paris school of international affairs - l`Association des Sciences-Po

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GHASSAN SALAMÉ : « PARIS SCHOOL
OF INTERNATIONAL AFFAIRS, UNE
ÉCOLE À VOCATION INTERNATIONALE »
Créée en septembre 2010, la Paris School of International Affairs (PSIA) s’est donné pour ambition de
rivaliser avec les grandes écoles d’affaires internationales dans le monde. À quelques mois de la première
diplômation de PSIA, nous avons rencontré son doyen, Ghassan Salamé, ancien ministre de la Culture au
Liban, ancien conseiller auprès du secrétaire général de l’ONU, ainsi que cinq étudiants et diplômés de l’école.
Propos recueillis par Pierre Meynard (SP 72) et Daniel Hoffman (M 11)
Quelles sont les origines de la Paris School
of International Affairs ?
Le premier facteur, c’est la prise en compte de la réalité de la
mondialisation. Aujourd’hui, Sciences Po doit non seulement
intégrer ce processus dans son curriculum, mais également préparer ses étudiants à s’insérer sur un marché du travail mondialisé. Cela demande des compétences professionnelles et une
formation académique particulières. À ce niveau, notre réflexion
part de l’aval. La mondialisation tue ou marginalise certaines
catégories de travail, mais elle en crée d’autres. Son impact est
parfois négatif avec la fermeture d’usines, la délocalisation ou
la nomadisation des capitaux, mais il peut être positif. Avec la
mondialisation, de nouveaux genres de travail ont émergé. Ensuite,
il y a une raison liée au fonctionnement des grandes universités de sciences sociales dans le monde, ce que Sciences Po a décidé
d’être il y a une quinzaine d’années. Ces universités sont organisées en écoles, au niveau des études de masters. Cela vaut depuis
longtemps aux États-Unis, mais aussi dans plusieurs pays européens, en Chine, à Singapour ou en Corée du Sud. C’est un standard international sur lequel nous nous alignons. La dernière
raison est interne. Sciences Po s’est beaucoup agrandi. Quand
j’ai rejoint l’institution il y a un quart de siècle, c’était une maison de 3 000 étudiants, qui pouvait être dirigée comme une PME.
Aujourd’hui, avec près de 10 000 étudiants, des campus hors les
murs, des accords d’échanges internationaux extrêmement lourds
et une visibilité qui dépasse de loin l’Hexagone, Sciences Po a
besoin de structures intermédiaires de gouvernance.
Certaines universités étrangères vous ont-elles
plus inspiré que d’autres ?
Ayant moi-même enseigné en France et à l’étranger, je suis bien
entendu allé voir comment les choses étaient mises en place ail-
leurs. Mais nous avons avant tout voulu créer un modèle sui generis. Celui-ci prend en considération certaines traditions de
Sciences Po, comme le tronc commun et le stage professionnel, tout en s’inspirant des campus étrangers pour les neuf cours
obligatoires de master. Nous avons aussi établi une nouveauté :
la nécessité de prendre deux mineures, régionale et thématique.
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Cette innovation est celle qui, aujourd’hui, passionne le plus mes
collègues outre-Atlantique. Un groupe d’études s’est d’ailleurs
constitué à Columbia University pour tenter d’adopter notre
solution. Je suis très fier de cela.
donc construit nos masters en fonction de ces problèmes et
non selon une tradition intellectuelle, aussi respectable soit-elle.
C’est pourquoi nous parlons d’affaires internationales plutôt que
de relations internationales.
Comment distinguer les « affaires internationales »
des « relations internationales » ?
L’enseignement des relations internationales en France s’est développé au cours des trente dernières années. Avec mes collègues,
nous avons tout fait pour que cette discipline tienne la comparaison au niveau mondial. Mais en réalité, nous faisons peu de
relations internationales à PSIA. Notre logique est la suivante :
il y a des problèmes qui ne peuvent plus être réglés au niveau
de l’État-nation. L’environnement, les migrations, la prolifération nucléaire, la santé globale, le développement des épidémies,
la résolution des conflits : voilà des questions dont le diagnostic et la solution sont nécessairement mondiaux. Nous avons
La multiplication des sujets internationaux va t-elle
vous conduire à l’ouverture de nouveaux masters ?
