Les villes nouvelles en Ile-de-France ou la fortune d`un malentendu

Transcription

Les villes nouvelles en Ile-de-France ou la fortune d`un malentendu
P ROGRAMME H ISTOIRE ET E VALUATION DES
VILLES N OUVELLES
LES VILLES NOUVELLES EN
ILE DE FRANCE OU LA
FORTUNE D’UN
MALENTENDU
– Revue de la littérature –
(1965 – 2000)
Juin 2002
Daniel BEHAR
Philippe ESTEBE
Sophie GONNARD
170bis rue du Faubourg Saint-Antoine - 75012 Paris
tél : 01 43 79 97 79 - fax : 01 43 79 99 52
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siret 323 565 994 00023 • ape 741 E
ette revue de la littérature consacrée aux villes nouvelles en Île-de-France ne saurait
prétendre à l’exhaustivité. Comment épuiser en effet l’un des sujet les plus débattus de
l’histoire de l’aménagement urbain et du territoire réunis ? La bibliographie recensée
sur le site du programme « Histoire et évaluation des villes nouvelles » suffit à montrer que
plusieurs vies érudites n’y suffiraient pas. Cette revue de la littérature ne constitue donc pas,
à proprement parler, un « survey », au sens académique. On a moins cherché à « servir » la
littérature que l’on s’est servi d’elle. La raison d’être de ce travail se fonde sur une
interrogation : peut-on retracer l’histoire de la spécificité des villes nouvelles dans le
contexte de la région Île-de-France ? Autrement dit, il ne s’agissait pas de faire une histoire
des villes nouvelles —puisque telle est l’ambition du programme dans son ensemble ; ni
d’accumuler un ensemble de monographies, partageant l’espoir de Philippe II s’adressant
aux paroisses, d’obtenir une carte complète du royaume. Mais plus modestement, de retracer
la genèse et le devenir d’une intention publique : les villes nouvelles existent, en Île-deFrance notamment, à la suite d’une intention publique suffisamment affirmée pour qu’elle ait
pu faire l’objet de reconstructions mythiques ou mythologiques. Elles témoignent donc d’une
intervention exceptionnelle de la puissance publique sur l’espace régional. Cette exception
originelle s’est ensuite « fondue » dans le paysage régional, elle s’est banalisée. Peut-on
décrire l’exception originelle, analyser les processus de banalisation et ouvrir à une réflexion
sur les « traces » actuelles —l’existence, au bout de trente ans, d’une spécificité «ville
nouvelle » en Île-de-France ? — à travers la littérature politique, administrative et savante ?
C
Ce texte retrace donc l’histoire d’une intention publique, il se présente comme la chronique
d’un référentiel. Il commence donc par reconstruire ce référentiel. Comme toute
reconstruction historique, tout en se présentant comme objectif —en l’occurrence, ce texte
prétend décrire les réelles intentions initiales des concepteurs des villes nouvelles— ce texte
est partial : il met l’accent sur un élément particulier du référentiel d’origine, à savoir la
fonction régionale des villes nouvelles. Mais il nous a semblé que cette dimension, pour n’être
pas la seule, était néanmoins déterminante du programme d’ensemble et de la suite des
opérations. Le deuxième reproche que l’on peut faire à ce texte est son caractère trop
abstrait : il s’intéresse aux productions discursives, sans expliquer leur genèse ; il ne
comporte notamment aucune analyse sociologique des différents porteurs de discours, de
leurs intérêts matériels et symboliques et de leur position dans le champ des politiques
publiques territoriales ; cette sociologie reste à faire et ce n’était pas l’objet de cette étude
que de s’y engager —si elle peut ouvrir des appétits en ce sens, elle n’aura pas été vaine. Le
troisième reproche, enfin, réside dans son indifférence affichée par rapport aux enjeux
proprement politiques, idéologiques et institutionnels auxquels ont participé les villes
nouvelles : la structuration politique de la région parisienne, la création des départements,
l’émergence d’un espace politique régional, les avatars de l’investissement de l’État dans la
région capitale ; cette histoire a déjà été abordée, elle le sera ailleurs et plus tard : elle est en
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filigrane de cette chronique dont ses rédacteurs seraient par trop naïfs s’ils espéraient
pouvoir s’en affranchir.
Il faut donc prendre ce texte pour ce qu’il prétend être, et rien de plus : une introduction
problématique aux questions : comment les concepteurs des villes nouvelles ont-ils formaté
leur fonction dans le contexte francilien ? Que disent les textes de la prise de consistance et
de l’évolution de cette fonction ? Que transmet la littérature du rôle actuel des villes
nouvelles ?
De manière sous-jacente, et sans le dire, ce texte aborde une quantité de problèmes : celui de
la « métropolisation » et de l’évolut ion des « villes » dans ce contexte ; celui de la pertinence
d’une intervention publique volontaire dans un univers aussi complexe et contraint que la
région parisienne ; celui des échelles de l’intervention et de la variabilité des résultats d’une
action en fonction des points de vue qui l’anime, etc… Toutes questions qu’il faudra étudier
plus avant dans le cadre de ce programme de recherche et d’évaluation.
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SOMMAIRE
PREMIERE PARTIE : VILLES NOUVELLES OU CENTRES URBAINS, LE MALENTENDU
ORIGINEL ............................................................................................................................................................................... 4
LES VILLES NOUVELLES , UN PROJET QUI « FONDE LE SCHEMA D’AMENAGEMENT DE 1965 » DE LA R EGION
PARISIENNE ................................................................................................................................................................................ 7
« La ville nouvelle est la conséquence et la clé de voûte du schéma directeur ».......................................................7
Les villes nouvelles comme facteur d’unité de la région .............................................................................................10
LES VILLES NOUVELLES COMME CENTRE INTERMEDIAIRE « ENTRE LE CENTRE DE PARIS ET LE CENTRE DE
QUARTIER » .............................................................................................................................................................................12
« Desservir et non pas grouper » ......................................................................................................................................12
A chaque centre sa vocation particulière ........................................................................................................................14
UN PROJET EXCEPTIONNEL ..................................................................................................................................................19
DEUXIEME PARTIE : DES CENTRES URBAINS PARMI D’AUTRES ..........................................................22
LES VILLES NOUVELLES SE FONDENT DANS LE PAYSAGE FRANCILIEN .......................................................................23
L’inscription dans les logiques régionales ......................................................................................................................23
La « localisation » des villes nouvelles ...........................................................................................................................25
Les villes nouvelles constituent-elles des pôles de la région parisienne ?................................................................30
LES POLARITES SE MULTIPLIENT EN ÎLE-DE-FRANCE...................................................................................................31
Au fil des documents d’aménagement, les villes nouvelles deviennent des pôles parmi d’autres .......................31
Polycentrisme ou « multicentrisme » ?...........................................................................................................................33
TROISIEME PARTIE : LA VILLE REVENDIQUEE .............................................................................................35
Le basculement de l’Etat giscardien et de l’opinion politique....................................................................................36
La logique des acteurs........................................................................................................................................................37
Les changements d’échelles de la mise en œuvre.........................................................................................................38
Les conséquences territoriales : des villes moyennes en Île-de-France ....................................................................40
CONCLUSION : UNE TENSION PRODUCTIVE, OU LA SPECIFICITE DES VILLES NOUVELLES
EN ILE-DE-FRANCE .........................................................................................................................................................44
Des combinaisons singulières...........................................................................................................................................45
Les villes nouvelles ont-elles encore, en tant que catégorie, un rôle à jouer dans les dynamiques
franciliennes ?......................................................................................................................................................................48
BIBLIOGRAPHIE ...............................................................................................................................................................50
LES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS .....................................................................................................................................51
LA LITTERATURE SAVANTE..................................................................................................................................................53
NUMEROS SPECIAUX « VILLES NOUVELLES » .................................................................................................................59
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PREMIERE PARTIE :
VILLES NOUVELLES OU CENTRES URBAINS,
LE MALENTENDU ORIGINEL
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Le projet « villes nouvelles » en Ile-de-France a été élaboré et conduit par le District de la
Région parisienne au travers du Schéma d’Aménagement et d’Urbanisme de la Région
parisienne (S.D.A.U.R.P.) de 1965. Les intentions qui fondaient ce projet ont été dès le départ
sources de confusion. Pour Paul Delouvrier et son équipe 1 , l’objectif était avant tout de créer
des centres urbains qui réorganiseraient la Région parisienne. Mais, le choix de l’expression
"ville nouvelle" a produit du malentendu sur le sens donné à ce projet. Pour Delouvrier, « le
mot de "ville nouvelle" a été bien choisi, à condition qu’on sache que ces villes nouvelles ne
sont pas des villes nouvelles autonomes au sens où on fait Brasilia, mais que ce sont des cités
anti-banlieue, tout en restant banlieue d’une agglomération principale », (Delouvrier, 1976,
in Murard & Fourquet). Toute la littérature à propos des villes nouvelles s’organise autour
de cette tension originelle : s’agit-il de nouveaux centres urbains dont l’objectif est
d’organiser la croissance de la région parisienne ? ou bien s’agit-il de villes nouvelles,
autonomes, dont l’objectif serait d’équilibrer la région parisienne ? Autrement dit : s’agit-il
d’un levier d’aménagement de la Région Parisienne ou bien d’un levier d’aménagement du
territoire dans une perspective « graviériste » ? Dès l’origine, les deux référentiels ont
coexisté.
Les villes nouvelles que souhaitait mettre en place l’équipe de Delouvrier en Ile-de-France
ne devaient pas ressembler aux villes nouvelles anglaises, mais devaient être d’abord « des
centres urbains nouveaux ». Selon Delouvrier , cette idée n’a pas toujours été bien comprise :
« nous devons insister et rappeler que la "ville nouvelle" est avant tout un "centre urbain
nouveau" », (Delouvrier, 1967). Pour Jean- Eudes Roullier, « la situation de départ, c’était un
peu (de) refuser les villes nouvelles, mais (de faire la) proposition de centres urbains
nouveaux », (Roullier, 1976, in Murard & Fourquet). L’équipe de Delouvrier rejetait l’idée de
villes nouvelles telles qu’elles ont été réalisées en Angleterre. Elles étaient selon eux placées
trop loin et mal reliées à Londres. Selon Piquard, les gens qui habiteront dans les villes
nouvelles en Ile-de-France ne devront pas s’y sentir prisonniers, (Piquard, 1976, in Murard &
Fourquet). « Les villes nouvelles telles que les ont conçues les Anglais, c’est absurde ! »,
(Delouvrier, 1976, in Murard & Fourquet).
Pour Delouvrier , l’expression « ville nouvelle » procède d’un choix de communication :
« Si je n’ai pas un mot nouveau qui cerne une réalité qui se veut nouvelle, jamais le Ministère
des Finances ne me donnera les moyens financiers originaux pour faire vraiment des centres
villes que je veux faire (…) sans ça, il va me dire : « Partout où vous verrez des ensembles
urbains nouveaux, on va me demander les mêmes avantages » ». Une autre raison est « la
considération que le mot "centre urbain nouveau" ne dirait rien à personne, tandis que le mot
"ville nouvelle" était parla nt », (Delouvrier, 1976, in Murard & Fourquet). Pourtant, parmi les
collaborateurs de Delouvrier, certains « s’opposèrent à l’adoption d’un terme qu’ils trouvaient
trop entaché de rêve (…) en revanche, J. Michel vantait les avantages du vocable de "ville
nouvelle" sur le plan publicitaire », (Carmona M., 1980).
En 1967, Delouvrier reconnaît que l’expression "ville nouvelle" comporte un
inconvénient : « on met peut-être trop l’accent sur le fait que la ville est un rassemblement
d’immeubles, un groupement de population, alors qu’elle doit être aussi un centre d’activités,
un pôle d’attraction ». Le sens donné au mot "ville nouvelle" par l’équipe Delouvrier n’a pas
1
Delouvrier est arrivé en 1961 à l’Institut d’Urbanisme de la Région Parisienne (I.A.U.R.P.). J. Michel y
travaillait déjà. Selon ce dernier, Delouvrier est arrivé avec son « commando », c’est-à-dire avec M. Piquard et J.
Millier. Millier a été placé directeur de l’IAURP, Delouvrier en étant le président.
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été toujours bien saisi par la suite. Pour certains, la « ville nouvelle » a entièrement recouvert
le contenu des « centres urbains nouveaux ». Ce malentendu est lié à l’usage du terme "villes
nouvelles" qui rappelle certaines réalisations étrangères. Cette confusion a des conséquences
sur l’appréciation portée sur le projet villes nouvelles en Ile-de-France.
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LES VILLES NOUVELLES, UN PROJET QUI « FONDE LE SCHEMA
D’AMENAGEMENT DE 1965 » DE LA REGION PARISIENNE
« La ville nouvelle est la conséquence et la clé de voûte du schéma
directeur »
Le projet villes nouvelles est né d’une réflexion de l’équipe de Delouvrier sur le
développement de la région parisienne. Delouvrier explique qu’ils ont commencé par se
demander : « est-ce qu’on peut tolérer cette tâche d’huile ? », (in Murard et Fourquet, 1976).
Les villes nouvelles ont été mises en œuvre pour résoudre le développement de la croissance
de la Région Parisienne. En 1992, Laurent Zylberberg estime que les villes nouvelles ne
peuvent être dissociées du projet d’aménagement de la région parisienne car elles ont été
« conçues comme partie d’un ensemble régional et non comme une opération ponctuelle ».
Elles constituent un élément fondamental du projet global d’urbanisme de l’époque : elles
« fondent le Schéma d’Aménagement » de 1965, (Zylberberg, 1992). Ceci explique
« l’absence de politique des villes nouvelles comme entité. Il n’y a jamais eu dans la région
parisienne une politique des villes nouvelles qui soit autonome par rapport à l’aménagement
régional ». Autour des villes nouvelles doit se créer et se développer une dynamique
régionale. Pour Zylberberg, « les villes nouvelles ont été conçues dès le début des années
1960 comme étant une réponse globale aux problèmes de la région ». Rappelons, selon
Delouvrier, la mission que le Général De Gaulle lui avait confié le 11 août 1961 : « C’est
important politiquement et pour la France que Paris retrouve une image de cité moderne. Il
faut mettre de l’ordre là dedans », (IAURIF, 2001). Le P.A.D.O.G., Plan d’aménagement et
d’organisation générale de la région parisienne, prévoyait déjà en 1960 le développement de
« noyaux urbains » mais il s’agissait là « d’opérations limitées et non pas intégrées dans une
politique d’aménagement régional », (Zylberberg, 1992). Michel explique que les centres
urbains sont un peu dans la continuité du PADOG avec les centres restructurateurs « mais à
une autre échelle », (Michel, 1976, in Murard & Fourquet).
Tout ceci amène Max Stern à dire : « La ville nouvelle (est) la conséquence et la clé de voûte
du schéma directeur, elle assure en des sites convenablement choisis, un ensemble de
fonctions. Elle fixe une part des foyers qui se disperseraient au hasard des possibilités de
l’agglomération, elle soulage, sans les concurrencer, les centres de villes, elle ébauche un
nouveau genre de vie où le déploiement dans l’espace des grandes fonctions urbaines tient
compte des nouveaux moyens de déplacements individuels et collectifs. »(in Zylberberg,
1992).
Cette régionalisation de la politique des villes nouvelles impliquait « une forte capacité à
s’extraire du terrain local ». En clair, il s’agissait de ne pas dépendre des élus locaux pour
créer les villes nouvelles. Les villes nouvelles « doivent être conçues dans une vision
régionale et non ville par ville ». (Zylberberg, 1990).
Des villes nouvelles pour organiser l’expansion urbaine
Les villes nouvelles ont été réalisées pour organiser l’expansion urbaine. « Au cadre de la
simple agglomération était substitué le cadre de la région dans lequel le développement
polycentrique devait contrer une extension spontanée radioconcentrique », (Saint-Julien,
2001). Ce projet est basé sur une hypothèse démographique de 14 millions d’habitants dans la
Région parisienne à la fin du siècle. Une première étape, avant l’organisation de la région
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parisienne, a été de faire accepter cette hypothèse de croissance. Celle-ci a été présentée en
1963 dans le Livre blanc 2 . Ensuite, l’organisation de la région parisienne recherchée, le
polycentrisme, a été exposée dans le SDAURP en 1965.
Ce projet est en rupture avec les principes du PADOG. Tout d’abord, l’hypothèse, sur
laquelle il repose, de 14 millions d’habitants à l’horizon 2000 en région parisienne, constitue
un changement de perspective par rapport à la politique de décentralisation dans laquelle
s’insère le PADOG. La politique du PADOG était de rechercher « un meilleur équilibre entre
Paris et le reste du territoire » qui passait pour cela par une stabilisation de la région et par une
politique nationale de décentralisation, (C. de l’IAURP, 1969). Gibel3 explique en 1976 quels
étaient les principes du PADOG : « une stabilisation (démographique) de la Région parisienne
est recherchée par une politique nationale d’aménagement. Elle doit aboutir à une
décentralisation vers la Province des activités secondaires et tertiaires qui ne sont pas liées à
la vie de l’agglomération. », (Gibel, in Murard et Fourquet, 1976). Selon Michel (in Murard et
Fourquet, 1976), l’idéologie de l’époque était anti-parisienne, « Paris ne doit pas croître ». Ce
« malthusianisme » interdisait de voir plus loin et « était une pétition de principe…on a
montré que la ville débordait de toutes ses règles ». En effet, en 1963, le Livre Blanc
constate : « la vérité est, qu’une fois de plus, les barrières de Paris éclatent. La vérité est qu’il
n’est pas sain de satisfaire par des dérogations les demandes les plus pressantes ». Par rapport
à ce qui apparaît comme « une idéologie extrêmement bloquante intellectuellement » (Michel,
in Murard et Fouquet, 1976), le SDAURP « s’efforce de dégager une vue réaliste de
l’évolution et de l’aménagement de la région parisienne (…) il refuse de miser sur une
régression contrainte de la région parisienne au moment même où l’ensemble du pays mise
sur l’expansion démographique, économique et sociale ». Il « rompt délibérément avec (…) la
stabilisation supposée et totalement théorique de l’expansion de 1956 à 1962 ». (C. de
l’IAURP, 1969). Pourtant, malgré tous les constats, ce choix de l’hypothèse de 14 millions
d’habitants apparaît aller à l’encontre de la politique nationale d’aménagement. Lorsqu’il
présente le Livre Blanc, Delouvrier explique que Paris connaît une période de croissance
comme le reste de la France et que ce développement de la région parisienne ne devrait pas se
réaliser au détriment de la province : « Dès lors que la population française globale devait
augmenter de 50 %, comment est-ce que la population de la Région Parisienne pouvait rester
la même ? Je ne suis pas pour que Paris grossisse. Je suis pour donner plus d’espace aux
Parisiens qui existent, pour recevoir ceux qui viennent, mais c’est à l’aménagement du
territoire de s’efforcer qu’ils ne viennent pas. », (Delouvrier, in Murard et Fourquet, 1976).
