Je ne vous ferai pas l`affront de vous présenter à nouveau Gojira, je
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Je ne vous ferai pas l`affront de vous présenter à nouveau Gojira, je
On laisse passer la bête ! Je ne vous ferai pas l'affront de vous présenter à nouveau Gojira, je pense que tous autant que vous êtes avez déjà entendu parler de ce monstre français à quatre têtes qui écrase tout sur son passage depuis seize années maintenant, à grands coups de riffs death-thrash modernes ravageurs ! Alors qu'on avait laissé les frères Duplantier et leurs potes de groupe partir en tournée internationale après la sortie de l'excellent The Way of All Flesh en 2008, tournée gigantesque qui finira par le mener en première partie de Metallica, rien que ça... la formation originaire de Bayonne nous revient en 2012, comme promis, avec une nouvelle plaque très attendues par leurs fans et aussi par la plupart des médias spécialisés, tant la qualité de la musique de Gojira a su se montrer meilleure à chaque nouvelle sortie. L'Enfant Sauvage, c'est son nom, arrive donc très bientôt dans nos bacs avec l'intention de nuire gravement à la santé de nos conduits auditifs, et quand on a eu la chance d'écouter ce disque, on se dit qu'il est clair que ça va faire très mal ! De passage à Bruxelles pour une journée de promotion, Joe et Mario Duplantier, toujours aussi gentils et bavards, nous on accordé une interview fleuve que nous vous proposons de découvrir avec autant de plaisir que nous l'avons effectuée. Entretien avec Joe Duplantier (chant et guitare) et Mario Duplantier (batterie) Interview et édition par Sponge Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés Sponge (Rock'N'Balls): Tout d'abord, comment vous sentez-vous maintenant alors que vous avez enfin le nouvel album terminé entre les mains ? Joe: Ca fait du bien ! C'est vrai qu'accoucher d'un album, c'est toujours une épreuve, j'imagine que c'est comme accoucher d'un bébé, enfin on le saura jamais (rires). Mais c'est comme un vrai accouchement, c'est beaucoup de préparation, neuf mois de composition, après il faut passer en salle d'accouchement, le studio, et là il faut y aller très profondément, avec beaucoup de douleur, et puis on ne sait jamais combien de temps ça va durer... Donc maintenant qu'on a le bébé entre les mains, on est bien contents, c'est clair ! S: La première bonne nouvelle autour de ce nouveau disque, c'est qu'il est le premier de Gojira à sortir sur Roadrunner Records ! Apparemment, ils vous avaient dans leur collimateur depuis un moment, alors comment est née cette nouvelle collaboration ? Joe: Effectivement, ça fait quelques années que Roadrunner nous approche, très respectueusement et gentillement, ce n'est pas la première offre qu'ils nous font. Avant, on était chez Listenable Records, et on était bien avec eux, c'est Laurent Merle qui s'occupe de ce label, et tout le monde connait Laurent ! Aux quatres coins de la planète, au fin fond du Canada anglophone, ils me disent « Hey Laurent!!! I know him! » (rires), c'est une star interplanétaire, qui a une aura et une vraie passion, et c'était vraiment super de faire un bout de chemin avec lui, il nous a ouvert des portes et on lui en sera éternellement reconnaissants, mais notre contrat avec eux s'est terminé, et on s'est retrouvés avec plein d'offres, et on a choisi la plus intéressante pour nous. Roadrunner Records était ceux qui nous suivaient depuis le plus longtemps, même à l'époque de notre signature avec Listenable, les gars nous avaient déjà approchés, mais ce n'était pas le moment pour nous, on préférait choisir une autre voie. Donc c'est une suite logique dans notre cheminement, et Monte Conner par exemple, qui est le directeur artistique du bureau aux Etats-Unis est venu nous voir et a suivi le groupe de prêt, il était présent à chaque concert qu'on a fait à New York depuis 2005, on a joué sept ou huit fois, et il était là systématiquement. En Angleterre, il