place du pessaire dans la prévention de l`accouchement prématuré
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place du pessaire dans la prévention de l`accouchement prématuré
UNIVERSITÉ DE STRASBOURG ÉCOLE DE SAGES-FEMMES DE STRASBOURG ANNÉE UNIVERSITAIRE 2013-2014 PLACE DU PESSAIRE DANS LA PRÉVENTION DE L’ACCOUCHEMENT PRÉMATURÉ DIPLÔME D’ÉTAT DE SAGE-FEMME MÉMOIRE PRÉSENTÉ ET SOUTENU PAR NONNENMACHER Pauline Née le 26 mars 1990 à Sélestat Directeur de mémoire : Docteur Gabrielle FRITZ REMERCIEMENTS Au Docteur Gabrielle Fritz, ma maître de mémoire, qui a su trouver le temps et les mots pour avancer ensemble dans ce travail. À Madame Véronique Paquet, sage-femme enseignante, pour sa disponibilité et son aide précieuse. À ma famille, et plus particulièrement à mes parents, et à ma sœur Marie pour leur présence. À Julien, pour son soutien et sa patience. À tous mes amis qui ont toujours su être là, et plus particulièrement ceux de la promotion 2010-2014, pour ces quatre années vécues ensemble. SOMMAIRE INTRODUCTION ......................................................................................................... 3 I. L’accouchement prématuré ............................................................................... 4 II. Prise en charge d’une menace d’accouchement prématuré .............................. 5 III. Le cas des grossesses multiples....................................................................... 5 IV. L’échographie endo-vaginale ............................................................................ 6 V. Le cerclage et le pessaire ................................................................................. 6 MATÉRIELS ET MÉTHODES ..................................................................................... 9 RÉSULTATS ............................................................................................................. 12 I. Maria Goya, Laia Pratcorona, Carme Merced et al., “Cervical pessary in pregnant women with a short cervix (PECEP): an open-label randomised controlled trial.” ....................................................................................................................... 13 1. Objectif ......................................................................................................... 13 2. Type d’étude ................................................................................................ 13 3. Matériels et méthodes .................................................................................. 13 4. Résultats ...................................................................................................... 15 5. Discussion et conclusion des auteurs .......................................................... 17 6. Analyse critique de l’article ........................................................................... 18 II. Hui SYA, Chor CM, Lau TK, Lao TT, Leung TY. “Cerclage pessary for preventing preterm birth in women with a singleton pregnancy and a short cervix at 20 to 24 weeks: a randomized controlled trial.” ...................................................... 20 1. Objectif de l’étude ........................................................................................ 20 2. Type d’étude ................................................................................................ 20 3. Matériels et méthodes .................................................................................. 20 4. Résultats ...................................................................................................... 22 5. Discussion et conclusion des auteurs .......................................................... 25 1 6. III. Analyse critique de l’article ........................................................................... 25 Liem S, Schuit E, Hegeman M, Bais J, de Boer K, Bloemenkamp K, et al., “Cervical pessaries for prevention of preterm birth in women with a multiple pregnancy (ProTWIN): a multicentre, open-label randomised controlled trial.” ...... 27 1. Objectif de l’étude ........................................................................................ 27 2. Type d’étude ................................................................................................ 27 3. Matériels et méthodes .................................................................................. 27 4. Résultats ...................................................................................................... 29 5. Discussion et conclusion des auteurs .......................................................... 35 6. Analyse critique de l’article ........................................................................... 35 DISCUSSION ............................................................................................................ 37 I. Indication des pessaires .................................................................................. 38 II. Le traitement par pessaire comparé au cerclage et à la progestérone ............ 43 III. L’échographie endovaginale systématique ..................................................... 46 IV. La tolérance maternelle de l’utilisation des pessaires ..................................... 47 V. L’impact psychologique d’une étude réalisée en ouvert et de la menace d’accouchement prématuré .................................................................................... 48 CONCLUSION .......................................................................................................... 49 RÉFÉRENCES .......................................................................................................... 51 ANNEXES 2 INTRODUCTION 3 I. L’accouchement prématuré L’accouchement prématuré se définit comme un accouchement survenant entre 22 et 37 semaines d’aménorrhée (SA), qu’il soit spontané ou induit (1). Il peut être induit en cas de pathologie maternelle et/ou fœtale nécessitant l’interruption de la grossesse. La prématurité concerne environ 7% des naissances en France (2). Les complications d’une naissance prématurée sont corrélées à l’âge gestationnel lors de l’accouchement, mais également au poids de naissance. La prématurité est ainsi divisée en trois groupes (3) : - La prématurité moyenne : de 33 à 36 SA + 6 jours. - La grande prématurité : de 28 à 32 SA + 6 jours. - L’extrême prématurité : les naissances avant 28 SA. La prévention des naissances prématurées est un problème majeur de santé publique. En effet, les complications d’une naissance avant terme, voire prématurissime sont importantes. La prématurité est, avec le retard de croissance intra-utérin, la principale cause de morbidité et de mortalité périnatale (1). Les complications, qui augmentent avec la précocité de l’accouchement, sont nombreuses. On y retrouve principalement (4): - Des pathologies respiratoires : Maladies des membranes hyalines, hémorragies pulmonaires, dysplasies broncho-pulmonaires, - des pathologies neurologiques : hémorragies intra-ventriculaires, leucomalacies, - des complications infectieuses, - des complications hémodynamiques, - des pathologies digestives : entérocolites ulcéro-nécrosantes, - des pathologies oculaires. Les étiologies d’une survenue précoce d’un accouchement (hors accouchement prématuré induit pour pathologie maternelle ou fœtale) lorsqu’elles sont retrouvées, sont multiples et peuvent être classées ainsi (1) : 4 - Causes utérines : malformations, grossesses multiples, béance cervicoisthmique, - Causes placentaires : placenta prævia, - Causes infectieuses. De nombreux facteurs de risques d’accouchement prématuré ont pu être mis en évidence, parmi lesquels les antécédents obstétricaux (antécédent d’accouchement prématuré ou de fausse couche tardive), un niveau socio-économique bas, les femmes de race noire, l’âge maternel, les grossesses multiples, le diabète maternel, et l’hypertension artérielle (3). Si beaucoup d’accouchements prématurés sont précédés d’une menace d’accouchement prématuré (qui se définit par des contractions utérines associées à des modifications cervicales) d’autres en revanche surviennent chez des femmes asymptomatiques chez qui le col s’est modifié à bas bruit (1). II. Prise en charge d’une menace d’accouchement prématuré Outre la mise au repos, une menace d’accouchement prématuré (MAP) peut être traitée par l’administration de tocolytiques. Il en existe trois classes médicamenteuses (1) : · Les b-mimétiques qui sont de moins en moins utilisés en raison de leurs effets indésirables. · Les inhibiteurs calciques qui empêchent l’élévation du taux de calcium intracellulaire et donc la contraction de la fibre musculaire. · Enfin, les antagonistes de l’ocytocine, qui empêchent l’action de l’ocytocine en se liant à ses récepteurs. Une corticothérapie anténatale est également administrée en cas de MAP inférieure à 35 SA. Elle permet de réduire la mortalité néonatale, les détresses respiratoires des nouveau-nés et les hémorragies intra-ventriculaires. C’est la seule thérapeutique ayant fait preuve de son efficacité (1). III. Le cas des grossesses multiples Les grossesses multiples, favorisées par l’assistance médicale à la procréation, représentent à elles seules, un facteur de risque considérable d’accouchement 5 prématuré. En effet, 17% d’entre eux concernent des grossesses gémellaires et 53% des grossesses multiples accoucheraient prématurément (3). Ce risque s’explique par la sur-distension utérine, et le taux plus fréquent de rupture prématurée des membranes lors de ces grossesses(1). IV. L’échographie endo-vaginale L’échographie par voie vaginale permet de mesurer la longueur du canal cervical du col de l’utérus. Or, il a été démontré à plusieurs reprises l’existence d’un lien entre la longueur du canal cervical et le risque d’accouchement prématuré spontané. En effet, un col très court sera un facteur de risque important d’accoucher prématurément (5). D’après un rapport de la Haute Autorité de Santé (HAS), l’intérêt de cette mesure résulte de l’apport ou non d’un rapport bénéfices/risques favorable. Selon l’HAS, cette mesure est intéressante pour déterminer le mode de prise en charge des femmes symptomatiques, en revanche chez des femmes asymptomatiques, elle n’est intéressante que s’il existe d’autres facteurs de risques associés (6). V. Le cerclage et le pessaire Une autre méthode pour traiter la menace d’accouchement prématuré ou pour prévenir l’accouchement prématuré est le cerclage du col. Ce cerclage, prophylactique ou thérapeutique existe depuis de nombreuses années, mais n’est efficace que dans des situations précises, notamment lors d’incompétence cervicale (7). Selon un rapport de la Cochrane publié en 2012, le cerclage est intéressant pour des femmes à haut risque d’accouchement prématuré (8). Le pessaire quant à lui, considéré comme non invasif par rapport au cerclage du col, non opérateur dépendant, d’utilisation facile et de faible coût est resté longtemps peu utilisé, notamment en raison d’absence de preuves de son efficacité. Pourtant, il représenterait depuis plus d’un demi-siècle une alternative au cerclage ou aux autres traitements de l’accouchement prématuré. 