Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de
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Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de protection Jean Leblond, Ph. D. (psychologie) Document d’analyse remis au Directeur de santé publique de la Capitale-Nationale Dans le cadre des travaux de rédaction de l’Avis de santé publique sur l’implantation des salons de jeux au Québec 20 février 2007 2 Référence suggérée : Leblond, J. (2007). Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de protection. Document d’analyse remis au Directeur de santé publique de la Capitale Nationale dans le cadre des travaux de rédaction de l’Avis de santé publique sur l’implantation des salons de jeux au Québec. Québec, QC. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 2 Présentation du document Ce document, commandé par la Direction de la santé publique de la Capitale-Nationale, a pour objectif d’appuyer la réflexion des spécialistes de la santé publique dont le mandat est de maintenir la population en santé à l’égard du jeu. L’approche est ainsi résolument centrée sur l’identification des comportements sains, c’est-à-dire des comportements sécuritaires. Le concept de jeu sécuritaire Le concept de jeu sécuritaire consiste à préciser dans quelles limites la population québécoise peut jouer sans craindre de développer une dépendance à l’égard du jeu ou d’y subir des dommages. Une promotion proactive de la santé permet ainsi d’identifier les limites à l’intérieur desquelles il est possible de satisfaire, de manière éthique, le désir légitime de la population de jouer en s’amusant pleinement. Par des mises en garde, l’environnement de jeu doit garantir que la personne est pleinement informée des risques, des moyens de s’en prémunir, des mesures curatives ou palliatives disponibles, des difficultés éventuelles à résoudre ou contenir les problèmes de jeu ainsi que de l’ampleur des dommages auxquelles elle s’expose lorsque les limites sont dépassées. Ce concept contraste radicalement avec le concept de jeu responsable dont l’objectif est surtout de dépister l’insanité et de tenter de minimiser les méfaits, les dommages. Cette approche intervient trop tardivement dans l’évolution des problèmes de jeu. Le rôle de la Santé publique ne doit pas se limiter à celui d’ambulancier lorsque la personne est déjà détruite par le jeu. Les critères du jeu sécuritaire Des critères de jeu sécuritaire ont été recherchés. Après avoir inventorié la littérature scientifique, une seule étude a proposé des critères opérationnels, raisonnablement quantifiables, et qui peuvent être facilement compris. Ainsi, une étude complémentaire1 de l’ESCC2 a tracé des courbes de risque en fonction de la fréquence et de la dépense au jeu. Les auteurs ont alors défini trois critères à l’intérieur desquels le jeu peut être considéré comme exempt de problèmes. Ces critères de jeu sécuritaire sont : 1 Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. 2 L’enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) a été réalisée en 2002 par Statistique Canada. Voir : Statistique Canada. (2002). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes: santé mentale et bien-être. Document 82-617-XIF. Ottawa, ON : auteur. Présentation du document - 4 • Ne pas jouer plus de 2 ou 3 fois par mois. • Ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). • Ne pas dépenser au jeu plus de 1% du revenu familial brut. Dès que la personne outrepasse un seul de ces critères, elle doit être consciente qu’elle s’engage dans une zone à risque d’autant plus que l’écart est grand. Lorsque les écarts vont en s’accroissant continuellement, il y a lieu de considérer qu’il y a perte de contrôle sur la dépense au jeu. Ces critères ne sont pas définitifs. Des études, spécifiquement dédiées à l’identification des critères du jeu sécuritaire, consolideraient l’identification du répertoire des comportements à suivre et la précision des seuils. Ces critères peuvent être nuancés, par exemple, en fonction des catégories socioéconomiques, des structures familiales, des activités de jeu ou des régions. Le concept de dangerosité Un autre objectif de ce document a été de répertorier les indices de dangerosité des appareils électroniques de jeu (AÉJ) ainsi que les mesures de protection qui pourraient rendre ces appareils sécuritaires. Avant même de commencer à jouer, il existe des indices de dangerosité des AÉJ parce que ces appareils sollicitent vers la morbidité des processus potentiellement sains. Ce sont l’intelligence écologique et l’optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une maladie. Des croyances erronées quant au hasard se manifestent typiquement, de manière naturelle, chez la plupart des individus. Elles ne sont pas pathologiques. Elles correspondent à un mécanisme d’adaptation3, issu de l’évolution humaine, et qui est qualifié d’intelligence écologique4. Dans le hasard, contrairement au monde réel, il n’y a pas de relation de cause à effet. Dans un tel contexte, les jeux de hasard sont des environnements artificiels qui posent des pièges exploitant les failles naturelles de cette intelligence écologique. 3 (a) Todd, P. M. (2001). Fast and frugal heuristics for environmentally bounded minds (pp. 5170). Dans G. Gigerenzer et R. Selten (éditeurs), Bounded rationality : the adaptive toolbox. Cambridge, MA : MIT press. (b) Sadrieh, A. et al. (2001). Group report : is there evidence for an adaptive toolbox? (pp. 83-102). Dans G. Gigerenzer et R. Selten (éditeurs), Bounded rationality : the adaptive toolbox. Cambridge, MA : MIT press. (c) Martignon, L. (2001). Comparing fast and frugal heuristics and optimal models (pp. 147-171). Dans G. Gigerenzer et R. Selten (éditeurs), Bounded rationality : the adaptive toolbox. Cambridge, MA : MIT press. 4 Gigerenzer, G. (2000). Ecological intelligence (pp. 59-76). Dans Adaptive thinking : rationality in the real world. New York, NY : Oxford university press. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 4 Présentation du document - 5 Un optimisme irréaliste à l’égard de développer des maladies est un concept phare de la psychologie de la santé5. L’absence d’optimisme irréaliste conduit à des états dépressifs6. Lorsqu’on est préalablement en santé, il est ainsi naturel de se croire résistant au danger. Par ailleurs, il est évident que la structure des jeux sur AÉJ sollicite une activation des processus mentaux qui ne peut que favoriser une dépendance psychologique à leur égard. Pour jouer, la personne doit accepter de diminuer la portée de ses raisonnements. En effet, le jeu sur AÉJ omet délibérément de préciser des informations cruciales au raisonnement normatif. Dans cette situation, les seuls processus mentaux qui peuvent s’activer conduisent essentiellement au développement d’automatismes, d’une persistance à jouer et au développement d’une conscience erronée de la situation. Dès qu’une expérience fortuite de gains apparaît comme étant significativement différente du hasard, de fortes illusions de contrôles incitent les joueurs à dépenser de l’argent qu’ils ne peuvent pas perdre. Il s’enclenche alors un surinvestissement dans la dépense au jeu dans l’espoir de se refaire, de récupérer des montants qui sont pourtant définitivement perdus. Dès lors, si une aide n’est pas apportée, des dommages sévères sont quasiment inévitables. Si la personne n’est pas mise en garde contre ce processus pathogène, elle a peu de chance de le réaliser pendant que ce processus s’installe. Le jeu pathologique sur AÉJ est particulièrement insidieux parce que ses racines se développent durant une phase gagnante. En effet, le gain significatif est le principal facteur pathogène qui concrétise les illusions de contrôle. Durant cette phase gagnante, la personne a un plaisir réel à jouer, et elle ne subit aucun dommage financier. La conscience du problème de jeu survient ultérieurement lorsque les pertes se sont déjà accumulées, parfois jusqu’à l’endettement. Dans un tel cas, l’épuisement des ressources financières diminue, de manière critique, la capacité de la personne à financer les initiatives qu’elle devrait entreprendre pour résoudre son problème de jeu. La « solution » morbide est alors de retourner au jeu dans l’espoir d’y faire le gros gain qui restaurerait la capacité financière. L’expérience de jeu sur AÉJ peut induire une dépendance psychologique, et elle peut conséquemment entraîner des dommages. En particulier, les AÉJ sont des produits dangereux parce qu’ils ont la capacité : 5 (a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (c) Taylor, S. E., & Brown, J. D. (1988). Illusion and wellbeing: a social psychological perspective on mental health. Psychological bulletin, 103(2), 193210. 6 Alloy, L. B., & Ahrens, A. H. (1987). Depression and pessimism for the future: biased use of statistically relevant information in predictions for self versus others. Journal of personality and social psychology, 52(2), 366-378. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 5 Présentation du document - 6 • d’induire une dépendance pathologique, o • et conséquemment de causer des dommages considérables, de capter une dépendance déjà existante à l’égard d’une autre activité de jeu, o et conséquemment d’aggraver les dommages subis par les joueurs déjà excessifs. Ils sont aussi dangereux en raison de l’incapacité actuelle des traitements à restaurer un état sain chez tous les utilisateurs qui y ont développé une dépendance pathologique. Des progrès importants ont été réalisés au Québec dans le domaine du traitement cognitif du jeu pathologique. L’application à grande échelle témoigne cependant de quelques difficultés qu’il reste à résoudre. Qu’est-ce qu’un appareil électronique de jeu? Les AÉJ englobent tous les appareils permettant de jouer à des jeux de hasard et d’argent dont le mécanisme de tirage est électronique. Au Québec, il existe deux catégories d’AÉJ. Les machines à sous (MAS) et les appareils de loterie vidéo (ALV). Une nouvelle catégorie fera son apparition dans les salons de jeu, soient les tables de jeu automatisées7 (TJA). Avant l’étatisation des AÉJ en 1993, il existait des appareils de poker vidéo (APV) qui étaient souvent opérés illégalement. Les MAS sont situées uniquement dans les casinos. Leur fonctionnement est soumis à la réglementation des jeux de casinos. Typiquement, les MAS n’offrent qu’un seul jeu quoique des MAS voisines peuvent offrir une grande variété de jeux. Les ALV sont situés dans les bars ou dans les hippodromes où ils sont opérés par des détaillants privés qui sont titulaires d’un permis de la Régie des alcools et des jeux du Québec (RACJ). Afin de vérifier l’intégrité des détaillants, les ALV sont reliés en réseau et leur fonctionnement est supervisé à partir d’un ordinateur central. Ils offrent plusieurs jeux. Leur fonctionnement est soumis à la réglementation des appareils de loterie vidéo. Les TJA sont de véritables tables de jeu pouvant offrir des jeux de roulette, de cartes et même des simulations de courses de chevaux. Outre l’absence de croupier, les joueurs ont la possibilité d’y jouer sans que les partenaires de jeu ne puissent porter un jugement sur l’habileté ou la compétence d’autrui8. Les mises sont inscrites discrètement sur un écran individuel. Les gains ou pertes ne sont pas davantage connues des partenaires de jeu. Les TJA offrent une discrétion que ne procurent pas les tables de jeu. 7 En anglais, multiplayers games. 