Le jeu de rôle
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Le jeu de rôle
Un bout d’histoire On peut lier l’histoire du jeu de rôle à un évènement et à deux personnes. En 1966 paraît aux ÉtatsUnis un livre qui va marquer toute une génération (celle des geeks, notamment !): le Seigneur des Anneaux, de JRR Tolkien. Cette grande épopée, mettant en scène un monde médiéval où la magie est omniprésente, est le cadre d’affrontements dantesques entre peuples aux multiples races. Ces histoires d’elfes, d’humains et d’anneau unique ont crée une émulation. Et si on jouait ces batailles ? Gary Gygax, un étudiant, développe alors des figurines en plomb adaptées aux batailles épiques, un wargame. Mais cela ne le satisfait pas entièrement. Dans ses règles de wargame, Gary Gygax décide de proposer, outre la magie et le fantastique, la possibilité de démarquer un personnage d’une bataille. Avec son ami Dave Arneson, il créé une série de règles permettant d’interpréter n’importe quel personnage seul dans leur monde fantastique. Le jeu de rôle Par Benoît Evellin LOISIR EN DÉCLIN, OU INTERACTIVITÉ DE DEMAIN ? Le jeu de rôle est un passe-temps existant depuis plus de trente ans. Créé aux États-Unis par Gary Gygax et Dave Arneson afin de donner une vie à leurs personnages de jeu de figurines, ce nouveau type de jeu de société fait appel à des concepts inédits dans le monde ludique : jeu en équipe, sans adversaires physiques autour de la table, prédilection pour le jeu d’acteur des participants, possibilité d’enchaîner ad lib les parties, absence de finalité ou de but à atteindre... Basé sur l’interactivité et la convivialité, ce principe de jeu n’est pas pour autant répandu. Au contraire, il est souvent fustigé, à la fois par la méconnaissance de son véritable principe ou la médiatisation de ses dérives. Le rôliste[1] passe souvent pour en gentil cinglé aux pratiques douteuses (“notre marque de fabrique” diront certains avec humour[2]) ou, dans le pire des cas, pour un psychopathe adepte des réunions sataniques[3]. L’arrivée plus récente des jeux de cartes à collectionner ou des jeux sur ordinateur a continué à perturber le grand public. Mais en réalité, d’où vient-il, de quoi s’agit-il ? Et surtout, que devient-il ? Voici quelques réflexions d’un rôliste, à propos de la perception dans la société de son loisir favori... Ainsi naît en janvier 1974 Dungeons & Dragons, le premier jeu de rôle. Les mille boîtes de jeu, éditées dans le garage de Gary, eurent un succès immédiat : quel plaisir pour les joueurs de pouvoir gérer et interpréter leur personnage fantastique favori ! Face au succès, une édition améliorée fut proposée, par la suite sans cesse augmentée [4]. Le succès de Donj’, comme on l’appelle familièrement, fut le démarrage d’une véritable mouvance. De nombreux jeu de rôle furent créés, dans un style médiéval fantastique, puis dans d’autres style ; Traveller ouvrant les portes du space-opera… En France, l’arrivée du jeu de rôle est conjointe à celle de la génération geek, c’est-à-dire les années 80. Donjons et Dragons est un succès, bien entendu, mais c’est la traduction de L’Appel de Cthulhu, basé sur les romans d’horreur de H.P. Lovecraft, qui remporte un large succès en France contrairement aux États-Unis. Se développent alors de nombreux jeux amateurs, édités par quelques éditeurs spécialisés. La presse spécialisée se développe, tout comme les clubs. C’est le début «On ne va pas parler de…» Le jeu de rôle (JdR), on pourrait écrire des kilomètres de phrases sur son sujet, tellement il s’étend. Sans entrer dans les différentes chapelles qui le segmentent, on peut au moins réaliser quelques coupes franches. Ainsi, on ne parlera pas des livres dont vous êtes le héros, à l’interactivité limitée, des cartes à collectionner, qui ne permettent aucune interprétation libre, ni même des jeux sur ordinateur, bien que dans la même thématique, mais tellement linéaires [A]. On n’en parlera pas, car il ne s’agit pas de jeu de rôle, ni plus, ni moins [B]. Mention spéciale pour