Les moteurs du développement de la métropole Nantes Saint

Transcription

Les moteurs du développement de la métropole Nantes Saint
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Les moteurs du développement de la métropole
Nantes Saint-Nazaire
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Par Laurent DAVEZIES
Stratégie métropolitaine
L’analyse par Laurent Davezies des moteurs du développement
économique de la métropole Nantes Saint-Nazaire
Dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par le Syndicat Mixte du SCOT, la SAMOA conduit
une réflexion sur la stratégie de la métropole Nantes Saint-Nazaire en privilégiant une démarche de
projets qui doit concourir à la constitution d’une culture partagée sur les enjeux métropolitains. Dans le
champ du développement économique, la SAMOA a décidé de faire appel à l’économiste Laurent
Davezies, Professeur à l’Université Paris Val de Marne, en poste à l’institut d’urbanisme de Paris et
expert reconnu auprès d’institutions nationales et internationales.
Auteur de diagnostics territoriaux pour des collectivités territoriales françaises, ses travaux de
recherche portent essentiellement sur les politiques régionales, les politiques urbaines et de
développement économique local ainsi que les politiques financières publiques. Fin connaisseur des
territoires français, c’est également un observateur avisé des réalités locales de notre territoire, pour
avoir mené, en février 2004, une étude sur les moteurs de la CARENE intitulée « Le développement
de la CARENE dans son environnement».
Il revient ici, à notre demande, pour dresser une analyse des moteurs du développement économique
de la métropole Nantes Saint-Nazaire. Une métropole qui, comme nous le verrons, ne peut se limiter
à ses seules limites institutionnelles et que nous nous sommes, dès lors, efforcés d’exprimer le plus
conformément possible à la réalité vécue de ce territoire.
L’expertise qui procède d’une nouvelle approche de l’économie territoriale de Nantes Saint-Nazaire
permet là aussi de resituer le rôle et la particularité de chaque sous ensemble, mais autorise avant
tout à comprendre le fonctionnement général de cette réalité métropolitaine et à saisir la pertinence de
raisonner à une échelle élargie. Un regard comparatif sur les autres aires métropolitaines françaises
permet par ailleurs d’éclairer la singularité de son développement.
Cette expertise a fait l’objet d’une restitution au cours d’un atelier (23 février 2005) auprès d’élus et de
techniciens du SCOT et sera soumis au débat lors de la conférence métropolitaine du 10 juin 2005.
La diffusion de ces données nous paraît être un enjeu pour les acteurs de ce territoire. La SAMOA se
propose dans ce document d’en faciliter la lecture par une synthèse des analyses de Laurent
Davezies (I) avant la restitution de son étude (II) et l’explication du découpage retenu pour le territoire
d’étude. La SAMOA met également à disposition du lecteur intéressé le dossier complet de l’expertise
avec données chiffrées, cartes, graphiques à l’appui.
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I Synthèse SAMOA des analyses de Laurent DAVEZIES
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Laurent Davezies : agir pour maintenir la dynamique
Laurent Davezies fonde son analyse du développement local sur les revenus dont dispose un
territoire. Il nous éclaire sur la diversité des « moteurs économiques » de la métropole Nantes SaintNazaire et la nécessité d’une action publique forte pour préserver les sources de ce développement
atypique.
2-1 Le périmètre d’étude de la métropole Nantes Saint-Nazaire (carte page 3)
Le territoire d’étude pour l’intervention de Laurent Davezies a été composé de la façon suivante :
A la base, les aires urbaines de Nantes et de Saint-Nazaire, celles d’Ancenis et de Clisson ainsi
que les communes multipolarisées s’y rattachant. Cet ensemble constitue pour l’INSEE
l’ensemble urbain Nantes Saint-Nazaire.
Ont été rajouté les territoires suivants :
Les pôles d’emploi de Pornic et Saint-Brévin ainsi que les communes de l’espace rural
interstitiel entre ces pôles et l’aire urbaine de Nantes (le pays de Retz)
- Le pôle d’emploi de Blain, constitué de la seule commune de Blain.
-
Population (99)
Nombre d’emplois (99)
: 1 024 075
: 408 447
Cet espace informel n’a d’autre vocation que de représenter une base d’étude, plus proche de la
réalité économique que le découpage institutionnel. Mais il est aussi discutable, en tout cas dans ses
marges, sans que cela ne remette en cause les grandes données économiques qui s’y rattachent.
z Sources statistiques de Laurent Davezies
INSEE
UNEDIC
DGI
CNAF
Ministère du Tourisme
Annexe 1 : Le découpage du territoire (à la fin de ce document)
Annexe 2 : les données statistiques de Laurent Davezies « les moteurs du développement de la
métropole Nantes Saint-Nazaire », éléments du rapport, janvier 2005 (communiqué sur
demande).
2
Les territoires vécus de l’INSEE - Datar
Périmètre d’étude de la métropole Nantes – St Nazaire
3
2-2 L’équilibre des revenus de la MNSN explique sa dynamique
z Chiffres à l’appui, Laurent Davezies s’écarte résolument des analyses traditionnelles :
. Le développement d’un territoire local n’est pas seulement lié à l’efficacité de ses
entreprises engagées dans la compétition économique mondiale. L’évolution de son produit
intérieur brut, le rapport entre le PIB et le nombre d’habitants ne suffisent pas à éclairer sa
situation économique. Pourquoi, sinon, l’Ile-de-France, qui est l’un des territoires les plus
productifs au monde, connaît-elle les difficultés que l’on sait ?
. La cohésion sociale d’un territoire est un facteur de développement économique, autant
que la présence d’infrastructures ou d’ « emplois métropolitains supérieurs ». Elle n’est pas
un effet mais une condition de la croissance économique locale. La cohésion donne à un
territoire la « solidité » dont a besoin l’économie pour s’y développer.
Les métropoles qui créent de la richesse au détriment de leur cohésion sociale et spatiale
s’affaiblissent : le revenu y progresse moins vite que la valeur ajoutée, le cadre de vie s’y
dégrade et une part croissante de leurs actifs les quittent. Les villes fragmentées, déchirées,
ont de moins bonnes perspectives de développement.
. Ce constat ne contredit pas l’analyse selon laquelle la création de richesse est un
préalable à sa redistribution, mais il oblige à lui donner une perspective renouvelée, plus
large : la richesse d’un territoire local n’est pas ce que produisent ses entreprises mais les
revenus qu’il attire et leur transformation plus ou moins grande en activités domestiques.
La base économique d’un territoire, constituée par ces revenus, est exposée à la
concurrence avec les autres territoires. Le secteur domestique est moins directement
soumis à cette concurrence.
. Traduction de cette analyse ci-dessous à travers le cas de la métropole Nantes SaintNazaire, étudié par Laurent Davezies.
Æ Les revenus captés forment la « base économique ». Ils ont quatre sources :
. La production de biens et services vendus à l’extérieur, dite aussi base productive privée :
Sur la métropole Nantes Saint-Nazaire, la base productive est formée des revenus de
100 000 salariés, dirigeants d’entreprises, 7 000 agriculteurs et pêcheurs vivant et
travaillant sur ce territoire. Elle s’élève à 2,4 milliards d’euros de revenus. Soit une base
productive représentant 25 % du total des revenus formant la base économique
locale.
Trois territoires différents : la zone de Saint-Nazaire dont les spécialisations industrielles
constituent un puissant moteur pour l’ensemble de la MNSN et dont l’emploi continue à
se développer (+ 1 600 salariés entre 1993 et 2001) ; le cœur de l’aire urbaine de Nantes
qui se spécialise dans les activités à haute valeur ajoutée et dont l’emploi croit
rapidement (+ 6000) ; le reste de la MNSN qui, à l’exception des zones résidentielles
littorales, se partage un spectre d’activités industrielles (à noter, dans ces territoires
industriels périphériques , la croissance forte des dirigeants d’entreprises de plus de 10
salariés)
. Les salaires publics, dite base publique :
Sur la métropole Nantes Saint-Nazaire, la base publique fait rentrer 1,8 milliards d’euros
de revenus, issus des revenus de 96 000 salariés du secteur public. Soit une base
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publique représentant 19 % du total des revenus formant la base économique
locale.
Les deux tiers des emplois publics sont localisés sur l’unité urbaine de Nantes.
Pas de sur-représentation par rapport aux autres emplois comparé à la moyenne
nationale.
. Les revenus de personnes résidant mais ne travaillant pas sur le territoire local, dite base
résidentielle (ou présentielle, liée à la présence).
Sur la métropole Nantes Saint-Nazaire, la base résidentielle fait rentrer 4,1 milliards
d’euros de revenus, issus des revenus de 26 000 actifs travaillant en dehors de ce
territoire (0,5 milliard d’euros), 171 000 retraités (2,3 milliards d’euros), et des dépenses
des touristes (1,3 milliard d’euros). Soit une base résidentielle représentant 42 % de la
base économique locale.
La balance de la MNSN est négative avec les zones voisines de l’Ouest. Elle leur fournit
des emplois et des revenus à plus d’actifs résidant sur ces zones qu’elles ne le font pour
les siens. Mais elle est positive avec l’Ile-de-France (effet TGV)
Spécialisation sur l’accueil résidentiel des cadres : 10 % des cadres vivant dans la MNSN
n’y travaillent pas : 3 400 cadres vivant hors de la MNSN viennent y travailler, 5 100
cadres vivent dans la MNSN et travaillent ailleurs. Soit un solde positif de 1 700 cadres
dont le revenu est dépensé sur place alors qu’ils n’y travaillent pas (qui représentent
aussi un potentiel d’emplois de haut niveau à capter ou développer sur place).
Les retraités pèsent moins lourd parmi les titulaires de revenu qu’en moyenne en
province (indice 100, MNSN 89), mais leur nombre progresse plus vite (23 % contre
16%) : « entre 1990 et 1999, quand la MNSN enregistre un gain de 49 000 actifs
occupés, elle enregistre 32 000 retraités supplémentaires ! ». De ces 32 000, 12 000 sont
imputables aux retraités venus de l’extérieur de la MNSN. 37% de ces retraités venus de
l’extérieur habitaient en Ile-de-France neuf ans plus tôt.
L’emploi des secteurs touristiques progresse plus vite que la moyenne de la province (39
% contre 33%), soit 2 700 créations nettes d’emplois entre 1993 et 2001.
Forte spécialisation des territoires littoraux dans le tourisme et la présence de retraités
. Les revenus issus des prestations sociales : c’est la base sociale
Sur la métropole Nantes Saint-Nazaire, cette base sociale fait rentrer 1,2 milliards
d’euros de revenus. Soit une base sociale représentant 14 % de la base économique
locale.