8 Faust, F. (2006-2007). New breed of table games. Canadian gaming business, 1(3), 22-26. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 6 Présentation du document - 7 Les chapitres Le premier chapitre inventorie la dépense au jeu de la population adulte québécoise. Là où c’est possible de le faire, la dépense a été analysée en fonction de chaque activité de jeu. La dépense per capita (DPC) et la dépense par joueur (DPJ) sont comparées au second critère du jeu sécuritaire, donc par rapport au seuil d’une dépense de 500 dollars annuellement. Le constat qui émerge de cette analyse est que la DPC est un estimateur trompeur de la situation réelle. Selon cette estimateur, la dépense moyenne des Québécois se maintiendrait à l’intérieur du second critère du jeu sécuritaire. Mais, tous les adultes québécois ne jouent pas. Lorsque la DPJ est analysée, les dépenses moyennes au jeu, les plus récentes, dans les loteries vidéo ($ 2 146), dans les courses de chevaux $ 1 523) ou dans les casinos ($ 722) dépassent, à elles seules, le second critère du jeu sécuritaire. Comme il s’agit d’estimations moyennes, de tels montants suggèrent qu’une portion considérable des joueurs, à ces activités, éprouvent des problèmes de jeu. Cela est d’autant plus préoccupant que la catégorie des joueurs a été définie comme étant n’importe quel adulte qui a misé au moins une fois dans l’année à cette activité. De nombreux joueurs très occasionnels étaient inclus. Si au lieu de prendre en considération tous les joueurs annuels, la DPJ s’était limitée aux joueurs mensuels, c’est-à-dire les joueurs réguliers, les estimations moyennes auraient été nettement supérieures. Le second chapitre dresse un portrait des ALV au Canada. Compte tenu que l’exploitation des ALV est presque similaire dans les huit provinces canadiennes qui les exploitent, des parallèles intéressants peuvent être fait. De plus, la mise en commun de plusieurs estimations procurent des données statistiques plus stables, plus résistantes aux cas particuliers. Le troisième chapitre traite expressément de la dangerosité des AÉJ. Ceux-ci sont dangereux parce qu’ils ont le potentiel de créer de nouveaux joueurs pathologiques, ainsi que la capacité d’attirer plus puissamment les joueurs qui sont déjà pathologiques. La dangerosité est constatée de plusieurs façons, dont (a) la prévalence de jeu excessif parmi les joueurs sur AÉJ, (2) le pourcentage de joueurs excessifs qui s’intéressent aux AÉJ, (3) la proportion des revenus des AÉJ qui provient des joueurs excessifs, (4) l’intensité de la dépense mensuelle sur les AÉJ, (5) l’incapacité à faire une autoévaluation correcte de la dépense sur les AÉJ, et (7) le pourcentage des demandes d’aide provenant de joueurs accrochés aux AÉJ. Le quatrième chapitre explore la dangerosité croisée qu’il y a à rapprocher les AÉJ des hippodromes. On ne doit pas oublier que les courses de chevaux ont un passé trouble avec le jeu pathologique. La relance des courses de chevaux pourrait aussi signifier la relance du jeu pathologique. Ce risque est d’autant plus préoccupant que les exemples provenant de d’autres juridictions laissent entrevoir que les AÉJ pourraient surtout contribuer à la relance du pari hors course. Dans ce cas, les travailleurs des champs de courses québécois ne seraient pas les gagnants de cette relance du jeu pathologique. Le chapitre cinq modélise le processus pathogène conduisant aux problèmes de jeu. Une stratégie de santé publique implique alors que l’on intervienne directement dans le processus pathogène en imposant des modifications structurales aux AÉJ qui sont susceptibles d’empêcher que les conditions de déclenchement du jeu pathologique ne surviennent. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 7 Présentation du document - 8 Le chapitre six répertorie et évalue de nombreuses mesures de protection qui ont été explorées de par le monde. Compte tenu que les AÉJ peuvent varier beaucoup d’une juridiction à l’autre, et que les produits pourraient ne pas être exportables, un accent particulier est mis sur les travaux réalisés au Canada. Enfin, un lexique est proposé afin d’aider au développement d’un langage commun. Les mesures de protection Les mesures de protection, expérimentées jusqu’à présent, visent surtout des aspects qui sont en périphérie du processus pathogène. En ce sens, elles ne peuvent qu’avoir des impacts mitigés. Néanmoins, quelques mesures apparaissent souhaitables : • La désactivation du bouton d’arrêt (ceci est déjà en vigueur). • La réduction de la vitesse de jeu (indépendamment de la désactivation du bouton d’arrêt). • La réduction des heures d’accès aux ALV. La fermeture des ALV à minuit a démontré son efficacité. • L’utilisation d’une carte-client uniquement en vue de permettre aux joueurs de définir eux-mêmes des périodes d’autoexclusion. Cette carte-client doit alors être obligatoire pour tout le monde en tout temps. D’autres mesures pourraient aussi être envisagées après avoir été testées. • Une suggestion de la commission Nijpels consiste à concevoir l’interface des ALV en fonction de deux soldes. Le premier solde est celui des mises. En début de session, le joueur y insère un montant d’argent à partir duquel il puisera ses mises. Le second solde reçoit les lots. Il n’est alors pas possible de transférer le montant de ce second solde dans le premier sans provoquer un encaissement global, et donc un arrêt de jeu. Cette mesure peut réduire les occasions de rejouer continuellement les gains sans prendre conscience de l’argent qu’on y perd. • Au lieu de demander au joueur de fixer préalablement la durée souhaitée de la dépense au jeu, il serait préférable qu’on lui demande le montant qu’il est prêt à perdre. • Il manque deux odomètres à l’écran des ALV. Le premier doit indiquer au joueur la vitesse de sa dépense au jeu. Le joueur pourrait ainsi évaluer combien lui coûtent 10 minutes de jeu. Le second doit indiquer la vitesse des sets. Dès lors, il serait plus facile au joueur de déceler quand il accélère sa cadence par rapport à son comportement habituel. Dans une vision à plus long terme, il est nécessaire d’envisager des mesures qui s’attaquent plus directement au processus pathogène. • L’optimisme irréaliste à l’égard du danger de devenir malades des AÉJ doit être contré d’une manière nettement plus ferme. Actuellement, la documentation Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 8 Présentation du document - 9 donnée au joueur tend plutôt à favoriser cet optimisme irréaliste. Avant même de s’initier au jeu, et particulièrement au moment où ils le font, les joueurs doivent être mis en garde contre : o o Le risque de développer une dépendance pathologique à l’égard des AÉJ en jouant sur les AÉJ. C’est beaucoup plus qu’une très petite minorité de joueurs qui développent des problèmes sur les AÉJ. En l’occurrence, 15% des joueurs annuels sur ALV sont des joueurs pathologiques. En raison de leur durée de jeu plus longue, à chaque instant, la probabilité pour qu’un joueur assis en face d’un ALV soit un joueur pathologique est de 35%. À travers le monde, environ 46% des revenus tirés des ALV proviennent des joueurs pathologiques. En Alberta, il s’agit de 67%. En Nouvelle-Écosse, 53%. L’intensité des dommages possibles. Lorsque les joueurs pathologiques se décident enfin à demander de l’aide, ceux-ci ont d’importantes dettes de jeu. Leur vie familiale, sociale ou professionnelle est en danger de rupture lorsque cela n’est pas déjà fait. Certains joueurs en viennent à commettre des crimes. Certains joueurs se suicident parce qu’ils ne voient plus comment s’en sortir. o Les traitements du jeu pathologique ne permettent pas encore de restaurer un état parfaitement sain à l’égard du jeu. Il n’est pas possible de revenir complètement en arrière. o Les mises en garde doivent indiquer quels moyens existent pour se prémunir des dangers et des dommages. Ces moyens doivent avoir été évalués empiriquement. • Sans équivoque, il est nécessaire de réduire les occasions de gain significatif sur les ALV. C’est le principal facteur pathogène. Cela peut être obtenu en réduisant le taux de remise effectif, paradoxalement en augmentant la taille des lots les plus importants, en imposant une mise minimale plutôt que maximale, en réduisant les occasions de jeu mutliligne, en augmentant les occasions de jeu multicrédit, ou en multipliant les lots de faibles valeur. Il existe de nombreuses manières d’y parvenir. Une solution adaptée au marché peut être trouvée. • Les croyances erronées sont au jeu pathologique ce que l’oxygène est au feu. En soi, elles ne sont pas dangereuses. Elles sont cependant ce qui permet au jeu pathologique de s’enflammer. Des cédéroms d’information doivent être Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 9 Présentation du document - 10 élaborés sur lesquels des simulateurs des jeux disponibles permettraient aux joueurs de tester à la maison les stratégies de contrôle que certains joueurs croient possible. Ces simulateurs personnels n’impliqueraient pas d’argent. Ainsi, après un gain significatif, le joueur en illusion pourrait faire ses tests sans dilapider ses biens. • Un professionnel de la santé, en particulier en ce qui a trait aux pratiques de jeu sécuritaire, doit être présent en tout temps lorsque le public a accès à un salon de jeux. L’action de ce professionnel peut s’inspirer du protocole d’intervention déjà utilisé par les employés de la firme Holland casino qui est déjà le principal consultant de Loto-Québec en matière d’établissement de jeu. L’ascendance du crime organisé sur le jeu En terminant, dans la perspective de la production d’un avis de la Santé publique concernant le projet des salons de jeux, Loto-Québec a requis que soit examiné la menace du développement de marchés gris ou clandestin (appareils illégaux) si ce projet n’était pas réalisé tel que proposé. L’existence de ces marchés, prétendument contrôlés par des criminels, est la principale justification qui a motivé l’étatisation des ALV en juin 1994. Depuis, ces marchés illégaux seraient pratiquement inexistants. En examinant l’historique des AÉJ, nous n’avons retrouvé que des traces minimes du contrôle des AÉJ par des criminels avant 1994. L’importance de la fuite fiscale est aussi très incertaine. Peu avant l’étatisation, les revenus des appareils de poker vidéo (APV) étaient divisés en part égales entre le distributeur et le détaillant. Des montants importants, obtenus par les distributeurs, peuvent avoir échappé au fisc car une infiltration des criminels parmi les distributeurs a été dénoncée. Toutefois, les détaillants étaient vraisemblablement des petits commerçants qui peuvent avoir déclaré à l’impôt leur part des revenus. En effet, les trois-quarts des appareils illégaux étaient détenteurs d’un permis de la Régie des loteries du Québec. Parce que ces permis existaient, les commerçants ont sans doute déclaré les revenus des APV, du moins au même titre que les revenus de leurs autres activités commerciales. En ce sens, la fuite fiscale est plausiblement nettement en deçà de ce qui était déplorée avant 1994. Les utilisateurs des APV n’étaient pas en contact direct avec les criminels. Leur sécurité n’était pas directement menacée. En fait, les criminels se sont vraisemblablement rapprochés de la clientèle lorsque le gouvernement du Québec a annoncé son intention d’étatiser les ALV. En effet, divers groupes rivaux ont alors entrepris d’acquérir le contrôle des bars où les ALV pouvaient être implantés. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 10 Chapitre 1 La dépense au jeu de la population québécoise La population québécoise dépense beaucoup dans les jeux de hasard et d’argent. Depuis 1970, la dépense totale est d’au moins 45 milliards de dollars; ce qui inclut un montant de 36 milliards de dollars dans les seules activités de Loto-Québec. Lorsque la dépense au jeu est répartie parmi l’ensemble des adultes québécois, la dépense per capita semble relativement peu élevée. Toutefois, la population participe inégalement aux activités de jeu. Lorsque la dépense per capita est analysée uniquement en fonction du nombre de joueurs, des montants importants surgissent en ce qui a trait aux AÉJ et au pari mutuel. De tels montants moyens ne sont pas réalistes sans qu’une portion appréciable des joueurs y éprouve des problèmes de jeu. Tableau 1 Dépense per capita et dépense par joueur à différentes activités de jeu Dépense per capita Dans ce chapitre Activité Année Population (DPC) Joueurs (DPJ) Section Page AÉJ (ALV + MAS + APVi) 1996 $ 84 $ 400 1.5.3 22 1996-1997 $ 84 $ 988 1.5.3 22 1999-2000 $ 163 $ 1 523 1.5.3 22 2002 $ 183 $ 2 346 1.5.3 22 2004-2005 $ 206 $ 2 146 1.5.3 22 1996-1997 $ 11,57 $ 76 1.6 27 2001-2002 $ 10,75 $ 119 1.6 27 1996 $ 101 $ 616 1.5.2 21 2002-2003 $ 127 $ 722 1.5.2 21 1993-1994 $ 25 --- Figure 3 16 2001-2002 $ 309 --- Figure 3 16 2002-2003 $ 310 --- Figure 3 16 2005-2006 $ 339 --- Figure 3 16 1989 $ 12,87 --- 1.12 32 1991 $ 25,07 --- 1.12 32 2002-2003 $ 150 $ 220 1.5.1 19 1996 $ 30,67 $ 807 1.7 28 2002 $ 31,24 $ 1 523 1.7 28 1992-1993 $ 183 --- Figure 3 16 1993-1994 $ 214 --- Figure 3 16 2001-2002 $ 507 --- Figure 3 16 ALV Bingo charitable Casinos québécois Casinos québécois + ALV Casinos étrangers Loteries Pari-mutuel Toutes Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 12 Ce tableau n’est pas complet parce que l’information nécessaire n’est pas toujours disponible. En l’occurrence, la dépense sur les MAS n’est plus publiée dans les rapports annuels de Loto-Québec. La dépense au bingo et dans les tirages ne sont plus publiées par la RACJ. Il est alors impossible de calculer la dépense per capita. De plus, pour calculer la dépense par joueur, des taux de pénétration annuels doivent être disponibles pour chaque activité. 1.1 Définitions Dans cette annexe, la fréquence et la dépense annuelle au jeu sont inventoriées en fonction des diverses activités de jeu auxquelles la population québécoise a accès. Afin de comparer ces données au second critère du jeu sécuritaire9, des statistiques per capita10 sont utilisées. Celles-ci représentent des moyennes pour l’ensemble de la population, ce qui inclut les personnes qui ne jouent pas du tout. Afin d’abréger le texte, le sigle DPC signifie la dépense per capita par rapport à l’ensemble de la population adulte du Québec. Le calcul est simple. Il suffit de diviser la dépense globale au jeu par le nombre de personnes adultes au Québec. Le sigle DPJ signifie plutôt la dépense per capita des seuls joueurs annuels. Il suffit de diviser la DPC par le taux de pénétration annuelle. Ce dernier est le pourcentage de la population adulte qui s’est adonnée à une activité de jeu au moins une fois durant l’année. C’est la DPJ qu’il faut comparer au second critère du jeu sécuritaire. Dès lors, des statistiques qui se situent en deçà, mais près de ce critère, reflètent déjà une situation préoccupante. Des statistiques dépassant ce critère suggèrent qu’une majorité de joueurs éprouvent des problèmes de jeu, car en général environ la moitié de la population se situe au-dessus ou au-dessous de la moyenne. 1.2 La dépense au jeu globale de la population adulte du Québec La dépense au jeu est l’argent perdu11 par les joueurs. Il s’agit des montants misés moins l’argent remis aux joueurs sous forme de lots. Cette dépense se répartit dans : 9 Le second critère consiste à ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). Voir dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. 10 Les estimés de la taille de la population adulte du Québec proviennent du fichier CANSIM 05100011.2.6 produit par Statistique Canada. Ces estimés permettent des comparaisons interprovinciales. 11 À noter que la dépense au jeu n’englobe pas les jeux à espérance nulle de gain, par exemple les parties de cartes entre amis. En effet, lorsqu’aucun établissement de jeu ne conserve une cote sur les paris, le jeu ne fait que redistribuer l’argent parmi les joueurs. À long terme, le hasard distribue les occasions de gain également. Dans les jeux à espérance nulle de gain, lorsqu’une personne perd systématiquement, c’est en raison d’un manque d’habileté par rapport aux Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 12 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 13 • • • • • • • • • • l’offre de jeu de Loto-Québec (loteries, casinos, ALV, bingo en réseau), le pari mutuel (hippodromes, salons de pari et Paritel), le bingo des organismes à but non lucratif, les tirages des organismes communautaires ou commerciaux, les casinos charitables (avant 1993), la spéculation boursière, les activités de jeu des nations amérindiennes, l’offre de jeu des juridictions étrangères, le jeu sur Internet, et les activités illégales de jeu. La Régie des alcools, des jeux et des courses du Québec (RACJ) a le mandat de surveiller les activités des cinq premiers secteurs de dépense12, tandis que les cinq derniers secteurs ne rendent aucun compte public des montants obtenus des Québécois. La figure13 suivante illustre la dépense au jeu de l’ensemble de la population québécoise dans les activités surveillées par la RACJ depuis la création de Loto-Québec. Il ne s’agit pas d’une distribution cumulée. La dépense globale au jeu a dépassé le milliard de dollars durant l’année fiscale 1989-1990, et elle a doublé à peine sept années plus tard. Huit autres années plus tard, la dépense au jeu a dépassé les 3 milliards de dollars. En fait, le montant cumulé de la dépense au jeu depuis 1970 est d’au moins 45 milliards de dollars14. partenaires de jeu, et non en raison de la structure de jeu. Dans les jeux à espérance négative de gain, à coup sûr, les joueurs perdent d’autant plus qu’ils jouent beaucoup. C’est la structure de jeu qui en est la cause. 12 Le contrôle de la RACJ sur les casinos est partiel. 13 Bien qu’il y ait eu des tirages et des bingos avant l’année 1983-1984, aucune donnée n’a été répertoriée cette année-là. Parce la RACJ a cessé de les publier après l’année 2001-2002, celles-ci sont ensuite manquantes. Après 2001-2002, les données du bingo se limitent à celles du bingo en réseau de Loto-Québec. La donnée du pari mutuel de 1971-1972 est manquante. 14 Concernant les bingos et les tirages, les données de la RACJ antérieures à l’année 1983-1984 ne sont pas prises en compte. Depuis l’année 2002-2003, la RACJ ne rapporte plus ces statistiques. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 13 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 14 Figure 1 Dépense au jeu Milliards Dépense annuelle des adultes québécois dans les activités de jeu $3 $2 $1 $0 2005-06 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 1999-00 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 1993-94 1992-93 1991-92 1990-91 1989-90 1988-89 1987-88 1986-87 1985-86 1984-85 1983-84 1982-83 1981-82 1980-81 1979-80 1978-79 1977-78 1976-77 1975-76 1974-75 1973-74 1972-73 1971-72 1970-71 Loteries Casinos Loterie vidéo Bingo Pari mutuel Tirages 1.3 Considération du revenu familial brut Selon le troisième critère du jeu sécuritaire, la dépense annuelle au jeu ne doit pas dépasser 1% du revenu familial brut. Pour illustrer l’importance de ce critère, nous avons divisé la dépense au jeu sur les AÉJ15 (MAS + ALV) dans chaque province canadienne en 2002-2003 par le revenu familial médian en 200216. Ces valeurs se trouvent en abscisse de la Figure 2. Lorsque mise en relation avec le taux de prévalence du jeu pathologique constaté lors de l’étude ESCC de Statistique Canada17 (en ordonnée), la relation entre les problèmes de jeu et le pourcentage du revenu familial brut dépensé au jeu semble raisonnablement établie. 15 Ces statistiques ont été compilées par la firme KPMG (2004). Canadian gaming highlights 2003. 16 Les revenus médians des familles proviennent du fichier CANSIM 111-0009 produit par Statistique Canada. 17 Les taux provinciaux de prévalence du jeu pathologique proviennent du fichier CANSIM 82617-XIF produit par Statistique Canada. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 14 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 15 Figure 2 Relation entre le pourcentage du revenu familial dépensé au jeu et les problèmes de jeu au Canada ICJE (modéré ou plus) en 2002 4,0% Manitoba Saskatchew an 3,0% Alberta Ontario Colombie-Britannique 2,0% Nouvelle-Écosse Québec Île-du-Prince-Édouard 1,0% Terre-Neuve-etLabrador Nouveau-Brunsw ick 0,0% 0,0% 0,2% 0,4% 0,6% 0,8% 1,0% 1,2% Dépense per capita (casinos + ALV) / Revenu familial médian en 2002 À noter que la dépense per capita est sousestimée au Manitoba, en Saskatchewan et en Nouvelle-Écosse car les nations amérindiennes, qui y opèrent des casinos, ne sont pas tenues de dévoiler la dépense au jeu. Ces points devraient conséquemment être déplacés horizontalement plus à droite du graphique. C’est le cas aussi pour la Colombie-Britannique car la région de Vancouver se situe très près de la frontière de l’état de Washington qui dispose d’imposants établissements de jeu. Un taux de prévalence inférieur à la moyenne canadienne, ou une dépense familiale inférieure, ne révèlent pas nécessairement que l’offre de jeu dans une province n’est pas dangereuse. Selon cette figure, les Québécois limitent leur dépense au jeu à moins de 0,6% du revenu familial brut. C’est en deçà du troisième critère de jeu sécuritaire, bien que cela demeure très élevé pour une moyenne. Conséquemment, il ne peut pas être inféré que la gestion de Loto-Québec est la cause d’un taux de prévalence du jeu pathologique, ou d’une dépense familiale, qui sont inférieurs à la moyenne canadienne. Malgré une offre dangereuse, la population peut avoir la sagesse de ne pas s’exposer et de répondre à cette offre de jeu. Dans un tel cas, ce n’est pas l’organisme de jeu qui est responsable d’un taux de prévalence inférieur ou d’une faible dépense. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 15 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 16 1.4 Considération de la dépense per capita, tous jeux confondus Dans son premier bilan de responsabilité sociale18, Loto-Québec indique que les Québécois dépensent annuellement 540 dollars per capita. C’est moins que la moyenne canadienne qui est de 642 dollars per capita. Il importe peu que le Québec ait une dépense per capita moindre ou plus élevée. L’objectif n’est pas d’être le Canadien le moins détruit par le jeu. La DPC doit plutôt être comparée au second critère du jeu sécuritaire19. Au Québec, la DPC, toutes activités de jeu réunies, a dépassé les 500 dollars annuellement depuis l’année 2000-2001 (voir Figure 3)20. Figure 3 $339 $331 $313 $310 $507 $309 $507 $304 $484 $282 $444 $248 $405 $215 $374 $185 $301 $122 $263 $77 $214 $25 $183 $195 $195 $192 $192 $175 $165 $155 $250 $144 $500 $140 Dépense per capita Évolution de la dépense au jeu per capita Total 2005-06 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 1999-00 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 1993-94 1992-93 1991-92 1990-91 1989-90 1988-89 1987-88 1986-87 1985-86 1984-85 1983-84 $0 Casinos + ALV En comparaison, la dépense au jeu dans les AÉJ (casinos et ALV) a dépassé les 250 dollars depuis l’année 1999-2000. Il est probable que cette seule source de dépense génère la plupart des problèmes de jeu. Antérieurement à l’avènement des casinos et ALV, la DPC se maintenait en deçà de 250 dollars annuellement. L’analyse de la dépense per capita révèle ainsi que la dépense au jeu de la population québécoise est très élevée par rapport au second critère du jeu sécuritaire. 18 Voir à la page 30 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale 2004-2005 : Pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteur. 19 Le second critère consiste à ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). Voir dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. 20 Depuis que la RACJ a cessé de publié les dépenses annuelles au bingo et aux tirages, il n’est plus possible de calculer la dépense per capita du total des activités. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 16 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 17 1.5 L’offre de jeu de Loto-Québec La dépense au jeu dans les produits de Loto-Québec est communiquée dans les rapports annuels de cet organisme. Ces produits sont les loteries, les casinos, les appareils de loterie vidéo, le bingo en réseau, ainsi que les loteries multimédia. Les Québécois y ont dépensé depuis 1970 plus de 36 milliards de dollars. Cette dépense au jeu représente une contribution appréciable au budget des dépenses du gouvernement du Québec. Au cours de la dernière décennie, le bénéfice net de LotoQuébec a procuré environ 3% du budget des dépenses de l’ensemble du gouvernement (voir Figure 4). Entre 1994-1995 et 2001-2002, la contribution de Loto-Québec a surpassé celles d’Hydro-Québec et de la SAQ, contribuant dès lors davantage au budget des dépenses. Figure 4 5% 4% 3% 2% 1% Loto-Québec Hydro-Québec (année civile avant 1994-1995) 2005-2006 2004-2005 2003-2004 2002-2003 2001-2002 2000-2001 1999-2000 1998-1999 1997-1998 1996-1997 1995-1996 1994-1995 1993-1994 1992-1993 0% 1991-1992 % du budget de dépense La contribution des bénéfices nets de Loto-Québec, d'Hydro-Québec et de la SAQ au budget des dépenses du Gouvernement du Québec SAQ Cette contribution coûte cependant cher aux joueurs. En effet, en 2005-2006, pour que Loto-Québec puisse verser 1 dollar au Fonds consolidé de la province (voir Figure 5), un joueur doit avoir perdu $1,51 aux loteries vidéo, $1,76 aux loteries conventionnelles, $3,46 au casino21 ou 7,98$ au bingo en réseau (non-illustré). Dans cette figure, il est possible de constater à quel point les casinos sont de plus en plus cher à opérer. Dans la perspective d’une réduction des coûts d’opération, il est attrayant de considérer l’implantation de tables de jeu automatisées dans les salons de jeu. Si les TJA ne font que déplacer une clientèle déjà existante, et qu’elles n’incitent pas à une dépense accrue chez les joueurs excessifs, cet objectif peut être atteint. Toutefois, l’avènement d’une nouvelle clientèle, ou un accroissement de la dépense au jeu, pourrait aggraver la situation. Il est souhaitable que les TJA soient l’objet d’une étude d’impact précise quant à la provenance de la clientèle et des fluctuations de la dépense au jeu. 21 Aux jeux du casino ou à ses services de restauration et d’hébergement. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 17 1971-1972 1972-1973 1973-1974 1974-1975 1975-1976 1976-1977 1977-1978 1978-1979 1979-1980 1980-1981 1981-1982 1982-1983 1983-1984 1984-1985 1985-1986 1986-1987 1987-1988 1988-1989 1989-1990 1990-1991 1991-1992 1992-1993 1993-1994 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 Millions Bénéfice net 1970-1971 1971-1972 1972-1973 1973-1974 1974-1975 1975-1976 1976-1977 1977-1978 1978-1979 1979-1980 1980-1981 1981-1982 1982-1983 1983-1984 1984-1985 1985-1986 1986-1987 1987-1988 1988-1989 1989-1990 1990-1991 1991-1992 1992-1993 1993-1994 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 Dépense au jeu / Bénéfice net Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 18 Figure 5 Ce qu'il en coûte aux joueurs pour que Loto-Québec puisse verser 1 dollar au Fonds consolidé du Québec $4,00 $3,50 $3,00 $2,50 $2,00 $1,50 $1,00 $0,50 $0,00 Loterie Loteries Casinos Loterie vidéo Enfin, il est intéressant de constater que, depuis leur avènement, les ALV sont la source principale, sinon l’unique source, de la croissance du bénéfice net de Loto-Québec. Figure 6 Répartition du bénéfice net annuel de Loto-Québec $1 800 $1 600 $1 400 $1 200 $1 000 $800 $600 $400 $200 $0 Casinos, restauration et hébergement Loteries vidéo Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 18 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 19 1.5.1 La dépense dans les loteries Depuis le premier tirage effectué le 14 mars 1970, les Québécois ont dépensé22 plus de 18 milliards de dollars dans diverses formes de loteries. En 2002-2003, la DPC a été de $ 150. Toutefois, seulement 68,1% de la population adulte a acheté un billet de loterie au moins une fois dans l’année (voir Tableau 2)23. Si on divise la DPC par le taux de pénétration annuelle, on obtient une DPJ égale à $ 220. Ce montant est très près de la dépense moyenne des joueurs rapportée à l’occasion de l’étude de prévalence de 200224 ($ 244, voir Tableau 2). Bien que la dépense dans les loteries continue de croître, celle-ci semble plafonner à un montant représentant environ 150 dollars per capita. Figure 7 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans les loteries $1 000 $750 $500 $250 $0 2005-06 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 1999-00 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 1993-94 1992-93 1991-92 1990-91 1989-90 1988-89 1987-88 1986-87 1985-86 1984-85 1983-84 1982-83 1981-82 1980-81 1979-80 1978-79 1977-78 1976-77 1975-76 1974-75 1973-74 1972-73 1971-72 1970-71 La barre colorée en bleu indique l’avènement des appareils de poker vidéo (APVi) illégaux auxquels la RACJ accordait néanmoins un permis. La barre colorée en rouge marque l’avènement du casino de Montréal, et la barre en jaune celle des ALV. Puis, la barre colorée en vert indique le début du bingo en réseau. 22 Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense dans les loteries équivaut au revenu de Loto-Québec moins les lots retournés aux joueurs. 23 Les données de 1996 proviennent d’une actualisation de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique au Québec. Voir à la page 253 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06000017-015 de la Cour supérieure du Québec. L’étude originale a été publiée dans : Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. 24 Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 19 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 20 Tableau 2 Participation de la population québécoise aux loteries Fréquence de jeu Dépense annuelle Année Activité À vie Annuelle Mensuelle Hebdomadaire 1996 Total 93,2% 88,0 % 67,0 % 47,1 % 2002 Total 2002 2002 2002 2002 Loterie traditionnelle Loterie quotidienne Loterie instantanée Loterie sportive Moyenne Médiane 68,1 % 244 $ 120 $ 65,3 % 169 $ 104 $ 9,2 % 176 $ 60 $ 37,0 % 98 $ 48 $ 2,4 % 472 $ 96 $ L’analyse du revenu annuel des catégories de loterie (voir Figure 8) indique que cette dépense est surtout distribuée dans les loteries à accès direct (Lotto 6/49, Super 7) et à un moindre degré dans les loteries instantanées25. Figure 8 25 Millions $1 200 $1 000 $800 $600 $400 $200 $0 1970-1971 1971-1972 1972-1973 1973-1974 1974-1975 1975-1976 1976-1977 1977-1978 1978-1979 1979-1980 1980-1981 1981-1982 1982-1983 1983-1984 1984-1985 1985-1986 1986-1987 1987-1988 1988-1989 1989-1990 1990-1991 1991-1992 1992-1993 1993-1994 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 Revenu annuel des loteries Revenu annuel des loteries de Loto-Québec Loteries à accès direct Loteries instantanées Loteries traditionnelles Pari sportif Appelées plus communément gratteux. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 20 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 21 1.5.2 La dépense au casino Le casino de Montréal a ouvert le 9 octobre 199326. Depuis, la clientèle a dépensé27 dans les trois casinos du Québec près de 8 milliards de dollars. Déjà en 1996, la DPC était de $ 101, ce qui représente une DCPJ de $ 616. Figure 9 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans les casinos québécois $1 000 $750 $500 $250 $0 1993-94 1994-95 1995-96 1996-97 1997-98 1998-99 1999-00 2000-01 2001-02 2002-03 2003-04 2004-05 2005-06 En 2002-2003, la DPC a été de $ 127 pour un taux de pénétration annuelle de 17,6%. La DPJ est ainsi de $ 722. Ce montant est supérieur à la dépense moyenne de $ 581 rapportée par les répondants de l’étude de prévalence de 2002. L’auto-évaluation est alors de 20% inférieure à l’estimé financier. Ces estimations de la DCPJ vont au-delà du second critère du jeu sécuritaire. Selon ces données financières, il y a lieu de considérer qu’un portion importante de la clientèle des casinos est affectée depuis longtemps par des problèmes de jeu, même si ces gens ne satisfont pas encore aux critères diagnostiques formels du jeu pathologique. Tableau 3 Participation de la population québécoise aux activités des casinos Fréquence de jeu Dépense annuelle Année Activité À vie Annuelle Mensuelle Hebdomadaire 1996 Total 37,8% 16,4 % 1,0 % 0,2 % 2002 Total 2002 2002 26 Moyenne Médiane 17,6 % 581 $ 55 $ Jeux de table 7,5 % 679 $ 60 $ MAS 16,3 % 210 $ 40 $ Voir à la page 10 du rapport annuel 1994-1995 de Loto-Québec. 