le jeu de rôle grandeur nature (le GN), où vous quittez votre canapé et la douceur d’une soirée entre amis pour le terrain, où vous interprétez « en vrai » le rôle qui vous a été attribué. On n’en parlera pas pour ne pas trop étaler le sujet, mais cela reste néanmoins du jeu de rôle, avec une dimension différente [C]. [1] Le rôliste, néologisme des années 90, est le pratiquant de jeu de rôle. Tout simplement. - Wikipédia, article sur le jeu de rôle. [2] Présentation du jeu In Nomine Satanis, Magna Veritas, In Nomine Satanis, Magna Veritas, Asmodée éditions – Juin 2003 [3] « Il faut les surveiller de près, si ils font du jeu de rôle. » - Inspecteur Lucas Fersen, dans Dolmen, saga estivale de TF1, 2005 [4] Donjons et Dragons existe toujours, la quatrième édition devant sortir en juin 2008, d’après le site de Wizards of the Coast, l’éditeur de D&D. [A] Malgré la liberté apparente et l’immersion qu’offre un jeu multijoueur en ligne tel World of Warcraft ou Guild Wars, il reste quand même très contraint en termes de liberté et d’interactivité. Il est ainsi impossible de tenter les actions de son choix, actions malgré tout envisageables quand un être humain anime la partie, estimant ou non que cela est possible. - Plaquette «Qu’est-ce que le jeu de rôle?» FFJdR 2005 [B] Définition du jeu de rôle sur le site de la Fédération Française de Jeu de Rôle [C] Définition du jeu de rôle grandeur nature sur le site de la Fédération Française de Jeu de Rôle Grandeur Nature Benoît Evellin - Le jeu de rôle, loisir en déclin ou interactivité de demain ? - 14 février 2008 - Page 1 des belles années, où l’ordinateur n’a pas encore envahi les maisons avec ses univers interactifs sophistiqués : le jeu de rôle est dans sa période faste. Et vint l’ombre… Le développement de l’informatique grand public et l’expansion d’Internet ont contribué à au déclin du jeu de rôle. Mais avant cela, les consoles de jeux vidéo ont aussi été des freins : il était tellement plus facile de vivre des aventures fabuleuses en ayant les images et les actions toutes prêtes sur son écran ! Et contrairement aux éditeurs de jeux de rôle aux petits budgets, les fabricants de consoles de jeux ont largement diffusé sur leurs produits. Les réalisateurs de jeux vidéos s’approprient les genres: les concepteurs (geeks, hé oui) de ces jeux sont le plus souvent rôlistes. Leurs rêves étaient de mettre des images sur de fabuleuses aventures. Ainsi naquirent les jeux vidéo RPG [5], où le joueur fait évoluer son héros, et ce géographiquement, socialement, matériellement et physiquement. Le public confond alors les genres, ne retenant que le mauvais dans ces cas là : les phénomènes d’addiction aux jeux vidéo et pire encore, comme en témoigne l’affaire de Carpentras… La génération geek C’est au cœur de cette communauté qu’on est sur de trouver la plupart des rôlistes. Mais ces geeks, qui sont-ils ? Comme dans toute partie de jeu de rôle, avant de définir les personnages, regardons le « background », l’arrière plan qui forme le monde. Si je vous parle de StarWars, Conan le Barbare, Goldorak, Spiderman, Le Seigneur des Anneaux et de bien d’autres œuvres de la même veine ? Oui, les mangas, les elfes, la science fiction, le médiéval-fantastique, l’informatique, les jeux vidéos, bref, toutes ces passions que beaucoup signalent comme marginales [D]… Voilà l’univers des geeks, des passionnés à l’imagination tellement fertile, ces mordus de l’irréel. Les rôlistes en font donc partie à part entière, de part leurs affection pour l’imaginaires et les grandes épopées, Cette génération geek, qui, depuis sa création dans les années 80, a permis au jeu de rôle de devenir ce qu’il est, sera un peu le fil rouge de ces pages. marginal et amoral comme on le croit bien souvent. Gary Gygax et Dave Arneson ont posé les bases du jeu de rôle tel qu’on le pratique : chacun joue un personnage évoluant dans un monde défini. Le jeu de rôle est dans le principe la même chose que les jeux d’enfants : « on dira que tu seras la princesse, et moi je suis le