Æ La base économique d’un territoire génère une activité domestique indispensable à sa
cohésion sociale:
. Les biens et services produits et vendus localement pour répondre à la demande des
habitants (boulangers, femmes de ménage, médecins, agents immobiliers, garagistes, etc.).
Sur la métropole Nantes Saint-Nazaire, l’activité domestique représente
la moitié des 410 000 emplois.
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. L’activité domestique est déterminante pour la cohésion sociale locale : ces emplois sont
« largement abrités de la concurrence mondiale, peuvent maintenir une activité non
technologique, à faible gain de productivité, donc plus ouverts aux actifs locaux les moins
qualifiés ». Contrairement au secteur productif privé et à ses « emplois métropolitains
supérieurs » l’activité domestique influe fortement sur le taux d’emploi et le taux de pauvreté
d’un territoire local.
z La dynamique de Nantes Saint-Nazaire
« L’avantage comparatif économique de la MNSN tient globalement à une capacité
d’attraction liée à sa diversification fonctionnelle (productivo-résidentielle), elle-même
génératrice d’une cohésion sociale et territoriale qui joue à son tour le rôle d’un turbo dans
l’activité de ce territoire ».
Æ La démographie
. Deuxième croissance des métropoles millionnaires derrière Toulouse entre 1990 et
1999. Idem pour le solde migratoire.
Æ L’équilibre des bases économiques
. La base résidentielle apporte autant que la base productive privée et la base publique
réunie.
. Parmi les métropoles millionnaires françaises, la MNSN est la seule à avoir trois
sources de revenus, productif, public, résidentiel fonctionnant de manière conjointe :
« Trois moteurs poussent mieux que deux. La dynamique de la MNSN comparée aux
autres villes millionnaires est, en dépit de son profil plus modeste, remarquable, et en
accélération ».
« Aucune des composantes du développement territorial ne l’emporte parce qu’elles y
sont toutes présentes… et s’épaulent mutuellement ».
« Le modèle qui apparaît, à l’examen, le plus dynamique, par comparaison entre les
territoires français est celui de l’équilibre, associant créations de richesses par la
production et revenus résidentiels et publics. C’est ce que l’on trouve dans la MNSN ».
. « L’aire urbaine de Paris, celles de Lyon et de Toulouse, dépendent plutôt de bases
productives et publiques, celles d’Aix-Marseille et de Lille de bases publiques, celle de
Nice de base résidentielle. L’aire urbaine de Rennes, beaucoup plus petite, ne dispose
pas de base résidentielle significative ».
. Attention : cet équilibre tient à « l’intégration d’une aire urbaine publique (Nantes) et
d’une aire urbaine productivo-résidentielle (Saint-Nazaire) ». A bien y regarder, la MNSN
« est encore un agrégat faisant interagir des territoires de natures et de fonctions très
diverses et dont l’ensemble est assez différent de ce que l’on trouve aujourd’hui dans les
grandes métropoles françaises ».
Æ La très bonne transformation en emplois domestiques grâce à la forte « présentialité »
. Progression de 32 % entre 1993 et 2002 des emplois domestiques « purs », ne se
développant qu’en fonction de la demande locale des ménages. La plus forte progression
des métropoles millionnaires.
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. Les interactions positives entre des composantes territoriales très différentes se lit dans
le fait que la circulation monétaire y semble très élevée.
. Cette forte dynamique tient aussi au niveau élevé de « présentialité ». La « présence »
mesure la population réellement présente sur un territoire un jour donné, soit l’équation :
Population habitante – population habitante absente + population non habitante résidante
= population présente
La « présentialité » est le fruit des aménités que développe un territoire, de l’envie que
l’on a ou non d’y résider lorsque l’on a le choix.
. Cette « présentialité » a une conséquence directe sur la demande locale. Dans les
Yvelines, 70 % de la population est là le jour le moins présent et 103 % le jour le plus
présent. En Loire-Atlantique, l’écart est très faible : 97 % le jour le moins présent, 106 %
le jour le plus présent. Ceci garantit un niveau élevé et soutenu de consommation, donc
d’activités domestiques, tout au long de l’année sur le territoire.
Æ La croissance de l’emploi
. Emploi total :
Seconde position, derrière Toulouse, pour la croissance de la population active occupée
(1990-1999), loin devant les autres métropoles millionnaires : 13,6 % pour la MNSN, 14,6
% pour Toulouse, 4 % pour Lyon, 3 % pour Aix-Marseille, 4 % pour Lille-R-T, 2 % pour
Nice.
. Emploi salarié privé :
Seconde position, derrière Toulouse, pour la croissance des emplois salariés privés et la
croissance des emplois de cadres d’entreprise entre 1993 et 2002. Première place pour
la croissance des professions libérales.
« Toulouse et la MNSN ont en commun d’avoir connu une croissance régulière de leur
emploi salarié privé qui suggère un mécanisme structurel plus fort que les turbulences
conjoncturelles ainsi qu’une base économique moins élastique aux variations
conjoncturelles (revenus publics et résidentiels) ».
. Faible poids des cadres d’entreprise et professions intellectuelles supérieures dans ses
actifs occupés : Sixième position des métropoles millionnaires (13,4 % contre 17 % à
Lyon, 20 % à Toulouse), mais seconde position pour leur croissance (derrière Toulouse).
Æ Le revenu des ménages
. Situation modeste : quatrième rang des métropoles millionnaires : 8 089 euros / hab,
contre 8 540 à Toulouse, 8 976 à Lyon et 9 540 à Nice. Plus élevé qu’à Aix-Marseille et
Lille-R-T.
Impôt sur le revenu par foyer égal à la moyenne de province, ce qui est peu pour une
métropole millionnaire (MNSN 99, province 100, France 118, Ile-de-France 176).
Æ La cohésion territoriale
. Le modèle classique de la « polarisation-fracture » métropolitaine ne semble pas
s’appliquer, au contraire : toutes les composantes territoriales y gagnent ».
7
. Les emplois des secteurs basiques productifs se sont développés dans presque toute la
MNSN, et plutôt plus rapidement hors des unités urbaines de Nantes et de Saint-Nazaire
(qui représentent toutefois 9 500 des 15 000 créations nettes d’emplois salariés privés
entre 1993 et 2001).
. Les 14 zones d’études de la MNSN ont eu, entre 1993 et 2002, une croissance de
l’emploi salarié privé supérieure (de 27% à 75%) à la moyenne de la Province (21%), à
celle de la France (18%) et a fortiori à celle de l’Ile-de-France (12%). Dans les 14 zones,
on constate la corrélation entre croissance des cadres et croissance des ouvriersemployés qui singularise la MNSN.
. « L’unité urbaine de Saint-Nazaire, qui est la plus pénalisée en termes sociaux, est la
grande gagnante au jeu de la création nette d’emplois induits (activités domestiques),
avec une croissance de 37 % de ce type d’emplois entre 1993 et 2002 ! ».
. Tous les territoires internes de la MNSN enregistrent une croissance du revenu des
ménages, et ce ne sont pas les territoires les plus riches dont le revenu augmente le plus
vite : le revenu des ménages a augmenté moins vite dans l’unité urbaine de Nantes que
dans les 13 autres zones d’études. De ce fait, la croissance des emplois domestiques,
liés à la demande locale, se fait sur toute la MNSN.
Æ La cohésion sociale
. Le plus faible taux de population vivant en dessous du seuil de pauvreté, avec Lyon,
des métropoles millionnaires, et le plus fort taux de réduction de ce taux dans les années
de croissance 1996-2000 (11 % parmi les moins de 65 ans, - 7,9 %), contre 20 % à AixMarseille, 17 % à Lille-R-T, 15,7 % à Nice, 12,7 % à Toulouse.
. La forte croissance des actifs cadres va de pair avec une forte croissance des actifs
ouvriers et employés, contrairement au « modèle » métropolitain habituel (Ile-de-France,
Lyon). La MNSN partage cette caractéristique avec Toulouse.
. « La MNSN a cette particularité de bénéficier à la fois de l’effet « richesse
métropolitaine » et de la diversité de la structure de sa base économique lui permettant
une réduction plus rapide du nombre de ses pauvres en période d’embellie macroéconomique ».
Æ L’intercommunalité favorable à cette cohésion
. La comparaison entre les inégalités de potentiel fiscal entre les 14 zones statisticogéographiques et entre les 22 EPCI concernées par le territoire d’étude de la MNSN ne
révèle pas de divergence entre les deux, au contraire.
Ceci montre que l’organisation politique des intercommunalités a plus été dans le sens
des gains de cohésion que l’inverse, à la différence de ce qui est souvent observé dans
les aires urbaines à cause de « mariages endogamiques » de communes riches entre
elles.
Æ Une forme « non métropolitaine » de développement ?
« Sous pratiquement tous ses aspects économiques et sociaux, la MNSN apparaît
différente de ce qu’est aujourd’hui une métropole française ». Sa forte dynamique
n’entraîne pas de fragmentation sociale et territoriale, mais au contraire la solidarité
croissante de ses composantes, « son renforcement comme un ensemble socioéconomique »
8
. Diffusion territoriale des emplois et des revenus au lieu de la concentration
caractéristique des métropoles.
. Croissance conjointe des emplois supérieurs et ouvriers-employés au lieu du
découplage habituellement constaté.
. Moindre taux de pauvreté que dans les métropoles millionnaires françaises.
. Modestie du revenu des ménages par rapport aux métropoles millionnaires françaises.
. Services supérieurs aux entreprises (conseil en gestion, publicité, etc.) moins présents
que dans la moyenne de province, avec une croissance également moindre : 3,6 % des
emplois en 2002 contre 4,1% à Toulouse, 4,3 % à Bordeaux, 5,1 % à Lyon. « La MNSN
apparaît à cet égard comme un territoire dont la base productive est plus technique que
tournée vers le business management ».
2-3 Les risques et les enjeux que souligne Laurent Davezies
« La question est maintenant de savoir si la MNSN a aujourd’hui mangé son pain blanc ou si les
résultats d’aujourd’hui prédisent ceux de demain…Sommes-nous face à une forme de développement
« pré-métropolitaine » ou « alter-métropolitaine » ? »
z Un risque : avoir mangé son pain blanc
Æ La diffusion territoriale des activités et la cohésion sociale moins mise à mal qu’ailleurs ne
seraient que les signes du retard de la « métropolisation » en cours de NSN. Le rythme de
développement étant bien de type métropolitain, la concentration des activités et la ségrégation
sociale ne seraient qu’une question de temps.
z Un enjeu : Maintenir un développement sur ces bases
Æ « Les acteurs locaux français ont souvent tendance à penser que la mondialisation de la
production les réduit au statut de « badaud » de l’évolution, voire de la fracture de leur territoire.
