Départdesjeunesàl`étranger: lesentreprisess`alarment
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Départdesjeunesàl`étranger: lesentreprisess`alarment
L’EMPRISE RUSSE SUR LA CRIMÉE S’AMPLIFIE GERARD MORTIER, RIDEAU NOIR PSG: les grandes ambitions de Laurent Blanc INTERNATIONAL – LIRE PAGE 2 SPORT – LIRE PAGE 15 CULTURE – LIRE PAGE 12 Mardi 11 mars 2014 - 70e année - N˚21506 - 2 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Télécoms: restructuration à hauts risques B ien dans sa manière, Arnaud Montebourg n’y est pas allé par quatre chemins. Depuis que Vivendi a décidé de vendresa filiale SFRet déclenchéde grandes manœuvres sur le marché français des télécommunications,sa religion est faite. Le ministre du redressement productif l’a affirmé dans un entretien au Parisien, dimanche 9 mars. Il estime que c’était « une erreur » d’avoir autorisé, il y a quatre ans, l’arrivée d’un quatrième acteur – Free, en l’occurrence – dans le secteur de la téléphonie mobile. « La concurrence par la destruction s’arrêtera si on revient à trois opérateurs mobiles tout en maintenant les prix bas », assure-t-il. Leministreaffiche doncsans grande ambiguïté sa préférence entre les deux candidats au rachat de SFR. Si Numericable l’emporte, note-t-il, il resteraquatreopérateursde téléphonie mobile. En revanche, si c’est Bou- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directrice : Natalie Nougayrède Départ des jeunes à l’étranger: les entreprises s’alarment t Lemouvement d’expatriation desjeunes cadres s’accélère, selon lachambre de commerce et d’industrie de Paris I l ya un changement majeurde comportement parmi les jeunes générations, avec une nette accélération de leur mobilité », relève un rapport de la chambre de commerce et d’industrie de Paris- Ile-de-France, qui sera rendu public mercredi12 mars.« Chômage et morositépoussent les jeunes au départ », ajoutent les auteurs. Le baromètre 2014 réalisé par l’IFOP pour le cabinet Deloitte avait déjà montré un doublement de la part des jeunes diplômés qui voient désormais leur avenir à l’étranger : 27 %, contre 13 % en 2012. La CCIP souligne également que les expatriés sont moins pressés de rentrer. 38 % envisagent désormais « un séjour de plus de dix ans ». Le député UMP Luc Chatel défendra, le 8 avril, la création d’une commission à l’Assemblée nationale sur ce phénomène. p LIRE CAHIER ÉCO P. 3 Municipales Maires PS, maires UMP, quelles différences ? À FUKUSHIMA , DES VIVANTS PARMI LES FANTÔMES t Trois ans après la catastrophe nucléaire au Japon, la région tente de revivre, entre territoires interdits et zones en voie de décontamination LIRE PAGE 4 t Fiscalité, transports, sécurité : bilan comparé A u-delà des discours d’estrades électorales, une grande convergence apparaît entre la gauche et la droite en matière de gestion municipale. Plus les villes sont grandes, plusl’actionparaît standardisée.La crise économique et la montée en puissance de l’intercommunalité y ont contribué, de même que la professionnalisationde laclassepolitique locale. p LIRE PAGES 6 ET 8 ÉDITORIAL Malgré l’impopularité du gouvernement et les divisions à droite, les risques d’alternance sont faibles, estime pour sa part Martial Foucault, directeur du Cevipof. Trente ville de plus 30 000 habitants pourraient toutefois baculer à droite. p LIRE PAGE 18 A Iwaki, le 8 mars, le recueillement des familles face à la mer. AFP AUJOURD’HUI Le mystère du vol MH370 « Longues peines » : le dur chemin vers la liberté Les causes de la disparition du Boeing de Malaysia Airlines restent inconnues, trois jours après les faits. Des morceaux de carlingue auraient été repérés. La piste terroriste est envisagée. Comme Philippe El Shennawy, les condamnés à plus de 15 ans de prison rencontrent les pires difficultés pour obtenir une libération conditionnelle. Enquête. INTERNATIONAL – PAGE 3 FRANCE – PAGE 9 14-18 LE JOURNAL DU CENTENAIRE LES FILMS DU POISSON ET SAMPEK PRODUCTIONS PRÉSENTENT ‘‘ Infiniment émouvant ’’ ‘‘ Une merveille ’’ Les causes de la guerre a Selon les historiens, la responsabilité allemande est privilégiée ou relativisée SUPPLÉMENT LES INROCKUPTIBLES ‘‘ Un petit miracle ’’ PREMIÈRE H H H STUDIO CINÉ LIVE H H H ‘‘ Bouleversant ’’ ARTE LA COUR DE BABEL un film de Julie Bertuccelli LE REGARD DE PLANTU © ILLUSTRATION : CHRISTOPHE BLAIN UK price £ 1,80 ygues Telecom, les consommateurs n’aurontplus le choix qu’entreOrange, toujours numéro un du marché, un ensemble Bouygues-SFR et Free Mobile. Un opérateur de moins, cela va mettrefin à la cassesociale, veut croire M. Montebourg. De fait, l’arrivée de Free Mobile, avec ses offres « low cost », en janvier 2012, a provoqué une féroce guerre des prix dont les opérateurs historiques ne sont toujours pas remis. Leurs résultats financiers ont été sévèrement affectés et l’emploi a durement souffert. Le ministre escompte, enfin, que la restructuration du secteur va permettre de remuscler les trois acteurs restants et leur donner les moyens de construire partout en France – et pas seulement dans les grandes métropoles – un réseau fixe à très haut débit en fibre optique, comme le gouvernement s’y est engagé. Onaimerait que le ministre ait raison. Mais rien n’assure que la restructuration en cours débouchera sur un paysage plus réjouissant qu’actuellement. A quoi ressemblait, en effet, le marché des télécoms avant l’irruption de Free Mobile ? A un oligopole : trois opérateurs aux profits obèses, qui maintenaient des prix trop élevés et qui s’étaient entendus pendant des années sur leurs tarifs, avant d’être sanctionnés par une amende record (534 millions d’euros) de l’Autorité de la concurrence, en 2005. Or rien ne garantit que l’on ne retombera pas dans ces travers, au grand dam des consommateurs. L’exemple de l’Autriche est éloquent : jusqu’à l’an dernier, quatre opérateurs y ferraillaient férocement, avant que l’un d’entre eux se fasse absorber par un concurrent. Depuis, les prix ont augmenté de près de 20 % ! Quant à l’emploi, c’est l’évidence que les sociétés concernées par la réorganisation en cours comptent beaucoup de doublons dans leurs équipes. En dépit des engagements pris aujourd’hui par les uns ou les autres, rien n’indique que l’ensemble de toutes ces équipes resteront en place à l’avenir. Mais il sera alors trop tard pour se désoler. p AU CINÉMA LE 12 MARS LIRE CAHIER ÉCO P. 4, 5 ET 10 Algérie 150 DA, Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤, Autriche 2,50 ¤, Belgique 2 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤, Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA 2 international 0123 Mardi 11 mars 2014 Moscou resserre son emprise sur la Crimée Alors que Vladimir Poutine promet une solution diplomatique, l’armée russe a pris le contrôle de bases ukrainiennes Moscou Correspondante T andis que le président russe, Vladimir Poutine, s’évertuait, dimanche 9 mars, à rassurer ses homologues occidentaux Angela Merkel et David Cameron, leur certifiant par téléphone qu’il voulait« trouverunesolutiondiplomatique» à la crise, ses soldats renforçaient leur emprise sur la Crimée, où les autorités locales inféodées au Kremlin ont annoncé pour le 16 mars la tenue d’un référendum sur le rattachement de la péninsule ukrainienne à la Russie. Samedi et dimanche, les forces russes à l’œuvre en Crimée se sont emparées de plusieurs bases militaires ukrainiennes – celles des garde-frontières de Tchernomorskoe, de Chkolkino et la station radio près de Sébastopol. Selon les gardefrontières ukrainiens, la Russie contrôle désormais onze postesfrontières en Crimée. « Un nouvel Etat est apparu avec lequel nous n’avons signé aucun document contraignant » Vladimir Poutine Quelque 30 000 soldats russes, dépourvusd’insignesdereconnaissance mais équipés de matériel lourd parfaitement reconnaissable, sont désormais présents dans la péninsule, toujours selon les garde- frontières ukrainiens. Tout récemment, hommes et véhicules ont été acheminés par le détroit de Kertch, qui sépare la CriméedelaFédérationdeRussie.Soucieux de jouir d’une plus grande liberté de mouvement, les militaires russes ont mis la main sur un terminal de ferries à Kertch, ce qui leur permet de faire entrer tout le matériel qu’ils souhaitent. Lors de sa conférence de presse du 4 mars, Vladimir Poutine avait nié la présence de forces russes en Crimée, assurant que les hommes en uniformes aperçus encerclant les unités de l’armée ukrainienne étaient des « forces locales d’autodéfense» qui auraient acheté leurs uniformes « dans des magasins». Les camions et les blindés, toutefois, sont immatriculés en Russie. Certains observateurs ont même remarqué la présence du bataillon tchétchène Vostok, utilisé en 2008 pour conquérir la province géorgienne d’Ossétie du Sud. Sans aucun doute possible, des unités russes maintiennent le blocus des bâtiments administratifs de Simferopol, la capitale de la Crimée, ainsi que le siège d’une dizaine d’unités de l’armée et des garde- Femmes de Simferopol Oksana Statsenko, 22 ans, étudiante : « Ma mère est ukrainienne, mon père est bachkir. Je sais que je défends un point de vue utopique, mais je voudrais que l’Ukraine ne dépende ni de la Russie ni de l’Union européenne. Je ne vais pas voter au référendum, que je considère comme illégal. S’il frontières ukrainiens, encerclées et privées d’eau et d’électricité. Signe que l’occupation est prévuepourdureretqueMoscoun’entend pas relâcher son étreinte, des soldats russes ont été vus posant des mines dans les régions ukrainiennes qui bordent la Crimée, notamment à Kherson. Des postes de contrôles ont été installés sur les routes menant à la péninsule. Les observateursinternationauxdépêchés par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ont été empêchés d’entrer en Crimée par des hommes armés et en treillis, samedi. Soucieux de faire oublier l’occupation militaire, Vladimir Poutine etSergueïLavrov,lechefdeladiplomatie, insistent sur le caractèreillégitime des nouvelles autorités de aboutit au rattachement à la Russie, je quitterai la Crimée et rejoindrai l’Ukraine.» Nina Fisenko, 21 ans, femme au foyer: «Je suis russe. Je n’accepte pas le nouveau gouvernement, qui s’est emparé du pouvoir à Kiev. Mais je ne veux Kiev, avec lesquelles ils refusent tout contact. «Nos experts estiment qu’un nouvel Etat est apparu [en Ukraine] avec lequel nous n’avons signé aucun document contraignant », a insisté M. Poutine, le 4mars. Ainsi, le maître du Kremlin se désengage du mémorandum de Budapest, signé en 1994 par la Russie, l’Ukraine, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne dans le cadre du démantèlement nucléaire des ex-républiques de l’URSS. Garante de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, la Russie profite des changements à Kiev pour mettre la main sur la Crimée, qui lui permet de contrôlerl’accèsaux merschaudes. Cette politique d’expansion territoriale est chère à Vladimir Poutine. L’ancien agent du KGB (services secrets et police politique) est ani- mé par une vision géopolitique héritée du XIXe siècle, selon laquelle plus un pays possède des terres plusilestpuissant.Sansse préoccuper du niveau de développement sur ces terres, l’important est d’y maintenir des troupes d’occupation. C’est le cas en Abkhazie et en Ossétie du sud. Captées à la faveur de la guerre de 2008, ces régions géorgiennessont des zones de nondroit, épicentres de tous les trafics (armes, drogues, blanchiment). Marquéparsa formationàl’époque du KGB, le président russe ne peut concevoir qu’une partie des Ukrainiens veuille vivre comme en Pologne ou en Estonie. Pour lui, le changementdepouvoiràKievaforcément été fomenté par les Occidentaux: « Ce n’est pas la première fois que nos partenaires européens pas non plus du retour des anciens dirigeants. La Russie, c’est la stabilité, je voterai en faveur du retour de la Crimée dans le giron russe.» p Pendant une semaine, la photographe Maria Turchenkova parcourt la Crimée pour Le Monde. fontcelaenUkraine.J’aiparfoisl’impressionqu’auxEtats-Unis,des gens installés dans des laboratoires conduisent des expériences comme ilsleferaientsurdesrats,sansserendre compte de ce qu’ils font.» Le point culminant de la captation de la Crimée interviendra le 16mars, lors du référendum sur le rattachement de la péninsule à la Russie.VotéparleparlementdeCrimée dans des conditions douteuses – absence de quorum, texte de la résolution tenu secret, présence de forcesarméesdansl’enceintedu parlement – la tenue du référendum est décrite à Moscou comme «un moment historique». Sa légalité ne fait aucun doute. « Il y aura bienunréférendumenEcosse,pourquoi pas en Crimée ? », a souligné Valentina Matvienko, présidente du Sénat russe. Des députés russes ont demandé à la Banque centrale que le rouble entre en circulation en Crimée sitôt après le vote. «Dans pas mal d’endroits du globe,le droitdespeuplesà l’autodétermination a été reconnu par les Nations unies», rappelait Vladimir Poutinele4mars.Pourtant,laFédérationdeRussieestdotéede«21Crimées», soit les 21 républiques autonomes (Tchétchénie, Ingouchie, Carélie, Bachkirie, Oudmourtie…) qui pourraient, un jour, exiger la tenue d’un référendum d’autodétermination, sans parler des îles Kouriles ou de l’enclave de Kaliningrad (Köenigsberg dans l’ancienne Prusse orientale), qui pourraient demander leur rattachement au Japon ou à l’Allemagne. p Marie Jégo L’argent russe de «Londongrad» influence le pouvoir britannique Londres Correspondance Ce sont les appartements les plus chers et les plus luxueux de Londres. Leurs baies vitrées ultramodernes offrent une vue imprenable sur Hyde Park. Un couloir souterrain les relie au Mandarin Oriental, le palace où officie le chef étoilé Heston Blumenthal. Au total, les 76 logements de One Hyde Park, un bâtiment conçu par le célèbre architecte Richard Rogers, se sont vendus pour 1,7milliard d’euros, soit 22 millions chacun en moyenne, selon une enquête de Nicholas Shaxson, auteur d’un livre sur les paradis fiscaux. C’est ici que des Ukrainiens proeuropéens ont choisi de manifester à plusieurs reprises ces derniers mois. Parmi les propriétaires de ce temple du luxe se trouve Rinat Akhmetov, l’homme le plus riche d’Ukraine, politiquement très influent. Sa fortune, dans les mines et l’acier, est estimée par Forbes à 12,5 milliards de dollars (9 milliards d’euros). Il est loin d’être le seul représentant de la sphère d’influence russe à avoir investi à One Hyde Park. Irina Viktorovna Kharitonina et Viktor Kharitonin, les copropriétaires d’une grande entreprise pharmaceutique russe, y ont deux appartements. Le magnat de l’immobilier Vladislav Doronin est un de leurs voisins. Quant à Alastair Tulloch, un avocat britannique proche des milieux russes, il est le prête-nom de quatre appartements, dont le réel propriétaire est caché derrière une structure juridique opaque. La capitale britannique est la place financière incontournable des oligarques russes et de tous les pays de l’ex-URSS, au point d’être parfois surnommée « Londongrad». Les acheteurs russes comp- tent pour 10% des résidences de grand luxe, selon l’agence immobilière Knight Frank. La chambre decommerce de la Haute Cour britannique est prise 60 % du temps par des dossiers venant de Russie ou d’Europe de l’Est. L’extraordinaire procès entre Roman Abramovitch, propriétaire de l’équipe de football de Chelsea, et Boris Berezovski, opposant notoire à Vladimir Poutine, mort l’an dernier, s’était aussi déroulé à Londres. « Beaucoup d’oligarques apportent à Londres de vastes quantités d’argent et utilisent cette ville comme base pour gérer leur fortune personnelle », estime John Christensen, de l’association Tax Justice Network. Selon lui, une large partie de ces sommes relève du blanchiment d’argent. Un banquier d’affaires londonien, spécialisé dans les affaires russes, confirme à demi-mots. « Beaucoup des activités russes sont légitimes, et le blanchiment ne se fait pas nécessairement à Londres, parce que c’est trop visible, mais c’est effectivement là que se trouvent les avocats, les juristes et les conseillers.» Les oligarques bien intégrés Impossible de quantifier précisément le phénomène, puisqu’il s’agit d’argent illégal. Mais la banque centrale russe elle-même estime que les deux tiers des capitaux qui sortent du pays sont issus d’activités illicites. Selon Tax Justice Network, la fuite des capitaux de Russie en trente ans s’élève à 798milliards de dollars. Autre indice : les principaux investissements étrangers en Russie viennent de Chypre, des îles Vierges britanniques, des Bermudes et des Pays-Bas (via les Antilles néerlandaises), des paradis fiscaux, dont plusieurs dépendent directement de Londres. « En grande partie, c’est de l’argent blanchi qui revient en Russie», accuse Ben Judah, auteur d’un livre sur Vladimir Poutine. Même les oligarques s’accusent entre eux. Alexander Lebedev, qui a fait fortune dans la finance et qui possède les quotidiens britanniques Evening Standard et The Independent, a publié, le 26 février, une tribune dans le New York Times. Il y cite notamment comme « vivant de [ses] crimes » Andrei Borodin, ex-patron de la Banque de Moscou installé au Royaume-Uni. Ce dernier rejette toute accusation de corruption. Selon M. Judah, l’argent russe influence désormais le pouvoir britannique. Il souligne que les oligarques se sont bien intégrés à la haute société britannique, notamment en inscrivant leurs enfants dans les écoles privées les plus chères. On compte 2 150 enfants russes dans les pensionnats les plus chic, soit des frais de scolarité d’environ 70 millions d’euros par an. « L’élite britannique a une mentalité de hedge fund. Elle ne produit rien, mais vit d’une rente qu’elle prend sur l’argent étranger, notamment de Russie», accuse Ben Judah. Pas question, dans ces conditions, de prendre des sanctions qui pourraient affaiblir la City. Lundi 3 mars, Hugh Powell, conseiller à la sécurité nationale, l’a révélé involontairement. Quand ce haut fonctionnaire s’est rendu chez le premier ministre britannique, David Cameron, le mémo qu’il tenait a été photographié au téléobjectif: il y était notamment écrit que le Royaume-Uni ne devait pas «fermer le centre financier de Londres aux Russes». Une approche qui exaspère M. Judah: «Tant que le Royaume-Uni continue à blanchir de l’argent, il demeure un partenaire de la Russie. » p Eric Albert 0123 international Mardi 11 mars 2014 3 Lemystèreduvol MH370,disparu aulargeduVietnam, resteentier Une enquête pour «terrorisme» a été ouverte en raison de la présence de passagers suspects Bangkok Correspondant régional P lus de quarante-huit heures après sa disparition, on restait encore sans nouvelles, lundi 10 mars au matin, du vol MH370 de la Malaysia Airlines qui s’est comme évaporé dans la nuit de vendredi à samedi au large des côtes du Vietnam, avec 227 passagers (dont 4 Français) et 12 membres d’équipage à son bord. Samedi, un peu avant 1 heure (heure locale), ce vol à destination de Pékin, qui avait décollé deux heures plus tôt de Kuala Lumpur, a brusquement disparu des écrans radars au large des côtes vietnamiennes. Au fur et à mesure que les heures passent, différentes hypothèses sont envisagées, y compris la pisteterroriste,unespéculationalimentée par la présence dans le Vers Pékin CHINE Hanoï L AOS VIETNAM THAÏL ANDE CA MBODGE Mer de Chine méridionale Hô Chi Minh-Ville Iles Tho Chu MALAISIE 250 km Kuala Lumpur Boeing 777-200 de deux passagers voyageant avec des passeports volés. Dimanchesoir,desavionsdel’armée de l’air vietnamienne ont signalé avoir aperçu des objets flottants mal identifiés, qui pourraient ressembler à des morceaux de carlingue au large des îles de Tho Chu, non loin de la péninsule de Ca Mau, la région la plus méridionale du Vietnam. La veille, des traînées d’huile sur la mer avaient été repérées par des avions vietnamiens. Selon une source de l’aviation civile malaisienne citée lundi par le quotidien thaïlandais Bangkok Post, le fait qu’aucune preuve tangible d’une trace du Boeing n’ait été trouvée semble indiquer que l’appareil s’est « probablement désintégré à une hauteur de 35 000pieds [10 600mètres]». L’avion, en service depuis plus de onzeans et qui avaitété inspecté il y a une dizaine de jours, devait, peu avant l’heure de son crash présumé, entrer en contact avec les contrôleurs aériens de l’aéroport d’Ho Chi Minh-Ville (ex-Saïgon). Mais ces derniers n’ont jamais reçu d’appel du vol MH370. Pour l’instant, rien n’explique comment un avion réputé très sûr, appartenant à une compagnie aérienne fiable, dont le dernier accident majeur remonte à 1977 – un appareil s’était écrasé dans le sud de la Malaisie après un détournement, faisant 100morts –, ait ainsi pu disparaître dans le golfe de Thaïlande, par temps calme, de nuit. Seulement 9 % des accidents mortels se produisent quand Des journalistes survolent, dimanche 9 mars, le golfe de Thaïlande, où l’avion de la Malaysia Airlines se serait écrasé. HOANG DINH NAM/AFP l’avion est à l’altitude de croisière, selon un résumé statistique des accidents d’avions commerciaux établipar Boeing.MalaysiaAirlines a cependant indiqué dimanche que l’avion disparu avait eu une aile endommagée en 2012, mais que l’appareil ne présentait aucun défaut qui aurait rendu son pilotage hasardeux. L’absence de tout contact radio « suggère que quelque chose de très soudain et de très violent s’est produit », a avancé un spécialiste américain des accidents d’avion, William Waldock, cité dimanche dans le Bangkok Post. Les autorités malaisiennes ont lancé une enquête pour « terrorisme » après la découverte qu’au moins deux passagers voyagaient avecdespasseportsvolés.Lesdocuments portaient le nom d’un Autrichien, Christian Kozel, qui s’était fait voler son passeport en Thaïlande en 2012; le second, un Italien du Tensionau Salvadoraprèsdes résultats provisoirestrès serrésà la présidentielle Le candidat du FMLN (gauche) avait frôlé la victoire au premier tour San Salvador Envoyé spécial L a tension était palpable, dimanche 9 mars, au soir du secondtourdel’électionprésidentielle au Salvador, où les deux candidatsen lice se sont proclamés vainqueurs. Le président du Tribunal suprême électoral (TSE), Eugenio Chicas, a ordonné, sans succès, aux deux partis politiques d’attendre les résultats définitifs avant de se proclamer vainqueurs. Selon les résultats provisoires portant sur 99,9 % des suffrages, Salvador Sanchez Ceren, candidat du Front Farabundo Marti de libération nationale (FMLN, gauche, au pouvoir), disposait d’une très faible avance, obtenant 50,11 % des voix, contre 49,89 % pour Norman Quijano de l’Alliance républicaine nationaliste (Arena, droite). Face à la différence minime, de 6357 voix sur près de 3 millions de suffrages exprimés, inférieure au nombrede bulletinsnuls et contestés, M. Chicas a annoncé qu’il se réunirait avec les deux candidats pour leur expliquer le mécanisme de décompte définitif. « Nous n’allons pas permettre que le tribunal électoral nous vole notre victoire », s’est exclamé M. Quijano, ancien maire de San Salvador, âgé de 67 ans, en fin de soirée devant une foule de partisans. « Nous n’allons pas permettre des fraudes style Chavez ou Maduro», a-t-il poursuivi, en référence à l’ancien et à l’actuel président du Venezuela. Il a mis en cau- se l’impartialitédu tribunal« acheté et corrompu». « Notre décompte établit clairement que nous avons gagné », a-t-il dit avant de menacer : « Nos forces armées sont attentives face à cette fraude. » « Nous avons à nouveau triomphé à l’issue de ce second tour », a proclamé M. Sanchez Ceren deux heures plus tard, devant plusieurs milliersde militantsde gaucheagitant des drapeaux rouges et scandant : « Le peuple uni ne sera jamais vaincu. » « La tendance des résultatspréliminairesest irréversible», a-t-il ajouté. Surprise Anciencommandant guérillero âgé de 69 ans, signataire des accords de paix qui ont mis fin à la guerre civile qui a fait plus de 75 000 morts entre 1980 et 1992, Salvador Sanchez Ceren a annoncé que le président Mauricio Funes avait pris des mesures « avec la police nationale civile pour garantir la tranquillité du peuple salvadorien». S’adressant à l’opposition, M. Sanchez Ceren lui a demandé de « rester tranquille et de respecter la volonté du peuple salvadorien». « Le modèle salvadorien est salvadorien, nous n’allons copier aucun modèle étranger », a-t-il affirmé. Durant la campagne, son adversaire l’avait accusé de s’inspirer du « socialisme du XXIe siècle », inventé par l’ancien président vénézuélien Hugo Chavez. M. Sanchez Ceren a annoncé que son gouvernement agirait en faveur de l’union de l’Amérique latine et des Caraïbes et maintiendrait « des relations étroites et de respect mutuel avec le peuple et le gouvernement des Etats-Unis». La journée électorale s’est dérouléedans lecalme. A Soyapango, une banlieue pauvre de la capitale, de nombreux électeurs s’affichaient avec des chemises rouges, la couleur du FMLN. L’ambiance était bon enfant dans cette banlieue où les maras (gangs) contrôlent plusieurs quartiers. Les deux candidats ont commencé la journée par une messe. M. Sanchez Ceren, marxiste et catholique pratiquant, a prié dans la chapelle de la Divine-Providence, où Mgr Oscar Romero, l’archevêque de San Salvador, avait été assassiné en 1980. Ce crime a été attribué aux escadrons de la mort formés par Roberto D’Aubuisson, le fondateur d’Arena. Les résultats ont surpris : le candidat du FMLN avait frôlé la victoire dès le premier tour, le 2 février, devançant M. Quijano de dix points, et les derniers sondages lui donnaient une confortable avance. « Le FMLN avait fait le plein au premier tour et Arena a mobilisé les abstentionnistes et une bonne partie des électeurs de droite qui avaientvoté pour Tony Saca, arrivé en troisième position avec 11 % des suffrages », analysait Salvador Samayoa, un ancien dirigeant de la guérilla devenu consultant et éditorialiste dans un quotidien de droite. p Jean-Michel Caroit nom de Luigi Maraldi, avait aussi signalés’êtrefaitdérobersonpasseportenThaïlande,en2013.Leministre des transports, Hishammuddin Hussein, a confirmé que deux autres passagers potentiellement suspects avaient été identifiés. Selon des experts, l’absence de contact radio «suggère que quelque chose de très soudain et de très violent s’est produit» Lundi, la police thaïlandaise a annoncé mener une enquête après avoir appris que les billets portant les noms des deux passagers à la fausse identité avaient été émis dans la ville de Pattaya le 6 mars. Les billets indiquaient que les deux passagers avaient pour destination Amsterdam et Copenhague via Pékin, un itinéraire plutôt étrange pour se rendre de Malaisie en Europe du Nord… Et le ministère de l’intérieur de Malaisie a annoncé lundi que les deux voyageurs en questionavaient« destraitsasiatiques». Alors que le FBI a fait savoir qu’il étaitprêtà fournirsonaide,des responsables du département de la sécurité intérieure des Etats-Unis ontconfiéauLos AngelesTimesque la possibilité d’une piste terroriste allait être examinée, tout en ajoutant : « Le fait que deux passagers aient embarqué avec des passeports volés ne signifie en rien qu’ils soient terroristes.» Interrogé sur ces hypothèses d’attentat, le premier ministre de Malaisie, Najib Razak, a déclaré : «Nous envisageons toutes les possibilités, mais il est encore trop tôt pour spéculer. » Dans cette zone maritime disputée entre plusieurs pays de la région et la Chine, plusieurs protagonistes ont mis temporairement de côté leurs revendicationsterritorialeset ont uni leurs efforts pour retrouver le Boeing 777: la Chine, le Vietnam, la Malaisie, les Philippines et Singapour ont dépêché dans la zone des bateaux et des avions. Les autorités malaisiennes ont par ailleurs évoqué, dimanche, la possibilité que le vol MH370 ait pu tenter, pour des raisons inconnues, de retourner se posersur l’aéroport international de Kuala Lumpur. « Il y a une forte possibilité que l’avion ait fait demi-tour», a avancéle chef d’état-major de l’aviation malaisienne, le général Rodzali Daud. Il resterait, dans cette hypothèse, à comprendre pourquoi les pilotes n’ont pas prévenu qu’ils amorçaient une telle manœuvre. p Bruno Philip - CESSATIONS DE GARANTIE LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 QBE FRANCE, sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08 ( RCS Paris 414 108 708), succursale de QBE Insurance (Europe) Limited, Plantation Place dont le siège social est à 30 Fenchurch Street, London EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie financière dont bénéficiait la : AGUELMIN IMMOBILIER SARL 63 rue saint Gabriel 59000 LILLE - RCS: 527 730 717 depuis le 1er janvier 2011 pour ses activités de : TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE cessera de porter effet trois jours francs après publication du présent avis. Les créances éventuelles se rapportant à ces opérations devront être produites dans les trois mois de cette insertion à l’adresse de l’Etablissement garant sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08. Il est précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-paiement des sommes dues et ne peut en aucune façon mettre en cause la solvabilité ou l’honorabilité de la SARL AGUELMIN IMMOBILIER. LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 QBE FRANCE, sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08 ( RCS Paris 414 108 708), succursale de QBE Insurance (Europe) Limited, Plantation Place dont le siège social est à 30 Fenchurch Street, London EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie financière dont bénéficiait la : BEST ONE REVENTE SARL 1443 route de Toulouse 31600 SEYSSES - RCS : 531 337 905 depuis le 1er avril 2013 pour ses activités de: GESTION IMMOBILIERE depuis le 1er janvier 2011 pour ses activités de : TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE cessera de porter effet trois jours francs après publication du présent avis. Les créances éventuelles se rapportant à ces opérations devront être produites dans les trois mois de cette insertion à l’adresse de l’Etablissement garant sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08.Il est précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-paiement des sommes dues et ne peut en aucune façon mettre en cause la solvabilité ou l’honorabilité de la SARL BEST ONE REVENTE. LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 QBE FRANCE, sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08 ( RCS Paris 414 108 708), succursale de QBE Insurance (Europe) Limited, Plantation Place dont le siège social est à 30 Fenchurch Street, London EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie financière dont bénéficiait : Mme Liliane GRATTON 5 rue des Lauriers 31650 SAINT ORENS DE GAMEVILLE RCS : 319298303 depuis le 01 Janvier 2004 pour son activité de: TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE cessera de porter effet trois jours francs après publication du présent avis. Les créances éventuelles se rapportant à ces opérations devront être produites dans les trois mois de cette insertion à l’adresse de l’Etablissement garant sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08. Il est précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-paiement des sommes dues et ne peut en aucune façon mettre en cause la solvabilité ou l’honorabilité de Mme Liliane GRATTON. LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 QBE FRANCE, sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08 ( RCS Paris 414 108 708), succursale de QBE Insurance (Europe) Limited, Plantation Place dont le siège social est à 30 Fenchurch Street, London EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie financière dont bénéficiait la : Monsieur Jérémy MATHIEU 31 avenue Gambetta 83400 HYERES RCS: 530 435 551 depuis le 1er avril 2011 pour ses activités de : GESTION IMMOBILIERE cessera de porter effet trois jours francs après publication du présent avis. Les créances éventuelles se rapportant à ces opérations devront être produites dans les trois mois de cette insertion à l’adresse de l’Etablissement garant sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08. Il est précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-paiement des sommes dues et ne peut en aucune façon mettre en cause la solvabilité ou l’honorabilité de Monsieur Jérémy MATHIEU. LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 QBE FRANCE, sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08 ( RCS Paris 414 108 708), succursale de QBE Insurance (Europe) Limited, Plantation Place dont le siège social est à 30 Fenchurch Street, London EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie financière dont bénéficiait la : NEOCOM IMMOBILIER SARL 17 rue du Commodore Hallet 14000 CAEN - RCS: 752 700 922 depuis le 1er octobre 2012 pour ses activités de : TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE cessera de porter effet trois jours francs après publication du présent avis.Les créances éventuelles se rapportant à ces opérations devront être produites dans les trois mois de cette insertion à l’adresse de l’Etablissement garant sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08.Il est précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-paiement des sommes dues et ne peut en aucune façon mettre en cause la solvabilité ou l’honorabilité de la SARL NEOCOM IMMOBILIER. LOI DU 2 JANVIER 1970 - DECRET D’APPLICATION N° 72-678 DU 20 JUILLET 1972 - ARTICLES 44 QBE FRANCE, sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08 ( RCS Paris 414 108 708), succursale de QBE Insurance (Europe) Limited, Plantation Place dont le siège social est à 30 Fenchurch Street, London EC3M 3BD, fait savoir que, la garantie financière dont bénéficiait la : SARL IMMOBILIERE OTT 30 rue de la République 67800 HOENHEIM - RCS : 393840244 depuis le 01 Janvier 2004 pour son activité de :TRANSACTIONS SUR IMMEUBLES ET FONDS DE COMMERCE cessera de porter effet trois jours francs après publication du présent avis.Les créances éventuelles se rapportant à ces opérations devront être produites dans les trois mois de cette insertion à l’adresse de l’Etablissement garant sis Etoile Saint-Honoré – 21 Rue Balzac – 75406 Paris Cedex 08. Il est précisé qu’il s’agit de créances éventuelles et que le présent avis ne préjuge en rien du paiement ou du non-paiement des sommes dues et ne peut en aucune façon mettre en cause la solvabilité ou l’honorabilité de la SARL IMMOBILIERE OTT. 4 0123 international & planète Mardi 11 mars 2014 RetourdanslesvillesmortesdeFukushima Trois ans après le séisme et la catastrophe nucléaire au Japon, les territoires contaminés sont tombés dans l’oubli Reportage Préfecture de Fukushima Envoyé spécial D ans le ciel, les corbeaux planent. Des papiers tourbillonnent dans le vent. Le silence pesant des rues sans vie est rompupar une porte qui claqueou des tôles ondulées qui grincent… Depuis trois ans, Tomioka est une ville morte. Cette commune de 16 000 habitants du nord-est du Japonavaitrésistéau puissantséisme du 11 mars 2011, et au tsunami qui l’avait suivi. Mais quelques jours après le tremblement de terre, la population a fui : l’océan avait envahi la centrale de Fukushima-Daiichi, située à une quinzaine de kilomètres, provoquant la catastrophe nucléaire la plus importante depuisTchernobyl(1986).Leshabitants ne sont jamais revenus. «On n’a rien à léguer ànos enfants. Les jeunes partent. Une ville sans les cris des gamins, ce n’est plus une ville » Un restaurateur de Minamisoma Dans la rue principale, on tombe sur une quincaillerie ouverte. Devant la devanture, balais, râteaux et tuyaux d’arrosage ont étésortispour attirerle client,comme si de rien n’était. Chaque jour, le patron de 67 ans est là. Il ouvre son coffre-fort d’un autre âge et fait l’inventaire. Lorsqu’il a fini, il recommence. L’homme vit dans un logement provisoire à Iwaki, à une trentaine de kilomètres. « Je n’ai rien d’autre à faire», dit-il. A l’autre bout de la Nationale 6, qui passe devant l’entrée de la centrale accidentée, une autre petite ville, Okuma (11 500 habitants), est interdite d’accès en raison d’un taux de radioactivité élevé. Avant l’accident, la mairie avait élevé un portique à la gloire de Tepco, l’opérateur de la centrale. Okuma est doublementcondamnée: seshabitants n’y retourneront pas et elle accueillera les déchets irradiés. En d’autres termes, elle est sacrifiée à jamais. Au nord de la centrale, à Namie (20000 personnes), interdite sauf à ses habitants, qui n’ont cepen- Arrêt de bus abandonné dans la ville de Tomioka, à 10 km au sud-est de la centrale de Fukushima-Daiichi. DOMINIC NAHR/MAGNUM dant pas le droit d’y dormir, ce sont les mêmes images de désolation. La zone a été balayée par le tsunami. Alors qu’ailleurs, les gravats ont été déblayés, ici, rien n’a changé depuis trois ans : maisons effondrées, carcasses de voitures défoncées et chalutiers échoués dans les rizières envahies d’herbes géantes. Par endroits, un petit autel bouddhique a été élevé avec de menues offrandes. La centrale est à sept kilomètres. Dans la rue commerçante épargnée par la vague géante, l’entrepôt du distributeur de journaux est rempli des piles ficelées d’exemplaires du quotidien daté du 12 mars 2011, jamais distribués. A la « une », une photo du désastre. « Les sinistrés sont tombés dans l’oubli, dit un restaurateur de Iitate Minamisoma Katsurao Namie JAPON Tomioka Naraha Hirono 10 km de léopard » : zones rouges totalement interdites, zones vertes où l’on peut se rendre sans y dormir et zones orange, en voie de décontamination. En plein milieu d’une zone dite sans danger, on tombe soudain sur des portions de territoire interdites d’accès car hautement contaminées. Dans tous les villages, les habitants s’inquiètent. « Les hirondelles et les moineaux ont disparu, il n’y a plus de grenouilles, des arbres meurent sans que l’on sache pourquoi», dit un ancien fonctionnaire de la mairie d’Iitate (6 000 habitants), à 100 km au nord-est de la centrale. Responsa- ble d’une équipe de décontamination, il préfère garder l’anonymat. « Lesrats et les serpentsse sont multipliés. On voit davantage de faucons. Dans les maisons moisies, qui ont souvent été cambriolées, on ne peut plus vivre. Ici, il n’y a plus d’avenir. » Les sangliers, qui se sont souvent accouplés à des cochons abandonnés dans l’exode, ravagent les campagnes, poursuit-il. Se nourrissant de tout ce qu’ils trouvent, ils sont hautement contaminés. « Dans notre région, on n’avait que la nature, dit Mika Nemoto, une jeune femme du bourg de Miyakoji, dans la petite ville de Une centrale toujours à risques Sur le site nucléaire sinistré, le problème majeur reste la gestion de l’eau contaminée, dont le volume ne cesse d’augmenter, les réacteurs devant être refroidis en continu. Plus de 430 000 m3 sont stockés dans près d’un millier de citernes géantes, tandis que dans les sous-sols stagnent 70 000 m3 d’eau fortement radioactive. Des solutions sont toujours recher- chées pour traiter ces liquides et éviter la pollution de l’océan. Autre défi, le retrait des combustibles de la piscine de refroidissement du réacteur 4. Début mars, 418 assemblages avaient été extraits, sur un total de 1 533. La vidange devrait se terminer fin 2014. Le démantèlement complet de la centrale n’est pas programmé avant quarante ans. Tamura (40 000 habitants). Mais on ne peut plus la toucher : on ne peut plus manger ses produits, boire son eau ; nos enfants ne peuvent plus jouer dans la montagne et doivent se balader avec un dosimètre autour du cou. La nature, c’était une amie. Aujourd’hui, il faut s’en méfier.» Certains paysans retournent inlassablement la terre, espérant en extirper le mal. Les éleveurs, dans une région réputée pour sa viande bovine, ont jeté l’éponge: à Kawauchi (2 800 habitants, dont la moitié est revenue), quatre-vingts familles pratiquaient l’élevage. Il n’en reste plus que sept. Lorsque la région de Namie fut interdited’accès, unéleveur a ignoré les injonctions des autorités d’abattre le bétail, venant en cachette le nourrir. Masami Yoshizawa a été arrêté plusieurs fois, mais il a continué. Dans son pré paissent une cinquantaine de bovins, nourris avec du fourrage provenant d’autres régions. Sur une citerne, quelques mots ont été tracés rageusement en rouge : « Il faut sauver la vie ». p Philippe Pons «Des victimes condamnées à vivre un désastre illimité» Futaba Okuma Kawauchi Minamisoma (70 000 habitants), un peu plus au nord. On n’a rien à léguer à nos enfants : le terrain ne vaut plus un sou. Les jeunes partent. Une ville sans les cris des gamins, ce n’est plus une ville. » Les deux tiers des 154000 sinistrés (soit 8 % de la population de la préfecture de Fukushima) vivent toujoursdansdeslogementsprovisoires.Selonuneenquêtededécembre 2013, deux tiers d’entre eux ne pensent pas rentrer. Quelque 30000personnespourraientpourtant être autorisées à regagner leurs logements dans la zone irradiée dans les deux années à venir. Sur les 130 kilomètres qui séparent Minamisoma, au nord de la préfecture de Fukushima, et Hirono, au sud, s’égrènent bourgs et hameaux désormais sans vie. Les rizières jaunissent. Les serres ne sont plus que de squelettiques charpentes métalliques dont les bâches en lambeaux flottent au vent.Lescheminsdes fermesabandonnées sont parsemés de kakis pourris. Impossible de les manger: ils contiennent une forte dose de césium. Depuis avril 2013, la géographie de la contamination est en « peau Centrale de Fukushima-Daiichi Centrale de Fukushima-Daini 20 km 30 km Zones pour lesquelles l’ordre d’évacuation est prêt à être levé : radioactivité inférieure à 20 millisieverts par an (mSv / an) Zones dans lesquelles les résidents ne sont pas autorisés à vivre : radioactivité entre 20 et 50 mSv / an Zones où les résidents ne seront pas autorisés à revenir avant longtemps : radioactivité de plus 50 mSv / an SOURCE : MINISTÈRE JAPONAIS DE L’ÉDUCATION, DE LA CULTURE, DES SPORTS, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE (MEXT) Miharu (Japon) Envoyé spécial « Toute notre vie, chaque jour, nous sommes à un point de départ.» C’est l’expérience que vivent plus intensément que d’autres les sinistrés du séisme et du tsunami du 11 mars 2011, selon Genyu Sokyu, moine de la secte zen Rinzai et chef du temple de Fukuju-ji, à Miharu, petite ville située à une quarantaine de kilomètres de la centrale nucléaire accidentée de Fukushima. Pendant des semaines, après l’accident, il a vu arriver les réfugiés du nucléaire, « dispersés à travers la région et le reste du pays ». Ecrivain et essayiste, distingué en 2001 par le prix Akutagawa (l’équivalent du prix Goncourt en termes de notoriété) pour son roman Au-delà des terres infinies (Editions Philippe Picquier, 2008), Genyu Sokyu s’efforce de leur venir en aide et de réfléchir sur ce désastre. Il vient de publier au Japon un recueil de nouvelles, La Montagne de lumière (à paraître en français chez le même éditeur), inspirées par « la confusion psychologique qui est la mienne depuis la catastrophe», dit-il. Force de vie Avant d’être moine, Genyu Sokyu, né en 1956, fils d’un bonze, a fait des études de chinois classique puis mené une vie vagabonde, qui a enrichi sa réflexion nourrie du message bouddhique. « Quand tout a disparu, biens matériels et êtres chers, comme c’est le cas pour les victimes, on ne repart pas de zéro : on est en deçà, affirme-t-il. Il faut lentement remonter à la surface pour rejoindre un point de départ. Certains ne le peuvent pas : ils sont prisonniers de ce provisoire dans lequel on les a laissés se noyer. La phase de tension est passée, mais ils sont perdus. Pour endurer, il faut savoir qu’il y a une limite. Mais pour eux, le transitoire est devenu un état perpétuel. Alors, ils s’isolent, se renferment sur eux-mêmes. C’est le sort de beaucoup dans les logements provisoires. Ils savent qu’ils sont condamnés à vivre un désastre illimité dans le temps. » Dans ses nouvelles, Genyu Sokyu s’efforce de montrer que, pour vivre avec la radioactivité, on ne peut que s’attacher aux plus infimes expressions de la force de vie, comme le jeune orphelin d’un de ses textes, qui observe un grillon, dans les herbes, au milieu des ruines, qui se mettra à chanter à l’unisson avec d’autres, plus loin, dans les arbres. « Le tsunami, c’est la force de la nature. Il faut se résigner et reconstruire. L’accident nucléaire est un effet secondaire dû à l’imprévoyance de l’Homme. Nous devons en accepter les conséquences: le sacrifice à jamais des régions qui recevront les déchets nucléaires. Le gouvernement prétend que ce seront des sites provisoires. C’est faux. Ils resteront là et ces régions seront condamnées.» Dans l’une des nouvelles de son nouveau recueil, un vieux paysan offre son champ pour entreposer les déchets nucléaires, dont il fera un feu purificateur – une « montagne de lumière ». p Ph. P. 0123 international Mardi 11 mars 2014 En Iran, le gouvernement Rohani relâche la pression sur les milieux culturels Plusieurs artistes sont désormais autorisés à travailler, mais la censure demeure Téhéran Envoyée spéciale A ssis dans sa librairie, au centre de Téhéran, Hassan Kiaian, le directeur de la prestigieuse maison d’édition Cheshmeh (« source », en persan), savoure enfin sa victoire. Le 12 février, il a appris que Cheshmeh, connue pourses ouvrageslittéraires et philosophiques d’auteurs iraniens ou étrangers, pourrait à nouveau reprendre ses activitésaprès deux ans d’interdiction. A l’hiver 2012, le ministère de la culture et de l’orientation culturelle avait ordonné l’annulation de l’autorisation de Cheshmeh. En pleine présidence de Mahmoud Ahmadinejad, la presse et certains cercles ultraconservateursavaient accuséla maisond’éditionde «tenter de renverser de manière douce le régime » et de « vouloir mener une révolution en voleurs ». Une référence aux révolutions de couleur en Europe orientale et en Asie centrale et au mouvement de contestation né à la suite de la réé- lectioncontestée de M.Ahmadinejad, en juin 2009. Si Hassan Kiaian ne veut pas donner d’entretien pour ne pas provoquer les radicaux, il ne cache pas son soulagement face à la nouvelle approche du ministre de la culture, Ali Janati, qui a personnellement annoncé la réautorisation de Cheshmeh,et du président Hassan Rohani. Dans une lettre ouverte, l’éditeur a salué « la bienveillance » des autorités. « Pendant les huitannées de la présidenceAhmadinejad (2005-2013), surtout après les événements de 2009, l’édition et, de manière plus générale, la culture étaient passées sous l’autorité des agents du renseignement, explique Chahin. A., directeur adjoint d’une maison d’édition à Téhéran, qui préfère garder l’anonymat. L’approche des autorités était purement sécuritaire. » Le 3 mars, Ali Janati a annoncé un accord conclu entre son ministère et celui du renseignement pour qu’aucun livre ne soit plus rejeté en raison de l’identité de son auteur : le précédent gouverne- Nucléaire : « Pas de garantie de succès », selon Mme Ashton A l’occasion de sa première visite à Téhéran, la chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, a mis en garde, dimanche 9 mars, l’Iran contre tout excès d’optimisme dans le règlement global du dossier nucléaire iranien. « Nous sommes engagés dans des négociations difficiles, avec des défis, et il n’y a pas de garantie de succès », a déclaré Mme Ashton. Le chef de la diplomatie iranienne, Mohammad Javad Zarif, a affirmé pour sa part que l’Iran était « déterminé à aboutir à un accord » dans les quatre ou cinq prochains mois. ment avait en effet dressé une liste noire. Le président Rohani a également déclaré, samedi 8 mars, devant les représentants des médias iraniens, que son gouvernement était favorable à « la liberté d’expression avec responsabilité ». « Si on bâillonne les gens et on brise les plumes, la confiance sera détruite», a-t-il lancé. A guichets fermés A en croire Chahin, bien que le ministère de la culture « essaye d’écourter les délais pour délivrer les autorisations [de publication]» et que la censure soit « moins sévère », de nombreux ouvrages restent en attente. L’un des plus grands écrivains iraniens, Mahmoud Dowlatabadi, attend depuis cinq ans la réponse du ministère pour son roman Le Colonel (Buchet-Chastel, 2012), lauréat du Prix Jan Michalski en 2013 et jugé « antirévolutionnaire » par les conservateurs. L’annonce de la publication du Colonel, en février à Téhéran, a suscité un tel tollé du camp conservateur que les autorités ont dû démentir l’information. A l’opposé, le metteur en scène Hassan Rahmanian, exilé au Canada depuistroisans, a eu la belle surprise de recevoirune réponse positive du ministère pour sa pièce Les Anciennes Chansons, jouée pendant dix jours à Téhéran en septembre2013. « Il m’était interdit de travailler depuis 2009. Je ne pouvais plus subvenir à mes besoins », explique cet écrivain aujourd’hui installé en Iran. Depuis son retour, il a pu faire jouer sa deuxième pièce, Arach Sade, du 10 au 12 février, deux fois par jour, à guichet fermé, dans la grande salle Vahdat à Téhéran. « Je pensais que le public m’avait complètement oublié. J’avais tort », explique-t-il, ému. Cette pièce est inspirée de l’œuvre de l’écrivain, scénariste et réalisateur, Bahram Beyzaï. Lui aussi, exaspéré par les entraves à son travail, s’est exilé aux EtatsUnis en 2010. En hommage, Hassan Rahmanian lui a dédicacé chacune des représentationsde sa pièce. « J’espère qu’il pourra revenir et travailler en Iran. Hélas, ce n’est pas encore possible », se désole-t-il. Dans le domaine de la musique, rien n’a encore changé, à en croire Ramin Sedighi, directeur d’Hermes Records, une maison de production et de promotion de musique moderne et traditionnelle iranienne. « Nous devons encore attendre [les autorisations] pendant huit mois à un an. Les nouveaux responsables de la musique au sein du ministère de la culture n’ont pris leurs fonctions qu’il y a deux mois », souligne-t-il. Mais au moins, l’atmosphère a changé : « Lors de nos réunions, au temps d’Ahmadinejad, c’est eux qui parlaient sans écouter ce que nous avions à dire. Le nouveau directeur de la musique, Pirouz Arjmand, n’a fait qu’une courte allocution, puis, pendant deux heures, il nous a écoutés. C’est un bon début. » p Ghazal Golshiri 5 LIBYE Les forcesgouvernementales empêchentunetransaction «illégale» de pétrole TRIPOLI. Le gouvernement libyen a annoncé, dimanche 9 mars, avoir déployé des forces de la marine au large du port d’Al-Sedra, dans l’est du pays, pour empêcher un pétrolier battant pavillon nord-coréen de quitter les eaux territoriales avec une cargaison « illégale » de pétrole. Des rebelles autonomistes continuaient dimanche à charger du brut sur le pétrolier, ignorant les menaces des autorités qui dénoncent un « acte de piraterie». « Le pétrolier ne peut plus quitter [le port], sinon il sera transformé en tas de ferraille», a déclaré le ministre de la culture, Al-Habib Al-Amin. Une précédente tentative d’exporter du brut par ces mêmes milices fédéralistes avait eu lieu en août 2013. – (AFP.) p Syrie Des religieuses enlevées ont été libérées BEYROUTH. Treize religieuses et leurs trois auxiliaires enlevées par des djihadistes le 3 décembre 2013 dans leur couvent de Maaloula, au nord de Damas, ont été libérées dans la nuit du dimanche9 au lundi 10 mars en échange de quelque 150 prisonnières détenues par le régime syrien, grâce à une médiation libano-qatarie. Les otages étaient détenues à Yabroud, bastion rebelle près de la frontière libanaise, par le Front Al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaida. Elles sont arrivées dans un état d’extrême fatigue à Jdaidet Yabous, poste-frontière syrien avec le Liban. – (AFP.) Irak Le premier ministre accuse l’Arabie saoudite d’être le « principal soutien du terrorisme » BAGDAD. Le premier ministre irakien, Nouri Al-Maliki, accuse l’Arabie saoudite d’être le principal soutien du « terrorisme» dans le monde. Dans un entretien diffusé samedi 8 mars par la chaîne France 24, M. Maliki a fustigé « le choix dangereux» de Riyad de « soutenir le terrorisme dans le monde ». « Il le soutient en Syrie, et en Irak, et au Liban, et en Egypte, et en Libye, et même dans les pays au-delà », a-t-il déclaré. En janvier, le dirigeant irakien avait dénoncé des pays arabes « diaboliques » et « traîtres», mais sans accuser directement des Etats en particulier. – (AFP.) Vatican Le cardinal Marx présidera le nouveau Conseil pour l’économie du pape Après la création d’un secrétariat pour l’économie, présidé par le cardinal australien George Pell, le 24 février, le pape François poursuit la réforme de la gouvernance économique du Vatican, marquée par des dysfonctionnements ces dernières années. Le Saint-Siège a annoncé, samedi 8 mars, la création d’un nouveau Conseil pour l’économie, présidé par le cardinal allemand Reinhard Marx, spécialiste des questions économiques et auteur d’un ouvrage intitulé… Le Capital. Il est composé de huit cardinaux, dont le Français Jean-Pierre Ricard, et de sept laïcs. L’école supérieure de l’audiovisuel et des nouveaux médias VOUS ina-expert.com 6 france 0123 Mardi 11 