Mémoire - A nissa T ouil
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Mémoire - A nissa T ouil
A TRANSMÉDI T NARRATION INTERAC ET IVE Anissa Touil 2015/2016 n° 115 333 94 Master Professionnel Création et Gestion de l’Image Numérique Mémoire de fin d’études TRANSMÉDIA ET NARRATION INTERACTIVE quand l’interactivité interroge, et renouvelle la participation du spectateur dans des univers et des dispositifs interactifs et immersifs Enseignants : Pascal Cesaro Quentin Destieu Jean-Paul Fourmentraux Fabrice Metais PARTIE I L’interactivité : du passage des médias traditionnels vers les médias interactifs 6 12 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive 13 Qu’appelle-t-on les anciens médias et pourquoi les différencie-t-on des médias interactifs? Quelles formes de narration interactive existent et pourquoi ont-elles été influencées par les médias traditionnels ? 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias 18 25 28 Ancienne ou nouvelle interactivité ? L’interactivité dans les narrations interactives (fictions interactives, jeux interactifs...) et transmédias découle d’une évolution des médias de masse et du Web PARTIE II Invention et création de narrations interactives : meilleure expérience et représentation de la réalité ? 32 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 33 Nécessité d’un esthétisme nouveau de l’information : internet, le virtuel et l’interactivité permettent-ils de mieux représenter notre monde? Enjeux majeurs de vouloir représenter notre existence avec les narrations interactives : vers un cinéma total ? 40 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu 46 L’hybridation de différents genres questionne la place importante du jeu dans l’art numérique Les narrations interactives et le jeu (vidéo): un nouvel art du jeu ? 50 PARTIE III Transmédia et narrations interactives : innovation et renouvellement dans la manière de raconter des histoires et de créer un univers 54 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires 55 Influence des supports et outils numériques sur l’interactivité et le contenu des narrations interactives Innovation dans la manière de concevoir les récits grâce aux outils numériques actuels 59 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants SOMMAIRE Introduction Révolution numérique : l’émergence d’internet a transformé les rapports entre les récits et 61 l’utilisateur, les rendant de plus en plus complexes Renouvellement dans la manière de raconter des histoires et de créer un univers innovant pour le public d’aujourd’hui 63 Conclusion 70 Bibliographie/Webographie 74 Glossaire 79 Annexes 80 Introduction 6 INTRODUCTION Créer de nouvelles formes de narration à partir d’une approche actuelle de saisir une définition de la narration interactive. de l’utilisation d’Internet et des nouveaux médias constitue le propos même de D’ailleurs, notre projet d’installation interactive, et principalement aborder les formes de de la problématique de ce mémoire. Cela narration qui se rapportent à notre répond à une notion importante énoncée projet personnel, à savoir la fiction aujourd’hui dans l’art numérique : interactive, le webdocumentaire mais aussi Qu’est-ce Nous mettons volontairement de côté un certain nombre interactive», selon le terme de Benjamin de composantes, qui nous semblent Hoguet, et ses composantes que sont la ne pouvoir être abordées de manière fiction interactive, le webdocumentaire pertinente qu’à titre d’exemple, n’étant et le transmédia? Comment raconter pas directement en relation avec notre une du pratique. Web et les différents médias qui le La composent? Pourquoi notre époque définie par Benjamin Hoguet, auteur tend-elle vers ces nouvelles formes et de narration, qualifiant par exemple et transmédia, comme une manière de le raconter une histoire par le biais de formes cinéma avec de la transmédia. allons «narration histoire que le nous les outils dispositif «passif»? narration concepteur interactive d’oeuvres est interactives d’interactions. Elle propose des contenus Ces formes de narration étant qui sont adaptés au public du Web : nouvelles, il est difficile d’en donner une définition claire et précise. «la narration En effet, chaque théoricien a une l’art de approche différente de ce qu’est la qui incorporent narration interactive car elle regroupe d’interactions tellement de formes différentes, qu’il est sociales difficile de la limiter à une seule définition. proposer des contenus adaptés aux Mais des rapprochements et des points nouveaux modes de consommation communs existent entre les différentes du public.»1 théories énoncées et il est alors possible interactive raconter ou est des histoires des formes technologiques, collaboratives pour 1 Benjamin Hoguet, La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, 2015, impression à la demande, p. 14 forme d’interaction, de crédibiliser un les nouvelles formes d’interaction; en univers imaginé, fictionnel, ce dont nous effet, trop souvent, certains vont utiliser jouons et que nous démontrons dans les termes cross-media, deep media, notre installation, du nom de R.y.l.e.e. transmédia, multimédia pour caractériser (Realize You Live Eventually Everything) ces nouvelles formes qui sont en fait plus (Annexe 5), larges au niveau de leur sens. Le terme un personnage fictif, s’inscrivant alors de narration interactive a le mérite de dans le monde réel. en faisant exister virtuellement regrouper tous ces sens en une seule formule. En effet, ce qui est commun Mais il faut savoir que l’interactivité dans toutes ces formes de narration, présente d’autres formes qui ne datent c’est qu’il y a un même but : «rechercher pas d’aujourd’hui. l’interaction, le pouvoir transformatif du dialogue à travers l’oeuvre créée.»1 auteur anglais, a créé en 1978, Le Guide Douglas Adams, scénariste et du voyageur galactique, saga de scienceCelle-ci cherche alors à nous faire fiction, d’abord sous forme de feuilleton partager une expérience singulière d’un radiophonique qui fut déclinée ensuite récit avec les nouveaux médias. Cette en romans, pièces de théâtre, jeux vidéo, expérience est aussi singulière dans le bande dessinée... Il a écrit un article How cinéma, mais elle est d’ordre «passif» to Stop Worrying and Learn to Love the par rapport à la narration interactive : le Internet, en 1999, où il dit : spectateur n’interagit pas sur le déroulé du film. Ce sont le vécu personnel et «La raison pour laquelle nous l’imagination de chacun d’entre nous avons qui tissent un lien émotionnel avec [l’interactivité] la narration et rendent alors chaque au long de notre siècle, les expérience unique. formes de divertissement non- besoin d’un est tel mot que tout interactifs ont dominé : cinéma, Par ailleurs, dans la narration radio, musique enregistrée et interactive, on trouve cette volonté de télévision. Avant leur arrivée, représenter notre monde, issu de la culture tout numérique et de nos pratiques virtuelles interactif : théâtre, musique, qui se sont progressivement imposées sport – les acteurs et le public à nous. Il s’agirait, avec cette nouvelle étaient divertissement ensemble, et était même 7 Introduction Il l’a définie ainsi pour englober Introduction 8 silencieux, la présence du public exerçait une influence puissante sur nouvelles formes de narration parce le déroulement du drame auquel il qu’on souhaite une plus grande liberté assistait.» d’expression et de création. Mais aussi, Aujourd’hui, on aspire à créer de et sûrement, il se manifeste un refus Cet auteur visionnaire explique de façon tout à fait intéressante la raison d’être et d’évoluer dans une société de divertissement qui serait «passive». de notre besoin d’évoluer vers une forme d’interactivité qui s’est «perdue» avec ces En effet, on cherche à transformer médias. nos médias passifs, en interactifs, comme nouveaux médias de masse. Ce Les créateurs qui désirent raconter sont les pratiques du Web qui nous ont des histoires vont privilégier de nouveaux fait évoluer vers cette démarche. Cette moyens et vont chercher à entrer en contact tendance va s’affirmer dans le futur : on avec le public pour créer des expériences assistera sûrement aux développements immersives et qui relèvent du jeu dans et de formes encore plus immersives où les par rapport à l’environnement réel, moins univers virtuels ne feraient qu’un avec le présent dans les audiences «passives». monde réel. Ces médias, qui avaient dominé Ce qui nous amène à penser à de la scène pendant tout le XXe siècle, nouvelles connaissent pour aujourd’hui un déclin. problématiques l’avenir, liées à la fascinantes révolution Nombre de chaînes de télévision se voient technologique, tout en craignant certains obligées de cesser leur activité parce aspects où l’humain disparaîtrait au profit qu’elles n’ont pas réussi à remanier leur d’un monde informatisé et hyperconnecté. stratégie de communication, en s’adaptant aux nouveaux formats du Web. Et le transmédia dans tout ça ? Dans le terme général de narration interactive De ce fait, avec Internet qui s’est de Benjamin Hoguet, le transmédia est un littéralement installé et inscrit dans nos composant de la narration assez difficile moeurs, une réelle transformation s’opère à définir car souvent confondu avec le en changeant nos pratiques et nos usages cross-media (glossaire). de l’interactivité. proposée. Enfin, il s’agit de définir qui consiste à mettre en place un les termes de fiction interactive et de contenu narratif sur différents médias, webdocumentaire. Une fiction interactive le transmédia, lui, demande à avoir présente un contenu narratif interactif car il l’utilisateur découvre une histoire : celui- s’agit de créer plusieurs fils narratifs, ci fait des choix en se laissant guider par imbriqués les uns dans les autres. le récit, mais il s’agit simplement d’une un univers fictionnel où illusion du choix. Ce n’est ni un genre, ni un média, mais une stratégie de communication qui permet de décliner un même univers dénouement pour exprimer les intentions narratif du créateur. Ainsi, si on prend l’exemple de manière cohérente sur plusieurs types de médias.2 Les histoires ont besoin d’avoir d’un le plus connu de la fiction interactive, Le Livre dont Vous êtes le Héros, les choix Chaque fil narratif est destiné à sont, soit faits de manière aléatoire et un support spécifique (bande dessinée, par le hasard des dés, soit par notre choix application, film...) et chacun est pensé d’emprunter tel parcours de l’histoire, le plus souvent comme des histoires qui mais le récit est en fait déjà défini. Le sont indépendantes. Chaque histoire sur choix est alors influencé par le discours. chaque support constitue alors un univers cohérent, mais qui peut être appréhendé Par contre, nous utilisons une autre sans avoir une connaissance approfondie forme de narration dans notre installation de tous les contenus possibles. Le interactive : le webdocumentaire, que transmédia modifie les codes classiques nous évoquons à travers le genre du faux- de la narration. documentaire. Ce format vient appuyer le propos et inscrit le personnage fictif dans Il s’agit alors à travers notre le monde réel. L’hybridation de différents pratique et notre personnage fictif, du genres est fréquente à l’ère de la création nom de Rylee, de parler de cette nouvelle numérique actuelle. forme de narration qui caractérise notre époque : en effet, l’interactivité est au coeur même du sujet, et interroge la place «web-faux-documentaire» ? Est-ce une et le rôle du spectateur face à l’oeuvre nouvelle forme d’interaction qui peut 2 Cette stratégie n’est d’ailleurs pas réservée uniquement aux productions audiovisuelles. Mais parle-t-on dans ce cas d’un permettre de pousser l’univers fictionnel 9 Introduction A la différence du cross-media Introduction 10 créé en se basant sur des éléments du l’illusion entretenue par les contenus des réel au point de mélanger la fiction à la films ; ils ont même rassemblé toute une réalité ? documentation sur un site internet, d’où le fait qu’on peut parler d’une oeuvre Le webdocumentaire permet transmédia. d’informer, de documenter sur un sujet précis, en utilisant le support du Web. Mais pourquoi un faux-documentaire questionnant sur sa position, sa posture, ? D’abord, il faut savoir qu’un faux- sa distance, son action, les choix qu’il documentaire est un documentaire fictif, fait sur le projet, et sur ce qu’il pense qui leurre le spectateur en donnant lui-même de ces formes de narrations l’impression qu’il s’agit d’un documentaire interactives, permet de s’interroger sur réalisé avec les techniques propres au notre consommation de l’information genre, et qui est en fait une fiction. et nos pratiques virtuelles sur Internet. Ce n’est pas une docu-fiction, car «Leurrer» le spectateur, en le Mais cela permet aussi de celle-ci a une teneur documentaire, où s’intéresser à la question de la jouabilité des éléments fictionnels sont rajoutés à la dans l’interactivité, le transmédia et dans réalité du documentaire. À titre d’exemple l’art. En effet, les narrations interactives et d’un faux-documentaire connu, on peut le transmédia interrogent une interactivité évoquer The Curse of the Blair-Witch, qui venant de l’univers du jeu (vidéo). La complète le film The Blair Witch Project. jouabilité est un élément important qui Ce documentaire fictif relate la disparition permet d’immerger le spectateur. de trois étudiants allant filmer leur projet sur la sorcière de Blair, et montre de faux qu’on souhaite se rapprocher de la témoignages, de fausses archives... représentation de notre monde, au point De plus, cela montre clairement de mélanger fiction et réalité. Tout ceci pour enrichir le film et faire croire au maximum que la légende Après avoir défini ces termes, de la Sorcière de Blair existe vraiment. on Eduardo Sánchez et Daniel Myrick ont problématique suivante. peut maintenant développer la créé alors un nouveau genre de cinéma et ont popularisé le principe du found footage en (glossaire), pour compléter Comment cause les l’interactivité relations remet entre les et l’évolution de comprendre de médias traditionnels professionnel, permet des notre projet et personnel expliciter ainsi et la vers les nouveaux médias. Comment les relation qu’entretient ce sujet avec nos narrations interactives dont le transmédia perspectives professionnelles. questionnent à travers des dispositifs techniques immersifs, les frontières entre le réel et le virtuel, la participation du spectateur en tant qu’acteur de l’histoire, mais aussi révolutionnent, inventent et renouvellent les manières de raconter des récits. Nous allons évoquer ce qu’est l’interactivité dans une forme comme celle-ci, à savoir pourquoi elle est un élément moteur de l’évolution des médias traditionnels par rapport aux nouveaux médias, et différentes en quoi ces approches changent nos pratiques actuelles. Puis, nous expliciterons pourquoi il y a un besoin de renouveler des formes de la narration par rapport aux attentes du public et par rapport à celles qui existent, notamment, en questionnant la teneur du jeu, et donc de la participation du spectateur. Enfin, en quoi la narration interactive permet de proposer des formes complexes d’interaction et d’inventer de nouvelles façons de raconter des histoires. En évoquant tous ces points, nous allons à la fois parler de notre parcours, 11 Introduction genres PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I PARTIE I L’INTERACTIVITÉ : DU PASSAGE DES MÉDIAS TRADITIONNELS VERS LES MÉDIAS INTERACTIFS Q plastiques personnels, avec une approche quasi esthétique, poétique qui mettait en ue sont les anciens avant une facette de notre monde. médias ? Nous commencerons ce mémoire par cette question, qui introduit bien à la théoriciens, que la vidéo est aujourd’hui fois ce sujet de recherche et l’ensemble considérée comme un ancien média, mais de notre parcours depuis la licence, ainsi qui a su évoluer et s’inscrire dans d’autres que les choix qui nous ont poussée à formats interactifs grâce à l’expansion travailler dans le domaine du numérique. d’Internet, tout comme la télévision, la radio et la presse. En effet, depuis la licence d’Arts On peut dire, à la suite de certains Plastiques, nous avons toujours questionné le format de la vidéo et son esthétisme à que l’on a commencé à interroger la travers différents projets artistiques réalisés révolution dans ce cadre. Ce qui nous intéressait, d’entreprises essaient alors d’imaginer c’était d’expérimenter ce médium pour l’avenir de l’industrie du divertissement faire vivre aux spectateurs des expériences avec l’hypothèse que les nouveaux particulières de la réalité en altérant leur médias allaient remplacer les anciens, perception de l’image. Selon les dispositifs qu’Internet remplacerait la télévision et grâce à une formation de plasticienne, il et que les utilisateurs auraient plus nous était possible de modifier la perception facilement accès aux contenus qui les par le biais d’effets naturels, et/ou virtuels. intéressent. C’est du moins ce qu’avait La vidéo nous permettait de transcrire dit Nicholas Negroponte, dans son numériquement la réalité par des choix best-seller Being Digital qui prédisait la C’est dans les années 1990, numérique. Bon nombre Figures du lieu, 2014, installation vidéo Travail réalisé en licence. Nous interrogions déjà l’esthétisme de la vidéo et des outils numériques. Avec le logiciel Adobe Flash, nous avons créé à partir de prises de vues originales, et de photographies prises sur internet, une décomposition des images en les reliant entre elles. Avec une certaine fluidité, en passant d’une image à une autre, cela donne l’impression de découvrir des paysages connus perçus différemment. Un esthétisme tout particulier que font ressortir le médium vidéo et les outils numériques. 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive Qu’appelle-t-on les anciens médias et pourquoi les différencie-t-on des médias interactifs ? 