Pourquoi l`intelligence économique n`a pas encore décollé en Afrique

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Pourquoi l`intelligence économique n`a pas encore décollé en Afrique
Global Journal of Research in Business & Management
Vol. 4, No. 1, December 18, 2015
www.gpcpublishing.com
ISSN: 2454-3128
Pourquoi l’intelligence économique n’a pas encore décollé en Afrique ?
État des lieux, enjeux et perspectives
GHIZLANE SALAM
Docteur en Économie et Gestion. Enseignante chercheur
Université Hassan II. Casablanca. Maroc
Laboratoire de l‟Intelligence Stratégique (LIS )
Résumé
Nous proposons de montrer à partir de cet article, l‟importance ainsi que la nécessité urgente de la question du
développement de l‟IE en Afrique, en mettant en évidence, tout d‟abord, les défis qui entravent encore l‟évolution de la
pratique de l‟IE dans les pays africains en général, et au Maroc en particulier, sans oublier de présenter les limites du
«modèle africain d‟IE » basé sur « l‟unité africaine ».
Mots clés :
Intelligence économique, politique nationale de l'informati on, système national
d'intelligence économique, Afrique, Maroc.
d'information, dispositif
Why economic intelligence has not yet taken off in Africa? Current
situation, problems and prospects.
Abstract
We propose to show from this communication, the importance and the urgency of the issue of competitive
intelligence Development in Africa, highlighting, first of all, the challenges that still hamper the development of the pract ice
of competitive intelligence in African countries in general and Morocco in particular, not to present the limits of the "
competitive intelligence African model" based on "African unity".
Keywords:
competitive intelligence, national information policy, national information system , business intelligence
system, Africa, Morocco.
Introduction
Pourquoi l‟intelligence économique (IE) n‟a pas encore décollé en Afrique? Pourquoi cette discipline n‟arrive pas à
se positionner correctement entre les autres nouvelles disciplines en économie managériale ? Pourquoi les pays africains
n‟ont pas encore réussi à implanter des structures d‟IE bien développées comme le cas des pays européens, asiatiques
ou encore américains ? Faut-il prévoir une définition africaine du concept « IE » pour pouvoir mettre en place un dispositif
d‟IE africain ? Ou bien chaque pays africain développe son IE indépendamment des autres pa ys africains, en se basant
sur ses propres spécificités et particularités?
Beaucoup de questions restent à poser lors qu‟on parle de l‟IE en Afrique. Cette panoplie d‟interrogations mène
encore vers d‟autres pistes de réflexion. Dans ce cadre, tout comme l‟Europe, l‟Amérique et même l‟Asie ont compris
depuis près de deux décennies, l‟importance de la démarche d‟IE avec la capitalisation et l‟utilisation stratégique
(protection et diffusion) de l‟information, notamment celle à caractère économique, en mettant en place des dispositifs
nationaux d‟IE qui ont servi leur économie à grande échelle. Au regard de toutes ces démarches, comment l‟Afrique peutelle réussir à orienter son économie vers une démarche nationale d‟IE ? Quel est l‟état des lieux de la pratique de l‟IE en
Afrique ? Quels sont les défis qui entravent encore l‟essor de cette discipline dans les pays africains en général, et au
Maroc en particulier ?
I. L’Afrique à l’ère de l’IE
Les travaux traitant la pratique de l‟IE en Afrique sont très exceptionnels pour ne pas dire absents. Dans ce cadre,
il ne faut pas être pessimiste ni même agressif comme certains auteurs qui expliquent ce vide par une certaine ignorance
de la part des chefs d‟États africains, vis -à-vis du rôle moteur que peut jouer l‟IE en faveur du développement de leur
économie. Ce concept se développe, certes, “petit à petit“ au sein de chaque pays . Mais au niveau africain, il y a encore
un immense travail à faire. À ce titre, nous avons essayé de collecter, sur la base d‟autres travaux de recherche, des
éléments susceptibles de réponde à notre problématique, dont voici une liste non exhaustive.
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1. Les travaux de Stevan DEDIJER (1911– 2004)
Nous commençons par les travaux de Stevan DEDIJER (1911– 2004). Cet auteur avait, dès le début des années
1970, formalisé à travers la définition de «l‟intelligence sociale», l‟application performante de la démarche d‟IE aux
logiques de développement. Selon lui, « un pays en développement qui ne dispose ni d‟une industrie de la connaissance,
ni de réseaux d‟information denses et de qualité, doit pouvoir dépasser cet handicap par l‟organisation d‟une politique
d‟intelligence, les ressources répondant aux besoins d‟information et de connaissance, pouvant être acquis et négocié à
l‟extérieur. La maîtrise de l‟information et de la connaissance de l‟intelligence sociale est un vecteur puissant de
développement, qui offre aux pays en voie de développement et aux nations émergentes , la capacité réelle d‟acquérir,
voire de négocier l‟expertise indispensable au développement endogène1».
Par ailleurs, la mise en place d‟un système d‟intelligence dans un pays en développement est désormais fortement
conseillée. Un individu hautement motivé, peut et doit déployer tout moyen pour promouvoir les intérêts de la
communauté à laquelle il appartient. Pour cela, des principes d‟efficacités apparaissent pour la gouvernance intelligente
de l‟organisation et pour l‟action:

La connaissance en général, la connaissance scientifique et la connaissance de l‟intelligence en particulier, sont
des outils essentiels pour l‟accompagnement de la croissance des nations et le fonctionnement du
gouvernement.

L‟art de la “pensée intelligente”, ainsi que l‟inventivité peuvent et doivent être utilisées, afin d‟atteindre de grands
objectifs de puissance avec un usage parcimonieux de ressources. Il convient de garder une organisation de
petite taille et d‟utiliser de façon intensive l‟initiative individuelle.
2. Forums, colloques, et rencontres en IE
Dans le cadre des forums, colloques, et rencontres en IE, les premières tentatives de sensibilisation sur l‟IE en
Afrique remontent à 19952. Amath Soumare fut l‟animateur des premiers colloques sur l‟IE et l‟Afrique. À partir de sa
société Sopel International, il eut le mérite de mener une opération originale de téléconférences entre des cadres africains
et des intervenants français , en liaison avec la Banque mondiale qui mit à cette occasion son système de vidéoconférence
à sa disposition. Au milieu des années 2000, les diplômés africains de l‟ École de guerre économique de Paris, créent les
premiers cabinets en IE en Afrique. Cette étape est essentielle, car elle est le point de passage obligé d‟une expertise
locale en phase avec la culture africaine.
