ournal - Concours - Théâtre National de Strasbourg
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JOURNAL Théâtre National de Strasbourg Novembre - Décembre 2010 / n°6 « Il y a un homme qui pleure. Et un ours polaire... » © Frédéric Nauczyciel L'Idée du Nord Jim Lotz – Quand je parle à un Russe, comme il m'est arrivé de le faire, ou quand je parle à un Danois ou à un Américain, quand je parle du Nord, je parle de problèmes communs. Je ne parle pas de ce qui se passe à Vladivostok ou à Fairbanks ou à Inuvik. Je parle de problèmes communs, et je reconnais que nous connaissons bien peu de choses de ce vaisseau spatial qu'est la Terre. Cette espèce de quête pour l'Eldorado – c'est tellement bidon, c'est tellement irréel dans un sens, c'est tellement anti-nordique. Le Nord est universel. C'est un environnement universel vous comprenez. Le Nord vous fait voir les choses à l'échelle mondiale. Extrait de L'Idée du Nord Après avoir renoncé à sa vie de concertiste, Glenn Gould s'est rendu dans le grand Nord. Il a ensuite réalisé un documentaire radiophonique au cours duquel cinq personnes livrent leur vision intime de l'Arctique. L’Idée du Nord en raconte l'enregistrement. Les acteurs s’emparent des témoignages comme d'une partition. Avec humour et profondeur, le spectacle parle de la solitude du processus de création, de sa nécessité pour pouvoir « vivre dans le monde sans pour autant être du monde » et s’y exprimer en artiste. Benoit Giros est acteur, auteur et lauréat de la Villa Médicis Hors-les-Murs 2008. L’Idée du Nord est l’histoire d’un enregistrement de la version française de The Idea of North. Il y a… … des acteurs qui viennent enregistrer une dramatique radio dans un studio qui pourrait aussi être une banquise. … une réalisatrice qui cherche les moyens les plus adéquats pour créer sans imiter Gould et qui se transforme au fur et à mesure de son voyage vers la création. … un espace blanc, tout blanc, englobant les spectateurs. Il y a des micros d’où sont prononcées les paroles. Les acteurs parlent souvent en même temps. Chaque acteur incarne un aspect de la pensée de Glenn Gould. Sur scène, ces présences dessinent une pensée en mouvement. Une famille au bord de la dissolution Claudio Tolcachir, auteur et metteur en scène de La Omisión de la familia Coleman > page 2 … du piano pendant l’entrée des spectateurs. … la cabine de réalisation dans la régie du théâtre d’où la réalisatrice donne ses consignes par micro interposé et la quitte pour venir parler directement aux acteurs. Le rouge est mis pendant les séances d’enregistrement. Il y a une boîte blanche sur laquelle est projeté le voyage vers le Nord vu d’une locomotive. Ce film a été tourné sur la ligne WinnipegChurchill qu’avait empruntée Gould en 1965. Il y a un homme qui pleure. Et un ours polaire… Lorsqu’on filme à une image par seconde pendant trente-six heures, on obtient 129 600 images (départ 20h13, deux nuits, un jour, arrivée 8h30 du matin, 1 625 km plus tard), c’est-à-dire un film de 1h26. Si le train roule à 90 km/h, on a alors l’impression qu’il file à 2 250 km/h. Monté, intégré au spectacle, projeté en continu, le film fait concrètement voyager le spectateur. Il raconte la part de réel, la part de géographie, le temps qui passe pour aller dans le Nord. Montre l’hypnotique du voyage, traverse le changement progressif de la nature. De la forêt à la toundra. De l’urbain au sauvage. Le spectateur voyage. Concrètement. Du Marivaux en concentré Entretien avec Jean-Pierre Vincent, metteur en scène de Les Acteurs de bonne foi > page 2 Un trésor caché Jean-Pierre Vincent, à propos de Les Acteurs de bonne foi > page 3 Entre Winnipeg et Fort Churchill, train de trappeurs style disneyland. Brasero à l’entrée des voitures. Une langue argotique de consonance franco-canadienne et chuintante. Les lieux parlent à l’imagination : portage Embarras, fort Qu’appelle, lac Brochet, lac Île à la Crosse, Le Pas, La Rouge, Flin Flon, Cormorant… De la forêt des « épinettes », nous passons aux boqueteaux malingres, puis c’est la toundra, le désert de roches et de lacs. Jean Malaurie Dans l’espace blanc imaginé par Giulio Lichtner, le film projeté s’inscrit sur les parois et les paroles des acteurs remplissent l’espace. Benoit Giros, metteur en scène de L’Idée du Nord L'Idée du Nord de Glenn Gould D’après la dramatique radio The Idea