chevalier », mais dans le cadre d’un jeu de société. La FFJdR définit le jeu de rôle comme une réalité virtuelle sans ordinateur, où les participants, tous solidaires pour accomplir un même but, interagissent entre eux et avec l’univers qui les entoure ; univers représenté par un joueur spécial, le « maître du jeu ». Ce joueur décrit les lieux, donne vie aux personnages rencontrés par le groupe et sert le plus souvent En fait, c’est quoi ? d’arbitre. A lui la tâche d’aniLe jeu de rôle n’est pas un loisir mation du groupe : il conçoit et L’explosion d’Internet, et la virtualisation à outrance ont encore renforcé le flou. Entre les avatars de Second Life et le célèbre MMORPG [5] qu’est World of Warcraft, le jeu de rôle (le vrai) se retrouve un peu sur la touche, toujours avec une mauvaise réputation alimentée par les nouvelles déviances des jeux en ligne. Pour certains [6], le problème vient aussi du support papier qui ne séduit plus et reste cher. Un livre de jeu de rôle coûte dans les 30 euros, ce qui n’est rien comparé à certains jeux vidéos, mais la désaffection pour la lecture, souvent relatée dans la presse, n’y est peut-être pas étrangère. Bref, si on s’en tient à ça, on a un tableau fort laid du jeu de rôle en France… Carpentras : l’enterrement du jeu de rôle français Le 10 mai 1990 est découverte une sordide profanation au cimetière juif de Carpentras (Vaucluse). La France entière s’émeut à juste titre de cet acte horrible, antisémite, réalisé, comme on le saura plus tard, par des néonazis [E]. La ferveur de l’opinion publique, relayée par les médias est telle que toutes les hypothèses sont imaginées. Malheureusement, dans les rumeurs d’orgies et de meurtres en série, on retrouve les rôlistes, tout à fait innocents dans l’histoire ! Mais l’occasion était trop belle de coller de jolies étiquettes sur ce loisir en le classifiant de malsain, de rassemblement de profanateurs, de satanistes et de bien d’autres choses encore ; le tout relayé par les politiques, la presse [D] et Mireille Dumas [F] dans ses émissions pleines de cas sociaux. Les conséquences sont graves, avec un haro sur les boutiques de jeu de rôle, une fermeture des clubs souvent soutenus par les municipalités [G] et beaucoup de parents qui interdisent à leurs ados de pratiquer leur loisir favori [H]… Cet évènement a amené à la création de la FFJdR. [5] RPG : Rôle Playing Game, terme anglais désignant le jeu de rôle ; MMORPG : La même chose, mais version Massive Multiplayer Online... [6] Article sur le jeu de rôle de Wikipédia, à propos du rôle du support papier pour le jeu de rôle. [D] Télérama et Ségolène Royal en tête combattent alors la génération geek en tapant sur le manga et associés et le Club Dorothée - Rafik Djoumi, journaliste et écrivain, dans le documentaire Suck My Geek [E] Christophe Hondelatte, Faites entrer l’accusé, Les Profanateurs du cimetière de Carpentras - 8 janvier 2006 [F] Depuis une blague courante entre rôlistes est de dire au narrateur, à l’issue d’un récit particulièrement sanglant ou tordu de partie de jeu de rôle qu’il va finir chez Mireille Dumas. Généralement après, ça part en délire vaseux... [G] Wikipédia, article sur la profanation du cimetière de Carpentras [H] J’ai pu le constater à Rennes comme à Nantes où je patique le jeu de rôle : les 25-30 ans, adolescents à l’époque, sont un creux dans la pyramide des âges rôliste... Benoît Evellin - Le jeu de rôle, loisir en déclin ou interactivité de demain ? - 14 février 2008 - Page 2 décrit oralement, tel un script de film, des évènements auxquels le groupe sera confronté. Un peu comme si vous étiez l’acteur, et que le réalisateur vous décrit une scène avec ses personnages, ses décors, ses accessoires, et vous laisse toute liberté d’agir en fonction des capacités prédéfinies du personnage que vous incarnez. Les actions du joueur et du personnage (appelé dans le jargon « personnage-joueur » ou PJ) sont liées et conjointes ; le joueur parlant le plus souvent à la première personne : « Je saute le précipice en tirant