DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L`INFECTION A VIH EN AFRIQUE
Transcription
DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L`INFECTION A VIH EN AFRIQUE
DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L’INFECTION A VIH EN AFRIQUE Mise en place d’une nouvelle technique localement J.J. FLOCH* RESUME Une étude critique des diagnostics biologiques de l’infection par le VIH est présentée. La positivité doit être confirmée par au moins un couple de techniques différentes, car la réponse est lourde de conséquences. Voici maintenant près de 10 ans que l’infection à VIH déferle sur le monde et a embrasé l’Afrique. L’incubation très longue, le retard que mettent les manifestations cliniques à apparaître, un mal se propageant de façon logarithmique, nous donnent à penser que le pire reste à venir. Il y a eu beaucoup d’espoir lors de la découverte rapide du virus en 1982 par BARRE-SINOUSSI et coll. (1), deux ans après la 1ère description de la maladie, permettant la mise au point de techniques de dépistage. Tout le monde croyait dans l’imminence de la découverte du vaccin, mais il a fallu déchanter... Les difficultés sont de tous ordres avec un virus qui mute constamment, un génome extrêmement complexe pour un rétrovirus, des réactions immunitaires inefficaces, un modèle animal hypothétique (2). En attendant la solution vaccinale, avec des mesures prophylactiques irrégulièrement suivies, on s’oriente à nouveau vers la recherche de thérapeutiques plus efficientes. La démarche tend à devenir plus adaptive. Comme dans le traitement des affections néoplasiques, on s’oriente vers l’utilisation de polychimiothérapies s’attaquant à des maillons précis de la réplication virale et le plus précocement possible. On peut penser que ce seront des équipes multidisciplinaires qui vont mettre en oeuvre ces traitements, équipes au sein desquelles le biologiste aura un rôle essentiel. En Afrique, les difficultés en matière sanitaire sont connues, les possibilités d’y répondre variables. Nous allons tacher d’indiquer les examens à pratiquer en fonction des situations rencontrées. Parmi celles-ci, une d’entre elles sera soulignée, car elle nous a paru importante, c’est celles des enfants nés de mères dites “séro-positives”, c’est à dire infectées. Il faut se battre en Afrique avec acharnement pour que partout soient installés des postes de diagnostic, même si nous savons actuellement que les possibilités thérapeutiques ou vaccinales sont nulles (3). I - Nous voudrions tout d’abord rappeler quelques vérités essentielles concernant les virus VIH (VIH 1 et VIH 2). 1 - La morphologie telle qu’elle est connue grâce à la microscopie électronique nous permet de comprendre la structure antigénique et les réactions anticorpales. FIGURE 1 GP 20 GP 41 p 18 p 25 p 66/51 p 31 = Composants transcriptase inverse A.R.N. Core Enveloppe 2 - C’est un Rétrovirus, c’est à dire un virus qui grâce à une enzyme qui lui est bien particulière (la “TRANSCRIPTASE-INVERSE”) transmet son information génétique dans le sens opposé du sens habituel, en passant par une étape intermédiaire de synthèse d’ADN-proviral, capable de s’incorporer au génome de la cellule, qui ainsi ne s’en “débarrasse jamais”. 3 - Les cibles de ce rétrovirus sont représentées par toutes * Professeur Agrégé, Chef du Département de Biologie CHU Bujumbura (Burundi) Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10) 575 les cellules porteuses de la protéine CD 4, marqueur de ces cellules et site de liaison du virus à celles-ci (lymphocytes, macrophages, monocytes, certaines cellules nerveuses...). 4 - Pour comprendre les conséquences de l’infection par le VIH nous n’avons à notre disposition que les seuls éléments de l’observation humaine, en l’absence de modèles expérimentaux, même si ceux-ci commencent à être identifiés (chimpanzé, macaque) (2), et encore convient-il d’ajouter que notre recul est, somme toute, très court, au maximum 9 ans, même si au cours d’études rétrospectives antérieures à 1981, on a retrouvé dans les sérothèques des sérums positifs... 