of North réalisée par Glenn Gould en 1967 Du mardi 9 au samedi 20 novembre 2010 Mise en scène Benoit Giros Du lundi au samedi à 20h, jeudi 11 à 16h Relâche dimanche 14 Salle Hubert Gignoux Avec Benoit Di Marco, Vincent Leterme, Hélène Mathon, Philippe Nahon, Jean-François Perrier, Catherine Vuillez Expositions photos • .la chaise. • Antoine Vitez, photographe > page 3 Éloge de la mêlée de Jean-Luc Nancy, philosophe > Stammtisch Le journal de... Andrée Pascaud > Stammtisch Spectacles Des acteurs de bonne foi Une famille au bord de la dissolution page 3 page 2 Claudio Tolcachir, auteur et metteur en scène Un trésor caché « Nous avons tous le sentiment d’être un monstre quand nous essayons de comprendre la vie, ses sens et ses mandats. » d’être complices, de nous identifier ou de nous tenir à distance, mais en aucun cas il ne s’agit de bons ou de mauvais. Ces personnages font ce qu’ils peuvent pour s’en sortir, c’est tout. Concernant la construction des personnages, nous avons travaillé à partir d’indications très précises, en essayant que chaque acteur s’éloigne de son registre de jeu connu et en pariant sur la composition de quelque chose de différent. Au fil de plusieurs mois d’improvisation, nous avons développé le caractère des personnages et surtout les liens entre chacun d’eux. Les acteurs ont dû apprendre à être là tout simplement : ne pas chercher à générer des conflits mais s’observer, recevoir ce qu’apportaient les autres personnages et les situations dans lesquelles nous les mettions... Évidemment chaque personnage est nourri de l’imaginaire personnel de l’acteur, c’est ce qui permet qu’ils soient tous si dessinés et pleins de nuances. conduit ensuite à traverser le salon de la maison – l’espace de la scène – pour arriver aux gradins où il va s’installer. Cette proximité fait bien sûr partie de l’idiosyncrasie, du caractère singulier de la pièce. En tournée, plutôt que de reproduire artificiellement cette maison, nous avons choisi de « théâtraliser » les différents espaces (le couloir, le patio, le salon, l’escalier, les toilettes…) grâce aux lumières. Ce qui donne une plus grande visibilité à tout ce qui se passe dans l’espace principal et en dehors. Le public assimile rapidement ces distinctions et, heureusement, l’intimité de la mise en scène originelle peut être ressentie avec autant de force. Car finalement chaque spectateur, avec son imaginaire et son histoire, finit de construire cette maison. Claudio Tolcachir, propos recueillis par Pierre Notte. La Omisión de la familia Coleman (Argentine) de Claudio Tolcachir - Cie Timbre 4 Du mardi 23 au samedi 27 novembre 2010 Texte et mise en scène Claudio Tolcachir > Spectacle en espagnol surtitré en français Du mardi au samedi à 20h, deux représentations à 16h et 20h : samedi 27 Salle Hubert Gignoux Avec Jorge Castaño, Araceli Dvoskin, Diego Faturos, Tamara Kiper, Inda Lavalle, Miriam Odorico, Lautaro Perotti, Gonzalo Ruiz Sur la dernière étagère, au fond de l’armoire, il y a un petit livre, la dernière miniature chef-d’œuvre de Marivaux : Les Acteurs de bonne foi. Même pas jouée de son vivant, longtemps oubliée ou ignorée, la pièce a connu de multiples réveils et mises en scène depuis soixante ans. Moi, la première fois, c’était en 1970 pour une trop brève aventure. Elle a toujours été accompagnée d’une autre pièce en un acte, souvent plus connue qu’elle. Ce qui fait qu’elle est toujours dans un coin d’ombre. Nous avons choisi cette fois de la présenter seule en l’étoffant un peu (merci Rousseau, merci d’Alembert et Marivaux soi-même). Cela reste un spectacle court. Nous l’espérons aussi dense que possible. Car la miniature, comme souvent, contient un nombre impressionnant de détails, points de vue, retournements, de cruautés et de cocasseries, qu’il faut prendre le temps de jouer. Un trésor est caché dedans, et nous avons cru bon d’ouvrir davantage certains thèmes, implicites ou esquissés, grâce essentiellement à la querelle entre Rousseau et d’Alembert sur la nécessité du théâtre dans notre société (ou non). Ce sujet-là nous a semblé être au cœur de la comédie, davantage que les métaphysiques rapports entre « fiction et réalité », sujets d’innombrables thèses. Pour moi, revenir vers une œuvre du XVIIIe siècle, c’est un peu comme rentrer à la maison… la maison des Lumières, de l’ébullition générale de l’intelligence, du