Delouvrier indique, en 1990, qu’il « ne faut pas croire qu’il fut facile pour nous,
graviéristes 4 , d’adopter de telles hypothèses de travail ». Mais l’inéluctable croissance du
nombre d’habitants en région parisienne et de leurs besoins allaient à l’encontre de toutes les
idées reçues sur le projet, (Delouvrier, in Voldman, 1990). Le SDAURP « a souvent été
considéré au départ comme concrétisant cette soi-disant "volonté" de la région parisienne
d’avoir 14 millions d’habitants à la fin du siècle (…) alors que le District de Paris n’avait
cessé de dénoncer ce chiffre comme une éventualité qu’il redoutait mais qu’il ne pouvait pas
raisonnablement écarter » (C. de l’IAURP, 1969). « Elle est une hypothèse et non pas un
souhait », (Delouvrier, 1967). Cependant, Delouvrier précise aussi : « Neuf millions
d’habitants en 1966, 14 millions vers l’an 2000. Voilà bien une manifestation de la vitalité de
la régio n parisienne. » (Delouvrier, 1966b). Cette hypothèse « retenue » de croissance de la
2
« Avant-projet duo-décennal » ou Livre Blanc, février 1963.
Au moment de la réalisation du PADOG, Gibel était le directeur du Service d’Aménagement de la Région
Parisienne (S.A.R.P.).
4
Il faut entendre « graviériste » au sens des défenseurs du processus volontariste de réduction du poids de la
Région Parisienne, à la suite de l’auteur de Paris et le désert français.
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population n’est pas destinée à concurrencer le reste de la France. Delouvrier craignait la
réaction de la province car la création des villes nouvelles apparaît comme un renversement
de la politique de décentralisation géographique menée depuis 1955, (in Voldman, 1990). La
vitalité de la région parisienne « ne s’exercera pas au détriment de la vitalité de l’ensemble de
la nation (…) faisant confiance au dynamisme de la province, il faudra même que le
supplément de population se porte davantage sur les autres villes que Paris et les fasse
doubler. », (Delouvrier, 1966b). Malgré ces dénégations, en 1985, J. Brun et M. Roncayolo
considèrent que « le projet se situe dans une conjoncture de croissance urbaine non seulement
acceptée, mais désirée ».
Une fois l’hypothèse de 14 millions d’habitants acceptée, il fallait ensuite organiser cette
croissance. Le principe des villes nouvelles découle de l’hypothèse de 14 millions d’habitants
en région parisienne à l’horizon 2000 : « à partir du moment où les gens ont fini par admettre
les 14 millions d’habitants, il fallait savoir où les mettre (…) la solution à y apporter s’est
imposée d’elle- même, dès lors que les termes du problème ava ient changé » (Michel, in
Murard et Fourquet, 1976). Le SDAURP prévoit une extension spatiale de l’agglomération
parisienne avec les villes nouvelles contrairement au PADOG qui recherchait la densification
du tissu urbain existant puisqu’il reposait sur une stabilisation de la région parisienne. Pour
les rédacteurs du PADOG : « le problème essentiel est celui de réorganiser et restructurer la
banlieue et non de l’étendre », (PADOG, 1960). Même si le PADOG propose la solution des
villes nouvelles, c’est fina lement, d’une part, la réalisation de noyaux urbains principaux et
secondaires dans l’agglomération existante qui a été choisie pour organiser celle-ci et d’autre
part, le développement des villes situées à 50 kilomètres de Paris pour structurer la partie
extérieure de l’agglomération. Ces dernières étaient considérées comme des villes nouvelles
anglaises. Il s’agissait « d’essayer de restructurer cette banlieue en développant des pôles dans
l’agglomération existante (…) Un développement des villes à 50 km de Paris et des villes à
caractère touristique et universitaire. Voilà les villes nouvelles anglaises. On dirait que c’est
fait exprès. » (Gibel, in Murard et Fourquet, 1976). Ces villes « PADOG » sont appelées plus
communément les « 4M » : ce sont Meaux, Melun, Montereau et Mantes. Dans le SDAURP,
les villes nouvelles ne seront pas localisées comme les 4M en-dehors du périmètre
d’urbanisation : « le SDAURP va plus loin que le PADOG en localisant des villes nouvelles
en périphérie des périmètres urbanisés », (Fouchier, 2001).
Vincent Fouchier considère que « en ce qui concerne les extensions urbaines, dont les villes
nouvelles sont emblématiques, il est apparu que seul le SDAURP n’a pas cherché à les limiter
(…) toutefois, même si le SDAURP projetait d’importantes superficies d’urbanisation, il les
organisait et les planifiait dans le but d’en restreindre le volume total. », (Fouchier, 2001).
Pour Fouchier, le SDAURP vise à maîtriser cette croissance par trois principes d’urbanisme
qui sont des centres urbains nouveaux, des axes préférentiels d’urbanisation et de transport et
l’unité de la région urbaine. Il cherche à mettre en place une organisation polycentrique afin
d’organiser la banlieue, mettre fin au monocentrisme et orienter la croissance spatiale. Selon,
Delouvrier : « partant du monocentrisme, nous nous sommes dit : il faut un polycentrisme,
une ville polynucléaire. Nous n’avons pas dit « villes nouvelles »… Ça voulait dire que dans
les banlieues existantes, il fallait déjà créer des centres là où il n’y en avait point, c’est-à-dire
tenter de regrouper les fonctions urbaines importantes pour donner une « gueule », une
physionomie à des banlieues qui n’en avaient pas », (in Murard & Fourquet, 1976). Le rôle
des centres urbains nouveaux dans l’aménageme nt de la Région parisienne est de constituer
les « points forts » des axes qui canaliseront l’extension spatiale de l’agglomération,
(Delouvrier, 1967). Les centres urbains nouveaux sont un choix d’aménagement : « dire
qu’on fait un centre urbain nouveau, c’était vraiment un choix délibéré (…) contraire aux
tendances (…) tout conduit à la dispersion, à la diffusion », (Michel, in Murard & Fourquet,
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1976). Les centres urbains nouveaux sont intégrés dans une politique d’aménagement à
l’échelle de la région, ils doivent « contraindre à une certaine discipline la poussée
d’urbanisation et éventuellement obtenir une correction des flux d’échange. C’est ainsi que le
centre urbain de la future ville de Noisy- le-Grand est appelé à jouer, d’une part, un rôle
restructurateur au profit de la banlieue Est et, d’autre part, un rôle de stimulant pour le
développement de l’urbanisation en direction de l’Est », (Vaujour, 1970).
« La politique des villes nouvelles ne consiste pas seulement à construire des milliers
d’immeubles dans des champs de betteraves. Elle ne consiste pas seulement à permettre une
utilisation maximale des grands équipements collectifs forts coûteux. Mais ce qui importe
avant tout, c’est de permettre à des millions d’hommes de vivre ensemble dans les meilleures
conditions possibles. » (Vaujour, 1970)
Les villes nouvelles comme facteur d’unité de la région
Une pensée obsède les aménageurs des années 1960 : comment préserver l’unité de la région
parisienne ? Comment éviter, alors que la population croît sans cesse, que la région parisienne
se fragmente en marchés du travail sectoriels, et que Paris perde sa centralité éminente ? Les
villes nouvelles doivent servir l’unité régionale.
« Des villes nouvelles d’une agglomération »
Delouvrier s’oppose à l’idée des villes nouvelles telles qu’elles ont été réalisées en
Angleterre : « la notion de continuité me paraît capitale…de façon à ce que l’unité complète
de la région soit sauvegardée et que les axes d’urbanisation soient des axes de transports
puissants permettant le contact avec tous les coins de l’agglomération », (Delouvrier, in
Murard & Fourquet, 1976).
Sa conception des villes nouvelles explique le choix de leur emplacement. Les villes
nouvelles ne devaient pas être trop loin de Paris : « Nous ne devions pas tomber dans ce que
nous considérions comme une erreur anglaise (…) ce sont des villes nouvelles d’une
agglomération ». Ainsi, les villes nouvelles ne devaient pas être trop loin de Paris d’une part
pour « continuer à avoir Paris comme pôle essentiel (…) la ville nouvelle est une ville dans
une agglomération » (Millier, in Murard & Fourquet, 1976). D’autre part, « c’est l’option
prise sur l’unité du marché du travail qui expliquait qu’on les mette près de Paris », (Roullier,
in Murard & Fourquet, 1976). Certains auteurs ont ainsi imaginé que les villes nouvelles
seraient reliées au centre parisien suivant le modèle des bi-pôles (au sein d’une entreprise, le
siège resterait au centre et des établissements s’installeraient en périphérie). Pour Steinberg
(1981), les villes nouvelles doivent jouer sur cette théorie des bi-pôles pour attirer de l’emploi
tertiaire. Pour cela, le réseau de transports joue un rôle important. Le quartier de MaineMontparnasse serait ainsi en liaison avec la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines, celui
de La Défense avec Cergy-Pontoise et enfin, celui de la Gare de Lyon avec Evry, Marne- laVallée et Sénart. Ainsi, M. Doublet, préfet de la Région Parisienne envisageait en 1970 « des
liaisons entre les pôles d’affaires parisiens et les villes nouvelles, celui de la Défense par
exemple avec Cergy et Trappes, ou Bercy-Gare de Lyon avec Melun et la Vallée de la
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Marne ». En 1975, P. Lecomte 5 évoque à nouveau des liaisons entre le centre et les villes
nouvelles concernant l’emploi tertiaire : « en dehors du tertiaire induit par l’urbanisation (…)
la création du grand nombre d’emplois nécessaires à l’équilibre au moins partiel habitatemploi est conditionnée par des possibilités de liaisons faciles avec les centres tertiaires
existant essentiellement à Paris ».
Conjurer le risque de fragmentation du marché du travail
Cette conception, de villes nouvelles reliées au reste de la région, n’a pas été facile à
imposer. Piquard indique que c’est pour cela que le Schéma d’Aménagement de 1965 contient
un volet sur l’unité de la région. Ce volet avait « pour objet très précis de démontrer qu’il
fallait à la fois payer des villes nouvelles et un réseau de transports, des villes nouvelles
comme s’il n’y avait pas de transports, et des transports comme s’il n’y avait pas de villes
nouvelles », (Piquard, in Murard & Fourquet, 1976). Pour maintenir l’unité de la région, les
villes nouvelles doivent être reliées au centre de Paris mais aussi au reste de la région. P.
Madaule rapporte en 1967 au Conseil Economique et Social que « d’excellentes
communications devront être assurées entre la ville nouvelle et la région toute entière ce qui
entraînera la mise en place progressive d’un nouveau plan de transport ». La réalisation de ces
objectifs implique pour lui des arbitrages dans les investissements régionaux en faveur des
infrastructures de transport : « Il conviendra donc que chaque ville choisisse de renoncer à
créer certaines opérations d’infrastructures qui lui paraissent pourtant revêtir un caractère
impératif, au profit d’investissements situés sur un terrain non urbanisé à l’heure actuelle et
qui, d’une rentabilité apparemment moins immédiate, n’en conditionnent pas moins le
développement harmonieux de l’agglomération ». Le VIe Plan donne pour objectif que toutes
les villes nouvelles soient reliées à la fin de 1975 à Paris par le rail et par la route.
Il s’agissait surtout d’obtenir une unité du marché du travail. Il est indiqué dans le volet
"unité de la région" du SDAURP que « la création des villes nouvelles ne doit pas aboutir à
une fragmentation, à un cloisonnement du marché unique en plusieurs marchés de l’emploi ».
« C’est le réseau des transports urbains qui crée l’unité du marché de la main d’œuvre »
(SDAURP, 1965). Pour P. Lecomte, la réalisation d’excellentes dessertes des villes nouvelles
est indispensable au démarrage de celles-ci aussi bien pour attirer des activités que des
populations. A court terme, il estime que le réseau de transports est important pour d’une part
convaincre les employeurs de s’installer : « pour que les employeurs se sentent unis au cœur
de l’agglomération et continuent à bénéficier du label "Paris" ». Ceci concerne plus
particulièrement les activités tertiaires qui « nécessitent des contacts humains et personnels
fréquents ». D’autre part, il permettra « aux premiers habitants d’accéder facilement à leurs
emplois dans l’agglomération centrale ». Pour l’avenir, il considère que le réseau de transport
est autant « indispensable pour les liaisons d’affaires et de lo isirs que pour laisser aux
travailleurs l’indispensable mobilité et choix de l’emploi ». Pour cela, les villes nouvelles
devront être reliées à Paris par des liaisons radiales mais aussi aux autres villes nouvelles et
aux grands pôles d’emplois par des liaisons tangentielles et des rocades. (Lecomte, 1975).
5
Du Service Régional de l’Equipement de la région parisienne
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LES VILLES NOUVELLES COMME CENTRE INTERMEDIAIRE
« ENTRE LE CENTRE DE PARIS ET LE CENTRE DE QUARTIER »
Les centres urbains doivent constituer un réseau de centralités intermédiaires. Le SDAURP
indiquait en 1965 : « Entre le centre de Paris et le centre de quartier ou de commune, c’est le
niveau intermédiaire qui manque : la solution retenue par le schéma directeur est donc de
constituer des centres urbains nouveaux qui aient vocation à desservir de 300 000 à un
million de personnes, suivant leur situation et suivant les catégories de services ou
d’équipements qui y seront implantées ». Ces centres sont localisés proches de la banlieue
parisienne pour contribuer à l’équiper : « A vrai dire, la conception de ces villes nouvelles ne
retient pas de site délimité en zone vierge (…) la ville nouvelle est localisée en continuité
directe avec la banlieue existante, son centre devant contribuer à résoudre le sous-équipement
de celle-ci. C’est le centre urbain, plus que la ville nouvelle, qui est le concept de base »,
(Merlin, 1982).
« Desservir et non pas grouper »
Les centres urbains nouveaux doivent desservir entre 300 000 et un million de personnes.
Jean Millier insiste sur cette notion de desservir en précisant que les centres urbains nouveaux
ont vocation à « desservir et non pas grouper » (Millier, 1966). Le tableau suivant donne des
indications sur ces objectifs.
Noisy- le-Grand
Beauchamp
Cergy-Pontoise
Tigery-Lieusaint
Evry-Courcouronnes
Sud-Est de Trappes
Nord-Ouest de Trappes
Sud de Mantes
Total
Population résidente
En 1962
Vers 1985
Prévisions vers 2000
40 000
12 000
40 000
5 000
7 000
3 000
2 000
1 000
110 000
700 000 à 1 000 000
300 000 à 500 000
700 000 à 1 000 000
400 000 à 600 000
300 000 à 500 000
400 000 à 600 000
300 000 à 400 000
300 000 à 400 000
4 500 000 environ
90 000
60 000
130 000
35 000
100 000
100 000
100 000
5 000
620 000
(population résidente et
population desservie)
Source : Jean Millier (1966)
Millier précise à propos de ce tableau que « le centre urbain desservira non seulement des
populations installées nouvellement dans les zones aujourd’hui non urbanisées, mais dans la
plupart des cas, des habitants des banlieues actuelles ». Il ne fournit pas de chiffres précis sur
la population résidente en l’an 2000, cela n’est pas utile pour lui dès lors que « l’ampleur du
centre-ville est définie par la population desservie par ce centre » et cela serait « illusoire » de
déterminer ces chiffres en 1966. Par conséquent, pour de nombreux auteurs, le SDAURP est
apparu peu précis sur les objectifs d’accueil. Fouchier (2001) considère que « la description
de ce que devaient être les villes nouvelles, dans le SDAURP, était très sommaire. Même
leurs objectifs démographiques n’étaient pas clairement annoncés. Il était simplement dit
qu’elles devraient "desservir" 300 000 à un million de personnes, mais ce chiffre correspond à
la fois aux populations à y implanter et la population en place dans les secteurs voisins ».
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Selon Pierre Merlin, l’objectif des centres urbains est double : « créer un pôle d’activités
et d’équipements pour les habitants de la ville nouvelle et participer à la restructuration du
tissu urbain de la banlieue existante », (Merlin,1982). Ce double objectif est plus ou moins
marqué selon les villes nouvelles. Ainsi, M. Gauer (in SDAURP, Rapport du Comité
consultatif économique et social de la région de Paris, 1965) distingue deux types de villes
nouvelles avec d’une part celles qui « constituent des centres de restructuration d’une banlieue
existante ou de préstructuration de banlieue en expansion ». Il les nomme des « cœurs de
ville ». Ces villes nouvelles seront « quelquefois à population résidente relativement faible,
destinés à desservir des zones importantes ». Dans ce cas, elles « contribueront à doter le
tissu urbain de foyers d’attraction ». Mais, pour lui , elles sont « trop engluées » et peuvent
difficilement prétendre à une vie propre. D’autre part, les autres villes nouvelles seront des
« villes neuves à population résidente importante, distinctes de l’agglomération et pouvant
prétendre à une vie propre ». En 1974, la Préfecture de la Région Parisienne fournit des
chiffres sur la population des villes nouvelles et celle de leur zone d’influence en 1974 et à
terme (1980). Ces chiffres indiquent qu’Evry a ce rôle de "cœur de ville" avec une population
en 1974 de 12 000 habitants en ville nouvelle et de 240 000 habitants pour la zone d’influence
et, à terme, 60 000 habitants en ville nouvelle et 360 000 habitants pour la zone d’influence.
Au contraire, Cergy qui a 74 000 habitants en 1974 devrait en compter 330 000 à terme à elle
seule, (Préfecture de la région parisienne, 1974a).
Un équilibre habitat-emploi qui « ne nie pas la possibilité de migrations alternantes » et
qui permet « la liberté de choix du lieu de travail », (Merlin, 1982)
Les villes nouvelles devront constituer des centres intermédiaires où seront localisés des
emplois. Mais, si l’objectif d’équilibre habitat-emploi est recherché, cela ne se traduit pas
forcément par un rapprochement domicile-travail. Ainsi, en 1965, le SDAURP indiquait :
« Ce que veulent apporter les centres urbains nouveaux prévus au schéma directeur, ce sont,
moins éloignées que le centre de Paris, des activités d’une diversité et d’une taille telles que
des possibilités de choix et de promotion soient ouvertes à la plupart ». Les différents
avantages de l’emploi en banlieue sont présentés dans le document. Le rapprochement
domicile-travail ne constitue qu’un des avantages et il est cité en dernier. « Les avantages
sociaux et économiques d’activités en banlieue sont bien connus. Il s’agit à la fois :
- de faire éclore une véritable vie urbaine, en faisant naître l’animation qu’ignorent les
cités-dortoirs ;
- de décongestionner le cœur de l’agglomération, et, en remédiant à l’entassement dans des
locaux industriels et commerciaux vétustes de nombre d’ateliers et de bureaux, de faciliter
la réalisation à Paris et dans la Seine des opérations de rénovation et d’aménagement ;
- d’éviter l’allongement constant du temps de trajet domicile-travail et de remédier
progressivement aux problèmes de circulation et de transport qui naissent de migrations à
sens unique. »
Millier (1966), quant à lui, distingue deux raisons qui incitent à promouvoir un nombre
important d’emplois dans ces centres : « d’une part, pour remédier aux maux de la communedortoir, d’autre part, pour permettre le desserrement d’un certain nombre d’activités à l’étroit
à Paris ».