27 Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense au casino équivaut au revenu de LotoQuébec. Les lots retournés aux joueurs ont été préalablement soustraits. Les montants totaux misés au casino ne sont pas divulgués. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 21 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 22 En 1996-1997, 68% des revenus des casinos provenait des machines à sous28. En 2002-2003, 75% des revenus des casinos ont été tirés des machines à sous29. Tel qu’illustré dans la Figure 10, les machines à sous contribuent à une part toujours croissante des revenus des casinos. Ce sont ces appareils qui contribuent surtout à la DPJ, et ils le font toujours davantage d’une année à l’autre. Figure 10 Répartiton des revenus des casinos selon le type d'activité Portion du revenu annuel 100% 90% 80% 70% 60% Tables de jeu 50% Keno 40% 30% Machines à sous 20% 10% 2002-2003 2001-2002 2000-2001 1999-2000 1998-1999 1997-1998 1996-1997 1995-1996 1994-1995 1993-1994 0% 1.5.3 La dépense dans les appareils de loterie vidéo Le développement du parc d’ALV de Loto-Québec a commencé le 28 juin 199430. Depuis leur implantation, les Québécois ont dépensé31 presque 10 milliards de dollars dans les ALV. En 1996, la DPC était de $ 84 pour une DPJ de $ 400. Les données de l’étude de prévalence de 1996 ne distinguent cependant pas entre les MAS, les ALV et éventuellement les APVi. Des taux de pénétration annuels plus précis ont cependant été publiés dans les rapports annuels de Loto-Québec (voir Figure 11). Ceux-ci étaient de 8,5% en 1996-199732, de 28 Voir à la page 11 du rapport annuel de 1996-1997 de Loto-Québec. 29 Selon KPMG (2004). Canadian Gaming Highlights 2003. 30 Voir à la page 12 du rapport annuel 1994-1995 de Loto-Québec. 31 Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense sur les ALV équivaut au revenu de Loto-Québec. Les lots retournés aux joueurs ont été préalablement soustraits. Les montants totaux misés sur les ALV ne sont pas divulgués. 32 Voir à la page 53 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 22 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 23 10,7% en 1999-200033 et de 9,6% en 2004-200534. Les DPJ correspondantes sont alors de $ 988, $ 1 523 et $ 2 146. Cette croissance fulgurante, nettement au-delà du second critère du jeu sécuritaire35, suggère des problèmes de jeu fréquents ou sévères parmi la clientèle régulière des ALV. Pour ces années, les DPC sont de $ 84, $ 163 et $ 206. Figure 11 Croissance de la dépense au jeu sur ALV en fonction de leur utilisation par la population adulte du Québec 14 12 10 8 6 4 2 0 10,7 9,6 8,5 7,8 4,7 9,3 1996-1997 1999-2000 10,8 2002 12,4 2004-2005 % de la population adulte qui joue sur les ALV Dépense annuelle au jeu (en centaines de millions) En 2002, selon l’étude de prévalence, la DPC était de $ 183 pour une DPJ de $ 2 346. L’auto-estimation des joueurs étant de $884 (voir Tableau 4), celle-ci ne reflète que 38% de l’estimation financière. 33 Voir à la page 53 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec. 34 Voir à la page 26 du rapport annuel 2004-2005 de Loto-Québec. 35 Le second critère consiste à ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). Voir dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 23 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 24 Tableau 4 Participation de la population québécoise aux AÉJ (MAS + ALV) Fréquence de jeu Dépense annuelle Année Activité À vie Annuelle Mensuelle Hebdomadaire Moyenne Médiane 1996 AÉJ 40,2% 21,0 % 4,4 % 1,6 % 2002 AÉJ 21,3 % 471 $ 50 $ 2002 ALV 7,8 % 884 $ 100 $ Entre 1994-1995 et 2000-2001, la croissance des revenus des ALV a été très forte. Pendant quatre années, les revenus se sont presque stabilisés avant d’entreprendre ce qui semble être une seconde période de croissance plus accentuée depuis 2004-2005. Toutefois, la loi sur l’interdiction du tabac va interrompre, au moins transitoirement, cette reprise de croissance. Figure 12 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans les loteries vidéo $1 250 $1 000 $750 $500 $250 $0 1994-95 1995-96 1996-97 1997-98 1998-99 1999-00 2000-01 2001-02 2002-03 2003-04 2004-05 2005-06 Lorsque la dépense au jeu sur ALV dans les provinces canadiennes est analysée en fonction du nombre d’années écoulées depuis leur implantation (voir Figure 13), il semble que l’évolution de la dépense globale sur ALV suit à peu près la même courbe de développement peu importe le lieu d’implantation36. En ce sens, l’attrait des ALV s’est développé à peu près au même rythme au Québec que dans les autres provinces canadiennes. Ce constat est alors indépendant du nombre d’ALV ou de sites de jeu. Les montants dépensés au jeu sont toutefois supérieurs dans les prairies. À noter que, pour cinq provinces, les baisses constatées à la dernière année reflètent les conséquences des lois anti-tabac déjà adoptées dans ces provinces. 36 La cassure de la courbe à l’an 8 pour l’Île-du-Prince-Édouard et à l’an 10 pour le NouveauBrunswick reflète le retrait des ALV distribués dans des commerces qui ne détenaient pas de permis d’alcool. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 24 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 25 Figure 13 Variation de la dépense annuelle moyenne per capita sur ALV en fonction du temps écoulé depuis leur implantation dans chaque province canadienne Revenu net annuel des ALV / population adulte $400 Manitoba (1991-92) $350 Saskatchew an (1993-94) Alberta (1991-92) $300 $250 Terre-Neuve-etLabrador (1990-91) Nouvelle-Écosse Québec (1994-95) (1991-92) $200 $150 Île-du-PrinceÉdouard (1991-92) $100 NouveauBrunsw ick (199091) $50 An 16 An 15 An 14 An 13 An 12 An 11 An 10 An 9 An 8 An 7 An 6 An 5 An 4 An 3 An 2 An 1 $0 Années depuis l'implantation des ALV Enfin, il est opportun de noter (voir Figure 14)37 que des données de la firme KPMG permettent de comparer la dépense au jeu sur les ALV situés dans les hippodromes du Québec à celle des ALV disséminés dans les bars du Québec. En 2002-2003, les ALV des hippodromes ont rapporté en moyenne $102 093, tandis que les ALV dans les bars ont rapporté en moyenne $74 475. Si la tendance est maintenue, chaque ALV déplacé d’un bar vers un salon de jeu pourrait augmenter la dépense au jeu de $27 618 annuellement, soit une augmentation de 37% du bénéfice brut. Ces données financières illustrent la complexité du concept d’accessibilité car le déplacement d’appareils peut susciter un changement dans l’attrait que ceux-ci exercent auprès de la population locale. Dès lors, en déplaçant des ALV dans les hippodromes, une augmentation du bénéfice pourrait annuler les conséquences anticipées de la 37 Données calculées à partir du document : KPMG. (2004). Current and potential racinos in Canada. http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf À titre de comparaison, les données de 2004 pour l’hippodrome de Trois-Rivières proviennent d’un rapport qui a été présenté au député André Gabias : Caron, C. et al. (2004). La survie des courses à Trois-Rivières. Trois-Rivières, QC : Groupe de travail Hippodrome de Trois-Rivières 2004. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 25 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 26 réduction annoncée du nombre d’ALV aux alentours des hippodromes de Québec et de Trois-Rivières. Figure 14 Revenu annuel net moyen par ALV Dépense au jeu sur les ALV selon leur emplacement $120 000 $100 000 $80 000 $60 000 $40 000 $20 000 $0 Aylmer Montréal Québec Trois-Rivières ALV hors hippodromes Hippodrome où les ALV sont situés 2002-2003 2004 1.5.4 La dépense dans le bingo en réseau Le bingo en réseau est une activité que Loto-Québec a inséré dans les soirées de bingo des organismes à but non lucratif. Le bingo en réseau existe depuis le 2 décembre 199738. Depuis le début, les Québécois y ont dépensé39 environ 180 millions de dollars. Il n’existe pas de données permettant de calculer la DPJ. Figure 15 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans le bingo en réseau $30 $20 $10 $0 1997-98 38 1998-99 1999-00 2000-01 2001-02 2002-03 2003-04 2004-05 2005-06 Voir à la page 19 du rapport annuel 1997-1998 de Loto-Québec. 39 Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense au bingo équivaut au revenu de LotoQuébec moins les lots retournés aux joueurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 26 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 27 1.5.5 La dépense dans les loteries multimédia Les jeux multimédias génèrent des revenus depuis février 200040, mais la dépense au jeu ne peut pas être inférée des royautés41. Quoiqu’il en soit, en 2005-2006, ces jeux n’ont procuré que 0,03% des revenus de Loto-Québec. 1.6 Le bingo des organismes charitables Tous les bingos des organismes à but non lucratif (OBNL)42 sont supervisés par la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec. Les rapports annuels de cet organisme public indiquent les revenus nets de l’ensemble des bingos licenciés entre 1983-1984 et 2001-2002. Depuis l’année 2002-2003, la RACJ ne divulgue plus la dépense au jeu dans les bingos des organismes charitables. Figure 16 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans le bingo charitable $80 $60 $40 $20 $0 La barre colorée en rouge marque l’avènement du casino de Montréal, et la barre en jaune celle des ALV. Puis, la barre colorée en vert indique le début du bingo en réseau. En 1996-1997, la DPC a été de $ 11,57 et la DPJ de $ 76. En 2001-2002, la DPC a été de $ 10,75 pour une DPJ d’environ43 $ 119. Bien que des personnes y dépensent quotidiennement, le bingo des organismes charitables ne motive pas de requête d’aide auprès des organismes communautaires ou des services cliniques. 40 Voir à la page 57 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec. 41 En page 67 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec, il est indiqué : « Les revenus représentent les redevances basées sur un certain pourcentage du total du prix de vente au consommateur de la loterie cédérom. » 42 Loto-Québec utilise plutôt l’expression « organisation sans but lucratif » (OSBL). 