solaire, de la sensualité. J’ouvre la porte et je me sens bien. Je suis un homme d’aujourd’hui, enfoncé comme tout un chacun dans les difficultés et les bêtises qui nous assaillent, mais je trouve ici une sorte de consolation, d’énergie pour me battre. De toute façon, appartenir – Vous envisagez Les Acteurs de bonne foi comme « un chef-d’œuvre dont les perspectives historiques et la violence latente n’ont d’égal que la transparence lumineuse »… Un peu de marxisme ne fait jamais de mal ! Cette pièce traduit une réalité historique connue : les alliances multiformes entre l’aristocratie parisienne et les bourgeoisies de tous étages, de toutes provinces. Dans Les Acteurs de bonne foi, ces alliances se nouent entre les richissimes parisiens et les populations moins fortunées des campagnes, populations qui sont à pied d’œuvre pour faire travailler les paysans et faire régner l’ordre. Il y a des tensions entre fractions de la classe riche – en particulier sur le plan culturel – et fractions de la domesticité citadine, de la paysannerie… Marivaux n’est pas Zola, mais il n’ignore pas le monde où il vit. – Dans cette œuvre, Marivaux explore également les relations qui se jouent entre l’illusion et le réel. Mettre en scène cette pièce, en 2010, revientil pour vous à interroger, à mettre en perspective la complexité de telles relations dans le monde d’aujourd’hui ? « Il y a un étrange parfum, un rythme vital unique dans la langue de Marivaux. » vent. Cette pièce n’est peut-être qu’une esquisse, mais entre les lignes on peut déceler une réserve de thèmes actifs, un terrain de recherche privilégié pour les acteurs : comment, par quels moyens en montrer tout le sous-texte ? Chaque mot pèse lourd. Théâtre et réalité, amour et désamour, jeux de pouvoir entre femmes, riches et pauvres, c’est du Marivaux en concentré ; et c’est très virtuose. – La langue de Marivaux structure et détermine la matière théâtrale de ses pièces. De quelle façon souhaitez-vous que les comédiens appréhendent cette langue ? « Toute pièce est écrite dans une langue étrangère qu’il nous appartient de comprendre et de traduire ». C’est Edward Bond, je crois, qui disait cela, en substance. Oui, il y a un étrange parfum, un rythme vital unique dans la langue de Marivaux. On peut chercher à expliquer, rationaliser, cerner cette langue, mais c’est beaucoup une affaire d’instinct et de musicalité de la part de l’acteur. Je crois que ce dernier doit d’abord s’appliquer à jouer l’une après l’autre, très concrètement, les pensées du personnage, qu’il doit en guetter les contradictions, les trous noirs. La langue viendra d’elle- Interroger ? Oui, mais pas pour le seul plaisir d’interroger : interroger pour élucider. Si cette fable peut servir en 2010, c’est justement dans l’écart, et non dans un illusoire rapprochement avec aujourd’hui. Si mise en perspective il y a, elle est historique. Quand je monte une pièce du passé, je le fais en homme d’aujourd’hui, avec des femmes et des hommes d’aujourd’hui, mais en tant que femmes et hommes historiques. Nous sommes des êtres historiques, on a trop tendance à oublier, voire à nier cette vérité. Cela va d’ailleurs avec la négation de la mort, dans le même mouvement. Nous ne sommes pas nés de la dernière averse : nous sommes les produits d’une Histoire. Et dans cette Histoire, bien des choses évoluent et changent plus ou moins rapidement ; d’autres ne changent pas, ou pratiquement pas. Certaines s’améliorent, d’autres se dégradent. Certaines meurent puis reviennent… Assister à une pièce du passé – forcément revue aujourd’hui, nous ne sommes pas des archéologues – c’est recevoir ce qu’elle a à nous dire. Et une pièce actuelle est forcément déjà un peu du passé… Entretien réalisé par Manuel Piolat Soleymat pour La Terrasse. à une époque, c’est avoir la garantie de ne rien y comprendre. Ces plongées dans les génies du passé sont un des atouts pour y comprendre plus… Les Acteurs de bonne foi, on peut les survoler très vite. Si l’on ralentit l’allure, chaque réplique, chacune des phrases, chaque virgule recèle un monde humain toujours changeant. Il se crée alors un espace/temps romanesque. Chaque phrase vaut une page de roman. La fable fleurit dans plusieurs directions. Le vieux Marivaux est au sommet de son art : simplicité, densité, économie, humour fou, méchanceté du diable. « Tout ceci