Evolution de l`infection par un virus de l`hépatite virale B en
Transcription
Evolution de l`infection par un virus de l`hépatite virale B en
Evolution de l'infection par un virus de l'hépatite virale B en présence d'un mutant d'échappement au 3TC Revue critique de l'actualité scientifique internationale sur le VIH et les virus des hépatites n°78 - novembre 1999 VHB - LAMIVUDINE Evolution de l'infection par un virus de l'hépatite virale B en présence d'un mutant d'échappement au 3TC Hélène Fontaine Service d'Hépatologie, Hôpital Necker (Paris) Acute exacerbation and hepatitis B virus clearance after emergence of YMDD motif mutation during lamivudine therapy Liaw Y.F., Chien R.N., Yeh C.T., Tsai S.L., Chu C.M. Hepatology, 1999, 30, 567-572 Une étude d'Hepatology semble confirmer que l'existence de mutations du motif YMDD est responsable d'échappements à la lamivudine (3TC) chez les patients immunocompétents. Avec comme facteurs de risque d'échappement une virémie pré-thérapeutique élevée et une durée prolongée de traitement. Il est actuellement bien établi que la lamivudine (3TC, Epivir®), analogue nucléosidique de la cytidine, est actif dans le traitement de l'hépatite B chronique, par l'inhibition de la réplication virale en quelques semaines dans 95 % des cas, associée à une amélioration biologique, à une séroconversion ag Hbe/ AC Hbe dans 16% des cas environ et à une diminution des lésions histologiques dans environ 50 % des cas (régression de la fibrose http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/78_1119.htm (1 sur 5) [11/04/2003 17:47:39] Evolution de l'infection par un virus de l'hépatite virale B en présence d'un mutant d'échappement au 3TC et surtout des lésions nécrotico-inflammatoires). Mais cette efficacité est limitée par l’existence de réactivations fréquentes en cas d'arrêt du traitement et par la survenue d'échappements au cours des traitements prolongés (15 à 30% environ après 12 mois de traitement chez les patients immunocompétents). Ces échappements sont dus à des mutations du site catalytique hautement conservé de la transcriptase inverse de la polymérase virale, le motif YMDD (tyr, met, asp, asp). Plusieurs études semblent suggérer qu'après l'apparition de l'échappement, le niveau des transaminases et de la virémie sont plus faibles que les dosages pré-thérapeutiques, mais l'évolution clinique, biologique, virologique et histologique de ces patients reste à préciser. Liaw et coll. ont suivi 55 patients (préalablement inclus dans une étude publiée en 1998) infectés de faÁon chronique par le virus de l'hépatite virale B et traités par lamivudine depuis au moins deux ans. Aucun n'était infecté par un virus mutant pré-C. Ces patients ont été régulièrement suivis par un examen clinique, des examens biologiques (transaminases, bilirubine et taux de prothrombine en cas d'augmentation des transaminases par rapport au niveau pré-thérapeutique), sérologiques et virologiques (virémie par méthode d'hybridation et PCR et analyse génotypique en cas d'échappement). Chez 6 d'entre eux, une biopsie hépatique a été réalisée en cours de suivi avec un immunomarquage anti-HBc in situ. L'exacerbation aiguë était définie par les auteurs comme une augmentation des transaminases à plus de 2 fois le taux initial ou à plus de 5 fois le taux normal ou de plus de 300 UI/L, et la séroconversion comme une clairance de l'antigène HBe et de l'ADN viral associée à l'apparition de l'AC HBe. Trente-deux patients (58,2%) ont développé un échappement entre la 4e et la 140e semaine après le début du traitement (en moyenne à la 78e semaine) dont 12 (37,5%) mutations YVDD associées à la mutation L528M et 20 (62,5%) YIDD; enfin, chez 8 patients, l'analyse génotypique a retrouvé de façon transitoire une population mixte (sauvage et mutante) au début de la période d'échappement. Le seul facteur de risque d'échappement était une virémie pré-thérapeutique élevée; les autres variables cliniques, biologiques et virologiques étaient identiques. Chez les 23 patients n'ayant pas échappé au traitement, 12 (52,2%) ont séroconverti dans le système HBe. Cinq avaient des transaminases pré-thérapeutiques élevées à plus de 5 fois la normale et ont séroconverti entre la 4e et la 32e semaine. Sept avaient des transaminases moins élevées: chez l'un d'entre eux, la séroconversion a eu lieu à la 50e semaine de traitement, 4 semaines après un pic de transaminases à plus de 20 fois la http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/78_1119.htm (2 sur 5) [11/04/2003 17:47:39] Evolution de l'infection par un virus de l'hépatite virale B en présence d'un mutant d'échappement au 3TC normale et chez les 6 autres, elle a eu lieu entre la 52e et la 72e semaine sans variation préalable du niveau des transaminases. Ces patients avaient un niveau pré-thérapeutique de transaminases significativement plus élevé et une virémie pré-thérapeutique significativement plus faible que les patients n'ayant pas séroconverti. Le traitement par lamivudine a été maintenu chez tous les patients, y compris les 32 échappeurs. Chez 93,7% de ceux-ci, une augmentation de transaminases a été décrite; dans 40,6%, elle correspondait à la définition de l'exacerbation aiguë et survenait 4 à 94 semaines après l'apparition de l'échappement (24e semaine en médiane). Chez certains, 2 ou 3 exacerbations successives ont eu lieu: 20 exacerbations au total, chez les 13 patients. Seule la virémie mesurée après l'échappement était significativement différente entre les patients ayant eu une exacerbation et ceux n'ayant pas eu d'exacerbation: elle était significativement