Parmi les Rapports du Comité d’Aménagement de la Région Parisienne concernant le
SDAURP, en 1965, celui de M. Darrigrand de la Chambre de Commerce et d’Industrie de
Paris préconisait le développement d’emplois nobles dans ces centres : « pour éviter une
ségrégation, il est indispensable de réussir à implanter des emplois nobles et d’y fixer une
population de cadres et de cadres supérieurs. Il faudra donc trouver des mesures d’incitation
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dans ce sens ». En 1976, Roullier estime que les centres urbains nouveaux constituaient les
moyens d’implanter le tertiaire à l’extérieur de Paris : c’est « l’idée qu’un certain
regroupement géographique en pôles d’emplois, en pôles de vie, était de nature à permettre
d’atteindre un seuil quantitatif qui puisse avoir une réelle incidence sur le développement de
la région », (Roullier, in Murard & Fourquet, 1976).
Finalement, pour Merlin, l’équilibre habitat-emploi est recherché, mais il constitue surtout
une possibilité pour la population résidente : « cet équilibre ne doit nullement conduire à une
contrainte ». « Les villes nouvelles sont conscientes qu’un tel équilibre ne peut être total et les
études initiales reposent sur des hypothèses variant entre 80 et 100 emplois pour 100 actifs
résidant dans la ville nouvelle (…) l’essentiel est que la possibilité leur soit offerte ».
L’incertitude majeure pour lui, dans cette capacité à proposer des emplois, « concerne la
possibilité, pour les centres des villes nouvelles, d’attirer des emplois de bureau ». (Merlin,
1982)
A chaque centre sa vocation particulière
Les centres urbains devront avoir une densité importante afin de créer des pôles attractifs.
Selon le SDAURP, les services publics et privés ainsi que les emplois devront être concentrés
dans « des espaces géographiques limités et relativement denses » pour desservir la
population de l’agglomération. Cette densité « ne permet pas seulement une desserte facile ;
elle renforce leur pouvoir attractif, non seulement pour l’implantation d’équipements
complémentaires mais encore pour faciliter la création du centre lui- même». Ces centres
urbains nouveaux devront regrouper plusieurs fonctions. S’ils sont comparés dans le
SDAURP de 1965 à des centres villes « ordinaires », c’est pour immédiatement relever leur
spécificité. Le SDAURP explique que la réalisation de cette "vocation" sera réalisée « par le
groupement de fonctions exercées traditionnellement par tout centre de ville, mais qui, pour la
région parisienne pourront se situer à un niveau plus élevé, à cause de l’importance de la
population à desservir ». « Il s’agit donc bien d’un centre urbain, aux multiples fonctions
telles que les centres des villes les ont assurées depuis l’origine des temps, et non de simples
centres commerciaux dont l’étranger présente des exemples, et qui, privilégiant la fonction
d’achat par rapport à toutes les autres, n’offrent du centre de la ville qu’une image mutilée. ».
Millier considère qu’il n’existe pas en région parisienne, en dehors de Paris et, dans une
certaine mesure, Versailles, de centre comparable à Toulouse ou à Strasbourg « alors que la
population s’accroît tous les trois ans de la population d’une ville de cette importance »,
(Millier, 1966). Néanmoins, pour Beaujeu-Garnier (1977), ces villes nouvelles n’ont pas un
besoin aussi impérieux qu’une ville isolée de semblable importance d’assurer la totalité des
fonctions urbaines du fait de la volonté de les intégrer dans l’agglomération « pour ne pas
rompre l’unité régionale ».
Afin de remplir ces différentes fonctions, ces centres urbains bénéficieront d’un certain
nombre d’équipements, aussi bien en matière d’éducation, culturelle, sportive et commerciale
qu’en matière administrative. Selon le SDAURP de 1965 : « pourront se situer dans ces
centres certains très grands équipements, uniques ou presque uniques, pour toute
l’agglomération, qui, aujourd’hui, ne peuvent plus, faute de place, être localisés dans Paris
intra- muros. ». « De tels équipements contribueront à donner une personnalité à chacun des
centres qui les accueillera, un musée des techniques, un parc de la culture, un musée de l’art
urbain et des villes, constituent de premiers exemples de ce qui pourrait être fait dans ce
sens ». Ces équipements « uniques » confient un rôle régional aux villes nouvelles : « cela
sera possible parce que ces centres urbains nouveaux s’insèreront dans l’ens emble plus vaste
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
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de la région de Paris toute entière (…) Ces grands équipements y trouveront (…) des
possibilités d’accès que l’insuffisance du réseau actuel des transports n’assure aujourd’hui,
pour la population de toute l’agglomération, à aucun secteur de banlieue », (SDAURP, 1965).
En 1970, Vaujour estime que « le centre urbain nouveau est appelé à remplir de multiples
fonctions et par là même à décongestionner le centre de Paris ». Il distingue différents niveaux
d’équipements : des petits équipements d’importance locale pour les besoins quotidiens, des
équipements régionaux courants et enfin « des équipements régionaux exceptionnels qui
donneront à chaque centre sa vocation particulière ». À la différence du Schéma
d’Aménagement, parmi ces équipements exceptionnels, il intègre les préfectures : « une
préfecture à Cergy et à Evry, une université complète à Noisy- le-Grand ». Ainsi, « par là,
chaque ville nouvelle assumera une fonction précise par rapport à l’ensemble de la région
parisienne », (Vaujour, 1970). En 1982, Merlin souligne lui la place accordée aux loisirs de
plein air dans les villes nouvelles.
Chaque centre urbain doit jouer un rôle spécifique par rapport à son environnement. Ainsi,
pour Merlin (1982), l’environnement joue un « rôle majeur particulièrement net pour Evry et
dans la Vallée de la Marne ». En effet, Evry est entourée de secteurs urbanisés comme Corbeil
ou en voie d’urbanisation rapide comme Grigny. Le centre urbain de Noisy-le-Grand est
quant à lui « au contact de la banlieue pavillonnaire ». Concernant Saint-Quentin-en-Yvelines,
« le centre urbain desservira, sans concurrencer le rôle traditionnel de Versailles, une vaste
zone périphérique mal équipée actuellement ». Ce rôle de restructuration est moins marqué
concernant la ville de Cergy-Pontoise qui est implantée en site relativement vierge. Enfin, à
Melun-Sénart, c’est le centre de Melun qui sera « au moins dans un premier temps le centre
de la ville nouvelle ». Pour Merlin, la présence d’une ville moyenne sur le territoire d’une
ville nouvelle ou à proximité « constitue un atout indéniable pour celle-ci ». La Commission
du Comité consultatif économique et social de la région de Paris reconnaissait déjà cet atout
en 1965 et recommandait même l’installation des villes nouvelles « à proximité aussi
immédiate que possible des villes anciennes suffisamment structurées » pour répondre à la
critique de villes nouvelles « sans âme collective ». Dans un premier temps, tout en créant son
propre cœur de ville la ville nouvelle pouvait ains i « jouir des avantages d’une agglomération
préexistante ». Puis, quand celui-ci serait créé, il deviendrait « le cœur de ville de
l’agglomération toute entière (…) la cité ancienne devient un quartier particulièrement
recherché de l’agglomération (…) il rattachera l’ensemble nouveau au passé ». (Gauer, in
SDAURP, Rapport du Comité consultatif économique et social de la région de Paris, 1965)
Le Programme Finalisé des villes nouvelles (1970) prévoit pour chacune des villes nouvelles
les fonctions qu’elles auront dans la région parisienne.
Evry : un centre urbain attractif
Evry sera « un centre urbain à vocation régionale » et son rôle sera de « renforcer
l’armature urbaine existante ». La volonté de « décollage » du centre se traduit d’une part par
le choix d’Evry comme chef- lieu de l’Essonne et par la création de la préfecture. D’autre part,
c’est sur l’emploi, principalement, que doit porter l’effort de décollage en créant « un pôle
d’emploi tertiaire », (Programme Finalisé des villes nouvelles, 1970).
Le projet de l’Agora constitue l’élément principal pour ce centre. Son ouverture est
prévue pour 1975. Selon Steinberg (Steinberg, 1981), l’Agora est «le premier exemple
d’intégration d’équipements publics et privés ». En effet, celui-ci rassemblera divers
équipements : un complexe sportif important (une piscine, une patinoire, une grande salle de
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sports), des équipements culturels (un théâtre, cinq cinémas, une bibliothèque), un centre de
documentation pédagogique, un centre d’orientation et d’information et une antenne de
l’Agence nationale pour l’emploi. En outre, un centre commercial régional ouvrira en même
temps que l’Agora. (Préfecture de la région parisienne, 1974a)
P. Merlin considère que c’est la création de ce centre urbain qui domine à Evry. Il
« constitue l’élément fondamental de cet édifice » du fait de sa situation dans un secteur en
cours d’urbanisation, « un tel principe paraît s’imposer dans le cas d’une ville nouvelle située
au cœur d’une zone déjà urbanisée ou en cours d’urbanisation ». Ce secteur contenait déjà
près de 200 000 habitants dans la zone probable d’influence directe du futur centre urbain.
Merlin prévoit qu’à terme, cette zone couvrira entre 400 000 et 500 000 habitants. D’autre
part, l’équilibre entre la population active résidente et l’emploi local est ici particulièrement
recherché « plus pour éviter la création d’un « super- grand ensemble » que pour faire comme
en villes nouvelles anglaises ». C’est un équilibre partiel qui est prévu (8 emplois pour 10
habitants actifs dont 6 travailleraient dans la ville nouvelle et 4 ailleurs). Ceci suppose qu’un
quart des emplois soit occupé par des non résidents. « Une telle prévision, qui ne nie pas la
possibilité de migrations alternantes, correspond au principe de la liberté de choix du lieu de
travail ». (Merlin, 1982).
Marne -la-Vallée : restructurer le Grand Est
Marne- la-Vallée « concrétise la volonté de promouvoir un développement organisé de
l’Est parisien ». Elle devra « assurer le rééquilibrage de l’agglomération parisienne vers l’Est
par la création d’un pôle de développement urbain ». Le Programme Finalisé souligne que
l’organisation urbaine de Marne- la-Vallée sera basée sur l’utilisation intensive des transports
en commun, notamment le RER qui est inscrit au programme du VIe Plan. (Programme
Finalisé des villes nouvelles, 1970)
Le centre urbain régional sera situé à Noisy- le-Grand, il « constitue le point fort de
cette première unité avec une concentration d’équipements publics et privés appelés à
rayonner à la fois sur la population des agglomérations de la petite couronne et sur celle de la
ville nouvelle ». Ces équipements seront concentrés dans un ensemble nommé la « Piazza »
qui proposera « un centre à vocation culturelle, regroupant cinémas, bibliothèque, complexe
sportif ; mais aussi sociale : Agence nationale pour l’emploi, centre d’orientation et
d’information ». À proximité de la Piazza, un centre commercial important s’installera ainsi
qu’un équipement universitaire et des centres de formation. (Préfecture de la région
parisienne, 1974a)
Selon Merlin, cette ville nouvelle rassemblera une série de quartiers autour des gares
RER. Ces différents quartiers seront séparés par des espaces verts et chacun constituera « une
petite ville nouvelle en soi, avec ses activités et ses équipements, groupée autour d’une ou
plusieurs stations de RER », (Merlin, 1982). Pour Steinberg, « la protection affirmée du site et
le caractère linéaire de la ville nouvelle imposeront une urbanisation discontinue en chapelet,
sous la forme de quatre unités possédant leur personnalité propre », (Steinberg, 1981). Le
métro express régional a pour lui un « rôle d’axe d’urbanisation pour la ville nouvelle ». C’est
lui qui est « seul capable d’exercer un effet d’entraînement des activités et emplois, et de
contre-balancer les tendances spontanées de croissance de l’agglomération vers l’ouest et le
sud ». Pour Darrigrand, ce que prévoit le SDAURP pour rééquilibrer l’Est est décevant : « Il
faudrait y prévoir une opération du type Défense pour l’installation d’un centre d’affaires.
Cette opération pourrait être dans Paris (Gare de Lyon – Bastille) ou dans la banlieue
proche ». (Darrigrand, in SDAURP, Avis et Rapports du Comité d’Aménagement de la Région
Parisienne, 1965)
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Cergy-Pontoise : prolongement tertiaire de La Défense
Le Programme Finalisé des villes nouvelles de 1970 indique que Cergy-Pontoise sera « un
pôle structurant pour la banlieue Nord-Ouest ». La priorité pour cette ville est la liaison entre
Pontoise et La Défense qui « donnera une impulsion très forte à la Ville Nouvelle et
principalement à la création d’emplois de bureaux ». Selon ce programme, Cergy-Pontoise
doit tout d’abord constituer rapidement un centre urbain. À terme, selon la Préfecture (1974a),
la ville nouvelle disposera de deux centres : le « centre urbain principal de Puiseux » qui est
en cours d’étude et le centre de Cergy dit « quartier de la Préfecture » qui est en cours de
réalisation. Le centre de Cergy « joue dès maintenant un rôle administratif important »
(préfecture, Hôtel de ville, un hôtel des polices) et « des équipements importants de caractère
régional y sont également soit réalisés, soit en chantier ». Mais, « lorsque le centre de Puiseux
sera réalisé, le centre de Cergy jouera un rôle moins important…Il constitue une image
réduite mais complète de la ville future ». Le quartier de la Préfecture contiendra au départ la
plus grande partie des emplois tertiaires, le centre commercial régional des Trois Fontaines,
qui « rayonne dès maintenant sur une population de plus de 300 000 habitants », une zone
attribuée à l’enseignement supérieur et un centre culturel important. (Préfecture de la région
parisienne, 1974a). Pour Vaujour (1970), ces deux centres urbains principaux auront des
fonctions distinctes : « l’un aura une fonction essentiellement administrative et commerciale
et de ce fait exercera une influence sur une part importante de la région nord-ouest de Paris,
l’autre sera à dominante de bureaux. ». Pour Merlin (1982), cette ville nouvelle a une vocation
de loisirs de plein air du fait de son site exceptionnel : « l’équipement de loisirs est la note
dominante de la ville nouvelle ».
Saint-Quentin-en-Yvelines : maîtriser le développement urbain en cours via la qualité
urbaine de l’offre
Saint-Quentin-en-Yvelines devra « organiser l’urbanisation qui n’a cessé de progresser dans
l’Ouest de cette région ». La ville nouvelle se développera dans « un milieu urbain de
qualité ». Elle « doit structurer l’Ouest de la région parisienne par la création d’un pôle
puissant ». « Le centre principal doit constituer un pôle structurant d’intérêt régional ».
L’université de Paris Ouest pourra y être accueillie. (Programme Finalisé des villes nouvelles,
1970)
Selon la Préfecture de la région parisienne (1974a), la ville nouvelle sera « éclatée en une
série de bourgades ». « Le centre jouera à l’égard de ces bourgades le rôle d’élément
fédérateur et donnera son unité à l’ensemble ». Le centre de Saint Quentin disposera d’un
ensemble commercial et d’équipements de loisirs. La ville disposera en outre, au niveau des
équipements universitaires, d’un Institut universitaire de technologie et d’unités
d’enseignement et de recherche et, au niveau des loisirs, d’une base de loisirs qui apportera
« à la ville nouvelle et à sa région un ensemble d’équipements de sport et de détente de taille
exceptionnelle ».
Tous les auteurs s’accordent pour qualifier de « bourgades » les différents quartiers de la ville
nouvelle. Pour Merlin, chacune des bourgades aura une certaine autonomie. Les projets pour
cette ville nouvelle sont une université, un centre culturel régional et une base de loisirs : « la
plus grande attention est apportée à l’aménagement de l’étang de Saint-Quentin et aux abords
de la vallée de la Mérantaise », (Merlin, 1982). La position géographique de Saint-Quentin au
Sud-Ouest favorise la ville nouvelle au niveau des emplois selon Steinberg. « La floraison
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d’établissements universitaires et de centres de recherche » (plateau de Saclay et vallée de la
Chevreuse) constituent également des facteurs favorables. En matière de logements, la ville
nouvelle est caractérisée par un environnement de qualité et par la présence de catégories
aisées du fait également de sa position à l’ouest de la banlieue parisienne. (Steinberg, 1981).
Melun-Sénart, « une ville verte »
L’objectif dans cette ville nouvelle, dans une première étape, « n’est pas de créer un
centre ville, mais de prendre en compte les poussées d’urbanisation », (Préfecture de la région
parisienne, 1974a). Pendant la période initiale de 15 ans au moins, le véritable centre sera
Melun. La ville nouvelle s’organisera en trois secteurs afin de tenir compte des poussées
naturelles (Merlin, 1982). Elle disposera d’un centre commercial au Bois des Saints Pères, des
équipements universitaires y seront réalisés ainsi que des équipements sportifs. Mais, Merlin
craint que le véritable centre urbain soit « vidé d’une partie de sa substance par la dispersion
des équipements publics au cours de la phase initiale ». L’image voulue « d’une ville verte »
repose sur la forêt de Sénart et sur le bois du Rougeau (Merlin, 1982). Pour la Préfecture, pour
tenir compte des massifs boisés et des bourgs existants, « une part importante sera faite aux
maisons individuelles et aux petits immeubles collectifs ».
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UN PROJET EXCEPTIONNEL
Au vu de cette relecture des intentions du projet « villes nouvelles », on perçoit plus
clairement en quoi il est exceptionnel. Cette exception ne consiste pas dans la création de
villes ex nihilo pour freiner la croissance démographique de la région parisienne. L’exception
des villes nouvelles recouvre deux dimensions : du point de vue du contenu, le projet s’inscrit
en rupture de la pensée décentralisatrice dominante. Du point de vue de la posture d’action
publique, le projet ne cherche pas à afficher un volontarisme à contre-courant, mais au
contraire cherche à « jouer » avec les tendances démographiques pour mieux les maîtriser.
Le projet des villes nouvelles se démarque du contexte de décentralisation et de politique antiparisienne de l’époque. Pour Michel (in Murard et Fourquet, 1976), « il y avait toute une
idéologie qui était anti-parisienne…Au niveau politique, comme disait Claudius-Petit : « Moi,
c’est pas compliqué, je peux faire voter à la Chambre n’importe quel texte contre Paris, la
majorité est provinciale »…on était malthusien pour Paris ». Or, le projet des villes nouvelles
repose sur une hypothèse de forte croissance de la région parisienne.
Ainsi, les villes nouvelles constituent une exception au regard du volontarisme
décentralisateur. Cependant, pour l’équipe de Delouvrier, cette croissance de la région ne se
ferait pas au détriment de la province. Delouvrier est allé en province défendre son projet :
« si on l’organise bien (la croissance urbaine) et si les villes de province l’organisent aussi
bien, il n’y a pas de raison que cela donne un coup d’accélérateur à Paris » (in Murard et
Fourquet, 1976).
Quand on l’analyse, la solution retenue est « la seule solution compatible avec les objectifs de
la politique nationale d’aménagement du territoire » (par rapport aux différentes alternatives)
(Laure, 1971). Placées plus loin, elles auraient concurrencé les villes du Bassin parisien.
C’est notamment pour cela que le projet de la ville nouvelle de Mantes a été abandonné.
