couverture d`options en presence de sauts

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couverture d`options en presence de sauts
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
Flor GABRIEL1
Philippe SOURLAS1
RESUME
Malgré son succès, la formule de Black et Scholes est souvent critiquée pour son
inadéquation aux réalités des marchés financiers. Plusieurs familles de modèles ont été ainsi
proposées pour remédier à ses déficiences, conduisant notamment à relacher l'hypothèse de
continuité des trajectoires des prix. L'objet de cet article est de (i) présenter, à partir d'un
modèle discontinu simple, les outils mathématiques nécessaires pour étudier des processus
discontinus ; (ii) présenter les modifications qualitatives induites par ces nouveaux modèles
et notamment l'impossibilité d'obtenir une stratégie de couverture parfaite ; (iii) s'interroger
sur les critères permettant de sélectionner les "meilleures" stratégies à mettre en place ; (iv)
implémenter sur des simulations de trajectoires, et comparer suivant ces critères, différentes
stratégies de couverture, statiques ou dynamiques, basées sur le seul sous jacent ou utilisant
des options liquides ; (v) étudier, sur ces exemples numériques, l'impact, sur l'efficacité des
stratégies de couvertures, des problèmes de robustesse aux erreurs de calibrage et à
l'introduction de frais de transactions.
Mots-clés : modèles à sauts, marchés incomplets, couverture, minimisation de
variance
ABSTRACT
While being widely used, the Black and Scholes model is often criticized for its inadequate
description of the behaviour of financial markets. Several types of models have been
introduced to redemy its deficiencies, some of which have discontinuous trajectories. The
aim of this article is to (i) present the mathematical tools that are needed for the analysis of
general discontinuous processes and apply them to a simple discontinuous model ; (ii)
exhibit some qualitative changes induced by this new family of models, in particular the
impossibility to totally hedge away risks ; (iii) examine some possible criteria for
determining the "best" hedging strategy ; (iv) simulate trajectories of prices to assess,
according to these criteria, the efficiency of different hedging strategies, static or dynamic,
that rely solely on the underlying or on several options ; (v) evaluate with these numerical
1
Autorité de Contrôle des Assurances et des Mutuelles (ACAM), 61, Rue Taitbout, 75009 PARIS
BULLETIN FRANÇAIS D’ACTUARIAT, Vol. 8, n°16, juillet - décembre 2008, pp. 14 - 60
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
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simulations the robustness of the hedging strategies to miscalibration or to the introduction
of transaction costs.
Keywords : jump processes, incomplete markets, hedging, variance minimisation
INTRODUCTION
La notion mathématique sur laquelle repose la modélisation des prix des actifs est la
notion de processus stochastique. Modéliser des trajectoires de prix revient à spécifier une
famille de processus stochastiques. Le point commun que partagent une grande partie des
processus stochastiques utilisés en finance est d'appartenir à la sous-famille des processus
de diffusion, qui repose sur le mouvement brownien. Le plus connu de ces modèles est le
modèle de Black et Scholes (B & S), qui modélise les trajectoires de prix comme une
exponentielle de mouvement brownien. Or l'observation des cours révèle la présence de
sauts visibles, que le modèle B & S ne permet pas de reproduire. Ces phénomènes peuvent
avoir une grande importance pour la gestion des risques car ils correspondent à des périodes
de crise.
L'inadéquation du modèle de B & S à la réalité des marchés peut aussi être constatée
graphiquement lorsque, au lieu de considérer les trajectoires de prix, on compare les
"rendements", c'est-à-dire des différentiels au cours du temps du logarithme des prix. Les
rendements de la plupart des actifs financiers prennent des valeurs largement plus
dispersées que celles du modèle B & S, avec des pics fréquents correspondant à des "sauts"
dans les prix. Parmi les nombreux travaux empiriques portant sur ce point, on peut citer les
travaux précurseurs de Mandelbrot [1963] ou la revue de littérature de Walter [2001].
Ces faits empiriques apparaissent de façon très différente selon l'échelle de temps
que l'on considère. A l'échelle de quelques minutes, les prix ne bougent que par sauts. A
l'échelle du mois, la présence de sauts est visible, quelques sauts étant reliés par des
portions de courbe continues. De manière générale, plus la durée d'observation est longue,
moins les sauts sont visibles (cf. Aït-Sahalia [2004]).
La capacité d'un modèle à générer des trajectoires réalistes n'est cependant pas
l'unique critère pour juger de la pertinence d'un modèle. La faculté d'un modèle à reproduire
les prix des options liées à son sous-jacent est un deuxième critère important ; l'importance
relative de ces deux mesures de performance dépend de l'utilisation qui va être faite du
modèle. Une bonne description du prix des options permet notamment de mettre au point
des stratégies de couverture adéquates et de quantifier convenablement le risque associé à
16
F. GABRIEL, P. SOURLAS
une position. Afin de pouvoir décrire l'état du marché des options à un moment donné, les
paramètres du modèle sont ainsi choisis afin de pouvoir reproduire au mieux les prix des
options à cet instant, procédé appellé calibrage du modèle. Ce besoin de modèles capables
de reproduire le prix des options a été à l'origine de généralisations du modèle de Black and
Scholes tels les modèles à volatilité locale ou stochastique.
La capacité d'un modèle à reproduire les prix de marché est souvent évaluée à partir des
prix de call européens pour différentes maturités et différents strikes. Il est d'usage de
représenter les prix sur le marché des options par ce qu'on appelle des "volatilités
implicites" de Black and Scholes associées. Ces volatilités implicites correspondent à la
valeur de la volatilité du modèle de B & S qui permettrait d'obtenir le prix observé. Cette
représentation est bijective et n'implique pas une croyance dans la pertinence du modèle de
B & S. Une surface typique est montrée Figure 1.
Figure 1: la surface de volatilité pour un échantillon de 500 options S & P
Les propriétés suivantes concernant ces surfaces ont été empiriquement observées
(cf. Cont et Meyer [2001]):
•
phénomènes de smiles et de skew : à maturité fixé, la volatilité implicite varie
fortement en fonction du strike, variation qui peut-être décroissante ("skew") ou en
forme de U ("smile")
•
phénomènes d'aplatissement du smile : la dépendance de la volatilité
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implicite vis à vis du strike décroît avec la maturité
La plupart des modèles utilisés peinent à rendre compte de ces deux propriétés
qualitatives. En particulier les modèles de diffusion tels que le modèle à volatilité locale ou
stochastique n'engendrent pas un phénomène d'applanissement du smile satisfaisant (cf.
Cont et da Fonseca [2001]).
De plus, si ces deux modèles permettent de reproduire le phénomène de smile, et
donc de résoudre les problèmes de calibrage, ils ne donnent pas pour autant une explication
structurelle de ce phénomène. Si par exemple la présence de skew peut s'interpréter en
terme d'effet levier, ceci ne permet pas de comprendre pourquoi sur certains marchés ce
skew devient un smile, ni pourquoi les schémas smile/skew se sont brutalement amplifiés
juste après le crash de 1987.
L'introduction de modèles discontinus, dits "à sauts" va permettre non seulement de
rendre compte des deux phénomènes qualitatifs ci dessus, mais aussi d'expliquer
simplement ces phénomènes en terme d'anticipations sur le marché. Ainsi, la présence de
skew est attribuée à la peur d'une importante baisse par les acteurs du marché. Ceci
explique en particulier le phénomène d'accroissement du schéma smile/skew depuis le
crash de 1987 : cette augmentation reflète la peur de répétitions des variations que les
acteurs du marché ont connu. Les processus à sauts permettent aussi de faire la distinction
entre skew et smile en terme d'asymétrie des sauts anticipés par le marché : pour les options
sur indice, la peur d'un saut important vers des valeurs inférieures donne lieu à un skew
décroissant alors que sur les marchés d'échange où les mouvements sont symétriques, on
s'attend à ce que les sauts soient symétriques donnant ainsi lieu à des smiles.
L'objet de notre travail a été :
•
de présenter, à partir d'un modèle discontinu simple, les outils mathématiques
nécessaires pour étudier des processus discontinus, et en particulier les processus
de Levy. Pour obtenir le détail des démonstrations non abordées, le lecteur pourra
consulter Cont et Tankov [2004]
•
de présenter les modifications qualitatives induites par ces nouveaux
modèles1. Notamment, il devient impossible d'obtenir une stratégie de couverture
parfaite et de supprimer totalement le risque. Ceci conduit à s'interroger sur les
1
Les modèles purement discontinus, tels que présentés par exemple dans Carr et al [2002] ne sont pas
traités.
18
F. GABRIEL, P. SOURLAS
types de stratégies à mettre en oeuvre en fonction de la manière dont le risque est
appréhendé
•
d'implémenter sur des simulations de trajectoires différentes stratégies de
couverture, statiques ou dynamiques, basées sur le seul sous jacent ou utilisant des
options liquides, et de les évaluer selon plusieurs critères
•
d'étudier sur ces exemples numériques des problèmes de robustesse et leur
impact sur l'efficacité des stratégies de couvertures
1.
MODELE A SAUTS UTILISE
On commencera par présenter rapidement les considérations pratiques qui amènent à
introduire les outils mathématiques du calcul stochastique pour pouvoir modéliser le
problème de couverture de portefeuille. Ensuite on introduira la principale nouveauté du
modèle présenté par rapport à la modélisation financière classique en temps continu que
sont les processus ponctuels. Puis on délimitera le cadre de l'étude en définissant le modèle
financier qui régira l'évolution "à caractère discontinu" des prix des actifs de base négociés
sur le marché. On verra de plus que ce modèle conduit à des marchés incomplets.
1.1
Présentation du modèle et de ses fondements
1.1.1
Les raisons pratiques de l'introduction du calcul stochastique
La modélisation de la couverture de portefeuille en présence de sauts amène à
modéliser deux types d'objets: d'une part des portefeuilles et d'autre part des produits
dérivés.
Un portefeuille dynamique, c'est à dire qui évolue en fonction du temps, voit sa
valeur évoluer pour deux raisons: parce que les actifs qui le composent changent de valeur
et parce que le gérant va intervenir pour acheter et vendre des actifs. Si un investisseur
intervient aux temps T0 = 0 < T1 < ... < Tn < Tn +1 = T en détenant une quantité φi d'actif St
pendant la période ]Ti , Ti +1 ] alors la variation de valeur de son portefeuille est:
n
∑φ (S
i
i =0
Ti +1
− ST )
i
Cette quantité est appelée intégrale stochastique de φ par rapport à S, notée
T
∫ φ dS
0
t
t
, et l'ensemble des processus constants par morceaux sur un intervalle compact
constituent la classe des processus simples. La question qui se pose alors au modélisateur
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
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est de généraliser cet outil mathématique afin de pouvoir rendre compte d'un plus grand
nombre de sources d'aléa et de garantir au modèle une certaine souplesse.
Il est en effet possible de donner un sens à cette expression pour une classe de
processus S assez large qui contient les processus traditionnels tels que le mouvement
brownien et les processus à variation finie, mais aussi de nouveaux processus comme les
processus ponctuels. La théorie de l'intégration stochastique permet de généraliser cet objet
en lui donnant un sens pour une classe de processus φ plus grande: l'ensemble des
processus cadlag (continus à droite et admet une limite à gauche).
