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DIALOGUE MÉDECIN PATIENT Cancers des voies aérodigestives supérieures Coordination scientifique Pr Béatrix Barry (Paris) Sous l’égide de Avec le soutien institutionnel de Cancer des voies aérodigestives supérieures Sommaire Éditorial ......................................................................... 3 La maladie .................................................................... 4 La prise en charge d’un cancer des VADS ............ 8 Vivre avec un cancer des VADS ............................. 21 Bibliographie ............................................................. 26 Associations de patients ........................................... 27 Rédaction : Franck Fontenay Franck Fontenay déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Béatrix Barry déclare avoir des liens d’intérêts avec Therabel et Covidien (expertise). Tous droits de reproduction, d’adaptation et de traduction par tous procédés réservés pour tous pays. Edimark SAS © octobre 1985 – Président : C. Damour-Terrasson Imprimé en France – Axiom Graphic SAS – 95830 Cormeilles-en-Vexin – Dépôt légal : xxxxxxxxxxx 2015 2 Guide idées vraies/fausses 2015 Éditorial L es cancers dits des voies aérodigestives supérieures (VADS) sont des cancers qui surviennent au niveau de la bouche, de la langue, de la gorge ou encore du nez. Il existe des traitements efficaces contre ces cancers, notamment lorsqu’ils sont diagnostiqués précocement. Qu’il s’agisse de la chirurgie, de la radiothérapie ou encore de la chimiothérapie et des thérapies ciblées, ces traitements peuvent toutefois avoir des conséquences importantes, en particulier, troubles de la voix, difficultés à avaler et à déglutir, donc à s’alimenter, nécessité éventuellement de recourir à une trachéotomie (respiration directement par la trachée) temporaire, voire définitive. Il est ainsi possible de guérir de ces cancers, mais parfois au prix d’une altération de la qualité de vie. La communication auprès du patient et de la famille est importante à tous les temps de la prise en charge (diagnostic, traitement, suivi). La présence d’une famille et/ou d’amis pour entourer le patient, un bon contact relationnel et un sentiment de confiance à l’égard de l’équipe soignante sont indispensables. Le temps de la consultation et de l’annonce est souvent insuffisant pour permettre au patient et à sa famille de poser les questions le concernant, et notamment d’envisager toutes les difficultés qu’ils risquent de rencontrer. Il nous a donc semblé utile de proposer ce guide qui reprend les principales informations à connaître sur les cancers des VADS. Ce guide est conçu comme un outil pour tous ceux qui sont concernés par cette maladie afin de les aider à mieux lutter contre elle. Car être bien informé est une étape très importante et permet de mieux accepter les conséquences du traitement et d’y faire face. Pr Béatrix Barry Chef du service d’oto-rhino-laryngologie, hôpital Bichat-Claude-Bernard, Paris 3 Cancer des voies aérodigestives supérieures La maladie 1. Les cancers des VADS peuvent toucher différents organes Les voies aérodigestives supérieures (VADS) sont constituées de la partie haute des systèmes digestif et respiratoire. Elles comprennent ainsi la bouche, les lèvres, le nez, les fosses nasales, les sinus, le pharynx et le larynx. Un cancer des VADS est un cancer qui se développe à partir des cellules de l’un de ces organes. Il existe ainsi une grande diversité de cancers des VADS, en fonction de leur localisation et des cellules qui sont à l’origine de la maladie. Dans la très grande majorité des cas, les cancers des VADS se forment à partir de cellules du tissu de revêtement des organes ; ce tissu est appelé épithélium. Les cancers sont alors dits épidermoïdes. Ceux qui touchent la bouche, le pharynx et le larynx représentent en France plus de 90 % de l’ensemble des cancers des VADS. Voile du palais Les cancers des VADS sont également appelés cancers de la tête et du cou, ainsi que cancers Nasopharynx de la sphère ORL (otorhinolaLuette ryngée) [1, 2]. Oropharynx Sinus frontal Cavité nasale Lèvres Plancher de la bouche Hypopharynx Cavité orale Mandibule Larynx Trachée 4 Œsophage Guide idées vraies/fausses 2015 2. Les cancers des VADS sont rares Selon les dernières estimations disponibles, plus de 14 600 nouveaux cas de cancer des VADS auraient été diagnostiqués en France en 2012. Cela représente environ 4 % de l’ensemble des cancers identifiés chaque année en France. Les cancers des VADS touchent davantage d’hommes (74 %) que de femmes. Une diminution du nombre de nouveaux cas survenant chaque année chez les hommes est toutefois observée depuis une trentaine d’années. À l’inverse, le nombre de nouveaux cas