Alors que le PADOG cherchait à contenir la croissance parisienne, à inverser les tendances, le
projet des villes nouvelles s’inscrit dans les tendances et cherche à les maîtriser. Selon
Carmona (1980), « Paul Delouvrier a une conception de l’aménagement de la Région
parisienne complètement différente de celle de ses devanciers. Alors que ceux-ci avaient pour
principal souci de fixer une limite à la croissance de l’agglomération parisienne, le premier
Délégué Général au District…songe bien davantage à organiser et à canaliser celle-ci ». Les
outils aussi sont différents : au lieu de recourir à des outils « de nature essentiellement
réglementaire », Delouvrier « s’oriente résolument dans la voie d’un engagement direct sur le
terrain (…) par la politique des villes nouvelles ».
Dès l’origine, un décalage entre les intentions et la représentation
Pourtant, très vite, les villes nouvelles subissent les critiques au nom du volontarisme
décentralisateur. Une enquête, présentée par Beaujeu-Garnier au Comité consultatif
économique et social de la région de Paris, sur le thème « Que pensent les provinciaux des
problèmes parisiens ? » est révélatrice de cette représentation concernant le projet des villes
nouvelles (Beaujeu-Garnier, 1974) :
- « le principal reproche qui leur est fait est qu’elles empêchent la décentralisation à
plus long rayon », « elles contribuent à renforcer la centralisation et le gigantisme de
la Région parisienne »
- « elles sont trop proches de Paris ; elles auraient dû se faire en province ; elles ne
constituent pas de pôles urbains autonomes »
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
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- « l’emploi et l’habitat n’y sont pas rapprochés »
Parmi les Avis du Comité d’Aménagement de la Région parisienne en 1965 , on trouve
également :
- Pourquoi « réaliser des villes nouvelles au contact immédiat de l’ancienne structure et
ne pas au contraire, commencer le schéma par certaines villes nouvelles plus
extérieures ? »
- « commencer, au contraire, par des villes bien placées dans leur site et reliées par tous
moyens, directement à Paris, mais isolées de l’agglomération actuelle, semble être la
politique à choisir ».
Pour J. Beaujeu-Garnier, ces critiques montrent « à l’évidence combien certaines campagnes
injustifiées ont réussi à fausser le jugement à l’endroit (des villes nouvelles)…Il serait peutêtre temps qu’une campagne de vérité efficace répande aussi cette opinion parmi les
provinciaux…On peut se demander si les réponses enregistrées correspondent à un manque
d’information ou à des craintes pessimistes qui paralysent l’objectivité du jugement »,
(Beaujeu-Garnier, 1974).
Beaujeu Garnier cherche à rétablir la vérité sur les villes nouvelles devant le Comité
consultatif économique et social de la région de Paris : « Simples rouages destinées à la
restructuration de l’agglomération, indispensables à la fois pour loger une partie des nouveaux
habitants dus en majorité à l’accroissement naturel et pour détruire l’abusif monocentrisme
d’un Paris congestionné, organismes complets rapprochant résidence-emploi et susceptibles
de créer des conditions de mieux vivre pour les Parisiens de l’ensemble de la Région, ces
villes nouvelles pouvaient difficilement être implantées plus loin de la capitale. » Les villes
nouvelles ont été élaborées en réponse aux problèmes de la Région parisienne et non pour
accroître la puissance de la Région. Ce sont des mesures pour les parisiens, élaborés compte
tenu des perspectives de croissance (interne) de la région et non pour attirer de nouvelles
populations. « Le recrutement de leurs nouveaux habitants, comme le prouve un récent
recensement partiel de l’INSEE, se fait à environ 90 % parmi ceux qui vivaient déjà dans
l’agglomération ». Selon M. Gauer, : « A la France entière, il faut faire comprendre que Paris
ne tire aucun motif de satisfaction de son expansion démographique, simple donnée
fondamentale dont il s’emploie simplement à tirer des conclusions ». (Gauer, in SDAURP,
Rapport du Comité consultatif économique et social de la région de Paris, 1965).
Dès l’origine, les villes nouvelles naissent sous le signe d’un double malentendu
exceptionnel :
• Un premier malentendu est lié au nom. On prononce « villes nouvelles », mais ça s’écrit
« centres urbains nouveaux ». Autrement dit, le terme de « ville » entretient la confusion
volontaire entre deux conceptions de l’objet. Une conception volontariste, consistant à
créer, à l’anglaise, des villes autonomes, dotées d’un ensemble complet de fonctions,
susceptibles d’accueillir une population importante ; une conception « délouvriériste »
consistant à concevoir des centres urbains destinés, pour partie à accueillir de la
population nouvelle mais surtout à desservir par les emplois et les services, une
population croissante.
• Un deuxième malentendu vient se greffer, lié cette fois à l’intention de fond. Tout le
monde pense « aménagement du territoire » alors que Delouvrier et son équipe veulent
« aménager la région parisienne ». Autrement dit, dans un climat de décentralisation, de
métropoles d’équilibre, de réduction du poids de Paris dans l’ensemble national, l’équipe
du district choisit de structurer la Région parisienne en fonction d’un horizon de
croissance démographique dont on ne sait s’il est seulement prévu ou pour partie souhaité.
On ne cesse de lui reprocher cette option au nom de l’équilibre. Le terme de « ville
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nouvelle » fait alors l’objet d’un retournement : si l’on avait voulu faire de « vraies »
villes nouvelles, alors il les aurait fallu plus loin de Paris ; on aurait ainsi fait d’une pierre
deux coups. Premier coup : en les éloignant de Paris, on leur donnait une chance
supplémentaire de devenir de « vraies » villes ; deuxième coup, en les éloignant de Paris,
on participait à la grande entreprise de rééquilibrage du territoire.
Ce double malentendu —et ses conséquences polémiques— vont structurer la plupart des
propos savants, politiques ou administratifs qui paraîtront, durant les trois décennies
suivantes, à propos des villes nouvelles.
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
DEUXIEME PARTIE :
DES CENTRES URBAINS PARMI D’AUTRES
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
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LES VILLES NOUVELLES SE FONDENT DANS LE PAYSAGE
FRANCILIEN
La réussite de la greffe des villes nouvelles sur le tissu de la Région Parisienne réside, dans
leur banalisation : elles accompagnent les tendances économiques, sociales et spatiales de
l’Île-de-France, des années 1970 au années 1980, et, de différentes façons, s’insèrent dans le
paysage régional. Du point de vue de l’aménagement de la région parisienne, le concept de
« centre urbain », tel que l’ont voulu Delouvrier et son équipe, est un succès.
L’inscription dans les logiques régionales
Pour Merlin (1982), la « rapidité de réalisation des centres urbains souligne l’intérêt d’une des
options les plus critiquées des schémas directeurs régionaux et notamment celui de la région
parisienne : l’implantation des villes nouvelles très près des métropoles. C’est cette proximité
qui a créé, dès le lancement de la ville nouvelle, une clientèle potentielle pour ses services et
ses équipements ». En 1983, lors des débats parlementaires au Sénat de la loi Rocard 6 , M.
Giraud 7 , explique que « la "maturité des villes nouvelles" s’exprime sur trois terrains
différents ». Tout d’abord, dans le domaine de l’aménagement régional, elles ont « contribué
à maîtriser le développement urbain de la région depuis bientôt 15 ans, en accueillant un
cinquième de la construction de logements ». Cependant, dans ce domaine, le bilan n’est pas
totalement positif du fait du « rôle insuffisant des villes nouvelles dans le rééquilibrage de la
région ». Ensuite, dans le domaine des équipements et du cadre de vie, les résultats sont pour
lui « spectaculaires ». Enfin, « l’émergence des communautés jeunes, actives et vivantes » est
pour lui le dernier signe de leur maturité.
Les villes nouvelles, malgré ce succès, n’ont pu à elles seules corriger l’ensemble des
déséquilibres régionaux. Ainsi, en 1994, le Schéma Directeur de la Région Ile-de-France
(S.D.R.I.F.) réaffirme à nouveau l’objectif de diminuer le déséquilibre est-ouest. Selon le
SDRIF, « le schéma directeur de 1965 a eu des effets positifs sur l’équilibre habitat-emploi
grâce à la création des villes nouvelles et à la structuration de la banlieue autour de pôles
d’emploi ». Cependant, il n’a pas pu « maîtriser la forte dynamique de tertiarisation qui s’est
accentuée au centre-ouest de Paris et au centre des Hauts-de-Seine ». Pour P. Beckouche
(1999), « les villes nouvelles ont globalement rempli les objectifs du SDAU (…) Mais, la
polarisation semble plus effective en termes d’emplois que d’habitat ».
Les villes nouvelles ont pourtant rempli leur fonction d’accueil de la population, mais avec un
certain retard, dû au temps nécessaire à leur démarrage. Ainsi, l’IAURIF (2001) regrette que
les villes nouvelles aient pris ce retard, car la croissance démographique la plus importante
s’est produite entre 1960 et 1975. Les villes nouvelles ont bien joué leur rôle d’accueil des
populations, mais dans la deuxième période, entre 1975 et 2000. Elles ont accueilli 21 % de la
croissance démographique de la grande couronne dans la première période et 55 % dans la
seconde période. Dans la période plus récente, entre 1990 et 1999, l’IAURIF (2000) montre
que, d’une part, « les villes nouvelles connaissent toujours les plus fortes croissances de la
région, même si leur rythme d’accroissement s’est nettement ralenti ( 1,4% par an entre 1990
et 1999 contre 4,9% entre 1982 et 1990) » et d’autre part que « les villes nouvelles
6
7
JO Débats parlementaires Sénat du 21.04.83, séance du 20.04.83
Président du Conseil Régional
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contribuent toujours fortement à la croissance de la grande couronne ». Elles ont ainsi
accueilli un tiers des habitants supplémentaires de la grande couronne. Cependant, « la
croissance touche inégalement les 58 communes qui constituent les villes nouvelles ». En fait,
la croissance démographique des villes nouvelles est avant tout fonction de l’attractivité
globale du secteur de la région parisienne dans laquelle elles se situent. Marne- la-Vallée
contribue et profite du dynamisme démographique Seine-et-Marnais, alors que le rythme de
progression moindre constaté à Cergy, par exemple, est lié à des taux Val d’Oisiens plus
modestes (IAURIF, 2000).
Des pôles d’emploi marqués par l’environnement régional
Concernant l’emploi, « les villes nouvelles ne peuvent être dissociées de la Région » selon J.F. Lemettre (1985). La formation de leur tissu d’activités est marquée par plusieurs
tendances : la désindustrialisation de Paris et la tertiarisation des activités en Région Ile-deFrance.
Pendant les premières phases de développement des villes nouvelles, les résultats concernant
l’emploi sont mitigés. Pour Lemettre, « l’installation des entreprises dans les villes nouvelles
n’est pas spontanée dans les premières années et doit beaucoup aux pressions
administratives ». D’autres facteurs expliquent aussi la formation de leurs tissus d’activités.
D’une part, la réalisation des infrastructures de transport a été « un facteur décisif » du
développement de Cergy-Pontoise, Saint-Quentin-en-Yvelines et Marne- la-Vallée. D’autre
part, à Evry et à Saint-Quentin-en-Yvelines, les instances locales ont mené des politiques afin
de faire émerger des spécialités variables selon les périodes: l’informatique et la robotique
pour Evry et les biens d’équipements, l’ingénierie et les services industriels pour SaintQuentin-en-Yvelines.
Dans les années 1990, le rôle des villes nouvelles dans l’accueil des entreprises apparaît
plus positif. Dès 1988, Steinberg remarque que les villes nouvelles « offrent une "structure
d’accueil" bien adaptée aux activités nouvelles », c’est-à-dire aux activités industrielles et
tertiaires supérieures. Tout d’abord, les facteurs de localisation des entreprises ont changé :
elles recherchent désormais de « bonnes liaisons avec tous les points de la métropole, la
qualité du cadre de vie et de travail et l’existence d’équipements socio-culturels, scolaires et
sportifs ». Et puis, les villes nouvelles « ont fini par accumuler en 15 ans un énorme potentiel
d’infrastructures propices à l’installation d’activités » et leur « image de marque commence à
s’améliorer » ou tout du moins, « elles ne font plus office de "repoussoir" ». Pour le SDRIF
(1994), les villes nouvelles, « dont la réussite en matière d’accueil d’entreprises est
exceptionnelle », ont un rôle à jouer dans le renouveau de l’industrie de l’Ile-de-France en
développant « la formation et la recherche en liaison avec les universités nouvelles ». Pour JM
Léger (1997), les villes nouvelles constituent « des pôles d’emploi dont l’attractivité dépasse
largement le périmètre ». Elles regroupent ainsi 44 % des emplois nouveaux créés en Ile-deFrance entre 1975-1990. Néanmoins, pour H. Chevalier (1999), « les postes créés n’ont
correspondu souvent qu’à des emp lois délocalisés de la proche couronne et de Paris ».
Les villes nouvelles « n’ont pas échappé aux tendances générales de l’automobilisation »
Alors que des efforts avaient été fait en villes nouvelles pour développer les transports en
commun, celles-ci n’échappent pas aux tendances générales de la grande couronne concernant
l’automobilisation. Pour G. Dupuy et M. Thébert (1998), les données relatives à la part de
l’automobile dans les déplacements internes et externes « suggèrent que les villes nouvelles,
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pourtant conçues pour éviter l’anarchie et l’étalement urbain-pour concentrer-, donnant ainsi
toutes ses chances au transport collectif, n’ont pas échappé aux tendances générales de
l’automobilisation, manifestes dans la grande couronne parisienne ». Une étude de Fouchier et
Duval (1998) sur la mobilité et les villes nouvelles montre également « que les habitants des
villes nouvelles n’ont pas un comportement de mobilité réellement différent des secteurs
voisins de seconde couronne de l’agglomération ou des communes urbaines hors de
l’agglomération. Il ne semble pas non plus que les efforts à l’égard de leur desserte ferrée, de
leur desserte interne et des liaisons piétonnières aient pour conséquence une mobilité
particulière ».
« Les villes nouvelles n’ont bénéficié d’aucune priorité » pour les grands équipements
Dans les années 1980, le bilan des équipements des villes nouvelles est plutôt négatif
concernant les "très grands équipements, uniques" annoncés en 1965 dans le Schéma
Directeur pour chaque ville nouvelle. Les universités ne seront réalisées que dans les années
1990. Pour Merlin (1982), « le bilan quantitatif n’est, en ce qui concerne les équipements
publics, ni catastrophique, ni réjouissant. Les retards ont été nombreux (…), mais
correspondaient le plus souvent aux retards des logements, donc de l’installation des
populations ».
Merlin dénonce plutôt l’insuffisance de l’engagement de l’Etat : « ce qui est grave, c’est la
réserve des pouvoirs publics vis-à-vis des villes nouvelles que traduisent ces retards ». Il
remarque « de sérieuses carences au niveau des grands équipements » et « la grave
insuffisance » en ce qui concerne les équipements universitaires qui auraient dû, selon le
VIème Plan, être localisés en priorité dans les villes nouvelles : « véritable dédit du ministère
de l’Education nationale qui, contrairement aux termes du plan et à ses propres engagements,
n’a pas acheté les terrains qui lui étaient proposés pour ses futures universités ». Merlin
remarque également un retard pour les hôpitaux et les lycées « pour lesquels les villes
nouvelles n’ont bénéficié d’aucune priorité et dont l’absence a longtemps nui à la "cohérence
temporelle et spatiale dans la réalisation des équipements et des logements" ». Finalement, si
les préfectures à Evry et à Cergy ont permis de créer environ 1 000 emplois et ont entraîné
l’implantation d’entreprises, Merlin déplore que « bien peu a été fait ailleurs ».
La « localisation » des villes nouvelles
Les villes nouvelles attirent les populations de la seconde couronne et plus particulièrement
celles de leur quadrant géographique. Si les résultats de l’étude de JF Deneux (1992) sur
l’ensemble des flux de population intéressant les villes nouvelles suggèrent que les villes
nouvelles sont attractives au niveau résidentiel, cette attractivité concerne plutôt les
populations de la seconde couronne. L’analyse de l’origine des arrivants révèle que cette
nouvelle population est « principalement francilienne » avec « une part prépondérante prise
par les habitants venant des départements de seconde couronne ». Ainsi, « il s’agit moins d’un
desserrement proprement dit, que d’une relocalisation résidentielle s’effectuant en grande
partie à l’intérieur même des départements de la seconde couronne ». En 1999, Fouchier et
Mirande, à travers l’étude des logements neufs et de leur population dans les cinq villes
nouvelles entre 1990 et 1997, réaffirment cette idée : les villes nouvelles « participent moins
au desserrement du centre de l’agglomération parisienne qu’à une pola risation en grande
couronne », (Fouchier et Mirande, 1999). Mais, si les villes nouvelles attirent des populations
nouvelles, elles ne les retiennent pas forcément. JF Deneux estime que les villes nouvelles
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« n’échappent pas à la logique migratoire relevée globalement pour l’ensemble de l’Ile-deFrance même si leur solde (migratoire) est nettement positif…le peuplement des villes
nouvelles est principalement devenu celui des Franciliens dont la mobilité est le trait
majeur ». Néanmoins, la comparaison avec les résultats du reste de la couronne périurbaine
montre que « les villes nouvelles résistent mieux aux forces qui amènent certaines populations
à quitter l’Ile-de-France ». L’hypothèse de Deneux est celle d’une « étape dans l’histoire
résidentielle des mé nages ». Le profil des migrants arrivant « ressemble étrangement à celui
des groupes qui se dirigent vers les communes rurales ». Pour Deneux, les villes nouvelles
constituent peut-être « un banc d’essai pour de futurs ruraux », elles seraient « perçues comme
des communes rurales assemblées ». Enfin, deux groupes structurent l’essentiel des
mouvements migratoires de la population active : les "professions intermédiaires et les
employés". Ceci amène Deneux a poser la question « villes nouvelles : villes moye nnes ? ».
L’étude des pétitionnaires de permis de construire de maisons neuves de V. Legrain (1999)
confirme cette « localisation » des villes nouvelles. Ainsi, Saint-Quentin « n’est plus une
destination du desserrement de la zone centrale » et « se desserre toujours vers l’Ouest ».
Cergy continue à jouer un rôle de pôle dans son quadrant puisqu’elle « accueille toujours des
pétitionnaires de Seine-Saint-Denis et du nord des Hauts-de-Seine, mais de moins en moins ».
Elle « se desserre également », mais son desserrement est moins lointain que celui des autres
villes nouvelles. Evry a « une clientèle plutôt locale (…qui) provient du nord- Essonne et de la
ville nouvelle elle- même ». « Son aire de diffusion est nettement tournée vers le Sud-Est ».
Sénart, « c’est la ville nouvelle où la part de pétitionnaires originaires de la zone centrale est
la plus importante, mais elle deviendrait moins un lieu de desserrement de la petite couronne
et se rapprocherait d’Evry, sans toutefois se desserrer dans le même temps ». C’est la ville
nouvelle dont les pétitionnaires sont les moins nombreux à partir. Enfin, Marne- la-Vallée
« reste un lieu de desserrement important pour la zone centrale ».