S'il est souhaitable de définir l'intégrale stochastique par rapport à une classe de
processus S la plus large possible, il faut noter que la restriction aux processus cadlag sur la
classe des stratégies φ est importante pour des raisons économiques: tout processus cadlag
est limite d'une suite de processus simples, ce qui permet d'interpréter tout processus cadlag
comme une limite de stratégies réellement implémentables et non pas comme un processus
déconnecté de tout rapport à la réalité. De plus la construction adoptée permet de garantir
une forme de continuité, puisque la convergence des stratégies garantit la convergence des
pay-offs finaux des stratégies.
Le deuxième problème de modélisation concerne la modélisation de l'évolution
temporelle des produits dérivés dont la valeur Vt est modélisée par: Vt = f (t , St ) . L'outil
principal est la formule d'Itô qui lie l'évolution du prix du produit dérivé ( Vt ) à celle du
temps et de la valeur du sous-jacent ( St ).
Comme cela a déjà été noté lors de l'introduction, l'idée des processus "à sauts" est
d'ajouter des discontinuités aux trajectoires continues issues du processus traditionnel de
diffusion de Black and Scholes, ce de façon ponctuelle. Ce dernier point fait appel à un
outil classique en actuariat présenté ci-dessous.
1.1.2
Processus ponctuels et modèle de Lundberg
A l'origine, le modèle de Lundberg (Lundberg [1903]), modèle dynamique en temps
continu, représente une succession de sinistres arrivant au cours du temps.
Dans le cadre ici présenté, on peut faire l'analogie avec ce modèle en considérant
que les discontinuités observées sont des "accidents" de la trajectoire des prix des actifs
sous-jacents et que la taille des sauts en sont le prix à payer. Le modèle de Lundberg
propose de décrire la succession des sinistres étudiée sous la forme d'un processus ponctuel
marqué ayant les caractéristiques suivantes :
20
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Les montants des "sinistres" (par analogie : la taille des sauts)
Les montants des sinistres ( Lk ) sont des variables aléatoires i.i.d., dont on notera
FL la fonction de répartition.
L'occurrence des sinistres (par analogie : l'occurrence des sauts)
Ces sinistres surviennent à des moments eux aussi aléatoires :
0 < T1 < T2 < … ps
tels que les durées entre sinistres ( τ 1 = T1 , τ n = Tn − Tn −1 n > 1 ) sont i.i.d.. On suppose de
plus que ces variables aléatoires sont sans mémoire :
∀t , t0 : P (τ ≤ t + t0 | τ > t0 ) = P (τ ≤ t )
propriété qui conduit à modéliser les (τ k ) par une loi exponentielle exp(λ ) . Introduisons
dès à présent une variable, fortement liée aux moments d'occurrences des sinistres, qui
apparaît dès que l'on veut effectuer un comptage sur les survenances de sinistres. Le
nombre de sinistres dans l'intervalle [0, t ] est noté :
N t = sup {n ≥ 1 / Tn ≤ t}
Les hypothèses faites sur les occurrences des sinistres sont équivalentes à poser que
N t est un processus markovien à accroissements indépendants et stationnaires vérifiant en
outre que N t suit une loi de Poisson de paramètre λ t .
Proposition 1.1 N t est un processus de Poisson homogène d'intensité
λ
Relation entre coûts et occurrence des sinistres
On suppose enfin que les suites ( Lk ) et (Tk ) sont indépendantes.
Figure 2: Processus ponctuel marqué représentant une succession de sauts de la
trajectoire du sous-jacent
Une fois la modélisation des processus de l'occurrence des sauts faite et les
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hypothèses sur le comportement des variables introduites posées (indépendance des
occurrences des sauts, des tailles de sauts, fréquence-taille et hypothèse poissonnienne), on
peut désormais s'intéresser à la "perturbation totale". Cette perturbation est la somme des
tailles des sauts arrivés sur la période de durée t , valeur fondamentale par la suite puisque
c'est d'elle que vont provenir toutes les modifications par rapport au cas d'une simple
trajectoire continue:
Nt
Δ t = ∑Lk
k =0
Les processus ponctuels ainsi définis permettent d'introduire des discontinuités dans
la modélisation des trajectoires de prix des actifs sous-jacents. C'est le cas en particulier du
modèle de Merton.
1.1.3
Présentation du modèle financier à sauts de Merton
Nous allons désormais nous placer dans un modèle financier à temps continu avec
un horizon fini T et où évoluent deux actifs, le premier étant l'actif sans risque dont le prix à
l'instant t est St0 . Le processus ( St0 )t∈[0,T ] est régi par l'équation différentielle :
dSt0
= rdt , r taux sans risque ≥ 0
St0
S00 = 1
Le second actif est un actif risqué dont le prix à l'instant t est St . Le processus
( St )t∈[0,T ] est supposé présenter une succession de sauts relatifs modélisée par un modèle
de Lundberg et suivre, entre deux instants de saut, le modèle de Black and Scholes. Plus
précisément, l'évolution de St dans l'espace probabilisé ( Ω, A, P ) sera décrite par
l'équation différentielle stochastique suivante :
Nt
dSt
= dZ t , Z t = μ t + σ Wt + ∑Li
St
i =0
S0 = 1
(1)
(2)
où
•
•
μ est le drift de la diffusion ;
(Wt )t∈[0,T ] est un mouvement brownien standard, σ est la volatilité de la
diffusion ;
•
( N t )t∈[0,T ] un processus de poisson d'intensité λ
auquel on associe
22
F. GABRIEL, P. SOURLAS
immédiatement le processus de survenance de sauts associé (Ti )i ≥1 (cf. paragraphe
sur le modèle de Lundberg) ;
( Li )i ≥1 une suite de variables aléatoires i.i.d. de densité f L telle que
•
ln(1 + L) ∼ N (m, δ 2 ) ;
•
nous supposerons que les tribus engendrées par (Wt )t∈[0,T ] , ( N t )t∈[0,T ] et
( Li )i ≥1 sont supposées indépendantes.
L'introduction d'outils portant sur des procesus plus généraux (processus de Levy) est utile
à l'étude de ces processus à sauts stationnaires. Ainsi, en ce qui concerne le processus
( Z t )t∈[0,T ] introduit précédemment, il est intéressant de s'attacher à étudier les
caractéristiques des discontinuités : ΔZ t = Z t − Z − . On peut ainsi définir la mesure de saut
t
définie sur [0, T ] × R associée au processus ( Z t )t∈[0,T ] par :
J Z (ω ,.) = ∑δ (T , L ) =
i ≥1
i
i
ΔZt ≠ 0
∑δ
t∈[0,T ]
( t , ΔZt )
Ainsi, pour tout ensemble mesurable A de R , J Z ([t1 , t2 ], A) compte le nombre
d'occurrence de sauts de Z entre les dates t1 et t2 , sauts dont la taille est dans A :
J Z ([t1 , t2 ], A) = card {s ∈ [t1 , t2 ], ΔZ s ∈ A}
On peut alors montrer en raisonnant sur les fonctions caractéristiques que :
Proposition 1.2 J Z est une mesure aléatoire de Poisson sur [0, T ] × R dont la
mesure d'intensité est μ Z (dt × dz ) = ν Z (dz )dt = λ f L (dz )dt , ce qui s'interprète comme le
nombre moyen de sauts par unité de temps.
Une fois cette mesure de sauts introduite, on peut définir l'intégrale associée :
t
∫∫
∞
0 −∞
ΔZ s ≠ 0
f ( s, z ) J Z (ds, dz ) =
∑
s∈[0, t ]
f ( s, ΔZ s )
En outre, si l'on introduit la mesure de saut compensée :
J Z (ω , dt , dz ) = J Z (ω , dt , dz ) − ν (dz )dt
E ( J Z (ω , dt , dz ))
on obtient le résultat suivant :
Théorème 1.3
∫∫
t
∞
0 −∞
f ( s, z ) J Z (ds, dz ) est la partie martingale de
Dans le cas présent, on constate que :
Nt
∑Li =
i =1
=∫
t
∫
∞
0 −∞
ΔZ s
∑ ΔZ
s∈[0,T ]
s
zJ Z (ds, dt )
∫∫
t
∞
0 −∞
f ( s, z ) J Z (ds, dz )
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
=∫
t
=∫
t
∫
∞
∫
∞
23
∞
0 −∞
0 −∞
z J Z (ds, dz ) + ( ∫ zν Z (dz ))t
−∞
z J Z (ds, dz ) + λ (e
m+
δ2
2
− 1)t
Ainsi, l'équation régissant l'évolution du prix du sous-jacent se réécrit :
S t = ∫ ( μ + λ (e
t
m+
0
δ2
2
− 1)) S s ds +
processusàvariationfinie
∫ σ S dW
t
s
s
0
martingalecontinue
t ∞
s Z
0 −∞
martingalediscontinue
+∫
∫
zS J (ds, dz )
(3)
St est une semi-martingale, avec en particulier en utilisant le théorème 1.3:
Proposition 1.4 Le processus des prix actualisés du sous-jacent : Sˆt = e − rt St est une
martingale sous P si et seulement si :
μ = r − λ (e
m+
δ2
2
− 1)
De même que dans le modèle de B & S, calculer un prix revient à calculer
l'espérance d'un flux terminal sous une certaine probabilité (cf. 1.2.1). Merton propose de
choisir un modèle où, sous cette probabilité, les paramètres vérifient la propriété de la
Proposition 1.4.
En outre, la théorie du calcul stochastique discontinu, et en particulier la formule
d'Itô permettant d'écrire la différentielle d'une fonction régulière d'un tel processus (cf. Cont
et Tankov [2004] et Protter [1986]), permet de résoudre l'équation différentielle
stochastique régissant l'évolution de l'actif risqué. En effet, d'après la formule de DoléansDade, l'équation : dSt = St dZ t a une unique semi-martingale solution:
St = S 0 e
et vu que : ΔZ s = ∑ iLi 1τ
i −1 ,τ i
Zt −
σ2
2
t
∏ (1 + ΔZ )e
0≤ s ≤t
−ΔZ s
s
( s ) , on a :
Proposition 1.5 Le processus ( St )t∈[0,T ] s'écrit:
St = S0 exp {( μ −
σ2
2
Nt
)t + σ Wt + ∑ln(1 + Li )}
(4)
i =1
Xt
Une telle écriture permet en particulier de simuler des trajectoires de
dans le graphique ci-après à droite, accolé à des données réelles:
St comme
24
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Figure 3: Comparaison de l'évolution réelle d'une action (à droite : SLM(NYSE),
Jan-Mars) et de simulations d'un processus à sauts suivant le modèle de Merton (à
gauche : r = 0, σ = 0.2, m = −0,1, δ = 0.1, λ = 1 )
Notons dès à présent que le processus ( X t )t∈[0,T ] est, tout comme ( Z t )t∈[0,T ] , un
processus de Lévy. On peut donc, de même que précédemment, définir les mesures
associées à X : J X , J X et ν X (= λφ où φ densité de N(m, δ 2 )). Comme :
ΔX t = ln(1 + ΔZ t ) , on a les relations suivantes :
∫∫
∞
=∫
t
t
0 −∞
∫
ΔZ s ≠ 0
f ( s, z ) J Z (ds, dz ) =
∞
0 −∞
∑
s∈[0,t ]
f ( s, ΔZ s ) =
ΔX s ≠ 0
∑
f ( s, e
ΔX s
− 1)
s∈[0, t ]
f ( s, e x − 1) J X (ds, dx)
la même formule valant pour les mesures de saut compensées. Ainsi l'équation (1.3) peut se
récrire sous la forme suivante que l'on utilisera par la suite:
2
δ
m+
∞
dSt
=
( μ + λ (e 2 − 1))
dt + σ dWt + ∫ (e x − 1) J X (dt , dx)
−∞
St
rsousprobabilitérisque − neutresimodèledeMerton
(5)
Quant au processus décrivant l'évolution de l'actif actualisé : ( Sˆt )t∈[0,T ] , il vérifie les
mêmes formules (3), (4) et (5), à ceci près qu'il faut enlever un terme en rdt dans
l'équation différentielle et multiplier par e − rt dans l'exponentielle.
