La revision generale des politiques publiques en France

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La revision generale des politiques publiques en France
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La revision generale des politiques publiques en France
Presentation et critique
François Lafarge
Bologna, SPISA
Via Belmeloro, 10 – 40126 Bologna
Jjanuary 15 2008
9:00 AM
The views expressed do not imply the expression of any opinion whatsoever on the part of the Italian
Department for Public Administration, and Formez.
LA REVISION GENERALE DES POLITIQUES PUBLIQUES EN FRANCE
PRESENTATION ET CRITIQUE
François Lafarge1
Dans le cadre de la recherche lancée par le Formez sur le thème de « La réforme du
système administratif français et les résultats de la recherche Giannini – Formez :
réflexions et commentaires », ce travail a pour but de présenter le nouveau processus de
réforme de l’Etat qui vient d’être engagé en France : la Révision générale des politiques
publiques, RGPP.
Celui-ci est marqué par une ampleur toute particulière qui en fait le projet de réforme le
plus ambitieux jamais engagé en France depuis les années d’après guerre. Il a débuté en
juillet 2007. Un compte rendu général est prévu en mai 2008.
1 Introduction
La RGPP part de la constatation de l’explosion de la dette accumulée par l’Etat
français : la dette globale a été multipliée par cinq entre 1980 et 2004. A la fin de 2005,
elle a dépassé les 1 100 milliards d’euros2. Elle est passé d’un 1/5 à 3/5 de la
production nationale annuelle en 25 ans. Ces chiffres parlent d’eux-mêmes et laissent
imaginer la marge de manœuvre qui reste à l’Etat pour mener de véritables politiques
sur le long terme.
Les lourdeurs et les incohérences de l’appareil administratif sont une première
explication de la gestion peu rigoureuse des dépenses : « l’organisation de l’appareil
administratif français est source d’incitations permanentes à la dépense publique et de
coûts injustifiés »3.
Mais il existe une seconde explication. L’action publique a été assimilée à la dépense
publique. Depuis 25 ans, de nombreuses structures ont été créées tant au niveau central
qu’au niveau local. Les instruments de politique se sont parallèlement multipliés suivant
le même mécanisme d’ajout permanent sans remise en cause systématique de l’existant.
Pour les unes comme pour les autres, le volume de dépense mobilisable a bien souvent
été considéré à la fois comme critère de l’implication publique et justification en soit de
l’action menée. Les questions relatives à la justesse des objectifs, au niveau
d’intervention choisi (Etat, collectivités territoriales, …) à l’adéquation des moyens à
ces objectifs, de l’absence ou non de coordination entre interventions parallèles, du
compte rendu, du contrôle et de l’évaluation, sont secondaires.
Le délabrement des finances publiques française ne rend tout simplement plus possible
de telles modalités d’action publique. Le projet de réforme qui vient d’être lancé en
1
Centre d’Expertise et de Recherche Administrative (CERA), ENA, Paris.
A cette dette financière s’ajoutent d’autres engagements de l’Etat, qui ne figurent pas aujourd’hui dans
la dette publique mais doivent être pris en compte comme les retraites des fonctionnaires. Différents
modes de calcul chiffrent le montant de ces engagements de 400 à 1 000 milliards d’euros.
3
Pebereau (M.), Rompre avec la facilité de la dette publique - Pour des finances publiques au service de
notre croissance économique et de notre cohésion sociale, Ministère de l'économie, des finances et de
l'industrie, Paris, La Documentation française, 2005, 135 pages.
2
1
juin-juillet 2007, la Révision générale des politiques publiques part précisément de cette
constatation, la même qui avait mené à la réforme des lois de finances et de manière
plus générale à la réforme de la comptabilité publique, toutes les deux introduites par la
loi organique relative aux lois de finances de 2001 (LOLF). La ratio de ce nouveau type
de démarche n’est plus « que pouvons nous faire » mais « que pouvons-nous nous
permettre ? »4.
Du point de vue des finances publiques, on sait de manière très générale, qu’il existe
trois catégories de dépenses publiques : les dépenses de fonctionnement, les dépense de
personnel et les dépenses de transfert ou redistribution. La RGPP ne se contente pas
d’intervenir sur les deux premières, ce à quoi les réformes précédentes, en particulier
celles d’avant la LOLF, se sont souvent bornées, mais elle a au contraire pour but de
porter le fer sur la troisième. Cela suppose que toutes les politiques publiques menées
par l’Etat soient minutieusement examinées, ce qui, au passage montre l’ambition du
projet.
L’examen de chaque politique publique doit être conduit en fonction d’une grille
d’analyse très détaillée, mais qui, au fond, est fondée sur deux interrogations
principales : cette politique est-elle pertinente ? Quelle est la personne la plus indiquée
pour la mettre en œuvre ?
Cette approche implique qu’à la fin de l’analyse des choix soit opérés. Pour chaque
politique menée il devra être statué sur son maintien, son développement, son
redimensionnement, son transfert ou son abandon.
Les réformes identifiées doivent permettre de réduire les dépenses de l’Etat dans les
trois catégories de dépense de manière quasi mécanique : l’abandon ou la réduction de
certaines politiques publiques seront vraisemblablement eux-mêmes sources
d’économies notables mais elles devraient également déboucher sur un
redimensionnement des dépenses de personnel et de fonctionnement5. L’argent public
ainsi dégagé doit servir, au moins en partie, à financer le développement des politiques
publiques considérées comme prioritaires par le gouvernement.
Nous allons tout d’abord passer en revue les cadres de référence de la RGPP (2) avant
de détailler ces principaux mécanismes (3) et de tirer quelques conclusions critiques sur
l’ensemble du processus (4).
2 Les cadres de références de la RGPP
La RGPP trouve ses cadres de référence dans la LOLF dont elle reprend (avec plus ou
moins de fidélité toutefois) de nombreux instruments ; elle s’inspire également de deux
réformes récentes : les stratégies ministérielles de réforme et les audits de modernisation
de l’Etat.
2.1 La LOLF
4
Des réformes de ce genre ont été promues et étudiées par l’OCDE (Méthodologie de la réforme des
missions). Elles ont déjà été mises en œuvre au Canada dans les années 1990 sous le nom de Revue des
programmes mais également en Italie dans une certaine mesure avec les réformes Bassanini (1997 –
1998) et la réforme du titre V de la Constitution en 2001.
5
Et ce également en référence avec la décision du Président de la République de ne pas remplacer la
moitié des fonctionnaires qui partent à la retraite.
2
La loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) est entrée en
vigueur le 1er janvier 2005. Elle abroge l’ordonnance du 2 janvier 1959 et devient la
nouvelle « constitution financière » de l’Etat. La loi de finances pour 2006 est la
première loi de finances adoptée en mode LOLF. La LOLF apporte des nouveautés
relatives à la gestion du budget de l’Etat (2.1.1). Elle oriente ce budget vers le contrôle
de la performance de l’action publique (2.2.2).
2.1.1 Les nouveautés apportées par la LOLF concernant la gestion du budget de l’Etat
La LOLF introduit tout d’abord de nouvelles modalités de présentation du
budget. Celui-ci est désormais présenté en deux axes qui ont pour but de mieux faire
apparaître la destination des moyens.
Le premier axe est celui des dépenses par destination. Avant la mise en place de
la LOLF, l’Etat allouait les crédits aux ministères en les répartissant entre environ 850
chapitres correspondant à la nature des dépenses. Le budget de l’Etat n’est dorénavant
plus voté par ministères mais structuré en trois niveaux : missions, programmes, actions.
