Séquence 10 : Les Universités populaires d`hier à aujourd`hui ou la

Transcription

Séquence 10 : Les Universités populaires d`hier à aujourd`hui ou la
Séquence 10 : Les Universités populaires d’hier à aujourd’hui ou la liberté
d’apprendre et de transmettre
Les universités populaires, mouvement d’éducation populaire, ont marqué la fin
du XIXe siècle, en une période politique troublée. L’intention de leurs initiateurs
était de délivrer au peuple l’enseignement supérieur dont il n’avait pu bénéficier.
Après une flambée de créations multiples (environ 230), les Universités
populaires vont presque totalement disparaître peu avant la Première Guerre
mondiale. Dans les années 1950, puis surtout à partir des années 1970, des
Universités populaires vont être à nouveau créées, amorçant un renouveau du
mouvement sur des bases nouvelles.
1) Trop peu d'innovations
Les utopies éducatives ne sont plus ce qu’elles étaient, les idées d’une nouvelle
éducation portée par le courant de l’Ecole nouvelle, né durant le XIXe siècle, ne
semblent plus guère à l’ordre du jour de la pensée dominante en éducation.
Depuis quelques temps l’heure paraît être au “ réalisme scolaire ”, à l’efficacité
supposée d’un enseignement capable d’entraîner 80% d’une classe d’âge au
niveau du baccalauréat, avec comme principale ambition pour les élèves de
pouvoir trouver au final un débouché dans un monde où les difficultés de toutes
sortes rendent acharnée la compétition pour l’obtention de diplômes recherchés,
tout cela sur un fond de perte de sens préoccupante, d’un retour aux valeurs les
plus traditionnelles. Même si des innovations sont encore tentées en divers
endroits de l’édifice de l’Education nationale et même de l’éducation tout court,
le temps des grandes idées éducatives nouvelles est loin, l’efficacité poursuivie
d’une scolarité sommée de se montrer “ rentable ” en terme de
professionnalisation rejette dans l’abîme du souvenir ému les rêves d’un type
d’éducation différent. Par son ampleur, un projet scolaire tel que celui de
Troisième République, souvent décrié et critiqué avec raison sur le terrain
pédagogique, pourrait nous apparaître aujourd’hui audacieux, en tout cas hors
de saison face à notre grande frilosité et à notre immobilisme actuel.
Aussi peut-il être de quelque intérêt de tenter d’observer, avec bien des années
de recul, comment ont pu tout de même être mises en place certaines
réalisations paraissant relever d’utopies éducatives portées par toute une
génération il y a environ trente ans.
1-1) Le modèle des Universités populaires
Les Universités populaires, institutions pourtant vieilles de plus d’un siècle,
permettent paradoxalement, dans leur formule contemporaine, de vérifier que
quelques idées qu’Ivan Illich avait formulées dans son ouvrage Une société
sans école trouvent une application ne pouvant que nous interroger sur la façon
dont nous envisageons habituellement éducation et enseignement.
En préambule, il est nécessaire de préciser que les Universités populaires,
rapidement évoquées dans la séquence 9, contrairement à ce préconise le titre
du livre d’Illich, n’envisagent pas et n’ont jamais préconisé la destruction du
système scolaire (Illich décrivait en fait des alternatives éducatives permanentes
organisées sous forme de réseaux, ce que réalisent en partie actuellement les
réseaux d’échanges de savoir), mais qu’elles essaient par des méthodes
originales de combler les espaces qu’il laisse en friche.