5 - Le rétrovirus provoque une réaction immunitaire très importante mais totalement inefficace, ce qui n’est pas non plus sans poser de problème de l’utilité de la vaccination. En vaccinant, ne va-t-on pas stimuler et accélérer le processus pathogène, en provoquant la synthèse d’anticorps facilitants, des processus de fusion, de recrutement de cellules infectées ? 6 - L’évolution clinique, du moins dans ses premières phases, est certes lente, avec une accélération indéniable en fin d’évolution, mais aussi avec une grande variabilité des allures évolutives observées, sans avoir d’explication plausible à proposer. Cette évolution est désormais considérée comme inexorable, aboutissant toujours au décès. 7 - Enfin, et nous pensons que ceci ne doit pas être perdu de vue de ceux qui manipulent le VIH, celui-ci n’est pas le virus hyper fragile que l’on croit. Il est certes normalement sensible aux radiations ultraviolettes et ionisantes, mais peut se conserver un certain temps, (quelques heures à quelques jours) dans le sang, le sérum séché, et même dans le matériel dentaire. Il mérite donc le respect et tout le matériel susceptible d’avoir été contaminé doit être manipulé avec précaution, désinfecté, stérilisé. II - Il nous faut aussi rappeler l’évolution classique de l’infection à VIH, ou “spectre” de la maladie. 1 - La primo-infection par le VIH Rarement patente (1 cas/5) se manifestant au plus par des signes d’affection virale et biologiquement par un syndrome mononucléosique, elle survient dans un délai de 1 mois après la contamination. Il faut aussi rappeler au sujet de la contamination qu’un seul contact suffit qui peut être le bon. Néanmoins il faut quand même beaucoup de malchance et “tomber” sur le lymphocyte hébergeant un virus en réplication active “réussie”. En général c’est la multiplication des contacts infectants qui favorise le succès Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10) J.J. FLOCH de la contamination. Cette période correspond à la phase virémique au cours de laquelle peu être isolé le virus, et où on peut détecter l’antigène, qui précède l’apparition des anticorps considérée comme la phase pré-sérologique. Elle a une durée moyenne de 8 à 12 semaines, mais on connaît des périodes plus longues, et ce qui est plus grave, quelques cas (rares, il est vrai) où le séro-conversion ne s’observe jamais. 2 - La période de latence clinique La séro-conversion a bien eu lieu, mais on n’observe pas la moindre manifestation clinique. Cette période a une durée indéterminée, variable, pouvant s’étendre sur plusieurs années. L’antigénémie à ce moment en général a disparu et le déficit immunitaire s’installe à bas bruit. 3 - Les états apparentés au SIDA Au bout d’un temps variable, apparaissent les premiers signes de la maladie : fièvre inexpliquée prolongée, amaigrissement, sueurs nocturnes profuses, diarrhées prolongées, signes appartenant à la “Définition de Bangui”. 4 - Le SIDA est l’extrémité finale du spectre Il est caractérisé par la survenue d’infections opportunistes ou de néoplasies traduisant un déficit profond de l’immunité cellulaire. En phase terminale les anticorps peuvent disparaître partiellement ou totalement, l’antigénémie peut réapparaître et on observe un effondrement des lymphocytes CD 4. FIGURE 2 - Courbe d’évolution Evolution clinique et biologique de l’infection par le VIH DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L'INFECTION A VIH EN AFRIQUE 576 III - Ces données établies, quels sont les pro b l è m e s posés au niveau du diagnostic biologique ? disposant d’un matériel pour effectuer les réactions immunoenzymatiques. Elle a suscité beaucoup d’espoir pour diverses raisons, mais elle a aussi déçu. C’est une technique