La « rue arabe - Arab Trade Union Confederation

Transcription

La « rue arabe - Arab Trade Union Confederation
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Data Base
Identification card
Title:
La « rue arabe » au-delà de l’imaginaire occidental
Topic:
Mouvements sociaux
Author:
Asef Bayat
Photo:
None
Type:
Article
Language:
Français
Year:
2009
Source
None
Source Link:
None
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
La « rue arabe » au-delà de l’imaginaire
occidental
Au-delà des clichés qui la présentent comme
« agressive » ou « apathique », la rue arabe est
d’abord un lieu politique, complexe et évolutif,
d’expression de griefs et de sentiments partagés –
des luttes anticoloniales aux mobilisations propalestiniennes ou contre la guerre en Irak, en passant
par
les
mouvements
islamistes,
sociaux,
démocratiques et les innombrables « empiétements
silencieux » qui défient l’ordre établi et la répression.
Durant les semaines de tension entre les attentats du 11
septembre 2001 et les premiers bombardements étatsuniens sur l’Afghanistan, et jusqu’à la défaite des talibans,
nombre de commentateurs firent part de leurs craintes
face à « l’irrationalité de la rue arabe » (Bartley, 2001),
pour reprendre une expression utilisée postérieurement
par le Wall Street Journal. Si les Etats-Unis attaquent un
pays musulman, s’inquiétaient les experts, la « rue
arabe » se rangerait derrière Oussama Ben Laden et les
autres islamistes radicaux, ce qui mettrait les intérêts
américains de la région en danger et vouerait
probablement la « guerre contre le terrorisme » de George
Bush à l’échec.
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Alors que les troupes nord-américaines se préparaient à
se déployer en Afghanistan, plusieurs représentants de
Washington allèrent jusqu’à implorer le premier ministre
israélien Ariel Sharon de mettre un frein à sa campagne
de répression du soulèvement palestinien. Si les
incursions israéliennes en territoire palestinien se
poursuivent durant l’assaut américain, craignaient-ils, la
colère des masses arabes risque de franchir le point
d’ébullition et les gendarmes locaux seront alors bien
incapables d’empêcher les foules déchaînées de s’en
prendre aux Américains, de saccager leurs propriétés
dans la région et de menacer la stabilité des régimes
arabes amis. Le sénateur Joseph Biden agitait même la
possibilité que « toutes les ambassades états-uniennes du
Moyen-Orient soient réduites en cendres » (Satloff, 2002).
Avec l’enchaînement des guerres – en Afghanistan puis
en Irak – et des offensives israéliennes – au Liban puis à
Gaza –, la « rue arabe » est devenue une expression
routinière dans les médias occidentaux, objet tout à la fois
d’une profonde anxiété et d’un mépris condescendant. La
« rue arabe », et par extension la « rue musulmane », est
devenue une expression lourde de connotations,
renvoyant à une mentalité réifiée et « anormale », à un
lieu étrange, rempli de personnes furieuses qui, soit
qu’elles nous haïssent ou qu’elles ne nous comprennent
pas, nous lancent des imprécations.
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Toute action « arabe » ou « musulmane » en est venue à
être décrite en termes « d’émeute, de soulèvement, de
révolte » (Satloff, 2002), menant à la conclusion logique
selon laquelle « les critères occidentaux de mesure de
l’opinion publique ne s’appliquent pas au monde arabe ».
La presse n’a cessé d’instiller aux lecteurs américains
l’idée qu’un rien pouvait transformer des masses arabes
apparemment inoffensives en « émeutes si violentes
qu’elles peuvent balayer des gouvernements » – en
particulier si ces gouvernements sont modérés et
demeurés loyaux envers les Etats-Unis (Kifner, 2001).
Cette anxiété quant aux réactions de la « rue arabe » n’a
pas empêché les Etats-Unis de pénétrer en Afghanistan.
Les bombes états-uniennes ont fait des milliers de morts
parmi les civils afghans, le conflit israélo-palestinien ne
s’est « refroidi » que brièvement et Bush s’est rapidement
tourné vers l’Irak. Et bien que de nombreuses
manifestations de protestation se soient produites dans
les mondes musulman et arabe, aucune ambassade
états-unienne n’a été brûlée. Les masses arabes ne se
sont pas non plus ralliées à Ben Laden.
