la FMC - Amejjay
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2253-fmc-001-007 12/06/03 18:35 Page 1 la FMC du généraliste n° vendredi 2 0 juin 2 0 03 22 53 Les méno-métrorragies GARO/PHANIE c a h i e r d é ta c h a b l e Du corps étranger intravaginal chez la fillette au cancer de la femme âgée, les méno-métrorragies relèvent de multiples causes. Médecin de famille, le généraliste est bien placé pour prendre rapidement en charge cette pathologie fréquente. Petit guide pratique. D R MARC KREUTER, sous la direction scientifique du P R PASCAL GAUC H ERAN D, gynéco-obstétricien (hôpital Édouard-Herriot, Lyon) objectifs > Savoir prendre en charge les ménorragies et les métrorragies suivant les différentes étapes de la vie génitale de la femme. HISTOIRE NATURELLE DES MENSTRUATIONS > Les règles, qui débutent à la puberté et cessent à la ménopause, représentent la chute de la muqueuse endo-utérine (endomètre). Les saignements sont issus des vaisseaux sous-muqueux dilatés. Elles surviennent tous les 25 à 31 jours, en moyenne tous les 28 jours, et durent habituellement de 3 à 6 jours. Au moment de la menstruation, la muqueuse est très fine et à peine visible dans les pertes éventuelles. Sous l’influence des estrogènes, sécrétés par les follicules ovariens, la muqueuse s’épaissit dans la première partie du cycle féminin. Au moment de l’ovulation, le follicule rompu libère l’ovule et se transforme en corps jaune sécrétant la progestérone. Celle-ci inhibe la production et l’activité des estrogènes. La muqueuse cesse de proliférer. Sa transformation se poursuit, du 15 e au 23e jour du cycle, pour préparer la nidation éventuelle. En son absence, l’endomètre se réduit entre le 24e et le 28e jour et est éliminé lors des règles. > Dans cette période de fécondité, un assez grand nombre de ménorragies et de métrorragies sont d’origine fonctionnelle, liées à un déséquilibre entre les sécrétions d’estrogènes et de progestérone ou encore à des troubles (souvent des absences) d’ovulation. Si ces troubles fonctionnels sont souvent simples à traiter médicalement, il ne faut pas oublier qu’il s’agit toujours d’un diagnostic d’élimination. On doit avant tout chercher des saignements liés à une grossesse normale ou pathologique et à des lésions organiques, en particulier tumorales ou infectieuses. PÉRIODE PRÉPUBÈRE Les petites filles de moins de 8 jours Des métrorragies sont possibles, correspondant dans ces cas rares à une réponse de l’endomètre aux estrogènes maternels résiduels. 2253-fmc-001-007 12/06/03 18:35 Page 2 FMC dossier fmc les méno-métrorragies Étiologies les plus fréquentes des méno-métrorragies suivant l’âge Iatrogènes Corps étrangers Puberté précoce Grossesse Fonctionnelles* Infectieuses < 6 ans + (estrogènes) ++ 6 à 12 ans + (estrogènes) + 12 à 18 ans ++ (contraceptif) + 18 à 30 ans + (contraceptif) + 30 à 40 ans ++ ++ + ++ 40 à 50 ans ++ ++ + ++ 50 à 70 ans + (THS) > 70 ans + (THS) Cancers +++ ++ + + ++ +++ +++ (et atrophie muqueuse) * Fonctionnelles = trouble de la balance hormonale estroprogestative + fibromes + adénomyoses. La biogenèse vaginale va se développer et tout guérit spontanément en huit jours. Il importe de ne rien faire dans ce délai de huit jours. Les petites filles de moins de 6 ans Le taux d’estrogènes est normalement insuffisant pour influencer l’endomètre à cette période. > Il faut vérifier que la mère de cette petite fille n’ait pas pris d’estrogènes (diéthylstilbestrol) pendant sa grossesse et qu’elle-même n’ait pas pris d’estrogènes accidentellement ou par jeu (crème aux estrogènes de sa mère ou de sa grand-mère ou absorption d’une ou plusieurs pilules contraceptives de sa mère). > On cherche par l’interrogatoire (existence de leucorrhées, de brûlures mictionnelles) et par l’examen avec un spéculum adapté, une vulvo-vaginite, cause la plus fréquente de saignement génital à cet âge. Les germes sont souvent banals. Un corps étranger est souvent le responsable. Le généraliste bien équipé, sinon le pédiatre ou le gynécologue, peut faire cet examen et retirer le corps étranger éventuellement en cause. Celui-ci éliminé, un traitement local de désinfection