diagnostiqués tous les ans chez les femmes est en augmentation sur la même période. La plupart des cancers des VADS surviennent après l’âge de 50 ans (3). faux 3. Tous les cancers des VADS sont liés au tabac et à l’alcool Le tabac et l’alcool sont les 2 principaux facteurs de risque connus de survenue des cancers des VADS. La consommation de l’un et de l’autre est retrouvée chez plus de 90 % des personnes atteintes par ces types de cancer. Cependant, le tabac et l’alcool ne sont pas les seuls facteurs favorisant la survenue d’un cancer des VADS. Ainsi, l’exposition aux poussières de bois et de cuir dans un cadre professionnel constitue également un facteur de risque reconnu pour les cancers des sinus. Le fait d’être exposé à certaines substances, comme l’amiante, le goudron et le nickel, semble également favoriser leur apparition. Enfin, il est aujourd’hui reconnu que le papillomavirus (HPV) est un virus qui peut provoquer certaines formes de cancer des VADS, en particulier au niveau des amygdales. Ce virus serait associé à une survenue de ces cancers à un âge plus jeune que la moyenne et chez des patients parfois non fumeurs (1, 4). faux 5 Cancer des voies aérodigestives supérieures 4. Certains symptômes persistants sont évocateurs d’un cancer des VADS Les signes associés à la survenue d’un cancer des VADS ne sont pas spécifiques et peuvent être différents d’une personne à une autre. C’est surtout leur persistance pendant plus de 3 semaines qui doit conduire à faire rechercher par un médecin la possible présence d’un cancer. Les principaux signes d’alerte sont : • un mal de gorge ; • des difficultés à avaler ou des douleurs lors du passage des aliments ; • des douleurs de l’oreille ; • des modifications de la voix (qui devient souvent rauque) ; • l’obstruction d’une narine ; • des écoulements de sang par le nez ou la bouche ; • la présence d’un ganglion dans le cou ; • la présence d’un aphte ou d’une tache rouge ou blanche dans la bouche. Ces différents symptômes peuvent être liés à une simple infection de la sphère ORL. C’est lorsqu’ils persistent plus de 3 semaines, notamment chez une personne qui fume, qu’ils sont évocateurs d’un cancer des VADS et que la consultation d’un médecin est alors indispensable (1, 4). 6 Guide idées vraies/fausses 2015 5. Différents examens sont nécessaires pour diagnostiquer la maladie Dans un premier temps, un examen clinique complet de la bouche, de la gorge et du larynx est réalisé. En cas de suspicion d’un cancer, différents examens sont nécessaires pour établir un diagnostic. Les examens systématiques sont : • une endoscopie des VADS. Cet examen consiste à observer l’intérieur des différentes zones des VADS à l’aide d’un tube fin muni d’une source de lumière. L’endoscopie permet de repérer la présence éventuelle d’une tumeur et d’en évaluer la taille. Cet examen nécessite une anesthésie générale ; • une biopsie. Si une lésion suspecte est repérée, un prélèvement de celle-ci est effectué. La biopsie est réalisée au cours de l’endoscopie. Elle peut être aussi prélevée directement en consultation si la lésion est située dans la bouche. Une fois la biopsie effectuée, le prélèvement est adressé à un médecin anatomopathologiste. Il s’agit d’un médecin spécialiste de l’étude des tumeurs. Après avoir examiné le prélèvement au microscope, il peut confirmer (ou pas) la nature cancéreuse de la lésion et préciser les caractéristiques des cellules de la tumeur. C’est uniquement à partir des observations du médecin anatomopathologiste que le diagnostic de cancer peut être établi de façon certaine ; • un scanner de la tête, du cou et du thorax. Grâce à des rayons X, cet examen permet d’obtenir des images de l’intérieur du corps. Il est ainsi possible de déterminer la localisation précise de la tumeur, sa taille, son extension, et si d’autres tumeurs sont également présentes. En fonction des résultats obtenus, d’autres examens complémentaires peuvent être nécessaires (1, 2). 7 Cancer des voies aérodigestives supérieures La prise en charge d’un cancer des VADS 6. Lorsqu’on est atteint d’un cancer des VADS, il faut être suivi dans un centre spécialisé Les personnes atteintes d’un cancer des VADS nécessitent une prise en charge spécialisée. Celleci doit être assurée par une équipe pluridisciplinaire, c’est-à-dire réunissant des professionnels de santé de différentes spécialités (chirurgien, oncologue, radiologue, radiothérapeute, etc.), au sein d’un établissement de santé autorisé à soigner les personnes atteintes de cancer. La liste des centres habilités à traiter les cancers est disponible sur le site de l’Institut national du cancer (INCa) : www.e-cancer.fr. Il est également possible d’être orienté vers un centre recommandé par son médecin traitant (1, 2). 