Seule l’invasion de la Bande de Gaza par Israël au
printemps 2002 a suscité des manifestations collectives
de colère parmi les Arabes ordinaires. Les millions de
citoyens arabes qui sont descendus dans les rues du
Caire, d’Amman, de Rabat et d’ailleurs pour manifester
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
leur soutien aux Palestiniens ne sont d’ailleurs pas sans
rappeler l’enracinement populaire des mouvements
arabes anti-coloniaux de l’après-guerre. Mais la « rue »
n’ayant pas explosé quand les Américains ont bombardé
l’Afghanistan durant le Ramadan, cet exemple de colère
populaire latente au sein du monde arabe n’a pas été
relevé par les médias.
La rue arabe a tout à coup cessé d’être considérée
comme un baril de poudre imprévisible pour être
rabaissée à un mythe, un « bluff » qui occulte le fait que
les pays arabes sont remplis de gens subissant un
« lavage de cerveau » qui les maintient dans
l’« apathie » [1]. Les implications pour l’orientation
stratégique des Etats-Unis ont été claires : les Arabes
n’ayant pas les tripes pour stopper une attaque sur l’Irak
ou empêcher toute autre initiative états-unienne
impopulaire, Washington ne doit pas faire preuve de
« sensibilité », mais bien de « résolution » face aux
récriminations des alliés arabes (Bartley, 2001).
Il ne faut donc plus prendre les slogans des manifestants
ou les affirmations des gouvernements arabes (selon
lesquelles ils subissent une pression populaire ingérable)
pour argent comptant. The Economist alla jusqu’à
annoncer la « mort » définitive de la rue arabe, peu de
temps avant que la conseillère à la sécurité nationale
Condoleezza Rice ne déclare que puisque les populations
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
arabes sont trop faibles pour revendiquer la démocratie,
les Etats-Unis doivent intervenir pour libérer le monde
arabe de ses tyrans.
« POLITIQUE DE LA RUE » ET « RUE POLITIQUE »
Qu’elle fasse une chose ou son contraire, la « rue arabe »
est donc systématiquement disqualifiée par les médias
occidentaux – elle est soit « irrationnelle » et
« agressive », soit « apathique » et « morte ». Bref elle
n’est pas considérée comme une chose « normale » par
les sociétés occidentales. La « rue arabe » est en quelque
sorte devenue l’extension d’un autre concept, tristement
célèbre, celui d’« esprit arabe », qui lui aussi réifie dans
une violente abstraction la culture et la conduite collective
de tout un peuple. Elle est le produit de l’imagination
orientaliste, qui dérive de la représentation coloniale de
« l’autre » et qui a malheureusement été intégrée par
certains arabes eux-mêmes.
Ce n’est donc pas un hasard si la « rue arabe » est
rarement considérée comme le lieu d’expression d’une
opinion publique ou d’une préférence collective, comme
son alter ego occidental, mais qu’elle est plutôt perçue
comme une « entité physique », une force brute qui ne
s’exprime qu’à travers les émeutes et la violence. La « rue
arabe » n’existe que dans cet imaginaire de la violence,
elle est ramenée à une menace pour les intérêts et une
perturbation pour les grandes stratégies. La rue en tant
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
que manifestation d’une préférence collective n’existe tout
simplement pas pour les décideurs nord-américains. C’est
cette perception de la « rue arabe » qui a informé la
stratégie de Washington au Moyen-Orient, une stratégie
qui a malmené l’opinion publique arabe, en offrant un
appui inconditionnel à Ariel Sharon lors du démantèlement
de l’Autorité palestinienne, tout en faisant la guerre à
l’Irak.
La politique de la rue (street politics) en général et de la
rue arabe en particulier est cependant plus complexe. La
rue n’est pas une simple réalité physique et la rue arabe
n’est pas une force brute… ou inerte. La « rue arabe » est
non seulement l’expression de la politique de la rue en
général, mais aussi, et surtout, de ce que j’appelle la « rue
politique » (political street). La « politique de la rue » est
par excellence le théâtre urbain moderne de la
protestation. Il suffit de se souvenir du rôle que la « rue »
a joué lors de changements historiques majeurs tels que
la révolution française, le mouvement ouvrier, les luttes
anticoloniales, le mouvement contre la guerre du Vietnam
aux Etats-Unis, les révolutions de velours en Europe de
l’Est ou le mouvement anti-guerre plus récemment.
