14. Donnez-vous TOUT à MOI. Donnez-moi tous vos péchés, que je les présente à mon Fils Jésus et je vous soulagerai de tant d’inquiétude et donnerai tant de paix à votre cœur. SD samedi 3 janvier 1970 14 Nous reproduisons, ce texte qui donne une lumière sur la position de l’Église dans une période sombre de l’histoire. Mit brennender Sorge. Quand Pie XI condamne le nazisme D’après un extrait du « Livre des merveilles », Mame-Plon, 1999 Du haut des chaires de toutes les paroisses catholiques d'Allemagne, en ce 21 mars 1937, le dimanche des Rameaux, la lecture publique du texte pontifical vient de commencer. Les fidèles retiennent leur souffle. « Mit brennender Sorge »... « C'est avec une vive inquiétude ». Les premiers mots de l'encyclique de Pie XI disent toute la gravité du moment. Ecrite en allemand et destinée aux vingt millions de catholiques du IIIe Reich, l'encyclique sur la situation de l'Église catholique en Allemagne, signée par Pie XI, a été acheminée au cours de la semaine en grand secret dans tous les diocèses d'Allemagne, puis reproduite et distribuée clandestinement. Pour chaque paroisse, il a été fait obligation par le Saint-Père de proclamer le texte. Dans beaucoup d'églises, en attendant la lecture publique, on l’avait caché dans les tabernacles. Dans l'une de ces églises, l'écrivain français Robert d'Harcourt se tient parmi les fidèles. Il écoute et regarde avec intensité, et publie quelques jours plus tard, dans L'Écho de Paris du 2 avril 1937, un article resté célèbre, qui retrace, de façon saisissante, le climat de cette lecture : « Dans ce silence actif d'une prodigieuse tension où était moralement perceptible le battement des coeurs, coude à coude avec les fidèles allemands et dans un sentiment accru de la solidarité de la grande famille catholique, nous avons entendu tomber, les uns après les autres, les mots terribles. Sur les visages, sur presque tous, une expression qui ne pouvait tromper; une expression nouvelle d'audace joyeuse dans la ferveur. Point de trace d'abattement ou de consternation. Bien plutôt une expression de libération. Toute cette foule pressée n'avait qu'un coeur et se taisait. Le service divin s'est achevé par une communion presque générale. » Les catholiques allemands ont bien besoin de la force du Christ, car ils savent ce qu'ils risquent à prendre au sérieux les directives du pape. Le concordat signé le 20 juillet 1933, entre le Saint-Siège et l'Allemagne, pour protéger l'Église dans ses droits essentiels, n'est pas respecté par le Reich : Multiplication des procès contre le clergé catholique, embrigadement des enfants dans les jeunesses hitlériennes, répression des associations chrétiennes, pertes d'emploi, emprisonnements, déportations, exil... Les persécutions contre les chrétiens ont déjà atteint une ampleur inquiétante. Qu'en sera-t-il maintenant que le pape porte le fer au coeur même de l'idéologie nazie, en désignant l'ennemi comme «prophète du néant»? Pie XI n'ignore rien des risques encourus. Mais précisément, en publiant à cinq Jours de distance, les 14 et 19 mars 1937, Mit brenneder Sorge et Divini Redemptori, en opérant la condamnation solennelle, conjointe et argumentée, des deux idéologies totalitaires (nazisme et communisme) qui ensanglantent le siècle, le pape croit à la force de la Vérité. Il faut ouvrir les yeux des catholiques sur la réalité perverse de ces doctrines, et leur en faire mesurer les conséquences qui malheureusement ne tarderont pas survenir. Cela fait plusieurs années déjà que la lettre du pape sur le nazisme est en gestation. À Pâques 1933, la philosophe Edith Stein confiait à dom Walzer, archi-abbé de Beuron, un message pour Pie XI, exposant la situation, prophétisant ce qui risquait de suivre et demandant une encyclique. Edith et sa sœur Rosa unies dans le Christ Rosa et Frieda sont désormais seules à la maison. Rosa désire depuis longtemps adopter la foi catholique et veut recevoir le baptême à Cologne près de sa sœur Bénédicte (C93). Ce sera fait la veille de Noël. Ensuite, les deux sœurs vont au carmel où Rosa, au cours de l’Office de Noël de minuit, reçoit la Sainte Communion pour la première fois. Quelle Joie pour les deux sœurs (C95)! 