sur les gobelins ». Bien entendu, afin de régir tout cela et de définir le possible de l’infaisable il existe des règles. Il n’y a pas de règle universelle. Bien souvent, chaque univers (vendu couramment sous forme de livre) propose son propre système de règles, adaptées aux actions type des personnages qui seront créés. Le jeu de rôle propose donc de « jouer quelqu’un d’autre et comprendre la relativité des choses [7] », comme le décrit Alexandre Astier [8], qui, par ailleurs, estime qu’il s’agit « du plus beau jeu du monde »… Et maintenant ? Le jeu de rôle est difficile à présenter par écrit. Les éléments nécessaires au jeu se confondent, et il est difficile de s’immerger dans le jeu d’acteur. Mais au quotidien, vous pouvez vivre des situations de jeu de rôle ou près d’univers qui s’y rapportent sans même Que faut-il pour jouer ? Il existe des bases communes pour pratiquer une partie de jeu de rôle: du papier, des crayons et tout ce qu’il faut pour passer une bonne soirée (c’est-à-dire la même chose que quand vous jouez, par exemple, au Monopoly). Bien entendu, il faut un volontaire pour être le maître du jeu (ou conteur), qui définira le contexte et les interactions en fonction des règles et de l’univers [I]. Afin de jouer avec un minimum de suspens, on fait varier les réussites des actions des personnages par des jets de dés aux multiples faces (entre autres 6, 8, 10, 20 ou 100 !). Bref, pour une quarantaine d’euros, vous avez un jeu complet, aux multiples possibilités, qui vous fera vivre des milliers d’aventures. vous en rendre compte. Vous êtes entourés par les univers du jeu de rôle sans trop le voir. Comme les geeks, les rôlistes sont partout… Au cinéma, le grand succès du Seigneur des Anneaux a créé un regain d’intérêt pour les mondes médiévaux-fantastiques et par la même le jeu de rôle. Le public finit par découvrir qu’un magicien ou un nain ne sont pas forcément méchants... D’autres aventures fantastiques, telles que Les 4 Fantastiques, X-Men ou Blade Runner ont été adaptées [9], tandis que le genre fantastique explose dans la bande dessinée (il n’y a qu’à regarder de développement d’éditeurs comme Soleil ou les Éditions Delcourt), avec des séries comme Donjon, De Cape et de Crocs ou Lanfeust (devenu depuis un jeu de rôle[10]). A la télévision. Alexandre Astier a réussi le pari de présenter l’uni- vers arthurien de Kaamelot au travers de personnalités fortes, avec de la magie, des portails inter-dimensionnels, des créatures fantastiques. Et le succès est au rendez-vous ! Même TF1 s’est essayé au jeu de rôle avec «Si c’était moi», un jeu de simulation présenté par Carole Rousseau, où deux people sont invités à réagir à une série d’aventures abracanabrantesques. Ca ne durera qu’à peine un an [11], mais c’est déjà ça de pris... La création en 1996 de la Fédération Française de Jeu de Rôle (FFJdR) a par ailleurs permis de démolir les idées reçues au sujet du jeu de rôle [12]. A présent axée sur l’information et la promotion, la FFJdR a fait une demande d’agrément ministériel « jeunesse et sport ». Entre les associations adhérentes et les membres individuels, la FFJdR regroupe 1500 membres. Une paille par rapport au monde rôliste français estimé en 2003 à 100000 personnes [13], mais en constante évolution [14]. Pari réussi pour l’intégration ? Oui, car malgré l’âge des rôlistes (la moyenne est d’une trentaine d’années) et la désaffection pour ce loisir constatée il y a quelques années, la reconnaissance et l’assimilation de la génération geek à la société actuelle permet d’ouvrir des portes et d’amener un phénomène de mode. Les clubs de jeunes pratiquants se montent, ou des sections jeu de rôle naissent dans les clubs de jeux de société [15]. [7] Interview d’Alexandre Astier dans le documentaire Suck My Geek [8] Créateur et acteur de la série médiévale-fantastique arthurienne Kaamelot, diffusée en France sur M6, dont une des sources d’inspiration est le jeu de rôle Warhammer. - Wikipédia, article sur la série Kaamelot. [9] Il existe des jeux permettant