Ce point fondamental pris en compte, on remarque que les Universités
populaires réalisent plusieurs des souhaits d’Ivan Illich en mettant en place ce
qui ressemble fortement à un réseau éducatif permanent indépendant des
pouvoirs politiques et financiers, ne fonctionnant qu’en fonction d’offres et de
demandes de savoirs. On peut d’ailleurs se demander si nous ne sommes pas
en présence de ce qui pourrait servir de modèle à la construction d’un
enseignement permanent ouvert à tous sans aucune condition d’accès autre que
celles régies par le droit d’apprendre et celui de transmettre. Condorcet durant
la Révolution avait déjà avancé l’idée d’une instruction se développant tout au
long de la vie, et l’histoire de l’éducation a déjà connu des avancées positives
allant dans le sens de l’accueil le plus large : l’Ecole pratique des hautes études,
sous le Second Empire, le Conservatoire national des Arts et Métiers,
l’Université de Paris VIII Vincennes, sont quelques exemples d’institutions qui
tentent ou ont tenté de pousser le plus loin le libre accès à la connaissance dans
l’enseignement supérieur. L’idée, si elle n’est pas absolument neuve, garde
cependant un potentiel de dynamisme suffisant pour mobiliser de nombreuses
énergies.
Les Universités populaires, au nombre d’une quarantaine au milieu des années
1990, regroupant entre 40.000 et 50.000 auditeurs, même si ce n’est finalement
qu’à une échelle relativement modeste, accomplissent dans leur action
quotidienne au moins deux des objectifs qu’Illich jugeait fondamentaux pour que
tout homme puisse s’accomplir en permanence individuellement et socialement
grâce à l’enseignement :
1) Elles offrent à tous ceux qui veulent apprendre un libre accès aux ressources
existantes, et cela à tous les âges de la vie.
2) Elles font en sorte que tous ceux qui désirent partager leurs connaissances
puissent rencontrer toute autre personne souhaitant les acquérir, ce qui sousentend la possibilité de transmettre (Illich, 1971, p. 128).
2) Différentes étapes
A un siècle de distance, après la désillusion qui suivit le projet caressé d’une
chimérique pacification sociale, après l’échec du rapprochement ouvriersintellectuels dont on espérait le sauvetage d’une république menacée par la
tempête de l’affaire Dreyfus, après la quasi-disparition du mouvement dans
l’entre-deux-guerres, les Universités populaires ont resurgi en deux temps - dans
les années 1950 puis, plus fortement dans les années 1970 - au sein d’une
société considérablement bouleversée où elles ont dû faire preuve d’inventé
pour subsister et se développer (Lien 1). Nous nous intéressons dans cette
séquence aux Universités populaires des cinquante derrières années, et nous
n’évoquerons pas en détail celles de la fin du XIXe siècle, que Lucien Mercier a
étudiées en profondeur. Précisons tout de même rapidement qu’une des
raisons de leur échec et finalement de leur première disparition, fut certainement
une pédagogie inadaptée au public adulte auquel elles s’adressaient, qui ne
disposait pas d’une instruction et d’une culture préalable nécessaires à la bonne
réception de l’enseignement supérieur que leur proposaient des enseignants
brillants mais semblant ignorer la problématique éducative dans laquelle ils
s’engageaient (Lien 2).
2-1) Education et citoyenneté participative
Les Universités populaires de la seconde génération (à partir de 1945) se
veulent les garantes de la notion de citoyenneté qu’il s‘agit de défendre contre
vents et marées afin d’agir pour ne pas subir, et certaines ont su, dans un climat
de convivialité essentiel recherché, avoir une approche nouvelle de la
connaissance et rénover en partie l’acte pédagogique en en ôtant l’exclusivité
aux spécialistes et en faisant de chacun de leurs auditeurs un enseignant
potentiel.
C’est à travers la notion de citoyenneté que les Universités populaires imaginent
des personnes rendues aptes à participer à la vie de la société et le mode
d’organisation interne de nombreuses associations-Universités populaires
concourt à développer cette aptitude.
Partant de principes participatifs simples relatifs à la transmission des savoirs
et aux tâches de gestion, elles pensent qu’il n’est pas irréaliste de vouloir former
des hommes dans le but de les rendre plus conscients, c’est-à-dire plus libres et
plus capables d’efficacité pour préparer ce que pourrait être un monde plus
égalitaire devant le savoir. A la faveur de cette convivialité qu’elles entendent
maintenir, elles sont des lieux où peuvent se créer des relations sociales rendant
possible l’énonciation de problèmes éducatifs particuliers qui peuvent se voir
reconnus par l’ensemble des membres de l’association et acquérir ainsi un
statut collectif.
