L`intermédiation en assurance et les professionnels de l`expertise

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L`intermédiation en assurance et les professionnels de l`expertise
ASSURANCE
L’intermédiation en assurance
et les professionnels de l’expertise
comptable
La loi du 23 juillet 2010 a ouvert aux professionnels de l’expertise comptable, personnes
physiques ou morales, la faculté d’exercer des activités commerciales ou des actes
d’intermédiaire accessoires. Cette ouverture constitue indéniablement un élargissement
de nos activités qui aura un impact positif sur notre exercice professionnel. L’activité
d’intermédiation en assurance présente, cependant en l’état actuel des textes, diverses
contraintes qui constituent autant de préalables qu’il est important de connaître.
Arnaud Debray, président du Comité des assurances du Conseil Supérieur
et président du Conseil régional de l’Ordre des Experts-Comptables de Normandie
Les professionnels de l’expertise
comptable peuvent-ils exercer
une activité d’intermédiation
en assurance ?
Les métiers classiques d’intermédiaire en
assurance ne peuvent être exercés par un
expert-comptable en vertu de l’article 24 de
l’ordonnance de 1945 et des articles 5 et 6
du Code de déontologie.
Le courtier d’assurance ou de réassurance
doit être un commerçant, or un professionnel de l’expertise comptable ne peut avoir
cette qualité.
L’agent général d’assurance comme le
mandataire des entreprises d’assurance
sont mandatés par une entreprise d’assurance. Afin de respecter le principe d’indépendance, un professionnel de l’expertise
comptable ne peut cependant intervenir
pour le compte d’une entreprise d’assurance.
Le mandataire d’intermédiaire d’assurance
assure l’encaissement de cotisations et de la
remise de fonds.
Le maniement de fonds est à présent
autorisé au professionnel de l’expertise comptable, mais le décret fixant les
conditions de création et les modalités de
contrôle de cette possibilité est toujours
en attente de parution. Par ailleurs, le
professionnel de l’expertise comptable ne
peut être rémunéré que par son client, et
par des honoraires, alors que ces différents
métiers sont généralement rémunérés par
les compagnies d’assurance sous forme de
commissions.
La définition donnée par les textes de
l’intermédiation en assurance est cependant plus large que le champ de ces métiers
classiques et pourrait conduire à inclure
dans son périmètre les conseils dispensés à
titre occasionnel par les professionnels de
l’expertise comptable.
Une définition large de l’activité
d’intermédiation en assurance
qui impacte l’activité de conseil
des professionnels de l’expertise
comptable
L’article L511-1 L du Code des assurances
définit l’intermédiation en assurance ou en
réassurance comme « l’activité qui consiste à
présenter, proposer ou aider à conclure des contrats
d’assurance ou de réassurance ou à réaliser d’autres
travaux préparatoires à leur conclusion », à savoir
solliciter ou recueillir la souscription ou
l’adhésion, voire exposer oralement ou par
écrit les conditions de garantie.
La définition de l’intermédiation telle que
donnée par cet article est large et inclut
dans son champ les missions de conseil
du professionnel de l’expertise comptable.
Celui-ci pourrait donc potentiellement se
voir soumis aux contraintes administratives
liées à cette activité.
Les intermédiaires doivent en effet être
inscrits à l’Orias dans la ou les catégories
qui les concernent. Ils doivent respecter
des conditions d’honorabilité et de capacité
professionnelle définis par le décret du
31 août 2006. Ils doivent également être
titulaires d’une garantie de responsabilité
civile professionnelle d’un montant minimum de 1 500 000 euros par sinistre et de
2 000 000 euros par année d’assurance. Ils
doivent enfin être titulaires d’une garantie
financière.
Il paraîtrait difficilement concevable de
soumettre les professionnels de l’expertise comptable à l’immatriculation et au
contrôle de l’Orias dans la mesure où ils
remplissent déjà, de par leur statut de profession réglementée, toutes les conditions
de diplôme, de formation, d’éthique, de
déontologie et de responsabilité civile professionnelle.
L’article L 511-1 I précise cependant qu’« est
un intermédiaire d’assurance ou de réassurance
toute personne qui, contre rémunération, exerce
une activité d’intermédiation en assurance ou en
réassurance ».
N’est donc considéré comme intermédiaire
AVRIL 2012 Sic 306 41
PROFESSION EXPERT-COMPTABLE I
ASSURANCES
que celui qui exerce cette activité contre rémunération (notamment les courtiers, les agents
généraux, les mandataires d’intermédiaires).
Dès lors que le professionnel de l’expertise
comptable ne se fait pas rémunérer pour ces
missions de conseil, il pourra être exonéré
des obligations liées au statut d’intermédiaire. Attention cependant car cette rémunération s’entend de manière large, comme tout
versement pécuniaire ou toute autre forme
d’avantage économique convenu et lié à la
prestation d’intermédiation.
L’article L. 511-1 est par ailleurs complété
par l’article R. 511-1 du Code des assurances
qui précise qu’est considérée comme présentation, proposition ou aide à la conclusion d’une opération d’assurance, « le fait
pour toute personne physique ou personne morale
de solliciter ou de recueillir la souscription d’un
contrat ou l’adhésion à un tel contrat, ou d’exposer
oralement ou par écrit à un souscripteur ou un
adhérent éventuel, en vue de cette souscription ou
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adhésion, les conditions de garantie d’un contrat.
Les travaux préparatoires à la conclusion d’un
contrat (…) s’entendent donc comme tous travaux
d’analyse et de conseil réalisés par toute personne
physique ou personne morale qui présente, propose
ou aide à conclure une opération d’assurance. Ils ne
comprennent pas les activités consistant à fournir
des informations ou des conseils à titre occasionnel
dans le cadre d’une activité professionnelle autre
que celle mentionnée à l’alinéa premier. »
Ce texte réglementaire admet donc que
les informations ou conseils donnés à
titre occasionnel, sans proposer ou aider
à conclure un contrat, sont autorisés sans
être qualifiés d’intermédiation et sans que
les personnes qui les réalisent soient soumises aux contraintes administratives de
cette activité.
Quelles situations pour les filiales
des cabinets d’expertise comptable
non inscrites à l’Ordre ?
Ces activités ne peuvent être exercées au
travers d’une filiale non inscrite au tableau
de l’Ordre dès l’instant où le dirigeant (ou
le confrère concerné), exerçant au sein
d’une société dédiée à l’intermédiation en
assurance, est expert-comptable mais aussi
commissaire aux comptes.
L’activité d’intermédiaire en assurance est
en effet incompatible avec les dispositions
légales et réglementaires régissant la
profession de commissaire aux comptes,
notamment celles de l’article L 822-10 du
code de commerce qui leur interdit toute
activité commerciale.
Par contre, dès lors qu’un professionnel de
l’expertise comptable n’est pas commissaire aux comptes, il peut avoir des participations au sein d’une société ayant cette
activité dans la mesure ou la détention de
celles-ci ne portent pas atteinte à son indépendance ou à l’exercice de sa profession
d’expertise comptable. p