vulvaire est souvent suffisant. Un antibiotique par voie générale peut se discuter suivant l’antibiogramme. > Mais on ne doit pas oublier la possibilité, certes rare, d’une tumeur vaginale bénigne ou maligne, 22 numéro 22 53 vendredi 2 0 juin 2 0 03 qu’il faut particulièrement redouter dans le cas où la mère a pris des estrogènes pendant sa grossesse. Les examens complémentaires (échographie abdominale) peuvent révéler une tumeur pelvienne, en particulier ovarienne. Les filles jusqu’à 12 ans Les premières hypothèses à soulever sont la puberté et la puberté précoce. En l’absence de signes pubertaires à l’examen clinique, on évoque les causes ci-dessus. AU MOMENT DE LA PUBERTÉ Métrorragies fonctionnelles, le plus souvent > Les premières règles, dans le cadre d’une puberté normale survenant à un âge normal, sont parfois hémorragiques. Parfois l’hémorragie peut être très importante, justifiant une hospitalisation. Dans le cas banal de règles un peu irrégulières, trop abondantes et douloureuses, on conseille une pilule pour tenter de régulariser les cycles : une pilule classique, estroprogestative peu dosée (< 0,04 mg d’éthinyl-estradiol) monophasique. > S’il s’agit de ménorragies se répétant à chaque cycle, on peut demander à cette jeune fille de dresser une courbe de température. Une courbe plate, témoin d’une anovulation explique ces symptômes. 12/06/03 18:35 Page 3 FMC 2253-fmc-001-007 L’imprégnation estrogénique est alors continue, non contrebalancée par une sécrétion en progestérone inexistante. La muqueuse est hypertrophique et peut saigner. En pratique, on peut se passer de la courbe ménothermique et demander d’emblée une échographie. Celle-ci permet de confirmer l’hypertrophie et aussi d’éliminer les autres pathologies. À cet âge, l’échographie se fait par voie abdominale. On mesure l’épaisseur de l’endomètre (voir encadré page 6) On prescrit une pilule contraceptive microprogestative pendant un ou deux mois pour entraîner une atrophie de l’endomètre. Attention aux métrorragies iatrogènes Il faut bien rechercher la prise d’estrogènes, comme chez les filles plus jeunes, et la prise « sauvage » de contraceptifs hormonaux. Grossesse arrêtée, échographie. Quelques pathologies organiques bénignes L’examen clinique avec examen au spéculum est indispensable, associé à un frottis de dépistage. On peut d’emblée découvrir une exocervicite, parfois la présence d’un corps étranger, ou un traumatisme vulvaire. Et à la grossesse Ne pas oublier de chercher une grossesse. L’interrogatoire risque de ne pas être fiable. Un dosage des ß-hCG élimine cette possibilité. Exceptionnels : troubles de la coagulation Une pathologie congénitale de la crase sanguine peut se révéler seulement à l’occasion des premières règles. Un bilan de la coagulation est nécessaire : NFS, plaquettes, temps de céphaline avec activateur (TCA), taux de prothrombine (TP). ENTRE LA PUBERTÉ ET LA MÉNOPAUSE Avant d’envisager le cas le plus simple et le plus fréquent des hémorragies fonctionnelles, il faut envisager une grossesse, une pathologie organique. Terminologie Les ménorragies sont des saignements menstruels anormalement prolongés, les métrorragies des saignements en dehors des règles. L’hyperménorrhée correspond à des règles trop abondantes, l’hypoménorrhée à des règles trop pauvres, la polyménorrhée à des règles trop fréquentes et la spanioménorrhée à des règles trop rares. Avant tout, s’agit-il d’une grossesse ? > L’interrogatoire fait préciser la date des dernières règles, la qualité des cycles habituels, la présence de signes sympathiques de la grossesse, les douleurs abdomino-pelviennes éventuelles, l’état général et la présence de malaises. > Au spéculum, on peut d’emblée noter un aspect saignant du col. Quel que soit son aspect, on fait systématiquement un frottis. On peut aussi noter la présence de sang et de débris noirâtres dans l’endocol, évoquant une fausse couche. > Si au toucher vaginal (TV) on sent un utérus augmenté de volume, il s’agit probablement d’une grossesse intra-utérine en cours d’interruption. Au contraire, une masse latéro-utérine douloureuse au TV, avec un utérus de taille