y avait toujours des représentants de Roadrunner qui étaient là, et au fil du temps on s'est aperçu que c'était de vrais gentlemen qui sont passionnés et qui étaient attentifs à ce qu'on faisait. Et ce label était une plateforme internationale idéale pour nous aujourd'hui, avec un vrai esprit derrière, et ça se confirme depuis qu'on est chez eux. S: Ce nouvel album s'intitule donc L'Enfant Sauvage et sortira officiellement dans les bacs le 26 juin prochain. Comment appréhendez-vous cette sortie ? Et que pensez-vous qu'en diront vos fans ? :-) Joe: Je pense que nos fans vont comprendre cet album, je crois qu'ils seront contents, parce qu'on y retrouve tous les éléments qui font que Gojira est ce qu'il est depuis le début, c'est nous avec en plus ce qu'on a appris, on a mis tout ça sur un disque pour lequel on a pris notre temps, et là on se sent vraiment sereins par rapport à cet album. Mario: Après, ça dépend aussi des attentes de chacun, ça reste hyper subjectif, certains fans ont besoin de violence, d'autres attendent un truc plus death-metal, c'est difficile d'être dans la peau de tout le monde et de savoir ce dont on a besoin. Peut-être qu'un mec aime Gojira pour certaines raisons qu'il ne retrouvera pas sur ce nouvel album, mais en tout cas c'est une bonne photographie du groupe à cette période, on a fait notre maximum, on s'est donné à 100% avec le plus d'honnêteté possible, mais si ça se trouve personne ne va l'aimer ! Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés Joe: Mais en même temps, on n'a pas fait de grand écart artistique, on s'est pas mis à la bossa nova du jour au lendemain. Ca reste du Gojira avec de la double-pédale et des hurlements. « Roadrunner Records était une plateforme internationale idéale pour nous aujourd'hui, avec un vrai esprit derrière, et ça se confirme depuis qu'on est chez eux. » (Joe Duplantier) S: D'où avez-vous tiré ce nouveau titre L'Enfant Sauvage ? Est-ce pour vous le terme qui représenterait le mieux Gojira à l'heure actuelle, et à la fois un moyen de plus de connecter le groupe à la nature ? Joe: En fait, on n'a pas vraiment besoin de se connecter à la nature, puisqu'on EST la nature, même cette table en fait partie, c'est marrant que l'humain en général se dissocie de ça, et nous on rappelle dans notre message que la nature, ou Dieu, c'est nous, nous sommes le miracle de la vie et de la nature. Et l'album part de ça. Mario: Gojira, c'est aussi une entité où il n'y a pas trop de règles, et une sorte de naïveté, beaucoup d'innocence, c'est peut-être ça aussi l'Enfant Sauvage, un truc très pur. Joe: C'est comme un mec qui débarque de la fôret, qui n'a pas eu d'éducation, et qui est lâché dans la ville, c'est un peu de vue du groupe sur la situation de la société humaine. S: Apparemment, Joe, tu as presque eu une vision de cet album avant de commencer à le composer, tu y avais déjà associé des couleurs, des sons, des formes. Peux-tu nous expliquer ce procédé et ces idées un peu plus en détails ? Joe: C'est vrai que moi, j'avais eu une vision bien personnelle avant de commencer à composer, je voyais des couleurs, une atmosphère, un truc venteux, une espèce d'orage sonore, parce que j'ai un souci de producteur sur notre groupe, j'ai toujours été vachement présent lors de la production de nos albums, de A à Z, après un album ça se compose à plusieurs, donc la vision intime d'un disque, ça se réalise rarement. C'est pour ça que je trouve intéressant que certains musiciens sortent parfois des albums solo, car ça leur permet d'aller au bout d'une certaine idée, et ça nous pend au nez à Mario et moi je crois, mais Gojira reste quand même le projet dans lequel on s'éclate le plus, et c'est pas près de s'arrêter. On a vraiment fait cet album à deux avec Mario, il a posé beaucoup de bases musicales, qui n'étaient pas forcément dans la vision que j'en avait, mais je l'ai rejoint volontiers dans sa vision de certains titres qu'il amenés presque du début à la fin, il est venu avec des structures, des mélodies, on a bossé là-dessus, j'ai aussi apporté mes morceaux à moi. Mario: Mais ce qu'on a en commun, c'est que Joe et moi voyons tous les deux Gojira un peu comme un volcan qui explose ! Quand on compose, on a des images en tête d'éléments très organises, on a ça encré en nous, et je ne sais pas d'où ça vient. Joe: C'est un désir de bousculer, on ne fait pas une musique pour se relaxer et s'endormir, on a envie de frapper fort avec un truc massif ! Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés S: Pour la production de cette album, tu t'es associé à Josh Wilbur qui s'est occupé de l'enregistrement et du mixage, et qui juste avant venait de produire le nouveau Lamb of God (ce qui n'est pas rien !). Comment s'est passée cette première collaboration, puisque il s'agit ici du premier album que vous n'avez pas entièrement autoproduit... ? Joe: Ca c'est relativement bien passé, mais il faut d'abord savoir qu'un album ne se fait jamais dans une parfaite quiétude. Il faut aller chercher des choses au fond de soi, trouver des compromis en tant que groupe, un terrain commun, certains doivent parfois imposer des choses ou essayer de le transformer en vision commune. L'élaboration et l'enregistrement d'un album, c'est un truc qui est tout en tension. Et donc Josh nous a rejoints dans cette tension, car il faut nous voir en studio, on n'est pas du tout détendus, on est stressés, ça peut péter d'un instant à l'autre (rires), mais on est suffisament posés et respectueux pour que ça se passe toujours bien ! Josh est un gars plein d'énergie, il venait de finir Lamb of God et un autre album juste avant, et il en avait encore sous le coude pour se jeter dans l'aventure avec nous, et c'est un truc qu'il faut vivre pour savoir ce que c'est. Il a apporté son savoir-faire technique, il a posé les micros de la batterie d'une façon magistrale, le son des drums est génial, il a mis une fougue toute particulière à obtenir les prises de son les plus carrées possible des guitares, de la basse, et puis au chant il m'a poussé vraiment au maximum. Et c'est important, car quand j'enregistrais ma voix pour les albums précédents, j'étais seul et ce n'est pas la même chose, parfois il faut avoir quelqu'un qui a une vision, qui est attentif en permanence pour te pousser ! S: Ce nouvel album semble plus technique et plus expérimenté, plus mature. Quels sont justement, selon vous, les différences majeures entre L'Enfant Sauvage et The Way of All Flesh ? Mario: La maturité c'est le mot, puisqu'on n'est plus dans la vingtaine maintenant, on est plus posés, on essaye d'aller un peu plus droit au but, mais c'est un phénomène naturel. On a aussi beaucoup tournée, on a engrangé énormément d'expérience, on l'a digérée, pour moi c'est normal dans le sens où depuis toutes ces années, on est restés à fond dans la musique, on a fait que tourner et s'occuper du groupe sous tous les aspects, on a parfois dû prendre du recul à causes de certaines désillusions, de joies, plein de trucs qui forgent l'expérience et nous donne un bagage plus solide dont découle forcément une musique plus solide aussi, plus mature. Joe: Sur le plan musical, ce sont des morceaux qui sont plus « droit au but », pour nous c'était un peu comme ça depuis le début, mais là on s'est débarassé de tout ce qui était superflu, ça donne quelque chose de plus pur. Mario par exemple, à la batterie, appréhende ces morceaux qui sont moins accidentés, moins périlleux, ce n'est plus du jonglage qui part dans tous les sens comme ça pouvait l'être au tout début, et il met toute sa technique au service d'un truc qui coule plus de source, mais avec encore plus de technique et d'expérience, donc ça donne quelque chose plus en finesse. Le raffinement, c'est quelque chose qui vient avec l'âge, cette musique est moins démonstrative. Après, personnellement, parfois la musique me permet plus de m'exprimer en tant que chanteur. Les morceaux se transforment en plateformes pour accueillir un chant qui sera aussi plus fort, alors qu'avant le chant faisait vraiment partie intégrante de la structure musicale, des guitares, c'était un instrument, mais maintenant c'est une vraie voix qui se dégage d'un tout. C'est un procédé assez long et complexe, ça a pris seize ans pour en arriver là, et quand on pose ce disque sur la table et qu'on l'offre aux fans, c'est pas du vent ! Il y a une vraie réflexion derrière ces morceaux, un vrai travail. Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés « Gojira, c'est aussi une entité où il n'y a pas trop de règles, et une sorte de naïveté, beaucoup d'innocence, c'est peut-être ça aussi l'Enfant Sauvage, un truc très pur. » (Mario Duplantier) S: La première idée que je me suis faite à l'écoute de ce nouvel album, c'est qu'il était très violent et à la fois très zen, avec beaucoup de sons organiques et naturels, ça semble beaucoup plus atmosphérique et spirituel que The Way of All Flesh qui sonnait plus compact. Etiez-vous dans un état d'esprit vraiment différent lors de la création de ce disque ? Avez-vous suivi des lignes de conduits précises ou un tout autre procédé que pour l'album précédemment ? Joe: En fait, pour The Way of All Flesh, on sortirait d'une période qui était le cycle d'album de From Mars To Sirius, c'était la première fois qu'on jouait à l'étranger, qu'on tournait autant, on a fait des tournées extrêmement physiques, on a fait des centaines de dates, on a été très peu chez nous pendant deux ans, et cette expérience a changé notre vie. A la fin de ce cyle, on est rentrés à la maison, on revenait des Etats-Unis et ont été complètement rincés ! On s'était dit qu'on prendrait quinze jours de repos complet, et finalement deux jours plus tard, on se donnait rendez-vous au studio pour commencer à bosser ! (rires). Mais on s'était rendu compte qu'il fallait qu'on sorte un nouveau disque assez rapidement, que c'était le bon moment pour nous, mais il faut nous imaginer après trois ans de tournée intensive, le corps est vraiment fatigué, mais avec cette énergie et cette spontanéïté propre au live, on a vécu des trucs impossibles, on s'est jetté dans des foules d'Irlandais bourrés, on est allés au Etats-Unis, on a connus des tensions pas possibles même entre potes, on a rencontré des death-metalleux polonais, des suédois, des mecs couverts de tattoos qui nous prenaient dans leurs bras (rires), on était vraiment dans une énergie brute, et hyper excitante ! Et l'album The Way of All Flesh est vraiment imprégné de tout ça, et je me rappelle qu'on était dans une énergie encore très électrique, et à ce moment-là j'étais personnellement dans un état d'esprit où je me rendais compte qu'on vit sur une toute petite planète, et ce disque est imprégné de ça, de colère aussi, et c'était cool de sortir tout ça de nous. Mais maintenant on revient dans une situation où on est un peu plus aguerris, les tournées nous marquent moins par leur violence, on est plus habitués, et toute cette richesse en nous, toute cette spiritualité aussi, remontent tout en douceur. S: Gojira existe depuis 16 ans, et le line-up n'a jamais changé ! Comment expliquez-vous cette cohésion dans le groupe depuis si longtemps alors que beaucoup d'autres formations auraient déjà changé plusieurs fois de membres ? Mario: C'est vrai (rires). Déjà, Joe et moi sommes frères, et on a trop de respect et d'amour l'un pour l'autre pour se mettre sur la gueule, et les deux autres membres du groupe sont des personnes exceptionnelles, vraiment, profondément gentilles, des mecs avec beaucoup d'abnégation, très calmes, on est tous les quatre très calmes, dans certaine extrêmité malgré tout, mais on est tous sur la même longueur d'ondes, et quand il y a une tension on essaye d'en parler, on est tous d'accord avec ça. Parce qu'on sait que c'est la clé de l'entente, c'est d'arriver à discuter. Parfois certains déconnent, mais quand ça