Les éléments réunis ici visent à monter qu’il n’en est rien ».
« Les moteurs actuels – et plus encore futurs – de la croissance locale résident dans la
préservation et la fabrication d’un environnement permettant à la fois d’attirer des facteurs de
production modernes (capital et travail), de retenir et de porter les projets productifs locaux,
mais aussi de préserver le véritable capital que constituent les équilibres sociaux et territoriaux
eux-mêmes dépendant de la diversité des spécialisations territoriales et de la qualité du cadre
de vie ».
Æ La chance d’avoir trois moteurs de développement économique est aussi une « injonction à
maintenir et à gérer cet équilibre (..) en inscrivant dans les politiques et les choix
d’aménagement les mesures permettant de limiter les risques de surchauffe (urbanisation,
coûts fonciers/immobiliers..), d’arbitrer dans les concurrences d’usage du sol entre
spécialisations territoriales, de développer des infrastructures permettant une meilleure
intégration/fluidité du modèle de développement de la MNSN, d’assurer un équilibre entre
fonctions productives et « reproductives » simples et élargies (culture, service public
d’éducation…), et de ménager la rente résidentielle, qui comme toutes les rentes se consomme
plus qu’elle ne se reproduit ».
9
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II L’étude de Laurent DAVEZIES
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Les moteurs du développement de la métropole Nantes – St Nazaire
Laurent davezies- Université Paris 12- Février 2005
L’étude commandée par la Samoa1 visait à identifier, localiser et évaluer les moteurs du
développement de l’ensemble de la Métropole Nantes-Saint Nazaire et à en mesurer les effets
sur son développement. Pour aller directement aux conclusions, il s’est agi de comprendre en
quoi son fonctionnement métropolitain –ou plutôt peut-être « alter-métropolitain »-, fondé sur
un équilibre entre différents moteurs, permettait d’expliquer l’étonnant succès économique et
social actuel de ce territoire en même temps que le partage de ce succès ente ses différentes
composantes. La présente note vise à synthétiser l’ensemble des analyses qui ont été menées.
Le lecteur voulant en savoir plus sur tout ou partie de ces analyses trouvera en annexe leur
présentation détaillée sous forme de fiches/diapos thématiques.
Le cadre d’analyse : la « théorie de la base économique »
En préambule, que le lecteur pressé pardonne l’auteur, il est nécessaire de dire deux mots du
contexte théorique de l’étude. Le cadre analytique de cette étude s’écarte en effet résolument
des analyses traditionnelles –et dominantes- du développement territorial qui postulent que les
qualités des systèmes productifs des territoires, dans un univers de compétition mondialisée,
suffisent à leur garantir un développement soutenu. Ces analyses, pourtant, échouent à
comprendre pourquoi les territoires les mieux adaptés à cette compétition connaissent
aujourd’hui de graves difficultés économiques et sociales (à commencer par l’Ile de France)
et négligent les cadres environnemental, social, en bref territorial, dont on peut voir qu’ils
constituent pourtant le premier facteur d’un développement productif durable. La notion de
« métropole » qui fait aujourd’hui l’objet d’une forme de fétichisme, est, on le sait, à la fois le
lieu des gains de compétitivité productive et de déstabilisation sociale et territoriale : le « tout
productif » exclut des parts croissantes de la population active la plus vulnérable, alimente la
pauvreté, génère la ségrégation socio-spatiale, mine la cohésion des territoires. La
« métropole » serait aujourd’hui le seul destin de la grande ville, hors le déclin, et cela à un
coût social qui serait inévitable. Le dilemme « métropolisation »-« cohésion » se poserait dans
les termes de la tragédie grecque !
La « cohésion » est généralement traitée comme une problématique sociale ou politique
n’ayant que peu à voir avec la « vraie économie ». Les économistes, du reste, laissent cette
question aux bons soins des sociologues et des géographes et ne l’intègrent pas dans leurs
modèles… Elle est cantonnée dans le registre des effets ou des retombées, voulus ou non
voulus, et peu ou pas dans celui des facteurs premiers de la croissance locale. Le vocabulaire
de la cohésion est chargé de connotations humanistes ou affectives (solidarité, équité, égalité,
redistribution,…), alors que si l’on revient à son sens premier, elle évoque d’abord la question
de la solidité du corps social (et c’est encore plus vrai du terme solidarité qui dérive
directement de solidus). Revenir à cette définition première place la cohésion non pas en aval
mais en amont des conditions de développement économique : elle constitue un véritable bien
1
Cette étude a été réalisée à la suite d’une première analyse menée à la demande de la CARENE (Davezies L.
(2004) « Le développement de la Carene dans son environnement ». Rapport à la Communauté
d’Agglomération de Saint-Nazaire. Œil-CRETEIL-Université Paris 12. Créteil. Polygraphié 45 pages + annexes)
10
public et un facteur de développement autrement plus stratégique que la dotation en
infrastructures ou la présence d’ « EMS » (emplois métropolitains supérieurs).
Les territoires « métropolitains » qui se développent rapidement en termes de création de
richesses au détriment de la cohésion socio-spatiale apparaissent aujourd’hui affaiblis2 : leur
revenu progresse moins vite que leur valeur ajoutée, le cadre de vie s’y dégrade et finalement
une part croissante de leurs actifs les quittent comme en témoigne le solde migratoire négatif
des villes françaises les plus spécialisées dans la production. Dans un contexte, nouveau à
l’échelle séculaire, dans lequel la population active française va commencer à décroître en
nombre absolu (« Le choc de 2006 » de Michel Godet), la capacité des territoires à retenir et
capter les populations de jeunes actifs constituera le principal enjeu de leur développement
productif. Mais on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre : ce sont les villes les plus
attractives sur le plan résidentiel –et leur « cohésion » fait partie de ces facteurs d’attractivité-,
dotées, on le verra, des meilleurs « coefficients de présentialité», qui auront à l’avenir les
meilleures perspectives de développement productif. Les villes « solides » ont aujourd’hui de
meilleures perspectives économiques que les villes fragmentées, déchirées, duales ou éclatées
(pour reprendre les adjectifs accompagnant généralement l’analyse des métropoles).
La métropole Nantes-Saint Nazaire (MNSN) constitue d’ores et déjà une illustration de ce
nouveau modèle de développement territorial et particulièrement urbain qui est en train
d’émerger en France.
Par ailleurs, de la même façon que l’on a discuté ce que sont les nouveaux facteurs du
développement territorial, il convient d’avoir une définition de ce qu’est ce développement
territorial en tant que tel, et, pour les acteurs locaux, de se doter d’un objectif clair et cohérent
sur ce qu’ils entendent que soit le futur de leur territoire. La littérature académique ou
politico-administrative n’offre pourtant aucune définition explicite du contenu de ce qu’est le
développement local ou régional. Les facteurs du développement productif (la compétitivité
productive, le PIB par emploi ou habitant,…) ont fini par occuper l’ensemble du champ du
développement et sont généralement confondus avec ses effets attendus (l’amélioration
durable du bien-être de la population). Le développement comme processus fait l’objet d’une
abondante littérature (des fonctions de production des économistes aux analyses
sociologiques de la « gouvernance »), mais on ne trouve rien d’articulé sur le contenu du
développement. D’où le désarroi analytique et politique face à des situations locales associant
système productif brillant et crise sociale et démographique ou, à l’inverse, sousdéveloppement productif et bonne santé sociale…
Ce qui apparaît aujourd’hui comme la seule approche analytique rendant compte de la nature
et des facteurs du développement d’un territoire est l’ancienne « théorie de la base
économique », datant de plus d’un siècle et généralement oubliée (mais maintenue et
transmise par quelques auteurs comme Loeiz Laurent, l’ancien directeur de l’Insee Bretagne).
2
Davezies L. (2003) La diversité du développement local dans les villes françaises. Rapport à la DATAR. ŒilCRETEIL-Université Paris 12. Créteil. Polygraphié 60 pages + annexes. (on trouvera dans le Premier Rapport de
l’Observatoire des Territoires, a paraître à la Documentation Française à l’été 2005, l’essentiel des analyses et
cartes développées dans ce rapport non publié).
11
Dans cette approche, le développement d’un territoire repose sur deux facteurs : (i) sa
capacité à maximiser les flux de revenus –appelé « base économique »- en provenance du
reste du monde (y compris de la France) et (ii) l’intensité de la circulation monétaire interne
(i.e. la propension des ménages du territoire à consommer localement). Le développement, en
tant que résultat, est exprimé en termes d’emplois, de revenus et de croissance démographique
du territoire. Cette approche par les revenus permet de rendre compte de ce qu’est la réalité du
développement de la population locale et de ses enjeux3.
Le "secteur basique" est celui qui apporte toutes sortes de revenus captés hors de la ville.
L’autre secteur de la ville est le "secteur domestique" dont le développement est induit par la
base économique par des mécanismes multiplicateurs d'emploi et de revenu. Il s'agit de
secteurs d'activité produisant des biens et des services vendus localement (boulangers,
médecins, commerçants, aides ménagères…). Ces secteurs, et la population qu'ils font vivre,
dépendent de la demande locale et du revenu local eux-mêmes déterminés par la base et par la
propension à consommer localement de la population. Il y a donc deux secteurs économiques
locaux : l’un exposé à la concurrence avec les autres territoires et le reste du monde, l’autre
protégé de la concurrence et qui permet aux actifs les plus vulnérables d’être employés, inclus
dans la société locale, par le biais d’activité à faible productivité et à ajustement structurel
lent. L’excellence et la vulnérabilité peuvent ainsi cohabiter d’autant plus positivement (et par
des mécanismes de solidarité d’abord marchands) que les flux de revenus basiques et leur
propension à stimuler les dépenses locales sont élevées.
La métropole Nantes Saint Nazaire, singulière par la structure moyenne de ses bases.
Le territoire de la MNSN regroupe un million d’habitants et permet de hisser ce territoire dans
le cercle restreint des villes millionnaires de la province française (aires urbaines de Lyon,
Aix-Marseille, Lille, Toulouse et Nice). À l’examen, ce qui apparaît frappant est le fait que,
dans ce club, –y compris si on y ajoute l’aire urbaine de Paris- la MNSN est celle dont les
bases du développement économique sont les plus équilibrées. Les revenus qui viennent
irriguer son économie proviennent à la fois (i) de la contrepartie des ventes de biens et
services produits dans la MNSN et vendus à l’extérieur (base productive privée), (ii) des
salaires publics (base publique), (iii) ainsi que des revenus apportés par des agents qui ne
travaillent pas dans la MNSN (base résidentielle) : retraités, touristes et actifs y vivant et
travaillant hors de la MNSN).
