Article La Patate douce, une culture tropicale pour diversifier sa
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Article La Patate douce, une culture tropicale pour diversifier sa
L’auxiliaire bio N°30 - Mars 15 Page 9 Maraîchage La Patate douce, une culture tropicale pour diversifier sa gamme On constate ces dernières années que la patate douce attire les consommateurs qui recherchent de nouvelles saveurs, cette tendance est confirmée aussi bien en bio qu’en conventionnel. Sa culture en France est peu développée car c’est une plante tropicale qui est très sensible au froid. Toutefois il est possible d’obtenir de bons rendements sous nos latitudes lorsque l’on maitrise cette culture, c’est également un produit peu connu qui permet de diversifier sa production. La patate douce, malgré son nom, n’est pas de la famille des solanacées comme la pomme de terre. Elle fait partie des convolvulacées comme le liseron et est originaire d’Amérique du sud, un autre avantage pour cette culture : elle ne fait pas partie des familles de plantes généralement cultivées en maraîchage ! Article extrait du TAUPIN DU MARAICHER, cahier technique de la CAB Pays de la Loire (4 numéros par an). Inscription annuelle auprès de la CAB. Les fournisseurs Le semencier Voltz propose des plants de patate douce livrés en minimottes sur plaque 84 de 3,5 cm de diamètre à 70ct/l’unité. Actuellement il n’y a pas de certification biologique, les plants produits sont non traités. (Variétés produites : Beauregard, Evangeline, Bonita, Murazaki). Contactez votre organisme certificateur pour connaître leur position par rapport aux dérogations pour cette culture. Autoproduction Obtenir des plants Quelles variétés choisir ? Il existe un très grand nombre de variétés de patate douce à travers le monde. Cependant un petit nombre d’entre elles sont adaptées à la culture en France. Ces variétés proviennent souvent des Etats-Unis ou du Canada où la culture de la patate douce est plus développée. Un essai variétal du GRAB à mis en évidence 2 variétés intéressante : Couleurs chair Kg / m² Beauregard Voltz Orange 2,88 479 Bonita Voltz Blanc crème 3 487 A noter que la variété Beauregard sert de référence actuellement, cette variété fait partie du domaine publique ce qui permet sa multiplication par tout un chacun. Les conditions nécessaires : Les boutures de patates douces sont produites végétativement. Pour cela les tubercules doivent être placés dans des conditions de températures et d’hygrométrie bien précises. Les températures du sol doivent être aux alentours de 25°C et l’humidité relative doit atteindre les 80% minimum. Ces conditions sont très favorables aux maladies fongiques, il faut donc bien être vigilant à utiliser des tubercules et un substrat sain. La pré-germination : La pré-germination est utilisée par certains producteurs. Les tubercules sont placés dans une humidité saturante à 25°C dans un endroit ventilé (sous une serre par exemple) pendant Les tubercules bio vendus pour la 2 à 4 semaines. Ce procédé peut être consommation humaine peuvent effectué en mars avant d’installer les être utilisés pour produire des bou- tubercules pour la production de tures, c’est actuellement une des boutures. Durant cette période le seules façons de produire ses plants. tubercule va se charger en oxygène Plusieurs inconvénients ressortent de et les rendements s’en trouveront améliorés. ce système : Poids tubercules vendables (g) Variété fournisseur agroBio D’autres fournisseurs proposent des ventes de tubercules pour ensuite réaliser ses propres bouturages. Cependant ce sont souvent des jardineries qui vendent aux particuliers, les prix ne sont donc pas toujours adaptés pour les professionnels (5-6 € pour un tubercule). Il est possible de produire ses propres boutures, pour cela un minimum de matériel et de temps est à mobiliser. -- On ignore la provenance précise des tubercules (on connaît la zone approximative USA, Israël…) -- On ignore souvent la variété -- Les tubercules sont sensibles au pourrissement 2 techniques de production de boutures : • Production en couche : Loïc de Barmon du Jardin de l’avenir : « Produire ses propres boutures donne des résultats très variables, certains pieds donne peu, d’autre pas du tout et d’autres pourrissent. C’est une réelle difficulté. » 12 bis, rue Saint Pierre - 79500 MELLE Tél. 05 49 29 17 17 - Fax. 05 49 29 17 18 www.penser-bio.fr L’auxiliaire bio N°30 - Mars 15 Page 10 Maraîchage Cette technique demande un certain investissement de temps et de moyens. Cependant elle permet théoriquement d’obtenir une certaine homogénéité dans la production de boutures. Le P17 permet d’éviter aux racines de s’enrouler autour du câble chauffant. La bâche noire permet de maintenir une humidité saturante, elle sera enlevé dès l’apparition des premieres boutures. La température doit être maintenue aux alentours des 25°C. Une fertilisation de la couche supérieure avec un amendement 10/10/10 est à prévoir. 