13 14 disparition des médias de masse : En se remettant dans le contexte 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive de l’époque, il est normal d’énoncer ces «Ce qui va arriver à la télévision de hypothèses. Cependant, pour l’instant, masse ces cinq prochaines années les anciens médias réussissent toujours à est si phénoménal que c’est difficile persister. Ils se diversifient et investissent à appréhender»3 le Web au point de créer de nouvelles pratiques médiatiques et narratives avec Pour George Gilder, la télévision le cross-media, le transmédia... C’est et la radio allaient alors être détruites pourquoi, Benjamin Hoguet parle de par l’ordinateur : «renaissance digitale». Effectivement, un stage dans une «L’industrie informatique converge société de production audiovisuelle nous avec celle de la télévision comme a fait prendre conscience de la nécessaire l’automobile a convergé avec le conversion des chaînes de télévision qui cheval, la télévision avec le juke-box, doivent suivre la demande médiatique le traitement de texte avec la machine d’Internet. La télévision, la radio... migrent à écrire, la conception assistée vers le Web : les nouvelles entreprises par ordinateur avec la planche à doivent proposer de nouveaux contenus dessin, et l’édition numérique avec pour la linotype et la presse à imprimer.»4 entreprises qui ont le monopole sur les se démarquer médias des traditionnels. anciennes Avec le développement médiatique numérique du Web actuel, elles pourraient subsister ainsi. Mais avec le temps et les progrès technologiques qui se font au fur et à «La vie est un joyau qu’il faut chérir», 2014, installation vidéo Réalisée en licence, cette vidéo interroge les effets virtuels que procure la vidéo sur un sujet. On ne sait plus au fil de la vidéo s’il s’agit d’un humain, d’une chose. Toujours est-il que cela a influencé notre pratique et nous a permis d’évoluer dans l’optique de notre travail aujourd’hui. 3 Nicholas Negroponte, Being Digital, 1995, New York, Alfred A. Knopf, p. 54 4 George Gilder, Afterword, The Computer Juggernaut: Life after Life after Television, 1994, New York, WW. Norton, p. 189 mesure, il est possible que la vidéo puisse disparaître au profit de la réalité virtuelle et des hologrammes, et qu’on ne parlera plus à terme de «vidéo» mais de «réalité virtuelle». Malgré tout, la vidéo reste toujours un format omniprésent et qui garde un fort pouvoir d’attraction car il permet de 15 partager des données très facilement, comme Youtube, Dailymotion, Vimeo... qui les hébergent. Mais alors pourquoi différencie- t-on les anciens des nouveaux médias ? Il y a au moins cinq raisons à cela. La première est le renouvellement de la production de contenu. Avec les nouveaux médias, les internautes ont Cyril C. de Laleu, InTime - An interactive Timescape, 2005, vidéo interactive L’installation suscite un questionnement sur des paradoxes spatio-temporels des «univers», qui sont propres à chacun. Ainsi, une narration interactive préexiste déjà dans cette installation en explorant ces différents univers. la possibilité de participer à la création du contenu des médias, chose quasi sur le fait que l’Internet public est très impossible avec les médias de masse contrôlé, surtout selon la plateforme anciens, ou du moins, trop difficile que l’on utilise, et que la vie privée est à mener. En effet, Internet a permis souvent menacée à partir du moment où une on l’expose sur un réseau social ou un puissance de diffusion et de communication efficace, la plus efficace site internet. jusqu’à ce jour pour pouvoir faire participer le public puisque l’internaute public supporte de moins de moins d’être peut donner son avis en commentant les contraint et soumis à certaines règles : réalisations. par exemple, la contrainte des horaires de diffusion, la publicité... La seconde raison est le fait que Avec l’avènement d’Internet, le les internautes ont pensé, et pensent toujours pour certains, que le réseau de de nouveaux moyens de communication, communication est «ouvert, transparent, de formats pour le consommateur, en plus médias essayant d’introduire la publicité, sans traditionnels, qui, eux, étaient réputés qu’elle soit trop intrusive, mais qu’elle fermés, hypocrites, opaques»5. permette néanmoins de financer les authentique que les Aujourd’hui, il faut alors réfléchir à créateurs : Ce qui s’avère ne pas être le cas pour les nouveaux médias étant donné que beaucoup d’informations circulent 5 Article de A babord!, Les nouveaux médias, https://www. ababord.org/Les-nouveaux-medias, consulté le 10/08/2016 «L’erreur des médias traditionnels est de vouloir imposer son modèle publicitaire obsolète aux autres: l’internaute ne veut pas (ou pas 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive grâce notamment aux plateformes vidéo 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive 16 seulement) qu’on lui diffuse le spot médias offrent de nouveaux moyens de 30 secondes lui martelant « c’est d’accès à l’information, ce qui n’empêche bon, achetez le » qu’il retrouve sur pas les anciens médias de recevoir des M6 ou TF1. Sur Internet, il fait ce critiques étant donné qu’ils ont aussi une qu’il veut, il regarde ce qu’il veut… version sur le Net. On peut penser alors Pour être vu, il faut lui donner une que les médias traditionnels et interactifs bonne raison de regarder, de ne pas se renforcent ainsi. skipper. Il faut donc le séduire, le distraire, l’informer.»6 certification des informations. En effet, La quatrième raison concerne la les anciens médias sont tenus à une La troisième raison nous amène certaine rigueur car les informations ainsi à la question de la liberté d’expression qu’ils véhiculent répondent à des critères sur Internet qui a changé nos pratiques de vérification préalable, à l’inverse des de l’utilisation des médias à travers le cas informations délivrées par les nouveaux du commentaire. Ceci permet de créer médias, pas nécessairement toujours une réelle mobilisation en donnant la vérifiées au moment de leur publication. parole à tout le monde, caractéristique d’un Internet démocratique. Même si distinction est celui des revenus, donc l’audience est dispersée, les nouveaux du modèle économique : ceux des 6 Article de Streetandmarketing, Les nouveaux médias vont-ils tuer les anciens?, http://streetandmarketing.com/ linterview-de-la-semaine/les-nouveaux-medias-vont-ilstuer-les-anciens/, consulté le 10/08/2016 Enfin, le dernier critère de médias traditionnels diminuent alors traditionnel du média de masse, qui rentables pour l’instant. Il s’agit de deux veut offrir toutes les nouvelles à tout économies différentes mais touchées par le monde). Le défi du financement de la crise économique commune qui posent l’information demeure total. Selon plusieurs problèmes de financement à leur les données du rapport, très peu création. Les anciens médias connaissent d’Américains sont prêts à payer pour une baisse des revenus importante qui l’information en ligne. Et, mauvaise fait que les pertes sont conséquentes nouvelle pour les annonceurs et les (par exemple, la télévision et la radio ont entreprises d’information, 79 % des une baisse de revenus de 22% en 2009)7. Américains affirment ne jamais ou Mais les nouveaux médias, présents sur rarement cliquer sur les publicités en ligne. «Ils passent outre, tout Jeffrey Shaw, The Golden Calf, 1994, installation interactive Un écran LCD portable posé sur un socle, montre un veau en or. Le spectateur peut faire bouger l’appareil pour observer le veau avec ses reflets et faire le tour de la sculpture virtuelle, ce qui brouille la frontière entre le réel et le virtuel. Ce travail a beaucoup influencé l’idée que nous avions de la notion de l’immersion qui était peutêtre erronée. En effet, l’immersion peut aussi bien être efficace sur une petite interface numérique, et n’a pas besoin de combler une pièce entière pour immerger le spectateur. De ce fait, on peut découvrir avec cette oeuvre le pouvoir de l’interface, comment elle amène le spectateur à devenir utilisateur, déjà, en 1994, ce qui était précurseur. Le spectateur devient vraiment «spect-acteur», selon l’expression d’Augusto Boal, et découvre à travers cette oeuvre une nouvelle interactivité qui est très présente aujourd’hui avec la réalité virtuelle et augmentée. Ceci nous a permis de comprendre un peu mieux l’objectif de l’interactivité et ce qu’elle a pu apporter comme changement quasi radical daart numérique. simplement», constate brutalement le rapport.»7 Par exemple, l’agence transmédia, Forge Animation, n’a pas réussi à finaliser sa campagne de financement participatif alors qu’elle préparait deux projets transmédia très intéressants. Elle s’est vue obligée de fermer : «Après un démarrage encourageant, le second Kickstarter de l’adaptation de La Horde du Contrevent d’Alain Damasio patinait sérieusement le Net, connaissent aussi une chute de 5% ces derniers jours. Au point que le la même année, notamment à cause du projet de financement participatif a comportement du consommateur en ligne : été purement et simplement annulé voilà quelques heures et pourrait «L’internaute butine et «chasse» la bien signifier également la fin de nouvelle d’un site à l’autre, selon l’aventure Forge Animation, qui les sujets et les événements (ce qui, en passant, s’oppose au modèle 7 Article de Le Devoir, libre de penser, Médias - Anciens et nouveaux médias, même combat, http://www.ledevoir.com/ societe/medias/286400/medias-anciens-et-nouveauxmedias-meme-combat, consulté le 10/08/2016 17 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive que les médias interactifs ne sont pas 18 devait également adapter à l’avenir 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive Abyme de Mathieu Gaborit.»8 Ainsi, l’avenir des anciens et nouveaux médias sont plus liés que ce que l’on imagine. Il faudrait alors ne pas faire de distinction dans un sens car ils ont évolué ensemble et ont construit Quelles formes de narration interactive existent et pourquoi ont-elles été influencées par les médias traditionnels ? un tout, un ensemble médiatique qui nous amène vers des médias de plus en interactifs, plusieurs formes de narration plus numériques et interactifs. Il faut interactive existent. Il y a alors une savoir d’ailleurs que les sites internet multitude de possibilités pour raconter actuellement ont du mal à proposer des une histoire interactive. On parle de contenus originaux. Les médias et les cross-media, de deep media, multimédia, sites vont évoluer mais vont être face transmédia, au même dilemme que les médias dits webdocumentaire, anciens. et elles ont toutes une définition plus Seul l’avenir nous le dira mais les ou moins claire et précise. Nous allons médias traditionnels ne sont pas encore évoquer dans les détails celles qui se enterrés. Étant donné que les internautes rapportent à notre projet personnel. Avec l’avènement des fiction médias interactive, cinéma interactif... ne font pas la différence, il faut dans un sens ne pas chercher à comparer les Le webdocumentaire anciens aux nouveaux. La télévision, Il s’agit du genre de narration certes, est en mauvaise posture, mais elle interactive se retrouve à travers les sites internet et par la VOD. Ce sera dans la complémentarité producteurs depuis le début du siècle. que ces deux types de médias vont se Un webdocumentaire a une démarche renforcer et évoluer. documentaire en premier lieu, et il les le plus journalistes, prisé et connu réalisateurs et permet de développer un point de vue sur la réalité. Il peut être une oeuvre finie ou en constante évolution. Il se caractérise 8 Article de Elbakin.net, La Fantasy au quotidien, Windwalkers : Forge Animation jette l’éponge, http://www. elbakin.net/fantasy/news/23463-Windwalkers-:-ForgeAnimation-jette-leponge, consulté le 10/08/2016 par un traitement particulier des sons, des textes, des images, des vidéos... Comme les oeuvres interactives, le a une structure leur personnage d’Ann Lee. En effet, le délinéarisée qui donne à l’utilisateur la personnage d’Ann Lee est attachant. Les possibilité de choisir la direction qu’il artistes ont acheté un personnage de souhaite dans la narration. Le but du manga qu’ils ont ensuite exploité dans webdocumentaire est de véhiculer une vision du réel propre à l’auteur, mais en donnant un «pouvoir» à l’utilisateur. Dans notre projet personnel, nous avons réalisé un webdocumentaire, mais fictionnel. Nous voulions faire exister un personnage fictif, en l’inscrivant dans le réel. L’enquête proposée permettait de semer le doute dans la perception du spectateur en manipulant le réel et le virtuel à la fois : à partir du moment où un personnage est évoqué comme s’il avait existé, il «existe» comme les légendes qui laissent à croire que tel phénomène a existé. Cependant, la première version du projet était une fiction interactive avant de devenir une installation interactive complexe, et donc un projet transmédia. La vidéo interactive a été réalisée avec PureData, logiciel dont nous avons pu apprendre la logique. Le projet en lui-même, en tout cas l’idée, a été trouvée suite à de nombreuses recherches artistiques, et d’échanges, notamment pour le nom et Pierre Huygue et Philippe Parreno, Anywhere out of the world, Two minutes out of time, 2000, installation vidéo 3D Annlee est le personnage que ces deux artistes ont acheté et exploité dans plusieurs productions qu’ils ont réalisées dont Anywhere out of the world, et Two minutes out of time. Avec ce personnage, ils veulent traduire à travers la forme narrative de la fiction, un enjeu similaire : «la représentation et ses significations». Ce personnage acheté à une maison d’édition japonaise réalisant des mangas, a été choisi par les artistes dans un catalogue comme une marchandise décrivant le profil et la personnalité de celui-ci. Ils achètent Ann Lee pour parler alors de son histoire, «libérée de l’industrie culturelle et réinvestie par le champ artistique». Anywhere out of the world est la première version d’une sorte de conte, racontant l’histoire d’Ann Lee, qui n’était qu’un simple produit destiné à faire vendre. Cette oeuvre critique fortement l’industrie de l’image, du cinéma, et des jeux vidéo. L’idée de vouloir réaliser alors un personnage, et de le faire exister, comme ces deux artistes l’ont fait en donnant une autre représentation d’Ann Lee qu’un simple personnage de manga, nous a donné envie d’expérimenter aussi et de faire vivre mon personnage fictif, de lui donner une importance. http://artsdocuments.blogspot.fr/2012/12/annlee.html certains choix plastiques du prototype. Les artistes qui nous ont le plus leurs projets pour parler de son histoire, inspiré pour créer Rylee sont Pierre et de sa condition de personnage fictif, Huygues comme une marchandise. et Philippe Parreno, avec 19 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive webdocumentaire 20 Enfin, le travail d’Eija-Liisa Ahtila a 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive toujours fait partie de nos influences, car ces installations interrogent le rapport au réel par des dispositifs immersifs qui créent des émotions et une identification du spectateur à l’oeuvre donnant un sens Eija-Liisa Ahtila, Talo - the house, 2002, installation vidéo Eija-Liisa Ahtila est une artiste du mouvement de l’art vidéo qui nous a vraiment influencée. Dans son oeuvre, on suit l’histoire d’une jeune femme qui sombre peu à peu dans la folie. L’installation offre alors avec ces multiples écrans, plusieurs points de vue de l’histoire, et l’immersion est possible sans avoir d’interaction directe avec une interface : cette oeuvre interroge la narration et le procédé filmique, présents dans la première installation de notre projet personnel au Patio du Bois de l’Aune, à Aix-en-Provence. Également, la fiction interactive de Davey Wreden, The Stanley Parable, 2011 nous a pleinement inspirée pour le prototype du projet personnel. Ce qui est surprenant dans cette oeuvre, c’est qu’il s’agit aussi d’un jeu vidéo où le narrateur nous raconte l’histoire d’un personnage. Le narrateur interagit de manière très amusante dans le sens où il nous déstabilise : il se moque de nous, nous incite à aller dans telle direction plutôt que dans l’autre en altérant notre choix de départ, et il s’agit d’un narrateur très mielleux qui ne souhaite pas qu’on découvre la deuxième version de l’histoire. Malgré l’illusion du choix, nous pouvons aller à l’encontre des dires du narrateur. Dans notre prototype, le narrateur se permet aussi de donner son avis sur l’histoire. à la narration. La fiction interactive On peut évoquer aussi la fiction interactive, qui permet de s’immerger dans un univers imaginaire. L’utilisateur choisit alors le parcours des personnages fictifs et le déroulé de l’histoire. Souvent, la posture proposée à l’utilisateur est d’être un enquêteur, qui doit découvrir comme un détective ce qui s’est passé. Mais qu’est-ce qui distingue une fiction interactive d’un jeu vidéo? La frontière n’est pas si claire, pourtant, il existe bien des catégories différentes. Les jeux interactifs, que sont les newsgames, serious game, jeux documentaires... sont différents des fictions interactives du fait qu’ils proposent une expérience définie par des règles de jeu ancrées dans le réel ou inspirées de faits réels. L’esprit des jeux interactifs est de proposer un objectif à atteindre même quand il s’agit d’un jeu documentaire, comme par exemple Reconstruire Haïti (Annexe 2). Le transmédia Le transmédia n’est pas considéré le cross-media, le deep media et le stratégie de diffusion. La manière dont multimédia, alors qu’il s’agit de stratégies sera construite la narration selon les différentes. différents supports utilisés va avoir des conséquences sur la conception de l’univers du projet par rapport à Le sa stratégie de diffusion mais aussi combinaison à l’engagement de l’utilisateur. Par (print, web, télévision, cinéma, radio, exemple, dans notre projet personnel, téléphonie...). Chaque support contient nous transmédia un même message, qui va permettre de avec quatre supports de diffusion : le créer un ensemble concret et fort entre site internet, la vidéo interactive, les les médias pour que la communication photographies et le téléphone, dans le soit but d’ancrer l’histoire dans un contexte améliorant ainsi l’impact du message, réel grâce au virtuel. cette stratégie de diffusion pourra mieux De ce fait, nous adoptons comme cibler l’internaute qui lui correspond. En stratégie de diffusion d’atteindre le plus s’adressant au bon utilisateur, le cross- de personnes en donnant la possibilité media va être personnalisé et adapter le de faire une partie de l’expérience depuis déroulé des interactions en fonction de chez soi ou de n’importe quel lieu, à l’utilisateur. condition d’avoir un accès Internet. projet cross-media Heis d’Anaïs Volpé faisons De plus, appel au l’utilisation de ces Le cross-media la cross-media plus de est une plusieurs efficace médias possible. En On peut prendre pour exemple le supports numériques et non-numériques (Annexe 3), de diffusion permet de créer un tout media en trois volets (un long-métrage, pour comprendre chaque élément et une série web et une installation) pour son utilité. En effet, dans ce projet, proposer trois lectures différentes et l’utilisateur est incité à découvrir par lui- complémentaires même et à sortir de ce cadre même si Tandis qu’un projet transmédia n’a pas celui-ci semble être dicté par des choix qu’une seule histoire à raconter, mais linéaires : sont ainsi interrogés son action plusieurs tirées d’un même univers: et ce qu’elle peut apporter à l’installation. «Un s’achève, là est la nuance.»9 Dans les formes de narration interactive existantes, il ne faut d’ailleurs pas confondre le transmédia avec qui a réalisé une oeuvre cross- univers d’une s’étend, même une idée. histoire 9 Benjamin Hoguet, La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, 2015, impression à la demande, p. 25 21 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive comme un genre, mais comme une 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive 22 Nathan Penlington, Fernando Gutierrez De Jesus, Sam Smaïl and Nick Watson, Choose Your Documentary, 2014, film interactif Choose Your Documentary est une toute nouvelle expérience de cinéma interactif, où 1500 chemins différents sont possibles pour l’utilisateur. Celui-ci, avec l’aide du réalisateur doit retrouver l’auteur d’un journal de bord qui a été perdu, et qui contient des pages mystérieuses que le réalisateur et les spectateurs souhaitent dévoiler. Ainsi, comme un enquêteur, nous devons partir à la recherche des informations sur le journal et essayer de dévoiler ses mystères à travers les différents parcours que le réalisateur a filmés avec son équipe. L’expérience est prenante et vraiment complexe: la multitude de possibilités qu’ont les spectateurs, réunis dans une salle obscure, et qui choisissent ensemble, par un système de vote, quel chemin prendre, crée alors une immersion totale et instructive. http://www.cyod.co.uk/ ownuqabwgzfr63gspfkkgtyu4aur97 Lev Manovich, Soft Cinema, 2002 - 2005, installation vidéo-numérique Aperçu d’une vidéo issue d’un programme informatique qui crée des séquences de cinéma numérique en sélectionnant des extraits dans une base de données. Classées selon des critères à la fois sémantiques et formels, comme la localisation, la direction du mouvement ou la luminosité, les vidéos sont sélectionnées à partir de paramètres définis par les boutons coulissants de l’interface graphique. Lev Manovich interroge l’importance de l’interactivité avec l’interface de la machine dans son oeuvre. Dans son ouvrage, Le Langage des Nouveaux Médias, il explique pourquoi l’interaction homme-machine est le coeur même de l’interactivité au sein des médias. Il s’agit selon lui de l’outil indispensable pour que les actions puissent se faire entre l’utilisateur et la machine. Ainsi, il met en avant plusieurs questions et problématiques qui amènent l’utilisateur à se questionner sur les possibilités que les médias et la technologie peuvent nous offrir comme liberté de création et de partage. 