Les politiques publiques sont divisées en missions qui peuvent être interministérielles.
Les missions, au nombre de 34 actuellement sont créées par la loi de finance sur
initiative du gouvernement. Chaque mission est déclinée en programmes. Les
programmes se déroulent à l’échelle ministérielle. Ils regroupent les crédits destinés à
mettre en œuvre une action ou un ensemble d’actions relavant d’un même ministère.
L’action est un élément d’un programme. Elle regroupe les crédits ayant la même
finalité au sein de chaque programme. Elle précise l’information sur la destination de
moyens budgétaires6.
Le deuxième axe est celui de la classification des dépenses par nature. Les
dépenses étaient auparavant regroupées par chapitre. Dans la nouvelle classification, les
dépenses sont réparties en sept titres chacun regroupant plusieurs catégories de dépense
(en tout 18) : titre 1 dotation des pouvoirs publics7 ; titre 2 dépenses de personnel8 ; titre
3 dépenses de fonctionnement9 ; titre quatre charge financière de la dette ; titre 5
dépenses d’investissement10 ; titre 6 dépenses d’intervention11. De l’ensemble de ces
titres, seuls les 2, 3 et 5 sont pertinents pour les développements qui suivent.
6
Par exemple, la mission « sécurité » se décline deux programmes ministériels, l’un à destination de la
police nationale (ministère de l’intérieur) et l’autre à destination de la gendarmerie nationale (ministère de
la défense). Les actions attribuées à la première sont ordre public et protection de la souveraineté ;
sécurité et paix publique ; sécurité routière ; commandement, formation et logistique. Les actions
attribuées à la seconde sont : ordre et sécurité publics, renforcement de la sécurité routière ; recrutement,
formation, commandement, logistique.
7
Des pouvoirs publics « constituants » : Présidence de la République, Assemblée nationale, Sénat, …
8
Rémunérations d’activité, cotisations et contributions sociales, prestations sociales et allocations
diverses.
9
Dépenses de fonctionnement autres que celles du personnel et subventions pour charges de service
public. Les premières correspondent aux achats de biens et services, travaux d'entretien engagées à court
terme par les administrations pour effectuer leur activité. Elles ne comprennent donc pas les dépenses de
capital fixe. Les secondes sont versées à des agents pour leur permettre d'assurer des missions de service
public.
10
Dépenses pour immobilisation corporelles de l’Etat et dépenses pour immobilisations incorporelles de
l’Etat. Il s'agit des achats de biens durables permettant la production de services par l'Etat
11
Les charges d’intervention sont des versements motivés par la mission de régulateur économique et
social de l’Etat. Elles comprennent : les transferts, versements sans contrepartie équivalente
comptabilisable et significative d’échange effectués soit directement par les services de l’Etat, soit
indirectement par l’intermédiaire d’organismes tiers, relevant le plus souvent du périmètre des opérateurs
des politiques de l’Etat dans leur rôle de redistributeur, au profit d’un ou plusieurs bénéficiaire(s)
3
La combinaison des deux axes débouche sur une meilleure lisibilité du budget de l’Etat.
On retrouve l’affectation des dépenses par destination mais aussi l’affectation par nature
des mêmes dépenses12.
2.1.2 Un budget orienté vers la performance
Les budgets établis en mode LOLF sont orientés vers la performance de l’action
publique13. Depuis janvier 2006, tout projet de loi de finances est accompagné d’un
« bleu ». Un « bleu » est établi par mission ; c’est un document comprenant plusieurs
données : pour chaque ministère, on y trouve la récapitulation des crédits par
programme, l’affectation des crédits par nature et par destination et un projet annuel de
performance (PAP). Ce dernier donne des précisions sur les programmes et décrit les
objectifs, les cibles de résultats et les indicateurs de performance liés à la réalisation des
programmes.
Chaque programme devra remplir un objectif précis qui servira à l’amélioration du
service public. Ils sont de trois ordres selon qu’on se place du point de vue du citoyen
(objectif d’efficacité socioéconomique), de l’usager (objectif de qualité des services
publics) ou du contribuable (objectif d’efficience de la gestion ou d’optimisation des
moyens mis en œuvre par les administrations).
Les cibles de résultat sont la valeur qu’on cherche à atteindre dans une séquence de
temps donnée. Cette valeur est mesurée par les indicateurs.
Les indicateurs permettent de mesurer la satisfaction de l’objectif14. Ceux-ci doivent
être pertinents, disponibles à intervalles réguliers, se prêter à des comparaisons,
compréhensibles, pérennes et fiables.
Chaque programme est confié à un gestionnaire. A ce titre, le gestionnaire se voit
attribuer une enveloppe globale de crédits, comportant un sous-plafond de dépenses de
personnel, qu’il doit répartir au sein de son programme. En contrepartie de cette liberté,
le gestionnaire veille à la cohérence de la répartition des crédits et à l’efficacité de leur
utilisation. Il peut, à travers cette autonomie, utiliser librement ses crédits : c’est la
fongibilité. Il peut décider de modifier la répartition des crédits entre les différentes
actions pour mieux atteindre les résultats fixés par le PAP. Il peut aussi modifier
l’affectation des crédits entre les différents titres des dépenses (dépenses de
fonctionnement, d’investissement, …). Cette fongibilité est toutefois asymétrique car le
gestionnaire ne peut toutefois pas augmenter ses crédits de personnel par des économies
dégagées sur d’autres postes. A la fin de la mise en œuvre d’une loi de finances sur une
appartenant à des catégories strictement identifiées (ménages, entreprises, collectivités territoriales et
autres collectivités) [...] les charges résultant de la mise en jeu de la garantie de l’Etat.
12
Tableau 1 exemple pour le programme de la police nationale :
Nature de la dépense
Numéro
et intitulé de l’action
01 Ordre public et protection
de la souveraineté
02 Sécurité et paix publique
Totaux
Dépenses
personnel
(titre 2)
de
Dépenses
de
fonctionnement
(titre 3)
13
Dépense
d’investissement
(titre 5)
Total
Christian de Boissieu, Jean-Hervé Lorenzi, Edward Arkwright et Julien Samson, Économie politique de
la LOLF, Conseil d'analyse économique, La documentation française, 2007.
14
Dominique Bureau et Michel Mongeot, Les indicateurs de performance de la LOLF : performance,
incitations et gestion publique, Conseil d'analyse économique, La Documentation française, 2007, 136
pages.
4
année, le gestionnaire de programme devra restituer un rapport annuel de la
performance (RAP). Celui-ci permettra de constater les écarts entre le PAP et ce qui a
été effectivement réalisé.
Pour faciliter la mise en œuvre des programmes, les programmes sont déclinés en
budgets opérationnels de programme (BOP) qui relèvent du niveau « actions ». Ces
BOP répartissent les crédits d’un programme entre les différents acteurs qui concourent
à mettre en place un même programme. Les responsables de BOP, peuvent, tout comme
les responsables de programmes, moduler leurs crédits entre les différents postes de
dépenses pour réaliser leurs actions.