10 novembre 1938, C’est la “Nuit de Cristal” qui verra la persécution se radicaliser contre les juifs : assassinés, jetés dans des camps de concentration ; les synagogues brûlent et sont pillées. Sœur Bénédicte craint que sa présence mette la communauté toute entière en danger. Le carmel de Echt en Hollande étant prêt à l’accueillir, elle prend la fuite le 31 décembre 1938, à la tombée de la nuit (C102). 1940 : Une lourde menace pèse sur la Hollande. Le territoire est envahi. La Gestapo ne tarde pas à entreprendre ses violents assauts contre les monastères. La nouvelle prieure lui demande d’écrire sur Saint Jean de la Croix dont on doit fêter le 400e anniversaire. Elle s’inspire de son ouvrage Ascension au Mont-Carmel pour rédiger la Science de la Croix, en guise de testament (C105). Mirador à Auschwitz-Birkenau 15 15 VERITE ET PARDON SE RENCONTRENT Arrêtée le 2 août 1942, (jour du pardon d’assise) sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix est déportée, ainsi que sa sœur Rosa, à Auschwitz-Birkenau. Un juif originaire de Cologne, qui a pu échapper à la déportation, raconte : « Parmi les nouveaux prisonniers en proie à des lamentations et à une excitation indescriptible, sœur Bénédicte attirait notre attention par son grand calme et sa sérénité [15]; Elle allait au devant des femmes pour leur apporter aide, consolation et réconfort, comme un ange, s’occupant de la toilette, de l’alimentation et des soins de petits enfants que beaucoup de mères, au bord de la folie et sombrant dans le désespoir le plus total, avaient déjà abandonnés depuis des jours. Ce faisant, elle donnait le témoignage, dans le camp, d’un amour immense, qui a frappé d’étonnement tout le monde (C13) . Sœur Thérèse-Bénédicte de la Croix est gazée le 9 août. Ses dernières paroles sont : « Nous partons pour notre peuple ». 15. Soyez toujours sereins, Offrez heure par heure vos croix, les peines et tout, en échange de vos péchés et de ceux du monde entier. SD mardi 2 juillet 1968 Bibliographie : A : Edith Stein, Disciple et maîtresse de vie spirituelle – Ed du Carmel B : Edith Stein, la puissance de la Croix W. Herbtrith. Ed Nle cité C : Edith Stein, prisonnière de l’amour.B. Weibel. Ed Tequi D : Edith Stein, la prière de l’Eglise. AD solem E : Lorsque Edith Stein se convertit. F. Gabriau. AD solem Int : Internet Compilation de messages de San Damiano – Père A Althoffer 16 Seigneur, Fais-moi prendre aveuglément les chemins qui sont les tiens. Tes voies, je ne cherche pas à les comprendre puisque je suis ton enfant ! Tu es le Père de la Sagesse, et aussi mon Père. Tu nous guides au travers de la nuit, Mais c’est vers Toi que Tu nous conduis. Poème écrit par Edith Stein (à la mort de son père spirituel, le 17 sept 1927) DU PARDON JUIF AU PARDON CHRETIEN Edith Stein naît un 12 octobre, jour du pardon juif. Elle est arrêtée un 2 août, jour du pardon d’Assise ! Le plus beau fruit de la recherche de la Vérité aboutit AU PARDON D’AMOUR : Sœur Thérèse-Bénédicte de La Croix n’a-t-elle pas été choisie pour être un phare de réconciliation entre juifs et chrétiens ? Aimez-vous, aimez-vous mes enfants ! Donnez le baiser du pardon et vous serez toujours pardonnés de Jésus, Roi et Juge, qui pardonne tout et qui est tout amour. Il suffit de vous jeter à ses pieds, repentis. Moi, je vous attends toujours, pour demander pardon et pitié au Père Éternel … Toujours avec amour, toujours avec patience, toujours pardonner et toujours accueillir SD jeudi 15 août 1968 16