Les compteurs en réseau de distribution d`eau potable

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Les compteurs en réseau de distribution d`eau potable
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CVC N ° 853 MAI / JUIN
COORDONNÉ PAR FRANCK BÉNASSIS
2008
Vieillissement et qualité
La question du renouvellement
Les compteurs en réseau
de distribution d’eau potable
par Laurent Kiéné
et Philippe Harmant, Aquafluence
Les compteurs d’eau neufs doivent répondre à des critères métrologiques précis et sont réglementés par le décret
français 76-130 du 29 janvier 1976 et la norme NF ISO 4064. Le décret 2001-387 du 3 mai 2001, introduit la notion
de contrôle des compteurs en service afin de garantir une bonne qualité métrologique des parcs existants. En plus
du respect des textes réglementaires, le gestionnaire d’un parc de compteur doit s’assurer du rendement global de
comptage afin de ne pas affecter le chiffre d’affaire de son activité. Le suivi du rendement du parc compteur, nécessite
une approche métrologique complétée par une étude détaillée des habitudes de consommation de ses clients.
P
lusieurs types de compteurs mécaniques sont utilisés pour comptabiliser
les consommations d’eau potable :
compteurs à jet unique, compteurs à jets
multiples et compteurs volumétriques. Les
performances de ces compteurs sont spécifiées dans la norme NF ISO 4064 et sont
réglementés par le décret français 76-130 du
29 janvier 1976. Les textes réglementaires
et normatifs sont relatifs au comptage de
l’eau froide (< 30°C) et définissent en particulier la classe (A, B ou C ; C étant la plus précise) et les erreurs maximales tolérées (EMT)
de ces instruments de mesure. Il existe également une classe D qui concerne le comptage des eaux chaudes (entre 30 et 90 °C).
Tableau 1 Classification des compteurs neufs en fonction des Erreurs
Moyennes Tolérées (EMT) pour différents débits caractéristiques
<15 m3/h
Qn
> 15 m3/h
Classe
Qmin
Qt
Qmin
Qt
A
0,04 . Qn
0,10 . Qn
0,08 . Qn
0,30 . Qn
B
0,02 . Qn
0,08 . Qn
0,03 . Qn
0,20 . Qn
C
0,010 . Qn
0,015 . Qn
0,06 . Qn
0,015 . Qn
Compteur (Qn = 1,5 m3/h)
Erreurs moyennes tolérées ; classe C
% erreur
8
6
4
Les classes de compteurs
Les classes sont définies par des débits
caractéristiques > Tableau 1 :
- Qmax : débit maximum pour lequel le compteur doit être capable de fonctionner pendant un temps limité, sans détérioration et
en respectant les EMT et sans que ne soit
dépassée la valeur maximale de la perte de
pression provoquée par la présence du
compteur dans la conduite d’eau,
- Qn : débit nominal pour lequel le compteur
doit pouvoir fonctionner en utilisation normale permanente ou intermittente (Qn=
Qmax/2),
- Qt (débit de transition qui sépare deux
domaines de débits pour lesquels les EMT
sont différentes)
- Qmin (débit minimum est le débit à partir
duquel, le compteur doit respecter l’EMT
fixée pour les débits inférieurs à Qt).
Le décret 2001-387 du 3 mai 2001, relatif au
contrôle des instruments de mesure,
apporte un complément en matière d’exigence métrologique applicable aux comp-
2
0
-2
-4
-6
-8
1
10
100
1000
Débit (l/h)
Figure 1 Exemple de courbe de précision d’un compteur neuf de classe C et de Qn 1,5 m3/h.
teurs d’eau, en introduisant la notion de
vérification périodique.
Pour les compteurs en fonctionnement, les
tolérances sont supérieures à celles des
compteurs neufs : pour les débits élevés,
les tolérances passent de 2 % (compteur
neuf) à 4 % (compteur en fonctionnement).
Pour le comptage de l’eau potable, les compteurs les plus utilisés sont de type volumétrique et de classe C. Les compteurs sont désignés par leur diamètre, par la valeur de Qn. la
Figure 1 donne un exemple de courbe de précision d’un compteur neuf de classe C et de
débit nominal 1,5 m3/h. Sur cet exemple typique, la courbe de précision est encadrée par
les EMT. Pour les débits inférieurs à Qmin,
l’erreur augmente de façon importante (Qmin
= 15 m3/h dans l’exemple présenté).