2.1.3 Le tropisme administratif de la LOLF
A partir de 2005 un lien a été réalisé entre la recherche d’une meilleure gestion
des moyens, développée dans le cadre de la LOLF, et la modernisation de l’Etat. Les
structures ministérielles chargées de ce dernier chantier avaient été modifiées en
profondeur en 2003 avec la création d’une Direction générale de la modernisation de
l’Etat mais leur rattachement au Premier ministre avait été maintenu. Avec la formation
du gouvernement de Villepin en juin 2003 la Direction générale de la modernisation de
l’Etat est placée sous l’autorité du ministre chargé de la mise en œuvre de la LOLF, le
ministre délégué au budget et à la réforme de l’Etat (qui dépendait lui-même du ministre
de l’économie et des finances). En mai 2007 une nouvelle étape est franchie lors de la
création du gouvernement Fillon, le ministre chargée du budget est non seulement
chargé de la mise en œuvre de la LOLF et de la réforme de l’Etat mais il également
responsable de la fonction publique : la Direction générale de l’administration et de la
fonction publique qui jusqu’à présent relevait soit du Premier ministre soit d’un
ministère ad hoc (le ministère de la fonction publique), est mise à sa disposition. Le
placement des services chargés du fonctionnement de l’administration de l’Etat
(direction générale de la modernisation de l’Etat, direction générale de l’administration
et de la fonction publique) dans l’orbite des services du budget tend à instaurer une
gestion commune, inscrite dans la logique de performance de la LOLF, des moyens
humains et budgétaires de l’Etat.
2.2 Les stratégies ministérielles de réforme et les audits de modernisation de l’Etat
La LOLF, votée en 2001, ne devait entrer en application qu’en 2006, le temps
pour les administrations de se préparer à cette nouvelle logique. Entre ces deux dates,
des réformes de modernisation de l’Etat ont été lancées en fonction de logiques mises en
place par la LOLF : les stratégies ministérielles de réforme (SMR) et les audits de
modernisation de l’Etat (AME). Elles sont proches quant au fond. Ce rapprochement
s’explique par le fait qu’elles ont été portés par des gouvernements différents : J.-P.
Raffarin pour les SMR, D. de Villepin pour les AME. En 2006 ont également été lancés
des audits de modernisation des achats de l’Etat15.
15
Les audits de modernisation sur les achats de l'État ont été menés de juin à septembre 2006, dans
l'ensemble des ministères, pilotés par la direction générale de la Modernisation de l'État du ministère des
finances et des représentants des trois inspections générales interministérielles (inspections générales des
finances, des affaires sociales et de l'administration), avec l'assistance de cabinets de conseil. Elles avaient
trois objectifs : réduire les dépenses, professionnaliser la fonction achats et apporter davantage de
simplicité pour les acheteurs, les gestionnaires et les fournisseurs. Sur les 15 milliards d’euros que l’Etat
dépense chaque année pour ses achats, la mise en œuvre des recommandations des audits sur les achats
devrait générer 1,3 milliard d'euros d'économies en 3 ans.
5
2.2.1 Les stratégies ministérielles de réforme
Les stratégies ministérielles de réforme ont été lancées par une circulaire du Premier
ministre du 25 juin 2003. Sans exclure certains chantiers de réforme interministériels
qui ont été mis en œuvre à la même époque avec des succès variés (réforme budgétaire,
simplification des procédures, etc.), les stratégies étaient élaborées, à la suite d’un
« réexamen systématique des missions et des structures », par les ministres dans le cadre
de leur département. La circulaire précisait que « certaines de ces missions peuvent être
déléguées ou abandonnées. D'autres, au contraire, doivent être renforcées ou exercées
différemment ». Le texte insistait tout particulièrement sur trois points. Les stratégies
devaient tirer toutes les conséquences des réformes concomitantes de décentralisation et
de la mise en œuvre de la LOLF. Elles devaient ensuite s’attacher à développer des
démarches qualité du service rendu dans le but de rendre les administrations rendre
« exemplaires » de ce point de vue. Le troisième et dernier point portait sur les modes
de gestion des ressources humaines, qui devaient évoluer « pour mieux récompenser
[les] efforts [des agents], pour simplifier et améliorer le cadre de leur action et pour
mieux mobiliser leur énergie et leurs compétences »16.
Entre mi 2003 et mi 2007, 230 actions ont été mises en œuvre. Elles se répartissent de
manière à peu près égale entre des actions d'amélioration de la productivité (économies
en personnel ou en crédits) et des actions d'amélioration de la qualité de service. Au
total, le gouvernement en a attendu 1,5 milliard d'euros et de 10 000 emplois
d’économie.
2.2.2 Les audits de modernisation de l’Etat
A la suite d’une circulaire du 29 septembre 2005, complétée par une circulaire
du 13 juillet 2006, un programme d’audits systématiques des administrations de l’Etat a
été mis en place. Les audits de modernisation s’inscrivaient dans la logique de la LOLF.
Tous les deux mois, chaque ministère devait identifier au moins un service, une
procédure ou une fonction significative, pour procéder à son audit en vue d’améliorer la
qualité et l’efficacité du point de vue des usagers, des fonctionnaires ou des
contribuables. Ces audits devaient être liés à un projet de modernisation du ministère,
identifiant par programme budgétaire les objectifs stratégiques d’efficacité et de qualité
poursuivis. Plusieurs ministères pouvaient également se coordonner pour proposer
conjointement des audits portant sur une problématique interministérielle. Les
propositions d’audits sont intégrées dans un programme de travail annuel.
Les audits sont réalisés sous la co-maîtrise d’ouvrage du ministère concerné et
du ministère du Budget et de la Réforme de l’Etat. Ils sont menés par des équipes
associant corps de contrôle ministériels et corps de contrôle interministériels, ainsi
qu’éventuellement des consultants extérieurs à l’administration.
D’une durée de deux à trois mois, ces audits débouchent sur des conclusions
conçues dans un but opérationnel. Il appartient ensuite au ministère concerné, en lien
avec celui du budget et de la réforme de l’Etat, de décider des modalités de mise en
œuvre des recommandations et d’en assurer le suivi.
Près de 170 audits ont été lancés, en sept vagues successives entre octobre 2005
et avril 2007 portant sur près de 150 milliards d’euros de dépenses de l’Etat17.
16
Quatre axes d'évolution étaient fixés : la déconcentration, la réduction du nombre de corps, la
reconnaissance du mérite, la gestion prévisionnelle des postes, des emplois et des carrières.
17
Les résultats des audits figurent sur
http://www.audits.performance-publique.gouv.fr/performance/audit_ci.php?g=0
6
3 La RGPP
La formation d’un nouveau gouvernement suite à l’élection de N. Sarkozy à la
Présidence de la République a eu pour conséquence de donner une tournure radicale aux
projets de réformes de l’Etat engagés les années précédentes. Le cadre de la LOLF est
conservé, celui des stratégies ministérielles de réforme et des audits de modernisation de
l’Etat également. Précisément, l’idée d’audit est reprise mais elle est étendue à toutes les
actions de l’Etat. Sa mise en œuvre des audits ne relève plus des ministres concernés
(avec le ministère chargé du budget) mais désormais, pour les décisions stratégiques,
directement du Premier ministre et du Président de la République.
On présentera tout d’abord les grandes lignes de la RGPP (3.1) puis l’organisation du
travail d’analyse (3.2) et ensuite de l’élaboration des scénarios d’évolution (3.3).
3.1 Les grandes lignes de la RGPP
La RGPP est une démarche d’analyse des politiques publiques qui doit, pour
chaque
politique,
proposer
des
scénarios
d’évolution
aux
instances
décisionnelles (3.1.1). Elle porte sur un périmètre déterminé (3.1.2) et doit suivre un
calendrier précis (3.1.3).