n’est qu’un rêve », dit Mme Argante, et il n’y a parfois qu’un bon vieux cauchemar pour vous remettre les pieds sur terre. Nous avons voulu donner à ce texte l’écrin le plus beau qui soit. Monter un classique, c’est « allumer une bougie par les deux bouts », celui d’aujourd’hui et celui de son origine, puis passer un accord au milieu de cette combustion. Nous avons donc fait le voyage et nous avons appelé la pièce à nous. Nous sommes allés faire un tour au XVIIIe siècle pour chercher de l’aide (merci Chambas, Cauchetier, Poisson, et merci Watteau, merci Fragonard, Greuze, etc…). Ce n’est pas une histoire d’aujourd’hui, mais elle nous concerne, au milieu de la bougie. Écoutez… Un mot enfin, un sourire amical à Jean Jourdheuil avec qui j’avais fait cette découverte en 1970, et aux actrices et acteurs qui nous accompagnaient alors dans la périlleuse aventure ; et que ce sourire rebondisse sur les actrices et acteurs qui vont vous montrer la chose… Jean-Pierre Vincent Parallèlement aux représentations de L’Idée du Nord, le TNS expose des photographies de Benoit Di Marco, collaborateur du spectacle. Par l'installation de la chaise de concert de Glenn Gould dans différents lieux, la série de photos évoque sa présence dans le grand Nord et les traces qu'il a laissées à l'intérieur de nous-mêmes. Du mardi 9 au samedi 20 novembre au TNS, hall Gignoux – entrée libre Antoine Vitez, photographe Le TNS et le Théâtre Jeune Public, exposent plus de 80 photos prises par le metteur en scène. Parallèlement à son activité de mise en scène, Antoine Vitez écrivait, dessinait et photographiait. L’essentiel de son travail photographique, entre 1968 et 1990, est réalisé avec un appareil reflex (24x36), et constitué d’une grande série de noir et blanc qui comprend des photos de théâtre et des portraits. Du jeudi 25 novembre au samedi 18 décembre au TNS, hall Koltès et au TJP, rue des Balayeurs et rue du Pont Saint-Martin – entrée libre Du jeudi 25 novembre au samedi 18 décembre 2010 Mise en scène Jean-Pierre Vincent > Coproduction du TNS Du mardi au samedi à 20h, les dimanches à 16h Relâche les lundis Salle Bernard-Marie Koltès Avec Patrick Bonnereau, Julie Duclos, David Gouhier, Anne Guégan, Annie Mercier, Pauline Méreuze, Laurence Roy, Matthieu Sampeur, Claire Théodoly, Olivier Veillon 2 3 • Les Acteurs de bonne foi > Du jeudi 25 novembre au samedi 18 décembre 5 * Séances spéciales Les Acteurs de bonne foi Audio-description (AD) > Jeudi 9 décembre 4 6 7 8 9 Surtitrage en allemand (STA) > Vendredi 10 décembre 10 Surtitrage en français (STF) > Samedi 11 décembre 12 13 14 15 • Les Acteurs de bonne foi - À l’issue de la représentation > Jeudi 2 décembre - À la Librairie Kléber avec Jean-Pierre Vincent (metteur en scène) et Bernard Chartreux (dramaturge) > Samedi 4 décembre à 15h 22 16 17 18 19 20 21 la omisiÓn 23 de la familia s coleman 24 25 les acteurs de bonne s foi 26 27 28 Lecture publique 29 Avec les comédiens de la troupe du TNS Samedi 4 décembre à 17h TNS, salle Gignoux – entrée libre Réservation recommandée 30 Tournage de La Cerisaie 2 Après Oncle Vania, le film de la mise en scène de Julie Brochen réalisé par JeanBaptiste Mathieu en 2003, le réalisateur Alexandre Gavras tournera La Cerisaie. Du 2 au 13 novembre au TNS Le film est produit par Philippe Avril/ Unlimited. 3 Le concours d’entrée de l’École du TNS l'idée s du nord 11 • L’Idée du Nord - « Contrepoints » avec Vincent Leterme (pianiste), Romain Vuillet (créateur sonore), Benoit Giros (metteur en scène) et, sous réserve, Alexandros Markeas (compositeur et pianiste) > Samedi 20 novembre à 15h TNS, salle Gignoux - À l’issue de la représentation > Mercredi 17 novembre • À l'école À l’occasion d’un travail avec les élèves du groupe 40, rencontre avec Armand Gatti animée par Olivier Neveux > Mercredi 10 novembre à 17h TNS, salle de peinture - Réservation obligatoire Les Acteurs de bonne foi de Marivaux 1 • La OmisiÓn de la familia Coleman Spectacle en espagnol surtitré (Argentine) > Du mardi 23 au samedi 27 novembre Rencontres © Antoine Vitez – Quelle relation particulière vous lie aux Acteurs de bonne foi ? Il y a des pièces qui vous accompagnent secrètement toute la vie. Vous les montez, une fois ou davantage, ou même vous ne les montez pas. Elles sont des compagnes, des amies, des repères auxquels viennent se confronter les autres