qui ne donne pas satisfaction chez le nouveau-né. Chez l’adulte, on peut trouver l’antigène en phase précoce, présérologique, puis il disparaît pour ne réapparaître qu’en fin de maladie, quand la majorité des anticorps a disparu et pourrait donc être assimilé à un critère péjoratif. Mais la critique essentielle qu’on peut faire à cette technique est d’être défaillante dans au moins la moitié des cas où elle devrait être positive. Ainsi si on dépiste l’antigène en phase précoce, on peut affirmer l’infection, mais est on autorisé à nier cette infection dans le cas contraire ? En cas de négativité de l’antigénémie, est ce une défaillance technique ou n’est ce pas dans ces périodes pré et post-antigénémiques ? Ce test diagnostique qui aurait dû être un test de diagnostic précoce s’avère insuffisant et en outre est très onéreux (à titre indicatif, un nécessaire ou Kit de réactifs est facturé 9 000 FF). On ne peut donc pas non plus actuellement recommander ce test en routine en Afrique. On a remarqué enfin que sous l’action de l’A.Z.T., l’antigène pouvait primitivement diminuer voire disparaître, mais il réapparaît inexorablement avec ou sans A.Z.T. signant bien la phase finale de la maladie. A - Diagnostic Il ne faut pas compter sur les signes cliniques avant longtemps, après la contamination. Le diagnostic va donc nécessairement être biologique, utilisant des méthodes diverses, plus ou moins sophistiquées, plus ou moins réalisables en Afrique. Actuellement ce diagnostic repose surtout sur la mise en évidence d’anticorps spécifiques anti VIH. Si cette recherche est positive, le malade est considéré comme infecté et le laboratoire répond donc “séropositivité”. Dans les pays industrialisés, on n’admet plus maintenant que l’on puisse affirmer séro-positivité à l’aide d’une seule réaction sérologique, il faut au moins deux réactions différentes pour pouvoir le faire. Voyons maintenant les méthodes à notre disposition : 1 - La recherche du virus lui-même Sa mise en évidence peut se faire en microscopie électronique. La culture est possible sur cellules en lignée continue : T4 lymphoblastoïdes humaines (cellules CEM, H9, HUT 78). Cette recherche peut se faire à partir du sang, des ganglions... Elle nécessite un laboratoire très performant, bien équipé, avec toutes les précautions d’usage prises tant visà-vis du personnel qui travaille sur ce matériel potentiellement dangereux vis-à-vis des cultures cellulaires elles-mêmes dont on connaît la grande fragilité et la sensibilité aux contaminations bactériennes ou mycotiques. Ces conditions sont réalisées dans des enceintes de sécurité de type P3. Il est rare de trouver en Afrique des centres où sont réalisées ces conditions, mis à part quelques Centres de Recherches, Instituts Pasteur (Dakar, Bangui, Yaoundé). En outre le caractère très onéreux de cette méthode la met hors de portée de la grande majorité des laboratoires Africains. Il ne faut donc pas y songer actuellement en Afrique. 2 - La recherche des antigènes est théoriquement très séduisante. La technique de mise en évidence des antigènes (essentiellement la protéine P 25) utilise la méthode immuno-enzymatique qui est bien connue ; nous ne reviendrons pas sur son principe (Technique d’immunocapture d’Abott ou d’Institut Pasteur Production). Elle est délicate mais réalisable dans la majorité des laboratoires 3 - Le recherche de l’A.D.N. pro-viral ou test d’amplification génomique ou “Polymérase-Chain-Réaction” ou “P.C.R.” Cette technique a provoqué beaucoup d’engouement. Sa “relative simplicité” de réalisation a amené plusieurs équipes à tenter sa réalisation. Son principe même est séduisant puisque les insuffisances des méthodes précédentes peuvent être liées au mode de réplication du virus, avec une possible phase d’éclipse et surtout la nécessité d’une intégration au génome cellulaire sans que le virus ou ses antigènes ne s’expriment