6 Le pessaire le plus fréquemment utilisé en cas de traitement d’une MAP, est le pessaire d’Arabin, consistant en un anneau en silicone, flexible et disponible en plusieurs tailles (9) (photos en annexe I). Le pessaire est inséré au fond du vagin afin que son diamètre externe soit supporté par le plancher pelvien et que le diamètre interne encercle le col de l’utérus. Une fois le terme de 37 SA atteint, le pessaire peut être retiré (9). Son mécanisme d’action reste à ce jour inexpliqué. Souvent on a supposé que c’est l’inclinaison du canal cervical vers l’arrière qui, en modifiant l’angle du col de l’utérus, amène le poids de la grossesse sur le segment inférieur antérieur (10). D’autres auteurs ont supposé que c’est la compression du canal cervical qui joue un rôle, notamment en protégeant d’éventuels infections (11). Enfin, le pessaire pourrait atténuer la pression exercée par la tête fœtale sur l’orifice interne du col (12). L’utilisation première du pessaire dans les études (les premières datant des années 1950) concernait les cas d’incompétences cervicales. Ce n’est qu’à partir des années 2000 que le pessaire s’est également vu attribuer un rôle dans des cas de col court chez des femmes non symptomatiques. Jusqu’à récemment aucune étude ne permettait d’affirmer l’intérêt du pessaire dans la prévention des accouchements prématurés en raison de méthodologies peu valides (études souvent rétrospectives, absence de groupe contrôle, …). C’est ainsi qu’en 2010, la Cochrane publiait une revue de la littérature qui concluait en l’absence d’études méthodologiquement satisfaisantes pour déterminer de l’intérêt d’un pessaire cervical en cas de menace d’accouchement prématuré (13). Depuis cette publication, plusieurs études ont été publiées, apportant des données nouvelles. C’est pourquoi, nous avons souhaité, par ce travail, réaliser un état des lieux sur les données actuelles, en nous demandant si en effet, le pessaire peut avoir un rôle dans la prévention de l’accouchement prématuré ou non. Afin de répondre à cette question, nous avons réalisé une revue de la littérature scientifique internationale. Dans un premier temps nous exposerons les méthodes de travail utilisées pour l’élaboration de notre mémoire. Dans un second temps nous étudierons trois articles sélectionnés en les décrivant et en les analysant. Pour finir, 7 nous réaliserons une discussion autour des résultats obtenus, en les confrontant entre eux et en les comparant à d’autres publications de la littérature scientifique. 8 MATÉRIELS ET MÉTHODES 9 Notre travail de recherche reposant sur une revue de la littérature, nous avons utilisé les bases de données bibliographiques suivantes pour effectuer notre travail : - « Pubmed-Medline » - « EM Premium » - « Science Direct » Pour se faire nous avons utilisé le portail terminologique de santé du CISMEF afin d’obtenir les mots clés suivants, et de les associer entre eux : à « Pessaries » à « Premature birth » à « Premature » La recherche bibliographique a été réalisée d’avril 2013 à décembre 2013. Une première lecture de survol a permis de mettre en évidence les articles qui correspondaient à nos objectifs de recherches. De plus, la consultation des références de chaque article nous a permis de compléter notre bibliographie. Une fois notre présélection faite, nous avons regardé de plus près la méthodologie des articles, le type d’étude réalisée, l’intérêt de leurs résultats, ainsi que leur date et revue de parution. C’est ainsi que nous avons choisi d’apporter dans nos résultats trois articles récents, en les analysant à l’aide de la grille de lecture de la méthode globale de lecture critique d’articles médicaux (annexe II). Ces trois articles, les plus récents sur le sujet, sont également les premiers à présenter une méthodologie valide. Il s’agit de trois études prospectives et randomisées : I) Goya M, Pratcorona L, Merced C, Rodó C, Valle L, Romero A, et al. “Cervical pessary in pregnant women with a short cervix (PECEP): an open-label randomised controlled trial” publiée en 2012 dans le Lancet (14). 10 Cette étude espagnole évalue l’intérêt des pessaires dans la prévention des accouchements prématurés chez des femmes dépistées par échographie transvaginale, comme à risque du fait d’un col court. II) Hui SYA, Chor CM, Lau TK, Lao TT, Leung TY. “Cerclage pessary for preventing preterm birth in women with a singleton pregnancy and a short cervix at 20 to 24 weeks: a randomized controlled trial.” Publiée en avril 2013 dans l’American Journal of Perinatology (15). De la même façon cette étude chinoise cherche à mettre en évidence l’intérêt du pessaire dans la prophylaxie de l’accouchement prématuré chez des femmes asymptomatiques avec un col de l’utérus raccourci. III) Liem S, Schuit E, Hegeman M, Bais J, de Boer K, Bloemenkamp K, et al. “Cervical pessaries for prevention of preterm birth in women with a multiple pregnancy (ProTWIN): a multicentre, open-label randomised controlled trial” issue du Lancet d’octobre 2013 (11). Cette étude néerlandaise évalue la place du pessaire dans la prévention des accouchements prématurés chez des femmes asymptomatiques avec une grossesse multiple. Afin de répondre à nos interrogations et de conclure au mieux, nous commencerons par analyser ces trois articles, puis dans un partie discussion nous confronterons leurs résultats entre eux, mais également à d’autres publications. Notre bibliographie a été réalisée avec l’aide du logiciel ZoteroÒ, selon les normes de Vancouver. 11 RÉSULTATS 12 I. Maria Goya, Laia Pratcorona, Carme Merced et al., “Cervical pessary in pregnant women with a short cervix (PECEP): an open-label randomised controlled trial.”(14) Il s’agit d’une étude espagnole, réalisée au sein de 5 centres hospitaliers de juin 2007 à juin 2010. Elle a été publiée en avril 2012 dans la revue anglaise le Lancet. 1. Objectif Cette étude évalue l’intérêt de l’insertion d’un pessaire pour prévenir l’accouchement prématuré, chez des femmes enceintes asymptomatiques présentant un col raccourci. 2. Type d’étude Il s’agit d’une étude multicentrique prospective ouverte, randomisée et contrôlée. 3. Matériels et méthodes 3.1. Population étudiée et méthodes de mesure L’étude est multicentrique. Les auteurs ont évalué chez des femmes asymptomatiques, âgées de 18 à 43 ans, avec une grossesse mono-fœtale, la mesure échographique du col utérin, lors des deuxièmes échographies de surveillance (de 18 à 22 semaines d’aménorrhée). Les femmes présentant un col de l’utérus long de 25 millimètres (mm) ou moins étaient invitées à participer à l’étude. Les critères d’exclusion étaient : - Un fœtus présentant une anomalie, - des contractions utérines douloureuses et régulières, - des métrorragies, - une rupture des membranes, - un placenta prævia, - un antécédent de conisation, - un antécédent de cerclage cervical. 13 3.2. Les critères de jugement 3.2.1 Le critère de jugement principal Il a été défini comme étant l’accouchement prématuré spontané survenant avant 34 semaines d’aménorrhée. 3.2.2 Les critères de jugement secondaires Ils concernaient des critères maternels et néonataux. Il s’agit de : - Des taux d’accouchements spontanés ayant eu lieu avant 28 et 37 SA. - l’âge gestationnel au moment de l’accouchement, - l’administration de traitements tocolytiques, - l’utilisation de corticoïdes pour la maturation pulmonaire du fœtus, - les cas de chorioamniotite, - les métrorragies, - les ruptures prématurées des membranes, - les césariennes, - les effets indésirables (pertes vaginales, repositionnement du pessaire, ablation du pessaire), - de critères périnataux : Mort fœtale, mort néonatale, poids de naissance inférieur à 1500 grammes (g.) et inférieur à 2500 g, - de critères néonataux : entérocolites ulcéro-nécrosantes, hémorragies intra-ventriculaires, syndromes de détresse respiratoire, rétinopathies, ou sepsis traité. 3.3. Randomisation Les patientes incluses dans l’étude ont été séparées en deux groupes distincts : · Un groupe « pessaire » : comprenant des femmes asymptomatiques avec un col inférieur ou égal à 25 mm traitées par pessaire. · Un groupe « contrôle » ou témoin : le même type de femmes, sans traitement préventif. La randomisation a été réalisée par l’unité statistique de l’hôpital du Vall d’Hebron à Barcelone. Avec une stratification par centre et par parité. 14 3.4. Interventions / Moyens de mesure Dans le groupe pessaire l’absence d’infection vaginale était systématiquement vérifiée et traitée le cas échéant avant l’insertion d’un pessaire. Chez toutes ces femmes, le type de pessaire inséré était un pessaire d’Arabin, de forme convexe, et était placé autour du col de l’utérus. Le pessaire était enlevé à 37 semaines d’aménorrhée (SA) ou avant, en cas d’un des signes suivants : - Des métrorragies actives, - un risque de mise en travail prématuré avec persistance de contractions utérines malgré une tocolyse, - un inconfort sévère ressenti par la patiente. Aucune patiente n’a été exclue de l’étude du fait de l’analyse en intention de traiter. Chaque femme participant à l’étude était suivie mensuellement par une équipe dédiée spécifiquement à l’étude. 3.5. Analyse statistique La taille de l’échantillon nécessaire afin d’obtenir une puissance suffisante était de 380 femmes avec un col inférieur ou égal à 25 mm. Ainsi, en considérant que la prévalence des femmes avec un col raccourci mesurant 25 mm ou moins est de 8%, l’étude nécessitait l’inclusion de 4750 femmes. Ce sont les tests de Mann-Whitney U et de Fisher qui ont permis la comparaison des deux groupes. Toutes les analyses ont été faites selon la méthode d’intention-detraiter avec le logiciel SPPS, version 16.0. Les résultats étaient considérés comme statistiquement significatifs quand p était inférieur à 0,05. 