3.1.1 Une démarche d’analyse des politiques publiques
La RGPP vise à examiner chacune des politiques publiques menées par l’Etat en
fonction de quatre points de vue : le point de vue du citoyen, dont la satisfaction des
besoins doit être au cœur de la hiérarchisation et de la transformation à conduire des
politiques publiques ; le point de vue du contribuable, auquel il faut garantir, au moindre
coût, un bon fonctionnement des administrations et une bonne conduite des politiques
publiques ; le point de vue de l’usager, auquel il faut apporter un service amélioré, des
procédures et des structures administratives simplifiées ; le point de vue de l’agent
public, auquel il faut donner un sens réaffirmé de sa mission et de ses objectifs, des
marges de manœuvre renforcées, et des conditions de travail améliorées.
Pour conduire l’analyse des politiques publiques à travers ces quatre points de vue, une
grille d’analyse des dépenses a été élaborée. Composée de sept questions, cette grille
part des objectifs et des bénéficiaires des politiques publiques pour s’étendre aux
questions d’optimisation des structures et des dispositifs. Dans ses grandes lignes, le
questionnement figure dans le tableau ci-dessous (le questionnement détaillé est
reproduit en annexe) :
1 Que faisons-nous ?
Quels sont les objectifs de la politique publique ?
Quels services assure-t-elle ? Que garantit-elle ?
A quoi contribue-telle ? A quoi remédie-t-elle ?
Qui sont les bénéficiaires visées et leurs caractéristiques ?
2 Quels sont les besoins et les attentes des collectivités ?
Cette politique est-elle toujours d’intérêt public ?
Les services répondent-ils aux besoins ? Quelles sont les nouvelles attentes ? Quelle
7
nouvelle offre de services proposer ?
Comment les bénéficiaires on-ils évolué ? Qui sont les bénéficiaires effectifs ?
Cette politique présent-elle des effets pervers ou des effets d’aubaine ?
3 Faut-il continuer à faire de la sorte ?
Faut-il maintenir cette politique ?
Faut-il revoir les objectifs ?
Quels services doit-elle rendre ?
Comment adapter les outils de la politique publique ?
Faut-il faire évoluer le champ des bénéficiaires ?
4 Qui doit le faire ?
La politique peut-elle être assurées plus efficacement par d’autres acteurs ou sous
d’autres formes ?
Est-ce à l’Etat de conduire cette politique ?
A quel niveau ?
Avec quelles coopérations et articulations avec d’autres acteurs publics ou privés ?
5 Comment faire mieux et moins cher ?
Quelles évolutions permettent d’optimiser les moyens de cette politique tout en
assurant le respect de ses objectifs et l’amélioration du cadre de travail des agents ?
Comment simplifier les structures et les procédures ?
6 Qui doit payer ?
Le financement de cette politique par l’Etat est-il justifié ?
Qui doit payer ?
Quels sont les cofinancements envisageables ?
7 Quel scénario de transformation ?
Quels scénarios d’évolution pour obtenir une politique publique plus efficace et moins
coûteuse ?
Comment garantir une mise en œuvre efficace ?
La grille d’analyse, et plus généralement la démarche d’analyse, est confiée à des
équipes d’audit. Les équipes d’audit ont trois objectifs.
Premièrement, quant à la méthode de travail, elles doivent assurer tout au long des
travaux un partenariat avec les ministères concernés (en particulier, les secrétaires
généraux, ainsi que les responsables des programmes au sens de la LOLF) de manière à
ne pas apparaître comme travaillant d’en haut, coupées des réalités administratives18.
Deuxièmement, quant aux finalités, les équipes d’audit ont pour but de présenter des
scénarios destinés à la fois à améliorer la qualité des politiques publiques et à
économiser les moyens publics. Pour respecter la première finalité, les équipes devront
fixer, si cela est nécessaire, de grands objectifs de performance et de qualité du service.
Elles devront aussi apporter des propositions de réponse à des dysfonctionnements
identifiés, qu’ils concernent la satisfaction des usagers ou les conditions d’exercice de
leurs missions par les agents. La seconde finalité impliquera de décrire avec précision
des voies et moyens d’augmenter significativement la productivité. Les sources
d’économie en matière de dépenses de fonctionnement autres que les rémunérations
doivent également être identifiées. De manière générale, la RGPP est avant tout un
18
Cette association des responsables des ministères concerne également les organisations représentatives
du personnel. Il est prévu que l’ensemble des agents doit pouvoir bénéficier d’une information sur le
processus, puis sur la mise en œuvre des décisions qui en seront issues.
8
travail d’instruction qui doit donner aux pouvoirs publics les moyens techniques de
choisir, dans chaque domaine, une stratégie d’évolution en fonction des scénarios que
les équipes auront préparés. Il ne leur est donc pas demandé de choisir une option, mais
d’en proposer plusieurs.
Troisièmement, quant au suivi, les équipes doivent porter une attention particulière à
l’étude et à la définition des conditions de mise en œuvre et d’acceptation des
recommandations, sans oublier les conditions d’accompagnement du changement pour
les agents publics. Il ne s’agit donc pas de s’en tenir à des recommandations de portée
générale, mais de proposer des décisions susceptibles d’êtres mises en œuvre
effectivement.
Les équipes d’audit présenteront à deux reprises leurs analyses à un Comité de suivi,
placé sous l’autorité conjointe du secrétaire général de la Présidence de la République et
du directeur de cabinet du Premier ministre.
Il reviendra ensuite au Conseil de la modernisation des politiques publiques, présidé par
le Président de la République, de prendre les décisions et d’arbitrer entre les différents
scénarios d’évolution retenus, pour atteindre les objectifs de la RGPP.
3.1.2 Le périmètre de la RGPP
Le périmètre de la RGPP est composé de trois grands champs. Premièrement,
quatorze domaines d’action de l’Etat, qu’on peut qualifier de « classiques » feront
l’objet d’un audit ; deuxièmement, six grandes politiques d’intervention associant l’Etat
et d’autres acteurs seront également analysées ; troisièmement, quatre chantiers
interministériels feront en outre l’objet d’une réflexion à part.
Les quatorze domaines sont : justice, agriculture et pêche, écologie, développement et
aménagement durable, aide publique au développement, action extérieure de l’Etat,
culture, communication et services du Premier ministre, enseignement supérieur et
recherche, enseignement scolaire, défense – anciens combattants, mémoire et liens avec
la nation, santé, solidarité, sport, sécurité, immigration, intérieur, outre-mer, réseaux
financiers. Afin de promouvoir une approche cohérente sur certaines politiques
publiques, dont la conduite est partagée entre plusieurs ministères, le périmètre des
équipes d’audit pourra porter sur les politiques publiques de plusieurs ministères. De
manière générale, chaque audit doit porter sur deux éléments, d’une part « l’appareil de
production » expression plus brillante mais dans le fond recouvrant les mêmes réalités
que celle « d’administration générale » ou de « fonctionnement » et d’autre part les
« dépenses d’intervention ». En ce qui concerne l’appareil productif, l’objectif est de
dresser différents scénarios assurant, grâce à des réorganisations et à des changements
de fonctionnement, un accroissement de la productivité et, permettant par là-même, le
non-remplacement partiel des départs à la retraite. Ces scénarios doivent décrire, dans le
détail, l’organisation et le fonctionnement des services. Un scénario au moins devra
permettre de ne remplacer qu’un départ à la retraite sur deux (ou davantage pour les
ministères allant d’ores et déjà au-delà de ce taux). Partout, une réduction des dépenses
de fonctionnement, ainsi que des dépenses d’investissement (lorsque l’usage de ces
investissements est, à titre principal, de nature administrative : informatique, immobilier
et infrastructures à usage administratif …), sera également proposé.