mars 2014 Maires PS, maires UMP: quelles différences? Fiscalité, transports, sécurité… Les élus des grandes villes mènent, le plus souvent, des politiques similaires S ur les estrades électorales, ils affirment leurs différences. Dans leurs mairies, ils se ressemblent. Quels sont les « marqueurs » qui distinguent les maires de droite et de gauche ? « Il y a une professionnalisationde la classe politique locale, une aseptisation. On fait tous la même chose », remarque Vincent Feltesse, candidat socialiste contre Alain Juppé, maire UMP sortant à Bordeaux. Plus les villes sont grandes, plus les politiques convergent par-delà les étiquettes des maires. La crise économique et la montée en puissance de l’intercommunalité ont standardisé l’action municipale. Les nuances partisanes se déclinent désormais en fonction de la taille des communes. Lemandatmunicipalqui s’achève aura été marqué par des hausses d’impôtslocaux dansla majorité des villes. A Marseille et à Bordeaux (UMP), le taux moyen de la taxe d’habitation est plus élevé qu’à Tours ou à Rennes (PS). Mais dans les communes de plus de 100 000 habitants, les maires font désormais profession de modération fiscale et affichent leur volonté de réduire les dépenses. Le constatest plusnuancédans les villes moyennes : « Il y a depuis plus longtemps à droite qu’à gauche une volonté de maîtrise des impôts,desdépensesde fonctionnement de personnel », remarque Franck Riester, maire (UMP) de Coulommiers (Seine-et-Marne). La sécurité est l’autre grand thème sur lequel les maires convergent. A gauche, les verrous idéologiques sautent. A Grenoble, Michel Destot (PS) a choisi d’armer sa police municipale. Les socialistes recourent à la vidéosurveillance. Selon une enquête de La Gazette des communes, fin 2013, sur les 60 plus grandes villes de France, plus des deux tiers ont installé des camérassur la voirie. Mais les communes qui n’en disposentpas sont toutes de gauche. Contrairement à Strasbourg, Toulouse ou Paris, à Aménagements urbains (ici, les brumisateurs du miroir d’eau à Bordeaux), tramways… sont des éléments devenus incontournables à droite comme à gauche. RODOLPHE ESCHER Lille, Martine Aubry affirme ainsi qu’« une caméra n’a jamais poursuivi un voleur » et préfère réclamer plus de policiers à l’Etat. Le développementéconomique fait clairement consensus: « Nous sommes tous des aménageurs », proclame Christian Estrosi, maire (UMP) de Nice. « La recherche de la compétitivité n’est plus de gauche oudedroite», insisteM.Destot,pré- Marseille : la droite largement en tête Au premier tour, la liste Gaudin (UMP) arriverait en tête avec 41 % des votes, devant la liste Mennucci (PS) avec 26 %, le FN (16 %), le Front de Gauche (11 %), la liste de Pape Diouf (5 %) et celle du Parti radical de gauche (1 %), selon un sondage BVA pour RTL et Le Parisien publié lundi 10 mars. Au second tour, l’UMP obtiendrait 44 % des voix, devant le PS qui recueillerait 39 % à l’issue d’une triangulaire avec le FN (16 %). Le sondage donne toutefois le PS gagnant dans les 4e et 5e arrondissements, un secteurclé détenu par l’UMP. La ministre déléguée à la lutte contre le handicap, Marie-Arlette Carlotti, l’emporterait avec 44 %. Le sondage a été réalisé du 5 au 8 mars sur un échantillon représentatif de 1 010 personnes. sident de l’Association des maires des grandes villes de France. Mais desdifférencespersistent. Dansles villes moyennes, « les maires de droite se montrent plus attentifs à la défense des centres-villes. Sans doute parce que les commerçants leursont davantageacquis»,observe Xavier Bertrand, maire (UMP) de Saint-Quentin (Aisne). Au menu communal obligatoire figure aussi la promotion des transports publics. Les premiers à avoir réintroduit le tramway sont les maires (PS) de Strasbourg, Grenoble et Nantes. Ce mode de déplacement roule désormais dans 22 grandes agglomérations dont celle de Bordeaux. Et 5 grandes villes ont un métro. Dans les villes moyennes, les municipalités de droite veillent toutefois à la place de la voiture (parkings, stationnements gratuits). A gauche, les mairesinnovent enmatièrede tarification. Depuis 2009, l’aggloméra- tion d’Aubagne (Bouches-du-Rhône), à majoritéPS-PCF, fait ainsi circuler gratuitement les bus entre ses 12 communes. Droite et gauche ne s’opposent plus non plus sur le mode de gestion des services publics. A Lyon, Gérard Collomb (PS) a privatisé le ramassage des ordures. A Nice, M.Estrosi a ramené la distribution de l’eau, longtemps gérée par Veolia, dans le giron de la ville. «Il n’y a pas de choix politicien du mode de gestion des services publics », conclut une enquête des Maires des grandes villes et de l’Institut de la gestion déléguée réalisée en 2013 surl’eau,les déchets,les transports. S’agissant du logement, le parti du maire ne détermine plus autant qu’avant le rythme de production de HLM. « A force d’entendre les gens dire qu’ils n’arrivent plus à se loger, il y a une prise de conscience généralisée de la nécessité de construire», assure l’ancien secrétaire d’Etat au logement Benoist Apparu, candidat (UMP) à Châlons-en-Champagne (Marne). L’Association des maires de grandes villes vient de réaliser un sondage auprès d’une trentaine d’entre elles. L’enquête montre une progression de la part des logements sociaux dans la plupart des communes de gauche et de droite de 2% en moyenne sur la durée du mandat. Mais si tous les maires PS disent vouloir atteindre l’objectif des 25 % de logements sociaux en 2025, aucune des villes de droite interrogées ne s’y engage. L’impact de la fin du cumul Il subsiste des domaines où maires de droite et de gauche ne sont pas au diapason. Vie associative, conseilsdequartiers,budgetsparticipatifs : « La codécision avec les habitantsresteuneméthodedegauche, souligne François Kalfon, candidat (PS) à Meaux (Seine-et-Mar- ne).C’estautantunmoyendemobiliserlescitoyensquedecontrebalancerlesréseauxdenotablestypeRotary Club qui votent à droite.» Hormis l’opposition gauchedroite, d’autres différences subsistent. «Il existe deux styles d’édiles: le maire entrepreneur qui travaille pour les générations suivantes et le maire gestionnaire – jadis on disait notable – qui offre de la tranquillité et de la sécurité à ses habitants », observe Madani Cheurfa secrétaire généralduCevipof,centrederecherches politiques de Sciences Po. L’ex-patrondel’UMPXavierBertrand voit apparaître une autre césure dans les années à venir. La fin du cumul des mandats va faire émerger deux profils de maires, selon lui : « Ceux qui feront vivoter leur ville et ceux qui se montreront capables de la faire rayonner en comptant sur leur seule force d’élu local. » p Béatrice Jérôme Le socialisme municipal, un modèle aux pieds d’argile COMME À CHAQUE FOIS que le national est en berne, les grands barons socialistes se replient sur leur terre. Ils mènent la campagne des municipales en se protégeant du mauvais vent parisien. Peu affichent sur leurs projets ou leurs affiches la rose et le poing. Tous mènent une campagne éclair en vantant leur bilan de maire et leur proximité avec les habitants. Le socialisme municipal qu’ils ont contribué à développer, chacun sur son territoire, avec un sens aigu du pragmatisme et des alliances, est leur meilleur rempart. Paris, Lyon, Toulouse, Nantes, Strasbourg, Montpellier, Lille… Dixsept des vingt premières villes françaises sont gérées par les socialistes qui contrôlent 54% des municipalités de plus de 10 000habitants. Cette hégémonie ne doit rien au hasard. Elle est le fruit «d’une longue conquête démarrée à la fin du XIXe siècle par les petites villes pour s’étendre aux moyennes puis aux grandes», explique l’historien Alain Bergounioux, membre de la direction du PS. Alors que la plupart des autres partis socialistes européens se sont construits en lien étroit avec les syndicats, la SFIO puis le PS ont tiré leur force du socialisme municipal, à la fois laboratoire pour les réformes et base de l’union de la gauche. A partir de 1977, la conquête des villes s’est accélérée, le plus souvent dans une alliance avec le PC et les écologistes. Et cette alchimie a si bien résisté qu’aujourd’hui le PS est d’abord un parti d’élus: les réseaux locaux comptent davantage que les courants, les expériences s’échangent dans le cadre de la puissante Fédération des élus socialistes et républicains; l’enracinement local, adossé à un puissant réseau associatif, permet d’amortir le choc des défaites nationales. «Jamais nous n’avons réussi à construire l’équivalent à droite car notre culture politique est beaucoup trop nationale», déplore un dirigeant de l’UMP. Mais, conçu au départ comme un contre-pouvoir, le modèle s’est, de fait, banalisé au point de devenir la norme. Quel grand maire aujourd’hui négligerait «le développement des services publics et du cadre de vie, la politique sociale et la démocratisation de la vie poli- tique?» qui sont, selon Alain Bergounioux, les principaux attributs du socialisme municipal. Maires des grandes villes de droite et de gauche défendent souvent des politiques similaires. Dans nombre de villes moyennes, quelle que soit leur étiquette politique, le tramway a surgi au même moment car les élus en ont compris l’enjeu: «C’est l’une des réponses les plus efficaces aux fractures sociales», souligne François Lamy, ministre délégué chargé de la ville. Et face à la crise, les maires n’ont pas hésité à faire jouer les amortisseurs sociaux: «Entre 2008 et 2013, la hausse de la fiscalité locale a été importante dans les communes de plus de 10 000habitants, constate Jérôme Fourquet, directeur du département Opinion et Stratégies d’entreprise de l’IFOP. Mais elle a concerné quasiment dans la même proportion les communes gérées par la gauche et celles détenues par la droite.» C’est justement par ce biais qu’a surgi l’alerte: l’impôt local est de moins en moins bien supporté. «C’est la première fois dans les enquêtes locales qu’on voit monter l’enjeu fiscal avec une telle intensité», constate le politologue Pascal Perrineau. «Les ressorts sont les mêmes que durant la révolte fiscale de 2013, renchérit Jérome Fourquet. On voit monter le rejet de l’assistanat, la contestation d’une mixité sociale visant à faire cohabiter dans les grandes villes les classes moyennes et les classes populaires issues de l’immigration.» Ce qui avait fondé le socialisme municipal est ébranlé d’autant De contre-pouvoir au départ, le modèle s’est banalisé au point de devenir la norme qu’à côté de l’impôt, l’autre sujet central est la demande de sécurité: «la peur se développe, le vivreensemble est menacé», constatent les sondeurs. Dans les grandes villes aussi, le repli individualiste gagne du terrain. « Le prix du foncier et la concurrence scolaire aboutissent à une ségrégation spatiale de plus en plus marquée, souligne Jérôme Fourquet. D’un arrondisse- ment à l’autre, la demande des électeurs n’a rien à voir. Et ceux qui ne trouvent pas leur compte sont contraints de partir.» C’est sur ces ressorts que le FN compte jouer pour attaquer le socialisme municipal. Le parti, qui présente 597listes en mars, a moins l’ambition de conquérir des villes que d’investir massivement les conseils municipaux. «Le FN va repolitiser les conseils municipaux en contestant la moindre décision prise par les maires et leurs équipes», prédit le député du 19e arrondissement de Paris et numéro deux du PS, Jean-Christophe Cambadélis. Il parle ainsi du choc de deux modèles: intégrationniste d’un côté, identitaire de l’autre. Remise en cause des critères d’attribution des logements sociaux, critique de l’aide publique au développement, mise à l’index des subventions attribuées aux associations… Alors que l’argent public se raréfie, le FN pourrait devenir l’opposant permanent aux choix municipaux en ciblant les populations immigrées au nom de l’identité française et de la préférence nationale, les deux composantes principales de son fonds de commerce doctrinaire. «Le risque existe», reconnaît Pascal Perrineau mais « il est encore limité». D’abord parce que «le modèle FN au niveau municipal n’existe pas». L’expérience des quelques villes gérées dans les années 1990 par le FN –comme Vitrolles et Marignane (Bouchesdu-Rhône) ou Toulon– s’est soldée par un échec. Entre outre, il existe un FN du Sud différent du FN du Nord où la demande sociale est très forte. «Le parti devra en tenir compte», souligne le chercheur. Dans les villes moyennes, mais surtout dans les zones rurales et périurbaines, le parti de Marine Le Pen profite autant des problèmes d’accès aux services publics que de l’insécurité pour prospérer auprès d’une classe moyenne qui avait cru trouver un meilleur cadre de vie en s’éloignant du centre-ville et se sent désormais reléguée. «Dans ces espaces, le FN prospère sur le sentiment que rien n’est fait “pour moi, petit blanc de la classe moyenne”», constate Jérôme Fourquet. p Bastien Bonnefous et Françoise Fressoz 8 0123 france Mardi 11 mars 2014 A Grenoble, alliés au Parti de gauche, les écolos défient la mairie socialiste Eric Piolle, candidat EELV, joue les trouble-fête à gauche face à Jérôme Safar (PS) Sous le pseudonyme de Pierre Evil, Pierre-Yves Bocquet, énarque, est un critique reconnu Grenoble Envoyée spéciale Portrait L e bruit des marteaux piqueurs résonne dans la Villeneuve, quartier populaire deGrenoble.S’yajouteceluidesgravats qui s’écoulent dans un tube qui serpente le long d’un immeuble voué à la destruction. Mercredi 5 mars, Eric Piolle, candidat écologisteà la mairie,écoute l’histoirede ce bâtiment, l’aile nord du 50, galerie de l’Arlequin, racontée par un collectif d’habitants. Accompagné de la secrétaire généraled’EELV, EmmanuelleCosse, et entouré de plusieurs de ses colistiers qui habitent ici, ce quadragénaireà l’allure sportive a prévu de s’attarder dans le quartier. Au programme : une visite des jardins partagés, une rencontre avec des associations et une réunion publique en fin de journée. Qu’il semble loin, le temps de l’expérimentation sociale imaginéeau début des années 1970. Malgré le soleil et les montagnes alentour, les bâtiments ont grise mine. La Villeneuve peine à se débarrasser de l’image qui lui colle à la peau depuisle discoursde Grenobleprononcé par Nicolas Sarkozy en 2010, après des émeutes urbaines. « Il y a des problèmes de sécurité réels avec des trafics de drogue, mais aussi une vitalité associative », assure M. Piolle, qui dit avoir frappé à toutes les portes de ce quartier de 12 000 habitants. Ses militants ont d’ailleurs bien travaillé : la plupart des panneaux d’affichage public arborent son effigie. « Ici, le PS fait – enfin faisait – 80 % des voix, affirme le candidat EELV. Mais il y a une véritable aspiration au changement, même le clientélisme ne marche plus. » A 41 ans, cet ingénieur entend détrôner les socialistes qui ont repris en 1995 la mairie à la droite après les ennuis judiciaires de l’ancien maire RPR Alain Carignon. Condamné en 1996 pour corruptionetabusdebienssociaux,cedernier se présente le 23 mars sur la liste de l’UMP Matthieu Chamussy. Sursaroute,M.PiolletrouveraJérôme Safar, premier adjoint PS du O Emmanuelle Cosse est venue soutenir Eric Piolle, candidat EELV à Grenoble, et sa numéro deux, Elisa Martin (Parti de gauche), dans le quartier de la Villeneuve, le 5 mars. SÉBASTIEN ERÔME/SIGNATURES POUR « LE MONDE » maire sortant, Michel Destot, qui a renoncé à briguer un quatrième mandat.Pouryparvenir,l’écologiste s’est allié au Parti de gauche – le PCF rejoignant les socialistes – et à un collectif de citoyens. « Ce n’est pasunelisteécologistemaisderadicaux écologistes, du Parti de gauche,etunrecyclaged’anciensdel’extrême gauche», critique M.Safar. «Eric Piolle ne s’occupe pas de la droite et concentre les critiques sur ma liste» Jérôme Safar candidat PS à la mairie de Grenoble Ancien cadre dirigeant chez Hewlett-Packard,M.Piollefaitcampagne sur le renouveau en politique. Il promeut ainsi « la gauche par envie et non par habitude». Son projet: renouer avec les habitants. En cas de victoire, il s’engage à démissionner de son mandat au conseil régionalpour être «un maireàpleintemps».Ilveutaussi«protéger» les services publics locaux de cette ville universitaire avec une tarification progressive de l’eau et duchauffageetlagratuitédestransports pour les 18-25ans. M.Piolle a eu une carrière politique éclair. Militant associatif, il s’engage en 2009 à Europe Ecologie avant d’être élu l’année suivante au conseil régional. « Il y a un décalageentre l’imagelisse et le discours, qui l’est beaucoup moins », attaque M. Safar. Cinq ans plus tard, M. Piolle maîtrise tous les codesde la politique– petites phrases comprises. Le PS ? « Il ne fait que gérer l’effondrement du système. » M. Safar ? « Un strausskahnovallsiste»qui n’attend quede «s’asseoir sur le strapontin». Et d’attaquer bille en tête la précédente municipalité, «la boucherie » des rythmes scolaires, les grandsprojets«inutiles» –lacandidature en 2009 aux Jeux olympiques, le projet de contournement routier au nord, le stade des Alpes… Et ce d’autant plus facilement que depuis 2008 les écologistes sont dans l’opposition. Dans cette ville de près de 160 000 habitants, où FrançoisHollandea fait 64,29% des voix au second tour de la présiden- tielle, la bataille se joue à gauche. D’autant que la droite se présente en ordre dispersé. « Eric Piolle ne s’occupe pas de la droite et concentre les critiques sur ma liste, déplore M. Safar. Il y a un danger avec un contexte national compliqué. Je ne sous-estime pas une droite qui certes recycle mais fait campagne.» A gauche, chacun refuse pour le moment de se prononcer pour le second tour. Arrivés en troisième position en 2008, les écologistes avaient fait le choix de se maintenir. « Si nous sommes en tête, on leur proposera de nous rejoindre, il n’y a pas de volonté de revanche », assure M. Piolle. M. Safar entend obtenir des « clarifications» sur de « vraies divergences » : la sécurité, les finances ou encore les transports. Un sondage réalisé par Ipsos et publié le 6 mars place les deux candidats en tête. La liste de M. Safar obtiendrait 34 % devant celles de M. Piolle (26 %) et de M. Chamussy (22 %). Donné à 9 %, le FN pourrait être en mesure de se qualifier. Sans doute pas ce qu’espérait le candidat EELV, mais de quoi le rendre incontournable. p Raphaëlle Besse Desmoulières Le FN lance«Marianne», son collectifétudiant Ce think tank associé au Rassemblement Bleu Marine entend défendre la méritocratie L e Front national s’est doté, samedi 8 mars, d’un think tankétudiant.BaptiséeCollectifMarianne,cettenouvellestructure associative, associée au Rassemblement Bleu Marine, est le pendant du Collectif Racine lancé en octobre2013 pour les enseignants. Ce collectif entend défendre la «méritocratie»etdénonce«lamassification de l’enseignement supérieur », productrice de « dépréciation de la valeur des diplômes ». «Les détenteurs d’une licence, d’un master ou même d’un doctorat peinent toujours davantagepour trouver un travail. Cette situation ne sera à terme plus tenable», peut-on lire dans le texte fondateur. Pour autant, le Collectif Marianne, qui demande une cotisation de 10 euros, n’entend pas être un syndicat étudiant. « Nous n’allons pas faire de militantisme ou tracter dans les établissements. Nous voulons être une plate-forme de réflexion et de proposition pour la jeunesse. Nous n’avons pas vocation,comme les militants de l’UNEF pour le Parti socialiste, à être les futurs cadres du Front national », indique son président, David Masson-Weyl, étudiant en master 1 en droit à Paris-II-Assas et en histoire à Paris-IV-Sorbonne,qui se dit souverainiste.Ce dernierespère séduire rapidement plusieurs centaines d’étudiantsgrâce à un site Internet Cespécialiste de gangsta rap quidevient lanouvelle plume deM.Hollande et aux réseaux sociaux. L’objectif de ce collectif : s’implanter dans les grandes écoles et les universités pour éveiller « les consciences face à la dépolitisation ». David Masson-Weyl a ainsi donné quelques exemples du faible engagement des étudiants vis-à-visdu syndicalismeuniversitaire : « Université de Bourgogne : 26 711 inscrits, 4 410 votants ; Nanterre (Paris-X) : 32 457 inscrits, 3 257 votants et enfin Lyon-II : 28 828 inscrits, 2 363 votants. Les faits sont là ! Ils sont peu reluisants.» Phénomène nouveau Pour Sylvain Crépon, sociologue et chercheur à l’université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense (Paris-X), la démarche du FN est tout à fait compréhensible: « Pour un parti qui s’est lancé dans une stratégie de dédiabolisation et qui est avide de normalisation, pénétrer dans l’université est logique. » Le collectif veut peser sur tous les grands sujets qui concernent la vie étudiante : la santé ou encore les bourses. S’il s’oppose fermement à la massification de l’enseignementsupérieur,il n’est pas forcément pour une sélection à l’entrée. « Une année de propédeutique pourrait permettre de savoir qui peut aller ou non à l’université. On peut réfléchir à une sélection au fur et à mesure ou à des programmes d’accompagnement», déclare David Masson-Weyl. Ce qui existe déjà, il faut le dire, dans de nombreuses universités. Sur le volet des étudiants étrangers, le président du Collectif Marianne, qui reconnaît avoir eu la chance d’étudier six mois au Japon,estime qu’il« n’est pas possible d’accueillir tous les étudiants étrangers qui voudraient venir en France. Il faut que l’on accueille les meilleurs ou ceux qui en tireraient le plus grand bénéfice ». MarineLe Pen,venue enmarraine, a salué « l’initiative de cette jeunesse française qui entend se battre pied à pied pour retrouver sa souverainetéperdue». Laprésidente du Front national a attaqué Geneviève Fioraso, la ministre de l’enseignementsupérieur, qui « ne tarit pas d’éloges pour tout ce qui dépasse nos frontières. Elle ne cesse de dire qu’une Silicon Valley à la française est possible, grand bien lui fasse ! Pourquoi aller chercher à l’autre bout du monde l’inspiration qui vous manque ? », a-t-elle lancé, critiquant au passage le projet Paris-Saclay, projet phare du Grand Paris qui regroupera grandes écoles, université, organismes de recherche et entreprises… « Mais, avec la présence de Danone ou de Kraft Foods, la recherche sera-t-elle indépendante ? », s’est interrogée Marine Le Pen. Elle s’en estaussi pris à la volontédela France d’être présente dans les MOOC, ces cours en ligne massivement ouverts,mais porteurs d’une « déshumanisation totale des savoirs». Reste à savoir si les idées du Front national séduiront la jeunesse étudiante jusque-là plutôt réticente. « On avait une surreprésentation du FN chez les jeunes non diplômés.Mais on constate aujourd’hui une présence forte chez les jeunes mal diplômés ou diplômés mais qui ont le sentiment d’être déclassés. Une telle initiative peut prendre dans un pays fermé à l’ouverture aux nouvelles générations et aux entrants dans le système », estime le politologue Dominique Reynié. Ce dernier voit dans le Collectif Marianne « la poursuite d’une stratégie systématique de professionnalisation du parti avec l’installation d’une nouvelle génération et des outils de recrutements des futurs cadres du parti ». Sylvain Créponsouligne,lui, un phénomène nouveau : « Il y a une présence d’étudiants qui s’affichent Front national dans certaines universités de gauche, comme à Nanterre ou Paris-VIII-Vincennes-Saint-Denis, etqui n’ont aucunproblèmeà le faire. Il y a dix ou quinze ans, cela aurait été impensable.» p Nathalie Brafman n savait Barack Obama féru de hip-hop. Son homologue français, en revanche, s’était jusqu’ici montré plus réceptif aux bluettes jazzy de Michel Jonasz qu’aux raps outranciers de Jay-Z. Il faut croire que son récent voyage outre-Atlantique l’a, en la matière, dévergondé : François Hollande vient de confier à un spécialiste du gangsta rap la préparation de ses prochains discours. L’information était, pour ainsi dire, passée inaperçue. Mardi 4mars, le Lab d’Europe1 révèle que le président de la République a fait de Pierre-Yves Bocquet sa nouvelle « plume », en remplacement de Paul Bernard, parti « pour des raisons personnelles » au Conseil d’Etat. Rien que de très classique, se dit-on de prime abord: le profil de l’heureux nommé semble on ne peut mieux cadrer avec les us et coutumes de la « Hollandie». Originaire de Valenciennes, élu UNEF-ID lors de son passage à Sciences-Po Paris, Pierre-Yves Bocquet est un énarque de 40 ans. A l’instar d’Aquilino Morelle, conseiller politique du chef de l’Etat, sous l’autorité duquel il malaxera la syntaxe présidentielle, cet inspecteur général des affaires sociales a fait ses premières armes politiques sous le mandat de Lionel Jospin,au sein du cabinet d’Elisabeth Guigou, alors ministre de l’emploi. Depuis l’élection de M. Hollande, le haut fonctionnaire, décrit par ses collaborateurs comme « minutieux et méthodique», occupait un poste de chargé de mission pour la protection socialeà l’Elysée.Sous le pseudonyme de Pierre Evil, il menait, en parallèle, une carrière de journaliste musical, spécialisé dans le rap américain. A quelques exceptions près, ses collègues ignoraient tout de sa double vie. Dans les couloirs du pouvoir, ses bagues épaisses et brillantes ne laissaient pas d’intriguer. Dans les rédactions des journaux où il officiait, c’est son costard-cravatequiéveillait les imaginations.«Je me souviensd’un homme discret, très propre sur lui, évoque Cyril de Graeve, qui fut son rédacteur en chef pendant quatre ans, au sein du magazine Chronic’art.Il présentaità l’ancienne,petites lunettes et costume sans fantaisie, soit tout le contraire des articles qu’il écrivait dans nos pages. Je ne connaissaispas son vrai nom, il travaillait pour nous bénévolement, de façon sporadique. » FrédéricMion,directeurde l’Institut d’études politiques de Paris, fut son camarade à l’ENA, au début des années 1990. Il insiste, lui aussi, sur la singularité de M. Bocquet : « Pierre-Yves était le plus jeune de la promo, il s’habillait dans un style assez relâché, jean et baskets Puma. Il avait des références très décalées par rapport à la majorité des élèves. Lors du choix du nom de notre promotion, il a proposé Guy Debord. Malgré son discours flamboyant, il a reçu peu de voix. » Une ironie pour le moins grinçanteveutquelefrançaisuseduterme « nègre» pour désigner celui ou celle qui écrit dans l’ombre d’une personnalité publique. Ce mot, insultantdans sa forme anglaise de «nigger»,PierreEvilamontrécomment les rappeurs noirs-américains se le sont réappropriés, pour en faire une arme politique. Avec érudition,il en a retracé l’histoireet la polysémie, dans ses chroniques de disques pour la presse, dans un documentaire pour Arte et dans deux livres fouillés (Gangsta rap, Flammarion, 2005, aujourd’hui épuisé, et Detroit Sampler, Ollendorff et Desseins, à paraître). «Selon moi, Pierre Evil fait partie des trois meilleurs critiques français de rap », estime le journaliste et musicienFredHanak,quil’acôtoyé Dans les couloirs du pouvoir, ses bagues épaisses et brillantes ne laissaient pas d’intriguer à Chronic’art. Fasciné par ce confrère « aussi secret que Batman, Banksy ou Kissinger », qu’il n’a jamais rencontré de visu, Fred Hanak en loue le style « hardcore» et subjectif, mâtiné d’une « approche politique et sociologique à la Bourdieu» « Contrairement aux branchés de Libération ou des Inrockuptibles, poursuit le journaliste, Evil sait de quoi il parle, prend le temps de comprendre les paroles, ne fait jamais d’erreur, mêle les références avec maestria, ne caresse pas dans le sens du poil. Son talon d’Achille: il connaît très bien le rap américain, de la côte ouest notamment, mais se désintéresse totalement du rap français. C’est un peu le Jacques Chirac de la critique rap: vieille école, excellent en politique extérieure, déplorableen politiqueintérieure.» Retranché derrière son « devoir de réserve», M.Bocquet tient néanmoins à faire savoir qu’il « met entreparenthèsessesactivitésd’écriture à titre privé», et qu’il s’interdit d’avoir une « expression personnelle et politique au nom du président»: «La seule personne qui écrit les discours de François Hollande, c’est François Hollande, mon rôle seraseulementdelespréparer»,ditil d’une voix aiguë, qui ne laisse rien transparaîtrede la verve d’Evil, ni de son amour pour le groupe de hip-hop Dead Prez – ainsi nommé en référence aux « présidents morts»quiornentlesbilletsdebanque américains. p Aureliano Tonet JUSTICE Broncadesavocatscontreles écoutesdeM.SarkozyetMe Herzog Le bâtonnier de Paris, Pierre-Olivier Sur, a affirmé, lundi 10 mars, sur Europe 1, qu’il allait «saisir le président de la République» après l’ouverture d’une enquête judiciaire sur la base de l’écoute d’une conversation entre Me Thierry Herzog et son client Nicolas Sarkozy, « afin qu’il puisse arbitrer dans cette affaire et prendre les mesures qui conviennent qui sont à son niveau. (…) Il s’agit de la défense de nos libertés publiques. (…) La démocratie est menacée». Samedi8, des avocats, dont plusieurs grands noms, s’étaient indignés dans une lettre « que le secret professionnel, socle de la défense, garantie fondamentale des libertés individuelles dans un Etat de droit, fasse l’objet d’atteintes graves et répétées». Une information judiciaire pour violation du secret de l’instruction et trafic d’influence a été ouverte, le 26février, après l’interception de discussions téléphoniques entre l’avocat et l’ex-président dans le cadre de l’enquête sur les accusations de financement de sa campagne de 2007 par la Libye. Deux juges ont diligenté une série de perquisitions le 4mars, visant Me Herzog et un haut magistrat du parquet général de la Cour de cassation, Gilbert Azibert. p – (AFP.) 0123 france Mardi 11 mars 2014 9 Philippe El Shennawy (ici à sa sortie de la maison d’arrêt de Fresnes, le 24 janvier) a obtenu une libération conditionnelle après avoir passé trente-huit ans en prison. ALBERT FACELLY/DIVERGENCE Les mille et un obstacles à la libération des «longues peines» Le cas d’El Shennawy illustre la difficulté d’obtenir une libération conditionnelle pour les détenus condamnés à plus de quinze ans de prison P laceren libérationconditionnelle un détenu condamné à unelonguepeinequi présente toutes les garanties de réinsertionrelève du parcoursdu combattant. Pour le condamné bien sûr, mais aussi pour le juge d’application des peines, même convaincu de l’utilité de la mesure. « La perpétuité dure vingt ans seulement en moyenne, croit savoir l’Institut pour la justice, une association qui milite pour une sévérité accrue. Déjà, un condamné à vingt ans ne purgeque dix ans de prisonen réalité, simplement du fait des lois en vigueur.»Les lois en vigueurmultiplient au contraire les embûches procédurales afin qu’un condamné à une longue peine ait les pires difficultés à obtenir une liberté conditionnelle. Témoin, le cas de Philippe El Shennawy. El Shennawy, 59 ans, est un braqueurrécidivistecondamnéà douze reprises, et pour la première fois à l’âge de 20 ans. Il n’a connu que la prison, en dehors de trois ans de liberté. Il n’a pas de sang sur les mains mais a passé trente-huit ans derrière les barreaux. L’homme, à la forte personnalité – il a obtenu une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme en 2011 sur les fouilles à nu –, a su mobiliser autour de son cas. Le tribunal d’application des peines de Versailles a relevé sa peine de sûreté de trois ans, François Hollande l’a gracié en mars2013 du reliquat de cette peine : il devenait libérable le 30 juin 2032 – à 78 ans. Rien ne s’opposait à une libéra- tion conditionnelle. Mais c’est ici que le combat commence, dans l’impressionnant maquis de l’exécution des peines, où un greffier ne retrouverait pas ses lunettes. La premièreconditionestde manifester«deseffortssérieuxderéadaptationsociale», en clair, avoirunlogement et un emploi – même dehors, avec près de 10 % de la population active au chômage, c’est loin d’être évident. Il faut encore que la durée de la peine accomplie soit au moins égale au double de la peine restant à subir. Et depuis la loi du 10 août 2011, tous les condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité, puis ceux qui sont condamnés à une peine d’au moins quinze ans encourant un suivi socio-judiciaire (c’est son cas) ou ceux condamnés à dix ans mais pour un crime lourd (viol, assassinat, meurtre) doivent, pour une libération conditionnelle prononcée par les trois juges du tribu- nal de l’application des peines, prendre l’avis d’une « commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté» (CPMS). Le détenu est conduit pendant plusieurs semaines pour un examen poussé dans un Centre national d’évaluation (CNE) – il en existe trois, l’un à Fresnes (Val-de-Marne), les deux autres à Lille et à Réau (Seine-et-Marne). Le travail est sérieux: le rapportprend en compte les observations du conseiller d’insertion, le parcours socio-professionnel du détenu, sa conduite en prison, ses capacités, ses ressources, son psychisme, son projet de sortie et son risque de récidive: 26 pages très denses dans le cas de Philippe El Shennawy, datées du 29 juillet 2013. Il se conclut assez positivementpar « le risque de récidive ne peut être objectivement qualifié, mais le maintien en détention ne permettra plus aucune évolution (…). Monsieur El Shennawy Ces autres « recordmen » de longévité en prison Pierre-Just Marny, condamné pour meurtres en 1969, s’est suicidé en 2011 dans sa prison en Martinique, après 48 ans de prison. né à perpétuité pour le meurtre de son patron. Sorti neuf mois en 1986, il a de nouveau été incarcéré après avoir tué son frère. Lucien Léger, mort en 2008 à 71 ans, a passé 41 ans en prison. Il avait étranglé en 1964 le petit Luc Taron. Condamné à perpétuité, il avait obtenu sa libération conditionnelle en 2005. Serge Lebon est détenu depuis 40 ans. Il a été condamné à perpétuité en 1972 pour avoir tué son père. Casanova Agamemnon, 63 ans, originaire de La Réunion, est incarcéré depuis 1969 et a été condam- Georges Ibrahim Abdallah, 62 ans, est détenu depuis 30 ans. Il a été condamné à perpétuité pour l’assassinat en 1982 à Paris de deux diplomates. dispose assurément de ressources personnelles, du soutien de son entourage et de projets professionnels et personnels pour lui permettre de se réadapterà la vie en milieu libre. » Ce rapport, plutôt favorable, est transmis à la CPMS, une simple commission administrative, et à elle seule. Les juges d’application des peines, qui doivent, eux, décider de la libération conditionnelle, n’ont rien à en savoir : belle victoire de la bureaucratie judiciaire. La commission est censée statuer dans les six mois. A défaut, les juges peuvent passer outre. Cela n’arrive jamais. La CPMS est incapable de respecter le délai légal et met partout en France entre neuf mois et un an à statuer. Pourledétenu,c’estla quadrature du cercle : à plus de 50 ans, et un casier judiciaire pour lettre de recommandation, il doit trouver un employeur qui lui signe un contrat pour, au mieux, l’année suivante, avec le risque non négligeablequela libérationne soit finalement pas accordée – on comprend que les entreprises hésitent. Dans le meilleur des cas, le condamnéprésenteune lettred’intention et trébuche devant le Centre national d’évaluation, qui doit évaluer « la cohérence entre le discours du condamné et les éléments du projet de sortie ». Dans le cas d’El Shennawy, le centred’évaluation a cru à son projet et un employeur têtu, chef d’une petite entreprise d’événements culturels, a accepté de l’embaucher. Restait à attendre l’avis de la CPMS. Si le tribunal d’application des peines était passé outre, il y avait toutes les chances que le parquet fasse appel : le dossier aurait alors atterri devant la chambre d’application des peines. Dont le président est justement celui de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, évidemment furieux que les juges se soient passés de son avis : c’est dire que le dossier aurait été mal engagé. La fameuse commission a rendu son avis le 20 décembre 2013. Huit pages, pour la plupart consa- Un greffier ne retrouverait pas ses lunettes dans l’impressionnant maquis de l’exécution des peines crées à la procédure et au rappel des condamnations de Philippe El Shennawy. L’analyse poussée du Centre d’évaluation est résumée en dix lignes exactement, le projet de sortie en trois. La commission retient une expertise de 1998 qui soupçonne chez le condamné « une psychose paranoïaque évolutive», alors qu’une autre, en 2007, des docteurs Daniel Zagury et Michel Dubec, des références en matière d’expertise psychiatrique, « ne relèvent aucune pathologie, estimant que celles constatées par leurs prédécesseurs pouvaient êtreinduites par les conditions d’in- Qui se souvient de Maurice Gateaux, plus vieux détenu de France? IL Y EN A UN au moins qui respecte toujours avec ferveur la mémoire du Général, même s’il n’a pas vraiment réalisé qu’il n’était plus de ce monde : Maurice Gateaux, le plus vieux détenu de France, incarcéré depuis probablement cinquante-cinq ans – tout le monde a un peu perdu le compte, lui le premier, il n’a plus toute sa tête. Il a d’ailleurs failli la perdre en 1968, à l’époque où la peine de mort n’était pas encore un souvenir, pour avoir tué un surveillant à coups de ciseaux. Depuis, il mène sa petite vie au centre pénitentiaire de Château-Thierry, dans l’Aisne. Maurice Gateaux avait 30 ans lors de sa condamnation en 1968, il en a 77 aujourd’hui. Il a vu le jour en Picardie, à Longchamps, dans l’Aisne, dans une commune qui a elle-même disparu : elle a été absorbée en 1970 par Vadencourt (630 habitants). Il était le sixième enfant d’un premier mariage, sa mère a encore eu dix autres petits. La naissance s’est mal passée, et les journalistes notent à son procès qu’il a failli mourir asphyxié et que l’épisode a entraîné « un retard dans sa croissance physique ». Il l’a rattrapé: aux assises, c’est un homme « de taille moyenne mais aux larges épaules, écrit Le Monde le 2février 1968, ce qui lui a valu le surnom de King Kong à la centrale ». Le petit Maurice fréquente distraitement l’école communale jusqu’à l’âge de 14 ans, devient ouvrier agricole, puis manœuvre, et fait en passant plusieurs cures de désintoxication. Il est envoyé en 1956 en Algérie pour son service militaire, où il est incarcéré pour avoir frappé à mort un Algérien. Il n’a pas laissé à l’armée un souvenir aimable, on le présente, note Le Monde, «comme un solitaire, un être renfermé, querelleur, méchant, violent, impulsif». Il est finalement réformé pour « débilité profonde ». De retour en France, Maurice Gateaux est condamné en 1959, puis en 1960, pour « vol, coups et blessures», puis en 1966 à vingt ans de réclusion pour « coups mortels et vol qualifié » commis deux ans plus tôt. Est-il alors incarcéré depuis 1959 ou avril 1965, comme l’indique sa fiche de l’administration ? La réponse s’est perdue dans les archives de la pénitentiaire. En tout cas, le condamné est transféré en août 1968 à la centrale de Nîmes avec 600 autres détenus. Il travaille dans l’atelier tailleur de la prison où 92 détenus, tous munis de ciseaux, sont Ledétenuestincarcéré depuisprobablement cinquante-cinqans –toutlemondeaun peuperdulecompte, luilepremier gardés par deux surveillants armés d’un sifflet. Le 16 mai 1967, Maurice Gateaux s’attarde dans l’atelier à aiguiser ses ciseaux. L’un des surveillants, Marius Albe, lui dit de regagner sa place. Le détenu le prend mal, l’entraîne dans « le magasin des pantalons » et lui donne quatre coups de ciseaux, à l’arcade sourcilière, au cou, à la narine et à la poitrine. Le gardien ne perd pas son sang-froid, et annonce « regagnez vos places, il ne me fait pas peur, il ira au quartier [disciplinaire]» ; il a le temps d’ajouter « il est fou » avant de mourir. « Ah je suis fou !, aurait dit le détenu, alors je vais tout casser ! » Il blesse encore légèrement un surveillant à la main avant d’être maîtrisé. Le journaliste du Monde à la cour d’assises du Gard n’a pas versé dans le compassionnel: Maurice Gateaux est «l’image de l’absence et du refus. Il suffit qu’il parle pour qu’apparaisse l’homme qu’il est : un être fruste. Il lit avec difficulté et sait à peine écrire. Et mercredi, on a pu le constater, il ne sait pas s’exprimer». L’article est publié au milieu d’autres nouvelles non moins sensationnelles, « un éleveur de lapins victimes de tirs de mines obtient réparation de l’EDF ». Maurice Gateaux a été condamné le 2 février 1968, après un rapide délibéré de quarante-cinq minutes, à la réclusion criminelle à perpétuité, mais échappe à la guillotine en raison de circonstances atténuantes : son avocat l’avait gentiment signalé: « Gateaux est un débile. Il suffit de le voir et l’entendre.» De centrale en centrale, Maurice s’est fait oublier, pendant plus de cinquante ans. Son avocat, Louis Lacroix, président en 1963 de la course à la cocarde à Nîmes, est devenu président fondateur de la Fédération française de course camarguaise en 1975, mais il est mort « depuis longtemps». Maurice a peu à peu perdu le fil. Il sort peu en promenade, n’a guère de visites, ne participe pas aux ateliers. Le vieux monsieur est encore alerte, porte des jeans et une casquette, mais il a des difficultés à se situer dans le temps, qui a eu tendance à s’arrêter avant son incarcération. Le moment qu’il préfère, c’est quand l’intervenant qui fait de la médiation animale vient le voir en cellule, avec son chien. Il aime beaucoup le chien. p F. J. carcération»,unedernièreexpertise de 2012 concluait même « qu’un suivi psychiatrique ou médico-psychologique n’est pas nécessaire à sa libération ». Quoi qu’il en soit, la commission, « compte tenu de ces traits de caractère psychotique », émet un avis défavorable et estime qu’El Shennawy « devrait poursuivre l’exécution de sa peine dans un centre de détention». Le tribunal d’application des peines, à la mince lueur de l’avis donné par la commission, était bien en peine de prendre une décision. D’autant que la CPMS de Paris, s’appuyant sur une lecture étroite de l’article 730-2 du code de procédure pénale – que la garde des sceaux, Christiane Taubira, souhaitait supprimer dans une première version de sa réforme pénale –, interdit aux juges d’avoir communicationdel’analysed’évaluation, dont elle se veut seule destinataire. Le vice-président de l’application des peines de Créteil a alors pris une décision hardie : « Attendu que la CPMS se réunira le 20 décembre 2013 pour étudier la situation de Monsieur El Shennawy; que cette date est postérieure au délai de six mois fixé par les textes – dont le terme était fixé au 12 octobre 2013 ; que l’audience aux fins d’examen de la demande d’aménagement de peine est prévue le 17 octobre 2013 ; qu’il apparaît essentiel à cette occasion que le tribunal de l’application des peines, dans le cadre de cette audience, puisse être en possession de l’évaluation effectuée par le CNE » ; il requiert du Conseil national d’évaluationqu’il lui livre son analyseducas ducondamné.Il l’a obtenu le lendemain, et par jugement du 22 janvier 2014, le tribunal d’application des peines a placé Philippe El Shennawy en libération conditionnelle. Avec d’étranges conditions : il est placé sous bracelet électronique (la loi l’impose), avec interdiction de sortir après 19 heures (et même 17 heures le samedi) – ce n’est assurément pas l’idéal pour un organisateur d’événements culturels –, obligation de soins et interdiction de fréquenter les cafés, pour une raison obscure… jusqu’au 25 janvier2026. La raison en est simple : ces conditions avaient été imposées par le parquet de Créteil qui, sinon, aurait fait appel. Et la chambre d’application des peines n’aurait pas manqué de renvoyer El Shennawy en prison, conformément à l’avis de la CPMS. Un juge d’application des peines pourra, dans les mois à venir, assouplir ces contraintes. Mais il est plus que temps que la chancellerie, comme elle s’y est engagée, remette à plat le code d’exécution des peines, et que les prisons ne soient pas des mouroirs pour les longues peines. p Franck Johannès S’évader du quotidien. Nouveau GLA. Une marque Daimler. 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Jusqu’au bout, le flamboyant et iconoclaste directeur d’opéra, figure de proue de la scène lyrique internationale depuis plus de trente ans, a fait preuved’une énergie hors du commun,commece 28 janvierau Théâtre royal de Madrid, où il accompagnait l’un de ses derniers projets : la création de l’opéra de Charles Wuorinen, Brokeback Mountain, sur un livret d’Annie Proulx. En quelques dates 1943 Naissance le 25 novembre à Gand (Belgique). 1981 Direction du Théâtre royal de la Monnaie, à Bruxelles. 1992 Direction artistique du Festival de Salzbourg (Autriche). 2002 Création du Festival triennal de la Ruhr (Allemagne). 2004 Direction de l’Opéra national de Paris. 2010 Direction du Théâtre royal de Madrid. 2014 Mort le 8 mars à Bruxelles. Le génie de cet homme aura sans doute été de revivifier l’opéra par le travail scénique Visionnaire et audacieux, Gerard Mortier aura marqué l’avènement des directeurs d’opéra stars: certains ont pu s’offusquer, par exemple, de ce que le preux Gantois associe son nom au logo de l’Opéra national de Paris, dont il fut le patron de 2004 à 2009. Certes, Gerard Mortier a toujours mis les maisons lyriques qu’il a dirigées au service d’un projet artistique qui avait pour lui valeur de manifeste. Mais c’est en humaniste que ce provocateur, brillant intellectuel et virulent débatteur, s’est toujours imposé, convaincu que l’art lyrique – connoté bourgeois et décadent – se devait d’être un lieu de connaissance, de conscience citoyenne, d’édification et de liberté, capable de « faire triompher l’art sur l’argent ». Toute la vie de Gerard Mortier n’aura été que le parcours d’une passion transmise par sa mère, qui lui avait fait découvrir à 11 ans La Flûte enchantée, de Mozart – c’est ainsi qu’il intitulera son livre, Dramaturgie d’une passion (Christian Bourgois, 2009). De ses débutsau Théâtre royal de La Monnaie, à Bruxelles, en 1981, à l’âge de 38 ans, dont il fit endix ans uneplaque tournante de l’art lyrique en Europe (moyennant un passif de 400 millions de francs belges et l’exil de Maurice Béjart en Suisse en 1987, avec lequel il était en conflit artistique). Jusqu’au staccato présente Déshabillez strip texte Flor Lurienne 2 n° En 2011. BRUNO CHAROY/PASCO baroud final au Théâtre royal de Madrid, dont il fut indignement limogé en septembre 2013 alors que son mandat courait jusqu’en 2016, à la suite de déclarations incendiaires dans la presse. Il fut temporairement réintégré comme conseiller artistique afin de superviser sa dernière saison sous la tutelle de son successeur, Joan Matabosch. Plus que tout, Gerard Mortier restera le « David » désigné pour succéder en 1992 au « Goliath » Herbert von Karajan, qui avait régné en autocrate depuis 1956 sur le prestigieux Festival de Salzbourg (Autriche). Le trublion s’était alors fait fort d’instaurer une politique novatrice, imposant une part importante de musiques duXXe siècle ainsi quede nombreuses créations, tandis que son caractère entier l’opposait de plus en plus violemment à ses tutelles au fur et à mesure de la montée de la droite xénophobe en Autriche. C’est sur un pied de nez qu’il quittera son poste en 2001, après la fameuse « bataille de La Chauve- sous-entendant largement qu’il n’avait pas eu, lui, l’accueil qu’il espérait. En 2001, lorsque Gerard Mortier quitte la direction du Festival deSalzbourg,il esttellementdétesté que son départ est ironiquement salué d’un article nécrologique publié en pleine page dans un journal autrichien – un trophée savoureux pour Mortier, qui aimait la joute et le panache. Paris avait été la seule ville où il s’était fait conspuer d’un « Mortier au bûcher! », au cours d’unereprésentation d’Iphigénie en Tauride, de Gluck, mise en scène par Krzysztof Warlikowski, ce qui l’avait profondément choqué et durablement meurtri. Aussi l’appel du City Opera de New York, en 2007, eut-il sans doute un goût de revanche sur l’ingratitude européenne. Mais Gerard Mortier avait démissionné en 2008, avantmême sa prise officielle de fonctions, pour des raisons de restrictions budgétaires. Il avouait dans un article paru le 2 février dans le New York Times l’avoir finalement regretté. Ce d’autant qu’à Madrid, son dernier poste, en 2010, après une courte lune de miel, il avait dû encaisser plus de 30 % de réductions budgétaires, mettant quasiment en péril la survie artistique du Teatro Real. Mortier avait taillé dans sa programmation, relevant le gant sans pour autant pratiquer la langue de boisvis-à-visdes politiques.Làaussi, il avait déchaîné les passions publiques. Le génie de cet homme cultivé et polyglotte à l’accent inimitable, affable et séducteur, qui savait à l’occasion être cinglant, aura sans doute été de revivifier l’opéra par le travail scénique. Il est en effet l’un des premiers à avoir invité des metteurs en scène comme Herbert Wernicke, Peter Mussbach, Luc Bondy, Patrice Chéreau, Peter Sellars, Klaus-Michael Grüber, les époux Karl-Heinz et Ursel Herrmann. Il a révélé Christoph Marthaler, puis Krzysztof Warlikowski, fait appel aux plasticiens Ilya et Emilia Kabakov (Saint François d’Assise, de Messiaen), Bill Viola Marie-Aude Roux de et avec Léonore Chaix La librairie lilloise L’Harmattan met la clé sous la porte D TIONS ONGA PROL u 19 juillet jusqu’a 5, rue Biot Paris 17 e _ Loc. 01 43 87 97 13 - w w w. l e u ro p e e n . i n fo jusqu’au 8 avril : les lundis et mardis 20h30 à partir du 8 mai : les jeudis, vendredis et samedis 19h30 et tous les dimanches 16h30 M i s e e n s c è n e : Marina souris » (Die Fledermaus, opérette de Johann Strauss), emblème de la culture autrichienne traditionnelle, dont il confia le « meurtre rituel » au metteur en scène allemand Hans Neuenfels. Après avoir créé, en 2002, le Festival triennal de la Ruhr, Gerard Mortier est accueilli avec enthousiasme à l’Opéra national de Paris. Il succèdeà HuguesGall. Mais le climat fraîchit peu à peu. Certaines productions, mal accueillies dans la presse, déclenchent les hostilités du directeur. Il subit aussi diatribeset critiquespouravoir conféré le mandat officieux de directeur musicalà son ami, le chef d’orchestre Sylvain Cambreling, avec lequel il a entretenu le compagnonnage de toute une vie. Des années plus tard, le Flamand gardait un bilan mitigé de son quinquennat français : public réactionnaire, journalistes incompétents, crise de la société française… Ne déclarait-il pas en 2009 dans nos colonnes que la maison d’art lyrique parisienne n’avait pas « le public qu’[elle] mérite », (Tristan et Isolde, de Wagner) ou Anselm Kiefer. Il a développé, avec le cinéaste Michael Haneke, une fructueuse collaboration mozartienne (Don Giovanni en 2006 à Paris, Cosi fan tutte en 2013 à Madrid) ; Mozart qui restera jusqu’au bout son compositeur fétiche, et La Flûte enchantée, sa quête du Graal. Côté répertoire, Gerard Mortier est à l’origine de nombreuses créations, notamment celles du compositeur belge Philippe Boesmans – La Ronde, d’après Schnitzler (1994), Le Conte d’hiver, d’après Shakespeare (1999), Yvonne, princesse de Bourgogne, d’après Gombrowicz (2009) – et de la compositrice finlandaise Kaija Saariaho – L’Amour de loin, créé en 2000 à Salzbourg, Adriana Mater, à Paris en 2006, sur des livrets d’Amin Maalouf. Le baron Gerard Mortier (il avait été anobli par le roi des Belges en mai 2007) était né à Gand, en Belgique, le 25 novembre 1943. Fils d’un boulanger et d’une « femme simple », il avait accompli sa scolarité dans un collège jésuite. Puis il avait poursuivi des études de docteur en droit, parce qu’elles lui « permettaient de garder du tempslibre pour continuer la musique et parce que le droit, comme la musique,parle despassionshumaines et permet de les régler », ainsi qu’une formation en management artistique. Avant d’embrasser l’art lyrique en 1968 comme assistant au Festival des Flandres, puis de faire ses gammes en Allemagne,occupantla directionartistique des opéras de Düsseldorf (1972-1973), Hambourg (1973-1977) et Francfort (1977-1979). «Nousavonsbesoinde l’artcomme du pain de l’esprit », disait cet éternel optimiste qui croyait en l’avenir : « Rien n’est jamais perdu, etsi nous menonsla sociétéà saperte, quelque chose de nouveau verra le jour. » Cet homme-là et sa vision du monde nous manquent déjà. p Tomé s c é n o gra p h i e e t l u m i è r e : N i c o l a s S i m o n i n création son : B e r t r a n d P e l l o q u i n evant les étagères bricolées en bois bourrées de livres, les clients sont tristes. Tristes de voir fermer leur librairie, de voir s’envoler un bout de culture, de voir disparaître l’un des derniers remparts à la standardisation. Le 8 mars, sous un soleil bienvenu en ce début du mois de mars à Lille, les fidèles de L’Harmattan sont venus dire adieu à l’une des deux dernières librairies de province de la célèbre maison d’édition française spécialisée dans les sciences humaines et sociales. Ouverte depuis plus de sept ans dans cette rue chic du Vieux- Lille, L’Harmattan met la clé