uro-oncologie - ONCO Pays de la Loire
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uro-oncologie - ONCO Pays de la Loire
REFERENTIEL REGIONAL 2011-2013 URO-ONCOLOGIE STRATÉGIES DE DIAGNOSTIC, DE TRAITEMENT ET DE SURVEILLANCE Version décembre 2011 SOMMAIRE Cancer de la prostate p3 Tumeurs urothéliales p 23 Tumeurs du testicule p 53 Tumeurs du rein p 61 Tumeurs malignes du pénis p 70 2 CANCER DE LA PROSTATE CLASSIFICATION TNM 2009 T Tumeur primitive TX : tumeur primitive non évaluée T0 : tumeur primitive non retrouvée T1 : tumeur ni palpable au toucher rectal (TR) ni visible en imagerie T1a : tumeur occupant moins de 5% du tissu réséqué T1b : tumeur occupant plus de 5% du tissu réséqué T1c : tumeur découverte sur une biopsie prostatique en raison d’une élévation du taux des PSA. N.B : la classification de l’American Joint Commitee intègre le score de Gleason pour différencier le T1a du T1b : - T1a < 5% du tissu réséqué avec un score de Gleason < 7 ou absence de grade 4 ou 5. - T1b > 5 % du tissu réséqué ou un score de Gleason > 7 ou présence de grade 4 ou 5. T2 : tumeur limitée à la prostate T2a : tumeur atteignant la moitié d’un lobe ou moins T2b : tumeur atteignant plus de la moitié d’un lobe mais sans atteindre les deux lobes T2c : tumeur atteignant les deux lobes T3 : extension au-delà de la capsule T3a : extension extra-capsulaire uni- ou bilatérale T3b : extension aux vésicules séminales uni- ou bilatérale T4 : tumeur fixée ou atteignant d’autres structures que les vésicules séminales (sphincter externe, rectum, muscles releveurs de l’anus ou la paroi pelvienne) N Ganglions régionaux NX : ganglions régionaux non évalués N0 : absence de métastase ganglionnaire régionale N1 : atteinte ganglionnaire régionale N1 mi : métastase ganglionnaire ≤ 0,2 cm (optionnel) Métastases à distance MX : métastases à distance non évaluées M0 : absence de métastase à distance M1 : métastases à distance M1a : atteinte des ganglions non régionaux M1b : atteinte osseuse M1c : autres sites Classification pathologique (pTNM) pT0 : absence de tumeur identifiée après prostatectomie totale pT2 : tumeur limitée à la prostate pT2a : tumeur limitée à un demi-lobe ou moins pT2b : tumeur unilatérale avec atteinte de plus d’un demi-lobe, mais pas des deux lobes pT2c : tumeur bilatérale pT3 : extension extra-prostatique pT3a : extension extra-prostatique uni ou bilatérale incluant le col vésical pT3b : envahissement des vésicules séminales uni ou bilatérale pT4 : envahissement d’autres structures que les vésicules séminales (sphincter externe, rectum, muscles releveurs de l’anus ou la paroi pelvienne) R Reliquat tumoral post-opératoire Rx : présence de résidu tumoral non évaluée R0 : absence de reliquat tumoral macroscopique ou microscopique R1 : reliquat tumoral microscopique (focal ou étendu) R2 : reliquat tumoral macroscopique L’envahissement du col vésical n’est plus classé pT4, mais est dorénavant classé pT3a 3 CLASSIFICATION DE D’AMICO Des groupes à risque ont été validés pour estimer le risque de progression après prostatectomie totale, radiothérapie externe et curiethérapie interstitielle. - Faible Risque : PSA < à 10 ng/ml et score de Gleason < à 6 et stade clinique T1c ou T2a - Risque intermédiaire: PSA entre 10 et 20 ng/ml ou score de Gleason de 7 ou stade clinique T2b. - Risque élevé : PSA > 20 ng/ml ou score de Gleason > 7 ou stade clinique T2c. Les groupes à risque intermédiaire et à risque élevé sont hétérogènes : il suffit d’avoir un des trois facteurs pour définir l’appartenance à ces groupes. Une distinction existe au sein du groupe à risque intermédiaire entre les tumeurs de score de Gleason 3+4 et les tumeurs de score de Gleason 4+3 qui appartiendraient plutôt au groupe à haut risque. Le stade cT3a est intégré au sein du groupe à haut risque dans les recommandations de l’EAU. ANATOMO-PATHOLOGIE Biopsies prostatiques Les biopsies prostatiques sont l’examen standard qui permet d’établir le diagnostic de cancer de la prostate et d’apporter des critères histo-pronostiques. Les prélèvements tissulaires doivent être adressés dans des pots étiquetés et accompagnés d’un bon de demande d’examen (papier ou informatique) comportant les renseignements administratifs et cliniques indispensables. En l’absence d’anomalie au TR, une cartographie prostatique en sextant avec 12 biopsies est suffisante, à raison d’une à deux biopsies par flacon et par sextant dûment étiqueté. Les prélèvements biopsiques d’un même sextant doivent être mis dans un flacon rempli de formol, soit directement, soit dans une cassette, étalés entre deux mousses imbibées de sérum physiologique. En cas de prélèvement dirigé sur un nodule, les prélèvements sont placés dans un flacon à part. En cas de tumeur cliniquement avancée (T3 ou T4), il est possible de regrouper les biopsies par côté (2 flacons). En cas de biopsies de saturation, il est possible de regrouper les biopsies à raison de 2 à 3 biopsies par flacon. Pour chaque flacon transmis, une série de 3 à 6 niveaux de coupes de 3 microns d’épaisseur sera confectionnée, puis étalée sur une lame en vérifiant que les 2 ou 3 carottes biopsiques soint bien présentes en totalité. Les lames seront colorées par l’hématéine éosine safran (HES) et confiées au pathologiste pour interprétation. Le diagnostic de cancer de la prostate repose sur un ensemble d’arguments histologiques, facilement analysables sur les colorations standard. Sont pris en compte la disposition des glandes et l’aspect des cellules prostatiques en comparaison avec les glandes prostatiques normales. Les critères permettant de porter un diagnostic de malignité reposent sur un faisceau d’arguments, comportant des signes majeurs, architecturaux et cytologiques et des signes accessoires ayant une bonne valeur d’orientation. En l’absence de cancer, toutes les lésions bénignes comme : atrophie, hyperplasie post-atrophie, hyperplasie des cellules basales, hypertrophie musculaire, prostatite destructive intense... seront décrites succinctement. Après l’analyse par coloration standard (HES) lorsque l’interprétation est incertaine notamment, en cas de lésion piège mimant le cancer (atrophie, hyperplasie adénomateuse atypique ou des foyers de PIN), en cas de forme particulière du cancer (carcinome à cellules spumeuses, carcinome peu différencié) ou afin de conforter le diagnostic en cas de foyer de petite taille (foyer minime), une étude immunohistochimique peut être nécessaire, avec l’utilisation d’anticorps dirigés contre les cellules basales (cytokératine 903, cytokératine 5-6, P63 ou avec un anticorps réagissant avec les cellules tumorales prostatiques : l’alpha-CoA-Methyl-Racemase (AMACR, Racemase, P504S). Le score de Gleason Le score de Gleason, créé en 1966 et redéfini en 2005, est reconnu internationalement et adopté par l’OMS. Il s’établit en effectuant la somme des deux grades les plus représentés dans un ordre décroissant. Il est recommandé de rapporter le score observé biopsie par biopsie. 4 En 2005, l’ISUP a publié des recommandations concernant l’évaluation du score de Gleason sur les biopsies prostatiques. Celles-ci préconisent : Evaluation du score site par site biopsié (par sextant) Pas de score 2-4 sur biopsies Les foyers architecturaux d’aspect cribriforme sont de grade 4 Prise en compte des grades 4 ou 5, dès qu’ils représentent 5% du volume tumoral Non prise en compte des grades 2 et 3 s’ils ne représentent pas 5% du volume tumoral Le système de grading s’applique aux foyers minimes Le système de grading s’applique aux variantes histologiques. En dehors du score de Gleason, les autres critères à indiquer sur le compte rendu des biopsies sont : la longueur des biopsies, la longueur du cancer, la présence d’une extension extra prostatique. La longueur moyenne des biopsies doit être au moins de 10 mm. La longueur du foyer tumoral sur une biopsie se calcule en mesurant la distance existant entre tous les foyers tumoraux. Il est possible de déterminer le pourcentage d’envahissement tumoral observé sur les biopsies, par le rapport de la longueur des foyers tumoraux / longueur totale des biopsies. Le compte-rendu précisera l’état du tissu extra prostatique si celui a été prélevé et s’il est visible. L’infiltration d’un espace périnerveux extra-prostatique doit être signalé car il correspond à une extension extra-prostatique. Seule la présence de PIN de haut grade doit être signalée. Le terme de foyer suspect s’applique pour décrire un foyer de prolifération microglandulaire ayant des atypies cytologiques ou architecturales insuffisantes pour permettre d’évoquer le diagnostic de cancer et pour affirmer un diagnostic de bénignité [8]. En cas de foyer suspect, une analyse immuno-histochimique avec les anticorps anti p63 et p504s permet de corriger le diagnostic dans 80% des cas. En cas de foyer suspect, le Club d’Uro-Pathologie préconise qu’une réponse collégiale, témoignant d’une interprétation consensuelle d’au moins deux pathologistes puisse être réalisée. Recommandations pour les biopsies L’urologue précisera : Les identités patient et préleveur Les renseignements cliniques : TR, PSA Le siège et l’identification des biopsies Traitement associé : inhibiteur de la 5-α-réductase, traitement hormonal Antécédents de traitements par agents physiques (radiothérapie, curiethérapie, HIFU) Le pathologiste précisera : La longueur des biopsies Le nombre de biopsies positives et leur siège Le score de Gleason site par site biopsié En cas de score élevé, le % de grade 4 ou 5 La longueur des foyers tumoraux (sextant par sextant) La présence d’une extension extra capsulaire En l’absence de cancer, le pathologiste précisera : La présence de PIN de haut grade La présence de foyers de prostatite En cas de lésion suspecte ou de foyer minime ≤ 1 mm : Une étude immunohistochimique est nécessaire en précisant les anticorps et leurs résultats Une double lecture peut être nécessaire Résection endoscopique de prostate Les cancers de la zone de transition de la prostate d’évolution favorable ont généralement un score < 7, alors que les cancers de la zone périphérique d’évolution plus péjorative ont plutôt un score > 7. 5 Recommandations pour l’analyse des copeaux de résection de prostate L’urologue précisera : Les identités patient et préleveur Les renseignements cliniques : TR, PSA Traitement associé : inhibiteur de la 5-α-réductase, traitement hormonal Antécédents de traitements par agents physiques (radiothérapie, curiethérapie, HIFU) Le pathologiste précisera : Le type d’inclusion effectué : totalité ou jusqu’à 8 blocs En cas de cancer, le nombre de copeaux envahis (ou le pourcentage) Le score de Gleason Evaluation du stade en cas de cancer de prostate sur des copeaux de RTUP pT1a : < 5% d’envahissement tumoral, absence de grade 4 pT1b : > 5% d’envahissement tumoral, absence de grade 4 pT2 : si grade 4 présent Pièce de prostatectomie totale L’interprétation des pièces de prostatectomie totale (PT) a pour but d’apporter des facteurs histopronostiques dont dépend l’agressivité du cancer de la prostate. La pièce de PT, une fois fixée pendant 48 à 72 heures dans du formol, doit être analysée selon le protocole de Stanford : isolement de l’apex, du col et de la base qui seront coupés de façon sagittale et para-sagittale, puis coupes étagées de la prostate selon un plan perpendiculaire à sa face postérieure sur 3 à 5 mm d’épaisseur et recoupes selon un plan frontal et sagittal pour une inclusion dans des cassettes standards ou en grande coupe. Le protocole de Stanford permet d’inclure la pièce en totalité, d’établir le stade pathologique et d’apprécier le statut des marges. Le pathologiste renseignera la présence de foyers tumoraux en précisant : Le score de Gleason du foyer principal et du (es) autre(s) foyer(s) Le siège L’extension extra-capsulaire de la tumeur L’état des marges Le score de Gleason s’établit en effectuant la somme du grade le plus représenté et du grade le plus péjoratif. Le pathologiste doit préciser le siège, l’importance et le caractère uni- ou plurifocal de l’extension extraprostatique. Une marge (ou limite) chirurgicale positive est définie par la présence d’au moins une glande tumorale arrivant au contact de l’encre, quelles que soient sa localisation et sa taille. Une marge est dite négative (R0) lorsque la tumeur est à distance de l’encre, qu’elle soit en position intra-prostatique ou en position extra-prostatique. Une marge positive (R1) peut être intra prostatique (pTx R1 ou pT2 R1 si millimétrique), extra-capsulaire (pT3 R1), unique ou multiple, focale ou étendue. En cas de marge douteuse, une étude immuno-histochimique avec l’anticorps p504s permet de préciser si les glandes écrasées observées au contact de l’encre sont tumorales. Le pathologiste doit préciser le siège, l’étendue et le caractère uni ou plurifocal de la marge positive. La pratique de l’examen extemporané des bandelettes neuro-vasculaires est limitée à certains centres. L’appréciation du volume tumoral peut être effectuée en appliquant la formule de Chen (0,4 x largeur x longueur x hauteur) ou être estimée en % d’envahissement global. Recommandation pour la prise en charge des pièces de prostatectomie totale L’urologue précisera : Les identités patient et préleveur Les renseignements cliniques : TR, PSA, résultats des biopsies ou de la RTUP La technique chirurgicale : préservation des bandelettes neuro-vasculaires La présence d’artéfacts chirurgicaux Traitement associé : inhibiteur de la 5-α-réductase, traitement hormonal Antécédents de traitements par agents physiques (radiothérapie, curiethérapie, HIFU) 6 Le pathologiste précisera : L’encrage de la pièce Les modalités d’inclusion de la pièce : totale selon la technique de Stanford (recommandée) En cas d’inclusion partielle, inclusion en totalité de l’apex, de la base, et de la partie postérieure de la prostate Le score de Gleason de la pièce opératoire : somme du grade le plus représenté et du grade le plus péjoratif Le score de Gleason du foyer principal et du (es) foyer(s) principa(ux) Le siège du foyer principal et du (es) foyer(s) principa(ux) L’extension extra-capsulaire de la tumeur du foyer principal et du (es) foyer(s) principa(ux) L’état des marges du foyer principal et du (es) foyer(s) principa(ux) Le stade pTNM L’évaluation du volume tumoral (facultatif) La présence d’une incision chirurgicale en zone prostatique saine En cas d’examen extemporané : Une concertation préalable entre le pathologiste et l’urologue est nécessaire Les résultats de l’examen extemporané et de son contrôle seront indiqués IMAGERIE Echographie prostatique La fiabilité limitée de l’échographie mode B n’a pas été suffisamment améliorée par l’écho-Doppler couleur ou puissance. L’échographie de contraste après injection de microbulles n’a pas montré une sensibilité ni une spécificité suffisantes pour être recommandée en routine pour détecter les cancers non palpables. L’échographie ne détecte pas le cancer non palpable dans environ la moitié des cas. Elle est utilisée, avant tout, pour viser la prostate et évaluer son volume qui est une aide à la prise en charge thérapeutique en particulier en cas de curiethérapie. Elle représente toutefois le temps le plus long de l’examen à la recherche d’une cible hypoéchogène. Cette précaution permet de multiplier les prélèvements dans la cible. S’il s’agit d’un carcinome, le taux de positivité de la biopsie est multiplié par 2,5. En cas de re-biopsie, l’échographie est encore moins sensible, car sa sensibilité est basse pour repérer les lésions antérieures. L’injection de microbulles peut avoir une indication en permettant de cibler quelques prélèvements supplémentaires dans les zones qui se rehaussent précocement pour augmenter le taux de détection du cancer. Après traitement focal, elle est recommandée pour vérifier la dévitalisation de la zone traitée. Scanner abdomino-pelvien La recherche de métastases ganglionnaires chez les patients à risque élevé ou intermédiaire a des implications pronostiques et thérapeutiques majeures. La taille pathologique généralement admise en TDM est de 8 mm pour les ganglions pelviens et de 10 mm pour les ganglions rétropéritonéaux, avec une augmentation du risque de métastase si le ganglion a une forme arrondie plutôt qu’ovalaire. La TDM est aujourd’hui supplantée par l’IRM et ne devrait être réalisée qu’en cas de contre-indication à l’IRM. IRM L’IRM de la prostate est devenue fonctionnelle en associant à l’imagerie T2 des séquences de perfusion et de diffusion, désormais incluses dans un examen de routine. Le couple perfusion-diffusion est le plus utilisé. Il est plus fiable que l’imagerie T2 pour localiser la ou les tumeurs, en apprécier leur volume et suspecter la présence de grade de Gleason élevé, autant d’éléments devenus indispensables si les thérapies focales ou la surveillance active sont prochainement validées. Prédire avec une grande fiabilité l’extension locale du cancer est devenu nécessaire. Avec les aimants de 1,5 Tesla, le couplage de l’antenne pelvienne à une antenne de surface endorectale est le garant de cette précision. Le surplus de signal augmente d’autant la qualité de l’imagerie fonctionnelle, notamment la diffusion. L’avenir dira si les premiers résultats obtenus avec les aimants de 3 Tesla en feront l’imagerie de référence et si l’utilisation de l’antenne pelvienne seule fournira les renseignements demandés. 7 La fiabilité reconnue du bilan d’extension ganglionnaire par lympho-IRM souffre de l’absence d’homologation de l’injection IV des particules de fer, mais la recherche des métastases osseuses par IRM corps entier est possible avec une sensibilité et une spécificité supérieures à celles de la scintigraphie osseuse qu’elle est appelée à remplacer. IRM et localisation du cancer de la prostate L’IRM de contraste et l’IRM de diffusion sont recommandées pour prouver qu’un cancer de la prostate est localisé. Les cancers de la zone périphérique de volume supérieur à 0,2-0,5 cc, peuvent être localisés avec une sensibilité supérieure à celle de l’imagerie T2, surtout s’ils ne sont pas palpables, avec une sensibilité variant de 60 à 97% et une spécificité moyenne de 85%. La localisation des cancers antérieurs qui échappent volontiers à la première série de biopsies est notablement améliorée. Ces deux séquences ont deux limites : l’inflammation prostatique et les nodules stromaux de l’hyperplasie bénigne, deux situations où la cinétique du Gadolinium dans la prostatite et la restriction de la diffusion des nodules stromaux de l’HBP peuvent simuler le cancer. La sensibilité élevée de l’IRM dynamique (> 85%) se fait au détriment d’une spécificité de 75%, compensée par une spécificité élevée de la diffusion (85%) pour la zone périphérique. Pour la zone de transition, des critères morphologiques stricts doivent être appliqués en imagerie T2 pour suspecter un cancer. Quand ces critères sont présents, l’IRM fonctionnelle ne procure qu’une amélioration modeste de la fiabilité pour localiser la tumeur. Extension locale du cancer de la prostate Elle se fait en couplant une antenne pelvienne à une antenne de surface qui augmente de façon substantielle la résolution spatiale. L’IRM ne détecte que les stades pT3a étendus, définis en IRM par la présence de plus d’1 mm de cancer perpendiculairement à la surface de la prostate. Depuis 1999, des signes spécifiques ont été décrits, mettant fin aux variations importantes de sensibilité et de spécificité rapportées dans les études antérieures. Dans toutes les études depuis 1999, seuls les signes directs sont désormais retenus. Indications de l’IRM - Localisation du cancer après biopsies négatives. L’IRM peut être réalisée avant de nouvelles biopsies surtout s’il est envisagé des prélèvements de la zone antérieure de la prostate. Faire des biopsies sous échographie sur une cible uniquement détectée par IRM pose le problème de la superposition du territoire à prélever avec les deux imageries. La technique de fusion des images d’échographie et d’IRM améliore la précision des prélèvements. Elle est particulièrement bien adaptée aux prélèvements des lésions antérieures. La place de l’IRM dans l’option de la surveillance active est en cours d’évaluation. - Détection des grades élevés. La valeur pronostique de l’IRM de diffusion est en cours d’évaluation. Les cancers de la prostate avec grades élevés ont probablement une restriction de la diffusion significativement plus basse que celle des cancers de bas grade. - Extension locale du cancer. En cas de risque intermédiaire ou élevé, le siège exact de la tumeur et ses contacts avec la capsule sont des informations aussi importantes à récolter que la détection du franchissement lui-même pour limiter le risque de marge positive. En cas de tumeur à risque faible, si une alternative au traitement chirurgical est envisagée, affirmer l’absence de stade pT3 avec une fiabilité très élevée devient l’enjeu principal. La résolution spatiale peut être renforcée par une acquisition 3D en coupes millimétriques. - Extension ganglionnaire. Une méta-analyse a montré que la sensibilité de l’IRM était de 39% avec une spécificité de 82%. La performance de la lympho-IRM par injection intra-veineuse de microparticules de fer captées par les macrophages des ganglions normaux a significativement améliorée l’imagerie de diffusion avec un aimant de 3 Tesla. Malgré leur intérêt clinique démontré, les agents de contraste superparamagnétiques n’ont pas encore été homologués. - Détection des métastases osseuses. La supériorité de l’IRM sur la scintigraphie pour détecter les métastases osseuses est connue depuis plus de 20 ans, mais la difficulté à explorer des volumes étendus a limité la diffusion de l’examen. L’IRM est plus sensible que la scintigraphie, car elle détecte les métastases osseuses avant que l’ostéoblastose ne soit perceptible sur la scintigraphie. Les images en pondération T1 font en règle le diagnostic. Limitée à l’étude du squelette axial (colonne vertébrale, bassin, et fémurs proximaux), elle représente même le moyen le plus fiable pour la détection des métastases. L’IRM permet en outre une mesure précise de la taille des métastases et de la réponse à la thérapie. Le bilan du squelette axial peut être réalisé avec un module corps entier qui, en se limitant à trois des cinq segments utilisables (rachis entier, bassin, fémurs proximaux) peut détecter virtuellement la totalité des métastases osseuses, avec un temps d’examen inférieur à 30 min. 8 En associant dans le même examen l’acquisition volumique abdomino-pelvienne en coupes millimétriques sans antenne endorectale pour l’étude des chaînes ganglionnaires, l’indication de l’IRM remplace le couple scintigraphie osseuse-scanner. La fiabilité de ce bilan régional et général par IRM devra être comparée à celle du PET scan à la choline marquée. IRM et suivi d’un cancer traité Après prostatectomie totale, l’IRM ne peut détecter des signes de récidive locale qu’à partir d’une valeur de PSA > 1,5 ng/ml. L’imagerie ne peut être recommandée si la décision de traiter la récidive est prise à un taux de PSA < 1 ng/ml. Après radiothérapie, l’IRM dynamique est en revanche fiable pour détecter la récidive locale et diriger les biopsies. Elle est recommandée avant une prostatectomie de rattrapage. En cas d’échappement hormonal, l’IRM devient utile pour détecter les métastases osseuses et peut être utilisée pour mesurer la réponse objective aux protocoles de chimiothérapie préférentiellement à la scintigraphie osseuse. Scintigraphie osseuse La scintigraphie osseuse (SO) est utilisée depuis des dizaines d'années comme modalité de dépistage de première ligne des métastases osseuses d'un cancer de la prostate. Sa sensibilité varie entre 46 et 70%, valeurs discutables en cas de décision thérapeutique lourde. Le principal problème de la SO est sa faible spécificité. En effet, des zones de captation scintigraphique ne peuvent pas être définies avec certitude comme étant malignes ou bénignes. Elles doivent être caractérisées par des examens complémentaires, typiquement des radiographies centrées afin de distinguer une origine bénigne (fracture, maladie de Paget, arthrose, … ) d'une origine maligne (métastatique). Cette association est imparfaite et le diagnostic peut rester incertain après ce bilan SO / radiographies, nécessitant le recours à des examens de troisième ligne TDM ou IRM. Une autre limite importante de la SO : elle ne permet pas de mesurer la réponse thérapeutique des lésions osseuses. Plusieurs stratégies ont été mises en œuvre pour améliorer les performances de la SO au Tc 99m, mais