normale, fait évoquer une grossesse extra-utérine (GEU). > L’échographie est le premier examen à demander. L’échographie abdominale montre un sac vitellin visible dès la sixième semaine d’aménorrhée (en pratique, lorsque le taux de ß-hCG atteint 1 000 UI/mL). Une échographie endovaginale donne un résultat fiable dès la cinquième semaine (ß-hCG à 2 000 UI/mL). > Seule une augmentation du taux de ß-hCG à deux jours d’intervalle témoigne d’une grossesse encore active (le taux double toutes les quarantehuit heures). > Lorsque le résultat de l’échographie ne permet pas de faire un diagnostic, ou si certains signes cliniques orientent vers une GEU, on refait une échographie et un dosage des ß-hCG tous les jours ou tous les deux jours. Si le diagnostic de GEU est fait ou est très fortement suspecté, on peut discuter des traitements non chirurgicaux (abstention ou numéro 22 53 vendredi 2 0 juin 2 0 03 3 2253-fmc-001-007 12/06/03 18:35 Page 4 FMC dossier fmc les méno-métrorragies Le cancer du col utérin : la hantise Schéma de la conduite à tenir devant une métrorragie Les traitements symptomatiques Lorsque l’hémorragie est importante, il peut être nécessaire de la calmer par un traitement hémostatique général (étamsylate : Dicynone®) ou fibrinolytique (acide tranexamique : Exacyl®, Spotof®). Stratégie des examens complémentaires L’échographie est l’examen fondamental. L’échographie avec contraste liquidien se développe : on injecte un peu d’eau dans la cavité utérine au cours de l’échographie, ce qui permet de donner des images de la cavité utérine (mais pas des trompes), en plus de celles du myomètre, des ovaires, etc. Cette technique a pratiquement fait disparaître les indications de l’hystérographie dans ce cadre. On l’utilise volontiers dans les suspicions de fibromes (pour en préciser la situation sous-muqueuse ou en plein myomètre), de polypes intracavitaires, d’hyperplasie de l’endomètre. L’hystérographie n’a presque plus d’indications. La biologie a peu d’intérêt. méthotrexate intramusculaire). Les indications de traitement cœlioscopique de la GEU restent cependant la règle. > Un cas particulier : la grossesse molaire qui s’accompagne de signes sympathiques de grossesse excessifs. Le taux de ß-hCG anormalement élevé et l’échographie permettent de poser le diagnostic. Le traitement repose sur le curetage sous échographie, suivi de la surveillance rigoureuse de l’évolution du taux d’hCG jusqu’à négativation. Une grossesse est déconseillée dans l’année qui suit ; une contraception est donc discutée. Une infection génitale haute : souvent une leucorrhée > En cas d’infection, les saignements s’accompagnent souvent de leucorrhées et de douleurs pelviennes ou abdominales. La température peut être élevée. Un petit bilan biologique perturbé (NFS : hyperneutrophilie, accélération de la VS, augmentation de la CRP) renforce l’hypothèse. Au stade aigu de l’infection, il est rare que l’échographie donne des images valables. À un stade chronique, peuvent se dessiner des images de pyosalpinx, d’hydrosalpinx, de trompes franchement pathologiques. Et surtout, le passage de la sonde d’échographie dans la région des trompes déclenche une douleur extrêmement violente, permettant d’affirmer le diagnostic. Actuellement, on recourt rarement à la cœlioscopie, si ce n’est en cas de doute diagnostique ou d’échec du traitement. >Le traitement, souvent débuté en hospitalisation, exige un repos strict et une antibiothérapie par voie intraveineuse la première semaine, puis per os les deux semaines suivantes. On associe en général un aminoside, une amoxicilline et du métronidazole. 