43 Il aurait préférable d’utiliser la DPC de 2002-2003 pour ce calcul. Malheureusement, cette donnée ne figure plus parmi les rapports annuels de la RACJ. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 27 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 28 Tableau 5 Participation de la population québécoise au bingo Fréquence de jeu Dépense annuelle Année Activité À vie Annuelle Mensuelle Hebdomadaire 1996 Bingo 40,5% 15,1 % 5,1 % 3,0 % 2002 Bingo 9,0 % Moyenne Médiane 423 $ 55 $ 1.7 Les hippodromes, les salons de jeu et partiel Il existe au Québec quatre hippodromes à Aylmer, Montréal, Québec et Trois-Rivières, 18 salons de pari répartis dans plusieurs régions de la province, ainsi qu’un système de pari, par téléphone ou Internet, appelé Paritel. Quel que soit l’endroit où les paris sont faits, ces montants sont cumulés dans les revenus généraux du pari mutuel. La dépense au pari mutuel (voir Figure 17) est compilée à partir de trois sources. Avant 1980-1981, les données ont été inférées à partir des Comptes publics du Québec44. Entre 1980-1981 et 1991-1992, les données proviennent des rapports annuels de la Commission des courses de chevaux du Québec. Par la suite et depuis, les données sont publiées par l’Agence canadienne du pari mutuel45. À noter que les montants rapportés comme étant les montants misés sont en fait la dépense au jeu46. Au cours des 50 dernières années, les Québécois ont ainsi parié plus de 9 milliards de dollars dans les courses de chevaux. 44 Les données antérieures à 1980-1981 sont une estimation calculée à partir de la taxe sur le pari mutuel publiée dans les comptes publics du Québec. Cette taxe est présumée refléter 10,3% des revenus des courses. Nous n’avons pas déterminé si cette taxe a été constante jusqu’en 1980. Quoiqu’il en soit, cette méthode sous-estime la dépense au jeu puisqu’un bond de 76 millions de dollars apparaît exagéré entre 1979-1980 et 1980-1981. 45 http://www.cpma-acpm.gc.ca/francais/acpm.htm. Il s’agit cependant de données recueillies du 1 janvier au 31 décembre. 46 La division des hippodromes d’Agriculture Canada rapporte, à la page 14 de la Revue annuelle 1990, un total des paris égal à $ 315 340 728 au Québec. Il s’agit en fait des revenus bruts, soit les montants misés moins les lots remis aux joueurs. Les montants pariés ont été rapportés par ailleurs dans un graphique de la Commission des courses de chevaux du Québec : Pour les années 1981 à 1990, les montants misés au pari mutuel sont indiqués dans un graphique à la page 28 du rapport annuel 1989-1990 de la Commission des courses de chevaux du Québec. Ainsi, pour des revenus rapportés de $ 317 140 789 en 1989-1990, des mises totales d’environ 1,150 milliards de dollars sont indiquées dans le graphique. Ce graphique permet d’estimer le taux de remise, entre 1983 et 1990, à 63,7%, 64,9%, 66,6%, 70,1%, 73,3%, 72,9%, 71,3% et 72,5% respectivement. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 28 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 29 Figure 17 $400 $300 $200 $100 $0 1955-1956 1956-1957 1957-1958 1958-1959 1959-1960 1960-1961 1961-1962 1962-1963 1963-1964 1964-1965 1965-1966 1966-1967 1967-1968 1968-1969 1969-1970 1970-1971 1971-1972 1972-1973 1973-1974 1974-1975 1975-1976 1976-1977 1977-1978 1978-1979 1979-1980 1980-1981 1981-1982 1982-1983 1983-1984 1984-1985 1985-1986 1986-1987 1987-1988 1988-1989 1989-1990 1990-1991 1991-1992 1992-1993 1993-1994 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans le pari mutuel La courbe de la dépense au jeu peut être divisée en sept intervalles : 1. Sans compétition jusqu’en 1970, les revenus du pari mutuel ont été en constante progression. 2. L’avènement des loteries de Loto-Québec en 1970 (barre colorée en noir) pourrait avoir temporairement stoppé la progression des revenus jusqu’en 1974-1975. 3. Par la suite, la progression reprend son cours jusqu’en 1980-1981. À noter que le saut de 76 millions entre 1979-1980 et 1980-1981 est un artéfact dû à un changement dans la méthode d’estimation de la dépense au jeu. 4. Entre 1980-1981 et 1987-1988, un premier déclin est constaté. Il pourrait s’agir d’une conséquence de l’arrivée des appareils de poker vidéo (APV) survenue à partir de juin 1976 (barre colorée en bleu) mais qui ont surtout connu une forte progression en 1982. 5. Entre 1988-1989 et 1991-1992, il y a une recrudescence de la dépense au pari mutuel. Il pourrait s’agir d’une réponse des parieurs au fait que le taux de remise du pari mutuel est passé de 64% en 1983 à 73% en 1987 (barre colorée en rose). Selon les appareils saisis, les APV avaient alors un taux de remise maximal de 72%. 6. Entre 1992-1993 et 1995-1996, se produit un second déclin encore plus accentué. Le casino de Montréal a ouvert ses portes en 1993 (barre colorée en rouge) et les ALV ont été implantés en 1994 (barre colorée en jaune). 7. Enfin depuis l’année 1996-1997, la dépense au jeu a ré-augmenté pour se stabiliser depuis. À cette occasion, le gouvernement du Québec a choisi d’implanter un grand nombre d’appareils dans des salons de jeu attenant aux hippodromes du Québec (barre colorée en orange). L’avènement du bingo en réseau (barre colorée en vert) ne semble pas avoir eu d’impact. Il existe des données manquantes pour les années 1963-1964 et 1971-1972. Cette figure est intéressante parce que l’implantation des ALV dans les hippodromes a vraisemblablement stimulé et stabilisé la dépense au pari mutuel. Il ne s’agit pas ici de revenus supplémentaires provenant des ALV, mais bien d’une dépense additionnelle au pari mutuel. Pourtant, entre-temps, la clientèle annuelle des hippodromes est passée de 3,8% de la population adulte en 1996 à 1,9% en 2002 (voir Tableau 6). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 29 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 30 Tableau 6 Participation de la population québécoise aux courses de chevaux Fréquence de jeu Dépense annuelle Année Activité À vie Annuelle Mensuelle Hebdomadaire 1996 Courses 24,7% 3,8 % 0,7 % 0,4 % 2002 Courses Moyenne Médiane 826 $ 25 $ 1,9 % En 1996, la DPC a été de $ 30,67 pour une DPJ de $ 807. En 2002, la DPC a été de $ 31,24, et DPJ a été de $ 1 523. Sans équivoque, la clientèle diminue plus rapidement que les revenus des hippodromes ce qui masque plausiblement une aggravation des problèmes des joueurs restants. 1.8 Les tirages des organismes communautaires ou commerciaux Tous les tirages47 des organismes communautaires ou commerciaux sont supervisés par la RACJ. Les rapports annuels de cet organisme public indiquent les revenus nets de l’ensemble de ces tirages entre 1996-1997 et 2001-2002. Il n’est cependant pas possible d’analyser la DPJ. Néanmoins, la masse de la dépense globale au jeu n’y est pas très élevée compte tenu de la popularité des tirages au Québec. En principe, les tirages commerciaux ne coûtent rien aux participants. Figure 18 M illion s Dépense annuelle des adultes québécois dans les activités de tirage $30 $20 $10 $0 La barre colorée en rouge marque l’avènement du casino de Montréal, et la barre en jaune celle des ALV. Puis, la barre colorée en vert indique le début du bingo en réseau. 1.9 Les casinos des organismes charitables Les casinos des organismes charitables ne posent aucun risque pour la population. Dans la figure suivante, nous comparons la dépense au jeu dans ces casinos, les seuls 47 Les tirages dont il est ici mention impliquent l’achat d’un billet, par exemple le tirage d’une maison pour venir en aide à un organisme charitable. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 30 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 31 disponibles au Québec avant 1993 (en vert), à celle réalisées dans les casinos de LotoQuébec depuis 1993 (en rouge). Figure 19 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans les casinos charitables $800 $700 $600 $500 $400 $300 $200 $100 $0 2005-2006 2004-2005 2003-2004 2002-2003 2001-2002 2000-2001 1999-2000 1998-1999 1997-1998 1996-1997 1995-1996 1994-1995 1993-1994 1992-1993 1991-1992 1990-1991 1989-1990 1988-1989 Les barres colorées en vert indiquent la dépense annuelle dans les casinos charitables. Celles-ci contrastent avec les barres colorées en rouge indiquant la dépense dans les casinos de Loto-Québec. 1.10 La spéculation boursière Dans la mesure où l’économie croît à long terme, l’activité boursière est à espérance positive de gain. Toutefois, certaines personnes spéculent à la bourse autrement que par une analyse découlant de connaissances approfondies sur les entreprises inscrites. Lorsque les personnes ne font que de l’analyse technique limitée aux fluctuations passées des titres, avec des transactions fréquentes à court terme, il semble qu’il s’agisse d’un jeu à espérance négative de gain. L’ampleur de ce phénomène n’a jamais été mesurée. Néanmoins, il peut être considéré que les Québécois participent à ce type de spéculation, et interprètent parfois cette activité comme un jeu. La comparaison entre les études de prévalence de 1996 et 2002 suggèrent une diminution de l’intérêt dans la spéculation boursière (voir Tableau suivant). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 31 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 32 Tableau 7 Participation de la population québécoise à la spéculation boursière Fréquence de jeu Dépense annuelle Année Activité À vie Annuelle Mensuelle Hebdomadaire 1996 Bourse 11,3% 7,1 % 3,3 % 2,2 % 2002 Bourse Moyenne Médiane 2,2% 1.11 Les activités des nations amérindiennes Depuis le 10 juin 1996, il existe au Québec un organisme amérindien appelé la « Kahnawake gaming commission48 » qui supervise des activités de jeu sur le territoire Mohawk ou celles diffusées à partir de cette réserve. La plupart des licences émises concernent des casinos virtuels sur Internet. Les nations amérindiennes organisent aussi des bingos qui suivent des règles différentes de celles édictées par le gouvernement du Québec. Il n’existe pas de statistiques valides concernant la dépense annelle des Québécois dans ces activités. 1.12 L’offre de jeu des juridictions étrangères Avant 1970, les Québécois auraient beaucoup dépensé dans les loteries étrangères49, notamment en achetant des billets du Sweepstake irlandais. Toutefois, l’avènement des loteries publiques de Loto-Québec semble avoir complètement endigué cette fuite économique. L’ouverture des casinos québécois a été motivée par l’attrait qu’exerçait les casinos américains sur la population du Québec. Selon Loto-Québec50, celle-ci y aurait dépensé 68 millions de dollars en 1989 et 135 millions de dollars en 1991. Il s’agit d’une DPC de $ 12,87 et $ 25,07. Avec les casinos établis au Québec, cette dépense a quintuplé depuis. Enfin, les croisières en mer commencent à être populaires auprès des Québécois. Ces paquebots constituent de véritables casinos flottants. Aucune estimation n’est disponible à leur sujet. 