toutes manquent de spécificité. Tomographie par émission de positrons La tomographie par émission de positrons (PET), étendue à la technologie TDM (PET / CT), est un outil très performant dans le diagnostic et le suivi de certains cancers métastatiques (poumon, lymphome, mélanome, certains cancers du sein…). Le marqueur métabolique le plus largement utilisé, le 18F-FDG (fluoro-déoxy-glucose), présente peu d’affinité pour les cellules métastatiques du cancer de la prostate, notamment pour le dépistage des métastases osseuses. Des études en cours évaluent l’utilité dans le diagnostic et le suivi des métastases d’autres marqueurs tels que la choline ou l'acétate marqués au 11C ou 18F, la 11C-méthionine, le 18F-fluorodihydrotestostérone et le 18F-fluorure. En dépit de l’absence d’homologation des microparticules de fer, il est recommandé en 2010 de prendre en charge par IRM fonctionnelle multiparamétrique exclusive un cancer de la prostate nouvellement diagnostiqué et de suivre son évolution après traitement si une récidive biologique survient. Les indications du scanner se limitent aux contre-indications de l’IRM. Le rôle du PET-scan est à préciser et l’avenir dira s’il représente une alternative à l’IRM dans la détection des micrométastases ganglionnaires ou des métastases osseuses. Indications Imagerie recommandée Extension locale du cancer IRM fonctionnelle Extension ganglionnaire IRM (TDM si contre indications) Extension osseuse Scintigraphie O. ou IRM osseuse Recherche de récidive IRM fonctionnelle Localisation du cancer après biopsies négativesIRM fonctionnelle Evaluation du volume tumoral IRM fonctionnelle Recommandation de grade B 9 CHIMIOPREVENTION La chimioprévention consiste à utiliser des molécules synthétiques ou des molécules naturelles (pharmaco-nutriments) dans l’objectif de prévenir l’initiation tumorale, d’inhiber la promotion des cancers et de retarder la progression tumorale. Trois essais de chimioprévention sont arrivés à maturité : L’essai SELECT : comparait l’efficacité du sélénium, de la vitamine E ou l’association des deux molécules à un placebo dans l’apparition d’un cancer de la prostate. Ni le sélénium, ni la vitamine E, ni l’association des deux molécules ne permettent de prévenir le cancer de la prostate. L’essai PCPT : comparait l’efficacité du finastéride à un placebo pour prévenir l’apparition d’un cancer de la prostate. Le finastéride diminue le risque de développer un cancer de la prostate (- 24%), mais il a été observé un plus grand nombre cancer de haut grade dans le groupe traité. L’essai REDUCE : comparait l’efficacité du dutastéride à un placebo pour prévenir l’apparition d’un cancer de la prostate chez des patients ayant un taux de PSA élevé et une série de biopsies négatives. Le dutastéride diminue globalement le risque de développer un cancer de la prostate (- 25%). Les molécules proposées actuellement ne répondent pas à la question sur la mortalité liée au cancer de la prostate (ou à l’absence de surmortalité liée au traitement ou d’une altération de la qualité de vie) (Niveau de preuve 1). La chimioprévention du cancer de la prostate par le sélénium ou la vitamine E n’est pas recommandée. L’absence de données suffisantes sur la mortalité spécifique et les effets secondaires du finastéride ou du dutastéride ne permettent pas de recommander cette chimioprévention médicamenteuse (Recommandation de grade A). DIAGNOSTIC Le toucher rectal Le TR permet de détecter des cancers de la zone périphérique (60% des localisations). Un TR suspect (induration) est une indication de biopsies prostatiques quelle que soit la valeur du PSA. Sa place dans le dépistage du cancer de la prostate reste recommandée en association avec le dosage du PSA total sérique. Le PSA et ses formes PSA total et libre Une élévation du PSA est observée en cas de cancer de la prostate, d’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP), d’inflammation et d’infection prostatique. La valeur seuil du PSA pour le diagnostic du cancer la plus souvent utilisée est 4 ng/ml. Dans l’étude PCPT, cette valeur seuil permettait d’obtenir une sensibilité de 93% et une spécificité de 24%. La valeur prédictive positive du PSA est de 25-35% pour un PSA entre 4 et 10 ng/ml et de 50-80% pour un PSA au-dessus de 10 ng/ml. Lorsque le PSA est entre 4 et 10 ng/ml, 70% des cancers diagnostiqués sont localisés. La fraction libre du PSA est moins élevée en cas de cancer qu’en cas d’HBP. Un rapport du PSA libre sur le PSA total (PSA l/t) bas (< 15%) est corrélé avec la présence d’un cancer. Une méta-analyse retrouvait une sensibilité de 95% et une spécificité de 18% pour une valeur seuil PSA l/t de 25% pour des taux de PSA de 4 à 10 ng/ml. Dans la tranche de PSA de 2 à 4 ng/ml, une valeur seuil à 28% permettait d’obtenir une sensibilité de 95% pour une spécificité de 6%. Cette sensibilité de 95% du rapport PSA l/t est jugée insuffisante et explique que le PSA libre ne soit pas recommandé en première intention. Son dosage reste réservé à une utilisation en deuxième intention par l'urologue en cas de première série de biopsie négative. PSA complexé et pro-PSA Le PSA complexé (PSA non libre) peut être dosé. Il est plus spécifique que le PSA total, à sensibilité égale, dans la détection du cancer de la prostate, pour les valeurs de PSA entre 2 à 10 ng/ml. Cependant l'habitude de l'interprétation du PSA total par les cliniciens et le faible gain en spécificité expliquent sa faible utilisation. 10 Des isoformes moléculaires du PSA libre ont été identifiées : les Pro-PSA, le PSA intact, la kallikréine humaine de type 2 (hK2) et le BPSA. Le dosage des formes moléculaires du PSA peut avoir un intérêt discriminant lorsqu’il est utilisé en association avec celui du PSA total et libre, mais est toujours en cours d’évaluation. L’association d’un panel de kallikréines (PSA libre, PSA intacte et hK2) au PSA total permettrait de diminuer de 50% le nombre de biopsies inutiles, en ne diagnostiquant pas 4 à 6% de cancers dont 1% de cancers de mauvais pronostic. Le Prostate Health Index utilisant le -2 Pro PSA est en cours de validation. Densité du PSA La densité du PSA rapportant le PSA total au volume prostatique total (PSAd) ou à celui de l'HBP (PSAdtz) améliore l’efficacité du PSA en situation de dépistage, dans la tranche 2,5 à 10 ng/ml. L’utilisation de ces rapports est non recommandée pour le dépistage du fait de la nécessité de disposer d’une mesure échographique et du fait de la variabilité de cette mesure évaluée à 15 à 25%. Vélocité du PSA Il existe 2 méthodes de mesure de la cinétique du PSA : la vélocité du PSA (PSAV) est exprimée en ng/ml/an et correspond à l’augmentation linéaire du PSA dans le temps ; le temps de doublement du PSA (PSADT) décrit l’augmentation exponentielle du PSA (inverse de la demi-vie du PSA) et s’exprime en mois. La cinétique du PSA est un facteur pronostique de survie après PT et après radiothérapie. Pour le diagnostic, les valeurs seuil de PSA > 0,75 ou 0,5 ng/ml/an ont été proposées, mais sans consensus d'utilisation en routine, du fait d'une définition (nombre et délai entre les dosages) aléatoire de la PSAV. L’utilisation de la cinétique du PSA dans le cadre du diagnostic n'est pas supérieure au PSA total seul. Le PCA3 PCA3 est un gène non codant exprimé exclusivement par le cancer de la prostate. C’est l’ARNm du PCA3 qui est dosé dans les urines après massage prostatique : le résultat de ce dosage permet d’établir un score obtenu par le rapport des ARNm du PCA3 et du PSA urinaire. Plusieurs études ont montré des résultats prometteurs pour le diagnostic du cancer de la prostate avec une meilleure sensibilité et spécificité que le PSA total seul. Ce marqueur pourrait avoir un intérêt chez les patients ayant une première série de biopsies négatives. Un score supérieur à 35 semble être le seuil retenu en faveur d’un cancer de la prostate. Ces résultats n'ont pas encore été validés. Le dosage du PCA3 n’est pas recommandé en pratique clinique. Les biopsies de prostate - Indications des biopsies Les biopsies prostatiques sont indiquées chez les hommes dont l’espérance de vie est estimée supérieure ou égale à 10 ans et qui ont une suspicion clinique ou biologique de cancer de la prostate : anomalie suspecte au toucher rectal ou élévation du PSA sérique. Chez les hommes dont l’espérance de vie est réduite, l’intérêt de réaliser des biopsies prostatiques doit être discuté au cas par cas, en fonction du terrain, du stade clinique, de la valeur du PSA et de la nécessité de mise en route d'un traitement. - Modalités de réalisation des biopsies L’information du patient doit être préalable à l'acte de biopsie et délivrée en consultation par le médecin indiquant les biopsies. La recherche de facteurs de risque de complications (allergique, hémorragique, infectieux) repose sur l’interrogatoire ciblé et se fait par le médecin lors de la consultation préalable. Une antibioprophylaxie est recommandée par prise unique de fluoroquinolone de deuxième génération par voie orale (Niveau de preuve 2). Les biopsies doivent être réalisées dans le cadre d’un soin externe pour en assurer la sécurité. La voie transrectale et le guidage échographique sont recommandés. Une anesthésie locale par bloc péri-prostatique est recommandée (Niveau de preuve 1). Le taux des complications infectieuses sévères et de rétention aigue d’urines rapportées après biopsies prostatiques est < 5%. La prise en charge optimale des complications infectieuses repose sur une information du patient, une hospitalisation et une antibiothérapie intraveineuse adaptée. Le nombre et le site des prélèvements dépendent des données du toucher rectal, du volume prostatique et du caractère initial ou répété des biopsies. - Schéma de la première série de biopsies Le schéma en sextant n’est plus approprié en raison d’un taux de détection inférieur de 30% par rapport aux autres schémas étendus. En l’absence d’anomalie clinique (stade cT1c) ou à l’imagerie (échographie ou IRM), le schéma étendu à 12 prélèvements est recommandé. Pour chaque lobe, les prélèvements sont réalisés au niveau médio-lobaire et latéral : à la base, au milieu et à l’apex. En cas de prostate de volume < 40-50 cm3, les deux biopsies médio-lobaires de 11 l’apex peuvent ne pas être pratiquées (schéma à 10 biopsies) (Niveau de preuve 3). La réalisation de plus de 12 prélèvements lors d’un schéma de biopsies initial n’augmente pas significativement le taux de détection (Niveau de preuve 1). En cas d'anomalie clinique ou à l'imagerie, d’anomalies intra- ou péri-prostatique, des biopsies dirigées complémentaires peuvent être réalisées. Lorsque le toucher rectal et le PSA sont suspects d’un cancer localement avancé, étendu à l'ensemble de la glande (stade clinique T3b-T4) et que seul un traitement palliatif est envisagé, un seul prélèvement dans chaque lobe est suffisant (Accord professionnel). - Schéma lors d’une deuxième série de biopsies En cas d’atypie (ASAP : atypical small acinar proliferation) ou de doute diagnostique quant à la présence de cellules cancéreuses sur une première série de biopsies, une deuxième série est recommandée. Cette deuxième série de biopsie est recommandée dans les 3 à 6 mois après la première (Niveau de preuve 2). Dans cette situation, le taux de détection du cancer par la deuxième série de biopsies est élevé, d’environ 40%. Le taux de cancer détecté est plus élevé lorsque les lésions d’ASAP sont associées à des lésions de PIN (prostatic intraepithelial neoplasia) (58% versus 35%). En cas de lésions isolées de PIN de haut grade, une deuxième série de biopsies n’est pas recommandée (Niveau de preuve 2), sauf si la première série n’a pas été réalisée selon un schéma étendu à 12 biopsies ou en cas d'augmentation persistante du PSA ou d'apparition d'une anomalie au toucher rectal. Il n’y a pas de consensus quant au meilleur délai entre les séries de biopsies. Le type de schéma à suivre lors d’une deuxième série de biopsies n’est pas validé. En l’absence d’évaluation par IRM à la recherche d’un cancer antérieur, la deuxième série de biopsies devrait inclure 4 à 6 biopsies additionnelles, au niveau de l’apex antérieur et de la zone de transition en plus du schéma standard des 12 biopsies (Niveau de preuve 3). -Biopsies dirigées par l'imagerie En cas d’anomalie échographique, des biopsies dirigées additionnelles sont recommandées sauf si la zone suspecte a déjà été prélevée par une des biopsies systématisées (Niveau de preuve 2). La réalisation d’une IRM de la prostate pour orienter des biopsies sur une anomalie est une option en cours de validation (Niveau de preuve 4). DEPISTAGE Alors que le dépistage organisé est en cours d’étude, la détection précoce du cancer de la prostate doit être proposée à titre individuel après information objective, pour ne pas méconnaître et laisser évoluer un éventuel cancer agressif de la prostate. La détection précoce du cancer de la prostate repose sur un toucher rectal et un dosage du PSA total dont le rythme de réalisation reste à préciser. Selon l’ERSPC, le bénéfice en termes de survie spécifique est démontré chez les hommes de 55 à 69 ans, au prix d’un risque de surtraitement. Le dépistage est recommandé à partir de 45 ans chez les hommes à haut risque de cancer de la prostate : origine afroantillaise ou antécédent familial (au moins deux cas collatéraux ou de survenue avant 55 ans). Le dépistage n’est pas recommandé chez les hommes dont l’espérance de vie est estimée inférieure à 10 ans en raison d’un âge avancé ou de co-morbidités sévères. Perspectives L’utilisation plus précoce du PSA pourrait modifier la fréquence des tests de détection. En effet, la valeur initiale du PSA total dosé avant l’âge de 50 ans, est prédictive du risque ultérieur de développer un cancer de la prostate. Pour un PSA initial ≤ 0,5 ng/ml, ce risque est inférieur à 7,5% durant les 25 années à venir. Ce risque est multiplié par 2,5 avec un PSA initial compris entre 0,5 et 1 ng/ml, et par 19 pour un PSA initial compris entre 2 et 3 ng/ml. D’autre part, une étude récente a montré qu’avec un PSA initial < à 1,5 ng/ml (dosé avant 50 ans), le risque de développer un cancer de la prostate durant les 9 années suivantes n’était pas accru. Pour une valeur de PSA initial ≥ 1,5 ng/ml, le risque augmente dès les premières années de suivi. Il est vraisemblable que, dans les années à venir, l’on s’oriente vers une évaluation plus précoce et plus ciblée du risque de développer un cancer de la prostate. La fréquence des tests serait fonction du résultat du premier PSA, dosé avant l’âge de 50 ans. Si à 60 ans, le taux de PSA est < 1 ng/ml, le risque de décéder d'un cancer de la prostate est inférieur à 2% et devrait conduire à arrêter tout dosage de PSA ultérieur. 12 Age (ans) < 50 ans [27] 50 ans [28] 60 ans [29] Taux de PSA (ng/ml) PSA ≤ 0,5 0,5 < PSA < 1 2 < PSA < 3 PSA < 1,5 PSA > 1,5 PSA < 1 Risque de cancer de la prostate < 7,5% x 2,5 x 19 Pas d’augmentation x5 < 2% (risque de décès ) FACTEURS PRONOSTIQUES - Cliniques : les données du TR surtout pour les tumeurs localement avancées (T3), l’obésité associée à un risque évolutif majoré après traitement local (Niveau de preuve 3). - Biologiques : la valeur du PSA initial et la cinétique du PSA (vélocité et temps de doublement) sont des facteurs indépendants de l’évolution de la maladie. Une hypotestostéronémie est également un facteur indépendant de récidive (Niveau de preuve 3). La testostéronémie n’est pas recommandée en routine en dehors de situation thérapeutique particulière (manipulations hormonales en phase métastatique) et pour vérifier la bonne adhésion au traitement hormonal. Le nadir du PSA < 0,5 ng/ml après radiothérapie ou curiethérapie est un facteur de bon pronostic. - Anatomo-pathologiques : le score de Gleason > 7 et la présence dominante de grade 4 ou 5 comme le pourcentage de tissu tumoral sur les biopsies sont des facteurs prédictifs de la récidive biologique (Niveau de preuve 3). L’analyse de la pièce de prostatectomie totale et des ganglions fournit des éléments pronostiques utiles pour la gestion du risque de récidive et la proposition d’éventuels traitements complémentaires. - L’IRM peut permettre de détecter un envahissement extra-capsulaire, un envahissement des vésicules séminales. - Certains de ces éléments sont retrouvés dans les groupes à risque de progression de D’Amico (faible risque, risque intermédiaire, risque élevé ou haut risque). Il est à noter également que le risque de mortalité spécifique est accru lorsque les trois facteurs de risque (PSA, stade clinique et score de Gleason biopsique) sont associés. RECOMMANDATIONS THERAPEUTIQUES Plusieurs critères pronostiques cliniques et biologiques pré thérapeutiques, associés à l’appréciation de l’état général du patient et aux caractéristiques de la prostate (volume et degré d’obstruction) interviennent dans le choix du traitement optimal parmi les différentes options thérapeutiques. Les avantages et inconvénients de chacune des options (modalités, durée d’incapacité, bénéfices, toxicité, conséquences éventuelles et efficacité) seront exposés pendant la discussion singulière entre le médecin référent et le patient. La proposition thérapeutique doit être validée en réunion de concertation pluridisciplinaire d’uro-oncologie. La préférence du patient entre plusieurs propositions thérapeutiques équivalentes doit être prise en compte. CANCER À FAIBLE RISQUE EVOLUTIF Les recommandations thérapeutiques dans les stades localisés se déterminent selon l’espérance de vie du patient estimée à partir des données de l’INSEE (tables d’espérance de vie de la population générale 2005-2006) et de la prise en compte des facteurs de morbidité compétitive pouvant limiter l’espérance de vie du patient (score ASA). Un seuil d’espérance de vie de 10 années est retenu pour proposer un traitement à visée curatrice pour une tumeur prostatique localisée. Un patient présentant un cancer de la prostate cliniquement localisé à faible risque évolutif doit être informé des différentes modalités de prise en charge, incluant au minimum la surveillance avec traitement différé, la prostatectomie totale, la radiothérapie externe, la curiethérapie. Cette information comprend une présentation des bénéfices et des risques de chaque proposition de traitement. Il n’y a pas de traitement standard des cancers localisés de la prostate à faible risque, mais diverses options qui doivent être envisagées en tenant compte de l’âge au diagnostic, des caractéristiques locales (comme le volume prostatique ou l’existence de troubles mictionnels), des facteurs de morbidité 13 compétitive, des diverses contre-indications et des préférences du patient. ESPERANCE de VIE > 10 ans Stade T1a : La découverte de cellules tumorales dans les copeaux de résection ou sur une pièce d’adénomectomie ne permet pas de préjuger des caractéristiques de la prostate résiduelle. • Les grade et score de Gleason doivent être pris en compte (classification de l’American Joint Committee) pour différencier T1a et T1b de la classification initiale TNM. • La réévaluation de la prostate restante par TR, PSA et biopsies de la prostate restante est recommandée • Un traitement à visée curatrice est proposé si la tumeur résiduelle est palpable, peu différenciée ou si la valeur du PSA reste élevée en post-opératoire. • Une surveillance annuelle simple (abstention – surveillance - traitement différé) peut être proposée en l’absence de grade 4 et en cas de réévaluation négative. La surveillance doit être régulière par dosage sanguin du PSA à 6 mois puis tous les ans, pour apprécier la cinétique d’évolution tumorale. Stade T1b, T1c et T2a : • La surveillance active Elle repose sur l’hypothèse de formes « latentes » du cancer localisé de la prostate, pouvant ne pas s’exprimer cliniquement du vivant du patient. Un programme de surveillance active a deux objectifs : proposer un traitement définitif pour les cancers localisés à faible risque initial mais enclins à progresser, et réduire le risque des effets secondaires et des complications des traitements pour des cancers non susceptibles de progresser. L’avantage d’une telle stratégie paraît plus assuré pour les patients âgés (plus de 70 ans), ce d’autant que le risque de sous-stadification est réel et que l’impact psychologique n’est pas négligeable. Il n’y a pas de niveau de preuve élevé jusqu’à présent dans ce cadre de prise en charge et les indications de la surveillance active basées sur ces études pourraient être les suivantes : - Cancer localisé à faible risque évolutif T1- T2a -et PSA initial < 10 ng/ml - et score de Gleason des biopsies ≤ 6 et absence de grade 4 - et moins de 3 biopsies positives (sur au moins 6 biopsies réalisées) - et moins de 50% de tumeur sur chaque biopsie envahie Les études en cours ne comportent pas de série de biopsies prostatiques de confirmation, ce que prévoit une étude multicentrique française (PHRC 2007-2008). Les données de la littérature conduisent à proposer un traitement actif aux patients en surveillance active pour un cancer de la prostate qualifié de latent en cas de survenue d’un des évènements suivants au cours du suivi (TR, PSA, biopsies annuelles de contrôle) : - Stade supérieur à T2a - ou temps de doublement du PSA < 3 ans - ou PSA > à 10 ng/ml - ou plus de 2 biopsies de contrôle positives - ou score de Gleason ≥ ou = 7 - ou demande du patient • La prostatectomie totale La prostatectomie totale est le traitement de référence des tumeurs localisées de la prostate chez l’homme de moins de 70 ans avec une espérance de vie supérieure à 10 ans. Elle peut être réalisée par voie chirurgicale ouverte rétro-pubienne, périnéale ou par voie laparoscopique trans- ou extra péritonéale. Il n’y a pas de voie d’abord ayant démontré une supériorité tranchante sur la qualité des résultats carcinologiques ou fonctionnels. Le curage ganglionnaire ilio-obturateur bilatéral associé est optionnel pour les cancers à faible risque évolutif. Si le curage ganglionnaire est réalisé, il n’est pas nécessaire de demander un examen extemporané de ce curage : l’indication de prostatectomie totale ne sera pas influencée par le statut ganglionnaire. La réalisation d’un curage ganglionnaire étendu incluant les axes iliaques externes et primitifs n’est pas recommandée. 