1.2
Règles de pricing et mesures martingales
Une fois précisé le processus d'évolution des actifs sous-jacents, on peut s'intéresser
au problème d'évaluation des options liées au marché financier. Ainsi, si l'on spécifie, en T,
un flux H (ω ) positif, fonction FT -mesurable : Ω → R , décrivant le pay-off terminal
recevable dans chaque scénario
moment t ≤ T ?
ω,
est-il possible de lui mettre un prix en 0 et en tout
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
1.2.1
25
Absence d'opportunités d'arbitrage et mesures martingales
On appelle règle de pricing, un procédé permettant d'associer au pay-off H cité
précédemment, une valeur Π t ( H ) en chaque moment. Un tel processus (Π t ( H ))t∈[0,T ] est
supposé adapté ( Π t ne dépend que de l'information disponible jusqu'en t), positif et
respecter une condition de linéarité (i.e. la valeur d'un portefeuille est donnée par la somme
des valeurs des constituants de ce portefeuille) et de consistance temporelle
( Π 0 ( H ) = Π 0 (Π t ( H ))) . Ces conditions, seules, imposent déjà une restriction quant aux
règles de pricing possibles. Si l'on définit, à t fixé :
Qt : F → R
par :
Π (1 )
Qt ( A) = t A = e rt Π t (1A ) , on constate que pour chaque scénario entre 0 et t, d'après la
Π t (1)
linéarité et la positivité de Π , ce sont des probabilités sur (Ω, F ) . De nouveau, par
linéarité toute fonction H FT -mesurable, s'écrivant comme une combinaison linéaire
Q
d'indicatrices d'éléments de la tribu FT , on obtient que : Π t ( H ) = e − rt E t [ H ] . De la
consistance temporelle, on déduit enfin que Qt est la restriction de Q0 (que l'on notera
Q ) à Ft d'où :
Π t ( H ) = e − r (T −t ) E Q [ H | Ft ]
(6)
Cette relation, appelée formule de pricing risque-neutre indique donc qu'il existe une
probabilité Q , sous laquelle le prix est l'espérance du flux actualisé en t.
Une autre condition fondamentale à remplir par une règle de pricing est qu'elle ne
doit pas générer d'opportunités d'arbitrage. Une opportunité d'arbitrage est une stratégie
autofinançante φ , dont la valeur Vt (φ ) vérifie :
V0 (φ ) = 0
VT (φ ) ≥ 0 et P (VT (φ ) > 0) > 0
où P est la probabilité historique. En particulier, deux stratégies ayant le même pay-off
final doivent avoir la même valeur à chaque instant, sinon la différence donnerait lieu à un
arbitrage. En raisonnant sur des stratégies consistant à détenir un actif du marché jusqu'à la
date T ou à le vendre à la date t et l'investir au taux r jusqu'à la date T, on en déduit, en
notant Q la probabilité liée à la règle de pricing, que :
EQ [ ST | Ft ] = E Q [e r (T − t ) St | Ft ] = e r (T − t ) St
EQ [ SˆT | Ft ] = Sˆt
Ainsi, l'AOA implique que la valeur actualisée de tout actif est une martingale sous la
mesure Q , que l'on nomme mesure martingale. Un raisonnement analogue à celui tenu
précédemment permet de montrer que les probabilités Q et P sont équivalentes (ie:
26
F. GABRIEL, P. SOURLAS
∀A ∈ F : Q( A) = 0 ⇔ P ( A) ). Ainsi, toute règle de pricing en AOA est donnée par une
mesure martingale équivalente. Réciproquement, il est aisé de voir qu'une probabilité
équivalente martingale donne lieu à une règle de pricing sans arbitrage. On a donc une
correspondance entre règles de pricing sans arbitrage et probabilités équivalentes
martingales.
1.2.2
Incomplétude de marché
Nous avons vu précédemment que l'AOA équivalait à l'existence d'une probabilité
Q équivalente à P sous laquelle les actifs actualisés sont des martingales. Trouver une
telle probabilité martingale équivalente revient donc, dans le cas du modèle de diffusion
avec sauts étudié, à trouver un processus positif et d'espérance unité (ζ t )t∈[0,T ] , qui rende le
processus ( Sˆt ζ t )t∈[0,T ] martingale sous P . Pour cela, considérons un modèle de Lévy, tel
que l'évolution du processus est déterminée par l'équation différentielle stochastique
suivante :
dζ t
∞
= b(t , Sˆt )dWt + ∫ (c(t , Sˆt , z ) − 1) J Z (dt , dz )
ζt
−∞
ζ0 =1
Les fonctions b et c sont supposées suffisamment "régulières" pour que le processus
(ζ t )t∈[0,T ] soit de carré P -intégrable. Ceci garantit l'intégrabilité de ( Sˆt ζ t )t∈[0,T ] et la
propriété que (ζ t )t∈[0,T ] est une martingale sous
P.
Considérons les processus positifs rendant ( Sˆt ζ t )t∈[0,T ] martingale sous
Proposition 1.6
ζt
P . On a :
est une densité de changement de probabilité vers une
probabilité martingale équivalente si et seulement si :
( μ + λ (e
m+
δ2
2
∞
− 1) − r ) + σ b + ∫ (c − 1) zν Z (dz ) = 0
−∞
(7)
(8)
c>0
Démonstration:
Rappelons la formule d'Itô généralisée pour le produit de deux semi-martingales1 :
dSˆt ζ t = Sˆt d ζ t + ζ t dSˆt + d [ζ t , Sˆt ]
d [ζ , Sˆ ] = d [ζ c , Sˆ c ] + Δζ ΔSˆ
t
t
t
t
t
t
Ainsi, d'après la décomposition processus à variation finie, martingale continue et
1
[X,Y] désigne la covariation quadratique de X et Y, cf. Cont et Tankov [2004].
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
27
martingale purement discontinue de ζ t (donnée par la définition de ce processus) et celle
de S et donc celle de Sˆ vue en première partie (formule (1.3)), il vient :
t
t
m+
dSˆt ζ t = Sˆt ζ t ( μ + λ (e
δ2
2
− 1) − r )dt + d [ζ tc , Sˆtc ] + E(Δζ t ΔSˆt )
∞
+(...)dWt + ∫ (...) J Z (dt , dz )
−∞
m+
dSˆt ζ t = Sˆt ζ t {( μ + λ (e
δ2
2
∞
− 1) − r ) + σ b + ∫ (c − 1) zν Z (dz )}dt
−∞
∞
+(...)dWt + ∫ (...) J Z (dt , dz )
−∞
( Sˆt ζ t )t∈[0,T ] est donc une
P -martingale si et seulement si sa partie à variation finie est nulle
d'où la première condition de la proposition. Enfin, en appliquant la formule de DoléansDale à l'équation différentielle stochastique définissant ζ , on a que :
∞
t
t
0
0 −∞
ζ t = exp ( ∫ b( s, Sˆs )dWs − ∫
∫
∏ c(s, Sˆ )
0≤ s ≤t
1 t
(c( s, Sˆs , z ) − 1)ν Z (dz )ds − ∫ σ 2 c 2 ds )
2 0
s
ce qui, pour avoir la positivité de
ζ
, donne la dernière condition.
Constatons que lorsque μ = r − λ (e
m+
δ2
2
− 1) (condition de Merton), il suffit de
prendre les fonctions b et c constantes égales respectivement à 0 et 1, d'où ζ = 1 pour
vérifier les conditions de la proposition ci-dessus. Dans ce cas, on retrouve donc bien,
comme on l'a vu dans le 1.1, que le processus des prix actualisés du sous-jacent est une
martingale. Cependant, notons que ce n'est pas la seule probabilité sous laquelle on a cette
propriété. En fait, même pour un μ quelconque, on n'a pas unicité de la probabilité
martingale équivalente. En effet, pour chaque fonction c positive choisie, la condition (7)
détermine de façon unique une fonction b et telle que le processus ζ associé soit un
changement de probabilité vers une probabilité martingale équivalente. De plus, un
processus ζ ne pouvant être obtenu que par un unique couple (b,c), on voit donc qu'il ne
peut y avoir unicité de la probabilité martingale. Or, il est montré dans la littérature qu'un
marché est complet si et seulement si il existe une unique probabilité martingale
équivalente. Le modèle étudié, contrairement aux modèles traditionnels, est donc
incomplet. Ainsi, pour certains pay-offs H, on ne peut trouver un portefeuille répliquant, à
savoir une stratégie autofinançante ( φt , φt ) telle que :
0
T
T
0
0
H = V0 + ∫ φt0 dSt0 + ∫ φt dSt
28
F. GABRIEL, P. SOURLAS
empêchant donc toute couverture "parfaite".
Cependant, même si l'on ne peut écrire tous les pay-offs actualisés sous la forme
d'une intégrale stochastique par rapport à Ŝ :
T
Hˆ = E[ H ] + ∫ φt dSˆt
0
ces pays-offs peuvent être représentés par une intégrale stochastique. Ce résultat est certes
moins fort que le précédent mais il permet de mettre au point des stratégies de couvertures
approchant "au mieux" le pay-off et minimisant donc de façon efficace la perte potentielle
de l'investisseur. Il reste à présent à déterminer une telle écriture sous forme d'intégrale
stochastique dans le cas particulier de certains pay-offs, pay-offs dont les stratégies de
couvertures associées seront étudiées ultérieurement.
1.2.3
Théorèmes de représentation martingale
Afin de simplifier les calculs et d'obtenir des formules explicites, on se place à
présent dans le cadre du modèle de Merton, où la probabilité historique est supposée être
une probabilité martingale équivalente. Dans ce cas, d'après la formule (1.5):
t
t
t ∞
S = rS ds + σ S dW +
(e x − 1) Sˆ J X (ds, dx)
t
∫
0
s
∫
0
s
s
∫∫
0 −∞
écriture sous forme d'une intégrale stochastique de
s
(9)
St , dont va découler la représentation
martingale de tout pay-off de variance finie.