Vieillissement et qualité
En fonctionnement, les compteurs vieillissent et la qualité de leur mesure s’altère graduellement. L’altération de la mesure s’explique par différents facteurs et en particulier : blocage en raison de la présence de particules, alourdissement des pièces mobiles
DOSSIER
CVC N ° 853 MAI / JUIN
CO M P TAG E E T M E SU RE S DE S É NE RG IE S
2008
par accumulation de tartre et de dépôts biologiques. Le vieillissement des compteurs
conduit très généralement à un sous comptage plus ou moins marqué selon le débit
> Figure 2. L’impact sur les débits élevés peut
être modéré, mais il peut être très marqué
sur les faibles débits. L’impact sur le débit
de démarrage du compteur est généralement très important (le compteur n’est plus
capable d’enregistrer les très faibles débits).
Pour estimer l’impact de l’erreur de comptage sur la facture d’eau il est nécessaire
de connaître les spectres > Exemple figure 3
de consommation afin de déterminer une
Erreur Moyenne Pondérée (EMP) : (…)
45
Erreur de mesure
4%
0%
Cpt neuf
-4%
Cpt en service
-8%
- 12 %
- 16 %
- 20 %
- 24 %
10
1
100
1000
10000
Débit (l/h)
Figure 2 Exemple de vieillissement d’un compteur mécanique.
Le sous-comptage se traduit directement
par une perte de chiffre d’affaires qui ne
peut donc pas être appréhendé par une
approche purement métrologique. Celle-ci
doit être complétée par une étude la plus
détaillée possible des consommations.
Pourcentage de la consommation
50 %
45 %
Maison
individuelle
40 %
35 %
La question du renouvellement
30 %
C’est l’EMP qui conditionne l’intérêt économique de renouveler un compteur après un
certain nombre d’années de fonctionnement. La stratégie de renouvellement
dépendra donc de la bonne connaissance à
la fois des courbes de vieillissement et des
habitudes de consommation des clients. Il
est en particulier important de disposer de
ces données pour les faibles débits qui peuvent représenter un pourcentage non négligeable des consommations. L’évolution des
débits de démarrage et des pourcentages
de compteurs bloqués pourra également
être un facteur déterminant.
Pour ce qui est des compteurs domestiques
de petits diamètres (généralement 15 mm),
l’approche ne peut être que statistique :
> prélèvement de compteurs de mêmes
caractéristiques et d’âge variable,
> détermination des courbes de précision
moyennes pour différents temps de fonctionnement,
> établissement des spectres de consommation (par catégorie de client)
Le vieillissement des compteurs est étroitement dépendant des conditions de son
environnement et en particulier de la qualité de l’eau. La détermination des courbes
de précision doit être réalisée site par site,
25 %
Immeuble
50 logements
20 %
15 %
10 %
5%
0%
3
5.5
11
15
22.5 40
80
150 300 700 900 1350 2375 2900 4750
Débits (l/h)
Figure 3 Exemple de spectre de consommations domestiques.
car les résultats ne sont pas transposables
d’un site à un autre.
L’établissement de spectres de consommation nécessite de réaliser des études spécifiques ciblées car les seules données clients
ne donnent pas suffisamment d’information
(relèves effectuées le plus souvent annuellement, et en conséquence, seule la consommation moyenne annuelle est connue).
Le recours à la télérelève est susceptible de
donner accès à des informations plus fines
sur les habitudes de consommation.
Pour les compteurs de plus grand diamètre, l’approche mérite d’être individualisée
dans la mesure où ces compteurs représentent généralement la plus grande partie des
ventes (en première approche, il est communément admis que dans un parc où ils
représentent moins de 20 % des clients, les
compteurs de grand diamètre - industriels
ou commerciaux - représente plus de 80 %
des volumes facturés).
La connaissance de ces données est nécessaire pour développer une politique de
renouvellement des compteurs. Le renouvellement devant être programmé avant
que les pertes d’exploitations induites par
le sous comptage, n’excèdent le coût de
renouvellement.
Références
> NF ISO 4064, Mesurage du débit d’eau dans les
conduites fermées - Compteurs d’eau potable froide
> Décret n° 76-130 du 29 janvier 1976 réglementant
la catégorie d’instruments de mesure : compteurs
d’eau froide
> Décret no 2001-387 du 3 mai 2001 relatif au contrôle
des instruments de mesure
> A. Pasanisi et E. Parent, Modélisation bayésienne du
vieillissement des compteurs d’eau par mélange de
classes d’appareils de différents états de dégradation.
Revue de Statistique Appliquée, 52 no. 1 (2004), p. 39-65)