En ce qui concerne les dépenses d’intervention, les travaux d’audit doivent également,
en s’appuyant sur la grille d’analyse, dresser des scénarios d’évolution. L’objectif est de
dépenser mieux, c’est-à-dire que l’argent public dévolu aux politiques publiques
9
atteigne réellement les objectifs fixés, dans des conditions optimales de qualité et de
résultat19.
La RGPP visera également à établir des pistes d’évolution pour six grandes
politiques d’intervention, qui ne relèvent pas uniquement de l’Etat mais associent
d’autres collectivités publiques, en particulier territoriales. Il s’agit de l’emploi et de la
formation professionnelle, du développement des entreprises, de la ville et du logement,
de la famille, de l’assurance maladie, des politiques de solidarité et de lutte contre la
pauvreté. Dans ces domaines, un premier débat devant le comité de suivi doit permettre
d’identifier les sujets sur lesquels des besoins d’analyse complémentaires sont
nécessaires, donnant lieu dès lors également à des travaux d’audit.
Parallèlement aux travaux des équipes d’audit et aux analyses relatives aux
grandes politiques d’intervention, la RGPP s’étend à quatre chantiers interministériels
portant sur la gestion des ressources humaines, l’organisation de l’administration
territoriale, les relations entre l’Etat et les collectivités locales, la simplification des
procédures internes. Les travaux à mener sur ces chantiers visent à concevoir des
réponses novatrices d’accompagnement de la réforme des administrations. Ils ne
relèveront pas de la responsabilité d’équipes d’audit et seront confiés à des pilotes
autonomes. Les conclusions auxquelles ces chantiers aboutiront, une fois validées,
devront être prises en compte dans l’élaboration des scénarios stratégiques.
3.1.3 Calendrier de réalisation
L’exercice de RGPP servira de base à la programmation budgétaire pluriannuelle
pour les exercices 2009 à 2001. Le respect de cet objectif implique que le Comité de
suivi ait terminé l’examen des scénarios d’évolution afin que le Conseil de
modernisation des politiques publiques puisse valider les options jugées pertinentes en
mai 2008, soit notons-le, deux mois après les élections municipales qui doivent se tenir
en mars 2008.
Dans ce contexte, les équipes d’audit ont commencé leurs travaux au début du mois de
juillet 2007. En ce qui concerne les analyses portant sur les dépenses d’intervention dont
l’Etat assume l’entière responsabilité, les chefs d’équipe coordonneront dans un premier
temps un dialogue entre les ministères et le ministère du budget, des comptes publics et
de la fonction publique (direction du budget), afin d’identifier les thèmes nécessitant un
besoin d’analyse complémentaire. L’objectif est de hiérarchiser les pistes de
rationalisation selon leurs enjeux financiers et leurs risques. Les équipes d’audit
approfondiront ensuite cette démarche sur la base des sujets identifiés en commun lors
de ce dialogue et de son appréciation propre.
Les équipes effectueront un premier passage devant le Comité de suivi entre la fin du
mois de septembre et le mois de décembre 2007, destiné à étudier les scénarios
intermédiaires de chacune et à recenser les points devant être complétés. Elles
effectueront un second passage entre le mois de janvier et mi-mai 2008, qui permettra
de nourrir la décision du Conseil de la modernisation des politiques publiques sur les
scénarios définitifs présentés.
19
Dans chaque domaine, les équipes d’audit travailleront non seulement sur les dépenses budgétaires,
mais également sur les dépenses fiscales (crédit d’impôt, mécanismes d’exonération de cotisations …),
sur les dépenses à la charge d’opérateurs et sur les recettes fiscales affectées. Par ailleurs, les
investissements structurants sont assimilés aux politiques publiques d’intervention.
10
3.2
Organisation du travail d’analyse
Les équipes d’audit sont constituées d’un chef d’équipe, garant de la qualité des
analyses et des scénarios présentés au comité de suivi, de membres des corps
d’inspection interministériels et ministériels, d’auditeurs ou de consultants externes. Les
promoteurs de la RGPP insistent sur le fait que la bonne association des membres des
corps d’inspection et des consultants externes est un enjeu essentiel pour assurer le
succès de la démarche.
L’association des équipes d’audit avec certains fonctionnaires clés des ministères est
également indispensable. Celle-ci implique le secrétaire général du ministère ainsi que
les responsables de programme LOLF. Chaque ministère désigne en outre un référent,
pour organiser les modalités pratiques des contacts entre l’équipe d’audit et les services
du ministre. L’équipe d’audit peut également auditionner tous les spécialistes, au sein de
l’administration ou extérieurs à l’administration, susceptibles lui apporter un éclairage
utile.
Le dispositif de la RGPP comprend également une équipe dite d’appui, organisée au
sein du ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, chargée de
s’assurer de la bonne conduite des audits et d’apporter le soutien nécessaire aux équipes.
Elle est placée sous la responsabilité du cabinet du ministre du budget20. Elle a pour
tâche de faciliter la diffusion de l’information, la coordination et les échanges entre
équipes d’audits, notamment sur des problématiques communes à plusieurs ministères,
ainsi que sur la prise en compte des orientations des travaux des groupes de travail
interministériels. Elle assiste les équipes d’audits sur les questions d’ordre
méthodologique et assure une dernière consolidation des travaux, destinée à faciliter la
formulation des scénarios d’évolution21.
Une fois rédigés, ces scénarios font l’objet d’une première analyse par une sorte de filtre
ou de pré instruction confiée au secrétariat du Comité de suivi22. Cet organe a pour rôle
de préparer les travaux des comités de suivi, de mettre en forme le dossier, d’organiser
matériellement des réunions et de réaliser les comptes-rendus de décisions à destination
de l’ensemble des parties prenantes, de dégager les lignes de force politiques derrière les
analyses techniques et de s’assurer que la présentation devant le Comité de suivi aura le
plus grand effet utile. Chaque séance réunit un chef d’équipe, ainsi que les cabinet(s)
des ministère(s) concerné(s).
L’étape suivante est la présentation par les équipes d’audit de leurs analyses devant le
Comité de suivi, placé sous l’autorité conjointe du secrétaire général de la Présidence de
20
Elle associe la direction du budget, la direction générale de la modernisation de l’Etat (qui assurera le
secrétariat de cette équipe), la direction générale de l’administration et de la fonction publique, un
membre de l’équipe de consultants (en charge de la coordination de leurs contributions) et les
représentants des autres membres du secrétariat du comité de suivi, s’ils le souhaitent.
21
Ce dernier examen par la groupe d’appui concernera notamment la consolidation et la cohérence des
propositions d’économies, l’apport d’expertise au chiffrage des propositions (chiffrage budgétaire des
propositions d’économie en, ETP, chiffrage des économies budgétaires) la cohérence et la caractère
réaliste des propositions des scénarios stratégiques et de la date d’effet des propositions, la cohérence
avec les propositions d’autres équipes d’audit et la pertinence des points devant être débattus devant le
secrétariat, puis le comité de suivi.
22
Assuré conjointement par les cabinets du Président de la République, du Premier ministre, du ministre
du budget, des comptes publics et de la fonction publique et du secrétaire d’Etat chargé de la prospective
et de l’évaluation des politiques publiques.
11
la République et du directeur de cabinet du Premier ministre23. Ce Comité de suivi est
chargé d’orienter les travaux et de préparer les éléments portés à la décision du Conseil
de la modernisation des politiques publiques. Plus précisément il recueille les
recommandations et analyses de l’équipe d’audit, ainsi que les observations et la
position du (ou des) ministre(s) concerné(s) ; oriente les travaux de l’équipe d’audit en
vue du deuxième passage, notamment en s’assurant que les scénarios proposés sont
suffisamment argumentés et documentés. Après un deuxième passage devant lui des
équipes d’audit, il donne un avis sur le ou les scénarios, afin de préparer les décisions du
Conseil de la modernisation des politiques publiques.