pièces… Pour moi, Les Acteurs de bonne foi fait partie de ce petit cercle. J’ai mis en scène cette œuvre en 1970, j’y suis revenu souvent dans des stages de sélection pour les grandes écoles, mais bien plus : j’y pense en silence assez sou- même : la musique n’est pas écrite. Chaque acteur a aussi la sienne ! Et puis, voyez cette fameuse langue : elle n’est pas la même selon que Marivaux écrit pour les Français ou pour les Italiens, pour la merveilleuse Silvia, par exemple. Elle n’est pas la même non plus selon que la pièce est en cinq actes ou en un acte. Chaque œuvre de Marivaux a aussi sa sous-langue… Savoir(s) en commun décembre 1 4 • lecture • rencontre Kléber 5 6 7 8 Dossiers de candidature à faire parvenir avant le 17 décembre 2010 Dossier téléchargeable sur www.tns.fr 9 AD* 10 STA* 11 STF* Le TNS accueille… 12 Savoir(s) en commun : rencontres université – société 9e édition : Le(s) corps Autour du thème « Le(s) corps », le TNS s’associe à l’Université de Strasbourg dans la programmation de la table ronde : « Le corps instrument » Une rencontre avec Caroline Marcadé (chorégraphe et metteure en scène), Nadia Foisil (doctorante en Anthropologie sociale et culturelle) et d’autres spécialistes. Lundi 29 novembre à 18h30 TNS, salle Gignoux Réservation au + 33 (0)3 88 24 88 00 13 Savoir(s) en commun : + 33 (0)3 68 85 12 51 http://savoirsencommun.unistra.fr 22 Ateliers de théâtre amateur 14 15 16 17 18 19 20 21 23 24 Dirigés par les comédiens de la troupe du TNS. 25 • Stage d’une semaine pour comédiens expérimentés Du mardi 23 au dimanche 28 novembre 26 • Premier « grand week-end théâtre » ouvert à tous Du jeudi 9 au dimanche 12 décembre Inscriptions : Sandra Hummel [email protected] / + 33 (0)3 88 24 88 03 © Pascal Victor – Les acteurs, ces monstres ordinaires... L’auteur et les acteurs doivent pouvoir défendre les personnages, aussi je ne suis pas sûr qu’aucun d’entre nous puisse les considérer comme des « monstres ». Nous sommes libres d’observer, Une riche dame de Paris vient marier son neveu à la campagne, lui donnant toute sa fortune. Pour que la fête soit complète, elle désire qu'on y fasse un peu de théâtre avec les paysans du cru. Mais la maîtresse du lieu, mère de la mariée, s'oppose à ce projet... Qui sont les acteurs marionnettes de cette étrange comédie ? Qui, au final, tirera les ficelles ? Dans Les Acteurs de bonne foi, il est question du pouvoir de la représentation, de l'écroulement des façades, de la relation du « jeu » au « soi ». Un dialogue entre théâtre et société, sources de questionnements qui ont toujours été au cœur du travail de Jean-Pierre Vincent, directeur du TNS de 1975 à 1983. © Cie Timbre 4 – Un drame originel ? La faute du père absent, toujours ? Je ne crois pas qu’il y ait une seule et unique réponse. La situation dramatique de chaque personnage se situe à un endroit différent. Certains sont au bord de l’explosion tandis que d’autres pourraient sans doute continuer à vivre dans les mêmes conditions. Chaque spectateur peut construire et comprendre à sa façon les différents éléments de l’histoire car ils sont suggérés mais jamais exprimés. C’est là une clé importante du développement de la pièce. L’absence de la figure du père est une décision prise presque dès le début du travail. Ce vide, la relation qu’entretient chaque personnage avec cette absence, apporte sans doute à l’histoire certains de ces ingrédients les plus significatifs [...]. Cependant je ne crois pas que l’on puisse considérer que s’il y avait un père dans la maison les choses iraient mieux. Ce serait différent sans doute mais pas nécessairement mieux. Ce serait une autre pièce, je suppose. Du marivaux en concentré Jean-Pierre Vincent, metteur en scène – Le public, membre de la famille... Un monstre c’est, entre autres, un être unique, dans le meilleur et dans le pire. Il est différent des autres. Nous avons tous le sentiment d’être un monstre quand nous essayons de comprendre la vie, ses sens et ses mandats. Cette monstruosité est à la mesure de la distance qui nous sépare du soi-disant bonheur. La mise en espace conserve les divisions de l’espace originel où le spectacle a été créé : la salle du théâtre Timbre 4 à Buenos Aires est un espace théâtral non conventionnel. Elle est située au bout d’un long couloir caractéristique de ce qu’on nomme en Argentine les « casas chorizo » (littéralement les « maisons saucisses ») : un bâtiment horizontal dont l’étroit couloir central dessert plusieurs appartements indépendants. Je vis dans l’un de ces appartements, et juste à côté, tout au bout de ce couloir-saucisse, se trouve notre salle de théâtre – un espace de 8 mètres sur 8. Le spectateur se trouve donc de fait dans un espace très intime : en franchissant le seuil de la porte, il entre dans une vraie maison. Il n’y a pas de scénographie : murs, fenêtres, portes, toilettes, tout est réel et contribue à une expérience du public qui le .la chaise. Les Acteurs de bonne foi est l’ultime texte dramatique publié par Marivaux. On en trouve la première trace dans le salon – fort bien fréquenté – de Mlle Quinault, une ancienne de la Comédie-Française, en 1748. Sous quelle forme ? On ne sait : lecture par Marivaux, ou jeu de salon ? Puis Marivaux parvint, dit-on, à faire jouer la pièce une fois par le Théâtre Français en 1755. Mais, après vérification des registres, le Français était en relâche ce jour-là… Y aurait-il eu une lecture interne à la Société ? Et ensuite, plus rien… Cet acte unique était-il un peu trop conséquent, avec ses dix acteurs, dont six femmes !?... Puis – et c’est le plus curieux – Marivaux fit publier son texte dans une revue amie en 1757, en plein cœur de la querelle à propos du théâtre, entre Rousseau et d’Alembert – avec Diderot en embuscade. Dans son article « Genève » de l’Encyclopédie, d’Alembert proposait aux austères protestants genevois d’introduire dans leur cité un peu de fantaisie en y fondant un théâtre. Rousseau, déjà échauffé contre la bande à Diderot, réfuta avec ampleur et ferveur les arguments du Parisien, dans sa célèbre « Lettre à d’Alembert sur les spectacles », lettre à laquelle d’Alembert répondra à son tour dans une « Lettre à Rousseau ». C’est aussi à ce moment que Diderot est en pleine activité « dramaturgique », publiant ses « Entretiens » sur « Le fils Naturel » et « Le père de famille »... Au milieu de ce grand bruit, Marivaux publie silencieusement ses « Acteurs de bonne foi »… J.-P. V. © Pascal Victor © Cie Timbre 4 Les Coleman. La grand-mère, la fille et les quatre petits-enfants cohabitent dans le dénuement. Chacun s’y construit un espace personnel, toujours plus difficile à délimiter. La maison où ils vivent les protège du monde, mais les enferme et les contraint à la plus grande solitude. Tout s’effondre quand la grand-mère, le pilier de la famille, disparaît. Chacun est forcé de prendre en main son propre destin. L’importance de la famille et sa fin comme institution capable de protéger ses membres sont interrogées dans La Omisión de la familia Coleman dont le metteur en scène et auteur, Claudio Tolcachir, né en 1975, dirige la compagnie, le théâtre et l’école Teatro Timbre 4 à Buenos Aires. Expositions photos • L’Idée du Nord > Du mardi 9 au samedi 20 novembre novembre 27 28 29 30 31 w w w . t n s . f r +33 (0)3 88 24 88 00 Stammtisch Éloge de la mêlée (extrait) Les cultures, ce qu’on appelle ainsi, ne s’additionnent pas, elles se rencontrent, se mêlent, s’altèrent, se reconfigurent. Elles se mettent les unes les autres en culture, se défrichent, s’irriguent ou s’assèchent, se labourent ou se greffent. Toute culture est en elle-même multiculturelle, non pas seulement parce Le geste de la culture est lui-même un geste de mêlée. qu’il y a toujours eu une acculturation antérieure et qu’il n’y a pas de provenance simple et pure, mais plus profondément parce que le geste de la culture est lui-même un geste de mêlée. C’est affronter, confronter, transformer, détourner, développer, recomposer, combiner, bricoler. Ce n’est pas qu’il n’y ait pas identité, une culture est une et unique, si tant est qu’on puisse se contenter du mot culture qui semble déjà avoir identifié ce dont il s’agit, mais précisément ce mot n’identifie rien, il se contente de court-circuiter toutes les difficultés qui se presseraient en masse si l’on essayait peuple, nation, civilisation, esprit, personnalité. Une culture, c’est un certain « un ». Le fait et le droit de cet « un » ne peuvent pas être négligés, encore moins déniés, au nom d’une essentialisation du mélange. […] Il existe une culture française, mais elle a elle-même plusieurs voix et elle n’est nulle part elle-même présente en personne sauf pour ceux qui la confondent avec un coq, ou