7. La prise en charge est la même pour tous les malades Les modalités de traitement sont déterminées de façon individualisée, en fonction des caractéristiques de la maladie et de l’état de santé de chaque patient. Il est notamment tenu compte de la localisation, de la taille, de l’extension et de l’agressivité de la ou des tumeurs, ainsi que du type de cellules cancéreuses. L’âge du patient, son état de santé global, ses antécédents médicaux et les éventuelles autres maladies qu’il peut avoir sont également pris en considération. Les séquelles que vont induire les traitements sont prises en compte dans la décision de l’équipe médicale et sont expliquées au patient (1, 2). faux 8 Guide idées vraies/fausses 2015 8. Le choix des traitements est déterminé par un seul médecin faux Le dossier médical d’une personne atteinte d’un cancer des VADS est systématiquement présenté et discuté dans le cadre d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP). Il s’agit d’une réunion à laquelle participent des médecins de différentes spécialités : chirurgien cervico-facial, chirurgien maxillofacial, oncologue, radiothérapeute, anatomopathologiste, etc. Les décisions prises sont collégiales afin de proposer la prise en charge la plus adaptée à la situation de chaque malade. Le médecin explique ensuite au patient quels traitements sont envisageables, celui qui a été décidé par l’équipe soignante, les raisons de cette décision et quelles en seront les conséquences. C’est bien entendu le patient qui en fin de compte décide du traitement qu’il va suivre après une information “éclairée” (1, 2). 9. Un programme personnalisé de soins est proposé à chaque malade À l’issue de la RCP, la proposition de traitement envisagé est expliquée au patient par le médecin qui le suit et est discutée avec lui lors d’une consultation spécifique, appelée consultation d’annonce. Le patient doit donner son accord sur les traitements et la prise en charge qui lui sont proposés. Ceux-ci sont alors consignés dans un document appelé Programme personnalisé de soins (PPS) qui lui est remis. 9 Cancer des voies aérodigestives supérieures Le Programme personnalisé de soins présente les différents traitements décidés, leurs modalités (dates, durée, etc.) et les coordonnées des membres de l’équipe soignante. Ce programme peut ensuite être adapté en fonction de l’évolution de l’état de santé du patient (1, 2). 10. Arrêter de fumer et de boire de l’alcool n’est pas indispensable Il est au contraire très fortement conseillé d’arrêter la consommation de tabac et d’alcool. Cela permet notamment de limiter les risques de complications pendant et à l’issue des traitements. En cas de dépendance, les membres de l’équipe soignante peuvent orienter vers des structures d’aide au sevrage (1, 2). faux 11. Une intervention chirurgicale peut être proposée Une opération chirurgicale fait partie des traitements possibles des cancers des VADS. L'objectif de l’intervention est alors de retirer la tumeur dans sa totalité ainsi que, par mesure de sécurité pour éviter une récidive, une marge de tissus sains avoisinants. La zone opérée est donc souvent plus grande que la tumeur initiale. La zone où est située la tumeur détermine le type d’opération à réaliser. Si, par exemple, elle est présente sur la langue, le chirurgien devra retirer une partie de celle-ci. Lorsque la tumeur se trouve au niveau du pharynx ou du larynx, l’opération consistera à prélever tout ou partie de l’un ou l’autre. Dans tous les cas, le chirurgien vise à préserver au maximum le fonctionnement de la région opérée, en particulier la capacité à respirer, à parler et à manger. 10 Guide idées vraies/fausses 2015 Une reconstruction est parfois nécessaire pour remplacer la zone enlevée, afin d’atténuer les conséquences fonctionnelles et esthétiques de l’intervention. Dans la mesure du possible, cette reconstruction est réalisée au cours de la même intervention. L’opération chirurgicale nécessite une hospitalisation. La durée de celle-ci est variable en fonction du type d’intervention et des suites opératoires. Elle se situe généralement entre quelques jours et 2 à 3 semaines. Avant toute intervention, une ou plusieurs consultations avec le chirurgien sont programmées afin que celui-ci explique au patient les modalités de l’intervention et les objectifs poursuivis, ainsi que les conséquences attendues à court et à moyen terme (2). 