Dans ce sens, la rue est le premier lieu de la politique
pour les gens ordinaires, pour ceux qui sont
structurellement absents des positions institutionnelles de
pouvoir – les chômeurs, les travailleurs précaires ou les
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
migrants. Elle est un médium clé, à travers lequel les
opinions et les perspectives se forment, s’étendent et
s’expriment. La « politique de la rue » est plus que le
simple conflit entre des autorités et des individus n’ayant
pas accès aux institutions et aux espaces formels
d’expression quant à l’usage actif de l’espace public et le
contrôle de l’ordre public. Les rues ne sont pas seulement
des lieux où les gens protestent, mais aussi des espaces
où ces gens « étendent » leur protestation au-delà de
leurs cercles immédiats pour inclure aussi les inconnus,
les « étrangers » qui peuvent épouser des griefs
similaires, réels ou imaginés.
C’est pourquoi non seulement les groupes exclus des
institutions, mais également ceux qui jouissent d’un
certain pouvoir institutionnel, comme les travailleurs ou les
étudiants, considèrent les rues comme des arènes pour
l’extension de leur opinion partagée. Ce potentiel de
contagion menace les autorités, qui en retour exercent un
pouvoir omniprésent sur les espaces publics – à travers
les patrouilles de police, la régulation du trafic, la division
spatiale. Les étudiants de l’Université du Caire, par
exemple, effectuent normalement leurs marches de
protestation à l’intérieur du campus. Cependant, dès le
moment où ils décident d’en sortir, la police anti-émeute
est immédiatement déployée à grande échelle pour
encercler les manifestants, les refouler dans un coin
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
inaccessible au regard du public et « localiser »
l’événement. En effet, la rue actuelle, étroitement gardée,
renvoie au fait que la rue métaphorique n’est pas tant
désertée que contrôlée.
Au-delà d’un espace physique pour la « politique de la
rue », les rues des villes renvoient à un énoncé
symbolique différent mais crucial, qui transcende la
dimension physique de la rue, pour véhiculer les
sentiments collectifs d’une nation ou d’une communauté.
C’est ce que j’appelle la « rue politique » – une notion
distincte de la « politique de la rue ». La rue politique
renvoie aux sensibilités collectives, aux sentiments
partagés, au jugement public des gens ordinaires, dans
leurs énonciations et leurs pratiques quotidiennes qui sont
exprimées dans les lieux publics – dans les taxis, les bus,
les magasins, sur les trottoirs ou, de façon plus audible,
dans les manifestations de masse.
UNE RUE ARABE ÉVOLUTIVE
Quelle est la spécificité du monde arabe en termes de
« rue politique » ? Les luttes anticoloniales sont une
première démonstration de l’activisme historique des rues
arabes. Des mouvements populaires ont émergé en Syrie,
en Irak, en Jordanie et au Liban à la fin des années 1950,
après que Nasser ait nationalisé le canal de Suez. La
triple agression par la Grande-Bretagne, la France et
Israël en octobre 1956, pour reprendre le contrôle du
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
canal, a déclenché une vague de manifestations de
soutien à l’Egypte dans le monde arabe. Bien qu’il n’y ait
sans doute pas eu de grand mouvement de solidarité
panarabe entre 1956 et la vague propalestinienne de
2002, les mouvements de contestation sociale des
travailleurs, des artisans, des femmes et des étudiants –
pour le développement social, les droits citoyens et la
participation politique – ont régulièrement occupé le
devant de la scène dans la majorité des pays arabes
(Burke et Lapidus, 1990 ; Lockman, 1994).
Les mouvements ouvriers du Liban, de Syrie, d’Egypte, du
Yémen et du Maroc ont mené des grèves et des
protestations de rue sur des questions de conditions de
vie comme sur des enjeux politiques. Durant les années
1980, l’ère des programmes d’ajustement structurel
recommandés par le FMI, les syndicats arabes ont
cherché à résister à la suppression des subventions aux
biens alimentaires, aux augmentations de prix, aux
diminutions de salaire et aux licenciements. Des arrêts de
travail « sauvages » ont eu lieu, malgré les accords « zéro
grève » (no strike deal) et la répression des militants. La
peur de la résistance populaire a d’ailleurs souvent amené
les gouvernements à reporter les programmes
d’ajustement structurel ou à préserver certaines politiques
sociales (Richards et Waterbury, 1990 ; Pripstein
Posusney, 1997).
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Les populations arabes ont réagi rapidement à la rupture
des contrats sociaux traditionnels. Les manifestations
urbaines se sont multipliées dans les années 1980 contre
la hausse vertigineuse du coût de la vie. Ce fut le cas en
août 1983 dans les villes du Nord du Maroc, suite à la
décision du gouvernement marocain de réduire de 20%
les subventions à la consommation. Des manifestations
similaires ont lieu à Tunis en 1984 et à Khartoum en 1982
et 1985. A l’été 1987, les factions rivales de la guerre
civile libanaise participent main dans la main à une même
manifestation de masse contre la dévaluation de la
monnaie libanaise.