14 La préservation des bandelettes neuro-vasculaires peut être envisagée en fonction de l’information donnée au patient, de son désir de conservation des érections, de sa fonction sexuelle avant la chirurgie et des critères d’agressivité tumorale (nombre de biopsies positives par côté, pourcentage de tumeur sur chaque biopsie). Elle est adaptée aux cancers localisés à faible risque évolutif, particulièrement chez les patients jeunes et chez ceux souhaitant conserver une fonction érectile. Pour le stade tumoral palpable T2a, une préservation unilatérale (du côté opposé à la tumeur) est discutée si les biopsies sont négatives ou faiblement envahies. La préservation des bandelettes NV est contre-indiquée dès qu’il existe un risque d’extension extra prostatique. • La radiothérapie externe La radiothérapie conformationnelle est exigée pour réduire la toxicité tardive par rapport à la radiothérapie conventionnelle à dose équivalente et augmenter la dose délivrée à la tumeur sans augmenter significativement la toxicité. Une irradiation pelvienne antérieure, une maladie inflammatoire rectale active constituent des contreindications à la radiothérapie externe. L’existence de symptômes obstructifs urinaires sévères augmente le risque de rétention vésicale pendant la radiothérapie et de complications ultérieures. Après résection trans-urétrale, la radiothérapie doit être différée de 6 à 8 semaines pour réduire le risque de complication urinaire et notamment de sténose urétrale. Pour les cancers de la prostate à faible risque, le volume cible doit comporter la prostate et le 1/3 interne des vésicules séminales ; il n’y a pas d’indication dans ces cas-là à irradier les aires ganglionnaires pelviennes. La dose dépasse 70 Gy. • La curiethérapie prostatique par implants permanents La curiethérapie exclusive consiste à implanter par voie périnéale et sous contrôle échographique des grains d’Iode125 au cours d’une anesthésie générale ou péridurale. Elle est proposée dans des situations cliniques précises: tumeur localisée sans extension extra prostatique de stade ≤ à T2b, score de Gleason ≤ à 6 (pas de grade 4 prédominant) et PSA ≤ à 10 ng/ml. Il n’y a pas de limite inférieure d’âge pour laquelle la curiethérapie est contre indiquée, mais il est préférable de ne pas la proposer à des sujets jeunes, en raison du peu de données scientifiques tranchantes sur les résultats carcinologiques à plus de 10 ans. Un volume prostatique supérieur à 50-60 cm3, l’existence d’une hypertrophie du lobe médian et/ou de symptômes obstructifs constituent des contre-indications relatives à la curiethérapie. Un antécédent de résection trans-urétrale large est une contre-indication à cette technique. • L’ablatherm HIFU (ultrasons focalisés de haute intensité par voie trans-rectale) Le traitement par HIFU peut être proposé à des patients (charte AFU) âgés de plus de 70 ans, dont l’espérance de vie est au moins de 7 ans (ou à des patients plus jeunes lorsque existe une morbidité compétitive), présentant une tumeur T1-T2 N0 M0, Gleason ≤ à 7 (3+4), une valeur de PSA ≤ à 15 ng/ml, un volume prostatique ≤ 50 cc., un volume tumoral limité (moins de 4 zones prostatiques atteintes sur 6). Le traitement est appliqué par voie transrectale sous contrôle échographique, après la réalisation d’une résection trans-urétrale de la prostate (synchrone ou préalable) pour diminuer le risque de rétention urinaire post-opératoire. Le recul de la technique est insuffisant pour juger du bénéfice à long terme. Les patients doivent en être informés lors de la discussion des options de prise en charge. ESPERANCE de VIE < 10 ans : Une attitude de surveillance avec traitement différé (abstention thérapeutique immédiate surveillance - traitement différé) peut être proposée. On instaurera un traitement palliatif ou hormonal à l’apparition de signes de progression locaux ou régionaux. CANCERS A RISQUE INTERMEDIAIRE Le groupe à risque intermédiaire est de composition très hétérogène. Il regroupe, selon la combinaison des valeurs de PSA, du stade et du score de Gleason, des cancers dont le risque de récidive est différent : 15 - Un groupe à risque réellement intermédiaire proche du groupe à faible risque pour lequel un traitement en monothérapie sera considéré : stade clinique T1c ou T2a et PSA < 15 ng/ml et score de Gleason ≤ 7 avec grade 3 majoritaire. - Un groupe dont le risque s’apparente plus à celui du groupe à risque élevé de D’AMICO, pour lequel un traitement combiné sera privilégié : T2b volumineux et/ou PSA entre 15 et 20 ng/ml et/ou score de Gleason à 7 avec présence majoritaire de grade 4. Deux paramètres complémentaires peuvent être pris en compte : - La longueur de tumeur et le pourcentage de tissu tumoral total sur les biopsies sont des facteurs prédictifs de récidive biochimique supérieurs au nombre de biopsies positives ou au pourcentage de biopsies positives. - La cinétique d’évolution du PSA dans l’année précédant le diagnostic et/ou un temps de doublement du PSA < 12 mois conduit à un accroissement significatif du risque de progression. Les traitements de référence sont la prostatectomie totale et la radiothérapie externe : - Les modalités de la chirurgie ne diffèrent pas de celles décrites pour les stades de bon pronostic, sauf pour le curage ganglionnaire qui est recommandé, et la préservation des bandelettes vasculo-nerveuses qui n’est pas indiquée du coté de la tumeur - la radiothérapie externe sera précédée d’une lymphadénectomie pour préciser le statut ganglionnaire si ce dernier influence l’indication, la technique et l’étendue de l’irradiation. Il s’agira dune radiothérapie conformationnelle exclusive avec escalade de dose ou d’une radiothérapie conformationnelle associée à une hormonothérapie courte de 6 mois par agoniste de la LHRH. La curiethérapie n’est pas contre-indiquée dans les risques intermédiaires faibles (Score de Gleason 3 + 4 ou PSA entre 10 et 15 ng/ml ) à condition qu’un seul de ces 2 facteurs soit présent. CANCER A HAUT RISQUE Le cancer à haut risque se défini par les critères énoncés précédemment auxquels on peut ajouter les critères associés suivants : Pourcentage de grade IV supérieur à 50% ou présence de grade V Vélocité du PSA supérieure à 2 ng/ml/an PSADT inférieur à 6 mois, Taux de biopsies positives supérieur à 50%, Pourcentage de cancer supérieur à 30% L’association hormono-radiothérapie conformationnelle est le traitement de référence dans les tumeurs localement avancées pour les patients dont l’espérance de vie est supérieure à 10 ans. Une lymphadénectomie préalable est réalisée pour préciser le statut ganglionnaire si ce dernier influence l’indication, la technique et l’étendue de l’irradiation. La dose d’irradiation doit être au minimum de 70 Gy. Une hormonothérapie adjuvante pendant 3 ans est bénéfique en terme de survie sans récidive biologique aux patients présentant une tumeur à haut risque, notamment en cas de score de Gleason ≥ 8. L’irradiation des aires ganglionnaires pelviennes est optionnelle. La prostatectomie totale élargie non conservatrice avec curage ganglionnaire étendu ou la radiothérapie externe à haute dose sont des options en monothérapie pour certaines tumeurs localement avancées présentant un faible risque métastatique : cT3a, PSA < à 10 ng/ml, score de Gleason égal à 7, N0. La radiothérapie adjuvante à la prostatectomie totale améliore la survie sans récidive biochimique et clinique à 5 ans lorsque les critères anatomopathologiques post-opératoires montrent une extension extra prostatique, un envahissement séminal, des limites chirurgicales envahies, mais sans bénéfice actuellement sur la survie globale. L’hormonothérapie dans les cancers de la prostate à haut risque trouve ses indications principales avec un bénéfice sur la survie globale : - en adjuvant à la prostatectomie totale en cas d’envahissement ganglionnaire et il est recommandé qu’elle soit précoce. - associée à la radiothérapie externe sur une période d’au moins 3 ans. 16 STADE N1 (atteinte ganglionnaire régionale) 1) Devant une forte présomption de stade N1 lors du bilan d’extension : choix thérapeutique ouvert : - Patient jeune en bon état général, tumeur T1-T2 Mo dans l’hypothèse d’un traitement à visée curative secondaire (si pNo ou pN1 limité, à savoir micro métastase et pas plus de 2 ganglions atteints à l’examen histologique définitif) : lymphadénectomie étendue puis hormonothérapie exclusive si pN1, ou traitement à visée curative (prostatectomie ou radiothérapie) si pNo ou pN1 limité (dans ce cas on associe une hormonothérapie). - hormonothérapie exclusive et immédiate. - Surveillance hormonothérapie différée chez un patient asymptomatique si c’est son choix. 2) Devant un stade pN1 - à l’ex-temporane alors qu’une procédure de prostatectomie totale est engagée : Il est recommandé d’arrêter de la procédure si l’envahissement est massif. La prostatectomie est optionnelle si l’atteinte ganglionnaire est limitée (micro métastase, pas plus de 2 ganglions atteints). Hormonothérapie adjuvante. - après curage mené isolément, hormonothérapie exclusive ou surveillancehormonothérapie différée sauf si atteinte ganglionnaire limitée où on discutera un traitement local associé à une hormonothérapie. STADE MÉTASTATIQUE M1 : - Traitement hormonal recommandé en première ligne : Les classes thérapeutiques • Les œstrogènes • Les anti-androgènes : o Stéroïdiens : Acétate de cyprotérone (200 à 250 mg par jour en 2 prises) o Non stéroïdiens : Flutamide (750 mg par jour en trois prises), Nilutamide (prise unique 150 mg par jour), Bicalutamide (prise unique 50 à 150 mg par jour). • Les analogues de la LH-RH (Leuproréline, Buséréline, Triptoréline, Goséréline) • La castration chirurgicale L’initiation du traitement Un traitement hormonal immédiat est recommandé, apportant, par rapport au traitement différé, une augmentation du délai sans progression et une amélioration de la qualité de vie. Cependant, eu égard aux effets secondaires de l’hormonothérapie prolongée sur la qualité de vie, la surveillance avec hormonothérapie différée est une option envisageable chez certains patients (patients N1 avec tumeur bien différenciée, patients en évolution biologique et métastatiques après traitement radical) Une monothérapie par agonistes ou castration chirurgicale est recommandée. Le blocage androgénique complet est recommandé pendant le premier mois de traitement. Le BAC prolongé au-delà d’un mois avec un anti-androgène non stéroïdien apporte, sur la survie spécifique à 5 ans, un bénéfice significatif mais modeste par rapport à la castration chirurgicale, ou chimique avec un analogue. Ce bénéfice doit être mis en balance avec une morbidité plus lourde du BAC. L’utilisation d’anti-androgènes non stéroïdiens en monothérapie est formellement déconseillée en cas de maladie métastatique avancée. Elle est optionnelle sous certaines conditions : patient jeune, asymptomatique, masse métastatique modérée et désireux de conserver sa sexualité. Le traitement intermittent est optionnel sous les conditions décrites précédemment. 17 - Les ajustements du traitement hormonal en cas d’èchec de la première ligne : - modifications successives du traitement hormonal initial : • La prescription d’analogue de la LH RH doit être poursuivie. • Un blocage hormonal simple (monothérapie par analogues ou anti androgènes) doit être complété. • En cas de blocage complet, arrêt de l’anti-androgène. Il faut attendre 4 à 6 semaines pour mettre en évidence un syndrome de retrait. Possibilité de traitement hormonal de seconde ligne : Bicalutamide à forte dose 150 à 200 mg/jour), Diethylstilbestrol (1 à 3 mg/jour), inhibiteurs de la sécrétion surrénalienne de testostérone (aminogluthétimide, ketoconazole, corticoïdes,…) ECHEC THERAPEUTIQUE 1) La rechute après prostatectomie totale La récidive biochimique est définie par la persistance d’un PSA détectable 4 à 6 semaines après prostatectomie totale ou la réapparition d’un PSA détectable après une période plus ou moins longue d’indétectabilité. Il n’y a pas de consensus concernant la définition de la récidive biochimique après chirurgie (valeur seuil du PSA) En France, la valeur de 0,2 ng/ml a été retenue, complétée de 2 contrôles ≥ à 0,2 ng/ml pour commencer un traitement. La récidive locale est évoquée avec les paramètres suivants : élévation tardive du PSA après la prostatectomie (délai ≥ à 2 ans), temps de doublement du PSA > à 12 mois et vélocité du PSA < à 0,75 ng/ml/an, atteinte capsulaire (pT3a) ou limites d’exérèse (marges) positives (R1 voire R2), absence de grade de Gleason 4 majoritaire. La récidive à distance évocatrice d’une évolution métastatique est plus probable avec les paramètres suivants : augmentation précoce du PSA après la prostatectomie (dans la première année), temps de doublement du PSA < à 6 mois, la vélocité > à 0,75 ng/ml/an, envahissement des vésicules séminales (pT3b) ou des ganglions (pN1), faible différenciation tumorale (grade de Gleason 4 ou 5 majoritaire). En cas de récidive locale, un traitement précoce par radiothérapie externe de la loge prostatique à la dose de 60-66 Grays peut rattraper 50 à 70% des patients. Il est recommandé de commencer la radiothérapie avant que le PSA ne soit supérieur à 1-2 ng/ml. Devant une récidive systémique une hormonothérapie précoce permettant de diminuer la fréquence de métastases cliniques. Un analogue de la LH-RH ou un anti-androgène peut être utilisé. 2) la rechute après traitements par agents physiques (radiothérapie externe et curiethérapie Elle est définie par une élévation du PSA au delà de la valeur du nadir + 2 ng/ml. Cette définition permet de prendre en compte les fluctuations habituelles de valeur de PSA après traitement par radiothérapie et en particulier les phénomènes de rebond fréquents après curiethérapie et qui n’ont pas de valeur pronostique. Ces rebonds peuvent être parfois tardifs et élevés. Un traitement de rattrapage peut être envisagé devant une récidive locale diagnostiquée précocement chez un patient dont l’espérance de vie dépasse 10 ans. La prostatectomie de rattrapage, bien que difficile et morbide a sa place sous réserve de bien en cibler les indications en s’appuyant sur des critères précis. L’HIFU post-radiothérapie est possible mais encore en phase d’évaluation. Le candidat « idéal » à la prostatectomie de rattrapage doit répondre à plusieurs critères. Il doit avoir une espérance de vie de plus de 10 ans, être motivé et consentant. La maladie doit être initialement curable (< à T3b, PSA < à 10 ng/mL, score Gleason < à 8) et le temps de doublement du PSA lors de la récidive doit dépasser 10 mois. La récidive biologique doit être survenue au moins 2 ans après la radiothérapie (ou au moins 3 ans après la curiethérapie). La récidive locale doit être confirmé pas un bilan d’extension négatif (fondé sur l’imagerie et si possible le curage ganglionnaire). Enfin, la miction et la continence urinaire doivent être évaluées comme « normales ».Les examens préopératoires ont pour objectif de confirmer que la maladie est restée localisée. Ils comprennent le toucher rectal (qui doit être souple ou au plus ferme), un bilan d’extension (scanner abdomino-pelvien, radiographie thoracique, scintigraphie osseuse ou IRM du corps entier), une endoscopie uréthro-vésicale (pour éliminer une sténose du col 18 vésical, une vessie radique, une tumeur vésicale) et une exploration urodynamique (pour évaluer la compliance vésicale). La rectoscopie est recommandée dans les publications récentes, l’absence de signe de rectite étant un critère prédictif d’un clivage prostato-rectal plus favorable. 3) Hormono résistance et hormono indépendance Les patients en phase de résistance à la castration chimique ou chirurgicale doivent être discutés en RCP multidisciplinaire avec les oncologues. la collaboration multidisciplinaire débute dès la phase de résistance à la castration. - Définition de l’hormono-résistance : Il convient de distinguer l’hormono-indépendance (échec du traitement hormonal de première ligne) de l’hormono-résistance (échec d’un traitement de deuxième ligne). Une élévation du PSA de 50% par rapport au nadir sous traitement, à 2 dosages successifs réalisés à au moins 15 jours d’intervalle, traduit la reprise évolutive biologique. Il convient en premier lieu de confirmer le taux de castration efficace en réalisant un dosage sanguin de la testostérone (< 0, 3 ng/ml). En cas de résistance à l’hormonothérapie, l’analogue LH-RH est poursuivi. - Première étape en phase d’hormono-résistance L’arrivée des nouvelles hormonothérapies permet aujourd’hui de parler non pas d’hormono-résistance mais de résistance à la castration. De ce fait après échec aux 2 lignes conventionnelles d’hormonothérapie, il est proposé, dans le cadre d’études internationales aujourd’hui, la place de ces nouvelles hormonothérapies. Ces hormonothérapies s’adressent à des patients qui présentent une évolution métastatique de leur cancer et sont asymptomatiques ou peu symptomatiques. - La deuxième étape consiste en la prescription d’une chimiothérapie. L’instauration de cette chimiothérapie répond aux critères suivants : 1. Indications limitées aux tumeurs métastatiques en échappement biologique, (après vérification d’absence de syndrome de retrait et contrôle d’une testostéronémie < à 0,5 ng /ml). 2. Deux augmentations consécutives du PSA au-dessus du précédent contrôle (de la référence antérieure) doivent être documentées. 3. Avant traitement, les taux sériques du PSA doivent être > à 5 ng/ml pour assurer une interprétation correcte de l’efficacité thérapeutique. 4. Les bénéfices potentiels de la chimothérapie cytotoxique et les effets secondaires attendus sont discutés individuellement avec chaque patient à la consultation d’oncologie médicale. 5. Le docetaxel à la dose de 75 mg/m2 tous les 21 jours a montré un bénéfice significatif en survie globale, ainsi que sur la qualité de vie et la douleur et représente le traitement standard. 6. Chez les patients avec des métastases osseuses symptomatiques, le docétaxel et la mitoxantrone sont des options thérapeutiques reconnues ère 7. En phase de 1 ligne métastatique hormonorésistante, des essais thérapeutiques étudiant l’intérêt de l’adjonction de thérapeutiques ciblées au docetaxel sont en cours. 8. Concernant la prise en charge des sujets âgés, une consultation multidisciplinaire avec le patient, le gériatre et l’oncologue permet d’ajuster une indication de traitement oncologique à l’évaluation gériatrique du patient. Le GETUG propose actuellement des traitements dédiés à cette population. - Troisième étape Au moment de la nouvelle poussée évolutive de la maladie, après recours au docetaxel, de nouvelles molécules ont démontré leur intérêt en terme de bénéfice clinique et de survie : sipuleucel, cabacitaxel, abiratérone. De plus des essais internationaux sont en cours, étudiant la place de thérapeutiques ème ligne métastatique ciblées en association aux chimiothérapies de 2 19 - Traitement spécifique des manifestations cliniques • La prise en charge de la douleur • La période de soins palliatifs justifie la prescription de traitements symptomatiques associés (asthénie, anorexie, constipation, nausées vomissements, etc...) dans le cadre d’une collaboration pluridisciplinaire. • Métastases osseuses : o L’utilisation de bisphosphonates (zolédronate 4 mg IV tous les 3-4 semaines, associé à de la vitamine D et du calcium) réduit les évènements osseux. o Un traitement orthopédique préventif (cimentoplastie, ...) o Le traitement des métastases douloureuses uniques ou localisées peut être assuré par une radiothérapie centrée sur la zone douloureuse. o L’irradiation métabolique (par strontium 89 ou samarium 153) est proposée (en l’absence de thrombopénie) dans la prise en charge des localisations osseuses multiples douloureuses. o L’irradiation externe localisée ou hémi corporelle est possible chez les patients jeunes (< 75 ans) avec une espérance de vie supérieure à 6 semaines et un état général relativement conservé (OMS < 2) sans insuffisance cardiaque, hépatique ou rénale ni atteinte de la fonction médullaire. o Les signes cliniques de compression médullaire doivent être recherchés. • Troubles obstructifs urinaires. o L’obstruction du haut appareil urinaire o Une rétention urinaire vésicale o Troubles métaboliques • Autres o La CIVD o L’anémie. 20 RECOMMANDATIONS DE SUIVI La justification du suivi varie selon l’âge et les comorbidités du patient, le stade de sa tumeur au diagnostic et la séquence thérapeutique réalisée au préalable. Un âge avancé ou la présence de morbidités sévères font espacer les consultations et les bilans du suivi. L’interrogatoire est orienté sur l’apparition de signes fonctionnels ou d’effets secondaires des traitements. Le toucher rectal et le dosage du PSA sont suffisants en routine chez les patients asymptomatiques. Suivi clinique : - Le suivi clinique s’effectue par interrogatoire à la recherche de signes d’obstruction vésicoprostatique ou de douleurs osseuses. La recherche des effets secondaires des traitements est indispensable. - Après prostatectomie, le toucher rectal est recommandé en cas de PSA détectable, ou devant une tumeur de haut grade ou à risque de récidive locale. La récidive biologique précédant toujours la récidive clinique pelvienne, le toucher rectal peut être jugé optionnel dans le suivi des patients ayant une valeur de PSA total indétectable. - Après radiothérapie, curiethérapie et HIFU le toucher rectal sera réalisé annuellement et de façon prolongée (10ans). Suivi biologique : • Le dosage du PSA sérique est recommandé. o Après prostatectomie, la valeur du PSA doit être indétectable à 3 mois. Il sera renouvelé à 6 mois puis, s’il est indétectable, de façon semestrielle pendant 3 ans puis annuelle pendant 10 ans. Une valeur de PSA ≥ 0.2 ng/ml est un signe d’échec du traitement à visée curatrice par persistance de tissu tumoral soit locale (par atteinte des limites chirurgicales) d’exérèse, soit par l’existence de micro métastases méconnues, ou plus rarement d’une prostatectomie incomplète (tissu normal résiduel). Comment différencier une récidive locale ou métastatique : La récidive locale est vraisemblable en cas d’élévation tardive du PSA après le geste chirurgical (> 2 ans), si le temps de doublement du PSA est supérieur à 11 mois et la vélocité inférieure à 0, 75 ng/ml par an, d’autant plus que la pièce opératoire montrait une atteinte capsulaire ou des limites d’exérèse (marges) positives (R1) et un score de Gleason < 7. Une évolution métastatique est très probable lorsque le PSA augmente précocement avant 2 ans, que le temps de doublement est inférieur à 11 mois, la vélocité > 0, 75 ng/ml par an, d’autant plus que l’examen histologique objectivait un envahissement des vésicules séminales ou ganglionnaire, et une faible différenciation cellulaire (score de Gleason ≥ 7). o Après radiothérapie ou curiethérapie, le PSA sera dosé de façon semestrielle pendant 3 ans puis annuelle pendant 10 ans. Les critères de guérison utilisés ne sont pas standardisés. La valeur nadir du PSA est la valeur pronostique la plus importante. Un PSA nadir < 0.5 ng/ml après radiothérapie ou curiethérapie est un facteur de bon pronostic. Un rebond du PSA peut survenir dans les mois qui suivent le traitement sans valeur prédictive défavorable. L’échec du traitement à visée curatrice après radiothérapie est défini par un PSA supérieur au nadir + 2 ng/ml. o Après HIFU Un dosage du PSA est réalisé 3 mois après l’application des ultrasons. Un nadir de PSA < à 1 ng/ml (voire 0,5 ng/ml) à 3 mois est corrélé à un risque de récidive faible. La réalisation de biopsies prostatiques de contrôle est proposée de principe pour une valeur de PSA nadir > à 1 ng/ml, ou en cas d’augmentation continue de la valeur du PSA sur 3 prélèvements 21 successifs, ou si la vélocité annuelle du PSA dépasse > à 0,75 ng/ml. Une surveillance semestrielle du PSA peut être proposée pendant 3 ans, puis annuelle. L’échec du traitement par HIFU est définie : par la positivité d’une biopsie de contrôle ou pour les patients présentant des biopsies négatives, 3 augmentations successives de la valeur du PSA avec une vélocité sur un an > à 0,75 ng/ml. o • • • Après traitement hormonal, un premier dosage du PSA est recommandé à 3 mois et/ou 6 mois pour déterminer le nadir après traitement. Le dosage des transaminases dans le cadre d’un traitement par anti-androgène non stéroïdien est réalisé à 1, 3 et 6 mois après le début du traitement ou en cas de symptomatologie digestive. Une numération sanguine régulière est souhaitable en cas de traitement hormonal prolongé par BAC pour vérifier l’absence d’anémie sévère. Un dosage de la créatinémie chez les patients localement évolués est recommandé d’autant plus qu’existent des signes d’envahissement ou de compression urétérale. Suivi par imagerie et biopsies prostatiques: La surveillance biologique et clinique prime sur la réalisation d’examens radiographiques. • Scintigraphie osseuse si évolution clinique ou PSA > 5 ng/ml après prostatectomie totale ou radiothérapie. • TDM abdomino-pelvien si suspicion d’atteint ganglionnaire. • IRM rachidienne si suspicion d’atteinte vertébrale. • Biopsies prostatiques après HIFU si PSA > 1 ng/ml après traitement ou 3 élévations continues sur 3 dosages à 3 mois. Le suivi d’un traitement hormonal peut ne consister qu’en un examen clinique, un dosage du PSA et la recherche des effets secondaires liés à la castration. La stabilité du PSA autorise à ne pratiquer aucun examen d’imagerie. Cas particuliers : 1. Attitude d’abstention surveillance : PSA semestriel pendant 4 ans, puis annuel. 