3 récoltes peuvent être réalisées avec 20 ou 30 pousses par tubercule au total. • Production sur nappe horticole : Les tubercules sont placés dans une terrine et recouverts au 2/3 de substrat drainant (terreau, mélange divers…), celui-ci est maintenu humide puis les terrines sont placées sur une nappe chauffante à une température de 25°C. Mise en place de la culture au champ Type de sol : sol drainant pour éviter les pourritures et déformations, maintenu humide. La patate douce tolère des pH faible, de 5,5 à 6,5. Il faut éviter d’avoir trop de matière organique dans le sol sous peine de diminuer les rendements. Climat : La patate douce a besoin de 120 jours de période « chaude » pour produire des tubercules récoltables. La température idéale se situe autour des 25°C. Le développement sera réduit pour des températures dépassant les 30°C. Un point très important est la sensibilité de cette culture au froid. Si les températures descendent aux alentours de 15°C (sol) la plante ne pousse plus. En dessous de 10°C la La récolte des boutures à lieu lorsque les tiges atteignent 20 cm (8 feuilles environ) pour une plantation en pleine terre. Le matériel de récolte doit être bien propre pour éviter les risques de maladies. On peut également récolter les boutures à des stades un peu plus jeunes et les placer en godets, les plants seront un peu plus vigoureux et la transplantation plus aisée mais cette technique demande aussi un peu plus de temps. agroBio plante meurt et les tubercules seront endommagés et non commercialisables. Fertilité : comme tous les tubercules, la patate douce est exigeante en potasse. Les exportations de la patate douce sont moyennes hormis pour la potasse. Il faut veiller à ne pas sur-fertiliser, notamment en azote, pour éviter un développement végétatif au détriN = 50-100 U/ha ment des P = 60-100 U/ha tubercules. K = 175-220 U/ha Travail du sol et plantation: l’écartement entre les plants peut varier de 22 à 45 cm dans le rang et 90 à 1,20 m en inter rang. Un essai du GRAB en France préconise un écartement de 30 cm sur le rang sur des planches de 70 cm de large. Plein champ ou sous abris ? La patate douce peut être placée en plein champ sans problème une fois que le sol est suffisamment réchauffé. Une production sous abris aura malgré tout plusieurs avantages : - Rapidité de développement - Moins d’attaques de ravageurs - Augmentation des rendements par l’augmentation des durées de culture 12 bis, rue Saint Pierre - 79500 MELLE Tél. 05 49 29 17 17 - Fax. 05 49 29 17 18 www.penser-bio.fr L’auxiliaire bio N°30 - Mars 15 Page 11 Maraîchage La planche doit être légèrement buttée sur 20 cm de hauteur. Cela va permettre d’avoir une terre aérée et de limiter la stagnation d’eau préjudiciable à la formation des tubercules. La patate douce est une plante qui s’enracine profondément si le sol le permet, il est parfois nécessaire de « tasser » le sol à une certaine profondeur pour éviter des difficultés à la récolte. Anthonny Cariolet du GAEC des Brillats : « Je travail le sol de façon classique avec un passage de cultivateur, ensuite je butte les passe pieds. Je place mes plants sur le haut de la butte, j’évite comme cela de la fatigue et des pertes de temps à la récolte » Une autre technique consiste à créer une semelle de labour avec le passage d’un rotavator. La plantation : elle a lieu lorsque tout risque de gel est écarté. Il faut veiller à ce que le sol soit suffisamment réchauffé et stable en température (16°C à 10 cm) pendant 4 jours au minimum. Un paillage plastique permet d’obtenir la bonne température plus tôt. Dans le cas de plantation directe des boutures en terre, on retire les 4 feuilles sur les 4 nœuds en partant de la base puis cette partie est enterrée. Deux feuilles au minimum sont laissées sur la partie aérienne. Les boutures peuvent être plantées à 45° pour une meilleure prospection racinaire. Entretien de la culture et récolte Entretien et irrigation Cette culture nécessite d’être sarclée au début de sa croissance, par la suite elle prendra le dessus sur les adventices. En parallèle du sarclage, un soulèvement ou retournement des tiges permet d’empêcher l’enracinement secondaire qui pourrait baisser les rendements des tubercules et prolonger la période de récolte. L’irrigation doit apporter 25 mm d’eau par semaine durant la période de croissance de la plante, c’est une plante qui résiste bien au stress hydrique mais qui craint l’accumulation d’eau qui entraine la pourriture des tubercules. Cette irrigation sera arrêtée un peu avant la récolte. Maladies et ravageurs : C’est globalement une culture peu sensible (hors pourriture), une bonne rotation et des plants sains doivent permettre de