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive 23 1. Évolution des médias traditionnels vers les médias interactifs et des formes de narration interactive 24 Ainsi, notre projet personnel avait une une forme de narration. Une oeuvre intrigue : l’enquête sur un personnage multimédia associe plusieurs médias sur fictif. Les photographies racontaient une un même support numérique (CD-Rom, enquête effectuée sur le personnage, DVD...). Donc, si une création multimédia mais avec une approche différente, recourt à plusieurs médias, images, sons, comme s’il s’agissait d’une autre histoire. films, vidéo, tous les projets évoqués L’utilisation précédemment du smartphone amenait projets pourraient paraître l’utilisateur à entendre un indice par des rapport à l’univers global, mais selon une on ne peut pas utiliser ce terme version différente. Puis, le fait aussi pour qu’il n’y ait pas réellement de fin à cette histoire, et que celle-ci puisse s’étendre encore et élargir l’univers proposé fait que la transition des médias traditionnels le projet s’inscrit plus dans une logique vers les médias interactifs et leur de transmédia que de cross-media. différenciation. Mais un débat existe qualifier multimédia, le genre mais narratif. De ce fait, nous avons expliqué sur le fait que certains dispositifs Le deep media Le deep media, lui, a une approche technologiques, genres et médias, ne bien particulière : c’est le nouveau Last Call, by 13th Street, cinéma interactif public, c’est-à-dire la communauté qui Un spectateur est appelé au hasard durant la projection du film pour donner des indications au personnage afin que l’histoire puisse avancer. Cette expérience interactive est étonnante, car avant la projection du film, chaque spectateur donne son numéro de téléphone. Quand il reçoit l’appel et qu’il répond, il interagit directement avec le protagoniste qui lui demande dans quelle direction il doit aller. Ceci fait appel à une toute nouvelle interactivité encore plus physique au cinéma. va construire le récit. La participation intense des internautes va créer la narration la plus immersive. L’exemple le plus connu est la série Lost. Il y a eu la création d’un Wiki nommé LostPedia pour alimenter la série au fur et à mesure avec les commentaires et les sujets de discussion des fans. Ce partage de connaissance crée alors une narration complexe et enrichissante. Le multimédia Enfin, le multimédia, terme le plus ancien et le plus utilisé, n’est pas selon certains théoriciens. Nous allons interactives créent une pause pour que essayer de comprendre aussi comment le spectateur puisse faire son choix... se les La combinaison des génériques des narrations interactives et transmédias. films, des intertitres, des images en présente l’interactivité dans Ancienne ou nouvelle interactivité ? Les webdocumentaires et fictions mouvement, du son et des textes, fait du cinéma le «premier multimédia moderne» selon Lev Manovich. Les nouveaux médias sont contrôlables au niveau de Le cinéma est né officiellement leur échantillonnage que ce soit de la à la fin du XIXe siècle. Dès le début, temporalité ou du contenu à manipuler il était échantillonné à vingt-quatre (ce qui est pareil aujourd’hui avec les clips images les vidéos, les publicités, et pas seulement le images qui se suivaient de manière cinéma). Ce type de configuration qu’est linéaire. de la manipulation d’images successives celui-ci composée d’un nombre limité existait déjà apparemment dans les d’échantillons nous préparait déjà à dispositifs précurseurs du cinéma du accueillir les nouveaux médias, avec XIXe siècle : par Mais secondes, la avec représentation l’échantillonnage du temps par pixels d’une image fixe numérique. Le cinéma «En 1887, Edison et son assistant, a été le premier à rompre quelque chose William de plus important auprès du public : «le adopter la technologie du disque passage du continu au discontinu»10. phonographique qui avait fait ses Dickson, songèrent à preuves pour enregistrer et projeter des films.»11 En effet, selon Lev Manovich, ce passage du continu au discontinu annonçait déjà les nouveaux médias : la représentation discontinue que l’on s’établissait comme cela ce qui fait qu’il trouve dans le cinéma, notamment est difficile de qualifier le cinéma de par rapport au montage qui est fait, dispositif technologique ancien. Mais est représentations qu’en est-il de son dispositif par rapport numériques actuelles : la navigation sur au spectateur à savoir de son interactivité? le Web est fragmentée. N’est-il pas un média dit «passif» ? 10 Lev Manovich, Le Langage des Nouveaux Médias, 2010, éditions Les presses du réel, p. 134 11 Lev Manovich, Le Langage des Nouveaux Médias, 2010, éditions Les presses du réel, p. 135 similaire aux La technologie cinématographique 25 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias sont pas considérés comme anciens 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias 26 Le principe du cinéma depuis sa art à sa création. Ce n’est qu’au début création se présente ainsi : dans une du XXe siècle, qu’on l’intègre en tant salle obscure, est projeté le film sur que 7ème art du fait de la spécificité du un grand écran avec plusieurs sièges médium. dirigés vers celui-ci pour permettre aux spectateurs de profiter du visionnage. De ce fait, le spectateur est passif spécificité du médium sont les outils bien : il lui suffit de simplement regarder définis pour ce domaine. Par exemple, l’écran, et de suivre le déroulé du film. quand on évoque des notes, ou des Cependant, important partitions, on sait que ce sont les outils qu’il faut mettre en avant quand un spécifiques à la musique. Si on parle spectateur regarde un film, même s’il de plan, de travelling, de montage on n’interagit physiquement pas avec le s’adresse au cinéma. Pourtant, nombreux film en lui-même, il interagit autrement sont ceux qui ont pensé que le cinéma et même de manière très dynamique n’était pas un art parce qu’il s’agissait de par rapport au contenu de celui-ci en «l’enregistrement photographique d’une s’immergeant dans l’histoire et dans oeuvre dramatique, et donc ce n’est pas la narration proposées. L’interactivité l’objet filmique qui est une oeuvre d’art est psychologique plutôt que physique. mais ce qui est filmé.»12 élément très En effet, le cinéma a toujours été Ce que nous entendons par L’évolution du cinéma vers une interactif à cause de cela : l’appréciation interactivité de plus en plus développée du film, mais aussi, le fait d’adopter le et une forte participation du spectateur point de vue du personnage (qu’il soit à se confirme depuis ces dernières années la première ou troisième personne), et de avec l’arrivée du cinéma interactif. ressentir certaines émotions par rapport à ce qui se passe créent une immersion. Le cinéma interactif L’interaction Le cinéma interactif commence du spectateur et son implication sont importantes, l’attention à prouver que les outils interactifs mis de celui-ci est ce qui définirait l’intérêt à disposition permettent de créer des du cinéma. Il faut noter que le cinéma expériences de plus en plus complexes n’a pas toujours été considéré comme un et intéressantes. L’action du spectateur, 12 Karim Debbache, Chroma S01.05 Paranormal Activity, 2016, vidéo dailymotion, http://www.dailymotion.com/ video/x4eq3z9?GK_FACEBOOK_OG_HTML5=1, visité le 10/08/2016 quand il procède à des choix durant un film, conduit à une fragmentation 27 du récit, qui ne perturbe pourtant pas son immersion. C’est le travail apporté mettre en valeur le contenu filmique, qui sera apprécié ou pas par le public, la fragmentation ne gênant pas la compréhension de l’oeuvre. Ces nouveaux genres interactifs permettent de plus en plus de possibilités. Le spectateur peut continuer à suivre l’histoire et vivre des émotions. C’est le travail apporté sur le dispositif technique, qui va mettre en valeur le contenu filmique, qui sera apprécié ou pas par le public, la fragmentation ne gênant pas la compréhension de l’oeuvre. Ces nouveaux genres interactifs offrent David Dufresne, Fort McMoney, 2013, jeu documentaire/webdocumentaire Ce jeu documentaire interroge l’économie de l’industrie pétrolière aux États-Unis dans la ville de Fort McMoney. Ainsi, en explorant cette ville à travers des interviews de personnages, les utilisateurs peuvent aussi rencontrer virtuellement les vrais habitants et travailleurs pour leur poser des questions. David Dufresne avait déjà travaillé sur le projet Prison Valley, qui est similaire dans sa structure et dans son interactivité : on pouvait aussi appeler par téléphone les personnages du webdocumentaire pour découvrir les conditions de vie dans la prison. Ici, il s’agit du même cas de figure, mais en explorant la situation sociale et politique de la ville de Fort McMoney. http://fortmcmoney.com/#/fortmcmoney de plus en plus de possibilités. Mike Figgis, Timecode, 2000, film comédiedramatique Scott Snibbe, Shadow Bag, 2005, installation interactive Shadow Bag fait vivre comme expérience au spectateur de voir sa propre ombre projetée sur un écran, en décalage avec les actions qu’il mène sur le moment présent. A la manière de l’oeuvre Fingering, l’interactivité présente dans cette oeuvre interroge la temporalité. Le spectateur connaît alors une interactivité physique avec son «ombre», à travers l’écran, où sa position, sa place, ses gestes et actions vont déterminer l’interaction qu’il va avoir avec lui-même. Le film dure 90 minutes. Pendant toute sa durée, 4 séquences sont diffusées simultanément. Le spectateur choisit alors de suivre l’un des personnages. Mais en suivant le parcours de 4 personnages, à travers l’écran coupé en 4, on se rend compte au fur et à mesure de l’histoire que notre attention est portée plus sur un personnage qu’un autre. Et ce, à cause de la musique qui attire le spectateur vers la scène où il se passe des choses, alors que dans les autres scènes il semble ne pas se passer grand-chose. L’illusion du choix est alors présente dans ce film et est questionnée. Même si cela est peu visible, cette illusion est intéressante en dépit du fait que l’interactivité est interrogée par le regard du spectateur. 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias sur le dispositif technique, qui va 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias 28 L’interactivité dans les narrations interactives (fictions interactives, jeux interactifs...) et transmédias découle d’une évolution des médias de masse et du Web L’interactivité machine L’interactivité a beaucoup évolué avec l’expansion La d’Internet du fait première interactivité, de l’interface selon Lev Manovich et l’interactivité machine, demande que Benjamin Hoguet. L’interface est ce qui l’univers du projet soit entièrement défini se trouve entre le média et l’utilisateur. par le créateur qui est complètement C’est cet outil qui va permettre de maître de la création de son univers. créer l’interaction voulue sur le média, L’interface propose différentes manières et opérer ainsi des modifications du de manipuler la production. Notamment, contenu. Ceci est même primordial pour si l’utilisation se fait par ordinateur toute installation de ce type. ou par mobile, les gestes tactiles et cliquables ne proposeront pas les mêmes L’interactivité, c’est avant tout dans le monde des médias, l’expérience expériences. de l’interface proposée : l’univers de la production est «fini», et les choix offerts L’interactivité sociale alors à l’utilisateur sont limités par les choix La voulus par le créateur. Les possibilités l’interactivité sociale où le canal de d’intervention souvent proposées par communication les fictions et documentaires interactifs est sont de lancer une vidéo en cliquant ici, scanner un code avec le mobile, toucher son écran pour que le personnage aille à droite etc... Il existe trois types d’interactivité dans un projet : l’interactivité machine, sociale et créative. Les trois peuvent s’entrelacer mais il existe des dominantes dans les projets. deuxième promu par interactivité est une l’interface, est et communauté. Tiffany Sum et Jonathan Minard, Fingering, 2005, installation vidéo-numérique interactive Cette installation donne à voir une personne qui pointe du doigt le spectateur si celui-ci reste trop longtemps devant l’écran. Ce qui est intéressant dans cette oeuvre, c’est qu’en même temps qu’elle interroge la position de voyeurisme qu’a le spectateur en s’approchant de l’oeuvre, celle-ci interroge à la fois l’interaction indirecte que le spectateur subit. En effet, on constate qu’en pointant du doigt celui-ci, l’oeuvre interagit avec lui sans avoir nécessairement besoin d’interface numérique. Avec simplement un personnage, elle met en avant cette interaction hommemachine dont parle Lev Manovich (sans interface avec des boutons ou des onglets). De plus, le spectateur ne sait pas tout de suite que le personnage réagit selon sa position et sa place devant l’écran. L’interactivité est alors expérimentée dans cette installation. est dans la continuité de l’interaction humaine et conversationnelle au point sociale, à savoir que l’interface est un que le créateur ne devient alors que outil de création où le créateur est plus l’entremetteur du projet et permet de un modérateur dans ce cas-là. Il accepte gérer celui-ci. Souvent, l’univers du que le public puisse modeler et modifier projet déborde sur les réseaux sociaux et la conception de l’oeuvre : «L’univers du on ne trouve pas de choix limités dans ce projet s’étend donc à chaque contribution cas-là ; bien au contraire, il n’y a plus de et est potentiellement sans fin»13 limites au point que le créateur n’étant plus maître de son oeuvre, il peut se faire en sorte que l’outil soit efficace, laisser surprendre par les échanges émis simple et pertinent pour que l’utilisateur et voir le bouleversement que cela peut puisse ajouter sa contribution au projet. créer pour le rapport entre la création Le public devient de ce fait, en quelque et sorte, «co-auteur» de l’oeuvre. le est public, l’expérience humaine. C’est le cas par exemple avec le projet Cut Au point que le créateur doit juste Mais y-a-t-il nécessité ? Les où il s’agit de la internautes ont-ils besoin de cela ? En page Facebook d’un personnage fictif effet, il y a une grande responsabilité qui répond en temps réel aux fans. morale à donner à l’utilisateur, comme l’affirme Grahame Weingren14. Si on (Annexe 1), L’interactivité créative La troisième interactivité laissait la possibilité à l’utilisateur de est représenter ce qu’il souhaite dans le créative. Elle est collaborative et créative contenu, il en serait alors entièrement dans les interactions proposées, mais responsable. 13 Benjamin Hoguet, La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, 2015, impression à la demande, p. 49 14 Grahame Weingren, «In the Ocean of Streams of Story», 1995, in Millennium Film Journal, n°28, http://mfk-online. org/journalPages/MFJ28/GWOCEAN.HTML (Lev Manovich, Le Langage des Nouveaux Médias, 2010, éditions Les presses du réel, p. 123) 29 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias principalement L’interaction 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias 30 formes propres choix et d’élargir le projet au- d’interaction existent et évoluent sans delà de ses attentes premières. De cesse en se mélangeant à plusieurs genres plus, le projet relevait du domaine du et stratégies numériques. La création transmédia du fait de l’utilisation de du plusieurs supports numériques. Ainsi, plusieurs transmédia, fictions interactives, webdocumentaires... découlerait alors de cette interactivité améliorée par Le parcours professionnel l’utilisation d’Internet et de ses outils. De ce fait, dans le master professionnel numérique, nous à notre Le projet personnel expérimentons Le prototype de notre projet pratique et notre projet personnels travers réalisé au ces questionnements. Ce genre de Patio du Bois de l’Aune, faisait partie formation nous apprend à travailler de la première catégorie, à savoir sur l’interactivité machine. L’interface a des logiciels audiovisuels...) comme la suite choix limités et nous étions les seuls Adobe, Final Cut Pro, Klynt pour la maîtres du projet en proposant telle ou réalisation de webdocumentaire, en plus telle action à l’utilisateur. d’interroger l’interactivité à travers son Le choix était binaire dans notre projet personnel. La principale consigne projet et proposait comme action au de la réalisation du projet personnel spectateur de se déplacer dans l’espace de master est d’avoir obligatoirement pour changer de point de vue sur l’histoire une production plastique interactive. par rapport au narrateur et à l’image vidéo proposée. Cependant, à l’espace recherches plastiques vers ce sujet de Pouillon, à Marseille, ce projet a évolué médias interactifs, en interrogeant la au-delà de l’interaction : il s’est étendu narration interactive et le transmédia, à une interaction sociale dans le sens où par rapport à ce que nous avions comme on pouvait communiquer par mail ou par pratique en licence. téléphone avec le personnage fictif. personnel R.y.l.e.e. (Annexe 5), les outils numériques (PAO, Ceci nous a permis d’orienter nos C’est en licence que nous avons commencé à avoir des cours du Il était alors possible de sortir cadre de l’histoire linéaire et d’infographie, et que nous avons pu réaliser nos premières productions l’expérience était plus intéressante aussi graphiques et audiovisuelles. si l’utilisateur se permettait de faire ses Ainsi, nous avons voulu élargir notre pratique numérique, pour arriver pratiques culturelles et sociales sur finalement à un projet professionnel l’utilisation des médias. centré sur les nouvelles technologies dans l’audiovisuel l’interactivité comme élément moteur avec les fictions interactives et les de l’évolution des médias traditionnels webdocumentaires que nous avons pu vers les médias interactifs, nous allons réaliser. Nous avons alors continué à voir pourquoi aujourd’hui, il y a un travailler avec cette approche de notre renouvellement des formes de narration pratique plastique, en essayant en plus grâce à Internet, à l’interactivité et de nous améliorer dans le domaine au virtuel, qui permettent de mieux du Web grâce à la réalisation de sites représenter notre existence et notre internet durant nos stages. monde. domaine de En outre, en ayant déjà questionné La première année de master nous a servi à travailler en équipe et à préparer notre projet personnel et professionnel de manière théorique, tandis que la deuxième année de master permettait de réaliser et montrer à travers deux expositions, Singularité(s) et Void