Les villes nouvelles ont des densités moyennes proches de celle de la seconde couronne. En
1997, pour Fouchier, la densité humaine nette des villes nouvelles « est voisine de la densité
mesurée dans le secteur de la deuxième couronne de l’agglomération parisienne ». Mais, ces
chiffres moyens recouvrent des réalités différentes. En effet, « certaines communes des villes
nouvelles ont des densités élevées, en comparaison des autres communes localisées à une
distance équivalente de Paris. Mais, leurs périmètres ont accueilli une large proportion de
quartiers denses ». Evry, par exemple, « est la plus dense de toutes les communes des villes
nouvelles avec des chiffres proches de ceux enregistrés en première couronne de
l’agglomération parisienne ». Ainsi, les villes nouvelles « apparaissent comme le
prolongement de la seconde couronne de l’agglomération parisienne (…) elles ont su, en
revanche, proposer une plus grande quantité d’espaces publics par habitant (…) tout en
canalisant une large part des urbanisations nouvelles ».
Les villes nouvelles se spécialisent selon leur quadrant
Aux tendances régionales s’ajoutent les tendances locales qui donnent à chaque ville nouvelle
une configuration propre en matière d’activités économiques. Chacune s’inscrit dans des
spécialisations fonctionnelles et dans des logiques par grands quadrants angulaires. Damette
et Beckouche (1990) montrent que le système productif de la métropole parisienne connaît
une répartition spatiale de ses fonctions. Les villes nouvelles s’insèrent dans des secteurs de
fonctions différentes et « reflètent la dominante du secteur dans lequel elles se situent ».
Ainsi, Saint-Quentin se situe dans le secteur sud-ouest de « la conception-gestion », à l’est,
Evry et Marne- la-Vallée sont dans la zone de logistique et au nord-ouest, Cergy-Pontoise se
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situe dans une zone plurifonctionnelle. « L’opposition fonctionnelle entre l’Ouest et l’Est
s’accompagne d’un contraste social et résidentiel ». V. Bathellier et JP Birchen (1993)
considèrent que le territoire régional « ne doit pas être le cadre référentiel unique de la
réflexion sur l’aména gement des villes nouvelles. L’observation des aires d’attraction permet
de pressentir la perméabilité des "frontières" régionales et l’étendue des interactions avec les
départements du Bassin parisien ».
On obtient ainsi des spécialisations différentes selon les villes nouvelles.
Saint-Quentin-en-Yvelines, un environnement très favorable
La ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines bénéficie d’un environnement local très
favorable. Selon JP Alduy8 (C. IAURIF, 1989), elle tire avantage d’une part « de sa
localisation sur l’axe de développement naturel de l’agglomération parisienne vers l’Ouest ».
Ainsi, de grandes firmes internationales et des entreprises de haute technologie l’ont choisie
car elles « avaient des difficultés à s’implanter dans la capitale ou en proche banlieue ouest ».
D’autre part, elle profite de la convergence de deux courants économiques : la croissance
tertiaire spontanée de l’Ouest parisien et le développement de la haute technologie au sud de
l’agglomération. Enfin, elle dispose d’un « cadre de vie apprécié et attractif, y compris pour
les cadres moyens et supérieurs des entreprises ». Selon V. Bathellier et JP Birchen (1993), la
ville nouvelle a développé « des types d’emplois qui en font la ville nouvelle la moins
dépendante de Paris ». « Les Quentinois sont les moins attirés par les emplois parisiens. A
l’inverse, et à l’exception de Marne-la-Vallée, les actifs parisiens y occupent
proportionnellement plus d’emplois que dans les autres villes nouvelles ». « Assurant pour
une part non négligeable (70%) l’accueil des actifs de la ville nouvelle et du département,
Saint-Quentin est aidée par la proximité de pôles d’emploi très excédentaires. Leur présence,
en ayant un effet d’entraînement a pu influer sur l’implantation d’activités dans la ville
nouvelle et a participé au dynamisme d’une vaste zone d’emploi qui concurrence l’influence
de Paris ». L’implantation de quelques grandes entreprises à Saint-Quentin-en-Yvelines a eu
des effets d’entraînement ensuite sur les autres entreprises. Ainsi, R. Nadaus 9 (1996) explique
que l’implantation de Bouygues à Guyancourt, grâce à l’appui de l’Etat, a permis le
développement du centre d’affaires de Saint-Quentin. De même, l’implantation du centre de
recherche de Renault devrait permettre à Saint-Quentin de « poursuivre sur sa lancée ». Celuici « aura un effet d’entraînement majeur ; plus encore que le siège de Bouygues, il amènera
des sous-traitants, des fournisseurs de services et de la taxe professionnelle ». (Beckouche P.,
Damette F., Vire E., 1997).
Dans son quadrant sud-ouest, Saint-Quentin constitue « le nœud de l’intégration économique
du Sud-Ouest du Grand Bassin parisien », (IUP, 1998). Selon Gollain et Sallez (1999), elle
s’insère dans le faisceau « Paris ouest sud-ouest parisien » et plus particulièrement dans la
tangente « Saint-Quentin-Vélizy-Saclay-Massy-Evry ». Cette tangente «se spécialise dans
l’industrie à haute valeur ajoutée et les services supérieurs informatiques et techniques qui y
sont liés. Elle joue un rôle complémentaire à Paris et au proche ouest parisien ». Ainsi, la ville
de Saint-Quentin bénéficie « de nombreux atouts pour aborder l’avenir ». Cependant, « son
éloignement des aéroports internationaux peut quelques fois la desservir ».
8
9
Directeur général de l’EPA de Saint-Quentin
Président du SAN de Saint-Quentin
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Marne-la-Vallée : pas de véritable insertion locale, plutôt une influence régionale
Le développement de la ville nouvelle de Marne- la-Vallée s’inscrit dans plusieurs tendances.
Tout d’abord, selon J. Poulit 10 (C. IAURIF, 1989), « l’importance du secteur tertiaire est liée à
sa situation sur l’axe central ». Cependant, « malgré la politique de "rééquilibrage à l’Est"
affirmée depuis deux décennies, les activités tertiaires ont continué à s’implanter
préférentiellement dans l’Ouest parisien ». En 1989, J. Poulit estime que la ville nouvelle
connaît « un décollage économique certain ». Selon Gollain et Sallez (1999), elle s’insère
également dans le faisceau « Paris Est-Marne- la-Vallée ». Pour eux, elle bénéficie d’atouts
qui « lui offrent de fortes opportunités de développement dans les services aux entreprises et
aux particuliers ». Et, selon ACADIE et l’ŒIL (IUP-ŒIL et ACADIE, 1998a), les
perspectives d’évolution des relations de Marne- la-Vallée s’orientent vers un arc tangentiel
allant de Roissy à Melun-Sénart.
Les migrations alternantes à Marne-la-Vallée s’expliquent par sa situation à cheval sur la
première et la deuxième couronne. Pour V. Bathellier et JP Birchen (1993), la ville nouvelle
est « influencée par un double processus » du fait de sa localisation : celui que connaissent les
villes nouvelles qui recrutent les actifs sur des aires rurales étendues et, d’autre part, celui des
pôles d’emploi dynamique de proche couronne qui attirent les actifs de l’agglomération.
Ainsi, elle « s’identifie partiellement à un pôle d’emploi de proche couronne ». Elle « a dû
lutter contre le déclin de la proche couronne est et nord et, pour cela, a constitué un pôle
dynamique, attractif pour les actifs du site, de la Seine-et-Marne et des départements adjacents
de la proche couronne ». Cependant, elle connaît un déséquilibre important au profit de la
sortie des actifs de la ville nouvelle, flux qui sont massivement dirigés vers la capitale et les
communes de proche couronne.
Le pôle que constitue cette ville nouvelle influence peu son quadrant. Marne- la-Vallée a un
développement qui se veut à une échelle plus large que l’échelle du quadrant et que lui
confère le SDRIF en tant que pôle d’envergure européenne. Ainsi, dans le XIe Plan (1993)
couvrant la période 1994-1998, l’EPAMARNE et l’EPAFRANCE prévoyaient de « renforcer
le pôle européen de Marne- la-Vallée par des projets structurants ». Tous ces projets ont une
vocation européenne : premier complexe touristique d’Europe avec Eurodisney, projet de parc
alimentaire européen et de site d’aménagement téléportua ire qui ferait de la ville nouvelle « le
futur pôle européen de l’image ». ACADIE et l’ŒIL estiment qu’elle n’est « ni capitale, ni
enclave au sein de ce quadrant ». « Il s’agit davantage encore d’un élément du "système
parisien desserré" que d’un "pôle du quadrant" ». Pour eux, l’objectif de rééquilibrage à l’Est
de l’agglomération « a été incontestablement tenu » par la ville nouvelle. Mais, « l’effet
d’entraînement économique semble ne pas avoir fonctionné (…) Phare de l’Est francilien,
Marne- la-Vallée n’en est pas la locomotive ». Le développement de la ville nouvelle se
poursuit aujourd’hui dans le dernier secteur, celui du Val d’Europe : « La ville nouvelle dans
la ville nouvelle », tel est le scénario souhaité par les acteurs locaux pour ce dernier secteur.
Mais, pour les auteurs, il est plus probable que ce secteur n’ait pas de « rôle prépondérant »
dans le système territorial du quadrant. L’EPAMARNE et l’EPAFRANCE pensent eux, dans
le XIIe Plan (1998), que la dynamique internationale du Val d’Europe va profiter à la Grande
couronne.
Cergy-Pontoise, une « ville nouvelle ancienne »
En 1981, Steinberg pensait que la ville nouvelle se situait dans l’orbite du pôle de La Défense.
Vingt plus tard, cette relation privilégiée entre Cergy-Pontoise et La Défe nse ne semble pas
s’être concrétisée. Il semblerait que ce soit davantage Saint-Quentin-en-Yvelines qui ait
10
Directeur général de l’EPAMARNE et de l’EPAFRANCE
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bénéficié de la proximité de ce pôle. Cergy, en revanche, s’insère dans une logique
départementale, en se tournant vers Roissy, tout en restant très liée, pour les échanges
domicile-travail à la zone centrale de l’agglomération parisienne (IUP, 1998). La ville de
Cergy est plutôt une ville tertiaire, 70 % de ses activités correspondent à des sièges sociaux
d’entreprises, alors que le reste du quadrant est plutôt un corridor industriel où la filière
mécanique est prépondérante. Cergy-Pontoise est « tournée vers la capitale, fonctionnant
principalement avec elle » et apparaît ainsi « comme poste avancé de la métropole
parisienne ». Pour Gollain et Sallez (1999), Cergy dispose d’une position avantageuse sur le
"faisceau Paris Nord-Ouest-Cergy" « grâce à un tissu économique récent et équilibré ».
Selon V. Bathellier et JP Birchen (1993), « la situation géographique de Cergy, son
éloignement de Paris, la croissance du nombre de ses emplois, l’assimilent à une "ville
nouvelle ancienne" qui a optimisé son équilibre habitat-emploi ». Elle a la proportion d’actifs
stables11 la plus forte des villes nouvelles et son aire de recrutement est selon eux à
prédominance locale.
Evry : un véritable pôle d’emploi
Selon Y. Boucly12 (C. IAURIF, 1989), Evry « a su tirer parti de la richesse technologique de
son environnement Nord-Ouest et attirer plus de soixante-dix entreprises axées sur
l’informatique et ses applications aux automatismes et à la robotique. ». Ainsi, la ville
nouvelle constitue un « pôle économique axé sur les technologies avancées » et apparaît
comme « un centre de développement économique du sud parisien ». En 1992, la ville
nouvelle affiche un fort taux d’emploi mais, selon J. Rueff, « derrière ce chiffre flatteur se
cache une inadéquation entre besoins des entreprises et niveau de qualification locale (…) la
moitié des habitants continuent de devoir aller travailler soit à Paris, soit dans le reste du
département ». Pour V. Bathellier et JP Birchen (1993), elle « constitue bien un pôle à part
entière qui exerce son influence sur une aire étendue ». Elle draine « une part non négligeable
d’actifs dans un rayon assez large, plus qu’elle ne diffuse ses propres résidents ». « Elle
bénéficie de nombreux atouts en matière d’emplois et d’image ». De nombreux ménages
s’installent à Evry du fait de l’attractivité de l’emploi mais aussi du fait d’un petit nombre de
communes autour de la ville nouvelle qui constituent des pôles excédentaires en emplois.
Cependant, elle « offre un exemple type des difficultés à assurer la croissance de l’équilibre
habitat-emploi sur une zone restreinte ».
Pour Gollain et Sallez (1999), l’influence de l’environnement d’Evry est double. D’une part,
elle s’insère dans le "faisceau Paris ouest sud-ouest parisien". Dans ce cadre, elle « offre le
visage d’un pôle urbain et d’emplois important » et a une « vocation technologique »
renforcée par la création du génopôle. D’autre part, Evry s’insère également dans le "faisceau
Paris sud –Evry" qui s’appuie « principalement sur le développement économique de l’ouest
du Val-de-Marne ». La vocation logistique de ce faisceau « tend à se prolonger…pour aboutir
dans la ville nouvelle d’Evry ».
Sénart a du mal à démarrer et à imposer sa centralité
En 1989, B. Meary13 (C. IAURIF) estimait que la réalisation de la Francilienne offrirait à la
ville nouvelle des perspectives de développement plus favorable. En 1993, V. Bathellier et JP
Birchen constatent que l’influence de Sénart est limitée : « le nombre de ses emplois n’a pas
11
Actifs stables : les résidants qui travaillent en ville nouvelle
directeur général de l’EPA d’Evry
13
directeur général de l’EPA de Sénart
12
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encore atteint un seuil suffisant pour lui permettre d’apparaître comme un pôle d’emploi
incontournable ». Ils considèrent qu’elle « commence seulement à vivre son "adolescence" de
ville nouvelle ». Pour eux, le renforcement de son accessibilité et ses disponibilités foncières
constituent des potentialités. En 1997, la Charte de développement économique de Sénart
rapportait une « absence de véritables pôles d’emplois », « un tissu économique hétérogène ».
Selon cette Charte, réalisée par le SAN, « l’absence de centralité et de pôle administratif n’a
pas permis de développer les emplois publics qui occupent habituellement une place
importante dans les pôles urbains et notamment dans les villes nouvelles ». Le refus de toute
notion de centralité explique l’absence de tertiaire à Sénart. La charte fait reposer le
développement de la ville nouvelle sur la création de son centre, le Carré Sénart. L’ensemble
commercial du Carré Sénart doit « lui permettre d’assurer sa vocation de centre ville et
répondre aux besoins d’une agglomération de 150 000 habitants ». « Il importe que Sénart
puisse limiter l’évasion commerciale actuelle et recentrer la consommation locale en adaptant
son offre commerciale à la diversité et à la complémentarité des modes de consommation ».
Les villes nouvelles constituent-elles des pôles de la région parisienne ?
En 1997, V. Fouchier constatait que, entre 1975 et 1996, « les cinq villes nouvelles ont
accueilli 2,1 fois plus de surfaces habitables (SHON) que leur périphérie immédiate ». Pour
lui, ce résultat peut être interprété de diverses manières. Il peut paraître modeste « si l’on
considère les efforts produits par la puissance publique pour attirer des constructions dans les
villes nouvelles ». Il peut « témoigner de l’effet d’entraînement des villes nouvelles sur leur
environnement ». Enfin, « il peut aussi illustrer le fait que le site des villes nouvelles ont été
judicieusement choisis dans des secteurs où la croissance s’orientait "naturellement" ».
Fouchier quant à lui défend l’hypothèse d’une "péri- urbanisation" autour des villes nouvelles.
« Le développement périphérique a surtout porté sur la fonction résidentielle » alors que « les
villes nouvelles ont fortement polarisé les constructions à vocation d’activité économique ».
Ainsi, pour Fouchier, cela « confirme la polarisation que les villes nouvelles ont su effectuer
dans leur territoire en matière de développement économique ». Mais, ce chiffre de 2,1
masque selon Fouchier des différences importantes. Ainsi, Cergy-Pontoise « a beaucoup plus
concentré son développement que les autres villes nouvelles, puisque son ratio ville
nouvelle/périphérie est de 4,4 ». A l’opposé, Sénart a le ratio le plus faible, elle « n’a reçu que
40% de constructions en plus que ses communes périphériques (ratio de 1,4) ».
Néanmoins, sur la période récente (1990-96), le ralentissement du rythme de construction
dans la région a « durement affecté les villes nouvelles ». La réduction du poids des villes
nouvelles (de 15 à 13,7% entre 1990 et 1996) dans la construction totale de la région peut être
la manifestation, selon Fouchier, de la « concurrence exercée par d’autres secteurs
géographiques de la région ». Ainsi, l’effet de polarisation produit par les villes nouvelles en
Ile-de-France ne leur est pas exclusif, d’autres sites participent de plus en plus à cette
polarisation.
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LES POLARITES SE MULTIPLIENT EN ÎLE-DE-FRANCE
Dans le SDAURP de 1965, le polycentrisme, s’appuyant sur les villes nouvelles, visait « à
accueillir une part notable de la croissance urbaine tant pour éviter l’extension de la tache
d’huile que pour assurer une desserte optimale en transport et un taux d’équipement élevé
pour constituer des centralités secondaires », (Fouchier, 1997). Selon V. Fouchier (1999), le
polycentrisme « recouvrait trois politiques complémentaires : la polarisation du
développement dans des zones privilégiées, la création de pôles denses et la constitution de
bassins de vie internes à l’agglomération ». Les Schémas d’aménagement suivants
maintiennent le principe du polycentrisme, mais d’autres centres surgissent : on passe ainsi du
« polycentrisme » au « multicentrisme ». Les villes nouvelles perdent peu à peu leur statut
privilégié de polarités secondaires de la Région Île-de-France.
Au fil des documents d’aménagement, les villes nouvelles deviennent des
pôles parmi d’autres
Du SDAURP au SDRIF, les typologies de centralités et de polarités économiques se sont
diversifiées. C. Moissinac (1981) estime que le SDAU de 1975 puis celui de 1979
redécouvrent l’agglomération existante et donnent une importance nouvelle aux pôles
restructurateurs. « L’affirmation de la primauté des villes nouvelles ne change pas », mais,
« les pôles structurants de banlieue sont, il faut vraiment le remarquer, mis sur le même plan
que les villes nouvelles et les villes petites et moyennes dont le SDAU 75 avait déjà souligné
l’importance ». « Les villes nouvelles ne sont plus les seuls moyens pour atteindre les
objectifs fixés : leur place s’est relativisée ».