Quelques temps plus tard, à l’automne 1988, c’est
l’Algérie qui est touchée par des émeutes contre
l’augmentation du coût de la vie, puis la Jordanie qui est le
théâtre d’une mobilisation nationale en 1989, sur les
conditions critiques des Palestiniens et contre l’austérité
économique, obligeant le roi Hussein à introduire
certaines mesures de libéralisation politique. En 1996, une
nouvelle vague de manifestations de rue contre la
suppression de subventions amènera le roi jordanien à
revenir sur ces mesures et à restreindre les libertés
d’expression et de rassemblement (Andoni et Schwedler,
1996). En Egypte, en 1986, ce sont les sous-officiers de
l’armée qui descendent dans la rue pour contester la
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
décision du gouvernement Moubarak de prolonger le
service militaire.
Si la majorité des manifestations urbaines est le fait des
classes populaires et moyennes, celles-ci bénéficient
souvent du renfort des étudiants. Mais les mouvements
étudiants ont également leur propre agenda militant. En
Egypte, les années 1970 constituent l’âge d’or d’un
militantisme étudiant dominé par les tendances de
gauche. L’opposition passionnée au traité de paix de
Camp David et à l’austérité économique a mis des milliers
d’étudiants dans la rue, des étudiants qui, depuis
plusieurs années, organisaient des conférences, des
grèves, des sit-in, des marches, etc. En 1991, les
étudiants d’Egypte, d’Algérie, du Maroc, de Jordanie, du
Yémen et du Soudan manifestent pour exprimer leur
colère, contre l’invasion du Koweït par l’Irak tout comme
contre l’intervention états-unienne. En 1987, les étudiants
palestiniens sont aux premiers rangs de la
première Intifada, malgré la répression féroce de l’armée
israélienne, qui abat, emprisonne et ferme les universités
palestiniennes.
Pour autant, la rue arabe a subi de fortes transformations
depuis le tournant des années 1990. Tout d’abord, les
manifestations sur les questions de pouvoir d’achat se
sont faites plus rares, car les gouvernements se sont
montrés plus prudents dans l’application des programmes
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
d’ajustement, ont déployé des filets sociaux et permis aux
ONG et associations caritatives islamiques d’aider les
pauvres. De fait, le monde arabe est la région en
développement ayant la plus faible incidence d’extrême
pauvreté (UNDP, 2002). Dans le même temps, le
mécontentement de la classe moyenne paupérisée a été
canalisé dans les mouvements islamistes en général et
dans la politisation des syndicats corporatistes en
particulier.
Ensuite,
les
mouvements
sociaux
traditionnels
« classistes » – les organisations paysannes, les
coopératives et les syndicats – ont connu un déclin relatif.
Les bases sociales des mouvements paysans et des
coopératives se sont érodées à mesure que les paysans
quittaient les campagnes pour les villes ou perdaient leurs
terres et devenaient ouvriers agricoles à la journée.
L’affaiblissement du populisme économique sous les
coups de l’ajustement structurel a mené au déclin de
l’emploi dans le secteur public, qui constituait le nerf du
syndicalisme. De réformes en dégraissages, de
privatisations en relocalisations, l’ajustement structurel a
sapé le syndicalisme du secteur public, tandis que les
nouvelles entreprises privées liées au capital international
restent sous syndicalisées.
Bien que la bureaucratie d’Etat demeure imposante, ses
employés, sous-payés, sont de moins en moins nombreux
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
à se syndicaliser. La plupart survivent en ayant un
deuxième ou un troisième emploi dans le secteur informel.
Aujourd’hui, la majorité des travailleurs arabes sont aussi
indépendants (self-employed). Beaucoup de salariés
travaillent dans des petites entreprises où prévalent des
rapports de type paternaliste. En moyenne, entre le tiers
et la moitié de la force de travail urbaine est active dans le
secteur informel non régulé et non syndicalisé. Les
tensions entre les chefs et les employés ne sont pas rares
dans ces établissements, mais les travailleurs sont
généralement plus loyaux envers leur chef qu’envers les
travailleurs du magasin d’à côté.