Bien que l’inscription à une Université populaire soit le résultat d’un choix
individuel très “ centré sur soi ”, on ambitionne tout de même d’inverser cette
propension à l’individualisme ambiant. Par la mise en contact de personnes qui
autrement ne se seraient pas rencontrées, on espère leur redonner envie de
jouer un rôle s’inscrivant au sein d’une collectivité pour la résolution de
problèmes qui pourraient survenir. Comme l’écrivait Illich, “ Il nous revient en
effet de lutter contre ce désengagement qui est le propre de la jeunesse
confiée à l’école, de revenir en quelque sorte à une tradition où seule la
participation à la vie de la société faisait de vous un homme ” (Illich, 1971, p.
144).
Ce modèle d’organisation prenant en considération les aspirations individuelles,
mais s’efforçant de les replacer dans un schéma social dynamique, peut
apparaître en définitive comme la quête d’un sens à donner à l’éducation face
aux apprentissages individualistes et “ rentables ” de notre époque. Lorsque les
Universités populaires revitalisent les patrimoines culturels d’origine populaire
en les conjuguant à une culture plus classique, elles œuvrent dans cette direction
en suscitant des interrogations nouvelles, des débats profondément actuels,
développant une conception culturelle susceptible de faire se rejoindre des
univers que tout séparait.
3) Des enseignements larges et ouverts
Les enseignements délivrés par les Universités populaires sont très diversifiés,
il s’agit de mettre chaque chose à la bonne distance et d’y apporter un regard
critique, afin de permettre à chacun d’être attentif aux évolutions du monde en
restant vigilant et en réfléchissant à ce que ces évolutions impliquent à différents
niveaux.
Le mouvement des Universités populaires prend sa source dans le profond
besoin de connaissances de nombre d’acteurs se percevant comme
suffisamment autonomes pour considérer qu’il leur appartient de construire leur
avenir sans pour autant éprouver le besoin de retrouver une structure éducative
claquée sur l’école (Lien 3). Ne conservant des structures institutionnalisées que
le cadre, les Universités populaires mettent en pratique des méthodes, des
façons de faire qui leur sont propres. Par leurs activités bientôt centenaires,
elles font preuve de capacités pédagogiques et didactiques imaginatives,
même si cela ne débouche pas toujours sur des réussites absolues, comme ce
fut le cas pour la première vague des années 1998-1914.
Bien qu’attachant avec la notion de citoyenneté une grande importance à la
dimension participative de leur action, elles offrent à toute personne la
possibilité, grâce à l’acquisition de savoirs librement choisis, de se forger une
culture personnelle ne répondant pas forcément aux canons de la culture
académique. En faisant cohabiter diverses disciplines, de la littérature
contemporaine au bricolage, de la mécanique automobile aux sciences, elles
rendent possible la construction d’un pont qui doit être jeté entre la maîtrise des
gestes pratiques quotidiens et la connaissance des principes scientifiques qui
les organisent (Lien 4). C’est par cette circulation rendue possible que la culture
populaire, tout en conservant ses capacités innovatrices spécifiques peut
intégrer la culture savante en se l’appropriant à partir du vécu de chaque jour.
Socialement marginalisée par la référence au peuple, la culture populaire
conquiert ses lettres de noblesse, et du même coup se voit en quelque sorte “
universalisée ”. Les Universités populaires font partie de ces associations qui
envisagent la culture populaire comme une culture à caractère universel, non
marginalisée, tout en considérant que la culture “ dominante ” dite “ savante ” ne
doit pas être l’apanage d’une élite.
Mais on considère également que l’apprentissage du civisme et du politique, au
sens d’organisation de la cité, est facilité par les disciplines artistiques,
scientifiques, philosophiques, comme cela fut déclaré par l’un des porte-parole
des Universités populaires lors d’un colloque qui leur fut consacré en 1987 : “
Véritables universités du citoyen, nous pouvons et devons être les universités
de la culture de la fin du millénaire : culture artistique, culture historique,
culture scientifique, culture civique et politique aussi ”. L’un des idéaux culturels
revenant de façon récurrente dans les colloques et congrès où la question de la
finalité du mouvement est en débat est celui qui consiste à vouloir renforcer les
capacités à comprendre et à agir dans un monde mouvant, évoluant à des
vitesses considérables. Il s’agit d’aider à comprendre, à mieux appréhender les
problèmes de la cité afin que les adhérents upistes puissent prendre leur avenir
en main avant d’en être dépossédés.