12. Une trachéotomie est toujours nécessaire Une trachéotomie consiste à pratiquer une incision chirurgicale au niveau de la trachée. Cela permet, en insérant dans l’incision un tube en plastique appelé canule, de maintenir la respiration sans passer par les Os hyoïde voies naturelles (nez et bouche). Lors de certaines interventions chirurgicales, la réalisation d’une Cartilage trachéotomie peut être nécesthyroïde saire. Cela concerne surtout les opérations réalisées au niveau du Cartilage cricoïde larynx, du pharynx et de la base de la langue. La trachéotomie Trachéotomie est alors pratiquée par mesure Trachée de sécurité, pour éviter une gêne respiratoire en raison du gonflement des tissus après l’opération, ainsi que pour protéger faux 11 Cancer des voies aérodigestives supérieures les poumons des “fausses routes” avec la salive. Les autres types d’intervention ne nécessitent généralement pas de trachéotomie. Lorsqu’elle ne peut être évitée, la trachéotomie est provisoire dans la plupart des cas. Elle est maintenue le temps que la respiration naturelle et la déglutition refonctionnent normalement. Selon les personnes et l’intervention pratiquée, cela prend entre quelques jours et quelques semaines. La canule est ensuite retirée (sans nécessiter une nouvelle intervention chirurgicale) et, après quelques jours, l’incision se referme naturellement. Seule une cicatrice reste visible. La trachéotomie peut toutefois être définitive (elle est alors appelée trachéostomie). C’est le cas essentiellement lorsque le chirurgien est obligé de retirer le larynx en totalité pour enlever toute la tumeur. Il raccorde alors la trachée à la peau par le biais d’une incision. L’orifice ainsi créé, par lequel l’air va passer, est maintenu ouvert grâce à une canule. Cette dernière est laissée en place jusqu’à la cicatrisation complète, qui prend de quelques semaines à quelques mois selon les personnes. La canule est alors retirée et l’orifice est protégé par un filtre (1, 2). 13. Selon l’opération réalisée, il peut y avoir des séquelles En fonction de la localisation de la tumeur et du type d’intervention chirurgicale pratiqué, il peut y avoir des conséquences, en particulier sur la voix et la déglutition (c’est-à-dire la capacité à avaler). Lorsque le larynx, le pharynx ou certaines parties de la bouche ont été concernés par l’opération, une modification, voire une perte de la voix survient fréquemment. Une prise en charge phoniatrique et une rééducation orthophonique sont alors nécessaires pour améliorer ces troubles. L’intervention chirurgicale des mêmes zones peut également provoquer des troubles de la déglutition. Il devient alors difficile d’avaler les liquides et les aliments. Cela peut parfois entraîner ce que l’on appelle des “fausses routes”, c’est-à-dire le passage 12 Guide idées vraies/fausses 2015 involontaire des aliments, des liquides ou de la salive dans la trachée et les bronches. Là encore, ces troubles sont améliorés par une rééducation orthophonique (1, 2). 14. La radiothérapie est un traitement possible La radiothérapie est une forme de traitement qui repose sur la production, par un appareil spécifique, de rayonnements (appelés aussi rayons ou radiations) qui détruisent les cellules cancéreuses. C’est un traitement local, le faisceau de rayonnements étant dirigé vers la zone du corps où sont situées les cellules cancéreuses. Selon le type de cancer des VADS, la radiothérapie peut être proposée comme seul traitement ou être administrée après une intervention chirurgicale ou encore être associée à une chimiothérapie ou à une thérapie ciblée. Habituellement, un traitement par radiothérapie s’effectue à raison de 1 séance par jour, 5 jours par semaine, pendant plusieurs semaines. Pour certains cancers des VADS, une technique particulière de radiothérapie, appelée curiethérapie, est parfois proposée. Cette technique consiste à introduire des fils radioactifs au sein de la tumeur. La curiethérapie nécessite une hospitalisation en chambre protégée contre les rayons radioactifs pendant plusieurs jours (1, 2). 15. La radiothérapie n’entraîne aucun effet indésirable Si la radiothérapie est totalement indolore (on ne ressent rien pendant les séances), elle peut s’accompagner d’effets indésirables. Ceux-ci dépendent de la zone traitée, de la dose de rayonnements et de la sensibilité individuelle de chaque personne. faux 13 Cancer des voies aérodigestives supérieures Les effets indésirables immédiats les plus fréquents sont : • une inflammation des muqueuses de la bouche et du pharynx. Appelé radiomucite, cet effet indésirable se manifeste par différents symptômes tels qu’une douleur, des aphtes, une rougeur, une sensation de bouche sèche ou pâteuse. Il entraîne aussi une sensation constante de soif et un risque d’infection. Des bains de bouche à base d’antidouleur et d’antifongiques (médicaments agissant contre les champignons parasites) permettent de soulager ces symptômes ; • une irritation de la peau, qui disparaît progressivement après la fin de la radiothérapie. Les effets indésirables plus tardifs les plus fréquents