Cas des options européennes
Dans ce cas, le flux terminal est fonction uniquement de
ST (et non pas de tout le
processus ( St )t∈[0,T ] ). On retient en particulier le cas des calls et des puts européens :
H = ( ST − K ) + et H = ( K − ST ) + , où K, le strike est un réel donné. Le prix, actualisé en t,
d'une telle option européenne est alors d'après la règle de pricing risque-neutre et la
propriété de Markov, une fonction déterministe de t et de la valeur du sous-jacent en t, St :
Ct = e − r (T − t ) E[ H ( ST ) | Ft ] = C (t , St )avec(t , s ) = e r (T −t ) E[ H ( ST ) | St = s ]
1,2
(10)
Si l'on suppose la fonction C (t , s ) C , ce que l'on peut montrer dans le cas d'un call ou
d'un put, on peut alors appliquer la formule d'Itô et écrire sous forme différentielle :
∞
∂C (t , St )
dCt =
σ St dWt + ∫ (C (t , St e x ) − C (t , St )) J X (dt , dx)
−∞
∂S
∂C (t , St )
∂C (t , St ) σ 2 St2 ∂ 2 C (t , St )
+[
+ rSt
+
∂t
∂S
2
∂S 2
∞
∂C (t , St )
+ ∫ (C (t , St e x ) − C (t , St ) − St (e x − 1)
)ν X dx ] dt
−∞
∂S
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
29
La première ligne est la partie martingale du processus et le reste est la partie à variation
finie. Or d'après l'écriture en espérance conditionnelle (équation(1.10)), le processus
Cˆt = e− rt Ct est une martingale donc, comme un processus à variation finie est une
martingale locale si et seulement si il est nul , C vérifie l'équation différentielle stochastique
suivante :
∂C (t , St )
∂C (t , St ) σ 2 St2 ∂ 2 C (t , St )
+ rSt
+
− rC (t , St )
∂t
∂S
2
∂S 2
∞
∂C (t , St )
+ ∫ (C (t , St e x ) − C (t , St ) − St (e x − 1)
)ν X dx = 0
−∞
∂S
équation qui peut permettre de calculer numériquement, grâce à des méthodes de
différences finies, le prix d'une option européenne (dans le cas du call et du put, on a une
formule explicite come on le verra par la suite). On obtient alors la représentation
"martingale" du pay-off actualisé:
Proposition 1.7 Dans le cas d'un put ou d'un call européen, on a l'écriture
Hˆ ( ST ) = Cˆ (0, S0 )
suivante :
+∫
T
0
T ∞
∂C (t , St ) ˆ
σ St dWt + ∫ ∫ (Cˆ (t , St e x ) − Cˆ (t , St )) J X (dt , dx)
−∞
0
∂S
On peut trouver des écritures similaires dans le cas de pay-offs plus complexes tels
que des pay-offs "path-dependent", les options à barrière en étant un bon exemple.
Ces écritures permettront de mettre en place des stratégies de couverture dans une
situation de marché incomplet.
La réplication parfaite étant théoriquement impossible il faut désormais traiter un
problème d'approximation. L'objectif sera en effet d'approcher, "de la meilleure façon qu'il
soit", un pay-off en utilisant un portefeuille d'actif non risqué et d'actif sous-jacent. On se
donnera par ailleurs le droit d'ajouter au portefeuille des options liquides. Divers critères
d'approximation amèneront à des stratégies de couvertures différentes induisant différents
profils de pertes. Ce sont ces risques résiduels qu'il faut minimiser ainsi que rendre robustes
aux divers paramètres.
2.
STRATEGIES DE COUVERTURE DANS LE MODELE DE MERTON
2.1
Différentes approches de la couverture
Comme cela a été vu précédemment, l'incomplétude des marchés invalide le
paradigme en finance de la réplication parfaite. Il faut donc se résoudre à approximer le
30
F. GABRIEL, P. SOURLAS
payoff final par une stratégie. Une fois admis le fait que la réplication comportait des
risques, il faut savoir mesurer ce risque et trouver un critère pour le réduire. Plusieurs
stratégies en finance ont été développées à cette fin.
Tout d'abord une première idée consiste à introduire des fonctions d'utilité selon
l'approche classique des économistes. Von Neumann et Morgenstern montrent qu'un
individu satisfaisant certains axiomes (continuité, indépendance) va vouloir maximiser son
espérance d'utilité face à un risque. Le problème devient alors:
max E[U (eT )]
où
eT est le risque résiduel.
On peut utiliser ce cadre d'analyse pour répondre à de nombreuses questions, comme
celle de connaître la composition optimale de son portefeuille en actifs de couverture, ou
pour évaluer la valeur de son portefeuille en calculant un équivalent certain, c'est à dire le
prix qui va rendre le gestionnaire indifférent entre vendre son portefeuille ou le conserver.
En finance on parle alors de "pricing par indifférence d'utilité".
La stratégie de couverture va donc dépendre des préférences du gestionnaire de
portefeuille, et notamment de son aversion au risque. Cette modélisation comporte
cependant plusieurs difficultés. Tout d'abord, il faut pouvoir connaître sa propre fonction
d'utilité ou celle de son employeur.De plus, l'équivalent certain va dépendre du niveau de
richesse de l'agent et des différentes opportunités d'investissement alternatives qui lui sont
offertes, ce qui peut parfois mener à des raisonnements étranges. AInsi, par exemple, il est
difficile de voir en quoi l'introduction de nouvelles actions IBM peut influencer une
stratégie de couverture d'option sur le sous-jacent Total. La modélisation par l'espérance
d'utilité n'est pas robuste à ces problèmes de spécification et de dépendance à des
paramètres extérieurs au problème de couverture. La sensibilité à ces facteurs est souvent
très forte, ce qui réduit malheureusement la portée des résultats obtenus par ces méthodes.
En outre, le prix que cette démarche attache aux différents payoffs n'est pas linéaire
en général, c'est à dire que l'équivalent certain d'un risque n'est pas une fonction linéaire du
risque. En effet, si X est un risque et w le niveau de richesse de l'investisseur:
c(λ X , w) ≠ λ c( X , w)
De plus, la concavité de la fonction d'utilité amène le gérant à traiter de façon
dissymétrique les gains et les pertes et donc les achats et les ventes. Le prix d'achat sera
donc différent du prix de vente. Ceci peut poser des problèmes dans des marchés très
liquides.
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
31
Il apparaît donc souhaitable de développer d'autres approches, ou tout du moins de
se restreindre à des utilités plus robustes. Une première idée consiste à faire disparaître le
risque de perte résiduel , et ce indépendamment du prix encouru.
On appelle ces stratégies des "stratégies de surcouverture", où le couvreur de l'option
calcule le montant qu'il lui faut pour, dans tous les états du monde, construire une richesse
terminale supérieure au pay-off qu'il doit fournir à l'acheteur. Le problème de cette méthode
est principalement que le prix peut très fortement dépendre des paramètres de sauts de
l'actif et devenir très vite beaucoup trop élevé. Il est possible de montrer que cette stratégie
produit pour une option donnée le prix le plus élevé parmi tous ceux compatibles avec le
pricing sous une probabilité risque neutre. Par exemple, la surcouverture d'un call aboutit à
des stratégies où l'on achète seulement l'action sous-jacente. A trop vouloir réduire le
risque, l'opération de couverture a perdu tout son sens.
La méthode principale développée par la suite peut s'interpréter comme un choix
d'une utilité quadratique, où l'on retrouve la pratique connue de mesurer le risque en terme
de variance. Lorsque cette minimisation est effectuée sous probabilité risque neutre, on peut
aussi interpréter cette minimisation de carré comme un problème de projection. Il s'agit
ainsi de minimiser:
inf E Q | VT (φ ) − H |2
T
T
0
0
H = V0 + ∫ φt0 dSt0 + ∫ φt dSt
où
Si on appelle A l'ensemble des payoffs atteignables par une stratégie de couverture,
on obtient:
inf E Q | VT (φ ) − H |2 = inf A∈A || A − H ||22
L (Q)
Trouver le portefeuille optimal revient alors à trouver le projeté de H sur l'ensemble
des payoffs atteignables.
C'est cette méthode de minimisation de la variance des pertes résiduelles du
portefeuille de couverture qui sera principalement utilisée, minimisation qui se fera sous la
probabilité risque neutre1.
1
Il est possible de s'interroger sur la pertinence d'effectuer la minimisation sous la probabilité risqueneutre. Ainsi, dans leur article, Aït-Sahalia et Lo [2000] argumentent que les différentes mesures de risque
devraient non pas être calculées sous probabilité historique mais sous probabilité risque neutre. Cette justification
repose sur un raisonnement économique et sur une vision des marchés dans la lignée du modèle d'Arrow et
Debreu. Le message des auteurs est qu'il ne faut pas minimiser le risque, mais minimiser la valeur économique du
risque. L'idée principale est que la probabilité risque neutre contient plus d'information que la probabilité
historique. En effet la probabilité historique traite de la même façon la perte de 1 euro en période de crash et la
perte de 1 euro en période de boom.
32
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Parmi les stratégies de minimisation de variance, on distinguera les stratégies de
couverture dynamique, consistant à acheter et revendre, en continu, une certaine quantité de
sous-jacent et d'options sur sous-jacent et les stratégies de couverture statique, où l'achat
des options sur le marché n'a lieu qu'initialement, options qui seront conservées jusqu'à
maturité. On peut noter dès à présent que l'on peut trouver diverses variantes de ces deux
stratégies.
Dans la section 2.2 on reprendra une idée développée par Merton dans les années
70: le risque de saut est idiosyncratique et on peut donc le négliger. En effet, Merton, qui
s'est intéressé au problème, dès les années 70, a considéré que la composante due aux sauts
était diversifiable car il la considérait comme non-corrélée avec le marché.
Bates, en 1988, suggère l'utilisation d'une couverture dynamique avec un
portefeuille autofinançant contenant l'actif sous-jacent et des options additionnelles afin de
minimiser le risque de saut (section 2.3).
La prise en compte des coûts de transaction, élevés pour les options vanilles
comparés à ceux de l'actif sous-jacent justifie une approche alternative qui est la couverture
statique où les positions des instruments de couverture sont choisies initialement puis
bloquées(section 2.4).
Après avoir proposé une rapide justification dans la section suivante de l'approche
sous probabilité risque neutre, on examinera de plus près ces stratégies dans le cas idéal où
l'on connaît parfaitement la probabilité martingale équivalente (avec μ vérifiant la
condition de la Prop 1.4). On notera cette probabilité Q .
2.2
Approche de Merton
2.2.1 Prix et delta de Merton
Dans ce cas, le prix, actualisé en t, d'une option européenne de flux terminal H ( ST )
est, comme cela a été vu dans la partie précédente, une fonction déterministe de t et de la
valeur du sous-jacent en t, St :
CtM = C M (t , St ) avec M (t , S ) = er (T −t ) E[ H ( ST ) | St = S ]
et donc d'après la formule (4) :
(μ −
C M (t , S ) = er (T −t ) E[ H ( Se
σ2
2
NT − t
)(T − t ) +σ WT − t +
∑
i =1
ln (1+ Li )
)]
On peut alors conditionner par le nombre de sauts, ce qui permet d'exprimer le prix comme
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
33
une somme pondérée de prix de Black-Scholes :
= er (T −t ) ∑Q( NT − t = n)E[ H ( S [( μ −
n≥0
σ2
2
n
)(T − t ) + σ WT − t + ∑ln(1 + Li )])]
i =1
N ( nm , nδ 2 )
= e r (T − t ) ∑
e
− λ (T − t )
n≥0
E[ H ( Se
En posant
S n = Se
(λ (T − t ))
×
n!
n
2
2
nδ 2
δ2
2 δ ) T − t + (σ 2 + n δ )W
− λ (T − t ) exp ( m +
nm +
) + λ (T − t ) r (T − t ) − (σ + n
2
2
2 T −t
2
2
e
nδ 2
δ2
nm +
− λ (T − t ) exp ( m +
) + λ (T −t )
2
2
M
C (t , S ) = e
r (T − t )
et σ n = σ 2 + n
δ2
2
)]
, on a :
r (T − t ) −
e − λ (T − t ) (λ (T − t )) n
E[ H ( S n e
∑
n!
n≥0
σ n2
2
(T − t ) +σ nWT − t
)]
e − λ (T − t ) (λ (T − t )) n BS
C (0, T − t , S n , K , r , σ n )
n!
n≥0
=∑
avec C BS (0, t , S , K , r , σ ) désignant le prix de Black-Scholes pour une option européenne de
maturité t, de spot S à la date 0, de strike K, avec un taux constant r et une volatilité
σ
. La
convergence de cette série étant rapide (convergence exponentielle), cette formule permet
un calcul numérique rapide des prix de calls européens dans le modèle de Merton (plutôt
que d'utiliser la méthode des différences finies suggérée dans la partie précédente).