44 numéro 22 53 vendredi 2 0 juin 2 0 03 Le cancer du col est toujours possible. L’examen au spéculum montre parfois une lésion évidente. Le généraliste peut faire un frottis, un TV pour évaluer l’extension du cancer et un examen général à la recherche de ganglions régionaux et de métastases (hépatiques). > Les laboratoires d’anatomopathologie sont à présent suffisamment performants pour répondre avec une grande fiabilité s’il s’agit d’un frottis normal ou pathologique et au sein de la pathologie, pour affirmer la présence d’un papillomavirus humain (HPV) ou d’une dysplasie. > S’il s’agit du HPV simple, sans dysplasie, le généraliste peut prescrire un traitement désinfectant local (type Colposeptine®) pendant un mois, puis refaire un frottis deux mois après la fin de ce traitement. Parallèlement, le partenaire est adressé à l’urologue ou au dermatologue pour dépistage et traitement. Les rapports sont protégés par préservatifs tant que les deux partenaires ne sont pas guéris. > Si le frottis s’avère pathologique, avec dysplasie, on confie la malade au gynécologue pour faire des biopsies de la lésion et pour décider du traitement. > Mais il ne faut pas renoncer à l’hypothèse d’un cancer du col, même si aucune lésion n’est visible et si le frottis, pour diverses raisons, est faussement normal. En l’absence d’autres diagnostics certains, il ne faut pas hésiter à revoir cette femme et à refaire un frottis quelques mois plus tard. Les pathologies organiques du corps utérin > Au spéculum, on peut voir un polype filant dans le col. S’il est très mobile, on peut aisément le retirer par simple bistournage avec une pince. On l’adresse systématiquement à l’anatomopathologiste. Mais il peut signaler la présence d’autres polypes intra-utérins à chercher par échographie, éventuellement avec contraste liquidien. Si celle-ci révèle de nombreux polypes, le gynécologue fera une hystéroscopie-curetage. > Au TV, on peut percevoir un gros utérus bosselé. C’est probablement un fibrome ou une adénomyose (voir encadré page 5). L’échographie permet de faire le diagnostic. Mais les fibromes saignant le plus facilement sont en position sousmuqueuse, pas toujours très gros et donc assez souvent inaccessibles au TV. > Une échographie est demandée si le TV et l’examen au spéculum sont normaux. > Si l’on a le moindre doute pour un adénocarcinome de l’endomètre (aspect d’hyperplasie irrégulier, âge avancé de la femme, hypervascularisation de 12/06/03 18:35 Page 5 FMC 2253-fmc-001-007 Classement des métrorragies Hémorragies basses Col : – ectropion (éversion de la muqueuse du col utérin) ; – ectopie (colonisation de l’exocol par des cellules de l’endocol). Vagin : – corps étranger ; – traumatismes ; – vaginite. Fibrome utérin, échographie. Hémorragies gravidiques Premier trimestre : – môle hydatiforme ; – fausse couche ; – grossesse extra-utérine (GEU) ; – certaines grossesses qui ont démarré sous contraceptifs. Môle hydatiforme. Deuxième et troisième trimestres : – placenta praevia ; – décollement précoce du placenta normalement inséré (DPPNI). La cause la plus fréquente est la menace d’accouchement prématuré dont on est averti par la clinique (contractions et toucher vaginal). En cas de doute, on demande une mesure du col à l’échographie vaginale et éventuellement une recherche de la fibronectine fœtale, test très fiable. Dans le service du Pr Gaucherand, si une femme a des contractions, un col d’une longueur supérieure à 30 mm à l’échographie et une recherche de la fibronectine négative, elle peut être rassurée et rentrer chez elle. Hémorragies des cancers – Cancer du col : rare, surtout depuis le dépistage des cancers du col par frottis systématiques. – Cancer de la trompe, également rare ; il donne plutôt un écoulement d’eau (hydrorrhée), rarement de sang. – Cancer de l’ovaire : rarement hémorragique. – Cancer de l’endomètre : saigne souvent. – Cancer du vagin : très rare. C’est une pathologie de la femme très âgée. – Hémopathies : rarissimes. Les salpingites La métrorragie est rarement au premier plan, elle est irrégulière et de faible abondance. Les douleurs et les leucorrhées sont les signes les plus nets. Fibrome utérin, hystérographie. cette lésion détectée par le doppler, etc.), on fait une hystéroscopie-curetage. Celle-ci est généralement faite sous courte anesthésie générale, en ambulatoire ; la malade entre le matin et ressort le soir même, accompagnée. Mais des techniques de microhystéroscopie se développent, avec de tout petits hystéroscopes souples permettant de franchir le col sans anesthésie particulière et de faire des biopsies. Les hémorragies fonctionnelles Ce n’est qu’après avoir éliminé toutes