nutrition obesite medias - Institut interdisciplinaire d`anthropologie

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nutrition obesite medias - Institut interdisciplinaire d`anthropologie
UNE LETTRE D’INFORMATION DU CETSAH!
N°1 - MAI 2007
NUTRITION OBESITE MEDIAS
Sommaire du numéro Editorial. Enquête : “Les journalistes, les médias et
l’obésité”, première partie (pages 1 et 2). Vu-lu-entendu : Messages sanitaires et publicité alimentaire (pages 3 à 5). Interview : Michel Chauliac, responsable du Programme National Nutrition Santé. Quickfacts (page 6).
Mihail Chemiakin, Le ventre de Paris
EDITORIAL
Par Claude Fischler
Comment les messages de santé publique sur la nutrition
“passent”-ils dans les médias ? Comment la communication du
PNNS (Programme National Nutrition Santé) est-elle reçue,
entendue – et restituée par la presse ? Sur l’obésité, en particulier, sujet de préoccupation mondial, quels discours nos
concitoyens reçoivent-ils ? Et comment, de leur côté, les journalistes, qui doivent rechercher, recevoir, sélectionner, reformuler et commenter cette information pour tous, perçoivent-ils
le PNNS et, plus généralement, les messages de santé publique
liés à l’alimentation ? Comment s’opère la fonction de médiation qu’implique le terme même de médias? En matière spécifique de santé publique et de nutrition, quelles sont les contraintes, les conditions de production, les caractéristiques
organisationnelles qui filtrent, colorent, sélectionnent, modulent l’information, orientent son traitement? Répondre à ces
questions ou les éclairer semble indispensable pour optimiser
l’efficacité des campagnes. Mais il ne s’agit pas que de communication : il s’agit aussi, en comprenant mieux la réception et
les usages réels des informations émises, de saisir une dimension supplémentaire et essentielle du rapport contemporain à
l’alimentation ; il s’agit enfin, peut-on espérer, d’aider à mettre
en œuvre, de la source à l’arrivée des messages et des actions,
un processus réflexif ou les moyens d’une auto-évaluation.
C’est grâce à un financement de la Direction Générale de la
Santé que le CETSAH a pu aborder ces questions. Valérie Adt
a d’abord analysé un corpus de plusieurs centaines de publications de presse et cherché dans ce matériau quelles étaient les
lignes de force, les thèmes le plus souvent évoqués, les figures
le plus souvent utilisées. Nous avons ensuite conduit des entretiens approfondis et organisé des discussions de groupe
avec des journalistes (en activité et en formation), pour mieux
comprendre leur perception, leurs préoccupations, leurs contraintes, leurs attentes, éventuellement leurs réserves, vis-à-vis
des scientifiques, des médecins, des actions de santé publique.
Cette lettre d’information est une sorte de journal de bord
mis en forme périodiquement de ce travail. C’est aussi une
restitution des résultats à l’usage de tous mais avant tout de
ceux qui ont bien voulu apporter leur concours à l’entreprise.
ENQUETE “LES JOURNALISTES, LES
MEDIAS ET L’OBESITE” (1ère partie)
Restitution du discours médiatique
Près de cinq cents articles regroupés en une « revue de presse
thématique des problématiques liées à l’obésité » constituée par
Weber Shandwick pour l’INPES et publiés au cours des cinq
premiers mois de l’année 2004 ont
été analysés. Ce corpus saisit une
partie du discours tenu par les
médias sur l’obésité à l’époque.
Résumé.
répartition des articles en fonction du support d'information
10
22
2
101
180
4
2
7 14
7
quotidien
hebdo
mensuel
bi-hebdo
bi-mensuel
bi-mestriel
trihebdo
trimestriel
sites
tv
radio
AP
45
103
Deux approches principales : légiférer, éduquer
En relation avec l’actualité parlementaire – on est alors en plein
débat sur la Loi de Santé publique - un pic d’information apparaît en mars - avril. Cette actualité semble avoir joué un rôle
déclenchant ou favorisant la médiatisation de l’action préventive,
mais non exclusivement : un peu plus du tiers des articles adopte
un « angle législatif » ; un article sur deux traite « d’éducation
nutritionnelle » (27,8%) ou dispense des « conseils nutritionnels » ( 21,3%)1.
Sous l’angle “législatif ”, on observe la forte médiatisation de
trois amendements adoptés vs la faible médiatisation des propositions rejetées (respectivement 84% et 16%). Hormis leur adoption, ces trois amendements (« publicité - spots TV » ; « collation
matinale » ; « distributeurs » ) ont en commun une notion de
protection des jeunes, la mise en cause du grignotage et des
produits de grignotage par opposition aux repas. La contradiction existe : « Non, snacking ne rime pas forcément avec obésité ». Cependant, la pratique est souvent assimilée à un comportement à
risque et l’univers de la toxicomanie, convoqué (notion de dépendance, comparaison des industriels de l’agroalimentaire aux
cigarettiers, emprunts aux mentions de la loi Evin, etc.). Les
auteurs ne prennent pas directement position : la parole est attribuée aux acteurs du débat et cette attribution, variable selon
les médias (presse professionnelle, PQR notamment en fonction
du gisement d’emplois que représente un secteur d’activités
susceptible d’être impacté par la loi - cas du NAVSA à Lyon par
ex.). D’où une représentation des opinions « pour » ou « contre » plus ou moins équitable. En conclusion des articles, on note
la présence de suggestions allant dans le sens de la recherche
d’un compromis, d’alternatives à l’interdit.
Dans les articles traitant « d’éducation nutritionnelle » (27,8%),
1
- D’autres dimensions du discours médiatique ont été explorées (dont dimension économique 21% ; recherche scientifique et médicale 15%, etc. decrescendo) : Valérie Adt et Claude Fischler, Rapport d’enquête “Les journalistes, les médias et l’obésité”, CETSAH, Paris 2005 (150 p).