Rappelons que dans le modèle de B & S traditionnel, la couverture permettant de
répliquer parfaitement l'option, couverture n'utilisant que le sous-jacent et l'actif non risqué,
est la couverture en delta (appellée par la suite couverture delta Black-Scholes). Cette
couverture consiste à prendre une proportion d'actif sous jacent égale au delta de l'option
∂C BS
(t , St )) . Etant donnée l'écriture du prix d'une option européenne dans le modèle
(i.e
∂S
de Merton sous forme d'une somme pondérée de prix de Black-Scholes, il semble donc
intéressant d'introduire le portefeuille de couverture, qui est celui proposé par Merton,
consistant en la valeur initiale C0 et en la stratégie autofinançante ( φt , φt ) définie par :
M
φt =
0
∂C M
e− λ (T −t ) (λ (T − t )) n S n ∂C BS (T − t , Sn , K , r , σ n )
(t , St ) = ∑
∂S
∂S n
n!
S
n≥0
t
φt0 = φt St − ∫ φ dS
0
34
F. GABRIEL, P. SOURLAS
D'après la prop 1.2.2, on a la représentation martingale suivante du prix actualisé :
M
T ∂C (t , S )
T ∞
t
CˆTM = Cˆ 0M + ∫
σ Sˆt dWt + ∫ ∫ (Cˆ (t , St e x ) − Cˆ (t , St )) J X (dt , dx)
0
0 −∞
∂S
Ainsi, la solution proposée par Merton ne permet de couvrir que la partie du risque liée à la
diffusion, l'erreur de couverture actualisée étant:
M
T ∂C
Hˆ − e− rT VT (φ ) = CˆTM − Cˆ 0M − ∫
(t , St )dSˆt
0
∂S
∂C
(Cˆ (t , St e x ) − Cˆ (t , St ) − (e x − 1) Sˆt )
(t , St ) J X (dt , dx)
0 ∫−∞
∂S
=∫
T
∞
M
cette technique de couverture, permettant donc de corriger l'effet moyen des sauts (car
l'espérance de la valeur ci-dessus est nulle) mais laisse l'investisseur complètement exposé
au risque de saut. En fait, en utilisant la définition de J X , et en se rappelant du sens de
l'intégrale par rapport à J X , on a :
Hˆ − e− rT VT (φ ) =
∂C
(Cˆ (t , S + ) − Cˆ (t , S − ) − ( S + − S − )
(t , S − ))
∑
t
t
t
t
t
∂S
t∈[0,T ]
M
M
ˆ (t , S e x ) − Cˆ (t , S ) − (e x − 1) Sˆ ∂C (t , S ))ν (dt , dx)
C
(
t
t
t
t
X
0 ∫−∞
∂S
−∫
T
∞
Dans le cas d'un C convexe (call ou put) le premier terme est strictement positif en cas de
sauts et nul sinon. Quant au deuxième, ν X étant une fonction de densité (donc strictement
positive), il est strictement négatif. Ainsi, entre chaque saut il y a sur-rendement par rapport
à l'actif sans risque pour compenser la présence de sauts, mais la richesse produite par la
stratégie de Merton diminue brutalement par rapport à la valeur réelle de l'option à chaque
saut du sous-jacent. C'est ce que l'on observe lorsqu'au cours de la période [0,T], on trace la
différence entre la richesse produite par la stratégie de Merton et la valeur de l'option dans
le modèle de Merton :
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
35
Figure 4: Comparaison de l'évolution du prix de Merton et de la valeur de la
stratégie de Merton pour un call européen de strike K=1.2 (avec modèle de Merton :
r = 0, σ = 0.2, m = −0,1, δ = 0.1, λ =1)
En fait, plus le nombre de sauts réellement arrivés au cours de la période [0, T ]
est grand, plus les pertes sont importantes pour le couvreur de l'option. C'est bien ce que
l'on observe lorsque l'on trace les distributions pour la couverture d'un call européen des
pertes résiduelles relatives (cf Figure 5), conditionnellement au nombre de sauts réellement
survenus (la perte résiduelle relative est égale à l'erreur de couverture divisée par le prix en
0 du call à couvrir). Le décalage des pertes vers des pertes positives lorsque le nombre de
sauts augmente y est bien visible.
Figure 5: Distributions conditionnellement au nombre de sauts réellement survenus des
pertes résiduelles relatives dues à la stratégie delta Merton pour la couverture d'un call de
strike K=1.2 ( r = 0, σ = 0.2, m = −0,1, δ = 0.1, λ =1)
36
F. GABRIEL, P. SOURLAS
L'approche de Merton n'est donc valable que si le portefeuille de l'investisseur
comporte un grand nombre d'options dont les composantes de sauts sont indépendantes, ce
qui éliminerait le risque de sauts de ce portefeuille diversifié. Cependant, une telle
hypothèse de diversifiabilité des sauts n'apparaît pas comme une hypothèse réaliste.
L'observation des indices de marché (Nikkei, S & P 500) révèle la présence de baisses
importantes, ces variations abruptes étant dues à des composantes de sauts très corrélées
parmi les diverses composantes de l'indice. Une telle remarque conduit à s'intéresser à
d'autres stratégies de couverture, où cette fois le risque de sauts sera pris en compte.
2.2.2
Comparaison avec la couverture en delta dans les modèles traditionnels
Que se serait-il passé si le couvreur d'options était complètement passé outre
l'existence des sauts et s'était contenté de se baser sur un modèle continu ? Comme
mentionné précédemment, un investisseur, partant d'un modèle de Black-Scholes standard,
va utiliser une stratégie de couverture delta Black-Scholes. Pour cela, les paramètres de
maturité, de spot, de strike et de taux sans risque étant connus, il lui reste à trouver la
volatilité implicite du processus, c'est à dire, comme on l'avait déjà présenté dans
l'introduction de ce mémoire, le réel σ imp tel que le prix de B & S avec ce paramètre
coïncide avec le prix du marché (que l'on suppose égal au prix de Merton) en 0, à savoir :
e − λT (λT ) n BS
C BS (0, T , S , K , r , σ imp ) = ∑
C (0, T , Sn , K , r , σ n )
n!
n≥0
Pour trouver la volatilité implicite, la fonction :
σ → C0BS ( K , σ )
étant croissante,
convexe puis concave, on peut utiliser un algorithme de Newton initialisé au point
d'inflexion de la fonction :
C0M − CBS (σ n )
∂CBS
(σ n )
∂σ
2 S
σ 0 = | ( 0− rt ) |
T Ke
σ n +1 = σ n +
Cette volatilité implicite est toujours supérieure à celle sans saut ( σ du modèle de
Merton), ce qui est normal car la variance totale augmente avec les processus à sauts. Une
fois le calibrage de la volatilité implicite effectué, il ne reste plus qu'à utiliser la couverture
delta B & S avec cette volatilité. Cette stratégie de couverture peut à présent être comparée
avec la stratégie de Merton présentée précédemment, en étudiant les pertes résiduelles
relatives pour la couverture d'un call européen.
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
37
Figure 6: Comparaison des distributions des pertes résiduelles relatives dues aux
stratégies de couverture delta Black-Scholes et delta Merton pour la couverture d'un call
européen de strike K=1.2 ( r = 0, σ = 0.2, m = −0,1, δ = 0.1, λ =1)
Les détails des courbes de la figure 6 seront analysés plus loin (pour les chiffres
caractéristiques des courbes : moyenne, variance, quantiles, … , se référer au tableau
suivant la figure 7). Cependant, on peut remarquer dès à présent que les courbes de pertes
associées aux deux stratégies Merton et B & S sont très proches l'une de l'autre. Ainsi la
stratégie de couverture de Merton ne semble pas être une stratégie complètement
déraisonnée, mais il semble important d'essayer de trouver des stratégies de couverture plus
efficaces, ce afin de justifier l'utilisation d'un modèle à sauts, plutôt qu'un traditionnel
modèle B & S.
La méthode de calcul des schémas de volatilité implicite donnés par le modèle de
Merton permet d'étudier les courbes de volatilités implicites obtenues à maturité fixée ainsi
que l'influence des paramètres
δ,λ
et m sur le prix de l'option. On pourra ainsi confirmer
les résultats énoncés dans l'introduction concernant l'effet smile/skew et voir concrètement
l'intérêt de l'introduction des modèles à sauts.
Augmenter
λ
revient à augmenter la fréquence des sauts, et donc amplifie l'effet du
modèle (voir sur les figures). Le paramètre
δ
est la variance du saut. Plus on l'augmente et
plus les sauts sont importants en valeur absolue. Les variations du processus ont donc une
probabilité plus forte d'être grandes. La densité finale, dite leptokurtique, a des queues plus
épaisses.
38
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Le prix du call est donc plus important pour des strikes loins de la monnaie, et on
obtient un smile de volatilité implicite, visible sur la figure 7 :
Figure 7: effet de
δ
sur le smile de volatilité implicite
Le paramètre m est la valeur moyenne du saut. Quand il est négatif, les sauts sont en
moyenne vers le bas et la probabilité pour le sous-jacent de prendre des petites valeurs est
plus élevée. Le prix des puts hors de la monnaie (et donc des calls dans la monnaie) est plus
élevé. On a un skew de volatilité implicite (figure 8). C'est ce qui se passe dans le marché
actions du fait de la peur des crashs. Un m positif donne l'effet inverse (skew positif - figure
9), les prix des calls hors de la monnaie sont plus grands du fait de la probabilité plus forte
pour le sous-jacent d'avoir un prix élevé.
Figure 8: effet de m négatif sur le smile de volatilité implicite
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
39
Figure 9: effet de m positif sur le smile de volatilité implicite
On arrive donc avec les paramètres δ et m à expliquer et générer un smile et un
skew, λ permettant de régler l'intensité de l'effet. L'introduction des modèles à sauts prend
donc tout son sens et l'on peut désormais s'attacher à mettre en place des stratégies de
couverture pertinentes sous ce modèle.
2.3
Approche dynamique avec minimisation de la variance
2.3.1 Principe
On se place dans le modèle de marché décrit en première partie (actif non risqué et
actif risqué suivant le modèle de Merton). On suppose en outre la présence d'un nombre l
d'options liées à ce marché et dont le prix en t est (Ci )1≤ i ≤l . Rappelons que dans ce cas, une
stratégie autofinançante est la donnée d'un capital initial c et d'une suite
( φt0 , φt ,ψ t1 ,… ,ψ tl )0≤t ≤T , processus admissible, caglad (continu à gauche et admettant des
limites à droite). Une stratégie prévisible et déterminée en tout t avant qu'un saut éventuel
se produise, telle que la valeur du portefeuille en t, Vt (φ 0 , Φ ) vérifie:
l
Vt (φ 0 , Φ ) = c + φt0 St0 + φt St + ∑ψ ti Cti
i =1
l
= c + ∫ φs0 dS s0 + ∫ φs dS s + ∑ ∫ ψ si dCsi
t
t
0
0
i =1
t
0
En passant au portefeuille actualisé, on constate que :
l
t
t
Vˆt (Φ) = c + ∫ φs dSˆs + ∑ ∫ ψ si dCˆ si
0
i =1
0
40
F. GABRIEL, P. SOURLAS
et pour avoir un portefeuille autofinançant, il suffit de prendre :
l
φt0 = Vˆt (Φ ) − ce − rt − φt Sˆt − ∑ψ ti Cˆti
i =1
la donnée d'un capital initial et de la quantité d'actifs et d'options risquées (c, Φ ) détermine
donc de façon unique un portefeuille autofinancé.