D‟un autre coté, le Forum IE et Développement (FIED) 3 est un forum économique qui rassemble de multiples
parties prenantes telles que des dirigeants d‟entreprises et de syndicats, des personnalités de la société civile,
universitaires, des responsables politiques et d‟organisations internationales, pour débattre des grands enjeux du XXIe
siècle sur le développement. Le dernier Forum a été organisé à Dakar, les 28 et 29 Novembre 20144, en se focalisant sur
les aspects structurels de la globalisation des économies.
Dans le même ordre d‟idées, la Conférence Permanente des Chambres Consulaires Africaines et Francophones
5
ème
(CPCCAF) a organisé sa 8
édition sur l‟IE en Afrique, à Toulouse (France) les 4, 5, 6 juin 2014. Cette édition
s‟intéressait à la thématique portant sur « l’information économique au service du développement économique des
TPE/PME africaines et le rôle des chamb res consulaires dans la mise à disposition de cette information ». En effet, les
Ateliers de cette édition avaient pour ambition de permettre pendant les trois journées, d‟enrichir l‟approche des
participants en matière d‟IE, de rassembler l‟ensemble des acteurs autour d‟une initiative de grande envergure centrée
autour de l‟IE en faveur des chambres consulaires membres de la CPCCAF, et de démontrer la capacité du réseau à
partager autour d‟expériences probantes.
Il ne faut pas oublier également les différentes initiatives prises dans le cadre du développement africain,
notamment la création des agences qui traitent les problématiques de la communauté africaine. On site à titre d‟exemple
Africa diligence6. C‟est une agence d‟informations stratégiques spécialisée sur les marchés africains, la géopolitique des
matières premières et l‟IE en Afrique. Le site de l‟agence (africadiligence.com) est la propriété de Knowdys Consulting
Group suscité, n°1 du conseil et de la formation en intelligence stratégique, due diligence et affaires publiques en Afrique
subsaharienne.
3. Thèses, mémoires, publications scientifiques….
Plusieurs travaux de recherche, thèses, mémoires ou publications, traitent l‟état des lieux de la pratique de l'IE en
Afrique. D‟après les exemples consultés, nous avons trouvé que la plupart de ces travaux é voquent la problématique de la
1
Armand Bahouka-Deb at. Thèse de Doctorat. « Appropriation et mise en œuv re de l'intelligence et de la sécurité économique dans le contexte de l'economie
congolaise : une platef orme expérientielle : la direction générale de l'economie ». 2011. Page : 46.
2
Romain Bonnet, Guy Gweth et Christian Harbulot. « Intelligence économique en Af rique ». http://www.eg e.f r/download/sem48_a rticle_af rique.pdf
3
www.sopel.org
4
http://www.sopel.org/f ied/TERME_DE_REFERENCE_FIED2014.pdf
5
www.cpccaf .org
6
www.af ricadiligence.com
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veille stratégique, la veille technologique ou encore l‟IE, relative parfois à un pays donné, ou même à des entreprises
nationales à travers des études de cas.
Parmi ces travaux de recherche, nous citons à titre d‟exemple la thèse7 d‟Armand Bahouka-Debat, qui a essayé de
démontrer, en 2011, la nécessité de l‟appropriation de l‟IE en tant que culture et mode de gouvernance alternatif, capable
d‟aider un pays en développement, comme le cas de l‟économie congolaise, à affronter les défis et enjeux triple. Ceux
relatifs au sous -développement, au développement alternatif et à la mondialisation.
Abdelmalek Alaoui est un auteur marocain qui a lancé en 2009, le 1 er et unique ouvrage jusqu‟à présent, sur
« Intelligence économique et guerre secrète au Maroc 8 ». Confronté aux mille défis, le Maroc a besoin d'une stratégie de
guerre économique, qui permettra le jaillissement du dirigeant marocain hybride, qui sait surveiller comme les Chinois,
analyser comme les Français, et agir comme les Anglo-saxons. À l'aide d'exemples plus étonnants les uns que les autres,
l'auteur, fin connaisseur des guerres secrètes qui se mènent au Maroc et ailleurs, est entré au cœur même de cet étrange
univers et a lancé les pistes pour une doctrine marocaine rénovée de sûreté économique.
Un autre exemple doit être mentionné également. C‟est le cas de l‟auteur camerounais Steve William Azeumo 9,
qui a lancé en juin 2013, un ouvrage sur « l'intelligence économique camerounaise (IEC) ». L'auteur s'est penché sur le
cas du Cameroun, afin de promouvoir auprès des gouvernements, des institutions, des entreprises, la prise en
considération de l‟IE dans l'élaboration de leurs différentes politiques économiques et stratégies de développement.
4. Autres travaux de recherche en Afrique
Aminata DIALLO et Franck BULINGE10 ont présenté en 2006 un travail de sensibilisation en matière d‟IE en
Afrique. Ces deux auteurs ont essayé de mener une réflexion p réalable à une recherche sur le développement de l‟IE en
Afrique sub-saharienne, en suscitant l‟intérêt à mettre en place des dispositifs nationaux d‟IE dans les pays africains. Un
autre travail de sensibilisation présenté en 2010, par Romain Bonnet, Guy Gweth et Christian Harbulot11. Ces auteurs ont
essayé, à travers leur travail intitulé « IE en Afrique », d‟analyser l‟évolution de l‟IE sur le continent africaine , en
considérant que le fait de „Dresser un état des lieux de l‟IE sur le continent africain e n 2010, peut s‟avérer un périlleux
exercice‟.