sont : • une sécheresse de la bouche provoquée par une diminution, voire un arrêt de production de la salive ; • des pathologies dentaires telles que des caries. Une bonne hygiène dentaire et le port de gouttières contenant du fluor sont recommandés pour limiter cet effet indésirable ; • un durcissement et une perte d’élasticité de la peau et des muscles du cou. Appelé fibrose cervicale, cet effet indésirable peut être atténué par des massages et des séances de kinésithérapie ; • un œdème (gonflement) du cou lié à une moins bonne circulation lymphatique. L’intervention d’un kinésithérapeute peut être nécessaire pour l’amoindrir ; • une hypothyroïdie, c’est-à-dire une diminution de la capacité de fonctionnement de la thyroïde lorsque celle-ci a été exposée à la radiothérapie. Une surveillance annuelle du fonctionnement de la thyroïde par des prises de sang doit ainsi être réalisée. Un traitement par des hormones thyroïdiennes peut être nécessaire. Dans tous les cas, le médecin assurant la prise en charge doit apporter une information détaillée sur les effets indésirables susceptibles de survenir pendant et après la radiothérapie. En cas de survenue d’un ou de plusieurs effets indésirables, le patient doit l’en informer sans tarder afin qu’une prise en charge adaptée puisse être proposée (1, 2). 14 Guide idées vraies/fausses 2015 16. Il est normal de perdre du poids pendant le traitement Il a été montré qu’un bon équilibre nutritionnel favorise l’efficacité des traitements contre les cancers des VADS. Or, en raison de la présence de la tumeur ou du fait des effets indésirables des traitements, par moments, il peut être difficile de s’alimenter. Les personnes atteintes de ces cancers ont ainsi tendance à être dénutries. La radiothérapie en particulier est susceptible d’accentuer la dénutrition. Des évaluations nutritionnelles sont régulièrement réalisées tout au long de la prise en charge des personnes atteintes par un cancer des VADS. Parallèlement, toute perte de poids doit être rapidement signalée à l’équipe soignante. Si nécessaire, des compléments nutritionnels peuvent être proposés pour rééquilibrer l’alimentation. En cas de difficulté importante pour s’alimenter ou de dénutrition prononcée, une alimentation entérale, à l’aide d’une sonde, peut être envisagée (2). faux 17. Une chimiothérapie peut être proposée La chimiothérapie fait partie des traitements possibles des cancers des VADS. Elle peut être proposée en association avec la radiothérapie (on parle alors de radiochimiothérapie concomitante). Dans ce cas, l’objectif est d’accroître l’efficacité de la radiothérapie. La chimiothérapie peut être aussi le premier traitement du cancer, avant une intervention chirurgicale ou une radiothérapie. Elle vise alors à réduire la taille de la tumeur et peut ainsi permettre 15 Cancer des voies aérodigestives supérieures de choisir le traitement le plus approprié à mettre en œuvre ensuite (chirurgie ou radiothérapie). Lorsqu’elle est administrée en premier (on parle alors de chimiothérapie néo-adjuvante), la chimiothérapie associe toujours plusieurs médicaments (1, 2). 18. La durée de la chimiothérapie est variable selon les malades Le ou les médicaments de chimiothérapie sont administrés par perfusion au cours de ce que l’on appelle des cures qui se succèdent. Chaque cure est suivie d’une période de repos. Le nombre de cures et le rythme de celles-ci sont déterminés en fonction des caractéristiques de la maladie et de l’état de santé général du patient. Les modalités du traitement peuvent être ensuite adaptées selon l’efficacité de ce dernier et la façon dont le patient le tolère. Les perfusions de chimiothérapie sont généralement administrées en hôpital de jour (on dit aussi en ambulatoire). Le patient se rend à l’hôpital pour recevoir son traitement et rentre chez lui le jour même. Il est toutefois possible dans certains cas que le traitement soit administré à domicile par un soignant (2). 19. La pose d’une chambre implantable n’est généralement pas nécessaire Pour faciliter la mise en place des perfusions de chimiothérapie et améliorer le confort du patient, il est habituel que soit posée une chambre implantable. Il s’agit d’un dispositif relié à une grosse veine. Il comprend un cathéter, c’est-à-dire un tuyau fin et stérile qui est introduit dans la veine. Le cathéter est relié à une chambre d’injection placée sous la peau. Le plus souvent, la chambre est installée faux 16 Guide idées vraies/fausses 2015 au-dessus de la poitrine, sous la clavicule. La pose de ce dispositif nécessite une petite intervention chirurgicale, généralement sous anesthésie locale. Une fois en place, la peau est piquée à l’endroit de la chambre afin de pouvoir administrer les perfusions. En dehors des cures de traitement, la chambre implantable ne nécessite pas de soins particuliers dans la vie quotidienne (2). 