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http://www.ehess.fr/centres/cetsah
UNE LETTRE D’INFORMATION DU CETSAH!
les actions préventives menées dans les écoles en partenariat
avec des villes dominent (78% des articles de ce sous-groupe :
Epode, Fleurbaix-Laventie, etc. – résultat lié à une abondance
d’articles de la PQR et sites maville.com). Promotion de l’équilibre alimentaire et promotion de l’activité physique apparaissent
quasi indissociables (co-occurrence 76%). Les « conseils nutritionnels » indépendants (21,3%) ne présentent pas la même
homogénéité. L’information traite d’initiatives isolées, au sens où
elles ne relèvent pas de l’action publique tout en « profitant » de
sa dynamique comme de l’actualité de la problématique. Ce
type d’articles offre l’avantage d’une apparente « personnalisation » du discours, tout en contribuant à la production d’une
« cacophonie alimentaire ».
N°1 - MAI 2007
cible de l’industrie agroalimentaire et du marketing, utilisé pour
son rôle de prescripteur d’achats mais, dans une finalité préventive, le rôle de l’enfant « pédagogue », « prescripteur » ou « conseiller » de ses parents semble admis et co-existe avec des consignes de revalorisation de l’autorité parentale.
qui est concerné ?
300
276
250
200
OBJ
OBGÉN
OBJ+OBGÉN
150
101
100
87
55
50
35
54
25 25
6
11
45
16
25
32
15
39
18
0
Médiatisation des consignes de santé publique
Les consignes de santé publique sont relayées, rarement contredites (des exceptions, dont allaitement maternel) mais leur contenu varie : tant en termes d’alimentation que d’exercice physique, on observe régulièrement leur déformation, dans le sens de
l’exagération ou de la minimisation.
Le Programme National Nutrition Santé (PNNS) est relativement peu cité (17,3% des articles), son nom parfois incomplet ou
tronqué : « Programme nutritionnel de santé ». Généralement, la citation est associée à des actions et/ou à des recommandations. Sa
mention par des professionnels équivaut à une revendication de
conformité (Weight Watchers,…) ou exprime un intérêt à la
conformité (filière pain). Le PNNS prend une valeur de « label »
et confère une valeur ajoutée « santé » à certaines catégories de
produits. Une pression à la conformité s’exerce parallèlement
sur les collectivités (mise en cause de contrats avec des sponsors
privés lors de séances de conseil municipal) et sur les pouvoirs
publics, le rappel de l’obésité servant d’argument dans les négociations entre acteurs (revendications syndicales, niveau de recrutement EPS, en médecine scolaire, etc.).
Au-delà de l’ancrage des consignes, des rappels et des intérêts à
la conformité, on observe des effets de catégorisation.
Une approche par “produits”, classificatrice
Une fois sur cinq, des produits alimentaires font les titres des
articles. Le cas échéant, les aliments réputés « bénéfiques » occupent 45% des titres (« Mangez des pommes ! L’aliment santé par
excellence », ...) et les aliments réputés « néfastes », 54% (à nuancer - de « nutritionnellement incorrects » à « interdits», en passant par
« dépassement dangereux »). Parmi ces derniers (sodas, friandises,
pizzas, chips, hamburgers...), figurent des produits d’importation
assimilés aux Etats-Unis. L’apparition simultanée des uns et des
autres véhicule souvent l’idée d’un rééquilibrage : « Moins de
bonbons et plus de fruits », « Plus de légumes, moins de graisses .On observe également une transposition de “la chasse au kilos” par
similitude « La chasse au sucre est ouverte » ; « La chasse au grand méchant gras ». Le discours nutritionnel va de pair avec l’émergence
d’un discours sur les nutriments.
A propos de la classification des produits, des commentaires
témoignent de la perception de la cacophonie : « Entre les aliments
"non grata" et ceux (les mêmes !) déclarés d’utilité publique, il y a de quoi y
perdre son latin ! » ; « Information, conseils et même, parfois, injonctions se
multiplient. Le citoyen est embrouillé ». Face à quoi, l’article peut revendiquer une fonction pratique (promesses de solutions simples
inspirées par le bon sens, facilement applicables ...).
Une “juvénilisation” de la problématique
Pratiquement huit fois sur dix, parler du surpoids et de l’obésité
conduit à parler des jeunes (enfants, adolescents)2 .
L’attention particulière portée à cette catégorie de la population
est exceptionnellement perçue comme excessive: « Il ne faut pas
exagérer, les ados français ne mangent vraisemblablement pas plus mal que
leurs parents ». Explicitement, l’enfant est décrit comme manipulé,
La population dans son ensemble, ensuite, est dite concernée
(42,6%, dont 20,3% sans référence aux jeunes) tandis
qu’il est rarement question
des personnes déjà obèses et de leur prise en
charge thérapeutique (2%).
partie 1
partie2
partie 3
partie 4
partie 5
livres RP
total
111
Peu d’autres distinctions sociales
sont relevées. Contrairement à l’association spontanément effectuée par les journalistes lors des entretiens (cf prochain numéro),
la relation entre obésité et CSP défavorisées est, à l’époque, rarement présente dans les matériaux analysés (5%). Ce résultat
pourrait être l’indice d’un évitement de la stigmatisation sociale.