Par ailleurs, le Sénégalais Ababacar MBENGUE 12 est nommé, en 2014, en tête du Groupe Knowdys. Ce groupe
est un jeune cabinet dynamique qui est leader incontesté dans le secteur de l‟IE et de la due diligence sur l‟Afrique. En
effet, la nomination d‟un africain à la tête du Groupe Knowdys pourra perme ttre d‟apporter aux pays africains, du poids et
de la technicité scientifiques et méthodologiques puisés dans le domaine du management stratégique, et de les combiner
avec la force d'une organisation leader, très professionnelle et respectée dans le secteur de l‟IE en Afrique. Ceci a été
confirmé par le nouveau Président Ababacar MBENGUE qui a garanti de « consolider la place de leader du Groupe
Knowdys en Afrique, en essayant d‟être présent sur l‟ensemble des régions du continent africain , et proposer une offre
globale et innovante d‟IE et de due diligence »13.
Passant maintenant au volet de la formation en IE en Afrique. Prenons le cas du Sénégal. C‟est en 2009 que le
Centre d‟Études diplomatiques et Stratégique (antenne de Dakar) a inauguré un master en IE14. Au Congo Brazzaville, un
projet d‟organisation des premiers ateliers d‟IE et le développement d‟Afrique centrale (CEEAC) fut proposé par le
Mastère d‟Intelligence Scientifique, Technique et Économique de l‟ESIEE Paris15, auprès des autorités compétentes. Ce
projet profitait du fait que le Président Denis Sassou Nguesso était Président en exercice de la communauté économique
des États d‟Afrique Centrale en 2005. Ces ateliers proposaient entre autre la création au Congo d‟une école d‟Intelligence
Économique d‟Afrique centrale dans le cadre de la CEEAC. Malheureusement, le projet transmis au cabinet du chef de
l‟État n‟a connu aucune suite.
En Algérie, le Ministère de l‟Industrie et des Mines a crée une Direction Générale de l‟IE, Études et Prospectives
16
ère
(DGIEEP). Cette Direction a édité en 2010, un manuel de formation en IE . Cette 1 édition du document s‟est basée
sur une étude réalisée par le Cabinet algérien Veil Tech pour le compte du Ministère, à partir d‟une enquête menée
auprès d'une trentaine d'entreprises industrielles , appartenant à divers secteurs d‟activité et reflétant la diversité de
l‟industrie nationale en termes d‟effectifs et de métiers. L‟objectif est de répondre à la volonté de contribuer à la formation
des entreprises dans un domaine nouveau qui est l‟IE. Certes, cette initiative doit être félicitée, mais il est à signaler que
depuis la 1 ère édition en 2010-2011, aucune nouvelle version n‟a vu le jour.
Synthèse:
Il ressort de cette revue de l‟IE en Afrique, un certain nombre de remarques, dont les principales sont les suivantes :
7
Armand Bahouka-Debat. Op. Cit.
Abdelmalek Alaoui. « Intelligence économique et guerres secrètes au Maroc ». Koutoubia Éditions Alphée. 2009.
Stev e William Azeumo. « L‟intelligence économique camerounaise (IEC) ». Préf aces de Francis Moaty et Oliv ier Cardini - postface d'Abdoulay e Ndaw.
Harmattan Cameroun. 2013.
10
Aminata DIALLO et Franck BULINGE. Op. Cit.
11
Romain Bonnet, Guy Gweth et Christian Harbulot. Op. Cit.
12
http://www.portail-i e.f r
13
http://www.kno wdy s.com
14
Armand Bahouka-Deb at. Op. Cit.Page 67.
15
L'école d'ingénieurs de la Chambre de commerce et d'industrie de région Paris Île-de-France (www.esiee.f r)
16
http://www.mdipi.gov .dz/IMG/pdf /manuel_de_f ormation.pdf
8
9
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
Absence de travaux collectifs sur l‟IE en Afrique. Ce « vide » ou encore « silence » dénote d‟une absence
de point d‟ancrage conceptuel et théorique des Africains sur ce sujet. Elle reste tributaire des autres
apports théoriques et pratiques d‟IE.

Aucun pays africain n‟a défini le concept d‟IE selon un cadre théorique qui répond à ses spécificités
économiques, politiques ou culturelles.

La plupart des initiatives prises dans le cadre du développement de l‟IE en Afrique n‟ont pas connu une
suite depuis leur lancement.

Chaque pays africain continue à développer une IE en l‟absence d‟une unité africaine.

Le succès d‟une démarche d‟IE passe nécessairement par l‟adhésion de tous les acteurs économiques.
C‟est une attitude de coopération et d‟échange entre public et privé et un engagement de chacun.
II. Réflexions nationales sur le développement de l’IE en Afrique : des stratégies
nationales se mettent en place
Le développement d‟une démarche en IE passe nécessairement par le développement d‟une politi que nationale de
l‟information. En effet, une politique nationale de l'information est l‟ensemble des principes et des stratégies qui orientent
l‟action à entreprendre pour la mise en œuvre d‟un objectif, se rapportant au Système National d‟Information, notamment
celui de réduire l‟émiettement de l‟information et la redondance des données, de réconcilier les inconsistances et
d‟augmenter l‟accès à l‟information critique17. En d‟autres termes, la politique nationale de l'information est la
transformation en réalité nationale du droit à l‟information . Dans ce cadre, l‟UNESCO a lancé en 2000, le « Programme
Information pour tous (PIPT) 18 ». Le PIPT est un programme intergouvernemental dans lequel les gouvernements du
monde entier, se sont engagés à mobiliser les nouvelles opportunités de l'ère de l'information , pour créer des sociétés
équitables grâce à un meilleur accès à l'information.
À cet effet, les pays du continent africain doivent aujourd‟hui anticiper, innover, partager, s‟adapter, analyser et
enfin protéger leur patrimoine et leur savoir-faire, à travers une politique d‟IE globale. Comment ces pays se sont
développés en matière d‟IE? Est-ce que l‟approche est différente? Quelles sont concrètement les actions mises en
place ?
À ce titre, il est à noter que sous l‟égide des Nations Unies, en septembre 2000, 147 chefs d‟État et de
gouvernement et 189 pays se sont engagés dans la Déclaration du Millénaire, définissant ainsi 8 domaines (Figure 1)19.
1
8
5.
Éliminer l’extrême
pauvreté et la faim
6.
Assurer l’éducation
primaire pour tous
7.