20. Des effets indésirables peuvent survenir pendant et après la chimiothérapie Le traitement par chimiothérapie est susceptible d’entraîner la survenue d’effets indésirables. Ceux-ci sont variables d’une personne à une autre en fréquence et en intensité, ainsi qu’en fonction du ou des médicaments administrés. Les effets indésirables les plus fréquents sont : • des troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhées) ; • une baisse du nombre de cellules du sang pouvant conduire à la survenue d’une anémie (diminution des globules rouges), d’une neutropénie (diminution de la principale catégorie de globules blancs) avec un risque plus important d’infection et/ou de thrombopénie (diminution des plaquettes) se traduisant par une moins bonne coagulation du sang, avec de possibles saignements ou hématomes ; • une inflammation des muqueuses de la bouche, avec la survenue de rougeurs, d’aphtes et de douleurs ; • des troubles de la sensibilité, se traduisant par des sensations d’engourdissement, de fourmillements ou de picotements ; • une perte des cheveux (alopécie) ; • des problèmes de peau (rougeurs, plaques, dessèchement, tiraillements, éruptions) ; • une perte d’appétit ; • des troubles au niveau des reins, qui peuvent moins bien fonctionner ; 17 Cancer des voies aérodigestives supérieures • des troubles de l’audition, se manifestant par des bourdonnements ou des difficultés à entendre. Ces effets indésirables ne sont pas systématiques. Certains peuvent être limités ou évités grâce à des traitements préventifs et à des conseils pratiques. En cas de survenue, il est important de les signaler sans tarder à l’équipe soignante afin que toutes les mesures puissent être prises pour les atténuer. Il peut arriver de ne pas ou peu ressentir d’effets indésirables. Cela ne signifie pas pour autant que le traitement est inefficace. À l’inverse, subir des effets indésirables importants n’est pas le signe que la chimiothérapie est particulièrement active (1, 2). 21. Une thérapie ciblée peut être associée à la chimiothérapie ou à la radiothérapie D’autres types de médicaments existent aujourd’hui contre les cancers : les thérapies ciblées. Ce sont des médicaments qui agissent plus spécifiquement sur les cellules cancéreuses que ne le font les médicaments de chimiothérapie. À l’heure actuelle, l’un de ces médicaments est utilisé pour le traitement des cancers épidermoïdes des VADS. Ce médicament peut être associé soit à la radiothérapie, soit à des médicaments de chimiothérapie. Le choix de le prescrire ou pas est déterminé en fonction de la situation de chaque malade. D’autres thérapies ciblées sont actuellement en cours d’évaluation dans le cadre d’essais cliniques (1, 2, 5). 22. Après les traitements, une surveillance régulière est nécessaire Une fois les traitements terminés, un suivi médical très régulier est indispensable. L’objectif de ce suivi, 18 Guide idées vraies/fausses 2015 qui comprend un examen clinique complet, est de détecter toute éventuelle récidive de la maladie, que ce soit au niveau de la zone où celle-ci s’était initialement déclarée ou dans une autre région du corps. Le suivi permet également au médecin d’évaluer les séquelles de la maladie et des traitements, et de proposer tous les moyens nécessaires pour les prendre en charge. Le rythme des consultations est déterminé au cas par cas. Il est recommandé que la première consultation ait lieu 1 à 2 mois après la fin des traitements, puis tous les 2 mois au cours de l’année qui suit. La deuxième année, des consultations tous les 3 mois sont conseillées, puis tous les 4 mois la troisième année. Le suivi doit se poursuivre au moins 5 ans. Un scanner ou une IRM est réalisé à l’occasion de la première consultation de suivi. Cet examen peut ensuite être renouvelé ultérieurement. D’autres examens peuvent être également prescrits tout au long du suivi, notamment pour la surveillance de la thyroïde (1, 4). 23. Il ne faut pas hésiter à consulter en cas de symptômes persistants Si, après la fin des traitements, un symptôme persiste ou réapparaît, une douleur par exemple, il est indispensable de consulter sans tarder son médecin spécialiste ou son médecin traitant. Il sera ainsi en mesure, d’une part, de proposer une prise en charge adaptée, d’autre part, de déterminer si ce symptôme indique ou non une récidive de la maladie. Médecin 19 Cancer des voies aérodigestives supérieures De même, tout nouveau symptôme, notamment au cours des 2 premières années qui suivent la fin des traitements, doit conduire à consulter son médecin sans attendre la prochaine consultation de contrôle. Ce peut être, par exemple, une nouvelle douleur ou une perte de poids inexpliquée (1). 