forcément en permanence. Il était donc extrêmement tentant d’aller “dénicher” le provirus là où il se cachait, c’est à dire au sein même du génome de la cellule infectée. Elle était donc particulièrement intéressante chez les nouveaux-nés. Mais à la relative facilité d’exécution technique, correspondent des difficultés croissantes d’interprétation. En outre son coût est prohibitif (5 000 FF par réaction). Nous voyons donc que toutes les méthodes cherchant à mettre en évidence, le virus, le provirus ou les constituants du virus (antigènes) sont toutes de réalisation délicate et onéreuses, peu réalisables dans la majorité des laboratoires Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10) J.J. FLOCH 577 africains. Par contre les laboratoires de référence peuvent mettre à la disposition des laboratoires d’analyse des techniques plus simples utilisant les antigènes pour rechercher les anticorps témoins de l’infection. 4 - La recherche des anticorps La séropositivité ou présence des anticorps spécifiques anti VIH dans le sérum témoigne d’une infection évolutive. En 1990, il n’est plus guère tolérable de porter un diagnostic de cette importance sans avoir utilisé deux méthodes sérologiques différentes, d’autant que de nombreuses méthodes ont été mises à la disposition des laboratoires. a) Les méthodes Immunoenzymatiques ou “ELISA” Le principe de ces méthodes est parfaitement connu. Ce sont les méthodes qui ont été utilisées les premières. Leur principe consiste à “piéger” les anticorps spécifiques du sérum par les antigènes du VIH fixés au fond des cupules par le fabriquant et à utiliser un système enzymatique révélateur de cette réaction antigène-anticorps. Il existe actuellement de nombreuses techniques commercialisées et de valeur sensiblement égale. On peut par exemple utiliser la technique ELAVIA 1 (destinée au dépistage des anticorps anti VIH 1), ELAVIA 2 (destinée au dépistage des anticorps anti VIH 2) ou même ELAVIA-MIXT (destinée à rechercher en un seul temps les deux types d’anticorps), de l’Institut Pasteur Production, qui donnent toute satisfaction et en donnant assez peu de faux séro-positifs (A Bujumbara nous avons dépisté environ 1 % de faux séro-positifs sur 6000 examens), témoignant d’une très grande sensibilité et fiabilité de ces réactions. Ces tests constituent ce que l’on appelle communément les tests de première génération. Cet excès de sensibilité impose néanmoins la réalisation de tests dits de “confirmation” que nous allons maintenant étudier. b) Les méthodes d’”immuno-blotting” Ce sont les méthodes de confirmation qui sont généralement choisies et qui sont les méthodes de référence. Elles sont commercialisées sous diverses appellations : - Western-Blot (Du Pont de Nemours) - LAV-BLOT (1 et 2) (Institut Pasteur Production) - Page-blot (Genetic systems), etc... Leur principe est bien connu. Il consiste à partir du virus VIH purifié et inactivé, à fractionner ses protéines spécifiques et à les faire migrer par électrophorèse en fonction de Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10) leur poids moléculaire, puis à les transférer par incubation électrophorétique du gel à la bandelette de nitro-cellulose. Ces bandelettes sont ensuite incubées individuellement avec des échantillons de sérum ou de plasma. Les anticorps anti-VIH éventuellement présents dans un échantillon vont se fixer aux antigènes viraux liés au support de nitrocellulose donnant lieu à une réaction antigène-anticorps spécifique visualisée par coloration. On voit ainsi apparaître sur la bandelette les bandes transversales correspondant à une ou plusieurs protéines (P) ou à des glycoprotéines (GP) du VIH : P 17, P 24, P 31, GP 41, P 51, P 55, P 66, GP 120, GP 160 (figure 3). FIGURE 3 Western Blot VIH 1 GR 160 GR 120 P 68 P 55 GP 41 P 34 P 25 P 18 c) Autre technique de confirmation ; la Radio-Immuno. Précipitation (RIPA). C’est une technique