3.3
L’élaboration des scénarios d’évolution par les équipes d’audit
La démarche type des équipes d’audit comprend sept étapes principales.
Appareil de production
Politique d’intervention
Timing
1 Lancement – préparation – prise connaissance du contexte –
détermination des modes de travail avec le ministre
2 Segmentation du cadre d’analyse et hiérarchisation des
enjeux d’évolution
3
Questionnement
des 3bis questionnement des
politiques
selon
sept politiques
selon
sept
questions clés
questions clés
4
Documentation
des 4bis
documentation
des
scénarios d’amélioration de la scénarios
d’économie
productivité et de réduction du partagés avec le ministère
coût
de
l’appareil
de
production
5 Approfondissement du (ou 5bis approfondissement par le
des) scénario(s) préconisé(s)
pool d’audit du (ou des)
scénarios(s) préconisé(s)
6 Consolidation des scénarios préconisés, analyse d’impact
sur la performance et conditions de mise en œuvre
7 Construction de la trajectoire de transformation et d’un plan
d’action
Du 1er juillet à fin septembre
2007
De fin septembre à fin
novembre 2007
Figure 2 synthèse de la demande d’analyse
Les équipes d’audit doivent préparer deux séries de scénarios : des
scénarios intermédiaires puis des scénarios définitifs.
Dans un premier temps, l’équipe d’audit prépare des scénarios intermédiaires (au
maximum trois). Pour chaque scénario, la position du ministère est restituée en
faisant apparaître les points nécessitant approfondissement, ainsi que le cas
échéant, un scénario de consensus. Chaque scénario précise les réformes à
conduire en termes de missions remplies, d’évolution des dispositifs
d’intervention et d’organisation, pour assurer un service public de qualité avec
23
Participent à ce Comité, le ministre du budget des comptes publics et de la fonction publique, le
secrétaire d’Etat à la prospective et à l’évaluation des politiques publiques, les rapporteurs du budget dans
les deux assemblées, des personnalités qualifiées et, selon le thème d’étude, le ou les ministres concernés.
12
une économie de moyens. Chacune de ces réformes fera l’objet d’une
quantification de l’économie de moyens qu’elle peut permettre à terme.
Pour le volet « appareil productif », les mesures proposées doivent permettre
au(x) ministères(s) concernés de rendre un service aussi bon ou meilleur avec
moins d’agents. L’un des trois scénarios devra permettre de documenter
l’objectif de non remplacement d’un départ à la retraite sur deux. Par ailleurs, il
présentera des pistes de rationalisation, pour réduire le coût de l’appareil
productif, en tenant compte notamment de l’impact du nouveau format d’effectifs
sur les dépenses de fonctionnement, ainsi que d’autres pistes de rationalisation.
Enfin, il étudiera les enjeux de qualité du service, d’économies de moyens,
d’accessibilité ou de risque.
Pour le volet « politique d’intervention », les travaux d’audit seront menés après
une phase de dialogue, coordonnée par le chef d’équipe entre les ministères et le
ministère du budget (direction du budget) afin d’identifier les thèmes nécessitant
un besoin d’analyse complémentaire. Les scénarios viseront plus précisément à
clarifier les objectifs visés et les bénéficiaires ciblés par les dispositifs
d’intervention ; à identifier les leviers et les pistes de rationalisation, à la fois en
termes de potentiel d’économies budgétaires, d’impact socioéconomique,
d’appréciation de la faisabilité et d’acceptabilité.
A la suite de l’examen par le Comité de suivi des scénarios intermédiaires et de
ses orientations, cette nouvelle étape aura pour objet d’approfondir le ou les
scénarios préconisés, tant sur « l’appareil productif » que sur les « politiques
d’intervention ». Elle sera destinée à apprécier la plus ou moins grande facilité de
mise en œuvre du (ou des) scénario(s) préconisé(s), à évaluer leur impact sur
l’ensemble des projets en cours ou en voie d’être lancés, et à s’assurer que la
consolidation des scénarios est à la hauteur de l’ambition données à l’exercice.
Cette étape conduite en relation étroite avec les principaux responsables des
ministères chargés de la mis en œuvre (secrétaire général, responsable de
programmes LOLF). L’équipe d’audit rapprochera le (ou les) scénario(s)
préconisés pour l’appareil productif et les politiques d’intervention, en s’assurant
de leur cohérence au regard des objectifs d’économies et d’amélioration de la
qualité du service.
Dans le cadre de cette seconde étape, l’équipe d’audit formalisera, en liaison avec
le(s) ministères(s) concerné(s), des scénarios stratégiques définitifs, étudiés par le
Comité de suivi lors d’une seconde audition. Chaque scénario sera décliné en
deux volets principaux, couvrant la période 2009-2011 : un volet A sur la
stratégie de politique publique et un volet B sur la stratégie d’optimisation du
coût de transformation.
Le volet A présentera les engagements de résultats visés (appareil productif et
politiques d’intervention) pendant la période 2009-2011, sous forme de grands
indicateurs de résultats, d’efficacité socio-économique ou de qualité de service.
Le nombre d’objectifs et d’indicateurs par scénario devra être limité et refléter la
finalité de chaque politique. Ces indicateurs reprendront, dans la mesure du
possible, les indicateurs de performance existant des documents budgétaires issus
13
de la LOLF (projets annuels de performance et rapports annuels de performance).
Le volet A présentera également la manière dont le ministre met en œuvre ses
moyens, adaptera son organisation et ses modes de fonctionnement, pour
atteindre ces objectifs.
Le volet B sur la stratégie d’optimisation du coût de transformation
présentera notamment : l’évolution des effectifs du ministère, en expliquant les
leviers mis en œuvre pour réaliser la réduction ; l’évolution du coût de l’appareil
productif du ministère, en expliquant les leviers de rationalisation et
d’optimisation à mettre en œuvre, en cohérence avec les priorité et objectifs ;
l’évolution du coût des politiques d’intervention, en expliquant les leviers de
rationalisation et d’optimisation à mettre en œuvre, en cohérence avec les
priorités et objectifs.
Pour chacun des deux volets, les équipes doivent veiller à prévoir les
impacts que leurs propositions peuvent avoir dans différents domaines.
Pour les recommandations relatives à la transformation de l’appareil
productif de l’Etat, l’équipe d’audit prolongera et approfondira les scénarios
intermédiaires par une évaluation des principaux impacts sur : la performance du
service rendu au citoyen, l’acceptabilité sociale des préconisations, en faisant
toute recommandation relative aux modalités d’accompagnement de la mise en
œuvre, l’économie de moyens, les conditions d’une bonne mise en œuvre des
scénarios en termes de projets à conduire, de conduite du changement, de
calendrier de mise en œuvre, de gouvernance et de pilotage du projet de
transformation ministériel. Lors de cette étape, l’équipe d’audit prendra en
compte les impacts sur l’appareil productif des mesures envisagées par le Comité
de suivi en matière de politiques d’intervention. S’agissant de la mise en œuvre
des réductions d’effectifs de chacune scénario, elle pourra, lorsque cela paraîtra
nécessaire au regard de la gestion des plafonds d’emplois autorisés dans les
années précédentes, prescrire pour les trois années du plan une évaluation portant
respectivement sur les titulaires et sur les autres catégories de personnel.