Setup;(), l’évolution de son projet personnel. De permis plus, ce d’apprendre autonomie en tant master à travailler a en qu’infographiste multimédia/webmaster projets, nous exercices sur différents donnés, pour comprendre comment travailler avec des commanditaires, notamment, grâce à divers stages qui permettent une première expérience en milieu professionnel. L’avènement du numérique et d’Internet a contribué à changer nos Marc-Antoine Mathieu, dessinée interactive 3", 2011, bande Il s’agit d’une bande dessinée interactive. Celleci existe avec deux expériences de lecture : une en version papier, comme une bande dessinée imprimée normale, mais aussi en version numérique : on y découvre une conspiration en suivant le parcours d’un rayon de lumière en 3 secondes. Ceci est impressionnant dans le sens où l’auteur réussit en quelques secondes à nous faire comprendre ce qui se passe. Narrativement, il s’agit d’un tour de force aussi car sans dialogue, juste avec des images, et en suivant une lumière, donc un point de vue assez particulier, on parcourt la bande dessinée de manière très originale et inattendue ce qui montre que les outils que nous avons à notre disposition nous permettent de créer des interactivités innovantes et inventives. http://www.editions-delcourt.fr/3s/index. php?page=home 2. L’interactivité dans les narrations interactives et transmédias le 31 PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II PARTIE II INVENTION ET CRÉATION DE NARRATIONS INTERACTIVES : MEILLEURE EXPÉRIENCE ET REPRÉSENTATION DE LA RÉALITÉ ? Plusieurs producteurs, designers, journalistes... cherchons à «acheter» de l’attention, interactives dont le transmédia comme et la nouvelle monnaie est devenue stratégie de diffusion. Ils ressentaient l’immersion.»15 le besoin d’évoluer vers cela. Les raisons interactifs, ce qui les relie tous entre eux, est leur admiration pour l’invention d’Internet. Mais aussi, le Web permet d’offrir un espace de liberté conséquent, notamment pour diffuser l’information en masse et le plus facilement possible. Il faut aussi noter que cela vient de l’usage du public : le public évolue et a des besoins spécifiques. Les modes de consommation de contenus ayant évolué très rapidement, les créateurs n’ont pas eu d’autres choix que de s’adapter. Mais face à une économie où il y a trop de communications, trop de contenus et peu de temps pour tout regarder, il faut attirer l’attention de l’utilisateur. Ce qui fait que l’information est perçue différemment aujourd’hui et que tous les moyens numériques issus du virtuel page et à tester «Dans une telle économie, nous ont voulu s’approprier les narrations commun de la majorité des créateurs à cliquer sur telle qu’un autre : les concepteurs, auteurs, réalisateurs, fascination du Web. En effet, le point inciter l’utilisateur tel contenu plutôt causes ont fait que principales sont tout d’abord dues à la sont bons pour En effet, pour obtenir l’attention de l’utilisateur, il faut adopter plusieurs stratégies. L’ergonomie de la navigation sur le Web est importante pour atteindre l’information. Elle doit faire preuve d’une certaine esthétique pour donner envie à l’utilisateur d’aller la consulter. Le design empathique (glossaire) interroge d’ailleurs ceci. Comment un site internet, un média, une application de téléphone, dans son design et dans son écriture, peuvent-il attirer l’attention de l’utilisateur ? Comment les informations sont perçues et comment immerger le spectateur dans un dispositif ? « Dans un monde riche en information, l’abondance d’information entraîne est consommée par l’information. Ce que l’information consomme est la 15 Benjamin Hoguet, La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, 2015, impression à la demande, p. 31 33 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques Nécessité d’un esthétisme nouveau de l’information : Internet, le virtuel et l’interactivité permettent-ils de mieux représenter notre monde? et de l’interactivité 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 34 pénurie d’une autre ressource qui est consommée par l’information. a une volonté de changer de types Ce que l’information consomme est d’information par rapport à l’émergence assez évident : c’est l’attention de d’Internet et sa puissance économique ses receveurs. Donc une abondance au sein de nos pratiques actuelles. d’information rareté Travailler sur le dispositif technique d’attention et le besoin de répartir permet d’immerger le spectateur dans efficacement cette attention parmi un univers. Il est important aujourd’hui la pour tout artiste ou entreprise d’avoir crée surabondance d’informations qui une des sources peuvent la consommer. »16 un Ce qui est sûr, c’est qu’il y site internet communiquer pour diffuser et son travail à un public. Antoine Schmitt, Psychic, 2012, installation interactive Le dispositif donne à voir le déplacement et les actions du spectateur dans la salle où est disposée l’installation, en écrivant automatiquement sur la projection les faits et gestes de celui-ci sur le moment présent. La narration proposée est alors intéressante dans le sens où l’écriture peut être une interaction très visuelle comme procédé narratif. Ainsi, l’oeuvre questionne aussi sous forme «d’un film invisible mais audible», sa propre réalité qui est en fait ce qui se passe dans la salle d’exposition : l’oeuvre observe le spectateur, tandis que le spectateur s’auto-observe. L’oeuvre décrivant ce qui se passe dans la salle d’exposition se trouve être le centre d’intérêt du spectateur. http://www.antoineschmitt.com/psychic-fr/ 16 Herbet Simon, économiste et prix Nobel américain, in : Benjamin Hoguet, La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, 2015, impression à la demande, p. 31 Dispositifs interactifs, projet médiatique interactif. Notamment, meilleure perception et dans notre projet personnel, nous avons représentation de voulu inscrire R.y.l.e.e. sur Internet, notre monde pour pouvoir diffuser notre travail le De plus, les dispositifs interactifs plus largement possible, et donner sont aussi importants dans le sens où la possibilité de le tester à distance. ils permettent de mieux représenter Installer R.y.l.e.e. sur le Net permet de notre monde, et donc, d’appréhender comprendre les différentes stratégies à beaucoup adopter, et de mesurer la pérennité du exemple, l’oeuvre Psychic d’Antoine projet. Schmitt est intéressante aussi bien dans son dispositif que dans la narration et En créant une enquête où il mieux faut chercher des informations pour l’information comprendre installation ce qui est arrivé au l’information. qu’elle propose. Par Cette nous donne à lire notre personnage, notre projet abordait un propre action dans l’espace d’exposition, problème majeur aujourd’hui concernant transcrite à l’écrit par la machine. Cette les contenus médiatiques : la véracité de oeuvre montre que simplement l’écriture l’information sur le Net, moins contrôlée peut être aussi visuelle voire plus qu’avec les médias traditionnels. La masse qu’un média visuel ou sonore, et donc, d’information qu’on trouve sur Internet permettrait de mieux représenter notre amontré plusieurs fois qu’il était possible existence. En effet, voir en temps réel de tomber sur des articles erronés ou nos actions sous forme écrite nous fait encore issus d’une mauvaise source. prendre conscience de nos mouvements Yacine Ait Kaci aka Yak, Elyx, 2015 L’artiste a créé ce petit personnage dessiné, nommé Elyx, qu’il met en scène dans son carnet dans tous les lieux qu’il visite, pour lui donner vie et créer une relation intéressante entre le réel et le personnage fictif : http://www.clique.tv/quand-un-personnagevirtuel-devient-le-vrai-porte-parole-des-nationsunies-rencontre-avec-elyx-et-son-createur-yak/ Il a eu un franc succès sur Internet où il a réussi dans son blog, à attendrir une communauté qui suivait Elyx dans ses nombreux voyages. Ainsi, l’artiste a réussi à faire exister son petit personnage et à l’animer intelligemment en s’appropriant l’espace et l’environnement sur le moment présent où il le dessine. http://www.clique.tv/quand-un-personnagevirtuel-devient-le-vrai-porte-parole-desnations-unies-rencontre-avec-elyx-et-soncreateur-yak/ 35 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques Il s’agit du même objectif pour tout 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 36 dans l’espace et nous donne à Par exemple, dans le domaine de percevoir une facette de notre réalité la robotique, de plus en plus de robots différemment. sont créés à l’effigie de l’homme et cette Nous souhaitons depuis toujours relation homme-robot évolue représenter notre existence, et notre sans cesse et est interrogée avec des vision des choses est centrée sur films comme Blade Runner ou Her, l’homme. Nous cherchons à représenter au point d’essayer de rapprocher la notre monde par mimétisme, et à machine d’une représentation la plus chaque évolution technique, nous nous parfaite de l’homme, de la pensée et rapprochons un peu plus d’un idéal : des comportements humains. On peut représenter le plus fidèlement possible trouver cela assez étrange, mais les la réalité. convictions humaines se présentent ainsi. On peut noter aussi que la réalité virtuelle nous incite à nous perfectionner dans la représentation de notre univers, celle-ci, mêlant les frontières, selon certains dispositifs, entre la réalité et la fiction. Elle permettrait alors une meilleure expérience sensitive visuelle pour l’humain qui cherche à vouloir Stefan Piat, Isola, 2010-2012, vidéo interactive constamment interroger sa perception et son environnement dans le domaine Plus on se rapproche de l’écran, mieux on voit l’île avec un homme, tout seul, perdu sur celle-ci. Plus on s’éloigne, plus on s’éloigne de l’homme et de l’île. L’interaction permet de se rendre compte que la narration est modifiée selon la position du spectateur. Ainsi, il modifie le contexte de l’oeuvre mais aussi le point de vue qu’il entretient avec elle. Ce déplacement qui change le contexte de l’histoire, change aussi la perception que le spectateur en a. Le déplacement du spectateur est aussi important dans notre projet, avec la vidéo interactive, qui permet de voir les modifications de l’image : quand le spectateur s’approchait de l’écran, il enlevait le voile flou qu’il y avait sur la vidéo, quand il s’éloignait, l’image redevenait floue. Comme si son déplacement mettait en avant son implication par rapport au projet. Son déplacement changeait aussi la narration et donc, le contexte du projet. du cinéma et de l’audiovisuel. http://isola.stefanpiat.net/ d’existence qui nous interrogent sur la Mais aussi, elle crée une interactivité immersive avec son public, en racontant des histoires complexes, mettant tout nos sens en alerte, et créant alors des émotions fortes, dans une narration fragmentée et sensible. Ainsi, le virtuel ne s’oppose pas à la réalité, mais le réel et le virtuel sont des formes permis d’appréhender les contraintes on ne sait plus s’il s’agit de la fiction techniques et organisationnelles pour ou de la réalité selon certains projets monter une exposition. Il y avait dans comme Life is Strange. ce projet l’idée de vouloir réaliser une Life is strange de Sébastien oeuvre In-situ, rendant compte de Gaillard, Baptiste Moisan et Sébastien l’architecture du lieu, de son histoire, Judit est une fiction interactive/jeu de son environnement par rapport au interactif, qui nous met dans la peau travail de l’art optique de Victor Vasarely d’une adolescente capable de remonter : nous avons alors fait appel aux outils dans le temps et de changer le cours de numériques actuels, pour mettre en avant la narration pour se sauver de certaines et confronter les aspects esthétiques du situations. L’ambiance de cette fiction, lieu, mais aussi, les aspects d’un monde le graphisme mais aussi les situations imaginé, d’un univers créé. proposées sont souvent très proches de la réalité. Certaines scènes peuvent d’ailleurs avoir déjà été vécues par des utilisateurs. Il est facile aussi d’avoir des émotions très intenses avec cette oeuvre. Ainsi, l’expérience est très immersive et fait qu’en s’identifiant au personnage, la réalité et la fiction sont brouillées. On ne distingue plus la frontière. Au cours de la réalisation de l’exposition MetaSIDERIS (Annexe 6), qui a eu lieu à la Fondation Vasarely dans le cadre du projet collectif de la première année de master, nous avons beaucoup évoqué la relation qu’entretient le réel avec le virtuel. Cette exposition nous a permis de gérer et coordonner le travail en équipe, nous a apporté des compétences dans la réalisation d’un appel à projet, en présentant celui-ci devant une commission de jury. Elle nous a aussi Émilie Anna Maillet et Judith Guez, La chambre de Kristoffer, 2014, projet transmédia (installation avec l’oculus rift, spectacle et installation labyrinthe QR code) Avec trois moyens d’expérimentation, l’installation avec l’oculus rift, le spectacle et l’installation labyrinthe QR code, les artistes proposent d’incarner un enfant, à travers un récit qui se passe dans sa chambre. Entre le réel et le virtuel, La chambre de Kristoffer fait expérimenter à son utilisateur tous ses sens, en racontant l’histoire d’un petit garçon qui aborde ses peurs face à l’univers. Ce qui fait alors s’entrelacer l’imagination avec le réel créant un doute existentiel sur des questionnements personnels du spectateur. http://www.exvotoalalune.com/creations/ chambre-de-kristoffer/ 37 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques représentation de nous-mêmes. Ainsi, 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 38 pour monter une exposition. Il y avait l’attention de l’utilisateur ainsi plutôt dans ce projet l’idée de vouloir réaliser qu’avec un format médiatique classique. une oeuvre In-situ, rendant compte de D’ailleurs, l’architecture du lieu, de son histoire, ne de son environnement par rapport quand elles sont confinées dans un au travail de l’art optique de Victor espace d’exposition, mais quand elles Vasarely: nous avons alors fait appel aux s’émancipent à l’extérieur seulement et ne outils numériques, pour mettre en avant s’adressent plus au public physiquement et confronter les aspects esthétiques présent du lieu, mais aussi, les aspects d’un participative. Les projets transmédia ne monde peuvent vraiment exister que dans le imaginé, d’un univers créé. les prennent oeuvres pas mais à transmédia forcément une sens communauté contexte où ils ont été créés, à savoir sur On peut se rendre compte alors Internet, en ayant comme spectateurs que l’on peut représenté et expérimenté des utilisateurs ou les internautes d’une l’information de plusieurs manières. communauté. Notamment, notre projet De plus, Internet permet de personnel R.y.l.e.e. est présenté sur un partager avec un grand nombre, mais site d’information, adoptant alors les encore faut-il pouvoir se démarquer dans outils spécifiques à la presse. L’attention la masse d’informations : tout compte du spectateur est alors attirée par le fait, le public est orienté vers quelques type d’informations proposé. De plus, produits seulement à cause du nombre de le site internet, le webdocumentaire, les vues, de clics, de la mesure de l’audience... photographies sont encore sur Internet De ce fait, nous pouvons remarquer qu’il (seule la vidéo interactive ne peut y être), y a alors un nouveau défi esthétique à ce qui fait que le projet peut encore relever et nous devrions explorer ces évoluer : une partie de celui-ci pourrait aspects éventuellement vivre par le biais d’une entre les interfaces graphiques, les communauté participative. moteurs de recherche, les bases de données, la navigation... qui seront les qu’offrent les ordinateurs, Et le transmédia? expériences clés de la vie future pour De ce fait, les projets transmédia comprendre quelles stratégies adopter. intéressent beaucoup les réalisateurs et les producteurs car ils savent qu’il y D’ailleurs, a de plus en plus d’enjeux pour attirer s’approprient de les plus artistes en plus le pour interroger ces nouveaux aspects. Par exemple, on peut prendre le travail de Lev Manovich avec son oeuvre, Soft Cinema, qui interroge l’interface graphique, montrant clairement que la base de données qui est donnée à voir est à portée d’atteinte du spectateur. En effet, grâce au dispositif qu’il propose, le spectateur peut choisir tout simplement de cliquer sur les vidéos qu’ils souhaitent voir, Lev Manovich ayant fait en sorte de créer une interface intuitive, classée selon des critères sémantiques et formels, et prouve alors que travailler l’aspect esthétique de l’interface numérique permet de mieux partager l’information avec l’utilisateur. Tous ces éléments nous amènent à s’interroger sur les enjeux majeurs dans la représentation de notre monde avec les narrations transmédias. interactives et Janett Cardiff et Georges Bures Miller, The Alter Bahnhof Video Walk, 2012, Documenta (13), Kassel Germany La temporalité est l’élément clé dans cette installation. On perçoit à travers une vidéo filmée avec l’iPhone, un récit que l’artiste nous propose de suivre face au lieu qu’elle avait filmé. Cette forme de narration où on entend l’artiste en voix off à travers un casque audio et qui nous raconte la scène, ce qu’elle a filmé précédemment et ce que l’utilisateur voit sur le moment présent et le moment passé à travers l’iPhone est intéressante. En effet, le spectateur suit les indications de l’artiste sans avoir le choix de voir ce qu’il souhaite voir à travers l’iPhone. Pourtant, il vit cela comme s’il parcourait l’environnement en réalité virtuelle en temps réel. Il est toutefois contraint, mais l’interactivité proposée est de découvrir un autre monde à travers les paroles de l’artiste, celleci confrontant alors la réalité à la fiction. Cette expérience peut être mise en parallèle avec le cinéma interactif comme forme de narration nouvelle. Comme avec notre personnage, confronter la réalité à la fiction permet de créer un univers particulier et d’impliquer l’utilisateur dans une autre perception visuelle. 