Nous avons déjà 30 programmes (9 masters et 21 programmes
de concentrations) sans compter les doubles diplômes. Notre
offre est l’une des plus riches et diversifiées du monde.
Au fond, tout dépend du marché du travail. Prenez les migrations : c’est un sujet international, mais peut-on placer suffisamment d’étudiants dans ce domaine ? J’ai des doutes. C’est
pourquoi nous avons créé une mineure et non un master sur
les migrations. J’hésite encore sur la question de la santé globale.
Cela étant, nos étudiants sont mieux équipés qu’auparavant. Avec
les combinaisons master/mineures, aucun diplôme ne ressemble à un autre et les profils sont très marqués étudiant par étudiant. On n’envoie pas de clones sur le marché du travail.
> Ghassan Salamé
Professeur des universités à l’Institut d’études politiques de Paris
(Sciences Po) et directeur de l’École des affaires internationales
de Sciences Po, Ghassan Salamé est né au Liban en 1951.
Titulaire d’un doctorat en lettres, d’un doctorat en sciences
politiques et d’un diplôme d’études approfondies en droit
international, sa carrière universitaire l’a conduit à l’université
Saint-Joseph de Beyrouth (1978-1985), à The American University
of Beirut (1982-1985), à l’université Paris-I (1985-87), puis au CNRS
(1986-2004), à Sciences Po (depuis 1987) et Columbia (depuis
2008).
De 2000 à 2003, il a été ministre de la Culture de la République
libanaise et président du Comité d’organisation du Sommet
arabe (mars 2002) et du Sommet de la francophonie (octobre
2002). Il a ensuite été nommé conseiller politique de la mission
de l’ONU à Bagdad (juin-octobre 2003) puis conseiller spécial du
secrétaire général de l’ONU (2003-2006).
Il est à présent membre du conseil d’administration de The
International Crisis Group (Bruxelles), de The International Peace
Institute (New York), de The Open Society Foundations (New
York), de The Center for Conflict Resolution (New York), de The
Centre for Humanitarian Dialogue (Genève), de l’Institut français
(Paris) et de plusieurs autres ONG. Il préside l’Arab Fund for Arts
and Culture.
Ghassan Salamé est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages dont
Quand l’Amérique refait le monde (Fayard, 2005), Appels
d’empire. Ingérences et résistances à l’âge de la mondialisation
(Fayard, 1996), Démocraties sans démocrates. Politiques
d’ouverture dans le monde musulman (Fayard, 1994), tous traduits
dans plusieurs langues. Ses contributions ont paru dans Foreign
Policy, The Middle East Journal, La Revue française de science
politique, Politique étrangère et d’autres périodiques.
Il est chevalier de la Légion d’honneur. Il a obtenu la médaille
Vermeil de l’Académie française pour l’ensemble de son œuvre.
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Y a-t-il des problèmes de débouchés ?
Cette école bat tous les records de Sciences Po en matière de
demande. Les chiffres sont en augmentation de 20 % par rapport à l’année dernière. Avec 1 350 étudiants, nous sommes dans
le peloton des cinq plus grosses écoles similaires dans le monde.
Cet intérêt international a deux conséquences évidentes : un
choix beaucoup plus sélectif dans nos admissions et une internationalisation croissante. Avec 70 % d’étudiants étrangers, nous
sommes très au-dessus de la moyenne de Sciences Po. Pour garder un certain équilibre, nous ne souhaitons pas dépasser les
75 %. La question du placement était gérable avec des promotions de 100 étudiants. Mais avec des promotions de 650 étudiants, c’est un autre défi. Nous devons également tout le temps
penser à un placement sur le marché global et non local, ce qui
exige des compétences beaucoup plus larges en matière de placement.