Si la croissance exponentielle des ONG à partir des
années 1980 a ressuscité le militantisme civique, force est
de constater qu’elles suivent « une politique de la
fragmentation » : elles divisent les bénéficiaires potentiels
de leur activisme en petits groupes, substituent la charité
aux principes de droits et de responsabilité et promeuvent
le lobbying au détriment de la politique de la rue. Ce sont
ces ONG actives sur les droits humains, les droits de la
femme et la démocratie – et non plus sur les écarts de
richesse et de revenu – qui ont renouvelé les espaces de
mobilisation sociale dans le monde arabe.
A mesure que la population dépend d’activités informelles
et que ses loyautés se fragmentent, les luttes pour le
salaire et les conditions de travail perdent du terrain face
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
aux préoccupations d’emplois, de travail informel et de
coût de la vie. L’urbanisation accélérée entraîne une
multiplication des demandes pour les services collectifs,
les logements décents, la santé et l’éducation. Dans ces
conditions, les couches populaires se tournent moins vers
la protestation collective que vers les stratégies
individuelles d’« empiètement silencieux ». Les individus
et les familles luttent pour répondre à leurs besoins de
base – acquérir un terrain à bâtir, avoir accès aux services
collectifs, obtenir un job informel ou des opportunités
économiques –, sans faire de vagues, bien que sur un
mode illégal. Au lieu d’organiser une manifestation de rue
pour exiger l’accès à l’électricité, par exemple, les sans
droits (disenfranchised) vont chercher à se connecter au
réseau municipal sans autorisation.
Dans le monde arabe, la classe politique par excellence
demeure donc la classe moyenne formée –
fonctionnaires, étudiants, professions libérales et
intelligentsia. Ce sont eux qui ont mobilisé la « rue » dans
les années 1950 et 1960 sous la bannière des idéologies
nationaliste, baathiste et socialiste. L’islamisme a été la
dernière de ces grandes visions du monde. Trouvant ses
principaux soutiens au sein des classes moyennes
paupérisées, les mouvements islamistes sont arrivés
pendant plus de deux décennies à activer de larges pans
de la population la plus désillusionnée au moyen d’une
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
islamisation « bon marché » – pureté morale et culturelle,
œuvres caritatives accessibles et politique identitaire.
Cependant, à partir du milieu des années 1990, il est
devenu clair que les islamistes ne pourraient aller très loin
avec une islamisation plus « coûteuse » – mise en place
de régimes politiques et économiques islamiques et
gestion des relations internationales sur un mode
compatible avec la citoyenneté nationale et globale
moderne. Les projets politiques islamistes étant entrés en
crise là où ils ont été mis en pratique (Iran et Soudan) et
les stratégies violentes ayant échoué ailleurs (Egypte et
Algérie), une nouvelle vision du projet islamique s’est
progressivement développée. Les mouvements islamistes
ont été réprimés ou se sont résignés à renouveler leur
approche.
Les tendances anti-islamiques qui ont fait suite en
Occident aux attaques du 11 septembre, ainsi que la
guerre contre le terrorisme, ont certainement accentué le
sentiment que l’Islam était menacé globalement, et donc
renforcé le langage de la religiosité et du nationalisme. A
l’occasion de divers scrutins nationaux, les partis
islamistes qui, entre autres choses, exprimaient leur
opposition aux politiques des Etats-Unis ont réalisé des
scores impressionnants. Le Parti de la justice et du
développement, au Maroc, obtenait 42 sièges lors des
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
élections de septembre 2002, doublant son résultat
précédent.
Un mois plus tard, le mouvement islamiste algérien arrivait
en troisième position aux élections municipales, tandis
qu’une coalition de partis religieux remportait 53 des 150
sièges parlementaires au Pakistan. En novembre de cette
même année 2002, les islamistes gagnaient 19 des 40
sièges au Bahreïn et le parti turc « Pour la justice et le
développement » raflait 66% des voix aux législatives.
Pour autant, ces victoires électorales indiquent moins un
« revival de l’islamisme » (Hilal, 2002 ; Abu al-Khayr,
2003) que son évolution, d’un projet politique de
dimension nationale à un langage fragmenté sur la piété
personnelle et la menace anti-islamique globale. Si rien ne
change par ailleurs, nous sommes sans doute à l’aube
d’un tournant post-islamiste (Bayat, 2007).