4. Résultats 4.1. Patientes incluses 15 L’étude, réalisée de juin 2007 à juin 2010, a permis de proposer à 18 235 femmes de participer au dépistage échographique de la longueur cervicale et ainsi d’entrer dans l’étude. 11 875 d’entre elles ont accepté. La longueur moyenne des cols de l’utérus mesurés à l’échographie était de 34 mm. 726 femmes avaient un col mesuré à moins de 25 mm, soit 6% des patientes. 385 d’entre elles ont été incluses dans l’étude. Deux groupes ont été randomisés : · 192 femmes chez qui un pessaire a été mis en place : le groupe « pessaire ». · 193 femmes chez qui aucun dispositif n’a été utilisé : le groupe « contrôle ». 4.2. Les accouchements spontanés avant 34 semaines d’aménorrhée Il s’agit du critère de jugement principal. Ils étaient significativement supérieurs dans le groupe « contrôle » : 27% contre 6% dans le groupe « pessaire » (p<0,0001). Les chiffres obtenus sont restés semblables en les ajustant à l’âge maternel, à l’indice de masse corporelle, à l’origine ethnique, aux antécédents chirurgicaux et à la longueur du col utérin à l’initiation de l’étude. 4.3. Les critères de jugement secondaires La rupture prématurée des membranes : Elle n’a eu lieu que chez trois femmes du groupe « pessaire » (2%), contre 17 dans le groupe « contrôle » (9%) (p=0,0013). Les critères néonataux : - Les enfants de poids de naissance inférieur à 1500 grammes étaient 9 soit 5% dans le groupe « pessaire » contre 26 enfants (14%) dans le groupe « contrôle » (p=0,0040). - Ceux de poids inférieur à 2500 grammes à la naissance étaient 17 (9%) dans le groupe « pessaire » contre 56 (29%) dans le groupe « contrôle » (p<0,0001). 16 Seul le taux de mortalité néonatale est resté identique : 0 enfant dans le groupe « pessaire » et 1 enfant sur 190 dans le groupe « contrôle ». Les critères périnataux quant à eux ne sont pas différents, sauf pour le syndrome de détresse respiratoire : 5 enfants dans le groupe pessaire (3%) contre 23 enfants (12%) du groupe « contrôle ». Les cas d’entérocolites ulcéro-nécrosantes, d’hémorragies intra-ventriculaires, de rétinopathies et les cas de sepsis ne sont pas statistiquement différents entre les deux groupes. Les autres critères de jugement sont représentés dans le tableau ci-dessous. Tableau I : Les critères de jugement secondaires Groupe "pessaire" Groupe "contrôle" Valeur de p 0,0058 Accouchements < 28 SA 4 (2%) 16 (8%) Accouchements < 37 SA 41 (22%) 113 (59%) < 0,0001 37,7 34,9 < 0,0001 Traitements tocolytiques 64 (34%) 101 (53%) < 0,0001 Corticothérapies 80 (42%) 121(64%) < 0,0001 Chorioamniotites 5 (3%) 6 (3%) Âge gestationnel à l'accouchement (en SA) 0,7596 D’après un questionnaire, 95% des femmes incluses dans le groupe « pessaire » recommanderaient ce dispositif à d’autres femmes. Les effets indésirables étaient plus nombreux dans le groupe « pessaire », avec notamment une augmentation des pertes vaginales. 5. Discussion et conclusion des auteurs D’après les auteurs, l’utilisation des pessaires dans la prévention des accouchements prématurés est une alternative intéressante, d’autant plus que l’insertion d’un pessaire est une procédure non invasive et facile à réaliser. Mais cette alternative nécessite un dépistage de la longueur du col utérin, qui si elle est 17 inférieure à 25 mm serait le meilleur facteur prédictif d’un accouchement prématuré avant 35 SA. Pour eux, d’autres études multicentriques et randomisées sont nécessaires pour confirmer ces résultats. 6. Analyse critique de l’article 6.1. Le titre Le titre est clair et il est en accord avec le contenu de l’article. 6.2. Objectif L’objectif des auteurs est clairement formulé au début de l’abstract ainsi que dans le titre de l’article. 6.3. Type d’étude et structure Il s’agit d’une étude multicentrique, prospective, randomisée, ouverte. Ce type d’étude correspond à un niveau de preuve de grade A, c'est-à-dire de preuve scientifique établie (annexe II). La structure IMRAD (introduction, methods, results and discussion) a été respectée. 6.4. Auteurs et publication L’article a été publié dans une revue de qualité, le Lancet, dont l’impact factor en 2012 atteignait 39,06. Les auteurs ont déjà publié des articles sur le sujet, ce qui atteste d’une bonne expertise du sujet. 6.5. Validité interne Un consentement éclairé a été signé par chaque patiente avant d’être incluse dans l’étude et le comité d’éthique de chaque hôpital participant à l’étude a accepté le protocole prévu. 18 Les critères de jugement ont été clairement définis et sont en accord avec l’objectif. La méthodologie de l’étude a bien été précisée. Les critères d’inclusion et d’exclusion ont été correctement précisés. Étant donné qu’un essai en aveugle était impossible si l’on voulait pouvoir inclure un groupe témoin, chez qui aucune insertion vaginale n’était faite, l’essai en ouvert se justifie pour cette étude. Sa durée (3 ans) a permis d’obtenir un échantillon suffisant de femmes pour avoir des résultats statistiquement significatifs avec une puissance de 80%. La randomisation a bien été effectuée, avec des patientes présentant les mêmes caractéristiques, évitant les biais de sélection. Ainsi, les deux groupes sont comparables. 6.6. Validité externe L’étude est cohérente avec les connaissances actuelles et les auteurs ont pris soin de comparer leurs résultats à d’autres études concernant ce sujet. 6.7. Pertinence clinique L’étude montre un taux d’efficacité intéressant du pessaire pour la prévention des accouchements prématurés, tous les résultats étant significatifs. Cet article permet de conclure en un rapport bénéfices/risques favorable. De plus, le coût d’un pessaire est négligeable (38 euros selon Goya et al.). Les patientes semblent représentatives de notre pratique courante et la taille de l’essai est pertinente. 19 II. Hui SYA, Chor CM, Lau TK, Lao TT, Leung TY. “Cerclage pessary for preventing preterm birth in women with a singleton pregnancy and a short cervix at 20 to 24 weeks: a randomized controlled trial.” (15) Il s’agit d’une étude chinoise, réalisée dans un centre hospitalier de Hong-Kong, d’octobre 2008 à novembre 2011, qui a été publiée en 2013 dans l’American Journal of Perinatology. 1. Objectif de l’étude L’objectif de l’étude est de déterminer l’efficacité des pessaires dans la prévention des accouchements prématurés, chez des femmes asymptomatiques qui ont un col mesurant moins de 25 mm, entre 20 et 24 semaines d’aménorrhée (SA). 2. Type d’étude Il s’agit d’une étude prospective contrôlée, monocentrique, randomisée, en simple aveugle. 3. Matériels et méthodes 3.1. Population étudiée Chaque patiente dont le col utérin était inférieur à 25 mm était invitée à participer à l’étude. Les critères d’inclusion étaient : · Une grossesse mono-fœtale. · Une longueur cervicale inférieure à 25 mm entre 20 et 24 SA. Les critères d’exclusion étaient : · Un antécédent d’incompétence cervicale, · un cerclage du col (pour la grossesse actuelle ou antérieure), · les grossesses gémellaires, · des anomalies fœtales majeures, · une dilatation cervicale, · des contractions utérines douloureuses, · des membranes rompues. 20 3.2. Méthodes et randomisation Lors de l’échographie morphologique classique du fœtus, entre 20 et 24 SA, la mesure du col utérin de chaque patiente était réalisée. Cette mesure permettait de déterminer, en fonction des critères d’inclusion et d’exclusion, les patientes pouvant rentrer dans l’essai. Avant toute randomisation, l’évaluation de la dilatation du col par examen au spéculum était réalisée. Une fois leur consentement recueilli, les patientes étaient réparties par randomisation en deux groupes : - Un groupe « pessaire » : où les femmes étaient traitées par la mise en place d’un pessaire d’Arabin, dont la taille était adaptée à la parité et à la longueur cervicale. - Un groupe témoin ou contrôle : où aucun traitement préventif n’a été mis en place. Dans les deux groupes les caractéristiques cliniques étaient identiques et se retrouvaient dans les mêmes proportions. Un examen au spéculum était réalisé ainsi qu’un prélèvement bactériologique vaginal. Afin de réaliser l’étude en simple aveugle, c'est-à-dire en aveugle pour les patientes, un toucher vaginal était réalisé chez les femmes du groupe « contrôle », simulant l’insertion d’un pessaire. L’extraction du pessaire était réalisée en cas de rupture prématurée des membranes, de saignements vaginaux ou de contractions utérines douloureuses, sinon, le pessaire était retiré à 37 SA. Toutes les femmes incluses dans l’étude étaient surveillées échographiquement tous les mois, jusqu’à 34 SA (croissance fœtale mais aussi longueur cervicale par voie vaginale). Si la longueur du col devenait inférieure à 10 mm, une cure de dexaméthasone était réalisée. 21 3.3. Les critères de jugement 3.3.1 Le critère de jugement principal Il s’agit de l’accouchement prématuré qui a lieu avant 34 SA. 3.3.2 Les critères de jugement secondaires Les critères de jugement secondaires sont les suivants : - Âge gestationnel à l’accouchement, - intervalle de temps écoulé entre le moment de la randomisation et de l’accouchement, - apparition d’infections vaginales, - poids de naissance des nouveau-nés, - taux de fausses couches et de morts néonatales, - des critères néonataux défavorables : jaunisses, septicémies, hémorragies intra-ventriculaires, et syndromes de détresse respiratoire. 3.4. Analyse statistique L’échantillon de femmes nécessaire à l’étude était de 1120 femmes avec un col inférieur à 25 mm. Ce chiffre a été calculé pour que l’étude atteigne une puissance de 80% : le taux d’accouchement spontané avant 34 SA dans le « groupe contrôle » de 8%, devait diminuer à 4% dans le « groupe pessaire ». L’analyse a été réalisée en intention-de-traiter. Une différence significative était représentée par une valeur de p inférieure ou égale à 0,05. 4. Résultats 4.1. Taille de l’échantillon D’octobre 2008 à février 2011 l’évaluation échographique de la longueur du col a été réalisée chez 4438 femmes. 203 d’entres elles avaient une longueur cervicale inférieure à 25 mm et 108 femmes chinoises ont finalement été incluses dans l’étude. Elles ont été randomisées en deux groupes : 22 · 53 femmes pour le groupe « pessaire » dans lequel la longueur cervicale moyenne était de 19,6 mm. · 55 femmes dans le groupe « contrôle », où la longueur cervicale moyenne était de 20,5 mm. 4.2. Le taux d’accouchements prématurés Aucune différence statistiquement significative n’est apparue entre les deux groupes. 