de jouer les personnages de ces films : Marvel Super Heroes RPG ou CyberPunk et Shadowrun [10] Le jeux d’aventures de Lanfeust et du Monde de Troy, Soleil, 2003 ; premier jeu de rôle disponible en grande-surface ! [11] C’était en décembre 2005, et en deuxième partie de soirée. Même si les choix était très réduits pour les joueurs (à cause des séquances animées illustrant les actions), on avait le principe. [12] «La fédération est née un soir, après le déroulement d’une convention, le France Sud Open, qui depuis deux ans souffrait de l’incompréhension et parfois de la malveillance d’une partie de l’opinion publique, ressassant sans comprendre une argumentation faussée et guidée par une partie de la presse et du monde médical, plus axée sur le sensationnel et la rentabilité que sur la volonté de fournir au public une information objective sur le jeu de rôle.» - Historique de la FFJdR, sur leur site web. [13] Tristan Lhomme, rédacteur en chef de la revue spécialisée (et disparue) Casus Belli donnait ce chiffre à titre d’estimation (interview du magazine virtue Krinein magazine, 02/07/03), car il n’existe pas de chiffres fiables. A titre de comparaiton, la même revue chiffrait le nombre de rôlistes français à 300000 quelques années auparavent. [14] En 2007, la FFJdR a atteint son plus grand nombre de membres - site internet de la FFJdR. [15] L’évolution du bottin des clubs de la FFJdR montre bien cette progression. [I] Par exemple médiéval-fantastique, space-opera, cyber-punk, post-apocalyptique, contemporain fantastique, médiéval historique, burlesque, super-héros, avec ou sans règles… Découvrez tous les styles grâce à la Guilde du Rôliste Galactique - www.roliste.com Benoît Evellin - Le jeu de rôle, loisir en déclin ou interactivité de demain ? - 14 février 2008 - Page 3 Internet a aussi permis de faire Les milliers de solutions possibles vivre le jeu de rôle, par la création Je vais vous mettre un peu à contribution pour illustrer un exemple de multide communautés de passionnés ples possibilités de dénoument d’une situation : imaginez que vous êtes un qui partagent, créent [16], expé- policier appelé avec vos collègues (d’autres joueurs) sur une alerte à la bomhôtel. Vous arrivez en même temps que les pompiers, le rimentent (comme tous les pas- be dans un grand Bomb-Squad [J], et vos procédez à l’évacuation de l’immeuble pour pouvoir le sionnés). On trouve également fouiller. Voilà que vous trouvez la bombe, une minute avant qu’elle n’explose. Il des t’chats ou des forums pro- est clair que le Bomb-Squad n’arrivera pas à temps, et que vos compétences posant des parties de jeu de rôle en électronique vous laissent une chance sur deux d’y rester. en ligne. Là encore, la confusion Que tentez-vous ? avec stress et spontanéité, lors peut régner : il suffit de taper « Voilà ce que différents joueurs m’ont imaginé de parties avec des groupes différents [K]: jeu de rôle » dans Google pour - Je saute du toit ! avoir la moitié des réponses ren- - Je lance la bombe du toit ! voyant à des MMORPG [17]. En - J’arrache tous les fils ! parallèle des boutiques en ligne, - Tu veux ma mort, hein ? on trouve également des cer- - Je me couche sur la bombe pour atténuer le souffle - J’attends… cles de passionnés qui vont créer - J’appelle un collègue pour lui laisser ma place ! communautairement leur jeu de - Je tente le désamorçage. rôle, et ensuite le diffuser. Si on Vous croyez qu’un ordinateur peut prévoir tout ça (et pire encore) ? en croit certains, le format PDF pas oublier que dans un jeu de lemmes horribles d’ordre mosemble détrôner progressivement rôle, n’importe quelle situation ral ou purement matériels, bref le papier [6]. est possible, avec une infinité de plonger dans une autre réalité détails ou de subtilités. Modéli- pour vivre autre chose. La seule L’interactivité ultime Avec la concurrence des MMOR- ser tout cela pour une application limite est l’imagination, sachant PG, le jeu de rôle semble être en virtuelle ? Ce serait un travail ti- que « toute une vie ne