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Dimanche 8 Février 2009
Avec la théologienne Corinne EGASSE, secrétaire de la Faculté adventiste de
Collonges sous Salève. Avec la participation de Joël FAYARD, paroissien de
l'Eglise adventiste de Collonges sous Salève, pour les lectures.
Le prophète Michée
Michée 6, 1 - 8
Musique : César Franck. CD Heavenly voices plage 1 "Panis angelicus". EMI classics 2004.
Accueil/Salutation :
CE : Bonjour ! Que la grâce et la paix soient sur vous !
Pendant le temps que nous passerons ensemble, j’aimerais vous proposer un cheminement,
un voyage, loin d’ici et loin dans le temps, au VIIIe siècle avant Jésus-Christ. Nous serons en
compagnie de Michée, un « petit » prophète de la Bible. Il est originaire d’un obscur village
à quelque distance de Jérusalem, et il vit une époque politiquement et socialement très
troublée.
Le message de Michée, loin d’être un texte antique poussiéreux, sonne toujours juste et fort
aujourd’hui. En voici quelques mots :
Première lecture biblique :
JF : « Ecoutez ce que le Seigneur me dit : « Va faire un procès pour me défendre !
Présente mon point de vue devant les montagnes et devant les collines. »
Montagnes, et vous, les fondations solides de la terre, écoutez le Seigneur qui est en procès avec
son peuple. Oui, le Seigneur est en procès avec son peuple, il demande des comptes à Israël. »
(Michée 6, 1 – 2, version Parole de Vie)
Première méditation :
CE : Le Seigneur demande des comptes à son peuple.
Dieu commence un procès solennel devant les montagnes impartiales.
En fait, c’est dans l’ensemble du livre de Michée que Dieu est en procès, qu’il dénonce les
défaillances, les erreurs, les péchés de son peuple (Mi 1.5). Il condamne explicitement les
puissants qui « projettent de faire du mal », qui convoitent des champs et des maisons et qui
s’en emparent en grugeant les propriétaires légitimes. Ces puissants qui ne respectent ni les
hommes ni leurs biens (Mi 2.1,2).
Et les reproches du VIIIe siècle avant Jésus-Christ ne sont guère démodés. Que dirait Dieu
aujourd’hui aux puissants du monde économique ? Ne leur reprocherait-il pas leurs égoïstes
jeux d’argent, leur insatiable appât du gain, leurs parachutes dorés, leur mépris des
économiquement faibles ?
Dieu ne reste pas silencieux devant les injustices. Par son prophète, il révèle au grand jour la
duplicité des chefs et des juges. Michée écrit : « C’est à vous de connaître ce qui est juste,
n’est-ce pas ? Mais vous détestez ce qui est bien, et vous aimez le mal. Vous détestez ce qui est
juste, ce qui est droit, vous le tordez » (Mi 3.1,2,9). La justice est corrompue. Le mal n’est pas
dénoncé, les victimes sont livrées à elles-mêmes, les coupables pavoisent. Et, pour reprendre
l’expression imagée de Michée, ceux qui devraient rétablir le droit « arrachent la peau » des
plus faibles, leur « brisent les os » (Mi 3.3).
Que dirait Dieu aujourd’hui aux détenteurs du pouvoir qui musèlent les juges ? Ne leur
reprocherait-il pas leurs multiples exactions, les détentions arbitraires sans jugement, les
violations répétées des droits, même par des Etats signataires de la Déclaration universelle
des droits de l’homme ?
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Dieu s’en prend ensuite aux prophètes qui se laissent acheter pour dire que tout va bien (Mi 3.5). Il condamne
les prêtres, détenteurs à l’époque du pouvoir intellectuel et religieux, qui enseignent en fonction de la sensibilité
de ceux qui les paient (Mi 3.11), qui disent ce que veut entendre le plus offrant.
Que dirait Dieu aujourd’hui aux tribuns, à ceux en qui les foules placent leur confiance ? Ne leur reprocherait-il
pas leur démagogie, leur amour de la popularité, leur préférence pour l’audimat plutôt que pour la vérité ?
Après les puissants, les dirigeants, les guides de tout poil, eh bien chacun en prend pour son grade. Après les
oppressions à grande échelle, voici les petites mesquineries du quotidien, le menu fretin. Le Seigneur traque le
mal là où il se trouve, chez les grands comme chez les médiocres. Le prophète dénonce en ces termes : « Les
amis de Dieu ont disparu du pays, il n’y a plus personne d’honnête. Tous cherchent une occasion pour tuer.