L’aire urbaine de Paris, comme celles de Lyon et de Toulouse, dépend plutôt de bases
productives et publiques, celles de Marseille-Aix et de Lille de bases publiques, celle de Nice
de bases résidentielles. La MNSN est la seule, dans ce club, à disposer, à la fois, des trois
moteurs (un peu à la façon de ce que l’on retrouve dans quelques rares territoires comme
l’aire urbaine d’Annecy). L’aire urbaine de Rennes, beaucoup plus petite, ne dispose pas non
plus de bases résidentielles significatives. La MNSN est un territoire qui n’est pas industriel
mais qui a de l’industrie, qui n’est pas résidentiel mais qui a des atouts résidentiels, qui n’est
3
Pour des développements conceptuels et méthodologiques, voir : Davezies L. (2004) "Temps de la production
et temps de la consommation: les nouveaux aménageurs du territoire?" n° 295 Futuribles. Mars 2004. Davezies
Laurent (2000) "Revenu et territoires" in Le développement local, Rapport du Conseil d'Analyse Economique
n°31 ,Paris. La Documentation Française. 15 pages
12
pas public mais qui a de l’emploi public… elle est donc mue par trois moteurs, ce qui
constitue une chance –la MNSN « en a sous le pied »-, on le verra, en même temps qu’une
injonction à maintenir et gérer cet équilibre en opérant plus qu’ailleurs des arbitrages dans
leurs concurrences dans l’usage du sol.
Tableau 1 : Estimation des revenus basiques de la métropole Nantes-Saint Nazaire- 1999
Note : les montants sont exprimés en francs, pour des évaluations datant d’avant le passage à l’Euro
Source : Calculs de l’auteur d’après Dgi, Insee, Unedic, Cnaf,…
Tableau 2 : La structure des bases économiques des grandes villes françaises comparée à
celles des aires urbaines de Nantes et Saint-Nazaire
13
Une des leçons d’un exercice d’évaluation des bases économiques territoriales réside dans le
fait que la part des revenus basiques directement issus d’une activité productive marchande
locale est partout largement inférieure à ce que constituent la somme des revenus publics
(salaires publics) et des revenus résidentiels (retraites, touristes et salaires d’actifs employés
ailleurs). Le « tout-productif », ne garantit donc pas une maximisation du revenu basique (tout
en ayant, on l’a dit, une forte propension à exclure les actifs peu ou pas qualifiés). Le « toutrésidentiel » a ses limites également : il se traduit par la consommation d’une rente
résidentielle non-renouvelable et qui peut atteindre assez rapidement ses limites, quand le
résidentiel n’est pas utilisé comme levier du développement productif, comme on l’observe
actuellement par exemple sur la Côte d’Azur. Le modèle qui apparaît, à l’examen4, le plus
dynamique, par comparaison entre les territoires français est celui de l’équilibre, associant
créations de richesses par la production et revenus résidentiels et publics. C’est ce que l’on
trouve par exemple à Annecy. Mais aussi dans la MNSN.
La MNSN en tête du peloton des villes millionnaires
Trois moteurs poussent mieux que deux ou un : la dynamique de la MNSN comparée aux
autres villes millionnaires est, en dépit de son profil plus modeste, remarquable (et en
accélération par rapport aux années 1980). Elle opère, dans la roue de Toulouse, un
échappée : seconde pour la croissance de la population (1990-99), pour le solde migratoire (la
MNSN accélère alors que les championnes des années 1980, Nice et Toulouse, ralentissent),
pour la croissance de la population active (et première pour celle des actifs masculins), pour
celle de l’emploi total et de l’emploi salarié privé –et l’écart se creuse largement entre
Toulouse et la MNSN et les autres villes millionnaires-, pour celle de l’emploi des cadres
d’entreprise, première pour la croissance des professions libérales et pour celle des chefs
d’entreprise de plus de 10 salariés…
Pour autant, la MNSN présente un profil plus modeste que les autres grandes villes, avec un
revenu moyen par habitant qui reste inférieur à celui des autres métropoles de Province, à
4
Davezies (2003), déjà cité
14
l’exception de Aix-Marseille et Lille. De même, la MNSN a, des cinq métropoles, le plus
faible taux de cadres dans ses actifs occupés. Ce retard, en dépit d’une très forte croissance de
leur nombre, est très marqué : 13,5% dans la MNSN contre 20% à Toulouse ou 17% à AixMarseille.
Métropole peu « métropolisée » (avec ce que la métropolisation comporte de fractures), la
MNSN est encore un agrégat faisant interagir des territoires de natures et de fonctions très
diverses et dont l’ensemble est assez différent de ce que l’on trouve aujourd’hui dans le
« modèle » des grandes métropoles françaises. Modeste, on l’a dit notamment pour le revenu,
mais avec moins de pauvres que les autres : elle est, des métropoles millionnaires françaises,
celle dans laquelle la part de la population en dessous du seuil de pauvreté est la plus faible et
une de celles dans lesquelles cette population s’est le plus réduite dans les années de
prospérité 1996-2000. Cette « modestie » associée à une faible présence de populations
pauvres signe le caractère « pré-métropolitain » de la MNSN et reflète, on le verra, la
diversité des moteurs de son développement qui, plus qu’ailleurs, offre des opportunités de
développement personnels à un large spectre d’actifs y compris peu ou pas qualifiés (à
l’inverse, parmi d’autres exemples, de l’Ile de France dans laquelle les succès productifs
passent par une exclusion croissante d’actifs vulnérables que la faiblesse des bases
présentielles francilienne ne permet pas de réintégrer dans l’activité… d’où les contreperformances sociales spectaculaires de la région parisienne).
L’équilibre des bases de la MNSN : une co-production de ses différents territoires…
Comment ces différents moteurs se combinent-ils entre les territoires de la MNSN ? On peut
d’abord donner quelques ordres de grandeur pour l’ensemble de son territoire: (i) la base
productive permet de faire rentrer de l’ordre de 16 milliards de francs (en 2000), grâce au
travail de 100 000 salariés et chefs d’entreprises et 7000 agriculteurs/pêcheurs. (ii) La base
publique amène de l’ordre de 12 milliards de francs sous forme de rémunération des 96 000
salariés publics. (iii) La base présentielle apporte autant que les deux premières réunies : de
l’ordre de 27 milliards de francs par le truchement des 171 000 retraités, des 25 000 actifs de
la MNSN qui travaillent ailleurs, des touristes présents dans les 60 000 résidences
secondaires et des 25 000 hébergements marchands.
On peut estimer que la moitié des 410 000 emplois de la MNSN sont consacrés à des activités
tournées vers la demande locale des ménages. Ce sont ces emplois qui dépendent de la
demande locale (la propension à consommer localement) et qui, largement abrités de la
concurrence mondiale, peuvent maintenir une activité souvent « low-tech », à faible gains de
productivité et donc largement ouverte aux actifs locaux les moins qualifiés. Soulignons
encore que l’emploi de la MNSN (comme du reste en gros dans la France entière) se partage
en un quart exposé à la concurrence des marchés (et évoluant en fonction de la position
compétitive du territoire), un quart public (qui évolue avec le peuplement) et une moitié
produisant des biens et des services vendus localement (et qui évolue avec la demande, i.e. la
présence des populations, leur revenu et leur propension à consommer localement).
Dotée de bases diverses et équilibrées, la MNSN est le fait de territoires eux-mêmes
diversifiés et complémentaires :
15
-
La base productive se partage entre trois types de territoires : (i) la zone de Saint
Nazaire, d’abord, dont les spécialisations industrielles (notamment navales et
aéronautiques) constituent un puissant moteur pour l’ensemble de la MNSN. Les
emplois continuent à s’y développer en dépit des inquiétudes récurrentes sur l’avenir
du secteur naval (+ 1600 salariés entre 1993 et 2001). Y travaillent près de 3 000 actifs
résidants dans l’aire urbaine de Nantes et ce sont au total près de 16 000 actifs de la
MNSN qui rentrent quotidiennement dans l’unité urbaine de St Nazaire pour y
travailler ; (ii) le cœur de l’aire urbaine de Nantes, qui se spécialise dans les activités à
haute valeur ajoutée (conseil en systèmes informatiques, réalisation de logiciels,
ingénierie,…) dont l’emploi croît très rapidement (au total près de 6 000 créations
nettes d’emploi entre 1993 et 2001). Ce sont près de 46 000 actifs de la MNSN qui
vont travailler dans l’unité urbaine de Nantes… De façon générale, avec une forte
concentration nantaise des services supérieurs aux entreprises, l’unité urbaine de
Nantes constitue le pôle de services supérieurs de l’ensemble de la zone (et au delà) ;
(iii) le reste de la MNSN, à l’exception des zones résidentielles littorales, qui se
partagent un spectre d’activités industrielles (agro-alimentaire, matières plastiques,
…). Ces activités progressent globalement et pour la plupart, en termes d’emplois,
même si certaines enregistrent actuellement des difficultés (textiles, équipements
automobiles, papiers cartons,…). C’est dans ces territoires industrieux, non littoraux et
« périphériques » des deux grandes aires urbaines que se situe la croissance –on l’a vu,
plus rapide que dans les autres métropoles millionnaires- des chefs d’entreprises de
plus de 10 salariés. La zone littorale de la Turbale, peu industrielle, parvient à
maintenir son emploi dans le domaine de la pêche.
Tableau 3 : La base productive privée en 2001. Nombre et indice de spécialisation de
l’emploi salarié privé des zones d’étude de la MNSN.
industries agro alimentaires
industries textiles-maroquinerie-chaussures
industries bois papiers cartons
edition
imprimerie
raffinage de pétrole
petrole-chimie-pharmacie
industrie du caoutchouc
transformation des matières plastiques
industries verre-ceramique-beton-pierre
travail des metaux-fonderie-chaudronnerie
fabrication appareils-machines
construction navale
construction aéronautique et spatiale
fabrication de meubles
industries diverses
informatique-recherche
jurid-compta-gestion-pub
archi-ingénierie-contrôle techn.
