Me KAMARA Adama - Tribunal de Commerce d`Abidjan

Transcription

Me KAMARA Adama - Tribunal de Commerce d`Abidjan
EPUBLIQUE DE COTE D’IVOIRE
------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
--------------TRIBUNAL DE COMMERCE
D’ABIDJAN
--------------RG N°3020/2015
------------Affaire
La société BONDOUKOU
MANGANESE
(Me KAMARA Adama)
AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 23 NOVEMBRE
2015
Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique
ordinaire du 23 Novembre 2015 tenue au siège dudit Tribunal, à
laquelle siégeaient :
Monsieur TRAORE BAKARY, Président ;
Messieurs BAGROU BAGROU ISIDORE, ALLAH-KOUADIO
JEAN-CLAUDE, OKOUE EDOUARD et KARAMOKO FODE
SAKO, Assesseurs ;
Contre
Monsieur FOFANA
Aboubakar Christophe
(SCPA NANA-BLEDE & Associés)
DECISION
Contradictoire
Déclare la société BONDOUKOU
MANGANESE recevable en son
opposition ;
Constate la non-conciliation des
parties ;
Dit la société BONDOUKOU
MANGANESE mal fondée en son
opposition ;
Dit Monsieur FOFANA Aboubakar
Christophe bien fondé en sa
demande en recouvrement ;
Condamne
la
société
BONDOUKOU MANGANESE à lui
payer la somme de onze millions
cinq cent quatre-vingt-seize mille
trois cent vingt Francs (11.596.320
F CFA) ;
La condamne aux dépens ;
Avec l’assistance de Maître SEKONGO MINATA EVELYNE,
Greffier assermenté ;
A rendu le jugement dont la teneur suit dans la cause entre :
La société BONDOUKOU MANGANESE, SA, au capital de
10.000.000 F CFA, dont le siège social est sis à Abidjan Plateau,
Boulevard Lagunaire, 18 BP 1984 Abidjan 18, prise en la personne de
son représentant légal, Monsieur BAJLA Ansu Krishna Kumar, son
Directeur Général, demeurant ès qualité au siège social sus indiqué ;
Laquelle a pour conseil, Maître KAMARA Adama, Avocat près la
Cour d’Appel d’Abidjan, y demeurant Abidjan Cocody, Immeuble ‘La
Baie de Cocody », 1er étage, Appartement n°8, route du Lycée
Technique, 04 BP 403 Abidjan 04, Tel : 22 44 29 07, Fax : 22 44 28
93, E-mail : [email protected]/[email protected] ;
Demanderesse d’une part ;
Et
Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe, né le 23 Mai 2012 à
Marcory, enfant mineur, fils de FOFANA Aboudramane et de
DIARRASSOUBA Aminata, de nationalité Ivoirienne, représenté par
son père, FOFANA Aboudramane, transporteur, domicilié à Abidjan
Abobo, Cel : 08 62 89 47/44 38 49 33 ;
Lequel a pour conseil, la SCPA NANA-BLEDE & Associés, Avocats à
la Cour d’Appel d’Abidjan, y demeurant Cocody Riviera II, Carrefour
Sainte Famille, Résidence la Paix II, Appartement 4, Tél : 22 49 38
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76, email : [email protected] ;
Défendeur d’autre part ;
Enrôlée pour l’audience du 31 Juillet 2015, l’affaire a été appelée et
renvoyée au 06 Octobre 2015 devant la 4ème chambre pour
attribution, puis au 12 Octobre 2015 devant la 5ème chambre aux
mêmes fins et au 19 Octobre 2015 pour la comparution du
défendeur ;
Advenue cette date, le tribunal a procédé à la tentative de
conciliation qui s’est soldée par un échec ;
Une instruction a alors été ordonnée et confiée au Vice-Président
TRAORE BAKARY et la cause a été renvoyée à l’audience publique
du 09 Novembre 2015 pour être mis en délibéré ;
L’instruction a fait l’objet de l’ordonnance de clôture n°1182/2015
du 05 Novembre 2015 ;
A l’audience du 09 Novembre 2015, la cause a été mise en délibéré
pour décision être rendue le 23 Novembre 2015 ;
Advenue cette audience, le Tribunal a vidé son délibéré ;
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier ;
Vu l’échec de la tentative de conciliation ;
Ouï les parties en leurs moyens et prétentions ;
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit d’huissier en date du 23 Juillet 2015, la société
BONDOUKOU MANGANESE a formé opposition à l’ordonnance
d’injonction de payer N°2529/2015 rendue le 02 Juillet 2015 par la
juridiction présidentielle du Tribunal de Commerce d’Abidjan qui l’a
condamnée à payer à Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe, la
somme de 11.596.320 F CFA ;
Cette ordonnance d’injonction de payer a été signifiée à la société
BONDOUKOU MANGANESE le 09 Juillet 2015 et celle-ci a assigné
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Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe à comparaître par devant
le Tribunal de Commerce d’Abidjan le 31 Juillet 2015 pour statuer
sur les mérites de son opposition ;
La société BONDOUKOU MANGANESE allègue à cet effet in limine
litis, l’irrecevabilité de la requête aux fins d’injonction de payer en
date du 1er Juillet 2015 pour violation de l’article 3 du Code de
Procédure Civile, Commerciale et Administrative en ce que
Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe n’a pas la capacité pour
agir ;
Elle relève qu’il est indiqué dans sa requête, que Monsieur FOFANA