5 accouchements (9,4%) ont eu lieu avant 34 SA dans le groupe « pessaire », contre 3 (5,5%) dans le groupe contrôle. Le nombre d’accouchement en fonction du terme a été représenté dans le tableau ci-dessous. Tableau II : Nombre d’accouchement prématuré en fonction du terme Âge gestationnel à Groupe Groupe Valeur de p l'accouchement "pessaire" "contrôle" Inférieur à (<) 37 SA 8 (15,1%) 10 (18,2%) 0,67 < 34 SA 5 (9,4%) 3 (5,5%) 0,46 < 30 SA 3 (5,7%) 3 (5,5%) 1 < 28 SA 2 (3,8%) 3 (5,5%) 1 < 26 SA 1 (1,9%) 3 (5,5%) 0,62 < 24 SA 0 2 (3,6%) 0,5 Moyenne (en SA) 38,1 37,8 0,68 4.3. Critères de jugement secondaires Aucun d’entre eux n’a révélé de différences statistiquement significatives entre les deux groupes. - L’intervalle de temps écoulé entre le moment de la randomisation et de l’accouchement : Il était de 113,6 jours dans le groupe « pessaire » contre 111,9 jours dans le groupe « contrôle » (p=0,72). - Rupture prématurée des membranes : 6 dans le groupe « pessaire » contre 8 dans le groupe « contrôle » (p= 0,62). 23 - Poids de naissance des nouveau-nés : 2 840 grammes (g.) dans le groupe « pessaire » contre 2 953 g. dans le groupe « contrôle » (p= 0,38). - Injection de déxaméthasone : Une cure (4 doses de 6 mg à 12 heures d’intervalle) a été nécessaire chez 9 patientes avec un pessaire, soit 17%, contre 8 femmes du groupe contrôle, soit 14,5% (p=0,73). - Les effets indésirables : Ils étaient significativement plus fréquents au sein du groupe « pessaire ». Vingt-cinq patientes se sont plaintes d’augmentation des pertes vaginales, quatre de sensations de pression, une de saignements vaginaux, une autre de douleur au niveau du vagin, et une patiente souffrait de rétention urinaire. Le pessaire s’est déplacé chez 2 patientes, nécessitant son replacement. - Les critères périnataux : Ils sont représentés dans le tableau suivant. Tableau III : Taux des critères périnataux dans chacun des deux groupes Valeur de p Groupe Groupe "Pessaire" "Contrôle" 3 (5,7%) 5 (9,4%) 0,72 15 (28,3%) 14 (26,4%) 0,91 5 (9,4%) 2 (3,8%) 0,44 Hémorragie intraventriculaire 0 1 (1,9%) 1 Admission en unité de soins intensifs Mortalité néonatale 21 (39,6%) 17 (32,1%) 0,54 1 (1,9%) 0 0,49 Septicémie Ictère néonatal Détresse respiratoire Aucun de ces critères périnataux ne présente de différences significatives entre les deux groupes. 24 5. Discussion et conclusion des auteurs Pour les auteurs, l’étude présente de grandes similarités avec celle de Goya et son équipe faite en Espagne (l’étude PECEP). Mais leurs résultats ne sont pas du tout semblables. C’est pourquoi Hui et son équipe ont publié prématurément leur résultats. Pour eux, une telle discordance entre les résultats impose la réalisation de nouvelles études avant de généraliser l’utilisation des pessaires dans la prévention des accouchements prématurés chez des femmes ayant un col utérin court. 6. Analyse critique de l’article 6.1. Titre Le titre est clair, il indique clairement l’objectif et le type d’étude. 6.2. Objectif Il est clairement défini dans le résumé. 6.3. Type d’étude et structure La méthode de l’étude est adéquate pour répondre à la question posée. L’étude comparative randomisée, prospective apporte un bon niveau de preuve, mais la faible puissance de cette étude ne représente qu’un grade B des recommandations (annexe II). La structure IMRAD (introduction, methods, results and discussion) a bien été respectée. Les critères d’inclusion et d’exclusion sont bien décrits. Les critères de jugement choisis sont pertinents et ont bien été évalués. 6.4. Auteurs et publication L’article a été publié dans l’American Journal of Perinatology, une revue dont l’impact factor en 2012 était de 1,574. Les auteurs avaient déjà publié en 2012 un article sur l’utilisation des pessaires lors d’insuffisances cervicales, ce qui démontre une bonne connaissance du sujet. 25 6.5. Validité interne La validité interne de l’étude est remise en cause par la faiblesse de l’échantillon analysé qui entraine un manque très net de puissance, empêchant d’obtenir des résultats statistiquement significatifs. Ce faible échantillon est regrettable d’autant plus que nous avons remarqué que le recrutement a été lent : seules 100 femmes sont entrées dans l’étude en 37 mois d’inclusion. Cette faible puissance des résultats est reprochable, d’autant plus que la publication de l’étude a été incitée par la sortie de l’étude espagnole PECEP de Goya, publiée dans le Lancet en avril 2012. En effet, en constatant le faible échantillon recruté (108 femmes) au bout de trois ans, les auteurs ont réalisé une étude intermédiaire pour décider de l’évolution de leur étude. Au même moment est parue l’étude espagnole de Goya et son équipe. Les importantes discordances entre leurs résultats et ceux de l’étude espagnole ont incité les auteurs à arrêter leur étude et à publier leurs résultats intermédiaires. Mise à part le faible échantillon de patientes obtenu, la méthodologie des auteurs est pertinente. 6.6. Validité externe Les auteurs n’ont comparé leurs résultats qu’avec ceux de l’étude de Goya, que nous avons détaillée en première partie. La cohérence externe est remise en question par ces résultats fortement discordants avec la récente étude espagnole. En effet, alors que Goya et son équipe trouvaient des résultats significatifs en faveur de l’utilisation des pessaires, Hui et son équipe ont trouvé des résultats opposés. Cependant, les résultats de Hui et al. ne sont pas statistiquement significatifs, leur effectif est moindre et l’on peut ajouter que leur étude a été publiée dans une moins bonne revue que celle de Goya. 26 III. Liem S, Schuit E, Hegeman M, Bais J, de Boer K, Bloemenkamp K, et al., “Cervical pessaries for prevention of preterm birth in women with a multiple pregnancy (ProTWIN): a multicentre, open-label randomised controlled trial.”(11) Cette étude, publiée en 2013 dans le Lancet est une étude néerlandaise qui s’intéresse aux grossesses multiples. Elle a été réalisée de septembre 2009 à mars 2012. 1. Objectif de l’étude L’objectif de cette étude était d’évaluer la capacité des pessaires cervicaux à prévenir la morbidité néonatale secondaire à un accouchement prématuré lors de grossesses multiples. 2. Type d’étude Il s’agit d’une étude prospective randomisée, ouverte. Multicentrique, elle a été réalisée au sein de 40 hôpitaux néerlandais. 3. Matériels et méthodes 3.1. Population étudiée Les femmes présentant une grossesse multiple entre 12 et 20 semaines d’aménorrhée (SA) ont pu être incluses dans l’étude. 3.2. Critères d’inclusion L’étude incluait toutes grossesses multiples entre 12 et 20 SA, quelque soit la longueur du col utérin mesurée entre 16 et 22 SA. 3.3. Critères d’exclusion Les critères d’exclusion étaient les suivants : - Des anomalies congénitales chez un fœtus, - une mort fœtale, - la présence d’un syndrome transfuseur-transfusé, - un placenta prævia. 27 3.4. Randomisation Les patientes incluses étaient randomisées en deux groupes : · Un groupe « pessaire » dans lequel était inséré un pessaire cervical. · Un groupe « contrôle » ou témoin, où aucun traitement préventif n’a été mis en place. L’inclusion dans un des deux groupes ne pouvait être réalisée à l’aveugle en raison de l’insertion d’un pessaire dans un seul des groupes uniquement. Dans les deux groupes, les caractéristiques des patientes étaient similaires. 3.5. Méthode Une mesure de la longueur cervicale était réalisée chez chaque patiente participant à l’étude au moment de la randomisation. Dans le groupe « pessaire », un pessaire d’Arabin était inséré par une sage-femme ou un obstétricien entre la 16ème et la 20ème SA. Afin d’insérer la taille appropriée à chaque femme, un examen du col au spéculum était effectué avant l’insertion. L’ablation du pessaire avait lieu à 36 SA, ou avant en cas de : - rupture prématurée des membranes, - métrorragies, - menace d’accouchement prématuré, - d’inconfort sévère lié à la présence du pessaire. À l’exception de l’insertion du pessaire, les deux groupes étaient traités de la même façon. 3.6. Critères de jugement 3.6.1 Le critère de jugement principal Il s’agissait d’un critère composite de morbidité néo-natale, en lien avec la prématurité, qui inclut au moins un des critères suivants : - Mort-né, - des leucomalacies périventriculaires, 28 - un syndrome de détresse respiratoire, - une dysplasie broncho-pulmonaire, - une hémorragie intra-ventriculaire de stades 3-4, - une entérocolite ulcéro-nécrosante, - un sepsis prouvé, - une mort néonatale (survenant jusqu’à 6 semaines après la date du terme prévu). 3.6.2 Les critères de jugement secondaires - Le terme lors de l’accouchement, - les accouchements ayant lieu avant 32 SA et avant 37 SA, - le nombre de jours passés en unité de soins néonataux intensifs, - les jours d’hospitalisation maternelle pour MAP, - la morbidité maternelle : complications thromboemboliques, infections des voies urinaires traitées par antibiotiques, pneumonies, endométrites, éclampsie, HELLP syndromes, décès maternel. 3.7. Analyse statistique Les analyses statistiques ont été réalisées en intention de traiter modifiée. Un résultat statistiquement significatif était représenté par une valeur de p inférieure ou égale à 0,049. Au départ, les auteurs prévoyaient de réaliser l’analyse d’un sous-groupe constitué des femmes avec un col de l’utérus inférieur à 25 mm. Mais étant donné le faible nombre de patientes avec un col utérin inférieur à 25 mm : 9 femmes (3 dans le groupe « pessaire » et 6 dans le groupe « contrôle »), les auteurs ont décidé de réaliser une analyse statistique d’un autre sous-groupe : celui des femmes ayant un col utérin mesurant moins du 25ème percentile : c'est-à-dire un col inférieur à 38 mm à l’échographie endo-vaginale pratiquée entre 16 et 22 SA. 4. Résultats 4.1. Randomisation et caractéristiques des patientes : 29 En 3 ans (de septembre 2009 à mars 2012) la participation de 813 femmes a permis de réaliser deux groupes : è Un groupe « contrôle » : incluant 410 femmes. è Un groupe « pessaire » : incluant 403 femmes. Les caractéristiques des patientes et notamment la longueur cervicale (44,2 mm dans le groupe « contrôle » et 43,6 mm dans le groupe « pessaire »), ainsi que les autres facteurs de risque d’accouchement prématuré étaient identiques entre les deux groupes. Ces caractéristiques ont été regroupées dans le tableau ci-dessous : Tableau IV : Caractéristiques des patientes Âge maternel (en années) Groupe Groupe "contrôle" "pessaire" 32,7 33,1 Antécédents d'accouchement prématuré 26 (6%) 29 (7%) Grossesses monochoriales 100 (24%) 87 (22%) Âge gestationnel à la randomisation 17,0 (SA) 16,9 (SA) Grossesses triples 9 (2%) 9 (2%) Nombre total de femmes 410 403 4.2. Insertion et ablation du pessaire : L’insertion a été faite avant 16 SA pour 18 patientes et après 20 SA pour deux patientes. L’âge gestationnel moyen lors de l’insertion du pessaire était de 18,7 SA. Dans le groupe « pessaire » : 23 femmes n’ont pas eu de pessaire pour différentes raisons : 10 se sont retirées de l’étude, 5 ont eu un cerclage, 4 femmes avaient un placenta prævia, 1 femme a accouché avant l’insertion du pessaire et 4 sans raisons spécifiques. 