avec Dupont-la-Joie. La voix de Voltaire n’est pas celle de Proust qui n’est pas celle de Pasteur, qui n’est pas celle des Rita Mitsouko, et elle n’est peut-être jamais non plus purement et simplement française, qu'est-ce qui est français ? qu’estce qui ne l’est pas ? Chez Stendhal, chez Hugo, chez Picasso, chez Lévinas, chez Godard, chez Johnny Halliday, chez Kat’Onoma, chez Chamoiseau ou chez Dibb ? Une fois encore, cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas une identité française, cela veut dire qu’une identité de ce type n’est jamais simplement identique, au sens où un crayon est identiquement le même hier et aujourd’hui, à supposer du reste que cela ne soit pas matériellement inexact. Dans Être singulier pluriel, Éd. Galilée, 1996 Le journal de... .la chaise. © Benoit Di Marco Jean-Luc Nancy, philosophe Petit poème d'occasion S'il fallait renvoyer chez eux Les mots arabes ou arabo-persans Ça ferait du monde Et un drôle de vide sur notre carte de séjour : Azur hasard D'algèbre à zénith Jupe (ce serait dommage) & matelas & nuque (mon amour) Abricot & sirop & sorbet & sucre & tambour Sans oublier la famille (tambourin tambour battant) & guitare lilas luth nénuphar orange Maboul comme azimut qui va bien & comme Zéro qui nous résume Et on serait bien ennuyé Bernard Chambaz Renseignements/Location : +33 (0)3 88 24 88 24 Andrée Pascaud Tarifs saison 2010-2011 : de 5,50 € à 25 € Andrée Pascaud est, depuis 2000, directrice des relations publiques au TNS. Elle quittera le théâtre à la fin de l’année. Nous lui avons proposé d’écrire la rubrique « Le journal de… ». Par quel bout allait-elle prendre cela ? Journal des derniers mois ? des premiers jours ? Elle a choisi de nous faire partager une vision d’ensemble. Un journal sans dates, donc. Celui de sa vie professionnelle au théâtre. Quand mes collègues m’ont proposé d’écrire quelques lignes pour annoncer mon départ en retraite, ça m’a fait plaisir, j’ai eu tout de suite envie de raconter des souvenirs. C’était dire aussi que « ça » allait finir, la vie dans un théâtre. Lorsque je suis arrivée à Strasbourg, pour travailler au TNS, on m’a demandé : « Ce n’est pas trop dur après Marseille ? ». Non, ça ne l’était pas, des fenêtres de bureau qui donnent sur des pelouses, une École dans le théâtre, arriver le matin en vélo en longeant la rivière… après le Théâtre du Merlan, au cœur des quartiers Nord à Marseille, quelques mètres cubes de béton dans une galerie marchande. Autour, premier cercle, une voie expresse, deuxième cercle, une population à la verticale dans des tours. Mais c’était une aventure formidable, d’amener des gens au théâtre là-bas. Jan Lauwers, au Merlan, en 1995, avant Avignon, une actrice déclamait le poème érotique de Mallarmé pendant que son collier s’égrenait sur le sol, le Théâtre de Complicité évoquait Kafka dans ce lieu où un vieux couple de retraités amenait des petits gitans : « pendant ce temps, ils oublient leurs soucis ». À dix ans le théâtre comme lieu d’oubli… Non, ce n’était pas dur d’arriver à Strasbourg avec ces Strasbourgeois incroyables qui viennent écouter une lecture un samedi aprèsmidi, même quand il doit faire si bon se promener dans les Vosges. Et puis, c’est pour travailler au TNS que je suis venue en Alsace avec ma fille Louise. Un théâtre national, je craignais l’institution après le chantier marseillais et c’est une grosse maison familiale, bien solide, que j'ai trouvée, avec des gens comme Monique*, qui étaient entrés là à l’âge de 14 ans et y avaient Informations pratiques passé leur vie, croisant les grandes figures qui ont fait ce théâtre ; avec Stéphane Braunschweig, Julie Brochen, des directeurs qui habitent vraiment là. Et on est accueilli dans ce lieu, pas du tout bizuté comme on pouvait l’être en arrivant à la Maison des arts de Créteil (j’y suis arrivée en 1987, après le Théâtre 71 de Malakoff et le théâtre d’appartement avec Ariane et Pierre Ascaride ; ils m’ont fait découvrir Calvino). Un an de bizutage avant d’être adoptée. Alors non, ce n’était pas dur le TNS, avec Didier* que je retrouvais, les élèves de l’École que l’on voit « grandir » au long de leurs trois ans d’études, les artistes que j’aime, Jean-Louis Hourdin qui parle en poésie, les acteurs qui viennent nous voir. Philippe Girard, disant à propos de Brand : « Il va falloir trouver quelque chose pour