sous la porte. «Ce n’est pas la faute d’Internet mais du loyer, soupire Cédric Boulanger, vendeur. On ne manquait pas de clientèle: on a même augmenté de 30 % ces deux dernières années.» Son collègue Thibaut Willems, en reprenant cette affaire en 2011, avait su assouvir les besoins de lecteurs pointus à travers un panel de plus de 25 000 titres. Et, tous les quinze jours, il pimentait la vie de son petit commerce par des rencontres avec des auteurs. « On vendait plus de 1 000 livres par mois, souligne Thibaut Willems, c’est énorme, mais après sept années déficitaires, L’Harmattan a choisi de recentrer ses activités à Paris. » Equation impossible Avec un loyer de 2500 euros pour quelques vingtaines de mètres carrés de rayonnage au rezde-chaussée et dans la cave d’une vieille bâtisse en briques rouges de trois étages, l’équation était impossible. « Il aurait fallu vendre pour 7 500 euros de livres chaque mois, calcule Cédric Boulanger. Ce qui est dur, c’est qu’il y a un vrai public. On parle de crise des librairies, mais ce n’est pas vrai.» De la justification, de Luc Bol- tanski et Laurent Thévenot, entre les mains, Sequoia, 31 ans, est venu faire un dernier achat avant la fermeture. « Ça va être de plus en plus difficile de trouver des ouvrages étonnants, explique cet étudiant en philosophie. On faisait ici de vraies découvertes. Et puis j’aime le côté convivial et la texture de la vie de petits endroits comme ici. » A L’Harmattan, on venait « se frotter à autrui et tisser des liens ». On venait aussi errer entre les rayons consacrés à l’urbanisme, à l’anarchisme, aux utopies, à l’ethnopsychiatrie, au jazz, etc. « Ça fait mal au cœur car on n’est jamais content d’assister à un enterrement, surtout pour un amoureux des livres comme moi », regrette Célestin, psychologue et fidèle client. « Certains vont désormais commander sur Amazon, constate Thibaut Willems. Mais aller dans un lieu comme ici, c’est autre chose. Le renouvellement des librairies passe par l’attractivité, l’animation et plus d’espace. Quitte à être décentré.» Licencié économique, il a prévu de continuer son combat dans l’une des quinze librairies indépendantes lilloises. p Laurie Moniez (Lille, correspondance) 0123 culture Mardi 11 mars 2014 Le rock touareg des Tinariwen SÉLECTION CD Le groupe malien est en tournée en France pour présenter son dernier album, «Emmaar» Musique Franz Schubert Wanderers Nachtlied Matthias Goerne (baryton), Helmut Deutsch, Eric Schneider (piano). Ce huitième album de Matthias Goerne s’inscrit dans le droit héritage de Dietrich Fischer-Dieskau, dont le baryton allemand fut l’élève. Dépasse-t-il le maître? Difficile à dire, mais Goerne est ici au zénith d’un art sans cesse médité. La voix a mûri avec bonheur, se veloutant de nostalgie dans l’aigu, s’adoucissant avec générosité dans le grave. C’est le théâtre intime de Schubert (1797-1828) que son souffle module tout en nuances et contrastes. Puissant et retenu, affectionné mais sans affectation, Matthias Goerne est l’un des plus passionnants Liedersänger du moment. p Marie-Aude Roux A près Tassili, gratifié d’un Grammy Award en 2012, Tinariwen sortait il y a quelques semaines Emmaar, qu’il présente mardi 11 mars à Paris. Un album que le groupe touareg du Mali reviendra défendre, cet été, en France, dans les festivals (notamment aux Vieilles Charrues le 18 juillet et aux Escales de Saint-Nazaire le 1er août). Gorgé de guitares électriques, tranchant avec l’atmosphère acoustique du précédent disque, ce sixième album a été enregistré dans une maison située dans le désert du Mojave, au sud de la Californie. Comme pour Tassili, des copains rockers sont venus. Josh Klinghoffer, le guitariste des Red Hot Chili Peppers, Matt Sweeney, celui de Chavez, le violoniste et joueur de pedal steel de Nashville, FatsKaplin,et aussile slameurpoète Saul Williams. Formé au début des années 1980 dans la région de Kidal, au Nord du Mali, présenté comme le porte-voix des rebelles touareg au Mali, au début des années 1990, pour une reconnaissance de leur culture et de leur langue, le tamasheq,Tinariwenattire l’attentionde la planète rock.Celle-ci s’entiche de ces rebelles du désert portant djellaba et turbans (l’image fait réfléchir l’imagination occidentale) et d’un message de résistance. Après leur passage, en 1999, au Festival Toucouleur à Angers, invitéspar le groupe Lo’Joet la sortiede l’album The Radio Tisdas Sessions, enregistré à Kidal et réalisé par le guitariste anglais Justin Adams (il produira deux albums pour eux), les musiciens de Tinariwen jouent en 2001 aux Transmusicales de Rennes. On les verra également rejoints sur scène par Robert Plant et Carlos Santana, ouvrir un concert des Rolling Stones, à Glastonbury (Angleterre) et celui, en juin 2012, au Stade de France, des Red Hot Chili Peppers. Autant de coups de pouce non négligeables pour créer du « buzz » et élargir son public au-delà des aficionados des musiquesdumondeet autresmilitants. Cette reconnaissance et le Grammy Award, « c’est une fierté pour notre peuple », déclare le bassiste du groupe, Eyadou Ag Leche, interrogé à l’occasion du concert 1 CD Harmonia Mundi. Duke Ellington The Ellington Suites Le groupe Tinariwen est présenté comme le porte-voix de la rébellion touareg au Mali. MARIE PLANEILLE des Nuits Zébrées de Radio Nova, le 21 février, au Rocher de Palmer, à Cenon, en banlieue bordelaise. Ce jour-là, plutôt que parler du disque, la voix douce et calme, il dit d’abord son ras-le-bol et exprime, aunom dugroupeune sourde colère : « La situation n’a pas changé. Depuis sa création Tinariwen existe pour la même cause. Nous voulons simplement faire valoir nos droits, sans que cela débouche sur une guerre. Nous sommes des Berbères, musulmans, porteurs d’une culture riche et fort ancienne. Certainement pas des terroristes, comme on nous a présentés parfois dans la presse ». « Eyadou est, avec Abdallah ag allhousseyni, l’un des plus engagés de Tinariwen, mais les membres du groupe ont des opinions plus ou moins prononcées sur leur engagement politique», explique Patrick Votan, leur manager français. Certains neveulent plus entendreparler de politique, d’autres restent très discrets sur leur implication. « Ce qui est certain, c’est qu’ils veulent tous que leur culture et leur peuple soient respectés par l’administration malienne. » « Tinariwen est un groupe à géométrie variable, en fonction des tournées, des disponibilités de chacun et des budgets », poursuit PatrickVotan,en réponse à l’absence, surla tournéeactuelle de Abdallah ag Lamida, dit Intidaw, enlevé et séquestré pendant plusieurs jours par Ansar Dine, un des grou- «Nous voulons simplement faire valoir nos droits, sans que cela débouche sur une guerre» Eyadou Ag Leche musicien de Tinariwen pes islamistesà l’origine de l’insurrection armée au nord du Mali en 2012. « Enlevé parce qu’il représente une menace à la propagande d’Ansar Dine », écrivait alors sur son site l’agence d’information touarègue Toumast Press qui avait révélé l’information. Né en 1978 à Tamanrasset, dans l’extrême sud de l’Algérie, où il vit actuellement,EyadouAg Leche est 13 proche du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA), mouvement touareg revendiquant l’autodétermination et l’indépendance du territoire de l’Azawad, au nord du Mali. Plusieurs de ses membres ont été tués ou blessés par les djihadistes, dontrécemment,Ahabi AgAhmeida, représentant le MNLA au sein du comité de liaison, mis en place après les élections de 2013, censé calmer les tensions locales. Un signe suggérant un possible apaisé ? « L’idéal du peuple est bradé, mes amis. Une paix imposée par la force est vouée à l’échec », disent les paroles de Toumast Tincha, sur le nouvel album, écrites par Eyadou Ag Leche. p Patrick Labesse Emmaar, de Tinariwen. CD Emmaar/Coop/Pias. Tinariwen sera en concert le mardi 11 mars au Trianon, 80, boulevard Rochechouart, à Paris (18e). Tél. : 01-44-92-78-00. Le 29 avril à la Maison des Arts André- Malraux, place Salvatore-Allende, Créteil (94). Tél. : 01-45-13-19-19. Ellington, Duke de son prénom, devenu aussi son titre en jazz – mais il aurait aussi bien pu avoir celui de prince, de roi, d’empereur–, a écrit, parmi ses milliers de compositions, un grand nombre de pièces au long vent conçues comme des suites musicales. La réédition de The Ellington Suites, dans la série des enregistrements remasterisés du label Pablo Records, permet d’en redécouvrir trois. Des merveilles de sophistication, de swing, d’élégance: The Queen’s Suite, pour la reine ElizabethII, enregistrée en 1959, The Goutelas Suite, « portrait » du château de Goutelas (Loire), enregistré en 1971, et The Uwis Suite, évocation d’une semaine Ellington à l’université du Wisconsin, dans la ville de Madison, en 1972. Des envolées. Dans un lent déroulé pour la reine, plutôt vive et « cinématographique» pour le château et ludique, dans les racines du blues, pour le monde universitaire. Dans tous les cas, de la grande musique. p Sylvain Siclier 1 CD Pablo-Concord Music Group/Universal Music. Habib Koité Soô Avec un vrai sens de la mélodie, une guitare fluide et la voix scintillante de douceur, Habib Koité chante le Mali, la beauté digne de ses instruments traditionnels et la virtuosité de ses musiciens (Terere, où interviennent Toumani Diabaté – kora – et Bassékou Kouyaté – n’goni). Il reprend L.A., titre festoyant du bel album Brothers in Bamako, enregistré en 2012 avec le bluesman américain Eric Bibb, intègre à sa musique acoustique le son du banjo, signes tangibles de son esprit d’ouverture, cultivé depuis le début de sa carrière, il y a vingt ans. Il dit aussi son attachement aux racines, valeurs et langues de sa terre, passant du bambara au malinké, du dogon au khassonké. Il est bon de se sentir relié et en phase avec son « chez soi» (Soô, message à l’adresse des candidats au départ vers l’eldorado occidental?), chante le griot, qui ne s’interdit pas une vision critique de la tradition (Need You dénonce les mariages « arrangés»). p Patrick Labesse 1 CD Contre-Jour/Socadisc. Disparition Mortdu poèteespagnol LeopoldoMaria Panero Né à Madrid en 1948, le poète espagnol Leopoldo Maria Panero est mort, mercredi 5 mars, à Las Palmas (Canaries), à l’âge de 65ans. Fils d’un écrivain franquiste, il fit de la prison pour opposition au régime, avant que sa consommation de drogue ne le mène, dans les années 1970, à être interné; il passa le reste de sa vie en hôpital psychiatrique. Ce qui ne l’empêcha pas de construire une œuvre tenue pour essentielle dans son pays, toute de colère et de lucidité, animée par le désir de rudoyer le lecteur et de renouveler l’écriture de la provocation. De cet auteur, qui fut aussi traducteur et critique, seulement trois recueils de poésie ont été traduits en français: Dans le sombre jardin de l’asile (éd. du Noroît, 1994); Territoire de la peur (L’oreille du loup, 2011) et Bonne nouvelle du désastre &autres poèmes (Fissile, 2013). p Raphaëlle Leyris A Reims, ce sera piscine ou beaux-arts Les batailles culturelles des municipales 12/18 La maire privilégie un nouveau musée L e projet du nouveau Musée des beaux-arts de Reims serait-il en train de prendre l’eau à cause d’une piscine? Il a suffi que la municipalité soitcontrainte, en décembre 2013, de fermer le complexe sportif Nautilud, dont la toiture risque de s’effondrer, pour que le plus gros chantier culturel delavilleredevienneunenjeuélectoral. Encestempsdedisettebudgétaire, devoir engager 25 millions d’euros pour réhabiliter une piscine olympique et 55 millions pour construire le grand musée du Boulingrin s’apparente à une folie financière. « Satanée toiture du Nautilud ! », doit-on penser dans les rangs de l’équipe municipale. A cause de cet épisode, l’actuelle maire socialiste Adeline Hazan a dû reporter de deux ans l’ouverture du musée, initialement prévue en 2018, et se retrouve prise au piège d’une opposition qui fait ses choux gras du problème de financement. « Il faut reprendre le dossier et réaménager le musée sans le déménager », défend le député Arnaud Robinet, tête de liste UMP, qui ne cache pas que sa « priorité » va au complexesportifetludique.Même position au Front national,où JeanClaudePhilippot,directeurdecampagneducandidatRoger Paris,estime que «la ville n’a pas les moyens de réaliser cette nouvelle constructionetdoitrénoverl’existant».L’adjoint à la culture, Serge Pugeault, fulmine face à tant de « mauvaise foi» : « Nous travaillons sur le projet depuis 2009, déjà 5 millions d’euros ontétédépensés; etlenouveaubâtiment imaginé par l’architecte britannique David Chipperfield, choisi à l’issue d’un concours international, a été adopté à l’unanimité par le conseil municipal.» Installé depuis un siècle dans l’ancienne abbaye Saint-Denis, en centre-ville, le Musée des beauxarts expose moins de 10% de sa collection. Couvrant les grands mouvements artistiques allant du XVe auXXe siècle,elleestpourtantconsidérée comme l’une des plus prestigieuses établies en province. Mais, faute de place, des dizaines de milliers d’œuvres dorment en réserve. Et Reims va recevoir en donation 663 œuvres de Léonard Foujita (1886-1968) pour constituer le plus grand fonds européen de l’artiste franco-japonais inhumé dans la chapelle rémoise Notre-Dame-dela-Paix. Les principales toiles devraient être exposées en permanence, dans une salle consacrée à Foujita, au cœur… du futur site du Boulingrin. Cela fait des décennies que ce Musée des beaux-arts fait l’objet de discussions quant à sa localisation et six ans que la municipalitésocialiste en a fait sa priorité. « De 40000 visiteurs par an, nous pourrions passer à 200 000 », assure Reims va recevoir en donation 663 œuvres de Léonard Foujita M. Pugeault, qui insiste sur l’atout touristiqueet urbanistiqued’untel projet. Jusqu’à cette histoire de piscine et cette campagne électorale focalisée sur les enjeux de fiscalité locale, tout semblait pourtant bien engagé. Un vaste terrain, à côté des halles rénovées du Boulingrin et à deux pas de la gare TGV, attend les trois nefs et la façade translucide imaginées par David Chipperfield pour accueillir, sur 11 000 m2 (au lieu des 4 000 de l’abbaye), le nouveaumusée et transformer le quartier en nouvelle porte d’entrée de la ville, au-delà du traditionnel périmètre de la cathédrale. «Toutes les études ont démontré que restructurerl’actuelmusée coûterait plus cher – environ 100 millions d’euros – et obligerait à fermer le musée pendant six à sept ans », insiste M. Pugeault. A cette bataille de chiffres s’ajoute un débat sur l’emplacement retenu. «L’installer au Boulingrin va densifierle secteur etcacherleshalles », pointeM. Robinet, qui ne remet pas en cause le projet architectural. « Cette polémique est artificielle et créée de toutes pièces par l’UMP pour qui la culture n’est pas une priorité, considère Adeline Hazan. Arnaud Robinet était conseiller municipal lorsque mon prédécesseur, Jean-Louis Schneiter, considérait lui-même que la reconstruction sur site était une aberration», rappelle la maire, qui a ravi la ville en 2008 à la droite mais qui, d’après les sondages, est donnée perdante pour ce scrutin. Resteque le floudemeuresurles 55 millions nécessaires au projet. L’Etats’est engagé à participermais la mairie ignore à quelle hauteur. « Nous le ferons même sans aide », affirme Mme Hazan. p Sandrine Blanchard Prochain article : la prison d’Avignon Histoire de J. NOUVEL ALBUM Photo Micky Clément / Artwork Frank Loriou Reims Envoyée spéciale EN TOURNÉE EN FRANCE PARIS - LA CIGALE LE 24 MARS www.jeannecherhal.fr sport 15 0123 Mardi 11 mars 2014 Laurent Blanc: «A Paris, je suis très gâté» L’entraîneur du PSG se confie au «Monde» avant le match contre le Bayer Leverkusen en Ligue des champions Entretien La 28e journée de Ligue 1 A u lendemain de sa victoire en championnat (3-0) à Bastia, samedi 8 mars, Laurent Blanc a reçu Le Monde au centre d’entraînement du PSG, situé à Saint-Germain-en-Laye (Yvelines). Après le large succès (4-0) de ses joueurs au match aller, l’entraîneur prépare la rencontre, mercredi 12 mars au Parc des Princes, avec les Allemands du Bayer Leverkusen en 8e de finale retour de Ligue des champions. Résultats Lille-Montpellier Lorient-Saint-Etienne Bordeaux-Lyon Bastia-PSG Guingamp-Evian Monaco-Sochaux Nantes-Ajaccio Toulouse-Reims Valenciennes-Rennes Marseille-Nice Vous abordez votre match face au Bayer Leverkusen avec un avantage confortable. Etes-vous déjà projeté vers les quarts ? Classement 1. PSG : 67 points. 2. Monaco : 59. 3. Lille : 52. 4. Saint-Etienne : 48. 5. Lyon : 45. 6. Marseille : 43. 7. Reims : 42. 8. Bordeaux : 40. 9. Toulouse : 39. 10. Bastia : 37. 11. Lorient : 36. 12. Nice : 34. 13. Montpellier : 33. 14. Guingamp : 32. 15. Nantes : 32. 16. Rennes : 31. 17. Evian : 30. 18. Valenciennes : 25. 19. Sochaux : 22. 20. Ajaccio : 15. Ona bien négociéle match aller. Et de manière brillante. Il faut maintenant finir le travail. Quelles équipes souhaiteriezvous éviter en quarts ? Barcelone, le Real Madrid et surtoutle BayernMunich.Elle fait partie des meilleures équipes européennes avec une génération de joueurs très performants. Depuis quatre-cinq ans, le Bayern est toujours présent dans le dernier carré. Il a perdu deux finales [2010 et 2012]. Au regard de ce qu’il fait sur la scène européenne, c’est un club qu’il faudrait éviter, mais on ne maîtrise pas le tirage au sort. Ces équipes sont-elles actuellement au-dessus du PSG ? Elles ont une histoire européenne beaucoup plus riche. Le PSG peut-il remporter la Ligue des champions cette saison ? C’est vous, les médias, qui vous emballez. Les dirigeants ont été très clairs et sont venus à Paris avec un projet ambitieux. Ils veulent remporter un jour cette Ligue «J’espère que le club permet au football français d’être plus “dans la gagne» sur la scène européenne» des champions. Quand ? Vous ne pouvez pas fixer une date ou une saison précise. Les dirigeants savent que c’est très difficile de remporter cette compétition. On met parfois beaucoup de temps pour la gagner. Je pense notamment à Chelsea [titré en 2012]. Devez-vous faire mieux que le quart de finale en 2013 ? Quand vous arrivez une fois en 8e de finale, une fois en quart ou en 2–0 1–0 1–2 0–3 0–1 2–1 2–2 3–2 2–1 0–1 dans les prochaines semaines ? Je n’en sais rien. Pour l’instant, ce n’est pas mon souci majeur. Je sais dans quelles conditions je suis arrivé. Je sais le contrat que j’ai signé. Je m’en tiens à ça. THOMAS SAMSON/AFP demi, vous vous rapprochez. Faire mieux, c’est gagner la Ligue des champions. J’espère qu’on permet au football français d’être plus « dans la gagne» sur la scène européenne. Mais cela serait très prétentieux de penser qu’on puisse faire changer la culture française en si peu de temps. On est en retard par rapport aux Espagnols, aux Anglais et aux Allemands. En Ligue 1, vous comptez 8 points d’avance sur Monaco. Le championnat est-il plié ? Le championnat n’est pas fini. C’est du pragmatisme. Je n’ai pas à êtreséduisantdans la communication. Il reste dix journées. Même Paris est dans l’obligation de prendre des points, comme d’autres clubs. Notre situation est plutôt favorable, je ne le cache pas. C’est difficile de conserver une concentration optimale dans cette atmosphère. Les gens du club lisent les médias et l’être humain a toujours tendance à se relâcher. Même moi. Il faut donc toujours être exigeant. La Ligue 1 est-elle dévaluée avec cette configuration dans laquelle le PSG fait cavalier seul ? J’inclus aussi Monaco dans ce « cavalier seul », même s’ils sont à huit points de nous. Ils font un parcours exceptionnel. Certains disent qu’il ne faudrait pas un championnat de France à deux vitesses, alors que la Liga espagnole est à trois vitesses depuis 50 ans et cela n’a pas empêché ses clubs de gagner des Coupes d’Europe et à la Roja de tout gagner. Alors oui, il vaudraitmieuxqu’ilyaithuitéquipes avec des niveaux techniques, physiqueset desmoyenséconomiques comparables en L1. Mais il n’y a qu’en Angleterre où il y a cinq, six clubsquisontdespuissancesfinancières à peu près égales. Etes-vous satisfait de ce que vous avez réalisé jusqu’à présent au PSG ? Oui. Les observateurs disent que n’importe quel entraîneur ferait aussi bien sur le plan des résultats. Certainement. On juge une bonne saison par les titres. Jusqu’à présent, on n’a encore rien gagné. Est-ce d’autant plus important qu’un entraîneur français réussisse dans un club qui a des visées continentales ? Ondonne beaucoupplus de crédit aux entraîneurs étrangers. Pourquoi? Jen’ensais rien.J’ail’impression que si on est un entraî- neur étranger, qu’on entraîne un grand club étranger et qu’on a un petit accent, ça passe mieux. Il y a de très bons entraîneurs français. Mais on a l’impression que les étrangers sont plus compétents. Vivez-vous actuellement l’expérience la plus épanouissante de votre carrière d’entraîneur ? Oui. Ma carrière d’entraîneur est très courte. On ne donne pas leur chance aux jeunes entraîneurs dans ce métier. On préfère prendre un entraîneur étranger qui a de l’expérience. A Paris, je suis très gâté. Mon groupe est très professionnelet beaucoup de gens sont jaloux. J’ai la chance d’être ici. Ma venue a été très commentée par les observateurs. Il n’empêche que c’est moi qui suis ici. Qu’avez-vous appris depuis que vous êtes au PSG ? La notion de groupe est devenue, à mes yeux, fondamentale depuis mon passage à la tête de l’équipe nationale [2010-2012]. Si vous n’avez pas un bon groupe, vous ne pouvez pas réussir. L’entraîneur du FC Lorient Christian Gourcuff a déclaré que vous déléguiez tout à vos adjoints. Cela vous agace-t-il ? J’ai beaucoup de respect pour M. Gourcuff qui est certainement unbon entraîneur.Mais il fautévoluer. J’ai connu l’entraîneurqui faisait tout : l’échauffement, la séance, les étirements, rangeait les plots, mettait les piquets, les filets et tondait presque la pelouse. Mais c’était il y a trente ou trente-cinq ans. En quoi consiste le job d’entraîneur du PSG ? A faire des séances, vous croyez? Les séances d’entraînements,vousmême vous pouvez les faire. On a deslivres,desCD,des courspourça. L’entraînementproprementdit est important mais cela varie selon le cluboùonévolue.Quandonentraîne le PSG, on joue tous les trois jours. On fait de l’entretien. J’estime que les adjoints peuvent aussi le faire et être compétents dans ce domaine. J’ai passé mes diplômes d’entraîneur. M. Gourcuff a dû les passer. Il les a passés il y a trente ans. Il devrait les repasser maintenantets’apercevraitquelemétiera évolué. Il y a de la communication dans les cours pour devenir entraîneur.Il y a trenteans,il n’y avaitpas de communication. Votre contrat sera-t-il prolongé Quelle serait la fin de saison idéale pour le PSG ? C’est de continuer à jouer avec l’étatd’espritqu’ona actuellement. Si on continue à jouer comme cela, il y aura forcément des satisfactions à la fin de la saison. Je prends du plaisir au bord du terrain. Dans le futur, plus le niveau va s’élever, plus cela deviendra compliqué. Maison a toujourscette lignedirectrice: mettre en difficulté l’adversaireen ayant plusle ballon que lui. Quel regard portez-vous sur l’équipe de France, à moins de cent jours du Mondial ? C’est bien qu’un club comme le PSG, qui est la locomotive de la Ligue 1, ait trois internationaux français [Blaise Matuidi, Lucas Digne, Yohan Cabaye]. C’est bon signe. Je suis mal placé pour parler de l’équipe nationale. Il faudra du temps, de la patience, quelques résultats. S’il y en a, ça ira peut-être un peu plus vite. Certains joueurs sont sur la fin. D’autres, très bons, arrivent. On a tous du mal, vous plus particulièrement, à oublier ce qu’il s’est passé en 2010. p Propos recueillis par Rémi Dupré n Sur Lemonde.fr Lire l’intégralité de l’entretien. Le XVde France,«finaliste» miraculeuxdes Six Nations Jeux paralympiques Rugby La France poursuit sa moisson de médailles aux Jeux paralympiques qui se déroulent jusqu’au 16 mars à Sotchi. Lundi 10 février, Marie Bochet a remporté sa deuxième médaille d’or en s’adjugeant le super-G. Après la descente, samedi 8 mars, la skieuse tricolore, âgée de 21 ans, a gagné l’épreuve en devançant une autre française, Solène Jambaqué. Les deux athlètes portent à quatre le nombre de médailles remportées par la France en trois jours de compétition. La Savoyarde Marie Bochet, victime d’une atrophie du bras gauche congénitale, est considérée comme le fer de lance de la délégation française pour ces Jeux paralympiques. Elle reste favorite pour les trois disciplines dans lesquelles elle est encore engagée. p Vainqueurs sur le fil des Ecossais (19-17), les Bleus peuvent gagner le tournoi s’ils battent l’Irlande S eule la victoire est belle, prétend le plus réaliste des dictons sportifs. La beauté est pourtant définitivement absente du succès (19-17) obtenu par les rugbymen français samedi 8 mars en terre d’Ecosse, lors de la quatrième journéedu Tournoides six nations. Un succès qui peut se qualifier d’inespéré, voire de miraculeux. Dominateur mais maladroit, le XV du Chardon, qui menait 14-9 à la mi-temps, s’est senti volé à Murrayfield. En fait, il s’est puni tout seul. D’abord en concédant un contre qui a permis à Yoann Huget d’inscrire le seul essai français après une course de 80 mètres. Puis en commettant dans les ultimes instants du match une faute au sol offrant à Jean-Marc Doussain, face aux poteaux, de retourner le sort de la rencontre. Ce résultat a suffi à faire le contentement de Philippe SaintAndré même si le sélectionneur a peiné à tirer des enseignements positifs de la rencontre. Le premier est rétrospectif: les Bleus ont enfin renoué avec la victoire à l’extérieur, ce qui ne s’était plus produit depuis juin 2012 en Argentine. Le second est prospectif: «On ne peut pas dire qu’on a été exceptionnels», a reconnu Philippe Saint-André, avec son art consommé de la litote, mais son équipe disputera tout de même une «finale» face à l’Irlande samedi 15 mars au Stade de France afin de remporter le tournoi. L’hypothèse paraît bien optimiste sachant que le XV du Trèfle, offensifet séduisant, a corrigé l’Italie (46-7)samedi à Dublin en inscrivant sept essais. A l’occasion des adieux de leur légendaire centre Brian O’Driscoll, les Irlandais paraissentidéalementplacés, avec un point-average favorable de 81 points (contre trois pour la France), pour remporter ce trophée qui leur échappe depuis 2009. Ils auraient même pu viser le Grand Chelem cet hiver sans une défaite amère (10-13) face à l’Angleterre le 22 février à Twickenham. Les joueurs de la Rose, avec une différence de + 32, sont eux aussi toujoursen lice,aprèsavoirbattule pays de Galles, double tenant du titre, dimanche à Twickenham (29-18). Ils affronteront à Rome des Italiens qui tenteront d’éviter la cuillère en bois. Autant dire qu’un sursaut français à Saint-Denis risque de faire le bonheur des Anglais. Pas de « sinistrose » Pour l’heure, Philippe SaintAndrérefuse de céder à la « sinistrose ». Après tout, ses hommes, comme les Irlandais et les Anglais, ont obtenu « trois victoires [outre celle contrel’Ecosse,unautresuccèsprovidentiel contre l’Angleterre (26-24) et un, immanquable, face à l’Italie (30-10)] sur quatre matchs dans les Six Nations. » En 2013, ils avaient enregistré à cette même période trois défaites et un match nul. « On va se préparer à faire un grandmatchà domicile,a promisle technicien. On est un peu comme des montagnes russes, on monte et puis on redescend, on se met la pression et on se fait peur tout seul. Avec ça, on arrive quand même à gagner des matchs internationaux.» A Murrayfield, les Bleus avaient à cœur de se racheter après leur piteuse défaite du 21 février contre le pays de Galles à Cardiff (6-27). A dix-huit mois du Mondial anglais, les sept changements apportés à la formation de départ ont malheureusement creusé davantage les doutes : jouant arrêtée, celle-ci a été moribonde en touche et même chahutée en mêlée. « La seule bonne chose, c’est qu’on a tenu, a conclu Philippe Saint-André. On gagne ce match et ça ne peut amenerquedu bonheuret de laconfiance. Ça va aider nos joueurs à se lâcher complètement pendant 80 minutes au stade de France. On l’avait fait contre l’Angleterre, on est capable de le faire samedi.» Comme on ne change pas une équipe qui gagne, le groupe des trente est pratiquement inchangé fors les retours de deux joueurs du Racing-Métro, le talonneur Dimitri Szarzewski et le troisième ligne aile Bernard Le Roux, et la réhabilitation du troisième ligne centre de Toulouse Louis Picamoles. p Bruno Lesprit Les skieusestricolores s’offrentun doubléen super-G Athlétisme Eloyse Lesueur, championne du monde du saut en longueur en salle Avec Eloyse Lesueur, sacrée championne du monde en salle du saut en longueur, dimanche 9 mars, et les médailles de Pascal Martinot-Lagarde et Garfield Darien sur le 60 m haies, l’équipe de France a rempli sa mission lors des championnats du monde en salle qui se sont achevés dimanche 9 mars à Sopot (Pologne). Avec un bond à 6,85 m, la Française a pris la tête du concours lors de son 4e essai. En 60 m haies, l’Américain Omo Osaghae a décroché le titre devant les deux représentants tricolores Pascal Martinot-Lagarde (7’’45) et Garfield Darien (7’’46). Rallye Sébastien Ogier gagne le rallye du Mexique Le Français Sébastien Ogier (Volkswagen Polo-R) a remporté, dimanche 9 mars, le rallye du Mexique, la troisième manche du championnat du monde des rallyes (WRC). Cette victoire lui permet de reprendre la tête du classement général. 16 0123 disparitions & carnet Mardi 11 mars 2014 Cinéaste Jean-Louis Bertuccelli Ÿ$ )KÁË$º zɾ ýÁKË&¾ @²@Ë$Í$˺¾ šK÷¾¾KË($¾• GKǺ<Í$¾• "÷KËBK÷ìì$¾• ÍKÁ÷Ký$¾• KËË÷²$Á¾K÷Á$¾ &$ ËK÷¾¾KË($ .²÷¾ &$ &@(>¾• Á$Í$Á(÷$Í$˺¾• Í$¾¾$¾• (ÉË&Éì@KË($¾• úÉÍÍKý$¾• KËË÷²$Á¾K÷Á$¾ &$ &@(>¾• ¾É¶²$Ë÷Á¾ )ÉììÉĶ$¾• (ÉË"@Á$Ë($¾• ¾@Í÷ËK÷Á$¾• ºKGì$¾}ÁÉË&$¾• ÇÉÁº$¾}ɶ²$Áº$¾• "ÉÁ¶Í¾• óɶÁË@$¾ &L@º¶&$¾ ont la joie d’annoncer la naissance de Eugénie, le 25 février 2014, à Paris. 3 juin 1942 Naissance à Paris 1970 « Remparts d’argile » obtient le prix Jean Vigo 1976 « Docteur Françoise Gailland » 1977 « L’Imprécateur » 5 mars 2014 Mort à Paris sie (Gallimard, 1968). Ce beau film, tournédansun village du Sud algérien, mais censé se passer en Tunisie, raconte l’histoire d’une jeune fille, Rima, dont la tâche principale consiste à aller chercher l’eau au puits voisin. Un jour, les hommes du village, qui presque tous travaillent dans la carrière de pierres voisine, décident de se mettre en grève pour demander une augmentation de salaire. Tandis que des hommes en armes prennent position, Rima décide d’enlever la corde du puits afin que les soldats ne puissent pas se désaltérer. D’une grande et belle radicalité – pas de dialogues, de très beaux chants berbères qui rythment de magnifiques images signées Andreas Winding, un rythme extrêmement lent –, Remparts d’argile décrit une double révolte: celle des ouvriers contre l’injustice, et celle, beaucoup plus intérieure et silencieuse, de Rima contre l’inexorabilité de la vie. Grâce à Bertrand Tavernier, qui étaitalors attaché de presse, le film fut présenté à Cannes, à la Semaine de la critique. Prix Jean Vigo en 1970, Remparts d’argile reçut un accueil critique très favorable et, fait exceptionnel pour une œuvre aussi difficile, représenta la France aux Oscars en 1971. S’il se trouvait un distributeur courageux pour le ressortir en salles, on serait surpris de constater à quel point ce film entre en résonance avec la révolution tunisienne actuelle. Engagement Suivront trois films : Interdit aux moins de 13 ans (1982), l’histoire d’un trentenaire qui n’en peut plus devivre dans son HLM de banlieueet qui, un jour, décidede réaliser une sorte de braquage parfait ; Stress (1984), un thriller joué par Carole Laure, Guy Marchand et André Dussollier ; et Aujourd’hui peut-être(1990), qui permit,trentecinq ans après La Strada, de retrouver, pour la dernière fois, la grande et rare Giulietta Masina. Jean-Louis Bertuccelli disait que « faire du cinéma c’est se prendre au sérieux comme le font les enfants quand ils jouent ». Cinéaste engagé et attachant, il était le père de la cinéaste Julie Bertuccelli, dont le nouveau film, La Cour de Babel, sortira en salles mercredi 12mars. p Franck Nouchi survenu le mercredi des Cendres 5 mars 2014, à Nice, dans sa cent unième année. Elle sera incinérée au crématorium de Nice, le jeudi 13 mars, à 11 heures. Une messe du souvenir aura lieu ultérieurement à Paris. M. Thierry PEYROUX et Mme, née Chloé DAVEZAC, L née JAUFFRET, ancienne résistante, journaliste et enseignante, °‰Çɾ÷º÷É˾• ²$ÁË÷¾¾Ký$¾• ¾÷ýËKº¶Á$¾• ì$(º¶Á$¾• (ÉÍͶË÷(Kº÷É˾ &÷²$Á¾$¾ Naissances Deuxansplustard,en 1972,JeanLouis Bertuccelli réalise Paulina 1880, adapté du roman de Pierre-Jean Jouve. Interprété par Olga Karlatos, Maximilian Schell, Michel Bouquet, Sami Frey, ce film en costumes d’une grande beauté entendait illustrer et dénoncer les us et coutumes de la bonne société milanaise de la seconde moitié du XIXe siècle. Avec On s’est trompé d’histoire d’amour, en 1974, Bertuccelli réussit un jolifilm aux accentsféministes, coécrit et interprété par Coline Serreau. Deux ans plus tard, il connaîtra son plus grand succès public : Docteur Françoise Gailland, d’après Un cri, le roman de Noëlle Loriot (Grasset), avec Annie Girardot, François Perrier, Jean-Pierre Cassel et Isabelle Huppert. L’histoire d’une femme, médecin des hôpitaux, qui apprend qu’elle est atteinte d’un cancer du poumon. Opération, guérison, retrouvailles familiales : grand succès populaire. L’un des rôlesles plusconnusd’AnnieGirardot, qui lui valut en 1977 le César de la meilleure actrice. En 1977, Jean-Louis Bertuccelli s’attaque à forte partie en adaptant L’Imprécateur, le roman de René-Victor Pilhes (Seuil), prix Feminaen 1974.Pourraconterl’histoire de cet homme – l’imprécateur – qui sape les bases de la filiale française d’une grande société américaine, Jean-Louis Bertuccelli fait appel à un casting ébouriffant : Jean Yanne, Michel Piccoli, Jean-Pierre Marielle, Jean-Claude Brialy, Michael Lonsdale, Marlène Jobert, Christine Pascal… Au final, les numéros d’acteur masquent un peu la charge, très violente, contre le pouvoir grandissant des multinationales. Reine DAUPHIN, Ses cendres seront dispersées dans la baie d’Alexandrie (Egypte) où elle est née. AU CARNET DU «MONDE» e cinéaste français JeanLouis Bertuccelli est mort dans la soirée du mercredi 5 mars, à Paris. Il avait 71 ans. On lui doit sept longs métrages, parmi lesquels Remparts d’argile, qui obtint le prix Jean-Vigo en 1970. Né d’un père italien et d’une mère française le 3 juin 1942, JeanLouis Bertuccelli avait fait des études de cinéma à l’Ecole LouisLumière. De 1964 à 1966, il travaille au cinéma et à la télévision en tant qu’ingénieur du son. Attiré par la mise en scène, il tourne plusieurs courts-métrages : Jeanine ou l’amour, La Mélodie du malheur, Oaxaca et Tricot. En 1969, il réalise Rempartsd’argile, son premier long-métrage, d’après Chebika, un livre de Jean Duvignaud, alors interdit en Tuni- ont l’infinie douleur de faire part du décès de ‚ɶº$ËKË($¾ &$ Í@ÍÉ÷Á$• ºú>¾$¾• ©&…{ ¯.%) '.%'T N0R.)3x'N.0 R „e ]W bU bU bU „e ]W bU be `Z Xx)0T',3,%vKNXN'T‡R) UNIFRANCE FILMS Claudine Dauphin, sa fille, Les familles Roche, Dauphin, Lacau, Sauvée, Fitterer, Moreau et Bouquet, ses cousins, Devant la Grande Bleue ou l’Atlantique déchaîné, souvenez-vous d’elle qui aimait tant la mer ! 32, rue d’Alleray, 75015 Paris. 29, rue Verdi, 06000 Nice. Charlotte Dinnematin-Dukat, sa fille, Dominique et Gilles Dinnematin, sa sœur et son frère, Lucie Dukat, la maman de Charlotte Et toute la famille, ont le chagrin de faire part du décès de Jacqueline et Stelio FARANDJIS ont la joie d’annoncer la naissance de leur deuxième arrière-petit-fils, Lucien, Seymour DINNEMATIN, journaliste, le mardi 4 mars 2014, à l’âge de soixante-six ans. petit frère de Jules, fils de Émilie RICCIARDI et Antoine ROY. Anniversaire de naissance Dix-huit ans. Charles, On se recueillera en la chambre funéraire de l’hôpital Sainte-Périne, le mardi 11 mars, à 11 h 15, au 45, rue Mirabeau, Paris 16e, puis à 14 heures, au cimetière d’Epône (Yvelines). Cet avis tient lieu de faire-part. bon anniversaire mon fils. Charles, Mireille, Yasha, Diane, Irène et leurs familles, Le monde est à toi ! Maman. Décès Nous, Yaël Fogiel, Laetitia Gonzalez Et toute l’équipe des Films du Poisson, sommes terriblement tristes d’apprendre le décès prématuré de Jean-Louis BERTUCCELLI. Grand réalisateur, magnifique personne, merveilleux père, grand-père et ami, Jean-Louis va nous manquer. Pour Julie, Emma, Darius et Angèle, ainsi que tous les proches, nos pensées les plus chaleureuses. Le préfet honoraire Pierre Breuil, son époux, Marc et Fumi Breuil, Anne et François Guilbaud, ses enfants, Enzo, Hugo, Mathilde et Vincent, ses petits-enfants, Les familles Gratacap et Breuil, ont la tristesse de faire part du rappel à Dieu de M Michèle BREUIL, me née GRATACAP, professeur de Lettres classiques, chevalier dans l’ordre des Palmes académiques, survenu le 8 mars 2014, à l’âge de soixante-douze ans. Les obsèques religieuses auront lieu le mardi 11 mars, à 16 heures, en l’église Saint-Salvy, à Albi (Tarn). Priez pour elle ! Jacques et Gisèle Mahier, Ses neveu et nièce Et toute la famille, ont la douleur de faire part du rappel à Dieu du colonel François CART, officier de la Légion d’honneur, médaille militaire, croix de guerre, déporté de la Résistance à Dachau, survenu le 6 mars 2014, dans sa quatre-vingt-douzième année. Les obsèques auront lieu le mercredi 12 mars, à 15 heures, en l’église SaintVincent, au Mesnil-le-Roi (Yvelines). ont le regret de faire part de la disparition de Mme Lily DWEK, née CHAMMAH, le mardi 4 mars 2014. L’inhumation a eu lieu le mercredi 5 mars, au cimetière du Montparnasse, à Paris 14e. Mme Denise Ganne, son épouse, Ses enfants Et petits-enfants, ont le regret de faire part du décès de M. Pierre GANNE, directeur honoraire de la BNPP, survenu le 2 mars 2014, dans sa quatre-vingt-dix-neuvième année. L’inhumation a eu lieu dans le caveau familial au cimetière de Crédin (Morbihan). Le médecin général inspecteur (2S) Léon Garréta, son époux, Anne et Dominique Garréta, ses enfants, Adrian et Carol Anne, ses petits-enfants et leur maman, Virginia Vander Jagt, Pierre et Marie-Reine Garréta, son beau-frère et sa belle-sœur, Les familles Garréta et Gavagnach, Ses amis Et ses proches, Jean-Eugène GARTNER, ingénieur des Arts et Manufactures (ECP 1946), géophysicien, né le 3 juillet 1922, est décédé le mardi 4 mars 2014. De la part de Alice Gartner-Leenhardt, son épouse depuis soixante-cinq ans, Thierry et Marie-Noëlle Gartner, Renaud Gartner, Corine et Vincent Bouton, Sylvie et Bruno Brau, Agnès et Daniel Nicoloso, ses enfants et leurs époux, Cécile et Jérôme, Marion et Thomas, Lucie et Florian, Tiphaine et Johan, Yann et Mélanie, Isabelle, Sandrine, Anaïs, Eloïse, Basile, Noémie, ses petits-enfants, Léonie, Clémence, Nathan, Manon, Dalva, ses arrière-petits-enfants. Un culte de souvenir et d’espérance a été célébré ce samedi 8 mars, à 16 heures, au temple protestant, 13, rue de Maguelone, à Montpellier. « Chacun tient de Dieu un don particulier » (I Cor. 7.7) Alice Gartner, Fonfrège, 34980 Saint-Clément-de-Rivière. [email protected] Ses élèves ont la tristesse de faire part du décès de M. René GOURGON, professeur des Universités, praticien hospitalier, survenu le 5 mars 2014. Chef du service de cardiologie des hôpitaux Bichat et Beaujon, à Paris et à Clichy, professeur à l’université ParisDiderot, il fut un « Maître » de la cardiologie, aimé et unanimement respecté. Sonia Henrich, son épouse, Sylviane Henrich et Jean-Pierre Minella, Véronique et Jean-Jacques Balteaux, Eric Henrich et Isabelle Schlichting, ses enfants, Vanessa, Valentine et Colin, ses petits-enfants, Jeannette Schaff, sa sœur, ont la grande tristesse de faire part du décès de Gaston HENRICH, ingénieur, diplômé de l’Ecole nationale supérieure de chimie de Mulhouse, survenu le 5 mars 2014, dans sa quatre-vingt-unième année. Nos profonds remerciements pour leur grande humanité, aux médecins, infirmières et à tout le personnel du service d’oncologie de l’hôpital Hautepierre de Strasbourg. 3, rue de la Bruche, 67800 Bischheim. Olivier et Urszula Lacolley, son fils et sa belle-fille, Azélie Lacolley, sa petite-fille, Marie-Christine Lacolley-Roca, sa nièce, Tous ses neveux et nièces, Line Boyer, son amie, ont la grande tristesse d’annoncer le décès de Albert LACOLLEY, née RENAUD, pharmacien-biologiste, le 6 mars 2014, à Paris. Une messe sera célébrée le mardi 11 mars, à 10 h 30, en l’église SaintLambert-de-Vaugirard, Paris 15e. L’inhumation aura lieu le même jour, dans le caveau familial, à l’issue d’une bénédiction en l’église de Villargoix (Côte-d’Or), à 16 h 30. 13, rue François-Villon, 75015 Paris. a la tristesse d’annoncer du décès du docteur Jean LOSSERAND, survenu le 5 mars 2014. Sa présence créative et son engagement analytique ont marqué ceux qui l’ont rencontré. Les membres de l’APF adressent à sa famille et à ses proches leurs sincères condoléances. Edith et Daniel, ses enfants Et toute sa famille, ont la tristesse d’annoncer le décès de Roger PAYOT, agrégé de philosophie, survenu à Lyon, le 25 février 2014. L’inhumation a eu lieu à Menglon (Drôme), où repose son épouse, Suzanne, décédée le 3 décembre 2011. 87, rue du Général-Conrad, 67000 Strasbourg. Arlette Quillet, son épouse, Renaud, son fils, Anne, sa fille, font part du décès de Pierre QUILLET, inspecteur d’Académie honoraire, survenu le 7 mars 2014, à l’âge de soixante-quinze ans. Les obsèques civiles auront lieu le mercredi 12 mars, à 15 heures, au cimetière d’Albert où l’on se réunira. Pas de plaques, que des fleurs naturelles. Des dons sont possibles à FRANCE ADOT ou à la Ligue nationale contre le cancer. Arlette, Renaud et Anne Quillet, 105, rue de la Libération, 80300 Albert. Anniversaire de décès Le 11 mars 2012, Maurice BERNARD, quittait les siens. Pour Aline, Dominique et Anne, il est toujours présent. Il aurait été heureux de connaître Hugo, son arrière-petit-fils, né le 18 octobre 2013. Selon sa volonté, son corps a été incinéré au crématorium de Strasbourg, dans l’intimité. font part du rappel à Dieu de Marcelle GARRÉTA, L’Association psychanalytique de France ancien administrateur de la France d’Outre-Mer, ancien sous-préfet de Figeac, Saintes, ancien préfet de la Creuse, de la Charente, des Côtes-du-Nord et de Seine-et-Marne, officier de la Légion d’honneur, commandeur du Faucon d’Islande, survenu le 7 mars 2014, dans sa quatre-vingt-dixième année. La cérémonie religieuse sera célébrée le mercredi 12 mars, à 15 heures, en l’église Saint-François-Xavier, Paris 7e. 10, rue Laval, 92210 Saint-Cloud. Hommage Jean-Louis CLUSE, agrégé de Lettres, docteur de l’université Paris III, nous a quittés le 1er mars 2014. Il avait soixante ans. Ses amis et ses collègues expriment leur profonde tristesse et gardent son lumineux souvenir. « ...je m’en vais, ô mémoire ! à mon pas d’homme libre, sans horde ni tribu, parmi le chant des sabliers... » Saint-John Perse. Communications diverses Autour de Claude Vigée Grand Prix national de la Poésie 2013, après-midi poétique, samedi 15 mars 2014, à 15 heures, Lecture poétique Les poètes et la guerre, avec Gabrielle Althen, Pierre Brunel, Anne Mounic, salle Las-Vergnas - Centre Censier, 13, rue de Santeuil, Paris 5e. http://revuepeut-etre.fr Institut universitaire Elie Wiesel, Leçon, mercredi 12 mars 2014, à 19 h 30, « L’invention de la religion juive », avec Henri Atlan, professeur émérite aux Universités de Paris et de Jérusalem. Inscriptions sur : www.instituteliewiesel.com 119, rue La Fayette, Paris 10e. Tél. : 01 53 20 52 61. 0123 météo & jeux Mardi 11 mars 2014 < -5° 0 à 5° -5 à 0° 5 à 10° Mardi 11 mars Le printemps se poursuit 40 km/h 8 10 40 km/h 7 15 Caen 4 17 Dublin Strasbourg 2 17 4 18 Nantes Dijon Poitiers Limoges 3 15 4 17 1020 Lyon 0 4 101 16 1015 3 16 5 21 A Montpellier 5 18 Nice Marseille 6 18 8 17 7 17 Rosine Coeff. de marée 38 Les conditions anticycloniques persisteront et signeront sur le pays. Elles apporteront un temps toujours sec et généralement bien ensoleillé. On notera cependant de fréquents brouillards le long des côtes de la Manche, parfois longs à se dissiper. Enfin, un temps lumineux mais voilé par moments, prédominera sur le quart Sud-Est. Il fera toujours très doux pour la saison, jusqu'à 21 degrés en Aquitaine. Ajaccio 20 km/h 5 15 Lever 13h52 Coucher 04h15 Lever 07h11 Coucher 18h48 Aujourd’hui Mercredi 3 16 3 14 6 16 6 17 3 16 4 18 4 21 6 18 8 19 5 16 Jours suivants Jeudi Nord-Ouest Ile-de-France Nord-Est Sud-Ouest Sud-Est D Bucarest AIstanbul Ankara Séville Rabat Front froid Occlusion Thalweg D Athènes Tunis Tunis Alger Beyrouth Tripoli Tripoli Le Caire beautemps cielcouvert assezensoleillé bienensoleillé bienensoleillé bienensoleillé bienensoleillé bienensoleillé assezensoleillé bienensoleillé beautemps bienensoleillé bienensoleillé faiblepluie beautemps averseséparses beautemps bienensoleillé bienensoleillé beautemps beautemps assezensoleillé assezensoleillé assezensoleillé bienensoleillé enpartieensoleillé 5 7 10 3 2 2 6 4 2 3 3 3 1 7 1 10 10 2 4 4 4 1 14 0 0 3 12 10 16 12 12 13 14 14 8 7 11 12 4 9 9 13 20 13 16 16 18 8 19 5 11 5 Riga Rome Sofia Stockholm Tallin Tirana Varsovie Vienne Vilnius Zagreb bienensoleillé bienensoleillé enpartieensoleillé assezensoleillé bienensoleillé enpartieensoleillé beautemps bienensoleillé bienensoleillé bienensoleillé 2 7 -2 1 1 6 1 2 2 4 5 15 5 8 4 15 10 13 8 14 Alger assezensoleillé Amman bienensoleillé Bangkok bienensoleillé Beyrouth assezensoleillé Brasilia enpartieensoleillé Buenos Aires beautemps Dakar bienensoleillé Djakarta pluiesorageuses Dubai assezensoleillé Hongkong enpartieensoleillé Jérusalem bienensoleillé Kinshasa pluiesorageuses Le Caire bienensoleillé Mexico beautemps Montréal cielcouvert Nairobi assezensoleillé 6 7 27 15 19 12 17 25 24 18 8 22 12 9 1 16 17 13 34 20 25 26 19 30 29 20 16 28 22 24 3 29 Dans le monde Jérusalem New Delhi soleil,oragepossible assezensoleillé New York assezensoleillé Pékin averseséparses Pretoria assezensoleillé Rabat Rio de Janeiro soleil,oragepossible bienensoleillé Séoul Singapour assezensoleillé bienensoleillé Sydney averseséparses Téhéran beautemps Tokyo assezensoleillé Tunis Washington enpartieensoleillé Wellington beautemps Outremer Cayenne Fort-de-Fr. Nouméa Papeete Pte-à-Pitre St-Denis soleil,oragepossible bienensoleillé averseséparses pluiesorageuses bienensoleillé soleil,oragepossible 16 26 4 9 1 17 16 19 9 21 24 32 -2 10 25 32 19 27 9 15 1 9 8 17 10 20 15 19 25 25 22 26 23 25 29 28 27 30 27 30 Météorologue en direct au 0899 700 713 1,34 € l’appel + 0,34 € la minute 7 jours/7 de 6h30-18h Vendredi Samedi 4 18 3 17 6 14 5 16 5 17 7 12 1 15 1 16 5 10 5 20 6 21 8 16 “Connaître les religions pour comprendre le monde” 4 20 6 21 9 21 CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX Motscroisés n˚14-059 2 Odessa Sofia Rome Dépression Front chaud Amsterdam Athènes Barcelone Belgrade Berlin Berne Bruxelles Budapest Bucarest Copenhague Dublin Edimbourg Helsinki Istanbul Kiev La Valette Lisbonne Ljubljana Londres Luxembourg Madrid Moscou Nicosie Oslo Prague Reykjavik Les jeux 1 Anticyclone En Europe 9 19 Zagreb Belgrade DBarcelone Kiev Budapest Espagne Grande douceur toujours d’actualité : 22 degrés à Séville Perpignan Températures à l’aube 1 22 l’après-midi Munich Vienne Barcelone Madrid Bordeaux 8 16 1025 Berne Lisbonne Lisbonne Grenoble Toulouse Copenhague Bruxelles Paris -3 13 Moscou Amsterdam Berlin Varsovie Prague 1030 Londres Chamonix St-Pétersbourg Riga Milan T Clermont-Ferrand Helsinki Minsk 3 16 5 17 Biarritz A 1035 Besançon D 3 17 6 18 20 km/h Edimbourg Metz 1005 Orléans 6 18 Mater l’échec Oslo Stockholm 35 10 5 18 p a r R ena ud Ma cha r t 1025 1010 Reykjavik 5 100 3 4 5 6 7 z Découvre notre nouvelle formule Sudoku n˚14-059 8 9 Solution du n˚14-058 TF 1 Série. Double foyer. Avec Mimie Mathy, Delphine Rollin, Laurent Olmedo (France, 2013, audio.). 22.55 New York unité spéciale. Série. Non avoué U. La fin ne justifie pas... V (S9, ép. 16 et 5/19) ; Meurtre dans un jardin (saison 1, 8/22) U. Avec Christopher Meloni. 1.25 Au Field de la nuit. Invités : Catherine Hermary-Vieille, Vladimir Fédorovski, Gavin’s Clemente-Ruiz... (70 min). II III IV FRANCE 2 V 20.45 Rizzoli & Isles. VI Série. Ce qui ne nous tue pas (S3, 1/15, inédit) ; L’Apprenti. Le Retour du chirurgien (saison 1, épisodes 1 et 8/10) U. Avec Angie Harmon. 23.05 Mots croisés. La droite forte ? 0.30 Mortelle randonnée pp Film Claude Miller. Avec Michel Serrault, Isabelle Adjani (France, 1983, 105 min) U. VII VIII IX I. Font le ménage bien à fond dans le fond des pavillons. II. Fait saillie au coude. Chez les Grecs. III. Instrument de force. Arrangement peu apprécié sous la Coupole. IV. Un début de catastrophe. Tronc du système artériel. Possessif. V. Sensibles aux gros tirages. VI. Belle Hellène. Equipai l’équidé. VII. Accueil en grande pompe. Personnel. VIII. Quelqu’un qui restera anonyme. Bien dégager au sommet. IX. Limité par l’horizon. Donnera son avis et son approbation. X. Engagées à remplir et respecter ses devoirs. Solution du n° 14 - 058 Horizontalement I. Définissable. II. Emerisée. Ait. III. Carré. Nicher. IV. Oc. Elança. Dé. V. Nias. Vahinés. VI. Vampée. Emeri. VII. Etienne. An. VIII. Nièce. Génial. IX. Uo. Têtes. ESO. X. Enns. Artisan. Lundi 10 mars 20.55 Joséphine, ange gardien. I Horizontalement A ujourd’hui, ce n’est plus l’Agence France-Presse qui annonce les nouvelles les plus brûlantes, mais Twitter. Et c’est par l’entremise du compte de Gilles Jacob, président du Festival de Cannes, que fut propagée, dimanche 9 mars peu après 9 heures, celle de la mort de Gerard Mortier : « Le Belge Gerard Mortier, grand directeur d’opéra anticonformiste et novateur, dans la lignée de Rolf Liebermann et d’Hugues Gall, est mort. » (M. Jacob a cependant tort de comparer les deux fils spirituels de Liebermann, qui se détestaient et ne se ressemblaient en rien.) Au cours de la matinée, une série de réactions officielles furent relayées par les réseaux sociaux, mais rien aux JT de 13 heures et 20 heures de France 2, alors que, dès son journal dominical de la mi-journée, Claire Chazal, qu’on a si souvent vue aux premières d’opéra, rappelait en quelques mots la singularité de l’ancien directeur de l’Opéra de Paris. A 15 heures, i-Télé et BFM-TV commençaient timidement à annoncer la mort de Gerard Mortier par un simple bandeau déroulant au bas de l’écran, mais seule LCI consacrait quelques images commentées à cette nouvelle. Arte, qui a si souvent diffusé les productions de Gerard Mortier (au Festival de Salzbourg et ailleurs), n’a pas annoncé d’hommage. Mais son écran Internet (concert.arte.tv/fr/) tenait à disposition deux spectacles enregistrés au Teatro Real de Madrid, que Gerard Mortier avait contribué à remettre sur l’échiquier des établissements lyriques européens Les soirées télé 10 1 1 12 FRANCE 3 Loto X Verticalement 1. Réponse qui n’engage pas vraiment. 2. Cubitus. On en parle beaucoup sans les voir. 3. Fîtes de nouveau. 4. A donné Le Nom de la rose. Sorti des brancards. 5. Rendis plus attrayant. Personnel. 6. Brille au-dessus des Pyramides. A mis quatre temps dans nos moteurs. Club phocéen. 7. Peu visible quand elle est sympathique. Scorpion d’eau. 8. Licencié à la fin. Pour un petit bain. Soutient la quille. 9. Perdent tout contrôle. 10. Sudiste. Patron. Base de départ. 11. Aspect. Difficile à avaler. 12. Rétribueras. Philippe Dupuis Verticalement 1. Déconvenue. 2. Emaciation. 3. Fer. Amie. 4. Irrespects. 5. Niel. Enée. 6. Is. Aven. Ta. 7. Senna. Eger. 8. Seiche. Est. 9. Caïman. 10. Bah. Nénies. 11. Lieder. Asa. 12. Etrésillon. 20.45 Leçons de vie. Dépasser son handicap. Documentaire. Andrea Rawlins (France, 2014, audio.). 22.35 Météo, Soir 3. 23.45 La Case de l’oncle doc. Cendrillon en route pour Versailles (55 min). Résultats du tirage du samedi 8 mars. 6, 15, 35, 40, 46 ; numéro chance : 7. Rapports : 5 bons numéros et numéro chance : pas de gagnant ; 5 bons numéros : 81 435,40 ¤ ; 4 bons numéros : 1 422,00 ¤ ; 3 bons numéros : 14,10 ¤ ; 2 bons numéros : 6,30 ¤. Numéro chance : grilles à 2 ¤ remboursées. CANAL + 20.55 Spécial investigation. Patrimoine: la face cachée des 1 000 merveilles du monde. Magazine. 22.30 Les Nouveaux Explorateurs. Le Monde du globe-cooker. Documentaire. 