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 39 transmédia et les narrations interactives 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 40 Enjeux majeurs de vouloir représenter notre existence avec les narrations interactives : vers un cinéma total ? une existence, et pour certains théoriciens faite une expérience tellement réaliste, qui un espace 3D».17 Aussi, les outils du Web et les médias à Cette nous aller de vers notre incitation automatiquement est avec le amène directement sur une autre appellent le «cinéma total» est une sorte page, alors qu’autrefois, quand on d’idéal technologique pour représenter lisait une phrase dans une histoire, notre monde le plus fidèlement possible. on pensait d’autres phrases, d’autres La volonté de créer un cinéma total est images et souvenirs. On avait nos déjà apparue dès les années 1950 ; propres représentations mentales André Bazin, critique français de cinéma, et nos propres associations d’idée parlait alors du mythe fondateur du en fonction de notre vécu : cinématographe, à savoir parvenir à représenter parfaitement le réel. Ceci «On nous incite, en somme, à suivre restant encore un idéal aujourd’hui, mais des associations préprogrammées qui, avec chaque progrès technique, fait ayant qu’on s’en rapproche de plus en plus, une Autrement sans jamais l’atteindre véritablement. existence dit, [...] objective. on nous demande de confrondre la structure Il est aujourd’hui possible de penser de l’esprit de quelqu’un d’autre avec que les interfaces des nouveaux médias la nôtre.»18 puissent avec le cinéma, être envisagées considéré dans hypertexte: un lien hypertexte nous nous aurions créé le cinéma total. Ce qu’ils peut-être se Web quand on clique sur un lien mettrait nos émotions à l’épreuve, que cinéma produisant représentation monde. et auteurs, il serait possible de créer le d’événements incitent permettraient de mieux représenter notre «si le livre est l’interface d’un texte, l’interface informatiques Les narrations interactives nous comme un espace d’information : comme On peut aussi comparer les sites internet à des peintures car l’esthétisme 17 Lev Manovich, Le Langage des Nouveaux Médias, 2010, éditions Les presses du réel, p. 559 18 Lev Manovich, Le Langage des Nouveaux Médias, 2010, éditions Les presses du réel, p. 148 la narration tandis que les peintures que relier, avec le contenu, comme le ferait narratives. un tableau de la Renaissance qui arrive à nous immerger dans une scène. Lev l’attention Manovich parle d’un «esthétisme de la événement, alors que les détails sur densité» en parlant des tableaux de la un tableau sont mieux mis en avant Renaissance : les affichages du Web quand il se veut descriptif. Les peintres pourraient s’en inspirer pour en tirer italiens voulaient raconter des histoires profit. Il parle d’ailleurs d’un travail alors de recherche très intéressant d’une voulaient décrire et montrer des détails historienne de l’art, Svetlana Alpers : particuliers. L’attention du spectateur selon elle, les peintures de la Renaissance n’est pas la même. Cependant, selon italienne ont un intérêt très fort pour Lev Manovich, on pourrait comparer la hollandaises peinture hollandaise avec les interfaces sont plus descriptives Blast Theory, Karen, 2015, application de téléphone La narration permet de concentrer que du les spectateur peintres sur un hollandais MediaEntity, 2015, bande dessinée transmédia Karen est une auxiliaire de vie, sous forme d’application de téléphone : l’utilisateur s’entretient avec un personnage fictif pour avoir une discussion avec elle. Il s’agit de créer des conversations et d’entretenir une relation d’amitié avec le robot pour ne plus se sentir seul. Comme une coach de vie, Karen nous demande comment nous allons chaque jour, de quoi nous avons envie de parler. Ainsi, elle interroge le big data, et toutes les bases de données contenant les informations sur la personnalité et la vie privée des utilisateurs que les grands groupes d’Internet (Facebook, Google...) collectent. Mais aussi, elle met en avant les relations qu’on pourrait avoir à l’avenir avec un avatar, un personnage fictif qui, finalement, arrive à nous faire croire qu’il existe réellement. Il s’agit d’un projet de bande dessinée transmédia qui mélange la réalité augmentée avec l’édition papier, donnant une liberté de lecture à l’utilisateur pour pouvoir découvrir la narration : en plus d’avoir accès aux chapitres de la bande dessinée, plusieurs jeux de pistes sont proposés et d’autres interfaces interactives ludiques sont à expérimenter. Il s’agit d’une approche plus actuelle pour aborder les bandes dessinées. Afin de se démarquer, surtout dans ce domaine, les auteurs de bande dessinée n’hésitent pas à proposer des interactions de plus en plus nouvelles et originales, afin aussi d’interroger et d’expérimenter de nouvelles formes de narration. Ici, il est sûr que ce projet transmédia joue sur une stratégie de communication axée sur les différents supports numériques qui existent aujourd’hui. http://www.blasttheory.co.uk/projects/karen/ http://www.mediaentity.net/ 41 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques proposé pourrait nous rapprocher, nous 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 42 Maxine Doyle, Sleep No More, 2011, théâtre interactif Cette pièce théâtrale est étonnante dans le sens où le spectateur se trouve au milieu des comédiens dans un espace déstructuré : celui-ci peut toucher le décor afin que la pièce prenne vie. L’interactivité y est très prononcée et repousse même les limites en donnant une telle liberté au public de pouvoir interagir ainsi. Plusieurs scènes sont jouées dans différents endroits et n’ont pas de parcours définis. Le spectateur va où bon lui semble : à lui de choisir vraiment où il souhaite aller et ce qu’il souhaite faire. Étant donné qu’il n’y a pas de chemins linéaires et de contrôle réel sur la pièce, Sleep No More est l’exemple parfait pour montrer qu’une histoire peut se construire avec le public et par le public, plutôt qu’avec réellement des choix pré-définis par le créateur. http://www.sleepnomore.com/#watch Blast Theory, A Machine To See With, 2010, performance interactive Suite à un appel téléphonique, des participants suivent les indications d’une voix. Ils doivent alors se rendre sur les lieux, et se rendent compte qu’ils se sont fait piéger, car ils ne savent pas s’ils sont impliqués dans un vrai ou un faux braquage. Ce dispositif interroge les frontières entre la réalité et le jeu : on ne sait plus réellement à chaque action que l’on fait si on est encore dans le domaine de la performance ou de la réalité. Ainsi, plusieurs personnes ayant testé la performance artistique ont pu témoigner, et dire qu’elles ne savaient plus vraiment quoi faire quand elles se retrouvaient bloquées. Cette expérience d’une grande ambition de ce collectif d’artistes britanniques Blast Theory, offre alors une immersion avec comme décor et environnement la réalité, et nous fascine sur ce que la participation du spectateur peut avoir comme importance pour donner un sens à une oeuvre comme celle-ci et notamment à une narration. L’aspect du jeu est aussi présent dans notre projet personnel, en donnant la possibilité à l’utilisateur d’enquêter sur l’histoire de Rylee. https://www.youtube.com/watch?v=NpTpL7wOEBI 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 43 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 44 numériques actuelles car le sens du l’approche du spectateur lui semble plus détail est prononcé dans les nouveaux réelle et cela lui permet alors de mieux médias (beaucoup d’informations et de appréhender détails sur les sites internet). l’interactivité est utile pour raconter l’information. De plus, l’histoire de Rylee qui ne peut pas La participation du spectateur s’inscrire dans un format linéaire, pour Les expériences du public avec donner la sensation de vivre une enquête l’oeuvre permettent d’interroger les problématiques sur la perception et policière. Il faut élargir cela en donnant plus d’actions à faire à l’utilisateur. les dispositifs immersifs qui se font depuis toujours dans l’art. Ainsi, on peut souligner que sans le spectateur, l’interactivité il n’y aurait pas d’histoires ni d’oeuvres combler certaines lacunes que la linéarité artistiques. n’arrive pas à satisfaire pour un créateur, notamment pour représenter le réel : En effet, Marcel Duchamp le disait Pour des projets complexes, permettrait alors de déjà, avec son urinoir : il ne s’agit plus de faire réellement attention à l’esthétique «Les grandes mécaniques du réel de l’objet avec Fontaine (même si sont certains critiques d’art pensent que le et blanc immaculé de l’urinoir a une valeur circonstances esthétique), mais c’est en détournant qui les animent. Et si la linéarité son urinoir, que Marcel Duchamp a fait s’accommode parfaitement d’une prendre conscience au spectateur que démonstration, d’un schéma de celui-ci pouvait devenir un objet d’art, et pensées que c’est le regard du spectateur, qui va description donner un sens ou une fonction à l’objet temps, elle peut s’avérer limitée pour qu’il a en face de lui. montrer et reproduire la complexité De ce fait, notre projet s’adresse intrinsèque des dynamiques qui nous au spectateur en s’inscrivant dans le entraînent ou nous gouvernent.»19 profondément restent complexes contingentes et aux subjectives, aux individus ou chronologique d’une du réel pour que le personnage fictif puisse exister. En effet, informations en fictives intégrant sur des des sites internet qui existent ou qui ont existé, 19 Benjamin Hoguet, Qu’est-ce que la narration interactive?Et pourquoi nous y tenons tant…,https:// medium.com/interactivite-transmedia/quest-ceque-la-narration-interactive-3fbdb9bc7a04#. pk3oirvps, visité le 10/08/2016 Ainsi, représenter on et pourrait expérimenter 45 mieux notre monde avec les narrations interactives et les dispositifs qui les accompagnent, notamment, pour se rapprocher de l’idéal de la représentation. L’interactivité nous amène d’ailleurs à penser à un concept bien défini : l’approche du jeu dans les narrations interactives et le transmédia, en pensant cela comme une révolution néomédiatique, du fait qu’il y ait un renouvellement de la jouabilité avec les nouvelles formes de narration. Se-Kwon AHN, Dream II - Chunggye Overpass (Rêve II - Le pont autoroutier de Chunggye), 2003, 14 min, vidéo monocanal Une vidéo prise depuis une voiture nous hypnotise à travers un parcours et une musique qui l’accompagne. Ainsi, cet artiste coréen interroge l’immersion que peut procurer la caméra subjective, plan filmique connu dans le domaine du cinéma. Dans notre projet personnel, nous découvrons aussi par un traitement de l’image tout aussi particulier que cette vidéo, un point de vue interrogeant l’immersion et la caméra subjective. 1. Représentation et expérience de notre monde à travers les narrations interactives et les outils numériques 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu 46 L’hybridation de différents genres questionne la place importante du jeu dans l’art numérique Les jeux sont l’accès premier aux à cette thématique. ordinateurs pour bon nombre d’entre nous au point de façonner notre perception L’hybridation du jeu et du film et notre comportement. Le jeu vidéo a D’ailleurs, l’hybridation est telle d’ailleurs pris une place importante dans que selon certains projets interactifs, le le domaine de l’art durant ces dernières jeu vidéo s’apparente à un film, comme années : on y interroge son esthétisme, avec Until Dawn de Nik Bowen, où les son interactivité... On peut prendre émotions du spectateur sont mises comme exemple les machinimas. à rude épreuve. En effet, le jeu joue des constamment avec l’état d’esprit du du joueur sur le moment. C’est-à-dire jeu vidéo, de l’univers virtuel. Les que si le joueur est stressé parce qu’il machinimistes utilisent le jeu vidéo pour sait que son avatar risque de mourir, créer des films. Il s’agit alors d’un genre la manette va alors prendre en compte cinématographique, et à la fois, d’un l’état de stress du joueur par rapport aux moyen d’expression. On peut prendre actions qu’il émet. comme exemple, Crysis, qui, bien qu’il soit un jeu vidéo, offre des expériences clairement d’un film par le réalisme machinimistes. En effet, le premier incroyable des personnages et par la épisode offre au spectateur un court- mise en scène, et donc immerge le joueur métrage réalisé à partir d’un jeu vidéo, dans un récit. avec un travail important sur l’expression des personnages, du décor, des plans à un jeu vidéo, comme Scott Pilgrim filmiques, ressemblant vraiment à un d’Edgar Wright, qui utilise clairement les film. codes culturels du jeu vidéo et de la bande Les créations machinimas sont audiovisuelles issues Ainsi, le jeu se rapproche Un film peut s’apparenter aussi que dessinée, en faisant alors référence dans l’idée d’exploiter le jeu dans l’art et le film par la représentation de pixels ou dans d’effets visuels. Il les faut noter narrations aussi interactives va considérablement changer notre manière Ce mélange des genres suscite de concevoir certains projets par rapport beaucoup de questions sur les nouveaux salle de cinéma interactive est beaucoup plus immersive. Par exemple Last «Une autre table-ronde s’intéressait Call met en avant le choix décisif aux relations entre les jeux vidéo d’un spectateur dans la salle, qui se et les médias traditionnels. Les retrouve confronté à choisir la suite magnats du cinéma regardaient de la narration du film parce que le de moins en moins les jeux vidéo personnage principal l’a appelé en temps comme un moyen d’estampiller leur réel sur son téléphone portable : le logo sur un produit secondaire, téléphone devient alors une manette de mais de plus en plus comme un jeu vidéo. A la différence d’un jeu vidéo moyen d’étendre l’expérience du où on joue seul ou à deux, l’expérience storytelling. Ces producteurs, qui en salle est une expérience collective. avaient grandi avec le jeu vidéo, avaient des idées bien précises sur réinventer les intersections créatrices entre nouveaux codes narratifs à adopter pour les différents médias; ils savaient les narrations interactives. En effet, de il y a un besoin de nouvelles règles, de qui étaient les concepteurs les plus inventifs et intégraient l’idée de collaboration dans leurs contrats. ordinateurs est issue du jeu. Ce qui rend Ils voulaient utiliser les jeux pour nouveau leur utilisation est qu’on explore explorer des idées inadaptées au leur jouabilité. Ainsi, la production, la format du film long métrage.»20 distribution et la communication sont de La manière dont nous utilisons les plus en plus informatisées : la révolution Le cinéma interactif, le jeu néomédiatique a eu un impact réel sur vidéo et l’art numérique le développement de notre société et de Le cinéma interactif interroge la notre culture au point de changer nos teneur du jeu dans ce nouveau genre pratiques quotidiennes. de dispositif cinématographique : le spectateur peut en effet entretenir une relation avec la mise en fonctionnement nouvelles pratiques, et propose de de l’installation. Contrairement à un nouvelles formes de jouabilité issues dispositif cinématographique classique, souvent la relation qu’on entretient dans une différents médias, mais aussi avec 20 Henry Jenkins, La culture de la convergence, des médias au transmédia, 2013, éditions Armand Colin, p. 28 L’art numérique interroge ces d’une hybridation 47 entre des stratégies de diffusion comme 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu médias et les médias du futur : 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu 48 le transmédia, le cross-media et le deep On peut dire par exemple que la media. Il se permet aussi d’affirmer leur franchise de Pokémon Go est un projet interactivité en utilisant des supports qui transmédia : il y a un univers complexe, ne sont pas forcément issus du domaine où du numérique. «Le numérique et le non- complémentaires, se rajoutent au fur numérique se co-construisent»21, pour et à mesure, en utilisant à chaque fois donner d’autres formes de narration des supports différents (la console, les comme MediaEntity et 3». produits dérivés, l’application mobile...). plusieurs histoires, expériences On peut remarquer d’ailleurs que le tour Le storytelling Par ailleurs, de force de Niantic et the Pokémon storytelling Company, les créateurs de Pokémon (glossaire) a beaucoup contribué à Go, est d’avoir réalisé un jeu en réalité améliorer la jouabilité et l’interactivité augmentée des narrations interactives. En effet, d’attraper des pokémons dans la réalité. le storytelling tend le à développer qui permet au joueur Ce jeu suscite de nombreuses cette jouabilité en proposant d’utiliser polémiques du fait qu’il s’agit d’un plusieurs supports destinés à la narration. nouveau concept, qui n’est pas encore Ainsi, une synergie se crée obligeant bien maîtrisé et qui alors, demande à l’utilisateur d’être acteur de l’histoire. être stabilisé, mais sa jouabilité est des sans conteste une expérience ludique, histoires de plus en plus complexes, on interactive, interrogeant une nouvelle va aussi proposer des dispositifs de plus mutation numérique. En outre, en élaborant en plus impressionnants. De ce fait, on ne jouerait plus avec ses pouces, mais avec son cerveau et on jouerait alors que l’on trouve dans plusieurs formes physiquement, demandant à ce que le de narration interroge sans cesse les corps entier participe. expériences comme des expériences En ce moment, c’est ce qui se ludiques, instructives, et rappelle le passe avec un phénomène tout nouveau domaine du jeu vidéo. D’ailleurs, dans mettant en avant cette jouabilité qui fait le domaine de l’art, nous pouvons sortir le joueur de chez lui, et l’oblige prendrecomme à arpenter son environnement réel : d’artistes britanniques Blast Theory, qui Pokémon Go. à la manière de Pokémon Go, interroge 21 Sous la direction de Jean-Paul Fourmentraux, Digital Stories, Art, design et cultures transmédia, 2016, éditions Hermann, p. 13 Ainsi, on peut dire que l’interactivité exemple le collectif aussi le jeu dans l’environnement spatial. 49 Avec son oeuvre A Machine To participants de suivre des directives. Mais en étant plongé dans leur univers, le participant ne ressent plus la frontière entre le réel et le jeu. Impliqué dans un braquage, il ne sait plus s’il peut faire appel à la police ou pas. La tension qui existe alors dans cette performance et qui immerge complètement le participant, nous amène à penser que le jeu est un élément clé pour comprendre comment attirer et immerger le spectateur dans un univers imaginé. 