Promouvoir l’égalité
des sexes et
l’autonomisation des
femmes
Réduire la mortalité
infantile
8.
2
7
3
1.
Améliorer la santé
maternelle
2.
Combattre le
VIH/SIDA, le paludisme
et d’autres maladies
Préserver
l’environnement
3.
4.
4
6
5
M ettre en place un
partenariat mondial pour
le développement
Figure 1 : les objectifs de la déclaration du Millénaire
À cette occasion, les banques multilatérales de développement se sont entendues pour poursuivre ces objectifs
communs, notamment la Banque Africaine de Développement (BAD), qui est considérée la 1 ère institution financière de
développement en Afrique. À cet effet, le rapport annuel 2012 de la BAD précisait que cette dernière a la volonté et les
ressources nécessaires pour devenir la 1 ère source d‟informations et d‟analyse sur les économies africaines 20. En
proposant déjà un portail très riche sur ses propres données statistiques, la banque a financé et fédéré le portail Open
21
Data de l‟Afrique . Open Data Afrique accompagne un certain nombre d‟initiatives mondiales et régionales destinées à
accroître la disponibilité des données sur l‟Afrique. Cette plateforme permettra d‟asseoir les processus de prise de
décision, la responsabilisation publique et la bonne gouvernance, sur des éléments de fait. Cette plateforme de données
17
Aminata DIALLO et Franck BULINGE. Op. Cit.
http://www.unesco.org
http://f r.slideshare.net/cadhoop/rapport-intelligence-economiq ue-ope n-data-linked in
20
http://www.af db.org/f ileadmin/uploads/af db/Documents/Procurement/Corporate-Procurement/Departmental_Annual_Repo rts/2012_-_NEPAD-IPPF__Rapport_annu el.pdf
21
http://www.af db.org/f r/knowledge/statistics/open-data-f or-af rica/background/
18
19
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en ligne fait donc partie de l‟initiative « Autoroute africaine de l‟information » pour intensifier la collecte, la gestion,
l‟analyse et le partage de statistiques de qualité sur le développement du continent.
À ce propos, nous avons choisi quelques pays africains, qui nous paraissaient un peu plus avancés par rapport
aux autres pays africains, pour pouvoir analyser leur progrès en matière de mise en œuvre des stratégies nationales d‟IE.
C‟est le cas de la Côte d‟ivoire, le Rwanda, le Maroc, l‟Algérie et de la Tunisie.
1. Le modèle de la Côte d’ivoire
La Communauté Ivoirienne de l‟Intelligence Économique (CIIE) 22, se voulait un espace d‟échange et
d‟approfondissement sur des sujets relatifs à l‟IE, en menant des actions de sensibilisations au grand public. La CIIE qui
est également un cercle de réflexion et un levier d‟impulsion à la disposition de toutes les organisations (publiques et
privées) pour les informer, les accompagner et les assister d ans l‟ensemble de leur activité, avait pour objectif de
contribuer au rayonnement économique de la Côte d‟ivoire, en participant à l‟organisation de l‟information économique.
Dans le domaine l‟IE, les acteurs sont sensibles à l‟information et plus que dans d‟autre domaine , à la surinformation. De
plus, la CIIE contribuait à la mise en œuvre d‟une démarche d‟IE au sein de la sphère publique et privée, et ce par la
promotion de formations et le développement de bonnes pratiques en matière d‟IE.
En guise d‟illustration des efforts ivoiriens dans ce cens, citons la 1 ère conférence sur L‟IE, organisée, en 2011, par
la CIIE sous le thème : « Comment les informations économiques et commerciales permettent d‟orienter la stratégie et de
faciliter la prise de décision dans une entreprise ou une administration ?». Cet évènement qui a vu la participation
d‟environ une centaine d‟auteurs, était placé sous le patronage du Ministère d‟État, Ministère du plan et du
Développement. Il s‟agissait de donner un aperçu global de l‟IE en tant qu‟un outil de développement pour les entreprises
publiques et privées.
2. Le modèle du Rwanda
La décision du développement de l‟IE au Rwanda est venue suite à la volonté de son Président rwandais Paul
Kagame. En effet, le Président rwandais organisait, en 2010, un Forum sur l‟investissement, à Kigali, avec l‟appui du
Commonwealth. L‟évènement rassemblait 120 investisseurs en provenance des cinq continents. 35 projets d‟un montant
de 5 milliards de dollars se sont annoncés à cette occasion. Dans la foulée du Forum de Kigali, le Président ordonne le
déploiement d‟une stratégie d‟IE, avec l‟appui du Fonds Monétaire International (FMI) et l‟expertise de consultants
africains. Le dispositif mis en place regroupe le Rwanda Development Board (RDB) en charge de la promotion des
exportations et des investissements 23, la Banque nationale du Rwanda24 (BNR), l‟Institut national des statistiques 25 (IN S)
et la Fédération du secteur privé 26 (FSP).
Les cinq institutions ainsi réunies, avaient pour mission première de croiser leurs données, d‟analyser la situation
d‟un échantillon de 200 entreprises rwandaises ouvertes aux capitaux étrangers et d‟établir un diagnostic d‟attractivité.
Les préconisations serviront de base à des campagnes internationales ciblées. La stratégie d‟IE mise en place par Kigali
jusqu‟en 2020, vise à ouvrir de nouveaux marchés extérieurs au Rwanda, en commençant par le marché commun Estafricain (126 millions de consommateurs), et à renforcer le tissu économique, industriel et technologique, avec l‟apport
d‟investisseurs étrangers.
3. Le modèle algérien
C‟est en 2005 que fut organisée la 1ère conférence sur l‟IE à Alger27. En seulement deux ans, il y a eu quatre
manifestations internationales sur l‟IE à Alger. Ces différentes manifestations ont permis de mieux appréhender l‟IE et de
mettre en place des cycles de formations professionnelles pour des cadres d‟entreprises. Au niveau de la formation
Universitaire, un premier master a été créé à l‟Université de la Formation Continue (UFC) d‟Alger durant cette période.