30 Le tableau suivant décrit les cas d’ablation du pessaire avant 36 SA. Ils sont répartis en trois groupes : - Avant 28 SA. - Entre 28 et 32 SA. - Entre 32 et 36 SA. Tableau V : Les causes d’ablation du pessaire avant 36 SA <28 SA entre 28 et 32 entre 32 et 36 SA SA 9 (16%) 6 (27%) 29 (27%) Métrorragies 8 (14%) 1 (5%) 2 (2%) Contractions utérines 5 (9%) 10 (45%) 31 (29%) Douleurs 17 (30%) 2 (9%) 4 (4%) Pertes vaginales 7 (12%) 0 2 (2%) Induction du travail 2 (4%) 2 (9%) 21 (20%) Expulsion du pessaire 7 (12%) 1 (5%) 1 (1%) Sans raison 2 (4%) 0 3 (3%) Raison logistique / / 14 (13%) Total 57 (14%) 22 (5%) 107 (27%) Ruptures prématurées des membranes Certaines de ces patientes ont accouché rapidement, dans les 48 heures suivant l’ablation du pessaire : - Dans le groupe où le pessaire a été enlevé avant 28 SA : 7/57 (12%) femmes ont accouché dans les 48 heures après l’ablation du pessaire. - Dans le groupe où l’ablation a eu lieu entre 28 et 32 SA : elles ont été 13/22 (59%) à accoucher dans les 48 heures suivant l’ablation du pessaire. - Dans le dernier groupe (ablation entre 32 et 36 SA) : elles étaient 70/107 (65%) dans cette situation. 31 4.3. Mesure de la longueur cervicale : La mesure de la longueur du col n’a pas été réalisée chez chaque patiente. Elle a été plus fréquente dans le groupe « pessaire » (81% versus 71% dans le groupe « contrôle »). Tableau VI : Évaluation de la longueur cervicale Nombre de femmes où la mesure a été Groupe Groupe "contrôle" "pessaire" 293 (71%) 328 (81%) Moyenne des longueurs cervicales 44,2 mm 43,6 mm Âge gestationnel lors de la mesure 18,6 SA 18,4 SA 4 (1%) 5 (1%) faite cervicale Présence d'un funnel Cependant une analyse statistique a permis de constater que l’absence de valeur de la longueur initiale des cols utérins n’a pas eu d’effet sur les résultats. 4.4. Le cerclage : Cinq femmes chez qui l’insertion d’un pessaire été prévue ont eu un cerclage à la place. Parmi ces cinq patientes une femme est décédée suite à une septicémie sévère faisant suite à un cerclage de Mac Donald effectué pour travail prématuré à 19,3 SA (avec un col mesuré à 27 mm). Les quatre autres femmes qui ont eu un cerclage ont accouché à : 21,6 SA, 23,1 SA, 26,4 SA et à 36,7 SA. Aucune des femmes du groupe « contrôle » n’a eu de cerclage. 4.5. La morbidité néonatale : Le critère composite de morbidité néonatale était similaire dans chacun des deux groupes. Il n’y avait aucune différence statistiquement significative dans les critères 32 néonataux. Ces différents critères néonataux sont regroupés dans le tableau cidessous. Tableau VII : Les critères néonataux Nombre d'enfants nés Groupe Groupe "pessaire" "contrôle" (95% IC) 823 NA (non 811 Risque relatif applicable) Présence de critères de morbidité 81 (10%) 87 (11%) 0,95 (0,65-1,38) 10 (1%) 14 (2%) 0,72 (0,30-1,77) 0 5 (1%) NA Syndrome de détresse respiratoire 36 (4%) 29 (4%) 1,26 (0,67-2,35) Dysplasies bronchopulmonaires 2 (<1%) 9 (1%) 0,23 (0,04-1,17) Hémorragies intra-ventriculaires 8 (1%) 7 (1%) 1,16 (0,33-4,07) Entérocolites ulcéro-nécrosantes 8 (1%) 7 (1%) 1,16 (0,39-3,43) Sepsis 19 (2%) 25 (3%) 0,77 (0,38-1,55) Décès durant l’hospitalisation 23 (3%) 28 (3%) 0,83 (0,41-1,68) 442 (55%) 466 (57%) 0,96 (0,86-1,06) Poids de naissance < 1500 g. 82 (10%) 86 (10%) 0,95 (0,65-1,41) Score d'Apgar < 7 à 5 min de vie 50 (6%) 60 (7%) 0,85 (0,55-1,30) 102 (13%) 124 (15%) 0,83 (0,60-1,15) 9 9 NA néonatale Mort-né Leucomalacies périventriculaires Poids de naissance < 2500 grammes Nombre d'admission en unité de soins intensifs néonataux Durée d'admission dans l'unité de soins intensifs (en jour) 33 4.6. Taux d’accouchements prématurés : Les taux d’accouchements prématurés avant 37, 32 et 28 SA étaient similaires dans les deux groupes. Ils sont représentés dans le tableau suivant. Tableau VIII : Taux d’accouchements prématurés et âge gestationnel moyen lors de l’accouchement Âge gestationnel à Groupe Groupe Risque Indice de l'accouchement "contrôle" "pessaire" Relatif confiance 95% < 28 SA 21 (5%) 16 (4%) 0,79 0,50-1,27 < 32 SA 49 (12%) 41 (10%) 0,86 0,65-1,15 < 37 SA 233 (57%) 222 (55%) 0,94 0,87-1,07 Moyenne (en SA) 36,4 36,7 0,91 0,76-1,09 4.7. L’analyse en sous-groupe : col inférieur au 25ème percentile Ce sous-groupe correspondait aux femmes qui avaient un col inférieur à 38 mm. Afin de réaliser une analyse statistique les auteurs ont comparé les deux groupes suivants : · Les femmes avec une longueur cervicale supérieure ou égale à 38 mm. · Les femmes avec une longueur cervicale inférieure à 38 mm : elles étaient 78 dans le groupe « pessaire » et 55 dans le groupe « contrôle ». Les caractéristiques générales de ces deux groupes étaient identiques. La longueur cervicale moyenne était de 35 mm dans le groupe « pessaire » et de 34 mm dans le groupe « contrôle ». Dans le groupe « pessaire » est apparue une diminution significative de la morbidité néonatale composite : 10% dans le groupe « pessaire » contre 24% dans le groupe « contrôle » (RR 0,42, IC 95% 0,19-0,91). Il en était de même pour les taux d’accouchements prématurés : 34 La moyenne d’âge gestationnel à l’accouchement était plus longue dans le groupe « pessaire » par rapport au groupe « contrôle » (36,4 contre 35 SA). à Avant 28 SA : 4% des femmes du groupe « pessaire » avaient accouché contre 16% des femmes du groupe « contrôle » (RR 0,23, IC 0,06-0,87). à Avant 32 SA : 14% du groupe « pessaire » contre 29% du groupe « contrôle » (RR 0,49, IC 95% 0,24-0,97). Seul le taux avant 37 SA n’a pas démontré de différence significative : 64% du groupe « pessaire » contre 78% dans le groupe « contrôle » (RR 0,82, IC 95% 0,541,24). 5. Discussion et conclusion des auteurs D’après les auteurs, le pessaire n’a pas d’effet chez toutes les grossesses multiples, mais il peut trouver son utilité chez des femmes, qui, lors d’une grossesse gémellaire présentent un col inférieur au 25ème percentile entre 16 et 22 SA. En effet, le taux d’accouchements prématurés avant 28 et 32 SA et les critères de morbidité néonatale sont significativement diminués par l’utilisation prophylactique d’un pessaire chez les grossesses multiples qui ont un col inférieur au 25ème percentile. De plus, les auteurs ont soulevé le fait que le pessaire est un dispositif peu coûteux et aux effets secondaires minimes. 6. Analyse critique de l’article 6.1. Titre Le titre de l’article est clair. Il indique le type d’étude réalisée. En revanche il ne précise pas le fait que les auteurs vont s’intéresser en premier lieu aux critères néonataux. 6.2. Objectif L’objectif est clairement cité dans le résumé de l’article. 6.3. Type d’étude et structure 35 L’étude réalisée est adaptée à l’objectif. Elle correspond à un niveau de preuve de grade A (annexe II). La structure IMRAD (introduction, methods, results and discussion) a bien été respectée. 6.4. Auteurs et publication L’article a été publié récemment dans la revue de qualité le Lancet, dont l’impact factor en 2013 était de 39,06. Les auteurs Liem et al. ont publié en mars 2013 une revue de la littérature au sujet des pessaires dans la prévention des accouchements prématurés, attestant d’une bonne connaissance sur le sujet. 6.5. Validité interne Les critères de jugement sont bien définis, ils sont en concordance avec l’objectif de l’étude. L’échantillon de femmes obtenu pour cette étude est important, il permet d’obtenir des résultats significatifs. Les groupes sont comparables à chaque fois, les biais de sélection ont été évités. Nous pouvons noter l’absence de mesure systématique de la longueur des cols utérins, et que les sous-groupes ont été modifiés au cours de l’étude. 6.6. Validité externe Les résultats sont en accord avec l’étude espagnole de Goya, « The PECEP trial », qui traitait le cas des grossesses simples. L’article semble en accord avec les autres études concernant les grossesses gémellaires, nous verrons cependant que ces dernières sont peu nombreuses. 6.7. Pertinence clinique L’utilisation d’un pessaire lors de grossesses multiples pourrait avoir sa place dans la prévention des complications néonatales liées notamment à la prématurité, dans un groupe de femmes bien distinct (longueur du canal cervical inférieure au 25ème percentile). D’autant plus qu’il s’agit d’un système peu coûteux et non invasif. 36 DISCUSSION 37 Dans notre discussion, nous confronterons les résultats de nos trois articles entre eux, mais également à d’autres résultats obtenus par une revue de la littérature. Nous verrons consécutivement quel peut être l’intérêt d’utiliser des pessaires en fonction de l’indication obstétricale, quelle peut être sa place face au cerclage et sa place face à la progestérone. Nous évoquerons le dépistage systématique de la longueur cervicale et pour finir, nous parlerons de la tolérance maternelle et de l’aspect psychologique d’un tel traitement. Notre travail de recherche n’a permis de mettre en évidence que trois études prospectives et randomisées. Néanmoins ces études, très récentes sont parues dans des revues dont l’impact factor est élevé, puisque deux sont parues dans le Lancet et une dans l’American Journal of Perinatology. I. · Indication des pessaires Lors de grossesses uniques chez des femmes asymptomatiques avec un col de l’utérus court : Si les résultats de l’étude PECEP de Goya et al. (14) montrent que le pessaire, utilisé de manière prophylactique chez des femmes asymptomatiques dont le col utérin est inférieur à 25 mm, entraîne une réduction significative du taux d’accouchements prématurés, les résultats de Hui et son équipe (15) ne montrent pas un tel intérêt. Dans l’étude PECEP le taux d’accouchement prématuré avant 34 SA était de 27% dans le groupe « contrôle » contre 6% dans le groupe « pessaire » (p<0,0001). Il en était de même des accouchements précédant la 37ème SA qui étaient de 59% dans le groupe « contrôle » alors qu’ils n’étaient que de 22% dans le groupe « pessaire » (14). L’étude de Hui et al. réalisée selon le même mode opératoire, présente un échantillon de patientes bien plus faible, qui n’a pas permis aux auteurs d’obtenir des résultats statistiquement significatifs (15). Cependant leurs résultats, bien que non significatifs (valeur de p supérieure à 0,001), ne sont pas du tout semblables aux conclusions tirées par l’étude PECEP. 