Quoi qu’il en soit, l’islamisme aura profondément
transformé les Etats arabes. Il les a rendus plus religieux
(car ils ont cherché à s’approprier l’autorité morale de
l’islamisme), plus nationalistes (car ils ont revendiqué leur
authenticité arabe et disqualifié la démocratie en tant que
notion occidentale) et plus répressifs, car la liquidation des
islamistes radicaux leur a donné la possibilité d’accentuer
leur contrôle sur les autres formes de contestation. Ce
legs des mouvements islamistes complique donc l’activité
des oppositions dans le monde arabe d’aujourd’hui.
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
RENOUVEAU DE LA RUE ARABE
Le revival de la « rue arabe » à l’occasion des
mouvements de solidarité avec les Palestiniens en 2002 a
été proprement spectaculaire. Pendant un court moment,
les Etats ont perdu le contrôle de la situation et des
groupes de plus en plus nombreux ont manifesté
publiquement leur opposition aux régimes en place. Même
les étudiants « occidentalisés » et « apolitiques » de
l’Université américaine du Caire ont rejoint les frondeurs.
Le mouvement de solidarité avec la Palestine a donc
montré que la politique de la rue arabe ne se réduisait pas
à l’islamisme et a su susciter le réveil des anciennes
traditions politiques.
En janvier 2003, alors que les troupes US s’apprêtaient à
attaquer l’Irak, un million de Yéménites défilaient dans les
rues de Sanaa en scandant « Une déclaration de guerre,
c’est ça le terrorisme ». Ils étaient 10 000 à Khartoum, des
milliers à Damas et à Rabat et des centaines dans la
capitale bahreïnienne de Manama (Al-Hayat, 28 janvier
2003). En Jordanie, 20 000 chrétiens priaient en public
pour le peuple irakien et condamnaient la guerre de Bush
(Al-Hayat, 15 février, 2003). Les mobilisations, grandes ou
moins grandes, contre la guerre d’Irak ont perduré en
Egypte et dans les autres capitales arabes, au milieu d’un
déploiement massif des forces de police. Et lorsque les
Etats-Unis et le Royaume Uni ont effectivement envahi
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
l’Irak, les manifestations de rue ont encore gagné en
vigueur.
Cependant, en ce qui concerne la Palestine à tout le
moins, la montée en puissance de la rue arabe s’est
produite avec l’approbation tacite des Etats arabes. La
violence extrême des opérations israéliennes et l’invasion
de l’Irak par les forces états-uniennes ont réuni les
politiques et la population dans un même sentiment
nationaliste. Qui plus est, la contestation de la rue était
largement dirigée contre un adversaire « externe », et les
slogans contre leur propre gouvernement étaient
davantage scandés par les leaders idéologiques que par
les simples manifestants. Ce n’est que lors des rallies de
2005 et 2006, au Caire, que la foule a demandé le retrait
des lois d’urgence qui depuis vingt ans entravent les
rassemblements publics, et la fin de la présidence de
Moubarak. Ces marches ont par la suite engendré le
mouvement démocratique.
Pourquoi la rue arabe a-t-elle échoué à s’élever contre sa
mise hors-la-loi pour exiger la démocratie et la justice ?
Alors
que
les
sans-droits
s’en
remettent
à
l’ « empiètement silencieux », les Etats arabes ont
largement réussi à neutraliser la classe politique en
adoptant un discours nationaliste, religieux et antisioniste.
Retranchée dans un « nationalisme panarabe vieille
école » et séduite par le langage de la religiosité et de la
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
moralité, l’intelligentsia arabe n’a pu saisir cette
opportunité pour arracher des concessions aux Etats
autoritaires.
L’occupation israélienne de la Palestine, avec le soutien
matériel et diplomatique des Etats-Unis, a engagé des
générations d’intellectuels arabes dans un nationalisme
culturel étroit dont les Etats autoritaires de la région ont
largement
profité.
Le
chauvinisme
(nativism)
a ceci de regrettable qu’il écarte les idées et les pratiques
prétendument enracinées dans des cultures étrangères
(généralement la culture occidentale), même quand elles
sont nobles, et qu’il idéalise les idées et les pratiques
nationales quand bien même celles-ci sont oppressantes.
Les droits humains, par exemple, sont souvent rejetés en
tant qu’importation occidentale ou manipulation de
Washington.
D’un autre côté, les gouvernements arabes laissent peu
d’espace à la contestation indépendante. Depuis 2000, les
manifestations collectives contre les Etats-Unis et Israël
ont été tolérées par les autorités, tandis que les actions de
rue non officielles ont été réprimées et les militants
intimidés ou arrêtés. Le 15 février 2003, alors que plus de
dix millions de personnes dans le monde manifestaient
contre la guerre en Irak, des milliers de policiers antiémeute refoulaient quelque 500 militants afin de les
séparer des autres manifestants.