Chacun tend un piège à son prochain. Ils sont très forts pour faire le mal » (Mi 7.2,3)
Que dirait Dieu aujourd’hui à monsieur tout-le-monde ? Ne lui reprocherait-il pas ses petitesses, ses dérapages
qu’il s’empresse de justifier, ses zones d’ombre, ses trahisons, son manque de loyauté, son manque de vision,
son manque de foi ?
Musique : Michael Nyman - CD La leçon de piano plage 4 "The heart asks pleasure". Virgin Records 1993
Le Seigneur est en procès avec son peuple devant les montagnes immuables… Tout au long du livre du prophète
Michée, Dieu dénonce abondamment le mal, sans complaisance. Il ne laisse aucun crime dans l’ombre.
Toutefois, dans les versets qui nous intéressent ce matin, ce sont des mots bien différents qu’il prononce. On est
très loin de l’accusation ! Voici les paroles de Dieu :
Deuxième lecture biblique :
JF : « Mon peuple, qu’est-ce que je t’ai fait ? En quoi est-ce que je t’ai fatigué ?
Réponds-moi ! Je t’ai fait sortir d’Egypte. Je t’ai délivré de l’esclavage. Je t’ai donné comme chefs Moïse, Aaron et
Miriam, leur sœur. Est-ce que tu me reproches cela ? Mon peuple, souviens-toi ! […]
Tu as pu voir les actions extraordinaires que moi, le Seigneur, j’ai faites pour toi. »
(Michée 6, 3 – 5, version Parole de Vie)
Deuxième méditation :
CE : Dieu n’accuse pas. Au contraire, il se fait suppliant, il plaide non-coupable. « Qu’est-ce que je t’ai fait ? En
quoi est-ce que je t’ai fatigué ? » Les rôles sont inversés. Le souverain de l’univers se soumet au verdict de son
peuple.
Alors que tout va mal chez les hommes, alors qu’il y a tant de torts à réparer, tant de vertus à rétablir, tant de
cœurs à réveiller, Dieu supplie. « Qu’est-ce que je t’ai fait ? »
Alors qu’il y a tant de motifs de colère, tant de délits à punir, tant de raisons de sévir, Dieu plaide. « En quoi estce que je t’ai fatigué ? »
Alors qu’il pourrait tempêter, briser, anéantir, Dieu pleure. « Réponds-moi ! »
Dieu présente sa défense, il en appelle à la mémoire de ses enfants : « Mon peuple, souviens-toi », souviens-toi…
Et le Seigneur évoque de vieux souvenirs, de bons souvenirs, ceux qui ont fondé la relation entre Dieu et son
peuple. Le Seigneur évoque des personnages : Moïse, Aaron, Miriam, les trois frères et sœur envoyés par Dieu à
son peuple pour le faire sortir d’Egypte, il y a bien longtemps. Dieu a fait alors naître son peuple à la vie, à la
liberté, à la responsabilité.
Et toi, mon peuple d’aujourd’hui, mon peuple du XXIe siècle, qu’est-ce que je t’ai fait ? En quoi est-ce que je
t’ai fatigué ? Je t’ai fait sortir de la prison du mal, du cachot du remords, de l’esclavage de la culpabilité. Je t’ai
délivré des entraves de ton passé et de tes faiblesses. Je t’ai donné, totalement donné, donné jusqu’au bout Jésus,
mon fils bien-aimé, pour le salut de chaque humain. « Est-ce que tu me reproches cela ? Mon peuple, souvienstoi ! » Telle est la plaidoirie de Dieu.
Musique : Michael Nyman - CD La leçon de piano plage 11 "The mood that passes through you". Virgin
Records 1993
L’étrange procès de Dieu défie les lois du genre. Loin d’accuser les hommes, Dieu se justifie, il plaide noncoupable, il demande à son peuple de lui rendre justice. La réponse du peuple ne se fait pas attendre, et elle a de
quoi nous surprendre. Le prophète Michée la transcrit en ces mots :
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Troisième lecture biblique :
JF : « Qu’est-ce que je dois offrir quand je me mets à genoux devant le Seigneur, le Dieu très-haut ? Est-ce que je
dois lui offrir des jeunes taureaux et les brûler entièrement en sacrifice ? Est-ce que le Seigneur veut des milliers de
béliers, des milliers et des milliers de torrents d’huile ? Est-ce que je dois offrir mon fils aîné pour qu’il pardonne
mes fautes et mes infidélités ? » (Michée 6, 6 – 7, version Parole de Vie)
Troisième méditation :
CE : Quelle surenchère ! Quel résumé saisissant d’une démarche religieuse fanatique et absurde !