18,2% d’accouchements avant 37 SA dans le groupe contrôle versus 15,1% dans le groupe traité par un pessaire, en revanche les accouchements précédant la 34ème SA ont été plus fréquents dans le groupe 38 « pessaire » : 9,4% contre 5,5% dans le groupe « contrôle », mais les résultats étaient non significatifs. Notre analyse critique de cet article ne nous permet pas de négliger ces résultats, bien qu’ils n’aient aucune puissance, car la méthodologie de l’étude est bien construite, elle est similaire à celle de l’étude PECEP de Goya et al. (14) Nous nous sommes cependant interrogés sur le fait que les auteurs, Hui et al., n’aient pas mené l’étude à son terme, entraînant un manque de puissance des résultats. Une explication de cette discordance de résultats peut être les taux d’accouchements prématurés survenus dans les groupes « contrôle ». En effet, si le taux au sein du groupe « contrôle » de l’étude PECEP est anormalement élevé, celui de Hui et al. est anormalement bas. Nous pouvons nous interroger si les caractéristiques des populations sélectionnées dans les deux études sont comparables. Nous les avons regroupés dans le tableau ci-dessous : Tableau IX : Taux d’accouchement prématuré dans les groupes contrôle de l’étude PECEP et de l’étude de Hui et al. Groupe « contrôle » Groupe « contrôle » de l'essai PECEP de Hui et al. < 37SA 59% 18,20% < 34 SA 27% 5,50% < 28 SA 8% 5,50% En reprenant les données d’une publication faite dans le Lancet en 2012 par Blencowe et al. une telle différence ne peut s’expliquer par les différences ethniques des deux populations étudiées. En effet les populations chinoises et espagnoles auraient les mêmes proportions d’accouchements prématurés (16). Outre ce fait nous avons constaté que les deux échantillons ne sont pas comparables en tout point de vue. Dans l’étude de Goya et al. (14) le taux de fumeuses est élevé (respectivement 19 et 20% dans chaque groupe) alors que dans l’étude de Hui et al. (15) il est faible, avec 1,9% de femmes fumeuses dans le groupe « pessaire » contre 5,5% dans le groupe « contrôle » (p=0,62). Or il a été constaté 39 que le risque d’accouchement prématuré était augmenté avec la consommation de tabac (1). Finalement, les résultats de Goya et al. publiés dans le Lancet (14), sont prometteurs quant à l’avenir de l’utilisation du pessaire chez des femmes que l’on dépisterait par échographie trans-vaginale au 2ème trimestre. D’autres essais plus anciens, non randomisés, ont également étudié l’intérêt des pessaires chez des femmes asymptomatiques dépistées par échographie endovaginale. Il semblerait au vu de leurs résultats, bien qu’il ne s’agisse que d’études rétrospectives, que le pessaire aurait un intérêt dans la prévention de la prématurité. C’est ainsi qu’en 2003, Arabin et al. ont publié dans le Journal of Perinatal Medicine une étude rétrospective dans laquelle ils ont étudié le taux d’accouchement prématuré chez des femmes avec antécédents d’accouchements prématurés spontanés avant 36 SA, ou qui présentaient des contractions utérines très prématurément, et chez qui le col de l’utérus mesurait moins du 10 ème percentile (15 mm) entre 18 et 28 SA, qu’ils ont traitées par pessaire (10). Ils ont analysé les dossiers de 12 patientes avec une grossesse unique, dans un groupe « pessaire », et 12 autres à titre de groupe « contrôle ». Les deux groupes avaient les mêmes caractéristiques et la moyenne de leur longueur cervicale était de 24 mm. Dans le groupe « pessaire » aucun accouchement prématuré n’est survenu, alors que 50% des femmes du groupe « contrôle » ont accouché avant 36 SA, 25% avant 32 SA et 17% avant 28 SA. Seule la différence entre les taux d’accouchements avant 36 SA était statistiquement significative (p<0,001). L’intervalle de temps entre le jour d’inclusion dans l’étude (représenté par le jour de mesure de la longueur cervicale) et le jour de l’accouchement était rallongé chez les femmes traitées par pessaire. De 67 jours dans le groupe « contrôle », il passait à 99 jours avec un pessaire (p=0,0184). Au vu de cette étude, le pessaire semblerait avoir un effet positif sur la prolongation de la grossesse chez des femmes dépistées par l’échographie endo-vaginale, mais ces résultats, étant issu d’une étude rétrospective et incluant un très faible nombre de femmes sont d’un faible niveau de preuve scientifique : grade C des recommandations (annexe III). 40 Acharya et al. en 2006 ont obtenu des résultats plus réservés, mais leur étude prospective non randomisée, publiée dans Archives of Gynecology and Obstetrics concernait des femmes très à risque d’accouchement prématuré. Sur les 54 femmes incluses dans l’étude : 11 avaient une grossesse multiple, et 15 (47%) avaient au moins 2 ou plusieurs facteurs de risque d’accoucher prématurément. Ces femmes étaient traitées par un pessaire si leur col utérin était inférieur à 25 mm avant 30 SA. Seules 56% des patientes ont finalement accouché après 32 SA. Cependant pour les auteurs, ce résultat est positif au vu de la population très à risque concernée (17). En 2010, Kimber-Trojnar et al. publiaient dans le journal of Maternal-Fetal and Neonatal Medicine les résultats d’une étude réalisée dans leur hôpital polonais, où en 6 mois ils ont recruté 56 femmes pour les traiter par un pessaire en polychlorure de vinyle. Ces pessaires de forme arrondie, semblent avoir le même effet mécanique que ceux d’Arabin. Ils ont sélectionné deux types de femmes qui présentaient au moins un facteur de risque d’accoucher prématurément. C'est à dire des femmes qui avaient un antécédent de fausses couches au premier et second trimestre, ou d’accouchement très prématuré (avant 34 SA), un antécédent de suture, de conisation ou de lacération cervicale. Ces 56 femmes ont été divisées, selon l’indication du pessaire, en deux groupes : 40 chez qui le pessaire était utilisé pour traiter une incompétence cervicale, qui selon les auteurs était déterminée par échographie trans-vaginale. Et 16 femmes dites à haut risque d’accouchement prématuré : des grossesses gémellaires, ou des grossesses avec au moins deux antécédents d’accouchements avant 34 SA ou deux fausses couches tardives (au 2ème trimestre de la grossesse). Finalement, la moyenne d’âge gestationnel à l’accouchement était de 38,3 SA, et 85,7% (48/56) des femmes ont accouché à terme. Les auteurs ont réalisé une analyse séparée des deux sous groupes de femmes afin de comparer l’efficacité des pessaires, mais cette analyse n’a pas montré de différences significatives. La méthodologie de l’étude ne nous permet pas de conclure quant aux résultats (18). Une autre étude rétrospective publiée en 2012 concernant 20 femmes avait été faite par l’équipe de Hui et al. avant la publication de leur essai prospectif randomisé. Ces 20 patientes étaient considérées comme à risque d’accoucher prématurément (antécédent de fausses couches tardives, d’accouchements extrêmement prématurés, de conisation) et avaient un col de l’utérus mesurant moins de 25 mm. 41 Les résultats de ces auteurs ont montré que parmi les femmes qui avaient un col compris entre 15 et 25 mm, 86% d’entre elles accouchaient après 34 SA, alors qu’elles étaient 46% si leur col mesurait moins de 15 mm. Pour ces auteurs, le pessaire semblait être une solution optimale pour prévenir la prématurité chez des femmes avec un col compris entre 15 et 25 mm, et pourrait être une option dans les cas où il mesure moins de 15 mm (19). En 2010, la Cochrane Database a publié un article concluant en l’absence d’études suffisamment bien menées pour affirmer l’intérêt du pessaire dans la prévention de l’accouchement prématuré, cependant ils ont constaté qu’un certain nombre d’études, non randomisées, semblaient démontrer un intérêt pour la prolongation de la grossesse (13). En 2013, suite à la publication de l’essai PECEP(14), les auteurs ont mis à jour leur revue de la littérature, qui concluait toujours en la nécessité d’études bien menées, puisque l’étude PECEP était la seule (20). · Lors de grossesses multiples : Dans leur étude ProTWIN, Liem et al. ont constaté que le pessaire n’était efficace lors de grossesses multiples que chez des femmes avec un col inférieur au 25 ème percentile de la population (pour eux : 38 mm) entre 16 et 22 SA et non pas dans une population générale de grossesses multiples (11). Ainsi, une échographie endovaginale serait également nécessaire en prévention de l’accouchement prématuré chez des femmes ayant une grossesse multiple, afin de dépister celles chez qui le pessaire pourrait prévenir un accouchement prématuré. Dans leur étude rétrospective en 2003, Arabin et al. avaient inclus des grossesses multiples. Un groupe de 23 femmes enceintes de jumeaux, avec un col inférieur au 10ème percentile, traitées par pessaire a été confronté à un groupe témoin de 23 femmes. Ils ont obtenu une différence significative dans les taux d’accouchement avant 32 SA ; 30% dans le groupe contrôle contre 0% dans le groupe pessaire (p<0,001). En revanche, les autres résultats ne présentaient pas de différences significatives : 52% d’accouchements prématurés avant 36 SA dans le groupe contrôle contre 35 % dans le groupe pessaire. Nous avons toutefois remarqué, que même si la longueur cervicale entre les deux groupes était identique (24 mm), les caractéristiques et facteurs de risque d’accouchement prématuré n’étaient pas semblables entre les deux (funnels présents chez toutes les femmes du groupe 42 pessaire contrairement au groupe contrôle, taux de vaginoses bactériennes plus élevés dans le groupe pessaire) pouvant représenter un biais