QuanD recycLé rime avec Beauté

Transcription

QuanD recycLé rime avec Beauté
Détourné
Au CADA,
les étagères,
pratiques
et fantaisistes,
proviennent
de barriques
de pétrole
recyclées.
Taillé Main
Derrière les
barriques de pétrole
et le verre, une table
basse originale,
disponible au CADA.
artisanat∑37
Design
Les lampes
kando
de Felix
Mosimann,
des objets
rares et de
qualité.
Kantha
Des petites
billes de tissu
assemblées
pour former
des colliers tout
en couleurs
et finesse, à voir
à LabelEtoffes.
Sac Éco-friendly
Venu du Japon
à LabelEtoffes,
un sac écologique
et délicat.
Tout en
couleur
Une
composition
de saris pour
des coussins
uniques, vendus
à LabelEtoffes.
En piste
Figurine faite à
partir d’anciennes
pièces détachées
de vélo et moto,
en vente au CADA.
Quand recyclé rime avec beauté
sou’al hemma
Actuels
E
lle est bien révolue l’époque
où artisanat recyclé ne
rimait qu’avec sac ou portemonnaie fabriqué à partir de
berlingots Tetra Pak. De nos
jours, les artistes-créateurs
voient toujours plus loin, toujours plus beau. Vintage oblige,
l’ingrédient clé reste le même:
un produit usé et ayant du vécu.
Le principe, donner aux rebuts
une seconde vie, n’a pas changé
non plus. A l’inverse du but qui,
lui, est de créer quelque chose
d’esthétique et de contemporain.
«Au-delà du recyclage, j’aime
surtout le fait de pouvoir proposer quelque chose d’unique»,
explique ainsi Julie Bouldoires,
bijoutière installée à Bienne.
Même son de cloche du côté de
Felix Mosimann, créateur biennois d’objets lumineux, composés de verre usagé. «Je ne dis
pas forcément que c’est du
recyclé. Je parle d’éléments
datant du siècle passé, ça sonne
bien plus design.»
Du Burkina Faso à la Suisse. Tan-
dis que ces derniers créent euxmêmes, d’autres écument les
quatre coins de la planète d’où ils
ramènent des pièces tout aussi
recyclées que colorées. Passionnée de textiles, Inge Sjollema a
créé il y a trois ans une boutique
de distribution appelée LabelEtoffes. Installée dans sa magnifique demeure, à Genève, son
échoppe foisonne de pièces
venues d’Inde, du Burkina Faso
ou encore du Japon. «Ce qu’il y a
de beau avec les produits recyclés, c’est que chaque objet a sa
propre histoire», raconte-t-elle.
A l’instar d’Inge Sjollema,
Romain de Diesbach importe
des produits artisanaux, du
continent africain principalement. Son but? Faire découvrir
et persister des savoir-faire peu
connus dans nos contrées. «Pour
que vivent les artisans du Sud»,
tel est ainsi le credo du jeune
homme de 32 ans, gérant indépendant du Comptoir des artisans d’ailleurs (CADA), fondé à
Fribourg en 2007.
Le constat est clair, ils sont nombreux à se côtoyer dans le monde
de l’artisanat recyclé. De Ouagadougou à Bienne, en passant par
Genève et Fribourg, quatre
d’entre eux ont toutefois retenu
notre attention. Leur point commun? Offrir des produits qui, par
la qualité de leur fabrication, leur
mise en valeur et leur vécu,
obtiennent le titre de perles
rares, éthiques et esthétiques.
Bienne, vivier de talents. Des
perles, on en trouve tout d’abord
chez Julie Bouldoires à Bienne et
ce depuis pas moins de huit ans.
Petite fille, elle aimait jouer avec
les bijoux de sa grand-mère.
Devenue grande, la créatrice de
35 ans a fait de son jeu son
métier. Elle flâne dans les brocantes, plonge dans les collections de ses grands-tantes, à la
recherche d’anciens modèles des
années 30 à 90 qu’elle adapte
ensuite à ce qui se fait
aujourd’hui. Selon les époques,
la matière des articles choisis
change, allant du plastique à la
pierre, en passant par le verre.
«Je ne retiens que les pièces pour
lesquelles j’ai un réel coup de
cœur», précise-t-elle. Une quête
de longue haleine qui lui permet
de façonner des bijoux vintage
et inégalables dans leur genre.
Sous ses doigts, les anciens
modèles deviennent alors
boucles d’oreilles légères et délicates. Assemblés au moyen d’un
fil d’argent ou de vermeil (argent
925 plaqué or), les chapelets,
chaînes et broches forment
quant à eux des colliers uniques
et branchés.