Cette période a été marquée également par la création de la Direction Générale de l‟IE, des Études et de la Prospective,
28
au sein du Ministère de l‟Industrie, de la Petite et Moyenne Entreprise et de la Promo tion de l‟Investissement . Son rôle
29
est d‟accompagner les entreprises algériennes dans leur démarche de Veille et d‟IE , et de constituer une force de
proposition sur les questions liées à la formation. C‟est à partir de 2008 que la présidence de la république algérienne a
parrainé un colloque international sur la Gouvernance des institutions et l‟IE. Des travaux et ateliers avaient été organisés
avec la participation d‟experts internationaux, pour définir les actions globales à mener en terme d‟IE.
22
http://arnesta.ov er-blog.com/pages/Intelligence-economique-en-cote-d-iv oire-une- organisation-se-met-e n-place-50 85082.html
www.rdb.rw/
www.bnr.rw/
25
www.statistics.gov.rw/
26
www.psf.org.rw/
27
Mouni r ROCHDI. « Intelligence Économique au Mag hreb : de 1990 à 2012 ». Publié en 2012. Disponible sur www.v eille.ma
28
http://www.mdipi.gov .dz
29
Exemple : les laboratoires pharmaceutiques SAIDAL, le groupe SONATRACH, la compagnie d‟hy drocarbures.
23
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4. Le modèle tunisien
La 1ère agence gouvernementale à s‟être intéressée sérieusement à l‟IE fut le centre de promotion des exportations
(CEPEX). Le centre a mis en place en 2008, à travers le Programme des Nations Unis pour le Développement (PNUD),
un projet d‟IE afin de répondre au mieux aux besoins des entreprises exportatrices tunisiennes. Par ailleurs, la 1ère
conférence internationale30 sur les Systèmes d‟Information et l‟IE (SIIE) a été organisée, en 2008, par L‟université de Loria
et l‟École Supérieure de Commerce Électronique de l‟université de la Manouba (ESCEM). La 5 ème édition de SIIE s‟est
déroulée en février 2012. Au niveau des entreprises, la Banque de Tunisie avait mis en place un système d‟IE suite à la
crise financière internationale.
D‟autres initiatives sont à mentionner dans ce sens. En effet, l‟Institut Arabe des Chefs d‟Entreprise a lancé le
31
Centre Tunisien de Veille et d‟IE (CTVIE). Son objectif est de fournir une information primaire, précise et prospe ctive aux
entreprises tunisiennes. L‟ESCEM a introduit un module de Veille dans leur formation initiale. De plus, l‟année 2012 a
connu deux évènements majeurs. Le 1er est la création de l‟Association Tunisienne d‟IE32 (ATIE). La nouvelle association
s‟est fixée pour mission la promotion et la diffusion de l‟IE et son appropriation par les divers acteurs économiques
nationaux, publics et privés. Le 2ème événement est le lancement du Réseau Tunisien d‟Intelligence et de Veille
Économique33 (RTIVE). Ce Réseau a été conçu dans le cadre du projet de promotion des exportations tunisiennes, initié
en 2009 et financé par le gouvernement suisse, avec l‟appui du Centre du Commerce International. Il vise à mettre à la
disposition des autorités publics et des opérateurs économiques, un dispositif de veille stratégique, susceptible d‟alerter
sur les évolutions économiques d‟intérêt majeur et d‟orienter des décisions prospectives à travers :

La Détection des tendances des marchés et l‟évolution de la règlementation liée au commerce dans les pays
partenaires ainsi que l‟identification des défis et des opportunités pour les entreprises tunisiennes sur le marché
international.

La collecte, la synthèse et le traitement d‟une information à forte valeur ajoutée.

La diffusion de l‟information traitée auprès des entreprises et des institutions d‟appui.
À coté de ces initiatives, il y a l‟expérience du Groupe tunisien CHAKIRA, l‟un des plus importants spécialistes
mondiaux dans la production de faisceaux de câbles électriques. Il y a également les travaux de recherche des étudiants
de l‟École Supérieure du Commerce. Notons aussi le Service de Veille Normative mis en place par l'Espace Information et
Documentation (EID) de l'INNORPI34. Ce service, appelé aussi "mise à jour d'informations", peut se définir comme suit
« une entreprise ou une personne fournit à l'INNORPI une ou plusieurs références de textes normatifs ou réglementaires,
et demande la vérification ou l'actualisation de ces références ».
5. Le modèle marocain
Au Maroc, la pratique de la veille stratégique (VS) ou de l‟IE est toujours présente . Les grandes entreprises
marocaines, et même quelques PME sont très avancées dans la matière. Sauf que cette pratique était et reste non
structurée et silencieuse35. En effet, depuis les années 2000, une prise de conscience des nécessités de la pratique de
ère
l‟IE au Maroc s‟est accélérée. En mai 2006, le Haut Commissariat au Plan organisait une 1 rencontre sous le thème
« l‟IE au profit des entreprises du Maroc dans l‟économie mondialisée ». A participé à cette rencontre le Président de la
Fédération des Professionnels de l‟IE en France. Parmi les travaux de recherche, nous avons également le colloque dont
le thème était “l‟intelligence économique et les économies émergentes“ qui s‟est tenu à Tétouan, les 25 et 26 Novembre
2004. D‟autres signes encourageants ont été enregistrés. Nous citons le travail effectué par l‟Institut Royal des Études
36
ère
Supérieures (IRES) pour le rapport du Cinquantenaire. Ce travail est considéré comme la 1 grande expérience
marocaine en IE. En effet, cette tentative de dresser un bilan exhaustif des réalisations du Maroc depuis l‟indépendance, a
permis de mobiliser des experts reconnus et de disposer d‟un point de départ essen tiel pour la mise en place d‟une
démarche nationale d‟IE. Elle est en capacité d‟identifier les forces et faiblesses du Maroc.
Par ailleurs, des écoles et institutions publiques se sont engagées dans cette lignée à travers des formations
spécialisées en m atière de veille et d‟IE notamment, l‟université Al Akhawayn, l‟École des Sciences de l‟Information (ESI),
l‟École National de Commerce et de Gestion (ENCG), le Centre National pour la Recherche Scientifique et Technique
(CNRST), l‟Institut Marocain de l‟Information Scientifique et Technique (IMIST).