Pour les recommandations relatives aux politiques d’intervention, l’équipe
d’audit évaluera leurs principaux impacts, notamment en termes : économiques et
sociaux pour les bénéficiaires concernés ; d’impact et de régulation économique
sur les secteurs d’activité impactés ; de risques sociaux et d’acceptabilité ;
d’économie de moyens, de modification réglementaire à prévoir pour mettre en
œuvre les recommandations ; d’organisation et de moyens pour les structures et
opérateurs gérant et mettant en œuvre ces politiques d’intervention ; de
conditions d’une bonne mis en œuvre des scénarios en termes de projets à
conduire, de conduite du changement, de calendrier de mise en œuvre, de
gouvernance et de pilotage du projet de transformation ministériel.
Pour toutes ces recommandations, l’équipe d’audit présentera les modalités
d’accompagnement à mettre en œuvre, ainsi que le calendrier. Ces modalités
détailleront notamment : les actions de nature réglementaire (calendrier et projets
de textes) ; les projets de réorganisation ; les mesures de gestion des ressources
humaines, sur la base des travaux du chantier interministériel relatif à la gestion
14
des ressources humaines ; les éventuels projets technologiques ; le délai
nécessaire à la mise en œuvre effective de chacune des actions proposées dans le
cadre du scénario stratégique ; les éventuels projets transversaux intéressant
plusieurs ministères.
4 Conclusions critiques
On ne peut qu’être frappé à la fois par le caractère extrêmement ambitieux de ce
projet de réforme. Premièrement, il apparaît comme un projet « total » car il a pour but
de passer l’ensemble ou presque de l’action de l’Etat en revue et ce dans des délais
assez brefs, moins d’un an, ce qui en fait un projet de réforme fast track.
Deuxièmement, très peu de temps après l’élection présidentielle et la formation du
gouvernement Fillon, le dispositif a été élaboré puis lancé avec une vitesse peu
coutumière. Les communiqués du gouvernement s’attachent d’ailleurs à présenter la
RGPP comme une rupture plutôt qu’une réforme.
Tout cela semble marquer une volonté de trancher avec les projets de réforme de l’Etat
et/ou de l’administration, en particulier ceux mis en place avant la LOLF, qui partaient
d’un diagnostic précis et juste, proposaient des réponses souvent excellentes mais
étaient rarement accompagnées d’un dispositif de suivi et encore moins d’une
évaluation : pour quelques réalisations heureuses, combien d’enlisements …
Cependant la RGPP soulève de nombreuses questions.
On passera sur les questions de forme : le projet n’a pas de réelle enveloppe juridique
(type circulaire). Il ne repose que sur des déclarations, des discours et des notes. Cela
n’est pas le plus préoccupant. D’ailleurs, on peut supposer que des textes vont suivre, en
particulier en ce qui concerne la création et les compétences du Conseil de
modernisation des politiques publiques. D’une autre ampleur sont en revanche les
questions relatives à la cohérence de la RGPP avec les dispositifs existants (4.1), au
périmètre de ce projet de réforme (4.2), à l’analyse en terme de politique publique (4.3),
à la constitution des équipes d’audit (4.4), aux organes compétents pour procéder aux
choix stratégiques (4.5) et aux dispositifs de suivi de la réforme après les décisions du
Conseil de modernisation (4.6).
4.1 Cohérence
La question de la cohérence de la RGPP se pose dans de nombreux domaines ; c’est visà-vis de la LOLF qu’elle est la plus criante. La RGPP a fait le choix non pas de se
glisser dans les dispositifs LOLF existants, dont d’une certaine manière elle s’inspire
pourtant très clairement, mais d’introduire un niveau de réforme supplémentaire avec
ses structures et ses procédures propres. La réforme LOLF présentait pourtant de
nombreux avantages : elle a fait l’objet d’un consensus politique, ses principes
commencent à imprégner l’action de l’administration et ses dispositifs, longs et
complexes à mettre en œuvre ; commencent à devenir opérationnels24. Il est dommage
24
Pour la première fois, les rapports annuels de performances (RAP) 2006 établis pour chaque
programme figurent parmi les annexes du projet de loi de règlement ainsi que le prévoit la LOLF. Ce
nouvel exercice vient clore le premier cycle budgétaire en mode LOLF, de la prévision à la réalisation des
résultats.
15
de la court-circuiter. Certes, la RGPP prévoit que les responsables de programmes
LOLF soient largement associés aux équipes d’audit. Mais les questions de coordination
restent préoccupantes. Premièrement, la LOLF identifiait 34 « missions » alors que la
RGPP ne compte plus que 14 (plus 6) « domaines » : ceux-ci n’étant pas forcement des
subsomptions de celles-là. Deuxièmement, les indicateurs de résultat pour les volets A
(stratégies de politique publique) des scénarios d’évolution peuvent être différents de
ceux de la LOLF (et donc source de confusion, mais aussi peut-être d’amélioration car
certains indicateurs LOLF sont très discutables). Troisièmement, l’attitude de by pass de
la RGPP vis-à-vis de la LOLF peut générer du découragement parmi ceux qui l’ont
promu ou qui la mettent en œuvre. Il aurait été plus judicieux de la renforcer, au besoin
même en la corrigeant. Cela aurait demandé plus de temps, ce que les promoteurs de la
RGPP ne semblaient pas vouloir concéder.
4.2 Périmètre
Il faut reconnaître et se féliciter de la place accordée à l’analyse de l’action
interministérielle au sein de l’analyse des quatorze domaines d’une part et par la
reconnaissance de quatre domaines « purement » interministériels d’autre part. On fera
toutefois deux critiques (d’ailleurs assez liées) en ce qui concerne le périmètre de la
RGPP. La première est relative à la distinction entre les politiques menées par l’Etat qui
feront l’objet des quatorze audits et les politiques dans lesquelles l’Etat intervient avec
d’autres acteurs et qui feront l’objet de six audits distincts. On peut se demander à cet
égard s’il existe encore des politiques dans lesquelles l’Etat est vraiment le seul acteur à
intervenir. Par ailleurs, il n’est pas précisé comment les six politiques associant l’Etat et
les collectivités territoriales ont été choisies (en concertation avec les collectivités
territoriales ?). Rien ne semble indiquer des représentants des collectivités soient
associés aux travaux. De manière générale, même s’il faut reconnaître qu’un certain
degré de synthèse est nécessaire à ce genre d’exercice, le découpage reflète une vision
trop simplifiée de l’action de l’Etat en particulier et de l’action publique en général.
La seconde critique a trait à l’absence totale de prise en considération des politiques
désormais décidées au niveau européen et vis-à-vis desquelles la France ne dispose, à
des degrés divers, que de compétences de mise en œuvre (cf. les douanes, l’agriculture
et la pêche, l’écologie mais également l’immigration, …). Il doit être clair que dans ces
cas, la latitude des équipes d’audit et des instances de décision est très étroite : les choix
politiques sont impossibles, les choix techniques sont possibles seulement si
compatibles avec les engagements de la France. Par ailleurs, on ne sait pas non plus
comment seront pris en compte les versements financiers européens substantiels dont la
France bénéfice en matière de politique agricole ou régionale par exemple. C’est un
défaut technique qu’on pouvait également adresser à la LOLF.
Les rapports annuels de performances (RAP) rendent compte, pour chaque programme, de l'exécution des
engagements pris dans les projets annuels de performances (PAP) accompagnant la loi de finances pour
2006, tant en termes d'exécution des crédits que de compte rendu en matière de performance, d'activité
des opérateurs de l'Etat et d'analyse des coûts et des charges. Ils expriment notamment les performances
réellement obtenues comparées aux objectifs figurant dans les projets annuels de performances annexés
au projet de lois de finances du même exercice.