dans les résultats (10). En 2006 Acharya et al. avaient également inclus des grossesses multiples dans leur étude ; 28% (9/32) de gémellaires et 6% (2/32) de grossesses triples. Les auteurs ont constaté que chez ces femmes le terme de l’accouchement précédait de 5 SA celui des femmes avec une grossesse simple. Ils n’ont cependant pas détaillé séparément les résultats concernant ce groupe (17). Enfin, en 2012 une étude rétrospective réalisée par l’équipe espagnole de l’essai PECEP a étudié l’intérêt du pessaire lorsqu’il était inséré à la suite d’un traitement pour syndrome transfuseur-transfusé. En effet, les auteurs ont analysé tous les cas de grossesses gémellaires qui ont été traitées par laser pour un syndrome transfuseur-transfusé ; 16 de ces femmes avaient une longueur cervicale inférieure ou égale à 25 mm avant le traitement par laser. Parmi elles, 8 ont eu un pessaire dans les 24 heures suivants le traitement, et 8 femmes ont été incluses dans un groupe contrôle. Cette étude a montré une prolongation de la grossesse lors de l’utilisation d’un pessaire ; l’âge gestationnel moyen à l’accouchement dans le groupe contrôle était de 28,1 SA alors qu’il était de 31,9 dans le groupe pessaire (p=0,04) (21). Le manque de données concernant les grossesses multiples nous empêche de conclure quant à l’intérêt du pessaire. Cependant, l’étude de Liem et al., publiée dans le Lancet (11), présente des résultats encourageants en ce qui concerne le traitement prophylactique d’un sous-groupe de femmes dépistées par échographie endo-vaginale. II. Le traitement par pessaire comparé au cerclage et à la progestérone En 2003, Antczak-Judycka et son équipe ont réalisé un essai comparatif polonais entre l’utilisation du cerclage et du pessaire, lors d’incompétence cervicale. Pour des femmes avec un col court à l’échographie entre 22 et 27 SA. Ils ont inclus 57 femmes : 22 traitées par un cerclage de Mc Donald, et 35 traitées par un pessaire. La durée moyenne de prolongation de la grossesse était de 13,4 semaines pour les femmes cerclées, contre 12,1 semaines pour les femmes avec un pessaire. Avec une valeur de p égale à 0,06 les auteurs n’ont pas mis en évidence de différence 43 significative d’efficacité d’une méthode par rapport à l’autre. Pour les auteurs, le pessaire semblerait être une alternative intéressante au cerclage, car il engendre moins de morbidité maternelle, est moins invasif que le cerclage et ne nécessite pas d’anesthésie. Ainsi, à efficacité égale, les méthodes ne montrent pas les mêmes taux de complications maternelles, donnant un avantage au pessaire. Cependant, cette étude possède, à nouveau, un faible niveau de preuve (22). Dans les récentes études concernant la prématurité, l’utilisation de progestérone apparaît de plus en plus comme un traitement préventif possible de l’accouchement prématuré, au même titre que le pessaire. Cependant, l’utilisation de progestérone dans ce cadre est bien mieux documentée que le pessaire, avec plusieurs études valides. Ainsi, Romero et al. ont publié en 2012 dans l’American Journal of Obstetrics and Gynecology une méta-analyse sur 5 essais randomisés pour évaluer l’efficacité de la progestérone vaginale chez des femmes asymptomatiques avec un col de l’utérus long de moins de 25 mm. Cette méta-analyse a mis en évidence que par rapport à l’utilisation d’un placebo, l’utilisation de progestérone était corrélée à une diminution significative du taux de prématurité (12,4% d’accouchements avant 33 SA contre 22% si placebo, RR : 0,58 ; IC 95% : 0,42-0,80). La mortalité et la morbidité néonatale étaient également significativement réduites (23). En 2009, dans leur essai publié dans le Journal of Maternal-Fetal and Neonatal Medicine, Sieroszewski et al. ont cumulé les deux moyens prophylactiques : pessaire et progestérone. En effet, ces auteurs ont publié une série de cas de 54 patientes chez qui la longueur cervicale mesurée à l’échographie était comprise entre 15 et 30 mm avant 28 SA qui ont été traitées par l’insertion d’un pessaire et par une dose quotidienne de 100 mg de progestérone vaginale. Le taux d’accouchements prématurés retrouvé dans cette population était de 16,7% (9/54). Ainsi 83,3% des femmes ont accouché à terme (après la 37ème SA). Or d’après les auteurs, une patiente appartenant au groupe de femmes ayant un col mesurant entre 16 et 33 mm a 25% de risque d’accoucher prématurément. Ainsi le pessaire aurait diminué ce risque de 25% à 16,7%. L’absence de randomisation ne nous permet pas de conclure quant aux résultats, cependant le taux de prématurité semble très faible dans un tel échantillon de femmes à risque (61% des femmes avaient un ou plusieurs antécédents de fausses couches tardives). De plus, le cumul des deux 44 éléments (pessaire et progestérone) crée un biais d’évaluation et ne nous permet pas de distinguer lequel des deux permet une telle efficacité, ou si c’est l’addition des deux qui permet ces résultats(24). Enfin, Alfirevic et al. en janvier 2013 ont publié dans Ultrasound in Obstetrics & Gynecology une comparaison indirecte de trois protocoles d’essais différents afin de comparer l’intérêt du cerclage, du pessaire et de la progestérone chez des femmes avec une grossesse simple, un antécédent d’accouchement prématuré et une longueur cervicale inférieure à 25 mm à l’échographie transvaginale. Pour se faire, les auteurs ont utilisé trois cohortes (25) : - Une cohorte américaine : 142 patientes traitées par cerclage (+/- 17ahydroxyprogestérone), - Une cohorte du Royaume-Uni : 59 patientes traitées par progestérone vaginale et cerclage, - Une cohorte espagnole de 42 patientes traitées par pessaire (issues pour la moitié de l’étude PECEP de Goya et al.). Les auteurs ont réalisé des comparaisons sur les nombres d’accouchements selon l’âge gestationnel à la naissance entre chaque groupe : cerclage VS progestérone, cerclage VS pessaire et progestérone VS pessaire. Un seul de leurs résultats a présenté une différence statistiquement significative. Il s’agit du taux d’accouchement prématuré avant 34 SA, lorsqu’on comparait pessaire et progestérone. En effet le taux de femmes accouchant avant 34 SA était significativement plus bas lors du traitement par pessaire, comparé à la progestérone (12% contre 32% RR : 2,70 IC95% 1,1-6,67). En revanche, lorsque les auteurs ont réalisé l’analyse d’un sousgroupe concernant uniquement les femmes avec un col inférieur à 25 mm, ils n’ont pas retrouvé de différence significative. Une telle comparaison comportant des échantillons de populations complètement différents, et des prises en charges non identiques (on peut noter également que dans le groupe de femmes cerclées, beaucoup avaient également des injections intra-musculaires de progestérone), implique la présence de biais statistiques nombreux. Les auteurs concluaient eux même en la nécessité de faire d’autres études randomisées, comparant directement ces trois modes de prise en charge (25). 45 III. L’échographie endovaginale systématique C’est en 1996 dans leur article publié dans la revue le New England Journal of Medicine que Iams et al. ont publié leurs résultats issus d’un essai prospectif multicentrique dans lequel ils ont réalisé une échographie endo-vaginale systématique pour mesurer la longueur des cols de l’utérus. Ces mesures ont ensuite été mises en corrélation avec le nombre d’accouchements prématurés survenus avant le terme de 35 SA. Les résultats ont montré que plus son col utérin est court, plus une femme a un risque relatif élevé d’accoucher prématurément. Avec un col inférieur au 10ème percentile (soit 26 mm dans leur étude) le risque relatif d’accoucher avant 35 SA est de 6,19 si le col est inférieur au 5ème percentile (soit 22 mm) le risque relatif est de 9,49. Enfin, chez des femmes avec une longueur cervicale inférieure à 1% (13 mm) il augmentait à 13,99 (p<0,001) (5). En 2010 l’HAS ne préconisait pas de dépistage systématique de la longueur cervicale. La connaissance de sa mesure entrainant des attitudes potentiellement iatrogènes et surtout le manque de certitudes sur les modes de prévention dans une population dépistées ainsi (6). En octobre 2012, dans l’Obstetrical and Gynecological Survey, Berghella a publié un article décrivant l’intérêt des échographies systématiques de dépistage en raison des différentes thérapeutiques de prévention possible. Pour cet auteur, toutes les grossesses uniques pourraient bénéficier d’une échographie endo-vaginale faite entre 18 et 24 SA. Ainsi, 2 à 5 % des femmes seraient dépistées comme à risque, avec un col inférieur à 20 mm et elles pourraient bénéficier d’un traitement de prévention de l’accouchement prématuré : la progestérone vaginale. L’auteur évoque également le pessaire, mais n’ayant que l’étude de Goya sur laquelle s’appuyer il précise la nécessité de nouvelles études. Il suggère d’utiliser le cerclage pour les femmes avec déjà un ou plusieurs antécédents d’accouchements prématurés (26). Si un tel dépistage est potentiellement iatrogène, sa rentabilité a déjà été prouvée, des études ayant analysé les coûts entre le dépistage systématique et les coûts des prises en charges néonatales, notamment lors de la prise en charge d’une prématurité (27). Si l’on reprend nos articles, on constate que dans l’étude PECEP, seules 11% des multipares avaient déjà un antécédent d’accouchement prématuré, les autres n’étant 46 absolument pas considérées comme à risque(14). Pour les auteurs de l’étude ProTwin, le dispositif étant peu couteux (38 euros), non invasif, non opérateur dépendant, et d’utilisation facile, un dépistage systématique de la longueur cervicale pourrait être réfléchi en terme de rendement, si de nouvelles études venaient apporter une preuve de l’efficacité des pessaires en prévention de l’accouchement prématuré. Car selon l’étude ProTwin, le pessaire n’est effectivement efficace que dans un groupe de femmes dépistées à l’échographie (inférieur au 25 ème percentile) (11). Actuellement, les auteurs sont partagés, entre une méthode reproductible mais iatrogène, qui ne dépisterait qu’un pourcentage modéré de femmes, mais entrainant une certaine iatrogénicité dans la prise en charge. IV. La tolérance maternelle de l’utilisation des pessaires Lors de chaque étude, les auteurs ont pris soin d’analyser la tolérance maternelle et les complications attribuables aux pessaires. Ainsi, selon Hui et al., l’utilisation d’un pessaire n’entraîne aucune complication. Cependant, les effets indésirables sont plus fréquents que dans le groupe contrôle, avec notamment une augmentation des pertes vaginales physiologiques (15). Dans leur étude espagnole, Goya et al. ont également relevé une augmentation légère des pertes vaginales quotidiennes. D’après un questionnaire, ils ont pu affirmer que 15% des patientes du groupe pessaire sentaient le dispositif présent dans leur vagin et ils ont pu déterminer que l’insertion du pessaire était moins douloureuse que son ablation. 