En 2007, le Maroc a assisté à la 1 ère tentative de convier des experts non francophones, à travers l‟organisation de
la conférence internationale « l‟Intelligence Territoriale » sous l‟impulsion de l‟Association Marocaine de l‟Intelligence
Économique (AMIE) 37, et du Forum Francophone des Affaires au Maroc. L‟implantation de la société DIGIMIND 38 a u
30
Mouni r ROCHDI. « Intelligence Économique au Mag hreb : de 1990 à 2012 ». Publié en 2012. Disponible sur www.v eille.ma
http://www.iace.tn/iace-centres/ctvie/
http://tunisia-businessintelligence.blogspot.com/2013/01/interv iew-exclusiv e-du-president-de.html
33
http://www.intellige nceeconomique.tn/f r/le-reseau.html
34
L‟Institut National de la normalisation et de la Propriété Industrielle (http://www.inn orpi.tn/Fra/innorpi-en-b ref _11_6)
35
Ghizl ane S ALA M. Thèse de Doctorat en éco nomie et Gestion. « État des lieux de la pratiq ue de l‟Intelligence Économi que da ns les équip ementiers
automobiles du Maroc : v ers une Supply Chain intelligente ». FSJES-Mohammedi a. 2013.
36
http://www.ires.ma
37
L‟Association Marocaine d‟Intelligence Économi que (A MIE) a été créée en 2006 par des acteurs appartenant au secteur priv é, à l‟administration et au
monde de la recherche. L‟A MIE se f ixe comme objectif d‟être un cercle de réf lexion et un lev ier d‟impulsion à la disposition de toutes les organisations
(entreprises, administrations et associations prof essionnelles…) pour les inf ormer, les accompagner et les assister en matièr e d‟i ntelligence éco nomique et
31
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Maroc à Rabat en 2006 (spécialisée dans la commercialisation des progiciels de veille), la création du 1 er cabinet
marocain « Global Intelligence Partners (GIP)» 39 en 2008, sous la présidence d‟Abdelmalek Alaoui, la création du Centre
en Intelligence Économique et Management Stratégique40 (CIEMS), du Centre Marocain de Conjoncture41 (CMC),
etc…sont d‟autres indices qui démontrent la volonté du Maroc pour s‟inscrire et développer une culture d‟IE.
C‟est juste après la crise financière et économique internationale que nous avons assisté à une transformation
systémique et organisationnelle en matière de veille et d‟IE. À ce t effet, le Ministère de l‟Économie et des Finances
marocain a mis en place, en 2009, un Comité de Veille Stratégique (CVS) 42. L‟objet du CVS est de mettre en place des
mécanismes de concertation et de réactivité vis -à-vis de la crise économique et financière internationale, et de constituer
une force de proposition pour le gouvernement marocain, en préconisant des mesures de soutien nécessaires aux
secteurs les plus exposés à la crise économique mondiale comme le textile ou l‟automobile. Cet instrument a co nnu un
réel succès et son bilan est très positif. Par ailleurs, des comités sectoriels composés de représentants du secteur public
et privé, ont été également mis en place afin de renforcer les capacités de proposition, d‟opérationnalisation et de suivi, e n
coordination avec le CVS. À ce niveau, un service de veille stratégique 43 a été créé au sein de la Direction des Études au
Ministère des Affaires Étrangères et de la Coopération. Cette entité a comme rôle la centralisation et l‟étude des
informations à caractère stratégique, collectées par les ambassades marocaines. Un rapport par pays et par secteur est
mis périodiquement à la disposition des exportateurs marocains intéressés 44. Ce service aura pour rôle également de
collecter le maximum d‟informations sur les activités économiques des pays concurrents du Maroc dans certains secteurs
considérés prioritaires dont l‟Aéronautique, le Textile, l‟Automobile, les fils et câbles…Notons également qu‟une structure
dédiée à ces marchés « la Commission Afrique » a été mise en place au sein de la CGEM 45 afin de faire connaître les
spécificités du marché de l‟Afrique Subsaharienne aux producteurs nationaux. Elle assure la diffusion d‟informations
relatives à ces marchés auprès du secteur privé et organise des missions d‟hommes d‟affaires vers ces pays. Mais, c‟est
une structure qui reste orienté pour satisfaire les besoins des membres de la CGEM et qui n‟a pas les moyens d‟assurer
un suivi régulier des changements de réglementations et des opportunités d‟affaires.
Synthèse
Suite à tous ces exemples, nous remarquons que la mise en œuvre de la politique nationale de l'information donne
lieu à la naissance d‟un système qui n‟est autre que le système national d‟information. Un système étant un ensemble de
structures cohérentes dont les éléments constitutifs, même détachés de leur contexte, en conservent la référence et
restent indispensables à son bon fonctionnement, à son développement, ainsi qu‟à son décodage. Chaque pays africain a
finalement choisi une approche différente de l‟autre. En effet, le Maroc a essayé de commencer par développer une
intelligence territoriale en développant en avant l‟IE Régionale à travers les agences de développement. La Tunisie a
choisi plutôt une intelligence collaborative regroupant plusieurs institutions à travers son réseau RTIVE. Alors que l‟Algérie
a opté pour une centralisation de l‟IE au sein de la Direction Générale de l‟IE du ministère de l‟Industrie. De grands efforts
déployés certes, mais des défis entravant l‟évolution et la réussite d‟une politique nationale d‟IE, persistent encore.
III. Les défis du développement de l’IE en Afrique
D‟après de tout ce qui précède, nous constatons qu‟il y a un savoir-faire africain sur lequel il faut capitaliser, mais il
reste beaucoup de travail à faire, du coté public et privé. En effet, en Afrique, la recherche, le traitement et la sécurisation
d‟informations à des fins de compétitivité économique ne marchent pas à l‟occidentale. À ce titre, nous avons essayé
d‟analyser quelques aspects qui nous paraissent importants et qui freinent encore l‟évolution d‟un système d‟IE Africain
(SIEA), en choisissant le cas du Maroc.