0.05 L’Œil de Links. Best of (25 min). Joker : 8 968 593. FRANCE 5 0123 est édité par la Société éditrice du « Monde » SA Durée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 94.610.348,70¤. Actionnaire principal : Le Monde Libre (SCS). Rédaction 80, boulevard Auguste-Blanqui, 75707Paris Cedex 13 Tél.: 01-57-28-20-00 Abonnements par téléphone: de France 32-89 (0,34 ¤ TTC/min); de l’étranger: (33) 1-76-26-32-89; par courrier électronique: [email protected]. Tarif 1 an : France métropolitaine : 399 ¤ Courrier des lecteurs: blog: http://mediateur.blog.lemonde.fr/; Parcourrier électronique: [email protected] Médiateur: [email protected] Internet: site d’information: www.lemonde.fr ; Finances : http://finance.lemonde.fr; Emploi : www.talents.fr/ Immobilier: http://immo.lemonde.fr Documentation: http ://archives.lemonde.fr Collection: Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40 Le Mondesur microfilms: 03-88-04-28-60 La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire des publications et agences de presse n° 0717 C 81975 ISSN 0395-2037 Imprimerie du « Monde » 12, rue Maurice-Gunsbourg, 94852 Ivry cedex Président : Louis Dreyfus Directrice générale : Corinne Mrejen PRINTED IN FRANCE 17 C’EST À VOIR | CHRONIQUE > 40° 1015 Châlonsen-champagne PARIS 35 à 40° 11.03.2014 12h TU www.meteonews.fr 8 17 Rennes 30 km/h 30 à 35° 6 16 5 15 7 14 25 à 30° En Europe D A Lille 20 à 25° Amiens Rouen Brest 15 à 20° D 6 14 Cherbourg 10 à 15° écrans 80, bd Auguste-Blanqui, 75707 PARIS CEDEX 13 Tél : 01-57-28-39-00 Fax : 01-57-28-39-26 Toulouse (Occitane Imprimerie) Montpellier (« Midi Libre ») 20.35 Un village français. Série. La Planque. Si j’étais libre (S3, 3 et 4/12). Avec Fabrizio Rongione, Audrey Fleurot. 22.20 C dans l’air. Magazine. 23.45 Entrée libre. Magazine (20 min). ARTE 20.50 Spécial femmes engagées. La Leçon de piano ppp Film Jane Campion. Avec Holly Hunter, Harvey Keitel (Fr. - Austr., 1992). 22.45 Amateur p Film Hal Hartley. Avec Isabelle Huppert, Martin Donovan (EU, 1994). 0.30 La Lucarne - Mekong Hotel Film Apichatpong Weerasethakul (60 min). M6 20.50 Top chef. Episode 8. Télé-réalité (saison 5). 23.50 Norbert et Jean: le défi (120 min). qui comptent, en dépit des féroces coupes budgétaires imposées par l’Etat espagnol : Brokeback Mountain, un opéra du compositeur américain Charles Wuorinen d’après la nouvelle d’Annie Proulx (1997, qui a donné lieu en 2005 à une fameuse adaptation cinématographique, Le Secret de Brokeback Mountain, signée Ang Lee), et la mise en scène d’Alceste, de Gluck, par Krzysztof Warlikowski, l’un des metteurs en scène de théâtre que Gerard Mortier fit régulièrement venir secouer le cocotier de la scène lyrique. Gerard Mortier avait l’art du rebrousse-poil Car Mortier, dont l’urbaine douceur n’avait d’égal que la coruscante violence de ses p(rop)ositions, avait l’art du rebroussepoil : décadrer (voire violenter) un classique favori ou présenter un ouvrage qui ne soit pas dans l’esprit musical du temps. Ainsi, Brokeback Mountain est conçu dans un langage musical des années 1970, dissonant et grisailleux, mais Mortier défendait cette musique comme il défendait les esthétiques si différentes de Philip Glass ou du compositeur belge Philippe Boesmans, qu’il soutint – avec raison – pendant plus de trente ans. Mais, ainsi que le rappelle le site Internet d’Arte Journal, Mortier ne craignait pas l’échec de ses choix et chérissait comme un talisman la maxime de Samuel Beckett: « Echouez, échouez à nouveau, mais échouez mieux. » p Mardi 11 mars TF 1 20.55 Person of Interest. Série. Room Service. Seule contre tous (saison 2, ép. 15 et 16/22, inédit) U ; Gestion des risques (S1, 16/23) U. Avec Jim Caviezel. 23.30 Following. Série (S1, ép. 13 à 15/15, inédit, 150 min) W. FRANCE 2 20.45 Aventures de médecine. Au cœur de l’homme. Magazine. 22.50 Infrarouge - Hôpital : attention, fragile ! (Fr., 2014). 0.15 Soignés d’office. Documentaire (65 min) U. FRANCE 3 20.45 Richelieu, la pourpre et le sang. Téléfilm. Henri Helman. Avec Jacques Perrin, Pierre Boulanger (France, 2013, audiovision). 22.25 Météo, Soir 3. 23.30 Les Carnets de Julie. Magazine. 0.25 Libre court. Magazine (60 min). CANAL + 20.55 La Chasse Film Thomas Vinterberg. Avec Mads Mikkelsen, Thomas Bo Larsen (Danemark, 2012) V. 22.50 The Master pp Film Paul Thomas Anderson. Avec Joaquin Phoenix, Philip Seymour Hoffman (EU, 2012, 130 min) U. FRANCE 5 20.35 Le Monde en face. Mes questions sur... Le Désir féminin (2013) U. 21.30 Débat. Avec Catherine Solano, Brigitte Lahaie. 21.45 Crèmes anti-âge : coup de jeune ou coup de bluff ? 22.35 C dans l’air. Magazine. 23.50 Entrée libre. Magazine (20 min). ARTE 20.50 Histoire. Ellis Island, une histoire du rêve américain. Documentaire. Michaël Prazan (France, 2013). 22.35 Forbidden Voices. Les Voix interdites. Documentaire (Sui., 2012). 0.10 Bahreïn, plongée dans un pays interdit. Documentaire. Stéphanie Lamorré (55 min). M6 20.50 Indiana Jones et le royaume du crâne de cristal p Film Steven Spielberg. Avec Harrison Ford, Cate Blanchett (Etats-Unis, 2008, audio.) U. 23.05 Sahara Film Breck Eisner. Avec Matthew McConaughey, Penélope Cruz (EU - Esp., 2005, 135 min) U. 18 décryptages 0123 Mardi 11 mars 2014 Malgré l’impopularité du gouvernement et les divisions à droite, les risques d’alternance sont faibles. Mais la mixité sociale des villes peut y contribuer Municipales: quels basculements? A proportion d’habitations à loyer modéré pour un élu de gauche, par exemple), et si sa gestion politique de la campagne (dissidence, alliances électorales, etc.) et ses performances économiques (création d’emplois) ou financières (qualité de la gestion municipale) sont satisfaisantes. Loin de s’opposer, il apparaît cependant que ces deux approches sont au contraire complémentairesafin de mieux circonscrire la dynamique électorale fran- çaise au plan municipal. C’est le choix que mescollèguesRichardNadeau, BrunoJérôme et moi-même avons effectué dans le cadre d’une étude menée sur les communes françaisesde plus de 30 000 habitants (soit 236 villes). Depuis 1965, la gauche a réalisé ses meilleures performances électorales en 1977 et 2008 (respectivement 160 et 140 villes gagnées). Sans surprise, ces deux grands succès confirment la thèse du scrutin référendaire local : les électeurs ont sanctionné la droite au pouvoir et inversementpour les victoires de la droite en 1983 et 2001 (soit 111 et 126 villes remportées), lorsque la gauche gouvernait. Dans l’ensemble, il est possible de définir une trajectoire politique pour chacune de ces 236 villes en distinguant les villes stables des villes instables électoralement. Depuis 1983, la gauche (PS, PC, Verts)et la droite(UMP, RPR, UDF)ont gouverné sans interruption respectivement 75 et 54 des plus grandes villes de France, c’est-à-dire que près de 55 % des agglomérations de plus de 30 000 habitants n’ont pas connu d’alternance politique depuis plus d’un quart de siècle. A l’inverse, seule une soixantaine de villes a connu des changements de majorité répétés durant la même période. Comment expliquer de tels phénomènes ? Trois familles d’explication issues de la sociologie électorale s’imposent dans le cas français. En premier lieu, la structure sociodémographique des villes constitue un puissant marqueur de stabilité politi- Dunkerque 5 6 8 Roubaix 47 Boulogne-sur-Mer Valenciennes Liévin 3 2 Maubeuge Arras 1 Dieppe St-Quentin Amiens Charleville-Mézières Cherbourg-Octeville Rouen Beauvais Compiègne Le Havre Thionville 9 Reims 10 11 Creil VILLES DE GAUCHE Metz Caen Soissons Evreux Haguenau DANS LA DURÉÉ Saint-Malo Nancy Vandœuvre-lès-Nancy Saint-Brieuc Dreux Strasbourg Stable Paris Saint-Dizier Brest Alençon Rennes Quasi stable Troyes Epinal Chartres Colmar Quimper Instable Orléans Laval Le Mans Mulhouse Auxerre Belfort Vannes Angers Lorient Tours Blois Montbeliard VILLES DE DROITE Nantes Saint-Nazaire Vierzon Dijon Saumur Besançon DANS LA DURÉE Nevers Saint-Herblain Cholet Joué-lès-Tours Rézé Stable Châtellerault Bourges Châlon-sur-Saône Le Creusot Quasi stable Châteauroux La Roche-sur-Yon Mâcon Instable Poitiers Montluçon Bourg-en-Bresse Roanne La Rochelle Niort Vichy 14 Limoges 18 Annecy 13 16 Lyon 19 1-Cambrai ; 2-Douai ; Angoulême St-Chamond 17 Chambéry Clermont3-Lens ; 4-Lille ; 15 12 Antibes Ferrand Saint-MartinPérigueux Saint-Etienne Grenoble 5-Marcq-en-Barœul ; 6-Tourcoing ; Cagnes-sur-Mer d’Hères Bordeaux Romans-sur-Isère 7-Villeneuve d’Ascq ; 8-Wattrelos ; Cannes Brive-la-Gaillarde Echirolles Mérignac 9-Le Grand-Quevilly ; 10-Saint-EtienneValence Grasse Talence Aurillac de-Rouvray ; 11-Sotteville-lès-Rouen ; Pessac Montélimar Gap Le Cannet 12- Bron ; 13-Caluire-et-Cuire ; Agen Fréjus 14-Rilleux-la-Pape ; 15-Saint-Priest ; Avignon Alès Albi Nice Mont-de-Marsan 16-Vaux-en-Velin ; 17-Vénissieux ; Salon de Provence Nîmes Montauban 18-Villefranche-sur-Saône ; 19-Villeurbanne Bayonne Montpellier Aix-en-Pr. Istres Toulouse Marignane Anglet Béziers Bastia Castres Arles Pau Aubagne Carcassonne Sète Martigues Hyères Tarbes Narbonne Marseille Ajaccio Perpignan La Seyne-sur-Mer Toulon Calais SOURCE : MARTIAL FOUCAULT STABILITÉ OU INSTABILITÉS DES VILLES DE PLUS DE 30 000 HABITANTS ENTRE LES ÉLECTIONS MUNICIPALES DE 1983 ET 2008 (Hors Ile-de-France) RAPPORT DE FORCE GAUCHE/DROITE En nombre de villes gagnées Gauche 1965 J. Chirac CONCURRENCE DES LISTES DISSIDENTES Nombre de villes où le maire sortant est concurrencé par une liste dissidente au 1er tour Couleur politique de la ville N. Sarkozy Droite, centre et FN et alliés F. Mitterrand 180 160 140 120 100 80 60 V. Giscard d’Estaing locaux, les formes de mobilisation durant la campagne et l’analyse des résultats, ont longtemps détourné les chercheurs de la prise en compte de la dynamique des élections municipales sur le temps long et les interactions entre enjeux nationaux et locaux. Deux traditions intellectuelles s’opposent à ce sujet. La première stipule que les élections locales sont des élections de second ordre : des scrutins moins importants aux yeux des partis, des électeurs et des médias, que les élections nationales. Les municipales seraient caractérisées par un taux de participation plus faible et par l’expression d’un vote de protestation à l’endroit du gouvernement national. Selon une acception stricte de ce concept, le résultat de telles élections dépendrait pour l’essentiel de la conjoncture nationale. Un président impopulaire provoquera la défaite de nombreux candidats se présentantsousl’étiquette dela majoritégouvernementale.Dans cecas de figure,le destin des élus locaux serait largement tributaire de la conjoncture nationale. Une deuxième approche avance que les facteurs locaux, à la fois structurels et conjoncturels, permettent aux candidats d’échapperaux tendancesnationales. Cette approche théorique distingue les facteurs de long terme (commel’appartenance sociale ou l’orientation idéologique) et les facteurs de court terme (comme l’image des candidats ou la performance de l’économie) pesant sur les choix électoraux. Dit autrement, selon cette approche, un maire de la même couleur politique qu’un président impopulaire résistera d’autant mieux à une vague électorale nationale défavorable qu’il est implanté dans une municipalité avec une sociologie favorable (ouvrière ou avec une forte DR G. Pompidou Un président impopulaire provoquera la défaite de nombreux candidats se présentant sous l’étiquette de la majorité gouvernementale Martial Foucault Professeur des universités à Sciences Po Paris et directeur du Cevipof (CNRS). Ses travaux de recherche portent sur le comportement électoral, le vote économique et l’économie politique. Il a publié en 2012 « Le Vote des Français de Mitterrand à Sarkozy » (Presses de Sciences Po) et publiera en septembre, aux Presses de Sciences Po, « Villes de gauche, villes de droite » (avec Richard Nadeau, Bruno Jérôme et Véronique Jérôme-Speziari) C. de Gaulle deux semaines du premier tourdes électionsmunicipales, partis politiques et électeurs peinent à se mobiliser pour ce premier rendezvous électoral depuis la victoire du Parti socialiste à la présidentielle de 2012. De par cette situation calendaire, les élections municipales de mars bénéficient du statut d’élections intermédiaires et interviennent comme des élections de mi-mandat, c’est-à-dire comme des référendums locaux sur l’action du gouvernement. Au regard de la très faible popularité actuellede l’exécutif(17 % d’opinionsfavorables dans le dernier baromètre TNS Sofres), les résultats attendus au soir du 30 mars permettront d’y voir plus clair sur la capacité de la gauche municipale à contrecarrer l’impopularité gouvernementale. La situation est-elle pour autant plus favorable à droite ? Avec 31 % d’opinions en sa faveur, le principal parti d’opposition a une popularité à peine supérieure à celle du PS (29 %) et semble souffrir de l’instabilité de son leadership et des divisions internes. Malgré cette défiance exprimée à l’égard des partis majoritaires et le relatif désintérêt à l’égard des prochaines municipales, elles demeurent un moment incontournable de la vie politique du fait de leur statut particulier dans le cœur des Français. Ainsi le conseil municipal reste l’institution à laquelle les électeurs accordent leur confiance la plus élevée (62 %), selon le baromètre de la confiance politique du Cevipof paru en janvier, loin devant le gouvernement (25 %) et l’Union européenne (32 %). Cette prédisposition favorable envers l’institution municipale interroge donc les ressorts de la décision électorale locale. Les paradigmes dominants en science politique de l’étude de telles élections, en se focalisant sur l’émergence d’enjeux 46 5 71 77 83 89 95 01 2008 Gauche 8 1983 10 17 1989 Droite 60 68 21 16 1995 52 2001 2008 Les trente villes qui peuvent virer à droite LA TRAJECTOIRE POLITIQUE des villes françaises depuis 1983 permet de tirer quelques leçons sur les résultats à attendre du scrutin de mars. L’exercice de prévision électorale étant un art délicat en sciences sociales, il est important de préciser que prédire une victoire ou une défaite parmi les 236 villes de plus de 30 000habitants requiert quelques explications méthodologiques et précautions d’usage. Ainsi, les projections pour le second tour s’appuient sur un modèle statistique où le vote est expliqué par des facteurs nationaux et locaux. A partir de l’estimation de ce modèle statistique, il ressort qu’une trentaine de villes sont susceptibles de basculer à droite. Avec un gain de 30 villes, la droite se retrouverait dans une situation comparable à celle de 2001 lorsqu’elle gouvernait 126 municipalités. Parmi ces gains, les villes de Périgueux, Anglet, Narbonne, Brive, Metz, Toulouse, Caen, Saint-Etienne, Asnières et Poissy présentent de fortes chances de basculement, ce qui constituerait en quelque sorte un retour à une forme de normalité politique pour ces villes historiquement ancrées à droite depuis 1983. Les chances de victoire de la droite paraissent également élevées à Ajaccio, Montbéliard, Vandœuvre-lès-Nancy, Salon-de-Provence, La Seyne-sur-Mer et Saint-Chamond. Plus symbolique serait la victoire de la droite dans des villes traditionnellement enracinées à gauche. Parmi elles, Pau, Charleville-Mézières et Belfort figurent en bonne place pour basculer dans le giron de l’UMP. Dans les communes d’Aubagne et Romans-sur-Isère où les deux maires sortants PS se représentent, la forte probabilité d’une triangulaire avec le Front national rend l’issue du scru- tin un peu plus complexe pour la droite. A défaut de vague bleue, un rééquilibrage droite-gauche est donc à attendre pour ces élections. Si Paris, Lyon, Lille, Dijon ont très peu de chances de basculer à droite, les villes de Nice et Bordeaux et même Marseille devraient voir leurs maires sortants UMP réélus. Alors que les années1980 et 1990 opposaient des maires avec des politiques municipales bien identifiées à droite ou à gauche, aujourd’hui peu de différences existent dans la conduite des affaires locales. C’est pourquoi la notoriété des candidats, la force du FN et le mécontentement actuel affiché à l’endroit du président de la République et de son premier ministre sont susceptibles d’être les facteurs-clés de cette élection municipale, finalement passionnante dans la perspective d’un nouveau réalignement local. p que. A l’image des travaux pionniers de géographie électorale d’André Siegfried, il existe toujours une corrélation entre les structuressocialeslocales et les comportements des électeurs. Très clairement, la stabilité des villes de gauche est assurée parune structuresociologiqueprincipalement composée d’ouvriers, employés et sans-emploi et inversement pour la stabilitédes villesde droite.Enrevanche,lesformes de mixité catégorie socioprofessionnelle favorisent nettement les alternances municipales. En deuxième lieu, le bilan économique du maire peut servir de guide dans la décision électorale. S’il n’existe pas d’indicateurs de perception par les électeurs des finances locales, les choix budgétaires et fiscaux opérés par les municipalités ont des conséquences directes sur la décision de vote. Lesvilles les plus sainesfinancièrement doublées d’une faible pression fiscale (Courbevoie, Neuilly-sur-Seine ou encore Alençon) garantissent ainsi une stabilité à gauche et une très forte stabilité à droite. A l’inverse, les villes présentant un endettement par habitant élevé (telles que La Ciotat, Angoulême, Salon-de-Provence, Avignon) sont plus exposées à l’instabilité électorale.Ce résultatsuggère queles équipes municipales sont responsables aux yeux des électeurs et que ceux-ci punissent ou récompensent ces dernières en fonction de leur qualité de gestionnaire. En dernier lieu, les configurations politiques locales peuvent également venir perturber la dynamique électorale de ces Le verdict des urnes contribuera à modifier la dynamique de la politique nationale jusqu’à la prochaine élection présidentielle villespar laprésencede candidaturesdissidentes ou de triangulaires au second tour. Alors qu’en 1983, on observait seulement 13 cas de listes dissidentes (8 à droite), ce chiffre atteignait 128 en 2001 et 73 en 2008 (52 à droite). L’interventionde plus en plus fréquente des partis politiques dans la désignation des candidats aux élections municipales, phénomène amplifié par les lois de décentralisation, a créé des tensions organisationnelles dans la vie des fédérations locales et a provoqué des candidatures dissidentes. Mesurédepuis 1983,l’effet des dissidences à droite représente en moyenne une perte de 5 points de pourcentage des voix au premier tour et 2,5 points pour une dissidence de gauche. Enfin, la montée en puissance du Front national au plan local, malgré sa très faible implantation (59 conseillers municipaux en 2008), a multiplié le nombre de triangulaires avec un pic en 1995 (101 cas). Si le FN est en mesure de rééditer sa performance de 1995 où il avait recueilli 12 % des suffrages dans les villes de plus de 30 000 habitants, un tel scénario impliquerait un grand nombre de triangulaires très défavorables à la droite (perte de 8,5 % en moyenne) et dans une proportion bien moindre à la gauche (perte de 2,5 % en moyenne). Les élections municipales de mars représentent un véritable enjeu politique en ce sens que le verdict des urnes contribueraà modifier la dynamiquede la politique nationale jusqu’à la prochaine élection présidentielle, sous la forme d’un remaniement ministériel et d’une révision éventuelle de la coalition gouvernementale actuelle. L’impopularité de François Hollande pourrait se traduire par un soutien accru pour l’UMP qui reste handicapée par la capacité de nuisance du FN. A l’exception de la centaine de villes stables à droite comme à gauche, dont on peut prédire sans grandrisque le maintien de la majorité sortante, les villes les plus instables risquent d’être le théâtre d’un référendum de la politique nationale et d’aboutir à une sanction de l’exécutif national même si les urnes restent locales. p 0123 19 analyses Mardi 11 mars 2014 Francophonie : la France fait-elle cavalier seul ? ANALYSE par Martine Jacot Service Développement éditorial Q ualifiée de « belle et grande cause » par François Hollande, la francophonie ne mobilise guère les foules dans l’Hexagone, contrairement à la plupart des autres pays concernés.Et il y a fort à parier que le 20 mars, Journée internationale de la francophonie instaurée en 1998, ne fera pas exception. L’intérêt pour cet espace linguistique a toutefois semblé croîtreauvu deschiffressur sonenvergureà travers le monde, et des projections annonçant sa formidable expansion en Afrique. « La francophonie, c’est 220 millions de locuteurs. Mais à terme, dans trente ans, il y en aura plus de 700millions. C’est un enjeu considérable, à la fois pour la culture mais aussi pour l’économie et pour la politique », a répété M. Hollande lors de ses vœux aucorps diplomatique,mi-janvier. L’Organisation internationale de la francophonie (OIF), l’entité qui regroupe 57 Etats ou gouvernements « ayant en commun l’usage du français », anticipe que l’Afrique, où vivent actuellement environ la moitié des francophones du monde, en rassemblera environ 85% en 2050. A trois conditions, sujettes à aléas. La première est que ce continent garde ses taux de natalité élevés – ils risquent de s’infléchir en raison de la croissance des classes moyennes dans de nombreux pays. La deuxième est que la scolarisation y progresse à grands pas. Or le système éducatif public est défaillant dans beaucoup de cas. Il faudra ensuite que le français soit consolidé – au Sénégal seul un tiers de la population le parle – et demeure une langue enseignée. Ce n’est plus le cas au Rwanda, qui a abandonné le français en 2011, du primaire à l’université, au profit de l’anglais. Le français régresse en Europe et dans toutes les organisations internationales où il est langue officielle, mais son avenir se jouera en Afrique, où il est en concurrence avec les langues locales, avec l’anglais et aussi l’arabe, via les écoles coraniques. La France, fortement engagée militairement au Mali et en République centrafricaine, vient de prendre différentes initiatives qui se voudraient en pointe sur plusieurs plans. Ministre déléguée à la francophonie, Yamina Benguigui a organisé, début mars à Kinshasa, le deuxième Forum mondial des femmes francophones, qui a rassemblé un millier d’entre elles, en majorité africaines. Dans cette même capitale de la République démocratique du Congo (RDC), M. Hollande avait pourtant ostensiblement boudé, lors du sommet de la francophonie de 2012, son homologue Joseph Kabila – propulsé au pouvoir en 2001, puis élu à l’issue de scrutins contestés –, en raison du peu de cas LE GRAND RENDEZ-VOUS EUROPE 1 « LE MONDE » - I-TÉLÉ Claude Bartolone: «La justice doit passer pour M. Sarkozy» Nicolas Sarkozy, c’est l’ennemi public numéro un de la gauche ? Non.Non,parcequel’ami numéro un de la gauche, c’est la justice, et elle doit pouvoir faire son travail. Quel que soit le rôle, quel que soit le rang que l’on peut avoir dans la société française, il faut que la justice passe. Pour M. Sarkozy, ancien président de la République, comme pour tout le monde. Donc, on peut écouter un ancien président de la République, on peut écouter des avocats. Les avocats s’en émeuvent. En l’occurrence,les textes le prévoient. L’article 100 de procédure pénale prévoit que s’il doit y avoir à un moment donné un avocat écouté, il faut simplement prévenir le bâtonnier. Donc après, il faut voir si la justice a fonctionné. Mais ce n’est pas interdit par nos textes, et je crois qu’il faut que la justice triomphe. Est-ce que ça vous étonne toutes ces affaires autour de Nicolas Sarkozy ? Elles n’ont rien à voir. Pour le moment, c’est comme dans un tableau de pointillisme, on regarde les différentes taches, et ça finit par faire, quand on prend un peu de distance, un paysage. Mais l’affaire Buisson, ce n’est quand même pas de la même nature, elle vient montrer ce qu’ont été les dérives que l’on a pu constater au cours du précédent quinquennat. A propos des soupçons de surfacturation à l’UMP, Jean-François Copé propose plus de transparence au sein des partis. Il va déposer a priori deux propositions de loi. Vous y êtes favorable ? Vous les soutiendrez ? Je ne comprends même pas ce qu’est cette carte de défausse jouéepar M. Copé, parcequ’en l’occurrence,pourles comptesdes partis politiques,la transparenceexiste. (…) On voit bien que M. Copé se retrouve avec un caillou dans sa chaussure, pour ne pas dire un euro. Mais, ce n’est pas le problème de la République. Nous avons des lois qui ont permis à tous les partis politiques d’installer la transparence sur leurs financementsetsur leurs campagnesélectorales. On voit bien que M. Copé essaie de trouver un truc. Le truc en l’occurrence pour rétablir la confiance avec les Français, c’est la loi. Il y a une loi sur la transparence qui donne des résultats, qui est reconnue par tous. Donc qu’il n’essaie pas de réinventer des choses qui sont déjà aujourd’hui existantes. A propos du pacte de responsabilité vous avez dit : « Ce sera un nouveau temps, une nouvelle donne. » Est-ce que cela signifie que c’est ce pacte de responsabilité qui peut ouvrir la deuxième partie du quinquennat, avec une autre équipe gouvernementale ? En l’occurrence, en termes de proposition, en termes de manière d’agir pour pouvoir remuscler l’appareil de production et faire rentrer la France dans le XXIe siècle d’une manière solide, je crois que c’est une nouvelle étape, et elle est extrêmement importante. Donc, elle doit être incarnée ? Dans le cadre du quinquennat, cette idée est surtout incarnée par le président de la République. Faut-il changer les contours de la majorité ou garder les écologistes au gouvernement malgré les couacs ? Je crois à cette alliance entre EuropeEcologie-Les Vertset le Parti socialiste. Je vais être encore plus clair : je souhaiterais que l’on soit même en mesure d’avoir le même candidat au moment de la prochaine élection présidentielle. p qu’il faisait des principes démocratiques et des droits de l’homme. Force est de constater que, depuis ce sommet, seuls des progrès de façade ont été enregistrés à ces chapitres. Lors de ce forum, Mme Benguigui a annoncé la création d’un fonds pour la scolarisation des filles jusqu’à 16 ans. « Je veux pouvoir imposer par la francophonie ce droit-là, a-t-elle déclaré, pour contribuer à faire tomber de fait les mariages précoces et les mutilations sexuelles. » « Quand une fille est allée à l’école jusqu’à 16 ans, a-t-elle estimé, elle ne prendra pas son couteau tranchant pour exciser sa propre fille ou sa nièce parce qu’elle saura que cela n’est ni dans l’islam ni dans les autres textes religieux, et que ce n’est qu’une coutume qui a perduré.» Financements en baisse La scolarisation pour tous au primaire est un objectif auquel travaillent des organisations multilatérales comme l’Unesco ou le Partenariat mondial pour l’éducation, mais la ministre souhaite « trouver des moyens supplémentaires» auprès des Etats francophones et des partenaires privés afin de jouer « un rôle d’accélérateur ». L’Agence française pour le développement a déjà engagé, depuis 2012, plus de 700 millions d’euros dans des programmes de scolarisation. L’autre initiative que s’apprête à lancer Mme Benguigui est, elle, financée à hauteur de 3,95 millions par la France : baptisée onde.fr www.lem Votre supplément « Frankenvirus » : l’expérience de la discorde Alors que deux équipes tentent de rendre plus facilement transmissibles entre mammifères des virus mortels de grippe aviaire, certains chercheurs n’ont pas de mots assez durs pour dénoncer ces travaux jugés trop risqués. une ampudouleur Après tourAmputer la être nts peuvent tation, les patie fantôme. Une un membre mentés par phénomène ise a réduit ce PAGE 3 équipe suédo elle. prothèse virtu grâce à une de la stage ADN Elargir le dépi étude américaine sugUne tion des trisomie ? d’une généralisa d’ADN gère l’intérêt de recherche nouveaux tests maternel. P A G E 2 sang le fœtal dans Internet plein la Toile Des robots % par des à plus de 50 est fréquenté ates indisns : des autom non-humai ment, mais son fonctionne ts. P A G E 2 pensables à » malveillan aussi des « bots Claude Bartolone Le Grand Rendez-Vous avec « Le Monde » est diffusé chaque dimanche de 10 heures à 11 heures sur Europe 1 et i-Télé [email protected] dans ¶ ¶ L’AFRIQUE, OÙ VIVENT ENVIRON LA MOITIÉ DES FRANCOPHONES DU MONDE, VA EN RASSEMBLER ENVIRON 85 % EN 2050 n i a m De Propos recueillis par Michaël Darmon, Alexandre Kara et Vanessa Schneider président de l’Assemblée nationale « 100 000formateurs pour l’Afrique», elle vise à fournir une formation à distance, via Internet, aux élèves instituteurs ou professeurs dans 8 pays d’Afrique. Cette initiative concurrence un programme lancé en 2008 par l’OIF de formation des maîtres à distance (Ifadem) auprès de 10pays francophones, avec de bons résultats. La France chercherait-elle à faire dorénavant plutôt cavalier seul en matière de francophonie? Sa contribution volontaire à l’OIF, destinée à financer ce type de programmes,a diminué de moitié en trois ans, passant de 21 millions en 2011 à 10 millions cette année. D’une manière générale, Paris a réduit ses financements aux opérateurs de la francophonie, parmi lesquels la dynamique Agence universitaire de la francophonie – 776 établissements à travers le monde –, pionnière dans les formations à distance diplômantes. La subvention de la France au réseau privé des Alliances françaises (au nombre de 812 dans 135 pays) a baissé de 15 % en trois ans. Les établissements scolaires français à l’étranger (481 dans 131 pays) ont, eux, perdu 416 millions d’euros en 2014. « La langue française n’appartient pas à la France », répète à l’envi François Hollande. Dès lors, s’allier pour des actions communes avec d’autres contributeurs de la francophonie moins endettés (Canada, Québec, Belgique et Suisse) pourrait faire sens. p Dans un avis elligence ? Doper l’int ltatif natioComité consu très riche, le enjeux examine les nal d’éthique », dont o-amélioration P A G E 2 de la « neur dangers. et es limit il détaille Chez une particulière e Une hérédité tères comm èle, des carac des raciplante mod ison et la taille la date de flora transmettent sans que et se PAGE 3 nes varient ge. d’ADN ne chan la séquence eport comme pass e Jean L’empathie et psychologu Le psychiatre nationalité d’acquérir la Decety vient go qu’il pour C’est à Chica 7 américaine. uisme. P A G E ux sur l’altr trava ses suit s, exercice avalanche en garde Simuler les nivologue met à risque Un ance accorgrande confi contre la trop la dynamiles décrivant dée aux modè uses. P A G E 3 neige es que des coulé lations Lluis n des popu migrations Généticie i explore les Quintana-Murc nt chercheur montre brilla passées. Ce s’est adapté ent l’homme aussi comm PAGE 7 aux microbes. gue Bertrand Le pneumolo le à l’e-cigaAntitabac naguère hosti le constiDautzenberg, i qu’el e aujourd’hu la lutte rette, estim essentielle dans . P A G E 7 tue une arme isme. Rencontre tabag le e contr tre en jeux La science en en ligne r à des jeux . anes à participe es de référence ent des prof dans des revu e tifiques incit publications gagn en plus de scien stratégie validée par des le monde y ticiens, de plus Une la science. Tout de géné urs. re rès nate enco prog ordi ribuer au physiciens ou s qui résistent aux seuls faction de cont Biologistes, satis lème la prob vent -5 soumettre des joueurs y trou PAGES 4 afin de leur ir ludique, les Outre un plais rveau ons pour le ce ti ra ib v es n De bon ritournelles, s… r de nouvelles dies rythmée à mémorise ute de mélo ent pourtant moins à l’éco trébuchent er qui parvienn insoniens qui quoi ? Enquête. die d’Alzheim rée, des park nts de la mala Pour préfé attei t? son nts men chan Des patie neurones. Com illées par leur du bien aux le coma réve fait 5 dans 4 ique s S La mus PAGE des personne n sous pressio Chercheurs lier ou périr»… nnie du « pub gique. cements, tyra esse psycholo course aux finan climat de détr tifs en baisse, entraîne un Budgets et effec métiers de la recherche ise. des cœur du mala Enquête au L’évolution PAGES 4 -5 enteurs ? Tous des m exagérer le t tendance à cents avaien ou illicites marginales expliavaient c e). Comment Kara des pratiques les, ceux qui du questionnair Williams et breuses variab l’attraction étaient s deuxième vague dent Ritch Savin- es of Sexual sur sociohétéro la question cela?, se deman mondiale, la revue Archiv rs déclaré leur gie elle à ce tatives, quer dans un article de la -seconde guerre avaient toujou sexualité seraitepuis l’après grandes enquêtes quanti urs Joyner de la sociolo presque toubre2013). La des La «malédiction objet qui parle s, voire plusie logie utilise t pas, à en croire pondent Behavior (décem plusieurs millier parfois pendant ir affaire à un Probablemen ? soc corres sur es ne «d’avo fluide es réalisé point s du Métier de idus, suivis gues études. Les répons nt diverger de deux vaient les auteurdes sujets qui se m milliers d’indiv individus, les sociolo tes les autres à dizaines de . 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Thaïlande Bruno Philip Région de l’Isan (Thaïlande) Envoyé spécial A B I R M AN I E Chiang Mai L AOS Khon Kaen THAÏLANDE Isan kong Mé Bangkok, ils pensent que les gens du nord-est de la Thaïlande sont des imbéciles », énonce d’un ton égal Chaineuk Phokachang, 74 ans, en se penchant sur la tableoù un néon jette une flaquede lumière crue. «Mais, poursuit l’homme, même si nous sommes pauvres et pas aussi bien lotis que les habitants de la plaine centrale et de la capitale, nous représentons une force.Voyez: l’armée n’ose même plus faire de coupsd’Etat,carils saventquenous,les“chemises rouges” qui défendons le gouvernement, n’avons pas peur des tanks…» Cette conversation s’est tenue en février au milieu de la cour de la maison d’un village thaïlandaisnommé Na Ke, luimêmesituédans larégionde l’Isan(«nordest » en thaï) qui regroupe une vingtaine deprovincesà l’identitésingulièrepar rapport à Bangkok et au reste d’un pays comparableà laFrancepar satailleet sa population. L’homme, comme tous les villageois qui l’entourent ce soir-là, appartient au mouvement dit des « chemises rouges ». Ils sont partisans de l’ancien premier ministre déchu Thaksin Shinawatra, renversé par les militaires en 2006. Ce regroupement hétérogène et traversé de courants parfois contradictoires dont la couleur n’est pas celle du communisme – même si d’anciens guérilleros du défunt Parti communiste thaï peuplent parfois ses rangs – a éclos après le putsch pour exiger le retour de l’idole écartée. Ces activistes paysans vêtus de pourpre soutiennent bien sûr du même élan l’actuelle première ministre Yingluck, sœur de Thaksin, élue en 2011 et qui fait face depuis trois mois à une fronde interminable. Ses adversaires s’efforcent de l’acculer à la démission, en l’accusant de diriger un régime corrompu et d’être manipulée par Thaksin le grand frère, en exil à Dubaï depuis 2008 pour échapper à une peine de deux ans de prison pour corruption et abus de pouvoir. «Thaksin, c’est un génie, poursuit Chaineuk Phokachang le retraité. Jamais dans l’histoire de la Thaïlande un premier ministre avait tenu les promesses faites aux plus pauvres…» La réaction des paysans de l’Isan et leur soutien quasi aveugle pour Thaksin et sa sœur illustrent la fracture Ilsvivent dansl’Isan, loin deBangkok. Leurhéros?L’ancien premier ministre Thaksin Shinawatra, renversé en2006. Leur combat? Soutenir sasœur, actuelle chef dugouvernement contestée Bangkok CAMBODGE Mer d’Andaman 100 km Golfe de Thaïlande MALAISIE sociale et identitaire d’un pays en plein marasme. La situation politique actuelle dessine en effet la carte d’un royaume profondément divisé entre nord et nord-est d’un côté et le sud, le centre et Bangkok, de l’autre, entre classes aisées et classes inférieures, entre le monde urbain et rural. C’est donc ici, loin de Bangkok et tout proche du Laos voisin, que l’on trouve des éléments d’explication à l’impasse politique actuelle.Ce Nord-Est plus déshéritéest comme le reflet inversé de l’image renvoyée par l’opulente Bangkok et de tous ceux qui ont profité du « miracle » économique des années 1980. Car, dans cet Isan auxterresacidesetauxrendementsagricoles plus faibles, la modernité est souvent une façade. Quand on s’enfonce dans les routes secondaires, que l’on pénètre dans des bourgs éloignés, on y sent comme un air de sous-développement… A Na Ke, Supot Kengam, 55 ans, chante elle aussi les louanges de Thaksin l’exilé en détaillant les mesures prises quand il était aux affaires: «Il nous a permis de nous faire soigner pour une somme maximale de 30 bahts [moins d’un euro], couvrant les frais médicaux ou d’hospitalisation. Avant, les pauvres devaient attendre et emprunter pour aller à l’hôpital. Thaksin a aussi accordé des subventions d’un million de bahts par village pour aider à leur développement. On n’avait jamais vu ça…» Qu’importe, en fait, pour les paysans que Thaksin fut un capitaliste à l’idéologie des plus néolibérales et que son gouvernement fut marqué par la corruption et le népotisme : ce que l’on retient ici de son passage au pouvoir (2001- 2006), c’est le souvenir d’un politique qui a augmenté le niveau de vie local. Tout se passe comme si cet ancien policier devenu milliardaire après avoir créé un empire dans le secteur des télécoms avait redonné une sorte de dignité à ces fermiers qui jamais, naguère, n’auraient osé relever la tête pour faire entendreleur voixfaceauxélitestraditionnelles: palais royal, armée, grandes entreprises liées à l’establishment. Quand on sait que le gouvernement alloue 70 % de son budget à Bangkok et ses environstandisqueleNord-Est,quiregroupe un tiers des soixante-dix millions de Thaïlandais, n’en recueille que 6 %, on a une idée des déséquilibres… Selon la Banque mondiale, durant les années où l’ancien premier ministre était au pouvoir, les revenus des ménages en Isan firent un bon de46 %. Ce qui n’est pas rien quandon songe au contexte d’inégalité des plus criants quiprévautdansle pays: selon des chiffres datant de 2010 publiés par des spécialistes des questions sociopolitiques thaïes, en Thaïlande,on évalueque le différentieldes salaires entre les 5 % les plus riches et les 5 % les plus pauvres est de dix… L es manifestants de Bangkok, promonarchistesinvétérés,activistesvenus des provinces plus riches du sud du pays, épaulés par les classes moyennes et supérieures, affichent souvent avec hauteur leur supériorité à l’égard de ces paysans du Nord-Est, qu’ils traitent parfois de «buffles »… Cette attitude trouve ses racines dans l’histoire particulière de l’Isan: à partir du XIIIe siècle, une grande partie de la région appartenait au royaume du Laos. Au début du XIXe, les soldats du royaume de Siam – l’anciennom de la Thaïlande – mirent à sac la capitale laotienne, Vientiane, et se livrèrent à des déplacements forcés de population d’ethnie lao dans ce qui est aujour- d’hui le Nord-Est thaïlandais. Rien de bien étonnant alors que, pour beaucoup de représentants de l’élite de la capitale, les gens de l’Isan soient considérés comme des « Laos ». C’est-à-dire des « ploucs » même s’ils sont bouddhistes, comme eux, etparlentundialecteappartenantaugroupe des langues thaïes, mais très proche de la langue lao… Réaction de Sanong Kemuang, 58ans, profession « homme à tout faire », comme il le dit lui-même, et habitant d’Akat Annuay, un autre village « rouge » de 523 âmes de l’Isan : « Oui, les gens de Bangkok disent de nous que nous sommes des Beaucoup de représentants de l’élite de la capitale considèrent les gens de l’Isan comme des «Laos». C’est-à-dire des «ploucs» Laotiens, et cela nous fait beaucoup de mal car ils pensent aussi que les Laotiens sont fainéants et stupides.» Il ajoute, approuvé par les autres villageois assis autour de lui : « En fait, on se sent beaucoup plus proches des Laotiens, car les Laotiens sont comme nous, généreux et hospitaliers.» Pour couronner le tout, les autorités thaïlandaises se sont efforcées, depuis le début du XXe siècle, de nier les identités locales au motif d’imposer le principe d’une « thaïtude » forgée selon des critères de Bangkok et du pouvoir royal au nom de l’unité nationale. Un paradoxe que relève l’historienaméricain David Streckfuss, qui réside à Khon Kaen, une des plus grandes villes de l’Isan : « Nombre d’habitants de la région ont développé un sens complexe de leur identité. Ils ont été simultanément niés ethniquement et marginalisés socialement. Au point qu’ils ont fini par se sentir considérés comme des citoyens de seconde zone, qu’ils n’osaient plus afficher leur culture.Tandisque,del’autrecôtédelafrontière formée par le Mékong, [les “cousins” laotiens] devenus les “protégés” des Français durant la colonisation pouvaient se AGNÉS DHERBEYS POUR « LE MONDE » comporter à loisir comme des “Laos” [au sens ethnique du terme]. Le mouvement des “chemises rouges” a ainsi permis aux gens du Nord-Est thaïlandais de revendiquer leur culture de l’Isan»… L’«hommeà toutfaire» duvillage« rouge » plaisante-t-il d’ailleurs tout à fait quand il lâche, déchaînant des rires dans l’assistance:«Ici,onn’a paseuaccèsàl’éducation, on n’a pas fini nos études, tout est trop centralisé à Bangkok. Mais, aujourd’hui, ce sont les gens de l’Isan qui vont faire changer la Thaïlande, et si ça ne leur plaît pas aux manifestants [antigouvernementaux de Bangkok], on est prêts à se séparer du reste du pays.» Lacriseen coursaurait-ellesemélesgermes d’un mouvement indépendantiste dans ces terres du Nord-Est ? Sans doute pas. Mais que cette crise ait creusé le fossé entre les gens de l’Isan et la capitale, c’est l’évidence.EcoutonsDeng Noppawan,professeure d’histoire dans un collège de Khon Kaen et accessoirement présentatrice d’un talk-show d’une radio « rouge » de la ville. La façon dont cette dame d’une cinquantaine d’années résume la perception par les gens de Bangkok de leurs compatriotes de l’Isan est significative de l’état d’espritdebeaucoupdans la région: «Pour les Bangkokiens, les gens de l’Isan sont bons dans trois professions : ouvriers, serviteurs et prostituées…» De fait, la crise actuelle est la prolongation d’une confrontation qui n’en finit pas : en 2010, les « chemises rouges » avaient occupé elles aussi Bangkok, pour exiger le retour de leur héros exilé. Un mouvement réprimé dans le sang par l’arméesousl’égided’un précédentgouvernement, « anti-Thaksin » celui-là. Plus de 90personnes avaient été tuées. Aujourd’hui, alors qu’aucune issue n’est en vue, déjà 22 personnes sont mortes et 700 ont été blessées en quatre mois de conflit larvé. Désormais, même si les manifestants ont quitté les grands carrefoursde Bangkok,qu’ilsoccupaientdepuis la mi-janvier, et si l’on assiste ces derniers jours à un certain retour au calme, une guerre civile, tant redoutée mais jamais vraiment envisagée, commence à hanter les esprits. Et, puisque rien n’est réglé et que la fronde antigouvernementale continue, la colère gronde toujours chez les « chemises rouges» de l’Isan et des provinces du Nord, elles aussi « rouges » : « Si les [riches et les élites] de Bangkok ne veulent plus de nous, qu’ils nous laissent nous gouverner nous-mêmes!», renchérit la professeure Deng Noppawan. p 0123 0123 Mardi 11 mars 2014 L’AIR DU MONDE | CHRONIQUE pa r S y l v i e K a u f f m a n n Les grains de sable de Poutine S REMARQUABLE TACTICIEN, VLADIMIR POUTINE, DANS SES CALCULS, N’AVAIT PAS PRÉVU LES GENS amedi soir 8mars, les hommes en treillis qui gardent Maïdan, la place de l’Indépendance à Kiev, ont eu un visiteur inattendu : Mikhaïl Khodorkovski. L’ancien patron de Youkos, l’oligarque milliardaire russe devenu prisonnier de Poutine, libéré le 20 décembre 2013 après dix ans de camp, est de passage dans la capitale ukrainienne. Il a choisi l’exil, à Berlin et en Suisse, et a sagement déclaré au lendemain de sa libération surprise qu’il n’avait pas l’intention de faire de politique ; tout au plus, a-t-il promis, se battrait-il pour les droits des prisonniers. Quoi de plus naturel alors, par les temps qui courent, qu’un week-end à Kiev ? Peut-être Ukrainiens et Russes n’ont-ils pas tout à fait la même conception de la politique que nous. Mais lorsque l’on s’appelle Mikhaïl Khodorkovski, que l’on choisit l’Institut polytechnique de Kiev comme lieu de sa première intervention publique, le 10 mars, et que cette intervention a pour thème «Libertés et droits de l’homme », on peut s’imaginer que ces choix ne passeront pas tout à fait inaperçus au Kremlin. Et que ce petit détour par Maïdan, cet hommage rendu aux morts de février, cette fraternisation au coin du brasero avec les anciens de l’Afghanistan qui lui demandent des autographes, ces poi- A nos lecteurs «Le Monde» innove L De Twitter en YouTube Le professeur Zoubov affirme avoir reçu de nombreux messages de soutien depuis la publication de son article. Pas du Kremlin, en tout cas, puisqu’il a appris assez vite qu’il était limogé de son poste. Aux dernières nouvelles cependant, il a été réintégré dans ses fonctions. Toujours à Moscou, où le pouvoir pensait avoir réduit au silence l’opposant Alexeï Navalny en l’assignant à résidence et en le privant d’Internet, sa femme a décidé de prendre le relais. « A partir d’aujourd’hui, c’est moi, Ioulia Navalnaïa, qui tiens ce compte, a-t-elle annoncé sur le compte Twitter de son mari. Et je passe tout d’un coup à un demi-million de followers ! » Et donc, bravant l’interdiction, @Navalny tweete, aux bons soins de Navalnaïa. C’est tout bête, il fallait juste y penser. Il y a aussi des grains de sable en Ukraine. Beaucoup. Ceux, par exemple, qui refusent de se prêter au schéma simpliste « Ouest contre Est », «fascistes » contre russophiles. Ainsi, Andréi Sadovyi, maire de Lviv, la ville la plus rebelle, la plus nationaliste de l’ouest ukrainien, a enregistré le 2 mars sur YouTube un appel en russe, à ses compatriotes de Crimée et de l’est du pays. Un appel vibrant, passionné, à l’unité du pays. «Battons-nous ensemble dans notre diversité, linguistique, culturelle, historique, pour vaincre la corruption et bâtir ensemble une Ukraine démocratique, implore-t-il. Nous avons perdu trop de temps depuis l’indépendance. Et cela, ce n’est ni Washington ni Bruxelles ni Moscou qui le feront, c’est à nous de le faire. » Ou ceux, comme le colonel Youli Manchour, qui a pris la tête, le 4 mars, d’une colonne de quelque 200 hommes de sa garnison de Belbek, à Loubimovka en Crimée. A pied, sans armes, ces militaires ukrainiens ont décidé de récupérer leur base aérienne occupée par les troupes russes, leurs fusils pointés sur eux, histoire de sauver un minimum d’honneur. Ou la première médaillée ukrainienne des jeux paralympiques de Sotchi, Olena Iourkovska. Arrivée derrière une Russe en ski assis, épreuve de biathlon, elle a dédié sa médaille à «l’indépendance de l’Ukraine ». Parfois, avec des grains de sable, on arrive à faire une montagne. p [email protected] Jean Jaurès L’interactivité et le décryptage sont renforcés e Monde a depuis trois ans investi dans le renouvellement de son offre éditoriale avec le souci constant d’enrichir ses contenus, sur le papier et sur le numérique, pour s’adapter aux nouveaux usages et offrir une gammetoujoursplus large de journalisme de haute qualité. En 2014, Le Monde poursuit cette dynamique et accélère sa transformation numérique, avec une réorganisation bimédia de l’ensemble de la rédaction et la relance globalede ses offres. Notre priorité est d’accroître le contrat de confiance avec le lecteur en amplifiant ce qui fait le cœur de notre identité et notre force : une information toujours plus ambitieuse, rigoureuse, riche et pédagogique, en phase avec les rythmes et les besoins du lecteur. Le Monde a ainsi lancé, lundi 10 mars, deux innovations majeures sur Lemonde.fr. Une nouvelle « chaîne », Les Décodeurs (Lemonde.fr/lesdecodeurs),est disponible sur Internet fixe, mobile et tablette, et accessible depuis les réseaux sociaux. Elle offre un décryptage de l’actualité,des vérificationsd’informations, leur contextualisation et du « datajournalisme» (utilisation des données au service de l’information), avec des mises en scènes fortes. L’équipe des Décodeurs, à l’effectif renforcé, se veut à l’écoute des curiosités des lecteurs. Elle regroupe notamment deux datajournalistes, deux infographistes et un social media editor, chargé de la diffusion sur les réseaux sociaux. Les Décodeurs offrent des contenus suivant plusieurs temporalités : une grande réactivité pour suivre en temps réel déroulé de l’actualité, en utilisant le format le plus adapté, tex- gnées de main chaleureuses immortalisées par des photos qui font le tour d’Internet, tout cela est éminemment politique. Ce sont des grains de sable comme celui-ci qui révèlent toute la fragilité du scénario lancé par le président russe pour ne pas perdre l’Ukraine. Remarquable tacticien, Vladimir Poutine a monté un brillant stratagème, des soldats russes qui n’en sont pas mais qui prennent le contrôle de la Crimée, un gouvernement fantoche local qui appelle à l’aide, un président renversé et exfiltré en Russie qui produit une lettre de demande d’intervention le 1er mars après avoir dit la veille qu’il était contre toute intervention militaire, un Conseil de sécurité à l’ONU impuissant à agir puisque la Russie en fait partie, des autobus de manifestants transportés dans les régions russophones pour y semer la division… Tout est en place. La libération de Khodorkovski elle-même, comme celle des Pussy Riots, avait été calculée pour ne pas polluer les Jeux de Sotchi. Mais Vladimir Poutine, dans ses calculs, n’avait pas prévu les gens. Les gens, les êtres humains. Et voilà que le célèbre prisonnier, après moins de trois mois d’exil doré, prend l’avion pour Kiev. C’est le pire cauchemar de M.Poutine : le soutien des démocrates russes aux révolutionnaires ukrainiens. Il ne s’est pas encore réalisé, tant s’en faut, mais ce genre de grains de sable peut gripper la machine. Comme ce professeur Zoubov, un autre grain de sable. Andreï Borissovitch Zoubov, historien, enseigne la philosophie au prestigieux MGIMO, l’Institut d’Etat des relations internationales à Moscou. Un intellectuel respectable et respecté. Il a 62 ans, l’œil bleu profond et des rouflaquettes grises qui paraissent tout droit sortis du Docteur Jivago. Lorsqu’il a appris l’opération en Crimée, le sang du professeur Zoubov n’a fait qu’un tour. Il a écrit une tribune comparant le plan de Poutine en Crimée à l’annexion de l’Autriche, des Sudètes et du territoire de Memel par Hitler en 1938-1939 et l’a envoyée au quotidien Vedomosti, à Moscou, qui l’a aussitôt mise en ligne. « Je voulais dire la vérité et ramener les Russes à la raison, a-t-il expliqué plus tard à Radio Free Europe. Et je voulais montrer aux Ukrainiens que tout le monde en Russie ne partage pas l’opinion de Poutine. Il existe une autre Russie. C’était mon devoir de citoyen russe. » te, infographie, cartographie, vidéo explicative ; et un temps plus long, celui de l’enquête et du datajournalisme. Les Décodeurs ont vocation à enrichir l’offre numérique ainsi que le journal quotidien et M le magazine. Le Monde lance également sur son site « Les fils de discussion », un nouvel espace de débats et de dialogues animé par les journalistes spécialisés de la rédaction. Complémentaires des formats d’échanges à succès que sont les lives, chats et commentaires, les fils de discussion répondent à notre volontéd’amplifierles possibilités de dialogue en ligne entre la rédaction et les lecteurs. « Les fils de discussion » permettent un approfondissement des grands sujets d’actualité dans un espace de dialogue unique. Ils offrent un espace au design épuré facilitant le suivi des échanges, les interventions de la rédaction et la sélection des contributions les plus pertinentes des internautes. Ce format repose sur une technologie innovante qui rend accessible à tous la participation aux débats avec les équipes du Monde. Un prophète socialiste 4 millions de « socionautes » Lemonde.fr,premiermédiad’information en France, fédère la plus importante communauté de « socionautes » avec 4 millions de personnes sur Twitter, Facebook et Google+.Nosprojetsvisentàintensifier l’interactivité dans des formats adaptés à la mutation des modesdeconsommationdel’information. Ils font partie d’une stratégie de relance éditoriale déclinée en plusieurs étapes cette année. Le Monde se fixe comme ambition d’être le premier média d’information francophone global. p La direction des rédactions Société éditrice du « Monde » SA Président du directoire, directeur de la publication Louis Dreyfus Directrice du « Monde», membre du directoire, directrice des rédactions Natalie Nougayrède Directeur délégué des rédactions Vincent Giret Directeur adjoint des rédactions Michel Guerrin Directeurs éditoriaux Gérard Courtois, Alain Frachon, Sylvie Kauffmann Rédacteurs en chef Arnaud Leparmentier, Cécile Prieur, Nabil Wakim Rédactrice en chef « M Le magazine du Monde » Marie-Pierre Lannelongue Rédactrice en chef « édition abonnés » du Monde.fr Françoise Tovo Rédacteurs en chef adjoints François Bougon, Vincent Fagot, Nathaniel Herzberg, Damien Leloup Chefs de service Christophe Châtelot (International), Luc Bronner (France), Virginie Malingre (Economie), Auréliano Tonet (Culture) Rédacteurs en chef « développement éditorial » Julien Laroche-Joubert (Innovations Web), Didier Pourquery (Diversifications, Evénements, Partenariats) Chef d’édition Christian Massol Directeur artistique Aris Papathéodorou Photographie Nicolas Jimenez Infographie Eric Béziat Médiateur Pascal Galinier Secrétaire générale