lourde nécessitant la manipulation de radioéléments, qui n’est donc pas à la portée de la majorité des laboratoires. En outre, c’est une méthode très onéreuse, exigeant des conditions de sécurité bien particulières. Exceptionnels sont les laboratoires capables de la réaliser. DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L'INFECTION A VIH EN AFRIQUE d) Les techniques de seconde génération utilisant comme antigène des protéines “recombinantes” obtenues par génie génétique. Il s’agit en général de tests de dépistage rapide comme par exemple l’HIV-CHEK, réalisable en 5 minutes. Les tests demandent néanmoins à être confirmés par les techniques classiques (ELISA, WESTERN-BLOT). Leur intérêt est grand puisqu’ils ne nécessitent pas de disposer de matériel lourd, l’apprentissage en est rapide et ils peuvent être utilisés dans les situations d’urgences (avant une transfusion par exemple). Dans les pays d’endémie, à situation économique difficile, disposant de peu de moyens, ils représentent une solution comme nous avons eu l’occasion de l’indiquer (4) et leur généralisation devait être préconisée en Afrique. 5 - Le test de production d’anticorps anti-VIH par les cellules circulantes (lymphocytes) on test I.V.A.P., préconisé en particulier par le Dr VENDRELL de la Faculté de Médecine de Montpellier. Le principe de cette technique est très intéressant, il consiste à utiliser un prélèvement du sang frais recueilli sur anticoagulant (héparine) par le procédé vacutainer. Le sang doit être traité dans la journée de son prélèvement, jamais au-delà. On sépare les lymphocytes sur gradient de Ficoll au cours d’une centrifugation douce, ne dépassant pas 500 G. Les lymphocytes isolés sont soigneusement lavés en utilisant comme solution de lavage le liquide de Hanks et ce, plusieurs fois de telle sorte qu’ils soient totalement débarrassés de tous les anticorps qui auraient pu adhérer à la surface des cellules. Enfin les lymphocytes sont mis en culture en milieu (RPMI + sérum foetal de veau) pendant au moins 6 jours, l’idéal étant d’atteindre 10 jours, à l’étuve à 37° C, en atmosphère enrichie de 5 % de CO2, saturée d’eau. Au bout de ce délai, on recueille les surnageants des cellules en culture dans lesquels on recherche la production d’anticorps spécifiques par ces cellules par les techniques ELISA et WESTERN-BLOT. Il semble bien démontré maintenant que seuls les sujets infectés possèdent des cellules capables de sécréter ces anticorps spécifiques anti-VIH. Toutes les manipulations doivent être rigoureusement stériles, effectuées sous hotte à flux laminaire vertical, en s’aidant d’une pipette automatique à commande électrique ou “Pipet-Aid”. A partit du culot cellulaire on peut faire en parallèle la technique d’amplification génomique ou PCR voire la culture virale. Cette technique, certes est délicate, ne peut pas être réalisée n’importe où. Elle nécessite un équipement minimal (hotte à flux laminaire, étuve à CO2, 580 centrifugeuse réfrigérée...), mais on remarque qu’elle n’utilise pas de radio-éléments. Elle a été réalisée pour la première fois en Afrique, en décembre 1989, dans le laboratoire de biologie du CHU de Bujumbura et avec succès. Elle est particulièrement indiquée pour les nouveaux-nés de mères séro-positives dont ils ont reçu passivement les anticorps et chez qui on cherche à montrer l’existence ou non de l’infection virale, pour qui la recherche de l’antigène est non satisfaisante et pour qui la technique d’amplification génomique est d’interprétation délicate. 6 - Test de confirmation par immunofluorescence Cette technique utilise une culture cellulaire inactivée. Elle nécessite un microscope à fluorescence. Elle reste délicate d’interprétation et de réalisation et semble maintenant définitivement supplantée par les techniques d’immunoblotting à titre de confirmation. 