1. Analyse des principaux freins au développement de l’IE en Afrique
La mise en œuvre d‟une politique publique d‟IE dans le contexte des pays d‟Afrique subsaharienne ou de pays
sous-développés, n‟est pas une décision aussi simple qu‟elle parait. Cette politique doit viser plusieurs objectifs,
qu‟Armand Bahouka-Debat46 a énumérés en cinq grands objectifs :

Réussir le développement en situation de relation du faible au fort. Cela veut dire qu‟il faut développer de fortes
relations avec les pays avancés en matière d‟IE, en bénéficiant de leurs réalisations.
de f édérer les efforts des acteurs et des structures d‟intelligence économique au Maroc. Enf in, l‟AMIE v ise le dév eloppement et la promotion des f ormations
en intelligence économique au Maroc.
38
www.digimind.f r
39
http://global-intel.com
40
www.ciems.ma
41
www.conjoncture.ma
42
www.mef .gov.ma
43
Le serv ice a remplacé la cellule de v eille économique qui n‟av ait que 2 f onctionnaires en 2008.
44
Selon les f onctionnaires chargés de la v eille, les entreprises reçoiv ent des fiches pay s av ec des inf ormations actualisées et des notes de v eille spécif iques
à des secteurs déterminés.
45
Conf édération Générale des Entreprises Mar ocaines.
46
Armand Bahouka-Deb at. Op.cit. Page: 214.
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
Gérer de façon pérenne une démarche et une stratégie d‟anticipation et de présence.

Permettre à la mise en œuvre de l‟IE d‟être « au service de la cohésion sociale, grâce à l‟instauration des
relations entre l‟État et les acteurs économiques et sociaux, adaptées aux enjeux mondiaux de compétitivité, en
participant, par le développement économique, au maintien du tissu social ».

« Au service des entreprises, la mise à disposition de l‟information utile et notamment économique et financière,
commerciale, juridique et réglementaire, scientifique et technique ; la sensibilisation/formation des entreprises à
l‟utilisation de l‟information ; le soutien des entreprises dans la conquête de marchés extérieurs, dans la veille
technologique et concurrentielle, à l‟acquisition de nouveaux savoir-faire… ».

Au service des États via la définition des politiques, des stratégies, la mise en cohérence, le développement
d‟outils, de modes d‟organisation et de travail au sein du Gouvernement et de l‟administration, visant à
augmenter leur performance économique notamment par une meilleure circulation de l‟information et une
collaboration interministérielle instituée. En ce sens, l‟IE est un puissant levier de réforme de l‟État.
L‟ensemble de ces fonctions ne saurait se réaliser sans l‟ existence d‟un dispositif national d‟intelligence et de
sécurité économique. Véritable centre d‟animation, de pilotage, de régulation, d‟évaluation et d‟interopérabilité, il permet
une synergie de l‟intelligence collective des acteurs et des modes opératoires. À cet effet, il est à préciser qu‟en Afrique,
dans un contexte où l‟État est souvent le principal acteur d‟une économie informelle à plus de 50%, elle est toujours
47
confrontée à une série de défis, que Guy Gweth a appelés « ennemies » . Cet auteur a précisé trois ennemies du
développement de l‟IE en Afrique à savoir : la corruption, la fuite des capitaux et la contrefaçon. En effet, et d‟après nos
développement théoriques, nous retenons le problème de la corruption, et nous ajoutons le suivi des stratégies
nationales et le partage d’information, comme les principaux problèmes, que nous appellerons « adversaires », de la
réussite de l‟IE dans les pays africains.
er
Le 1 adversaire est la corruption. En effet, entre la grande corruption (de haut niveau où les décideurs politiques
chargés d‟appliquer les lois utilisent leur position officielle pour promouvoir leurs intérêts personnels) et la petite corru ption
(à forte connotation bureaucratique dans l‟administration publique), l‟impact est extrêmement difficile à chiffrer. La lutte
contre la corruption est un combat mondial qui mobilise la plupart des appareils étatiques. En Afrique, la contribution de
l‟IE est surtout décisive pour les grandes entreprises qui craignent de perdre des contrats et de se mettre à dos des
autorités corrompues , en refusant d‟en être les corrupteurs. Ce travail exceptionnel s‟appuie sur les informations
confidentielles fournies par des « honorables correspondants » occupant des postes clés au sein des administrations.
Cette situation fait encore appel au paradoxe du partage de l’information comme un autre adversaire de
l‟évolution de l‟IE en Afrique. En effet, l‟accès à l‟information et la maitrise des sources d‟information constituent une
entrave majeure pour les opérateurs économiques souhaitant entretenir des relations économiques avec d‟autres pays du
monde. Le manque d‟informations au sujet du cadre préférentiel du commerce avec les pays partenaires est un handicap
sérieux à la réalisation des objectifs attendus d‟un tel dispositif de coopération. Ce déficit informationnel lié au manque d e
diffusion des opportunités et des facilités qu‟offre ce cadre aux opérateurs économiques, remet en cause la logique même
de signature d‟accords. En effet, l‟IE fournit plusieurs possibilités pour mobiliser le savoir et les compétences comme
sources d‟avantages économiques. Le processus d‟IE, avec ces différentes étapes, est conditionné par une fluidité de la
circulation des flux d‟informations, une culture de travail en groupe, de partage d‟informations et d‟échange de
connaissances48.
Arri vons au dernier adversaire, c‟est le suivi des stratégies. Nous avons constaté que certaines stratégie sont
lancées avec une grande réussite, d‟autres ont connu un échec total suite à une mauvaise évaluation des besoins, et
d‟autres encore n‟ont pas connu un suivi. Un grand point d‟interrogation se met en place. Est-ce que cette situation est
due au cout de la mise en œuvre d‟une stratégie nationale ? Ou bien cela s‟explique par la responsabilité des autorités
africaines qui considèrent l‟IE comme un outil de luxe et de mode ? Ou encore ils existent d‟autres freins méconnus
jusqu‟à présent et qui empêchent cette discipline à évoluer en Afrique ?