24. En cas de récidive, il n’est pas possible de proposer un autre traitement Après les traitements et même s’il ne subsiste plus aucun signe de la maladie, il peut arriver que celleci réapparaisse au cours des années qui suivent : on parle alors de récidive ou de rechute. En cas de suspicion de récidive (par exemple, si un symptôme se manifeste à nouveau), un nouveau bilan complet doit être réalisé, comprenant notamment un scanner ou une IRM. Si la récidive est confirmée, un nouveau traitement est alors proposé. il peut s’agir d’une nouvelle intervention chirurgicale et/ou d’une radiothérapie. Parfois, une chimiothérapie seule est proposée. Le choix du ou des traitements est déterminé par l’équipe soignante en fonction de la situation de chaque patient (1). faux 25. Il faut attendre 5 ans pour être guéri d’un cancer des VADS Les cancers des VADS sont des maladies souvent localisées qui, si cela survient, récidivent dans la majorité des cas dans les 2 à 3 ans qui suivent le traitement. Le suivi au-delà des 5 ans est surtout nécessaire pour les patients qui sont d’anciens fumeurs ou qui continuent à fumer, pour rechercher la survenue d’une autre tumeur débutante liée au tabac (1). faux 20 Guide idées vraies/fausses 2015 Vivre avec un cancer des VADS 26. Une trachéotomie ou une trachéostomie ne nécessitent aucun soin particulier Des soins quotidiens sont indispensables pendant la durée de la trachéotomie ou après une trachéostomie. Il faut en particulier nettoyer au moins 1 fois par jour l’orifice qui permet la respiration. Ces soins ont notamment pour objectif de limiter le risque d’infection, de préserver la filtration de l’air inspiré et d’éviter l’accumulation de sécrétions. Pendant l’hospitalisation qui suit la réalisation de l’intervention chirurgicale, l’équipe soignante se charge d’expliquer au patient et à son entourage tous les soins nécessaires et comment ils doivent être réalisés. Un document écrit présentant les procédures à mettre en œuvre leur est généralement remis au moment de la sortie de l’hôpital. Si le patient n’est pas certain de parvenir à les réaliser lui-même, un soin quotidien par une infirmière libérale peut lui être prescrit à sa sortie de l’hôpital (2, 6). faux 27. Différentes méthodes existent pour parler après une trachéostomie La trachéostomie ne permet plus de parler de manière naturelle. En effet, le dispositif mis en place fait que l’air est inspiré directement dans la trachée. De plus, les cordes vocales et le larynx ont été enlevés. Il devient alors nécessaire d’apprendre à parler différemment, grâce à une rééducation orthophonique. Plusieurs techniques sont notamment possibles : 21 Cancer des voies aérodigestives supérieures • la voix œsophagienne consiste à produire des sons en expulsant de l’air depuis l’œsophage. Les sons produits sont ensuite modulés par la bouche pour former des mots. Cette technique nécessite un apprentissage sur plusieurs semaines ; • la voix trachéo-œsophagienne nécessite la pose d’un implant phonatoire entre la trachée et la partie supérieure de l’œsophage. L’implant peut être mis en place au cours de l’intervention chirurgicale initiale ou ultérieurement, en sachant qu’il doit être changé régulièrement. Il est nécessaire de boucher l’orifice de la trachéostomie avec ses doigts pour parler. Un apprentissage avec un orthophoniste permet d’apprendre progressivement à parler avec cette technique ; • la voix artificielle repose sur l’utilisation d’un appareil qui produit des vibrations. Appelé laryngophone, cet appareil doit être placé sous le menton. Il transforme en sons les mots formés avec la bouche (2). 28. Il n’y a rien à faire si l’on rencontre des difficultés pour manger Après l’intervention chirurgicale, des troubles de la déglutition sont susceptibles d’apparaître, et il peut devenir difficile d’avaler des aliments et des liquides. Il peut également survenir des “fausses routes”, c’est-à-dire le passage d’aliments ou de liquides dans la trachée et les bronches. faux 22 Guide idées vraies/fausses 2015 En cas de difficultés, il est conseillé de privilégier une alimentation liquide ou semi-liquide dans un premier temps. Si nécessaire, une alimentation à l’aide d’une sonde (alimentation entérale) peut être temporairement mise en place. Parallèlement, une rééducation avec un orthophoniste doit être entreprise. Elle permet généralement un retour progressif à une alimentation normale. Il est important de signaler rapidement à son médecin traitant ou à son médecin spécialiste toute difficulté de déglutition ou d’alimentation, afin que toutes les mesures puissent être prises pour éviter une perte de poids et par conséquent une dénutrition (2). 