2. Attitude de surveillance active : PSA tous les 3 à 6 mois couplé au TR., bilan local par biopsies à un an puis tous les 2-3 ans. ANNEXE Référentiel OMIT : Cancer de la prostate Traitements recommandés (AMM, extensions) : ère Taxotère* monothérapie 1 ligne (TAX 327) Traitements non recommandés : Taxotère* en association Alimta*, eloxatine*, erbitux*, gemzar*, herceptin*, taxol* 22 TUMEURS UROTHELIALES CLASSIFICATION TNM 2010 Tumeurs de vessie T Tumeur primitive Tx Tumeur primitive non évaluable T0 Tumeur primitive non retrouvée Ta Carcinome papillaire non invasif Tis Carcinome in situ « plan » T1 Tumeur envahissant le chorion T2 Tumeur envahissant la musculeuse pT2a Tumeur envahissant le muscle superficiel (moitié interne) pT2b Tumeur envahissant le muscle profond (moitié externe) T3 Tumeur envahissant le tissu péri-vésical pT3a Envahissement microscopique pT3b Envahissement extra-vésical macroscopique T4 Tumeur envahissant une structure péri-vésicale T4a Prostate, vagin ou utérus T4b Paroi pelvienne ou abdominale N Ganglions lymphatiques régionaux Nx Ganglions non évaluables N0 Absence de métastase ganglionnaire régionale N1 Métastase ganglionnaire unique ≤ 2 cm N2 Métastase ganglionnaire unique > 2 cm et ≤ 5 cm ou métastases ganglionnaires multiples ≤ 5 cm N3 Métastase(s) ganglionnaire(s) > 5 cm M Métastases à distance Mx Métastases non évaluable M0 Absence de métastase à distance M1 Métastase(s) à distance Tumeurs des voies excrétrices supérieures T Tumeur primitive Tx Tumeur primitive non évaluable T0 Tumeur primitive non retrouvée Ta Carcinome papillaire non invasif Tis Carcinome in situ T1 Tumeur envahissant le chorion T2 Tumeur envahissant la musculeuse T3 Bassinet et calices : tumeur dépassant la musculeuse envahissant la graisse péri-pyélique ou le parenchyme rénal Uretère : tumeur dépassant la musculeuse et envahissant la graisse péri-urétérale T4 Tumeur envahissant les organes de voisinage ou la graisse péri-rénale à travers le rein N Ganglions lymphatiques régionaux Nx Ganglions non évaluables N0 Absence de métastase ganglionnaire régionale N1 Métastase ganglionnaire unique ≤ 2 cm 23 N2 Métastase ganglionnaire unique > 2 cm et ≤ 5 cm ou métastases ganglionnaires multiples ≤ 5 cm N3 Métastase(s) ganglionnaire(s) > 5 cm M Métastases à distance Mx Métastases non évaluable M0 Absence de métastase à distance M1 Métastase(s) à distance INTRODUCTION Un carcinome vésical est diagnostiqué ou traité dans le monde chez 2,7 millions de personnes chaque année et dans la majorité des cas les tumeurs urothéliales apparaissent après 60 ans . En France, cette ème pathologie occupe la 7 place, tous cancers confondus (INVSS 2008) et constitue le second cancer urologique après celui de la prostate. Le carcinome vésical est responsable de 3% des décès par cancer, son incidence est en augmentation d’environ 1% par an, mais sa mortalité spécifique semble diminuer chez l’homme. Il est aujourd'hui fortement recommandé d’utiliser la dénomination TVNIM pour les tumeurs sans infiltration du muscle vésical et TVIM en cas d’infiltration tumorale du détrusor . Tableau 1. Classification des tumeurs de vessie Stade T pTa pTis pT1 ≥pT2 Description Tumeur papillaire de grade variable sans infiltration du chorion Tumeur plane de haut grade sans infiltration du chorion Tumeur papillaire de grade variable avec infiltration du chorion mais sans infiltration du muscle Tumeur qui infiltre au moins le muscle 1 Dénomination TVNIM 1 2 TVIM TVNIM : Tumeur de vessie sans infiltration du muscle TVIM : Tumeur de vessie avec infiltration musculaire 2 Lors du diagnostic initial, 75 à 85% des tumeurs sont des TVNIM : 60 à 70 % des lésions récidiveront la première année et 10 à 20 % progresseront vers des tumeurs invasives et/ou métastatiques. La prévention des TVNIM repose sur la lutte contre les principaux facteurs de risque que sont le tabagisme et l'exposition professionnelle (carcinogènes chimiques). A l'opposé, les tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure (TVEUS) sont des tumeurs beaucoup plus rares, avec une incidence de 1 à 2 cas pour 100 000 habitants et par an. 24 DIAGNOSTIC ET UROTHELIALES BILAN D’EXTENSION DES TUMEURS I - TUMEURS VESICALES 1. Diagnostic précoce et symptômes 1 - 1 - Signes cliniques L’hématurie macroscopique, souvent terminale, constitue le signe clinique le plus fréquent. Des signes d’irritation vésicale (pollakiurie, miction impérieuse, brûlure urinaire) sont observés dans 20% des cas. En l’absence d’infection urinaire, ces symptômes doivent faire suspecter l’existence d’un carcinome in situ vésical. 1 - 2 - Examen clinique Les touchers pelviens permettent d’apprécier le blindage pelvien en cas de TVIM. 1 - 3 - Indication du dépistage individuel L’hématurie peut être microscopique et décelée simplement par la recherche à la bandelette urinaire (Hémastix®). Un diagnostic précoce peut-être envisagé en cas d’intoxication tabagique ou d’exposition professionnelle avec des carcinogènes chimiques. 1 - 4 - Marqueurs tumoraux De nombreux tests urinaires à visée diagnostique ont été décrits avec deux objectifs : - d'une part, dépister une TVNIM asymptomatique dans une population à risque. - d'autre part, simplifier les modalités de surveillance des TVNIM en réduisant les indications de la cystoscopie. Les recommandations de l’International Consensus Panel on Cytology and Bladder Tumor Markers suggèrent d’associer la cytologie urinaire à ces différents tests afin d’en améliorer la sensibilité. Cependant, aucun test urinaire ne se dégage à ce jour pour une utilisation en pratique clinique. 2. Examens para-cliniques à visée diagnostique 2 - 1 - Cytologie Urinaire La cytologie urinaire : - détecte les cellules tumorales de haut grade avec une très grande spécificité. - mais présente une faible sensibilité pour les tumeurs de bas grade. - son interprétation reste très dépendante du médecin qui la réalise. Une cytologie urinaire positive peut indiquer la présence d’une tumeur n’importe où dans la voie excrétrice urinaire. La technique de FISH augmente la sensibilité de la cytologie en mettant en évidence des anomalies cytogénétiques spécifiques intéressantes dans les cas difficiles ou pour le dépistage des TVES. La cytologie demeure avec la cystoscopie un des examens de référence pour la détection et la surveillance des TVNIM, notamment de haut grade. 25 2 - 2 - Examens d’imagerie a - Echographie L’échographie par voie sus-pubienne : sensibilité de 61 % à 84 % pour les tumeurs de type polypoïde > à 5 mm. o diagnostic différentiel : présence de caillots (mobiles, pas de vascularisation Doppler, fragmentables par pression de la sonde). o indication voie endorectale : patient obèse et vessie vide. o une échographie négative ne permet pas d’éviter la cystoscopie. b - Examen tomodensitométrique La TDM est habituellement réservée au bilan d’extension, en particulier pour les TVIM. Pour éliminer une lésion associée du haut appareil urinaire, l'uro-scanner est aujourd'hui l'examen de référence (en hyperdiurèse avec temps excrétoire) et remplace donc l'UIV. 2 - 3 - Endoscopie diagnostique Le diagnostic de la tumeur de vessie dépend principalement de l’examen endoscopique et de l’examen histologique de la totalité de la lésion réséquée. Lorsque le patient est adressé avec une échographie évoquant fortement une tumeur vésicale, l’étape de la cystoscopie diagnostique avant la résection endoscopique est optionnelle. Elle est réalisée habituellement par fibroscopie sous anesthésie locale. La fibroscopie précise le nombre, la taille, la topographie, l’aspect de la tumeur et de la muqueuse vésicale. 2 - 4 - Résection trans-urétrale de la vessie La résection dans les TVNIM doit être si possible complète et profonde (présence de trousseaux musculaires). La cartographie des lésions est essentielle. Elle précise le nombre de tumeurs, leur topographie par rapport à l’urèthre prostatique et aux orifices urétéraux, leur taille et leur aspect (pédiculé ou sessile). Les biopsies randomisées de la muqueuse ne sont plus réalisées en routine. Elles sont indiquées sur les zones anormales évoquant un carcinome in situ. L’utilisation de la fluorescence (acide hexaminolevulinate en instillation) lors de la RTUV améliore significativement le diagnostic du carcinome in situ et la qualité de la résection avec un impact possible sur la récidive tumorale. Les principales indications de l'utilisation de la fluorescence vésicale sont : • Lésions vésicales multifocales • Diamètre tumoral > 3 cm • Récidive tumorale précoce • Cytologie de haut grade • Surveillance de lésions à haut risque (T1 G3 et CIS) 26 3. Examens para-cliniques du bilan d’extension 3 - 1 - Examen Tomodensitométrique En cas de TVNIM, le bilan d’extension par TDM n’est pas systématique, mais d’autant plus justifié que le grade est élevé ou que la tumeur est volumineuse puisqu’il existe un risque de sous-stadification. En cas de TVIM, la TDM est l’examen de référence pour le bilan d’extension, qui permet : o l’évaluation du retentissement sur le haut appareil urinaire o d'apprécier l’envahissement des organes de voisinage et de la graisse péri-vésicale o la recherche d’adénopathies et /ou de métastases (les premiers sites métastatiques étant les ganglions et le poumon). Le diagnostic d'infiltration de la graisse péri-vésicale ou péri-lésionnelle a une sensibilité de 89% et une spécificité de 95%, avant la résection. En revanche, lorsque la TDM est réalisée après la RTUV, il existe une surestimation de l'extension à cause de remaniements inflammatoires de la graisse péri-vésicale. La TDM ne détecte qu’un envahissement massif dans la prostate ou les vésicules séminales, mais permet d'apprécier un éventuel envahissement des structures digestives et l'existence de métastases viscérales (hépatiques et pulmonaires). La recherche de localisations cérébrales est indiquée devant des manifestations cliniques. 3 - 2 - IRM En pratique, l’IRM pelvienne n’est utile que lorsque l’on suspecte une extension aux organes de voisinage (stade pT3b) avec une fiabilité diagnostique du de 94%. L’IRM permet également le diagnostic d'envahissement de la paroi pelvienne avec lyse osseuse. 3 - 3 - PET FDG- CT Il n’existe pas actuellement de données suffisantes dans le bilan des tumeurs urothéliales. 3 - 4 - Evaluation de l'extension ganglionnaire Le critère diagnostique d’adénopathie métastatique pelvienne est identique en TDM et en IRM, basé uniquement sur la taille (8 mm de plus petit axe). Pas de différence significative entre la TDM et l’IRM avec une sensibilité globale de 36 % et une spécificité entre 80 et 97 %. La TDM hélicoïdale conventionnelle reste la méthode la plus couramment utilisée et la plus facilement accessible pour détecter une adénomégalie. 3 - 5 - Recherche de métastases osseuses La scintigraphie osseuse n'est pas indiquée de façon systématique dans les TVIM, mais reste l'examen de première intention en cas de point d'appel clinique. Les foyers suspectés seront contrôlés par radiologie conventionnelle ou au mieux par TDM. Une ponction biopsie guidée sous TDM est à envisager en dernier recours si le doute persiste. 4. Diagnostic anatomo-pathologique Le diagnostic de TVNIM impose l’examen de la totalité des copeaux de résection. Le grade cellulaire et le stade tumoral restent les deux critères fondamentaux dans la prise en charge ultérieure. La référence actuelle pour le grading des tumeurs urothéliales est la classification OMS 2004 [3]. Celle-ci majore la proportion de carcinomes de haut grade par rapport à la classification OMS 73 : 27 OMS 1973 Carcinome G1 OMS 2004 Tumeur de faible potentiel de malignité Carcinome de bas grade Carcinome G2 Carcinome de bas grade Carcinome de haut grade Carcinome G3 Carcinome de haut grade Les TVNIM sont divisées en bas et haut grades dans la nouvelle classification En pratique, la classification OMS 2004 : - paraît plus en adéquation avec les marqueurs tumoraux vésicaux. - présente une meilleure reproductibilité que la classification OMS 73. - décrit de façon exhaustive les différents « variants » des tumeurs urothéliales infiltrantes. Ces contingents variants pouvant modifier la prise en charge diagnostique et thérapeutique. L'évaluation du stade tumoral (TNM 2010) sera également réalisée sur le matériel de résection, mais avec quelques réserves : - ne permet pas de statuer sur la profondeur de l’infiltration du muscle, c'est-à-dire de séparer les T2a des T2b (donnée obtenue uniquement lors de l'analyse de la pièce de cystectomie). - la résection ne permet pas d’aller au-delà du stade « T2 au moins ». En effet, la présence d’îlots de tissu adipeux ne signifie pas que la séreuse soit infiltrée, car du tissu adipeux est présent au sein de la musculeuse et du chorion. - permet de sous-stadifier l’infiltration du chorion en T1a (chorion superficiel) et T1b (chorion profond), dont la valeur pronostique est démontrée. - la présence d'emboles vasculaires ne modifie pas le stade, mais doit être précisée car sa valeur pronostique est reconnue. 28 En pratique, les examens recommandés pour le diagnostic d'une TVNIM sont : (Recommandation de grade B) • Cytologie urinaire • Cystoscopie avec cartographie des lésions associée à une résection endoscopique et précédée d’un ECBU • Evaluation du haut-appareil par Uro-TDM en cas de TVNIM volumineuse, ou multifocale, ou de haut grade cellulaire En pratique, les examens recommandés pour le diagnostic et le bilan d’extension d'une TVIM sont : (Recommandation de grade B) • Cytologie urinaire • Cystoscopie avec cartographie des lésions associée à une résection endoscopique et précédée d’un ECBU • Uro-TDM systématique • Bilan d'extension avec TDM thoracique 29 II - TUMEURS DES VOIES EXCRETRICES SUPERIEURES Les TVEUS sont découvertes, soit devant des signes cliniques, soit lors du bilan d’une tumeur de vessie. Dans un tiers des cas, les TVEUS sont multifocales et bilatérales dans 2 à 8% des cas. Moins de 10% des TVEUS ont une lésion vésicale synchrone, la zone de prédilection étant la région péri-orificielle. Il est important de noter que les recommandations diagnostiques proposées pour les TVEUS reposent essentiellement sur l'analyse de séries rétrospectives. 1. Bilan initial 1 - 1 - Cytologie urinaire Une cytologie urinaire de haut grade est très évocatrice de TVES, lorsque la cystoscopie est normale. Elle est moins sensible même pour les lésions de haut grade que dans la vessie. La recherche d'anomalies moléculaires par technique de FISH est prometteuse avec une sensibilité de 80% sans altération de la spécificité. 1 - 2 - Uro-TDM Il constitue l'examen de référence pour l’exploration de la voie excrétrice supérieure et remplace désormais l’urographie intraveineuse. Mais sa définition est stricte et correspond à une acquisition au temps excréteur : • • • • protocoles multiples allant de deux à quatre acquisitions spiralées au moins millimétriques avant et après injection de produit de contraste. reformations 2D multiplanaires en phase excrétrice pour le haut appareil urinaire et la vessie essentielles. injection préalable d’un diurétique à faible dose indispensable pour détecter une petite lésion dans les cavités pyélocalicielles et mieux voir l’uretère. taux d’irradiation initialement élevé, mais nettement réduit sur les appareils récents équipés des systèmes de modulation de la dose adaptée à chaque patient. Le taux de détection est satisfaisant lorsque l'on utilise ce type d'imagerie : sensibilité de 96% et spécificité de 99% pour une lésion polypoïde entre 5 et 10 mm. En revanche, la sensibilité chute à 89 % pour une lésion polypoïde < 5 mm et 40% pour une lésion polypoïde < 3 mm. La principale difficulté demeure les lésions planes indétectables, en dehors d’une infiltration massive ou simulant une urétérite. 1 - 3 - IRM de la voie urinaire supérieure La réalisation de l'IRM est indiquée en cas de CI à l’examen TDM : taux de détection de 75% avec injection de contraste d’un processus tumoral < 2 cm. L'IRM injectée reste contre-indiquée en cas d’insuffisance rénale sévère (< 30 ml/min de clearance créatinine) du fait du risque de fibrose néphrogénique. L’IRM sans injection est alors moins contributive. 2. Urétéroscopie diagnostique L’urétéroscopie s’intègre dans une meilleure approche du diagnostic positif et différentiel. En effet, l’utilisation d'un urétéroscope souple permet : - d’explorer macroscopiquement l’uretère et l’ensemble des cavités rénales dans près de 95% des cas. - d’apprécier l’état de la paroi où s’implante la tumeur. - d’effectuer un diagnostic visuel macroscopique. - d’y associer un prélèvement histologique de la lésion (biopsies contributives pour déterminer le grade tumoral dans 90% des cas avec un taux de faux négatifs de l’ordre de 5%). 30 - de rechercher de cellules anormales au cours d’une cytologie urinaire in situ. L’urétéroscopie (souple ou rigide) est particulièrement utile lorsqu'il existe un doute diagnostique ou lorsqu’un traitement conservateur est envisagé. Son indication doit donc être systématiquement discutée dans le bilan pré-opératoire d'une TVEUS. En pratique, le bilan suivant est recommandé en cas de TVEUS : • Cytologie urinaire, idéalement in situ • Uro-TDM (acquisition au temps excréteur) • Urétéroscopie avec prélevements biopsiques • Cystoscopie pour éliminer une lésion vésicale synchrone 31 32 TRAITEMENT DES TUMEURS Tis/ Ta/ T1 En utilisant six principaux paramètres clinico-pathologiques (grade, stade, taille de la tumeur, taux antérieur de récidive, présence de CIS concomitant et nombre de tumeurs), il est possible de calculer la probabilité de récidive et de progression d'une TVNIM selon les tableaux de risque élaborés par l’EORTC (www.eortc.be/tools/bladdercalculator). Ainsi, il est classique de différencier en fonction du risque de récidive et de progression : Ta unique, bas grade ou LMP* (grade diamètre < 3 cm et absence de récidive tumorale Risque faible Risque intermédiaire 1) et - Ta bas grade ou LMP (OMS 73) multifocal et/ou récidivante, - T1 bas grade (grade 1-2) - Ta haut grade (grade 2/3 et 3) - T1 haut grade (grade 2/3et 3) ou T1 récidivante - CIS (carcinome in situ) Risque élevé *LMP : Low Malignancy Potential (tumeur à faible potentiel de malignité) 1 - Différents traitements 1 - 1 - Traitement initial : résection trans-urétrale de vessie Au-delà de son intérêt diagnostique et pronostique, la RTUV (résection transurétrale de vessie), aussi complète que possible, constitue le premier temps du traitement. En cas de tumeur de stade T1 de grade élevé, de tumeur volumineuse et/ou multifocale ou de résection incomplète, une ré-évaluation endoscopique et histologique dans un délai de 4 à 6 semaines permet une stadification plus précise, améliore la sélection (et donc la réponse) des patients au traitement endo-vésical, réduit la fréquence des récidives et pourrait retarder la progression de la tumeur. 1 - 2 - Traitement adjuvant : instillations endovésicales En complément de la RTUV, un traitement par instillations endovésicales peut être nécessaire selon le risque de récidive et de progression, soit par chimiothérapie (Mitomycine C - MMC), soit par immunothérapie (Bacille Calmette Guérin - BCG). Instillation post-opératoire précoce de Mitomycine C Après la RTUV, une instillation post-opératoire précoce (IPOP) de Mitomycine C est recommandée, en respectant systématiquement ses contre-indications (l’hématurie et la perforation vésicale). Elle est réalisée au plus tard dans les 24 heures qui suivent la RTUV. L'IPOP après RTUV diminuerait le risque de récidive tumorale de 12 à 39%, que la lésion soit uni- ou multi-focale . Mitomycine C (chimiothérapie) L’efficacité de la MMC dépend de son mode d’utilisation. Il est recommandé de prévoir : - une réduction de la diurèse 8 heures avant l’instillation. - une alcalinisation des urines par du bicarbonate de sodium. Le traitement actuellement classique est de 6 à 8 instillations hebdomadaires de 40 mg, suivies ou non d’instillation mensuelles. Les conditions dans lesquelles sont réalisées ces instillations sont essentielles, car la Mitomycine C peut-être facilement inactivée. 33 BCG (immunothérapie) Le BCG ne sera débuté que 4 à 6 semaines après la dernière résection et en l’absence de toute hématurie macroscopique et infection urinaire (ECBU < 4 jours). Le traitement d’attaque est de 6 instillations hebdomadaires (suivi d’un contrôle cytologique et endoscopique), complété par 3 instillations hebdomadaires après 6 semaines d’arrêt. Enfin, un traitement d’entretien peut être proposé sur une durée totale de 3 annèes selon la tolérance au traitement. 2 - Indications En fonction de l’histologie de la RTUV, la prise en charge thérapeutique est discutée selon le risque estimé de récidive/progression tumorale : 2 - 1 - TVNIM à faible risque Une instillation immédiate simple réduit le risque de récidive et peut être considérée comme le traitement standard. Aucun autre traitement ne devrait être proposé chez ces patients en l’absence de récidive tumorale. 2 - 2 - TVNIM de risque intermédiaire La probabilité d'une récidive tumorale est évaluée de 24 à 38% la première année, 46 à 62% à cinq ans, alors que le risque de progression tumorale est respectivement de l'ordre de 1 à 5% et 1 à 17 %. L'instillation post-opératoire précoce de chimiothérapie ne semble pas modifier l'évolution des patients de risque intermédiaire avec des lésions tumorales multiples. Le traitement de référence repose sur une chimiotherapie intra-vésicale mais sans consensus sur la durée et la fréquence des instillations. Une réduction du taux de récidive a été rapportée lorsque le traitement d’entretien était poursuivi pendant au moins 1 ou 2 ans. Une méta-analyse de 22 études prospectives randomisées évaluant le rôle de la chimiothérapie intra-vésicale dans la prise en charge des TVNIM de risque intermédiaire n’a démontré aucun avantage sur le plan de la réduction du taux de progression en comparaison avec une RTUV seule. Les instillations de BCG peuvent être discutées pour traiter ce groupe pronostique de tumeurs vésicales. Plusieurs études prospectives comparant le BCG à la Mitomycine C (MMC) ont conclu que le BCG avec traitement d'entretien retardait au moins la progression vers une maladie envahissant le muscle, tout en diminuant la fréquence des récidives tumorales. Les données de l’essai EORTC 30911 suggèrent que le BCG est supérieur à la chimiothérapie pour le traitement des TVNIM de risque intermédiaire en termes de délai d’apparition de la première récidive tumorale, de survies globale et spécifique. Cependant, l’avantage à long terme du BCG par rapport à la chimiothérapie reste controversé compte-tenu de son plus grand risque de toxicité et de moindre tolérance. Il a été rapporté qu’un traitement à tiers de dose de BCG serait plus efficace que la Mitomycine pour prévenir récidive et progression pour des tumeurs de pronostic intermédiaire. Au total, les TVNIM de risque intermédiaire incluent un groupe hétérogène de tumeurs : l'identification de sous-groupes paraît nécessaire pour différencier les patients qui seront uniquement traités avec des doses simples de MMC post-opératoire, de ceux dont le risque évolutif plus péjoratif justifierait un traitement d'entretien voire le recours à une BCGthérapie. La modification des grades (OMS 2004) devrait à l'avenir permettre de mieux identifier les patients à risque justifiant plutot une BCGthérapie. 2 - 3 - TVNIM à haut risque Le traitement de référence est la résection endoscopique complète suivie 4 à 6 semaines d’un traitement adjuvant par instillation endovésicale de BCG, de préférence à la chimiothérapie intravésicale par Mitomycine. Dans de rares cas, une cystectomie d’emblée peut être indiquée. a - Indication d’une deuxième résection avant BCG thérapie Toute immunothérapie par le BCG doit être précédée d’une RTUV complète. Un panel d’experts 34 internationaux conseille même une nouvelle résection systématique des tumeurs T1 de haut grade, en raison du taux élevé de sous-évaluation du stade. b - Quel traitement d’entretien ? L'objectif du traitement chez les patients avec des lésions à haut risque est avant tout de prévenir la progression tumorale. Une importante méta-analyse de l’EORTC regroupant 24 essais incluant un total de 4 863 patients a montré que le traitement de maintenance par BCG est associé à une réduction de 37% du risque de progression en comparaison aux groupes contrôles (RTUV seule, RTUV et chimiotherapie intra-vésicale, RTUTV et immuno-thérapie). Le traitement d’attaque par BCG repose sur six instillations hebdomadaires suivies de 3 instillations hebdomadaires après un arrêt de 6 semaines, considéré comme le schéma de référence pour le traitement des TVNIM à haut risque. L'objectif étant de prévenir ou retarder la récidive tumorale et l'infiltration du muscle vésical tout en permettant le contrôle d'un éventuel CIS associé. Différents essais ont suggéré que le traitement d'entretien pourrait améliorer les résultats du traitement de BCG, mais le schéma optimal du traitement d'entretien reste à définir. Seule l'étude randomisée du SWOG (South West Oncology Group) a clairement démontré un avantage au traitement d’entretien en terme de survie sans récidive et de progression tumorale. Le protocole proposé par Lamm (6 instillations hebdomadaires pour le traitement d’induction, suivies de 3 instillations hebdomadaires à 3, 6, 12, 18, 24, 30 et 36 mois) reste actuellement le plus utilisé, même si le nombre optimal de cycles d'entretien n'est pas toujours possible, les patients étant encouragés à accepter au moins 3 cycles d'entretien et à continuer les instillations tant qu’elles sont bien tolérées. Pour les patients présentant un carcinome in situ vésical, l’EAU recommande un traitement d’induction de BCG suivi d’un traitement de maintenance d'au moins un an. La réponse à la BCG-thérapie doit absolument être évaluée trois mois après le traitement d’induction. En cas de persistance du CIS, il est recommandé de poursuivre le traitement par six nouvelles instillations hebdomadaires. Si une réponse complète n’est pas obtenue après 6 mois, la cystectomie totale est alors recommandée. De même, une sous-population de TVNIM à très haut risque peut être clairement identifiée. En considérant l’ensemble des critères de mauvais pronostic, chez des patients jeunes, il est possible de sélect ionner de rares candidats à la cystectomie précoce. Risque faible Surveillance simple Risque intermédiaire Instillations hebdomadaires de mitomycine (MMC) sur 8 semaines consécutives après cicatrisation vésicale (4 à 6 semaines). Le BCG peut être discuté en alternative aux instillations de MMC de première intention ou en cas d’échec du traitement par la mitomycine. Risque élevé Instillations endovésicales de BCG (sauf contreindications) après cicatrisation vésicale (4 à 6 semaines). Si les instillations de BCG sont bien supportées, intérêt d'un traitement d’entretien. En cas d’échec du traitement par BCG, la cystectomie totale demeure le traitement de choix. Après la RTUV, une cystectomie d’emblée peut être discutée en RCP dans certaines formes de mauvais pronostic chez des patients jeunes. 