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Face au défi de l’expression publique dans la rue, les
militants arabes ont développé de nouveaux moyens de
coordination, sous la forme de campagnes civiques, de
campagnes de boycott, de cybermilitantisme et d’art
contestataire. La rue étant l’objet d’une surveillance de
tous les instants, le militantisme s’est aussi réfugié dans
l’antre des institutions civiles – campus universitaires,
écoles, mosquées, associations professionnelles et ONG.
Dans ce climat hostile aux libertés politiques, les
associations professionnelles ont offert un espace aux
campagnes politiques, au point de tenir le rôle de partis
politiques où prévaut une intense compétition pour le
leadership. Leurs quartiers généraux ont servi de bases
pour des rassemblements politiques, du travail caritatif et
des campagnes de solidarité internationale.
D’autres associations civiles, à commencer par les
nouvelles ONG de plaidoyer, ont commencé à promouvoir
le débat public sur les thèmes des droits humains, de la
démocratisation, des femmes, des enfants et des
travailleurs. Début des années 2000, entre 90 et 100
organisations de défense des droits de l’homme opéraient
dans le monde arabe, parallèlement aux centaines de
centres de services sociaux et aux organisations à
caractère social, plus nombreuses encore, qui utilisent
progressivement le langage des droits dans leur travail
(Azzam, 2003).
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Les innovations en termes de mobilisation, de style de
communication et de flexibilité organisationnelle apportent
un souffle d’air frais qui tranche avec le discours
nationaliste sclérosé. Le Comité populaire égyptien pour
la solidarité avec l’Intifada palestinienne en est une
illustration. Mis sur pied en octobre 2000, le Comité réunit
des représentants des différentes tendances politiques
égyptiennes – socialistes, nationalistes, islamistes et
collectifs de défense des droits humains, de la femme,
etc. Parmi les initiatives du Comité, citons la mise sur pied
d’un site web et d’une liste de courrier électronique, la
réalisation de collectes caritatives, l’organisation d’un
boycott des produits américains et israéliens et la
promotion d’une pétition pour la fermeture de l’ambassade
israélienne au Caire qui a rassemblé plus de 200 000
signatures.
Le Groupe égyptien anti-globalisation et la Campagne
nationale contre la guerre en Irak, de même que le Comité
pour la défense des droits des travailleurs et certaines
ONG de défense des droits humains ont adopté des
formes similaires de militantisme (el-Hamalawy, 2003).
Ces organisations ont joué un rôle précurseur dans
l’émergence d’un nouveau style d’action politique en
Egypte, qui s’est affirmé par la suite à travers Kifaya et
d’autres mouvements démocratiques (Bayat, 2007).
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
L’organisation de campagnes de charité ou de boycott est
donc devenue un nouveau levier de mobilisation politique.
Des milliers de jeunes volontaires et des centaines
d’associations se sont impliqués dans la collecte de
nourriture et de médicaments pour les Palestiniens. En
avril 2002, en l’espace de quatre jours et quatre nuits, des
étudiants de l’Université américaine du Caire ont récolté
plus de 30 tonnes de produits de première nécessité
auprès de particuliers et d’entreprises, qu’ils ont par la
suite amenés aux Palestiniens de Gaza par camion. Des
millions d’Arabes et de musulmans ont participé au
boycott des produits américains et israéliens, en ce
compris Mac Donald, KFC, Starbucks, Nike et Coca-Cola.
La coordination des campagnes a aussi reposé sur un
usage intensif des technologies de l’information. Le
courrier électronique permet aux militants de propager
leurs revendications et leurs appels à manifester. Les
sites d’information alternatifs sont en passe de constituer
un des principaux canaux de formation de réseaux de
citoyens critiques et informés. L’usage croissant de
Facebook, le site de réseau social, a permis en 2008 à la
jeunesse égyptienne de construire le « Mouvement du 7
avril » : clui-ci a mobilisé quelque 70 000 jeunes,
universitaires pour la plupart, en faveur de la liberté
d’expression, la prospérité économique et contre la
corruption. Ces militants ont réussi à organiser des
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
manifestations de rue ainsi qu’une grève générale, le 7
avril 2008, en soutien aux travailleurs du textile en grève.
Parallèlement, la télévision par satellite, qui a connu un
boom dans le monde arabe, permet la diffusion d’une
information alternative qui tranche avec la stérilité des
chaînes nationales. La prolifération des antennes sur les
toits de Damas enlève aux panneaux d’affichage
gouvernementaux le peu de crédit qu’il leur reste encore.