Quels sont les grands secteurs de placement ?
Tout ce qui est tourné vers l’international : les organisations mondiales, les ONG, les entreprises dont l’actionnariat et les activités sont de nature globale et les gouvernements nationaux dans
les métiers à dominante internationale. Nos étudiants viennent
de 100 pays et vont se placer à travers les continents. Je sais qu’ils
ont reçu une formation professionnalisante d’excellence à PSIA,
les premiers diplômés le seront en juin prochain.
Le choix d’enseigner en anglais a beaucoup fait parler.
Pourquoi avoir pris un tel pari ?
Ma mission était d’entrer dans la compétition internationale.
Il me fallait donc casser le vivier franco-français et francophone.
Pour accueillir des étudiants américains, canadiens, australiens,
sud-africains, nigérians, chinois, brésiliens ou indiens, il était
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nécessaire de passer à l’anglais. Mais la pire des choses aurait été
de faire un itinéraire anglophone, c’est-à-dire une espèce de
« master appauvri ». Est-ce que le français a été enterré ? Pas du
tout ! Le pari était que les étudiants non francophones, une
fois arrivés à Paris, voient dans l’apprentissage du français une
vraie plus-value. Je peux vous dire que tous les étudiants monolingues anglophones inscrits à PSIA ont demandé à apprendre
le français. Ce modèle d’une francophonie conquérante encourage les étrangers à améliorer leur niveau de langue pour prendre des cours en français, qui représentent un tiers de l’enseignement. Et sans PSIA, peut-être n’auraient-ils pas appris le
français, ni été exposés à la vision française des affaires internationales.
L’année 2011 fut riche en événements internationaux.
Cela a-t-il eu une influence sur votre école ?
Le curriculum doit être immune par rapport à l’actualité. Il ne
doit pas s’ajuster au dernier journal de France Info ! Les professeurs qui enseignent la résolution des conflits et la médiation
sont des personnes comme Jean Arnault, un des plus grands
fonctionnaires de l’ONU, Lakhdar Brahimi, un ancien secrétaire général adjoint des Nations unies, Alvaro de Soto, qui a
mené les négociations de paix au Salvador, ou Miguel Ángel
Moratinos, l’envoyé spécial de l’Union européenne au ProcheOrient pendant neuf ans. Rony Brauman est le conseiller scientifique pour le master Droit de l’homme et Action humani-
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taire ; parallèlement Jean David Levitte rejoindra bientôt le corps
professoral de PSIA. Avec de tels piliers, on ne change pas
l’enseignement au gré des événements internationaux. En
revanche, les professeurs sont libres de commenter l’actualité.
D’autre part, nous organisons de nombreux événements extracurrriculaires réservés à nos étudiants : des journées sur la Libye,
la Syrie ou la Chine, la venue de Kofi Annan, de David Petraeus,
d’Alain Juppé ou encore une conférence avec deux gouverneurs
d’Afghanistan.
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Avec les combinaisons master/mineures,
aucun diplôme ne ressemble à un autre et les profils
sont très marqués étudiant par étudiant.
Comment faire pour améliorer
les relations avec les alumni ?
Avec la création de PSIA, nous sommes dans une situation nouvelle liée à l’internationalisation du corps étudiant. Votre association peut jouer un rôle crucial. Nous devons interagir pour
vous décrire le profil de nos diplômés et garder contact avec
eux aux quatre coins du monde et dans la diversité de leurs futures
professions. Pour que nos étudiants conservent le meilleur souvenir de leur passage à Sciences Po, nous devons investir encore
plus de moyens humains, matériels et immobiliers. Ghassan Salamé et Pierre Meynard
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LES VISAGES DE L’ÉCOLE DES AFFAIRES
INTERNATIONALES
Les 1 300 étudiants passés par PSIA appartiennent à plus de 100 nationalités différentes. Petit florilège.