Total emploi concerné (indice de présence)
Total emploi concerné (nbre d'emplois 2001)
MNSN
9 095
2 062
3 230
733
2 091
975
2 345
1 128
2 600
1 251
8 728
17 493
6 468
5 029
1 076
1 943
8 394
9 895
6 124
100
80 765
in UU
Nantes
in AU
Nantes
66
34
69
117
114
46
81
146
75
97
72
95
3
63
61
118
145
126
124
85
42 823
in UU St
Nazaire
in AU St Nantais- Nantais- in AU
NantaisNazaire Sud
Nord
Ancenis Est
53
236
151
40
365
71
424
640
13
0
49
372
8
284
150
75
200
18
43
27
36
161
178
72
175
435
0
0
0
0
240
115
12
170
0
2
29
9
0
0
88
59
289
118
420
47
67
194
63
114
130
124
120
248
125
67
120
171
365
90
586
0
25
0
0
369
0
0
0
0
54
613
379
11
137
19
31
92
12
0
18
113
20
8
8
71
41
45
45
67
80
62
44
30
34
135
130
116
138
105
17 884
4 147
3 578
2 821
2 143
HORS
AU POLE
EMPLOI
ESPACE
RURAL
(Sud)
263
0
49
151
18
0
2
0
316
215
95
28
12
0
39
5
3
54
32
68
1 039
16
in AU
Clisson
industries agro alimentaires
industries textiles-maroquinerie-chaussures
industries bois papiers cartons
edition
imprimerie
raffinage de pétrole
petrole-chimie-pharmacie
industrie du caoutchouc
transformation des matières plastiques
industries verre-ceramique-beton-pierre
travail des metaux-fonderie-chaudronnerie
fabrication appareils-machines
construction navale
construction aéronautique et spatiale
fabrication de meubles
industries diverses
informatique-recherche
jurid-compta-gestion-pub
archi-ingénierie-contrôle techn.
Total emploi concerné (indice de présence)
Total emploi concerné (nbre d'emplois 2001)
43
1051
1153
64
23
0
5
387
320
0
82
59
0
0
219
957
23
38
34
147
2 015
MULTIPO
LARISÉE
ARRDT
St
Nazaire
573
190
40
0
105
0
15
0
0
27
102
195
0
0
64
4
20
48
52
135
1 582
hors UU
MULTIPO
St
LARISÉE
Nazaire
in AU St HORS AU RURAL UU de la
Turbale
Nazaire ENCLAVE
308
730
110
0
314
12
13
33
54
0
0
68
74
13
0
0
0
0
0
0
0
0
0
0
25
0
0
261
1174
0
500
385
9
69
161
19
1
0
128
0
13
0
341
86
0
8
48
26
0
2
6
36
48
0
52
2
29
120
190
34
1 187
1 160
110
HORS
AU POLE
EMPLOI
ESPACE
RURAL
(Nord)
129
608
246
0
49
0
0
0
0
0
188
4
0
0
0
0
0
16
71
68
214
MULTIPO
LARISÉE
ARRDT
Cholet
64
0
0
0
56
0
0
0
0
93
31
20
0
0
0
421
0
75
25
30
62
Source : calcul d’après Unedic
-
La base publique fondée sur le quart de l’emploi total de la MNSN est concentrée
dans l’unité urbaine de Nantes (dans laquelle 30% de l’emploi est public). La forte
croissance démographique de la MNSN explique les performances de création nette
d’emplois des secteurs éducation/sanitaire/social : avec 31,3% (contre 18,4% en
France), soit 11 000 emplois entre 1990 et 1999. La croissance des employés de la
fonction publique est moyenne (15,6% contre 15,5% en France), avec 6 700 créations
nettes, et celle des cadres publics et professions intellectuelles supérieure, également
moyenne (24,5% , comme pour la France) avec 4 500 créations nettes. Ces emplois,
fortement centrés sur Nantes bénéficient à de nombreux secteurs de la MNSN dans
lesquels résident ces actifs. De façon générale, cependant et en dépit de leur forte
croissance, les emplois publics ne sont pas surreprésentés (par rapport aux autres
emplois) dans la MNSN par rapport à la moyenne nationale.
-
La base résidentielle est constituée des pensions de retraites (près de 16 milliards de
francs), les dépenses des touristes (8,5 milliards de francs) et les revenus d’actifs
résidants dans la MNSN et travaillant ailleurs (près de 3 milliards de francs).
(i)
La part la plus importante de la base résidentielle est constituée des
revenus des 171 000 retraités qui vivent dans la MNSN. Ils constituent de
plus, là comme ailleurs en France, le gros de l’augmentation des titulaires
de revenu de ces dernières années : dans le même temps où la MNSN voit
ses actifs occupés croître de 49 000 unités entre 1990 et 1999, elle
enregistre près de 32 000 retraités supplémentaires ! Nombre d’entre eux
proviennent de l’extérieur de la MNSN. On peut calculer que l’apport de
17
retraités venus d’ailleurs entre 1990 et 1999 (12 000) représente 7% des
retraités 1990 de la MNSN. 37% d’entre eux étaient recensés en Ile de
France en 1990… Il s’agit là d’un appoint important de revenus basiques
pour la MNSN (et d’autant que les retraités mobiles venant d’Ile de France
sont parmi les plus solvables…). La géographie de leur localisation est
nettement tournée vers l’ouest de la MNSN et le littoral, au risque même
de frôler la saturation (au regard des effets d’évictions qu’une population
d’électeurs inactifs peut avoir sur d’autres composantes du développement
économique local) dans certaines zones (avec des retraités représentant
près de 70% des actifs dans les zones littorales). Pour autant , la croissance
de leur nombre, entre 1990 et 1999 se porte nettement dans l’Est et le Sud
de la MNSN, permettant un « étalement » de cette population à d’autres
composantes de la MNSN, avec leurs effets ambigus sur leur
développement (avec les avantages de « l’or gris » et les inconvénients du
« grey power »…). Si le nombre de retraités augmente rapidement dans la
MNSN, on ne peut pour autant dire qu’elle se spécialise dans leur accueil :
leur poids dans les titulaires de revenu de la MNSN est de l’ordre de 27%,
à peine supérieur à ce que l’on observe dans l’AU de Lyon (25%) ou de
Toulouse (24%) et beaucoup moins que dans l’AU de Nice (34%) et même
que dans la Province en général (30%). Dans ses prévisions à 2030, du
reste, l’Insee classe la Loire-Atlantique dans les départements qui
enregistreront une croissance de leurs personnes âgées inférieure à la
moyenne nationale.
(ii)
La deuxième composante de la base résidentielle de la MNSN est
composée des dépenses des touristes (en hébergement marchand et non
marchand). Globalement, la MNSN est, une fois encore, dans la moyenne
nationale avec une composante touristique n’y pesant pas plus qu’ailleurs,
mais pas moins non plus. La part des résidences secondaires dans le
logement est la même que pour la moyenne de province (12%), mais plus
de trois fois supérieure à ce que l’on observe dans les métropoles
millionnaires (à part à Nice). L’offre en tourisme marchand (chambres
d’hôtels et places de camping) est légèrement inférieure à la moyenne de
Province ainsi que la part de ses salariés privés qui travaillent dans le
secteur touristique. En revanche, certains de ses territoires, littoraux,
comme pour les retraités, sont fortement spécialisés dans l’accueil et
l’économie touristique. De façon générale, il n’y a pas de forte croissance
de ce secteur économique dans la MNSN: avec des résidences secondaires
se transformant de façon croissante en résidences principales et avec une
faible augmentation de l’offre en hébergement marchand (hôtels et
campings). La croissance étonnante de la MNSN n’est donc pas portée,
mais plutôt accompagnée par son économie touristique. On assiste de
façon générale à un certain rééquilibrage au profit de l’est et du sud de la
MNSN (chambres d’hôtel) ou du nord de l’estuaire (campings).
(iii)
La troisième composante de la base résidentielle est le fait des actifs qui
vivent dans la MNSN et travaillent à l’extérieur. De façon générale,
cependant, la MNSN fonctionne globalement comme un pôle d’emploi qui
18
attire plus d’actifs extérieurs qui viennent y travailler (26 000, soit 6,4% de
son emploi) qu’elle « n’exporte » ses actifs vers d’autres lieux d’emploi
(24 600, soit 6,0% de sa population active). Ce qui est souvent lu comme
un bénéfice net (1 600 emplois) en termes de captation de compétences
extérieures au profit de la MNSN correspond aussi à un déficit de revenu
basique lié au fait que 1 600 emplois nets (26 000 bruts) générant de la
valeur ajoutée (de la richesse) dans la MNSN ne se traduisent par aucun
revenu supplémentaire injecté dans l’agglomération. Il n’en reste pas
moins que 24 500 actifs résidant dans la MNSN apportent les revenus d’un
emploi situé à l’extérieur (soit près de 3 milliards de francs). La balance de
la MNSN est négative avec les zones voisines de l’Ouest français (elle
fournit des emplois et des revenus à leurs actifs plus qu’ils ne le font pour
les siens), mais positive avec l’Ile de France (effet TGV). Concernant les
seuls cadres, la situation est différente : la MNSN gagne, en termes de
revenus basiques, aux échanges avec les zones voisines comme avec l’Ile
de France : près de 10% des cadres vivant dans la MNSN n’y travaillent
pas ! (employés à Angers ou à Paris, ils préfèrent vivre dans la MNSN …
et y apporter leurs revenus). Il s’agit là d’un double avantage pour la
MNSN : parce que cela apporte des revenus d’appoint significatifs et parce
que là encore, la MNSN « en a sous le pied » en matière de développement
d’activités supérieures, disposant de cette réserve de cadres employables
(ou « débauchables ») déjà présents, à l’heure où la raréfaction de la
population active française introduit une nouvelle concurrence, notamment
sur ce « créneau » des cadres, entre les territoires.
Au total donc la MNSN, apparemment moyenne, présente un visage équilibré et
complémentaire en termes aussi bien d’avantages comparatifs que de spécialisations
fonctionnelles : c’est un territoire industriel mais aussi public et résidentiel, sans que ces deux
dernières composantes se substituent à la première : aucune des composantes du
développement territorial ne l’emporte parce qu’elles sont toutes présentes… et s’épaulent
mutuellement, en s’additionnant, pour maximiser le niveau de la base économique de
l’ensemble.
Les effets d’entraînement économiques et sociaux de la base de la MNSN
Les interactions positives entre des composantes territoriales aussi différentes se lit dans le
fait que la circulation monétaire y semble très élevée : la MNSN est plus que les autres villes
millionnaires, bien dotée en emplois tournés vers la demande locale et ils y progressent
nettement plus vite qu’ailleurs (même à qu’à Toulouse). L’essai marqué par la base
économique est transformé par la propension à consommer localement (elle même liée à
l’attractivité et aux aménités de la MNSN).