suffit pas train de se noyer. Autant était-il tanesque ! L’informatique et les à vivre toutes les aventures pos[20] », il décrié il y a quelques années, on jeux vidéo en particulier réagis- sibles pour l’être humain voit maintenant une utilisation sent à des notions logiques : « si est grand temps de vivre autre chaotique du terme de « jeu de telle action est faite, il se passe chose ! rôle ». La FFJdR, les associa- ceci ». Est-il possible de définir Alors ? tions et les amateurs défendent toutes les possibilités d’actions et Le jeu de rôle a encore de nomleur loisir avec ferveur [18]. Nous de résultats ? Difficile, non ? breuses parties devant lui avant sommes la plupart du temps pra- Le jeu de rôle se déroulant dans de disparaître. Et encore, peuttiquants des MMORPG ou de l’imagination de chacun, en fonc- il disparaître ? Entre quelques Jeu de Rôle Grandeur Nature, tion des descriptions des partici- personnes à l’imagination fertile qui, malgré les différences avec le pants, tout est alors possible. Le il est très aisé de démarrer une jeu de rôle « papier » [19] sont de jeu de rôle conserve une belle partie… Au vu de la popularilongueur d’avance sur les simuproches cousins. sation des mondes fantastiques Certains pourraient croire que lations les plus réalistes, les plus et de l’assimilation de la culture le jeu de rôle va finir écrasé par abouties ou les plus étendues. geek par le grand public, l’avele développement des jeux vidéo, Vous pouvez donc vivre des aven- nir semble prospère pour le déde plus en plus réalistes. Il ne faut tures que jamais vous ne vivrez, veloppement du jeu de rôle. Les vous trouver confronté à des di[16] L’exemple du Donjon de Naheulbeuk, une aventure par épisode en MP3 créée en 2001. Basée sur un groupe de débutants aux prises avec l’univers hostile d’un mystérieux sousterrain, elle illustre bien la mise en scène des classiques du jeu de rôle. On y retrouve de nombreuses références aux systèmes de jeu du genre : les niveaux, les compétences, les différences raciales…, ainsi que l’ambiance des parties de jeu de rôle avec les inspirations héroïques, les jeux de mots pendables et les guérisons magiques…, le tout tiré de l’expérience de John « Poc » Lang, le créateur de la série. Le Donjon de Naheulbeuk est devenu une référence du web francophone : bien des gens non rôlistes ont rapidement accroché, au point que des T-Shirts, des figurines, des bandes dessinées (et même des chaussettes) aient été publiés… « Une aventure en MP3 complètement débile », dixit le narrateur. «Retrouvez les aventures du Donjon de Naheulbeuk sur www.penofchaos.com/donjon» [17] Essai fait le 14 février 2008 : sur la première page, les résultats étaient partagés à parts égales. [6] Article sur le jeu de rôle de Wikipédia, à propos du rôle du support papier pour le jeu de rôle. [18] On invite ses amis à une partie, on vient animer un stand à la fête du jeu, on écrit sur ce sujet, on tient un site internet… [19] Une désignation parfois employée pour bien faire la différence entre les différentes pratiques. Ainsi, le jeu Warhammer se décline en version wargame (la plus répandue), mais aussi en version papier, MMORPG et, par le biais d’amateurs en GN ! [20] Bernard Werber, écrivain et réalisateur, auteur de Le Père de nos pères, Les Fourmis, Nos, les Dieux, L’encyclopédie du Savoir Relatif et Absolu, tiré de son interview dans Suck My Geek. [J] Accessoirement, ça se passe en 2030 à Los Angeles, République de Californie… - Jeu de rôle COPS, Siroz Editions. [K] Il existe des rassemblements de rôlistes, des conventions, où on vient pour jouer avec d’autres personnes que son groupe habituel. Pour cela, les maîtres du jeu ont prévu un scénario passe-partout, abordable par le plus grand nombre, avec une aventure qui ne durera qu’une soirée (dans mon cas, une alerte à la bombe dans un hotel de grand standing bouré de fausses clés de désamorçage). Les conventions ont un bon moyen de découvrir de nouveaux jeux, et même de s’initier au jeu de rôle. Benoît Evellin - Le jeu de