Par Daniel Hoffman (M 11) et Anaïs Llobet (M 11)
Constance Schéré
Timothy Gallagher
> 23 ans, Franco-américaine,
1re année de l’École des affaires internationales
en Environmental Policy
> 30 ans, Américain,
Expatriée au États-Unis dès le plus jeune âge, Constance a
poursuivi sa scolarité sur les deux rives de l’Atlantique, entre
sa Bretagne natale et la ville de Boston. Après l’obtention
d’un bac international, elle intègre la University of
Massachussetts Lowell, dont elle sort diplômée en mai 2011.
Constance, qui ressentait le besoin d’étudier en France, s’est
alors orientée vers le master Affaires publiques de Sciences
Po. « C’était une erreur de casting, reconnaît-elle. Il s’agit
d’un master franco-français pour les gens qui veulent préparer
l’ÉNA. Ce qui n’est absolument pas mon cas. »
En découvrant le programme de PSIA, Constance a compris
qu’il lui convenait bien mieux. « D’abord, il n’y a pas ce
modèle en deux parties, deux sous-parties, qui n’a pas
beaucoup de sens pour moi, décrit-elle. J’avais du mal à
m’exprimer comme je le souhaitais avec de telles contraintes. »
Depuis qu’elle a rejoint l’École des affaires internationales au
second semestre, la
jeune francoaméricaine se réjouit
de l’enseignement et
des conditions de
travail. « Les
professeurs sont très
compréhensifs, ils
n’ont pas de méthode
préconçue. C’est
facile de s’adapter,
quel que soit le
système dont on est
issu. »
Au prochain
semestre, Constance aimerait trouver un stage dans un
ministère lié aux thématiques environnementales. Elle
recherche en priorité aux États-Unis, où elle a l’intention de
travailler plus tard, mais n’est pas fermée à des opportunités
en France.
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2e année de l’École des
affaires internationales
en International Security
Après être sorti diplômé de
la prestigieuse académie
navale d’Annapolis, “Tim”
Gallagher a intégré le corps
de la marine américaine.
Il y a servi comme pilote de
l’air avec des déploiements
dans de nombreux pays,
dont l’Irak.
Parrainé par la Olmsted Foundation, qui permet à des
officiers en fonction d’étudier à l’étranger pendant deux ans,
il a rejoint PSIA en 2009.
« Ce programme me donne l’opportunité de réfléchir, de
prendre une pause dans une carrière concentrée sur la tactique
et les affaires militaires, estime Tim. Voir les choses de façon
plus globale, plus académique est aussi une bonne façon de
me préparer pour le commandement majeur. »
Le stage hors les murs, qu’il a réalisé à l’école militaire, fut
l’expérience la plus marquante de son master. « Avoir une
nouvelle perspective sur l’armée s’est avéré essentiel pour mon
développement personnel. Un des grands avantages de
Sciences Po, c’est de savoir intégrer les étrangers dans la
société française. »
À quelques mois de regagner les États-Unis, où il sera
chef d’escadron à la base navale de San Diego (avant un
probable départ pour l’Afghanistan), Tim s’avoue tiraillé.
« Je suis prêt à partir, car j’ai envie de rejoindre mes amis et de
servir mon pays. En même temps, j’exerce un métier où il y a
très peu de temps pour faire le point. Je suis père de famille :
Paris serait le cadre idéal pour voir grandir mes enfants. »
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Dina Manitra
> 23 ans, Franco-malgache,
diplômée en 2011 de l’École des affaires
internationales en International Economic Policy
Dina Manitra travaille
aujourd’hui comme analyste
à la Société financière
internationale (IFC),
institution de la Banque
mondiale chargée de
financer le secteur privé
dans les pays en
développement. « Sur le
papier, ça peut faire rêver,
mais cela relève du miracle :
habituellement, IFC
privilégie des profils avec
une solide formation en finance », explique avec modestie la
jeune Franco-malgache. « Mais ma formation à l’École des
affaires internationales m’a appris à analyser et c’est cela qui
a fait la différence avec mes concurrents. »
Un atout renforcé par six mois de stage à Proparco, filiale de
l’Agence française du développement. « Grâce au système
pédagogique de Sciences Po, j’ai pu coupler une formation de
qualité à une expérience professionnelle », souligne Dina qui
vit aujourd’hui à Nairobi, au Kenya.