7 - La numération des lymphocytes est de réalisation facile, mais insuffisante. Le décompte des différents types lymphocytaires avec établissement du rapport CD 4/CD 8 est beaucoup plus délicat et exige généralement une technique en fluorescence. Elle est remplacée dans les grands centres bien équipés par la cytométrie de flux, irréalisable dans la majorité des hôpitaux africains car il s’agit d’un matériel sophistiqué et onéreux. 8 - La recherche de la Beta-microglobuline ne présente pas un intérêt fondamental. B - Etude de cas particuliers 1 - La séro conversion Elle peut être affirmée dès que sont apparues en WesternBlot, les bandes correspondant à la GP 160 et la P 25 même si celles ci sont isolées. Ce sont les premières bandes à apparaître et on peut affirmer que la présence de la seule bande GP 160 signe la séro-conversion. Les autres bandes se complètent généralement dans des semaines qui suivent. Le GP 160 persiste d’un bout à l’autre de l’infection. 2 - Malades “SIDA” Les différents profils de W.B. qui peuvent être observés au cours du SIDA sont représentés dans le tableau ci-dessous, sachant que le nombre de croix correspond au “score d’intensité” de la réaction par rapport au témoin a une valeur Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10) J.J. FLOCH 581 quantitative certaine. On voit les bandes disparaître au cours de l’évolution, les unes après les autres sauf la GP 160 qui persiste jusqu’au terme ultime de la maladie et doit être considérée comme le signe biologique pathognomonique de l’infection à VIH. TABLEAU 1 Evolution du W.B. GP 160 GP 120 GP 41 P 68 P 34 P 55 P 25 ASYMPTOM. 4+ 4+ 4+ 4+ 4+ 4+ ARC 4+ 4+ 4+ 4+ 2+ 2+ 4+ + OU 4+ 4+ 4+ 2+ 2+ 2+ +/- EVOLUTION 4+ 4+ 4+ + + - - 4+ 4+ 4+ - - - - 4+ - - - - - - 3 - Nouveaux-nés nés des mères séro-positives Il y a transfert passif d’anticorps anti VIH dans 95 % des cas au cours de la grossesse, ce qui ne signifie pas que l’enfant soit infecté et c’est ce qu’il va falloir confirmer ou infirmer. Malheureusement on ne sait pas reconnaître en sérologie les anticorps transmis passivement de ceux synthétisés activement par un enfant infecté par le virus. On ne peut pas compter sur la présence d’antigène ou non, aussi jusqu’ici il fallait surveiller ces enfants et observer la disparition des anticorps en 15 à 18 mois pour pouvoir affirmer qu’ils n’étaient pas infectés. La PCR a suscité des espoirs, mais ses difficultés d’interprétation sont trop grandes et elle ne peut pas être appliquée en routine. La technique IVAP de sécrétion active des anticorps par les lymphocytes en culture semble prometteuse et a le mérite d’être applicable en Afrique pourvu que le laboratoire soit suffisamment équipé, c’est ce que nous avons prouvé au CHU de Bujumbura. 4 - Les particularités de bandes isolées S’il s’agit de la présence de la bande GP 160, on peut affirmer sans hésiter que la personne est séropositive donc infectée. S’il s’agit de bandes isolées comme la P 18 ou la P 25 le doute est autorisé, il est indispensable de suivre ces personnes dans le temps, afin d’observer l’apparition de nouvelles bandes, en particulier la GP 160. Bandes isolées P 18, P 25 chez les nouveaux-nés notamment : dans ce cas, on est perplexe et il est indispensable de recourir à d’autres méthodes comme la P.C.R. ou l’I.V.A.P. Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10) C - Choix des méthodes 1 - Dans les centres hospitaliers peu spécialisés ou modestement équipés, il faut utiliser des tests simples et fiables, ne nécessitant pas un apprentissage long et un matériel lourd, exemples : - HIV-CHEK de Du Pont de Nemours - PEPTI-LAV 1.2 de Institut Pasteur Production, de réalisation un peu plus longue que le test précédent (1 h 30) mais permettant aussi de dépister simultanément VIH 1 et VIH 2, ce qui est intéressant en Afrique de l’Ouest. 