27e Instants Vidéo, 2015, webdocumentaire (Klynt) Dans le cadre des Instants Vidéo, festival annuel d’art vidéo à la Friche de la Belle de Mai, à Marseille, les étudiants de Master du Métiers du Film Documentaire doivent filmer et communiquer sur le travail du festival, les performances, les films présentés. Nous nous sommes jointe à eux deux années de suite : la première année, nous avons réalisé un webdocumentaire où il fallait rendre compte de la structure de la Friche et faire découvrir les productions audiovisuelles des étudiants de cinéma. La deuxième année, nous avons réalisé des films relatant l’ambiance du festival. Nous avons aidé les étudiants de cinéma, à construire une narration et à monter les rushs filmés durant la journée. http://www.instantsvideo.com/blog/ InstantsVideo27/#Introduction 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu See With, Blast Theory demande à des 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu 50 Les narrations interactives et le jeu (vidéo): un nouvel art du jeu ? l’élément principal pour une expérience L’alliance entre le jeu vidéo et le transmédia De plus, les jeux vidéo qui veulent Aujourd’hui, les narrations vidéoludique réussie, comme pour une narration interactive. interactives et le transmédia ont un s’essayer au transmédia aujourd’hui même enjeu : travailler la jouabilité. connaissent un problème majeur qui n’est Le activement pas à négliger : la notion de propriété à une problématique majeure pour intellectuelle. En effet, cela peut être l’industrie du jeu vidéo et les contenus un frein conséquent sur la gestion des médiatiques. En effet, novateur comme droits et la cohérence narrative d’une stratégie de diffusion, il interroge le jeu franchise, ce qui fait que le plus souvent, vidéo et pourquoi cette rencontre entre les producteurs sont réticents pour le transmédia et le jeu semble naturelle. réaliser de tels projets. Si par exemple, Il faut noter que le jeu vidéo connaît une un même jeu rencontre une meilleure mutation difficile durant ces dernières audience avec son application mobile que années. En effet, s’adapter à la demande sur console, alors il y a aura des conflits du public n’est pas chose aisée. Pour commerciaux au sein de la franchise. Mais réaliser un jeu vidéo de qualité, il faut des solutions commencent à émerger, selon le britannique Rick Gibson, collecter pour que les expériences transmédia se le plus d’informations possibles sur le développent, notamment avec les social public visé pour pouvoir appréhender game (glossaire). les composantes du jeu. Ainsi, cela va En soi, le jeu vidéo a eu du permettre de comprendre l’évolution du mal à comportement du joueur en collectant. parce qu’il était destiné au début à Les jeux en ligne sont alors valoriser le monde du cinéma et de la pertinents car ils permettent de faire télévision comme produits dérivés des tester le jeu à ses utilisateurs afin productions audiovisuelles. Mais son de savoir comment l’améliorer et de art du storytelling a su le démarquer, et l’adapter le plus efficacement possible. faire en sorte qu’il puisse se détacher Mais le plus important pour un bon jeu de vidéo est sa jouabilité. En effet, cela peut tout de suite faire perdre un utilisateur du fait de sa capacité à se renouveler et si celle-ci n’est pas intuitive : c’est à s’adapter : il évolue vers le transmédia. transmédia participe la s’affirmer sphère comme un art, cinématographique. L’admiration du jeu vidéo existe retrouve les mêmes véhicules, les par le cinéma, et qui est en train de mêmes technologies, la même flore séduire L’interactivité et la même faune. A noter que les étant au coeur du transmédia, les jeux batailles vidéo-ludiques pourront vidéos sont plus à même de proposer changer le cours de la série. En des processus narratifs innovants et effet, les choix et actions des de réinventer le jeu, en développant joueurs influenceront le scénario des univers transmédias complexes. de la série qui évoluera chaque pourquoi semaine en fonction de l’avancée le jeu vidéo s’approprie de plus en de la communauté dans le jeu.»22 Ainsi, plus le le jeu on vidéo. comprend storytelling 51 transmédia. On peut prendre pour exemple le projet transmédia, Defiance Ainsi, il s’agit d’une expérience (Annexe transmédia très variée, qui propose Souvent, ce terme est détourné de vraiment plusieurs possibilités, où la sa signification première, mais Defiance fiction et le jeu vidéo ont un même est bien un projet transmédia de grande enjeu, le travail sur le storytelling. envergure. Entre jeu vidéo et fiction TV, Cette évolution montre à quel point le ce projet propose une aventure où les storytelling transmédia va permettre derniers survivants, humains et aliens, à doivent cohabiter. Dans une ambiance développer. Le principe du jeu pour post-apocalyptique, ils devront survivre raconter une histoire permettrait à des et bâtir à nouveau une civilisation. Ce créateurs d’attirer un public qui n’est qui est intéressant dans ce projet, c’est peut être pas intéressé par le sujet en que l’utilisateur a la possibilité d’avoir lui-même. vraiment plusieurs histoires du même univers, selon qu’il utilise la console, ou une exposition sur les plantes et la qu’il regarde un programme TV. Mais biodioversité, aussi, il y a des va-et-vient intéressants forcément les jeunes. Mais présenter entre les différents supports et genres : sous une forme de jeu transmédia, 4). l’industrie vidéo-ludique de se Par exemple, si on veut présenter ceci n’intéresse pas la curiosité du jeune public peut être «Par exemple, un personnage peut suscitée comme cela. Nous sommes à sortir du jeu vidéo et rejoindre la une époque où l’attention du spectateur série pour parler de ce qui s’est 22 Article de Transmedia Lab Orange, Defiance : Premier déroulé durant votre partie. On univers nativement Transmedia entre jeu vidéo et fiction TV , http://www.transmedialab.org/the-blog/news/defiancepremier-univers-nativement-transmedia-entre-jeu-videoet-fiction-tv/, consulté le 10/08/2016 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu Il s’agit d’une opportunité déjà approuvée 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu 52 est primordiale. Il faut alors pouvoir indices etc... proposer et les des jeunes choses nouvelles, d’aujourd’hui sont Même dans documentaire, le on du commence à aussi nourris par la culture du jeu. s’approprier modèles normalement au médium du jeu vidéo. économiques se créent, mais même Ceux-ci peuvent permettre d’attirer un dans l’industrie du jeu vidéo, pour les public ayant besoin d’une jouabilité pour grandes entreprises en tout cas, celles- pouvoir s’intéresser aux documentaires. ci tendent à se rapprocher de ce qui Les médias de masse, donc les médias se fait dans le cinéma hollywoodien traditionnels, ont du mal à suivre cette selon les dires du créateur de Dofus, demande, mais ils vont sûrement à Anthony Roux. L’univers du jeu vidéo l’avenir, se renouveler comme ils l’ont veut et va de plus en plus ressembler fait jusqu’à présent. En outre, plusieurs les domaine outils spécifiques au modèle économique du cinéma. De ce fait, on peut alors évoquer L’art dans le jeu (vidéo) une sorte technique, Mais pourquoi l’art s’approprie le dans de jeu, et notamment, le jeu vidéo? Il faut nouvelles manières de raconter des savoir que l’art en règle général interroge histoires et de jouer avec. D’ailleurs, toutes les disciplines, que ce soit les certains projets qui nous semblent mathématiques, la société, la culture, être des webdocumentaires, s’avèrent la littérature... Il interroge absolument être des jeux documentaires. Fort Mc tout, et a besoin à chaque fois de Money de David Dufresne, est un jeu s’approprier quelque chose qu’il n’a pas documentaire dans le sens où il a un encore expérimenté. Ainsi, on peut dire but précis, un objectif à atteindre: qu’il s’agissait d’une opportunité dans connaître l’industrie ce domaine encore mal considéré qu’est pétrolière aux États-Unis dans la ville le jeu vidéo. De plus, pour les artistes, de Fort McMoney. Ainsi, le réalisateur il s’agit d’un terrain d’expérimentation et souhaite que les utilisateurs découvrent d’individuation : le spectateur participe par eux-même en explorant la ville les et s’engage, ce qui change totalement personnages qui s’y présentent, les son rôle de spectateur. Les relations et découvertes qu’il a faites... L’utilisateur les échanges entre joueurs sont alors doit intéressants. d’innovation scénaristique alors et ludique l’économie se de renseigner, appeler parfois les personnages pour avoir des En effet, ils permettent aussi pour aboutissant alors à un renouvellement donc de les faire exister, mais aussi de dans la manière de raconter des histoires traiter de sujets graves par le biais du jeu. et de créer des univers. Par exemple, nous avons déjà participé au festival d’art numérique Eniarof. Eniarof a été conçu par un ancien étudiant de l’école d’art d’Aix-en-Provence qui présente son festival comme une fête foraine de pop-up, proposant alors une hybridation entre art contemporain et expériences ludiques. Ainsi, nous pouvions tester des projets interactifs qui interrogeaient la participation du public au sein d’un festival et les enjeux sociétaux et économiques selon certains projets par le biais du jeu. Au dernier festival Gamerz, l’oeuvre Unmanned de Molleindustria et Jim Munroe, est un jeu vidéo satirique où on incarne un soldat américain, bombardant les pays étrangers le jour et retournant dans sa famille le soir. En se réappropriant le jeu vidéo, les artistes l’utilisent alors pour dénoncer des aspects de notre société. Ils s’approprient alors les narrations interactives et le transmédia pour interroger le support, l’outil comme la participation du spectateur, qui sans cette participation, ne ferait pas exister l’oeuvre. On peut alors parler d’une révolution néomédiatique, notamment pour innover, révolutionner, inventer, Festival Gamerz 11 (Anissa Touil), Molleindustria & Jim Munroe, 2015, production audiovisuelle Chaque année, le festival Gamerz regroupe des travaux d’artistes numériques et contemporains par thématique. Dans le cadre du master, nous devons faire en sorte de communiquer sur ces oeuvres, en filmant, montant, interviewant les artistes, et leurs projets. Nous publions ensuite les productions audiovisuelles sur la plateforme Vimeo pour qu’on puisse garder une trace du travail qui a été fait, et communiquer aussi sur le festival. Nous avons réalisé plusieurs vidéos en deux années de master, dont celle-ci, sur le travail de Molleindustria & Jim Munroe. https://vimeo.com/145742762 Pour jouer au jeu : http://unmanned.molleindustria.org/ 53 2. Révolution néomédiatique : quand les narrations interactives et transmédia permettent de réinventer l’art du jeu les artistes de faire vivre leurs oeuvres, PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III PARTIE III TRANSMÉDIA ET NARRATIONS INTERACTIVES : INNOVATION ET RENOUVELLEMENT DANS LA MANIÈRE DE RACONTER DES HISTOIRES ET DE CRÉER UN UNIVERS l’influence d’Internet et la technologie qui ont ouvert un champ d’expérimentation considérable depuis quelques années. En effet, Internet a non seulement donné la possibilité aux créateurs d’inventer de nouvelles formes de narration, mais aussi, il a pu apporter les outils pour les produire et l’hébergement nécessaire pour s’adresser aux communautés. En effet, que ce soit les artistes, auteurs, écrivains, photographes, réalisateurs, scénaristes, scénographes... pratiquement tous ont trouvé une certaine frustration, un manque, dans la discipline dans laquelle ils exerçaient, alors qu’une opportunité s’ouvrait à eux dans le domaine de la technologie numérique et l’interactivité. Mais, l’interactivité demande plus d’efforts au public parce qu’elle est moins intégrée dans nos pratiques culturelles que celle d’un média traditionnel. Il n’en est pas moins vrai que de nombreux acteurs importants comme on a pu le voir se tournent vers cette opportunité pour répondre aux attentes des nouvelles générations. exemple a par mis du temps, mais connaît maintenant lexique, un des codes culturels et sociaux On ne peut pas aborder cette question sans évoquer l’utilisation et cinéma communs, que l’interactivité tandis numérique étant nouvelle, va connaître aussi ce type de développement. Comme le dit JeanMarie Dallet, dans Digital Stories, l’interactivité «exige de réinventer un langage pour connecter entre elles les informations.»23 Histoire de l’ordinateur et des supports/outils numériques Le fichier numérique offre de nombreuses possibilités de manipulation et d’utilisation, et influence le type de projet proposé. Les avancées techniques et technologiques ont toujours eu une influence dans l’Histoire de l’Art et ont renouvelé les pratiques artistiques et culturelles. En 1833, au moment où Daguerre commence à créer son daguerréotype, qui va par la suite révolutionner le monde de l’art, dans la photographie, mais aussi la société (les médias, la presse...), Charles Babbage, 23 Jean-Marie Dallet, Cinéma interactif : dispositifs un projectifs et arpentage de la mémoire, in : Digital Stories, Art, design et cultures transmédia, sous la direction de Jean-Paul Fourmentraux, 2016, éditions Hermann, p. 151 55 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires Influence des supports et outils numériques sur l’interactivité et le contenu des narrations interactives Le 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires 56 moderne.»24 inventeur qui fut l’un des premiers précurseurs de l’informatique, était en train de réaliser une invention qu’il nomma «machine analytique». Il s’agit moitié du XXe siècle, en 1936, quand d’une machine sur le même principe que Alan Turing écrivit un article «On l’ordinateur numérique moderne. Elle Computable Numbers» qui explique son permettait de stocker des informations ordinateur multi-usage, ressemblant à et de pouvoir les imprimer en utilisant un projecteur de film. des cartes perforées. Elle programmait et synthétisait déjà des images avant représente un épisode déterminant de de servir au traitement de données. l’histoire de l’ordinateur : son invention Elle pouvait alors opérer n’importe quel consiste principalement à stocker et calcul mathématique. Il s’agissait d’une enregistrer des données pour qu’un calculatrice. Mais cette invention ne fut projecteur puisse les lire. Le dispositif jamais terminée alors que l’invention met en mémoire les données dans un de Daguerre a eu un impact direct sur médium ce qui fait que cela ressemble à la société, avec cette possibilité de un ordinateur. pouvoir reproduire la réalité, la «machine analytique» ayant mis du temps à être caméra qui cherche à enregistrer des reconnue. images discontinues, les ordinateurs Le fait de vouloir représenter la stockent les données électroniquement réalité était déjà important, notamment avec un code binaire. Au fur et à comme outil médiatique pour diffuser mesure, le cinéma devient dépendant l’information. Pour autant, cela ne veut de l’ordinateur au point que l’ordinateur pas dire que les traitements de données construit par l’ingénieur allemand Konrad n’ont pas évolué en même temps que les Zuse, médias de masse selon Lev Manovich : donne à voir que les sons, les formes, les Il faut attendre la deuxième En fait, la machine d’Alan Turing Sauf qu’à la différence d’une fonctionnant numériquement, textes, les images fixes et en mouvement le deviennent calculables et sous formes traitement des données sont des d’ensembles de données informatiques technologies ce qui a créé les nouveaux médias. «Les elles médias de masse et complémentaires; apparaissent ensemble et évoluent côte à côte, rendant aussi possible la société de masse Il est intéressant de noter aujourd’hui que ces inventions, qui 24 Lev Manovich, Le Langage des Nouveaux Médias, 2010, éditions Les presses du réel, p. 91 vient aussi de sa réalisation et donc du support qu’il représente : il se retrouve constamment dans l’évolution des médias. Aujourd’hui, le film est un fichier numérique, ce qui fait qu’il ne peut que développer maintenant les spécificités de son support. Par exemple, la musique actuelle serait aussi influencée par le support qu’on lui propose : on tend vers une dématérialisation du support (cassette vers cd, cd vers fichier Radúz Činčera, interactif Kinoautomat, 1967, film Ancêtre de l’oeuvre The Last Call, Kinoautomat interrogeait déjà le cinéma interactif en faisant une pause au milieu de la projection, pour laisser la possibilité aux spectateurs de choisir la suite de l’histoire. L’illusion du choix est aussi présente dans ce film, dans le sens où il n’y avait que deux chemins différents. numérique..) au point d’aller vers une décompression numérique. Le support influencerait les artistes à créer plutôt de la musique électronique, car celle-ci est plus adaptée au support numérique qu’une musique acoustique ou classique. Par exemple, on ne parle plus vraiment de musique aujourd’hui dans la culture populaire mais de son pour qualifier une chanson, un extrait musical. Ainsi, la décompression de la musique vers le numérique proposerait une meilleure écoute par rapport au type de fichier, ceux-ci influençant aussi les artistes à créer des oeuvres musicales numériques. Il en est de même alors pour les narrations interactives : les récits fragmentés, les interfaces numériques... les histoires et expériences proposés s’adaptent aussi au type de support numérique. Toni Dove, Artificial installation interactive Changelings, 1998, Cette installation donne à voir au spectateur différents points de vue des personnages par rapport aux émotions qu’ils ressentent durant le récit. Ainsi, les émotions des personnages vont varier en fonction de la position du spectateur par rapport à l’écran. De ce fait, l’artiste interroge une immersion particulière de l’utilisateur face à l’installation à laquelle il est confronté. Datant de 1998, cette oeuvre est assez novatrice et en avance sur son temps, car le récit traditionnel est accompagné par des composantes interactives pour faire fonctionner l’installation. Ainsi, on peut dire qu’il s’agit d’une forme de narration assez nouvelle pour l’époque qui annonce l’évolution du cinéma émotif. 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires 57 montrent que la fonction de l’objet 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires 58 R . Y . L . E . E . (Realize You Live Eventually , Everything), 2016, vidéo interactive R.y.l.e.e (Realize You Live Eventually Everything) est une installation interactive qui évoque l’histoire d’un personnage, du nom de Rylee, racontée sous forme de narration interactive. Ce projet a évolué en deux temps. Au début, il n’y avait que la vidéo interactive, exposée au Patio du Bois de l’Aune, avec l’exposition Singularité(s). Ce prototype mettait en avant le point de vue et la posture du spectateur en tant qu’enquêteur pour découvrir la fiction. Plus il s’éloignait de la vidéo, plus il se retrouvait à écouter un discours narratif à la troisième personne, l’entraînant à adopter une distance avec le récit. Plus il s’approchait, plus il était impliqué dans l’histoire en tant que détective et personnage principal. Le projet à l’exposition Void Setup;(), à Marseille, implique beaucoup plus d’interactions dans l’installation et de complexité dans l’histoire. Le contenu du projet se présente ainsi : en caméra subjective, un narrateur raconte l’histoire de Rylee, un personnage qui a disparu suite à un accident. Le spectateur doit alors connaître son histoire : selon l’écoute que celui-ci adopte, le discours ne sera pas le même et le visuel non plus. (Annexe 5) Consulter une partie du travail sur : http://rylee.16mb.com/ serait pas aussi vivant sans le mode multi-joueurs, les joueurs pouvant alors enquêter ensemble sur la disparition des scientifiques. Ainsi, les créateurs ont pu voir leurs projets s’améliorer avec cette participation active et dynamique du réseau. En effet, Internet a non seulement donné la possibilité d’inventer de nouveaux formats interactifs avec les nouveaux médias comme on a pu le voir précédemment, mais il permet aussi de produire les contenus et de s’adresser aux communautés par le biais de plateformes: outil au même titre que l’esthétique l’est pour une photo documentaire. Comme l’esthétique, l’interactivité est une accroche, une originalité qui renforce la part créative, qui suscite l’intérêt. Comme l’esthétique, l’interactivité doit servir le propos Grâce aux outils actuels, on trouve un potentiel technologique important pour créer. De ce fait, le public ne cherche pas à vivre l’expérience d’une forme d’interaction mais à écouter le récit, l’outil étant simplement au service de la création. Comme en bande dessinée, le scénariste de la saga Lanfeust de Troy, Arleston, a déclaré que pour faire une bonne bande dessinée, ce n’est pas le dessin qui compte, mais l’histoire. S’il y a une bonne histoire, le lecteur sera immergé dans l’aventure, et ne fera plus attention au dessin en lui-même, même s’il ne lui plaît pas. «Je pense que l’interactivité est un de transmission. Avant tout, public de l’autre qui comptent.»25 donc, à des communautés participatives le projet Alt-Minds de Éric Viennot ne passant par d’autres modes l’histoire d’un côté et le favorisé une ouverture au monde, et des projets importants. Par exemple, de raconter une histoire en interactivité ou pas, c’est Internet et la technologie ont qui ont permis aux créateurs de faire vivre l’engloutir. Car le but est Ainsi, les outils numériques sont présents pour innover, mais la part créatrice est plus importante, et c’est aux créateurs de faire les bons choix pour trouver la forme de narration interactive qui convienne à son récit. Les oeuvres d’artistes s’approprient de plus en plus 25 Micha Patault, photojournaliste et réalisateur , in : La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, Benjamin Hoguet, 2015, p. 89 59 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires Innovation