Devant l'impossibilité de procéder à une réplication parfaite, il convient comme déja
mentionné d'approximer au mieux le pay-off. Afin d'approximer au mieux le pay-off, la
stratégie de couverture pourra non seulement utiliser le sous-jacent, mais aussi des options
liquides, qui ne sont plus redondantes.
Dans un tel contexte, si l'on note H, le pay-off à approximer, le but est donc de
"minimiser" le risque résiduel lié au portefeuille à savoir :
l
t
t
eT (c, Φ ) = c + ∫ φs dSˆs + ∑ ∫ ψ si dCˆ si − e − rT H
0
i =1
0
Comme déjà signalé, une bonne mesure du risque est de calculer la variance de cette erreur
(erreur quadratique), variance qu'il faut minimiser. Une telle variance peut être calculée
sous probabilité historique ou probabilité martingale équivalente, ce qui conduit à des
résultats différents. Si la première possibilité semble au premier abord la plus naturelle, la
deuxième approche a été privilégiée, les processus étudiés ayant des propriétés particulières
sous probabilité martingale (cf première partie). La robustesse au changement de
probabilité sera ultérieurement étudiée. Le problème à résoudre est donc de trouver:
l
(c , Φ ) = argmin( c ,Φ ) E prob (c + ∫ φs dSˆs + ∑ ∫ ψ si dCˆ si − e − rT H )
t
0
i =1
t
0
L'intérêt de s'être placé sous probabilité martingale est que (cf première partie) les actifs
actualisés sont des martingales, admettent une écriture particulière et que l'on peut ainsi
réaliser des projections orthogonales (cf Schweizer [2001]). Dans ce cas, on a alors le
théorème suivant :
Théorème 2.1 On suppose que sous une certaine probabilité
Q , l'évolution des
prix actualisés des options est donnée par :
⎛ Sˆt ⎞
⎜ ⎟
⎜ Cˆ t1 ⎟
t
Cˆt = ⎜ ⎟ = Cˆ 0 + ∫ σ s ( s, Cs )dWs + ∫
γ ( z ) J (ds × dx)
⎜ ⎟
0
[0, t ]× R s
⎜ Cˆ l ⎟
⎜ t⎟
⎜ ⎟
⎝ ⎠
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
41
et que H t = E Q (e − rT H | Ft ) peut aussi s'écrire :
t
H t = H 0 + ∫ σ s0 ( s, H s )dWs + ∫
γ ( x) J (ds × dx)
0
[0, t ]× R s
0
alors le couple (c , Φ ) minimisant l'erreur quadratique est donné par :
c = H 0 = E Q (e − rT H )
Φ = (σ tσ t* + ∫ γ t γ t*ν (dz )) −1 (σ t0σ t* + ∫ γ t0γ t*ν (dz ))
R
R
Démonstration:
D'après les hypothèses, (Cˆt )t est une martingale d'où, pour un processus
ˆ ) en est une aussi. En particulier E( Φ dCs
(Φ t )t admissible, ( ∫0Φ s dCs
t
∫0 s ˆ ) = ∫0 … = 0 .
t
T
0
Ainsi :
T
ˆ − (e − rT H − E(e− rT H ))
eT (c, Φ ) = c − E(e− rT H ) + ∫ Φ s dCs
0
constante
d ′espérancenulle
et comme l'espace des constantes et celui des v.a. d'espérance nulles sont orthogonales dans
L2 :
T
ˆ − (e − rT H − E(e− rT H ))) 2
E(eT (c, Φ )) 2 = E(c − E(e − rT H )) 2 + E( ∫ Φ s dCs
0
ce qui donne immédiatement la valeur de c = E(e
− rT
H ) minimisant cette expression. En
remplaçant alors c par cette valeur dans l'expression précédente et en utilisant l'écriture de
Ct et de H t sous forme martingale, on obtient :
T
T
0
0
E(eT (c, Φ )) 2 = E( ∫ (φt σ t − σ t0 )dWt + ∫
∫
∞
−∞
(φt γ t − γ t0 ) J (ds × dx)) 2
En utilisant les formules d'isométries issues du calcul stochastique avec processus à sauts :
T
∞
0
−∞
E(eT (c, Φ )) 2 = E( ∫ [(φtσ t − σ t0 ) 2 + ∫ (φt γ t − γ t0 ) 2ν (dx)]dt )
Le terme sous l'intégrale dans l'expression précédente est un terme positif quadratique en
Φ t . La couverture optimale est alors obtenue en minimisant ce terme, à savoir en annulant
la différentielle première par rapport à Φ t , ce qui donne la valeur énoncée dans le
théorème.
La valeur initiale du portefeuille optimal quels que soient les actifs utilisés en
couverture est égale au prix de l'actif à couvrir sous la probabilité martingale. Dans le cas
d'un call européen et du modèle de Merton, la valeur initiale sera donc prise égale au prix
de Merton.
Cette formule permet dans un premier temps d'étudier la stratégie de couverture d'un
call européen hors la monnaie à l'aide du seul sous-jacent.
42
F. GABRIEL, P. SOURLAS
2.3.2
Couverture par le seul sous-jacent
On considère le problème de couverture d'un call européen par le sous-jacent risqué.
D'après la première partie le sous-jacent actualisé vérifie dans le modèle de Merton une
équation stochastique différentielle qui lui donne une écriture sous forme martingale
(équation (5)) et dans ce cas, le call européen vérifie le théorème de représentation
martingale (Prop 1.7). D'après le théorème précédent (2.1), sous la probabilité Q :
, γ ( x) = (e x − 1) Sˆ
σ = σ Sˆ
t
t
σ t0 =
t
t
∂C
(t , St )σ Sˆt , γ t0 ( x) = Cˆ M (t , St e x ) − Cˆ M (t , St )
∂S
M
où C M est le prix de Merton associé au call européen à couvrir. En remplaçant la formule
du théorème 2.1 par les valeurs explicites de paramètres ci-dessus, le portefeuille optimal
de valeur initiale C M (0) et comportant en t la quantité suivante d'actif risqué est donné
par :
φt =
σ2
∂C M
1 ∞
(t , St ) + ∫ [C M (t , St e x ) − C M (t , St )](e x − 1))ν X (dx)
∂S
S −∞
∞
σ 2 + ∫ (e x − 1) 2ν X (dx)
(11)
−∞
Lorsque les sauts sont de taille nulle (les termes en
νX
disparaissent), on retrouve la
stratégie de couverture en delta, qui est bien la stratégie optimale dans ce cas. Avec la
présence de sauts, d'autres termes liés aux sauts viennent corriger ce terme afin de tenir
compte du risque lié aux sauts, ce qui n'avait pas été le cas dans la méthode proposée par
Merton. Pour la suite, on note ϒ(t , C ) le dénominateur de l'expression (2.1):
ϒ(t , C M ) = σ 2
∂C M
1 ∞
(t , St ) + ∫ [C M (t , St e x ) − C M (t , St )](e x − 1))ν X (dx)
∂S
S −∞
Le calcul explicite des termes de la formule (11) permet d'implémenter la stratégie
∂C M
(t , St ) ayant déjà été calculé dans la partie sur le prix de
ci-dessus. Le terme en
∂S
Merton, il ne reste plus qu'à expliciter les intégrales vis à vis de
λ
ν X , sachant que ν X
est
fois la fonction de distribution de la gaussienne : N (m, δ ) . Un tel calcul d'intégrale
2
donne:
∫
∞
∫
∞
(e − 1) ν X (dx) = λ[e
x
−∞
2
2 m + 2δ 2
−e
m+
δ2
2
+ 1]
C (t , St )(e − 1))ν X (dx) = C (t , St )λ[e
−∞
M
x
M
m+
δ2
2
− 1]
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
Il ne reste plus qu'à expliciter
∫
∞
43
C M (t , St e x )(e x − 1))ν X (dx) . Un raisonnement identique à
−∞
celui mené pour trouver le prix de Merton (en passant à un conditionnement en fonction du
nombre de sauts) permet de montrer que :
∫
∞
C M (t , St e x )(e x − 1))ν X (dx)
−∞
= λ (e
m+
δ2
2
C M (t , St e
m+
3δ 2
2
, σ2 +
δ2
T −t
) − C M (t , St e
m+
δ2
2
, σ 2 ))
σ2
Les résultats associés à cette stratégie de couverture seront étudiés en fin de partie
(une fois toutes les stratégies présentées afin de pouvoir les comparer).
A ce stade, les techniques de couverture utilisées reposent sur le seul sous-jacent. En
effet, la littérature financière s'est fortement concentrée sur de telles méthodes ; les marchés
étant supposés complets, l'information apportée par les autres options sur le marché étaient
considérées comme redondantes par rapport au sous-jacents seuls. L'objet de la partie
suivant va être au contraire de chercher à complexifier les stratégies de couverture en
introduisant certaines de ces options. (cf Carr et Wu [2004])
2.3.3
Introduction d'un instrument de couverture supplémentaire
L'objectif est de couvrir un call européen hors la monnaie par le sous-jacent risqué et
un autre call européen, cette fois, à la monnaie pour la valeur initiale de l'action. En
s'appuyant sur les représentations martingales données en première partie, le théorème 2.1
sous la probabilité Q induit que :
⎛
⎞
σ Sˆt
⎛
⎞
(e x − 1) Sˆt
⎜ *M
⎟
⎜
⎟
⎜ ∂C
⎟
*
*
M
x
M
(t , St )σ Sˆt ⎟ , γ t ( x) = ⎜ Cˆ (t , St e ) − Cˆ (t , St ) ⎟
σt = ⎜
∂S
⎜
⎟
⎜
⎟
⎜
⎟
⎜
⎟
⎝
⎠
⎝
⎠
σ t0 =
∂C M
(t , St )σ Sˆt
∂S
, γ t0 ( x) = Cˆ M (t , St e x ) − Cˆ M (t , St )
où C M est le prix de Merton associé au call européen à couvrir et C *M le prix de Merton
associé au call européen couvreur. En remplaçant la formule du théorème 2.1 par les
valeurs explicites de paramètres ci-dessus, on trouve un portefeuille optimal de valeur
initial C M (0) et comportant en t les quantités suivantes d'actif risqué et de call couvreur:
44
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Φ t = At−1 Bt
⎛ σ 2 + (e x − 1) 2ν X (dx)
⎞
ϒ(t , C *M )
∫
⎜
⎟
*M
⎜
⎟
1
*M
2 ∂C
2
*M
x
*M
2
) + 2 ∫[C (t , St e ) − C (t , St )] ν X (dx) ⎟
At = ⎜
ϒ(t , C )
σ (
∂S
S
⎜
⎟
⎜⎜
⎟⎟
⎝
⎠
⎛
⎞
ϒ(t , C *M )
⎜
⎟
Bt = ⎜ 2 ∂C M ∂C *M
1
M
x
M
*M
x
*M
+ 2 ∫[C (t , St e ) − C (t , St )][C (t , St e ) − C (t , St )]ν X (dx) ⎟⎟
⎜σ
S
∂S ∂S
⎝
⎠
On peut remarquer que:
•
lorsque l'on ne regarde que l'influence du sous-jacent (
At (1,1)
), on
Bt (1)
retrouve le portefeuille optimal avec la seule couverture du sous-jacent, ce qui est
cohérent.
•
dans le cas plus simple où les sauts ne sont pas des sauts gaussiens mais qu'il
ne peut y avoir qu'une seule taille de sauts (ν X = λδ x ), les calculs de Φ t se
0
simplifient énormément et l'on peut vérifier que l'erreur résiduelle est dans ce cas
nulle.