Le principe du « chaînage vertueux » inscrit à l'art. 41 de la LOLF lie la discussion de la loi de règlement
et du projet de loi de finances afin de permettre aux parlementaires et aux acteurs du pilotage des finances
de l'Etat, et plus particulièrement les responsables de programmes, de tirer les conséquences des résultats
observés pour l'année à venir en créant ainsi un véritable « cycle de la performance ».
16
4.3 Analyse en terme de politique publique
La RGPP marque le passage d’audits qui, selon la circulaire de 2005 relative aux audits
de modernisation de l’Etat, portaient sur des « procédures, services ou fonctions » à
l’intérieur d’un ministère, à des audits portant sur l’ensemble d’une politique publique.
Cela représente un véritable saut qualitatif. Cependant, ils sont officiellement présentés
comme des analyses de politiques publiques. Or, l’expression même d’analyse des
politiques publiques n’a fait l’objet d’aucune précision (seulement une énumération).
Sans vouloir faire preuve d’un esprit trop critique il paraît légitime de se demander si
c’est bien une réelle analyse des politiques publiques qui sera mise en œuvre ou s’il ne
s’agira que de « maxi audits ». L’analyse des politiques publiques est en effet une
discipline en soi dont l’enseignement ne se répand qu’assez lentement en France. Elle
fait référence à des instruments d’analyse propres, élaborés entre autres par la science
politique. Les spécialistes qui y sont vraiment rompus sont-ils assez nombreux pour
assurer une présence significative au sein des équipes d’audit ? Est-ce d’ailleurs la
volonté des promoteurs de la RGPP ? Par ailleurs, le dispositif de la RGPP prévoit que
les équipes d’audit peuvent faire appel à des spécialistes extérieurs à l’administration. Si
la RGPP entend réellement s’engager sur la voie de l’analyse des politiques publiques
avec tout ce que cela suppose, il s’agit d’une occasion rare de faire appel aux chercheurs
qui travaillent sur ces sujets.
4.4 Constitution des équipes d’audit
Il n’est pas donné de précision sur les critères de sélection des chefs d’équipe
d’audit, ni sur les instances qui procèdent à cette sélection. Une plus grande lisibilité
dans ce domaine aurait été bienvenue vue l’importance que le dispositif de la RGPP
confie aux chefs d’équipe.
4.5 Les organes compétents pour préparer et valider les choix stratégiques
On pourrait soutenir que, d’un certain point de vue, la RGPP est prévue pour
fonctionner à la marge des administrations qu’elle a pour but de réformer. Le premier
indice dans le sens d’un tel contournement est la place qui est faite aux cabinets d’audit
privés au sein des équipes d’audit. Deuxièmement, le rôle confié aux cabinets
ministériels, dont les membres sont certes issus de l’administration mais qui mettent en
œuvre d’autres logiques au moins partiellement différentes que les logiques
administratives, est important en particulier au niveau de l’équipe d’appui et du
secrétariat du Comité de suivi. Troisièmement, s’il est vrai que les ministères sont
étroitement associés au travail des équipes d’audit ainsi qu’à l’évaluation des scénarios,
il n’en est pas moins vrai que les équipes, sans chercher à se démarquer
systématiquement de ce que proposent les ministères, n’ont pas pour objectif de trouver
un accord avec eux sur les scénarios d’évaluation. Le point de vue ministériel est
demandé et pris en compte mais il peut ne pas être retenu. Quatrièmement, le Comité de
suivi compte des ministres et les rapporteurs du budget des deux chambres, mais il est
toutefois possible d’y adjoindre des personnes qualifiées dans une proposition non
précisée et surtout il est placé sous l’autorité conjointe du secrétaire général de la
Présidence de la République (organe jusqu’à présent discret et peu impliqué dans les
processus et les tâches concernant l’administration active) et du directeur de cabinet du
Premier ministre : cela place des ministres dans une position subordonnée par rapport à
des membres de cabinets même s’il s’agit des responsables des cabinets des sommets de
l’exécutif : celui du Président de la République et celui du Premier ministre. De toute
17
façon, ce Comité ne dispose pas du pouvoir de décision qui relève du Conseil de
modernisation des politiques publiques présidé par le Président de la République mais
dont la composition n’est pas détaillée pour l’instant. On notera là encore qu’il est rare
et donc significatif de voir le Président de la République directement impliqué dans ce
qui semble à première vue une question « d’intendance ». Cela s’explique d’une part par
le centralisme présidentiel qu’on observe depuis l’élection du nouveau Président de la
République et d’autre part par le fait que, pour ses promoteurs, la RGPP est bien autre
chose qu’une question d’intendance administrative.
Dernière observation, l’ampleur des réformes souhaitées fait qu’à un moment ou à un
autre celle-ci dépassera le domaine de l’exécutif pour toucher à des politiques ou à des
modalités d’exécution des politiques qui relèvent du législatif. D’ailleurs, vu le
caractère radical qui a été imprimé à la réforme RGPP, il serait étonnant qu’elle s’arrête
aux bornes de l’exécutif et du pouvoir réglementaire. Or, le Parlement n’est guère
impliqué dans le processus décisionnel de la RGPP. Cela nous amène, au passage, à un
nouveau problème de cohérence de la RGPP avec la LOLF. La LOLF repose sur une
valorisation du rôle du Parlement dans le cycle budgétaire mais également dans le
contrôle de l’utilisation de l’argent public et en conséquence dans le contrôle de
l’administration. Ce rôle pourrait d’ailleurs être accru si certaines propositions du
« comité Balladur » sont reprises dans la Constitution et mises en œuvre25. La RGPP
semble radicalement redimensionner ce rôle pour faire du contrôle de l’administration
une affaire de l’exécutif
4.5 Les dispositifs de suivi de la réforme
Enfin la mise en œuvre les choix arrêtés est peu détaillée. Tout est remis aux équipes
d’audit qui doivent prévoir des modalités ad hoc dans leurs scénarios d’évolution et aux
secrétaires généraux des ministères qui seront chargés des mises en œuvre concrètes. Un
dispositif de suivi et d’évaluation/validation similaire à celui qui accompagne le
processus du choix des scénarios d’évolution n’est pas prévu.
Conclusion
Dans l’ensemble on reste encore partagé. D’un côté les réserves qu’on vient de
développer ne militent pas en faveur de cette réforme. D’un autre côté on ne peut passer
sous silence le contexte généralement diagnostiqué comme dégradé de l’administration
française. Ce projet très original de réforme de l’Etat semble vouloir frapper vite et fort :
et s’il s’agissait d’un choc à la mesure des scléroses administratives ?
25
La rapport du Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des
institutions de la V° République intitulé Une V° République plus démocratique, a été remis au président
de la République le 29 octobre 2007. Trois de ces propositions vont clairement dans le sens d’un
renforcement des pouvoirs de contrôle du parlement vis-à-vis de l’administration : proposition 41,
« inscrire dans la Constitution la mission de contrôle et d’évaluation des politiques publiques dévolue au
Parlement en plus du vote de la loi » ; proposition 42, « prévoir que la Cour des comptes assiste les
assemblées parlementaires dans leurs missions de contrôle et d’évaluation », proposition 43 : « créer au
sein de chaque assemblée un comité d’audit parlementaire, organe composé notamment des présidents de
commission, placé sous l’autorité du président de l’assemblée et chargé d’organiser les activités de
contrôle (programme de travail coordonné ; recours à des moyens internes, externes, publics ou privés ;
débats sur les suites à donner) ».
18