dans la manière de concevoir les récits grâce aux outils numériques documentaire et non pas 1. L’utilisation des supports et outils numériques incitent à raconter différemment les histoires 60 et interrogent le transmédia et les qui est en ligne qu’il y a quelques années. narrations interactives. Ils les détournent Ceci permet de créer des projets qui et en jouent. Ils montrent aussi que prennent vie grâce à leur participation. cela n’empêche pas de réaliser des films d’auteurs. Par exemple, Laetitia le public arrive tout de même à Masson, avec son webdocumentaire, envisager qu’il fasse partie du monde The End, nous montre qu’il est possible qui se projette autour de lui. Cela de composer son propre film, en ayant le ne le gêne plus car il s’est habitué à point de vue singulier de l’auteur. Nous cela. Il commence à intégrer les codes pouvons alors nous immerger dans l’état culturels du numérique. Mais que vont d’esprit de l’artiste et de la production nous apporter ces récits fragmentés proposée, tout en ayant notre perception dans l’avenir ? Pourquoi l’émergence et opinion. La fragmentation du récit d’Internet a enrichi la créativité de ces n’empêche pas d’apprécier son film : les nouvelles formes de narration ? De plus, avec la réalité virtuelle, arrêts dans la narration pour effectuer les choix ne rompent pas le charme de l’immersion et le point de vue de la réalisatrice. L’utilisateur compose le film, mais l’artiste reste bien l’auteur de son film. L’innovation passe aussi par le fait que l’on peut changer nos structures narratives. On est capable de manier les bases de données de plus en plus facilement, et donc de stocker et Laetitia Masson, The End, 2015, webdocumentaire d’enregistrer des éléments de plus en Laetitia Masson nous propose de composer notre propre documentaire en sélectionnant des mots sur une liste qu’elle nous a façonnée. Au départ, elle ne pensait pas réaliser ce travail dans le format d’un webdocumentaire mais d’un film documentaire classique. De manière très sensible, plusieurs films nous sont en fait présentés, avec des choix définis, mais la réalisatrice nous laisse tout de même une assez grande part de liberté, sans nous influencer, sur le film que l’on souhaite composer. Ainsi, cette expérience interactive multimédia nous amène à interroger notre société actuelle, et nous propose de devenir le réalisateur de son propre film. Cette nouvelle forme de narration nous invite à découvrir le cinéma, l’interactivité, mais aussi la liberté qu’offre le web sur une présentation de différents témoignages et interviews que la réalisatrice nous propose de voir en interrogeant des personnes sur plusieurs facettes de notre société. plus importants. On peut géolocaliser les utilisateurs, ce qui permet de proposer des expériences interactives avec leur environnement et sortir d’un musée ou d’une galerie pour tester un projet. Aujourd’hui, on peut jouer avec le public : il participe plus facilement à ce http://the-end.nouvelles-ecritures.francetv.fr/ 61 L’émergence d’Internet nouveaux des nouvelles et compétences. L’auteur doit alors chercher une «nouvelle écriture empathique» (en anticipant les actions de l’utilisateur quand il est devant un choix) pour essayer d’entrer dans un nouvel «espace d’écriture a savoir-faire multidimensionnel» beaucoup contribué à la transformation selon Benjamin Hoguet. des médias que nous connaissons et aux pratiques liées au numérique que travaillent aussi sur ces projets, étant le réseau (le nouveau public) entretient donné qu’il faut une équipe importante avec les projets sur le Net. pour réaliser ce type de projet. Même Cependant, des techniciens Il faut savoir qu’Internet, s’il est possible que la part créatrice de vu le plus souvent comme de l’auteur soit compromise, il ne faut pas l’isolement pour l’utilisateur oublier l’opportunité qui se présente et une forme d’insociabilité, avec ces projets interactifs. Les formats a espaces télévisuels et cinématographiques sont d’interactions humaines. On réduits par rapport à une expérience peut alors trouver des liens transmédia normalement enrichissante. très forts et directs entre les créateurs et leur public. donner un nouveau mode d’expression aux récits. Raconter une histoire devient pourtant des Mais aussi, le storytelling transmédia contribue à En effet, l’interactivité permet de un art complexe. changer nos rapports entre le public et Une histoire est constituée les récits narratifs proposés. Il rencontre d’une structure, de personnages, d’une aussi de nouveaux enjeux économiques pensée, de chansons... mais tous les qui ressemblent au domaine du cinéma composants nécessaires sont toujours comme on a pu le voir auparavant. présents pour créer une grille de lecture, Si l’interactivité a évolué, c’est bien même si cela semble déconstruit du grâce aussi au storytelling. Ceci oblige fait de sa fragmentation. On retrouve les auteurs à changer constamment leur toujours les mêmes ingrédients même manière de travailler, en acquérant de s’ils ne sont pas perçus de la même 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants Révolution numérique : l’émergence d’Internet a transformé les rapports entre les récits et l’utilisateur, les rendant de plus en plus complexes 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants 62 manière par l’utilisateur. évoluera avec ses supports et outils qui personnages l’ont fait naître. Il ne peut que continuer restent la base constitutive d’une histoire. dans ce sens là, à savoir exploiter encore Sans personnages, il est difficile de plus la technologie numérique. Benjamin construire une histoire cohérente. Puis Hoguet a alors raison dans un sens de ces personnages font des choix, ce qui critiquer Henry Jenkins, penseur du constitue aussi l’interactivité nécessaire transmédia, quand il dit que Star Wars, pour le spectateur. En effet, les choix des le Magicien d’Oz, ou encore la Chapelle personnages vont impliquer le spectateur Sixtine, sont des expériences transmédia dans l’histoire, même en étant passif. avant l’heure. Sans choix pour continuer la narration, le récit n’avancerait pas et alors il ne la part du penseur, et qu’il occulte le fait pourrait y avoir d’intérêt à celle-ci. que le transmédia est né principalement grâce à l’émergence d’’Internet et des Notamment, les Ainsi, les storytellers savent que Il pense qu’il y a une exagération de le choix, et donc l’interactivité, possède réseaux sociaux. des richesses à ne pas négliger dans une histoire. Et grâce aux outils et supports sont rattrapés par des contraintes numériques qui existent aujourd’hui, économiques ils ont la capacité de pouvoir proposer faire face, et qui font qu’ils sont des récits complexes et plein de sens. D’ailleurs, on peut considérer que souvent réduits aux formats télévisuels pour le transmédia, il s’agit d’un idéal par rapport au reste de l’expérience à atteindre avec cette liberté de plus proposée. en plus étendue à l’ère du numérique. Nous allons alors à l’encontre de la transmédia est avant tout «une volonté toute puissance des médias de masse, d’adaptation et de survie pour des pour proposer de donner plus de industries culturelles qui ont vu leurs pouvoir au public. La complexité du fondements ébranlés.»26, même s’il est transmédia possible qu’il soit utilisé pour son aspect découle de l’émergence ou Pourtant, les projets transmédia auxquelles cinématographiques Pour Benjamin ils doivent dominants Hoguet, le d’Internet et de la participation du public créatif seulement. et la réalisation des créateurs. Ainsi, on peut dire que le transmédia s’inscrit est une «forme de marketing» qui va véritablement dans le numérique et aller aux endroits où le marché est le 26 Benjamin Hoguet, La narration réinventée, le guide de la création interactive et transmédia, impression à la demande, 2015, p. 28 plus fort, ceci n’est pas contraignant : Cependant, même si le transmédia inventer, parce qu’un monde peut cinéma peuvent proposer aussi des supporter de multiples personnages environnements variés, étant donné que et de multiples histoires sur de petit à petit, ils s’adaptent à la création multiples médias.»27 Web, au jeu, à l’édition, et qu’il faut alors en tirer profit. Renouvellement dans la manière de raconter des histoires et de créer un univers innovant pour le public d’aujourd’hui que les personnages sont importants, Raconter des histoires et créer souvent plus grand qu’un film, car le public son propre univers se complexifient avec qui y participe élargit avec sa participation les outils disponibles aujourd’hui. Ce qui le projet en lui-même en donnant de permet de créer des expériences encore multiples directions et aspects à cet plus fascinantes. L’art du storytelling est univers. L’enrichissement qu’apportent devenu d’ailleurs de plus en plus l’art de selon les projets les internautes renforce construire un monde plus qu’une histoire. l’oeuvre et la fait exister, au point que cette celle-ci devient monumentale et prend évolution dans l’ouvrage d’Henry Jenkins: des proportions conséquentes au fil du Un scénariste évoque mais Le scénariste a alors raison de dire qu’aussi, un univers permet d’apporter un contenu conséquent. En effet, les artistes créent des oeuvres interactives qui ne peuvent pas être pleinement explorées dans un seul média, car les environnements qu’ils construisent sont complexes. L’univers proposé est le plus temps. Il s’agit de nouvelles manières de «Quand j’ai commencé, il fallait une raconter des histoires, le créateur servant bonne histoire parce que sans une d’intermédiaire, gérant et modérant son bonne histoire, il ne pouvait pas y oeuvre. avoir de film. Plus tard, quand les suites ont commencé à marcher, on a nouveaux médias, parle de la création pris un personnage, parce qu’un bon «d’outils de contextualisation» par les personnage pouvait soutenir une lecteurs et les auteurs. Ces outils sont multitude d’histoires. Aujourd’hui, exemple, des cartes géographiques, des c’est tout un monde qu’il faut Janet Murray, théoricienne des 27 Henry Jenkins, La culture de la convergence, des médias au transmédia, 2013, éditions Armand Colin, p. 135 63 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants bien au contraire, la télévision et le 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants 64 arbres généalogiques, des chronologies, répondre aux attentes de ses internautes. pour permettre au spectateur de ne pas se perdre et de comprendre les espaces permettent de créer de nouvelles formes culturels et psychologiques de l’oeuvre. de narration où le public cherche des informations au-delà de l’histoire, ce qui Ainsi, il n’est pas désorienté, et De ce fait, les médias numériques celui-ci contribue en même temps à rend l’univers encore plus réel. améliorer l’histoire, comme les fan- fictions qui permettent de continuer aujourd’hui face à ce renouvellement à faire vivre les histoires bien que de la narration, c’est que l’histoire est l’auteur ait arrêté de les raconter. Par un élément fondamental pour toute exemple, la websérie française What culture humaine. C’est grâce à cela que Ze Teuf de Benjamin Euvrard, Ingrid nous partageons et donnons un sens à Monley-Pegge, Charly de Witte et toutes nos expériences quotidiennes. Benjamin ce Ainsi, nous complexifions les formes même principe en proposant à ses fans de narration en narrations interactives d’imaginer la suite de l’épisode du jour du fait qu’on souhaite étendre le champ au lendemain. Les utilisateurs peuvent de possibilités plutôt que de restreindre twitter et donner leur avis pour que le à une structure narrative traditionnelle créateur puisse améliorer l’histoire, et comportant un chemin unique avec un Dumont s’inspire de Ce qui est intéressant de noter début, un milieu et une fin. Selon l’ouvrage d’Henry Jenkins, c’est en 1999, que des films ont commencé à changer le cinéma : The Blair Witch Project, Matrix, le Sixième sens, Fight Club, Dans la peau de John Malkovitch... Le public a eu le droit à Laure Prouvost, Grandma’s installation vidéo mixée Dream, 2013 Laure Prouvost nous invite dans ses installations comme par exemple dans Grandma’s Dream, à se laisser séduire et emporter par ce qu’elle raconte : elle propose alors une narration très divertissante avant de finir sur une note hors contexte à l’histoire, ce qui la subvertit et introduit alors peu à peu une dimension complètement surréaliste. Ainsi, la narration est maîtrisée mais aussi expérimentée physiquement pour le spectateur. Installation qui demande toute une machinerie afin d’immerger celui-ci dans l’univers particulier de l’artiste. un nouveau type de divertissement : pour les plus confirmés, ceux-ci étaient attendus, pour les moins passionnés, ce fut une réelle surprise. Janet Murray évoque alors que durant cette année, il y avait trois types de consommateurs : le spectateur très engagé, donc le fan, le spectateur qui cherche une cohérence navigateur», qui cherche les connexions autant quand il souhaite voir un film entre les différentes parties de l’histoire, d’aventures comme X-men, ou des découvrant ainsi les divers récits d’un blockbusters même contenu, le transmédia. de leurs héros favoris du fait qu’avant Le public d’aujourd’hui l’est tout relatant les aventures d’aller voir le film, ils connaissent Le storytelling transmédia déjà dans l’Histoire ont joué avec leurs avatars ou leurs Le storytelling transmédia, même figurines. Hollywood s’inspire du coup s’il semble innovant, existe en fait depuis de la structure des mythologies antiques très longtemps. Par exemple, au Moyen- pour raconter leurs histoires de super- Âge, la vie des saints ou des rois était héros. Ainsi, les narrations interactives racontée sur plusieurs supports : vitrail, et surtout le transmédia, le storytelling, tapisserie, spectacle..., afin que les connaissent un renouvellement dans la personnes illettrées puissent connaître manière de raconter les histoires : son leur histoire. De même, Tolkien, au utilisation n’est pas forcément nouvelle moment d’écrire le Seigneur des Anneaux, dans son concept, mais un renouvellement s’inspire de la mythologie et du folklore de celui-ci existe aujourd’hui. les personnages parce qu’ils nordiques pour inventer des fictions sous forme d’un ensemble de récits qui donne de la consistance à son ouvrage. On peut d’ailleurs mettre en parallèle la mythologie et le storytelling transmédia. En effet, l’intérêt de la mythologie est de raconter à travers les dieux, les meilleurs aspects humains comme les pires pour apprendre l’esprit et la pensée humaine. Les Grecs connaissaient tous les aventures d’Ulysse car Homère avait réussi de manière orale, à créer un univers basé sur des informations venant de mythes qui existaient déjà. Le public était alors informé. Éric Viennot, Alt-Minds, 2012, fiction interactive Cette fiction interactive propose de retrouver des scientifiques qui ont disparu. Mais Alt-Minds a une plus grande particularité par rapport à d’autres fictions interactives que l’on a pu voir : c’est que l’enquête proposée s’expérimente en multi-joueurs. Ainsi, cette grande enquête devient vite ambitieuse avec l’implication de chaque personne et d’une communauté qui peut se construire, dans le sens où le créateur a dû essayer en tant que modérateur de gérer la structure narrative de sa plateforme face à un public en ligne. http://www.dailymotion.com/video/xv0pjn_altminds-trailer-2-vf_videogames 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants 65 à l’histoire, et le «spectateur d’un même 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants 66 Le cinéma émotif En mélangeant art et science De ce fait, nous finirons sur un (notamment par rapport au fait que projet pertinent, parce qu’il résume bien l’artiste a dû faire appel à un laboratoire dans son ensemble la problématique de en neurosciences pour créer ce genre de ce mémoire, en répondant à plusieurs dispositif), il n’en reste pas moins que questions que l’on se pose sur l’avenir l’interrogation sur le plan artistique reste des formes de narration interactives qui aussi majeure, avec les nouveaux outils existent, du transmédia mais aussi du technologiques utilisés aujourd’hui. cinéma : Mademoiselle Paradis de Marie- Laure Cazin. bien réfléchi : en effet, la question de Le sujet en lui-même du film a été impressionnante l’hypnose met en parallèle le dispositif de par son concept, son dispositif, hypnotique que représente le cinéma interroge des quand le spectateur est face à un film en narrations interactives aujourd’hui. Les salle, le mettant dans un état émotionnel théoriciens des médias se posent ces singulier. problématiques, et cette oeuvre pourrait prouver qu’un récit fragmenté est tout l’interactivité présent dans les cinémas aussi enrichissant comme expérience interactifs : est-ce que le cinéma interactif émotive qu’un film linéaire. Le sujet de va créer de nouvelles formes de narration, Mademoiselle Paradis est une tentative de en se différenciant du jeu vidéo ? Ce qui guérison pour une musicienne souffrant est important, c’est que Marie-Laure de cécité nerveuse. Un médecin viennois Cazin semble dire que pour son oeuvre, il de la fin du XVIIIe siècle tente de la serait intéressant de «renouveler le rituel guérir avec de l’hypnose. Ainsi, le film cinématographique en y intégrant les évolue en temps réel selon les émotions nouvelles possibilités du numérique»28. de l’utilisateur avec un casque EEG. Là, en déclarant cela, elle pointe un fait L’enjeu dispositif très important sur les nouvelles formes est de dispositif de narrations interactives qui émergent Cette oeuvre beaucoup de d’aspects ce renouveler le De plus, il interroge la teneur de cinématographique tel qu’on le connaît : dans une salle de cinéma classique, en grâce aux nouveaux supports et outils donnant à nouveau à cette expérience numériques. collective, des événements renouvellement du dispositif plus prononcés, grâce à l’interactivité et au temps réel. un 28 Marie-Laure Cazin, Le cinéma émotif : récits interactifs et neurosciences, 2016, in : Digital Stories, Art, design et cultures transmédia, sous la direction de Jean-Paul Fourmentraux, 2016, éditions Hermann, p. 174 Ce renouvellement va clairement pièce de théâtre où le comédien ne refait changer, voire transformer les formes de pas le même jeu exactement à chaque narration interactive mais aussi le cinéma, représentation : cette installation, avec qui est l’un des genres dominants. les émotions qui diffèrent selon chaque spectateur et selon chaque moment Par exemple, le premier cinéma 4D a ouvert à Los Angeles29, aux États- ressemble au dispositif théâtral. Unis, où celui-ci fait bouger le siège du spectateur en temps réel pour lui faire sera d’autant plus intéressante dans son ressentir les secousses des films d’action interaction que celle-ci va être différente et d’aventures à la manière d’un parc à chaque fois selon les réactions des d’attractions comme le Futuroscope. On acteurs qui changent en fonction des tend vers une interactivité au cinéma de émotions du spectateur. Mais aussi, cela plus en plus prononcée et voulue, mais pose énormément de questions pour qui était déjà le cas auparavant. En effet, savoir s’il faut aller dans le sens des le cinéma possède quasiment le même émotions du spectateur, ou le surprendre dispositif que le théâtre, avec ses sièges, : est-ce que l’outil doit s’adapter au public sa scène... On peut mettre en parallèle les ou l’inverse? Ce qui est sûr, c’est que premières salles de cinéma qui existaient, le cinéma émotif soulève actuellement où il y avait des numéros de cirque ou de beaucoup de questions à ce sujet et pour music-hall entre les projections. l’instant, essaie de définir son champ L’interprétation du film de l’artiste artistique. De ce fait, le cinéma émotif Marie-Laure Cazin interroge ce nouveau est en dispositif qui est en train d’émerger et narrations interactives et transmédia trouve une solution pour que le public l’accompagnent dans ce sens, à savoir, ait une interaction directe avec le film. que l’interactivité commence de plus en L’ambiance de la salle, la perception du plus à se développer pour pouvoir créer film sont différentes selon les émotions des univers et des récits de plus en plus que les spectateurs ressentent au cours complexes, proches de la réalité, relevant de celui-ci. Il y a une sorte de miroir le défi alors d’avoir fait évoluer les médias entre les acteurs et les spectateurs, traditionnels vers des progrès techniques comme si on se trouvait alors devant une innovants et impressionnants, grâce Dans Mademoiselle Paradis, 29 Article de Le Monde, Les cinémas en 4D font une première percée aux États-Unis, http://www.lemonde.fr/ culture/article/2014/07/03/les-cinemas-en-4d-font-unepremiere-percee-aux-etats-unis_4450354_3246.html, consulté le 18/08/2016 train d’évoluer et les à Internet, et aux nouveaux outils et supports numériques actuels artistiques. 