95% de leur patientes traitées par pessaire le recommanderaient à d’autres femmes. Selon eux, les pessaires ne présentent aucun risque d’effets secondaires graves (14). Arabin et al. ont eux aussi réalisé un questionnaire lors de leur essai, qui constatait que 47% des femmes (8/17) se plaignaient d’une augmentation des pertes physiologiques, et elles rapportaient elles aussi une douleur plus grande à l’ablation qu’à l’insertion, le reste du traitement n’étant pas douloureux selon ces femmes. 75% des femmes de cette étude pourrait le réutiliser si nécessaire ou le conseillerait à une amie (10). 47 Le seul cas de complication retrouvé à travers notre revue de la littérature, est celui d’Arabin et al. Ils ont décrit le cas d’une femme, qui, traitée par pessaire à 27 SA, a présenté une rupture prématurée des membranes à 32 SA avec une mise en travail spontané. Selon les auteurs le pessaire a été enlevé tardivement au cours du travail, ce qui a entrainé une thrombose au niveau du col de l’utérus, qui s’expliquerait par l’augmentation de la pression entre le pessaire et le col utérin, ainsi que par l’œdème de ce col. Si cette femme avait retrouvé un col d’aspect normal 6 semaines après l’accouchement, son col restait cependant court ne mesurant que 25 mm. Cet exemple montre à quel point il est impératif d’enlever le pessaire une fois à terme, mais surtout l’importance de le retirer en cas de contractions utérines (10). Arabin et al. conseillent de contrôler la bonne position du pessaire une fois inséré et si nécessaire, ils conseillent de faire une échographie (10). L’échographie endo-vaginale ne semblerait pas gênée par la présence du pessaire. En effet, Goya et al. ont écrit une publication décrivant la manière de procéder pour réaliser une échographie endo-vaginale lorsqu’il y a présence d’un pessaire (28). V. L’impact psychologique d’une étude réalisée en ouvert et de la menace d’accouchement prématuré Nous nous sommes demandés si un facteur psychologique aurait pu jouer un rôle dans la prise en charge de ces femmes, d’autant plus que les études étaient réalisées en ouvert. En effet, dans l’étude ProTwin et PECEP les femmes savaient à quel groupe elles appartenaient (11)(14), alors que dans l’étude de Hui, où les résultats sont moins en faveur du pessaire, le traitement a été dissimulé à la patiente, et aurait pu influencer les résultats du traitement (15). Cependant, nous nous demandons comment un tel traitement peut rester ignoré d’une femme, quelque soit son niveau de connaissances obstétricales. De plus, dans chacune des études, que le pessaire soit dissimulé à la femme ou non, les médecins savaient à quel groupe appartenait leur patiente, ce qui a pu influencer leurs propres choix médicaux. Ainsi, le pessaire semble efficace dans une population précise de femmes, dépistées par échographie endo-vaginale. 48 CONCLUSION 49 La prématurité et la morbidité néonatale qu’elle entraîne est un problème de santé publique. Sa prévention est un enjeu majeur des professionnels de la périnatalité. Parmi les différents moyens de prévention actuellement utilisés nous nous sommes plus particulièrement intéressés au pessaire, un dispositif, qui, inséré au fond du vagin, permettrait d’empêcher les naissances prématurées. De nombreuses études de cohorte ont été faites sur le sujet et semblent indiquer qu’il aurait un effet bénéfique sur la prolongation de la grossesse. Ces dernières années, de nouvelles études prospectives randomisées ont été publiées. Nous avons souhaité les analyser afin d’évaluer l’intérêt de l’utilisation des pessaires. Il semblerait au vu de nos résultats que le pessaire ait un intérêt pour prévenir la survenue d’un accouchement avant terme lors de grossesses uniques, chez des femmes qui ont un col de l’utérus inférieur à 25 mm à l’échographie endo-vaginale entre 18 et 22 SA. De même, lors de grossesses multiples, le pessaire préviendrait l’accouchement prématuré chez les femmes dont le col utérin mesure moins de 38 mm entre 16 et 22 SA. Le pessaire est donc un dispositif peu coûteux, non invasif, facile d’utilisation et avec une bonne tolérance maternelle, mais pour préciser les sous-groupes de population pour lesquels il aurait un intérêt dans la prévention de l’accouchement prématuré, d’autres études prospectives randomisées et multicentriques sont nécessaires. Pour l’instant le pessaire d’Arabin n’est pas disponible en France mais il est commercialisé en Allemagne. Cependant une étude multicentrique prospective randomisée française va bientôt débuter et le CHU de Strasbourg sera un des centres investigateurs. 50 RÉFÉRENCES 51 1. Kayem G, Goffinet F, Haddad B, Cabrol D. Menace d’accouchement prématuré. EMC - Obstétrique. janv 2006;1(2):1̻17. 2. Blondel B, Norton J, Mazaubrun C, Bréart G. Enquête nationale périnatale. Paris Inst Natl Santé Rech Médicale [Internet]. 1998 [cité 11 janv 2014]; Disponible sur: http://presse-inserm.fr/wp-content/uploads/2013/02/rapportnaissenp2010.pdf 3. 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[Comparison of cerclage and cerclage pessary in the treatment of pregnant women with incompetent cervix and threatened preterm delivery]. Ginekol Pol. oct 2003;74(10):1029̻1036. 23. Romero R, Nicolaides K, Conde-Agudelo A, Tabor A, O’Brien JM, Cetingoz E, et al. Vaginal progesterone in women with an asymptomatic sonographic short cervix in the midtrimester decreases preterm delivery and neonatal morbidity: a 53 systematic review and metaanalysis of individual patient data. Am J Obstet Gynecol. févr 2012;206(2):124.e1̻124.e19. 24. Sieroszewski P, Jasiński A, Perenc M, Banach R, Oszukowski P. The Arabin pessary for the treatment of threatened mid-trimester miscarriage or premature labour and miscarriage: a case series. J Matern Fetal Neonatal Med. janv 2009;22(6):469̻472. 25. Alfirevic Z, Owen J, Carreras Moratonas E, Sharp AN, Szychowski JM, Goya M. 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Ultrasound Obstet Gynecol Off J Int Soc Ultrasound Obstet Gynecol. août 2011;38(2):205̻209. 54 ANNEXES Annexe I : Photos du pessaire d’Arabin Source : http://www.incoshop.co.uk/dr-arabin-cerclage-pessary-type-asq-267-p.asp Annexe II : Grille de lecture standardisée de la méthode globale de lecture critique L'information existe-t-elle pour chacune de ces 8 questions ? 1. Objectif - Pronostic - évolution - Impact d'une intervention - Etiologie - causalité 2. Type d'étude - Essai contrôlé randomisé - Etude de cohorte - Etude cas-témoins - Etude transversale - Rapport de cas - série de cas 3. Facteur(s) étudié(s) - Exposition - Intervention - Test diagnostique La façon d'aborder la question est-elle correcte? Si non, cela menace-t-il la validité de l'étude ? Y a-t-il une hypothèse ? Le type d'étude est-il approprié à Si non, les résultats de l'étude la question posée ? sont-ils totalement inutiles ? - Sont-ils bien décrits ? - Comment sont-ils mesurés ? -Même méthode de mesure chez tous les sujets ? Dans tous les groupes ? - Méthode à l'aveugle ? - Y a-t-il une comparaison indépendante avec l'étalon ? - Sinon ce biais de mesure menace-t-il la validité de l'étude ? - Sinon ce biais menace-t-il la validité de l'étude ? Comment sont-ils mesurés ? - Idem question 3 Tous les critères de jugement pertinents sont-ils évalués ? -La sélection est-elle correcte ? -Y a-t-il eu randomisation ? - Les groupes diffèrent-ils par des caractéristiques autres que les facteurs étudiés ? -Quelle est la proportion de sujet atteignant la fin du suivi ? -Y a-t-il pour le test, un large éventail de patients ? -Idem question 3 - Si non, ceux qui ont été oubliés sont-ils importants ? 6. Facteurs de confusion potentiels et biais - Sont-ils tous envisagés ? - Sont-ils bien contrôlés ? -Si non, cela invalide-t-il l'étude ? 7. Analyses statistiques - Intervalles de confiance ? - Tests statistiques ? - Si résultats positifs - Si résultats négatifs - Force de l'association 8. Conclusions des auteurs ? - Réponses aux questions ? - Vérification de l'hypothèse ? - Objectif atteint ? Taille de l'échantillon suffsante? Cliniquement intéressant ? Puissance du test, taille de l'échantillon -Si non, les résultats sont-ils inutiles ? - Si non, l'étude est-elle utile ? - Si insuffisant, l'étude est-elle : utile ou non concluante ? Les conclusions répondent-elles à l'objectif ? En somme : - Les résultats sont-ils acceptables appliqués à la population source ?=validité - Les résultats peuvent-ils être extrapolés aux situations qui vous intéressent pour votre propre pratique ?= applicabilité 4. Critère(s) de jugement 5. Population source et sujets étudiés - Si non, ce biais menace-t-il la validité externe ? Si non, ce biais menace-t-il la validité interne ? Si elle n'est pas optimale, la validité interne est-elle menacée ? Si non, ce biais menace-t-il la validité externe ? Source : Landrivon G. Méthode globale de lecture critique d’articles médicaux à l’usage de l’étudiant et du praticien. Paris : Frison-Roche ; 1996 Annexe III : Grade des recommandations NIVEAU DE PREUVE SCIENTIFIQUE GRADE DES FOURNI PAR LA LITTERATURE RECOMMANDATIONS Niveau 1 - Essais comparatifs randomisés de forte puissance - A Méta-analyses d’essais comparatifs Preuve scientifique établie randomisés - Analyse de décision basée sur des études bien menées Niveau 2 - Essais comparatifs randomisés de faible puissance - B Etudes comparatives non randomisées Présomption scientifique bien menées - Etudes de cohorte Niveau 3 - Etudes cas-témoins Niveau 4 - C Faible niveau de preuve scientifique Etudes comparatives comportant des biais importants - Etudes rétrospectives - Séries de cas - Etudes épidémiologiques descriptives (transversale, longitudinale) Source : ANAES. Guide d’analyse de la littérature et gradation recommandations. Service Recommandations Professionnelles ; 2000. des
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