du groupe Catherine Joly Secrétaire générale de la rédaction Christine Laget Conseil de surveillance Pierre Bergé, président. Gilles van Kote, vice-président pTirage du Monde daté dimanche 9 - lundi 10 mars 2014 : 378 052 exemplaires. Figure essentielle de l’histoire de la gauche et fondateur du socialisme moderne, Jean Jaurès fut un des premiers « indignés ». Tribun, écrivain, philosophe, journaliste, mais aussi député, militant politique, théoricien, cet homme engagé, républicain jusqu’au plus profond de l’âme, combattit toute sa vie l’hypocrisie sociale, l’injustice économique et la guerre… Pourtant, aujourd’hui, même une partie de la droite et de l’extrême droite tentent de se l’approprier. Comme si, au-delà des clivages idéologiques, Jaurès appartenait désormais à notre patrimoine. « Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? », chantait Brel. A l’occasion du centième anniversaire de son assassinat, qui annonçait la tragédie de 14-18, Le Monde cherche à répondre à cette question… Dans ce hors-série, une INVITATION à la VISITE PRIVÉE de l’exposition JAURÈS, le 20 mars, aux Archives nationales « JEAN JAURÈS, UN PROPHÈTE SOCIALISTE », un hors-série du Monde 7,90 € - En kiosque et sur lemonde.fr/boutique 2 21 Quand votre intérêt rejoint celui des PME, la confiance revient. Plus que jamais les PME sont au cœur de l’économie avec le lancement du PEA-PME. Elles représentent 52 % de l’emploi salarié en France et 49 % de la valeur ajoutée. Elles constituent la trame du tissu économique français. Investir dans les PME et les ETI*, c’est contribuer au développement des entreprises les plus créatrices de valeur. C’est favoriser l’innovation, la croissance et le développement de notre pays. Avec le fonds Amundi Actions PME, Amundi remet votre épargne au cœur de l’action. www.amundi.com Le fonds Amundi Actions PME présente un risque de perte en capital et n’offre ni garantie, ni protection du capital initialement investi. * PME et ETI : Petites et Moyennes Entreprises et Entreprises de Taille Intermédiaire. Le fonds présente un risque de liquidité : dans le cas particulier où les volumes d’échanges sur les marchés financiers sont très faibles, toute opération d’achat ou vente peut entraîner d’importantes variations du cours des sociétés. Les caractéristiques principales du fonds Amundi Actions PME sont mentionnées dans sa documentation juridique, disponible sur le site de l’AMF et le site amundi.com ou sur simple demande au siège social de la société de gestion. La documentation juridique vous est remise avant toute souscription à un fonds. Ce fonds est géré par Amundi. Investir implique des risques : les valeurs des parts ou actions des OPCVM sont soumises aux fluctuations du marché, les investissements réalisés peuvent donc varier tant à la baisse qu’à la hausse. Il appartient à toute personne intéressée par les OPCVM, préalablement à toute souscription, de s’assurer de la compatibilité de cette souscription avec les lois dont elle relève ainsi que des conséquences fiscales d’un tel investissement. Le traitement fiscal dépend de la situation individuelle de chacun et est susceptible d’être modifié ultérieurement. Les informations contenues dans le présent document sont réputées exactes à mars 2014. Amundi, Société anonyme au capital de 596 262 615 € - Société de gestion de portefeuille agréée par l’AMF n° GP 04000036 – Siège social : 90 boulevard Pasteur, 75015 Paris. | Mardi 11 mars 2014 SFR: le coup de pouce de Niel à Bouygues t Pour racheter SFR et donner des gages à l’Autorité de la concurrence, Bouygues a conclu un accord avec Free pour lui céder son réseau t Les associations de consommateurs redoutent une hausse des prix t Martin Bouygues explique que la fusion avec SFR est «un projet pour la France » LES ÉTATS-UNIS ENVISAGENT D’ADOPTER LA CARTE DE PAIEMENT À PUCE LIRE PAGE 5 Les dessous de l’incroyable bataille de la bentonite perdue par Imerys LIRE PAGES 4, 5 ET 10 Xavier Niel, fondateur de Free, et Martin Bouygues, patron du groupe du même nom. LIRE PAGE 6 LIONEL BONAVENTURE /AFP ET FRANCOIS MORI/ AP Les entreprises s’inquiètent de la fuite des diplômés t De plus en plus de jeunes quittent la France. Au Royaume-Uni ou en Allemagne, le mouvement est plus fort Les enjeux de l’Ile-de-France Le Marché international des professionnels de l’immobilier se tient à Cannes du 11 au 14mars. Le Monde fait le point sur les mutations dans la région. Après le logement, le marché des bureaux est rattrapé par la crise. LIRE PAGES 11-12 IDÉES S’inscrire à la fac doit coûter plus cher Le gouvernement encourage le rapprochement entre classes préparatoires et universités. Mais il doit laisser ces dernières mettre en place les droits d’inscription qui leur permettraient de concurrencer les écoles. LIRE PAGE 10 re-AntoineGailly,présidentdelaCCIP.Ces“signaux faibles” sont préoccupants: quelle sera leur portée dans quinze ans ? Les jeunes qui partent reviendront-ils ? » Pour autant, pointel’étude,lephénomènedefuitedescerveaux est bien plus important au RoyaumeUni, en Italie ou en Allemagne. Luc Chatel, député UMP de la Haute-Marne et ex-ministre de l’éducation, défendra, le 8 avril, la création d’une commission d’enquête à l’Assemblée afin d’examiner ce « sujet grave». p LIRE PAGE 3 1,61 1 2001 PERSPECTIVE | par P h i li ppe Es ca nd e Le glorieux destin des sœurs de Bâle O n les appelait les trois sœurs de Bâle. Elles sont nées à la fin du XIXe siècle dans l’une des villes industrielles les plus dynamiques d’Europe. Un siècle et demi plus tard, les sœurs ne sont plus que deux – Ciba et Sandoz ont donné naissance à Novartis et Hoffmann-La Roche est devenu Roche. Ces deux-là ont résisté à tous lesventscontrairesetsontdevenus les plus beaux laboratoires pharmaceutiques du monde. De cette bourgade du Rhin, nichéeaux confinsde la France, de l’Allemagne et de la Suisse, ils narguent les géants américains et germaniques sur les technologies les plus récentes. A ce jeu, le champion absolu est Roche. Il est le groupe pharmaceutique le plus cher du monde. Sa valeur en Bourse, plus de 250 milliards de dollars (180 milliards d’euros), tutoie celle des stars de l’Internet. Des milliards qui traduisent le formidable succès de cette entrepriseetlesattentesqu’elle suscite. Tous ses concurrentstentent de copier son modèle, mélange de ténacité dans la recherche et d’agressivité dans le marketing. L’antique laboratoire, qui produisait ses premières décoctions de plantes en 1886, sort grand gagnant du troisième âge de la pharmacie. Le premier fut celui des plantes, le deuxième, aprèsguerre, celui de la chimie, des antibiotiques, de la cardiologie et des gros « blockbusters », ces médicaments capables à eux seuls de générer chacun plusieurs milliards de dollars de bénéfices par an. L’âge du cancer Le troisième âge est avant tout marqué par l’explosion du cancer. Maladie multiforme et si difficile à combattre par les moyens classiques de la chimie et de la chirurgie. Selon l’Organisation mondiale de la santé, on a recensé14millionsde nouveauxcasen 2012 et l’on en prévoit 22millions en 2030. Faceà un teldéveloppement,il fallait explorer de nouvelles voies de recherche. Roche a été le premier des grands acteurs à comprendre l’importance de la biotechnologie et à repérer l’acteur le plus prometteur dans ce Cahier du « Monde » N˚ 21506 daté Mardi 11 mars 2014 - Ne peut être vendu séparément 2013 Français inscrits à l’étranger, en millions domaine,la sociétécalifornienne Genentech, en 1990. Il avait saisi, dès cette époque, la puissance absolue de la rechercheaméricaine.AlafinduXXe siècle, celle-ci représentait plus des trois quarts de l’effort mondial, effectué sous l’ombrelle de son centre de recherche publique, le puissant National Institute of Health et ses quelque 30 milliards de dollars de budget. La vista de Roche et sa ténacité lui ont permis de mettre au point des médicaments améliorant spectaculairement le sort des malades, et de garder son avance jusqu’à aujourd’hui. Mais nous voilà au seuil du quatrième âge de la pharmacie. Celui-ci doit composer avec l’explosion des coûts de traitement qui croise la pauvreté des budgets de sécurité sociale des pays développés.Celadans un contexte de basculement de la recherche vers l’Asie, surtout la Chine, dont les budgets explosent quand ceux des Américains sont encontraction.Uneautreillustrationd’un changementdu monde auquel se préparent déjà les glorieuses sœurs de Bâle. p LIRE LE DOSSIER PAGES 8-9 0123 SPÉCIAL IMMOBILIER 60000à 80000 personnes. « Il y a un changement majeur de comportement parmi les jeunes générations, avec une nette accélération de leur mobilité, indique l’étude. Chômage et morosité les poussent au départ. » Et ils sont de moins en moins pressés de rentrer. «C’est une vraie préoccupation», assure JeanMarc Mickeler, le directeur des ressources humaines de Deloitte, alors que la part des jeunes diplômés qui voient leur avenir à l’étranger a doublé, à 27% contre 13% en 2012. «Pour le pays, cela m’inquiète, confie Pier- LIRE PAGE 2 j CAC 40 4 374 PTS + 0,19 % j DOW JONES 16 452 PTS + 0,19 % j EURO-DOLLAR 1,3886 J PÉTROLE 108,17 $ LE BARIL J TAUX FRANÇAIS À 10 ANS 2,21 % 10/03 - 9 H 30 0123 HORS-SÉRIE Ç L a France perd-elle ses forces vives ? La chambre de commerce et d’industrie de Paris - Ile-de-France (CCIP), qui représente 800 000 entreprises, commence à s’inquiéter de voir de plus en plus de jeunes cadres faire leurs valises. Pour y voir plus clair sur la réalité du phénomène, la CCIP a analysé les informations disponibles. Et rendra publiques ses conclusions le 12mars. Le mouvement d’expatriation s’accélère, c’est un fait. Chaque année, il concerne RUPERT STADLER, UN FINANCIER À LA TÊTE DE L’ALLEMAND AUDI 14-18 LES LEÇONS D’UNE GUERRE LES ENJEUX D’UN CENTENAIRE Un hors-série du Monde 7,90 € chez votre marchand de journaux ou sur lemonde.fr/boutique 2 0123 plein cadre Mardi 11 mars 2014 Rupert Stadler, le financier à la tête d’Audi qui a appris à parler boulons L'AGENDA MARDI 11 MARS Union européenne Réunion des ministres européens des finances à Bruxelles. Automobile Salon de l’emploi automobile, organisé au siège du Groupe Argus, à Paris. Le patron de la marque aux anneaux va présenter, mardi, les résultats du groupe. Il est un des rares managers de l’entreprise à n’avoir pas fait d’études d’ingénieur http://salon.autorecrute.com Immobilier Marché international des professionnels de l’immobilier (Mipim), jusqu’au 14 mars, à Cannes (Alpes-Maritimes). www.mipim.com/language/french MERCREDI 12 MARS Résultats Lagardère, Iliad, NRJ Group, Numericable (annuels). Indicateurs économiques Résultats de l’emploi salarié au quatrième trimestre 2013 (Insee/Dares). Seniors Forum Emploi seniors, organisé à la Grande Halle de La Villette, à Paris, par le Medef Ile-de-France. Portrait Berlin Correspondance V u de France, les managers des grands groupes allemands manquent parfois de panache… Ils ne possèdent souvent aucun des attributs classiques du grand patron français – un diplôme d’une grande école de commerce ou d’ingénieur, et l’assurance souvent hautaine de ceux qui savent appartenir à l’élite économique du pays. Rupert Stadler, directeur du constructeur automobile de luxe Audi, est un de ces dirigeants aux origines modestes, qui ont su se hisser au sommet de l’industrie allemande. Le dirigeant de l’une des entreprises les plus rentables et les plus emblématiques du « made in Germany » est fils d’agriculteurs.Il a grandi dans une fermeà Wachenzell, en Bavière, a fréquenté un petit internat de campagne avant d’intégrer la Fachhochschule d’Augsbourg, l’équivalent de l’école de gestion de Nantes ou de Montpellier… Ses passions ? Le jogging et le vélo. Sa grande fierté est d’avoir parcouru le chemin de Compostelle en VTT. La modestie n’empêche pas les exploits, bien au contraire. Rupert Stadler, 51 ans, devrait afficher lors de la présentation des résultats de l’entreprise, mardi 11 mars, des performances étincelantes. En 2013, la filiale de Volkswagen (VW) a vendu 1,57 million de véhicules, une hausse de 8,2 % par rapport à 2012, un nouveau record historique. Audi, qui vise les 2 millions en 2020, doit son succès à des taux de croissance exceptionnels au RoyaumeUni (+ 14,9 %), aux Etats-Unis (+ 13,5 %) et surtout en Chine (+ 21,2 %). Avec plus de 480 000 véhicules vendus, l’empire du Milieu est aujourd’hui le premier marché de la marque aux quatre cercles, qui prévoit d’y augmenter encore sa production dans les prochaines années. Audi a aussi amélioré sa rentabilité: la marque est plus profitable que BMW et Mercedes, ses grands rivaux allemands sur le marché mondial des berlines de luxe, que le trio domine à 80 %. C’est aussi l’entreprise préférée des jeunes diplômés allemands. Rupert Stadler, élu en 2011 PDG de l’année par le magazine WirtschaftsWoche, est présenté comme un des prétendants les plus sérieux pour prendre la tête du groupe VW, premier constructeur européen, qui veut devenir numéro un mondial en 2018. Ils sont rares pourtant, ceux qui auraient prédit à M. Stadler un tel parcours. En 2006, lorsqu’il est pressenti pour devenir, à 43 ans, directeur d’Audi en remplacement de Martin Winterkorn, appelé à diriger le groupe à Wolfsburg, les observateurs sont sceptiques. Le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung parle alors d’un homme dont l’apparence « évoque celle d’un conseiller en placements d’une caisse d’épargne». Tout le sépare de Martin Winterkorn, son prédécesseur, imposant docteur ès métallurgies. Dans l’empire VW, colosse de 550 000 salariés où la technique est érigée en religion, Rupert Stadler est un des rares managers non ingénieurs. Son atout maître ? Avoir su gagner la confiance de Ferdinand Piëch, neveu de l’inventeur de la coccinelle Ferdinand Porsche et puissant président du conseil de surveillance de VW. Avec son très fidèle Martin Winterkorn, M. Piëch exerce encore une influence considérable sur le groupe qu’il a redressé en tant que PDG après avoir révolutionné la marque Audi. Plaire à Ferdinand Piëch est la clé pour réussir chez VW. Le patriarche de 76 ans est connu pour son extrême méfiance et son exercice jaloux de l’autorité. « Chez VW, il y a ceux en qui Piëch a confiance et les autres. Certains, même très talentueux, se sont brûlé les ailes pour avoir été trop sûrs d’eux, explique un bon connaisseur du groupe. Rupert Stadler, lui, est d’une loyauté à toute épreuve. » L’actuel patron d’Audi a connu Ferdinand Piëch à 34 ans, lorsque, secrétaire général du groupe à Wolfsburg, il travaille cinq ans directement sous sa direction. La suite de sa carrière sera fulgurante : res- www.forumemploiseniors.fr Société « Royaume-Uni: l’autre modèle ? La Big Society de David Cameron et ses enseignements pour la France », matinée de débats organisée par l’Institut de l’entreprise au Cercle de l’union interalliée, à Paris. www.institut-entreprise.fr JEUDI 13 MARS Assurance-chômage Date butoir pour la conclusion d’un accord des partenaires sociaux sur une nouvelle convention qui fixe les allocations des 2,2 millions de chômeurs indemnisés. Indicateurs économiques Publication des chiffres de l’inflation en février (Insee) ; publication du rapport mensuel de la Banque centrale européenne. Résultats Eurotunnel, Dassault Aviation, Altran (annuels). Social Le tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) statue sur le sort de Continentale Nutrition, en redressement judiciaire. Electroménager Examen des offres de reprise de FagorBrandt par le tribunal de commerce de Nanterre. Bourse Assemblée générale des actionnaires de Ono, le principal câblo-opérateur espagnol, au cours de laquelle l’entrée en Bourse de la société doit être approuvée. VENDREDI 14 MARS Sephora Le Conseil constitutionnel donne sa décision sur deux questions prioritaires de constitutionnalité déposées par la chaîne de parfumeries Sephora (groupe LVMH) sur le travail de nuit et du dimanche. Bourse Fin de la période de souscription à l’augmentation de capital de 45,5 millions d’euros de la société de biotechnologies Transgene. Artisanat Semaine nationale de l’artisanat. www.semaine-nationale-artisanat.fr Technologie Dernier jour du Cebit, à Hanovre (Allemagne), la plus grande réunion high-tech du monde. www.globalfairs.fr/fairs/deutsche-messe/cebit SAMEDI 15 MARS Matières premières Anne Lauvergeon fait son entrée au sein du conseil d’administration du groupe minier anglo-australien Rio Tinto, où elle occupera un poste d’administratrice non exécutive. Langues Forum Eduexpo’14 « Langues, études et emploi », à l’ESCP-Paris. http://www.eduexpo.fr BRITTA PEDERSEN/DPA/AFP 17 mars 1963 Naissance à Titting, en Bavière. 1987 Diplômé en gestion d’entreprise de l’Ecole technique d’Augsbourg. 1990 Entre chez Audi comme auditeur des ventes et du marketing. 1997-2002 Directeur du secrétariat général du président du directoire du groupe Volkswagen. 2007 PDG d’Audi. 2010 Membre du directoire du groupe Volkswagen. ponsable de la planification produits au siège en 2002, il devient membre du directoire d’Audi en 2003, avant de prendre la tête du joyau de VW en 2007. E st-ce à dire que Rupert Stadler ne seraitqu’un exécutantdes volontés du tout puissant duo Piëch-Winterkorn ? Certains critiques n’hésitent pas à franchir le pas. « Les chiffres de ventenereflètentpasla situationréelledela marque. Ils sont dus à la vigueur du marché chinois, sur lequel Audi est présent depuis vingt-cinqans», analyse Ferdinand Dudenhoffer, expert de l’industrie automobile. «Lavéritéestquelamarqueadéclinétechniquement depuis que Rupert Stadler est à sa tête, juge-t-il. Le slogan : “Vorsprung durch Technik” [« L’avance par la technique »] s’est perdu. La marque n’a toujours pas de véhicule électrique et sur les moteurs hybrides, ils ont été les derniers du marché! » Le grand rival BMW a récemment marqué des points en lançant sa gamme élec- trique, avec la i3 et la i8, en fibre de carbone,penséepourêtre laplusécologiquepossible, de la production au recyclage. Stefan Bratzel, expert automobile de l’école technique de Bergisch-Gladbach, renchérit : « Rupert Stadler est passé à côté de ce sujet. Et en termes de design, il y a eu trop peu de différenciation ces dernières années. » Des reproches qui semblent avoir été entendus à Wolfsburg : le directeur développement d’Audi a été remercié brutalement en mars 2013. En décembre, ce fut au tour du directeur design d’être congédié. « Ces signes montrent que la direction de VW est nerveuse, considère un connaisseur du secteur. Ils ont compris qu’ils doivent accélérer le rythme.» Mais Rupert Stadler semble intouchable. « Qu’il soit resté malgré ces deux départs montre l’étendue de la confiance dont il jouit », pense M. Dudenhoffer. Le directeur d’Audi continue de croire à sa ligne pragmatique : « Nous ne voyons pas de marché suffisant pour le tout-électrique », répète-t-il à la presse allemande. Ses chevaux de bataille ? La voiture entièrement connectée et le véhicule conduit par ordinateur. Il prédit aussi de belles années au GPL ainsi que de grosses évolutions dans la distribution. « On ne peut pas savoir quelle technologie l’emportera, tout cela fait partie de la course sans merci que se livrent Audi, Mercedes et BMW, juge un influent observateur du marché. M. Stadler est un manager complet. Il maîtrise parfaitementles finances, le marketing et la distribution, et il a su s’approprier la technique de manière incroyable. A côté du duo Piëch et Winterkorn, vous ne pouvez pas vous maintenir si vous n’arrivez pas à suivre une conversation sur tel ou tel boulon. Ils ne sont pas si nombreux, chez VW, à pouvoir se prévaloir de ces qualités. » p Cécile Boutelet SON ATOUT MAÎTRE ? AVOIR SU GAGNER LA CONFIANCE DE FERDINAND PIËCH, PUISSANT PRÉSIDENT DU CONSEIL DE SURVEILLANCE DE VW DIMANCHE 16 MARS Formule 1 Ouverture du Championnat du monde avec le Grand Prix d’Australie, à Melbourne. L UN DI 17 MARS Armement Publication, à Stockholm, des chiffres des exportations d’armes par pays en 2013 par le Centre de recherche international sur la paix. Automobile Début de l’offre de Volkswagen pour le rachat des parts des autres actionnaires de Scania. Réflexion Trophées des think tanks, au Conseil économique, social et environnemental, à Paris, sous le haut patronage de son président, Jean-Paul Delevoye. www.oftt.eu/IMG/pdf/invitation_ttt2014.pdf Innovation Deuxième Forum de l’innovation à Limoges, à la chambre de métiers et de l’artisanat de la Haute-Vienne (rencontres de professionnels et échange d’expériences). http://lise.region-limousin.fr/lise/actualites RENDEZ-VOUS L UN DI 10 MARS Ouverturedu CeBITà Hanovre L e Salon mondial du marché numérique(CeBIT) a ouvert ses portes, lundi 10 mars, à Hanovre (Allemagne). Destiné avant tout aux professionnels, il a pour thème central l’exploitation« durableetresponsable»des données(bigdata).Environ 230 000 visiteurs sont attendus pour cette manifestation, qui fermera ses portes le 14 mars. Le Salon s’articuleautour de huitthématiques,chacune destinée à des groupes-cibles. Elles englobent des problématiques comme les solutions mobiles pour les entreprises, la recherche et l’innovation,etc.Un millier de séminaireset de présentations sont au programme. La sécurité informatique fera aussi l’objet de nombreux débats, quelques mois après le scandale des écoutes de l’Agence nationale de sécurité (NSA) américaine. Une trentaine d’exposants français seront présents – parmi eux,Thales,Simplicité(une plate-forme« cloud »), Systran(logiciels de traduction pour les outils informatiques) – ainsi que les géants IBM, HP ou Deutsche Telekom. La chancelière allemande, Angela Merkel, a inauguré le Salon dimanchesoir, accompagnée du premier ministre britannique, David Cameron, dont le pays est l’invité d’honneur. p Sarah Belouezzane économie & entreprise 3 0123 Mardi 11 mars 2014 De plus en plus de jeunes quittent la France Lesentreprisesparlentde«fuitedescerveaux». AuRoyaume-Uni,en Italie,enAllemagne,le mouvementestplusfort L a France perd-elle ses forces vives ? La chambre de commerce et d’industrie de ParisIle-de-France (CCIP), qui représente 800000 entreprises, commence à s’inquiéter de voir de plus en plus de jeunes cadres faire leurs valises. Formés dans un pays où la morosité est quasiment devenue un art de vivre, ils se laissent aspirer par une course aux talents devenue mondiale. « Depuis quelques mois, constate la CCIP, ces questions majeures font la ‘‘une’’ des médias, en particulier étrangers. Devant d’évidents signes d’une mobilité accrue des jeunes, des cadres dirigeantsde grands groupes, des grandes fortunes ou d’entrepreneurs, des observateurs français s’inquiètent de ce qui pourrait s’apparenter à une hémorragie.» Pour y voir plus clair sur la réalité du phénomène,la CCIP a analysé les informations disponibles. Un document, que Le Monde a pu consulter, sera rendu public le 12 mars à l’occasion de deux tables rondes organisées à Paris. L’étude montreque le mouvementd’expatriation s’accélère. La population des Français établis à l’étranger est estimée à 1,5 à 2millions de personnes.«Qualifiéeetactive»,ellea augmentéde « 3 % à 4% par an au cours des dix dernières années (soit environ de 60 000 à 80 000 personnes par an) ». Dans le même temps, la population française croissait de 0,6% en moyenne. Autre sujet d’inquiétude: «Il y a bien un changement majeur de comportement parmi les jeunes générations, avec une nette accélération de leur mobilité, indique l’étude. Chômage et morosité poussent les jeunes au départ. » Notamment les jeunes entrepreneurs, ce quipréoccupela CCIP.Le « baromètre 2014 de l’humeur des jeunes diplômés» réalisé par l’IFOP pour Deloitte, montre que ces derniers accordent peu d’« arguments» à la France pouvant les inciter à y travailler. Le meilleur d’entre eux, la « qualité de vie », n’en séduit que 44 %. En revanche, une majorité déplore « l’état du marché de l’emploi», « l’environnement politique et social » et «l’état de l’économie». Par ailleurs, les expatriés sont moins pressés de rentrer. De 2005 à 2013, la part de ceux qui envisagent un séjour supérieur à dix ans est passée de 27 % à 38 %, relève la CCIP en citant une étude de Mondissimo, un site Internet consacré à l’expatriation. Le baromètre Expatriation : un quasi-doublement en vingt ans Une option de carrière qui tente durablement la jeunesse française NOMBRE DE FRANÇAIS INSCRITS À L’ÉTRANGER, EN MILLIONS 1,61 PART DES JEUNES DIPLÔMÉS EN RECHERCHE D’EMPLOI QUI SITUENT LEUR AVENIR PROFESSIONNEL À L’ÉTRANGER 13 % 1,4 27 % Janvier 2012 Janvier 2014 1,2 DURÉE ENVISAGÉE DU SÉJOUR À L’ÉTRANGER, EN % DES JEUNES DIPLÔMÉS 1 44 28 0,8 12 11 0,6 1995 2000 2005 2010 2013 5 Moins de 1 an De 1 à 5 ans De 6 à 10 ans De 11 à 15 ans Les expatriés, beaucoup mieux formés que la moyenne Un phénomène à relativiser PART DES DIPLÔMÉS... EXPATRIÉS PAR PAYS, EN 2010, EN MILLIONS 53 % 12,5 % des expatriés (au-delà de bac+3) 4,69 4,28 3,62 1,84 Italie France de la population totale (au-delà de bac+2) Royaume-Uni Allemagne Toute la carrière SOURCES : CCI PARIS ÎLE-DE-FRANCE, DELOITTE Deloitte montre, lui, que 28 % des jeunes diplômés envisagent une expatriation à vie. « C’est une vraie préoccupation», assure Jean-Marc Mickeler. Le directeur des ressources humaines de Deloitte rappelle que le baromètre précédent avait montré un doublement de la part des jeunes diplômés qui voient leur avenir professionnel à l’étranger: 27%, contre 13 % en 2012. «Pour le pays, oui, cela m’inquiète », confie Pierre-Antoine Gailly, président de la CCIP. Tous ces « signaux faibles » sont préoccupants : « Quelle sera leur portée dansquinzeans?Lesjeunesquipartent reviendront-ils? » « Que les talents français aillent se confronter à leurs alter ego à l’étranger, c’est plutôt positif pour le tissu économique français, dès lors qu’on est capablede les inciter à revenir à un moment ou à un autre, abonde M. Mickeler. La crise et les désillusions vécues par les jeunes ont eu un impact sur ces départs, c’est vrai. Mais il est trop tôt pour crier au loup. » M. Mickeler ne cache néanmoins pas qu’il craint, comme DRH, de voir les meilleurs profils lui filer entre les doigts. Pourautant,«l’idéed’un mouve- mentmassifdefuitedestalents,spécifique à la France, ne semble pas correspondre à la réalité», tempère le document. Jean-Luc Biacabe, directeur des politiques économiques à la CCIP, qui a supervisé l’étude, souligne que le phénomène est bien plus important au RoyaumeUni, en Italie ou en Allemagne. L’ONU estime que 4,7 millions de Britanniques sont expatriés. « Et trois quarts des Britanniques ne reviennent pas au pays », observe-t-il. L’étude rappelle en outre que «la France attire, elle aussi, des talents. Nous sommes le troisième pays au monde en nombre d’étudiants étrangers accueillis, un facteur d’influence économique.» D’ailleurs, M. Biacabe rappelle que la mobilité des jeunes est un objectif politique constant. « On fait l’Europe!, s’enthousiasme-t-il. La moitié des départs se fait vers des payseuropéens.Peut-onencoreparler d’expatriation? Ne faudrait-il pas plutôt s’en réjouir et y voir une forme d’émergence de citoyenneté européenne ? » Les optimistes voient dans ces mouvements une conséquence heureuse de la mondialisation. Le monde vit la seconde grande vague de migrations après celle de 1880-1930. L’enjeu est de faire de cette « menace» une opportunité économique. De la dizaine de grandes entreprises contactées par Le Monde, aucune n’a donné suite à nos demandes d’entretien sur ce sujet, certainesau motif que «l’écrasante majorité de [leurs] salariés ont été recrutés et travaillent à l’étranger». Les responsables politiques sont plus bavards. «Dire que la mobilité professionnelle est une fuite est une vision étriquée qui ne correspond pas à la réalité. La France ne vit pas en autarcie », déclarait fin 2012 au Monde Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des présente Français de l’étranger. Et «70 % rentrent en France dans les dix années ». Le 3 avril, elle organise une conférence sur le thème : « Français à l’étranger, un atout pour la France ». Luc Chatel, député UMP de Haute-Marne, défendra, le 8 avril, lacréationd’unecommissiond’enquête à l’Assemblée afin d’examiner ce « sujet grave ». Favorable à l’ouverture internationale, l’ex- De 2005 à 2013, la part de ceux qui envisagent un séjour supérieur à dix ans est passée de 27 % à 38 %, relève la chambre de commerce de Paris ministre de l’éducation s’inquiète de « tous ceux qui sont contraints de partir parce qu’ils pensent ne pas trouver un emploi, ne pas pouvoir créerune entreprise…Celareprésente une menace pour la France. » Attention, plaide Frédéric Lefebvre, député UMP des Français de l’étranger: «Il ne faut pas caricaturer nos compatriotes qui s’expatrient. Ils sont l’un des principaux atouts de la France dans la mondialisation. La logique, ce n’est pas de lesdissuaderdepartir,maisdecréer les conditions pour qu’ils maintiennentle lienavec laFrance.» Al’unisson de la CCIP, il pense qu’il faut «ressouder la diaspora». p Emploi «En deux semaines, c’était fait» Londres Correspondance Au Royaume-Uni, cela fait plus de deux décennies que ça dure. C’est une tendance lourde, quel que soit le gouvernement français du moment: en vingt ans, le nombre de Français enregistrés au consulat de Londres a triplé, à 126000. L’inscription n’étant pas obligatoire, le nombre réel est sans doute nettement supérieur, entre 300 000et 400000 personnes. Dans leur immense majorité, ces Français – tous milieux et toutes origines confondus – sont venus pour travailler. Parmi eux se trouvent notamment des jeunes diplômés, qui trouvent plus d’opportunités de l’autre côté de la Manche. Georges, 28 ans, issu de l’Ecole nationale supérieure de l’aéronautique de Toulouse (Supaéro), est de ceux-là. Après un premier emploi à Paris, il arrive à Londres en mai2012 pour travailler dans une entreprise américaine dans le domaine du financement de l’électricité. « Londres était une ville qui ne me tentait pas. Je l’imaginais grise et pluvieuse. Mais c’est là que j’ai trouvé les propositions d’emploi les plus intéressantes. J’ai cherché à Paris mais je n’ai pas trouvé de poste de ce niveau.» Il s’est donc installé avec sa femme – et ses deux enfants en bas âge – et commence à apprécier sa vie outre-Manche. «Je pensais que ce serait une expérience de courte durée et qu’on repartirait rapidement. Mais finalement, il y a pas mal d’attraits pour rester. Maintenant, je m’imagine plutôt ici pour dix ans. » « On a fait un petit Anglais » Margot Myers, à Londres depuis dix ans, a vécu une expérience similaire. Au départ, cette Française de 31 ans est venue pour faire ses études d’illustratrice au Camberwell College of Arts. « Après mon diplôme, je n’avais pas très envie de rester à Londres, mais c’était super simple de trouver un emploi, se rappelle-t-elle. J’ai vaguement déposé quelques CV et en deux semaines, c’était fait. Alors, je suis restée.» Depuis, son frère l’a rejointe et ils ont créé ensemble leur entreprise d’illustration, qui compte 20% de clients en France, et le reste au Royaume-Uni. «C’était facile de monter notre boîte. En comparaison, j’ai des amis parisiens qui travaillent ensemble, mais qui sont tous à leur propre compte parce que c’est plus facile que de créer leur structure commune.» Aujourd’hui, Margot Myers n’imagine plus rentrer en France. Pour des raisons professionnelles, mais aussi parce que sa vie est désormais ancrée dans la capitale britannique. Elle y partage sa vie avec un Espagnol, avec qui elle a eu un bébé. « On a fait un petit Anglais! » Pierre Delorne, 29 ans, est lui aussi arrivé au Royaume-Uni par ses études. Cet ingénieur pétrolier n’y avait pas songé, mais quand il était à Supélec, on lui a proposé de faire un double diplôme franco-britannique, avec une dernière année à l’Imperial College, à Londres. «Les grandes écoles se sont tournées vers l’international, et il est logique que les étudiants prennent plus d’emplois à l’étranger.» Lui-même a commencé à Aberdeen, en Ecosse, avant de rentrer deux ans en France, puis de repartir en 2012 à Londres, où il travaille pour le pétrolier Perenco. Ce Marseillais d’origine n’envisage pas de rester trop longtemps outre-Manche, espérant un jour retrouver une ville plus chaude et proche de la mer. Mais ce ne sera sans doute pas en France. «Je n’envisage pas du tout d’y retourner.» p Eric Albert Boostez votre carrière avec Decouvrez notre nouvelle chaîne LeMonde.fr/emploi L’actualité du marché de l’emploi, la gestion de carrière, le management et toutes nos offres d’emploi. Benoît Floc’h 4 0123 techno & médias Mardi 11 mars 2014 Bouygues embarque Free dans son combat pour racheter SFR Pour accentuer la concurrence, la filiale du groupe de BTP vendra son réseau mobile à Iliad B ouygues serait-il en train de remporter la manche ? Il vient en tout cas de marquer un point déterminant dans le duel qui l’oppose à Numericable pour le rachat de SFR, le deuxième opérateur de l’hexagone, à sa maison mère, Vivendi. Le groupe de BTP a annoncé dimanche 9 mars avoir conclu un accord historique avec Iliad la maison mère de Free. Si c’est lui qui est choisi par les actionnaires de SFR, Bouygues cédera la quasi-intégralité de son infrastructure de réseau au groupe fondé par Xavier Niel (par ailleurs actionnaire à titre per- « Si c’est Bouygues qui gagne, on se dirige vers un ‘‘super Free’’ », remarque un très bon connaisseur du secteur sonnel du Monde) pour 1,8milliard d’euros. Sont concernés environ 15 000 antennes, mais aussi des points hauts (toits, terrasses…) et des équipements électroniques. Free devrait par ailleurs récupérer une grande partie du portefeuille de fréquences mobiles dont dispose Bouygues Telecom. En se mettant d’accord avec Free, Bouygues donne ainsi des gagesà l’Autoritéde la concurrence et lève une incertitude majeure qui pesait sur son dossier de rachat. En effet, si Bouygues Telecom et SFR devaient se marier en l’état, le nouvel ensemble disposerait d’un réseau mobile et d’un portefeuille de fréquences qui en ferait un mastodonte des télécommunications. Un tel opérateur contreviendrait en plusieurs points aux droits de la concurrence français et européen et pourrait rompre l’équilibre existant entre les différents acteurs du secteur. Un argument qui faisait dire à certains observateurs et analystes que l’offre de rachat de SFR par Altice,lamaisonmèrede Numericable, avait plus de chances de remporter lefeuvertdel’autoritédelaconcurrence.Seloneux,ledossierNumericable avait de fortes chances d’être instruit plus vite que celui de Bouygues. Une remarque désormais balayéeparBrunoLasserre,leprésident de l’autorité de la concurrence. Dans une interview au Figaro datée du dimanche 9 mars: le haut fonctionnaire a tout simplement indiqué que le temps nécessaire à l’instruction des deux dossiers serait identique. «En signant cet accord avec Free, Bouygues a fait un énorme pas en avant. Ils ont pris les devants pour trouver une solution à ce qui constituaitunsérieuxproblème.Cetengagement [de vendre le réseau mobile à Free] peut restaurer une dynamique concurrentielle saine sur le secteur puisque Free sera maître de sonpropreréseauetpourrainnover comme il veut », expliqueune sourceprochedel’autoritéindépendante. Mais l’institution l’assure, elle n’est pas là pour arbitrer. Elle examinera scrupuleusement le dossier, quel que soit le racheteur que Vivendi choisira. Pour Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif, c’est une autre histoire: il a clai- Lors de la Fashion Week à Paris, le 4 mars. VINCENT ISORE/IP3 PRESS rement pris position pour Bouygues. « La concurrence par la destruction s’arrêtera si nous revenons à trois opérateurs mobiles », a-t-il expliquédansunentretien,dimanche9mars,auParisien.«Ellenes’arrêtera pas si Numericable conquiert SFR, puisque la concurrence restera à quatre dans le mobile.» Etonnament, M. Montebourg menacemêmel’Autoritéderégulationdescommunicationsélectroniques et des postes (Arcep) de représailles si son président, Jean-Ludovic Silicani, venait à chercher des noises à son favori. « Je suis pour réduire d’urgence les pouvoirs de l’Arcep, explique sans trembler le ministre. Tout le gouvernement ne fait pas bloc derrière M. Montebourg, cependant. Officiellement, il n’est pasquestion de prendre parti entre Bouygues et Numericable. «Aucun commentaire sur ce dossier concernant des entreprises cotées», explique-t-on à l’Elysée. Pourtant, Fran- çois Hollande a bien reçu Martin Bouygues lors d’une audience privée, jeudi 27 février. Le bétonneur était accompagné de François Pinault, l’un de ses actionnaires, réputé proche du président de la République. Même mutisme à Matignon, où personne n’était disponible lundi matin pour un commentaire. Invitédimanche9 mars surBFM TV, Pierre Moscovici a refusé d’exprimer une préférence. « Nous devons avancer avec une boussole, qui est l’investissement, l’emploi et la satisfaction du consommateur, et faire le meilleur choix, a indiqué le ministre de l’économie. L’Etat est là pour donner un cadre général, exprimer une vigilance, c’est ce que nous faisons. Ensuite, les institutions compétentes prendront leur décision.» Chez Altice, on s’accroche à cette neutralitéaffichée et on veut croire que les dés ne sont pas encore jetés. « Nous sommes sereins et détermi- nés car nous croyons en notre projet industriel», explique-t-on à la maison-mèredeNumericable.« Jamais Joaquim Almunia [le commissaire européen à la concurrence] ne laissera passer un dossier pareil. Comment justifier que deux acteurs, le premier et le second aient plus de 80% de parts de marché? », s’interroge un proche du dossier. Même si les choses ont l’air bien engagées pour Bouygues, à l’Arcep, on fait valoir que même si un accord a déjà été signé avec Free, c’est au gendarme des télécoms de déterminer dans quelle mesure et selon quel calendrier Bouygues Telecompourraitcédersesfréquences. Signifiant ainsi qu’il pèserait sur les opérations à venir. Idem à l’Autorité de la concurrence qui indique que la vente du réseau de Bouygues à Free n’est probablement pas la seule concession qu’elle demandera si le groupe de BTP remporte la mise. Le conseil de surveillance de Vivendi doit encore se prononcer, a priori, vendredi 14 mars. Pour l’instant, leur choix ne semble pas arrêté. Cequiest sûr,c’estque Freeestle grand gagnant des bouleversements à venir. « Si c’est Bouygues qui gagne, on se dirige vers un ‘‘super Free’’ », remarque un très bon connaisseur du secteur. Le quatrième entrant, qui n’a pas encore fini de construire son réseau mobile, se retrouverait avec une infrastructure toute prête, et en partie à la norme 4G. « Martin Bouygues claironne partout qu’il a payé 10milliards poursonréseauetillerevend1,8milliard à Free… », souligne encore ce très bon connaisseur du secteur. Même Orange y gagnerait, « une fusion Bouygues-SFR, stabiliserait lemarchéetnouspermettraitderester leader sur le fixe », commente unesourceauseindel’ex-monopole d’Etat. p Sarah Belouezzane et Cedric Pietralunga Le quatrième opérateur en forte croissance Le groupe de Xavier Niel pourrait être le sur un marché hexagonal difficile grand gagnant de la recomposition en cours UN CHIFFRE D’AFFAIRES en hausse de 19 %, à 3,7 milliards d’euros, un résultat net qui bondit de 42 %, à 265millions d’euros… Le moins que l’on puisse dire, c’est que les performances financières pour 2013 d’Iliad, la maison mère de Free, publiées lundi 10 mars, sont impressionnantes. Le contraste avec les autres opérateurs du marché français est saisissant. L’année dernière, Orange, l’ex-monopole, toujours numéroun du marché, a vu son chiffre d’affaires s’effriter de 4,5 % (à 40,9milliards d’euros). Bouygues Telecom est repassé dans le vert (il avait affiché des pertes en 2012), mais ses revenus ont chuté de 11 % (à 4,7 milliards d’euros). Et SFR, la filiale de Vivendi, dont le chiffre d’affaires a baissé de 9,6 % (à 10,2 milliards d’euros) par rapport à 2012… Free n’est désormais plus vraiment le « maverick», le franctireur des télécommunications, tel qu’on le qualifie encore souvent. Le quatrième opérateur mobile du marché hexagonal, qui a lancé ses offres à bas coût début 2012, est un acteur de poids. Il comptabilisait, à fin 2013, 13,7 millions de clients, abonnés à ses services fixe et mobile tout compris. Dans le fixe, les services « triple play» (accès à Internet, télévision sur Internet, téléphone fixe illimité), Free a encore réussi à convaincre 276 000 nouveaux abonnés en 2013, davantage que Bouygues (+ 167000), SFR (+ 170 000) et Orange (+ 215 000). Visiblement, Free profite toujours à plein de son image de marque – un opérateur spécialisé dans les services de téléphonie fixe à des prix attractifs. De fait, c’est sur ce métier qu’il a débuté, au début des années 2000. Et c’est lui qui a inventé le principe du « triple play». Dans le mobile, l’opérateur a recruté 2,8 millions de nouveaux clients en 2013, et dispose d’une part de marché de 12 %, deux ans seulement après son arrivée en fanfare sur le marché. C’est bien plus que les projections des analystes quand Iliad est arrivé sur le marché du mobile. A l’époque, début 2012, ils tablaient sur une dizaine de pour cent de part de marché cinq ans plus tard. Faible endettement Comme pour le fixe, l’image de Free semble jouer à plein. Ses concurrents ont beau avoir aligné leurs tarifs sur les siens, Iliad a recruté 81 % des nouveaux abonnés mobiles en 2013. La rentabilité de cette activité mobile avait été mise en doute au lancement de ses offres à prix cassé (19,9 euros par mois pour l’illimité, 2 euros seulement pour deux heures de communication). Aujourd’hui, elle ne fait plus guère de doute. Le mobile a ainsi contribué à hauteur de 114 millions d’euros au résultat brut d’exploitation en 2013. Free ne précise cependant pas la contribution de l’activité à son résultat net. Seul hic, la vente de téléphones « nus », sans forfait, qui ne décolle pas : elle n’a représenté que 140millions d’euros de chiffre d’affaires en 2013. Visiblement, on choisit Free pour ses forfaits, pas pour les téléphones. Iliad s’est par ailleurs payé le luxe, lundi, de publier des objectifs de croissance pour 2014 et même au-delà, ce qui prouve à quel point il envisage l’avenir avec confiance. Dans les services fixes comme dans le mobile, le groupe veut atteindre « à long terme » une part de marché de 25 % en France. Et il espère dépasser les 4milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2015. De quoi booster encore un peu plus un cours de Bourse qui a déjà progressé de manière insolente ces deux dernières années, alors que celui de ses concurrents faisait du surplace. Lundi, l’action Iliad cotait à plus de 188 euros, à la Bourse de Paris. Contre un peu plus de 10 euros pour celle d’Orange… Dans ce contexte, si Free rachète le réseau mobile de Bouygues Telecom, l’opération pourrait encore faire progresser le « profil » financier du groupe. Il s’est entendu sur un prix de 1,8 milliard d’euros avec Bouygues, qu’il a les moyens d’avancer, étant donné son faible endettement (1,3 milliard d’euros d’encours de crédit). Acquérir une infrastructure lui permettrait par ailleurs de diminuer drastiquement les montants qu’il verse à Orange pour lui louer son réseau mobile et renforcerait, du coup, sa rentabilité à terme. Une très belle opération en vue, donc. p Cécile Ducourtieux SI FREE acquiert les 15 000antennes du réseau mobile de Bouygues Telecom, pour « seulement» 1,8 milliard d’euros, cela constituerait une énorme avancée pour le quatrième opérateur de téléphonie mobile, entré sur le marché il y a seulement deux ans. De fait, pour l’instant, le réseau mobile de Free est encore régulièrement pointé du doigt par les concurrents et les usagers pour sa couverture du territoire jugée insuffisante. A son lancement en 2012, l’offre mobile de Free, qui battait le record du forfait le moins cher du marché, avait fait l’objet de suspicions quant à la qualité du service rendu. A l’époque, Free ne disposait que d’une couverture de 25 % exigée par les autorités pour entrer sur le marché. Pour pouvoir lancer un réseau au niveau national, l’opérateur avait signé un contrat dit d’itinérance avec le numéro un du marché, Orange, coûteux mais efficace. Ce contrat de location du réseau de l’ex-monopole ne couvre que la 2G et la 3G et il expirera en 2018. D’ici-là, Free doit donc se doter d’une infrastructure en propre qui couvrira au moins 75 % de la population en janvier2015. C’est l’une des exigences de l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep) qui doit dévoiler cet été le résultat de deux enquêtes de couverture sur la 3G et la 4G pour tous les opérateurs français. « Si la trajectoire d’investissement et de déploiement de Free s’éloigne de la trajectoire théorique, fait-on savoir à l’Arcep, nous pourrions être amenés à une mise en demeure anticipée.» Selon des chiffres officieux cités en fin d’année 2013 par le site Internet La Tribune, les services de Free ne couvriraient actuellement que quelque 60 % de la population hexagonale. Selon les données compilées par l’Agence Si Free rachète le réseau mobile de Bouygues Telecom, son problème d’infrastructures sera réglé nationale des fréquences, il y avait au 1er mars 13600 sites autorisés pour le mobile très haut-débit (4G) en France, dont 11 890 sont en service. Sur les 8 388 sites autorisés en février dans la bande 4G, 1 712 ont été attribués à Free. L’opérateur a actuellement 1 115 « supports» 4G en service (infrastructures portant une ou plusieurs antennes), contre 824 le mois précédent, et 2760 supports 3G en service, sur 47 118 au total. Même si ses dirigeants assurent pouvoir remplir les exigences de l’Arcep pour janvier2015, l’opérateur est encore loin derrière ses concurrents en termes de réseau propre. Si Free rachète le réseau mobile de Bouygues Telecom, son problème d’infrastructures sera réglé d’un coup. Et qui plus est, à moindre frais. Le réseau de Bouygues, qui a commencé d’être construit dans les années 1990, couvre environ 98 % de la population française en 3G. Pour ce qui est de la 4G, c’est le réseau hexagonal le plus étendu, avec pas moins de 60% de la population couverte, contre seulement 40 % pour Orange et SFR. Quant au réseau de Free, actuellement, il n’existe quasiment pas sur cette technologie de très haut débit mobile. Pour se constituer pareille infrastructure très aboutie, il a fallu des années à la filiale du groupe de BTP. «Décrocher» une autorisation pour planter une antenne sur un toit, en ville, peut par exemple prendre jusqu’à quatre ans. En raison de la sensibilité des riverains, aux risques supposés des ondes. Free gagne donc un temps considérable. « L’enjeu pour l’opérateur est surtout de trouver des points d’installation en zone dense, pour maximiser sa couverture de la population», précise-t-on à l’Arcep. Le prix de 1,8 milliard d’euros sur lequel Free et Bouygues se sont entendus paraît, par ailleurs, particulièrement intéressant pour le quatrième opérateur mobile. On estime en effet qu’il faut débourser 2 milliards d’euros pour s’offrir un réseau mobile à l’échelle de la France. Free rachèterait donc à prix « coûtant» une infrastructure de « première classe». p Audrey Fournier 0123 techno & médias Mardi 11 mars 2014 Les associations de consommateurs redoutent une hausse des forfaits L’UFC-Que choisir s’interroge aussi sur «la qualité du service» du futur ensemble Bouygues-SFR D ès dimanche 9 mars, peu après l’annonce, dans LeJournal du dimanche, de l’intention de Bouygues Telecom de vendre à Free 15 000 antennes pour s’emparer de SFR sans mettre en danger la concurrence, les associations de consommateurs sont montées au créneau. Pour elles, la hausse des prix sur les forfaits de téléphonie mobile des consommateurs est quasi inéluctable. Et de mettre en avant l’exemple à ne pas suivre, celui de l’Autriche, où le passage de quatre à trois opérateurs s’est traduit par une forte hausse(10 %à18%selonlesestimations) des prix. AlainBazot,leprésidentdel’UFCQue choisir, s’est interrogé dimanche sur la « capacité d’absorption duréseau» du futurensembleBouygues-SFR, délesté de ce qui serait cédé à Free. Et sur « la qualité de service», il a rappelé que «les clients en France ont beaucoup souffert de l’existenced’uncarteldetroisopérateurs, qui avait réalisé une entente illicite». A l’Autorité de régulation des télécoms (Arcep), on fait valoir que l’entrée de Free sur le marché a permis de réintroduire une forte dose de concurrence dans le secteur et s’est traduite par une économie d’environ 3 millions d’euros pour les consommateurs. « Xavier Niel [fondateur de Free et actionnaire à titre personnel du “Monde”] a fait plus avec son forfait illimité pour le pouvoir d’achat des Français que Nicolas Sarkozy en cinq ans », avait INDICE DES PRIX SELON LE CONTRAT ET L’INTENSITÉ DE CONSOMMATION, BASE 100 EN JANVIER 2010 Janvier 2012 110 Arrivée de Free sur le marché 100 90 80 70 60 50 juil. oct. Janvier 2012 Free entre sur le marché et lance deux forfaits : un abonnement à 19,99 euros avec appels illimités et 3 gigaoctets (Go) de données, une première. Le second, à 2 euros, comprend une heure d’appels et 60 SMS. Année 2012 Les opérateurs historiques tentent de s’aligner. Bouygues Telecom aligne son offre low cost B & You directement sur celle de Free, à 19,90 euros. Les autres suivent. Les offres qui comprennent appels illimités et 3 Go de données bais- janv. 2011 avr. juil. oct. janv. 2012 avr. juil. oct. déc. SOURCE : ARCEP d’ailleurs tweeté Arnaud Montebourg, en janvier2012. L’Arcep rappelle qu’elle n’a pas de dogme en matière de nombre d’opérateurs, et que l’intensité concurrentiellen’estpas,contrairement à ce que dit la doxa économique,forcémentliéeaunombred’acteurs. Bruno Lasserre, le président de l’Autorité de la concurrence, a de la même façon déclaré au quotidien Les Echos, lundi, qu’il « n’y a pas de chiffre magique pour un marché idéal».