Bien que différent, le travail de
Felix Mosimann s’apparente
quelque part aussi à la bijouterie,
tant il est fin et distingué. Menuisier de métier, ce designer de
53 ans crée des corps lumineux
depuis plus de vingt ans. Des
coupes et des bols, en verre ou
L’Hebdo 5 décembre 2013
Photos: dr∑ sou’al hemma
récup. Transformer les objets au lieu de les jeter, c’est bien. Les embellir
pour qu’ils deviennent design et élégants, c’est encore mieux. Notre sélection.
cristal du siècle passé, tels sont
ses outils principaux. Il les lave et
les perce. Un processus complexe qui nécessite bien souvent
plus d’une journée de travail par
pièce. Puis vient l’étape qu’il préfère: l’assemblage.
«Cette phase, c’est mon dessert,
illustre-t-il. C’est le cadeau
après le travail.» Une, deux,
trois, l’artiste biennois utilise
jusqu’à sept pièces par lampe,
selon son humeur et ses envies.
Résultat: des lustres élégants et
uniques, qu’il dote ensuite d’ampoules halogènes ou de LED.
L’art des contrées lointaines.
Des lumières, on en trouve également au Comptoir des artisans d’ailleurs. Moins raffinées
peut-être, elles s’adressent
5 décembre 2013 L’Hebdo
avant tout à quiconque court
après plus d’exotisme. «En
ce moment, nous travaillons
principalement avec des artisans du Burkina Faso», explique
Romain de Diesbach. Les
critères de sélection résident
dans la qualité du produit,
l’imagination de l’auteur ainsi
que les matières utilisées.
Lampe, table basse et étagère
sont taillées dans des barriques
de pétrole et du verre. Plateau et
figurine proviennent pour leur
part de métal recyclé, chaîne de
vélo et pièces détachées de
moto.
Une fois passés sous les mains
des artisans partenaires du
Comptoir, ces objets nous font
oublier qu’ils étaient à la base
simples déchets.
Fortes d’une habileté tout aussi
exceptionnelle, les personnes
représentées par Inge Sjollema
relèvent également le défi de
donner à d’anciens détritus les
apparats d’accessoires de
valeur.
Ainsi, lorsque l’on entre chez
cette belle femme de 57 ans, on
trouve sur notre gauche des
sacs et pochettes noirs, soulignés d’un ou plusieurs traits de
couleur. Mieux connues sous le
nom de produits de Gafreh
(Groupe d’action des femmes
pour la relance économique du
Houet, l’une des 45 provinces
du Burkina Faso), ces pièces
sont confectionnées à partir de
sachets en plastique, récoltés
dans les rues de Bobo-Dioulasso, deuxième ville du Burkina Faso.
Lavés et séchés, ils sont
ensuite découpés en lamelles,
avant d’être tissés avec du
coton pour devenir ces sacs à
main et trousses, sobres et
fonctionnels, dont on ne soupçonnerait jamais l’origine.
Moins connus, mais tout aussi
intéressants, viennent ensuite
les «sacs en maïs» du Japon.
Déposés sur la droite de leurs
concurrents burkinabés, ces
sacs, originaires de la province
de Fukui, sont réalisés en fibres
d’acide polylactique, obtenu à
partir d’amidon de maïs. Résistants et imperméables, ils sont
avant tout biodégradables:
enterrés, ils se dégradent
entièrement. Portés à l’épaule,
ils peuvent contenir jusqu’à
15 kilos. Magiques, beaux et
pratiques.
Last but not least arrivent alors
les kanthas. De couleurs vives
et variées, on ne peut les rater.
Ce d’autant plus qu’ils trônent
au milieu de la pièce. Très utilisé au Bengale (Etat de l’est de
l’Inde), au Bangladesh et au
Bihar (Etat du nord-est de
l’Inde), kantha se dit d’un travail de broderie réalisé à partir
de restes d’étoffes. Originaires
du village de Kajoli, dans le
sud-ouest du Bangladesh, ceux
de LabelEtoffes sont réalisés à
partir de saris recyclés. Ils se
conjuguent en plaids, housses de
coussins, écharpes et colliers,
uniques et raffinés.√
Julie Bouldoires, Boutique CAYOU, Bienne,
www.cayoubijoux.com
Felix Mosimann, www.kando.ch
Comptoir des artisans d’ailleurs, exposition
temporaire du 23 novembre au 22 décembre
2013, à la galerie d’art L’Aurore, à Sorens (FR).
Exposition permanente à l’ancienne Tuilerie
du Mouret (Praroman, FR), www.lecada.ch
LabelEtoffes, Genève, www.labeletoffes.ch
Actuels
36∑artisanat
Vintage recomposé
Un assemblage
de chapelet, broche
et chaîne, à trouver
chez CAYOU.