2 - Dans les centres les mieux équipés, il ne faut plus se contenter d’une seule réaction. En situation d’urgence (avant une transfusion sanguine par exemple) : HIV CHEK/ou Pepti-LAV 1.2. Ces tests doivent être confirmés par les tests classiques (ELISA, W.B.). En routine : une technique ELISA (ELAVIA de l’I.P. P.) devant être confirmée par une technique d’immuno-blotting (Westernblot, ou LAV-BLOT). Chez les nouveaux-nés : technique ELISA, technique d’immuno-blotting, technique IVAP. 3 - Dans les centres de recherche, viennent s’ajouter les techniques plus sophistiquées : PCR, culture de virus, etc... sachant le coût approximatif de toutes ces techniques : - HIV-CHEK 20 FF - ELAVIA 20 FF - WB 200 FF - IVAP 300 à 400 FF - PCR 5 000 FF - Culture de virus 10 000 FF 4 - Enfin sur le terrain et lors d’enquêtes épidémiologiques, soulignons l’intérêt du prélèvement sur papier buvard (comme dans les enquêtes “trypanosomiase”). Nous avons appliqué cette méthode alors de l’enquête nationale de séroprévalence du VIH au Burundi sur plus de 6 000 prélèvements et elle nous a donné toute satisfaction, comme elle en donne aussi aux médecins éloignés d’un laboratoire hospitalier, qui lors d’une consultation peuvent effectuer ce prélèvement et l’adresser d’en différé au laboratoire, à condition de le garder au réfrigérateur. Le principe de cette technique, rappelons le brièvement, consiste à faire une scarification au bout du doigt avec un vaccinostyle et à aspirer le sang par un papier-buvard calibré. On laisse sécher le sang, et on adresse le prélèvement au labo- DIAGNOSTIC BIOLOGIQUE DE L'INFECTION A VIH EN AFRIQUE 582 ratoire. Puis est effectuée une élution d’une nuit et à partir de l’eluat peuvent être réalisées les techniques ELISA et immuno-blotting. prélèvement (papier buvard) que de l’exécution technique (HIV-CHEK). Mais chaque fois que cela est possible il faut asseoir son diagnostic sur un couple de techniques différentes, car la réponse est lourde de conséquences. Il est également important de faire un suivi immunologique des patients en collationnant les bandelettes d’immunoblotting par exemple. Enfin chez le nouveau-né, la technique IVAP peut être préconisée en Afrique où dans les principaux centres elle doit être réalisable. CONCLUSION Les difficultés du diagnostic d’infection à VIH en Afrique sont variables d’un endroit à l’autre. Actuellement on dispose de techniques relativement simples tant au niveau du BIBLIOGRAPHIE 1 - F. BARRE SINOUSSI et coll. - “Isolation of a lymphotropic Retrovirus from a patient at Risk for Acquired Immuno Deficiency Syndrome (AIDS”. Science 20 may 1983, vol. 220 p. 868-871. 2 - D. DORMONT, J. LIVARTOWSKI - “Les modèles animaux du SIDA et des infections à VIH”. Retrovirus. Septembre 1989, TII n°4 p. 95-105. 3 - D.DORMONT et coll. - “La thérapeutique anti rétrovirale du VIH : données fondamentales actuelles”. Retrovirus, Septembre 1988 TI n° p. 25-35. 4 - J.J. FLOCH, R. LAROCHE “HIV CHEK. Une solution pour les pays à infrastructure sanitaire modeste”. Médecine et Armées 1989. 5 - L. MONTAGNIER et coll. - SIDA et infections à VIH. Un volume. Librairie Flammarion/Médecine Sciences 1989. 6 - J.P. VENDRELL et coll. - “Mise en évidence de la sécrétion d’anticorps à spécificité HIV 1 pour les cellules mononuclées circulantes de sujets infectés par les virus VIH 1”. Retrovirus, Septembre 1988, TI n°1 p. 39-40. 1ères JOURNEES FRANCO-AFRICAINES D'UROLOGIE DAKAR 30 Novembre - 3 Décembre - 8 Décembre 1990 SOUS L'EGIDE DE L'ASSOCIATION FRANÇAISE D'UROLOGIE PREDIDENT DES JOURNEES Professeur Adolphe STEG (Paris - Cochin) SECRETARIAT SCIENTIFIQUE ET D'ORGANISATION Professeur Aristide MENSAH (Dakar Le Dantec) Docteur Guy VALLANCIEN (Paris - Choisy) THEMES PRINCIPAUX : Adénomes et cancers de la prostate - La prévention antibiotique dans la chirurgie urologique - Le point sur la bilharziose urinaire en 1990 Le traitement des rétrécissements de l'urètre - Quoi de neuf en 1990 ? - Plus des communications libres... Médecine d'Afrique Noire : 1990, 37 (10)