35 3 - RESULTATS 3 -1 - Modalités de suivi a - Suivi lié aux instillations vésicales Mitomycine : les effets indésirables principalement rapportés sont des effets locaux à type de cystite chimique, ainsi que des allergies cutanées. BCG : compte-tenu des risques imputables au traitement, un bilan spécifique à l’initiation du traitement est recommandé et chaque nouvelle instillation est précédée d’un examen clinique, d’une évaluation de la tolérance des instillations précédentes et d’un ECBU (< 4 jours). Les effets indésirables principalement rapportés sont : • locaux : cystite (pollakiurie, dysurie, hématurie, fuites urinaires). • régionaux : douleurs pelviennes ou rénales, constipation, prostatite, épididymite, orchite, abcès rénal. • généraux : fièvre >38,5°C, syndrome grippal, doule urs musculaires, asthénie, arthralgie, signes allergiques et rash cutané. b - Suivi carcinologique En raison du risque de récidive tumorale et de progression de la maladie vésicale, la fréquence des cystoscopies est à moduler en fonction du groupe de risque pour une surveillance adaptée. En effet, un retard dans le diagnostic et la prise en charge thérapeutique de récidives tumorales de haut grade à fort potentiel d'infiltration musculaire menaçant la vie du patient. Ainsi, le résultat de la première cystoscopie à 3 mois de la RTUV initiale est un facteur pronostic très important tant pour la récidive tumorale, que pour le risque de progression musculaire. Les examens du suivi sont effectués selon le groupe de risque de la maladie vésicale : ème ème ème ème ème ème Risque faible Cystoscopie : au 3 , 6 , 12 mois puis annuelle pendant 10 ans (à vie si persistance de l’intoxication tabagique) Risque intermédiaire Cystoscopie : au 3 , 6 , 12 mois puis annuelle pendant 15 ans (à vie si persistance de l’intoxication tabagique) Cytologie urinaire : recommandée, couplée à la cystoscopie Uro-TDM : tous les deux ans et en cas de cytologie positive ou de symptôme en faveur d’une atteinte du haut appareil Risque élevé Cystoscopie au 3 , 6 , 9 , 12 mois, puis tous les 6 ème mois la 2 année, puis annuelle à vie ème ème ème ème Cytologie urinaire au 3 , 6 , 9 , 12 mois, puis tous ème les 6 mois la 2 année, puis annuelle à vie Uro-TDM tous les 2 ans ou si cytologie positive ou de symptôme en faveur d’une atteinte du haut appareil ème ème ème ème 3 - 2 - Echec des instillations endo-vésicales a - Echec après chimiothérapie intra-vésicale Les patients présentant des récidives non infiltrantes après la chimiothérapie intra-vésicale peuvent bénéficier dans un second temps des instillations endo-vésicales de BCG. 36 b - Echec après BCG thérapie : définitions Le traitement par instillations de BCG doit être considéré comme un échec dans les situations cliniques suivantes : • lorsqu’une tumeur infiltrant le muscle est détectée lors du suivi systématique. • si une tumeur de haut grade non infiltrant le muscle est présente à 3 mois et 6 mois. • toute aggravation de la maladie vésicale sous traitement par BCG : une récidive multifocale, un stade tumoral ou un grade cellulaire plus élevé, la persistance d'un carcinome in situ (CIS), malgré une réponse initiale. Définition des différents types d’échecs de la BCG thérapie. - Patients intolérants au BCG : il existe une récidive tumorale après un traitement non adéquat, interrompu prématurément, à cause d’effets secondaires importants. - Patients réfractaires au BCG : persistance d'une tumeur à 6 mois après un traitement d’induction associé à un traitement d'entretien ou à un traitement de ré-induction après le bilan à 3 mois. Dans ce groupe sont inclus les patients qui présentent une progression en grade cellulaire ou stade tumoral à 3 mois après le premier cycle d’induction. - Patients résistants au BCG : persistance d'une lésion de plus faible grade cellulaire et/ou stade tumoral, ou récidive tumorale après le traitement initial, mais il existe 6 mois après la résection initiale une réponse thérapeutique aux instillations de BCG. - Patients récidivants à distance du traitement initial : absence de récidive tumorale durant les 6 mois suivant la résection, mais apparition d'une récidive précoce (avant 12 mois), intermédiaire (12-24 mois) ou tardive (après 24 mois). 3 - 3 - Traitement des patients intolérants au BCG Les effets secondaires sévères apparaissent chez moins de 5% des patients traités par BCG thérapie et une vaste majorité des patients peuvent être traités. a – Diagnostic Les effets secondaires du BCG peuvent être divisés en effets locaux et systémiques. Les effets locaux sont en général plus fréquents et moins sévères que les effets systémiques, mais ils sont souvent à l’origine de l’interruption du traitement. L’incidence des effets locaux est comparable avec ou sans traitement de maintenance. b - Stratégies thérapeutiques Réduction des doses : un traitement à tiers de dose a montré la même efficacité à prévenir la récidive tumorale et le risque de progression avec moins de toxicité. La toxicité était diminuée dans le groupe avec réduction de dose. Les auteurs recommandaient une dose standard pour les patients à haut risque ou ayant une tumeur multifocale et une réduction de dose pour les patients présentant une tumeur de risque intermédiaire et pour le traitement d’entretien. Traitement pharmacologique associé : la prescription d’Ofloxacine, 6 heures après instillation de BCG, semble diminuer de manière significative les effets indésirables graves. 3 - 4 - Prise en charge des patients réfractaires, résistants ou récidivants au BCG La récidive observée dès le premier contrôle cystoscopique à 3 mois est un facteur très péjoratif associé à un taux de progression tumorale de 60-80%. La présence de CIS est un facteur de pronostic indépendant. Une importante étude de l’EORTC a montré un taux de progression de 10% à un an et 29% à 5 ans pour les T1G3 sans CIS contre 29% et 74% respectivement en cas de CIS associé. La multifocalité est également un facteur de récidive tumorale, mais seule l’étude de Sylvester a montré qu'il s'agissait d'un facteur de progression. 37 3 - 5 - Traitement des échecs de la BCG thérapie a - Cystectomie totale Dans la prise en charge des TVNIM, en cas d’échec du BCG sous forme de récidive de haut grade ou de carcinome in situ dans l’année, le traitement de référence reste la cystectomie totale. Cette chirurgie permet une survie à 5 ans comprise entre 80 et 90%. Lorsque le traitement radical est décidé, il doit être réalisé sans délai (avant trois mois), car le risque de progression de la maladie vésicale est important. b - Deuxième traitement par BCG Selon Herr, un temps total de traitement et de suivi d'au moins 6 mois est nécessaire pour identifier l'échec précoce du traitement par BCG. Les patients qui récidivent sur le même (ou moindre) stade tumoral et grade cellulaire à trois mois ne doivent pas être considérés comme des échecs puisque un deuxième traitement d’induction de 6 semaines de BCG va permettre d’obtenir une réponse dans 35% des cas (patients résistant au BCG). Au contraire, l’apparition d'une lésion plus péjorative en stade tumoral et/ou grade cellulaire ou la présence de CIS au décours du traitement doivent être considérés comme un échec et faire discuter la réalisation rapide d’une cystectomie (patients réfractaires au BCG). D’autre part, lorsque la récidive tumorale est tardive après 2 ans, il est possible de proposer de nouvelles instillations de BCG avec le même pronostic que le traitement initial. c - Combinaison BCG et Interféron Après échec du BCG, il existerait en deuxième ligne de thérapie intra-vésicale une place pour l'Interféron alpha 2b. Dans un essai multicentrique de phase II, comparant le suivi de 467 patients en échec de BCG traités par faible dose de BCG et interféron alpha 2b et 536 patients BCG naïfs traités par une dose standard et BCG et interféron alpha, 45% des patients en échec de BCG et 59% des patients naïfs de BCG étaient indemnes de récidive tumorale avec un suivi médian de 24 mois. En dehors d'essais thérapeutiques, une cystectomie totale immédiate doit être indiquée chez les patients présentant une tumeur T1 de haut grade, avec des lésions associées de CIS, ou en cas de récidives multifocales de lésions de haut grade. 38 TUMEUR DE VESSIE N'INFILTRANT PAS LE MUSCLE VESICAL (TVNIM) ALGORITHME THERAPEUTIQUE Risque faible RTUV +/- IPOP Risque intermédiaire RTUV + IPOP Instillations Amétycine RECIDIVE TUMORALE Lésions multifocales RTUV + IPOP RECIDIVE TUMORALE RTUV + IPOP Risque élevé RTUV +/- IPOP BCG induction EVALUATION VESICALE BCG entretien BCG induction +/- entretien RECIDIVE TUMORALE Instillations Amétycine RECIDIVE TUMORALE CYSTECTOMIE TOTALE 39 PRISE EN CHARGE DES COMPLICATIONS DE LA BCG-THERAPIE Signes généraux Classe 1 Classe 2 Classe 3 Classe 4 Syndrome grippal >2H et < 48H ≥ 48H et < 7J ≥ 7J Température ≥ 38° et <38,5° ≥ 38,5° et < 48H ≥ 39,5° et >12H Collapsus cardio vasculaire Douleurs musculaires < G3 ou ou < G3 ≥ 39,5° et < 12H ≥ 38,5° et > 48H =G3 Réactions allergiques =G3 Œdème/ Bronchospasme Détresse respiratoire CIVD Asthénie Hépatite Septicémie Rash cutané / Dermite Arthrite / Uvéite iridocyclite Traitement Rarement Occasionnellement Antalgiques (Paracétamol) Antalgiques (Paracétamol) Anti cholinergiques Anti cholinergiques Antispasmodiques Antispasmodiques AINS + Oflocet 200 mg x 2/J x 7 J. Si inefficace Arrêt du BCG Discuter l’hospitalisation ECBU / Rx Thorax / Asat Alat Vérifier l’absence d’infection urinaire Corticoïdes IV 0,5 à 1 mg/Kg/J + Oflocet 200 mg x 2/J Hospitalisation Inh 300 mg/J + Rifampicine 600 mg/J + Ethambutol 1200 mg/J ± Cortancyl IV 0,5 à 1 mg Kg /J Jusqu’à résolution des signes Ou INH 300 mg/J + Rifampicine 600 mg/J ± corticoïdes IV 0,5 à 1 mg/Kg /J Jusqu’à résolution des signes Poursuite des instillations oui oui Si hospitalisation, arrêt du BCG Arrêt du BCG 40 TRAITEMENT DES TUMEURS DE VESSIE T2, N0, M0 La stadification T2 N0 M0 est essentiellement clinique, car l’histologie de la résection est imprécise (minimum T2) et le scanner ne permet pas d’évaluer de manière fiable l’infiltration locale de la tumeur (T), ni l’invasion ganglionnaire (N). La gravité des tumeurs infiltrantes de vessie implique une information claire du patient incluant les risques évolutifs de la maladie, la nature des traitements envisageables ainsi que les risques fonctionnels de la chirurgie radicale. 1 - Cystectomie 1 - 1 - Aspect carcinologique La cystectomie demeure le traitement curatif de référence des TVIM et son indication mérite également d'être discutée chez le patient octogénaire. Le délai de la réalisation de ce geste ne doit pas excéder 12 semaines à compter de la résection diagnostique sous peine de gréver le pronostic (décès spécifique et risque global de décès). Même si la recommandation est toujours de réaliser cette intervention par vois ouverte, certaines équipes évaluent l'intérêt dans cette indication de la chirurgie mini-invasive. Si le geste d’exérèse est réalisé par laparoscopie voire par chirurgie robotique, la dérivation urinaire est le plus souvent réalisée par une mini-laparotomie. Le pourcentage de TVIM dans la population ≥ 80 ans représente 19,7% alors qu’il est de 49,4% dans la population des 65-79 ans. Le taux de complications mineures et majeures post-opératoires ainsi que le taux de décès spécifique ne semblent pas différents entre ces deux populations si une sélection des patients âgés (co-morbidités) pouvant bénéficier d’une telle chirurgie est réalisée de façon exhaustive en amont. L’âge reste un facteur pronostique associé à un stade tumoral plus avancé et une survie spécifique moins favorable (survie spécifique : 78,5% si ≤ 50 ans, 44,9% si 51-69 ans, 28,1% si ≥ 70 ans). La réalisation d'une chimiothérapie néo-adjuvante à base de cisplatine permet une amélioration de la survie globale (77 mois avec versus 46 mois) avec une proportion de pT0 sur la pièce de cystectomie plus fréquente dans le groupe avec traitement néo-adjuvant. L’hydronéphrose pré-opératoire est hautement suspecte d’une extension extra-vésicale, voire de la présence de métastases ganglionnaires associées et semble constituer un argument supplémentaire pour proposer une chimiothérapie néoadjuvante. Le curage ganglionnaire étendu remontant jusqu'à la bifurcation aortique devrait être réalisé de façon systématique permettant de détecter 90% des métastases ganglionnaires, contrairement au curage standard ilio-obturateur qui ne permettrait de retrouver que 50% des métastases ganglionnaires. Différentes études ont rapporté le caractère potentiellement curatif de ce geste dans le cas de micrométastases : 25% des métastases ganglionnaires se situant au niveau de la région iliaque interne et 35% au dessus de la bifurcation iliaque commune. Il existe donc un risque de sous-stadification du statut ganglionnaire préjudiciable au pronostic du patient en l'absence de curage ganglionnaire étendu. En cas de tumeur multifocale ou de CIS associé, un examen extemporané des recoupes urétérales doit être réalisé avant la réalisation de la dérivation urinaire. Chez l’homme, la cystectomie totale emporte la prostate et les vésicules séminales. En cas d’envahissement de l’urètre prostatique sur les biopsies sus-montanales et/ou lors d’un examen extemporané de la recoupe urétrale, une urétrectomie complémentaire doit être réalisée. La récidive urétrale après cystectomie reste un évènement rare (8% des cas), observé le plus souvent dans les 5 années suivant la chirurgie radicale, d’où une surveillance à ne pas relâcher (cytologies urinaires, cystoscopie). Le facteur de risque principal de cette récidive urétrale est l’envahissement du stroma prostatique. Les autres facteurs de risque étant la multifocalité, la localisation cervicale et la présence de CIS associé lors du diagnostic de la tumeur initiale. Une récente revue de littérature insiste sur la gravité de cette atteinte (survie moyenne de 28 mois à partir du diagnostic). 41 Chez la femme, la cystectomie emporte le plus souvent l’utérus en totalité et l’urètre réalisant une pelvectomie antérieure. Cette attitude est aujourd'hui remise en question en raison du faible risque de lésion génitale associée. L’infiltration lympho-vasculaire (LVI) de la pièce de cystectomie est un élément très péjoratif car associé au stade tumoral avancé, à une tumeur de haut grade, une invasion des marges chirurgicales ou encore à la présence de métastases ganglionnaires. De même, la présence de marges positives sur la pièce de cystectomie constitue un facteur de mauvais pronostic avec un taux de récidive tumorale important (à 5 ans : 63% vs 22%) et un taux de décès spécifique significatif (69% vs 27%). Ainsi, ces deux paramètres pourraient devenir un critère de sélection pour l’indication d’une chimiothérapie adjuvante. 1 – 2 Type de dérivation urinaire a - Chez l’homme Une néo-vessie doit être proposée systématiquement si elle réalisable. Il est nécessaire de bien sélectionner et préparer le patient et surtout instaurer une surveillance tous les 6 mois les trois premières années, puis de façon annuelle. Une néo-vessie iléale à basse pression ou colique est le traitement standard, permettant le rétablissement de la continuité urinaire. Une dérivation cutanée (type Bricker) est réalisée dans les situations suivantes : • impossibilité anatomique (éventualité rare dont le patient aura été averti en pré-opératoire). • envahissement tumoral de l’urètre prostatique et/ou biopsie extemporanée positive de la recoupe urétrale, conduisant à une urétrectomie. • âge trop avancé ou surtout psychisme non adapté. L’attitude thérapeutique consistant à préserver une partie de la prostate et des vésicules séminales afin d’améliorer les résultats fonctionnels de cette intervention (fonction érectile, continence) ne peut actuellement constituer une recommandation compte-tenu du risque très important de récidive locorégionale. b - Chez la femme Malgré un taux de complications et une durée d’hospitalisation similaires, la cystectomie totale de la femme semble être associée à des pertes sanguines opératoires supérieures. La vessie de remplacement est possible, mais des critères précis doivent être respectés : - d'une part, la conservation des 2/3 distaux de l’urètre peut être réalisée lorsque la tumeur n’envahit pas le col vésical et que l’examen extemporané de la recoupe urétrale est négatif. - d'autre part à côté de ces critères carcinologiques, il est nécessaire de s’assurer de critères urodynamiques (pression urétrale maximale supérieure à 30/35 cm H20 en raison des pics de pression élevés persistants dans les réservoirs iléaux détubulés). Une vessie de remplacement ne peut être proposée qu’à une patiente motivée et capable de s’auto-sonder en raison du risque de rétention par bascule postérieure du réservoir vésical. L’entérocystoplastie de remplacement chez la femme peut permettre une conservation de l’intégrité corporelle, une conservation de la fonction urinaire, une meilleure préservation de la possibilité de rapports sexuels. Dans le cas contraire, la dérivation urinaire externe type Bricker et les poches continentes (Indiana Pouch) sont les montages urinaires les plus fréquemment proposés. 2 - Alternatives à la cystectomie Le profond remaniement démographique de la société, avec une proportion grandissante de patients âgés présentant d'importantes co-morbidités, amène à modifier la prise en charge thérapeutique du cancer de la vessie. Lorqu'une chirurgie radicale est contre-indiquée ou refusée 42 par le patient, différentes alternatives thérapeutiques conservatives sont possibles, comme la résection de tumeur de la vessie seule, la cystectomie partielle, la chimiothérapie, la radiothérapie ou la combinaison de certains de ces traitements. Les étapes d'un éventuel traitement multimodal conservateur associent : (1) sélection stricte des patients ; (2) résection exhaustive trans-urétrale de la tumeur de la vessie associée à une radiothérapie et une chimiothérapie ; (3) contrôle histologique de la réponse avec possibilité de cystectomie de rattrapage ; (4) suivi strict avec évaluation endoscopique associée à une histologie par des biopsies vésicales et une cystectomie si récidive d’une tumeur infiltrant le muscle vésical. 2 - 1 - RTUV + radio-chimiothérapie concomitante Des critères de sélection stricts permettent, en dehors de ceux refusant la chirurgie, d’inclure des patients dans cette stratégie thérapeutique : - lésion unique de petite taille (≤ 30 mm) - absence de carcinome in situ vésical associé - RTUV complète avec diagnostic définitif de lésion pT2 - absence d’hydronéphrose (signe d’une lésion extra-vésicale) Les taux de réponse complète sont de 60 à 85%, la survie globale à 5 ans de 50 à 60% et la survie avec vessie en place de 40 à 45%. Aucune étude randomisée comparant cette approche thérapeutique à la cystectomie n’a été réalisée, ne permettant pas de la proposer en routine mais uniquement à des patients sélectionnés. L’essai RTOG 99-06 a évalué l’association RTUV à une chimiothérapie (paclitaxel, cisplatine) et à une radiothérapie dans le cadre de tumeurs de la vessie infiltrant le muscle vésical (T2-T4a). Le taux de réponse complète était de 81% après un suivi médian de 49,4 mois, la survie globale et spécifique étant respectivement de 56% et 71%. L’étude GETUG 97-015 a évalué la qualité de vie de ces patients avec un taux de staisfaction proche de 67%. 2 - 2 - Cystectomie partielle Cette alternative thérapeutique concerne environ 5% des patients avec une TVIM. Elle répond aux mêmes impératifs carcinologiques que la chirurgie radicale et nécessite la réalisation d’un curage ganglionnaire étendu. Si les patients sont bien sélectionnés, la survie globale à 5 ans est identique aux patients subissant une chirurgie radicale. Les indications sont très strictes : lésion unifocale et primitive sur une portion mobile de la vessie, lésion de stade T2 voire T3, absence de carcinome in situ associé, diamètre tumoral ≤ 4 cm, lésion située à moins de 2 cm du col. Au total, certaines études récentes montrent que la survie actuarielle sans récidive infiltrante à 5 ans est de 69%, 49% des patients ne présentant pas de récidive à 5 ans sur leur vessie en place. La cystectomie partielle peut également se discuter dans la prise en charge d'une tumeur de vessie intra-diverticulaire. Il existe cependant très peu de données dans la littérature sur l'intérêt d'un traitement complémentaire (radiothérapie et/ou chimiothérapie). RTUV complète (si possible) et Surveillance ou Tumeur de bas grade Instillations endo-vesicales RTUV incomplète et /ou Cystectomie partielle Tumeur volumineuse et /ou de haut grade voire Cystectomie totale 43 2 - 3 - Radiothérapie externe Cette option peut être discutée dans les mêmes conditions que l’association radio-chimiothérapie concomitante. Elle n’est à envisager qu’en cas de contre-indication à la chimiothérapie ou à visée hémostatique chez des patients fragiles. Une association avec la curiethérapie est également possible. Dans un premier temps une résection exhaustive de la tumeur de vessie est réalisée. Une localisation trigonale ou proche des méats urétéraux est une contre-indication à cette indication. La radiothérapie externe (28 grays en 12 fractions) associée à une curiethérapie (Iridium-192) permet une survie spécifique à 5 et 10 ans similaire à un groupe de patients identiques traités par cystectomie. Cette indication n’est possible que si la lésion tumorale est du T2 et ≤ 5 cm. Cette stratégie thérapeutique étant proposé que chez les patients refusant la cystectomie et ceux inéligibles pour un traitement radical chirurgical. 