67 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants Marie-Laure Cazin, Mademoiselle Paradis, 2014, film interactif 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants 68 Cette oeuvre est unique en son genre et même précurseur de l’évolution du cinéma. Elle dépasse les limites en proposant comme expérience à l’utilisateur de porter un casque EEG, qui permet de contrôler les émotions de celui-ci. Selon les émotions qu’il dégage, la narration va se construire par rapport à cellesci sur le moment présent. Ainsi, les personnages et l’ambiance du film vont être sombres par exemple si l’utilisateur commence à stresser. De ce fait, cela pose une question primordiale pour les formes de narration futures : est-ce que l’on doit accentuer et suivre la directive de l’émotion du spectateur, ou doit-on aller à l’encontre pour le frustrer mais aussi le surprendre? Par exemple, si un utilisateur se sent mal avec la scène, on pourrait lui proposer alors une scène plus joyeuse. Inversement, pour l’utilisateur qui se sent joyeux, pourquoi ne pas lui proposer une scène plus stressante et oppressante afin de jouer avec ses émotions et de créer aussi des effets de surprises dans le récit. Ne faut-il pas alors surprendre le spectateur en lui donnant comme interaction ce genre de situation? Le cinéma émotif est vraiment quelque chose qui va se développer à l’avenir. Il tend vers une interactivité de plus en plus prononcée avec les multiples outils qui permettent de complexifier les actions au cinéma. https://vimeopro.com/curiosite/marie-laure-cazin/video/140423810 2. Récit fragmenté : nouvelle façon de construire des récits audiovisuels numériques pour le public d’internet en créant des univers narratifs innovants 69 Conclusion 70 CONCLUSION Ce qu’on a pu constater, c’est que considérés dès le début des années l’interactivité est un élément moteur dans 1990 comme les idéaux de la révolution la transition des médias traditionnels numérique qui «devaient libérer le public vers les médias interactifs. Les nouveaux de la tyrannie des médias de masse et lui outils puissance permette de ne consommer que le contenu d’Internet permettent de partager et qui l’intéressait personnellement.»30 et qui de faire participer le public activement, changent aussi le type de consommation: mais aussi, ils permettent une meilleure se représentation de notre monde. individuelle, une consommation conçue en communauté participative, à savoir le numériques et la On a vu aussi que la fragmentation rajoute à la consommation du récit offrait la possibilité de construire réseau. des univers complexes avec des dispositifs immersifs sans perturber la compréhension chaîne MTV Networks, «le spectateur de la narration. De même, nous avons est un média-actif»30, et conçoit sa appris que l’histoire des supports et consommation avec cette phrase : «ce que outils numériques mais aussi la création je veux, quand je veux»30. Comme a dit le directeur de la du storytelling transmédia influencent les créateurs et donc la création de contenus. En effet, le fichier numérique offre de narration interactive demandent encore nombreuses possibilités de manipulation à s’intégrer dans le contexte socio- et d’utilisation, et influe sur le type de économique et culturel de la société projet proposé. actuelle. Dans la deuxième moitié du XXe Pour autant, le transmédia et la Il est vrai qu’encore aujourd’hui, siècle, on pensait que l’art interactif de nombreux projets transmédias et serait passager, un effet de mode, alors narrations interactives ont du mal à voir qu’aujourd’hui, il persiste et évolue sans le jour, du fait qu’ils ne connaissent pas cesse comme s’il s’était inscrit dans le encore de modèle économique bien défini patrimoine culturel et qu’il existait depuis comme le cinéma et le jeu vidéo. longtemps. Dans les sociétés de production audiovisuelle aujourd’hui, le financement Les nouveaux médias ont été 30 Henry Jenkins, La culture de la convergence, des médias au transmédia, 2013, éditions Armand Colin, p. 292 difficile aussi de les faire évoluer et de les particulièrement sauvegarder contre les mises à jour des compliqué : les dispositifs étant trop logiciels, des sites internet et les coûts récents et onéreux, les producteurs d’hébergement que cela demande. de transmédia ces projets est interactifs ne savent pas réellement si ceci va être rentable. Avec différentes expériences à Le problème du budget est un l’extérieur et dans le cadre de l’université, enjeu majeur du fait que le manque nous avons pu savoir dans quel domaine d’investissements dans un média où la du numérique nous voulons nous insérer gratuité est prédominante a une rentabilité professionnellement. indirecte. Le manque de connaissance aussi sur la complexité des réalisations aussi être actrice de ces nouveaux des projets empêche fortement de se changements lancer dans ce genre de projet. domaine des narrations interactives et Pourtant, c’est bien le financement du transmédia, il nous semble possible de ce type de projet qui est un enjeu vital pour notre cas, d’intégrer une société pour l’avenir. Mais ce qui fragilise cet de production audiovisuelle axée sur ces ensemble, c’est le fait de vouloir à tout problématiques, donc une société de prix créer un genre à part. C’est-à-dire production transmédia, proposant des de différencier un webdocumentaire d’un projets de grande envergure, ou même de documentaire, une série, d’une websérie... travailler sur la communication de ceux-ci Étant donné que nous aimons qui ont lieu dans le en proposant nos services de graphiste, et En effet, le Centre national du de webdesigneur comme nous avons pu cinéma et de l’image animée (CNC) a des le faire avec la campagne de financement fonds bien distincts pour qualifier les participatif que nous avons menée pour nouveaux médias des médias linéaires, ce le film documentaire sur La Maison de qui fait que de ne pas intégrer les nouveaux Gardanne. D’ailleurs, nous comprenons médias dans l’ensemble des industries qu’il y ait plusieurs enjeux importants culturelles s’instaurer, dans le domaine de l’audiovisuel, du web alors qu’en soi, le public n’accorde pas et de l’infographie en général face à ces d’importance à cette distinction. nouvelles mutations numériques. l’empêche de De plus, Internet n’est pas un Des agences de production musée, la conservation des oeuvres n’est transmédia, parmi les start-up, sont en pas stable, ce qui fait que cela rend plus train d’émerger. Elles pourraient alors 71 Conclusion et Conclusion 72 avoir besoin d’un profil comme le mien. dans des dispositifs de plus en plus De plus, nous comprenons la logique des immersifs pour faire vivre des expériences langages de programmation en HTML et encore plus prenantes. CSS ayant déjà codé. Nous comptons d’ailleurs, après le master, chercher du travail en exploitant ce que nous problématique avons déjà appris et en orientant nos manière humoristique pour la promotion choix professionnels par rapport à nos d’un jeu vidéo sur l’utilisation d’un casque préférences. olfactif appelé Nosulus Rift. Ce casque Ubisoft interroge en même cette communiquant de serait capable de faire sentir à l’utilisateur Dans tous les cas, on a pu voir des odeurs émises par la réalité que ce master nous a apporté un bagage virtuelle. La jouabilité toucherait alors un nécessaire pour la vie professionnelle qui autre sens, l’odorat, ce qui donne à penser nous attend. Nous avons appris à utiliser que les industries du divertissement des logiciels numériques, à travailler veulent aussi essayer des dispositifs en équipe, à communiquer avec les interactifs et immersifs qui impliqueraient commanditaires, mais aussi à travailler d’autres sens humains. sur différents événements et production de projet de communication. Nous Les installations interactives, souhaitons alors en tant qu’infographiste comme multimédia/webmaster, sur ont aussi le même objectif, à savoir des projets de narration interactive immerger complètement le spectateur et transmédia. Ceci nous permettrait dans d’expérimenter cette installations perturbent les sens du approche et de comprendre à travers des spectateur mais aussi sa perception projets de créateurs comment raconter de l’environnement dans lequel il est une histoire interactive. à encore travailler mieux celles un l’aide de univers de Miguel Chevalier, numérique. projections Ses numériques sur les façades d’un bâtiment. Nous ne savons pas comment vont évoluer la technologie numérique, et les narrations interactives/transmédia, et le transmédia évoluent vers cela, à mais une chose est sûre, les recherches savoir qu’on améliore leurs dispositifs artistiques et scientifiques vont de plus immersifs pour s’axer sur l’interactivité et en plus interroger ces nouvelles pratiques permettre des expériences individuelles Ainsi, les narrations interactives L’hybridation des genres et leur évolution dans un contexte interactif va aussi s’accentuer avec le temps. De même, les formes de narration et le transmédia se renouvellent déjà grâce aux créateurs et vont sûrement s’affirmer avec la participation de plus en plus dynamique du spectateur. 73 Conclusion ou collectives des plus enrichissantes. Bibliographie/Webographie 74 Bibliographie/Webographie Ouvrages ARASSE Daniel, Histoire de peintures, Denoël , 2004 - On n’y voit rien, Gallimard, 2003 ARDENNE Paul, Art, le présent : la création plasticienne au tournant du XXIe siècle, Éditions du Regard, 2009, BENJAMIN Walter, L’oeuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, Allia, 2011 BLOOR David, Sociologie de la logique, les limites de l’épistémologie, Pandore, 1983 BOISSIER Jean-Louis, La relation comme forme, l’interactivité en art, nouvelle édition augmentée, éditions Les presses du réel, 2008 BRASSIER Ray, L’énigme du réalisme, http://anaximandrake.blogspirit.com/list/ traductions/Brassier_Enigme_du_Realisme.pdf, consulté le 08/05/2015 CARDON Dominique, A quoi rêvent les algorithmes, nos vies à l’heure des big data, Seuil, 2015 CURNIER Jean-Paul, Montrer l’invisible : écrits sur l’image, éditions Jacqueline Chambon, 2009, DIDI-HUBERMAN Georges, Ce que nous voyons, ce qui nous regarde, Les Éditions de Minuit, 1992 - Génie du non-lieu, air, poussière, empreinte, hantise, Les Éditions de Minuit, 2001 DOUEIHI Milad, La grande conversion numérique, Seuil, 2011 - Pour un humanisme numérique, Seuil, 2011 DUQUESNE Timothy, L’avenir [des pixels] est entre nos mains, impression à la demande, 2016 FOURMENTRAUX Jean-Paul, Art et Internet, Les nouvelles figures de la création, CNRS Éditions, 2005 - (dir.) 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Il permet alors, en neurosciences, de comprendre l’activité du cerveau et donc, d’évaluer les émotions du spectateur en temps réel. - Cross-media : Le cross-media est une stratégie de diffusion, sauf qu’elle est différente du transmédia : elle fait naître des interactions et des synergies entre différents supports de publication. Ainsi, sur un principe de mise en réseaux, les médias répondent aux nouveaux usages de consommation de l’information. Chaque support est relié à une même histoire, créant un univers commun mais dépendant entre les différents supports. - Design empathique : Le design empathique est un nouveau mode de pensée issu de l’ère du numérique qui permet de réfléchir sur une nouvelle approche et conception de l’utilisation des médias et technologies numériques. Lié au design en tant qu’activité de conception, il s’agit de se mettre à la place de l’utilisateur pour comprendre et anticiper ses besoins en créant de nouveaux supports de communication plus attractifs et attrayants pour ses émotions et sentiments personnels. Il permet d’accompagner des formes nouvelles de lien social, l’empathie étant au cœur du sujet même de ce mouvement. - Faux-documentaire : Il s’agit de faire croire sous l’apparence d’un documentaire que le contenu est vrai, alors qu’il s’agit d’un leurre. A ne pas confrondre avec un mockumentaire, qui est un documentaire parodique. Par exemple, The Office est un mockumentaire, car il s’agit de parodier le travail au bureau, tandis que Rec, ou District 9 sont des faux documentaires car ils utilisent les outils spécifiques au documentaire pour faire croire que quelque chose existe. - Found-footage : Le found footage est un genre cinématographique de la deuxième moitié du XXe siècle. Souvent utilisé dans les films d’horreur, cela consiste à visionner une partie ou un film entier comme un enregistrement vidéo authentique qui a été filmé par les protagonistes eux-mêmes. Il y a une volonté de caméra subjective omniprésente, de la qualité visuelle et sonore dégradée et des images prises sur le vif, pour donner l’impression d’être dans l’action en temps réel. - Social game : L’expérience du social game est de faire participer les amis ou un réseau d’amis sur un jeu vidéo précis. Le social game d’Assassin Creed a par exemple pris des ampleurs conséquentes au point d’avoir pu développer une expérience transmédia par la suite de ce jeu. - Storytelling : Le storytelling sert à raconter des histoires pour communiquer. Dans le marketing, il s’agit d’utiliser le récit comme un moyen de communication publicitaire. Plusieurs marques l’utilisent pour capter l’attention du spectateur et susciter son émotion. - VOD : Signifiant la vidéo à la demande, il s’agit d’une technique de diffusion de contenus vidéos numériques le plus souvent vendus par les réseaux câblés comme Internet, ou non câblés comme la 3G. 79 Glossaire Glossaire Annexe 1 Annexes 80 Bigger Than Fiction,Cut, 2013, série transmédia Présentation de la page Facebook, Youtube et de l’application mobile du personnage fictif Jules 81 Annexes Annexe 2 European Journalism Centre, Reconstruire Haïti, 2014, jeu documentaire Reconstuire Haïti est un jeu documentaire qui nous interroge sur les choix que nous menons pour essayer de reconstuire Haïti quatre ans après le séïsme qui a dévasté le pays. Sous forme d’un reportage interactif, la manière dont est mené ce jeu attire notre attention sur les enjeux économiques, sociaux et politiques du pays pour essayer d’effacer sa misère et lui redonner un élan de vie. http://apps.rue89.com/haiti/ Annexes 82 Annexe 3 Anaïs Volpé, Heis, 2016, projet cross-media Son projet se décline en trois supports : un long-métrage, une série et une installation. L’artiste mêle à la fois une approche cinématographique et plastique adaptée au Web. Ainsi, elle mélange plusieurs procédés dont la fiction et le travail documentaire pour évoquer comment l’humain combat quotidiennement pour tendre vers le chiffre un, Heis voulant dire en grec ne faire qu’un au sens de l’épanouissement personnel et non de l’individualisme. http://www.heis.fr/ 83 Annexes Annexe 4 Trion Worlds, Defiance, 2016, projet transmédia Il s’agit du projet transmédia par excellence : dès l’entrée sur le site, Defiance nous propose d’accéder directement à la série ou au jeu, selon la console qu’on souhaite utiliser. http://www.defiance.com/fr/ Annexe 5 Annexes 84 R . Y . L . E . E . (Realize You Live Eventually Everything), 2016 Installation interactive transmédia : - Site internet (ordinateur, bureau, casque audio) - Vidéo interactive (capteurs, arduino, enceintes) - Photographies sur papier aluminium Consulter une partie du travail sur : http://rylee.16mb.com/ Dans un deuxième temps, le projet s’est décliné ainsi : nous avons réalisé un espace d’exposition qui rassemble des éléments de communication comme un site internet, un webdocumentaire, l’installation interactive et des photographies, ceux-ci venant appuyer et contextualiser l’univers de Rylee. Il s’agissait avec cette nouvelle forme de narration, de crédibiliser un univers imaginé, où nous faisions exister virtuellement un personnage dans le monde réel. L’expérience veut faire ressentir sous forme d’enquête, de recherches, et d’expérimentations ce qui est arrivé à celuici. Ainsi, en le rendant existant virtuellement, en lui créant un univers particulier, avec des éléments concrets qui existent, le fait de mélanger le réel à de la fiction met en avant l’information de masse à laquelle on est confronté tous les jours en explorant des pages d’Internet : information qu’on a tendance à assimiler trop vite, sans prendre le temps de vérifier la légitimité de celle-ci. Mais aussi, R.y.l.e.e. remet en question la tendance actuelle dans l’ère numérique qui est de vouloir imiter notre réalité dans des univers virtuels grâce aux nouvelles technologies et à la révolution numérique. Dans cette installation, le spectateur se retrouve alors confronté à découvrir une nouvelle forme de narration qui interroge son point de vue, ses choix, ses actions, sa position par rapport à l’histoire, et par rapport à l’interaction qui l’accompagne, questionnant la notion de transmédia, la narration interactive et le jeu dans l’art. Il doit alors parcourir le site, découvrir les photographies et la manière dont on fait fonctionner la vidéo interactive. Le projet à l’exposition Void Setup;(), à Marseille, implique beaucoup plus d’interactions dans l’installation et de complexité dans l’histoire que celui présenté au Patio du Bois de l’Aune. Annexes 85 Annexes 86 Annexe 6 Exposition MetaSIDERIS, 4 au 5 avril 2015 - Fondation Vasarely (Aix-en-Provence) Exposition Singularité(s), 11 au 12 décembre 2015 - Patio du Bois de l’Aune (Aix-en-Provence) Exposition Void Setup;(), 2 au 4 mai 2016 - Espace Fernand Pouillon (Marseille) Durant tout le master, nous avons réalisé trois expositions. La première est une exposition qui a servi à présenter un projet collectif de 5 personnes, à la Fondation Vasarely, à Aix. La deuxième fut une exposition présentant le prototype de notre projet personnel au Patio du Bois de l’Aune, et la dernière fut celle montrant la finalité de notre projet personnel à l’espace Pouillon à Marseille. Ainsi, nous avons pu apprendre à monter des expositions, et nous rendre compte de contraintes techniques et organisationnelles. Notamment, le travail sur la communication en réalisant les affiches, les flyers... fut conséquent. Pour voir les différentes expositions et le travail réalisés durant le master : http://anissa-touil.fr/ NOTES 2015/2016 - Aix-Marseille Université - http://anissa-touil.fr/ A T TE EVI IDÉMSNART CARETNI NOITARRAN