rôle, loisir en déclin ou interactivité de demain ? - 14 février 2008 - Page 4 adhésions dans les associations remontent, et Internet permet de créer un réseau d’échanges inédit, tout en profitant de l’essor de la société pour les loisirs.. Bref, ce n’est pas aujourd’hui qu’on s’arrêtera de jouer ! Benoît Evellin, 14 février 2008 L’auteur Document sous Licence Creative Commons Paternité-Pas de Modification 2.0 France Vous êtes libre de reproduire, distribuer et communiquer cette création au public selon les conditions suivantes : Paternité. Vous devez citer le nom de l’auteur original de la manière indiquée par l’auteur de l’oeuvre ou le titulaire des droits qui vous confère cette autorisation (mais pas d’une manière qui suggérerait qu’ils vous soutiennent ou approuvent votre utilisation de l’oeuvre). Pas de Modification. Vous n’avez pas le droit de modifier, de transformer ou d’adapter cette création. A chaque réutilisation ou distribution de cette création, vous devez faire apparaître clairement au public les conditions contractuelles de sa mise à disposition. La meilleure manière de les indiquer est un lien vers cette page web. Chacune de ces conditions peut être levée si vous obtenez l’autorisation du titulaire des droits sur cette oeuvre. Rien dans ce contrat ne diminue ou ne restreint le droit moral de l’auteur ou des auteurs. Sources globales Rôliste depuis l’adolescence, (prédilection pour COPS et Pendragon), je pratique également le Grandeur Nature et à l’occasion les MMORPG, notamment World of Warcraft. J’anime également un site Internet de promotion et de découverte du jeu de rôle et de la Bretagne fantastique (Les Elfes de Bretagne). Ce texte a été réalisé dans le cadre de mes études en Design Hypermédia au sein de l’École de Design Nantes Atlantique, dans le cadre des cours d’Expression Écrite et Orale, encadré par Virginie Braud et Sandrine Chagnard-Pianlekha. Faute de temps pour pouvoir pratiquer mon loisir, je me suis décidé à écrire dessus afin de savoir ce qu’allait devenir le jeu de rôle en France. A. Sites Internet : 1. Le site de la Fédération Française de Jeu de Rôle (FFJdR) - www.ffjdr.org 2. Wikipédia, l’encyclopédie libre - Jeu de rôle : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeu_de_r%C3%B4le - L’affaire de Carpentras : http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_de_la_profanation_du_cimeti%C3%A8re_juif_de_ Carpentras - Kaamelot : http://fr.wikipedia.org/wiki/Kaamelot - Le Donjon de Naheulbeuk : http://fr.wikipedia.org/wiki/Donjon_de_Naheulbeuk 3. Le Guide du Rôliste Galactique - www.roliste.com 4. Site de la Fédération Française de Jeu de Rôle Grandeur Nature (FédéGN) - www.fedegn.org 5. Le site wizards of the Coast, éditeur de Donjons et Dragons - www.wizards.com 6. Krinein magazine : Casus Belli - Interview, 02/07/03 - www.krinein.com 7. Le Donjon de Naheulbeuk - www.penofchaos.com/donjon B. Livres : 1. Plaquette “Qu’est-ce que le jeu de rôle” éditiée par la FFJdR - 2005 2. Série de bandes dessinées Donjon, Lewis Trondheim et Joann Sfar, Delcourt, depuis 1998 3. Série de bandes dessinées Lanfeust de Troy, Christophe Arleston et Didier Tarquin, Delcourt, depuis 1994 4. Série de bandes dessinées De Cape et de Crocs, Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou, Delcourt, depuis 1995 C. Manuels de jeu de rôle : 1. Manuel du Joueur, édition 3.5, Donjons et Dragons, Wizards of the Coast / Asmodée éditions - 2004 2. COPS, prologue, Asmodée éditions - 2005 3. In Nomine Satanis, Magna Veritas, quatrième édition, Asmodée éditions – Juin 2003 4. Jeu d’Aventure de Lanfeust et du monde de Troy, Soleil, 2005 D. Filmographie 1. Suck my geek, Tristian Shulmann & Xavier Sayanoff, Empreinte Digitale, 2007 2. Faites entrer l’accusé, Les Profanateurs du cimetière de Carpentras, Christophe Hondelatte, 8 janvier 2006 3. Dolmen, saga estivale de TF1, 2005 E. Documents autres 1. Grille horaire de TF1, décembre 2005 Benoît Evellin - Le jeu de rôle, loisir en déclin ou interactivité de demain ? - 14 février 2008 - Page 5