De la responsabilité
Parler des jeunes est « concernant », fait appel à la responsabilité
parentale : l’enfant n’est pas tenu pour responsable de son alimentation, il contracte dès son plus jeune âge de « mauvaises habitudes alimentaires », encouragées par la publicité et le marketing,
aggravées par la sédentarité, notamment du fait du temps passé
devant la télévision. Les « causes » sont vues comme multiples
et, systématiquement, les médias énoncent plusieurs d’entre
elles. La responsabilité collective est admise, consensuelle, les
consommateurs invités à prendre leur part. On voit apparaître
une théorie de l’escalade du surpoids vers l’obésité et l’irréversibilité du processus inquiète, justifiant d’intervenir avant car « si
on ne fait rien »…
Alarmer - rassurer
Une fois sur deux, presque, les chiffres du surpoids et de l’obésité
sont communiqués, lesquels font partie du « constat » sur lequel
l’article prend appui. Généralement introductifs, ils sont associés
à des « alertes » scientifiques et/ou politiques, à des comparaisons et à la citation de maladies (maladies cardiovasculaires,
diabète, hypercholestérolémie, cancers).
Les chiffres annoncés varient, ceux de l’obésité infantile allant de
3,5% à 16%, de même que les projections à l’horizon 2020 (de
20 à 25% ; « un enfant sur quatre sera obèse »). Une confusion ou un
amalgame surpoids - obésité est notable (16% d’enfants en surpoids dans un media / 16% d’enfants obèses dans un autre). Si
la distinction est opérée dans une partie des articles, dans d’autres, l’un des deux termes disparaît, le plus souvent au profit de
l’obésité.
Toutefois des comparaisons (France/Etats-Unis en particulier ;
inter-régionales ou départementales, etc) viennent atténuer ou
compenser l’effet « alarmant » de l’annonce amplifié par la confusion. Tout en fonctionnant comme une mise en garde ou un
avertissement, généralement, la comparaison est avantageuse
pour soi au sens où elle véhicule implicitement l’idée que, ailleurs,
c’est pire... Parfois, il est fait référence au modèle culinaire français
susceptible de jouer un rôle “protecteur”.
Entre alarmer et rassurer, une tension du discours est donc perceptible que les entretiens individuels et les discussions de
groupe entre journalistes éclairent, notamment en se situant du
point de vue des contraintes professionnelles qui s’exercent (partie 2 d’enquête à suivre dans le prochain numéro).
2
- L’étude du matériel visuel (46,1% des articles sont illustrés) montre que l’image ne tient pas tout à fait le même langage que le rédactionnel : les jeunes y sont montrés deux fois moins souvent qu’ils ne sont désignés dans les textes ; en cas de surpoids ou d’obésité visible, les sujets représentés sont
sensiblement plus souvent des femmes (42,4%) que des jeunes (37,3%) ou des hommes (20,3%).
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UNE LETTRE D’INFORMATION DU CETSAH!
N°1 - MAI 2007
VU, LU, ENTENDU
M e s s a g e s s a n i t a i re s e t p u bl i c i t é a l i m e n t a i re
Le Charivari, Honoré Daumier
Commentant les résultats d’une enquête menée auprès de sept
cents personnes, le 26 février 2007, l’association UFC-Que
Choisir jugeait les messages sanitaires inefficaces3 . De son côté,
en s’appuyant sur les pré-tests réalisés par l’INPES auprès d’un
millier de personnes, Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, les créditait d’une « efficacité pédagogique ». Comment la
contradiction de ces deux annonces faites à la presse fut-elle
gérée et restituée par les médias ? Plus largement, quelles “explications” le public a-t-il pu recevoir à propos de cette mesure
? L’examen d’une cinquantaine de documents fournit des éléments de réponse à ces questions4 .
Le débat de l’efficacité : une information sélective
Dans la cinquantaine d’articles analysés, on observe que la
« preuve » de l’inefficacité des messages sanitaires est davantage
fournie au public que la « preuve » de leur efficacité. La citation
unilatérale est favorable à la critique : les pré-tests de l’INPES ne
sont jamais cités seuls, contrairement à celui d’UFC-Que
Choisir. Un manque de matière
journalistique ; la position
« juge et partie » de la source dans le cas de l’INPES peuvent en partie expliquer cette
observation.
L’échantillon est trop restreint
pour tirer des conclusions valables, cependant, des différences
entre presse écrite, presse audiovisuelle et internet sont envisageables et à rapprocher de la crise
que connaît la presse d’information payante et des investissements publicitaires dans les médias comme de leur répartition
entre eux. La question de l’impact de la mesure sur les recettes
publicitaires est d’ailleurs envisagée : “L’alimentation est l’un des
principaux secteurs du marché publicitaire français avec près de 8% des
investissements médias en 2006” et assurant que, selon, l’Association
Nationale des Industries Alimentaires (ANIA), “le dispositif ne
devrait pas différer les plans médias des marques” (Le Figaro 070207).
Un mois après la promulgation du décret, certains font un premier bilan : “Le message sanitaire, cher mais bon pour la pub” titre le
quotidien 20 Minutes expliquant que 90% des annonceurs
“jouent le jeu” et tirent profit de “se poser en défenseur de la santé publicitation des pré-tests (test UFC-Que
Choisir ; pré-tests INPES)
5
pré-test UFC-Que
Choisir
pré-tests INPES
14
27
citation des deux à
la fois
ni l'un, ni l'autre
information
antérieure
10
0
que” en intégrant le bandeau plutôt qu’en payant la taxe. Par
ailleurs, des engagements conclus avec les pouvoirs publics (cas
du Syndicat National de la Publicité Télévisée) peuvent également avoir joué - dans le sens de la “neutralité”.