2 - 4 - RTUV seule Cette option ne doit être envisagée que pour des patients âgés, dont l'espérance de vie est courte (ASA ≥ 3). La RTUV seule ne peut être envisagée que pour une tumeur unique ≤ pT2 d’une taille ≤ 3 cm sans pTis à distance. Traitement recommandé d'une TVIM Cystectomie totale à ciel ouvert associée à un curage ilio-obturateur o La voie laparoscopique est encore en cours d'évaluation o Le curage extensif est proposé dans le but d'améliorer la stadification et les résultats carcinologiques (Recommandation de grade B) o Chez l'homme, la cystectomie emporte prostate et vésicules séminales o Chez la femme, la cystectomie emporte le plus souvent l'utérus o L'entéro-cystoplastie est proposée chez l'homme en l'absence d'impossibilité anatomique et lorsque la recoupe urétrale est négative (lors de l'examen extemporané) (Recommandation de grade C) o Une vessie de remplacement est proposée chez la femme motivée uniquement si la tumeur n'envahit pas le col vésical o L'urétrectomie doit être réalisée chez l'homme en cas d'envahissement de l'urétre prostatique (Recommandation de grade C) 44 TRAITEMENT DES TUMEURS DE VESSIE A HAUT RISQUE DE PROGRESSION METASTATIQUE DE STADE T3 NX ou Tx-N1-2 Le diagnostic de tumeur de vessie à haut risque de progression (T3NX ou TXN1-2) peut être porté en pré-opératoire lors du bilan d’extension, pendant la chirurgie d'exérèse ou bien sur l’examen histologique de la pièce opératoire. L’incidence de l’envahissement ganglionnaire dans le cancer infiltrant de la vessie est évaluée entre 5% à 20% dans les stades pT1, 50% à 60% pour les pT3-4. Dans une large étude rétrospective de 1054 cystectomies, il existait un impact sur la survie globale dépendant du stade pathologique et du nombre de ganglions envahis variant de 50% (pT1N1) à 26% (pT3bN1-2) à 5 ans. 1 - Diagnostic réalisé lors du bilan d’extension La valeur prédictive positive de détection d’un envahissement ganglionnaire sur le scanner est de l’ordre de 65%. L’envahissement microscopique est responsable des faux négatifs observés en imagerie. A l’inverse, des faux positifs sont possibles chez les patients âgés ayant une involution graisseuse de certaines structures ganglionnaires. L’IRM standard ne semble pas être supérieure au scanner pour la détection des métastases ganglionnaires du cancer de la vessie. L’utilisation de nano-particules supramagnétiques lymphotropes, en conjonction avec une IRM de haute résolution, paraît pouvoir améliorer la détection des adénopathies pour les tumeurs de vessie. Enfin, le rôle du PET-scanner est encore incertain et discuté dans cette indication. Dans certains cas, une ponction trans-cutanée d'un ganglion suspect peut aussi se discuter à visée histologique. Lorsque le diagnostic d’envahissement ganglionnaire paraît évident au scanner avec des adénopathies lombo-aortiques, le consensus actuel est de discuter une chimiothérapie première avant d’envisager un geste local pelvien. Il semble que le contrôle local associé à une chimiothérapie péri-opératoire améliore la survie qu’il s’agisse d’un contrôle par association de résection endoscopique suivi d’un traitement conservateur (chimio-radiothérapie) ou par cystectomie totale. Deux méta-analyses d’essais randomisés ont montré un gain de survie à 5 ans de 5% en faveur de la chimiothérapie néo-adjuvante à base de cisplatine. Ainsi, seuls les protocoles M-VAC (Methotrexate, Vinblastine, Doxorubicine et Cisplatine) sous sa forme classique et un protocole similaire, le CMV, combinaison de Cisplatine, Methotrexate et Vinblastine sont validés dans les essais néo-adjuvants. A ce stade, il semble logique de réserver la cystectomie aux patients qui répondent à la chimiothérapie et à ceux dont le pronostic est aggravé par une obstruction du haut appareil ou bien par un syndrome tumoral pelvien (hématurie, douleur, altération de la capacité). La cystectomie présente alors une morbidité et une mortalité conséquentes et le rapport bénéfice / risque doit être discuté. Chez les patients répondeurs à la chimiothérapie, une autre option comme la radio-chimiothérapie sera discutée. Si une indication de cystectomie est retenue, le consensus est de réaliser une dérivation urinaire simple et efficace, facile à appareiller comme l’urétérostomie cutanée trans-iléale de Bricker. Cependant lorsque les conditions anatomiques le permettent et que le risque de récidive locale est faible (absence de CIS diffus, recoupe urétrale saine, curage macroscopiquement complet), l’entéro-cystoplastie peut donner de bons résultats fonctionnels avec un taux de complication acceptable. Dans une étude rétrospective de 61 patients N1 ou N2 ayant eu un remplacement vésical, une récidive loco-régionale existait dans 11% des cas, dont la moitié au contact de la néo vessie. Il ne semble donc pas y avoir de contre-indication à l’entérocystoplastie chez des patients N+ sélectionnés pour lesquels il est retenu l’option du traitement chirurgical local. Lorsque le diagnostic de tumeur à haut risque de progression est établi lors du bilan d’extension, une chimiothérapie comportant du cisplatine suivie d’une réévaluation est recommandée. La chirurgie peut alors être proposée aux patients répondeurs (Recommandation de grade C). 45 2 - Diagnostic réalisé pendant la chirurgie d'exérèse Le curage ganglionnaire ilio-pelvien est inclus dans la procédure chirurgicale standard de la cystectomie totale pour cancer, mais une enquête récente de la SEER relève qu’il n’est réalisé que pour 40% des patients. Le curage standard comprend l'ablation des ganglions iliaques externes, hypogastriques et obturateurs. Le curage étendu commence à la bifurcation aortique et emporte les ganglions iliaques communs et externes, hypogastriques, obturateurs et pré-sacrés. Dans cette procédure, il est recommandé de retirer au moins 20 ganglions. La pièce chirurgicale envoyée en anatomo-pathologie est un facteur de variabilité du nombre de ganglions du curage. Le curage standard ramène une moyenne de 2,4 ganglions si la dissection est effectuée « en bloc » contre 8,5 si la dissection est effectuée ganglion par ganglion. La densité ganglionnaire et l’étendue anatomique du curage sont des paramètres importants. La densité ganglionnaire est définie comme le rapport entre le nombre de ganglions positifs et le nombre de ganglions total du curage : de nombreuses études rétrospectives ont montré que la densité ganglionnaire avait un impact pronostic sur la survie (de 43% à 17% à 10 ans selon que la densité ganglionnaire est inférieure ou supérieure à 20%). De la même manière, le nombre de ganglions du curage apparaît aussi comme un facteur pronostique avec une survie à 10 ans de 25% contre 36% selon que le curage comportait moins ou plus de 15 ganglions. Enfin, il a été rapporté que, parmi les patients ayant un envahissement ganglionnaire, ceux dont les adénopathies étaient de petite taille, peu nombreuses, sans effraction capsulaire, semblaient tirer avantage de l’exérèse chirurgicale ganglionnaire, avec un maximum de bénéfice pour ceux ayant une tumeur T2 et moins de 5 ganglions envahis. Si le diagnostic d’atteinte ganglionnaire est fait en per-opératoire, deux options sont alors possibles : le traitement chirurgical maximal (cystectomie et curage étendu) ou le traitement néoadjuvant suivi éventuellement d’un traitement local. L’importance de l’envahissement ganglionnaire et de l’extension loco-régionale va guider le choix thérapeutique. Si l’exérèse complète de la maladie tumorale est a priori réalisable, elle doit être effectuée. En présence d’une atteinte ganglionnaire, qu’elle soit diagnostiquée en per-opératoire ou sur la pièce opératoire, une chimiothérapie adjuvante devra être discutée. Cinq études randomisées et une métaanalyse ont été publiées sur la chimiothérapie adjuvante des tumeurs de vessie. La méta-analyse de ces essais a été gênée par le petit nombre de patients et le peu de puissance de chacun des essais, laissant une marge d’erreur trop importante pour tirer une conclusion définitive sur le rôle bénéfique ou non d’une chimiothérapie adjuvante. Lorsque le diagnostic de tumeur à haut risque de progression est réalisé lors de la chirurgie, un traitement chirurgical maximal (cystectomie et curage étendu) ou un traitement néoadjuvant suivi d’un traitement local doivent être discutés. Si l’exérèse complète semble réalisable, elle doit être proposée (Recommandation de grade C). 3 - Diagnostic réalisé sur l’examen histologique de la pièce opératoire Il existe théoriquement une indication à une chimiothérapie adjuvante. Dans la pratique actuelle, l’indication du traitement adjuvant peut être guidée par le calcul du risque de progression métastatique évalué selon les nomogrammes actuellement disponibles. Une autre question est celle de la faisabilité du traitement. Ceci est particulièrement vrai pour le cancer urothélial, où l’âge médian est de 65 ans, les co-morbidités liées à l’intoxication tabagique sont fréquentes et la localisation anatomique de la tumeur peut entraîner par elle-même une altération de la fonction rénale alors que les protocoles de chimiothérapie habituels à base de cisplatine sont toxiques. Lorsque le diagnostic de tumeur à haut risque de progression est fait sur la pièce opératoire, discuter une chimiothérapie adjuvante à base de platine (Recommandation de grade C). 46 PRISE EN CHARGE DU CANCER DE LA VESSIE M+ Au moment du diagnostic, 25% des tumeurs urothéliales infiltrent le muscle vésical et même si elles sont confinées à l’organe, 20 à 40% des patients vont rechuter et 5% sont métastatiques d’emblée [1]. Au stade localement évolué ou métastatique, le meilleur traitement reste en premier lieu la chimiothérapie à base de Cisplatine (CDDP) avec une médiane de survie de 14 à 15 mois, chez les patients éligibles pour cette chimiothérapie. Le bilan d’extension des métastases repose sur des arguments radiologiques avec l'examen tomodensitométrique et éventuellement le PET FDG scanner. 1 - Facteurs pronostiques Les deux principaux facteurs impactant la survie sont : un état général altéré (PS > 1) et la présence de métastases viscérales avec une espérance de 18,2 mois si aucun facteur de mauvais pronostic n’est présent à 4,4 mois pour les patients les plus défavorables. 2 - Standard de traitement en première ligne Le protocole standard de traitement de première ligne dans les tumeurs urothéliales métastatiques reste depuis plus de 15 ans le M-VAC (Methotrexate, Vinblastine, Doxorubicine, Cisplatine) avec un taux de réponse de 76% et une médiane de survie supérieure à un an. Ce protocole a démontré sa supériorité dans un essai randomisé de phase III contre le Cisplatine seul. Le protocole Gemcitabine-CDDP (G-C) sur un cycle de quatre semaines a été comparé au protocole MVAC sans G-CSF. Cet essai initialement construit pour démontrer une supériorité d’un minimum de quatre mois en survie globale, a rapporté des résultats équivalents (médiane de survie globale 13,8 pour le G-C et 14,8 mois pour le M-VAC ; taux de réponse objective respectivement de 54,3% et 55%). La toxicité était plus importante dans le bras M-VAC, avec un taux de neutropénie grade 3-4 de 82% versus 71%, d’aplasie fébrile de 14% versus 2% et de sepsis sur neutropénie de 22% versus 1%, respectivement pour les bras M-VAC et G-C. La survie à 5 ans restait comparable (13% pour G-C versus 15,3% pour M-VAC) . Le M-VAC HD (haute dose) a été comparé au M-VAC standard en situation métastatique permettant de doubler la dose de cisplatine et de doxorubicine, mais sans gain en termes de survie médiane (15,5 vs 14,1 mois), malgré une légère amélioration du taux de réponse objective (62% vs 50%). La place des associations à trois agents n’a pas encore été définie. Plusieurs essais de phase II ont montré des résultats prometteurs en termes de réponse objective. Le premier essai de phase III randomisé comparant un triplet (Gemcitabine-Cisplatine-Paclitaxel) au G-C en première ligne a inclus 627 patients. Il était construit pour montrer une supériorité de 4 mois en survie globale : la différence était significative pour le taux de réponse objective (57% versus 46%) mais pas pour la survie (15,7 mois versus 12,8 mois), toutefois une analyse en sous-groupe a mis en évidence un bénéfice significatif en survie pour les patients atteints d’une tumeur de vessie, par rapport aux tumeurs des voies excrétrices (p=0,03) . Seulement 50% des patients avec un cancer de vessie métastatique sont aptes à recevoir une chimiothérapie à base de cisplatine, soit du fait d’une clairance de la créatine inférieure à 60 ml/min, soit d’une altération de l’état général (PS > 1). 3 - Alternative au traitement standard (patient "unfit") 3 - 1 - Sur l’état général Une des options possibles pour les patients non éligibles à une polychimiothérapie, notamment à base de sels de platine, est une monochimiothérapie par Gemcitabine avec une efficacité démontrée dans 3 phases II en monothérapie (22 à 28% de réponse objective), avec 9% de réponse complète, peu toxique (pas de toxicité grade 3/4), mais avec une survie qui reste limitée : de 8 à 12 mois. Les patients ayant un état général très dégradé (PS 3 ou 4) n’ont aucun bénéfice de la chimiothérapie. 47 3 - 2 - Sur la fonction rénale Environ un tiers des patients ne peuvent pas accéder au CDDP en raison d’une altération de la fonction rénale : l’alternative demeure le carboplatine. De nombreux essais ont montré l’efficacité anti-tumorale des combinaisons à base de carboplatine, mais ces résultats étaient inférieurs aux combinaisons à base de CDDP, sans que ces protocoles ne soient comparés dans une phase III randomisée. Le dernier essai randomisé confirmant ces données était une phase II comparant l’association gemcitabine-carboplatine au protocole G-C, chez 110 patients atteints de tumeurs urothéliales avancées : les taux de réponse objective étaient de 49,1% et 40%, les médianes de survie globale de 12,8 mois et de 9,8 mois, respectivement pour les bras G-C et G-Carboplatine. 4 - Deuxième ligne de traitement De nombreuses mono-chimiothérapies ou associations ont fait l’objet de phases II, avec des taux de réponse objective variant de 7 à 28% (docetaxel, paclitaxel, ifosfamide, oxaliplatine-5FU, gemcitabine, permetrexed, topotecan, lapatinib, gefitinib, bortezomib et sunitinib). La vinflunine, après plusieurs essais de phases II, a fait récemment l’objet d’un essai de phase III, comparé aux soins de support : la différence en survie globale était significative après ajustement selon les facteurs pronostiques connus et non en intention de traitement) avec une survie globale de 6,9 mois vs 4,3 mois. En raison de toxicités induites par ce traitement (50% de neutropénie grade 3/4, 16% de constipation grade 3/4), seuls les patients ayant un PS < 2 ont été inclus dans cette phase III, avec une réduction de dose pour les patients ayant des antécédents de radiothérapie pelvienne. 5 - Les traitements en cours d’évaluation La place des nouvelles drogues n’est pas définie : un essai randomisé comparant un nouveau taxane le laroxel, au protocole G-C vient de s’arrêter de façon prématurée. Les thérapeutiques ciblées sont en cours d’évaluation et n’ont pas encore donné de résultats probants : essais effectués avec le cetuximab (anticorps anti-EGFR), le bevacizumab (anticorps anti-VEGFR), le pazopanib (inhibiteur de tyrosine kinase de l’EGFR), le zactima (anti-VEGFR). L’essai ARTIC de phase III randomisé est en cours pour évaluer l’efficacité du Trastuzumab, associé à une chimiothérapie standard, dans les tumeurs urothéliales surexprimant Her2. Les résultats d’une étude de phase II, évaluant le Sunitinib en traitement de maintenance, après obtention au minimum d’une stabilité ont été rapportés récemment : ces résultats n’étaient pas très encourageants concernant la survie sans progression à 6 mois (objectif principal), avec une importante toxicité de grade 3. 6 - Place de la chirurgie de rattrapage Les patients avec un faible volume tumoral, en rechute localisée et sans facteur de mauvais pronostic, peuvent avoir une réponse de qualité à la chimiothérapie. Certaines études rétrospectives ont montré qu’un traitement chirurgical de rattrapage à l’issue de la chimiothérapie et chez des patients bons répondeurs, pouvait amener à une rémission prolongée. L'exérèse chirurgicale possible d'une métastase isolée doit également être considérée dans la stratégie thérapeutique. En conclusion, les tumeurs urothéliales sont chimio-sensibles : 50% de réponse objective mais non chimio-curables avec 100% de rechute après la 1ère ligne, sans amélioration de la survie globale depuis plus de 10 ans. Les patients éligibles pour une première ligne de chimiothérapie à base de CDDP, reçoivent le protocole G-C en première intention ou M-VAC. Le CBDCA et les associations sans platine ne sont pas recommandés pour les patients pouvant recevoir du CDDP. Si l’état général ou la fonction rénale ne l’autorisent pas, (patients dit « unfit »), l’option la plus utilisée est une polychimiothérapie à base de gemcitabine-carboplatine. Enfin pour les patients plus âgés, ou avec de fortes co-morbidités, une des options est une monochimiothérapie à base de gemcitabine seule. En deuxième ligne, la vinflunine peut être proposée pour les patients gardant un bon état général (PS < 2). Il n’existe pas d’indication, hors essais cliniques, à un traitement par thérapeutique ciblée. Etant donné le pronostic qui reste sombre de ces patients et le peu de ressources thérapeutiques, il convient de favoriser au maximum les inclusions dans les essais thérapeutiques. 48 En première ligne de traitement ► Pour les patients pouvant recevoir du cisplatine (CDDP) : MVAC (+ GCSF) ou HD-MVAC (+ GCSF) ou GC (Recommandation de grade A) ère ► Traitement de 1 ligne pour les patients « unfits » pour du cisplatine : Association de CT contenant du carboplatine (CBDCA) ou monothérapie (Recommandation de grade B) En deuxième ligne de traitement ► Pour les patients ayant un PS < 2 : vinflunine en monothérapie (Recommandation de grade B) ► Pour les patients ayant un état général altéré : traitement du support 49 TRAITEMENT DES TUMEURS DE LA VOIE EXCRETRICE SUPERIEURE I - TUMEURS CLINIQUEMENT LOCALISEES 1 - Traitement chirurgical radical La néphro-uréterectomie totale (NUT) par voie ouverte avec excision d’une collerette vésicale périméatique est le traitement chirurgical de référence des TVEUS (Niveau de preuve 3), quelle que soit la localisation de la tumeur dans la voie excrétrice : • parce que des taux de récidives important dans le moignon urétéral ont été rapportés (16 à 58% des cas) • parce que l’incidence des TVEUS bilatérale est faible (2 à 5%) Il est important de ne pas sectionner la voie excrétrice au cours de la chirurgie compte-tenu du risque potentiel de dissémination. Plusieurs alternatives techniques ont été décrites pour simplifier la résection de l’uretère distal : stripping, résection intra-murale de l’uretère par voie trans-uréthrale. Aucune n’a démontré son équivalence à l’excision de la collerette vésicale. Un délai supérieur à 45 jours entre le diagnostic et l’exérèse de la tumeur constitue un risque de progression de la maladie urothéliale. Le curage ganglionnaire associé à la NUT présente un intérêt pronostique et permet d’obtenir une stadification optimale de la maladie. Le curage dans les pN+ permet la diminution de la masse tumorale et la détection de micro-métastases pour orienter les patients vers un traitement adjuvant. La NUT par voie laparoscopique n’a pas fait la preuve définitive de son innocuité. Quelques cas isolés de diffusion tumorale avec apparition de métastases, dans des délais très rapides, sur des sites anatomiques inhabituels, ont été initialement rapportés après NUT laparoscopique. De nombreuses études vont cependant dans le sens de résultats oncologiques similaires alors que la voie laparoscopique apparaît supérieure à la chirurgie ouverte sur le plan fonctionnel. Les principes carcinologiques suivants doivent être respectés : - aucun contact entre urine de la voie excrétrice tumorale et cavité gazeuse - exérèse en mono-bloc du rein et - de l'uretère après certitude de l'intégrité vésicale - le morcellement de la pièce opératoire est formellement proscrit. - sécurisation de l’extraction de la pièce (sac opératoire) - ne pas opérer les tumeurs infiltrantes (T3/N+) ou métastatiques Une seule étude prospective a démontré l’équivalence de la NUT laparoscopique à moyen terme pour les tumeurs non invasives. 2 - Traitement chirurgical conservateur Le traitement de référence reste la NUT chez les patients ayant un rein controlatéral fonctionnel et sain. 50 2 - 1 - Urétéroscopie thérapeutique Le traitement endoscopique conservateur des TVES localisées par urétéroscopie (en fonction des contraintes techniques ou anatomiques) peut-être envisagé dans les tumeurs de faible stade et grade. • il faut disposer du matériel ad hoc : urétéroscope souple plutôt que rigide, générateur laser, pinces à biopsies. • le patient doit être informé que la surveillance sera plus contraignante. • cette option est prioritairement réservée aux indications de nécessité où le patient est à risque d’insuffisance rénale terminale après NUT. 2 - 2 - Chirurgie ouverte Les résections segmentaires pour le traitement des tumeurs à faible risque de l'uretère distal sont envisageables. Il convient de s’assurer que la tranche de section de la pièce d'exérèse est saine. Les résections segmentaires de l'uretère iliaque et lombaire ont conduit à un taux d'échec plus important que celui noté pour l'uretère pelvien. La résection de tumeurs du bassinet ou des calices à ciel ouvert est de moins en moins pratiquée. La résection de tumeurs pyélo-calicielles à ciel ouvert est techniquement difficile et le taux de récidive est plus élevé que dans l’uretère. 2 3 - Chirurgie laparoscopique Elle peut-être proposée en cas de tumeurs du bas uretère avec réimplantation urétéro-vésicale dans le même temps opératoire. 2 - 4 - Traitement percutané Le traitement percutané des TVEUS pyéliques est envisageable pour les TVEUS de faibles stade et grade. Ce traitement est proposé aux tumeurs de la tige calicielle inférieure, encore inaccessibles en urétéroscopie. 3 - Agents topiques adjuvants L’instillation de BCG ou de mitomycine C dans la voie excrétrice, par néphrostomie per-cutanée ou par l’intermédiaire d’une endoprothèse urinaire, après traitement conservateur d’une TVES ou pour traiter un carcinome in situ est techniquement réalisable. Les résultats à moyen terme sont proches de ceux observés dans le traitement des tumeurs de vessie, mais non confirmés à long terme. Indications électives du traitement endoscopique (Recommandation de grade C) o Tumeur unifocale o Taille (plus grand diamètre) < 1 cm o Tumeur de bas grade en cytologie ou sur les biopsies (50% cas) o Aucun élément radiologique en faveur d’une infiltration o Traitement conservateur complet envisageable (hors calice inférieur) o Surveillance endoscopique (urétéroscopie souple) rapprochée possible o Information et compliance du patient vis à vis du rythme de surveillance 51 Surveillance des TVES après traitement (Recommandation de grade C) En cas de NUT, pendant au moins 5 ans : 1) Tumeur superficielle : Cystoscopie/ cytologie urinaire à 3 mois puis annuellement Uro-scanner tous les ans 2) Tumeur invasive : Cystoscopie/ cytologie urinaire à 3 mois, puis annuellement Uro-scanner tous les 6 mois pendant 2 ans, puis annuellement Après traitement conservateur, pendant au moins 5 ans : Cytologie, uro-scanner à 3 mois, puis à 6 mois puis tous les ans Cystoscopie, urétéroscopie et cytologie in situ à 3 mois, à 6 mois puis tous les 6 mois pendant 2 ans, puis tous les ans. II - TUMEURS LOCALEMENT AVANCEES - METASTATIQUES 1 - Traitement chirurgical radical Aucun bénéfice à la réalisation d’une NUT dans un contexte métastatique (M+), mais peut seulement être envisagée à titre palliatif. 2- Chimiothérapie Aucun effet de la chimiothérapie néo-adjuvante, contrairement à ce qui a été démontré dans la vessie [1]. La chimiothérapie adjuvante permet d’obtenir un taux de rémission pouvant aller jusqu’à 50% avec un impact minime sur la survie. Différentes associations de chimiothérapie ont été proposées : • • • MVAC a permis d’obtenir des résultats comparables à ceux des tumeurs de vessie avec une toxicité significative. La NUT préalable est un facteur limitant les doses de chimiothérapie à base de platine. carboplatine et paclitaxel ont permis d’obtenir des résultats similaires au MVAC avec moins d’effets indésirables. oxaliplatine et gemcitabine ont donné des résultats prometteurs dans une étude de phase II. 3 - Radiothérapie externe La radiothérapie adjuvante pourrait améliorer le contrôle local de la maladie, mais elle n’influence ni la survenue de métastases ni la survie. 