Dans ce cas, on observe déjà un gain par rapport aux méthodes de couverture
utilisant uniquement le sous-jacent. En fait si la méthode de minimisation de la variance
avec le seul sous-jacent s'apparente à la couverture delta B & S lorsque les sauts sont de
petites tailles, dans le cas où l'on introduit un call supplémentaire comme instrument de
couverture et que l'on suppose les sauts petits, la couverture optimale peut être approximée
par les ratios de couverture suivants :
∂C M ∂C *M ∂ 2 C M ∂ 2 C *M
φt1 =
(
/
)
−
∂S
∂S
∂S 2
∂S 2
∂ 2 C M ∂ 2 C *M
φt2 =
/
∂S 2
∂S 2
On reconnait là les ratios de couverture obtenus dans le modèle de B & S par la
méthode de couverture delta-gamma où cette fois on annule non seulement la dérivée
première du portefeuille de couverture (couverture en delta), mais aussi la dérivée seconde.
On gagne donc en précision.
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
45
Dans ce cas précis (modèle de Merton avec sauts gaussiens), il est possible
d'implémenter la méthode de couverture décrite précédemment. La plupart des termes
intervenant dans l'écriture de Φ ont été calculés dans le paragraphe précédent (
σ 2 + ∫ (e x − 1) 2ν X (dx) et ϒ(t , C ) ).
M
Ne reste plus qu'à expliciter:
M
x
M
*M
x
*M
∫[C (t , St e ) − C (t , St )][C (t , St e ) − C (t , St )]ν X (dx)
qu'on note Γ(t , C M , C *M ) .
Pour
∫[C
*M
(t , St e x ) − C *M (t , St )]2ν X (dx)
*
il suffira de replacer dans la formule précédent C par C . Toujours en raisonnant de la
même manière que celle utilisée pour trouver le prix de Merton, on obtient :
Γ(t , C , C
M
*M
)=λ[
*M
C − C (t , S )C
M
M
−C
−
*M
*M
M
(t , Se
(t , S )C (t , Se
1
2Πδ
∫C
*M
m+
m+
x
δ2
2
δ2
2
, σ2 +
, σ2 +
M
δ2
T −t
δ2
T −t
x
(t , St e )C (t , St e )e
−
)
)
( x − m )2
2δ 2
dx ]
Le dernier terme de l'expression, n'étant pas calculable directement, on discrétise
l'intégrale par la méthode des trapèzes. La distribution de pertes obtenue et les
commentaires seront fait ultérieurement.
2.4
Approche statique
Les analyses précédentes sont valables dans un cadre de marché sans frictions, c'està-dire sans coûts de transaction au sens large (spread, mais aussi coûts de monitoring). On
peut donc se demander si les méthodes de couverture proposées ne perdent pas de leur
attractivité lorsque de tels coûts sont pris en compte. Nous nous sommes limités à utiliser
une ou deux options pour nos stratégies de couverture dynamique afin de prendre en
compte les problèmes liés à la liquidité de ces produits. On peut noter que ces problèmes de
liquidité sont particulièrement aigües lors des fortes variations boursières qu'on essaie de
prendre en compte par les sauts.
L'approche statique est une alternative à l'approche dynamique. Il s'agit de constituer
au temps initial un portefeuille de couverture, et de le conserver jusqu'à échéance (stratégie
46
F. GABRIEL, P. SOURLAS
dite buy-and-hold ). Ceci permet de limiter les coûts de transaction et d'éliminer les
problèmes de liquidité.
L'approche statique considérée cherche à minimiser la variance des pertes
( min E( H − VT ) 2 ) où H désigne le pay-off de l'option vendue et VT la valeur du
portefeuille à maturité.
Minimiser une variance revient à effectuer une régression linéaire de type moindres
i
carrés du payoff H sur les payoffs des options de couverture CT . Notons :
⎛
⎞
e rT
⎜
⎟
ST
⎜
⎟
⎜ (S − K ) ⎟
1 +
C =⎜ T
⎟
⎜
⎟
⎜ (S − K ) ⎟
N +
⎜ T
⎟
⎜
⎟
⎝
⎠
(si l'on ne considère que la possibilité de régresser sur des calls)
On considère donc la régression: H = C β + ε , le choix optimal de portefeuille étant
alors:
β = E(C'C ) −1 E(C , H )
On simule des trajectoires afin d'estimer les matrices de variance-covariance empirique
entre le payoff H et le payoff des calls et la matrice de variance-covariance des payoffs des
calls.
Après avoir présenté les différentes stratégies envisagées, il convient désormais
d'essayer de les comparer. Pour l'histogramme suivant, représentant les pertes résiduelles
dues aux différentes stratégies, comme pour tous les histogrammes présentés par la suite, il
est bon de préciser:
•
que l'option que l'on cherche à couvrir est un call européen de strike 1.2 et de
maturité 1 (un an).
•
que le nombre de simulations réalisées pour représenter ces différentes pertes
dépend de la méthode utilisée. Pour les méthodes de Merton, B & S et MC
(couverture dynamique avec seulement le sous-jacent), nous avons utilisé 150.000
simulations. Ce nombre est de 10.000 pour la méthode MC2 (couverture
dynamique avec sous-jacent et une option) et 1.000.000 pour la couverture
statique.
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
•
47
que les pertes sont exprimées en valeur de départ de l'option à couvrir, en
l'occurrence : la valeur de Merton, en 0, du call européen de strike 1.2. La valeur
représentée correspond de plus bien aux pertes du couvreur d'options, c'est-à-dire à
la somme d'argent qu'il doit verser à l'acheteur de l'option moins la richesse
produite par sa stratégie, il s'agit du Loss , qu'on notera L, l'opposé de ce qui est
communément appelé le P & L dans les salles de marché.
•
que les densités ont été obtenues par estimateurs à noyau dont la taille de la
fenêtre a été choisie de sorte à rendre les courbes lisses . En conséquence, elle est
de taille 0.02 pour Merton, B & S et MC, de taille 0.05 pour MC2 et 0.001 pour la
couverture statique.
•
que la couverture dynamique dite MC2 utilise le sous-jacent ainsi qu'un call
de strike 1, valeur initiale du sous-jacent, pour couvrir le call de strike 1.2.
•
que la couverture statique utilise la meilleure (au sens des moindres carrés)
combinaison linéaire possible de sept instruments: une constante (du cash sur un
compte en banque), le sous-jacent et cinq calls européens de strikes: 1.1, 1.06,
1.02, 0.98 et 0.94.
•
que la fréquence de remise à jour du portefeuille de couverture dans le cadre
des stratégies de couverture dynamique (Merton, B & S, MC et MC2) est de 300
par an, ce qui correspond environ à une remise à jour journalière du portefeuille
(on estime qu'il y a approximativement 250 jours où la bourse est ouverte dans une
année).
Le jeu de paramètres utilisé pour simuler le processus sur lequel ont été calculées les pertes
représentées sur le diagramme qui suit est le suivant:
•
les taux d'intérêt sont nuls
•
les sauts du sous-jacent sont gaussiens, de moyenne -0.1, de dispersion
égale à 0.1 et arrivent avec un fréquence
λ
δ
égale à 1 (un saut en moyenne par
année).
•
la volatilité du sous-jacent est de 20% et c'est une martingale sous la
probabilité sous laquelle l'histogramme est tracé (il s'agit de la probabilité de
pricing de Merton).
•
on suppose que le couvreur d'options dispose d'une estimation correcte de
l'ensemble de ces paramètres (nous verrons plus tard ce qu'il se passe lorsque ce
n'est pas le cas), sauf pour celui qui utilise le delta de B & S: ce dernier calibre,
48
F. GABRIEL, P. SOURLAS
initialement, une volatilité implicite (rendant, en 0, le prix de B & S pour cette
volatilité implicite et le prix de Merton du call identiques) et se sert par la suite de
cette volatilité implicite, qu'il ne recalibre plus, pour couvrir l'option. Ce sera
l'approche également retenue pour tous les histogrammes représentant les pertes
obtenues par la méthode de B & S qui suivront.
Figure 10: Histogramme récapitulatif des pertes résiduelles
Le tableau suivant contient quant à lui un résumé statistique des différentes pertes
(la notation t x % désigne le quantile à x % de la variable aléatoire L). Pour chaque critère
statistique (moyenne, variance...), on a souligné la ou les valeurs qui étaient les meilleures,
correspondant ainsi à la stratégie la meilleure selon le critère de risque choisi :
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
49
On peut observer que les espérances de pertes sont toutes non significatives à 99%,
ce qui est normal puisque le processus sous-jacent est martingale.
On observe aussi qu'il n'y a pas vraiment de gain (et même plutôt une perte) à
utiliser la règle de la couverture en delta classique en sachant qu'il y a des sauts, c'est à dire
à utiliser le delta de Merton, plutôt que le delta de B & S classique après avoir calibré la
volatilité implicite. Ceci n'est pas si surprenant car si le trader utilisant le delta de Merton
est conscient qu'il peut y avoir des sauts, il choisit délibérément de ne pas couvrir ce risque.
La méthode MC (moindres carrés dynamique n'utilisant que le sous-jacent) est plus
performante que ces deux premières méthodes mais cela n'est pas si sensible: on observe
une diminution d'environ 10% de l'écart-type de la perte en l'utilisant.
Les méthodes MC2 et de couverture statique sont quant à elles très performantes.
Elles permettent de réduire l'écart-type de la perte de près de 30% et les quantiles à 1% (ces
quantités sont importantes à cause de la législation bancaire, le régulateur imposant aux
banques de contrôler leurs pertes extrêmes potentielles) de 20 à 40%. A noter que leurs
performances sont très proches et que, si la méthode MC2 semble légèrement meilleure, la
couverture statique est plus parcimonieuse car elle ne requiert que la connaissance des lois
des processus à maturité et pas la connaissance des lois des processus sur l'intégralité de la
trajectoire. Ainsi, dans ce cas les couvertures statique et MC2 sont les meilleures.
3.
ROBUSTESSE DES STRATEGIES
3.1
Robustesse aux paramètres du modèle
Nous n'avons pas abordé la question de l'estimation des paramètres du modèle dans
notre travail. On peut par exemple consulter Planchet et Therond [2005] sur ce point. On
peut néanmoins constater qu'il est en pratique relativement difficile d'obtenir une estimation
correcte du jeu de paramètres du modèle utilisé. Il est donc naturel d'étudier la robustesse
des stratégies de couverture possibles à une mauvaise estimation des paramètres. Afin de
discerner l'influence de chacun de ces paramètres, nous avons à chaque fois supposé que
tous les paramètres étaient bien estimés à part un (tendance ou paramètres de sauts selon le
cas). Dans chaque cas, nous réalisons un diagramme de pertes et nous plaçons dans un
tableau les diverses valeurs statistiques associées, valeurs qui vont nous permettre de
comparer les différentes stratégies, ce selon la manière dont le risque est appréhendé.
50
F. GABRIEL, P. SOURLAS
3.1.1 Influence de la tendance
Un des grands messages du modèle de Black and Scholes est que, toute option
pouvant être parfaitement répliquée, il n'est pas nécessaire d'estimer le paramètre de
tendance des cours. En effet, sous toute probabilité équivalente à la probabilité risqueneutre martingale, comme la probabilité historique, l'histogramme des pertes sera constitué
d'un Dirac en 0. Lorsqu'au contraire les marchés ne sont plus complets, ce qui se passe dans
le cas présent, et l'option imparfaitement répliquée, une différence entre les paramètre de
tendance du sous-jacent sous probabilités risque-neutre martingale et historique modifiera
l'histogramme des pertes. Le graphique et le tableau présentés à la page suivante ont été
obtenus en utilisant exactement le même jeu de paramètres que pour l'histogramme placé en
fin de section précédente. L'unique différence est qu'un sur-rendement du sous-jacent de
10% par rapport au taux sans risque (toujours supposé nul) a été ajouté.