19
Tableau 4 : La présence et le dynamisme de l’emploi salarié privé des activités tournées
vers les ménages – 1993-2002.
Note: les emplois « domestiques purs » sont un échantillon, conceptuellement homogène, des activités se
développant en fonction de la demande locale des ménages. Ils ne constituent pas la totalité, loin de là des
emplois domestiques (on a vu plus haut que l’emploi domestique pèse en gros la moitié de l’emploi salarié privé
de la MNSN).
Source : Unedic
On peut même penser, au vu du taux de couverture pour 100 habitants de la MNSN, que leur
potentiel de croissance est encore important.
Cette forte dynamique des effets de la demande locale sur l’emploi « domestique » de la
MNSN tient aussi au fait qu’elle dispose d’un niveau élevé de « présentialité ». Cette notion
nouvelle, développée au Ministère du Tourisme par l’équipe de Christophe Terrier (et qui a
fait l’objet d’une première présentation aux « Journées Méthodologiques de la Statistique »
organisées par l’Insee en Mars 2005) se distingue de la notion de résidentialité. La
« présence » mesure le nombre total de gens réellement présents sur un territoire (c.a.d. la
population y vivant, moins la partie de cette population qui en est absente un jour donné, plus
les Français et étrangers qui y résident temporairement). Les territoires productifs et riches ont
généralement la caractéristique à la fois d’attirer peu de touristes et de se vider de leurs
habitants plusieurs semaines par an (les Parisiens, qui certes habitent une ville très touristique,
passent 57 nuits par an à plus de 100 km de Paris !) : ce mécanisme provoque un important
déficit de demande locale, les locaux allant consommer ailleurs sans que cette absence soit
compensée par des consommateurs venus d’ailleurs. Les Yvelines, par exemple, ont un jour
minimum de présence, en 2003, avec l’équivalent de 70% de leur population et un jour
maximum avec 103%… La Loire-Atlantique est le deuxième département français pour la
faiblesse de l’écart entre le jour de plus faible et celui de plus forte présence sur son territoire
(entre 97% et 106%), les partants étant généralement remplacés par des visiteurs, ce qui
permet de garantir un niveau élevé et soutenu tout au long de l’année de consommation sur le
territoire.
La forte dynamique des emplois « domestiques », liés à la consommation locale, peu ou pas
exposés à la concurrence internationale (ou même interrégionale), souvent faiblement
qualifiés, stimule, on l’a dit, une insertion dans l’emploi que n’offrent pas les secteurs
« métropolitains » emblématiques (les « emplois métropolitains supérieurs »). Ce sont eux qui
constituent le meilleur barrage, sinon le barrage absolu, contre le chômage, l’exclusion et la
pauvreté. C’est un des éléments qui expliquent que la croissance de l’emploi de la métropole
ne procède pas, comme on l’observe dans les autres villes millionnaires (à l’exception de
Toulouse), d’une combinaison de création des emplois de cadres en même temps que de
20
destruction d’emplois d’ouvriers5 et employés, les uns « remplaçant » les autres… Dans la
MNSN, tous ces emplois progressent en même temps.
Une autre conséquence de la bonne transformation de la base économique en stimulation des
secteurs d’emplois répondant à la demande locale peut être lue dans la –relativement aux
autres métropoles- bonne maîtrise des phénomènes de pauvreté6. La MNSN , on l’a dit, est la
métropole millionnaire qui a le plus faible taux de sa population vivant en dessous du seuil de
pauvreté (11% en 2000, comme Lyon, contre 21% dans l’AU d’Aix-Marseille, 17% dans
celle de Lille, 16% dans celle de Nice et même 13% dans celle de Toulouse), et elle est dans
celles où le nombre de pauvres a le plus reculé durant la période de croissance
macroéconomique entre 1996 et 2000 (-8%, comme Toulouse et derrière Nice qui bénéficie
au moins sur son plan de sa mono-industrie résidentielle).
Dans le Rapport sur la Pauvreté 2003 - 2004, on7 a mesuré économétriquement la relation
entre formes de développement des territoires et pauvreté. La pauvreté et son évolution
apparaissent liées à la nature/structure des bases économiques locales: les économies
métropolitaines, productives privées sont plus riches et ont des taux de pauvreté souvent plus
faibles, mais en croissance plus rapide du fait de l’ajustement permanent de leurs économies
(effet d’éviction des actifs les moins qualifiés). Mais les territoires qui ont les meilleures
capacités de contrôle de la pauvreté sont ceux qui ont, en plus de la base privée, des bases
publiques et résidentielles significatives…. Le cas de la MNSN a cette particularité de
bénéficier à la fois, (i) plus que les autres de l’effet « richesse métropolitaine » (on a vu qu’en
dépit de revenus moyens un peu moins élevés que les autres métropoles, elle avait un taux de
pauvreté inférieur) et (ii) de la diversité de la structure de sa base économique lui permettant
une réduction plus rapide du nombre de ses pauvres en période d’embellie macroéconomique.
On observe donc dans la MNSN une forme de développement tout à la fois rapide,
diversifiée, combinant high et low tech., ce qui se traduit par des performances sociales que
lui envieraient la plupart des grandes métropoles françaises.
À base partagée, effets d’entraînement partagés entre les différents territoires de la MNSN
Une caractéristique marquante du développement métropolitain actuel, en France comme
dans la plupart des pays industriels est de générer des fractures sociales et spatiales. On a vu
que la structure de la base économique de la MNSN associée à sa forte « présentialité »
5
le concept statistique d’ « ouvrier » ne renvoie pas nécessairement, et de moins en moins, à des activités
industrielles ou manufacturières mais, et de plus en plus, à des activités de services (par exemple, les chauffeurs
sont des ouvriers…)
6
On a préféré retenir la pauvreté que le chômage, comme marqueur social, dans la mesure où le taux de
chômage est, particulièrement dans des territoires à fort solde migratoire, un faux ami pour le diagnostic : les
espaces les plus affectés sont souvent les plus dynamiques car ils attirent les chômeurs (Languedoc), alors que
les territoires « en panne » de développement les voient partir et ont des taux plus faibles que la moyenne (la
Lorraine). Le lecteur curieux retiendra qu’en 1999 la MNSN a le deuxième taux le plus bas de chômage par
rapport aux autres métropoles et qu’elle enregistre de très loin le plus faible taux de croissance de leur nombre
entre 1990 et 1999.
7
Davezies L. (2003) «Formes du développement territorial et pauvreté » – in Travaux de l'Observatoire
National de la pauvreté et de l'Exclusion 2003-2004.- Documentation Française - Paris - 2004
21
semblait permettre de meilleures performances sociales que chez la plupart de ses
homologues françaises. Mais la très forte croissance de sa population et de son emploi, les
effets globalement vertueux de son modèle économique, ont-ils été partagés entre toutes les
composantes territoriales qui constituent la MNSN ?
Là encore le modèle classique de la polarisation-fracture métropolitaine ne semble pas
s’appliquer, au contraire : toutes les composantes territoriales « y gagnent ».
On a procédé à un traitement des différentes variables du développement territorial pour un
découpage statistico-géographique de la MNSN en 14 territoires. On trouvera en annexe
l’ensemble des tableaux de chiffres et cartes rendant compte de ces analyses.
Carte 1 : zones d’étude de la MNSN
Comme on l’a vu, un grand nombre des territoires de la MNSN contribuent, avec leurs
avantages comparatifs, à sa base économique : le secteur basique privé, plus spécialisé autour
de Saint-Nazaire, de la périphérie nantaise, des zones de Clisson ou Ancenis, la base publique
plus centrée sur Nantes et la base résidentielle plus fortement présente sur le littoral. Cette
différenciation complémentaire des fonctions au sein de la métropole ne se fait pas au
bénéfice du centre de la MNSN, au contraire : si l’on regarde nos « emplois domestiques
purs », qui sont les marqueurs des emplois induits par la demande locale, ils se développent
plus rapidement à la « périphérie » qu’au centre de la MNSN.
22
Tableau 5 : Le dynamisme de l’emploi salarié privé des activités tournées vers les
ménages dans les zones d’étude de la MNSN – 1993-2002.
Emplois salarié privé domestique pur
In UU Nantes
In UU StNazaire
nantais-Nord
nantais-Sud
nantais-Est
Hors UUStNaz in AUStNaz
HORS AU POLE EMPLOI ESPACE RURAL (Sud)
MultipolArrdtStNaz
Hors AU Rural enclavé
In AU Ancenis
InAUClisson
MultipolUULaTurbale
MultipolArrdtCholet
HORS AU POLE EMPLOI ESPACE RURAL (Nord)
Métro NSN
Loire-Atlantique
Province
Ile de France
France
2002
35
8
2
1
1
1
1
1
1
57
61
2 366
630
2 997
598
950
370
918
347
873
616
115
321
251
034
512
206
411
522
694
971
845
816
² 1993-2002
8 047
2 424
573
600
357
227
495
345
65
320
211
62
89
206
14 021
14 574
400 216
66 719
466 935
² 1993-2002
29%
37%
32%
46%
36%
35%
44%
45%
25%
34%
26%
14%
76%
100%
32%
31%
20%
12%
18%
Note: les emplois « domestiques purs » sont un échantillon, conceptuellement homogène, des activités se
développant en fonction de la demande locale des ménages. Ils ne constituent pas la totalité, loin de là des
emplois domestiques (on a vu plus haut que l’emploi domestique pèse en gros la moitié de l’emploi salarié privé
de la MNSN).
Source : Unedic
L’unité urbaine de Saint Nazaire, qui est la zone la plus pénalisée en termes sociaux, est la
grande gagnante au jeu de la création nette d’emplois induit, avec une croissance de 37% de
ce type d’emplois. Sur les treize zones d’études, dix font mieux que l’unité urbaine de
Nantes ! On trouvera en annexe une analyse de corrélation montrant que la croissance des
emplois « domestiques purs » a été, dans nos 14 zones, inversement proportionnelle à leur
taux de couverture en début de période (et indifféremment à leur taux de croissance
démographique). On a donc affaire là à une répartition spatialement équilibrée, voire
équilibrante, de ces effets du développement territorial.
Plus généralement, si l’on analyse l’évolution de l’emploi salarié total, dont on a déjà dit
qu’elle plaçait la MNSN, avec Toulouse, en tête du peloton des métropoles millionnaires
françaises, on est frappé de constater que ce succès est partagé par l’intégralité des 14 zones
de la MNSN : pas une d’entre elles n’a un taux de croissance 1993-2002 de son emploi salarié
privé inférieur à celui de la Province ! Onze des treize zones d’études ont, de plus, un taux de
croissance de cet emploi supérieur à celui de l’unité urbaine de Nantes !