Des messages inefficaces, aux effets indésirables
L’information fait état d’une « polémique sur l’efficacité des messages
sanitaires » (Les Echos), d’« une mesure jugée inefficace » par UFC-Que
Choisir (AFP, Le Monde, CB News, 20 Minutes, etc) ou plutôt
« à l’efficacité discutable » selon l’ANIA (Le Figaro). Lesdits messages auraient un effet, mais un « effet contre-productif garanti » (Le
Monde, Le Café Pédagogique - webzine destiné aux enseignants
- ...), des « effets inverses garantis et prouvés ! » (vivelesrondes.com).
D’autre part, on peut lire que « Les professionnels s’inquiètent, eux
aussi, des effets collatéraux de ces messages qui pourraient semer le trouble
chez le consommateur (...)» (sante-naturelle.info). L’étude UFC-Que
3
4
Choisir, jugée « tout à fait édifiante » par l’auteur d’un article de la
presse agroalimentaire, fournit matière à conclure : « Encore une
mesure qui va créer la confusion dans les esprits et augmenter l’anxiété des
plus angoissés sans toucher les gens véritablement concernés. On va droit vers
l’orthorexie chez certains et l’anomie alimentaire pour beaucoup qui ne sauront
plus
à
quel
saint
se
v o u e r. » .
(proposagroalimentaire.wordpress.com).
L’énoncé des résultats de l’enquête UFC-Que Choisir - près de
la moitié des sondés n’ont pas vu le message ; 91% des interrogés “ont été dans l’incapacité d’identifier que le produit alimentaire présenté dans la publicité était déséquilibré” ; “les 2/3
(alternativement citation de 66%) comprennent le message de
travers, c’est-à-dire que les produits sont équilibrés” - s’accompagne parfois de traits d’ironie : « Les résultats (…) ne manquent pas
de piquant ! » ; « Quelle efficacité ! ».
Les résultats fournis par l’association et leur interprétation ne
sont jamais discutés - cependant qu’est-ce qu’une “réponse
correcte” pour la source ? quels effets désirables ? (encadré).
Accusée de ne pas jouer “son rôle d’alerte” (La Croix), la mesure
est qualifiée de « galéjade » selon le mot du président d’UFC-Que
Choisir repris par l’AFP, CB News, Le Monde, Libération, L’Est
Républicain, Nord-Eclair, actualite.aol, etc., y compris en titre,
sous-titre ou chapeau d’articles. Les uns la conçoivent comme
« un coup d’épée dans l’eau » ; « Un flop donc » (20Minutes) ; d’autres
(s’) interrogent : « une mesure de bonne conscience ? » (L’Express) ; « une
mesure light ? » (Lyon Plus) - le gratuit d’information lyonnais titrant « La santé fait sa publicité » ; tandis que l’usage de titres à
double sens permet à chacun une libre interprétation : « C’est
mauvais... Et c’est écrit » (Nord-Eclair).
Inutiles, relativement inoffensifs
Moins fréquemment, les messages sanitaires sont dits « efficaces
selon les pouvoirs publics, inutiles selon l’UFC-Que choisir » (Stratégies) notamment parce que « ce ne sont pas des messages relativement
inoffensifs qui vont modifier le comportement », propos également attribué à l’association de consommateurs (RFI), laquelle « s’est attelée
à démontrer l’inanité des textes » (Challenges). On peut alors estimer
que « ce dispositif a le mérite d’exister » (RFI) ou conclure que « (...)
légiférer de cette manière n’était peut-être pas la solution la plus efficace. »
(Challenges).
Les propos sont d’ailleurs souvent modérés par des qualificatifs à
connotation positive : les messages sont dits « de bon sens » ;
« d’intérêt public » ; « de prévention » ; « mentions sanitaires
qui se veulent assez préventives » ; « prônant une meilleure hygiène de vie ».
L’annonce d’un premier bilan dans six mois et du renouvellement des messages sanitaires par le ministre de la Santé subit
toutefois le contrecoup de ces “mauvais” résultats : « Xavier Bertrand a promis un premier bilan dans six mois et a indiqué que les messages
seraient ‘’régulièrement renouvelés’’ pour en renforcer l’impact .»
(sante-naturelle.info). A la source ministérielle, le renouvellement
des messages est conçu « pour maintenir leur efficacité pédagogique ».
On note un problème de définition des produits alimentaires
visés : même si une partie des articles parlent de “produits manufacturés”, ce sont souvent les produits et boissons sucrés et/ou
gras et/ou salés qui sont dits concernés par la mesure. Ce qui
explique la sollicitation de l’avis d’internautes, par exemple,
selon la formulation suivante : « Des messages sanitaires obligatoires
sur les ‘’mauvais aliments’’, qu’en pensez-vous ? » (yahoo.fr).
- Les messages sanitaires sont “impuissants à ....” ; des “mesurettes à l’efficacité douteuse”. Communiqué de presse UFC Que-Choisir, 26.02.2007
- Corpus de 56 articles publiés en février-mars 2007 obtenus par une recherche en termes exacts sur Google (messages sanitaires publicité alimentaire).
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Discours minoritaires
Un quart des articles traite des messages sanitaires sans référence aux pré-tests. Leur contenu est alors soit strictement descriptif de la mesure ; soit axé sur l’encadrement de la publicité
et sur l’amélioration de la qualité nutritionnelle des produits
(engagements pris par des industriels et des distributeurs selon
un cahier des charges défini avec les pouvoirs publics).
L’information est parfois interprétée au regard de l’échéance
électorale des présidentielles . Quelques articles parlent d’empressement dicté par les élections (la publication d’un décret à
effet immédiat, peu conforme aux usages en droit, « surprend »
après trois ans - la Loi de santé publique date de 2004). Le papier d’opinion est rare, on registre alors un discours type « Xavier Bertrand à la solde de » (Nicolas Sarkozy et /ou l’ANIA). Le ton est alors ironique, la mesure éreintée, décrite comme une
manœuvre politique, un soutien et une « arme » apportés à un
candidat (discours notamment enregistré dans la PQR de Charentes, région d’un autre présidentiable, possédant une fonction
auto-définissante). Dans ce cas, il est à noter que la seule « concession » faite en faveur de l’adoption d’une telle mesure réside
dans le surpoids des enfants, tenu pour « une inquiétude bien
réelle » par opposition aux chiffres de l’obésité concernant l’ensemble de la population française.
