Le contentieux de l`aide sociale
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Le contentieux de l`aide sociale
LE CONTENTIEUX DE L’AIDE SOCIALE (Position commune - Juin 2015) Les compétences des juridictions de l'aide sociale Les juridictions de l’aide sociale sont des juridictions de l'ordre administratif. La contestation d’une décision relative à l’attribution d’une prestation d’aide sociale s’effectue devant : - en première instance, une commission départementale de l'aide sociale (CDAS) instituée dans chaque département ; - en appel, la Commission Centrale d'Aide Sociale (CCAS). C’est une cour unique située à Paris ; - en cassation, le Conseil d'Etat. La CDAS est compétente sur l'ensemble des prestations d'aide sociale accordées par le préfet de département ou le président du conseil départemental : - litiges relatifs à l'attribution des prestations d'aide sociale ; - les litiges relatifs au versement des prestations ; - litiges relatifs à la récupération du montant des prestations versées sur la succession du bénéficiaire de l'aide sociale ; - litiges relatifs au recouvrement des sommes indûment perçues, demandées à des particuliers bénéficiaires de l'aide sociale, en raison des dépenses exposées par une collectivité publique ; - recours relatifs à la CMU-c. Elle n’est pas compétente sur : - les décisions prises par le préfet ou par le président du conseil départemental en matière d'aide sociale à l'enfance ; - les litiges relatifs à l'attribution des prestations d'aide sociale facultative instituées librement par les collectivités territoriales (sauf exceptions) ; - les litiges relatifs aux prestations d'aide sociale ne relevant pas du code de l'action sociale et des familles. Elle est composée comme suit : - un président (magistrat de l’ordre judiciaire) ; - un rapporteur (fonctionnaire du conseil départemental). 1 La CCAS est compétente pour statuer sur l'ensemble des appels formés contre les décisions des CDAS. Elle est par ailleurs compétente en premier et dernier ressort sur, notamment : - des litiges opposant deux départements ou un département et l'État sur le débiteur des dépenses d'aide sociale ; - les contestations relatives à la détermination du domicile de secours. La CCAS comprend un greffe et six sections. Chaque section siège à trois membres : 1 président (magistrat de tout ordre), 1 assesseur, et 1 rapporteur. La CCAS comprend, à ce jour, 35 membres : - 1 président - 7 présidents de section (le président de la CCAS préside également 1 section (contentieux RMI), - 12 assesseurs - 15 rapporteurs (le plus souvent de jeunes juristes rémunérés par le ministère des affaires sociales), - 1 commissaire du gouvernement Les présidents en fonction sont issus : - du Conseil d’Etat (deux présidents), - de la Cour des Comptes (trois présidents), - de l’ordre judiciaire (deux présidents). Les sections qu’ils président sont spécialisées par type de contentieux : - 3 sections sont compétentes pour les contentieux « RMI » - 2 sections examinent les contentieux en manière de « CMU-c et d’AME », - 1 section est spécifique aux contentieux relatifs aux personnes âgées, - 1 section traite les contentieux relatifs aux personnes handicapées. 2 Activité de la Commission centrale d’Aide Sociale Source : rapport d’activité 2014 de la CCAS. Pourquoi faut-il réformer le contentieux de l’aide sociale ? Une telle réforme s’impose à la suite des décisions du Conseil constitutionnel du 25 mars 2011 (n°2010-110 QPC) et du 8 juin 2012 (n°2012-250 QPC) qui ont censuré les textes fixant la composition des CDAS et de la CCAS. Ces textes ne permettaient pas de garantir l’indépendance de ces instances, notamment au niveau départemental. Les décisions contestées devant ces instances, qui comptaient des fonctionnaires et des membres des conseils départementaux, étaient en effet prises par les présidents de conseils départementaux en matière de prestations sociales, par exemple l’APA. Que prévoit l’article 55 du projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement (Petite loi) ? Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnances les dispositions relevant du domaine de la loi de nature à fixer les règles de composition des juridictions mentionnées aux articles L. 134-1 et L. 134-2 du code de l'action sociale et des familles, dans des conditions de nature à assurer l'indépendance et l'impartialité de leurs membres. 1° à 3° (Supprimés) Ces ordonnances sont prises dans un délai de six mois à compter de la date de promulgation de la présente loi. Le projet de loi portant ratification de ces ordonnances est déposé devant le Parlement au plus tard le dernier jour du troisième mois suivant leur publication. 3 A ce stade de l’examen parlementaire, le CISS approuve la suppression du recours administratif obligatoire (RAPO) que le projet de loi initial envisageait d’instaurer. Un tel recours demande du temps, la capacité de répondre à ses exigences formelles ainsi que des moyens financiers, l’aide juridictionnelle ne le prenant pas en charge. Placer un recours administratif entre le juge et le justiciable constituerait donc un réel frein à l’accès au droit Le contentieux de l’aide sociale devrait, selon toute vraisemblance, et si l’on s’en tient au texte adopté au Sénat en première lecture, évoluer en trois temps : - dans le cadre de la loi d’adaptation de la société au vieillissement actuellement en cours d’examen parlementaire ; - dans le cadre des ordonnances que le Gouvernement pourra prendre, en vertu de la loi d’habilitation (projet de loi), pour fixer les règles de composition des CDAS et CCAS, afin de garantir l’indépendance et l’impartialité de leurs membres ; - dans le cadre d’un vaste de projet qui viserait la réforme des juridictions sociales, inspirée notamment du rapport Marshall de décembre 2013. 4 Positions du CISS Le CISS réaffirme son attachement à ce qu’un recours administratif préalable obligatoire ne soit pas réintroduit au cours de l’examen parlementaire afin de ne pas pénaliser davantage les justiciables très souvent en situation de dénuement et de détresse. Un tel recours serait inadapté aux spécificités du contentieux de l’aide sociale et constituerait une entrave aux voies de recours qu’il est déjà difficile d’exercer pour les personnes concernées. Le CISS propose par ailleurs que les futures ordonnances, visant à fixer les règles de composition des CDAS et CCAS permettant de garantir l’indépendance et l’impartialité de leurs membres, prévoient : - de nouvelles appellations pour les CDAS et la CCAS afin de faire apparaître plus explicitement la nature juridictionnelle de cette instance : o les CDAS deviendraient des « Tribunaux de l’aide sociale » ; o la CCAS deviendrait la « Cour nationale d’aide sociale ». Cette nouvelle appellation permettrait également de différencier la CCAS des Centres Communaux d’Aide Sociale. - de détacher les « Tribunaux de l’aide sociale » et la « Cour nationale d’aide sociale » du ministère des affaires sociales pour les adosser, en tant que juridictions administratives, au Conseil d’Etat. - une nouvelle composition des « Tribunaux de l’aide sociale » : o un magistrat de tout ordre pour présider ; o un rapporteur, rémunéré par le « tribunal » dans le cadre d’un contrat de droit public ; o un représentant des usagers, issu d’une association d’usagers, intervenant dans le champ sanitaire, social ou médico-social. - une nouvelle composition de la « Cour nationale d’aide sociale » o un magistrat de tout ordre pour présider ; o des rapporteurs, rémunérés par le Conseil d’Etat, sur la base d’un forfait par dossier dont le montant est fixé par voie réglementaire ; o un assesseur, issu d’une association d’usagers intervenant dans le champ sanitaire ou social ou médico-social. 5