limiter les risques. Les tubercules sont très appétants pour les gros ravageurs (sangliers, rats), prévoir des aménagements si besoin. Attention également aux risques de taupins. La patate douce est sensible à différentes formes de pourriture (pourriture molle, pourriture noire des tubercules, pourriture de la tige). L’utilisation de plants sains et un passage de produit fongique permet de diminuer les risques. Récolte La culture dure de 120 à 150 jours après plantation. Si les températures restent assez douces en fin de saison, les tubercules continuent de grossir ce qui nécessite parfois de les couvrir si on veut améliorer son rendement. Quand récolter ? -- Faire des prélèvements réguliers de tubercules pour contrôler l’avancement de la culture. -- Le jaunissement du feuillage est un indicateur de fin de culture. -- Si la température du sol descend à 13°C la récolte doit commencer car les tubercules risquent de se détériorer à des températures plus basses. -- Lorsque l’apex noircit, la récolte doit être immédiate. L’appareil végétatif est en train de dépérir et il pourrait transmettre des pourritures aux tubercules. Lors de la récolte on coupe les parties aériennes 2 à 3 jours avant le ramassage des tubercules. De cette manière l’épiderme de la patate douce va se raffermir et on limitera donc les risques de blessures à la récolte. En cas de récolte au fur et à mesure, la destruction du couvert n’est pas obligatoire même si elle facilite la récolte. La récolte doit être effectuée à la main avec une fourche bêche, le tubercule est très sensible aux coups et aux blessures et il aura tendance à pourrir si la récolte endommage trop la racine. Conservation et stockage La conservation et le stockage dépend du mode de commercialisation de la culture. En maraîchage diversifié, la récolte est faite petit à petit et la culture est souvent entièrement vendue avant d’avoir été stockée. Anthony Cariolet du GAEC des Brillats : « Nous avons stocké de la patate douce en silo dans du sable l’année dernière, mais la demande du consommateur était là, nous avons donc tout sorti avant de passer l’hiver » agroBio 12 bis, rue Saint Pierre - 79500 MELLE Tél. 05 49 29 17 17 - Fax. 05 49 29 17 18 www.penser-bio.fr L’auxiliaire bio N°30 - Mars 15 Page 12 Maraîchage Le Curing Cette phase post-récolte doit permettre de durcir l’épiderme et d’améliorer la conservation des tubercules. Durant cette phase la patate douce va également se charger en sucre, améliorant par conséquent ses qualités gustatives. Pour cela on place les tubercules à environ 25°C en maintenant une haute humidité relative (80 à 90%) dans un endroit bien ventilé pendant une semaine. Ce procédé est intéressant, cependant il est compliqué à mettre en place étant donné l’époque de la récolte. Le soleil est moins présent et la patate douce manquerait donc de chaleur pour bien réaliser ce processus. Sur des surfaces plus importantes ou des modes de commercialisation avec des plus grosses quantités, la patate douce peut être stockée en un lieu frais (12 à 15°C avec une humidité relative de 80%) pendant 6 à 8 mois. Cependant la patate douce est fortement soumise aux phénomènes de pourrissement, c’est sans doute l’un des problèmes principaux de cette culture. Quelques chiffres Temps de travail : Cette culture est assez peu gourmande en temps, elle présente une agroBio bonne concurrence vis-à-vis des adventices ce qui est souvent le facteur limitant. La récolte manuelle est peut être ce qui prend le plus de temps et d’énergie. Anthony Cariolet du GAEC des Brillats : « C’est globalement une culture qui nous prend peu de temps, malgré cela nous somme obligés de décaler un peu sa culture car nous n’avons pas le temps de nous en occuper au début de printemps. D’autres cultures sont prioritaires. » Rendements et prix : Les rendements moyens sont extrêmement variables d’une variété à l’autre et même d’un pied à l’autre. On peut espérer d’une culture bien menée entre 2 et 3 kg de patate douce par pied. Soit une cinquantaine de tonne par hectare. Le prix du kg varie quant à lui de 1,5 à 4 € le kilo selon les circuits de vente. Contact : Julien TAUNAY et Amandine GATINEAU – CAB Pays de la loire [email protected] Intérêts de la culture -- Diversifier sa production -- Réel engouement du consommateur -- Famille de plante non cultivée -- Culture peu exigeante -- Adapté aux circuits de vente directe -- Marge intéressante comparée au temps requis et au prix de vente 12 bis, rue Saint Pierre - 79500 MELLE Points de vigilance -- Pas de plants disponible en Bio -- Difficile de produire ses plants -- Exigence de température (plante tropicale qui craint le froid) -- Tubercule sensible au pourrissement -- Difficulté de conservation -- Récolte manuelle (difficilement mécanisable) Tél. 05 49 29 17 17 - Fax. 05 49 29 17 18 www.penser-bio.fr