Ile-de-France 2000 (C. IAURIF, 1988), met en avant trois axes de développement pour
résoudre « le problème du rééquilibrage entre l’Est et l’Ouest ». Les villes nouvelles sont
réparties sur chacun d’eux : l’axe Nord qui comprend Cergy-Pontoise et Roissy, le grand axe
tertiaire central qui comporte trois secteurs (à l’est, Marne- la-Vallée, Bercy-Tolbiac et
Vincennes ; au centre, Paris et La Défense qui « a des possibilités d’extension vers le Nord
Ouest » ; et l’ouest où « la concentration des emplois est importante ») et l’axe Sud avec cinq
points majeurs (le centre tertiaire de Massy, la technopôle de Saclay-Palaiseau, le secteur
d’Orly-Rungis, Saint-Quentin, et Evry et Melun-Sénart). Le Livre blanc (1990) pose la
question suivante : « Les villes nouvelles mises en œuvre depuis 1965 devront-elles continuer
à structurer l’essentiel de l’urbanisation nouvelle, ou faut- il planifier des développements
importants dans d’autres secteurs de la région ? ». Il propose quatre actions pour organiser
l’extension périphérique de l’agglomération : viser le plein usage des villes nouvelles
existantes, renforcer les villes moyennes (situées dans un rayon de 30 à 50 km), ouvrir de
nouveaux sites à l’urbanisation (au nord, le pôle international de Roissy et au sud, le
technopôle du plateau de Saclay-Palaiseau). Enfin, Merlin et O’Callaghan (1990) proposent
des « pôles de rééquilibrage » dont les objectifs seraient « la structuration de la banlieue, le
rééquilibrage centre-périphérie et est-ouest et les opportunités foncières sur des lieux bien
desservis ».
Le SDRIF de 1994 agrège ces différentes réflexions préalables. Il réaffirme le principe
du polycentrisme mais avec de multiples pôles : « une organisation urbaine polycentrique
comportant des pôles urbains et des équipements forts structurants la région ». Ces pôles
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doivent à nouveau contribuer à « lutter contre la tendance d’extension en tache d’huile ». Ils
seront de tailles différentes et devront assurer « des fonctions de centralité grâce aux
équipements publics, aux commerces et à une desserte de bonne qualité par les transports
collectifs ». Le SDRIF propose quatre types de pôles :
- Les centres d’envergure européenne qui seront « des sites d’accueil européens
d’entreprises à vocation internationale » (Paris et La Défense, le site de Roissy, Marne- laVallée, le site d’Orsay, Saclay-Massy, Orly) ;
- Les secteurs de redéveloppement de la proche couronne qui devront répondre « à l’accueil
d’une partie conséquente de la croissance des 25 prochaines années ». En effet, le SDRIF
vise « la valorisation de la zone centrale…pour limiter la consommation de nouveaux
espaces agricoles ».
- Les villes nouvelles et les nouveaux sites d’urbanisation. « Les villes nouvelles devront
conforter leur acquis de pôles régionaux tant administratif, tertiaire, commercial
qu’universitaire pour assurer dans cette grande couronne l’effet d’entraînement dont les
nouveaux sites urbains ont besoin pour réaliser leur développement ». Cependant, « en
aucune façon, les villes nouvelles ne sauraient satisfaire à elles seules les besoins
nouveaux », elles ont des possibilités d’accueil qui ont leurs limites. Les secteurs de
redéveloppement de la Vallée de la Seine et les nouveaux sites d’urbanisation permettront
de répondre à ces besoins nouveaux. « A l’inverse des villes nouvelles au moment de leur
création, (ils) trouvent appui sur des structures urbaines confirmées ». En effet, ils sont
proches des villes nouvelles et des centres d’envergure européenne et devront profiter de
leur dynamisme pour se développer.
- Les villes de la couronne rurale qui comprennent les villes « trait d’union » (contribuent à
l’ouverture de l’Ile-de-France sur les régions voisines), les villes cœurs (apportent des
services à leur environnement rural) et Mantes, Meaux et Melun (de puissants relais).
« Ainsi enrichie par cette diversité de pôles, l’Ile-de-France accroît ses chances de réussir un
développement harmonieux, équilibré et solidaire ».
Le Contrat de plan 2000-2006 définit dix sites prioritaires parmi lesquels figurent Marne- laVallée et Sénart. Ces pôles sont de nature différente. Ainsi, certains sites sont des territoires
touchés par la désindustrialisation et « nécessitent un effort de solidarité et une intervention
publique qui permettent un redéveloppement du tissu économique, une amélioration du cadre
de vie et un meilleur accès aux services publics », (sites de la Plaine Saint Denis, de la Plaine
de France, de la Boucle de Gennevilliers et de Seine Amont et du secteur de la Seine Aval).
Au contraire, certains sites sont des territoires « à fort potentiel scientifique et économique ».
Ils « constituent des pôles dynamiques qui focalisent initiatives, développement et emploi (ils)
doivent contribuer au rayonnement international de l’Ile-de-France tout en contribuant au
développement de leurs aires d’influence et de la région », (Plateau de Saclay, Val de Seine et
Roissy). Enfin, pour renforcer le rôle de Marne- la-Vallée et de Sénart, « l’Etat et la Région
conviennent de prolonger la politique d’accompagnement de leur développement entreprise
aux précédents plans ». Les autres villes nouvelles, quant à elles, « doivent continuer, avec le
reste de la zone dense de l’agglomération, à jouer leur rôle de polarisation de la croissance
démographique et économique ».
Au fil des intentions publiques, les villes nouvelles deviennent des pôles parmi d’autres. Dans
un contexte de développement démographique et urbain ralenti, et alors même que l’action
publique se tourne vers le renouvellement urbain, la catégorie « ville nouvelle » n’a plus le
monopole de la volonté d’organisation polycentrique de l’espace régional.
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Polycentrisme ou « multicentrisme » ?
Différents jugements ont été portés sur l’évolution du polycentrisme depuis le schéma
directeur. Certains sont plutôt négatifs, la « multipolarité » a conduit à des centralités qui sont
jugées insuffisamment fortes. Ainsi, dès 1981, Moissinac constate que « les années passant,
"le sens" de ces centres nouveaux s’est vidé de son contenu laissant pla ce à une présentation
assez froide soit des équipements, soit même des transports nécessaires pour accéder au
centre… soit enfin des fonctions que doivent remplir ces centres », alors que « les objectifs en
matière de villes nouvelles surtout, beaucoup plus que pour les pôles restructurateurs, étaient
bien d’atteindre "une centralité entière", mythique peut-être, mais imaginée en termes
globaux ». Pour elle, déjà en 1975, on trouve une conception du polycentrisme très éloigné de
celle du SDAU de 1965. Deux conceptions du polycentrisme s’opposent à l’époque. Dans la
première, défendue par la Préfecture de la région, l’objectif est de renforcer l’unité régionale,
alors que, dans la seconde, l’unité de l’agglomération est remise en cause par JM Poirier 14 .
Pour lui, l’unité marché du travail n’est qu’un mythe, il s’organise, en 1975, en "quartiers
d’orange" le long des radiales. Le vrai polycentrisme consisterait à conforter des pôles
polyvalents, des centres d’activités quasi-autonomes, de façon à avoir des marchés du travail
indépendants (Moissinac, 1981).
Cette conception n’est pas éloignée de celle de Jacques Lévy (1995), « les nouvelles formes
d’urbanisation se révèlent incapables de produire une centralité forte à l’échelle de
l’agglomération. Du coup, la pression sur le centre ancien se renforce ». « Dans ce contexte,
et malgré le volontarisme désormais épuisé des villes nouvelles, le monocentrisme est
condamné à perdurer et à s’aggraver ». Trois traits caractérisent selon lui la structure spatiale
de Paris : « une métropole monocentrique », « l’isolement relatif par rapport au cœur de la
mégalopole centre-européenne » et « le basculement vers le périurbain ».
Si M. Piquard (in Association Française des Villes Nouvelles (A.F.V.N.), 1996) considère que
« les villes nouvelles ont globalement rempli leur contrat », pour lui, « ce qui s’est passé hors
villes nouvelles a probablement plus changé la vie de plus d’habitants de la région que les
villes nouvelles elles- mêmes ». Il souligne trois processus. Tout d’abord, « au lieu de la
concentration des grandes fonctions de services, nous avons vu leur dispersion » ; c’est le cas
par exemple pour l’enseignement supérieur, pour les hôpitaux et pour les centres
commerciaux. Ensuite, « au lieu de la hiérarchie des fonctions, nous vivons leur
concurrence ». Pour lui, les raisons de cette concurrence sont liées au réseau routier que les
nouvelles implantations de services ont privilégié par rapport au réseau ferroviaire conçu
selon le principe radio-concentrique traditionnel. Enfin, « la banlieue préexistante a révélé une
aptitude à se renouveler qui avait été complètement sous-estimée ». Finalement, pour Piquard,
on peut soit « déplorer » cette concurrence des villes nouvelles qui entraîne « des occasions
manquées de créer de beaux centres urbains » ou soit « se féliciter », « les usagers et clients
votent avec leurs roues et leur portefeuille ».
L’étude Géographie économique de la région parisienne (Beckouche P., Damette F., Vire E.,
1997) suggère d’une part qu’il y a bien une polarisation mais qu’elle est très sélective et
d’autre part, que la zone centrale a conforté sa position. Entre 1982 et 1994, « la polarisation a
régressé (…les) pôles pèsent globalement de moins en moins lourd ». Cependant, ces résultats
généraux cachent en fait des réalités différentes selon les pôles : « il y a bien polarisation,
mais elle est très sélective ». « Les cartes montrent l’indiscutable réussite d’un polycentrisme
équilibrée à l’échelle de la région ». « Cependant, lorsque l’on passe du registre de
l’urbanisation au contenu économique du développement, le tableau est plus nuancé ». La
polarisation s’est confirmée mais « au profit d’un petit nombre de zones privilégiées » et le
14
rapporteur général du Plan
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déséquilibre Est/Ouest s’est accru. Les villes nouvelles en ont profité mais « au regard des
emplois les plus qualifiés, le cœur de la zone centrale a conforté sa prééminence ».
« Davantage encore que le succès des villes nouvelles, l’élément le plus important dans la
géographie économique contemporaine est le glissement du centre de gravité du centre
d’affaires depuis Paris Ouest vers les Hauts-de-Seine ».
Finalement, Burgel (1999) déclarait qu’en 1995, « la multipolarité est partout…au risque
évidemment d’être nulle part sinon à Paris ». Même si les villes nouvelles ont accueilli une
part importante de l’emploi, « elles ne représentent qu’à peine 5 % de l’emploi francilien, près
de sept fois moins que la ville de Paris ». « La qualité et la nature des activités comptent
finalement plus que la morphologie territoriale et la configuration de l’agglomération. A cet
égard, l’espace parisien apparaît beaucoup plus caractérisé par ses singularités que par ses
multipolarités : le maintien d’une forte centralité et l’apparition d’identités périphériques très
personnalisées ».
Au contraire, pour d’autres auteurs, ce « multicentrisme » conduit au bon fonctionnement de
l’Ile-de-France. Ainsi, P. Beckouche (1999) estimait que « au-delà de Paris et de La Défense,
l’émergence de pôles économiques majeurs à Roissy, dans les villes nouvelles et sur le
plateau de Saclay, marque le succès de 30 ans de planification » . « C’est dans la zone
centrale, c’est-à-dire dans l’agglomération parisienne étendue à ces nouveaux pôles de
moyenne banlieue, que demeurent les activités stratégiques de la Région parisienne, du Bassin
parisien et du pays tout entier ». « La structure urbaine parisienne a atteint un équilibre qu’il
serait dommage de perdre ». Il faut selon lui privilégier la densité par rapport à l’étalement :
« Il faut défendre l’idée de densité urbaine à toutes les échelles ». Les priorités de
l’aménagement régional sont de valoriser les avantages de la densité et d’articuler les
différents espaces entre eux. Pour cela, Beckouche considère qu’il est nécessaire d’achever
l’accessibilité aux pôles d’emploi, d’appuyer le développement des sites stratégiques,
d’organiser les espaces interstitiels en fonction des pôles et de donner aux pôles majeurs un
rôle d’articulation entre l’agglomération parisienne et les villes du Bassin parisien.
Pour M. Ro usset-Deschamps (2000), le polycentrisme proposé par le SDRIF se rapproche de
l’idéal de Lévy, la métropolisation partagée. « Le SDRIF propose des types de centralités
répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain ». Le projet « fait le choix d’une politique
d’offre de centralité afin de doter toutes les parties de l’espace urbain d’un accès à
l’urbanité ». En effet, il vise « à donner à tous les habitants l’accès à la densité, à l’échange et
à la diversité que procurent les centres ». Cependant, « chaque centre n’a pas obligatoirement
toutes les fonctions, ou s’il les a, elles ne sont pas identiques puisqu’elles résultent des réalités
sociétales spécifiques territorialisées qui les produisent ». Ainsi, le SDRIF donne « un label »
à d’autres espaces que l’espace central et reconnaît « la diversité des stratégies des acteurs par
l’offre de situations spatiales et sociales variées ». Enfin, « ce polycentrisme, ou plutôt
"multicentrisme", reconnaît l’existence d’interrelations entre les centres qui sont à la base
d’un enrichissement réciproque. C’est l’idée de métropolisation partagée (Lévy 1995) au sein
de l’espace urbain ».
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TROISIEME PARTIE :
LA VILLE REVENDIQUEE
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Alors que la position des villes nouvelles en tant que pôles de la région se banalisait, le
référentiel « villes nouvelles », dans le même temps, prenait de la consistance. Aussi bien
l’Etat que les acteurs locaux ont cherché peu à peu à réaliser de véritables villes.
Le basculement de l’Etat giscardien et de l’opinion politique
Pour Carmona (1980), la période 1974-1976 correspond à la crise des villes nouvelles. « Les
pouvoirs publics ont en fait arrêté à l’égard des villes nouvelles une attitude qui marque par
rapport aux principes défendus par P. Delouvrier, puis M. Do ublet, une sensible inflexion.
"Développer et achever les villes nouvelles" avait déclaré Valéry Giscard d’Estaing à Evry ».
Pour la presse, les villes nouvelles sont devenues des villes comme les autres». Dans Le
Monde du 4 mars 1975, un article titrait « A Saint-Quentin-en-Yvelines. L’envers du décor ».
L’article fait la description suivante :« Allez donc derrière la nationale, tout au bout de La
Verrière. Vous verrez Chicago, dit-on dans la ville nouvelle ». Pour Carmona, « l’idée qui se
dégage au printemps de 1975 » est donc celle de terminer les villes nouvelles.
L’enjeu voulu par le SDAURP, consistant à créer des « centres urbains » est peu à peu perdu
de vue. L’expression « ville nouvelle » est progressivement prise au pied de la lettre. Face à
l’opinion politique et à l’opinion publique, on juge les villes nouvelles à l’aune de l’image
classique de la « ville ». En particulier, la distinction stratégique entre « desserte » et
« accueil » qui était au cœur du projet des villes nouvelles n’est plus de mise. Une « ville », ça
doit être autonome et diversifié ; ça doit offrir toutes les fonctions à ses habitants et surtout,
du travail. Or, pour Xavier Debertrand, qui transcrit les propos de l’Élysée : « Nos
responsables ont pu observer sur place au cours de visites des réalisations en cours que l’idéal
n’est pas atteint : à savoir assurer du travail pour la grande majorité de la population sur place.
A l’heure actuelle, 60% de la population active travaille au-dehors…65 % des habitants vont
se distraire ou se cultiver à Paris » 15 , (Carmona, 1980). Michel Poniatowski déclare devant le
Conseil d’Administration du District le 9 juin 1975 que « le gouvernement a décidé de
réaffirmer la priorité reconnue aux villes nouvelles, et fait préparer un programme qui
permette d’y accueillir environ 600 000 habitants d’ici 1985. (.…) Ce n’est qu’à ces
conditions qu’elles pourront devenir des centres urbains équilibrés et autonomes et que la
densification du reste de la région sera évitée ». La nouvelle politique à l’égard des villes
nouvelles conduit le gouvernement à renforcer la priorité dont elles bénéficient « pour
accélérer le rythme et parvenir au plus vite à l’objectif recherché » selon Carmona. L’objectif
de l’Action N°1 du Programme d’Action Prioritaire national N°21 est ainsi défini : « Faire des
cinq villes nouvelles de la Région d’Île-de-France des cités vivantes, de dimension
raisonnable et pouvant assumer elle- même leur avenir».
Cette position de l’Etat qui s’inscrit dans le contexte de crise économique et de chute de la
fécondité se trouve confortée par celle de différents élus locaux. Ainsi, en 1977, M.
Bonnefous 16 énumère les différents échecs des villes nouvelles, (Fourcade et Bonnefous,
1977). Tout d’abord, « les migrations quotidiennes subsistent ». Ensuite, l’importance des
objectifs de population a conduit à dévitaliser le reste de la banlieue. Enfin, les villes
nouvelles sont trop près de Paris. Pour lui, les fonctions de centralité auraient plutôt dues être
diffusées vers Rouen ou Reims. Plus tard, lors des débats parlementaires de la loi Rocard,
d’autres élus locaux critiquent les villes nouvelles selon le même point de vue. Ainsi, à
15
16
L’Entreprise, 20 mars 1975
Sénateur des Yvelines et Président de la Commission des Finances au Sénat
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l’Assemblée Nationale 17 , en 1982, G. Malandain, parlant du cas de Saint-Quentin :
« L’équilibre habitat-emploi, qui était le principe justifiant ces pôles régionaux de
développement que sont les villes nouvelles, n’a pas été respecté. Les migrations quotidiennes
vers Paris mais également vers Saint-Quentin en sont la preuve tangible ». Au Sénat18 , en
1983, B Hugo 19 évoque le fait que les villes nouvelles « sont généralement mal vécues par les
habitants ; beaucoup parlent même d’échec (…). Ce qui est vrai, c’est qu’elles sont de taille
excessive par rapport aux villes nouvelles anglaises (…) trop proches de la capitale en ce qui
concerne celles de la région parisienne, qu’elles sont artificielles du fait même que leur
création ne s’impose pas en fonction de critères économiques et qu’il y manque des
équipements importants et indispensables ». Pour lui, elles « ne sont pas des villes (…) On n’a
pas jeté les fondements de la construction de véritables villes pouvant jouer le rôle de pôles
face à la croissance des grandes concentrations urbaines ». « Il est donc primordial, pour
l’avenir des agglomérations nouvelles, de modifier profondément l’orientation sur laquelle
repose leur développement ».
La logique des acteurs
Au stade de la mise en œuvre, un glissement progressif et compréhensible s’opère. La
fonction des villes nouvelles par rapport à l’ensemble de la région parisienne est perdu de vue
au profit de considérations plus « locales ». Pour les élus, qui, peu à peu, prennent pied dans
ces nouveaux espaces politiques, comme pour les aménageurs —quel que soit leur
attachement missionnaire au grand dessein initial— il s’agit bie n de « faire des villes ».
Techniciens et élus s’associent donc pour donner du corps à la notion de « ville ».
La convergence d’intérêts entre les élus et les EPA
Après s’être opposés au projet, les élus locaux ont eu « un rôle beaucoup plus dynamique
qu’on ne le présente généralement » dans la mise en œuvre de la politique des villes
nouvelles. « Devant l’irréversibilité du projet et aussi parce que certains élus ont pressenti ce
que les habitants pourraient gagner en services collectifs et en emplois nouveaux, les
responsables politiques locaux ont accepté de jouer la carte « ville nouvelle » et tenté
d’accroître leur influence par l’action de l’administration ». Les élus locaux ont cherché à
retirer le maximum d’avantages pour leur propre commune : « la greffe urbanistique ne put
dès le départ s’effectuer que par des négociations plus ou moins conflictuelles avec les élus
concernés » (M. Dagnaud, 1979). Les EPA, de leur côté, ont certaines fois soutenu les élus
contre une décision prise au niveau central. On assiste ainsi à une certaine convergence
d’intérêts entre EPA et élus. Pour Dagnaud, « la dépendance mutuelle EPA/SCA20 (…) oblige
à la négociation. Cette négociation s’impose d’autant plus que, dans la période récente, élus et
techniciens sont en que lque sorte "dans un même bateau" que l’Etat aimerait bien laisser
naviguer seul (…) ils sont mus par un objectif commun : le modèle urbain "Ville nouvelle" ».