4) L’enseigné-enseignant
Les Universités populaires ne possèdent pas de projet pédagogique
absolument précis, pas de méthode didactique unique, si ce n’est de permettre
à tout adulte de revenir quand il le veut sur ce qu’il veut sans conditions de
diplômes ou de scolarité antérieure, s’interdisant, comme le souhaitait Illich,
toute discrimination parce que le candidat n’aurait pas suivi préalablement
quelque programme d’enseignement obligatoire.
La mise en place des programmes de cours répond à la demande de leur
public, le maintien ou le retrait de la discipline ou du cours dépend de l’intérêt
que lui portent les auditeurs durant l’année. La prise en compte des besoins est
déterminée par le positionnement éducatif et militant des associations et il en
résulte évidemment une grande variété de contenus et de manières de faire
suivant les particularités des différentes implantations régionales (Lien 5).
Se créé ainsi un autre rapport au savoir centré avant tout sur l’envie
d’apprendre, étant donné que la démarche est volontaire et n’a pas pour objectif
l’obtention d’un diplôme ou d’un savoir professionnel et qu’elle s’effectue en
dehors du temps de travail : “ L‘adulte se prend ainsi en charge lui-même et
est responsable de son assiduité, mais fixe avec le groupe la périodicité, le
contenu, la méthode des cours. Sa récompense est le plaisir de l’effort qu’il
s’impose à lui-même sans objectif de promotion sociale ou professionnelle,
sans notion de compétition hiérarchique. En ce sens, on peut parler
d’autoformation assistée ” (pièce d’archives des années 1970 de l’Université
populaire de Rosny-Sous-Bois en région parisienne).
Sur le terrain pédagogique, une des caractéristiques les plus marquantes des
Universités populaires est celle qui offre la possibilité à des personnes dont ce
n’est pas le métier de pouvoir exercer la fonction de professeur ou de formateur
en transmettant des connaissances qu’elles ont pu acquérir personnellement
dans certains domaines. Chaque auditeur pouvant ainsi devenir enseignant, il
s’établit un principe d’échange des rôles tenus par les différents protagonistes à
l’intérieur de l’association (Lien 6).
Cette possibilité de devenir enseignant pour qui en possède l’envie et la
capacité mais pas les diplômes l’autorisant normalement à le faire, est une des
particularités que l’on rencontre dès la Libération dans une Université populaire
de taille moyenne comme celle de Rosny-Sous-Bois, et que l’on verra s’étendre
à celles qui ouvriront leurs portes dans les années 1980. A Rosny, dès la fin des
années 1940, des auditeurs deviennent enseignants, comme en témoigne un
ancien professeur en évoquant l’une de ses étudiantes : “ Voyant qu’elle avait
des possibilités, je lui ai dit écoute, si ça t’intéresse, tu peux devenir
enseignante, je t’aiderai. Un autre professeur qui m’avait précédé a
également formé des élèves qui sont devenus professeurs à leur tour”.
L’échange des rôles entre enseignants et enseignés est un système qui s’est
mis spontanément en place, de façon pragmatique, parfois pour répondre
certaines saisons à un manque d’enseignements traditionnels. Ce n’est
qu’après coup que se dégagera éventuellement une philosophie pédagogique
de cette pratique.