52 TUMEURS DU TESTICULE Les tumeurs germinales du testicule représentent 1 à 2 % des cancers chez l’homme, 3,5 % des cancers urologiques et 95 % des cancers du testicule. Ces tumeurs sont rares avant 15 ans et après 50 ans. Elles concernent l’adulte jeune de 20 à 35 ans où elles représentent près de 12 % des cancers. L’incidence annuelle des cancers du testicule dans les pays industrialisés est de 3 à 6 / 100 000 habitants. Cette incidence est en augmentation dans tous les pays. Classification TNM-UICC de 2009 : Tx Tumeur primitive ne pouvant être classée T Tumeur Primitive T0 Pas de signe de tumeur primitive Tis Néoplasie germinale intra tubulaire (carcinome in situ) T1 Tumeur limitée au testicule et à l’épididyme sans invasion vasculo-lymphatique. La tumeur peut atteindre l’albuginée mais pas la vaginale T2 Tumeur limitée au testicule et à l’épididyme avec invasion vasculo-lymphatique ou tumeur atteignant la vaginale T3 Tumeur étendue au cordon spermatique avec ou sans invasion vasculo-lymphatique T4 Tumeur étendue au scrotum avec ou sans invasion vasculo-lymphatique N Ganglions Régionaux Nx Ganglions régionaux non évaluables N0 Pas d’extension ganglionnaire régionale rétropéritonéale N1 Extension ganglionnaire comportant une adénopathie de moins de 2 cm de plus grand axe ou moins de 5 adénopathies dont aucune ne mesure plus de 2 cm N2 Extension ganglionnaire comportant une adénopathie de 2 à 5 cm de plus grand axe ou 5 adénopathies dont aucune ne mesure plus de 5 cm ou extension extra ganglionnaire histologique N3 Extension ganglionnaire comportant une adénopathie de plus de 5 cm de grand axe M Métastases à distance Mx Métastase non évaluable M0 Absence de métastase M1 Métastase(s) à distance M1a Ganglions autres que rétropéritonéaux ou pulmonaires M1b Autres sites métastatiques 53 L’évolution post-opératoire des marqueurs tumoraux doit être prise en compte. Le dosage sera effectué en tenant compte de leur demi vie (α-FP : 5 à 6 jours, HCG totale : 1 à 2 jours). Le taux d’α-FP doit diminuer de moitié toutes les semaines, le taux d’ HCG de moitié toutes les demi semaines. Une non normalisation ou une décroissance anormalement lente conduit à adopter l’attitude thérapeutique d’un stade métastatique biologique. S Marqueurs sériques au nadir après orchidectomie Sx Marqueurs non disponibles ou non réalisés S0 Valeurs normales des marqueurs sériques LDH (U/l) αFP (ng/ml) HCG (mUI/ml) S1 < 1,5 N et < 5 000 et < 1 000 S2 1,5 à 10 N ou 5 000 à 50 000 ou 1 000 à 10 000 S3 > 10 N ou > 50 000 ou > 10 000 Classification AJCC en stade des tumeurs germinales testiculaires réactualisée en 2009 Stade T N M S Stade 0 pTis N0 M0 S0, Sx Stade I pT1-4 N0 M0 Sx Stade IA pT1 N0 M0 S0 Stade IB pT2-4 N0 M0 S0 Stade IS pT1-4 N0 M0 S1-3 Stade II pT1-4 N1-3 M0 Sx Stade IIA pT1-4 N1 M0 S0-1 Stade IIB pT1-4 N2 M0 S0-1 Stade IIC pT1-4 N3 M0 S0-1 Stade III pT1-4 N0-3 M1a Sx Stade IIIA pT1-4 N0-3 M1a S0-1 Stade IIIB pT1-4 N1-3 M0 S2 pT1-4 N0-3 M1a S2 pT1-4 N1-3 M0 S3 pT1-4 N0-3 M1a S3 pT1-4 N0-3 M1b S0-3 Stade IIIC 54 Classification pronostique IGCCCG (International Germ Cell Cancer Collaborative Group) des stades métastatiques Pronostic Bon Tumeur Germinale Non-Séminomateuse (TGNS) Tous les critères ci-dessous - Primitif : testiculaire ou rétropéritonéal - Absence de métastase extra-pulmonaire - αFP < 1 000 ng/ml - HCG < 5 000 UI/l - LDH < 1,5 U/l Survie globale à 5 ans : 92% Intermédiaire Tous les critères ci-dessous - Primitif: testiculaire ou rétropéritonéal - Absence de métastase extra-pulmonaire - αFP > 1 000 ng/ml et < 10 000 ng/ml ou - HCG > 5 000 UI/l et < 50 000 UI/l ou - LDH > 1,5 N U/l et < 10 N U/l Survie globale à 5 ans : 80% Tumeur Germinale Séminomateuse (TGS) Tous les critères ci-dessous : - Primitif : quel que soit le site - Absence de métastase extrapulmonaire - αFP normale - Quelque soit HCG - Quelque soit LDH Survie globale à 5 ans : 86% Un critère parmi - Quel que soit le site primitif - Présence de métastases extrapulmonaires - αFP normale - Quelque soit HCG - Quelque soit LDH Survie globale à 5 ans : 72% Mauvais Un critère parmi - Primitif médiastinal - Présence de métastases extrapulmonaires - αFP > 10 000 ng/ml ou - HCG > 50 000 UI/l ou - LDH > 10 N U/l Pas de patient avec TGS classée en mauvais pronostic Survie globale à 5 ans : 48% 55 RECOMMANDATIONS L’analyse anatomopathologique de la pièce d’orchidectomie occupe une place fondamentale dans le bilan initial de la prise en charge des tumeurs germinales du testicule. Au stade précoce, les options thérapeutiques reposent sur la notion de facteurs de risque. Les lésions métastatiques justifient une thérapeutique adaptée aux groupes pronostiques. La prise en charge ultérieure (surveillance ou chirurgie complémentaire) repose également sur des critères actuellement bien définis. RECOMMANDATIONS DIAGNOSTIQUES LE MINIMUM REQUIS • L’examen clinique o Il comprend l’examen du testicule tumoral et du testicule controlatéral, la recherche d’une masse abdominale palpable (adénopathies de plus de 5 cm de diamètre, “ bulky disease ” des anglo-saxons), d’une gynécomastie et la palpation des aires ganglionnaires sus claviculaires. • Les marqueurs tumoraux. o Le dosage sérique préopératoire concerne l’HCG totale, l’alpha foeto protéine (α-FP) et la LDH. L’importance de l’élévation initiale constitue un critère pronostique, leur décroissance sera suivie après l’orchidectomie. • La tomodensitométrie thoraco-abdomino-pelvienne. o elle doit prendre en compte le siège, la taille et le nombre d’adénopathies rétro péritonéales rencontrées. Une évaluation volumétrique de ces adénopathies ou la mesure du plus grand diamètre constitue le critère de référence permettant de déterminer, sur une même coupe, l’importance de la régression après chimiothérapie. o Le siège, le nombre et la taille des localisations secondaires viscérales seront également précisés. • L’échographie scrotale. o Elle précise le siège et l’aspect de l’induration scrotale suspecte. Elle apporte un élément d’orientation en cas de kyste épidermique en présence d’une image parfois typique en pelures d’oignon. o Elle permet de vérifier le parenchyme testiculaire controlatéral pour les rares tumeurs bilatérales synchrones. LES EXAMENS OPTIONNELS • • • • • L’imagerie par résonance magnétique. L’IRM permet de mieux préciser les rapports avec les gros vaisseaux. Elle peut être utile en cas d’allergie au produit de contraste iodé et de contre indication au TDM. La tomographie par émission de positron (TEP) n’est pas recommandée dans le bilan de stadification initial. Il est en cours d’évaluation pour les TGS de stade I. L’échographie abdominale. Elle garde une place dans la précision des localisations secondaires hépatiques pour lesquelles elle reste plus performante en cas de nodules hypodenses non spécifiques à la tomodensitométrie. L’IRM ou le TDM cérébral est réalisée en présence de TGNS avec métastases viscérales ou de symptômes neurologiques. La scintigraphie osseuse et/ou TDM rachidien si signes d’appels. L’EXAMEN ANATOMOPATHOLOGIQUE Il constitue l’élément déterminant dans le choix des attitudes thérapeutiques en fonction du bilan d’extension. La fiche anatomopathologique de compte-rendu type permet de recueillir les données nécessaires à la détermination du stade pathologique (pT) de la classification TNM 1997. 56 RECOMMANDATIONS THERAPEUTIQUES CONSERVATION DU SPERME Ayant une valeur médico-légale, elle est proposée systématiquement avant l’orchidectomie pour au moins l’un des prélèvements. Le reste des prélèvements peut être réalisé après l’orchidectomie avant de débuter le traitement complémentaire. Deux recueils sont en général suffisants, le CECOS peut en fonction de la qualité du sperme recueilli souhaiter un prélèvement supplémentaire. L’ORCHIDECTOMIE - Elle est systématiquement recommandée en première intention - Réalisée impérativement par voie inguinale, elle nécessite un abord premier du cordon permettant en cas de doute ou lorsqu’une orchidectomie partielle est envisagée, un clampage provisoire. La ligature ou le clampage sont effectués avant extériorisation de la glande. Une prothèse testiculaire est mise en place en l’absence de suspicion d’infection, en fonction du souhait du patient. - En cas de menace vitale par une maladie métastatique avancée: la chimiothérapie peut être réalisée avant l’orchidectomie. - Devant une tumeur sur testicule unique ou des tumeurs bilatérales, une chirurgie partielle peut être proposée si le diamètre tumoral est inférieur 2 cm et volume tumoral est inférieur à 30% du testicule, associée à des biopsies en tissu sain. LES TUMEURS GERMINALES NON SÉMINOMATEUSES - STADE I : Les facteurs de mauvais pronostic sont représentés par la présence d’emboles vasculaires ou lymphatiques. Modalités thérapeutiques : o Surveillance : Elle repose sur le schéma suivant : 1. Dosage des marqueurs tumoraux : Il est réalisé la première année tous les mois, puis tous les deux mois la deuxième année, les trois mois la troisième année, puis deux fois par an les deux années suivantes. 2. TDM thoraco-abdomino-pelvienne : Elle est réalisée tous les trois mois la première année, tous les quatre mois la deuxième année, tous les six mois les trois années suivantes. 3. Echographie scrotale : Elle est réalisée de façon optionnelle chez les patients à haut risque de tumeur controlatérale (antécédents de cryptorchidie, micro lithiases diffuses). o Curage ganglionnaire unilatéral : d’un curage modifié qui intéresse la zone de drainage du testicule concerné et comporte une préservation nerveuse : 1. à gauche, les limites du curage sont: le pédicule rénal en haut, l’uretère en dehors, l’artère iliaque primitive en bas, et comporte toutes les régions suivantes: inter-aortico-cave en dessus de l’artère mésentérique inférieure, pré-, para- et rétro aortique. avec exérèse du cordon. 2. à droite, les limites du curage sont: le pédicule rénal en haut, l’uretère en dehors, l’artère iliaque primitive en bas, et emporte toutes les régions suivantes: inter-aortico-cave, rétro-, pré- et latéro-cave avec exérèse du cordon. Une chimiothérapie est indiquée (2 BEP séparés de 21 jours) si l’examen anatomopathologique définitif montre une atteinte ganglionnaire AVEC plus de 6 ganglions touchés OU un ganglion de plus de 2 cm, OU une rupture capsulaire. Une surveillance stricte peut être proposée en cas d’atteinte ganglionnaire intéressant moins de 6 ganglions infra centimétriques avec chimiothérapie en cas de rechute. o Chimiothérapie repose sur deux cures de Bléomycine, Etoposide, Cisplatine (BEP) séparées de 57 21jours. Indications : Le choix se fait en concertation avec le patient sur les bénéfices-risques et en fonction du facteur pronostique - STADE ≥ II Chimiothérapie en fonction du groupe pronostic IGCCCG : • Bon pronostic : 3 cycles de BEP • Pronostic intermédiaire : 4 cycles de BEP • Mauvais pronostic : 4 cycles de BEP ou inclusion dans des essais thérapeutiques - MASSES RESIDUELLES APRES chimiothérapie • • • Leur diagnostic repose sur l’évaluation morphologique par TDM-TAP 4 semaines après la chimiothérapie Si marqueurs normaux et masse inférieure à 1 cm : surveillance Si marqueurs normaux et masse résiduelle > 1 cm, résection chirurgicale C’est une chirurgie régionale qui comprend l’exérèse des masses résiduelles et au moins un curage ganglionnaire unilatéral du territoire de drainage du testicule concerné. Le curage est bilatéral en cas d’adénopathie visible au scanner ou palpée en peropératoire en dehors de ce territoire. L’exérèse des masses résiduelles doit être complète, quelles que soient les résections viscérales et / ou vasculaires associées nécessaires. • En fonction de l’histologie des masses résiduelles : o Si tératome ou nécrose : surveillance. o Si tumeur active : discuter chimiothérapie - RECIDIVE ou PROGRESSION SOUS chimiothérapie • Chimiothérapie de rattrapage (4 PEI/VIP ou 4 TIP ou 4 VeIP) : La prise en charge doit être faite de préférence par des équipes spécialisées. LES TUMEURS GERMINALES SEMINOMATEUSES (TGS) Quel que soit le stade évolutif, la présence dans le bilan initial d’une élévation faible ou modérée de l’HCG ne modifie en rien l’attitude thérapeutique. Le séminome spermatocytaire constitue une entité à part, rencontré essentiellement chez le sujet âgé. Sa filiation avec le séminome reste encore controversée. Cette tumeur ne présente jamais de métastase et son traitement se limite à l’orchidectomie. - STADE 1 L’invasion du rete testis et la taille de la tumeur au-delà de 4 cm sont des facteurs de moins bon pronostic (pas les emboles) qui peuvent influencer la prise en charge thérapeutique. On peut ainsi individualiser 3 groupes de risque : Faible risque = rete testis normal et tumeur de moins de 4 cm. Risque intermédiaire = invasion du rete testis ou tumeur de plus de 4 cm. Haut risque = invasion du rete testis et tumeur de plus de 4 cm. Méthodes : o La radiothérapie reste le traitement de référence à la dose de 20 Grays. elle intéresse uniquement la région lombo-aortique. o La chimiothérapie, basée sur un seul cycle de carboplatine AUC7 (hors AMM) peut être proposée. o Le principe de la surveillance active repose sur le fait que seule 20% de ces tumeurs récidiveront. Elle suppose un patient compliant qui se soumettra à un contrôle clinique, 58 biologique (marqueurs tumoraux) et tomodensitométrique tous les 6 mois les 2 premières années puis tous les ans entre 2 et 5 ans. Indications : Patient compliant de risque faible : surveillance Patient compliant de risque intermédiaire : surveillance ou radiothérapie ou chimiothérapie Patient non compliant ET/OU à haut risque : radiothérapie ou chimiothérapie. - STADE IIA et IIB • • Radiothérapie : lombo-aortique à la dose de 20 Gy en 10 fractions avec un complément de 30 Gy sur les masses ganglionnaires ou Chimiothérapie : 3 cycles de BEP ou 4 cycles d’EP en particulier si stade IIB. - STADE ≥ IIC Chimiothérapie par 3 ou 4 cycles de BEP en fonction du groupe pronostic IGCCCG - MASSE RESIDUELLE APRES chimiothérapie • Evaluation morphologique par TDM-TAP 4 semaines après la chimiothérapie • La régression des masses résiduelles des TGS est volontiers différée (3 à 6 mois) • Masse résiduelle < 3 cm : surveillance 18 • Masse résiduelle > 3 cm : évaluation par TEP-TDM au F-FDG o Si TEP-TDM positive: résection des masses résiduelles o Si TEP-TDM négative: radiothérapie, chimiothérapie ou surveillance - RECIDIVE ou PROGRESSION SOUS chimiothérapie Chimiothérapie de rattrapage : La prise en charge doit être faite de préférence par des équipes spécialisées. RECIDIVES TARDIVES (TGS ou TGNS) Récidive survenant plus de 2 ans après la chimiothérapie. La prise en charge doit être faite de préférence par des équipes spécialisées. • Traitement de référence o Traitement chirurgical par résection de toutes les lésions si techniquement possible • Si lésion inextirpable o Faire une biopsie de la masse o Radiothérapie si lésion localisée d’une TGS o Chimiothérapie si lésions diffuses ou TGNS CAS PARTICULIER du TESTIS UNIQUE La découverte d’une tumeur testiculaire chez un patient porteur d’un testicule unique peut conduire dans certaines situations particulières à proposer une chirurgie conservatrice (niveau de preuve: III-1). Cette chirurgie qui est optionnelle ne s’adresse qu’aux patients avec un bilan hormonal pré opératoire normal (Testostérone, LH), une tumeur de moins de 2 cm de diamètre et la possibilité de conserver au moins la moitié du volume testiculaire. Cette chirurgie répond à des règles techniques très strictes. Si il existe autour de la tumeur des lésions de NIT qui seront systématiquement recherchées, une radiothérapie scrotale ou une totalisation de l’exérèse seront discutés (niveau de preuve: III-1). Une orchidectomie radicale de rattrapage est indiquée en cas d’exérèse en marges positives. En présence d’une tumeur bilatérale lors du diagnostique, une chirurgie conservatrice unilatérale pourra se discuter du coté où elle techniquement réalisable. 59 RECOMMANDATIONS DE SUIVI Il n’y a pas d’étude évaluant la fréquence et le mode de surveillance. Il s’agit d’avis d’experts. ère 1 année ème 2 année Tumeur Germinale Non Séminomateuse (TGNS) de Stade I Examen clinique et Tous les 3 Tous les 3 mois Marqueurs (αFP, mois LDH, HCG) Surveillance TDM ThoracoTous les 6 Tous les 12 abdomino-pelvien mois mois Examen clinique et Tous les 3 Chimiothérapie Marqueurs (αFP, Tous les 3 mois mois ou LDH, HCG) Curage TDM ThoracoTous les 12 Tous les 12 ganglionnaire abdomino-pelvien mois mois Tumeur Germinale Séminomateuse (TGS) de Stade I Examen clinique et Tous les 4 Surveillance Tous les 4 mois Marqueurs (αFP, mois ou LDH, HCG) Radiothérapie ou TDM ThoracoTous les 6 Tous les 6 mois Chimiothérapie abdomino-pelvien mois Tumeur Germinale Testiculaire Métastatique Examen clinique et Tous les 3 Marqueurs (αFP, mois LDH, HCG) TDM Thoracoabdomino-pelvien Tous les 6 mois ème 3 ème -5 année Tous les 6 mois Tous les 12 mois ème 6 - 10 année ème Tous les 12 mois Tous les 12 mois Tous les 6 mois Tous les 12 mois - - Tous les 6 mois Tous les 12 mois Tous les 12 mois Tous les 12 mois Tous les 3 mois Tous les 6 mois Tous les 12 mois Tous les 6 mois Tous les 12 mois Tous les 12 mois CONCLUSIONS La prise en charge des tumeurs germinales du testicule permet d’obtenir une guérison chez plus de 90% des patients. Quel que soit le stade de la maladie, la démarche thérapeutique repose sur la prise en compte de facteurs prédictifs ou pronostiques qui permettent d’optimiser les résultats tout en minimisant la toxicité. Les modalités thérapeutiques sont parfaitement codifiées. Tout écart lors de leur déroulement expose les patients à une perte des chances de guérison. 60 TUMEURS DU REIN L’incidence du carcinome à cellules rénales (CCR) était en France en 1995 de 11.9 pour 100 000 habitants chez l’homme et de 5.5 pour 100 000 habitants chez la femme avec d’importantes variations selon les régions. Le nombre de nouveaux cas diagnostiqués était de 4910 et le nombre de décès de 3060. L’incidence du CCR est en augmentation constante dans les pays industrialisés. En France, la progression en 20 ans a été de 7.8 à 12.2 pour 100 000 habitants. Le CCR représente le 11ème cancer en terme de fréquence, le 3ème cancer urologique chez l’homme après prostate et vessie, le 2ème chez la femme après le cancer de vessie. CLASSIFICATION TNM 2002 La classification TNM 2002 est actuellement la classification de référence, pour les adénocarcinomes uniquement. Tx : tumeur primitive non évaluable T0 : absence de tumeur primitive T1 : tumeur inférieure ou égale à 7 centimètres, limitée au rein T1a : tumeur inférieure ou égale à 4 centimètres, limitée au rein T1b : tumeur comprise entre 4 et 7 centimètres, limitée au rein T2 : tumeur supérieure à 7 cm, limitée au rein T2a, inférieure ou égale à 10 cm T2b, supérieure à 10 cm T3 : envahissement de la graisse péri rénale, de la surrénale ou de la veine cave : T3a : envahissement de la graisse péri rénale ou de la veine rénale et ses branches segmentaires T3b : extension à la veine cave inférieure sous diaphragmatique sous forme d’un thrombus néoplasique T3c : extension d’un thrombus néoplasique à la veine cave inférieure sus diaphragmatique ou envahissement de la paroi cave T4 : tumeur franchissant le fascia de Gerota ou envahissant la surrénale par contiguité Nx : N0 : N1 : N2 : adénopathies régionales non évaluables absence de métastase ganglionnaire métastase au niveau d’un ganglion unique métastase de plusieurs ganglions Mx : M0 : M1 : métastases non évaluables absence de métastase à distance métastase à distance. HISTO-PATHOLOGIE La WHO (World Health Organisation) a proposé en 2004 une nouvelle classification des tumeurs rénales basée sur des critères histologiques et cytogénétiques Les principales tumeurs du rein de l’adulte sont représentées par les tumeurs malignes à cellules rénales De nouvelles entités sont apparues dans la classification WHO 2004 et doivent être reconnues car de pronostic et de traitement différents : les carcinomes à translocation Xp11, le carcinome kystique multiloculaire à cellules claires, 61 les carcinomes tubuleux mucineux et à cellules fusiformes, le carcinome tubulokystique de bas grade, le groupe des REST. Classification WHO 2004 : - Tumeurs à cellules rénales malignes et bénignes - Tumeurs métanéphriques (adénome, adénofibrome et tumeur stromale métanéphrique), - Le spectre des tumeurs mixtes épithéliales et mésenchymateuses ou REST (néphrome kystique, tumeur mxte épithéliale et stromale et synovialosarcome) - Tumeurs néphroblastiques (restes néphrogéniques et néphroblastome) - Tumeurs neuro-endocrines (tumeur carcinoïde, carcinome endocrine, tumeur primitive neuroectodermique ou PNET, neuroblastome et phéochromocytome) - Tumeurs rares (toute tumeur mésenchymateuse, lymphome, tumeur germinale) et métastases rénales La classification histologique des carcinomes rénaux est actuellement basée sur des critères morphologiques et génétiques permettant d’isoler cinq groupes de cancer du rein : 1. Carcinome rénal conventionnel ou carcinome à cellules claires (75%) 2. Carcinome tubulo-papillaire (10%) avec une sous classification en type 1 (petites cellules basophiles) et type 2 (grandes cellules éosinophiles) 3. Carcinome à cellules chromophobes (5%) 4. Carcinome des tubes collecteurs ou carcinome de Bellini (1%) 5. Carcinome du rein non classé (5%) Le grade nucléaire de FUHRMAN est actuellement adopté par la grande majorité des équipes distinguant 4 grades selon la taille du noyau et du nucléole des cellules carcinomateuses. Le diagnostic différentiel concerne l’angiomyolipome et les adénomes oncocytaire, papillaire et métanéphrique qui sont des tumeurs bénignes. - Compte rendu standardisé Il est recommandé aux pathologistes de proposer un compte-rendu et une conclusion standardisés qui reprendront tous les critères histologiques dont l’urologue ou l’oncologue auront besoin pour une prise en charge thérapeutique optimale - type histologique de la tumeur selon la classification - WHO 2004 - taille (plus grand diamètre en centimètres) ; - grade de Furhman ; composante sarcomatoïde en pourcetage ; - .envahissement locorégional (oui/non) : –cavités pyélocalicielles ; –veine rénale ; –graisse hilaire ; –graisse péri-rénale ; –fascia de Gerota ; - .hémorragie / Nécrose (oui/non) ; - .emboles vasculaires microscopiques (oui/non) ; - .ganglions hilaires ; - .surrénales : si envahie (par contiguïté ou par métastase) ; - .marges chirurgicales, exérèse complète ou non pour - tumorectomie ou néphrectomie partielle ; - .rein non tumoral .TNM 62 FACTEURS de RISQUES a) Tumeurs du rein natif et insuffisance rénale Il est recommandé de dépister les tumeurs des reins propres chez les patients en insuffisance rénale terminale. Dans ces conditions, le pronostic semble favorable. On recommande au minimum une échographie rénale bilatérale annuelle, complétée par une TDM en cas d’anomalie évocatrice de tumeur. Le rôle de l’IRM n’est pas établi. La néphrectomie systématique en présence de kystes sur les reins propres n’est pas recommandée. b) Maladies héréditaires Maladie de Von Hippel-Lindau : maladie à transmission autosomique dominante en rapport avec une anomalie du gène VHL situé sur le chromosome 3 associant différentes localisations tumorales dont des carcinomes à cellules claires et des kystes rénaux. Les altérations germinales du gène VHL sont à l’origine de la maladie de VHL alors que les altérations somatiques sont responsables de la majorité des carcinomes à cellules claires sporadiques. Un dépistage génétique (avis de l’onco-généticien) est indispensable en cas de sujets apparentés à un patient VHL, mais aussi en cas de tumeur rénale bilatéral et/ou multiple, de tumeur rénale avant 45 ans ou de tumeur rénale familiale avec au moins 2 cas. Des cancers du rein et d’autres tumeurs rénales peuvent faire partie du tableau clinique de la sclérose tubéreuse de Bourneville, du Syndrome de Birt-Hogg-Dube et de la léiomyomatose cutanée familiale. Ces syndromes, une fois reconnus, nécessitent une prise en charge spécialisée. Il existe des formes familiales de carcinome tubulopapillaire dont le gène est situé sur le chromosome 7. Les formes héréditaires imposent une surveillance individuelle annuelle et une surveillance familiale biannuelle. Leur traitement doit être le plus conservateur possible. RECOMMANDATIONS DIAGNOSTIQUES La majorité des CCR est découverte fortuitement à l’occasion d’un bilan échographique demandé pour diverses raisons. 