« Il semble donc qu’au système étatique autoritaire se soit substitué un système plus classique
de bargaining entre les décisions de l’Etat central et la volonté des élus locaux ».
17
JO Débats parlementaires Assemblée Nationale du 07.10.82, séance du 06.10.82.
JO Débats parlementaires Sénat du 21.04.83, séance du 20.04.83.
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maire de Trappes
20
Syndicat communautaire d’aménagement
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
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Le tropisme de l’aménageur : « faire la ville »
Les architectes ont pris le pouvoir et ont mené en villes nouvelles de grands projets qui ont
fait de ces dernières des laboratoires de l’innovation architecturale. Selon Léger (1997),
« dans les années soixante-dix et au début des années quatre-vingt, les villes nouvelles
occupaient fréquemment les pages des revues d’architecture ». Le logement social en villes
nouvelles était « à l’avant-garde de l’architecture : la monumentalité néo-classique ou néomoderne a laissé des images fortes, tandis que le théâtre des politiques d’innovation du
ministère a mis en scène une diversité souvent jugée excessive ». « Comme elles ont souvent
été un terrain d’expérimentation architecturale et urbaine, elles doivent simultanément
matérialiser des images globales, identitaires. Le paradoxe des études ponctuelles est qu’elles
contribuent à renforcer l’image de ville- laboratoire ».
Selon Léger, el s villes nouvelles ont également fait appel à des artistes « dans les années
soixante-dix pour intervenir globalement sur l’aménagement de quartiers entiers, suivi de la
commande d’œuvres plus monumentales dans les années quatre- vingt, dont l’Axe majeur de
Cergy est la plus ambitieuse ». L’idée de l’Axe majeur remonte à 1975. Il s’agit d’un
« parcours monumental de trois kilomètres dessiné à partir de 1980 par le sculpteurpaysagiste Dani Karavan ». A propos de l’intégration de l’art à l’espace urbain, pour JE
Roullier, ceci répond à « l’ambition majeure, (au) rêve secret, de réconcilier la ville avec notre
temps, de retrouver le secret perdu de la construction d’une ville accueillante à tous,
stimulante, agréable à vivre » 21 .
Les changements d’échelles de la mise en œuvre
De l’aménagement régional à l’aménagement urbain
En passant à la phase de réalisation, le projet est passé du domaine de l’aménagement du
territoire à celui de l’aménagement urbain. Le schéma directeur de 1965 visait initialement à
organiser l’extension urbaine de l’agglomération parisienne par la création de centres urbains.
Ce projet a logiquement évolué vers une politique d’aménagement urbain. Au fur et à mesure
de leur développement et de l’arrivée de nouvelles populations, les villes nouvelles ont
cherché à satisfaire les besoins de la population locale. B. Hirsch (Directeur de l’EPA de
Cergy-Pontoise jusqu’en 1975) explique que « pendant des années, je me suis efforcé
d’obtenir que les urbanistes négligent un peu les grands desseins pour se soucier de questions
terre-à-terre ». « J’ai toujours accordé plus d’importance aux opinions des habitants qu’aux
jugements des techniciens ». (Chenu, 1994). A la fin des années 1970, la population nouvelle
développe « un intense mouvement associatif, qui exprime l’originalité de leur situation et de
leurs besoins », (Guyard, 1982). J. Guyard considère que « il appartient aux élus locaux de
décider comment cette population sera accueillie, quels équipements on construira, quel
urbanisme on choisira, etc… ». Les élus « sont, et le seront encore plus en 1983, les porteparoles d’une population nouvelle majoritaire » 22 .
21
JE Roullier (1978), préf. à L’art et la ville-Art dans la vie. L’espace public vu par les artistes en France et à
l’étranger depuis dix ans, Paris : La Documentation française.
22
Maire d’Evry. On peut d’ailleurs souligner combien cette représentation de la « demande sociale » est au
moins aussi construite que celle portée par le district de la Région Parisienne : il n’est pas certain que la demande
sociale s’exprime aussi nettement en faveur de la construction de « vraies villes », alors même que les pratiques
sociales incorporent toujours plus de mobilité. L’opposition entre une demande « d’en bas » et une demande
« d’en haut » fait classiquement partie des arguments échangés dans les négociations politico-administratives. Il
ne faut pas voir plus de « réalité » dans l’une que dans l’autre. Il se trouve, en la circonstance, que la
représentation de la demande «d’en bas » a enfourché la ville comme cheval de bataille —alors que la
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L’augmentation des pouvoirs des élus locaux avec la décentralisation et la loi Rocard a fait
craindre à certains que les villes nouvelles perdent définitivement leur rôle dans
l’aménagement régional. Ainsi, en 1982, M. Rousselot23 souligne que la décentralisation « ne
doit pas être l’exacerbation des particularismes locaux ni le foisonnement de politiques de
clochers ». « Il faudra affirmer le caractère national et régional des projets (…) Cette
affirmation entraînera obligation pour les communes de respecter ce projet national et/ ou
régional dans leurs schémas d’aménagement et dans leurs plan d’occupation des sols ». Pour
P. Pommelet (1989), les responsables sur le terrain doivent poursuivre activement une
politique volontariste de développement car selon lui, la tentation de « retrouver le confort du
droit commun » est forte.
La logique centre/périphérie : des agglomérations nouvelles
Ce processus naturel de recentrage de la conception urbaine des programmes d’aménagement
se traduit notamment par l’imposition, dans la mise en œuvre des villes nouvelles, de schémas
classiques. En particulier, les producteurs de villes nouvelles n’échappent pas au schéma
opposant un centre dense à une périphérie plus clairsemée. En 1997, Fouchier, étudiant les
densités des villes nouvelles, constate que « la plupart des villes nouvelles ont été planifiées
comme des agglomérations nouvelles : elles ont toutes une ou plusieurs communes de plus
forte densité, aux fonctions centrales, autour desquelles on a disposé les urbanisations de
faible densité ». Le cas de Cergy-Pontoise constitue un exemple de cette logique. Au départ,
plusieurs centres urbains avaient été prévus. Lors du dernier Schéma Directeur de Cergy
(2000), le SAN ne propose plus qu’un seul centre. Les élus cherchent à structurer
l’agglomération : selon eux, les besoins de développement pour l’agglomération sont « des
besoins de structuration à l’échelle de tout son territoire comme à celle des communes et des
quartiers, ainsi que des besoins de rééquilibrage géographique des grandes fonctions
urbaines ». Ils souhaitent d’une part rétablir l’équilibre entre habitat et emploi au sein de
l’agglomération : « Les choix initiaux de développement de l’agglomération nouvelle ont
conduit à concentrer les activités économiques principalement à l’Est du territoire tandis que
les secteurs d’habitat en occupent plutôt la partie Ouest ». « Cette orientation qui a permis de
conférer aux secteurs de développement économique une parfaite lisibilité doit aujourd’hui
évoluer vers un meilleur équilibre géographique entre les deux grandes fonctions urbaines
(…) (pour) inscrire durablement la mixité urbaine ». D’autre part, la révision du schéma
directeur vise à « renforcer et dynamiser » la centralité d’agglomération. Pour réaliser « une
centralité d’agglomération bien équipée », le projet est de mettre en relation les pôles de
Cergy-Préfecture et de Pontoise. Ce dernier « constitue, au cœur de l’agglomération nouvelle,
une référence à la ville traditionnelle et à l’histoire urbaine du site ». Les élus souhaitent
« établir un lien structurel fort entre les deux centres par la constitution d’un véritable tissu
urbain dense ancré sur chacun d’eux ».
représentation « d’en haut » —celle des centres urbains— correspondait en fait sans doute mieux aux pratiques
spatiales des habitants.
23
Directeur de l’EPA de Marne-la-Vallée
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Les conséquences territoriales : des villes moyennes en Île-de-France
Une logique d’équipement de la ville et de services aux habitants plus que de desserte du
territoire
On ne prendra qu’un seul exemple, mais, à notre sens, significatif du déplacement de logique.
Il s’agit des équipements universitaires.
La décision de réaliser des universités en région parisienne dans les villes nouvelles en 1991
lors du plan Universités 2000 est apparue pour certains comme le dernier surgissement de
l’exception villes nouvelles, les universités étant un des équipements "uniques" dont les villes
nouvelles devaient être dotées à l’origine pour pouvoir constituer des pôles urbains
importants. Cependant, la réalisation de ces équipements peut être également interprétée
comme une prise de consistance de la logique ville, les universités étant aujourd’hui de plus
en plus considérées comme un élément d’urbanité.
Une logique de centralité locale
Tout d’abord, les universités nouvelles ont plutôt une logique de centralité locale de proximité
et ne sont pas véritablement des éléments d’un système régional. Selon M Bedarida, D.
Leglart et L. Schlumberger-Guedj (1997), l’objectif du plan U2000 en Ile-de-France était de
maîtriser « la dissémination des antennes universitaires et (de) soulager la situation critique
des universités de Paris intra- muros sans nuire à leur développement ». Mais, selon A.
Richard, l’objectif au départ n’était pas de créer des universités autonomes : « les réflexions
visaient alors à créer des "entrepôts universitaires" chargés d’offrir, par exemple, des seconds
cycles de "secours" permettant de désengorger les filières les plus chargées des universités
parisiennes ». « De nombreux élus du Val d’Oise se sont vite concertés pour aller plus loin, et
tout mettre en œuvre pour créer de véritables structures d’accueil indépendantes des
établissements d’enseignement supérieur situés dans la capitale ». (A. Richard, en tant
qu’ancien président du SAN de Cergy, in Allez savoir, oct. 2001). Le projet U2000 a ainsi
fixé comme objectif de « créer des universités à part entière ». Pour M Bedarida, D. Leglart et
L. Schlumberger-Guedj (1997), cette « aventure universitaire fut donc le "souffle" des années
90 qui les (les villes nouvelles) empêcha de stagner (…) en assurant à ces agglomérations la
présence d’un équipement universitaire de prestige, promis dès 1965, peut apparaître comme
une des dernières actions d’envergure de l’Etat avant que ces dernières ne perdent leur statut
spécifique ». Selon l’IAURIF (1998), les universités « renforcent le rôle de pôle d’équipement
des villes nouvelles ».
Selon M Bedarida, D. Leglart et L. Schlumberger-Guedj (1997), les universités en villes
nouvelles ont permis d’assurer « une meilleure répartition des effectifs ». Mais, elles n’ont pas
véritablement désengorgé les universités parisiennes :« les universités intra- muros ont vu leur
effectif stagner mais non baisser comme il était escompté ». 50 000 places des universités
intra- muros devaient être supprimées. La réalisation de ces équipements structurants que sont
les universités se traduit finalement plus par une centralité locale que par une centralité à
l’échelle régionale. Selon M. Garnier, « les universités des villes nouvelles recrutent
essentiellement dans leur environnement géographique proche et très peu d’étudiants
proviennent du grand bassin parisien » (Garnier, 1995).
M Bedarida, D. Leglart et L. Schlumberger-Guedj (1997) relatent l’implication des
collectivités locales dans le projet U2000. Ceci montre ce que chacune attend de la création de
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ces universités. Pour le conseil général du Val d’Oise, le projet constitue « l’élément
manquant au parachèvement de la ville nouvelle et du développement du Val d’Oise ». Au
contraire, le Conseil général de l’Essonne émet une grande réserve pour ce projet car il
dispose déjà d’une université dans le département (Paris 11). Selon J. Rueff, en 1992, Evry
comptait sur l’université d’Evry-Val d’Essonne pour « hausser le niveau général de formation
de ses habitants » et permettre une meilleure adéquation avec les besoins des entreprises.
Selon M Bedarida, D. Leglart et L. Schlumberger-Guedj (1997), les élus souhaitaient « attirer
en priorité les résidents de la ville nouvelle et créer une université de centre-ville à taille
humaine ». Mais, l’université ne répondra pas aux attentes des résidents « compte tenu des
filières essentiellement scientifiques alors que la majorité des bacheliers sont des littéraires ».
Lors des 10 ans de l’université de Cergy, différents acteurs de la ville nouvelle ont tiré un
bilan de l’université (in Allez savoir, 2001). Pour A. Richard, « l’université de Cergy-Pontoise
joue pleinement son rôle d’oxygénation locale ». Pour G. Tchivitdji (président de la
délégation Val d‘Oise de la CCI Versailles-Val d’Oise-Yvelines), « sans l’université, le Val
d’Oise ne pourrait être considéré comme un département à part entière (…) Les retombées du
développement universitaire sont extraordinaires. Enfin, il est possible de former de futurs
cadres en nombre, habitant le Val d’Oise, pour qu’ils travaillent dans le Val d’Oise avec les
entreprises du Val d’Oise ». Pour D. Gillot (première vice-présidente du SAN et Conseillère
générale du Val d’Oise), l’université « a également permis aux jeunes du Val d’Oise
d’accéder à des études supérieures près de chez eux, ce qui a facilité ainsi la vie étudiante de
beaucoup d’entre eux et valorisé, crédibilisé le Val d’Oise et l’agglomération nouvelle dans
leur rapport à la capitale ».
Le dernier Contrat de Plan Etat-Région (2000-2006), dans son volet universités, ne donne pas
de rôle au niveau régional pour les universités des villes nouvelles. Par contre, il prévoit la
« création de nouveaux pôles universitaires complémentaires intégrés dans les grands projets
urbains », alors que les universités des villes nouvelles avaient pour fonction de désengorger
les universités de la région parisienne. Et, l’un de ces nouveaux pôles, le pôle nord francilien,
« vise à constituer un pôle de rayonnement international » alors qu’aucun rôle précis n’est
assigné aux universités des villes nouvelles.
Une logique d’urbanité qui se renforce
En réalité, ces universités ont contribué à faire des villes nouvelles des vraies villes. C’est ce
qu’affirme D. Gillot (in Allez savoir, oct. 2001), « l’université a participé à faire de Cergy une
vraie ville ».
Pour JP Alduy (in AFVN, 1991), l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines « met
en scène cette nouvelle agglomération qui va structurer l’espace de la région parisienne ». Elle
sera réalisée à Saint-Quentin selon la dialectique suivante : « l’université dans la ville et la
ville par l’université ». Ainsi, l’université sera d’une part implantée au contact du centre
existant et d’autre part, dans une zone anticipant l’extension du centre. Pour G. Carrez24 (in
AFVN, 1991), « les universités ne sont pas uniquement un service, un lieu d’enseignement,
mais aussi un moyen d’affirmer et de renforcer l’identité et l’enracinement qui sont en train de
se développer en ville nouvelle ». Elles vont être « le point de départ des villes nouvelles ». J.
Rueff estime pour Evry que « les futurs universitaires feront vivre la ville ». « L’achèvement
de ce dernier morceau de ville en plein cœur d’Evry marquera sans aucun doute son entrée
définitive dans l’âge de la majorité ». (J. Rueff, 1992).
24
secrétaire général du Groupe Central des Villes Nouvelles
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42
M Bedarida, D. Leglart et L. Schlumberger-Guedj (1997) expliquent à quelle logique
répondent les emplacements retenus pour les universités dans les différentes villes nouvelles.
Ainsi, à Cergy-Pontoise (les Chênes) et à Evry (à côté de la cathédrale), les emplacements
viennent « conforter le centre auquel ils apportent une diversification des fonctions, un
nouveau type de population, une animation et une aura qui lui faisaient défaut ». A Marne- laVallée (cité Descartes) et à Cergy-Pontoise (Saint-Martin et Neuville), « les équipements
universitaires sont appelés à la rescousse pour aider au lancement ou au développement de
nouveaux quartiers ». F. Bouchard 25 (in Allez savoir, oct. 2001) considère que l’université
« est aussi un projet urbain (…) construire un établissement public au cœur même de la cité,
pour qu’il soit l’un des moteurs du développement urbanistique. La théorie fonctionne dans la
pratique, puisque que les étudiants qui circulent dans la ville sont aujourd’hui l’un des
vecteurs essentiels de l’animation urbaine ».
L’enseignement supérieur à Marne- la-Vallée constitue un cas à part. Pour M Bedarida, D.
Leglart et L. Schlumberger-Guedj (1997), dès 1965, l’objectif était de : « constituer le
pendant, à l’est, de Nanterre dans les domaines scientifiques ». En 1983, c’est le comité
interministériel d’aménagement du territoire qui décide le principe de la cité Descartes : « un
projet ambitieux qui vise à initier une forte synergie entre la recherche, l’industrie et
l’enseignement ». Elle regroupe de très grandes écoles. Dans ce cadre, l’université ne répond
pas à la même logique que les universités des autres villes nouvelles. Ce projet contribue à
conforter le statut de la ville nouvelle comme pôle de l’Est, voire comme centre d’envergure
européenne. En 1993, le XIème Plan de la ville nouvelle faisait figurer l’université parmi « les
projets régionaux à rayonnement national ».
Les villes nouvelles acquièrent les signes extérieurs des « vieilles villes »
Les villes nouvelles, avec le temps, acquièrent une complexité sociale et spatiale qui leur
confère un statut de « vraie ville » : elles ne sont plus seulement une étape dans un parcours
résidentiel mais elles peuvent aussi offrir une diversité suffisante pour que s’orga nise, en leur
sein, la mobilité résidentielle ; elles connaissent des processus de différenciation sociale et
spatiale qui entraînent des phénomènes de ségrégation et —consécration suprême ?—
l’inscription de certains quartiers dans la géographie prioritaire de la politique de la ville.
Des parcours résidentiels en ville nouvelle
Une étude de Fouchier et Mirande (1999) de la population des logements neufs en villes
nouvelles sur la période 1990-1997 établit que les villes nouvelles connaissent elles aussi des
parcours résidentiels internes. En effet, un tiers des ménages des logements neufs habitaient
déjà leur ville nouvelle. « Les villes nouvelles atteignent une certaine maturité et témoignent
d’un attrait pour les ménages qui y résident ». Ce chiffre témo igne d’une proportion élevée de
migrations internes. Cette étude met également en évidence « une grande ressemblance
globale d’une ville nouvelle à l’autre tant par les caractéristiques de logements neufs que pour
celles de leur population ».
L’étude de E. Korsu (2001) sur les dynamiques d’inégalités et de pauvreté dans les villes
nouvelles d’Ile-de-France confirme ce constat en montrant des « tendances à l’agrégationségrégation » dans les années 1990. Après une homogénéisation massive du niveau de vie
dans les années 1980, on observe des mouvements résidentiels à l’intérieur des villes
nouvelles. Les flux de nouvelle population sont moins importants dans les années 1990. C’est
à l’intérieur des villes nouvelles qu’on constate des mouvements de population. Ainsi, pour
25
Ancien DG de l’EPA Cergy
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
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Korsu, les années 1990 correspondent à « une nouvelle phase où les flux sont moins massifs
et où les dynamiques sont plus subtiles et moins indifférentes socialement et spatialement ».