Comparaison des modèles et citation des chiffres
Les dispositions adoptées par la Grande-Bretagne et une actualité concomitante - l’affaire du « petit Connor Mc Creddie » prédisposaient à la comparaison et peuvent avoir contribué à
donner du relief à l’information UFC-QC.
La comparaison des modèles réglementaires est généralement
associée à une demande d’encadrement de la publicité alimentaire dans les programmes pour enfants plus strict ou plus “sévère” (voire interdiction). Par rapport aux mesures prises en
Grande-Bretagne mais aussi au Québec, en Suède, en Norvège,
en Italie et en Allemagne, le dispositif français, situé entre les
pôles de la prohibition et de l’auto-régulation, apparaît comme
un compromis ou une demi-mesure (reprise du terme « mesurette »
employé par UFC-Que Choisir, mots et locutions synonymes, de
la critique du BVP et de l’auto-régulation).
La comparaison des modèles peut être associée à un jugement
défavorable - « Pour tous ceux-là [pour tous ces pays-là], la vulnérabilité des enfants ne fait pas de doute. » (conclusion Libération 270207)
- sauf comparaison (rare) des statistiques de la prévalence du
surpoids et de l’obésité dans plusieurs pays européens : une
journaliste du quotidien Le Monde (éd. du 14.03.07) fait ainsi
observer que si les mesures diffèrent, d’un pays à un autre, les
situations ne sont pas comparables. Et de rappeler le “triste record
britannique” en matière d’obésité et de surpoids. Ce type d’information tend à éclairer les difficultés d’encadrement de la publicité et à justifier une démarche plus progressive.
Lorsque les données françaises sont seules mentionnées (cas le
plus fréquent), on note régulièrement l’affirmation d’une « amplification » ou d’une « augmentation constante » du surpoids et
de l’obésité avec la citation des principaux chiffres de la dernière
enquête Obépi - laquelle concluait pourtant à une stabilisation
du surpoids et à l’amorce d’un ralentissement de la progression
de l’obésité en France.
Enfants et harcèlement nutritionnel
Comme de l’analyse précédente, l’idée que les jeunes sont essentiellement concernés ressort de l’examen de ces matériaux (on
note cependant la mention régulière de données relatives à la
prévalence du surpoids parmi les enfants issus des CSP défavorisées, ce qui ne s’observait pas auparavant) et l’information peut
s’entendre comme la reconnaissance juridique d’un lien entre
surpoids, obésité des jeunes et publicité. Cette observation peut
être rapprochée de l’un des résultats de l’étude UFC-Que Choisir : les adultes paraissent décoder moins facilement la publicité
N°1 - MAI 2007
que les jeunes - un résultat inexploité.
Sans faire les titres, enregistré dans le texte des articles, le concept de “harcèlement nutritionnel” apparaît dans des médias
revendiquant leur adhésion à un système de valeurs et de principes - l’éthique, la défense des travailleurs, la religion :
- « L’obligation faite aux annonceurs de diffuser, à partir du 1er mars, des
messages de prévention à la télévision dans les publicités semble ″impuissante
à protéger les enfants du harcèlement nutritionnel opéré par le marketing
agroalimentaire ″, selon les tests menés par l’UFC ». (Novethic, V.
Smée, “Publicité et obésité : l’industrie agroalimentaire face aux
pressions”, 27.02.07).
- « Inefficaces et complaisantes. C’est en ces termes que l’UFC-Que Choisir
qualifie les mesures avancées pour endiguer le harcèlement de l’industrie
agroalimentaire à l’égard des enfants. » (L’Humanité, M.-N. Bertrand,
« Les mots ne font pas le poids », 27.02.07).
- « Selon l’association, ″ces messages seront impuissants pour protéger les
enfants du harcèlement nutritionnel opéré par le marketing
agroalimentaire ″. » (La Croix, P. Bienvault, « La lutte contre l’obésité passe aussi par la publicité », 26.02.07).
A la source, le propos est introductif : « L'UFC-Que Choisir publie
aujourd'hui une étude en deux parties démontrant : - Que les nouveaux
messages sanitaires qui vont être insérés dans les publicités sont impuissants
à protéger les enfants du harcèlement nutritionnel opéré par le marketing
agroalimentaire, […] »5
Le concept de « harcèlement nutritionnel » est particulièrement
évocateur. Il renvoie à un savoir commun relatif au harcèlement
et à ses formes connues : le harcèlement moral et le harcèlement
sexuel. La pensée est aiguillée dans cette direction et, de ce point
de vue, parler de harcèlement nutritionnel opéré par le marketing alimentaire sur des enfants assimilerait presque la publicité à une pratique
perverse. Dès lors, quelles peuvent être les réactions? Le harcèlement, moral et sexuel, est un délit passible de sanctions pénales
(Loi de modernisation sociale ). La juridicisation serait-elle au
coeur du propos ? Peut-être. Implicitement, la notion de « harcèlement nutritionnel » suggère l’idée de délit. Dans la perspective de class actions à la française engagées devant les tribunaux
par des collectifs de consommateurs ou de personnes obèses
contre des industriels, cette notion pourrait être un puissant
levier. Et être utilisé comme tel, même si le retrait de la loi Breton de l’agenda parlementaire, en janvier dernier, a provisoirement écarté cette menace pour l’industrie agroalimentaire. Ce
point de vue éclaire la consigne de l’ANIA (insertion des messages préventifs plutôt que paiement de la taxe) et les engagements
pris en faveur de l’amélioration de la qualité nutritionnelle des
aliments fabriqués par les industriels.