refoule trop, on en parle ensemble. La communication est primordiale. Joe: Et puis aussi le fait qu'on n'utilise pas de drogues, je le dis souvent, c'est con mais si l'un d'entre-nous était enfoncé dans la drogue, on n'en serait pas là aujourd'hui. On garde l'esprit clair par rapport à tout ce qui nous entoure. Ca ne veut pas dire qu'on a forcément une hygiène de vie impeccable, mais aucun de nous n'est en détresse, ou incapable de Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés s'exprimer, tu vois. Quand tu es ancré dans une drogue et que tu ressens quelque chose, que tu as quelque chose à dire, tu ne le fais pas, et au final tu t'anesthésies, tu t'assommes... On n'a pas ça dans le groupe, et on est toujours très alertes. Mario: Et on a aussi un gros recul par rapport à notre « succès », on est loin d'être Madonna ou Britney Spears, on ne nous reconnu pas dans la rue, mais on regarde tous les quatre ça avec beaucoup de distance. Parfois on croise des groupes qui ont moins de notoriété que nous, mais qui ne passent déjà plus la porte, tu vois (rires), et nous on arrive à se détacher de tout ça. Joe: On reste des gens soucieux, en fait. Tu vois là je vais me lever, je vais me dire « Bon, qu'est-ce que je fais de mon plateau, je le mets à la poubelle ? », on fait attention aux détails etc... C'est pas forcément toujours une qualité, parfois c'est bien de se détendre aussi, mais du coup quand quelqu'un ne va pas bien dans le groupe, on le capte tous, on en parle. On s'adore, donc on n'a pas envie d'en perdre un dans l'aventure ! Après c'est pas dit que personne n'arrête le groupe à l'avenir, car c'est quand même une vie difficile et fatiguante, donc on n'est pas à l'abris d'un départ, et à ce moment-là il faudrait décider de ce qu'on ferait. Mais on n'en est pas là. S: Vous êtes connus pour utiliser les paroles de vos chansons pour diffuser vos croyances spirituelles et votre intérêt pour l'environnemment. Comment vous sont venus ces envies et ces croyances ? Comment expliquez-vous votre préoccupation pour la nature ? Joe: Je dirais qu'on a reçu une éducation par nos parents, ce qui n'est pas toujours le cas. Il y a plein de gamins à qui on n'explique pas les choses, à qui l'on ment, on leur fait croire au Père Noël et toutes ces conneries... Nous, on a eu des influences très positives par nos parents, pas que ça évidemment, mais au moins une éducation. On nous a appris à ne pas jeter nos papiers par terre, par exemple, et ça nous est resté, tu vois ! Et du coup, quand on pratique notre musique, on est du genre soucieux, encore une fois, on a envie de revendiquer, on a souvent des discussions dans le groupe, on se sent impliqués dans le monde en général. Il y a aussi une dimension spirituelle, c'est vrai, qui n'explique pas forcément par notre éducation, mais si quelqu'un souffre à côté de moi, c'est mon égal, donc je souffre un peu avec cette personne aussi, c'est le fait de se projeter dans cette personne, et de ne pas être satisfait que quelqu'un souffre, ce serait complètement démoniaque ! Chez nous c'est l'inverse qui se passe, on se sent proches des gens, on n'a pas envie d'agresser notre public, de marcher sur la tête des gens ! C'est du bon sens, et de l'éducation, oui. Mario: Géographiquement aussi, on a grandi dans la bouse (rires), on jouait dans la mer, on jouait dans les bois, on n'a pas grandi dans une grande ville mais dans un petit village du sud de la France où il n'y a pas de centre ville, il y a juste des grandes forêts, l'océan, et c'était notre terrain de jeu ! Et moi à trente ans, dès que je me retrouve en ville, je me sens un peu oppressé, c'est un truc presque physique, je n'ai absolument rien contre les gens et la ville, mais le béton qui recouvre le sol me fait bizarrement suer le corps, je me sens un peu animal en fait, un peu sauvage justement. Mais je parle uniquement pour moi, bien sûr. Joe: Oui, c'est vrai. Moi personnellement j'aime beaucoup New York par exemple, mais c'est un peu une jungle, j'irais jamais habiter dans un truc pareil, ou alors il faudrait me payer très très cher ! (rires) C'est vrai, on a grandi dans les vagues, on se sent très proches de la nature, mais comme tout le monde, encore une fois, on fait partie de la nature. Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés « Notre groupe est né d'un désir de bousculer, on ne fait pas une musique pour se relaxer et s'endormir, on a envie de frapper fort avec un truc massif ! » (Joe Duplantier) S: En 2010, vous avez débuté l'enregistrement d'un EP 4 titres qui serait vendu au profit de l'association Sea Sheperd qui combat la chasse à la baleine tout autour du globe. On a déjà pu entendre le titre « Of Blood and Salt » avec en invité Devin Townsend et Fredrik Thordendal (Meshuggah), mais la sortie de cet EP a été repoussée, apparemment à cause d'un problème de disque dur défectueux... Où en est la création de ce disque à l'heure actuelle ? Joe: En fait, on a beaucoup avancé sur ce projet, le processus n'a pas duré très longtemps, la seule erreur qu'on a faite c'est d'en parler un peu trop tôt, je pense. En fait on ne comptait pas en parler, mais l'information a filtré. C'est un truc qui prend du temps, parce qu'il y a plusieurs chanteurs et musiciens impliqués, c'est un projet carritatif, donc sans argent à la clé, donc il ne faut payer personne pour bosser dessus, donc on le fait nous-même, c'est déjà très avancé, le disque est déjà mixé. Le problème de disque dur est réglé, mais maintenant c'est un problème d'emploi du temps ! C'est à dire qu'on ne peut pas être ici en train de te parler, et en même temps bosser sur ce projet... donc finalement, c'est un peu de ta faute ! S: Oui, je m'en rends compte, et je m'en veux beaucoup, désolé... (rires). Joe: Oui, tu peux ! (rires) Non mais on doit s'occuper de la promo du nouvel album, on ne peut pas choisir de stopper ça pour bosser sur autre chose, donc on attend de trouver un moment pour terminer ce projet, mais ça sortira, c'est sûr à 100% ! S: Apparemment, Gojira travaille également en ce moment sur la création d'un DVD live qui contiendrait aussi un documentaire intitulé The Way of All Flesh From the Inside. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce DVD, et connaissez-vous déjà sa date de sortie officielle ? Mario: La date de sortie est donc le 4 juin [note: ce DVD/BluRay est donc maintenant disponible à la vente !], il contiendra deux concerts entiers enregistrés en 2009 sur la tournée de The Way of All Flesh en France, un dans une salle plutôt intimiste sans déballage de technique et de production, et un autre concert tourné au Garorock Festival dans le sud de la France, on était tête d'affiche sur une grosse scène, ça a été filmé et donc ça c'est un peu plus sophistiqué et dynamique. On aime beaucoup ces deux lives, c'est un bon portrait du groupe. Et à côté de ça, il y a donc un documentaire que Joe, moi et une Française qui bosse dans la vidéo avons réalisé ensemble, c'est un espèce de patchwork anecdotique, il n'y a pas de gros message, c'est juste un documentaire d'une heure filmé de l'intérieur par le groupe, avec nos téléphones, nos petits appareils photo de merde, et qui retrace tout de la création de l'album jusqu'à la tournée avec Metallica trois ans après, tu peux voir toutes les étapes de 2007 à 2010, c'est intéressant. Ce n'est pas une méga-production ou un essai philosophique ou poétique. Joe: Mais je pense que c'est ce qui va intéresser nos fans, c'est qu'ils vont nous suivre dans tout ce processus ! On est assez silencieux dans ce documentaire, on n'est pas tout le temps en train de faire des blagues ou autres, c'est plutôt simple et tout en finesse, quand on filme nous-même, on choisit ce qu'on filme, évidemment c'est jamais impartial, mais c'est justement notre regard sur nous-même, c'est totalement inédit ! C'est quelque Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés chosequ'on ne fait