1. La tomodensitométrie (TDM) est l’examen de référence pour caractériser la tumeur et pour effectuer le bilan d’extension. • La caractérisation de la tumeur est au mieux effectuée par une TDM rénale sans puis avec injection en coupes fines (trois ou cinq millimètres) en phase corticale et en phase tubulaire. La présence d’une ou plusieurs tumeurs, sa taille, sa localisation, enfin, la visualisation du rein controlatéral sont essentiels à la prise en charge thérapeutique. La présence de graisse au sein de la tumeur sur la TDM doit faire évoquer systématiquement un angiomyolipome en sachant qu’il existe des tumeurs malignes avec des contingents graisseux. La présence d’une tumeur à développement centrorénal prenant faiblement le produit de contraste doit faire évoquer, surtout en présence de ganglions, le diagnostic de lymphome, de métastase ou de carcinome de Bellini. Une biopsie à visée diagnostique est alors souhaitable, la prise en charge thérapeutique étant évidemment distincte selon les cas. • L’extension locorégionale, veineuse, ganglionnaire et métastatique de la tumeur est basée aussi sur la TDM : o L’infiltration péri-rénale est parfois difficile à affirmer et doit atteindre un centimètre au moins pour être significative ; O L’extension veineuse se traduit du côté de la lésion par une augmentation du diamètre ou une modification de forme de la veine rénale et de la veine cave inférieure dans son segment inter-rénal ou sus rénal. L’absence de prise de contraste ou un rehaussement hétérogène évoquent la présence d’un thrombus. Pour des raisons anatomiques, l’étude de la veine rénale gauche est facile, celle de la veine rénale droite beaucoup plus aléatoire, en raison de son trajet court et vertical. L’I.R.M.et TDM multibarette est 63 o o l’examen de choix pour préciser la limite supérieure d’un thrombus cave, par rapport aux veines sus-hépatiques et à l’oreillette droite. Une extension ganglionnaire est suspectée quand la taille des ganglions se situe entre 1 et 1.5 cm. Au-delà, l’envahissement ganglionnaire est probable. L’extension lymphatique est évoquée avec une sensibilité comparable en TDM et en I.R.M. par la mise en évidence d’images ganglionnaires siégeant par ordre de fréquence dans la région du hile, puis sur les chaînes latéro et inter-aortico-caves. Une possible atteinte médiastinale est possible par l’intermédiaire du canal thoracique. Les adénopathies sont considérées comme significatives quand leur diamètre atteint ou dépasse 10 mm. En TDM comme en I.R.M., il n’existe pas de critère morphologique ou structural spécifique d’un envahissement ganglionnaire métastatique et l’on retrouve 40 % de ganglions métastatiques pour des adénopathies comprises entre 10 et 20 mm. Par contre les ganglions régionaux dont le diamètre est supérieur à 20 mm sont presque toujours métastatiques. L’analyse structurale des ganglions lymphatique par scanner ou IRM ne permet pas de préjuger de leur atteinte métastatique. Seuls des critères de taille permettent de suspecter leur envahissement. Les métastases sont à rechercher par ordre de fréquence au niveau du poumon (50 à 60 % des formes métastatiques), du médiastin, de l’os, du foie, du rein, de la surrénale et du cerveau. Une acquisition TDM au niveau du thorax est souhaitable dans le cadre du bilan préopératoire bien que ne modifiant pas la prise en charge initiale. L’existence de localisations prévalentes osseuses n’est pas exceptionnelle en particulier chez l’adulte jeune. Lorsqu’une immunothérapie est envisagée, un bilan TDM de l’encéphale est nécessaire. Des localisations secondaires au niveau de la graisse rétro péritonéale, du pancréas et, d’une façon plus exceptionnelle au niveau de la thyroïde ou du sein ont aussi été décrites. L’aspect des lésions secondaires rénales peut être variable. Bien souvent elles reproduisent l’aspect tomodensitométrique et le comportement hémodynamique de la lésion primitive. 2. L’IRM rénale est effectué en cas de contre-indications à la TDM (insuffisance rénale), ou dans les formes atypiques (petite taille, kystique, hémorragique, hypo vasculaire, infiltrant, multifocal...) ou dans les formes de diagnostic difficile ou en cas d’extension veineuse. 3. Les autres examens (scintigraphie osseuse, TDM cérébrale...) ne sont utiles qu’en cas de signes d’appel clinique. 4. La biopsie percutanée des tumeurs du rein est réalisable. Indications - .Contexte de cancer extra rénal connu : distinction entre un cancer du rein primitif et une métastase . - Suspicion de cancer rénal non extirpable (localement avancé et/ou multimétastatique), cancer du rein métastatique - quand une néphrectomie n’est pas envisagée : apporte la preuve histologique nécessaire à l’instauration d’un traitement oncologique - Tumeurs pour lesquelles un traitement ablatif est envisagé - Patients avec comorbidités notables : détermination du rapport bénéfice/risque d’un traitement vs la surveillance active - Tumeurs rénales sur rein unique, dans un contexte de fonction rénale compromise ou dans toute situation ou la néphrectomie partielle première est à risque de complications afin d’éliminer une tumeur bénigne . - Les indications de principe pour les petites tumeurs rénales solides (< 4 cm) indéterminées par l’imagerie restent discutées quand une néphrectomie partielle première est possible. Ne sont pas des indications de biopsie percutanée à visée diagnostique histologique : – Les tumeurs kystiques classées Bosniak I ou II par l’examen tomodensitométrique en raison du caractère bénin de ces lésions – Les tumeurs kystiques classées Bosniak IIf, III ou IV en raison de l’absence de valeur d’une biopsie lorsqu’elle ne fait pas le diagnostic de malignité Les contre-indications .- Suspicion de carcinome urothélial de la voie excrétrice supérieure : en raison du risque de dissémination tumorale de ces tumeurs - Suspicion d’angiomyolipome : en raison du risque hémorragique lié à leur ponction 64 . Il n’y a pas de contre-indication liée à la position de la tumeur par rapport au rein. Cependant, il a parfois lieu d’adapter le trajet de ponction grâce au guidage tomodensitométrique Méthodologie Il est recommandé que le calibre de l’aiguille utilisée pour biopsier soit d’au maximum 18 Gauge. Il est recommandé de pratiquer au moins 2 carottes biopsiques. 5. Le bilan sanguin préopératoire standard est nécessaire. Néanmoins, aucun examen biologique n’est actuellement retenu comme facteur pronostique. Une hypercalcémie et une augmentation des phosphatases alcalines et plus généralement du bilan hépatique, peuvent être l’expression d’un syndrome paranéoplasique ou d’extension métastatique. Il n’existe à l’heure actuelle aucun marqueur reconnu et validé pouvant être utilisé de manière routinière comme marqueur tumoral. 6. évaluation de l’état général Il semble nécessaire de connaître l’état général du patient. Ainsi, l’évaluation du performance status (PS) a été faite soit par l’index de Karnofsky soit par la classification ECOG (Eastern Cooperative Oncology Group). Actuellement, l’évaluation du malade est fait au mieux lors de la consultation d’anesthésie avec le Score ASA (American Society of Anesthesiology) : I – patient en bonne santé, II – maladie systémique modérée, III – maladie systémique, IV – maladie systémique invalidante imposant une sédentarité, V – patient moribond dont l’espérance de vie est de l’ordre de 24 heures avec ou sans intervention. 7. formes atypiques ou de diagnostic difficile : Carcinome de petite taille (< 4 cm) : souvent homogène et de niveau de rehaussement variable, pouvant en imposer pour une tumeur bénigne pauvre en graisse. Carcinome solide, hypo vasculaire : rechercher d’un rehaussement tardif à la TDM. Carcinome kystique : intérêt de la classification de Bosniak modifiée : - Type I « Kyste simple » Densité hydrique (< 20 UH) Homogène Limites régulières sans paroi visible Absence de rehaussement (< 10 UH) - Type II « Kyste atypique » Cloisons fines Fines calcifications pariétales Kyste hyperdense (> 50 UH) Absence de rehaussement (< 10 UH) - Type IIF Cloisons nombreuses et fines Paroi légèrement épaissie Calcifications pariétales et des cloisons, régulières Kyste hyperdense et entièrement intra-rénal et ≥ 3 cm. PAS de rehaussement de la paroi ou des cloisons (à surveiller par imagerie) - Type III « Kyste suspect » Cloisons nombreuses et épaisses Paroi épaisse Limites irrégulières Calcifications épaisses, irrégulières Contenu dense (> 20 UH) Rehaussement de la paroi ou des cloisons - Type IV « Cancer à forme kystique » Paroi épaisse et irrégulière Végétations ou nodule mural 65 Rehaussement de la paroi ou des végétations Carcinome hémorragique : l’évoquer devant une hémorragie spontanée, qui peut masquer une petite lésion tumorale. Carcinomes multiples et bilatéraux : penser à une forme familiale, à des métastases ou un lymphome. Biopsie. Carcinomes infiltrants : carcinome T3 ou T4, tumeur secondaire ou lymphome, tumeur urothéliale, sarcome ? Exceptionnel carcinome à composante graisseuse RECOMMANDATIONS THERAPEUTIQUES 1. Néphrectomie partielle et traitements conservateurs - La néphrectomie partielle constitue l’indication élective pour un stade T1. Elle est recommandée pour stade T2 : en indication relative (sujet à risque évolutif d’insuffisance rénale) en indication impérative (rein unique) La survie globale est augmentée par rapport à la néphrectomie radicale. La voie ouverte : représente la technique de référence. La voie laparoscopique s’adresse à des patients sélectionnés, par des équipes entrainées. - Les traitements ablatifs (cryoablation et radiofréquence) sont proposés, après biopsie per cutanée, pour les tumeurs de moins de 4cm du sujet agé ou des patients à risque néphronique, ou devant des comorbidités importantes pour les tumeurs sur rein unique pour les formes héréditaires et tumeurs multiples Ils comportent un risque plus élevé de récidive que la chirurgie conservatrice. Ils nécessitent un suivi par imagerie TDM ou IRM avec injection. Il n’y a pas d’extension d’indication aux sujets à espérance de vie courte. Les Contre-indications relatives sont représentées par les tumeurs de plus de 4 cm, les tumeurs hilaires ou proches de la voie excrétrice. 2. Néphrectomie élargie Elle est recommandée : - dans les stades T1 T2 No si la néphrectomie partielle n’est pas réalisable en marges saines et avec une morbidité acceptable - chez les patients d’emblée métastatique en bon état général (ECOG O à 2). L’approche laparoscopique (rétro ou transpéritonéale) est réservée aux stades T 1-T2, sans limite stricte de taille tumorale pourvu que le pédicule ne soit pas infiltré par le processus tumoral ou ganglionnaire. 3. Surveillance active Elle est envisageable pour les carcinomes (biopsie préalable souhaitable), chez le sujet agé atteint de comorbidités importantes. Elle nécessite le consentement du patient. Elle repose sur l’imagerie : TDM tous les 3 mois la première année, puis tous les 6 mois pendant 2 ans, puis tous les ans. Le traitement s’impose si la tumeur dépasse 4 cm ou devient symptomatique, ou si le temps de doublement du volume est inférieur à 1 an. 4. Extension veineuse L’exérèse complète du thrombus chez les patients NoMo est indispensable en termes d’intention de traitement curatif. 66 La détermination du niveau supérieur du thrombus conditionne le geste : En cas de thrombus sous hépatique, un contrôle axial et latéral de la veine cave inférieure (VCI) est suffisant. Si le sommet du thrombus est situé au-dessus de l’abouchement des veines sus-hépatiques, un contrôle du pédicule hépatique doit être réalisé. En cas d’extension sus diaphragmatique, il est recommandé d’effectuer une CEC. 5. Surrénalectomie Elle est souhaitable pour les tumeurs de taille supérieure à 8cm quelle que soit leur topographie, pour les tumeurs du pôle supérieur accolées à la surrénale ou en cas d’anomalie surrénalienne à la TDM préopératoire. 6. Curage L’intérêt thérapeutique du curage sur la survie à 5 ans n’est pas prouvé. 7. Métastases La prise en charge des patients métastatiques a été bouleversée depuis 2005 par l’arrivée de nombreux nouveaux traitements, comme les anti-angiogéniques et les inhibiteurs de m-TOR. L’immunothérapie exclusive (interféron alpha et / ou interleukine 2) n’est presque plus utilisée ; elle reste toutefois une option pour les patients de « très bon pronostic » (en pratique les patients jeunes, en très bon état général, avec uniquement des métastases pulmonaires). La place de la néphrectomie avant le traitement général, est discutée ; dans l’attente de données plus fiables en provenance d’essais thérapeutiques, elle reste recommandée sauf pour les patients altérés et / ou polymétastatiques. Par ailleurs, en cas de métastase unique avec un intervalle libre de plus d’un an (entre la néphrectomie et l’évolution métatstatique) la métastasectomie reste indiquée, lorsqu’elle est réalisable avec une bonne probabilité de résection complète. Médicaments disponibles : 1) SUTENT (sunitinib) : anti-angiogénique oral de type « inhibiteur de tyrosine kinase » 2) NEXAVAR (sorafenib) : anti-angiogénique oral de type « inhibiteur de tyrosine kinase » 3) AVASTIN (bevacizumab) : anti-angiogénique IV (anticorps anti VEGF) 4) TORISEL (temsirolimus) : inhibiteur de m-TOR, IV 5) AFINITOR® (everolimus) : inhibiteur oral de m-TOR A venir : VOTRIENT® (pazopanib) ; en attente de l’essai contrôlé versus Sutent® ème Axitinib, en 2 ligne Indications : Elles dépendent des critères pronostic selon Motzer. ère 1 ligne : - patients de bons pronostic ou de pronostic intermédiaire : SUTENT ou AVASTIN + ROFERON (option : immunothérapie exclusive) - patients de mauvais pronostic : TORISEL ou SUTENT® ème 2 ligne : - après cytokines : NEXAVAR ou SUTENT - après AVASTIN : SUTENT ou AFINITOR® - après inhibiteurs de TK : AFINITOR® (option : autre inhibiteur de TK) - après TORISEL : ? Pour les histologies autres que « cellules claires », les traitements sont les mêmes mais avec une probabilité d’efficacité moindre. Les associations sont déconseillées en dehors d’un essai clinique ; privilégier les traitements séquentiels. 67 Plusieurs traitements sont à l’étude en situation adjuvante : NEXAVAR®, SUTENT®, VOTRIENT®. Pour le moment, il n’y a pas d’indication de traitement adjuvant en routine. TABLEAU ANNEXE : conduite à tenir devant une petite masse rénale Petite masse rénale solide d’histologie indéterminée (≤ 4cm) Patient âgé < 70 Pas de co-morbidités notables Bonne expérience de vie Pas de risque chirurgical Patient âgé ≥ 70 Co-morbidités notables Fonction rénale compromise Faible espérance de vie Risque chirurgical important Option préférée = chirurgie Biopsie per cutanée pour confirmer le caractère malin Nephrectomie partiellement, techniquement simple Nephrectomie partielle, techniquement difficile Biopsie percutanée pour confirmer caractère malin Nephrectomie partielle, ouverte ou laparoscopique - Options préférées - Surveillance active et si augmentation de taille - Traitement ablatif - Nephrectomie partielle si expertise - Technique ablative - Nephrectomie totale laparoscopique si technique ablative non sure 68 RECOMMANDATIONS de SUIVI Le suivi d’un patient opéré d’un CCR doit se faire sur un délai d’au moins 15 ans puisque des récidives même tardives ont été rapportées. Il répond à l’objectif de détecter des récidives locales ou métastatiques, qui doivent faire l’objet d’un traitement chirurgical ou général. Le taux de survie à 5 ans pour les tumeurs T1 inférieures à 4 cm est de l’ordre de 90% et pour les tumeurs T1 supérieures à 4 cm de l’ordre de 80% comme pour les tumeurs T2. Pour les tumeurs T3 avec extension à la graisse péri- rénale, le taux de survie à 5 ans est de l’ordre de 70% et de 60% en cas d’extension veineuse. Pour les tumeurs T4, le taux de survie à 5 ans est de l’ordre de 30%. • • • • • En cas de métastase unique, le traitement chirurgical peut permettre d’atteindre des taux de survie de l’ordre de 30 à 50% en fonction du site métastatique. En cas de récidive locale sans autre localisation métastatique, une exérèse chirurgicale est recommandée. Les facteurs pronostiques actuellement reconnus et validés par des études d’analyses multi variées restent le stade, le grade, le type histologique et l’état général. Concernant le CCR métastatique, les facteurs pronostiques clairement identifiés sont le nombre et la localisation des sites métastatiques, le délai d’apparition des métastases, la possibilité d’une métastasectomie chirurgicale curative et la néphrectomie première. Tous les marqueurs tumoraux testés, moléculaires ou cytogénétique, n’ont pas confirmé leur rôle potentiel comme facteur pronostique indépendant dans le diagnostic, dans la rémission ou la progression du CCR . Les recommandations de suivi sont donc affaire individuelle et ne repose pas sur des bases scientifiques. Elles vont dépendre aussi du type de chirurgie effectuée : • en cas de néphrectomie élargie, la consultation post-opératoire doit comprendre un examen clinique et un dosage de la créatinémie : o tumeur de bon pronostic (pT1, pT2, N0, M0) le suivi doit être annuel et comprend un dosage de la créatinémie et une TDM thoraco-abdominale; o tumeur de pronostic intermédiaire (pT3, N0, M0) le suivi doit être semestriel et comporte un examen clinique, un dosage de la créatinémie et une TDM thoraco-abdominale pendant 3 ans puis annuel ; o tumeur de mauvais pronostic (pT4, et/ou N1-2, et/ou M1), le suivi doit être quadrimestriel comportant un examen clinique, un dosage de la créatinémie et une TDM thoracoabdominale. • après chirurgie conservatrice, en présence d’un rein controlatéral sain, il est utile d’avoir une ème TDM abdominale de référence réalisée dans la période post-opératoire entre le 4 et le 6 mois, puis un suivi annuel associant examen clinique et TDM thoraco-abdominale. 69 TUMEURS MALIGNES du PENIS Epidémiologie des tumeurs malignes du pénis Les tumeurs du pénis sont rares. Leur incidence est variable selon les pays. En Europe, elles représentent environ 0,6 % des cancers de l’homme, contre 17 % au Brésil. Des facteurs de risque sont connus, en particulier l’absence de circoncision néonatale et les défauts d’hygiène locale. Les lésions précancéreuses et les infections virales de type HPV jouent également un rôle. La localisation au gland est la plus fréquente (près de la moitié des localisations). L’évolution des cancers du pénis est lente. Elle est initialement locale, puis ganglionnaire inguinale. Les localisations métastatiques sont peu fréquentes et tardives. Anatomo-pathologie des tumeurs malignes du pénis Conditions précancéreuses (lésions fréquemment associées à un carcinome du pénis) : le lichen scléroatrophique chez le sujet âgé, et les condylomes vénériens à HPV. Lésions précancéreuses : elles évoluent vers un carcinome pénien en l’absence de traitement. Il s’agit de lésions de carcinome in situ. On regroupe ainsi l’Erythroplasie de Quérat et la maladie de Bowen. La maladie de Paget extra-mammaire est à classer à part. Les carcinomes du pénis : • Le carcinome épidermoïde (95 %), siégeant principalement au niveau du gland, du prépuce et de la couronne du gland.Il en existe 2 formes principales : o ulcéro-infiltrante qui sera rapidement associée à un envahissement ganglionnaire, et o exophytique qui entraîne une évolution ganglionnaire tardive et rare. Le pronostic de ce carcinome est conditionné par sa profondeur d’infiltration, son grade d’histopronostic et l’existence éventuelle d’emboles sanguins ou lymphatiques. • 2 autres formes de carcinome particulières méritent d’être citées : o le carcinome basaloïde qui touche des hommes plus jeunes, est une forme agressive, souvent liée à HPV. o Le carcinome verruqueux est une lésion à malignité locale exclusive. Stadification du carcinome du pénis (classification TNM 2009) T Tumeur Primitive Tx Tumeur primitive ne pouvant être classée T0 Pas de signe de tumeur primitive Tis Carcinome in situ Ta Carcinome verruqueux non infiltrant T1 Tumeur envahissant le tissu conjonctif sous épithélial T1a Sans invasion lympho-vasculaire et non faiblement différencié ou non indifférencié T1b Avec invasion lympho-vasculaire ou faiblement différencié ou indifférencié T2 Tumeur envahissant le corps spongieux ou caverneux 70 T3 Tumeur envahissant l’urètre (Clinique : palpation ou imagerie) Nx Ganglions régionaux non évaluables N0 Pas de ganglion inguinal palpé N1 Palpation d'un seul ganglion unilatéral mobile N2 Palpation de ganglions multiples ou bilatéraux mobiles N3 Ganglions inguinaux fixés ou ganglions pelviens, unilatéraux ou bilatéraux pN0 Pas d'atteinte ganglionnaire régionale pN1 Métastase ganglionnaire inguinale unique pN2 Métastases ganglionnaires inguinales multiples ou bilatérales pN3 Métastase ganglionnaire pelvienne, unilatérale ou bilatérale ou à distance M Métastases à distance (Pathologique: biopsie ou exérèse) pNx Ganglions régionaux non évaluables Mx Métastase non évaluable Grade Histologique pN Ganglions régionaux cN Ganglions Régionaux T4 Tumeur envahissant d’autres structures adjacentes Gx Renseignements insuffisants pour classer le grade histologique M0 Absence de métastase à distance M1 Présence de métastases à distance G1 Bien différencié G2 Moyennement différencié G3-4 Faiblement différencié ou indifférencié Diagnostic des tumeurs malignes du pénis Pénis : • Examen clinique : o Topographie, aspect, nombre, taille, infiltration caverneuse ou spongieuse, longueur de verge saine • Imagerie (optionnel) : o IRM +/- test d’érection pharmacologique pour apprécier l’extension en profondeur (en particulier avant traitement conservateur) • Prélèvement biopsique : o Si doute diagnostique o De préférence faire une biopsie-exérèse avec marges en tissu sain 71 Aires ganglionnaires inguinales : Risque d’atteinte ganglionnaire si tumeur pénienne ≥ pT1b ou ≥ G2 • Examen clinique : o Systématique et bilatéral : nombre, taille, consistance, mobilité • Cytoponction +/- échoguidée si adénopathie palpée (cN+) • Imagerie : o TDM inguinale et pelvienne si examen difficile ou adénopathie palpée (cN+) o TEP-TDM au 18F-FDG (optionnel) si adénopathie palpée (cN+) • Ganglion sentinelle (optionnel): o Si pas d’adénopathie palpée (cN0) Métastases à distance: • TDM abdomino-pelvienne si atteinte ganglionnaire inguinale prouvée (pN+) • TDM thoracique ou radiographie pulmonaire si signes d’appel • Scintigraphie osseuse si symptômes osseux ou hypercalcémie RECOMMANDATIONS THERAPEUTIQUES PENIS - Tis ; Ta et T1a : • Biopsie-exérèse ou • Traitements conservateurs locaux o Laser Yag ou CO2 ou o Crèmes cytotoxiques (5-fluoro-uracile, imiquimod 5%) ou o Technique de Mosh (si Tis ou Ta G1) - T1b ou T2 du gland : • Biopsie-exérèse ou • Curiethérapie (si tumeur du gland ou du sillon, à distance de l’urètre et du méat, sans envahissement des corps caverneux, inférieure à 40mm) ou • Amputation partielle - T2 du corps du penis ou T3 : • Amputation partielle ou • Amputation totale avec urétrostomie périnéale - T4 : • Chimiothérapie première néo-adjuvante o Si répondeur, amputation totale avec urétrostomie périnéale - Récidive locale : • Quel que soit le traitement conservateur, le taux de récidive locale est de 15 à 30% • Une reprise locale avec un geste conservateur peut à nouveau être indiqué si elle est techniquement possible sinon amputation partielle ou totale. - Remarques • En cas de chirurgie conservatrice, les marges d’exérèse doivent être en tissu sain (pas de taille limite de la marge). • Une reprise chirurgicale doit être réalisée en cas de marge en tissu tumoral. AIRES GANGLIONNAIRES La prise en charge ganglionnaire doit être systématique en cas de tumeur pénienne ≥ pT1b ou ≥ G2 ou d’adénopathie palpée. Elle est bilatérale et doit être réalisée lors du diagnostic initial de la maladie (ne pas attendre l’apparition secondaire d’adénopathie) - Régions inguinales cliniquement normales (cN0) : • Tumeur à risque faible d’envahissement ganglionnaire (< pT1b ou < G2) : 72 • o Surveillance. Tumeur à risque élevé d’envahissement ganglionnaire (≥ pT1b ou ≥ G2) : o Ganglion sentinelle ou o Lymphadénectomie inguinale modifiée bilatérale - Régions inguinales avec ganglions inguinaux mobiles et palpables (cN1-2) : • Cytoponction sous échographie o Si positive : lymphadénectomie inguinale totale du côté pN+ et lymphadénectomie inguinale modifiée du côté cN0. o Si négative : nouvelle cytoponction à distance ou lymphadénectomie inguinale modifiée. - Régions inguinales avec ganglions inguinaux fixés (cN3) : • Chimiothérapie néoadjuvante o Si réponse : discuter chirurgie d’exérèse inguinale et pelvienne o Si pas de réponse : traitement palliatif (seconde ligne chimiothérapie, radiothérapie) - Apparition de ganglions inguinaux au cours de la surveillance : • Si pas de prise en charge ganglionnaire initiale : o Lymphadénectomie inguinale bilatérale selon les mêmes principes ci-dessus. • Si prise en charge ganglionnaire initiale : o Lymphadénectomie inguinale totale du côté de la récidive +/- chimiothérapie adjuvante ou néoadjuvante - Remarques : • En cas de lymphadénectomie inguinale modifié : o Si pN0 : surveillance. o Si pN+ : compléter par une lymphadénectomie inguinale totale du côté pN+ • Indication d’une lymphadénectomie iliaque si : o ≥ 2 ganglions inguinaux métastatiques ou o Effraction capsulaire sur un ganglion inguinal ou o Suspicion d’atteinte ganglionnaire pelvienne à l’imagerie RECOMMANDATIONS DE SUIVI - Remarques : • Il n’y a pas d’étude évaluant la fréquence et le mode de surveillance. Il s’agit d’avis d’experts. Pénis Traitement Pénectomie conservateur Examen clinique ou auto-palpation Modalité de suivi Fréquence re e 1 et 2 année e e e 3 , 4 et 5 année Tous les 3 mois Tous les 6 mois Tous les 6 mois Tous les 12 mois Aires inguinales Pas de curage Curage pN0 Examen clinique ou auto-palpation Tous les 3 mois Tous les 6 mois Curage pN+ Examen clinique ou auto-palpation Echographie inguinale Cytoponction si adénopathie Tous les 6 Tous les 3 mois mois Tous les 12 Tous les mois 12 mois 73