4-1) Nombre et niveaux d’étude
Les auditeurs devenant enseignants upistes sont quelquefois nombreux : à
l’Université populaire de Mulhouse, au milieu des années 1990, 40% des
intervenants ne provenaient ni de l’éducation nationale ni d’autres organismes
de formation. Par la généralisation de cette pratique, les Universités populaires
semblent réaliser ce que préconisait Gaston Bachelard quand il écrivait que “
C’est une grande méprise de l’instruction commune que d’instaurer, sans
réciproque, la relation inflexible de maître à élève. Voici, d’après nous, le
principe fondamental de la pédagogie de l’attitude objective : qui est
enseigné doit enseigner. Une instruction qu’on reçoit sans la transmettre
forme des esprits sans dynamisme, sans auto-critique (…). Une telle
instruction fige en dogmatisme une connaissance qui devrait être une
impulsion pour une démarche inventive ” (Bachelard, 1938, p. 244).
Les enseignants non professionnels ne sont pas forcément dotés d’un niveau
d’études très élevé. En 1982, à Mulhouse, 20% d’entre eux ne possédaient pas
le baccalauréat, 22% étaient bacheliers sans posséder de diplômes
universitaires. L’attitude générale est de faire confiance à leurs connaissances,
à leur sens insu de la didactique, ce qui traduit certainement une prise de
distance par rapport à une pédagogie dogmatique. Et cela, généralement,
fonctionne bien. Comme le soulignait Illich “ La plupart des professeurs de
l’enseignement technique sont moins habiles, d’esprit moins inventif, moins
capables de communiquer leurs connaissances spécifiques que les
meilleurs artisans et hommes de métier (…). Beaucoup de jeunes, si on leur
donne les instructions, les encouragements et les outils nécessaires,
obtiennent de meilleurs résultats que les enseignants qualifiés lorsqu’il s’agit
d’amener leurs camarades à la découverte des plantes, des étoiles ou de
l’étude de la façon dont fonctionne un moteur, un poste de TSF ” (Illich, 1971, p.
36) (Lien 7).
4-2) La passion d’enseigner et d’apprendre
Les dirigeants upistes ont depuis longtemps à l’idée que l’on peut tirer
beaucoup d’autodidactes ou de professionnels de toute sorte, heureux de faire
partager une connaissance souvent acquise avec passion. Illich renforce cette
idée en affirmant que “ ceux qui veulent parler de tel livre seraient souvent
prêts à payer pour trouver des interlocuteurs ” (Illich, 1971, p. 154). Cette
conception du droit de transmettre est parfois définie dès le début d’un projet de
création d’une Université populaire : “ Nous voulions que l’Université populaire
soit une tribune pour qui a quelque chose à dire ” (Reilhac et Herzberg, 1991,
p. 62). Face à des publics divers et hétérogènes, l’enseignant upiste ne peut se
contenter d’adopter la posture pédagogique traditionnelle, il faut avoir recours à
la conviction que donne la passion, cette passion de la connaissance qui fait
sens chez de nombreux intervenants non professionnels : “ Je préférais les
autodidactes passionnés qui savaient parler des choses qui ont fait leur vie ”,
déclare Paul Meyer, fondateur de l’Université populaire du Rhin (Relhac et
Herzberg, Ibid). Ce choix pourra même se retrouver quand il s’agit de recruter
des responsables, comme en témoigne cette annonce passée par l’Université
populaire de Rosny-Sous-Bois en 1973 : “ Première association culturelle de
Rosny recherche son président, dynamique et enthousiaste, d’esprit
absolument indépendant, cultivé, mais de préférence autodidacte ” (Verrier,
1993).