vraiment pas souvent au sein du groupe, donc ce sera une vraie percée dans notre univers pour les gens qui nous aiment vraiment et qui nous suivent depuis le début. S: Alors que Gojira est né à Bayonne dans le sud-ouest de la France, le groupe n'est plus vraiment associé à votre pays d'origine, et a plutôt une réputation de « groupe international » à l'heure actuelle. Comment expliquez-vous cet attrait soudain pour Gojira un peu partout et surtout aux Etats-Unis ? Joe: D'une part, ce n'est pas vraiment soudain comme tu le dis, c'est vrai que pour le moment il y a un buzz, parce qu'on a signé chez Roadrunner, entre autres, mais il faut savoir qu'à une époque de notre carrière, on était au même stade que plein d'autres groupes français très talentueux, et à un moment donné on a pris la décision de partir à l'étranger, on voulait ça depuis le début ! Je me rappele que la moindre date en Suisse, en Belgique, on était même venus jouer ici au Magasin4 et on était super excités d'avoir joué dans ce pays, tu vois ! On a un esprit un peu conquérant depuis nos débuts, on veut conquérir de « nouveaux territoires », même si il s'agit juste de partager notre musique avec des gens, mais ça nous excite, on aime voyager, on aime la différence, on en a même besoin, on a ça dans les trippes, c'est spirituel, on a besoin de se confronter à l'inconnu ! Mais c'est très difficile de sortir à l'étranger quand tu n'es pas connu, surtout quand tu n'as pas un gros label derrière toi, et on a bossé là-dessus pendant quinze ans ! Mario: Pendant toutes ces années, on a fabriqué notre armure, et puis à un moment il faut foncer ! Parce qu'on sait qu'il y a plein de mecs super doués partout, il peut parfois y avoir un groupe de génie dans la cave d'à côté, mais c'est autre chose de se battre, de rassembler ses forces et de se dire « Allez on y va ! ». Il faut aussi s'entourer des bonnes personnes, se dédier entièrement à ça, lâcher son job d'à côté, c'est beaucoup de sacrifices et de prises de risques, beaucoup de doutes, mais il faut foncer quoi qu'il arrive. Joe: C'est vrai qu'à une époque, on avait un certain succès en France uniquement, qui nous permettait de jouer et de mettre un peu d'argent de côté, qui nous permettait ensuite de faire un concert en Angleterre ou aux Etats-Unis bénévolement, mais on avait de quoi payer nos frais d'organisation ! On s'est proclamés nous-même « groupe international » quand d'autres groupes ont préféré la sécurité de la France ou de la Belgique juste à côté. Tout le monde n'est pas partant pour se déplacer jusqu'en Angleterre et aller se faire chier à jouer dans un club pourri, sans être payé... et nous dès le départ, on a foncé dans cette optique-là. Mario: Et puis c'est aussi très progressif. On est allés jouer aux Pays-Bas dans des clubs plus petits que ce snack où on se trouve ici, on l'a fait en Angleterre, aux States, avec des cafards qui nous sautaient sur le front (rires), non c'est vrai, on a joué dans des endroits impossibles, comme un squat aux Pays-Bas, c'était un vrai sauna à la marijuana avec un tapis de bière par terre, sans scène, la folie... une pizzeria en Angleterre etc... et en Grande-Bretagne, tu es payé si les gens viennent ! C'est pas les salles subventionnées françaises, t'arrives dans la cave, on te file cinquante euros, et si y'a du monde qui se pointe, tu auras un peu plus, mais c'est tout ! On s'est tapé pendant dix ans des concerts où on gagnait juste assez pour payer l'essence pour le déplacement ! On a bouffé notre merde pendant longtemps, vraiment. Et pendant ce temps-là, Roadrunner nous observait, et à force de voir qu'on se démenait comme ça, on est devenus crédibles aux yeux des gens qui pouvaient nous offrir des contrats, et quand ils sont venus vers nous, ils savaient qu'on savait ce qu'on voulait, et qu'on était prêt à se défoncer sur la route ! Cette collaboration, on ne l'a pas volée, finalement. Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés « On a un esprit un peu conquérant depuis nos débuts, on veut conquérir de « nouveaux territoires », même si il s'agit juste de partager notre musique avec des gens, mais ça nous excite, on aime voyager, on aime la différence, on en a même besoin, on a ça dans les trippes, c'est spirituel, on a besoin de se confronter à l'inconnu ! » (Joe Duplantier) S: Qu'est-ce qu'il manquerait à Gojira aujourd'hui pour réaliser une carrière parfaite ? Estce qu'il y a des choses en particulier dont vous rêvez ? Mario: Hier, je zappais à la télévision dans ma chambre d'hôtel, et il y avait un reportage sur Britney Spears, qui parlait de sa profonde tristesse, de son désarroi, de son malheure profond... Et bon, d'apparence, on pourrait se dire que c'est la méga-star planétaire... donc qu'est-ce que c'est vraiment qu'une carrière parfaite ?! Nous en tout cas, notre histoire est belle, déjà. Joe: Je dirais qu'on a toujours des objectifs très réalistes, par exemple ce que j'aimerais la prochaine fois qu'on ira à Londres, c'est qu'au lieu de jouer à l'Underworld, qui est une sallede 450 places où on a déjà joué deux fois, je voudrais qu'on joue dans une salle d'un calibre un peu au-dessus, avec 2000 personnes, ce sont des salles parfaites pour la musique qu'on fait, le son remplit bien la salle, et avec un beau lightshow et un son d'un autre monde, ça me plairait ! Je voudrais qu'on me propose de mettre en place un show tonitruant, qu'on se sente bien sur scène, qu'on soit heureux et qu'on puisse en vivre, quoi de mieux ? On n'a définitement pas la folie des grandeurs, on aime notre musique, on ne la trahira jamais, et on a envie qu'elle remplisse des belles salles avec des gens contents. S: Joe, tu as eu l'occasion de jouer dans Cavalera Conspiracy lors du premier album, Inflikted, mais tu as ensuite quitté le groupe. Y avait-il une raison particulière à cela ? Etaitce pour te consacrer uniquement à Gojira ? Et certains d'entres-vous ont-ils d'autres projets parallèles en ce moment ? Joe: Mario compose de son côté, il a son univers musical bien à lui, qui est riche et cohérent, il ne lui manque qu'un peu de temps pour pondre un album. Moi pareil, j'enregistre souvent de la musique, j'adore ça, je bosse seul dans mon coin. C'est comme être en couple avec quelqu'un, parfois c'est aussi pas mal de passer une journée seul à la maison ! Mais bon, pour l'instant on n'a pas le temps, vraiment (rires). Mario: On traverse en ce moment des étapes importantes, et j'ai besoin de rester concentré. Mais c'est vrai que j'ai aussi mes espaces à moi, je compose effectivement de mon côté, mais je fais aussi un peu de peinture, ce sont des brêches qui te permettent de t'aérer un peu, et à côté de ça on a une vie normale. Joe: Mais concrètement, même si on peut apparenter Gojira à un couple comme j'en faisais le parallèle juste avant, là on ne peut pas prendre une demi-journée pour souffler, parce qu'on doit s'occuper de nos gosses, nos albums en fait. Et pour Cavalera Conspiracy, c'était vraiment une expérience, mais après il a fallut que je parte, j'étais hyper honoré d'y avoir participé, mais il fallait que je revienne à mon groupe, vraiment (rires). Alors qu'on n'était pas encore si connus que ça, mais j'en n'avais rien à foutre, Gojira c'est notre bébé et on s'en occupe. Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés S: Eh bien merci beaucoup pour cet interview ! Je pense beaucoup de vos fans vous avoir un sacré orgasme en écoutant ce nouvel album. Avez-vous un dernier mot pour vos fans et nos lecteurs ici en Belgique et partout ailleurs ? Joe: Merci à tous les belges, et merci à toi ! On sera présents ces prochaines semaines à la Werchter Boutique et au Graspop Metal Meeting, et puis on voudrait bien jouer en Europe en fin d'année, mais plutôt pour une tournée des salles, ça se profile petit à petit, et on en a très envie. A très bientôt ! Publié par Rock'N'Balls sur www.rocknballs.com | Tous droits réservés