Nicolas Thébault
> 26 ans, Franco-néo-zélandais,
diplômé en 2011 de l’École des affaires
internationales en International Security
Conserver un lien avec Sciences Po est essentiel pour Nicolas.
Depuis un an, il organise des pots de l’amitié entre militaires
français et américains, anciens du master Sécurité
internationale. « Ce sont des réunions mensuelles, plus ou
moins informelles, explique le jeune diplômé. Cela me permet
de garder un lien avec le
monde de la défense, qui
m’a toujours fasciné. »
De son master, il a surtout
retenu l’aspect extrêmement
concret et pratique. « Je
prenais un cours sur
l’antiterrorisme, dont le
professeur était un ancien
policier français. Dans la
salle, il y avait un officier
belge, un marine américain
et un spécialiste australien
des questions
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antiterroristes, se souvient-il. Les débats étaient à la fois
tendus et passionnés. Après les cours, on continuait la
discussion au café Le Basile. C’était fascinant. »
Aujourd’hui, responsable marketing chez le constructeur
naval DCNS, Nicolas se veut très optimiste quant aux
débouchés. « J’ai été contacté par mon employeur quand
j’étais encore à Sciences Po. Le fait que de grandes entreprises
montrent un tel intérêt avant même qu’on soit diplômé est un
vrai message d’espoir pour les étudiants. »
Sébastien Turbot
> Français, alumni de Sciences Po (promotion 2011)
et enseignant à l’École des affaires internationales
Issu d’un master de
recherche en Affaires
internationales à Sciences
Po, Sébastien Turbot rend
son mémoire début
septembre 2001. Quelques
jours après, le monde entier
regarde avec effroi deux
avions percuter les deux
tours du World Trade
Center. Pour Sébastien
Turbot, alors membre de
l’ONG Afghanistan libre,
c’est une évidence : il doit
partir à Kaboul. « ONG,
diplomates, organisations internationales, forces militaires…
D’un coup, tous les acteurs des relations internationales y
étaient réunis, se souvient Sébastien Turbot. Sans ma
formation à Sciences Po, je n’aurais pas eu les clés pour
comprendre ce nouveau grand jeu. »
Après dix ans passés à Kaboul, où il a monté l’agence de
communication Sayara, Sébastien Turbot décide de revenir en
France. Quand l’École des affaires internationales lui propose
de devenir enseignant, il saute sur l’occasion. « Cela fait deux
ans que j’anime des cours à vocation professionnalisante :
j’apprends à mes étudiants à mieux cerner les enjeux, les
acteurs, les métiers et les pièges des situations de conflits.
Je veux les aider à anticiper leur insertion professionnelle »,
explique Sébastien Turbot.
Pour une première expérience professionnelle, l’enseignant
encourage ses étudiants à opter pour des zones dites
« chaudes », qu’il qualifie de « superbes écoles de la vie » et de
véritables catalyseurs de carrières. Des carrières pour
lesquelles les profils PSIA sont « parfaits, car ils ne sont pas
englués dans une technicité parfois réductrice ».
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>> Qu’est-ce que PSIA ?
Une école à vocation internationale
Les francophones l’appellent l’École des
affaires internationales, les anglophones
the Paris School of International Affairs.
Créée en septembre 2010, PSIA a déjà vu
passer entre ses murs près de 1 300 étudiants, originaires de plus de 100 pays.
Comportant huit doubles diplômes avec
des universités étrangères prestigieuses
(Columbia, Georgetown, London School
of Economics, Freie Universität, Luigi
Bocconi University, MGIMO, Peking
University, University of St. Gallen)
et un cursus résolument bilingue, où
deux tiers des cours sont dispensés en
anglais, l’école mise sur l’international. Un pari gagnant : une fois
diplômé, plus d’un étudiant sur deux
opte pour un poste à l’étranger.