Autre signe frappant, et qui place la MNSN hors du schéma ségrégatif métropolitain
classique : on constate de nouveau une étroite corrélation, dans les 14 zones, entre la
croissance des cadres et celle des employés-ouvriers (dans le graphe 1 ci-dessous, l’Ile de
France représente l’idéaltype du modèle métropolitain que l’on retrouve dans les métropoles
millionnaires à l’exception, déjà mentionnée, de Toulouse –voir annexe-). Dit autrement, les
territoires qui comptent la plus grande part d’employés-ouvriers (leur part varie entre 62% et
78% selon les territoires d’étude) ne sont pas ceux où ils croissent le plus, ce qui rend compte
de la faiblesse des dynamiques d’approfondissement de la spécialisation sociale des territoires
23
de la MNSN (et qui constitue une des retombées les plus nettes d’un fonctionnement
métropolitain classique).
Graphe 1 : Croissances respectives des cadres et des employés-ouvriers dans les 14 zones
d’étude de la MNSN – 1990-1999
90,0%
80,0%
² actifs cadres et prof inte.
Sup. 1990-99
70,0%
60,0%
50,0%
40,0%
30,0%
MNSN
20,0%
Ile de France
-10,0%
10,0%
0,0%
-5,0%
0,0%
-10,0%
-20,0%
y = 2,327x + 0,0031
Province
R2 = 0,5342
France
5,0%
10,0%
15,0%
20,0%
25,0%
² actifs ouvriers & employés 1990-99
Source : calculs d’après Insee
Cartes 2 : Composition sociale et son évolution dans les zones d’étude de la MNSN – Les
cas des cadres et employés-ouvriers. 1990-1999
Un autre effet du modèle de développement de la MNSN se lit dans l’évolution de la pauvreté
au sein de ses territoires. On a vu que la MNSN, globalement, avait plutôt moins de pauvres
que les autres métropoles et avait une bonne capacité à en réduire le nombre en période de
24
croissance. L’analyse des 14 zones d’études rend compte du fait que de façon générale, la
pauvreté s’est réduite plus rapidement là où elle était déjà le plus présente (graphe 2). L’unité
urbaine de Saint-Nazaire constitue une exception relative à ce mécanisme, avec un taux de
pauvreté record au sein de la MNSN en 2000 (14,5% de la population de moins de 65 ans)
alors qu’elle n’était qu’en troisième position en 1996, avec un taux de 15,1%, derrière le
« pôle d’emploi de l’espace rural- sud » (16,1%) et l’unité urbaine de Nantes (15,4%). Le
nombre de pauvres s’y est certes réduit de 4% (soit 700 personnes) entre 1996 et 2000, mais
deux fois moins vite que dans l’ensemble de la MNSN. On peut lire ce relatif décrochage de
l’unité urbaine de Saint-Nazaire, contrastant avec sa dynamique de création d’emplois induits
évoquée plus haut, comme le reflet d’une certaine disjonction entre ses dynamiques d’emploi
et ses dynamiques de peuplement (les emplois créés ne bénéficiant pas forcément à ses actifs).
On y observe un mécanisme analogue dans le haut du tableau des PCS, avec une croissance
des emplois de cadres plus importante que la croissance des cadres dans les actifs résidant à
Saint Nazaire…
Cartes 3 : taux de pauvres dans la population de moins de 65 ans en 2000 et évolution du
nombre de pauvres entre 1996 et 2000 dans les zones d’étude de la MNSN.
Source : Cnaf
Graphe 2 : Mise en relation entre le taux de pauvreté 1996 (abcisse) et le taux de
variation du nombre de pauvres 1996-2000 (ordonnée). Zones d’études de la MNSN
10,0%
5,0%
y = -0,2085x - 0,0512
In AU Ancenis
2
R = 0,0062
Hors AU Rural enclavé
nantais-Sud
Ile de France
0,0%
5,0%
7,0%
9,0%
-5,0%
11,0%
13,0%
France
In AU Ancenis
MNSN
-10,0%
15,0%
Province
17,0%
UU St Nazaire
UU nantes
-15,0%
Hors Au Pole Emploi Espace Rural (Sud)
-20,0%
InAUClisson
Source : Cnaf
25
Le revenu des ménages constitue le dernier des « fondamentaux » du développement
territorial. On observe là encore un mécanisme frappant de rééquilibrage entre les différentes
zones de la MNSN, à l’inverse de ce que l’on peut voir dans les métropoles françaises : dans
chacune des 13 zones d’études, le revenu par habitant a cru plus vite que dans l’unité urbaine
de Nantes. De façon générale, le revenu par habitant a augmenté d’autant plus vite que le
revenu par habitant en début de période était faible. Le coefficient de corrélation de la
régression est faible parce qu’échappent à ce modèle trois petites zones d’étude qui associent
revenus élevés et fort taux de sa croissance : les communes de la MNSN faisant partie de
l’aire urbaine de Clisson, la zone de la Turbale et le pôle d’emploi rural littoral au sud de
l’estuaire. L’unité urbaine de Nantes, dont le revenu par habitant est en 1990 de 15%
supérieur à la moyenne de la MNSN ne l’est plus que de 10% en 2000, avec une croissance de
son revenu par habitant qui n’est qu’égale à la moyenne nationale. De façon générale, les
inégalités de revenu entre les 14 zones décroissent nettement, avec un coefficient de variation
du revenu qui passe de 0,15 à 0,13 durant la décennie. Il s’agit là, répétons-le, d’une
dynamique singulière et qui est à l’inverse de ce que l’on observe dans les « vraies »
métropoles françaises.
Graphe 3 : Mise en relation entre le revenu par habitant 1990 (abscisse) et le taux de
variation de ce revenu 1990-2000 (ordonnée). Zones d’études de la MNSN
40%
35%
² rev/hab 19902000 (euros
constants)
y = -1E-05x + 0,3243
2
R = 0,0203
30%
25%
20%
MNS
15%
Province
10%
France
Rev/hab 1990 (euro 2000)
5%
6 000
Ile de France
7 000
8 000
Coefficient de variation rev/hab
9 000
1990
0,152
10 000
1995
0,142
11 000
1998
0,136
12 000
2000
0,134
Note 1: La zone « in AU Clisson » n’apparaît pas dans le graphe. Son rev/hab 1990 est de 8 369 euros et son tx
de variation 40%. Cette zone est comptée dans le calcul de régression.
Note 2: les coef. de variation sont non-pondérés par la population
Source : Dgi
La MNSN est donc un territoire qui associe forte croissance économique, progrès social et
gains de cohésion territoriale. La question s’est posée de savoir si son organisation territoriale
avait tendance à accompagner ou à contrarier ce mouvement. Dans des analyses récentes
menées pour le compte du Ministère de l’Intérieur, sur les effets de la mise en
intercommunalité dans les villes françaises, on a souligné le risque de fragmentation que
26
faisaient courir les « mariages endogamiques » que l’on observe un peu partout en France : les
communes riches se mariant avec les communes riches et limitant par là les mécanismes de
partage et de mutualisation liés aux politiques locales. Une façon d’évaluer la situation au sein
de la MNSN a consisté à comparer les inégalités de potentiel fiscal8 entre les 14 zones
statistico-géographiques et entre les 22 EPCI –politico-administratifs- qui concernent la
MNSN. Le graphe 4 rend compte de cet exercice. En règle générale, plus un territoire est
fragmenté, plus les inégalités sont fortes. Le passage de 14 à 22 zones devrait donc
mécaniquement se traduire par un écartement de la courbe par rapport à la diagonale du
graphe. On observe l’inverse. La courbe définie par les 22 EPCI rend compte d’une plus
grande égalité entre les zones politiques que ne le fait la zone rendant compte, de façon
neutre, de la réalité statistico-géographique des composantes de la MNSN. Une dynamique
inverse se serait traduite par le fait que les communes les plus richement dotées auraient pu se
regrouper dans des clubs fermés sur la base d’une homogénéité de situation, faisant diverger
la courbe des EPCI en dessous de celle des territoires statistiques (la part du potentiel fiscal de
la MNSN bénéficiant aux EPCI les plus pauvres se réduisant, celle bénéficiant aux plus
riches augmentant). On peut donc considérer qu’au sein d’un territoire où demeurent certes
des inégalités de potentiel fiscal entre les différentes zones, l’organisation politique des
intercommunalités a plutôt été dans le sens de gains de cohésion que l’inverse (comme on
l’observe dans de nombreuses aires urbaines).
Graphe 4 : Courbes de concentration du potentiel fiscal 2001. 14 Zones d’études de la
MNSN et 22 EPCI de la MNSN
Part du
potentiel fiscal 100%
de la MNSN 2001
80%
60%
40%
20%
0%
0%
20%
40%
60%
80%
Poids des zones de MNSN dans sa population,
triées par ordre croissant de revenu / hab 2000
100%
Potentiel fiscal Stat
Potentiel fiscal Epci
Source : calculs d’après Insee et Dgi
Pour conclure…
L’analyse présentée ici permet de dégager un certain nombre de conclusions robustes sur la
nature et les effets du modèle de développement de la MNSN. Sous pratiquement tous ses
aspects économiques et sociaux, la MNSN apparaît différente de ce qu’est aujourd’hui une
8
le potentiel fiscal est le revenu fiscal que toucheraient les communes si elles appliquaient les mêmes taux à
chacune d’entre elles. Il s’agit donc d’une mesure synthétique de la richesse de la base de l’ensemble des taxes.
27
métropole française. De façon générale, la MNSN marque sa différence, et elle la marque
positivement : une forte dynamique de tous ses « fondamentaux », particulièrement si on la
compare avec les autres villes millionnaires françaises, sans pour autant en payer le prix en
termes de fragmentation sociale et territoriale, au contraire. La plupart des indicateurs
marquent une forte solidarité de développement de la MNSN, c’est-à-dire son renforcement
comme ensemble socio-économique.
La question est maintenant de savoir si la MNSN a aujourd’hui mangé son pain blanc ou si les
résultats d’aujourd’hui prédisent ceux de demain… Sommes nous face à une forme
développement « pré-métroplitaine » ou « alter-métropolitaine » ? La MNSN est-elle en
retard –et les plaies de la métropolisation sont encore à venir- ou en avance dans un modèle
de développement territorial équilibré que pourront lui envier les métropoles « à la papa » ?