48 http://www.kahnawake.com/gamingcommission 49 Voir l’ensemble du dossier dans : Loto-Québec. (1984). Dossier Québec 1901-1970. Quatrième dossier des périodiques de Loto-Québec. Montréal, QC : auteurs. 50 Voir aux pages 66-68 dans : Bizier, H.-A. (1996). Loto-Québec: un succès collectif. Montréal, QC: Forces Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 32 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 33 1.13 Le jeu sur Internet En raison des lois canadiennes, le gouvernement du Québec a le pouvoir exclusif de réglementer le jeu dans l’ensemble de son territoire. À cet égard, il n’a émis aucune licence concernant le jeu sur Internet qui est, de ce fait, a priori51 illégal. Les résultats de l’étude de prévalence du jeu pathologique au Québec, réalisée en 2002, indiquent néanmoins que 0,3% de la population adulte52 du Québec a joué sur Internet cette année-là. Cela représente environ 14 000 joueurs53 qui ont parié en moyenne 1 495 dollars. Au total, les adultes québécois auraient ainsi investi environ 20,9 millions de dollars en 2002 dans l’ensemble des activités de jeu disponibles sur Internet. 1.14 Les activités illégales de jeu Entre 1979 et 1991, la Régie des loteries du Québec émettait des licences pour des appareils de poker vidéo que l’on retrouvait dans différents commerces54. Ceux-ci constituent ce qui est désigné comme le marché gris puisque, sans être légaux, ils étaient tolérés par les autorités. Il y en avait 978 en 1981-1982, et un sommet a été atteint en 1990-1991 avec 18 581 licences. Avec l’implantation des ALV de Loto-Québec en juin 1994, ce marché a été complètement résorbé en 199655. La dépense au jeu dans ces appareils n’est pas connue précisément. Elle aurait pu atteindre 352 millions de dollars en 199156. Le marché clandestin, ou marché noir, du jeu est constitué de tout dispositif de jeu ne détenant pas de licence. Aucune estimation de la dépense au jeu n’est possible sur ce marché, à toutes fins pratiques, invisible. 51 Les nations amérindiennes du Canada affirment ne pas être contraintes par les lois provinciales comme les nations amérindiennes des États-Unis ne sont pas contraintes par les lois des états en matière de jeu. La volonté ou le pouvoir des gouvernements provinciaux à subordonner les nations amérindiennes aux lois provinciales sont actuellement accompagnés de tolérance. Par ailleurs, les casinos virtuels licenciés légalement à l’étranger pourraient ne pas être tenus responsables des infractions commises par les citoyens canadiens qui les utilisent. 52 Voir à la page 10 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. 53 Voir à la page 41 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. 54 Voir à la page 13 dans le rapport annuel 1993-1994 de la Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec. 55 Voir à la page 8 du Plan d’action 2003-2006 de Loto-Québec. 56 Voir la section 3.2.2.3 - La rentabilité des APV à la page 69 du présent document au Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 33 Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 34 Loto-Québec57 rapporte que les marchés gris et clandestin auraient englobé 25 000 appareils de jeu durant les années 80, et que ceux-ci auraient généré (annuellement) des revenus de 600 millions de dollars, soit un revenu annuel d’environ 24 000 dollars par appareil. Une telle estimation équivaut à la dépense au jeu, en 1997-1998, sur les ALV de Loto-Québec, à celle des trois casinos la même année, ou à trois fois et demie les montants misés au pari mutuel. Il est douteux qu’une activité clandestine ait pu égaler celle de casinos, d’ALV ou d’hippodromes accessibles sans entrave. 1.15 En conclusion La dépense au jeu de la population québécoise a subi une croissance continuelle entre 1970 et 1993 avant de connaître une augmentation spectaculaire entre 1993 et 2001. L’avènement des casinos et des ALV, en 1993 et 1994, ne semble pas avoir amoindri la croissance des loteries, pas plus que le bingo en réseau ne l’a fait plus tard en 1997. De même, l’accroissement de la dépense au jeu dans les activités de Loto-Québec est telle qu’elle dépasse de beaucoup l’ensemble des montants misés dans le pari mutuel. Sans équivoque, il n’y a pas eu de substitution importante entre les marchés. Les dollars consacrés à une activité de jeu ne semblent pas provenir d’une autre activité de jeu, précédemment plus populaire, mais d’autres secteurs du budget des Québécois. Enfin, l’analyse de la dépense au jeu indique que les DPJ sont très élevées pour les ALV, les casinos et le pari mutuel. Eu égard au second critère du jeu sécuritaire, il est probable qu’une bonne partie de ces clientèles éprouvent des problèmes de jeu. 57 Voir à la page 8 du Plan d’action 2003-2006 de Loto-Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 34 Chapitre 2 La loterie vidéo : état de la situation au Canada En 1988 aux États-Unis, pour la première fois, le gouvernement fédéral a autorisé les nations amérindiennes à exploiter des établissements de jeu offrant les activités de jeu légales dans l’état où elles sont établies58. Les revenus des nations amérindiennes n’étant pas taxables par les états59, ces derniers pouvaient subir d’importantes pertes fiscales. Les états ont alors tenté de retenir l’argent du jeu soit en négociant un partage de revenus ou en opposant des casinos d’état60. Certains états, moins fortunés, n’étaient pas en mesure de rivaliser d’imposants casinos amérindiens, ou ceux d’état voisins plus fortunés. Un moyen moins dispendieux pour tenter de retenir l’argent du jeu a été d’implanter des parcs d’ALV dans l’environnement immédiat des populations. Ainsi, les premiers ALV ont été implantés en 1989, dans l’état du Dakota du Sud. Pour la première fois61 depuis 195162, les appareils de jeu sortaient des casinos. Au Canada, les AÉJ sont légaux depuis le 31 décembre 1985, mais uniquement s’ils sont exploités par les gouvernementaux provinciaux63. Les nations amérindiennes ne peuvent pas exploiter des dispositifs de jeu sans l’aval des provinces. Le premier casino canadien a ouvert ses portes à Fort Garry, au Manitoba, en décembre 1989. Bien loin de là, le 1 décembre 1990, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a développé un premier parc d’ALV. Second casinotier, le Québec n’a ouvert les portes du casino de Montréal qu’en octobre 1993 alors que sept provinces avaient déjà déployé leur parc d’ALV (voir Tableau 8). Ainsi, le déploiement des ALV au Canada n’a pas été motivé par la menace d’une fuite économique vers l’économie amérindienne ou vers des juridictions voisines. En fait, les provinces canadiennes ont surtout mis leurs ALV en compétition avec leurs propres casinos. En particulier, le Québec n’était pas menacé par une offre de jeu massive à ses frontières, ni même par un marché clandestin. 58 (a) McCulloch, A. M. (1994). The politics of indian gaming : tribe/state relations and american federalism. Publius, 24(3), 99-112. (b) Greene, B. M. (1996). The reservation gambling fury : modern Indian uprising or unfair restraint on tribal sovereignty? BYU journal of public law, 10, 93116. (c) Barker, T., & Britz, M. (2000). Jokers wild. Legalized gambling in the twenty-first century. Westport, Connecticut : Praeger. 59 Voir à la page 14 dans : Johnson, R. N. (2004, October). Indian casinos : another tragedy of the commons? Draft paper of a chapter to appear in T. L. Anderson, B. Benson, & T. Flanagan (Eds), Self-determination: the other path for Native Americans. 60 Voir aux pages 15 à 28 dans : Johnson, R. N. (2004, October). Indian casinos : another tragedy of the commons? Draft paper of a chapter to appear in T. L. Anderson, B. Benson, & T. Flanagan (Eds), Self-determination: the other path for Native Americans. 61 À l’exception de deux expériences pilotes au Montana et en Caroline du Sud. 62 En raison du Johnson Act : 15 USC Section 1172, Chapter 24 – Transportation of Gambling Devices. 63 Voir notamment aux pages 17 à 20 dans : Campbell, C. S., Hartnagel, T. F., & Smith, G. J. (2005, July 6). The legalization of gambling in Canada. Prepared for : The Law commission Canada : « What is a crime? ». Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 36 Tableau 8 Codes des couleurs des provinces et date d’implantation des ALV Province Nouveau-Brunswick Terre-Neuve-et-Labrador Île-du-Prince-Édouard Nouvelle-Écosse Manitoba Alberta Saskatchewan Québec Ontario Colombie-Britannique Date d'implantation Décembre 1990 Décembre 1990 Août 1991 Mai 1991 Novembre 1991 Mars 1992 Juillet 1993 Juin 1994 Seuls l’Ontario et la Colombie-Britannique n’ont pas de parc d’ALV car ces provinces ont davantage investi dans le développement de casinos bien pourvus en MAS. L’Ontario a aussi développé des racinos64, soit des salons de jeu situés dans des hippodromes. La Colombie-Britannique commence aussi à en développer. Au Québec, les racinos existent depuis 1996 aux hippodromes de Montréal, Québec, Trois-Rivières et Aylmer. 2.1 Le nombre d’ALV au Canada Le nombre d’ALV a connu une croissance rapide jusqu’en 1996 alors que le marché s’est stabilisé à un peu moins de 40 000 ALV (voir Figure 20). Figure 20 Évolution du nombre d'ALV au Canada 40000 35000 30000 25000 20000 15000 10000 5000 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 1999-00 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 1993-94 1992-93 1991-92 1990-91 0 64 Il s’agit d’un néologisme contractant les expressions anglaises racing et casino. On y trouve un grand nombre d’appareils électroniques de jeu similaires aux MAS et aux ALV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 36 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 37 Depuis 1995-1996, le Québec constitue la province où il existe le plus d’ALV au Canada. En contrepartie, avec l’Alberta, le Québec est la province où il existe le moins d’ALV par groupe de 10 000 personnes adultes (voir Figure 21). Figure 21 70 60 50 40 30 20 10 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 1999-00 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 1993-94 1992-93 1991-92 0 1990-91 Nombre d'ALV par 10 000 adultes Nombre d'ALV par 10 000 adultes au Canada Ceci ne signifie pas que l’offre de jeu y est moindre car, parmi les provinces qui offrent des ALV, l’Alberta et le Québec possèdent les populations les plus urbanisées65 (voir Figure 22). Dans un tel contexte, les zones plus densément peuplées peuvent être davantage exposées malgré un nombre moindre d’appareils. Figure 22 81% 85% ColombieBritannique 64% Alberta Manitoba Saskatchewan 72% 85% Ontario Québec 50% NouveauBrunswick 56% NouvelleÉcosse 44% Île-du-PrinceÉdouard 58% Terre-Neuveet-Labrador 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 80% Proportion de la population habitant en milieu urbain Au Québec, après avoir rapidement atteint un sommet de 4 370 en 1996-1997, le nombre de sites où se trouvent des ALV est en constante régression (Voir Figure 23). 