plus élevée chez les premiers. Les autres variables cliniques, biologiques et virologiques étaient comparables. Chacune de ces exacerbations biologiques était précédée d'une augmentation de la virémie 4 semaines auparavant environ. Excepté un patient perdu de vue un mois après l'exacerbation, l'évolution a été favorable chez les 12 autres patients. Trois ont eu une décompensation hépatique définie par les auteurs comme une augmentation de la bilirubinémie et un allongement du taux de prothrombine, avec une restitution de la fonction hépatique au cours du suivi; dans ces 3 cas, une séroconversion dans le système HBe et une négativation de la virémie ont été observées. Une séroconversion a également été décrite chez 5 autres patients 1 à 5 mois après l'exacerbation biologique. Chez 6 (50 %) patients, les transaminases se sont normalisées ultérieurement. Au total, chez 9 (75%) patients, une séroconversion dans le système HBe et un négativation de la virémie ont été décrites. Au contraire, en l'absence d'exacerbation aiguë, aucune séroconversion n'a été observée chez les échappeurs. Les résultats étaient comparables quel que soit le type de mutation YVDD ou YIDD. Sur l'ensemble de la population, l'exacerbation était plus fréquente (40,6 vs 4,3%) et la séroconversion plus rare (25 vs 52 %) en cas de mutation YMDD; mais chez les échappeurs, la séroconversion HBe était plus fréquente en cas d'exacerbation (75 vs 0%). Six patients ont eu une biopsie hépatique au cours du suivi. Chez 5, elle a été réalisée au moment de l'exacerbation: le score nécrotico-inflammatoire était à 3, 5, 7, 9, 11 avec un immunomarquage anti-HBc in situ positif dans tous les cas. http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/78_1119.htm (3 sur 5) [11/04/2003 17:47:39] Evolution de l'infection par un virus de l'hépatite virale B en présence d'un mutant d'échappement au 3TC Dans le dernier cas, la biopsie a été réalisée 2 mois après l'épisode de décompensation hépatique: l'immunomarquage était alors négatif et il existait une fibrose en pont. Les auteurs suggèrent que cette étude confirme l'existence de mutations du motif YMDD responsable d'échappements à la lamivudine chez les patients immunocompétents, avec comme facteurs de risque d'échappement, une virémie pré-thérapeutique élevée et une durée prolongée de traitement. Les exacerbations biologiques, déjà décrites dans la littérature au moment de l'échappement, pourraient être probablement sous-estimées en l'absence d'un suivi biologique rapproché (au moins bimensuel). Ces épisodes sont fréquemment suivis d'une séroconversion dans le système HBe et d'une négativation de la virémie; aucun facteur prédictif d'exacerbation n'a pu être identifié dans cette étude. L'hypothèse suggérée par les auteurs, pour expliquer cette augmentation des transaminases, est une réponse immunologique naïve lymphotoxique T contre le variant associée à un épisode de cytolyse hépatique et suivie parfois d'une disparition de la virémie. Le risque d'insuffisance hépatique, comme il a été décrit ici chez 3 patients, doit être pris en compte et suggère une surveillance rapprochée des patients ayant échappé à la lamivudine, en particulier dans les semaines qui suivent une augmentation de la virémie. Une question reste toutefois en suspens: quelle est l'attitude thérapeutique à tenir chez les patients ayant échappé? Faut-il continuer le traitement, comme la plupart des équipes le suggèrent? Faut-il associer un autre traitement? Probablement, mais celui-ci reste encore à définir. Cette étude rapporte l’existence d’exacerbations quelques mois après l’apparition d’un mutant YMDD au cours d’un traitement prolongé par lamivudine. Ces observations soulèvent plusieurs problèmes. Comment expliquer ces exacerbations? Sont-elles dues, comme on peut l’observer dans l’histoire naturelle de l’hépatite virale B non traitée, à une accentuation des défenses immunitaires de l’hôte favorisées par l’apparition du virus mutant, particulièrement après une augmentation de la virémie? Et, dans ce cas, la réaction immunitaire vis-à-vis du virus mutant serait-elle plus importante que vis-à-vis du virus sauvage? La survenue d’exacerbations peut être responsable de décompensations sévères de la fonction hépatique et pourrait aboutir au décès chez certains patients. Même si une séroconversion dans le système HBe et un arrêt de la réplication virale sont souhaitables, cette éventualité doit tempérer l’hypothèse d’une évolution de l’infection moins sévère après l’apparition du virus mutant. Malgré un niveau de virémie http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/78_1119.htm (4 sur 5) [11/04/2003 17:47:39] Evolution de l'infection par un virus de l'hépatite virale B en présence d'un mutant d'échappement au 3TC souvent plus faible après l’échappement et une réponse histologique persistante quelques mois après l’échappement, le recul est probablement encore insuffisant pour juger de l’évolution ultérieure de ces patients. L’utilisation d’associations thérapeutiques dans le traitement de l’hépatite virale B reste à développer dans l’avenir et pourrait permettre d’éviter cette situation potentiellement dangereuse. - Isabelle Fontaine 1 - Lai CL, Chien RN, Leung NWY et al. " A one year trial of lamivudine for chronic hepatitis B " N Engl J Med, 1998, 339, 61-68 2 - Melegari M, Scaglioni PP, Wands JR " Hepatitis B virus mutants associated with 3TC and famciclovir administration are replication defective " Hepatol, 1998, 27, 628-33 http://publications.crips.asso.fr/transcriptase/78_1119.htm (5 sur 5) [11/04/2003 17:47:39]