Il est difficile de répondre avec sûreté à ces questions. On peut cependant avancer un certain
nombre d’arguments s’appuyant sur des faits avérés. Il est certes difficile de prévoir ce que
sera demain l’activité basique privée de la MNSN : l’emploi dans le secteur naval, par
exemple, depuis longtemps condamné continue à se développer dans des créneaux de
spécialisation assurant un avantage comparatif à la métropole dans le domaine des industries
tournées vers la mer. La transformation vers des activités dérivées, telles celles liées à
l’aéronautique s’est effectuée au bénéfice des deux aires urbaine de Saint-Nazaire et Nantes.
Les activités de machinerie, agro-alimentaires, de transformation des plastiques, de
chaudronnerie, de textile même, ont continué à se développer ces dernières années sur
différents secteurs de la MNSN en dépit des bouleversements majeurs que connaissaient ces
secteurs ailleurs en France. Les activités de services supérieurs (conseils en systèmes
informatiques, réalisation de logiciels) explosent dans le même temps. Tous ces faits rendent
compte d’un fort dynamisme industriel (au sens large) de la MNSN. Quant à l’avenir, ce n’est
pas une affaire de divination mais d’efforts des acteurs locaux, publics et privés, pour
maintenir et améliorer un environnement déjà attractif pour les entreprises grandes et petites.
On l’a vu, la MNSN est aujourd’hui dans les championnes françaises de la croissance des
chefs d’entreprise. Par ailleurs, sa forte dynamique démographique et son attractivité
résidentielle à l’égard des jeunes actifs lui permettent de disposer d’un marché de l’emploi
très attractif pour des grandes entreprises qui se heurteront de façon croissante, déjà
aujourd’hui et plus encore dans un avenir proche, à une pénurie de main-d’œuvre en France.
(Le fait, que l’on a souligné, que 10% des cadres résidant dans la MNSN n’y travaillent pas
doit être lu comme un élément significatif du potentiel d’ores et déjà acquis de développement
d’activités de haute valeur ajoutée). L’attractivité résidentielle et touristique, la forte
« présentialité » offrent à la MNSN des facteurs précieux de son progrès ultérieur dans le
domaine productif tout en permettant d’associer le plus grand nombre au développement de la
zone.
La cohésion étonnante dont jouit la MNSN (comparée aux autres métropoles) constitue en
effet un de ses atouts majeurs et un des éléments-clefs de son attractivité pour le capital
comme pour la main-d’œuvre. Cette cohésion tient au fait qu’un large spectre d’activités se
développe parallèlement : industries, services supérieurs, recherche, emplois publics, emplois
touristiques et emplois « induits », … du très high au très low tech., ce qui permet d’offrir un
large spectre d’emplois à des actifs dont la structure de qualification n’est pas plus favorable –
et même plutôt moins- que dans les autres métropoles. Et cette cohésion provient de la co28
existence singulière de trois larges flux monétaires de son développement : l’argent de la
compétitivité, celui du secteur public et celui des résidants non actifs (touristes et retraités) se
partagent les différents canaux permettant d’irriguer largement les différentes composantes
sociales et spatiales de la MNSN. En bref, l’avantage comparatif économique de la MNSN
tient globalement à une capacité d’attraction liée à sa diversification fonctionnelle
(productivo-résidentielle), elle-même génératrice d’une cohésion sociale et territoriale qui
joue à son tour le rôle d’un turbo dans l’attractivité de ce territoire.
Les acteurs locaux français ont souvent tendance à penser que la « mondialisation » de la
production les réduit au statut de badauds de l’évolution voire de la « fracture » de leurs
territoires. Les éléments réunis ici visent à montrer qu’il n’en est rien. Les moteurs actuels -et
plus encore futurs- de la croissance locale résident dans la préservation et fabrication d’un
environnement permettant à la fois d’attirer des facteurs de production modernes (capital et
travail), de retenir et de porter les projets productifs locaux, mais aussi de préserver le
véritable capital que constituent des équilibres sociaux et territoriaux eux-mêmes dépendant,
comme on l’a vu, de la diversité des spécialisations territoriales et de la qualité du cadre de
vie.
Limiter les inconvénients de la métropolisation tout en maximisant ses avantages constitue
une piste d’action dans laquelle la MNSN est déjà largement engagée, sans qu’elle en soit
peut-être très consciente ni qu’elle l’ait modélisée explicitement dans ses actions publiques.
C’est à un tel exercice que doit s’attaquer le SCOT de la métropole Nantes-Saint Nazaire, qui
doit inscrire dans les politiques et dans les choix d’aménagement les mesures permettant de
minimiser les risques de surchauffe (urbanisation, coûts fonciers/immobiliers,…), d’arbitrer
dans les concurrences d’usage du sol entre spécialisations territoriales, de développer les
infrastructures permettant une meilleure intégration/fluidité du modèle de développement de
la MNSN, d’assurer un équilibre entre fonctions productives et fonctions « reproductives9 »
simples et élargies (culture, service public d’éducation, université et recherche…), et un
ménagement de la rente résidentielle de son territoire (qui comme toutes les rentes se
consomme plus qu’elle ne se reproduit).
9
… pour reprendre la terminologie de Beckouche et Damette à propos des fonctions urbaines (« grille
STRATES »).
29
__________________________________________________________________________
III Annexe 1 : Le découpage du territoire
__________________________________________________________________________
Le périmètre d’étude de la métropole Nantes Saint-Nazaire
Le territoire d’étude pour l’intervention de Laurent Davezies a été composé de la façon
suivante :
A la base, les aires urbaines de Nantes et de Saint-Nazaire, celles d’Ancenis et de
Clisson ainsi que les communes multipolarisées s’y rattachant. Cet ensemble constitue
pour l’INSEE l’ensemble urbain Nantes Saint-Nazaire.
Ont été rajouté les territoires suivants :
Les pôles d’emploi de Pornic et Saint-Brévin ainsi que les communes de l’espace rural
interstitiel entre ces pôles et l’aire urbaine de Nantes (c.a.d le pays de Retz)
- Le pôle d’emploi de Blain, constitué de la seule commune de Blain.
-
Population (99)
Nombre d’emplois (99)
: 1 024 075
: 410 000
Cet espace informel n’a d’autre vocation que de représenter une base d’étude, plus proche de
la réalité économique que le découpage institutionnel. Mais il est aussi discutable, en tout cas
dans ses marges, sans que cela ne remette en cause les grandes données économiques qui s’y
rattachent.
Ensuite ce territoire a été lui-même subdivisé aux fins de l’étude de la façon suivante :
-
L’aire urbaine de Nantes
● l’unité urbaine de Nantes
Haute-Goulaine
Basse-Goulaine
Bouguenais
Carquefou
La Chapelle-sur-Erdre
Couëron
Indre
La Montagne
Nantes
Orvault
Le Pellerin
Rezé
Sainte-Luce-sur-Loire
Saint-Herblain
Saint-Jean-de-Boiseau
Saint-Sébastien-sur-Loire
Sautron
30
Les Sorinières
Thouaré-sur-Loire
Vertou
● les communes à l’Est de l’unité urbaine
Barbechat
La Chapelle-Basse-Mer
La Chapelle-Heulin
La Haie-Fouassière
Le Landreau
Le Loroux-Bottereau
Le Pallet
La Remaudière
Saint-Julien-de-Concelles
La Varenne
Mouzillon
Vallet
● les communes au Nord de l’unité urbaine
Bouée
Casson
Le Cellier
Cordemais
Couffé
Fay-de-Bretagne
Grandchamps-des-Fontaines
Héric
Joué-sur-Erdre
Ligné
Malville
Mauves-sur-Loire
Mouzeil
Nort-sur-Erdre
Notre-Dame-des-Landes
Petit-Mars
Saffré
Saint-Étienne-de-Montluc
Saint-Mars-du-Désert
Sucé-sur-Erdre
Le Temple-de-Bretagne
Les Touches
Trans-sur-Erdre
Treillières
Vigneux-de-Bretagne
La Chevallerais
31
Oudon
Teillé
● les communes au Sud de l’unité urbaine
Aigrefeuille-sur-Maine
Le Bignon
Bouaye
Brains
Château-Thébaud
Cheix-en-Retz
La Chevrolière
La Limouzinière
Maisdon-sur-Sèvre
Monnières
Montbert
Pont-Saint-Martin
Port-Saint-Père
Remouillé
Rouans
Saint-Aignan-Grandlieu
Saint-Colomban
Saint-Fiacre-sur-Maine
Saint-Hilaire-de-Chaléons
Saint-Léger-les-Vignes
Saint-Lumine-de-Coutais
Saint-Mars-de-Coutais
Sainte-Pazanne
Saint-Philbert-de-GrandLieu
Vue
Geneston
Saint-Hilaire-de-Clisson
Saint-Lumine-de-Clisson
-
L’aire urbaine de Saint-Nazaire
● l’unité urbaine de Saint-Nazaire
Batz-sur-Mer
La Baule-Escoublac
Le Croisic
Guérande
Le Pouliguen
Donges
Montoir-de-Bretagne
32
Pornichet
Saint-Nazaire
Trignac
● les communes hors unité urbaine
Assérac
Herbignac
Saint-Lyphard
Saint-Molf
Besné
La Chapelle-des-Marais
Saint-André-des-Eaux
Missillac
Crossac
Sainte-Reine-de-Bretagne
Prinquiau
Saint-Joachim
Saint-Malo-de-Guersac
Férel
-
Les communes multipolarisées
● par Nantes et Ancenis
Champtoceaux
Drain
Liré
● par Nantes et Saint-Nazaire (Est)
Bouvron
Drefféac
Sainte-Anne-sur-Brivet
Campbon
Lavau-sur-Loire
Quilly
Pontchâteau
La Chapelle-Launay
Savenay
● par Nantes et Saint-Nazaire (Ouest)
Mesquer
Piriac-sur-Mer
La Turballe
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-
L’aire urbaine d’Ancenis
Ancenis
Saint-Géréon
Anetz
Mésanger
Pouillé-les-Côteaux
La Roche-Blanche
Saint-Herblon
-
L’aire urbaine de Clisson
Clisson
Gétigné
Gorges
Cugand
La Bernardière
-
Le pôle d’emploi de Blain
Blain
-
Les pôles d’emploi de Saint-Brévin et Pornic
La Plaine-sur-Mer
Pornic
Préfailles
Saint-Michel Chef-Chef
Saint-Brévin-les-Pins
-
Les communes de l’espace rural enclavé
Chéméré
Arthon-en-Retz
Chauvé
Corsept
Frossay
Saint-Père-en-Retz
Saint-Viaud
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