Créer les spécialistes de demain
Pour l’École des affaires internationales,
former les élites de demain, c’est allier
un enseignement théorique de qualité à
une spécialisation approfondie. Les étudiants de PSIA ont l’opportunité de choisir entre neuf mentions de master, toutes
créées après une analyse fouillée du marché de l’emploi. Les étudiants devront
ensuite opter pour deux thématiques parmi
les quatorze proposées ; elles domineront
leur parcours à PSIA et les distingueront
aux yeux de leur futur employeur.
Une meilleure insertion
professionnelle
Grâce à des cours professionnalisants et
un troisième semestre consacré aux stages,
les étudiants de PSIA préparent activement leur insertion professionnelle. Selon
la dernière enquête menée par Sciences Po
Avenir et portant sur la promotion 2010,
près de 67 % des étudiants ont trouvé un
emploi dès l’obtention de leur diplôme,
avec une forte proportion de pré-embauche
au cours de la dernière année d’études.
56 % d’entre eux sont aujourd’hui en CDI,
contre 13 % en CDD. En deux ans, le
salaire annuel des jeunes diplômés
d’affaires internationales a augmenté de
plus de 40 % : 43 129 € en 2010, contre
30 413 € en 2008.
La vie associative de l’École
Grâce à l’Association affaires internationales de Sciences Po (AAISP), PSIA et
ses 1 350 étudiants actuels profitent d’une
vie associative très dynamique. L’AAISP
organise près d’une dizaine de conférences
chaque année, auxquelles participent les
plus grands noms du monde des relations
internationales. Le journal de l’association, InFocus, à parution trimestrielle,
apporte aux étudiants un complément de
réflexion sur une problématique précise et
pertinente, comme les révolutions advenues en 2011... et celles qui n’ont jamais
eu lieu.
Un corps professoral
de renommée mondiale
Pour asseoir la crédibilité de PSIA, son
doyen Ghassan Salamé (voir interview
p. 35) a fait venir les plus grands spécialistes mondiaux des questions internationales. C’est ainsi que des diplomates de renom, des professeurs émérites, d’anciens ministres ou des hauts
fonctionnaires partagent leur expérience
et leurs connaissances avec les étudiants.
Parmi les principales personnalités, citons
Jean Arnault, représentant spécial de
l’ONU pour la Géorgie ; Lakhdar Brahimi, ancien secrétaire général adjoint des
Nations unies ; Paul Collier, directeur du
Centre d’études des économies africaines
à l’université d’Oxford, ou encore Miguel
Angel Moratinos, ministre espagnol des
Affaires étrangères de 2004 à 2010. > Les programmes de PSIA
Programmes master
Programmes de “concentrations”
- Sécurité internationale
- Politique économique internationale
- Management public international
- Politique de l’environnement
- Développement international
- Droits de l’homme et action humanitaire
- Énergie internationale
- Journalisme et affaires internationales
- Pratiques du développement
Concentrations régionales
- Afrique
- Amérique du Nord
- Amérique latine
- Asie centrale et du Sud-Est
- Chine et Asie du Nord
- Europe
- Moyen-Orient
- Russie
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Concentrations thématiques
- Droits de l’homme et action humanitaire
- Économies émergentes
- Environnement
- Énergie internationale
- Migrations
- Politique économique appliquée
- Renseignement
- Santé publique internationale
Concentrations appliquées
- Gestion de projet
- Méthodes
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POLITIQUE
Enseignant
Campus
LES POPULISMES :
UN PHÉNOMÈNE EUROPÉEN
Dominique Reynié a obtenu, pour son ouvrage Populismes, la pente fatale, paru chez Plon,
le prix du livre politique et le prix des députés. Il expose ici les raisons du développement des populismes
en Europe et les moyens de le combattre.