Probablement ému par le rappel des actions extraordinaires du Seigneur à son égard, le peuple s’interroge sur la
meilleure manière de faire quelque chose en retour pour son Dieu. Ce ne sont pas les idées qui manquent.
L’holocauste est le sacrifice le plus généreux, puisqu’il est entièrement brûlé sur l’autel. Le jeune taureau est le
sacrifice de luxe, celui que les riches offrent, de bien plus grande valeur que le mouton ou le chevreau. Les
milliers de béliers, les dizaines de milliers de torrents d’huile… Les chiffres manquent ! Le sang dégouline de
partout. L’huile ruisselle. Dans le cadre de la religion antique, où les sacrifices et les offrandes en nature
abondent, on est dans l’escalade religieuse. Une escalade religieuse qui mène où ?
A l’absurde, à l’abomination. Au sacrifice d’enfant, surtout au sacrifice du fils aîné. Le sacrifice de ce qui m’est
plus précieux que ma propre vie. Comme si ce sacrifice suprême pouvait effacer ma transgression, mon péché.
A de multiples reprises, dans la Bible, le sacrifice d’enfant est interdit, condamné, odieux, impensable, alors
qu’il est pratiqué par les peuples voisins de l’Israël antique. Dans son affolement religieux, dans son désir
obsessionnel de réparer, dans son fanatisme, l’homme propose à Dieu la chose la plus abominable, celle que le
Seigneur interdit pourtant avec le plus de fermeté.
Que faire de ces versets aujourd’hui où les sacrifices sanglants n’existent plus ? Qu’est-ce aujourd’hui que la
surenchère religieuse ? Qu’offrons-nous à Dieu qui soit le pur produit de notre affolement ? Comment
cherchons-nous à satisfaire ce que nous imaginons des exigences divines ?
Même s’il y a longtemps qu’on ne parle plus de sacrifice et de sang qui coule, je pense que le cœur humain a
aujourd’hui les mêmes angoisses qu’autrefois. Je pense que Dieu fait toujours peur, c’est pour ça peut-être
qu’on essaie de ne pas croire en son existence. Je pense qu’on cherche toujours et encore à amadouer Dieu, à se
le concilier, à se le rendre favorable par notre soumission, par notre obéissance, par le sacrifice de soi-même à
défaut du sacrifice d’un taureau. Je pense qu’encore aujourd’hui le sentiment religieux nous conduit à multiplier
les efforts et les tortures intérieures pour réparer nos fautes, pour effacer notre culpabilité.
Musique : Michael Nyman – CD La leçon de piano plage 2 "Big my secret". Virgin Records 1993
La voie fanatique du « il faut absolument faire quelque chose de grand pour Dieu » mène à l’impasse.
L’obsession religieuse qui croit qu’il faut sacrifier à Dieu ce qui nous est le plus cher, pour que ce sacrifice ait
de la valeur et soit digne de la grandeur de Dieu, cette obsession religieuse est aux antipodes de la volonté de
Dieu. La volonté de Dieu, elle est clairement rappelée par Michée :
Quatrième lecture biblique :
JF : « Le Seigneur te fait savoir ce qui est bien. Voici ce qu’il demande à tout être humain :
Faire ce qui est juste, aimer, agir avec bonté et vivre avec son Dieu dans la simplicité »
(Michée 6, verset 8, version Parole de Vie)
Quatrième méditation :
CE : Dans cette magnifique parole du Seigneur, il n’y a aucune trace d’angoisse, aucune ombre d’obsession,
aucune tentative humaine de réparation. Tout est simple, tout est épuré. C’est un chemin de vie, de vie avec
Dieu, et non un chemin de sacrifice et de sang qui coule, de destruction, de mort.
A tout humain sur la face de la terre, Dieu demande la même chose : « ce qui est bien ». Et « ce qui est bien »
est décliné ici en trois mots d’ordre tout simples, universels, transcendant toute culture et toute religion : « faire
ce qui est juste, aimer agir avec bonté et vivre avec son Dieu dans la simplicité ». Au plus profond de soi,
chacun sent combien ces mots sont vrais, combien ils sont justes, combien ils sont porteurs de vie.