les situations précédentes que l’on peut s’orienter vers les ménorragies ou métrorragies fonctionnelles. > L’interrogatoire doit d’abord bien en préciser la chronologie. Les hémorragies fonctionnelles – Fibromes. – Adénomyose : c’est l’endométriose interne, c’est-à-dire une colonisation du myomètre par l’endomètre ; il se forme des cryptes à l’intérieur du muscle utérin, colonisées par l’endomètre. Cela explique que ces malades ne saignent jamais en dehors des règles, mais seulement et en très grande abondance au moment des règles. L’adénomyose résulte probablement d’un déséquilibre entre l’estrogène et la progestérone. Dans l’adénomyose, on essaie des progestatifs atrophiants (donc ni progestérone naturelle ou assimilés) assez fortement dosés. En cas d’échec, le traitement est chirurgical (hystérectomie). – Troubles de la balance entre les estrogènes et les progestatifs. Métrorragies iatrogènes – Consommation d’estrogènes. – Progestatifs. – Anticoagulants. – Anti-inflammatoires à fortes doses. numéro 22 53 vendredi 2 0 juin 2 0 03 5 2253-fmc-001-007 12/06/03 18:35 Page 6 FMC dossier fmc les méno-métrorragies Mesure de l’épaisseur de l’endomètre Le chiffre donné par l’échographiste correspond au double de l’épaisseur de l’endomètre, puisque l’onde ultrasonore traverse les deux feuillets de l’endomètre ; mais c’est bien ce chiffre que l’on retient dans les mesures. Chez la jeune fille et la femme en période d’activité génitale : – en dessous de 5 à 6 mm, on parle d’atrophie de l’endomètre ; – au-delà de 15 à 20 mm, on discute une hypertrophie. Chez la femme ménopausée : – en dessous de 5 à 6 mm, on parle d’atrophie de l’endomètre ; – au-delà de 10 mm, il faut penser au cancer. La majorité des métrorragies sont en fin de cycle, précédant les règles ; les pertes sanguines sont souvent brunâtres. Elles sont liées à une insuffisance relative de progestérone par rapport aux estrogènes. On les traite par des progestatifs dérivés de la 17-OH-progestérone, de la 17-méthyl-progestérone ou de la 19-nor-progestérone du 15e au 25e jour du cycle. Si cette femme souhaite une contraception, on lui propose un traitement par ces progestatifs à la même posologie, mais du 5e au 25e jour du cycle. > Les saignements capricieux, survenant n’importe quand dans le cycle, correspondent le plus souvent à des anovulations. Les périodes proches de la puberté et de la ménopause sont les plus exposées. L’échographie apporte souvent le diagnostic. Si l’on a le moindre doute sur autre chose qu’une hypertrophie de l’endomètre, on fait une hystéroscopie. La biopsie d’endomètre confirmerait le diagnostic d’hypertrophie de l’endomètre (voir encadré cidessus). Les indications de biopsie d’endomètre dépendent des habitudes des gynécologues. Pour certains, au moindre doute échographique, la biopsie à la canule ou au microhystéroscope est envisagée. Actuellement, grâce à de toutes petites canules, on peut faire de telles biopsies assez facilement sans anesthésie, au cours d’une simple consultation. > Les progestatifs du 15e au 25e jour corrigent les saignements. Si cette femme souhaite une contraception, autour de la quarantaine, on choisit une contraception macroprogestative. On peut également conseiller des pilules estroprogestatives à climat progestatif (avec les anciens progestatifs, plus atrophiants que les nouveaux). Méno-métrorragies iatrogènes > Les contraceptifs hormonaux peuvent être en cause dans les méno ou les métrorragies. Dans ce cas, il s’agit souvent de petits saignements espacés, 66 numéro 22 53 vendredi 2 0 juin 2 0 03 capricieux, tachant le protège-slip : les spottings. Le contraceptif en cours est souvent insuffisamment dosé en estrogènes. On peut poursuivre la contraception avec une pilule contenant plus de produit : estroprogestatif monophasique dans lequel le dosage est un peu supérieur (si elle est à 15 gamma, passer à 30). Si, malgré le changement de pilule, les saignements persistent, il s’agit probablement d’une atrophie de l’endomètre ; la prise d’une pilule séquentielle pendant deux cycles va permettre la repousse normale de l’endomètre. On peut aussi attendre deux cycles