Aboubakar Christophe est un mineur représenté par son père,
Monsieur FOFANA Aboudramane et qu’un mineur n’ayant pas la
capacité d’agir en justice ne peut être représenté ;
Elle allègue également l’irrecevabilité de l’action de Monsieur
FOFANA Aboubakar Christophe pour défaut de qualité à agir pour
violation de l’article 3 alinéa 2 du Code susvisé aux termes duquel
l’action n’est recevable que si le demandeur a la qualité pour agir en
justice ;
Elle déclare qu’elle a conclu le contrat avec Monsieur FOFANA
Aboubakar Christophe qui est majeur et qui dispose d’un registre de
commerce, car transporteur, et non avec le défendeur qui est
mineur ;
La société BONDOUKOU MANGANESE allègue en outre, la nullité
de l’exploit de signification de l’ordonnance en date du 09 Juillet
2015, pour violation de l’article 8 de l’acte uniforme portant
organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des
voies d’exécution motif pris de ce que outre le montant fixé par la
décision et les intérêts et frais de greffe, d’autres montants figurent
sur l’exploit de signification, notamment les droits proportionnels, la
TVA, la sommation interpellative, la sommation de payer et le coût
du présent exploit ;
Subsidiairement au fond, la société BONDOUKOU MANGANESE
soutient que l’action de Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe
est mal fondée car celui-ci ne peut contracter en application de
l’article 7 de l’acte uniforme portant sur le droit commercial général
aux termes duquel, le mineur ne peut avoir la qualité de
commerçant ;
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En réplique, Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe, représenté
par son père, explique que par le truchement de son administrateur
légal, son père, la société BONDOUKOU MANGANESE lui a confié
le transport de manganèse au port d’Abidjan ;
Il ajoute que sur un ensemble de 14 factures pour un montant de
18.979.310 F CFA, la société BONDOUKOU MANGANESE a réglé la
somme de 7.382.990 F CFA par différents chèques BACI et reste lui
devoir la somme de 11.596.320 F CFA ;
Il indique qu’il a signifié l’ordonnance d’injonction de payer à la
société BONDOUKOU MANGANESE le 09 Juillet 2015 et n’ayant
reçu aucun acte d’opposition dans le délai requis, il a sollicité et
obtenu du greffe de la juridiction de céans, un certificat de non
opposition et a fait apposer la formule exécutoire sur la décision
susvisée ;
Il précise que lors de la signature du contrat, il a été représenté par
son père agissant en qualité d’administrateur légal et que malgré son
âge, il a bien exécuté son obligation ;
Il ajoute que la société BONDOUKOU MANGANESE qui a fait un
début de paiement, est mal venue pour soutenir qu’elle ne peut
payer parce qu’il est mineur ;
Dans tous les cas, relève-t-il, nul ne peut se prévaloir de sa propre
turpitude ;
Il fait valoir que sa créance réunit toutes les conditions pour être
recouvrée suivant la procédure d’injonction de payer ;
Il sollicite en conséquence que la société BONDOUKOU
MANGANESE soit déclarée mal fondée en son opposition ;
Dans ses conclusions en date du 23 Octobre 2015, la société
BONDOUKOU MANGANESE persiste pour soutenir que Monsieur
FOFANA Aboubakar Christophe n’a pas la qualité pour agir en
justice ;
SUR CE
EN LA FORME
SUR LE CARACTERE DE LA DECISION
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Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe a conclu ;
Il y a lieu de statuer par décision contradictoire ;
SUR LE TAUX DU RESSORT
Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe sollicite le paiement de la
somme de 11.596.320 F CFA, montant inférieur à 1.000.000.000 F
CFA ;
Il y a lieu de statuer en premier et dernier ressort, conformément à
l’article 8 de la loi organique N°2014-424 du 14 Juillet 2014 portant
création, organisation et fonctionnement des juridictions de
commerce ;
SUR LA RECEVABILITE DE L’OPPOSITION
L’opposition de la société BONDOUKOU MANGANESE est
intervenue dans les forme et délai légaux ;
Il y a lieu de la déclarer recevable ;
AU FOND
SUR LE BIEN FONDE DE L’OPPOSITION
Sur l’irrecevabilité de l’action et de la requête aux fins d’injonction
de payer
Prenant prétexte de sa qualité de mineur, la société BONDOUKOU
MANGANESE allègue l’irrecevabilité de l’action de Monsieur
FOFANA Aboubakar Christophe et de la requête aux fins
d’injonction de payer pour violation de l’article 3 du Code de
Procédure Civile, Commerciale et Administrative en ce que d’une
part, Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe n’a pas la capacité
pour agir en justice, d’autre part, il n’a pas la qualité pour agir en
justice ;
Aux termes de l’article 3 du Code de Procédure Civile, Commerciale
et Administrative, « l’action n’est recevable que si le demandeur :