Figure 11: Histogramme récapitulatif des pertes résiduelles lorsque la paramètre de
tendance est mal estimé
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
51
La première différence avec le cas où le sous-jacent ne présente pas ce surrendement par rapport au taux sans risque est que les espérances de pertes (à part celle de la
méthode de Merton) deviennent statistiquement significatives. Ceci est tout à fait normal
dans la mesure où les processus (actualisés) ne sont plus martingales. Les méthodes de
B & S et Merton donnent toujours des résultats très voisins (bien que la méthode de B & S
conduise désormais à une perte moyenne de 2% de la valeur de départ). La comparaison de
ces deux méthodes avec la méthode MC n'est par ailleurs plus évidente : MC donne des
résultats moins dispersés mais conduit à une perte moyenne élevée (12% de la valeur de
départ de l'option!). Ceci s'explique a priori par le fait que cette méthode doit consister à
prendre des positions moins élevées en actif risqué (qui porte le sur-rendement) et ne
permet pas, en moyenne, de produire une richesse suffisante pour payer le détenteur de
l'option (qui reçoit bien sûr pour sa part en moyenne bien plus de rémunération à maturité
que lorsque le sous-jacent ne présente pas de sur-rendement).
Les méthodes MC2 et de couverture statique donnent toujours de très loin les
résultats les moins dispersés. A noter la mauvaise perte moyenne (7%) engendrée par la
couverture dynamique utilisant l'option à la monnaie et le sous-jacent. La couverture
statique offre donc, une fois que tout est pris en compte, la meilleure robustesse au
paramètre de tendance.
Le tableau ci-dessous donne un résumé des pertes résiduelles obtenues en suivant
chacune des stratégies dynamiques n'utilisant que le sous-jacent dans le cas, assez peu
réaliste, où le sous-jacent ne présente pas un sur-rendement mais un sous-rendement de
10%:
52
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Ce dernier tableau laisse supposer que l'explication concernant l'importante perte
moyenne engendrée par la méthode MC est juste. Cette fois-ci, lorsque le sous-jacent porte
un sous-rendement par rapport au taux sans risque, la perte moyenne par la méthode MC est
significativement négative (elle représente un gain moyen de 7% pour le couvreur de
l'option), cette méthode conduisant à détenir moins d'actif risqué. A noter que les méthodes
de Merton et B & S conduisent quant à elles à des pertes à peine significatives. La méthode
MC reprend clairement le dessus sur ces deux autres stratégies.
3.1.2
Influence des paramètres de sauts
L'influence des paramètres de sauts mérite également d'être étudiée. Désormais, les
paramètres à l'origine des pertes ci-dessous représentées sont les mêmes que dans la section
2.3 à l'exception des paramètres de sauts utilisés par le couvreur d'options. Ce dernier se
couvre en pensant (ce qui n'est pas le cas) que les sauts sont gaussiens, de moyenne -0.05
(au lieu de -0.1) et de fréquence
λ
1.4039 (au lieu de 1). Cette valeur de
λ
a été choisie
de telle sorte que les valeurs de Merton de l'option couverte soit quasiment la même sous le
jeu de paramètres (-0.1, 1) et le jeu (-0.05, 1.4039).
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
53
Figure 12: Histogramme récapitulatif des pertes résiduelles lorsque les paramètres de saut
sont mal estimés
L'ensemble des stratégies semblent relativement robustes à ce mauvais calibrage du
modèle. La stratégie de Merton en bénéficie même très légèrement. La hiérarchie des
stratégies reste la même: Merton et B & S restent à peu près équivalentes, légèrement
moins bonnes que MC, elle-même très inférieure à MC2 et à la couverture statique, qui sont
à peu près équivalentes.
54
F. GABRIEL, P. SOURLAS
3.2
Introduction de coûts de transaction
3.2.1
Principe
Nous comparons différentes stratégies, dynamiques ou avec une couverture
statique. Dans le but de pouvoir mieux les comparer, il est important de prendre en compte
les coûts de transaction. Une stratégie dynamique conduit à échanger régulièrement le sousjacent (et éventuellement une option liquide dans le cadre de la stratégie MC2). Ceci peut
être source de beaucoup de pertes. Une couverture statique quant à elle induit un achat
initial unique de plusieurs options, qui peuvent être plus ou moins liquides, mais pour
lesquelles les coûts de transaction sont toujours assez largement supérieurs à ceux à payer
lorsqu'on achète et vend du sous-jacent. Il reste à intégrer quantitativement ces coûts dans
les histogrammes de pertes précédents.
Les taux suivants ont été choisis: à chaque fois que le trader achète du sous-jacent, il
paye un coût de transaction de 0.1%, proportionnel au montant échangé, et un coût de
transaction de 1% pour les options, également proportionnel au montant échangé. On
considère qu'à maturité le détenteur d'une option n'a pas de coûts de transaction à payer
pour recevoir les flux qui lui sont dûs alors que le détenteur d'actions doit les payer, car il
doit intervenir sur le marché pour les vendre.
Ces taux de transaction peuvent paraître relativement arbitraires, mais ils
correspondent à un ordre de grandeur réaliste, si l'on se restreint aux options relativement
liquides (ce qui est le cas ici). Pour ces taux et les paramètres choisis dans les derniers
paragraphes de ce rapport, les coûts de transaction pour la couverture statique et les
couvertures dynamiques sont proches, légèrement en faveur de la couverture statique. Nous
rappelons que cette dernière utilise 5 options liquides en plus du sous-jacent et que la
fréquence de remise à jour du portefeuille dans le cadre des stratégies dynamiques est de
300 par an.
3.2.2
Etude dans le modèle de Merton
Lorsque tous les paramètres sont bien estimés, on voit en effet que la couverture
statique, par ses plus faibles coûts de transaction, prend le dessus sur la couverture MC2.
Cette dernière garde le dessus sur les trois stratégies dynamiques utilisant uniquement le
sous-jacent mais cette fois-ci, le delta de B & S avec calibrage initial de la volatilité est la
meilleure de ces trois méthodes, supérieure à la stratégie MC, présentant une perte moyenne
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
55
et une dispersion plus fortes. Lorsque tous les paramètres sont bien estimés, la méthode MC
conduit donc à faire plus de transactions que la méthode de B & S.
Figure 13: Histogramme récapitulatif des pertes résiduelles lorsque les coûts de
transaction sont pris en compte
56
3.3
F. GABRIEL, P. SOURLAS
Etude avec modifications du paramètre de tendance
Les histogrammes et tableaux ci-dessous ont été obtenus en conférant au sous-jacent
un sur-rendement de 10% par rapport au taux sans risque (les autres paramètres sont les
mêmes que précédemment):
Figure 14: Histogramme récapitulatif des pertes résiduelles lorsque les coûts de
transaction sont pris en compte et le paramètre de tendance mal estimé
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
57
On voit ici le grand intérêt de la couverture statique. Alors que la plupart des
stratégies dynamiques conduisent à une perte moyenne, principalement due aux coûts de
transaction, de 20 à 30% de la valeur de Merton de départ de l'option, la couverture statique
ne continue qu'à coûter une dizaine de pourcents de la valeur de départ. Il s'agit de la plus
préférable des stratégies. La stratégie MC, même si elle conduit à une erreur de réplication
plus grande (cf 3.1.1), regagne de l'intérêt par rapport au cas où on ne prend pas en compte
les coûts de transaction car elle n'exige pas de grosses remises à jour du portefeuille et
présente une espérance de perte bien plus petite que les stratégies MC2 et de B & S. La
stratégie de Merton est probablement, après la couverture statique, la stratégie la plus
préférable, malgré la dispersion élevée des pertes à laquelle elle conduit.
3.3.1
Etude avec modifications des paramètres de sauts
On se place dans un cas identique à celui étudié dans la section 3.1.2. Tous les
paramètres sont bien estimés par le couvreur d'option à part les paramètres de saut: ce
dernier se couvre en pensant (ce qui n'est pas le cas) que les sauts sont gaussiens, de
moyenne -0.05 (au lieu de -0.1) et de fréquence
λ
1.4039 (au lieu de 1).
Figure 15: Histogramme récapitulatif des pertes résiduelles lorsque les coûts de
transaction sont pris en compte et les paramètres de saut mal estimés
58
F. GABRIEL, P. SOURLAS
On retrouve ici la hiérarchie la plus fréquente: les méthodes de Merton et B & S sont
à peu près équivalentes, moins bonnes que la méthode MC, elle-même moins bonne que la
méthode MC2 qui est dominée du fait de la prise en compte des coûts de transaction, par la
couverture statique avec 5 options.
CONCLUSION
Cet article a étudié un modèle de marché financier où les cours des actifs présentent
des discontinuités. L'introduction de ces dernières est utile dans la mesure où les cours réels
présentent également des sauts. Elle permet aussi de donner une explication structurelle du
smile de volatilité, cohérente, en particulier, avec le renforcement de ce dernier après le
crack de 1987.
Bien que le marché considéré s'inspire du modèle de Black and Scholes, l'ajout du
risque supplémentaire de saut confère à ce marché des caractéristiques qui l'en éloignent : la
couverture parfaite par réplication d'une option n'est plus possible, le marché est incomplet.
Une règle de pricing linéaire respectant l'hypothèse d'absence d'opportunités d'arbitrage
correspond toujours au pricing à l'aide d'une probabilité risque-neutre, qui n'est plus unique
du fait de l'incomplétude des marchés.
COUVERTURE D’OPTIONS EN PRESENCE DE SAUTS
59
La couverture parfaite n'étant plus possible, il a fallu déterminer une mesure de
risque, permettant de classer, sur la droite réelle, l'ensemble des pertes résiduelles (variables
aléatoires). Nous nous sommes, pour des raisons évoquées dans le présent article, focalisés
sur l'espérance L2 (le second moment).
Des stratégies autofinançantes de couverture dynamiques d'options, utilisant le sousjacent et éventuellement d'autres options, ainsi qu'une stratégie de couverture statique, ont
été étudiées dans ce cadre. La principale conclusion à laquelle nous sommes parvenus est
que la couverture statique impliquant suffisamment d'options est probablement la meilleure
des stratégies étudiées, surtout si l'on s'intéresse à la robustesse à un mauvais calibrage du
modèle et on intègre les coûts de transaction.
D'autres aspects resteraient cependant à approfondir:
•
étudier d'autres stratégies de couverture, par exemple des stratégies, non plus
autofinançantes, mais autofinancées en moyenne, des stratégies quasi-statiques
(avec plusieurs remises à jour du portefeuille) qu'il faudrait comparer aux
stratégies étudiées.
•
examiner les complications survenant lorsque les options de couverture n'ont
pas la même maturité que les options à couvrir, toutes les options n'étant pas
disponibles à la même maturité sur le marché.
•
s'intéresser à la couverture d'options plus complexes que celles que nous avons
couvertes, des options asiatiques ou à barrière par exemple.
•
regarder quelle est la meilleure fréquence, dans le cadre de stratégies
dynamiques, de remise à jour du portefeuille (en incluant les coûts de
transaction) et voir si, pour cette fréquence, la couverture statique reste toujours
préférable.
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