sans traitement, sans pilule, en conseillant d’autres moyens contraceptifs. Puis, on prescrira une pilule monophasique normodosée à 30 gamma. > Les oublis de pilule sont souvent la cause de métrorragies, de même que la prise contemporaine de médicaments diminuant leur efficacité. L’interrogatoire doit permettre de les débusquer. Dans ces cas, il faut également évoquer une grossesse débutante ou en voie d’interruption. > Les DIU provoquent assez souvent des ménorragies, voire des métrorragies. Après avoir éliminé d’autres causes (examen clinique, échographie), on retire ou on change le DIU. Les DIU à la progestérone (Mirena®) sont remarquablement efficaces sur ce symptôme de métrorragie sous DIU. À LA PÉRIMÉNOPAUSE Tout est possible à cette période : une grossesse, des cycles anovulatoires, un cancer du col, etc. Le bilan très complet comporte une hystéroscopie et un curetage biopsique. APRÈS LA MÉNOPAUSE Par définition, on dit qu’il s’agit d’un saignement de la ménopause s’il survient au moins un an après les dernières règles. > Le bilan est très complet : frottis du col et surtout de l’endomètre, échographies, microbiopsies, hystéroscopie « facile », éventuellement curetage biopsique ; il permet de trouver des lésions très diverses. Atrophie de l’endomètre Une atrophie de l’endomètre permet de rassurer cette femme. Il n’y a jamais de cancer de l’endomètre lorsque l’épaisseur de celui-ci est inférieure ou égale à 5 mm. Si elle est très gênée par ses saignements, qui généralement sont assez faibles, on peut discuter un traitement hormonal substitutif (THS) – estrogène, associé à un progestatif dans la seconde moitié du cycle. Sinon, on ne donne rien. 12/06/03 18:35 Page 7 PHOTOS PR PASCAL GAUCHERAND FMC 2253-fmc-001-007 Rarement une hypertrophie de l’endomètre Une hypertrophie de l’endomètre est rarissime après la ménopause, sauf chez les femmes sous THS. Elle doit faire suspecter un cancer de l’endomètre. Elle impose une exploration (frottis de l’endomètre + microbiopsies ou microhystéroscopie ou hystéroscopie-curetage). > Le traitement chirurgical est indiqué en raison du risque majoré de cancer de l’endomètre sur ce terrain. > Ce n’est qu’après avoir éliminé un cancer de l’endomètre qu’un traitement progestatif peut être prescrit pour réduire ou supprimer les saignements. Mais une surveillance très rapprochée s’impose. Toujours traquer le cancer ; découvrir d’autres pathologies organiques > Le cancer de l’endomètre est une indication chirurgicale. > Le cancer du col est plus rare, mais souvent difficile à dépister, car la jonction est haute dans l’endocol à cette période de la vie et peut échapper au frottis. > Les polypes et fibromyomes sont rares, car estrogénodépendants. Mais ils sont à risque accru de dégénérescence. > Des tumeurs ovariennes, parfois notées au TV et confirmées à l’échographie, relèvent également de l’exérèse chirurgicale. Cancer de l’endomètre : myomètre envahi sur les 2/3 et col atteint. > Un banal prolapsus érodé peut saigner du fait de l’atrophie muqueuse vaginale, soit parce qu’elle est extériorisée, soit par arrêt complet de l’imprégnation estrogénique. On le voit au spéculum. ce qu’il faut retenir > À la puberté, toutes les métrorragies sont fonctionnelles ou iatrogènes. > Avant la quarantaine, toutes les métrorragies sont obstétricales, iatrogènes ou infectieuses. > Après 40 ans, toutes les métrorragies sont obstétricales, iatrogènes, infectieuses ou cancéreuses. > Après la ménopause, toutes doivent faire évoquer le cancer de l’endomètre. > Les troubles fonctionnels doivent représenter un diagnostic d’élimination. pour en savoir plus > Traitement des métrorragies, A. Lethaby et al., Human Reproduction, 2002 ; 17 : 2795. > « Les méno-métrorragies hors les ménopauses », Gynobs, n° 397, 15 décembre 1998 : un article de synthèse > Reproduction humaine et hormones, 1998, vol. 11, p. 131-180 : un volume qui fait le point sur les troubles de la menstruation et les hémorragies fonctionnelles. > Genesis, février 2003 : un numéro spécial sur la prise en charge des troubles hémorragiques fonctionnels du cycle. numéro 22 53 vendredi 2 0 juin 2 0 03 7