«Cequicompte,c’estlaqualité et les incitations concurrentielles des acteurs.» Trois ans de guerre tarifaire Rentrée 2011 Les trois opérateurs « historiques » se préparent à l’arrivée de Free en lançant les premiers forfaits « SIM Only », sans téléphone ni abonnement. ... « gros » consommateurs de services vocaux Ensemble des forfaits, dont... avr. sent pour atteindre une fourchette comprise entre 45 et 60 euros. Décembre 2013 La guerre des prix se déplace sur le terrain de la 4G. Free aligne la 4G sur le prix de son forfait 3G et propose 20 Go de données, une quantité équivalente à de l’illimité. Bouygues Telecom s’aligne le premier, en ajoutant dès le lendemain la 4G à ses offres « SIM Only ». Orange lui emboîte le pas, suivi par SFR. Février 2014 Bouygues dévoile une offre « triple play » à 19,99 euros par mois, nettement inférieure aux prix du marché. Free répond le lendemain en proposant une offre similaire, d’un centime moins chère. Pourl’UFC-Quechoisir,lapréservation des intérêts des utilisateurs pourrait passer par une meilleure place accordée aux opérateurssans réseau propre (MVNO) : l’association demande à ce que leurs conditions d’accès au marché de gros soient revues. La guerre des prix qui avait suivi l’entrée de Free sur le marché du mobile en janvier2012 avait fait de la France le pays le plus concurrentiel d’Europe. Une particularité que les associations de consommateurs défendent bec et ongles. Pour François Carlier, de l’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV), «ce scénario [de consolidation] présente un risque». « Vouloir reconcentrer un secteur comme les télécoms pour lui redonner du souffle, au détriment du consommateur, nous paraît être une mauvaise politique », a-t-il déclaré à France Info, dimanche. Pourlesanalystesd’OddoSecurities, la baisse des prix aux forceps, telle que l’a menée Free depuis son entrée en fanfare sur le marché avec ses forfaits mobiles à prix cassés(2eurospourleplusbas), a vécu. «Les prix les plus bas n’ont pas bougé depuis un an», souligne Alexandre Iatrides chez Oddo. La différenciation entre les offresdevraitàl’avenirmoinssefaire sur les prix, aujourd’hui tous en ligneles unsavec les autres,que sur le contenu du forfait et la qualité de service. Le pari des opérateurs est qu’avec le développement du stan- dard 4G, qui permet une navigation et des téléchargements nettementplusrapidesqu’en3G,lesutilisateurs souhaiteront augmenter les capacités de leur forfait en termes de données et seront pour cela prêts à payer un peu plus cher. En début d’année, SFR et Orange avaient pour ce faire annoncé une légère augmentation de leurs for- Pour l’Autorité de régulation des télécoms, l’intensité concurrentielle n’est pas forcément liée au nombre d’acteurs faits 4G, avec en contrepartie des servicesadditionnels.Unemanœuvre délicate, alors que Free a, en décembre, annoncé inclure la 4G danssesforfaits3G,sansaugmentation de prix. Sauf que… la couverture 4G de Free n’atteignait à l’époque qu’un peu moins de 20 % de la population. La réalité n’était pas à la hauteur des promesses, mais cela devrait rapidement changer, avec le rachat de 15 000 antennes Bouyguesparl’opérateurlowcost:Bouyguesdispose,eneffet,d’unavantage concurrentiel fort, avec plus de 60 % de couverture de la population en 4G. Cette donnée pourrait considérablement dynamiser les offres 4G de Free. p Audrey Fournier A en croire Free, « il n’y a aucune raison pour que les prix augmentent » Questions à... Maxime Lombardini, directeur général d’Iliad, maison mère de l’opérateur SOUCIEUX DE DONNER des gages à l’autorité de la concurrence pour faciliter l’acceptation de son dossier, le groupe Bouygues a indiqué, dimanche 9 mars, que, dans le cadre de son projet de racheter l’opérateur de téléphonie mobile SFR à Vivendi, une négociation exclusive était en cours avec l’opérateur Free pour lui céder une partie de son propre réseau mobile. Maxime Lombardini, directeur général d’Iliad, maison mère de Free Mobile, explique quelles seraient les conséquences d’un rapprochement Bouygues-SFR pour l’ensemble du marché de la téléphonie mobile. Et pour Free en particulier. Y Que comptezvous racheter exactement à Bouygues Telecom, si ce dernier acquiert SFR ? Par cette opération, conditionnée au succès de l’offre de Bouygues sur SFR, nous achèterions l’intégralité du réseau mobile de Bouygues Telecom, à l’exception concurrents passerait de trois à deux. du cœur de réseau. Soit 15 000 antennes environ ainsi qu’un portefeuille de fréquences 2 G, 3 G et 4G. Le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg a clairement indiqué vouloir revenir de quatre à trois acteurs. Il a aussi laissé entendre son soutien à l’offre de Bouygues sur SFR. Qu’en pensez-vous ? Combien de temps gagneriezvous ainsi sur la construction de votre réseau ? C’est difficile à mesurer, mais clairement nous trouverions notre indépendance plus rapidement. En maîtrisant totalement notre réseau, nous serions à même d’être plus innovants et toujours aussi dynamiques commercialement. Les associations de consommateurs redoutent une hausse des prix si l’on repasse de quatre à trois opérateurs mobiles. Les tarifs vont-ils augmenter ? Il n’y a aucune raison pour que cela se produise. Au contraire. Si l’opération a lieu et que nos deux concurrents sont Orange et Bouygues-SFR, nous aurons face à nous deux géants. Nous serons plus que jamais le « maverick», l’aiguillon concurrentiel. Nous aurons tout intérêt à main- Cartedepaiement: aux Etats-Unis,la puce pourraitbientôtremplacer la bandemagnétique En 2013, 19 groupes de distribution ont vu les données bancaires de leurs clients piratées Les prix du mobile ont chuté avec l’arrivée de Free janv. 2010 5 AFP tenir des offres et des prix attractifs pour attirer de nouveaux abonnés. Quand vous avez un réseau avec de la capacité disponible et un tel écart de parts de marché, c’est un devoir de proposer au marché des offres attractives! Et culturellement, chez Free, nous ne sommes à l’aise que dans un univers de liberté et de concurrence. Nous ne changerons pas parce que le nombre de nos La concurrence est saine et a des effets vertueux. Notre arrivée dans le mobile a poussé nos concurrents à être plus innovants et à investir toujours plus pour améliorer leurs réseaux. Il y a aujourd’hui une solution qui se dessine, proposée par Bouygues, très solide, française, qui accélère le plan « très haut débit [FTTH]» et préserve l’emploi. Cette opération a, dans le même temps, le mérite de dynamiser la concurrence en nous affranchissant plus rapidement de l’itinérance. C’est la preuve que, parfois, la politique industrielle et la concurrence peuvent se retrouver. p Propos recueillis par Sarah Belouezzane New York Correspondant L es Etats-Unis se décident enfin à adopter la carte de paiement à puce électronique.Visa et MasterCardont annoncé, vendredi 7 mars, la création d’un groupe de travail réunissant établissements financiers et commerçantsafin de généraliserle système d’ici à octobre 2015. Cette initiative est lancée alors que les piratages de données se multiplient aux Etats-Unis. La prise de conscience de la nécessité de renforcer la sécurité des paiements s’est produite en décembre 2013, lorsque la troisième chaîne de distribution américaine,Target, a reconnu s’être fait subtiliser les données de 110 millions de clients pendant les fêtes de fin d’année. Ce sont les coordonnées bancaires, adresses courriel et numéros de téléphone de près d’un tiers de la population américaine qui sont ainsi partis dans la nature. Quelques jours après, une autre chaîne de magasins, Neiman Marcus, annonçait le piratage de plus d’un million de cartes de paiement. Au total, en 2013, 19 groupes de distribution ont été victimes de ce type de malversation, selon les chiffres de l’institut d’études Ponemon. Alorsque plusde80paysdansle monde ont adopté le système des puces, les Etats-Unis en sont toujours à la bande magnétique, qu’il suffit de passer dans un lecteur, sans taper de code confidentiel, la transaction étant authentifiée par la signature d’un simple reçu. L’une des failles de ce système rudimentaire, qui date du début des années 1970, provient du fait que, une fois les données entrées sur cette bande magnétique, il est impossible de les modifier. Ce qui facilite grandement le travail des pirates, notamment pour fabriquer des fausses cartes. La puce dite « EMV », du nom du consortiumentreEuropay,MasterCard et Visa, qui a imposé la norme en Europe, permet au contraire de générer à chaque transaction un code unique. Une sécurité qui est doublée grâce au code personnel que l’on doit taper sur un terminal pour chaque achat. Aux Etats-Unis, sur les 5,6 milliards de cartes en circulation, seulement 0,3 % possèdent une puce. En Europe, la proportion s’élève à 81 %. Si la première puissance économique du monde n’a pas voulu jusqu’à présent adopter ce système, c’est tout bonnement dans un souci d’économie. La National Retail Federation (NRF), la fédération américaine de la distribution, estime que la mise en place des équipements, l’achat des logiciels et la formation des salariés coûteraient au total environ 30 milliards de dollars (21,6 milliards d’euros). A titre de comparaison, en 2012, la fraude aurait coûté aux commerçants et aux banques américaines environ 11,3 milliards de dollars, soit en moyenne5 centspourchaquetranche de 100 dollars d’achat. Jusqu’ici, ce risque de défaut était assumé, mais l’affaire Target a fait monter la pression d’un cran. « Ces magasins représentent une part prépondérante de notre économie. Si les consommateurs ne peuvent pas avoir confiance dans la protection de leurs données, notre reprise économique va s’essouffler», s’est notammentirrité le sénateur démocrate du Vermont, Patrick J. Leahy, à la tête de la commission parlementaire qui a auditionné le 4 février les distributeurs piratés. Un agacement compréhensible à la lumière des statistiques : les Etats-Unis représentent environ un quart des transactionspar carte danslemonde,mais 47%de lafraude, selon le Nilson Report, une newsletter spécialisée. Ce chiffre a augmenté de 70 % entre2004 et 2010,d’aprèsles données du cabinet de conseil Celent. Cette forte augmentation s’explique simplement par le fait que la fraude internationale a migré vers la zone où la sécurisation a fait le moins de progrès. Même si le système de la puce n’est pas fiable à 100 %, il a permis Les Etats-Unis représentent environ un quart des transactions par carte dans le monde, mais 47% de la fraude aux pays qui l’ont adopté de réaliser des progrès spectaculaires. Par exemple, la fraude au RoyaumeUni s’est effondrée de 57 % en dix ans. Paradoxalement, Target avait été l’un des premiers à lancer un système de carte à puce au début des années 2000. Mais l’expérience a tourné court. Le temps de transaction était plus lent et, surtout, les autres distributeurs n’ont pas suivi le mouvement. « Je crois que nous sommes prêts à bouger », affirme aujourd’hui Gregg Steinhafel, le patron de Target, échaudé par le gigantesque piratage dont ses clients ont été victimes. Si le groupe de travail lancé par Visa et MasterCard va dans la bonne direction, tous les problèmes sont loin d’être résolus. A peine constitué, il enregistre déjà une défection de taille. La puissante NRF, qui représente plusieurs milliers d’adhérents et pèse 2 500 milliards de dollars, a dit qu’elle n’y participerait pas dans la mesure où, pour le moment, il n’est pas prévu que les cartes à puce soient dotées d’un code confidentiel. « Ils ne seront pas sérieux pour ce qui est de la lutte contre la fraude tant qu’ils ne passeront pas au code », estime Mallory Duncan, le directeurjuridiquede la NRF. Dans ces conditions, l’échéance de 2015 semble difficilement tenable. p Stéphane Lauer il est temps de parler d’économie 8H30 DU LUNDI AU VENDREDI SUR 6 0123 économie & entreprise Mardi 11 mars 2014 Comment Imerys a renoncé à la plus grande acquisition de son histoire FINANCE Cofinoga: BNP Paribaset les GaleriesLafayettese déchirent Le champion français des minéraux industriels n’a pas voulu surenchérir au-delà du raisonnable pour s’offrir l’américain Amcol. Son rival MTI remporte l’affaire pour 1,7milliard de dollars La tension monte encore entre BNP Paribas et les Galeries Lafayette qui s’affrontent sur la valorisation de leur filiale à 50-50, Laser Cofinoga. Alors que les syndicats du spécialiste du crédit à la consommation ont appelé à la grève lundi 10mars, la banque dénonce une « manipulation des représentants du personnel de Laser Cofinoga et encourage ces derniers à la plus grande vigilance en ce qui concerne l’interprétation qui leur est donnée des échanges entre actionnaires». Un conseil d’administration de Laser Cofinoga destiné à approuver les comptes devrait être chahuté lundi. Les Galeries Lafayette demandent à ce que soit « pris en compte le redressement de l’entreprise», quand BNP exige de doter des provisions. En septembre2012, les Galeries avaient exercé leur option pour vendre leur participation à BNP Paribas. Depuis, les deux groupes se déchirent sur le prix. p Isabelle Chaperon Papier L’usine Vertaris de Voreppe va redémarrer La papeterie Vertaris (ex-Matussière et Forest) de Voreppe, dans l’Isère, va être reprise par le fonds Springwater Capital, selon Les Echos du lundi 10 mars. L’usine, en liquidation depuis juillet2012, va être transformée pour produire de la pâte à papier. « Le niveau de l’euro est élevé mais il ne doit pas être le bouc émissaire des problèmes de compétitivitéde la France » Pierre Moscovici, sur BFM-TV, le dimanche 9 mars. Le ministre de l’économie a reconnu que, à près de 1,38 dollar, « l’euro est à un niveau élevé », en précisant aussitôt que « cela ne doit pas être un prétexte pour ne pas réformer et l’Europe et la France ». SOCIAL Travaildominical: MichelSapin prometunprojet de loi La bentonite est utilisée dans de nombreux procédés industriels, notamment dans les forages pétroliers. SARAH BETH BARNETT/« CASPER STAR TRIBUNE »/AP C ela aurait dû être la plus grande acquisition de l’histoire d’Imerys. Et un nouveautitrede gloirepour sonprincipal actionnaire, Albert Frère, le plus riche des milliardaires belges. Mais, sauf ultime surprise, le champion français des minéraux industriels va devoir faire une croix sur Amcol, la société américaine qu’il voulait s’offrir pour 1,7 milliard de dollars, soit 1,2 milliard d’euros. Après trois semaines d’une incroyable bataille boursière, Albert Frère, son associé Paul Desmarais Jr et les dirigeants d’Imerys ont décidé, vendredi 7 mars, de ne pas surenchérir davantage. C’est donc Minerals Technologies, l’autre candidat, qui devrait l’emporter.Latransactionseraenprincipe officialisée ces prochains jours. Une affaire qui confirme que le robinet de l’endettement est de nouveau ouvert pour les groupes industriels et permet toutes les offres publiques d’achat (OPA). «Le mariage entre Amcolet Imerys était un projet prometteur, grâce à la très bonne complémentarité des deux groupes, mais tout a un prix », commentent les analystes d’Aurel BGC. Amcol, une belle endormie américaine Amcol, la cible de la bataille boursière qui s’achève, est une vieille maison américaine. Ses racines remontent au milieu des années 1920. A Deadwood, la bourgade du Dakota du Sud où est enterrée Calamity Jane, d’anciens chercheurs d’or s’étaient alors lancés dans l’exploitation de la bentonite et avaient rencontré peu après un entrepreneur dynamique, Paul Bechtner. De leur association était né American Colloid, le futur Amcol. Quatre-vingt-dix ans plus tard, la société appartient toujours à 20% aux descendants de M. Bechtner, « M. Bentonite», et d’autres dirigeants historiques. Elle n’a qu’un produit à son catalogue, la bentonite, dont elle est le leader mondial. Considérée par certains analystes comme une « belle endormie», Amcol compte 2 800salariés, pour un chiffre d’affaires de 1 milliard de dollars (0,7 milliard d’euros) en 2013, et un bénéfice net limité à 31 millions de dollars. Six surenchères en trois semaines, avocats et banquiers d’affaires mobilisés des deux côtés de l’Atlantique : qui aurait imaginé pareil combat pour un produit inconnu du grand public, la bentonite ? Une sorte d’argile dont l’un des principaux débouchés est… la litière pour chat! L’histoire rappelle la fable de Jean de La Fontaine, Le Lièvre et la Tortue. Dans le rôle de la tortue : Minerals Technologies (MTI). Les dirigeants de cette ancienne filiale de Pfizer sont les premiers à s’intéresser à Amcol. Dès le printemps 2010, en toute discrétion, son patron, Joe Muscari, entame des discussions en vue d’une possible fusion. L’affaire n’aboutit pas. Deux ans et demi plus tard, en octobre2012, de nouvellesnégociations sont engagées. Là encore, les deux parties n’arrivent pas à s’entendre: MTI propose de tout payer en actions, sans le moindre dollar en cash. Les dirigeants d’Amcol refusent. Mais ces tractations secrètes sèment le doute chez les administrateurs d’Amcol : ne serait-ce pas, effectivement, le moment de vendre ? Vieille maison américaine, Amcoln’a qu’unproduità soncatalogue, la bentonite.Cette argile qui tire son nom de Fort Benton, la ville du Montana où furent découverts les premiers gisements, n’est pas destinée qu’aux litières pour chat. Elle est aussi utilisée dans de nombreux procédés industriels, notammentdanslesforagespétroliers. Un débouché très porteur aux Etats-Unis, avec l’essor du pétrole et du gaz de schiste. Premierproducteurde bentonite au monde grâce à ses réserves du Wyoming, Amcol devient de ce fait une cible de premier ordre. En décembre2012, le conseil d’Amcol décide en conséquence de préparer l’éventuelle cession du groupe, et confie un mandat à la banque d’affaires Goldman Sachs. Lorsque M. Muscari, le tenace patron de MTI, entame une troisième approche pour fusionner avec Amcol, en octobre 2013, le processus prend donc une autre tournure. Sa proposition, à 40,50 dollars par action, est certes de nouveau rejetée, même si MTI est désormais prêt à payer en cash les deux tiers de la facture. Mais cette fois, Amcol ne s’en tient pas là. Ses banquiers sont chargés de faire monter les enchères, en contactant d’autres acquéreurs possibles. GoldmanSachs en appelle trois. Uniquement des industriels des minéraux désireux de grandir dans ce métier : le leader mondial Imerys, le chimiste suisse Clariant, et un troisième larron non identifié. Imerys est le seul à répondre. «QuandAmcolnousacontactés, le 3 décembre, nous avons réagi très vite, parce que nous avions déjà identifié la bentonite comme un minéral intéressant pour nous », raconteGillesMichel,lePDGd’Imerys.Mieux: le groupefrançais avait déjà réfléchi à un possible mariage avec Amcol, tout en excluant une opération hostile. A partir du moment où l’américain prend luimême les devants, tout change. En quelques jours, Imerys, ses avocats et ses banquiers se mobilisent. Nom de code de l’opération : « Amadeus ». Les dirigeants français font le tour des usines d’Am- Ces folles surenchères font tousser au sein même de MTI, dont le directeur général démissionne en pleine OPA col, aux Etats-Unis, en Chine, au Royaume-Uni, en Afrique du Sud. Surtout, ils calculent quel prix ils peuvent offrir. Amcol est certes un champion mondial, qui ferait entrer le groupe dans la bentonite, lui permettrait de grandir de 20 % d’un coup, et l’arrimerait solidement sur le décisif marché américain. Mais Albert Frère est attentif à sa « galette » : pas question pour Imerys de surpayer sa proie. Il faut que l’acquisition crée de la valeur dans la durée. Dès le départ, les Français ont en tête un prix maximal voisin de 45 dollars par action. A ce niveau, ils savent que l’« opération Amadeus » peut encore être rentable. Mais ils tentent d’obtenir l’affaire pour moins, et proposent d’abord 39,50 dollars. Pas assez, répond Amcol, qui a reçu entre-temps une offre à 41 dollars de MTI. Imerys monte alors à son tour à 41 dollars, et décroche le feu vert d’Amcol. A prix égal, les dirigeants américains préfèrent signer avec un groupe solide, prêt à payer 100 % en cash, qu’avec MTI, une société quatre fois plus petite qu’Imerys et pour laquelle l’affaire représente un pari très audacieux. Le 12 février, le grand mariage franco-américainest annoncéofficiellement. En deux mois, le lièvre Imerys semble avoir remporté la course que la tortue MTI avait lancée près de quatre ans plus tôt. Mais M. Muscari n’entend pas être privé de sa victoire si près du but. Dès le lendemain, le président de MTI sort de l’ombre, et annonce une surenchère. Puis une autre le jour suivant. Puis une troisième et une quatrième quand Imerys met à son tour un peu plus d’argent sur la table. MTI monte jusqu’à 45,75 dollars par action, soit 42 % de plus que ce que valait Amcol en Bourse quatre mois auparavant. Visiblement, cette spirale fait tousser au sein même de MTI. Le 27février,en pleinebataille,l’entreprise annonce la démission immédiate « pour raisons personnelles» de Robert Wetherbee, son directeur général, arrivé un an auparavant pour succéder à terme à M.Muscari.Ce dernierreprendprovisoirement toutes les commandes. Comment ne pas voir dans ce départsoudain le signed’un désaccord profond sur le prix offert? Car la note devient salée. A 1,7milliardde dollarsdette comprise, la facture totale équivaut à… 56 fois le dernier bénéfice net d’Amcol! Même rapportéau résultat d’exploitation,le prix reste nettement supérieur à la plupart des transactions enregistrées dans le secteur. M. Muscari, lui, est prêt à casser sa tirelire pour une opération hautement stratégique. L’achat d’Amcol va doubler la taille de MTI. Et comme la société n’a pas de dette, lesbanquesluiprêtentsansproblème les fonds nécessaires, dans un contexted’argentà nouveaufacile. Résultat : MTI rafle la mise. « A ce prix-là, nous n’étions pas en mesure de proposer un retour sur investissementsuffisant,commente M. Michel. Je suis déçu, mais je n’ai aucun regret. Et puis, cet épisode auramontré qu’Imerys est capable d’agir vite et fort ! » De plus, le groupe français ne rentre pas complètement bredouille : il devrait recevoir 39 millions de dollars d’Amcol à titre de dédit. De quoi atténuer la déception, en attendant le passage d’une nouvelle proie. p Denis Cosnard Dans un entretien au Journal du dimanche, le ministre du travail Michel Sapin a indiqué, dimanche 9 mars, qu’un projet de loi sur le travail dominical dans le secteur du bricolage serait examiné « avant la fin de l’année». Selon lui, le nouveau décret autorisant l’ouverture de ces magasins le dimanche, publié samedi 8 mars, permet de « stopper la confusion» dans le secteur. La première mouture du décret avait été suspendue par le Conseil d’Etat. Plusieurs syndicats ont déjà indiqué vouloir attaquer le nouveau texte devant la haute juridiction. – (AFP.) p Japon +1,5 % C’est le taux de croissance de l’économie japonaise en 2013, publié lundi 10 mars. Entre octobre et décembre, le produit intérieur brut n’a finalement augmenté que de 0,2 % d’un trimestre sur l’autre, contre 0,3 % espéré. Même si cette progression annuelle est légèrement supérieure à celle de 2012 (+ 1,4 %) et la meilleure depuis 2010, c’est une déception pour le premier ministre conservateur, Shinzo Abe, qui, dès son arrivée au pouvoir fin 2012, avait fait de la relance sa priorité. Médias BeIN pourrait diffuser des matchs de la Coupe du monde de football 2014 TF1, détenteur des droits de retransmission du Mondial de football au Brésil (12 juin-13 juillet), négocie avec BeIN pour lui revendre l’autorisation de diffuser des matchs, écrit le Journal du dimanche du 9 mars. La chaîne sportive qatarie achèterait de 36 à 64 matchs, pour 35 à 50 millions d’euros, selon le JDD. Conjoncture La Banque de France laisse inchangée sa prévision de croissance au premier trimestre La Banque de France a confirmé, lundi 10 mars, compter sur une croissance de 0,2 % de l’économie française au premier trimestre 2014, dans une deuxième estimation fondée sur son enquête mensuelle de conjoncture de février. – (AFP.) Baisse de la production industrielle en janvier La production industrielle de la France a baissé de 0,2 % en janvier après une baisse de 0,6 % un mois plus tôt, a indiqué l’Insee, lundi 10 décembre. La production de l’industrie manufacturière a dans le même temps augmenté de 0,7%. – (Reuters.) Agroalimentaire Chiquita et Fyffes fusionnent pour créer le numéro 1 mondial de la banane La société américaine Chiquita Brands International et la société néerlandaise Fyffes ont annoncé, lundi 10 mars, leur fusion, donnant naissance au leader mondial de la banane. Le nouvel ensemble, baptisé ChiquitaFyffes, sera détenu à 50,7 % par les actionnaires de Chiquita et à 49,3 % par ceux de Fyffes. Il pèsera 4,6 milliards de dollars (3,3 milliards d’euros) de chiffre d’affaires. Unilever prend la majorité du capital d’une société chinoise de traitement des eaux Le géant néerlandais de l’agroalimentaire et de l’hygiène, Unilever, a annoncé dimanche 9 mars avoir acquis la majorité du capital de la société chinoise Qinyuan, au chiffre d’affaires de 140millions d’euros. Automobile Fermeture de l’usine PSA d’Aulnaysous-Bois : 214 salariés encore à reclasser Après l’arrêt de la production de l’usine d’Aulnay-sous-Bois (SeineSaint-Denis), PSA Peugeot Citroën doit encore reclasser 214 de ses 3000 employés du site en cours de fermeture, a détaillé, vendredi 7mars le groupe automobile. D’ici à la fin du mois de mars, ces employés doivent accepter l’une des propositions du groupe, sinon ils risquent le licenciement. dossier 8 0123 Mardi 11 mars 2014 Roche : champion de la capitalisation boursière Un chiffre d’affaires en hausse Un laboratoire orienté vers la recherche N°1 dans la biotechnologie CAPITALISATION BOURSIÈRE 2014, EN MILLIARDS DE DOLLARS EN MILLIONS DE FRANCS SUISSES DÉPENSES EN R&D EN MILLIARDS DE DOLLARS VENTES ISSUES DES BIOTECHNOLOGIES, HORIZON 2018 Roche Novartis Pfizer Merck & Co Sanofi 46 780 GSK 258 10,3 31 220 222 205 168 134 9,4 7,9 6,7 6,7 35,3 Roche milliards de dollars 6,3 133 2003 2013 Novartis Roche Merck & Co Pfizer Sanofi N°1 GSK Lesmoléculesdu groupesuisseRoche,premièrecapitalisationboursièredu secteurpharmaceutique, ontrévolutionnéle traitementdestumeurs. Un modèle qui inspire toute la profession Au cœur du plus puissant laboratoire du monde L e nouveau siège de Roche, à Bâle (Suisse), est à l’image de ce groupe pharmaceutique né sur les rives du Rhin à la fin du XIXe siècle. Géant et discret. L’architecture, en double hélice, symbole de l’ADN, a été abandonnée au profit d’un dessin plus austère : un triangle blanc qui se reflète dans les eaux du fleuve. Baptisé sobrement Bau 1 (« bâtiment1 »), il accueillera, en 2015, les troupes d’élite de ce laboratoire devenu, en quelques années, la première capitalisation boursière du secteur avec une valeur de 260milliardsdedollars(185milliardsd’euros). Roche devance Novartis, l’éternel rival, dont le siège se trouve à une dizaine deminutes delà, sur l’autre rivedu Rhin, et le géant américain Pfizer. Il y a cinq ans, le groupe valait 90 milliards de dollars. Il pèse aujourd’hui plus lourd que Wal-Mart, Shell ou Nestlé. Un esprit de start-up Son succès repose sur trois médicaments phares – le MabThera, l’Avastin et l’Herceptin. Ces anticancéreux sont devenus, en moins de dix ans, des best-sellers. En 2013, ils ont rapporté plus de 21 milliards de dollars. Plus connu du grand public pour le Valium et le Lexomil, deux stars des pharmacies, Roche truste un tiers du marché mondial du traitementdes cancers. Ce segment représente plus de 60 % de ses ventes de médicaments et connaît une croissance annuelle supérieure à 10 %. De quoi agacer les géants du secteur comme Pfizer, le britannique GSK ou le français Sanofi, dont les comptes sont plombés par la perte de grands brevets et laconcurrencede copieslowcost.Toustentent toutefois de reproduire le « modèle Roche », étendard de la pharmacie du futur, basé sur un sens aigu de la science, des acquisitions ciblées et un redoutable sens des affaires. C’est au 124 Grenzacherstrasse, près du siège actuel, que s’était installé, en 1894, le banquier Fritz Hoffmann. Il avait une idée en tête : profiter de l’expertise des chimistes dans les extraits de plantes pour se lancer sur le créneau très lucratif du médicament. La première création de cette startup de la Belle Epoque fut un simple sirop contre la toux à base d’écorce de gaïac, un arbre exotique. Lancé en 1898 sous le nom de Sirolin, il conquiert en un temps record les pharmacies d’Europe, des Etats-Unis et même du Japon. Le Pantopon, puissant antalgique à base d’opium, et le Digalen, à base de digitale, indiqué en cas d’insuffisance cardiaque, suivront peu après. Depuis, Roche a bien changé, mais cet esprit pionnier flotte dans les immenses couloirs aux allures d’hôpital. « Il faut suivre la science », martèle Severin Schwan, 47 ans, patron du groupe depuis 2008. Ce diplômé en droit et en économie, passionné de science, n’hésite pas à griffonner sur un bout de papier cellules et molécules pour expliquer au néophytela mécanique de ses médicaments. Son ambition : piloter un paquebot de 80000salariés comme une start-up. Ici on fermesansétat d’âmeles centresderecherche jugés vieillots ( comme en 2012 celui de Nutley dans le New Jersey qui comptait 1000 salariés) et on joue la carte de la compétition entre les équipes. Les chercheurs de pRED, et gRED, deux entités maisons dédiées à la recherche fondamentale, s’affrontent pour identifier les molécules de demain. Quant aux meilleurs « cerveaux», recrutés dans le monde entier, ils ont une totale liberté. Un petit labo abrite ainsi une unité étonnante consacrée aux cellules souches. Sur un écran, on voit des cellules de cœur battre,et sur unautre,des neuronescolorésen vertet bleu.« Bientôt,nous pourronsles utiliser pour sélectionner les molécules les plus prometteuses et tester la toxicité des futurs médicaments », explique Martin Graf, responsable de ce projet avant-gardiste. Le groupe met les moyens : il consacre, selon Evaluate Pharma, plus de 21% de ses ventes de médicaments à la recherche contre 19% pour Novartis, 15% chez Pfizer, 16 % pour Sanofi ou 15 % chez GSK. Résultat : Roche a quinze candidats-médicamentsà unstadeavancé.« Lemeilleurpipeline de l’industrie », dit Philippe Lanone, analyste chez Natixis. « Et, avec 75 % d’études cliniques positives sur les trois dernières années, le taux de succès est plus élevé que la moyenne du secteur, malgré quelques échecs récents », ajoute-t-il. Le pari des biotechnologies Ce qui paie, aujourd’hui, c’est le pari des biotechnologies pris il y a vingt ans. En 1990, Roche a déboursé 2 milliards de dollars pour acquérir 56 % de Genentech (en 2009, le groupe a acheté les 44 % restants pour plus de 46 milliards). Cette société américaine a dans son portefeuille une nouvelle génération de médicaments: les anticorpsmonoclonaux.Cesontdesarmes redoutables pour lutter contre le cancer. Roche a en outre un autre atout : sa division diagnostics, qui fabrique les tests « compagnons » indispensablespourrepérer les patients sensibles au médicament. Emblématique de cette approche, l’Herceptinaétélancéen2000.Prescritpoursoigner certains cancers du sein en complément de traitements classiques (chirurgie et chimiothérapie),il cible les femmes porteuses d’un gène HER2 mutant (20 % à 25 % des cas). Pour elles, ce cancer est souvent mortel, avec un taux de survie de 13%, cinq ans après l’apparition des métastases. Avec l’Herceptin, la survie à cinq ans passe à 25 %. Et, dans les cas où la tumeur est soignée précocement, le médicament diminue de moitié le taux de récidive. « Ces résultats ne sont pas une évolution, mais une révolution », a déclaré Gabriel Hortobagyi, l’un des grands spécialistes américains du cancer du sein, dans The New England Journal of Medicine. A peu près au même moment, Roche a lancé le MabThera – indiqué dans certains lymphomes et dans la leucémie lymphoïde chronique – et l’Avastin, utilisé Le grand dilemme des labos dans les pays émergents « NOTRE médicament n’est pas destiné aux patients indiens, mais aux Occidentaux qui peuvent se le payer.» Cette phrase choc a été prononcée, en janvier, par le patron du groupe allemand Bayer; elle illustre bien le dilemme des laboratoires. D’un côté, ils ont intérêt à négocier des prix de plus en plus élevés pour leurs médicaments. De l’autre, ce prix constitue un mur infranchissable pour les pays pauvres, qui ont aussi besoin de ces traitements. Au cœur de la polémique, le Nevaxar, un médicament indiqué contre le cancer du rein. Lancé par Bayer, il coûte 80 000 dollars (58000 euros) pour dix mois de traitements. Trop cher, juge l’Inde qui vient d’autoriser un laboratoire local à produire une copie quarante fois moins chère, en dépit du brevet de Bayer. Cette affaire n’est pas la première; Novartis, Pfizer ou encore Merck & Co sont tous familiers des tribunaux de ce pays. La question de l’accès aux anticancéreux de dernière génération se pose dans les mêmes termes que celle de l’accès aux trithérapies il y a dix ans. Selon l’Organisation mondiale de la santé, les pays pauvres et à revenu intermédiaire représentaient 57 % des quatorze millions de patients atteints d’une tumeur dans le monde, mais 65% des décès. Le cancer tue plus que le sida, la malaria et la tuberculose réunis. Pour sortir de cette impasse, les groupes pharmaceutiques finissent le plus souvent par proposer un prix ajusté en fonction du pouvoir d’achat du pays, voire du patient. C’est ce que fait Roche, notamment en Chine, où certains traitements coûtent dix fois le salaire annuel moyen d’un ouvrier. Dans ce pays, le laboratoire s’est associé avec des compagnies d’assurance locales pour élaborer un dispositif spécifique au cancer. Il propose aussi ses médicaments à prix réduits pour une partie des patients. Eviter les copies « sauvages » « Dans les pays émergents, leur stratégie n’est pas de commercialiser des technologies périmées, mais de facturer aux patients les plus riches les médicaments au prix fort pour subventionner les soins des plus pauvres», souligne Eric Le Berrigaud, analyste chez Bryan Garnier. Un contrat gagnant-gagnant, dans lequel le laboratoire accepte de réduire sa marge, pour éviter l’arrivée de copies « sauvages », tout en préservant son image auprès de clients prometteurs. En 2017, la Chine pays représentera 15 % des dépenses de médicaments dans le monde contre 8 % en 2012, selon IMS Health. Ce pays sera alors le second marché pharmaceutique mondial derrière les Etats-Unis. Roche, comme ses concurrents, insiste cependant sur le fait que les médicaments ne font pas tout. Dans la plupart des pays pauvres, le manque d’équipements et de médecins est le premier frein aux soins. Et les politiques de prévention sont quasi inexistantes. p C. Hr DES ACQUISITIONS CIBLÉES ET UN REDOUTABLE SENS DES AFFAIRES FORMENT LA SIGNATURE DU GÉANT SUISSE dans de nombreux cancers. « Ces trois médicamentsontprofitéd’unquasi-monopole pendant quasiment dix ans, car la concurrence s’est réveillée trop tard. Cette situation est rarissime », commente Eric Le Berrigaud, chez Bryan Garnier. Roche a pu ainsi empocher plus de 100 milliards de dollars au total depuis leur lancement. Seule menace pour le modèle économique bien rodé de Roche : l’arrivée des premières copies (les « biosimilaires» dans le jargon) alors que ses brevets arrivent à échéance. Sa parade? Rendre obsolète sa propre technologie, avec le lancement de nouveaux médicaments comme le Perjeta et le Kadcyla pour le cancer du sein. « Compte tenu des progrès qu’ils apportent, et malgré un prix plus élevé, ils seront incontournables dans les indications où ils sont approuvés. Les patientes et les médecins les privilégieront plutôt qu’Herceptin ou même ses copies, dont plus personne ne voudra», résume Philippe Lanone. Pour garder une longueur d’avance, Roche compte aussi sur de nouvelles technologies comme l’immunothérapie. C’est un domaine en pleine effervescence sur lequel ses rivaux Merck & Co et Bristol Meyer Squibb sont bien positionnés. Le groupe suisse est aussi passé maître dans l’art de repérer les start-up et les programmes académiques les plus prometteurs. Il a ainsi signé, en 2013, environ 160nouveaux partenariats. Un marketing soigné Son sens aigu du marketing est un autre atout dans ce contexte hyperconcurrentiel. Ses premières pubs à l’iconographie soignée et aux slogans aguicheurs feraient hurler, aujourd’hui, les autorités de santé. Un exemple ? Les réclames pour le Librium, premier tranquillisant à base de benzodiazépines. Lancé en 1960, cet ancêtreduValiumestd’abordsymboliséparun planeur posé sur un ciel sans nuage, survolant de paisibles montagnes suisses. Mais en 2014, à l’heure où Andrew Witty, le patron du laboratoire britannique GSK, assure qu’il ne paiera plus les médecins pour favoriser ses médicaments, le ton a changé. « La promotion est d’abord une conversation scientifique, assure Severin Schwan, le patron de Roche. Nos vendeurssontsouventdesmédecinstrèsspécialisés qui s’adressent à d’autres spécialistes. S’ils n’arrivent pas devant eux avec un bon produit et des résultats solides, la conversation s’arrête tout de suite ! » Mais les plus difficiles à convaincre ne sont pas les médecins. A l’heure des déficits publics, les payeurs tombent de leur chaiseà lavue desfacturesque leurprésente le labo : près de 100 000 dollars pour un traitement complet avec le Kadcyla, le dernier-né des anticancéreux du groupe. Pour contourner cet obstacle, Roche a remis au goût du jour un slogan qui a fait la fortune des marchands de lessives : « satisfait ou remboursé»… Le groupe fera payer les médicaments quand ils auront bénéficié aux patients. Ses concurrents n’avaient pas encore osé. Un mélange d’audace et de patience qui fait l’originalité et la vitalité de la vieille dame de Bâle. p Chloé Hecketsweiler 0123 dossier Mardi 11 mars 2014 Une cause qui devrait augmenter Centré sur la lutte contre le cancer PRIX TOTAL DU DERNIER TRAITEMENT LANCÉ CONTRE LE CANCER DU SEIN (LE KADEYLA) VENTES DE MOLÉCULES ANTICANCÉREUSES, EN MILLIARDS DE FRANCS SUISSES 35 MabThera 25 Avastin 94 000 dollars Herceptin 15 ESTIMATION DE L’ÉVOLUTION DU NOMBRE DE CAS DE CANCER, EN MILLIONS 14 MILLIONS 22 MILLIONS Autres 5 0 2004 2013 Un investissement rentable DÉPENSES TOTALES RELATIVES À LA PRISE EN CHARGE DU CANCER 7,3 milliards d’euros 2012 Au cours des deux prochaines décennies 9 (période 2011-2012) DÉPENSES POUR LES PRINCIPALES MOLÉCULES ANTICANCÉREUSES LES PLUS PRESCRITES EN 2012 Autres laboratoires Roche PUBLIC PRIVÉ 40,7 27,1 59,3 % 72,9 % SOURCES : BLOOMBERG, ROCHE, OMS, INCA, EVALUATEPHARMA Un laboratoire au siège de Roche, à Bâle (Suisse). M. RUETSCHI/KEYSTONE/AP «Nos ministres de la santé sont d’abord des ministres de la maladie» Entretien Severin Schwan, PDG du laboratoire Roche, aimerait que les Etats misent davantage sur la médecine préventive C ostume sombre, chemise blanche et cravate rouge assortie aux fleursqui ornentson bureau,Severin Schwan affiche la même simplicité que le losange bleu qui sert de logo au géant pharmaceutique Roche. Nommé à la tête du laboratoire suisse en 2008, cet Autrichien de 47 ans vient d’annoncer un chiffre d’affaires pour 2013 de 46,7 milliards de francs suisses (38 milliards d’euros). Un record. Le 4 mars, il a été rejoint par Christoph Franz, l’ancien PDG de la compagnie aérienne allemande Lufthansa, qui a été élu président de Roche. Severin Schwan revient sur les grandes évolutions de l’industrie pharmaceutique et les grands défis à venir en matière de santé. Les trois premiers médicaments mis sur le marché par Roche et qui ont totalisé plus de 15 milliards d’euros de vente en 2013 sont tous issus de biotechnologies. L’ère de la chimie, qui a donné naissance à la plupart des médicaments que nous consommons, est-elle désormais derrière nous ? Non, car les médicaments biologiques – les anticorps monoclonaux utilisés pour traiter les cancers du sein par exemple – sont constitués de molécules très grosses, qui s’agrippent à la surface de la cellule mais ne peuvent y pénétrer. Quand le problème vient d’un dysfonctionnement à l’intérieur même de la cellule, il faut recourir à des molécules fines issues de la synthèse chimique capablesde franchir la membrane. Nous sommes la plus grosse biotech du monde, mais pour autant,notresavoir-faireenchimieestprécieux. Pour guérir le cancer, il faut combiner ces deux approches. domaine du cancer. Mais il faudra des années avant que ces données soient utilisées routinièrement. Roche a récemment créé un laboratoire consacré à l’étude des cellules souches. Est-ce la prochaine révolution de la pharmacie ? Larecherchedans ce domaineestencore balbutiante mais prometteuse. Le chercheur japonais Shinya Yamanaka, qui aobtenu, en 2012, le prix Nobel de médecine, a montré qu’il était possible de « reprogrammer» n’importe quelle cellule en cellule-souche. Celle-ci peut alors devenir exactement ce que vous voulez qu’elle soit pour les besoins de la recherche: des cellules de cœur, de foie, de rein, etc. Grâce à cela, il sera bientôt possible de tester les effets secondaires de n’importe quelle molécule sur ces cellules plutôt que chez l’homme. Ces recherches feront aussi progresser la médecine « régénérative». Ainsi, cela prendra sans doute des décennies, mais pourquoi ne pourrait-on pas faire repousser la moelle épinière d’un patient paralysé ou réparer un cœur endommagé après une crise cardiaque? Le « big data » est aussi au cœur de ces révolutions. Quelles perspectives ouvre pour vous l’analyse de ces milliards de données ? C’est très intéressant du point de vue de la recherche. Nous pourrions accéder à des donnéesbienplusétenduesquecellesobtenueslorsdes essaiscliniquesqui comptent au mieux quelques milliers de patients. Desmillionsdedonnéesactuellementstockées dans les archives des médecins pourraient aussi être utilisées par des scientifiques pour mieux comprendre l’évolution des maladies et identifier de nouvelles pistes de recherche. Nous menons des expériences pilotes avec des institutions publiques,notammentau Royaume-Unidans le La médecine prédictive est-elle la prochaine étape ? « ON POURRA BIENTÔT TESTER LES EFFETS DES MOLÉCULES SUR DES CELLULES PLUTÔT QUE CHEZ L’HOMME » C’estcertainementune pisteintéressante. En attendant, nous aimerions déjà que les Etats fassent de la médecine… préventive. Nos ministres de la santé sont d’abord des ministres de la maladie. Ils prennent soin des gens malades. Si une personne a un cancer, elle est soignée. Mais ne seraitil pas plus judicieux de tout faire pour prévenir cette maladie? Le principal obstacle à ce changement est l’horizon de temps très court des politiques. Or, si vous commencez un programme de prévention aujourd’hui, c’est le successeur de votre successeur qui en bénéficiera. Inimaginablepour les politiques! Du coup, ils ne bougeront que si la pression de la société est suffisamment forte. Le prix des nouveaux traitements dans le domaine du cancer peut atteindre 75 000 euros par an. Dans certains pays comme le Royaume-Uni, l’Etat refuse de prendre en charge les anticancéreux les plus onéreux. Comment adaptezvous votre modèle économique à ces contraintes ? Nousdevonsadapterle prix desmédicaments au bénéfice qu’ils apportent réellement à chaque patient. Ainsi, l’Avastin est indiqué pour traiter sept types de cancer : colorectal, du sein, des bronches, du rein, de l’ovaire, etc. Son efficacité est différente selon le type de tumeur. Nous proposons donc d’ajuster nos tarifs selon le cancer pour lequel il est utilisé.Et, dans unsecond temps,nousproposons d’indexer le prix du traitement sur les résultats obtenus pour chaque patient. Les autorités de santé sont ouvertes à cette proposition, mais nous nous heurtons à un problème pratique: la disponibilité des données. Nous n’avons aucun moyen de savoir à quels patients a été administré l’Avastin que nous avons livré, et avec quels résultats. Pourqu’untelsystèmefonctionne,ilfaudrait que chaque médecin tienne un registre de ses prescriptions et que les informations soient centralisées. C’est compliqué à mettre en œuvre, d’autant qu’il faut garantiraux patientsla protectiontotalede leurs données privées. Quelle est votre stratégie dans les pays émergents, où la question du prix se pose presque en termes éthiques ? C’est un vrai défi. Nos médicaments ont des prix élevés dans les pays riches, mais nous les commercialisons aussi, ailleurs, à un prix plus abordable. Ainsi, en Chine, il y a un marché privé pour les patients qui ont les moyens de payer le prix élevé, et un marché public où nos médicaments sont distribués à moindre coût. C’est possible avec cette méthode: une patiente atteinte d’un cancer du sein paie six premières injectionsd’Herceptin; six autres sont gratuites. Grâce à ce mécanisme, trois fois plus de patients sont traités. Mais le prix d’un traitement n’est pas tout. Pour que les patients puissent bénéficier d’un médicament comme l’Herceptin, il faut des médecins et des infirmières qualifiés,descentresde soinséquipéspourréaliser le diagnostic.Dans certains pays, il n’y a même pas de routes pour emmener les malades jusqu’à l’hôpital! p Propos recueillis par C. Hr 10 0123 idées Mardi 11 mars 2014 La dette publique reste un tabou politique Pourquoi le débat porte-t-il toujours sur le déficit? La fusion de Bouygues Telecom et SFR est un projet pour la France Martin Bouygues PDG du groupe Bouygues V oilàunemagnifiqueillustrationconcrète de l’esprit de responsabilité autour duquel se rejoignentdésormaistous les acteurs pour favoriser la compétitivité française et lutter contre le chômage. Concrète, oui, car la proposition de Bouygues Telecom de racheter SFR n’est pas un pacte mais un projet industriel cohérent, complet, précis, chiffré,financé.Un projet positifpour un secteur stratégique aujourd’hui dévasté, positif pour la France, positif pour le dynamisme économique et pour l’emploi dans notre pays… Notreprojettientenpeudemots :ilconsisteàcréer un acteur majeur du numérique en France. Nous proposons de fusionner Bouygues Telecom et SFR ; de céder à Free le réseau mobile de Bouygues Telecom ainsiqu’unportefeuilledefréquences;d’investirmassivement ; et de développer l’emploi en France, notamment en relocalisant certains des services aujourd’hui assurés au-delà de nos frontières. Le premier, le principal effet de l’offre de Bouygues Telecomest de permettre à la France de passer de quatre à trois opérateurs, c’est-à-dire une configuration de marché semblable à ce qui existe dans de très grands pays et donc de s’inscrire dans la tendance à l’œuvre en Europe. C’est d’ailleurs très exactement ce que dit le ministre du redressement productif, Arnaud Montebourg, lorsqu’il explique que la France sera plus forte avec trois opérateurs qu’avec quatre. Telle est bien la logique de notre offre. Tel est bien ce que nous mettronsen œuvre.Nous le feronsen respectant naturellement les exigences que les autorités réglementaires pourraient avoir et en appliquant scrupuleusement les engagements que nous prenons. Concernant les impératifs réglementaires, notre propositionyrépond.Lacessiondenotreréseaumobile à Free, qui vient en prolongement de notre offre de fusion avec SFR, permet de maintenir en France une forteconcurrencepar les infrastructures.Le dispositif quenousprésentonsgarantitle maintiend’unedynamique de marché bénéfique pour les consommateurs. Quant aux engagements que prend aujourd’hui Bouygues Telecom, si certains n’ont pas été suffisamment entendus, je veux ici les répéter solennellement et publiquement, afin que tous et chacun puissent mesurer combien ils vont dans le sens de la raison, de la responsabilité et du patriotisme économique. Engagementdecontribueràrecréeruneconcurrencesaine,adaptéeàl’échelledumarchéfrançaisetfavorable au dynamisme économique et social de notre pays. Engagement d’effectuer des investissements majeurs grâce aux importantes synergies que nous pourrons dégager : nous consacrerons 2 milliards d’euros par an aux réseaux fixe et mobile dont 400millions par an à la fibre optique, dont le déploiement est privilégié par les pouvoirs publics. A cet égard, il doit être clair que nous investirons dans la technologie dite de « la fibre jusqu’à l’abonné » (ou « FTTH», pour « fiber to the home»). C’est la technologie fibre la plus avancée, la plus prometteuse et la seule à offrir des débits adaptés aux usages de demain. C’est aussi la technologie sur laquelle le gouvernement a fondé le plan France Très Haut Débit. J’observe égalementquede nombreusescollectivitésterritoriales placent le FTTH au cœur des réseaux très haut débit qu’elles prennent l’initiative de déployer. Engagement de contribuer à dynamiser par ces investissements l’activité des industries de télécoms en France dont les compétences sont incontestables. Dans le même sens, nous poursuivrons et amplifierons l’action de notre incubateur Bouygues Telecom Initiatives qui promeut de nombreuses start-up françaises. Nous avons l’intention d’augmenter très vigoureusementles capacitésd’investissementde cet incubateur en renforçant son capital et ses moyens humains. L’expertise qui est la nôtre en matière d’incubation a permis l’émergence de formidables succès comme Melty – start-up lancée en 2009 et qui, en 2014, est un des leaders de la presse jeunes en ligne, se développe à travers toute l’Europe et compte des millions de visiteurs. Il y a beaucoup d’histoires d’entreprise comme celle-ci à construire. Nous y contribuerons. Engagement de ne procéder à aucun licenciement collectif, aucun plan social, aucun plan de départs volontairesetmêmededynamiserl’emploi,enrelocalisant en France des centres d’appels et en développant les réseaux commerciaux et la relation client. Engagement de maintenir en France le siège social dunouvelensemble,de lecoter à la Boursede Paris, de payer nos impôts en France, et non au Luxembourg ou ailleurs. Ces engagements ne sont pas destinés à embellir notre offre. Ils répondent en profondeur à nos convictions et à la logique industrielle de notre projet. Si nous voulons rapatrier des centres de relation client, c’est que nous savons qu’ils sont plus performants lorsqu’ils sont basés en France. Si nous voulons aider les PME françaises, c’est que leurs capacités d’innovation sont incontestables et reconnues. Si nous voulons dessiner en profondeur un nouveau paysage du secteur, c’est que tout le monde a à y gagner. C’est pour cela que nous voulons le faire. C’est pour cela que nous nous engageons. p François Morin Economiste L ¶ Le groupe Bouygues a annoncé qu’il était prêt à céder son réseau mobile à son concurrent Free (Iliad), pour faciliter son mariage avec SFR, et recomposer ainsi le paysage de la téléphonie mobile française. HISTOIRE | CHRONIQUE p a r P i e r r e - C y r i l l e H a u tcoe u r S’inscrire à la fac doit coûter plus cher C ¶ Pierre-Cyrille Hautcœur est directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales, Ecole d’économie de Paris es dernières semaines, l’université Paris-Dauphine, l’Ecole des mines et l’Ecole polytechnique ont annoncé vouloir accroître les droits d’inscription demandés aux étudiants. Face à la stagnation ou à la réduction des financements publics, à la demande d’accroissement de la qualité de l’encadrement de la part des élèves, à la concurrence croissance des universités et écoles étrangères, mais aussi d’officines privées qui emploient parfois leurs enseignants, cette solution leur est apparue comme la seule possible. Faut-il le leur interdire? Historiquement, les écoles spécialisées ont, en France, joué un rôle dans la formation de cadres techniques, mais aussi dans celle des élites économiques, sociales et intellectuelles. Formant des hauts fonctionnaires, elles sont à ce titre gratuites (voire même versent un traitement aux étudiants). Les classes préparatoires aux concours de ces grandes écoles, créées dans les lycées, sont aussi gratuites depuis que le lycée l’est devenu, dans les années 1930. Or, elles ont été habilement utilisées comme viviers par d’autres écoles, plus ou moins grandes, plus ou moins privées, qui se sont multipliées depuis quarante ans et qui sont, elles, payantes… Le succès des écoles auprès des familles a été permis par un financement, public et privé, supérieur à celui dont bénéficient les universités. Or, même si l’Etat dépense relativement beaucoup par étudiant en moyenne, le caractère presque exclusivement public du financement des universités ne permet plus à celles-ci de fournir l’encadrement et l’insertion demandés par les familles. Lorsqu’un étudiant est le principal bénéficiaire de l’enseignement qu’il reçoit, parce qu’il accroît sa rémunération future, il est juste qu’il contribue à le financer. Néanmoins, les retombées sur la société (progrès scientifique, innovation, expertise, création, culture) justifient une subvention publique. L’importance relative du bénéfice privé par rapport au bénéfice public varie d’une formation à l’autre, ce qui justifie que la subvention publique soit plus faible pour les filières directement professionnelles. Les parents sont d’ailleurs prêts à payer plus pour des filières efficaces sur ce plan. Chacun reconnaît inversement que la formation des médecins, des artistes ou des chercheurs doit être subventionnée. A armes égales Or, aujourd’hui, il n’est pas évident que les écarts de financement entre filières se justifient par ces différences d’externalités sociales. Parce que l’Université est sous dotée financièrement, la plupart des étudiants y bénéficient d’une formation gratuite de haute qualité scientifique, mais sans l’accompagnement pédagogique nécessaire pour lui donner toute sa valeur. Inversement, des filières plus encadrées (notamment les prépas et les écoles, publiques ou privées) renforcent la capacité d’usage de ces savoirs, mais sans contribuer à leur production. Deux conséquences doivent être tirées de la complémentarité des deux systèmes : ils doivent être rapprochés pour que tous les étudiants puissent bénéficier à la fois d’un haut niveau scientifique et d’un encadrement efficace; la partie directement appropriée par l’étudiant (l’encadrement renforcé) peut justifier des droits d’inscription supérieurs dans les universités, et un financement public inférieur dans les classes préparatoires et les grandes écoles. Le gouvernement actuel encourage le rapprochement entre classes préparatoires et universités. Mais il ne résoudra pas le problème financier tant qu’il ne laissera pas les universités libres de mettre en place les droits d’inscription qui leur permettraient de concurrencer, à armes égales, les écoles. p a Commission européenne vient de sommer Paris de respecter ses objectifs en matière de déficit public, à savoir le fameux critère de 3 % de ratio « déficit sur produit intérieur brut (PIB)» à l’horizon 2015. En plaçant la France sous surveillance renforcée,Bruxelles rejoint les préoccupations de la Cour des comptes dans son rapport annuel, remis le 11 février, où étaient exposéeslesmille et unemanièresde combattre ledit déficit. En revanche, sur les 1 397 pages du rapport, on ne repère que neuf lignes consacrées à la dette publique. Pourquoi cette différence vertigineuse entre déficit des finances publiques et dette publique ? Pourquoi ne pas traiter explicitement du deuxième critère européen du traité de Maastricht, celui de 60 % de ratio « dette publique sur PIB » ? Il est vrai que, depuis le déclenchement delacrise,aucunpaysdéveloppéne maîtrise réellement son évolution. Il atteint partout des niveaux très élevés dans la zone euro, mais aussi au Royaume-Uni (93,3%), aux Etats-Unis (111,7 %), et, un record, au Japon (245 %). Pourtant, l’impact de la dette est considérable sur le déficit. En France, les intérêts de la dette représentent le premier poste du budget (45 milliards d’euros en 2013). Or, pas un mot sur cette charge dans le rapport de la Cour des comptes! Le surendettement des Etats est lié à la crise de 2007-2008, car il a fallu injecter des fonds publics considérables pour recapitaliser les banques N’y a-t-il pas là un tabou politique ? Serait-ce donc là que se cache la cohérence intime de la politique gouvernementale? Puisqu’il est impossible de compter sur l’inflation ou la croissance pour réduire la dette, la seule voie crédible serait celle de la rigueur budgétaire, suivie si nécessaire d’une politique d’austérité (baisses des salaires et des retraites), pour passer à travers les gouttes d’une prochaine crise. L’opposition épouse la même analyse, mais ne peut évidemment pas le dire. Car mettre en avant la dette, ce serait prendre le risque de soulever dans le débat public, par exemple, l’idée d’une restructuration de la dette. Or, celle-ci léserait les intérêts de la partie la plus aisée de son électorat, qui verrait alors diminuer ses revenus tirés des fonds obligataires. Et puis, pour la frange la plus libérale, mettre l’accent seulementsur le déficit permet de précipiter encore un peu plus le démantèlement de l’Etat social. Ce consensus implicite entre majorité et opposition est évidemment très inquiétant, car il n’empêche pas les mâchoires de l’étau de la dette de se resserrer dangereusement. Quelles sont alors les solutions possibles et crédibles? Certains économistes reprennent l’idée d’un effacement partiel de la dette : les uns voudraient contraindre les créanciers à accepter une restructuration plus ou moins négociée; d’autres prônent son effacement partiel de façon autoritaire en raison de l’illégitimité des pratiques spéculatives qui l’auraient générée ; enfin, quelques-unsévoquentune sortieunilaté- rale de l’euro afin de bénéficier d’une dette dévaluée par sa conversion dans la nouvelle monnaie. Mais les uns et les autres ne voient pas à quel point ces solutions conduiraient toutes le système monétaire etfinanciermondialdans une nouvellecrise d’une grandeur inégalée. Les marchés financiers ont été tétanisés par les crises grecque ou chypriote, dont les économies ne représentent pourtant qu’une infime partie du PIB européen. Un effacement même partiel de la detted’un pays commela France entraînerait une crise bancaire sans précédent. Par effet domino, les banques systémiques du monde entier auraient toutes chances de s’écrouler, pour deux raisons : d’une part, la corrélation entre les plus grands établissementset les Etats à travers lestitresde dette,d’autrepart,ledéclenchement de produits financiers d’assurance extrêmement toxiques, les CDS (credit default swap), de nature à provoquer une accélération foudroyante de la crise. Ces « solutions», tout comme les politiques économiques menées en Europe, nous précipitent tout droit vers un nouveau cataclysme financier aux effets politiques et sociaux incalculables face à des Etats exsangues. Pour imaginer une sortie de crise crédible, il faut revenir au point de départ et aux causes du surendettement des Etats. Faire croire que l’énormité de la dette publique relèverait d’une gabegie des finances publiques depuis trente ou quarante ans est scandaleux. Comment en effet expliquer que les grands pays occidentauxsoient tous, aujourd’huiet simultanément, en situation de surendettement? Tous des incapables? Non, le surendettement des Etats est directement lié à la crise de 2007-2008, car il a fallu injecter des fonds publics considérables pour recapitaliser les banques et soutenir l’activité économique. La dette publique mondiale s’est accrue de 67 % entre2007 et 2012, ce qui est proprement vertigineux. S’attaquer réellement aux causes de la crise financière est donc la seule voie pour stabiliser le système de financement de l’économie mondiale. Il faudrait ici détailler les réformes accomplies récemment en matière de régulation financière pour montrer leur impuissance à enrayer véritablement les dérives des marchés financiers. En tout cas, leur limite se mesure malheureusementchaquejour à l’aunede la multiplication des scandales financiers (Libor, marché des changes, etc.). Le silence sur la dette indique que le débat de fond n’a pas été encore ouvert. Pourengagercelui-ci,posonslevraiproblème, celui de l’instabilité systémique de la sphèrefinancièreinternationale,quiplonge ses racines dans les abandons de souveraineté des Etats en matière monétaire. Peut-on encore admettre que la quasitotalité de la création monétaire soit d’origine privée, que les deux variables fondamentalesde la financeglobale, le taux d’intérêt et le taux de change, soient manipulées par un oligopole de banques systémiques qui dictent de fait leurs politiques auxEtats? Nous sommesdansun état d’urgence, mais pour le proclamer, encore faudrait-il que nos responsables politiques aient le courage de la vérité. p ¶ François Morin, professeur émérite de l’université de Toulouse, fut membre du conseil général de la Banque de France et du Conseil d’analyse économique. Il est l’auteur de « La Grande Saignée. Contre le cataclysme financierà venir » (Lux, 2013) D’AUTRES DÉBATS SUR LE WEB a « Face à Google, l’incroyable faiblesse de la Commission européenne », BrunoGuillard, fondateur de la société 1plusV. 