29. Il est important de prendre soin de ses dents Avant que les traitements soient mis en œuvre, un bilan dentaire est systématiquement réalisé. Il est, en effet, important que toutes les pathologies dentaires éventuellement présentes (caries, dents abîmées, etc.) soient traitées et qu’un détartrage soit réalisé. L’intervention chirurgicale peut conduire à devoir extraire une ou plusieurs dents. Par ailleurs, la radiothérapie favorise les complications dentaires. En fonction de la zone traitée, le port d’une gouttière remplie de fluor peut être prescrit. Il est alors nécessaire de la porter tous les jours pendant 5 à 10 minutes. Cela permet d’éviter la survenue d’infections dentaires et de caries. Une fois les traitements 23 Cancer des voies aérodigestives supérieures terminés, il est important de consulter un dentiste tous les 6 mois pour s’assurer du bon état des dents. Afin d’éviter tout risque d’infection, il est nécessaire de prendre un traitement antibiotique pour tous les soins dentaires, les détartrages et la pose d’un appareillage ou d’implants. Une bonne hygiène dentaire est vivement recommandée (1, 2). 30. Il est possible d’être fatigué lorsqu’on a un cancer des VADS La maladie et les traitements, que ce soit l’intervention chirurgicale, la radiothérapie ou les médicaments, sont susceptibles d’entraîner une fatigue. Celle-ci est plus ou moins importante selon les personnes. Il est essentiel d’en parler à l’équipe soignante afin qu’une cause précise éventuelle puisse être recherchée (une anémie, par exemple) et qu’une prise en charge adaptée puisse être proposée (2). 31. Les cancers des VADS font partie des maladies prises en charge à 100 % Comme tous les cancers, ceux des VADS donnent droit à une prise en charge à 100 % des soins par l’Assurance maladie dans le cadre des affections de longue durée (ALD). La prise en charge à 100 % concerne tous les soins et toutes les prestations liés au cancer, dans la limite des tarifs de remboursement prévus par l’Assurance maladie. Elle inclut, sous certaines conditions, les frais de transport qui sont nécessaires aux soins et à la surveillance de la maladie. En revanche, les éventuels dépassements d’honoraires ainsi que le forfait journalier hospitalier (en cas d’hospitalisation) restent dus par le patient (ou sont remboursés par sa mutuelle complémentaire) [2]. 24 Guide idées vraies/fausses 2015 32. C’est au malade de faire la demande de prise en charge à 100 % La demande de prise en charge à 100 % est effectuée par le médecin traitant, c’est-à-dire le médecin déclaré par le patient auprès de sa caisse d’assurance maladie. Pour cela, il remplit un formulaire spécifique, le protocole de soins. Il mentionne dans ce document le diagnostic, ainsi que les soins et les traitements envisagés. Il adresse ensuite ce formulaire au médecin-conseil de l’assurance maladie dont dépend le patient. Une fois que ce dernier a donné son accord pour la prise en charge à 100 %, le protocole de soins est remis au patient et lui est expliqué par son médecin traitant (2). faux 33. Il existe des associations de patients atteints de cancers ORL Les associations de malades jouent un rôle important d’information, de conseil et de soutien. Il peut être utile de les contacter (cf. p. 27). 25 Cancer des voies aérodigestives supérieures Bibliographie 1. Tumeur maligne, affection maligne du tissu lymphatique ou hématopoïétique. Cancer des voies aérodigestives supérieures. Paris : HAS, INCa, coll. Guide affection longue durée ; 2009. 2. Les traitements des cancers des voies aérodigestives supérieures, collection Guides de référence. Cancer info, Inca, décembre 2012. 3. Les cancers en France. Les données. Boulogne-Billancourt : INCa ; 2014. 4. Hans S, Brasnu D. Cancers ORL : conduite à tenir et traitement. Traité de médecine Akos. Paris: Elsevier Masson SAS ; 2010. 5. Dorsey K, Agulnik M. Promising new molecular targeted therapies in head and neck cancer. Drugs 2013;73(4):315-25. 6. Trachéotomie et prise en charge des maladies neuromusculaires. Paris : AFM ; 2007. 26 Guide idées vraies/fausses 2015 Associations de patients Union des associations françaises de laryngectomisés et mutilés de la voix (UAFLMV) L’UAFLMV regroupe 23 associations régionales de malades. Elles informent et apportent soutien moral et aide à la réinsertion sociale par des visites à l’hôpital et à domicile. Adresse : 13, place de Rungis, 75013 Paris. Tél.: 01 42 33 16 86 Email : [email protected] Site Internet : www.mutiles-voix.com Association ORL Vie Nouvelle L’association ORL Vie Nouvelle se propose d’apporter aide, écoute et conseil aux malades et à leurs proches. Adresse : 15, rue d’Angleterre, 06000 Nice. Email : [email protected] Site Internet : orlvienouvelle.wordpress.com 27 3265710001- 07/15