1° Justifie d’un intérêt légitime juridiquement protégé, direct et
personnel ;
2° A la qualité pour agir en justice ;
3° Possède la capacité d’agir en justice » ;
Il ressort de l’analyse de ce texte que l’action n’est recevable que si le
demandeur possède la capacité d’agir en justice et a la qualité pour
agir en justice ;
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En l’espèce, il ressort de la requête aux fins d’injonction de payer en
date du 1er Juillet 2015, que ladite requête a été introduite par
Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe, mineur, représenté par
son père, Monsieur FOFANA Aboudramane ;
Le mineur ayant été représenté par son père, peut valablement ester
en justice ;
Il échet en conséquence de déclarer mal fondée, l’exception
d’irrecevabilité de l’action et de la requête aux fins d’injonction de
payer ;
Sur la nullité de l’exploit de signification de l’ordonnance
d’injonction de payer
La société BONDOUKOU MANGANESE allègue la nullité de
l’exploit de signification de l’ordonnance d’injonction de payer en
date du 09 Juillet 2015 pour violation de l’article 8 de l’acte
uniforme portant organisation des procédures simplifiées de
recouvrement et des voies d’exécution, motif pris de ce que, outre le
montant fixé par la décision et les intérêts et frais de greffe, d’autres
montants figurent sur l’exploit de signification, notamment les droits
proportionnels, la TVA, la sommation interpellative, la sommation
de payer et le coût du présent exploit ;
Toutefois, il est de jurisprudence constante que l’indication dans
l’acte de signification de frais supplémentaires ne vicie pas celui-ci
dès lors que les frais exigés par l’acte uniforme portant organisation
des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
s’y trouvent ;
Aux termes de l’article 8 de l’acte uniforme susvisé, « à peine de
nullité, la signification de la décision portant injonction de payer
contient sommation d’avoir :
-soit à payer au créancier le montant de la somme fixée par la
décision ainsi que les intérêts et frais de greffe dont le montant est
précisé … » ;
En l’espèce, l’exploit de signification daté du 09 Juillet 2015 contient
toutes les mentions prescrites à peine de nullité par l’article 8
susvisé ;
Il y a donc lieu de dire ce moyen mal fondé et le rejeter ;
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Sur le recouvrement de la créance
La société BONDOUKOU MANGANESE sollicite que Monsieur
FOFANA Aboubakar Christophe soit déclaré mal fondé en son action
en recouvrement car, aux termes de l’article 7 de l’acte uniforme
portant sur le droit commercial général, le mineur ne peut avoir la
qualité de commerçant ;
Aux termes de l’article 7 alinéa 1 de l’acte uniforme susvisé, « le
mineur, s’il n’est pas émancipé, ne peut avoir la qualité de
commerçant ni effectuer des actes de commerce » ;
Toutefois, aux termes de l’alinéa 2 de l’article 1125 du Code Civil,
« les personnes capables de s’engager ne peuvent opposer
l’incapacité du mineur, de l’interdit ou de la femme mariée avec qui
elles ont contracté » ;
En l’espèce, il résulte des pièces de la procédure qu’un protocole
d’accord a été signé entre Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe
représenté par son père en qualité d’administrateur légal et la société
BONDOUKOU MANGANESE portant sur le transport de manganèse
de Bondoukou à Abidjan ;
Dans ces conditions, la société BONDOUKOU MANGANESE ne peut
se prévaloir de la qualité de mineur de Monsieur FOFANA
Aboubakar Christophe pour s’opposer au paiement réclamé ;
Par ailleurs, la société BONDOUKOU MANGANESE ne conteste pas
devoir la somme de 11.596.320 F CFA dont Monsieur FOFANA
Aboubakar Christophe sollicite le paiement ;
Il convient de dire que la créance poursuivie est certaine, liquide et
également exigible ;
Il échet en conséquence de faire droit à la demande de Monsieur
FOFANA Aboubakar Christophe en condamnant la société
BONDOUKOU MANGANESE à lui payer la somme de 11.596.320 F
CFA ;
SUR LES DEPENS
La société BONDOUKOU MANGANESE succombe ;
Il sied de mettre les dépens à sa charge ;
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PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en premier et dernier
ressort ;
Déclare la société BONDOUKOU MANGANESE recevable en son
opposition ;
Constate la non-conciliation des parties ;
Dit la société BONDOUKOU MANGANESE mal fondée en son
opposition ;
Dit Monsieur FOFANA Aboubakar Christophe bien fondé en sa
demande en recouvrement ;
Condamne la société BONDOUKOU MANGANESE à lui payer la
somme de onze millions cinq cent quatre-vingt-seize mille trois cent
vingt Francs (11.596.320 F CFA) ;
La condamne aux dépens ;
Et ont signé le Président et le Greffier
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