0123 spécial immobilier Mardi 11 mars 2014 11 Logement: le match Hidalgo-NKM à Paris Nathalie Kosciusko-Morizet(UMP) axe son projet sur l’habitat intermédiaire et Anne Hidalgo (PS) sur le social L e Mipim, le Marché international des professionnels de l’immobilier, qui se tient du 11 au 14 mars à Cannes, proposera aux investisseurs des projets déjà lancés. Mais d’autres programmes, actuellement en gestation et absents du Salon, dessineront les opportunités de demain. Ce sont ceux des candidates à la Mairie de Paris, Anne Hidalgo (PS) et Nathalie Kosciusko-Morizet (UMP). Avec la pénurie de logements abordablesdans les grandescapitales, le résidentiel redevient partout un axe fort du développement des villes. « Le logement des salariés est un élément déterminant dans le choix d’une implantation immobilière pour les grands groupes », explique Magali Marton chez DTZ. Aussi, le charismatique maire de Londres, Boris Johnson, va-t-il venir en personne à Cannes pour vendre aux fonds les avantages d’un investissement dans ce secteur. C’est aussi sur ce terrain que les deuxcandidatesà laMairiede Paris ont bâti leur programme. Avec une surenchère dans les objectifs chiffrés et dans l’imagination de solutions nouvelles. Alors que seulement 3 000 logements ont, en moyenne, été créés chaque année depuis 2001, elles promettent d’en produire 10 000, dont 6 000 constructions neuves. Et, de part et d’autre, on affirme que l’on pourra transformer massivement les bureauxvidesenlogementsetremplir ceux qui sont vacants. Du côté d’Anne Hidalgo, on parle de « choc d’offre », et chez « NKM», de« planMarshalldulogement».Maislesmargesdemanœuvre sont étroites. « Si les deux programmes reviennent au rythme de production d’avant Bertrand Delanoë [maire de Paris depuis 2001], aucun ne change le profil de Paris,figédepuisledébutduXIXe siècle dans un espace limité en surface et en hauteur. Ils ne font que confir- logements sociaux ne seront réalisables que dans une vision élargie de Paris à la métropole. De son côté, NKM prévoit, à titre de précaution, une subvention de 1,8milliardd’eurossur la mandature, pour modérer le prix du foncier et le prix de sortie des logements neufs.C’estainsiqu’elleentendproduire des logements intermédiaires et construire 2 700 logements par an réservés à l’accession sociale à la propriété, avec une décote de 25% sur le prix de marché. Une provisionqui serviraaussià financerle lancement de son ambitieux programme d’aménagement. A Paris, la rareté du foncier disponible rend la construction de nouveaux logements problématique. VINCENT ISORE/IP3 PRESS mer la vocation de plus en plus muséale du centre-ville de l’Ile-deFrance», juge l’économiste spécialiste du logement, Gilbert Emont, conseiller à l’Institut de l’épargne immobilière et foncière, et directeur de l’institut Palladio. Dans la continuité de son prédécesseur et en phase avec la politiquedugouvernement,AnneHidalgo promet de maintenir le rythme de 6500logements sociaux par an, pour atteindre 25 % du parc immobilier en 2025, nouvel objectif de la loi Duflot.De son côté, si NKM affirme vouloir réduire la voilure à un peu plus de 4 000 logements sociaux par an, il s’agit chez elle d’une construction nette. Elle s’engage à mettre un terme à la politique, très coûteuse pour la ville, de préemption des appartements vendus sur le marché libre pour les transformer en logements sociaux (1 milliard d’euros entre2008et2011).Elleprometaussi de relancer la productionde logements intermédiaires, dont le parc a beaucoup baissé sous Delanoë, passant, entre 2001 et 2012 de 43 000 à 35 000 unités. Au total, sous ses deux mandatures, 30 000 logements ont disparu des marchés libres et intermédiaires. Cesontbiendeuxvisionstrèsdifférentes, s’adressant à deux cibles politiques distinctes, qui sous-tendent les programmes des candidates. Alors qu’Anne Hidalgo s’inscrit dansune successionpolitique axée sur les occupants de logements sociaux, il y a chez NKM une volonté de retisser la continuité sociale en reconstruisant la chaîne du parcours résidentiel. « Entre le stock de logementssociaux, et celui d’appartements du marché libre, il y a à Paris un fossé qui incite ceux qui occupent les premiers à y rester à vie, explique M. Emont. Paris a plus besoin de 25 % de logements locatifs intermédiaires que de 25 % de logements sociaux.» Les deux candidates se veulent des « maires bâtisseurs » de 6000logements par an. Mais elles s’opposentsurlamanièredeprocéder. Sur le plan du foncier d’abord. « Le pari d’Anne Hidalgo repose en partiesur l’idée que l’Etat vendrases terrains à bas prix, explique M. Emont. Or, l’Etat, qui a besoin d’argent, a toujours vendu au bon prix sous le regard de la Cour des comptes. Je ne vois pas par quel miracle cela changerait.» Elle sait néanmoins qu’avec la saturation du foncier, les 25 % de Les professionnels souhaitent un allégement des normes de construction A PARIS, l’essentiel du foncier disponible pour la construction de logements appartient… au ministère de la défense, à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, à la SNCF, à Réseau ferré de France ou à la ville. Reste à le mobiliser à un prix qui permette de maîtriser le prix des logements neufs. Aussi, estime Bruno Corinti, président de Nexity Résidentiel, « si les élus veulent produire massivement des logements intermédiaires, il faudra bien qu’ils mettent tout en œuvre pour que l’Etat accepte enfin de vendre ses terrains à bas prix ». Pour dégager de la constructibilité, les professionnels attendent beaucoup de la modification du plan local d’urbanisme (PLU). « Il faut densifier, dit le directeur général délégué de Bouygues Immobilier, Eric Mazoyer. L’Ile-de-France n’échappera pas à la densification des centres-villes qui touche les grandes capitales du monde. Pour cela, il faut relever la hauteur des immeubles, et en banlieue transformer les zones pavillonnaires pour faire du logement collectif. » Et pour favoriser la transformation de bureaux en logements, dont l’équilibre financier est difficile, « il faudrait accorder aux opérateurs qui s’engagent à les transformer en habitation la possibilité d’accroître la surface construite de 20% à 30 % ». Usage réversible Pour Stéphane Theuriau, directeur général délégué chez Altarea Cogedim, cette révision du PLU doit être « l’occasion de réorienter la politique immobilière de la ville, du tertiaire vers l’habitation ». D’autant qu’avec la réforme de la taxe professionnelle, qui pèse désormais moins lourd dans le budget des communes, les maires ont moins besoin de bureaux. « Mieux, cela pourrait être l’occasion d’introduire une flexibilité dans l’affectation du foncier, dont l’usage pourrait être réversible en fonction des besoins. Aux architectes aussi de s’adapter à un bâti flexible, en concevant, explique Stéphane Theuriau, des immeubles de bureaux qui puissent, au bout de vingt ans, être facilement transformés en logements. » S’il y a un levier sur lesquels tous les professionnels sont d’ac- cord, c’est celui de l’allégement des contraintes de production. Seulement, ce chantier-là, c’est à l’Assemblée nationale où se votent les lois qu’il se construit. Et Stéphane Theuriau résume : « Pour réduire les délais de transformation, il faut empêcher les recours abusifs sur les permis de construire qui ont respecté le PLU et les réglementations, faire un moratoire sur les normes de toute nature, assouplir la réglementation thermique. » Vaste programme… p V. Se. Philosophie volontariste Car c’est aussi de cette manière qu’elle entend se démarquer, en créant du foncier. Entre la couverture de 1,4 kilomètre de périphériqueau sud et de voies ferrées à Bercy-Charenton comme aux gares du Nord et de l’Est (couverture qui rend les terrains avoisinants constructibles), l’équipe de NKM considère que, sur cinquante ans, les opérations de couverture ou d’enfouissement de tout ce qui peut l’être permettraient de créer 60 hectares pour un potentiel de 30 000 logements construits. Au cours de sa première mandature, elle pense libérer 5 hectares de fonciers à bâtir pour 3 000 logements, soit 500 par an. Et sur une deuxième mandature, 7 hectares pour 4000 logements. Anecdotique? Cette visionest empreinted’une philosophie volontariste d’aménagement qui s’appuie sur le marché privé. Cette ambition serait-elle financièrement supportable ? NKM fait le pari que ce sera à coût zéro, le foncier ainsi créé étant revendu aux promoteurs. Ce que l’InstitutMontaigne,quia évaluéle coût des programmes, juge crédible.Leprésidentde NexityRésidentiel, Bruno Corinti, estime lui aussi que « la cherté de l’immobilier à Parispermetdefinancerlaconstruction de foncier». Concernant l’évolution du Plan local d’urbanisme (PLU), sur lequel la prochaine équipecommencera à travailler dès avril, Anne Hidalgo a laissé entendre qu’elle autoriserait le rehaussement de quelques immeubles et qu’elle relèverait le coefficient d’occupation des sols. Elle entend aussi assouplir les contraintes liées aux changements d’affectation, favoriser la mixité des usages au sein des mêmes immeubles et permettre la construction de quelques tours. Plus prudente,NKM est circonspecte sur la construction de tours qui, selon elle, s’intègrent mal dans l’urbanisme très écrit de la ville-centre. p Valérie Segond Partenaire de la stratégie immobilière des entreprises, elle conçoit à leurs côtés des solutions durables et innovantes avec un double objectif : valoriser le patrimoine urbain existant et concevoir l’immobilier de demain. 16 Md€ de patrimoine www.foncieredesregions.fr en part totale Conception – réalisation : Acteur de référence de l’immobilier de bureaux, Foncière des Régions dispose d’un patrimoine loué à des entreprises leaders de leur secteur. Expert, grâce à ses équipes et ses savoir-faire reconnus, Foncière des Régions a su développer des partenariats locatifs uniques. – Crédits photo : ArteFactoryLab, Hiboo, O. Ouadah. Foncière Partenaire 12 0123 spécial immobilier Mardi 11 mars 2014 Transformer des bureaux en logements n’est pas si facile Les modifications coûtent plus de 2000 euros par mètre carré. Les bailleurs préfèrent souvent détruire pour reconstruire D ’un côté, plus de quatre millions de mètres carrés de bureaux vides dans la région Ile-de-France, dont 700000 à Paris. Et de l’autre, une pénurie chronique de logements depuis trente ans… «Alors quele prix desloyersd’habitation n’a pas cessé de monter depuis vingt ans, ceux des bureaux, eneurosconstants,ontbaisséenraison d’un excès d’offre et d’une inadaptation des locaux disponibles à la demande », constate Stéphane Theuriau, directeur général délégué de la société foncière Altarea Cogedim. Au point qu’à Paris, dans les 3e, e 4 , 18e et 19e arrondissements, les loyers moyens au mètre carré des appartements dépassent désormais ceux des bureaux. Aussi, bien que marché résidentiel et marché tertiaire aient l’habitude de s’ignorer, de plus en plus de propriétaires de bureaux vides s’interrogent: est-ce le moment de les transformer en logements, ou de les vendre pour les faire transformeret bénéficier,au passage,de l’exonération de 40 % de la taxation des plus-values ? « Ils s’y résignent après quatre ans de vacance, quand ils ont perdu tout espoir de louer leur immeuble de bureaux à plus de 200 euros le mètre carré par an», dit M. Theuriau. Pour le président de Nexity résidentiel, Bruno Corinti, certains de ces bureaux ne valent plus grandchose : « Dans les quartiers qui n’ont pas de vocation tertiaire, la valeurde bureauxobsolèteset vides peut être faible et les rentabilités négatives compte tenu des charges qui continuent à courir. L’espoir de les voir retrouver une vraie valeur une fois rénovés est très aléatoire.» C’est pour ces biens que la question de la transformation se pose. Aprèsanalyse économique,peu de propriétaires franchissent le pas. Car les obstacles sont nombreux. La plupart sont liés aux dif- Les nouvelles normes ont fait exploser le coût d’une transformation. Et ont dissuadé plus d’un investisseur férences entre le marché des bureaux et celui des logements. « Entre la surface louée d’un bureau et celle d’un logement, il y a 10% d’espaceperdu enpalieretcouloirs, explique Eric Mazoyer, directeur général délégué de Bouygues immobilier.Il y a aussi des différences de fiscalité : les loyers des logements sont frappés d’une TVA à 20 %, alors que ceux des bureaux sont hors taxes. Il existe aussi des normes spécifiques au logement neuf. Enfin, ajoute M. Mazoyer, le coût de transformation de bureaux en logements est plus élevé que celui d’une simple rénovation de bureaux. En clair, l’opération résiste rarement au calcul économique.» Voilà aussi pourquoi, selon Stéphane Theuriau, « pas plus d’un projet sur dix n’est effectivement mené à son terme ». Puis surgissent les obstacles liés à la qualité des biens eux-mêmes: «Hormisles immeubleshaussmanniens conçus à l’origine pour être des logements, les bâtiments des années 1970, 1980 et 1990 exigent de telles modifications de la façade et de la structure interne qu’ils se prêtent difficilement à une transformation, explique Bruno Corinti. Dans le cas de ces derniers, on peutperdrejusqu’à 20% dela surface utile. » En fait, seuls les immeubles répondant à des critères très précis peuvent être transformés en logements. Ils ont été identifiés par le cabinet Deloitte. Avantdeselancer,unpropriétaire-bailleur doit se poser de nombreuses questions. Le plan local d’urbanisme (PLU) autorise-t-il un usage alternatif ? L’immeuble de bureaux pourra-t-il répondre aux nouvelles exigences du monde du travail? Est-il situé dans une zone dotéedeséquipementsindispensables à la vie des habitants ? Par exemple, pourra-t-on y construire une crèche, des commerces? L’immeuble a-t-il une profondeur de moins de seize mètres pours’assurerquetoutes lespièces auront bien une fenêtre? Une hau- Un grand nombre d’opérations de petite taille TRANSFORMATION DE BUREAUX EN LOGEMENTS, À PARIS ENTRE 2001 ET 2012 Plus de 10 000 m2 De 1 000 m2 à 10 000 m2 18e 17e De 100 m2 à 1 000 m2 19e 9e 8e 16 e 1er 7e 6e 15e 14e 10e 2e 3e 11e 20e 4e 5e 12e 13e SOURCE : VILLE DE PARIS ET PRÉFECTURE teur inférieure à cinquante mètres pour respecter certaines normes anti-incendie? Et à quel prix pourraient se vendre les logements neufs dans ce quartier ? Du coup, les avantages supposés de la transformationfinissentpar êtresérieusement écornés. Et chacun se demande : cette solution est-elle vraiment préférable à la destruction-reconstruction ? Stéphane Theuriau, qui gère actuellement une grande opération de transformation à Courbevoie, appelée Sky, de184 logementssur quinzeétages avec commerces et crèche, en est persuadé. Chez Nexity, Bruno Corinti est plus dubitatif: «Des premières étudesàlalivraison,enpassantparl’ob- Le nouveau visage de La Défense 90 % DES SALARIÉS* SATISFAITS DU QUARTIER DE LA DÉFENSE C’est bon signe, mais nous voulons faire encore mieux. *Selon l’enquête BVA réalisée en face à face auprès de 1156 personnes travaillant dans le quartier d’affaires de La Défense, pendant le mois d’octobre 2013. tention du permis de construire, les recours, la déconstruction partielle etlarestructurationavecsesinévitables surprises, l’opération prend trois à quatre ans, soit autant que la construction neuve.» Pour lui, c’est clair : « Ce n’est ni plus court ni moins cher : alors qu’il faut compter, au mètre carré, 2 000 euros pour le neuf, une transformation coûte entre 2000 et 3 000euros.» En fait,les normesexigées (pour l’accès des personnes handicapées, sur la performance énergétique…) ontfaitexploserlesprixdelatransformation. Et ont dissuadé plus d’un investisseur. « Dans tous les projets d’acquisition d’immeubles de bureaux vides destinés à être transformés en loge- ments qu’a menés Nexity, on a fini par démolir intégralement le bâtiment pour en reconstruire un neuf», lâche M. Corinti. En d’autres termes, inutile d’espérer une transformationmassive de bureaux en logements à Paris comme le laissent accroire les programmes des deux candidates à la mairie de Paris actuellement en compétition, sauf à modifier radicalement l’équilibre économique de l’opération de transformation. Tout le monde en convient : la solution réside plutôt dans la destructionsystématiquedes immeubles obsolètes et amortis depuis longtempset dans leur reconstruction en immeubles d’habitat. p Valérie Segond En Ile-de-France, la baisse des prix n’incite pas les entreprises à déménager Lemarchédes bureauxrésisteà Paris, mais14% des surfacessontvacantesà la Défense I l y a actuellement 3,9 millions de mètres carrés vacants en Ilede-France. Et 500 000 le sont depuis plus de trois ans ! », déclare Brice Chasles, consultant chez Deloitte Real Estate Advisory. L’excès d’offre se concentre à l’ouest de Paris, principalement à la Défense (401000m2), dans les Hauts-deSeine, et dans le croissant Ouest (1 093 000 m2). Cette situation va-t-elle inciter les entreprises franciliennes à déménager pour alléger le poids de leur immobilier? Dans une enquête commandée par Foncière des régions à l’institut AOS Studey et publiée en décembre 2013, 43 % des entreprisesparisiennesde plus de500salariés se déclarent prêtes à quitter Paris,quand 21 % envisagentde faire le trajeten sens inverse. Uneévolution notable puisqu’en 2011 seulement 23 % envisageaient de quitter la capitale. « Les entreprises deviennentde plus en plus pragmatiques, conclut un porte-parole de Foncière des régions. Le marché des bureaux ne se limite plus à Paris intra-muros et à La Défense; il devient multi-polaire. De nouveaux centres d’attraction apparaissent à Nanterre, à Saint-Denis, et, peut-être,prochainementà Gennevilliers.» Bien sûr, les entreprises cherchent à faire baisser le coût de leur immobilier(loyers, charges,fiscalité). Et, si les prix sont orientés à la baisse,le repli est loin d’êtreuniforme, ce qui devrait logiquement favoriser la mobilité. Dans Paris, le marché des bureaux résiste car le taux de vacance reste bas, entre 6 % et 7 %, deux fois inférieur à celui de Londres. Presque un niveau d’étiage, si l’on considère que le taux naturel de vacance (lié à l’évolution de l’activité des entreprises) se situe entre 3 % et 4 %. Entre l’Etoile, la gare Saint-Lazare et l’Opéra, dans la fameuse zone QCA (quartier central des affaires), les mètres carrés libres sont rares. Pourtrouverdesbureauxneufs, la solution la moins coûteuse pour un grand groupe reste de franchir le périphérique. Car la situation est complètement différente à La Défense, où le taux de vacance atteint 14 %. La demande pour les surfaces de plus de 10 000mètres carrés s’est effondrée et un grand nombrede tourscomptent des étages entièrement vides. Renégociation des bails Au troisième trimestre 2013, le prix moyen du mètre carré à la location dans les bureaux d’Ile-deFrance a reculé de 3,2 % en rythme annuel.De façon unanime, les professionnels s’attendent à une accélération du repli en 2014. Mais, au lieu d’inciter les entreprises à déménager, la diminution des prix a plutôt tendance à figer le marché. « Elle incite les entreprises àrenégocier leurbail à labaisseplutôt qu’à déménager », déclare M.Chasles. Cette crise sur le marché des bureaux a une autre conséquence, plus inattendue. Elle donne un coup de frein aux projets de campus,pourtanttrèsen vogueces dernières années. Créer un campus en banlieue permet à un grand groupe de rassembler ses activités dans un cadre verdoyant et bien desservi par les transports en commun, en proposant à ses salariés des services (crèche, salle de sport, etc.) inaccessibles à Paris. Le contexte incite désormais les directions des entreprises à l’attentisme. p Jérôme Porier REPRODUCTION INTERDITE LE MONDE/MARDI 11 MARS 2014/13 les oFFRes D’eMPloi DiRigeants - Finances, aDMinistRation, JuRiDique, R.H. - Banque, assuRance - conseil, auDit - MaRketing, coMMeRcial, coMMunication santé - inDustRies & tecHnologies - éDucation - caRRièRes inteRnationales - MultiPostes - caRRièRes PuBliques Retrouvez toutes nos offres d’emploi sur www.lemonde.fr/emploi – Vous RecRutez ? M Publicité : 01 57 28 39 11 [email protected] Nations Unies Président directeur Général - H/F la société d’accélération de transfert de technologie (satt ) Grand est est né dans l’écosystème de l’innovation englobant 4 régions : Bourgogne, Franche-comté, lorraine et une partie de la champagne. la satt Grand est a pour vocation de devenir l’outil de valorisation de la recherche publique sur ce vaste territoire. elle rassemble les forces de ses futurs actionnaires dans le domaine de la maturation et du transfert technologique, notamment les acquis des directions et filiale de valorisation de la recherche des partenaires fondateurs ainsi que le fond accordé par l’etat. Pour accompagner ce déploiement, les partenaires fondateurs de la satt Grand est (universités de Bourgogne et de Franche-comté, l’université de lorraine, universités de technologie de troyes et de Belfort-montbéliard, ens mm, agrosup dijon, cnrs inser m et l’etat) recrutent un Président directeur Général (H/F). Mission : À la tête d’une équipe atteignant à court terme 40 salariés et d’une organisation structurée en 4 départements métiers (maturation, Propriété industrielle, marketing, Prestations r&d) et un département ressources, votre mission consiste à élaborer les orientations stratégiques de la satt , piloter son comité de direction, développer des partenariats stratégiques tournés vers l’industrie et les partenaires du territoire. Vous représentez l’entreprise auprès de l’ensemble de ses clients et partenaires. Vous gérez le budget de l’entreprise dans une optique d’autofinancement à moyen/long terme et assurez le reporting aux actionnaires. Profil : de formation supérieure à dominante scientifique, idéalement complétée par un mBa ou équivalent, vous êtes familier des dynamiques de développement économique par la recherche et vos compétences en management sont reconnues. Vous avez acquis une solide expérience dans le développement de projets de maturation et de transferts de technologies et l’accompagnement de spin-offs. Vos capacités d’anticipation et d’adaptation, votre aptitude à construire une organisation et à fédérer des équipes, votre talent de négociateur vous permettront de réussir dans ce poste. anglais courant indispensable. Merci de faire parvenir votre candidature à notre conseil Hudson, à l’attention de Maxim Peter, en indiquant la réf. FR678362/104 dans l’objet du mail à [email protected] conseil en recrutement & Gestion des talents Juges du Tribunal du contentieux administratif et du Tribunal d’appel Est-ce que votre conduite professionnelle individuelle et collective démontre une adhérence conforme aux normes et principes éthiques élevés ? L'Organisation des Nations Unies cherche des juges au sein de son Tribunal du contentieux administratif et sonTribunal d’appel qui feront partie de son système interne d’administration de la justice et qui traiteront des différends liés au droit du travail. Les juges sont nommés par l’Assemblée Assemblée générale sur la liste de candidats recommandés par le Conseil de justice interne, un organisme anisme indépendant établi par l'Assemblée générale. Expérience professionnelle : Dans le cas du Tribunal d’appel, les candidats devront justifier d’au moins 10 années d’expérience judiciaire en droit administratif ou d’une expérience équivalente acquise au sein d’une ou plusieurs juridictions nationales et dans le cas duTribunal du contentieux administratif, de 15 années d’expérience. Les femmes sont fortement encouragées à présenter leur candidature. Pour tout complément d’information veuillezz consulter : http://www.un.org/fr/oaj/pdf/judges_ad.pdf ad.pdf carrières Nations Unies Secrétaire exécutif (D-2) Programme des Nations Unies pour l’environnement Êtes-vous un défenseur de l'environnement ? Êtes-vous capable d'appuyer une mise en œuvre cohérente du programme mondial pour l'environnement ? Basé à Genève, le Programme des Nations tions Unies pour l'environnement (PNUE) recherche un responsable dynamique amique et expérimenté capable de gérer le Secrétariat conjoint des Conventions onventions de Bâle, Rotterdam et Stockholm. Formation : Diplôme universitaire du niveau veau de la maîtrise dans le domaine du droit, des sciences politiques, de la chimie, de l'économie, de l'administration on publique ou dans toute autre discipline apparentée. La Fondation Bettencourt Schueller (FBS) met en œuvre la mission reçue de ses fondateurs il y a 25 ans de « donner des ailes au talent » pour contribuer à la réussite et au rayonnement de la France. Forte de convictions et de valeurs explicitées, elle agit par des prix, des dons, l’accompagnement des porteurs de projets, un engagement dans l’évaluation et la mesure d’impact dans trois domaines : les sciences de la vie, la culture et la solidarité. La Fondation recrute son : Responsable du mécénat social H/F Basé à Neuilly Sur Seine Expérience professionnelle : Plus de quinze inze années d'expérience de gestion, à des niveaux de responsabilité de plus en plus élevés, s, dans le domaine de l'environnement, acquise e auprès ou au sein d'une organisation internationale. onale. > Directement rattaché au secrétaire général, vous travaillez au quotidien avec le directeur général et l’ensemble de l’équipe. Au niveau externe vous êtes en lien avec les porteurs de projets, les experts, les fondations ou autres partenaires. > Vous êtes responsable du développement et du déploiement de la stratégie du mécénat social. Les femmes sont fortement encouragées à présenter leur candidature. > Responsable des opérations, vous participez au processus de sélection des nouveaux projets et suivez les projets de la FBS : bonne exécution, relations de qualité avec les porteurs de projets, accompagnement actif jusqu’au bilan de fin de convention. Pour tout complément d’information veuillez consulter careers.un.org org > Vous pouvez représenter la FBS (événements, conférences, tables rondes…) et vous animez le réseau d’experts externes et le réseau de ses partenaires dans le champ social. > Vous devrez constituer et animer l’équipe (future) du mécénat social. Retrouvez notre opération spéciale Diplômé d’un bac +5, vous avez au moins 10 années d’expérience, notamment au sein d’un organisme d’intérêt général (fondation, association…) et vous connaissez les enjeux du mécénat. Vous disposez également de bonnes connaissances du secteur social, médico-social, éducatif, humanitaire… f DIVERSITÉ le lundi 17 mars* Généraliste, vous disposez de fortes capacités à étudier les dimensions d’un projet : technique, RH, finances, gouvernance, calendrier. Vous êtes apte à représenter et incarner les valeurs et l’esprit de la FBS. Votre niveau d’anglais est courant. dans Merci d’adresser votre candidature sous ref RMS/PE/0314 à Proway Executive Search. Par courriel à : [email protected] Mission confiée en exclusivité à Proway Executive Search Retrouvez toutes nos offres sur www.lemonde.fr *daté mardi 18 mars. LycéE Français du KowEit GrouPE ScolairE la réSiDEncE Koweit Enseignants (h/f) EABJM Paris Maroc Directeurs, Professeurs et Enseignants (h/f) Professeurs (h/f) >Multipostes, International carrières REPRODUCTION INTERDITE >Multipostes 14/LE MONDE/MARDI 11 MARS 2014 Koniambo Nickel RECRUTE une centaine d’EXPERTS (H/F). Installée en Nouvelle-Calédonie, Koniambo Nickel a développé un site industriel de classe mondiale qui fait de lui le plus important producteur de nickel au monde. Cette co-entreprise du leader mondial Glencore et de la Société Minière du Sud Pacifique (SMSP) est aujourd’hui en plein essor et ambitionne une extraction annuelle de 60 000 tonnes pour la mi-2015. Afin de soutenir son développement, Koniambo Nickel, qui compte déjà plus de 1000 collaborateurs, a confié à Hudson le recrutement de plus de 110 ingénieurs et techniciens francophones (H/F). Parmi les nombreux postes qui sont ouverts aujourd’hui, nous recherchons : X Ingénieur de production pyrométallurgie X Chef de quart X Opérateur expert X Chef de service géologie de la ressource X Ingénieur stratégie d’évaluation exploitation X Préparateur de travaux/ordonnancement Consultez l’ensemble des offres détaillées sur : http://koniambonickel-recrutement.com/ Conseil en ReCRutement & Gestion des talents Emploi REGARD SUR En partenariat avec DOSSIER RÉALISÉ PAR M PUBLICITÉ > IMMOBILIER < Une option très liée à la conjoncture Les postes de cadres dans l’immobilier sont très directement liés à l’évolution du marché. La faiblesse de la construction de logements et l’atonie de l’immobilier de bureau n’augurent rien de très favorable à court terme. C’est donc vers un marché de niches, plus technique et plus orienté vers l’immobilier commercial ou la gestion de l’existant que doivent s’orienter les candidats Difficile de se projeter dans les métiers d’un secteur qui affiche depuis plusieurs exercices un réel malaise. L’immobilier au sens large est plus que jamais le domaine des paradoxes. de l’emploi est actuellement négatif après la fermeture de 3000 agences immobilières en 2 ans. De quoi refroidir les ardeurs des postulants les plus déterminés. Et pourtant, derrière ce paysage la situation est peut-être Dans la promotion la meilleure clé d’entrée c’est le double diplôme Les observateurs comme les citoyens et plus étonnamment les responsables politiques déplorent le manque cruel de logements en France; Ils ont raison: selon tous les experts il manquerait de 600 000 à 800 000 logements pour satisfaire les conditions de base d’un marché en phase avec le poids économique du pays. Pour autant, les professionnels du secteur reconnaissent qu’ils ont toujours des offres d’emplois et des expertises non satisfaites. La publication des chiffres prévisionnels du ministère du Logement pour l’année en cours ajoute à ce désarroi. D’un côté, le niveau des constructions stagne dangereusement autour de 300 000 unités en rythme annuel et pis encore, le nombre des mises en chantier comme celui des dépôts de permis de construire, la matière première de l’emploi du secteur pour les 5 ans qui viennent, est en chute de 18 %. Le solde moins sinistrée qu’elle ne paraît. D’abord parce que la promotion immobilière ne doit pas être confondue avec la construction. Si les univers sont très intimement liés, c’est du côté de la promotion que les évolutions les plus rapides et les ruptures technologiques sont les premières à se manifester. Dans la pratique, la promotion qui est un métier de niche recrute des profils très spécifiques à la mesure des enjeux que représentent les opérations qui voient le jour. Que ce soit dans le résidentiel, le commercial ou l’économique, tout projet impose de recruter des développeurs, des financiers, des commerciaux et enfin des ingénieurs de suivi de chantiers. À des rythmes qui mettent le marché en permanence sous tension. Un promoteur installé comme Bouygues Immobilier regroupe dans ses équipes une moyenne de 70 % de cadres et réserve les deux tiers de ses embauches à des Bac+5. Depuis la phase conceptuelle - les bâtiments doivent de plus en plus répondre à des concepts environnementaux très stricts, certains sont même des centres de production d’énergie -, aux études financières jusqu’aux études de faisabilité administrative, les fonctions couvrent un spectre de métiers très large. Avec un très fort focus sur les métiers commerciaux. C’est là que se définit la dimension des attentes du marché. Une responsabilité qui en fait souvent la fonction la mieux payée du secteur. Les meilleurs éléments peuvent espérer des rémunérations annuelles supérieures à 200 000€. Mais l’Immobilier est aussi un secteur où copropriétés ou d’ensembles locatifs. Car derrière les devantures d’agences qui parsèment nos rues - même si elles sont beaucoup moins nombreuses depuis trois ans - il existe de nombreuses opportunités pour les jeunes diplômés. Les grands réseaux immobiliers comme Foncia ou Century 21 suivent de très près les jeunes diplômés des écoles de commerce comme l’ESC Pau ou les universités qui proposent des Bachelors et des Masters spécialisés. Les grosses structures qui ne jouent pas dans la même division que les opérateurs locaux ou de petite taille, offrent des formations internes, des synergies transversales et des plans de carrière cohérents. L’immobilier L’immobilier offre des métiers structurés et des parcours variés la texture du parchemin doit partager la vedette avec la dimension humaine. Celui où les a-priori s’effacent devant la compétence. La filière de conseiller commercial est ainsi un sas qui ouvre vers les fonctions de directeur commercial puis de directeur d’agence. Les plus structurés des grands réseaux proposent jusqu’à 32 formations différentes qui permettent de solides évolutions professionnelles. Notamment celles qui conduisent aux métiers de la gestion de peut dans ce cadre encore offrir des opportunités de carrières et des récompenses salariales à considérer. Avec d’autant plus de sérieux que d’une façon ou d’une autre, le secteur de l’immobilier au sens large c’està-dire de la promotion à la gestion du parc construit devra nécessairement se remettre en mode marche avant. =L.PM C Les hiffres 18 % c’est le recul d’une année sur l’autre des mises en chantier de logements en France. 240 000 c’est le nombre d’emplois rattachés au secteur de l’immobilier. 677 offres d’emploi Immobilier sur Emploi en partenariat avec www.lemonde.fr/emploi 0123 0123 Mardi 11 mars 2014 L’ÉCLAIRAGE | CHRONIQUE pa r J e a n - P i e r r e D u p u y Au-delà de l’égoïsme L ¶ Jean-Pierre Dupuy est philosophe, professeur à l’université Stanford (Etats-Unis). e dalaï-lama s’est récemment rendu, comme François Hollande, dans la Silicon Valley californienne, au cœur du capitalisme technologique. Accueilli par le tout nouveau Centre de recherche et d’enseignement sur l’altruisme et la compassion, créé à l’université Stanford, il a donné une conférence sur « La compassion et l’éthique des affaires », très suivie et unanimement appréciée. L’homme n’est pas, par nature, un être égoïste, a martelé le maître spirituel. Les recherches les plus récentes sur le cerveau, baptisées « neurosciences contemplatives», démontrent que nous sommes foncièrement des êtres compassionnels. Si l’amour du prochain ne guide pas toujours nos actions, c’est que, trop absorbés par la recherche du bien-être matériel, nous le réprimons en nous. Apprenons à devenir ce que nous sommes, par exemple par la méditation, et nous serons plus heureux, nous rendrons les autres plus heureux et les affaires s’en porteront d’autant mieux. Les hôtes du dalaï-lama ont abondé dans son sens. Le malaise existentiel de trop d’ingénieurs, d’informaticiens et de « venture capitalists», minés par le stress et la dépression, engendre un coût insupportable pour la Vallée. LES INDÉGIVRABLES | p a r X a v i e r Gorce De Davos (Suisse) à Singapour, il n’y a plus de grand-messe du capitalisme mondial où la robe ocre des moines bouddhistes ne vienne égayer les tenues sombres des maîtres du monde. Les exposés se suivent et… ne se ressemblent pas. On passe du discours économique le plus convenu sur les moyens de sauver la compétitivité et la croissance à l’apologie de la compassion, de l’altruisme et de l’amour d’autrui. Le miracle, c’est que personne ne semble yvoir la moindre contradiction. Le rapport de Jacques Attali sur « l’économie positive», remis au président de la République à l’automne 2013, évoquait d’ailleurs une relance de la croissance par la production du « prendre soin», le fameux care. Mais cette situation a quelque chose de comique par la naïveté dont elle témoigne. Et elle est préoccupante par l’aveuglement qu’elle manifeste. On croyait savoir que l’idéologie économique était née de la conviction que les vices privés font les bienfaits publics. C’est le déchaînement des passions mauvaises nées de la rivalité – envie, haine, ressentiment – qui donne au système une énergie incroyable et, créant l’abondance, rend tout le monde plus heureux. Due à Bernard Mandeville (1660-1733), critiquée mais reprise par Adam Smith (1723-1790), cette thèse a été atténuée par la suite avec la notion de concurrence parfaite. Au XXe siècle, Milton Friedman a dit ce que cette « perfection» recouvre. Le marché, écrit-il, a ceci de merveilleux qu’il fonctionne «sans qu’il soit nécessaire que les gens se parlent ni qu’ils s’aiment». Cette utopie d’une société où l’indifférence mutuelle et le repli sur soi seraient les meilleurs garants du bien commun est si monstrueuse qu’on se dit que seul un bien puissant motif a pu faire qu’elle soit prise au sérieux par tant de grands esprits. Je livre mon hypothèse. Le mal de l’amour-propre Jean-Jacques Rousseau nous a appris que le mal – qu’il nommait amour-propre – apparaît lorsque les passions, une fois « détournées de leur objet par des obstacles », « s’occupent plus de l’obstacle pour l’écarter que de l’objet pour l’atteindre» (Dialogues, Flammarion 1999). L’obstacle, c’est le rival, celui qui se trouve entre moi et l’objet de mon désir. Or les rivaux pullulent dans la société de concurrence débridée. Le mal, c’est de se détourner de l’objet pour ne plus se préoccuper que de renverser l’obstacle et prendre le dessus sur lui. Cette fascination pour le rival trouve son intensité maximale dans les guerres amoureuses, mais il faudrait être naïf pour croire qu’elle n’existe pas dans la guerre économique. Les faits divers du monde des affaires nous en apportent une foison d’exemples chaque semaine. La «psychologie du souterrain», pour parler comme Dostoïevski, ne menace pas moins l’économie qu’elle ne met constamment en 15 péril la solidité de nos attachements. La citation de Friedman, elle, révèle ce que la solution économique à ce problème entend être. Puisque le mal de la concurrence est fait d’attachement obsessionnel à l’obstacle que représente le rival tout à la fois vénéré et haï, coupons court à ce danger en détachant complètement les sujets les uns des autres. Ils se feront la guerre sans jamais se rencontrer. La naïveté des apôtres de l’économie de la compassion est de ne pas comprendre que l’égoïsme est un mensonge, un mécanisme de défense, une manière de masquer, et de se masquer, la place envahissante qu’occupe le rival dans nos vies. Leur aveuglement, c’est de croire que l’égoïsme est la forme ultime du mal et que c’est contre lui qu’il faut mobiliser les ressources de l’altruisme. Ils se trompent de combat. Au-delà de l’égoïsme, il y a non pas la charité chrétienne ou l’empathie bouddhiste, mais le mal de l’amour-propre. Rousseau, encore: «C’est un sentiment relatif par lequel on se compare, qui demande des préférences, dont la jouissance est purement négative et qui ne cherche plus à se satisfaire par notre propre bien, mais seulement par le mal d’autrui» (Dialogues). Combien moins brutale serait la société si les hommes se laissaient guider par leur intérêt « égoïste» ! L’intérêt (inter-esse, être entre), nous dit Hannah Arendt, c’est comme la table entre les convives: elle les réunit d’autant mieux qu’elle les maintient à distance les uns des autres. L’amour ne peut jouer le rôle de cet entre-deux. Il abolit les différences, et c’est ce qui, paradoxalement, le rapproche de la haine. L’un comme l’autre sont prêts au sacrifice de soi, même si c’est pour des raisons opposées. p 0123 La plus belle perspective sur 5 000 ans d’histoire MA VIE EN BOÎTE | CHRONIQUE par Annie Kahn M entir, tricher, sont pour moi deux attitudes totalement rédhibitoires. Comment vivre, comment échanger, comment négocier avec une personne aux propos mouvants et trompeurs? Une nouvelle étude bat en brèche cette attitude moraliste. Etre malhonnête, tricher, rend plus créatif, affirment Francesca Gino et Scott Wiltermuth, professeurs dans deux business schools d’universités américaines, respectivement celle d’Harvard et celle de l’université de Californie du Sud (USC). Nos deux chercheurs ont mené cinq expériences impliquant à chaque fois entre 100 et 200individus. Chacune de leurs expériences alterne de façon différente des tests de triche et des tests de créativité. Et les résultats sont sans ambiguïté. Malhonnêtes et plus créatifs Une personne ayant les mêmes compétences et les mêmes aptitudes de base en termes de créativité qu’un autre individu risque fort de mieux tirer profit de ces aptitudes si elle est également plus tricheuse que l’autre. Le génie est malin. Et dans les deux sens du terme : pernicieux, mais aussi astucieux ! Pour les chercheurs, la raison en est limpide : « Les personnes qui se comportent de façon mal- honnête se sentent moins obligées de se conformer aux règles et ont de ce fait plus de facilité à se montrer créatives en associant des concepts, des connaissances, que l’on ne juxtapose pas d’habitude.» C’est-à-dire à penser en dehors des cadres habituels. Une des expériences menées était spécifiquement conçue pour vérifier cette intuition. Et elle l’a bien confirmée. « Malhonnêteté et créativité sont deux traits de caractère qui impliquent de ne pas rentrer dans le moule. Il est donc logique que les personnes malhonnêtes soient aussi les plus créatives », insistent les auteurs. Or, Francesca Gino ainsi qu’une autre équipe de chercheurs ont déjà prouvé, par le passé, que, à l’inverse, les personnes dont on a stimulé la créativité en les incitant à réfléchir en dehors des cadres établis n’hésitent en revanche pas à appliquer avec rigueur le principe selon lequel les règles sont faites pour être contournées. Ils se mettent à tricher plus facilement. Si stimuler sa créativité rend plus malhonnête et, qu’ensuite, seconduire de façon malhonnête rend plus créatif, on en déduit facilement que le fait de mentir ou de tricher enclenche un cercle vertueux. Ce qui est un comble! p [email protected] *Chaque volume de la collection est vendu au prix de 9,99 €, sauf le n° 1, offre de lancement au prix de 3,99 €. Offre réservée à la France métropolitaine, dans la limite des stocks disponibles. Visuels non contractuels - Photo Thinkstock- agencejem.com Malin génie Une collection présentée par Jacques LE GOFF L’œuvre historique de référence www.histoire-et-civilisation.fr Cette semaine, le volume 7 : LA GRÈCE CLASSIQUE DÈS LE JEUDI 6 MARS CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX En partenariat avec 0123 SUPPLÉMENT 2 |10 ---- MARS 2014 Les civils dans la tourmente l’année 1914 | En août, la fermeture des frontières piège des dizaines de milliers de personnes en territoire étranger Enfants belges réfugiés à Paris, en novembre 1914. EDE/EXCELSIOR – L’EQUIPE/ROGER-VIOLLET Quelles sontlescauses delaguerre? Entretien P. 2-3 Le Quesnoy n’oublie pas ses sauveurs des antipodes p. 6-7 L André Loez e 30 juillet 1914, Mary Houghton, une voyageuse anglaise, voit passer les premiers conscrits autrichiens mobilisés, à Bozen (aujourd’hui Bolzano, en Italie), dans le Tyrol du Sud: « Ce qui nous frappa le plus étaitleur completmanqued’entrain. Ils piétinaient sur la route ou s’asseyaient sur les rebords dans un silence résigné qui ressemblait à celui des chevaux que nous avions vus un peu plus tôt. Très peu d’entre eux parlaient, et aucun ne semblait avoir l’élasticité qu’on aurait pu attendre de leur jeunesse. Leurs pas n’exprimaient ni espoir ni regret : ils faisaient partie d’un vaste mécanisme mis en mouve- Contribuez au grand élan mémoriel du Centenaire en faisant un don Cahier du « Monde » N˚ 21506 daté Mardi 11 mars 2014 - Ne peut être vendu séparément ment pour une raison inconnue, qu’ils étaient incapables d’accélérer ou de retarder. » Le « vaste mécanisme » de la guerre qui débute conduiten effetdes millionsd’hommessous l’uniforme et vers les champs de bataille. Mais, dans l’immédiat, le déclenchement du conflit a une autre conséquence,un peu moins connue : la fermeture des frontières, dans les premiers jours d’août 1914, piégeant des centainesde milliers de civils – travailleursimmigrés, étudiants, correspondants de presse, voyageurs et vacanciers – sur un territoire désormais hostile. Parmi eux se trouve ainsi le footballeur Steve Bloomer, auteur de 28 buts sous le maillot de l’équipe nationale anglaise, tout juste arrivé en Allemagne en juillet 1914 pour entraîner une équipe locale. Incapable de quitter le pays après la déclaration de guerre britannique, le 4 août, il sera interné en novembre au camp de Ruhleben, près de Berlin, où il restera jusqu’en 1918. A l’été 1914, certainsparviennentde justesse à franchir les frontières. Le médecin allemand Georg Nicolai s’est rendu à Lyon pour un important congrès de radiologie médicale, qui s’achève le 31 juillet. Apprenant le lendemain la mobilisation générale, il réussit à s’embarquer dans un des derniers trains franchissant la frontière allemande, échappant de peu à l’arrestation à Belfort, où des militaires français l’ont un temps soupçonné d’espionnage. Lire la suite page 2 Soutenez le Fonds du Centenaire, placé sous l’égide de la Fondation de France, afin d’aider les 1 000 projets pédagogiques, culturels et scientifiques portés par des associations et des centaines d’acteurs publics et privés pour commémorer la Grande Guerre partout en France. Faites un don au Centenaire en adressant un chèque à l’ordre de Fondation de France - Fonds du Centenaire, à l’adresse : Mission du Centenaire – 109, boulevard Malesherbes – 75008 Paris. Ou sur www.centenaire.org, rubrique Faire un don. Pour toute information, contactez le 01 78 99 46 93. Les dons en faveur du Fonds du Centenaire ouvrent droit à des réductions d’impôts (impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, ISF). II 0123 le journal du centenaire Suite de la première page Passés du Tyrol autrichien à l’Allemagne le 1er août au volant de leur automobile de tourisme, Mary Houghton et son mari sont immobilisés par la réquisition du carburant pour l’armée puis la saisie de leur voiture. En quelques jours, ces insouciants voyageurs sont devenus des « sujets ennemis», gagnés par l’angoisse de ne pouvoir quitter le pays. Le 5 août, au lendemain de la déclaration de guerre, ils prennent le dernier train pour la Suisse, restée neutre. Tous n’auront pas cette chance. Le peintre allemand Paul Cohen-Portheim, quirésideà Paris, est alorsenvillégiature dansle Devonshire.Le 4août, la guerrele surprend sans ressources ni logement sur le sol anglais, et privéde la possibilité de s’embarquer : les deux derniers bateaux pour l’Allemagne ont été retenus à quai. Même dénuement, même impuissance pour l’écrivain hongrois Aladar Kuncz, sujet des Habsbourg, qui passe ses étés dans un village près de Morlaix, dans le Finistère. C’est là qu’il assiste au premier acte de la tragédie, le 1er août: «Au milieu d’un silence de mort, lemairedonnalecturedel’ordredemobilisation. Ce fut une stupeur muette. Nulle acclamation. Mais quelqu’un étouffa un sanglot, puis la foule, un instant pétrifiée, se disloqua. » Ce soir-là, à bord d’un express Brest-Paris bondé, les voyageurs français se montrent encore courtois envers cet ennemi francophone et francophile. Mais, le 2 août, alors que le réseau ferré est entièrement passé sous le contrôle de l’armée pour permettre la concentration des hommes, il échoue à prendre l’ultime train pour la Suisse, n’arrivant pas à s’approcherdu quai noir de monde. Le délai fixé par les autorités expire le soir même. Il sera bientôt fiché, arrêté,déplacé,pourfinirenferméàNoirmoutier puis sur l’île d’Yeu (Vendée). Car tous les Etats prennent des mesuresd’exceptionenverscescivilsindésirables, au statut mal défini par le droit international. On ne veut pas les expulser – comme les Allemands l’avaient été en 1870 – de crainte que les hommes n’augmentent les effectifs militaires adverses, mais on redoute de les laisser libres de leurs mouvements. Dès le 31 juillet, en France, un décret leur refuse l’usage des télégrammes, et une trop brève fenêtre leur est laissée pourpartir: «Tous lesétrangers,sans distinction de nationalité, seront autorisés à quitterla France jusqu’àla fin du premier jour de mobilisation (24e heure). » Au-delà, il faut s’enregistrer auprès des autorités, le séjour étant prohibé dans les régions frontalières et à Paris. Des dispositifs similaires sont mis en place en Allemagne et en Grande-Breta- Mardi 11 mars 2014 gne, où les navires adverses sont arraisonnés, ou