Une obligation sous peine de taxe / message ou
taxe, deux options prévues par la loi
« On savait déjà que fumer tue » (Charente Libre) ; « on connaissait
l’abus d’alcool est dangereux pour la santé » surenchérissent l’AFP, Le
Figaro, Nord Eclair et L’Expansion, ce denier ajoutant « On
connaîtra bientôt : “Pour votre santé, mangez au moins cinq fruits et légumes par jour” ; “Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière”
; “Pour votre santé, évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé” ; “Pour
votre santé, évitez de grignoter entre les repas” ».
Les messages sanitaires intégrés aux publicités alimentaires,
peut-être parce qu’ils rappellent les mentions obligatoires de la Loi
Evin, sont dits « obligatoires » par les uns (Le Nouvel Observateur,
L’Express, MSN, Midi Libre, 20 Minutes, L’Usine Nouvelle,
e-sante.fr, ...) et présentés comme une option par d’autres : « A la
taxe, l’alimentaire préfère la mention sanitaire » titre ainsi Stratégies au
regard de la position adoptée par l’ANIA . L’alternative de la
taxe prévue par la loi, ailleurs, est interprétée comme une sanction : « Un message sanitaire va accompagner les publicités alimentaires
sous peine de taxe » annonce Libération. Le manquement serait
5
- Communiqué de presse UFC-Que Choisir, « Publicité et obésité infantile - Les messages sanitaires et l'autorégulation ne sont que des mesures dilatoires ! »,
26 février 2007, 2p.
CENTRE D’ETUDES TRANSDISCIPLINAIRES SOCIOLOGIE ANTHROPOLOGIE HISTOIRE"
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UNE LETTRE D’INFORMATION DU CETSAH!
passible de « sanctions » (Magazine Santé) ; « Toute entreprise qui ne
respecterait pas cette nouvelle règle devra s’acquitter d’une amende équivalente
à 1,5% de son budget publicitaire à l’Institut National de Prévention et
d’Education pour la Santé » (Santé Naturelle) ; d’une “taxe punitive”
(sous-titre Nord-Eclair).
Justifications les plus fréquentes de la mesure
L’un des principaux « effets » de cette mesure et de sa médiatisation réside dans l’affirmation d’un lien entre publicité et obésité (ainsi que, dans son sillage, entre publicité et surpoids en particulier parmi les enfants).
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L’obésité (en titre) : « Obésité : des messages dans des
publicités alimentaires » (France 2, France 3 infos) ;
« La lutte contre l’obésité passe aussi par la publicité » (La Croix) ; « La pub obligée de lutter contre
l’obésité » (20 Minutes) ; « La publicité contre l’obésité ? » (Challenges) ; « Publicité et obésité : l’industrie
agroalimentaire face aux pressions » (novethic.fr) ;
« Des messages anti-obésité dans les publicités alimentaires » (L’Expansion) ; « Obésité : les quatre messages
sanitaires arrivent sur les écrans publicitaires à partir
du 1er mars » (i-dietetique.com) ; « Lutte contre l’obésité : polémique sur l’efficacité des messages sanitaires » (Les Echos) ; ...
Le surpoids (en chapeau) : «Réglementation – Les
mesures pour lutter conte le surpoids des enfants varient selon les pays » (Le Figaro,…). Le surpoids des
enfants est en particulier médiatisé, notamment parmi
les enfants issus de CSP défavorisées (citation invariable, respectivement 1 enfant sur 6 et 1 enfant sur 4 :
AFP, Le Monde, La Croix, Nord-Eclair…).
Le rappel, variable, des chiffres de la dernière enquête
Obépi : « 20 millions de gens en surpoids, dont 5,9
millions d’obèses » (AFP, Libération,…) ; « On compterait ainsi 20 millions de gens en surpoids et 5,9 millions d’obèses » (RFI) ; « des chiffres français qui font
état de 20 millions de personnes en surpoids dont 9,5
millions d’obèses » (i-dietetique.com).
« L’augmentation » ou « l’amplification du phénomène » en France (formules courantes), inscrite ou non
dans le temps : « Cette mobilisation des pouvoirs publics s’explique par le poids que prend le problème de
l’obésité en France depuis 20 ans » (Usine Nouvelle).
La « Mauvaise foi des industriels » (20 Minutes) ; le
« (…) harcèlement nutritionnel opéré par le marketing
agroalimentaire » (La Croix) ; les « séduisantes et redoutables publicités de l’industrie agroalimentaire »
(L’Express) compte tenu de l’échec de l’autorégulation
(contrôle de la publicité par le BVP) ;
« Lutter contre la ‘’malbouffe’’ » (news.yahoo.com ;
sante-az.aufeminin.com) et contre « les risques pour la
santé d’une mauvaise nutrition » (L’Express).
N°1 - MAI 2007
CONSULTATION DES SOURCES - RAPPEL
Depuis le 1er mars, la publicité et la promotion pour certains
produits alimentaires et boissons (*) dans les médias comme
dans le hors-médias (TV, radio, presse écrite, internet, cinéma,
affichage, téléphone portable, prospectus et imprimés publipromotionnels...) sont accompagnées par l’un des quatre messages suivants, diffusés à part égale : « Pour votre santé, mangez
au moins cinq fruits et légumes par jour » ; « Pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière » ; « Pour votre santé, évitez de
manger trop gras, trop sucré, trop salé » ; « Pour votre santé, évitez
de grignoter entre les repas ». L’information du public est obligatoire, mais non nécessairement sous cette forme : plutôt que
l’insertion des messages, les annonceurs peuvent choisir d’acquitter une taxe correspondant à 1,5% du coût de de leurs
actions publicitaires ou promotionnelles. Cette taxe, collectée
au profit de l’INPES, s’entend comme une contribution financière à la politique d’information nutritionnelle menée par les
pouvoirs publics.