rire dans le quatrième (acte) sinon les spectateurs ne vont pas tenir ». Ils ont trouvé et c’était magnifique. Et des crises de rire, comme pendant les répétitions des Petits drames camiques montés par Claude Duparfait, que nous voyions arriver ébouriffé d’angoisse tous les matins et qui nous faisait mourir de rire. Oui, je voudrais moi aussi écrire « Je me souviens » et laisser revenir les spectacles magnifiques de Claude Regy – son mur d’acteurs dos au public dans Intérieur, les acteurs de Kantor entrant sur le plateau et c’était l’humanité toute entière – les morts et les vivants – qui se levait. Faire partager ça, faire entendre le souffle d’un spectacle qui nous soulève, c’est ce que font les RP*, c’est ce que nous avons essayé de faire avec Patrick*, Sandra* et Lorédane*, raconter des histoires de spectacles qui existent, raconter notre attente de ceux qui n’existent pas encore. Partir des mots. J’ai toujours travaillé dans des théâtres de textes, de mots. Le travail de RP est un travail intellectuel sans doute mais surtout « physique », un mouvement perpétuel entre plateau, gens de l’extérieur, collègues, élèves. Trouver les mots justes pour porter le geste des artistes, ne pas les trahir et ne pas se trahir soi-même. C'est passionnant. Le théâtre est un lieu de vie où des individus ne viennent pas seulement voir des spectacles mais écrire, comme à Marseille avec Hubert Colas, pour lire comme dans les comités de lecture du TNS, avec Cécile*, Fred*, Muriel*, Hélène*, Jean-Baptiste*, Sharif*, Blanche*, Claire*, Luc-Antoine*, Pascale*... « Des petits moments d'humanité » m'a dit un soir une des lectrices. Un jeune stagiaire, Eddy*, me demandait il y a quelques jours, si près de mon départ : « Pourquoi le théâtre ? » et c'est incroyable parce que cette question, on me l'avait posée lors de l'entretien d'embauche dans le premier théâtre où j'ai postulé ; j'avais alors répondu : « je ne sais pas, si je fais dix ans d'analyse je pourrais peut-être répondre ». J'ai été engagée mais aujourd'hui, vingt-sept ans plus tard, je ne sais toujours pas répondre, je suis seulement sûre que c'est une chance formidable de finir sa carrière professionnelle ici, au TNS. *Monique Privat était responsable de la billetterie *Didier Juillard, ancien secrétaire général du TNS, avec qui j’avais déjà travaillé à Créteil *Relations Publiques *Patrick Lardy, ancien chargé de relations publiques, et Sandra Hummel, Lorédane Besnier, actuelles chargées de relations publiques *Cécile Péricone, Fred Cacheux, Muriel Inès Amat, comédiens de la troupe du TNS ; Hélène Schwaller, Jean-Baptiste Verquin, Luc-Antoine Diquéro, Blanche Giraud-Beauregardt, Sharif Andoura, Claire Aveline, Pascale Lequesne, actrices, acteurs *Eddy Azzem Où et comment acheter vos billets (hors abonnement) ? La location est ouverte un mois avant la première de chaque série de représentations. • Au guichet du TNS : 1 avenue de la Marseillaise. Horaires d’ouverture : le lundi de 14h à 18h, du mardi au samedi de 10h à 18h. • Par téléphone : +33 (0)3 88 24 88 24 et par Internet http://billetterie.tns.fr (à moins de 2 jours avant la date choisie, les réservations ne peuvent plus être acceptées). • À la caisse du soir (uniquement le spectacle du jour) : ouverte 45 min. avant le début de la représentation. • Autres points de vente : Boutique Culture (place de la Cathédrale), au Kiosque Culture - réservé aux détenteurs de la carte Culture (L’Agora - bâtiment Le Platane), et dans le réseau « FNAC, Carrefour, Géant, Système U, Intermarché » (www.fnac.com - www.carrefour.fr www.francebillet.com Tél. +33 (0) 892 68 36 22 : 0.34€/mn) Où se jouent les spectacles ? TNS : 1 avenue de la Marseillaise - Salle Koltès, placement numéroté - Salle Gignoux, placement libre Espace Klaus Michael Grüber : 18 rue Jacques Kablé, placement libre Toutes les salles sont accessibles aux personnes à mobilité réduite. Édité par le Théâtre National de Strasbourg • Directrice de la publication Julie Brochen • Responsables de la publication Olivier Chabrillange, Fanny Mentré, Chantal Regairaz • En collaboration avec Lorédane Besnier, Éric de La Cruz, Caroline Hollard, Sandra Hummel, Fabienne Meyer, Andrée Pascaud • Graphisme Tania Giemza • Remerciements à Jean-Luc Nancy, Emmanuel Piolat Soleymat et Dan Abitbol de La Terrasse, Pierre Notte • Impression Roto Offset - Rixheim