Dominique Reynié, dans votre ouvrage Populismes,
la pente fatale, vous dressez un portrait sombre de la
popularité grandissante des partis d’extrême droite en
Europe. Vous attribuez cette popularité à la crise
économique, qui provoque une réaction de
protectionnisme. Selon vous, le populisme est-il un
phénomène spécifique au « Vieux Continent » ?
Cette résurgence n’est-elle pas patente dans tous les
pays touchés par la crise ?
Il s’agit indubitablement d’un phénomène politique propre à
l’Europe, parce que la démographie joue un rôle important. Peutêtre faudrait-il regarder de près l’évolution actuelle du Japon,
notamment avec le Parti pour la Restauration d’Osaka, du maire
de la ville, Toru Hashimoto. Chez nous, dans tous les pays du
Vieux Continent, depuis une vingtaine d’années, s’affirme une
nouvelle forme de populisme que je qualifie de “populisme patrimonial”, apparu en Europe du Nord, en particulier aux PaysBas. C’est un phénomène politique multiforme qui cherche à
tirer profit d’une double inquiétude des Européens craignant
que soit simultanément remis en question leur patrimoine matériel, ou leur niveau de vie, et leur patrimoine culturel, ou leur
style de vie, par les effets de la globalisation économique, du
vieillissement démographique, de l’immigration et de la crise
des finances publiques.
En Europe, sur un plan politique, cette double inquiétude a
été identifiée par les partis d’extrême droite, tandis que la crise
des finances publiques affaiblit structurellement la capacité d’action des partis de gouvernement, de gauche comme de droite.
Saisissant cette opportunité, des partis d’extrême droite ou conservateurs opèrent une reconversion vers le populisme patrimonial :
le Parti du Progrès en Norvège, les Vrais Finlandais, les Démocrates de Suède, le Parti du Peuple Danois, le Parti pour la Liberté,
aux Pays-Bas, le Vlaams Belang ou le N-VA en Belgique, le FPÖ
autrichien, l’UDC suisse, la Ligue du Nord en Italie, le Laos
en Grèce ou le BNP et le UKIP en Grande-Bretagne.
Quelle est la spécificité de la France dans
ce contexte, s’il y en a une ?
Il me semble que la spécificité du Front national tend à s’effacer. Sous l’impulsion d’une nouvelle génération amenée par
Dominique Reynié (PES 83)
Professeur des universités à
Sciences Po et directeur général
de la Fondation pour l’innovation
politique, Dominique Reynié est
agrégé de science politique et
chercheur associé au Cevipof.
Il a notamment dirigé de 1999 à
2006 le DESS Études et Stratégie
marketing, et de 2002 à 2005
l’Observatoire interrégional du
politique de Sciences Po.
Marine Le Pen, le Front national a entamé et presque achevé
un processus de conversion au modèle du populisme patrimonial. Elle a délaissé le discours économique volontiers libéral
de son père pour investir un discours beaucoup plus socialisant. Je parle à ce sujet d’un « tournant ethnosocialiste ». Il lui
donne une assise électorale potentiellement plus large que pouvait espérer un parti d’extrême droite.
Comment les partis traditionnels peuvent-ils
faire face à cette vague de populisme ?
En n’y cédant pas, ce qui malheureusement arrive trop souvent ;
en réparant ou en compensant les effets sociaux que génère une
crise de transition ; en luttant contre toutes les formes d’abus
et de corruption qui exaspèrent légitimement les citoyens ; en
réformant les institutions politiques, par exemple en proscrivant
tout cumul de mandats ; en intensifiant la coopération européenne, car les peuples sont moins désireux de renouer avec la
passion nationaliste que de retrouver une puissance publique
capable d’ordonner leur destin ; en définissant démocratiquement le contrat politique permettant d’accueillir nos immigrés ;
en sortant de son enlisement la grande idée d’une EuroMéditerranée... Propos recueillis par Anne-Sophie Beauvais (MR 06)
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