Les intervenants upistes dépendent totalement de la qualité du contenu qu’ils
délivrent et de la pédagogie qu’ils utilisent. Dans les Universités populaires, la
qualité de la relation engagée dans un processus d’éducation permanente basé
sur le volontariat de part et d’autre de la salle de cours, le désir de savoir et de
transmettre, sont des facteurs de la plus haute importance, et la qualité humaine
de la pédagogie peut se révéler aussi essentielle que le contenu transmis. De
nombreux adultes déçus par la scolarité telle qu’ils ont pu la connaître durant
l’enfance et l’adolescence sont implicitement demandeurs de relation
chaleureuse avec les enseignants et, s’affranchissant de l’interdit majeur,
réclament de pouvoir enseigner à leur tour. Par ce mode de fonctionnement
incitant les auditeurs à choisir eux-mêmes les méthodes et contenus des cours
auxquels ils assistent, les Universités populaires tendent à rendre à l’acte
pédagogique les dimensions de plaisir, d’imagination, de curiosité, d’envie
d’apprendre (Lien 8). Peut-être est-il possible de lire en filigrane derrière une
telle démarche une interrogation portant sur l’acte enseignant, sur ce qui doit
être transmis ainsi que sur la personnalité de celle ou de celui qui doit endosser
la responsabilité de la transmission. Au vu de l’hétérogénéité des publics et des
provenances diverses des intervenants, les Universités populaires se révèlent
des lieux d’expériences pédagogiques originaux. Refusant l’institutionnalisation,
elles peuvent repousser les limites de l’expérimentation, pour autant que leur
trésorerie le leur permette. Se réclamant de l’indépendance politique et
financière, elles peuvent demeurer de lieux d’essais potentiellement riches de
résultats qui pourraient être profitables à l’institution éducative tout entière,
prouvant par leur action de chaque jour que l’acquisition et la transmission de
connaissances sont en définitive des gestes simples et quotidiens, le savoir
devenant ainsi intimement mêlé à la vie.
Certes, le temps est sans doute au réalisme scolaire, les enjeux symboliques
des utopies éducatives n’apparaissent plus fondamentaux. Mais, de Rousseau
à Montessori, de Dewey à Rogers, les avancées éducatives faisant évoluer le
système éducatif se nourrissent d’imagination et d’audace. Car, comme le
déclarait Michel Serres il y a dix ans “ Si vous ne rêvez pas, vous ne faites pas
de progrès pédagogique ” (Serres, 1993).
Bibliographie séquence 10
Bachelard (G), (1938), La formation de l’esprit scientifique, Paris, Vrin.
Illich (I), (1971), Une société sans école, Paris, Seuil
Mercier (L), (1986), Les Universités populaires : 1899-1914. Education
populaire et mouvement ouvrier au début du siècle, Paris, Les Ed. Ouvrières,
188 P.
Poujol (G), Les Universités populaires sont de retour, Les Cahiers de
l’animation, n° 37, 1982.
Reilhac (G), Herzberg (M), (1991), Une université pour le plaisir, Saisons d
‘Alsace, n° 112.
Serres (M), 1993, Ainsi change l’école, Autrement, n° 136.
Verrier (C), (1993), Les Universités populaires, un siècle d’éducation des
adultes , Mémoire de maîtrise, Université de Paris VIII Saint-Denis.
Saisons d’Alsace, 1991, n° 112, Les universités populaires.
Liens séquence 10
Séquence 10 : Lien 1 : Visuel : Entrée d’une Université populaire au début du
siècle (Saisons d’Alsace n° 112, p. 9).
Séquence 10 : Lien 2 : Visuel : de la salle de conférences de la Coopération
des idées (Mercier (L), (1986), Les Universités populaires 1898-1914.
Education populaire et mouvement ouvrier au début du siècle, Paris, Les
Editions Ouvrières, p. 100). Visuel : Voltaire, Université populaire du XVe
(Mercier (L), (1986), Les Universités populaires 1898-1914. Education
populaire et mouvement ouvrier au début du siècle, Paris, Les Editions
Ouvrières, p. 100).
Séquence 10 : Lien 3 : Visuel : Affiche d’université populaire (Saisons d’Alsace
n° 112, p. 115).
Séquence 10 : Lien 4 : Visuel : Cours de peinture dans un Université populaire
(Saisons d’Alsace n° 112, p. 62).
Séquence 10 : Lien 5 : Visuel : Cours de théâtre dans une Université populaire
(Saisons d’Alsace n° 112, p. 59).
Séquence 10 : Lien 6 : Visuel : Cours de botanique d’une Université populaire
(Saisons d’Alsace n° 112, p. 71).
Séquence 10 : Lien 7 : Visuel : Atelier de mécanique dans une Université
populaire (Saisons d’Alsace n° 112, p. 76).
Séquence 10 : Lien 8 : Visuel : Atelier poétique dans une Université populaire
(Saisons d’Alsace n° 112, p. 68).