Deux pré-tests
Le 26 février dernier, UFC - Que Choisir présentait à la presse
les résultats d’une étude sur l’impact de l’un des messages
sanitaires. Réalisée pour le compte de l’association en 2006,
l’étude porte sur 704 personnes, dont la moitié d’enfants âgés
de 8 à 14 ans, ayant visionné sur un ordinateur portable un spot
publicitaire TV pour une marque de céréales (Lion) agrémenté
du message « Pour votre santé, évitez de manger trop gras, trop
sucré, trop salé ». Les sondés ont ensuite répondu à un questionnaire. Résultat, à la première diffusion du spot, 48% d’entre eux
n’avaient pas vu le message sanitaire. Ensuite, si une majorité
s’accorde à le trouver facile à lire (66% des adultes et 58% des
enfants), une partie des personnes interrogées ont éprouvé des
difficultés de compréhension et, ce, particulièrement parmi les
sondés appartenant aux CSP défavorisées et parmi les enfants
en surpoids. La mention a été comprise plutôt comme une
consigne nutritionnelle générale (58% des adultes et 57% des
enfants), que comme un message pratique destiné à apprécier le
produit présenté dans la publicité (40% des adultes ; 33% des
enfants). Dans ce cas, en % total des sondés, 26% des adultes et
19% des enfants ont pensé que le message signifiait : “Lion est
équilibré” (37% de sucre selon l’association) - la différence
entre adultes et enfants méritant d’être soulignée. Cela dit, la
finalité des messages sanitaires est-elle de désigner des produits “déséquilibrés” au public ? Et, en l’absence d’un tel jugement sur le produit, leur efficacité peut-elle être tenue pour
nulle ? Le test montre que 91% des personnes n’ont pas identifié ces céréales comme “déséquilibrées”, néanmoins 51% des
adultes et 49% des enfants ont compris qu’il fallait limiter sa
consommation de produits gras ou sucrés.
De son côté, le 28 février, le Ministre de la Santé et des Solidarités annonçait la publication au Journal Officiel de l’arrêté et du
décret introduisant ces messages sanitaires. Dans un communiqué à la presse, Xavier Bertrand promet un premier bilan dans
six mois et la modification régulière des messages « afin de
maintenir leur efficacité pédagogique ». En conclusion, le Ministre
fait état des résultats d’un pré-test réalisé par l’INPES ; selon lui
« Entre 90% et 98% des sondés approuvent les messages sanitaires
et les jugent clairs, faciles à comprendre et faciles à retenir ». Le prétest aurait été effectué auprès d’un millier de personnes.
Reproduction du graphique 5
extrait des résultats de l’étude
UFC - Que Choisir précitée
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(*) Sont concernés, les aliments manufacturés ou transformés ; les boissons avec du
sucre, un édulcorant de synthèse ou du sel
ajoutés. Les produits “bruts” (fruits et
légumes frais, viandes et poissons,...) ou
simplement emballés (oeufs en boîte, ...) et
les produits mis en conserve, surgelés, etc.,
sans aucun autre ajout que de l’eau ne sont
pas visés par la loi ; ni les boissons telles
que le café, le thé, les infusions ou encore le
lait et les jus de fruits sans ajouts.
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UNE LETTRE D’INFORMATION DU CETSAH!
N°1 - MAI 2007
INTERVIEW “SI J’ETAIS JOURNALISTE”
Q U I C K F A C T S
Michel Chauliac, responsable du Programme
National Nutrition Santé à la DGS
TV, JEUX VIDEO : + 46 CALORIES PAR HEURE
PASSEE DEVANT UN ECRAN /JOUR
Imaginez que vous soyez journaliste et que vous ayez un papier
à écrire sur l'obésité... Que diriez-vous ?
MC - Je parlerais de santé évidemment, mais en insistant vraiment sur l’urgence, sur la nécessité de ne pas repousser à 20 ans,
ni même à 5 ans le moment de s'y intéresser. Les Etats-Unis
pourraient servir de contrepoint et je dirais que, dans notre société, le risque d'arriver à une telle situation est réel. Ensuite,
même si ce n'est pas très original, l'un des points d'accroche
importants me semble être l'enfant. L'enfant en tant que tel,
mais aussi en tant que vecteur de l'amélioration de l'alimentation
au sein du groupe familial. Il me semble que si l'on veut toucher
l'adulte au sujet de son enfant, on doit pouvoir lui montrer que
ce n'est pas son enfant qui est seul en cause mais tout globalement : la fabrication de l'aliment, l'environnement… J'aurais
envie de dire « faites attention à votre environnement ! »,
d'amener chacun à prendre conscience des sollicitations permanentes qui s'exercent - pour des aliments éventuellement gratifiants mais dont les qualités nutritives ne sont pas toujours majeures. Après… Comment faire pour que le lecteur s'interroge
sur ses propres pratiques ? Comment traduire l'information de
façon à s'adresser à des personnes dont le niveau d'éducation
n'est pas nécessairement très élevé ? Je ne sais pas, je n'ai pas de
solution toute faite. C’est justement l’affaire de professionnels.
Vous parliez de sollicitations véhiculées par l'environnement.
Vous pensiez à la publicité ?
MC - Oui. Le PNNS a travaillé sur cette question. La publicité,
c'est le media qui donne, en peu de mots, le message le plus fort.