Premièrement : « Faire ce qui est juste. » N’est-ce pas là un ingrédient essentiel de la vie de tous les jours ? Le
fondement sur lequel construire nos relations avec les autres ? Il ne s’agit pas d’un acte religieux, mais d’un
comportement ordinaire, d’une éthique de vie. Chacun, là où il est, quelle que soit sa vie, quelle que soit son
intelligence, peut « faire ce qui est juste » dans sa famille, auprès de ses voisins, de ses collègues de travail, de
ses camarades d’études. Simplement mettre de la droiture, de l’équité, de l’honnêteté, de la transparence, de la
dignité dans chacun de nos mots, dans chacune de nos pensées, dans chacun de nos gestes, dans chacune de nos
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attitudes. « Faire ce qui est juste », ce n’est pas forcément être Zorro, mais plus simplement se tenir éloigné des
petitesses, des mesquineries, des trahisons, des lâchetés ordinaires.
Deuxièmement : « Aimer, agir avec bonté. » Une invitation à la douceur, à la bienveillance, à l’intelligence du
cœur, qui s’attache à discerner ce qui sera bon, utile, bienfaisant pour l’autre. Il ne s’agit pas seulement d’agir
avec bonté, ce qui est déjà un principe de comportement magnifique et souvent recommandé dans la Bible, mais
il s’agit aussi d’aimer agir ainsi. L’action bienveillante, le souci de l’autre, l’altruisme ne doivent pas être
pratiqués pour satisfaire, bon gré mal gré, l’exigence divine, mais plutôt parce que cela nous tient à cœur, parce
que nous y sommes poussés par une motivation profonde et véritablement généreuse, parce que nous y trouvons
notre plaisir et notre raison d’être.
Troisièmement : « Vivre avec son Dieu dans la simplicité. » J’aime cette phrase. J’ai envie d’en faire ma devise
personnelle. Elle respire la sérénité, la relation parfaitement apaisée avec Dieu. Elle est concrète, elle tient
compte de la réalité de ma vie, avec ses hauts et ses bas, avec des jours où je m’entends bien avec mon Dieu, où
je le comprends, où je l’aime ; mais aussi avec des jours où je suis un peu fâchée avec mon Dieu, où je ne
ressens pas sa présence, où je me demande ce qu’il fait ou ce qu’il ne fait pas. « Vivre avec son Dieu dans la
simplicité », c’est accepter ce cheminement quotidien, banal, irrégulier, parfois chaotique, vivant quoi !
Musique : César Franck. CD Heavenly voices plage 7 "Alléluia du Chœur de Pâques". EMI classics 2004
Prière :
CE : Seigneur, tu es tout et nous si peu, mais tu nous aimes tels que nous sommes.
Tu sais que nous ne sommes pas des anges parfaits, mais tu nous cherches quand nous nous cachons,
tu nous appelles quand nous nous éloignons. Tu nous veux près de toi, avec toi, dans ta famille.
Seigneur, tu fais tout et nous si peu, mais tu agrées, tu encourages ce peu que nous faisons. Tu nous
veux actifs, engagés, attentifs aux besoins de l’autre et prompts à nous mettre en mouvement. Tu sais
que c’est en œuvrant que nous trouvons le bonheur et l’épanouissement.
Seigneur, tu peux tout et nous si peu, mais tu supplées notre impuissance. Quand nous ne pouvons
plus, tu es là pour nous tenir debout, pour restaurer nos forces. Tu nous veux vivants et audacieux pour
toi.
Seigneur, tu aimes tant et nous si peu, mais tu accueilles nos pauvres témoignages de gratitude. Quand
nous t’aimons insuffisamment, tu pardonnes. Quand nous aimons insuffisamment notre frère, tu nous
encourages et tu prends toi-même soin de lui. Tu nous veux aimants, car l’amour fait vivre le monde.
Ouvre nos cœurs à la bonté.
Au nom de Jésus, qui a révélé la profondeur de ton amour.
Amen.
Bénédiction :
CE : « Que le Seigneur vous bénisse et vous protège !
Que le Seigneur fasse briller sur vous son visage et qu’il ait pitié de vous !
Qu’il vous regarde avec bonté et qu’il vous donne la paix » (Nombres 6, 24 - 26, version Parole de vie)
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