2. Les principaux freins au développement de l’IE au Maroc
Au niveau du Maroc, ce pays ne dispose toujours pas d‟un modèle d‟action unifié en la matière. L‟exemple des
babouches marocains et l‟attaque chinoise de ce produit fait surgir la nécessité d‟adopter une politique nationale en
matière de veille et d‟IE. Dans ce contexte, Boujemâa ACHCHAB et Driss HARRIZI ont présenté un travail traitant les
défis de l‟IE au Maroc49. Ces deux auteurs ont développé 19 défis qui freinent encore l‟évolution de l‟IE au Maroc. En
effet, l‟absence à la fois d‟un projet de société Marocain qui définit l‟IE selon le contexte marocain, et un organe national
chargé d‟IE, deviennent une nécessité cruciale pour fédérer toutes les initiatives marocaines aussi bien publiques que
privées. En réagissant ainsi, la mise en place d‟un dispositif juridique permettant de favoriser l‟accès et la circulation de
l‟information dans le respect des normes déontologiques et légales, parait légitime. Plus que ça. Réussir une démarche
d‟IE au Maroc impose plus que jamais l‟adoption d‟un management stratégique de l'information, pour la simple raison ,
c‟est que l‟implantation d‟une telle démarche au Maroc est avant tout un changement dans la culture managériale , aussi
bien humaine qu‟informatique. Cela passe nécessairement par un travail de sensibilisation et de communication auprès
47
Guy Gweth. « Les ennemis de l‟intelligence économique en Af rique ». Les Afriques. n°190. Fév rier 2012.
Ghizla ne SALA M. « Qui dit intelligence économique dit partage d'inf ormation ». Marché et organisations, (2), 2013. Pages : 41-66.
49
Boujemâa ACHCHAB, Driss HARRIZI. « Les déf is de l‟intelligence économique au Maroc ». La Rev ue Gestion et Organisation 5. 2013. Pages : 130–137
48
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des opérateurs économiques et sociaux, colossal, pour éviter tout malentendu qui peut confronter le concept IE avec des
actions d‟espionnage. Ce problème peut être résolu également par des actions de formation, initiées par des entités
privées ou par les autorités publiques à l‟aide d‟un système éducatif permanent et de qualité. Si nous nous arrêtons sur la
liste des nouveaux métiers relatifs à l‟IE, à savoir : veilleur, data miner, auditeur d‟IE, consultant, gestionnaire des
connaissances (KM), responsable d‟IE, lobbyiste, animateur de réseaux d‟entrepris es, responsable de e-réputation,
gestionnaire de crise… une grande question se pose: le Maroc est-il capable d‟offrir un cadre de formation adéquat en IE,
en terme de quantité et de qualité ?
Par ailleurs, la pratique de l‟IE est restée restreinte aux activités de la veille. Le Maroc n‟a pas encore atteint le
niveau stratégique de l‟IE qui dépasse la veille par des actions de prise de décision et d‟influence (lobbying). Un autre défi
sur lequel nous insistons, c‟est le problème du partage d’information. C’est une réalité face à laquelle les entreprises
doivent régir consciemment. C‟est une culture d‟égoïsme et d‟intérêt individuel qui domine encore les esprits. La diffusion
de l‟information est un facteur de développement économique accéléré, alors que sa r étention conduit à une perte de bien
pour la collectivité. En parallèle de ce partage d‟informations, il ne faut pas oublier d‟identifier les informations susceptibles
d‟être diffusées, des informations stratégiques présentant un avantage concurrentiel pou r l‟entreprise. Cela demande tout
un travail de sensibilisation pour développer un esprit et une culture de travail en groupe, dans un cadre d‟intelligence
collective. Donc c‟est tout un état d‟esprit qu‟il faut changer.
En revanche, la mise en réseau (pôles de compétitivité, clusters d‟entreprises) ne peut donner qu‟un effet
multiplicateur au développement du Maroc. Or, les clusters ou encore les Think-Tanks sont très rares au Maroc, pour ne
pas dire absents. Dans ce sens, selon le classement annuel (2011) de l‟Université de Pennsylvanie des think tanks les
plus influents dans le monde50, un seul Think-Tanks marocain figure dans ce classement. Il s‟agit du Centre des Études et
er
ème
ème
Recherches en Sciences Sociales (CERSS) qui est classé 1 au Maroc, 5
dans la région Arabe et 22
dans la région
Mena. Dans ce cadre, le secteur privé ne joue pas pleinement son rôle, ce sont les organismes publics et les associations
qui sont les plus actifs. Un partenariat public - privé - tissu associatif et académique, est fortement souhaitée en vue de
donner plus de tonicité à la mise en œuvre de l‟IE au Maroc. Dans cette perspective, un budget doit être mis sur la table. Il
est à signaler à ce niveau que les économies développées ont su mettre en place un dispositif national réussi, en
l‟adaptant avec le nouvel environnement ainsi qu‟aux spécificités de leur économie. Nous citons à titre d‟exemple la
Chine, qui a su garder le contrôle de son économie avec une ouverture prudente de celle -ci. Elle s‟est appuyée sur les
investissements étrangers pour mettre à niveau du point de vue technologique et managérial de l‟économie, mais de
façon qui reste limitée à certains secteurs. C‟est cette orientation qui favorise aujourd‟hui la croissance extraordinaire de
son économie.
Conclusion
Contrairement aux vues dominantes et sur la base des résultats obtenus, l a mise en œuvre de l‟IE en Afrique en
général est encore en gestation, et beaucoup de défis entravent son développement. Elle devra reposer sur une logique
de sensibilisation et de formation appropriée des acteurs, mais aussi sur une capitalisation des pratiques et expériences
de tous les acteurs , et être centrée sur une stratégie de développement adoptée. À notre niveau, cela ne peut réussir que
s‟il y ait 2 conditions:
1ère condition : vulgariser le concept « IE » dans les pays africains. Le concept est mal défini, ou encore « perçu »
dans les pays africains. Il est parfois synonyme de « piratage », et parfois d‟« espionnage », ce qui rend difficile d‟en
parler, et par conséquent de le développer correctement. L‟IE n‟est pas de l‟espionnag e. C‟est une aide à la prise de
décision à travers la bonne gestion de l‟information et ce, dans un cadre légal et transparent.
2ème condition : un bon climat de collaboration privé-public très développé au niveau de chaque pays africain. Si
nous réussirons à concrétiser cette collaboration nationale interne, nous pouvons ainsi évoluer vers une collaboration
panafricaine, et donc développer une unité africaine d‟IE.
Bibliographie
50
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