Si les cybercampagnes restent limitées à l’élite (malgré
l’augmentation du nombre d’usagers d’internet), l’art
politiquement engagé touche un public plus large. La
réoccupation de la bande de Gaza par l’armée israélienne
en 2002 a ravivé l’héritage politique de personnalités
telles que Umm Kulthoum, Fairouz et le Marocain Ahmad
Sanoussi. Les artistes – acteurs, peintres et surtout
chanteurs – se sont faits les porte-parole de l’indignation
générale. En Egypte, des stars de la musique de premier
plan telles que ‘Amr Diab, Muhammad Munir et Mustafa
Qamar ont produit des albums composés exclusivement
de morceaux religieux et nationalistes qui ont connu un
succès populaire retentissant.
Bien sûr, l’étendue et l’efficacité de ces nouveaux espaces
de contestation restent modestes. Il n’empêche, la
tendance grandissante des gouvernements arabes à
chercher à les contrôler – en fermant des ONG, en retirant
des livres ou des chansons du marché et en arrêtant les
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
créateurs de sites web – témoigne de leur capacité
potentielle à compenser les interdits qui frappent la rue
arabe. Celle-ci reste cependant le lieu d’expression par
excellence de l’opinion populaire, en particulier quand
celle-ci est ignorée par les régimes locaux ou les
puissances mondiales. La rue arabe n’est ni
« irrationnelle » ni « morte », elle connaît des mutations
majeures entraînées par le maintien d’anciennes
contraintes et l’apparition de nouvelle opportunités liées à
des restructurations globales. En tant que moyen et mode
d’expression, la rue change, mais les griefs collectifs
qu’elle véhicule demeurent. L’islamisme gardera-t-il sa
prééminence en matière d’articulation idéologique de ces
griefs ?
Traduction de l’anglais : François Polet
BIBLIOGRAPHIE
Abu al-Khayr A. (2003), « al-Islam al-Siyasi wa alDimuqratiyya », al-Wafd, 15 février.
Andoni L. et Schwedler J. (1996), « Bread Riots in
Jordan », Middle East Report 201, automne 1996.
Azzam F. (2003), coordinateur du programme de droits
humains de la Fondation Ford, interview avec l’auteur, Le
Caire, février 2003.
Bartley R. (2001), « Resolution, Not Compromise, Builds
Coalition », Wall Street Journal, 12 novembre.
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Bayat A. (2007), Making Islam Democratic : Social
Movements and the Post-Islamist Turn, Palo Alto,
Stanford University Press.
Burke E. et Lapidus I. (dir.) (1990), Islam, Politics and
Social Movements, Berkeley, University of Carlifornia
Press.
el-Hamalawy (2003), « Closer to the Street », Cairo
Times, 6-19 février 2003.
Fisk R. (2003), « A Million March in London, but Faced
with Disaster, the Arabs Are Like Mice », Independent, 18
février.
Hilal R. (2002), « Blowback : Islamization from Below », alAhram Weekly, 21-27 novembre.
Khalil A. (2002), « The Arab Couch », Cairo Times, 26
décembre.
Kifner J. (2001), « Street brawl », New York Times, 11
novembre.
Lockman Z. (dir.) (1994), Workers and Working Classes in
the Middle East : Struggles, Histories, Historiographies,
Albany, State University of New York.
Pripstein Posusney (1997), Labor and the State in Egypt,
New York, Columbia University Press.
Reuel M. G. (2002a), « Better to Be Feared than
Loved », The Weekly Standard, 29 avril.
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.
Reuel M. G. (2002b), « The Myth
Street », Jerusalem Post, 11 avril.
of
the
Arab
Richards A. et Waterbury J. (1990), A Political Economy of
the Middle East, Boulder, Westview Press.
Satloff R. (2002), « The Arab ‘Street’ Poses No Real
Threat to US », Newsday, 27 septembre.
UNDP (2002), Arab Human Development Report 2002,
New York, United Nations Development Program
NOTES
[1] Voir par exemple Reuel (2002a et 2002b).Mais les
auteurs qui ont de la sympathie pour les manifestations
arabes peuvent avoir les mêmes appréciations, comme
par exemple Khalil (2002) et Fisk (2003).
Intellectual rights and Copy rights belong solely to the source.
These materials we're collected by Arab Trade Union Confederation to
be added in its specialized Data Base, for easier access.