L’apparition de la ségrégation
Korsu (2001) indique des tendances à la ségrégation dans les villes nouvelles. Dans chaque
ville nouvelle, une ou plusieurs communes « concentrent dans des proportions importantes les
populations fragiles et défavorisées, tandis que ces mêmes populations sont plus rares, sinon
existantes dans d’autres communes ». Il indique même que chaque ville nouvelle « inclut une
ou plusieurs des communes les plus extrêmes de la région parisienne en terme de
concentration de la pauvreté ». Examinant les villes nouvelles autour de la question des
inégalités sociospatiales aux différentes échelles, il note que « dans les années 1990, le
rattrapage en termes de profil social qu’a effectué la ville nouvelle par rapport à sa périphérie
ou à la région s’est fait au prix d’un creusement des inégalités de revenus entre communes au
sein de la ville nouvelle ».
Selon D. Béhar (1991), « avec le temps, la ville se diversifie socialement, fonctionnellement
et spatialement ». Pour P. Beckouche (1999), les villes nouvelles connaissent également « des
tendances à "l’évasion résidentielle" avec des signes de ségrégation socio-spatiale ». A Cergy,
le SAN a mis en œuvre « une stratégie globale concourant à lutter contre la ségrégation
urbaine et sociale » (Schéma directeur, 2000). Le phénomène de dévalorisation de certains
quartiers touche à la fois le logement et les populations, et indirectement les activités et les
équipements. « La structure de la population tend vers un appauvrissement et contraste avec
le tissu économique local ». Un des objectifs de la révision du schéma directeur était
« d’assurer, dans le respect des équilibres sociaux et notamment de la diversité de l’habitat, le
développement urbain de l’agglomération pour répondre aux besoins des populations
résidentes et renforcer l’identité de Cergy-Pontoise ». Pour cela, une des actions prévues par
le nouveau SD est : « l’amplification des opérations de restructuration et de requalification
urbaine dans les quartiers les plus anciens et les plus fragilisés, afin de stopper et prévenir les
désordres urbains majeurs ».
Certains sites des villes nouvelles relèvent de la politique de la ville
En 1992, L. Zylberberg indiquait que les villes nouvelles connaissaient des problèmes
sociaux mais que certaines d’entre elles « se refusent à adopter des procédures de
« développement social des quartiers » pour ne pas brouiller leur image ». Depuis, d’autres
auteurs ont également soulevé cet aspect des villes nouvelles. Selon Béhar et Epstein (1998),
les quartiers en difficultés se trouvent au centre des villes nouvelles. Ces quartiers centraux
« voient se superposer deux types de manifestation urbaine des problématiques sociales : un
espace de fragilité socio-économique lié à la fonction résidentielle de la ville nouvelle dans la
métropole, et un espace d’incivilité lié à la centralité dans l’agglomération ». Pour Béhar et
Epstein, ces quartiers en difficulté sont le signe « d’une réussite » des villes nouvelles : « la
puissance publique est parvenue à constituer ex nihilo de vraies villes, des lieux de
polarisation spécifiques dans la métropole, toutefois marqués par des phénomènes de
valorisation et de dévalorisation communs à l’ensemble des villes ».
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
CONCLUSION :
UNE TENSION PRODUCTIVE, OU LA SPECIFICITE DES
VILLES NOUVELLES EN ILE-DE-FRANCE
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
45
On peut donc relire l’histoire des villes nouvelles en région parisienne comme celle de la
tension entre deux référentiels et deux échelles : un référentiel et une échelle régionale —celle
des « centres urbains » originaux ; un référentiel et une échelle « locale » celle des « villes
nouvelles », l’expression étant prise au pied de la lettre. Ce qui fait la spécificité des villes
nouvelles au terme ( ?) de ce parcours, c’est bien la combinaison singulière de ces deux
référentiels. Conçues comme des centres urbains dans une perspective d’aménagement
régional, elles ont grandi et mûri comme des villes, dans une perspective largement
autocentrée. Les interférences de ces deux logiques peuvent constituer une grille de lecture de
la situation actuelle des villes nouvelles dans l’espace francilien, et dessiner la figure inédite
de « villes de métropole », qui ne sont ni tout à fait de simples « pôles » spécialisés (à la
différence de la Défense, de Roissy ou de Saclay par exemple), ni des buttes témoins
nostalgiques de la ville moyenne presque provinciale (comme Meaux, Melun ou Etampes), ni
non plus des communes de banlieue, aussi identifiées soient-elles (comme Saint-Denis par
exemple).
Pour autant que l’on accepte cette spécificité résiduelle —ce qui ne serait pas un mince
hommage rendu aux concepteurs et aux producteurs des villes nouvelles— s’agit- il d’une
catégorie d’objet susceptible de jouer un rôle particulier dans les dynamiques franciliennes,
ou bien les villes nouvelles —installées dans ce statut hybride de villes de métropole— ontelle achevé leur « mission » historique ?
Des combinaisons singulières
L’agencement en continu des référentiels "centres urbains" et "villes nouvelles" a conduit à
des combinaisons particulières pour chaque ville nouvelle.
Sai nt-Quentin-en-Yvelines, diluée dans le système
« Entre Saint-Quentin et la proche banlieue Ouest, il faut parler d’intégration : les activités et
les entreprises sont les mêmes, les marchés du travail sont intersectés », (Beckouche P.,
Damette F. et Vire E, 1997). La ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines a bénéficié « de
sa localisation sur l’axe de développement naturel de l’agglomération parisienne vers
l’ouest » selon Alduy, (C. IAURIF, 1989). Ses succès économiques ont permis son
développement. Ainsi, Y. Draussin considère qu’elle ne doit « peut-être, qu’à la seule et
brillante montée en puissance de sa fonction tertiaire, la reconnaissance de sa réalité »,
(AFVN, 1996). Son centre s’est réalisé tardivement. Avant sa réalisation, la ville nouvelle
avait une image négative selon lui. En 1999, pour Chevalier, elle bénéficie d’une bonne image
de marque, de la proximité de La Défense et des centres d’affaires des Hauts-de-Seine. Selon
lui, « située en grande couronne ouest, elle n’est pas, pour l’instant, confrontée aux mêmes
problèmes sociaux que connaissent Cergy ou Marne- la-Vallée ». P. Beckouche relevait en
1999 qu’elle se distingue de plus en plus des autres villes nouvelles du point de vue des
revenus et du taux d’encadrement de l’emploi (de manière positive). Par contre, « ses revenus
moyens sont de plus en plus loin de la moyenne des Yvelines ». Son cadre de vie est apprécié
et constitue un facteur d’attraction pour les entreprises afin de loger les cadres moyens et
supérieurs de l’entreprise. J. Bellanger 26 (sénateur) estimait en 1991 que : « les villes
nouvelles présentent le grand avantage d’éviter un mitage encore plus grave du territoire, en
particulier dans le département des Yvelines. A voir les difficultés qu’éprouvent les maires
26
JO débats parlementaires Sénat du 15.11.91, séance du 14.11.91
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La place des Villes Nouvelles dans le système métropolitain francilien
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des communes rurales à maîtriser leur urbanisation, on peut se demander ce qui se serait passé
si la ville nouvelle de Saint Quentin n’avait pas existé ». Saint Quentin apparaît ainsi comme
la ville nouvelle la moins exceptionnelle. Très intégrée au système métropolitain, elle est le
reflet de la spécialisation et du dynamisme économique de son quadrant. Comme partout en
Ile de France, elle est marquée par la disjonction tendancielle entre son profil économique et
son profil social.
Marne -la-Vallée, élément du système régional
La ville nouvelle n’apparaît pas vraiment comme un centre urbain, ni comme une ville. Pour
C. Huertas (in AFVN, 1996), « Marne- la-Vallée n’est pas une ville à proprement parler (…)
mais un espace de restructuration de la banlieue parisienne conçu autour et à partir d’un mode
de transport en commun ». Pour ACADIE et l’ŒIL (IUP-ŒIL, ACADIE, 1998a), la volonté
de polarisation du développement urbain « conjuguée au parti d’aménagement linéaire », pour
le cas de Marne-la-Vallée, semble mise en échec. Dès 1965, le SDAURP confiait un rôle
particulier à la ville nouvelle puisqu’elle devait rééquilibrer la région parisienne à l’ouest. En
1994, la ville nouvelle est classée parmi les centres d’envergure européenne par le SDRIF.
Selon celui-ci, l’atout de la ville nouvelle réside dans son offre d’une « gamme très diversifiée
de services, grâce notamment au pôle tertiaire Marne- la-Vallée Porte de Paris, au pôle
scientifique de la Cité Descartes et au pôle de Marne- la-Vallée Val d’Europe, premier
complexe tour istique européen, qui sera desservi par le TGV ». « Les capacités de
développement de Marne- la-Vallée tant sur le plan économique qu’urbain, la diversité de ses
fonctions, la multiplicité de ses liaisons vers les autres pôles d’excellences, font de ce site un
atout majeur de la région et de son équilibrage à l’est ».
Marne- la-Vallée comprend plusieurs centres. Pour S. Beauvais, cette multipolarité est une
volonté politique (in AFVN,1996). Huertas considère que la ville nouvelle « tire un trait
d’union sur tout un territoire , bouleversant sur son passage les anciens modes de vie ». « A
mesure qu’elle se développe, Marne- la-Vallée fonctionne par polarisations successives qui
viennent, non pas contrer le processus de desserrement mais l’accompagner », (IUP-ŒIL,
ACADIE, 1998a). A l’intérieur de la ville nouvelle, le développement n’est pas homogène.
Celle-ci s’est développée progressivement d’ouest en est. Selon le XIIème plan (1998), les
vocations spécifiques des différents centres sont les suivantes : pôle tertiaire aux Porte de
Paris, complexe de recherche à la Cité Descartes, station touristique à Disney et site d’accueil
international au Val d’Europe. Les premier et dernier secteurs ne sont pas au même niveau de
développement. Le XIIème Plan de la ville nouvelle souligne que « une différenciation de
plus en plus nette est apparue entre la dynamique très forte créée en grande couronne par le
projet Euro-Disney, et la poursuite plus contrastée des grands projets de petite couronne
dépendant en grande partie des grosses implantations décidées par les pouvoirs publics ».
« Ce sont principalement les communes de la petite couronne de Marne- la-Vallée qui sont
confrontées aux effets de la crise économique dans leurs quartiers à forte concentration
d’habitat social, marqués par la jeunesse de la population ». Chevalier (1999) remarquait
parmi les faiblesses de la ville nouvelle : « à l’ouest de la ville, le logement social est trop
dominant et dessert l’image auprès des entreprises ». Pour Beckouche (1999), « le pôle
tertiaire de Noisy doit renforcer son rôle structurant et apporter une réponse à la fuite
résidentielle… (l’urbain existant) présente des poches de paupérisation et de précarité ». « A
l’autre extrémité de la ville nouvelle, le secteur IV est particulier : il a vocation à rayonner sur
une large aire urbaine environnante (grand Est parisien composé de villes moyennes comme
Meaux, de bourgs et de villages) ». Elément majeur du système à l’échelle métropolitaine,
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Marne la Vallée « disparaît » lorsqu’on change d’échelle —ne serait-ce qu’au niveau du
quadrant Est.
Cergy-Pontoise, un centre urbain arrivé à maturité et une logique ville qui prend le
dessus
Dès 1993, V. Bathellier et JP Birchen considéraient que « sa problématique actuelle est axée
sur la préserva tion de ses acquis et l’adaptation de son habitat aux besoins nouveaux qui
émanent d’une population en quête d’un cadre de vie champêtre aisément accessible en
dehors de la ville ». Selon Beckouche (1999), Cergy présente « les niveaux sociaux et
économiques les plus élevés » après Saint-Quentin-en-Yvelines. Il estime que comme SaintQuentin, cette ville nouvelle arrive à maturité. Pour Chevalier (1999), Cergy-Pontoise
bénéficie d’une forte concentration de PME-PMI, de la proximité de Roissy et de la présence
d’une université et d’écoles comme l’ESSEC. Mais, pour lui, l’évolution de la ville nouvelle
au cours des années 90 est plus préoccupante : « l’absence de politique et de discours sur
l’aménagement du territoire est considérée comme inquiétante, car un non-développement de
l’activité économique risque à court terme de créer des déséquilibres emploi-habitat ». Gollain
et Sallez (1999) ont établi plusieurs scénarios concernant la localisation future de l’emploi en
Ile-de-France. Dans le scénario d’une « polynucléarité hiérarchisée » en Ile-de-France, Cergy
se verrait « fortement concurrencée par d’autres territoires, mais pourrait bénéficier
d’opportunités liées à sa vocation renforcée de pôle d’enseignement supérieur et à sa
proximité de Paris et de Roissy ». Cette concurrence serait encore plus marquée en période de
ralentissement économique. « Pour aborder l’avenir, la ville nouvelle bénéficiera de la
concentration actuelle des PME-PMI, de sa proximité de Roissy et de la présence d’une
université complète et de grandes écoles ». Cependant, pour eux, la ville nouvelle a des
handicaps à son développement : « l’inadaptation d’une partie de l’immobilier d’entreprises,
la trop forte concentration par endroits de logements sociaux et le niveau élevé des taxes
locales ». Chevalier souligne également le fait que des bâtiments ne répondent plus aux
contraintes des entreprises et que dans certains quartiers, la trop forte concentration de
logements sociaux « ne favorise pas le développement de l’image de marque de certaines
entreprises ». Il remarque aussi la présence de troubles sociaux importants.
A tous points de vue, c’est bien la logique de « ville », avec tous ses avatars, qui semble
prendre le dessus.
Evry, à la fois ville et pôle d’emploi
En 1992, J. Rueff annonçait : « Evry a conquis ses galons de ville ». « De ville nouvelle : elle
est devenue une ville ». M. Mottez (AFVN, 1996) rappelle que pour le centre d’Evry « la
multifonctionnalité était une règle ». Ainsi, l’Agora symbolisait cette volonté de
diversification. Par la suite, l’université a été conçue comme « un quartier à "couleur"
universitaire » et non comme « un campus universitaire ». Parmi les points forts de la ville
nouvelle, mis à part son environnement, Chevalier (1999) cite son université et le fait que la
ville soit presque achevée : « image forte avec la présence de la cathédrale ». Cependant, Evry
en tant que ville comporte aussi des points faibles en matière d’attraction : « comme à CergyPontoise, image urbaine médiocre dans plusieurs quartiers, et notamment au centre ville ».
Selon Beckouche (1999), « la ville nouvelle d’Evry polarise bien l’emploi (premier pôle
d’emploi du département de l’Essonne) ». « Elle polarise fortement un premier bassin resserré
autour de Corbeil- Essonnes et Ris-Orangis ». Au delà, c’est plus un phénomène de péri-
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urbanisation. L’habitat y est « essentiellement peu dense et consommateur d’espace ». Ceci
est lié « au raz-de-marée motorisé » selon G. Dupuy et M. Thébert (1998). Avec
l’automobilisation, « par densification, extension et mitage, l’urbanisation a progressivement
entouré Evry ». Pour les auteurs, « les habitants de cette périphérie, fortement motorisés, se
trouvent attirés par des pôles extérieurs, compromettant ainsi l’émergence de centres urbains
secondaires en ville nouvelle ». Ainsi, si Evry —reconnue comme « ville » par la plupart des
observateurs— apparaît comme un pôle d’emploi incontestable, sa fonction de pôle de
services semble moins évidente.
Sénart : une centralité à venir?
Pour F. Tirot (AFVN, 1996), « l’enjeu, c’est aujourd’hui d’atteindre le rang d’une ville à part
entière » en se dotant d’un centre. Selon Beckouche (1999), « à Sénart, la polarisation reste à
faire (…) une centralité urbaine inexistante ». Pour Beckouche, son enjeu est « un meilleur
ancrage économique dans son territoire et vers l’Essonne, par une liaison de transport collectif
en site propre Evry-Melun et le renforcement des synergies universitaires, économiques et
dans la recherche ». Concernant, l’évolution des revenus et de l’emploi, celle de Sénart est
selon lui « la plus inquiétante » : effondrement des revenus, faible croissance de l’emploi et
plus faible progression de l’emploi-cadre. Les points faibles de la ville nouvelle selon
Chevalier (1999) sont son centre- ville inachevé et l’absence de secteur de « pointe » ou
d’entreprises très marquantes.
Au delà des villes nouvelles : quelles leçon pour l’action publique ?
Le processus mis en lumière ci-dessus est la forme locale que prend ce que l’on a appelé la
« banalisatio n » des villes nouvelles. Cette banalisation est, pour la plupart des observateurs,
le signe paradoxal de leur réussite. Signe de leur réussite puisqu’elles s’enracinent comme de
« vraies » villes ou, du moins, prennent une place locale spécifique. Mais cette réussite est
paradoxale car elle se fait au détriment de la vision de niveau régional, consistant à traiter et
maîtriser les risques liés à la croissance, à l’engorgement, et au desserrement de la région
parisienne. D’où l’interrogation qui semble faire sens commun aujourd’hui : les villes
nouvelles ont réussi, chacune à sa façon, mais le projet villes nouvelles lui- même ? Or, à force
de trop focaliser l’attention sur les objets singuliers que représentent désormais les villes
nouvelles, on peut être conduit à réécrire l’histoire et à faire exister de manière artificielle une
catégorie qui ne signifie plus rien dans l’espace francilien. Autrement dit, pour reprendre
l’expression de Jacques Lévy, après avoir banalisé l’exception, faire le constat d’un
exceptionnelle banalité. Oui, on a réussi à construire des villes nouvelles entre 20 et 35 km de
Notre-Dame, et puis après ? En quoi cette réussite a-t-elle permis de traiter les enjeux de
niveau régional qui étaient à l’origine du programme ? En quoi la mise en œuvre de ce
programme a-t-elle contribué à faire évoluer les regards et les conceptions sur les formes du
développement urbain, économique et social de l’Île-de-France ? En quoi les méthodes
d’action publique développées dans le cadre des villes nouvelles ont-elles connu une
évolution de nature à leur permettre de traiter des enjeux apparus depuis lors, comme celui de
l’exclusion sociale, de la densification et du développement durable ?
C’est bien à une interrogation à cette échelle qu’invite le survo l bibliographique qui précède.
Au-delà d’un objet ou d’une catégorie, quels sont les référentiels d’action publique qui l’ont
promu ? En quoi ces référentiels et les méthodes mises en place étaient- ils pertinents par
rapport aux enjeux qu’ils prétendaient traiter ? En quoi ces référentiels et méthodes ont- ils pu
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s’adapter aux évolutions régionales ? Sont- ils encore, d’une manière ou d’une autre,
valables ?
Autrement dit, au-delà des villes nouvelles, c’est un questionnement de plus grande ampleur
sur les visées et les méthodes de l’intervention publique sur le territoire métropolitain qu’il
faut aujourd’hui aborder.
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BIBLIOGRAPHIE
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