Et si lire un article demande un effort, regarder une pub n'en
demande aucun... Quant à savoir si la publicité est persuasive, le
prix de trente secondes au prime time de TFI est, me semble-t-il,
de l'ordre de 120 000€. Vers 20 heures, c'est de cet ordre-là. Les
annonceurs investiraient-ils de telles sommes si les bénéfices
escomptés n’étaient pas considérables ? Je me souviens de discussions avec les représentants de l'industrie objectant qu'aucun
lien entre publicité et obésité n'était prouvé, qu'aucune étude
scientifique ne permettait de dire « la publicité entraîne l'obésité ».
Je ne comprends pas ce discours-là : que les études le montrent
ou non, les industriels ne sont pas des philanthropes, que je sache.
Je ne veux bien sûr pas généraliser. De toute façon, ce sont des
agences qui conçoivent les publicités...
Des publicités, j'en vois un certain nombre parce que, dans le
cadre de certains financements, il faut demander l'avis du ministère sur la campagne. Alors nous disons « non » ou « il faut plutôt dire cela …».
Les industriels reçoivent des financements pour faire de la pub ?
MC - Pas les industriels : une filière. Certaines filières sont financées par l'Union Européenne et, à ce moment-là, il y a un avis
du ministère de la Santé qui est obligatoire.
Certaines publicités vont dans le sens des messages de santé
publique. Je pense notamment à une publicité pour de la charcuterie qui, en très peu de mots, fait passer un message positif
pour un acteur de santé car il dit : « moins de...». C'est le message que le PNNS veut faire passer : moins de gras, de sel, de
sucre ; avec son complément : "plus de..." fruits, légumes, féculents et céréales notamment complètes. C'est ainsi que le slogan
"manger varié et équilibré" peut prendre du sens. Reste la pratique, et on entre là dans un champ complexe...
Dès trois ans, plus un enfant passe de temps devant un écran, plus il
consomme de friandises et de boissons sucrées. C’est ce qu’affirme une
équipe de chercheurs de la Harvard Medical School (Boston) sur la base
d’une enquête réalisée par questionnaire auprès de 1203 enfants et de
leurs mères. Les résultats ont été obtenus après contrôle des biais éventuels (dont facteurs socio-démographiques et IMC des parents) ; 87%
des enfants sont issus d’une famille aux revenus supérieurs à 40 000$ /
an et 72% des mères possèdent au moins un college degree. En moyenne,
ces enfants passent 1,7h / jour devant un écran (tv, vidéo). “Pour chaque
heure quotidiennement passée devant un écran, nous observons une
augmentation de la consommation de friandises, boissons comprises, et
de l’apport calorique total (+ 46,3kcal/jour)” explique Sonia Miller, l’un
des co-auteurs de l’étude.
Source : American Heart Association, Meeting report, M. Gillman et S.
Miller, “Excessive TV viewing among young children is linked to poor
eating habits”, NR07-1124, 28 fév.2007, p.56.
IMAGE DU CORPS
Marcel Rufo (hôpital Cochin) et Jean-Pierre Poulain (Université de Toulouse-Montmirail) ont été nommés à la présidence du groupe de travail
“image du corps” constitué par les pouvoirs publics dans le cadre de
PNNS2. Le groupe réunit des scientifiques, deux ministères (Santé,
Culture), le BVP, des associations de consommateurs et de personnes
obèses, des annonceurs et des représentants d’agences de publicité. Tous
ont pour mission de plancher sur “l’impact de la publicité sur l’acceptation par la société des différentes corpulences et sur les comportements
nutritionnels individuels”.
Source : ministère de la Santé et des Solidarités
“DEREMBOURSEMENT”
Deux assureurs lâchent les consommateurs de produits anti-cholestérol.
Les AGF et la MAAF s’étaient engagés à un geste financier envers leurs
clients consommateurs de produits anti-cholestérol : les AGF remboursaient une “cure” de 3 mois de yaourts Danacol (Danone) et la MAAF
accordait une remise de 10% sur le montant de leur cotisation aux consommateurs de Fruit d’Or Pro-Activ (Unilever). La campagne n’ayant
drainé que 5 200 acheteurs de ces produits en 2006, les compagnies
viennent de mettre un terme à leur partenariat avec Danone et Unilever.
Lien source : http://www.agroalimentaire.fr
EMBONPOINT PROTECTEUR ?
Chez les personnes âgées de plus de 65 ans, celles dont l’IMC est compris entre 25 et 35, c’est-à-dire présentant du surpoids ou au premier
stade de l’obésité, bénéficient de l’espérance de vie la plus élevée (15
ans). L’embonpoint réduit le risque de fracture de la hanche et augmente la résistance en cas de pertes de poids consécutives à des maladies
telles que le cancer et la pneumonie. La conclusion selon laquelle l’embonpoint est bénéfique pour les aînés est toutefois provisoirement posée :
dans son éditorial du 23 avril, le JAMA s’interroge et envisage un “effet
de survivants en santé”.
Lien source : le Journal of the American Medical Association (JAMA)
PREVENTION
Selon une étude récemment publiée par le British Medical Journal
(BMJ), à long terme, manger moins salé réduit du quart le risque d’être
victime d'une maladie ou d’un accident cardiovasculaire.
Lien source : http://www.bmj.com/cgi/reprint/334/7599/885
Lettre d’information “Nutrition Obésité Médias”
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REDACTION
Valérie Adt, Claude Fischler, Vanessa Thomas
PUBLICATION
C e n t re d ’ E t u d e s Tr a n s d i s c i p l i n a i re s S o c i o l o g i e
A n t h ro p o l o g i e H i s t o i re ( C E T S A H )
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Avec le soutien de l’association ENSANS (Environnement, Santé et Société)
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