encore en Autriche-Hongrie et en Russie. Dans ce pays, une directive du ministère de l’intérieur se veut rassurante, le 8 août 1914 : « Les Autrichiens et Allemands pacifiquement employés et Le conflit déchaîne la xénophobie d’une partie des populations n’excitant pas de soupçons peuvent maintenir leur résidence et rester sous la protection de nos lois, ou bien quitter le pays.» Ces garanties ne dureront guère. Car le conflit qui commence déchaîne la xénophobie d’une partie des populations, dont l’imaginaire est depuis longtempstravailléparlahantisedel’espionnage. En 1906, le romancier britannique Walter Wood avait publié The Enemy in ourMidst(« l’ennemiparminous»),imaginant les nombreux immigrés allemands à Londres, domestiques ou serveurs de restaurant, comme autant d’espions potentiels pouvant guider une invasion. En France, après les passions de l’affaire Dreyfus, ce sont les violents articles de Léon Daudet dans L’Action française qui jettent, à partir de 1912, un même soupçon sur les étrangers. L’entréeen guerretransformecessuspicionsenexactionsdanslesgrandesvilles, où de nombreux magasins sont saccagés, notamment ceux de la firme Maggi (la rumeur accuse la maison suisse, qui a des Allemands dans son conseil d’administration, d’être un centre d’espionnage). Aladar Kuncz évoque ainsi le climat tendu des premiers jours de guerre à Paris : « Il n’était pas prudent pour les étrangers de se montrer dans la rue.Nonseulementlesreprésentantsofficiels de la police demandaient couramment à voir les papiers, mais des particuliers, s’improvisant détectives, arrêtaient àtoutmomentdespassants,particulièrement des hommes blonds. Car blond signifiait Allemand, et Allemand était synonyme d’espion. » La brune actrice danoise Asta Nielsen est, elle, prise pour uneespionnerusseetmanqued’êtrelynchée en se promenant à Berlin. La violence envers l’étranger culmine à Saint-Pétersbourg, dont le nom aux sonorités trop germaniques sera bientôt russifiéen Petrograd,et oùlafoulesaccage début août l’ambassade allemande. Ces débordements ne sont pas limités à l’Europe:leconsulatallemandàWellington (Nouvelle-Zélande) connaîtra le même sort, et les immigrés allemands, autrichiens ou hongrois d’Australie ou du Canada finiront aussi par être internés, dans des conditions matérielles et morales très variables. Au regard des millions de morts qui suivront, leur sort peut sembler dérisoire. Il montre pourtant la nature profonde du conflit: frontières fermées, identités durcies, pouvoir de coercition accru pourlesEtats.L’entréeenguerremarque une césure majeure dans l’histoire des migrationsetdescirculationsinternationales, mettant fin à ce qu’on a appelé la « première mondialisation » d’avant 1914, ère d’accélération des échanges culturels, scientifiques et économiques, et d’intenses mobilités individuelles. Au total, près de 300 000civils ennemis seront enfermés dans des camps à travers l’Europe en 1914-1918, dont 65000 environ en France. Il faut y ajouter les centaines de milliers de déportés vers l’intérieur de l’empire russe, où les chefs militaires ont évacué de force, courant 1915, des populations « suspectes », ennemisetsujetsdutsar,juifsenparticulier, mêlés. Le sort, cette même année, des passagers du Lusitania – paquebot britannique torpillé par un sous-marin allemand – comme des Arméniens de l’Empire ottoman illustrera de façon plusdouloureuseencorela vulnérabilité des civils dans un monde en guerre. p André Loez «Les deux camps ont rempli la poudrière» Selon l’historien Gerd Krumeich,le débat historiographiquesur les causes du conflita eucours pendant un sièclesur la questionde la responsabilité allemande,tantôt mise en avant, tantôt relativisée entretien | Propos recueillis par Gaïdz Minassian et Antoine Reverchon L ’historien allemand Gerd Krumeich, spécialistede lapremièreguerremondiale,estprofesseurémériteà l’université Heinrich-Heine de Düsseldorf et professeurassocié à l’Institut d’histoire du temps présent. Il est par ailleurs vice-président du Centre international de recherche de l’Historial de la Grande Guerre de Péronne(Somme) et membre du conseil scientifique de la Mission du Centenaire. Son dernier ouvrage, Le Feu aux poudres. Qui a déclenché la guerre en 1914 ?, doit paraître prochainement chez Belin. Comment les historiens, de 1918 à nos jours, ont-ils analysé les responsabilités dans le déclenchement de la guerre ? Il n’est pas toujours facile, à quelque période que ce soit, depuis la fin de la guerre, de distinguer dans la littérature sur le sujet les intentions politiques des approches historiographiques, la volonté de démontrer de la volonté de comprendre. Dès les années 1920, les sources primairessont à peu près toutes disponibles. Des journaux personnelsou lesMémoires detel ou tel protagoniste,voire quelques archives inédites, ont certes été publiés par la suite, mais ils n’apportaient rien de nouveau par rapport aux documents officiels déjà livrés. En 1917, Lénine a rendu publiques les archives de l’Etat tsariste pour dénoncer les « fauteurs de guerre impérialistes », qui étaient pour lui dans les deux camps. Dès 1919, la République de Weimar publie aussi les archives du Reich – 40 volumes au total –, essentiellement pour prouver aux Alliés sa volonté de transparence et de rupture avec le régime impérial. Le ministère des affaires étrangères allemand édite même une revue dont le titre est La Question des responsabilités de la guerre, sous-titrée « Cahiers berlinois paraissant chaque mois pour l’éclaircissement international » : 1 200 pages paraîtront de 1922 à 1942 ! Les Anglais feront de même dans les années 1930. Les Français ne publient les archives du Quai d’Orsay qu’à partir de 1935, et à un rythme plutôt lent. Le dernier volume, qui concerne le traité de Versailles, va paraître en 2018 ! Les seules archives diplomatiques de 1914 qui ne sont devenues publiques que récemment sont celles de la Serbie, mais personne n’est encore allé les regarder de près. Contrairement à ce qu’affirment certains historiens, il n’y a donc pas de « nouvelles sources » qui aient pu révolutionner la lecture des responsabilités de la guerre, vingt, trente, cinquante ou cent ans après,ce qui est d’ailleursassez rare en histoire. Ce sont donc bien les interprétations qui ont varié, l’accent mis sur tel ou tel aspect. Quelles ont été ces interprétations successives? En désignant officiellementl’Allemagne comme «l’agresseur», l’article 231 du traité de Versailles, en 1919, semble fixer pour la postérité la responsabilité du déclenchement de la guerre. Dans les dix ans qui ont suivi, les historiens allemands « sérieux » n’ont pas osé se risquer sur ce terrain délicat. Mais de nombreux politiciens, journalistes ou anciens militaires, en Allemagne, y compris à gauche, ont mis en cause cette interprétation, en s’appuyant justement sur la publication des archives. En France, l’ouvrage majeur a été celui de Pierre Renouvin [Les Origines immédiates de la guerre, Alfred Costes, 1925] : sur le déroulement et l’enchaî- nement exact des faits au cours de l’été 1914, on n’a guère fait mieux depuis. Pourtant, Renouvin n’a jamaisété traduitenallemand! Certes,sonouvrage conforte la thèse de la responsabilité allemande : l’Allemagne déclare la guerre parce que le plan Schlieffen [plan d’attaque de la France mis au point au début du XXe siècle] nécessite de déclencher les hostilités avant que la mobilisation russe ne soit achevée. Toutefois, comme l’a montré un ouvrage de l’historien allemand Stefan Schmidt édité en2009,Pierre Renouvinétait un conseillerdeRaymond Poincaré [président de 1913 à 1920]. Après le conflit, celui-ci, surnommé « Poincaré la guerre », était l’objet de violentes attaques des milieux pacifisteset de l’opposition,quidénonçaientson attitude « jusqu’au-boutiste» lors de la crise de 1914. Cen’estquedanslesannées1930qued’autreshistoriens « sérieux » commencent à s’emparer de la question, parce que le 10e anniversaire de la fin de la guerre et les romans de « témoignage » (comme ceux de Roland Dorgelès, Erich Maria Remarque ou Ernst Jünger) qui fleurissent à l’époque renouvellent l’intérêt du public. Les travaux des historiens américains Bernadotte Schmitt, Sidney Bradshaw Fay et Harry Barnes, publiés à la fin des années1920, etsurtoutceuxdujournalisteitalienLuigi Albertini, qui complète les archives par la lecture de tous les articlesdelapresseeuropéennede1914etparl’interview systématique des protagonistes encore « Personne n’est encore allé regarder de près les archives de la Serbie » 2 août Décret français fixant lesobligations des civils étrangers et ennemis, qui doivent s’enregistrer auprès des autorités en préalable à leur internement, avec des réserves pour les catégories jugées francophiles (Polonais, Tchèques, certains AlsaciensLorrains, puis lesArméniens de l’Empire ottoman, après l’entrée en guerre de ce dernier, en novembre). Comment l’arrivée d’Hitler au pouvoir affecte-t-elle les approches de chaque côté du Rhin ? Dans la Francedes années1930, il y a une tendance de certains milieux de droite, qui voient d’un bon œil l’ascension du nazisme – et qui seront dans les rangs des futurs collaborateurs –, à minimiser la responsabilité allemande, ou en tout cas à l’estimer partagée. Ce qui est alors mis en avant est le soutien inconditionnel des Français aux Russes, et celui des Russes aux Serbes. Cela aurait poussé l’Allemagne à déclarer la guerre. Mais le débat historiographique, qui commence à se développer, est interrompu par la montée de la menacenazieet la secondeguerre mondiale.La traduction du livre de Luigi Albertini en 1952 passe plutôt inaperçue. C’est pourtant la même année que le premier accord franco-allemand de l’aprèsguerre porte sur le contenu des manuels scolaires, d’où doit être suppriméetoute notion de responsabilité unilatéraledans le déclenchementde la Grande Guerre : un accord scrupuleusement appliqué 1915 1914 Les civils ennemis surveillés, déplacés, internés vivantsde la « crise de juillet», apportentune vision plus nuancée des responsabilités – bien que le travail d’Albertini ne soit paru en italien qu’en1940 et traduiten anglais qu’en1952 [The Origins ofthe War of 1914,Enigma]. C’est au final l’ouvrage le plus complet à ce jour sur la crise de l’été 1914. Dès 1932, Pierre Renouvin lui-même a signé un article fameux dans la Revue historique, dans lequel il admet qu’on ne peut parler de « responsabilité unilatérale» et estime que l’article 231 du traité de Versaillesest plus un moyen juridique de fonder le paiement des indemnités de la guerre que l’affirmation d’un fait historique. C’est une approcheque les Allemandsutiliserontaussitôt pour justifier leur non-paiement. 5 août Aliens Restriction Act en Grande-Bretagne, qui constitue la base légale de l’internement des civils ennemis, tenus de s’enregistrer et ne pouvant quitter sans permis un rayon de 5 miles (environ 8 kilomètres) autour de leur domicile. La possession d’armes ou d’explosifs leur est interdite et leur vie associative (clubs, journaux) est restreinte. 6 novembre L’Allemagne décide l’internement de tous leshommes britanniques en âge de porter les armes (de 17 à 55 ans) demeurant sur son territoire. 27 janvier Circulaire du chef d’étatmajor russe systématisant l’expulsion des juifs et de «tous les individus suspects» des zones sous contrôle militaire, lancée danscertains endroits dès 1914. 7 avril Première loi française sur ladéchéance de nationalité des naturalisés d’origine ennemie, complétée par la loi du 18 juin 1917. Au total, 549 dénaturalisations de personnes d’origine allemande, austro-hongroise ou ottomane seront prononcées. 0123 le journal du centenaire Mardi 11 mars 2014 III Plaque stéréoscopique de 1914, extraite de l’exposition itinérante « De boue et de larmes… 14-18 dans les yeux d’un poilu ». INSTANT3D. FR « Pour l’historien Sean McMeekin, les Allemands n’y seraient pour rien » par l’Allemagne, beaucoup moins en France. En Allemagne, la tendance historiographique dominante dans les années 1950 est de ne retenir que ce qui peut expliquer l’avènement d’Hitler, en l’espèce « l’humiliation» de Versailles. Dans les années 1960, cette interprétation est-elle remise en cause ? En 1961, la publication de l’ouvrage de Fritz Fischer [Griff nach der Weltmacht. Die Kriegszielpolitik des kaiserlichen Deutschland 1914-1918, Drosde] change complètement la vision qui prévalait dans lesannées 1950.Pourlui, ilexisteunefiliationdirecte entre la seconde guerre mondiale et le militarisme allemand, entre le nazisme et le régime autoritaire du Kaiser, une alliance des élites militaires, industrielles et politiques qui conduit à la guerre. Celle-ci, au contraire de ce que dit l’historiographie allemande classique, n’est pas un « accident ». En s’appuyant sur les archives allemandes datant du tout début du conflit concernant les « buts de guerre»de Berlin,ilestimequel’Allemagneasciemment déclenché la guerre, une volonté qu’il jugera, dans ses ouvrages postérieurs, encore plus radicaux, présente dès 1912. Cette analyse correspond au sentiment de culpabilité qui pèse alors sur toute la génération allemande des années 1960 – la mienne – qui rejette les explications que leurs aînés essaient de trouver au triomphe du nazisme et à la seconde guerre mondiale. L’historiographie d’Allemagne de l’Est, en particulier avec Fritz Klein, met en avant les origines plus lointainesque la seule crise dejuillet, en analysant la rivalité des impérialismes européens selon la grille de lecture léniniste de l’inéluctabilité de la guerre dans une économiecapitaliste. Cette approche « par le temps long », qui domine dans les années 1970, fait un peu oublier la polémique sur la responsabilitéallemandenéedu livre de Fritz Fischer, dont il s’étonnait d’ailleurs, en expliquant s’intéresser lui aussi aux causes plus lointaines. Il en est de même dans les années 1980 à 2000, car l’historiographie est alors dominée par l’histoire sociale et culturelle, qui s’intéresse aux civils de l’arrière ou aux « expériences de guerre » du soldat dans les tranchées, et bien peu aux décisionspolitiques, diplomatiques ou militaires. Dans les années 1980, les ouvrages de l’Américain Samuel Williamson, ou des Autrichiens Manfried Rauchensteiner et Fritz Fellner, exploitant les sources austro-hongroises, mettent en avant l’importance del’ultimatumde Vienneà Belgradedans le déclenchement du conflit, mais cela ne change guère la vision d’une Allemagne responsable, puisque Berlin soutient l’Autriche dans son attitude radicale contre la Serbie. Cette vision est-elle toujours privilégiée? Dans les années 2000, elle est vraiment remise en cause, à travers les ouvrages de Sean McMeekin, notamment le dernier, The Russian Origins of the First World War (Harvard University Press, 344 p., 17,10¤). Cet historien américain insiste sur les responsabilités des Etats serbe et russe, qui couvrent cequi reste, toutcompte fait, un assassinatterroriste. Sean McMeekin démontre l’agressivité russe en présentant le ministre des affaires étrangères d’alors, Sergueï Sazonov, comme l’artisan de la guerre. Pour l’historien, les Allemands n’y seraient donc pour rien. On peut aussi citer l’Australien Christopher Clark[Les Somnambules, Flammarion,668 p., 25 ¤], qui, renouant avec l’approche des années 1930, minimise la responsabilité allemande en estimant que l’ensemble des dirigeants européens ont concouru aveuglément au déclenchement de la guerre. Il est très critique à l’égard des Serbes, allant jusqu’à rapprocher leur attitude d’alors de leur comportement dans la guerre civile yougoslave de 1991 à 1995. Il dédouane Vienne, dont l’ultimatum ne serait pas plus inacceptable que celui de l’OTAN à la Serbie, en 1994. Et il accuse les hommes politiques russes et français d’avoir appuyé sans sourciller la position serbe, sans tenir compte des craintes allemandes d’un « encerclement». Cette démarche rencontre un immense succès en Allemagne – le livre est réédité douze fois –, parce que, outre l’effet de l’approche de la date du centenaire,il correspond à un changementprofond de la culture politique des nouvelles générations en Allemagne. La fin de la guerre froide a permisà Berlin de redevenir un acteur politique qui compte: il est donc pertinent de s’intéresser aux processus de décision. Par ailleurs, l’amenuisementde la dissuasion nucléaire rend à nouveau possible une guerre entre grandes puissances : il est tout aussi pertinent de s’intéresserà la façon dont s’enchaînentles décisions qui peuvent y conduire. Quelle est votre propre analyse ? L’argumentselon lequel l’Allemagnen’aurait pas de responsabilité dans le déclenchement de la guerre est de mauvaise foi. Il est certain qu’il y a une volontéserbedene pasplier faceà l’Autriche,qu’ily a une volonté autrichienne de détruire la Serbie, une volonté allemande de tester la volonté russe de soutenir la Serbie et une volonté française d’encourager la Russie à ne pas laisser tomber la Serbie. La thèse d’un été paisible et serein interrompu par la surprise d’une guerre impromptue ne tient pas non plus. Les deux camps ont rempli peu à peu la poudrière durant les années précédentes, mais il est incontestable que ce sont les Allemands quiy mettentle feu. Le cœur du problèmeest, comme l’avait déjà montré Pierre Renouvin, la mobilisation russe : les Allemands pensaient qu’ils ne pouvaient pas arrêter la mécanique lancée par la mise en œuvre du plan Schlieffen. Rappelons que l’arméefrançaise avait l’ordre de laisser 10 kilomètres entre son front et l’armée allemande. C’était symbolique, mais fondamental : il s’agissait de prouver, à l’opinion française comme au gouvernement britannique, dont l’engagement n’était pas si assuré, que l’Allemagne était bel et bien l’agresseur. Mais rappelons que, dans les archives françaises publiées après-guerre, une dépêche du 31 juillet 1914 envoyée à Paris par l’ambassadeur français en Russie, Maurice Paléologue, indique que « la Russie a mobilisé, à la suite d’informations sur les mobilisations autrichienne et allemande ». Or, ce texte a été modifié pendant la guerre : la dépêche réelle, que l’on a retrouvée, stipule seulement « la Russie a mobilisé»… Pour vous montrer à quel point historiographie et enjeux politiques restent indissociables, j’ai reçu un appel d’un éditeur de Belgrade, qui avait entendu dire que mes travaux contredisaient en partie ceux de Christopher Clark : il voulait traduire mon livre en serbe ! p 1917 8-13 mai Au lendemain du torpillage du Lusitania, émeutes antiallemandes en Grande-Bretagne, à Liverpool puis Londres et Manchester en particulier ; elles conduisent à l’internement de la quasi-totalité des civils allemands en âge de porter lesarmes encore en liberté. Affiche de propagande britannique, 1915. AKG 1918 2 avril 6 avril Décret français portant sur lacréation, pour la première fois, d’une carte d’identité à l’usage des étrangers, indiquant une volonté de contrôle accru et systématisé des populations. Proclamation du président Woodrow Wilson restreignantles libertés et lesdéplacements des civils ennemis (enemy aliens) sur le territoire américain, le jour du vote par le Congrès de l’entrée en guerre des Etats-Unis. Documents d’identité de Léon Trotski, lors de son séjour à Paris, au début de la guerre. ARCHIVES DE LA POLICE 26 avril Second accord diplomatique franco-allemand de Berne (après celui de décembre1917), concernant le rapatriement des prisonniers, qui comprend pour la première fois des dispositions concernant lesinternés civils. IV 0123 le journal du centenaire Mardi 11 mars 2014 Déplacés, réfugiés, internés, les civils en otage Les flux de réfugiés et de déplacés durant la Grande Guerre (1914-1918) NORVÈGE Helsinki Petrograd SUÈDE Vologda Mer Baltique RUSSIE L’Empire russe Mer du Nord Pskov Ile de Man Vers l’intérieur de la Russie et la Sibérie est renversé en 1917 Courlande DANEMARK Dublin Moscou Wakefield ROYAUMEUNI Newbury Berlin OCÉAN ATLANTIQUE LUX. SUISSE (Camps, voir zoom) Mer Caspienne Vienne Thalerhof nov. 1918 AUTRICHEHONGRIE Caporetto nov. 1917 Mer PORTUGAL Kiev Galicie Raabs Drosendorf Linz FRANCE Vers l’intérieur de la Russie mars 1918 août 1914 Prague nov. 1918 Paris Varsovie Sagan ALLEMAGNE Sept. 1914 Minsk Groningue Havelberg Ruhleben Harderwijk Londres PrusseOrientale PAYS-BAS Ad ria SERBIE ti q MONT. 1918 ROUMANIE 1918 ue ESPAGNE 1916 Mer Noire BULGARIE mai 1916 Constantinople 1916 Gibraltar (R.-U.) EMPIRE OTTOMAN GRÈCE Vers les Etats-Unis PERSE Maroc esp. oct. 1918 Afrique du Nord française 250 km Chypre (R.-U.) Triple-Entente (1907) Triple-Alliance (1882) et ses alliés L’Italie est membre de l’Alliance avant de se rallier à l’Entente en 1915 Populations civiles quittant les zones de front et prenant le chemin de l’exode Arméniens fuyant le génocide (à partir de 1915) Au côté de l’Entente Aux côtés des empires centraux Avancée maximale des troupes de l’Entente Avancée maximale des troupes de l’Alliance Civils français et belges déplacés de force vers l’Allemagne à partir de 1914 Population résidant dans l’empire russe (civils ennemis, sujets russes dont communautés juives) déplacés vers l’intérieur à partir de 1914 Arméniens déportés au cours du génocide Les principaux camps en France Ile de Sieck ville Granville Ile Chausey Vire La Ferté-Macé Pl Plérin Alençon Ile-d’Yeu Précigné Besançon Angers Ile de Noirmoutier Sources pour les trois cartes : Encyclopédie de la Grande Guerre 1914-1918, Bayard, 2004 ; Atlas-historique.net ; Georges Duby, Atlas historique mondial, éd. Larousse ; Peter Gatrell, « Refugees and Forced Migrants during the First World War », et Matthew Stibbe, « Civilian Internment and Civilian Internees in Europe, 1914-1920 » in Immigrants & Minorities : Historical Studies in Ethnicity, Migration and Diaspora, 2008 ; Michael R. Marrus, Les Exclus, les réfugiés européens au XXe siècle, Calmann-Lévy, 1986 ; Jean-Claude Farcy, Les Camps de concentration français de la première guerre mondiale (1914-1920), Anthropos collection Historiques, 1995. Fleury-en-Bière Pontmain Mayenne Ploërmel Déportés de zones de guerre et territoires occupés Epreuves et exodes Ile de Tatihou Ile de Groix Hennebont Carnac Auray Sarzeau Ennemis étrangers Les déplacés et déportés APRÈS AOÛT 1914 Crozon Landaoudec Fort de Lanvéoc Principaux camps d’internement de civils Les réfugiés EN AOÛT 1914 Bagdad Damas Mer Méditerranée Les Etats en guerre Ile Longue Dodécanèse (It.) Malte (R.-U.) Bitray Blanzy Luçon La Rochelle ClermontFerrand Aurec VillefrancheAnnonay de-Rouergue Bergerac Espalion Viviers Crest Rochefort Moissac LabastideSaint-Pierre Garaison Ajain Rodez Saint-Affrique de-Provence Fort del’île SainteMarguerite Annot Morsiglia Luri Oletta Ol Béziers Saint-Tropez Les camps de triage Pour Austro-Allemands (ressortissants des nations ennemies, en particulier d’un âge mobilisable). Quatre sont disciplinaires (Crozon, Noirmoutier, Haut-Grognon et Surville, sur l’île de Groix) Pour Alsaciens-Lorrains, souvent non surveillés, dont un pour « romanichels » à Crest (surveillé) Pour suspects. Les « suspects au plan national » et « indésirables » sont des prostituées, espions présumés, repris de justice, vagabonds, “individus louches”, la plupart ramassés dans la zone des armées, près du front. 1915 Des civils étrangers internés au Canada construisent la route menant au lac Louise, dans l’ouest du pays. ARCHIVES DU MUSÉE GLENBOW Septembre1915 Après le début du génocide arménien, des veuves déportées dans l’Empire ottoman posent avecleurs enfants. AKG 0123 V le journal du centenaire Mardi 11 mars 2014 Lepremierconflitmondialmarque uneétapedansl’expositiondescivils àlaviolencedeguerre.Dèslapremière semaine,descentainesdemilliers depersonnesfuientlescombats. Ilfautajouteràcesdépartsvolontaires desmouvementsforcés:populations occupéesdéportéespourletravail,civils ouétrangers«suspects»évacuésvers l’intérieur.Dansl’Empireottoman, legénocidedesArméniensaboutit en1915àdes«marchesdelamort». Les populations déplacées entre 1919 et 1923, lors du règlement du conflit Acesdéplacementssuccèdentaprès laguerrelesmouvementsliés auxremaniementsdesfrontières etlesviolencesquilesaccompagnent. Lesmassacresetatrocitéscommis ferontl’objetd’unnuméroultérieur. FINLANDE NORVÈGE Helsinki Petrograd Mer Baltique SUÈDE URSS Tallinn La Russie soviétique devient l’URSS en 1922 ESTONIE Mer du Nord NOUVEL ÉTAT LIBRE D’IRLANDE LETTONIE Dublin Schleswig du Nord ROYAUME- LITUANIE Memel Dantzig Prusse UNI Londres Poméranie PAYS- BAS OCÉAN Eupen et Malmedy ATLANTIQUE Paris FRANCE Moscou Riga DANEMARK Berlin Posnanie (All.) Varsovie ALLEMAGNE Prague LUX. POLOGNE UKRAINE Indépendante de 1917 à 1920 AlsaceLorraine1 Indépendance de 1918 à 1920-1921 SUISSE Mer Caspienne ROUMANIE Fiume PORTUGAL Lisbonne ITALIE ESPAGNE Bucarest ROY. DES SERBES CROATES ET Belgrade AZERB. ARMÉNIE 2 Sofia Rome GÉORGIE Mer Noire BULGARIE Constantinople Gibraltar (R.-U.) TURQUIE GRÈCE Vers les Etats-Unis PERSE Ankara ALBANIE Maroc esp. IRAK SYRIE (Fr.) Afrique du Nord française Malte (R.-U.) 250 km Mer Méditerranée 1919-1923 : une Europe nouvelle sort du conflit Etats vainqueurs Etats vaincus Nouveaux Etats Etats neutres Territoires sous mandat de la SDN Villes libres Frontières issues des conflits postérieurs à la Grande Guerre (guerres russo-polonaise, 1919-1921, et gréco-turque, 1919-1922) Novembre1917 Dodécanèse (It.) Après la défaite de Caporetto, les soldats etcivils italiens fuient lesterritoires occupés par les armées austro-hongroise et allemande. MP/PORTFOLIO/LEEMAGE (R.-U.) (R.-U.) Bagdad LIBAN (Fr.) Les populations déplacées à la suite du règlement du conflit, du traité de Versailles (28 juin 1919) au traité de Lausanne (24 juillet 1923) Population quittant des territoires habités par les Allemands Population quittant les territoires perdus par la Hongrie Population venant des différentes régions qui composaient l’Empire des Habsbourg Russes fuyant la révolution et la guerre Ukrainiens Polonais Bulgares Arméniens survivants du génocide 1922 Les réfugiés d’origine grecque quittent l’Asie mineure par lapéninsule de Samanli-Dag, durant la guerre gréco-turque (1919-1923). ICRC Echanges obligatoires de population turque (1 million de personnes) et grecque (0,5 million de personnes) La convention de Lausanne (janvier 1923) prévoit que « les citoyens turcs de religion grecque orthodoxe établis en territoire turc seront systématiquement échangés avec les citoyens grecs de religion musulmane établis en territoire grec » Echanges gréco-bulgares (1) Réfugiés et expulsés à la suite du tri des populations (2)La Serbie figure parmi les vainqueurs en 1914-1918 et forme un nouvel Etat avec les territoires acquis NB : le rapatriement des réfugiés et des prisonniers du temps de la guerre ne figure pas sur la carte 1925 Après la révolution de 1917, des milliers de Russes blancs se réfugient en France. Ici, à Paris, lorsd’une réunion d’exilés. ROGER VIOLLET VI 0123 le journal du centenaire Mardi 11 mars 2014 Les remparts de Vauban, au Quesnoy (Nord). Une plaque a été scellée à l’endroit où les troupes néo-zélandaises menèrent l’assaut, à l’aide d’une échelle. En bas à droite : la ferme du « pigeon noir », où le commandement allié était installé. PHOTOS : OLIVIER TOURON/DIVERGENCE POUR « LE MONDE » Au Quesnoy, cent ans de gratitude Monumentaux morts, circuit de mémoire,clins d’œil lors du carnaval…La petite commune du Nord ne ménage pas sa reconnaissanceenvers les Néo-Zélandaistombés pour la libérer, le 4novembre 1918 Benoît Hopquin B Le Quesnoy (Nord), envoyé spécial imberlot sommeille dans son costume de Pierrot, sous le porche de la mairie du Quesnoy. Le gentil géant attend le premier dimanche d’août qu’on le réveille et le promène en cortège par les rues, accompagné de la fanfare, des majorettes et des habitants déguisés. « Oh ! Pierrot ! Bimberlot/Rin tin tin Compèr’et loriot/Oh ! Pierrot ! Bimberlot/Rin tin tin Compèr’et loriot », chantera la foule. C’est ainsi dans cette commune du Nord depuis des temps immémoriaux et même avant. Le héros local n’est pas seul sous le porche. Aux côtés de Bimberlot se trouve un autre personnage, également haut de près de quatre mètres: un guerrier maori tout tatouéet bien impoli.Le grossiertire la langue à ceux qui le regardent: cette tradition duhakan’a paséchappéaux espièglesNordistes. Une telle irrévérence, voilà qui sied parfaitement à l’esprit du carnaval. Un ethnologue bégueule trouvera forcément à redire à la représentation que se font les Ch’tis du peuple polynésien. Reste que l’hommage, pour rieur qu’il soit, est sincère. Un siècle après, Le Quesnoy continue de remercier les soldats néozélandais qui délivrèrent la ville, le 4 novembre 1918. Et, dans ces entours de Valenciennes, quelle meilleure manière d’honorer une mémoire qu’en la faisant entrer dans la geste carnavalesque? Ce 4 novembre 1918, les libérateurs étaient donc venus de bien loin, « de l’autre extrémité du monde », comme le rappelle une plaque apposée dans la ville. Elle a été scellée au sud des remparts de Vauban, là où l’avant-garde mena l’assaut à l’aide d’une échelle de 9 mètres. Dans cette guerre effroyablement moderne, cette méthode moyenâgeuse contribua à mythifier la scène. Elle fut immortalisée en 1920 par le peintre George Edmund Butler, artiste de guerre officiel de la Nouvelle-Zélande. Son tableau montre le second lieutenant Leslie Averill, un étudiant en médecine de Christchurch, grimpant sur l’enceinte, pistolet au poing, sui- vi par une demi-douzaine d’hommes. L’œuvrefigure depuis dans les livres d’histoire de l’hémisphère Sud. Quatre-vingt-dixNéo-Zélandais moururent devant Le Quesnoy, si près de l’Armistice. Parmi eux, Sydney Allan Murrell, un employé de banque, engagé volontaire en 1914 dans le corps expéditionnaire et enterré dans le cimetière de la ville. Ou Henry James Nicholas, tombé au début de l’offensive, et qui repose à Vertigneul, à quelques kilomètres du Quesnoy et à 20 000 kilomètres de sa terre natale. FranckBruyère, 43ans, professeurd’histoire au collège du Quesnoy, a consacré un 100 000 « Kiwis », 10 % de la population totale, seront envoyés aux combats. 18 000 y mourront livre à ce dernier (Henry James Nicholas, Mon Petit Editeur, 180 p., 19 ¤). Arrièrepetit-fils d’un « poilu » disparu au lieu-dit de Bagatelle (Marne), en juin 1915, dont la femme chercha désespérément la trace après la guerre, cet enfant du pays s’est naturellement intéressé au rôle des soldats « kiwis ». Au fil des archives, l’enseignant s’est mis aux basques de Nicholas, ouvrier engagé en 1916, sergent qui se vit remettre la Victoria Cross pour fait de bravoure. Il l’a suivi de Lincoln, près de Christchurch, jusqu’à Vertigneul. « En racontant son histoire, je racontais celle de la Nouvelle-Zélande», explique l’auteur. Depuis 1907, le pays était un dominion indépendant de l’Empire britannique, un Etaten gestation.La première guerre mondiale va contribuer à forger la nation au feu de l’enfer. « En 1916 est institué le service militaire, explique Franck Bruyère. Il y a la possibilité de s’y soustraire, mais les réfractaires seront peu nombreux. En 1918, les soldats néo-zélandais ont acquis une réputation d’excellence. Ils sont suivis par une troupe de journalistes qui relatent leurs faits d’armes. Ils seront accueillis en héros à leur retour. » Près de 100 000 hommes, 10 % de la population totale, seront envoyésen France et en Belgique et 18 000 y laisseront la vie. Le Quesnoy est la première victoire retentissantedecette jeune histoire.Fortement défendue, la ville est finalement conquiseet 2 000Allemands sontfaits prisonniers. Le 10 novembre, le président Poincaré viendra en personne saluer l’exploit. « La prise du Quesnoy, dans l’immensité de la guerre et au milieu des millions de morts, ce n’est rien, dit Paul Raoult, sénateur et maire de la commune. Mais c’est un peu le Valmy des Néo-Zélandais.» Le socialiste est réélu avec constance depuis 1984, fors une interruption de sept ans pour cause de cumul des mandats. Sa ville étant jumelée avec une homologue des antipodes, Cambridge, l’élu a déjà fait le voyage. Il n’en finit pas de raconter comment le nom de sa ville lui vaut chaque fois la sympathie. « Le Quesnoy est plus connu là-bas qu’à Paris », plaisante-il. «Tous les Néo-Zélandais ont des ancêtres qui ont fait la guerre en Europe », ajoute Marie-José Burlion, responsable de l’asso- 0123 le journal du centenaire Mardi 11 mars 2014 VII un livre, un enjeu 1961 : la « controverse Fischer » secoue l’Allemagne L Sous le beffroi de l’hôtel de ville, Maori le géant attend le carnaval. Ci-dessous: la parcelle néo-zélandaise du cimetière de Beaudignies, à 5 km du Quesnoy. a formule disant d’un livre qu’il a « l’effet d’une bombe» est particulièrement adaptée à celui de l’historien allemand Fritz Fischer. En 1961, ce professeur de l’université de Hambourg publie en Allemagne Les Buts de guerre de l’Allemagne impériale, 1914-1918. Bien que le parcours de Fischer ne soit pas celui d’un esprit critique – il fut même membre du Parti nazi –, il entend démontrer que l’impérialisme allemand est le principal responsable du déclenchement de la première guerre mondiale. Selon l’historien, il y a continuité entre la politique allemande de la fin du XIXe siècle et les buts de guerre en 1914-1918 étudiés ici dans le détail: affaiblir la France, mettre à distance la Russie, dominer économiquement l’Europe centrale, faire de la Belgique un Etat vassal… Un des arguments clés de Fischer tient dans le « programme de septembre» (1914), un texte approuvé par le chancelier Theobald von Bethmann-Hollweg. Ce dernier, qui avait jusque-là l’image d’un modéré, semble dès lors le représentant d’un point de vue impérialiste et annexionniste. Grand coupable Plus tard, dans Krieg der Illusionen («La Guerre des illusions», Droste, 1969), Fischer radicalise le propos et insiste sur les problèmes économiques de l’Allemagne d’avant-guerre qui renforcent la marche vers l’affrontement. A contre-courant de tout l’effort allemand de l’entredeux-guerres pour rééquilibrer les responsabilités, Fischer fait donc de son pays le grand coupable de l’hécatombe, portant « la part décisive de la responsabilité historique de la guerre mondiale ». Dans la préface à l’édition française (1970), l’historien Jacques Droz considère que Fritz Fischer oblige les Allemands de son temps à une « révision déchirante », à reconnaître que les historiens de l’entre-deux-guerres ont facilité le terrain à Hitler en trompant l’opinion sur les « buts de guerre allemands», en fournissant des arguments à la dénonciation «démagogique» du traité de Versailles (1919). Le Spiegel écrit alors : « C’est une mine posée sous la bonne conscience des Allemands» et l’on évoque même une « affaire Dreyfus » allemande. Fritz Fischer déclenche un véritable scandale, car ses thèses sortent de l’espace universitaire pour toucher un public bien plus large, jusqu’à mobiliser le gouvernement de Bonn, qui produit un contre-feu. C’est que l’enjeu tient à l’ensemble de l’histoire de l’Allemagne au XXe siècle, aux continuités de « Bismarck à Hitler ». En Allemagne, la polémique fut âpre et les adversaires de Fischer, souvent politiquement conservateurs, assuraient que la politique allemande fut essentiellement défensive, ou que la politique extérieure fut le moteur principal des décisions d’alors. Comme dans l’entre-deux-guerres, à vrai dire, le contexte politique éclaire aussi les arguments et les contre-arguments. Les thèses de Fritz Fischer, bien reçues dans l’ambiance contestataire des années 1960, se sont imposées à de nombreux historiens. Elles ont été infléchies par de nouvelles recherches, soulignant par exemple les différentes positions parmi les dirigeants allemands. Reste que Fischer s’appuie essentiellement sur les sources allemandes et on lui oppose encore que les responsabilités des autres pays se trouvent dans leurs propres documents, comme le soutient aujourd’hui l’historien australien Christopher Clark. p Nicolas Offenstadt Griff nach der Weltmacht. Die Kriegszielpolitik des kaiserlichen Deutschland 1914-1918, de Fritz Fischer, Droste, 1961. Traduction française : Les Buts de guerre de l’Allemagne impériale 1914-1918, Editions de Trévise, 1970. un acteur du centenaire Daniel Percheron veut rendre aux Nordistes leur juste place L ciation Le Quesnoy-Nouvelle-Zélande, qui compte une soixantaine de membres. Alors, aujourd’hui, les habitants de l’archipel sont de plus en plus nombreux à venir, en touristes cette fois. Ils sont 800 par an à pousser la porte de l’office de tourisme. Hélène Hatton et ses collègues ont appris à les reconnaître à leur carrure, à leur accent ou à la fougère qu’ils portent en emblème sur leurs vêtements.Ils débarquentde Londres, Paris ou Bruxelles. « Dans leur tour d’Europe, ils nous consacrent une journée», explique la jeune femme. La famille d’Hélène Hatton est du cru. Son arrière-grand-père,Jules, a transmisla mémoire de l’occupation allemande qui a commencé dès 1914. « Elle fut moins dure qu’en 1939-1945. » Les habitants souffrirent cependant de privations et devaient être munis d’un Ausweiss pour circuler. Le Quesnoy doit son nom à une déformation du mot chêne, une essence qui peuplait encore la région au début du XXe siècle. Mais, en 1918, la forêt de Mormal, le plus grand massif du département duNord,avait disparu,lesarbres ayant servi à étayer les tranchées allemandes. Quand les Néo-Zélandais ont repris la ville, elle ne comptait plus que 1 500 habitants sur les 5 000 d’avant-guerre. Les autochtones firent grande fête à ces bra- Le lien ne pouvait que rester fort entre le pays naissant et la commune du XIIe siècle ves venus du diable vauvert. Le lien ne pouvait que rester fort, par-delà les mers et les décennies, entre le pays naissant et la commune du XIIe siècle. Franck Bruyère se souvient d’une visite des AllBlacks en 1991. Amateur de rugby, il avait voulu faire dédicacer son ballon et avait essuyé des refus embarrassés. « Ils étaient là pour se recueillir et non pour faire leur promotion. » Interrogée sur l’instant où elle s’était sentie la plus fière d’être néo-zélandaise, la championne olympique de cyclisme Sarah Ulmer ne cita pas le podium d’Athènes en 2004, mais sa visite privée au Quesnoy, cinq ans plus tard. La cité libérée ne ménage pas sa reconnaissance, et pas seulement en offrant un compagnon de promenade à Bimberlot. Dès 1923, elle a concédé une portion de ter- rain à la Nouvelle-Zélande, transformé en un parc fourmillant de plantes importées. En déambulant, on découvre une avenue des Néo-Zélandais, une place des AllBlacks,unerue Helen-Clark(ex-première ministre de l’archipel), une rue au nom du chanteur Graeme Allwright et même une rue Aotearoa (« le pays du Long Nuage blanc », nom maori de la Nouvelle-Zélande).En 1977,quatreans avant sa mort,l’officier qui mena l’assaut, Leslie Averill, était revenu inaugurer une école à son nom. Un circuit de mémoire retraçant les principales étapes de la bataille a été mis sur pied. Chaque 4 novembre est organisée une veillée aux flambeaux et chaque 25 avril, une délégation néo-zélandaise se rend dans le Nord pour l’Anzac Day, jour de commémoration de la bataille de Gallipoli, qui eut lieu à l’entrée du détroit des Dardanelles, en 1915. Avec l’approche du centenaire, Franck Bruyère et Laurence Tep, professeur d’anglais, ont mis en place un programme originalpour les troisièmes, utilisant la pédagogie informatique. Chaque élève se mettra dans la peau d’un soldat néo-zélandais ettentera de faire vivre son avatarnumérique. « Une manière d’entretenir la mémoire auprès des nouvelles générations », explique Franck Bruyère. p e 11 novembre2014, le président Hollande devrait inaugurer le Mémorial international de Notre-Dame-de-Lorette, à AblainSaint-Nazaire, près d’Arras. Sur un anneau de métal, conçu par l’architecte Philippe Prost, seront inscrits dans l’ordre alphabétique les noms des 600 000 soldats morts dans le Nord-Pas-de-Calais durant la Grande Guerre. Daniel Percheron, président de la région et sénateur du Pas-deCalais, est le principal artisan du projet : « L’idée de ce mémorial à côté de la nécropole nationale de NotreDame-de-Lorette me taraudait depuis les années 1990, quand j’avais longé le mur de Washington, mémorial des vétérans du Vietnam. » D’ici à l’automne, Daniel Percheron inaugurera aussi le Musée de la bataille de Fromelles, situé près de Lille, à côté du cimetière du Bois Faisan qui abrite les dépouilles mortelles de soldats australiens retrouvées en 2008. «Quel contraste, ces légères ondulations de terrain, ces doux paysages des Weppes… Comment imaginer que tant de jeunes venus de l’hémisphère Sud sont morts là, si vite? » Théâtre de batailles récurrentes et compliquées à décrire, le nord du pays n’occupe pas la première place dans la mémoire collective française de la Grande Guerre. « La légende, c’est la Voie sacrée, des batailles comme Verdun… Alors que notre région a toujours été sur la route des invasions. Entre les conflits, nous menions des batailles industrielles, nous luttions contre le chômage… Quand je revois les images de l’exode de 1940, tous ces Nordistes fuyant leur ville de manière précipitée, je pense que nous n’étions pas guéris du traumatisme de la première guerre mondiale. Nous avons ensuite moins entretenu le souvenir que les Canadiens ou les Australiens par exemple, qui l’associaient à la naissance de leurs nations.» Les ouvrages d’histoire s’empilent chez le désormais septuagénaire qui enseigna cette matière à Lens, au lycée Condorcet, de 1963 à 1965, puis au lycée technologique jusqu’en 1979. « J’ai quitté l’éducation nationale quand j’ai été élu député européen sur la liste de François Mitterrand.» Chemins de mémoire Plus jeune, il voulait devenir avocat. «Puis ce fut journaliste de sport, car j’écoutais passionnément Georges Briquet à la radio. Finalement, mon troisième centre d’intérêt l’a emporté…» La Révolution française est son sujet de prédilection. « Je lis tout ce que je déniche sur la Convention.» Pour ce natif de l’Oise, la Grande Guerre commence par un souvenir familial. «Mon grand-père est mort le 22octobre 1914 en Argonne, fauché par une mitrailleuse. On n’a jamais retrouvé son corps. Dans sa dernière lettre, il rassurait sa famille en affirmant que ses bras très longs lui offraient un avantage pour le combat à la baïonnette…» Sous son impulsion, le Nord-Pasde-Calais a lancé des Chemins de mémoire et créé un site Internet qui leur est consacré, « pilotés par l’agrégé d’histoire Yves Le Maner, chantre incomparable de [leur] région, spécialiste des deux guerres mondiales». p Geoffroy Deffrennes (Lille, correspondant) VIII 0123 le journal du centenaire Mardi 11 mars 2014 La couleur très politique des commémorations belges TEMPS FORTS SÉLECTION Expositions Hôtel de Ville de Paris « Fusillé pour l’exemple – Les fantômes de la République». Jusqu’au 22 mars. > Quefaire.paris.fr L’Etat a pris peu d’initiatives,au contraire de la région flamande, que les francophonesaccusent de lecture partisane VU D’AILLEURS Jean-Pierre Stroobants U Bruxelles, correspondant ne vaste exposition, intitulée « 14-18, c’est notre histoire », ouverte le 26 février au Musée royal de l’armée et de l’histoire militaire de Bruxelles, a vraiment marqué le point de départ des commémorations de la Grande Guerre pour le grand public en Belgique. Une autre exposition, « Bruxelles à l’heure allemande», ouvrira au mois d’août, en un autre lieu symbolique, le Musée de la ville, sur la Grand-Place de la capitale. Au-delà de ces deux événements, c’est bien timidement que la Belgique officielle paraît vouloir commémorer l’événement. Le gouvernement fédéral ne s’enest souciéqu’àla mi-2013,en réunissant un comité consultatif de huit historiens – quatre néerlandophoneset quatre francophones– chargés surtout de superviser les grands rendez-vous, de communiquer avec les pays étrangers et de coordonner, si possible, les actions de la Wallonie et de la Flandre… Cette dernière a, elle, pris les choses très au sérieux depuis 2008. Elle a beaucoup investi pour rappeler le souvenir des Flanders Fields, cette plaine de l’Yser proche de la frontière française où l’armée belge, chargée de défendre une ligne de front entre Nieuport et Dixmude, fut contrainte de se replier en octobre 1914. Ce retranchement fut rendu possible grâce à l’inondation volontaire des polders empêchant le passage des troupes allemandes. Hendrik Geeraert, le batelier qui réalisa cette opération, est devenuunegloirenationaledontlevisage a orné, en 1950, un billet de banque. Français et Britanniques défendaient Ypres, au sud de la ligne de défense belge. La ville médiévale fut l’objet d’attaquesmultiples,quilaréduisirentencendres. Les Allemands allaient en effet utiliser des armes de plus en plus terrifiantes pour tenter de la conquérir: des lance-flammes, des gaz asphyxiants et le gaz moutarde, ou « ypérite ». La ville abrite aujourd’hui le Musée In Flanders Fields et une exposition permanente sur la première guerre mondiale. Les rivalités « communautaires » n’étant jamais bien loin dans ce pays qui a vécu, entre 2010 et 2012, l’une des plus longues crises politiques de l’histoire mondiale, la Flandre est aujourd’hui accusée de se servir de l’évocation du conflit pour renforcer l’affirmation de son identité et promouvoir son image à l’étranger. Elle gommerait complètementle cadre national belge et la référence à l’histoire du pays. En insistant sur les drames du front de l’Yser, c’est la situation,plus complexe et souventterrible, du reste du territoire, alors occupé par les Allemands, qui est oubliée. Aucun historien n’a été consulté. Paradoxe: l’un d’eux, Bruno De Wever, est le frère du dirigeant du parti indé- pendantiste Alliance néoflamande (NVA), Bart De Wever. Et il a confié au magazine Le Vif-L’Express que, contrairement à ce que veulent faire croire des officiels flamands, « les soldats se battaienten premierlieupourdéfendreleur patrieet sont souventtombésparpatriotisme belge ». Et donc pas seulement pour défendre la paix, comme semble l’indiquer la communication officielle. « Ces jubilés servent toujours des objectifs qui en disent plus long sur le présent que sur le passé » Bruno De Wever historien BrunoDeWeverrelèveque labrochure officielle de la Flandre, intitulée 2014-18, Le Grand Centenaire, ne mentionne qu’une seule fois le mot « Belgique »… pour préciser l’adresse de son secrétariat.« Ce genrede jubiléssert toujours des objectifs qui en disent plus long surle présentque sur lepassé », souligne encore l’historien. La communication officielle n’évoque pas davantage le combat pour l’émancipation flamande mené sous l’Occupation, ou la proclamation d’une Musée d’histoire de Nantes région indépendante, en décembre 1917, par le Raad van Vlaanderen (Conseil de Flandre). C’est une fraction du mouvement flamand, les « activistes », hostiles à la Belgique bourgeoise et francophone, qui allaient s’incarner temporairement en leaders du peuple. Ilsvoulaient,contrairementaux «minimalistes », s’appuyer sur l’occupant allemand pour obtenir la séparation administrative, voire l’indépendance. La « Flamenpolitik » menée par l’Allemagne s’accommodait de cette évolution, elle qui « souhaitait fissurer la Belgique de l’intérieur et créer un petit Etat satellite», relève Marc Reynebeau (Histoire belge, Editions Racine, 2005). Même si cette tentative a échoué, la Grande Guerre a créé l’un des principaux mythes fondateurs du combat nationaliste : l’oppression des soldats flamands,commandésdans une langue inconnue d’eux et forcés d’effectuer les missions les plus dangereuses. Une visionnuancéeparl’historienneLaurence Van Ypersele, qui relève seulement une légère surreprésentation des Flamandsdansl’infanterie,oùétaientaffectés les soldats les moins éduqués : la Flandre, région rurale, était à l’époque le parent pauvre d’un pays très prospère. Une fois encore, c’est la communauté francophone qui va donc promouvoir seuleun patriotismebelge.Celanesuffira peut-être pas à honorer la mémoire des 43000 soldats et 22 000 civils tués durant un conflit qui fit aussi 20000 blessés, dans ce royaume qui se voulait neutre et ami de l’Allemagne… p « A l’école de la guerre, 1914-1918 ». Jusqu’au 20 avril. > Chateau-nantes.fr Archives nationales « Jaurès ». Paris, jusqu’au 2 juin. > Archives-nationales.culture.gouv.fr Bibliothèque historique de la Ville de Paris « Paris 14-18, la guerre au quotidien ». Photographies de Charles Lansiaux, jusqu’au 15 juin. > Paris-bibliotheques.org Forum antique de Bavay « Sauve qui veut ! Des archéologues mobilisés, 1914-1918». Jusqu’au 26 août. > Forumantique.lenord.fr Musée lorrain de Nancy « Eté 1914, Nancy et la Lorraine dans laguerre », jusqu’au 21 septembre. > www1.nancy.fr/culturelle/musees Conseil général du Haut-Rhin « Vivre en temps de guerre des deux côtés du Rhin, 1914-1918». Colmar, 22 mars-6 mai. > Haute-alsacetourisme.com Bibliothèque nationale de France « Eté 1914: les derniers jours de l'ancien monde». Paris, 25mars-3août. > Bnf.fr Historial de la Grande Guerre « Entendre la guerre. Sons, musiques et silence en 14-18 ». Péronne, 27 mars16novembre. > Historial.org Musée de la Chartreuse « Sauve qui veut! Des musées mobilisés». Douai, 29mars-6juillet. > Musenor.com/Les-Musees/ Douai-Musee-de-la-Chartreuse Spectacles vivants Hall de la chanson Parade Fauve, chansons de la Grande Guerre. Paris, 13-30mars. > Lehall.com Cité des arts de Chambéry Le Violoncelle de guerre. Maurice Maréchal et le Poilu, violoncelle: Emmanuelle Bertrand, textes : Christophe Malavoy, le 20 mars. > Citedesarts.chambery.fr La Merise Noir de boue et d’obus, Cie Difé Kako. Trappes, 20 et 21 mars. > Lamerise.com Opéra de Paris Cycle « Convergences», Spleens et détresses, de Louis Vierne. Le 26 mars. > Operadeparis.fr Equinoxe – scène nationale de Châteauroux La Grande Guerre, compagnie Hotel Modern (Rotterdam), 28 et 29 mars. > Equinoxe-lagrandescene.com Cinéma Cinémathèque française Centenaire de la Grande Guerre au cinéma. Paris, 26 mars-5 mai. > Cinematheque.fr Colloques Goethe Institut de Nancy, Université de Lorraine « Lalongue durée de la Grande Guerre. Regards croisés franco-allemand de 1918 à nos jours». Université de Lorraine, Nancy et Metz, 19-21mars. > Goethe.de/ins/fr/nan Société d’études jaurésiennes « 1914. L’Internationale et les internationalismes face à la guerre». Paris, 22-24mars. > Jaures.info ULLSTEIN BILD/ROGER-VIOLLET Adolf Hitler, la photo trop parfaite une image, un symbole I l s’agit sans doute de la plus célèbre photographie du début de la guerre. Une foule dense se presse sur l’Odeonsplatz, à Munich, le 2août 1914, pour célébrer l’entrée en guerre de l’Allemagne contre la Russie, déclarée la veille. Dans un cercle à la droite de l’image, un agrandissement permet de bien distinguer l’une de ces figures enthousiastes: on reconnaît la moustache et la mèche caractéristiques d’Adolf Hitler, sujet autrichien de 25 ans, qui va bientôt s’engager au 16e régiment d’infanterie de réserve bavarois pour ce qu’il décrira ensuite comme l’expérience la plus exaltante de son existence. Le cliché semble ainsi fixer la rencontre parfaite d’un destin individuel, celui du futur Führer, et d’un sentiment collectif, celui de l’unité nationale exaltée, au tout début du conflit. Trop parfaite, peut-être. Car on doit l’image à Heinrich Hoffmann (1885-1957), nazi convaincu dès 1920, devenu le photographe officiel de Hitler par la suite: il immortalisera par exemple sa poignée de main avec Pétain à Montoire, en octobre1940. Auteur d’un reportage sur l’entrée en guerre en 1914, il n’aurait d’abord pas remarqué Hitler sur sa photo, avant de la «retrouver» et de la publier opportunément, avec agrandissement, à la veille de l’élection présidentielle de 1932. Autant d’éléments qui font douter bien des historiens de son authenticité, Gerd Krumeich faisant valoir, par exemple, que la plaque de verre originelle n’a jamais été retrouvée, ou que d’autres versions du cliché montrent un personnage à la coiffure différente. Au-delà de retouches indéniables, la présence d’Hitler à ce rassemblement reste plausible. Mais comment interpréter l’image d’unanimité se dégageant du document? Ici, Thomas Weber, le plus récent biographe des années de guerre de Hitler, attire l’attention sur la composition de la scène: alors que d’autres photos, ainsi qu’un film réalisé le même jour, montrent une foule munichoise assez restreinte, de bonnes parties de la place restant vides, le cadrage resserré produit un effet de masse trompeur. Davantage qu’une vue réaliste de la mobilisation, le cliché vise l’efficacité mobilisatrice, en 1914 comme dans les années1930. p André Loez Télévision/Documentaires France 2 Apocalypse, la première guerre mondiale, de D. Costelle et I.Clarke, produit par CC&C, 5 épisodes de 52min. 18mars, 25 mars, et 1er avril en soirée, suivi d’une émission spéciale. > Apocalypse.france2.fr/ premiere-guerre-mondiale France 3 La Cicatrice, de L. Véray, produit par Cinétévé, 52 min. Le 24 mars, en soirée. > Education.francetv.fr > Sur le site Centenaire.org Consultez le programme détaillé. > Lemonde.fr/centenaire-14-18