65 Voir Statistique Canada, tableau numéro 01090200 http://dissemination.statcan.ca/english/freepub/82-221-XIE/00503/tables/html/44_01.htm. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 37 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 38 En 2005-2006, le nombre de sites n’était plus que de 3 122, soit une réduction de 29% depuis son maximum. De plus, le nombre d’ALV a atteint un maximum de 15 314 en 1998-1999 pour diminuer ensuite à 13 516 en 2005-2006, soit une diminution de 12% (Voir Figure 24). À noter que malgré cette réduction continuelle, depuis déjà plusieurs années, la dépense au jeu des Québécois a toujours été en progression (voir à la page 22 dans ce document). Figure 23 Figure 24 Nombre de sites Nombre d'ALV 16000 5000 4000 3000 2000 1000 0 12000 8000 4000 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 0 2.2 Les paramètres de jeu sur ALV Les ALV sont à peu près tous semblables au Canada. Le taux de remise moyen est de 92% au Québec et en Alberta. Il est de 92,5% en Saskatchewan. Les provinces de l’Atlantique offrent plutôt des jeux dont le taux de remise varie entre 93% et 95%. Le Manitoba ne publie à peu près aucune information concernant ses ALV. Les jeux offerts sont des clones les uns des autres. Ceux-ci sont partout un mélange de jeux de lignes et de jeux de cartes avec, à l’occasion, des jeux de keno ou de bingo. Bien qu’ils soient d’apparence semblables, ces petites variations dans les taux de remise pourraient faire varier considérablement la dangerosité des appareils. 2.3 Les revenus des ALV Malgré que le Québec et l’Alberta aient un ratio d’ALV per capita moindre, les appareils rapportent davantage que ceux des autres provinces (voir Figure 26 par rapport à la Figure 25). En 2004-2005, parmi l’ensemble des provinces qui offrent des ALV, la population du Québec équivalait à 51% de la population. À cet égard, son parc d’ALV ne représente que 36% de tous les ALV au Canada. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 38 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 39 Figure 25 Répartition des ALV au Canada en 2004-2005 NouveauBrunsw ick 7% NouvelleÉcosse 10% Québec 36% Manitoba 14% Île-du-PrinceÉdouard 1% Terre-Neuve- Saskatchew an 10% Alberta 15% et-Labrador 7% En contrepartie, le Québec retire 41% des profits. Seuls le Québec et l’Alberta ont obtenu une plus grande part des profits compte tenu de la proportion des ALV qu’ils possèdent. Figure 26 Répartition des profits tirés des ALV au Canada en 2004-2005 NouveauBrunsw ick Nouvelle5% Écosse 7% Île-du-PrinceÉdouard 1% Terre-Neuveet-Labrador 5% Québec 41% Manitoba 10% Saskatchew an 9% Alberta 22% 2.4 La dépense par joueur La dépense per capita est un indice trop général de l’impact des ALV, car seulement une minorité de la population s’intéresse aux jeux qui y sont offerts. Huit provinces ont publié les taux de pénétration annuels des ALV dans leur population (voir Figure 27). Ainsi, entre 1992 et 2005, 15% de la population adulte a joué au moins une fois sur les ALV. Il est à noter que le Québec est la province où la population s’intéresse le moins aux ALV. En ce sens, la dépense per capita moindre au Québec cache une dépense moyenne supérieure par joueur (voir Figure 28). En ce qui concerne ces deux figures, le détail du calcul, pour les données du Québec, est indiqué dans le Tableau 9. Non explicité ici, le même calcul a été fait pour les autres provinces. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 39 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 40 Figure 27 Taux de pénétration annuelle des ALV au Canada 30% 25% 20% 15% 10% 5% Terre-Neuve-et-Labrador Nouvelle-Écosse Nouveau-Brunsw ick Île-du-Prince-Édouard Québec Manitoba Saskatchew an Alberta 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 0% Figure 28 Bénéfice des ALV par joueur annuel $3 000 $2 500 $2 000 $1 500 $1 000 $500 Terre-Neuve-et-Labrador Nouvelle-Écosse Nouveau-Brunsw ick Île-du-Prince-Édouard Québec Manitoba Saskatchew an Alberta 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 $0 Tableau 9 Comparaison de la dépense per capita et de la dépense par joueur sur les ALV de Loto-Québec Année Revenu net des 1 ALV Population 2 adulte Dépense 3 per capita Taux de 4 pénétration Nombre de 5 joueurs Dépense par 6 joueur 1997 $466 286 000 5 609 967 $ 83,12 8,5% 476 847 $ 977,85 1999 $767 969 000 5 706 445 $134,58 10,7% 610 590 $1 257,75 2002 $1 067 506 000 5 878 550 $ 181,59 7,8% 458 527 $2 328,12 2004 $1 128 847 000 6 002 655 $ 188,06 9,6% 576 255 $1 958,94 1 Bénéfice brut des ALV au 31 mars selon les rapports annuels de Loto-Québec. Population le 1 juillet selon Statistique Canada, tableau CANSIM 051-00011,2,6. 3 Revenu net des ALV divisé par la taille de la population adulte. 4 Selon les rapports annuels de Loto-Québec ainsi que l’étude de prévalence de 2002. 5 Nombre de joueurs annuels = population adulte multipliée par le taux de pénétration annuel. 6 Revenu net des ALV divisé par le nombre de joueurs annuels. 2 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 40 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 41 Ce tableau témoigne à quel point la dépense per capita renseigne mal sur la réalité des joueurs. Ce qui apparaît une dépense annuelle per capita de moins de 200 dollars est en fait une dépense d’environ 2 000 dollars par joueur annuel. Et, encore, les joueurs annuels englobent beaucoup de personnes qui ne jouent que sporadiquement. Si les données étaient disponibles pour les joueurs mensuels, cette dépense par joueur serait beaucoup plus élevée; et encore davantage pour les joueurs qui jouent régulièrement à chaque semaine. 2.5 Le comportement des joueurs Douze études provinciales de prévalence du jeu, deux rapports annuels de LotoQuébec, ainsi qu’une étude pancanadienne, ont publié récemment des informations décrivant spécifiquement les comportements des joueurs sur les MAS ou sur les ALV. Parfois, ces études publient des informations comparant la situation actuelle aux années antérieures. Les informations présentées ci-après proviennent donc de ces études auxquelles nous nous référons en ayant recours aux sigles suivants (voir Tableau 10). Tableau 10 Études de prévalence disponibles pour évaluer les comportements de jeu sur les MAS et les ALV Sigles Références MAS ALV TN2005 Terre-Neuve-et-Labrador, 2005 Marketquest research group, Inc. (2005, November). Newfoundland and Labrador gambling prevalence study. St John's, NL: Government of Newfoundland and Labrador, Department of health and community services. Non Oui IPE1999 IPE2005 Île-du-Prince-Édouard, 2005 Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health. Non Oui NÉ1996 NÉ1997 NÉ2003 Nouvelle-Écosse, 2003a Schrans, T., & Schellinck, T. (2004, June). 2003 Nova Scotia gambling prevalence study. Final report. Halifax, NS: Nova Scotia office of health promotion. Oui Oui NB1992 NB1996 Nouveau-Brunswick, 1996 Baseline market research. (1996) Appendix E : Final report, prevalence study, problem gambling, wave 2. Dans Video lottery program review. Non Oui NB2001 Nouveau-Brunswick, 2001 Focal research (2001). 2001 Survey of gambling and problem gambling in New Brunswick. Moncton, NB: New Brunswick department of health and wellness. Non Oui QC1997 QC1999 Québec, 1999 Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. Oui Oui Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 41 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 42 Tableau 10 Études de prévalence disponibles pour évaluer les comportements de jeu sur les MAS et les ALV QC2002 Québec, 2002 Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, QC : Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. Oui Oui Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. QC2004 Québec, 2004 Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal, QC : auteur. Oui Oui ON2001 Ontario, 2001 Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001, December 04). Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Toronto, ON: Canadian centre on substance abuse. Responsible gambling council (Ontario). Oui Non ON2005 Ontario, 2005 Wiebe, J., Mun, P., & Kauffman, N. (2006, May). Gambling and problem gambling in Ontario 2005. Submitted to the Ontario problem gambling research centre. Oui Non MA2001 Manitoba, 2001 Patton, D., Brown, D., Dhaliwal, J., Pankratz, C., & Broszeit, B. (2002 april). Gambling involvement and problem gambling in Manitoba. Winnipeg, Manitoba: Addictions foundation of Manitoba. Oui Oui SA1993 SA2001 Saskatchewan, 2001 Wynne, H. J. (2002, January). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Final report. Ottawa, ON: Canadian centre on substance abuse. Oui Oui AL1993 AL1997 AL2001 Alberta, 2001 Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Institute. Oui Oui CB2002 Colombie-Britannique, 2002 Britsh Columbia Ministry of Public Safety and Solicitor General (2003). British Columbia problem gambling prevalence study. Final report. Victoria, BC: auteurs. Oui Non CAN2002 Canada, 2002 Marshall, K., & Wynne, H. (2003, December). Fighting the odds. L’emploi et le revenu en perspective, 4(12), Ottawa, ON : Statistique Canada, 75-001-XIE. Oui Oui 2.5.1 Les taux de pénétration et d’adoption des ALV Le taux de pénétration indique le pourcentage de la population adulte qui a utilisé les ALV. La proportion de la population qui a misé sur un ALV au moins une fois au cours Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 42 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 43 de sa vie participe au taux de pénétration à vie. Ceux qui ont joué au cours des 12 derniers mois composent le taux de pénétration annuelle, et ainsi de suite. Le Tableau 11 indique les taux moyens de pénétration des études provinciales réalisées au Canada entre 1992 et 2005. Ces taux sont affichées dans la Figure 29. On constate ainsi que, là où il y a des ALV, seulement une personne adulte sur cinq (20,6%) a eu la curiosité d’y jouer. Les trois quarts d’entre elles (15,1% de la population adulte) y ont joué au cours de la dernière année. Le taux d’adoption annuel est alors de 73% (voir Figure 30). Parmi les joueurs annuels, 42% adoptent une fréquence de jeu mensuelle. Les joueurs mensuels représentent alors 6,4% de la population adulte. Enfin, 41% des joueurs mensuels misent sur les ALV à chaque semaine. À noter que 2,6% de la population adulte joue sur les ALV à chaque semaine. Ce pourcentage est très près du taux de prévalence du jeu pathologique en général dans la population. 21% 18% 10% 28% 16% 18% 13% 18% 13% 13% 2% 2% 2% Moyenne Figure 29 25% 20% 15% 10% 5% 0% Taux de pénétration des ALV 20,6% 15,1% 6,4% À vie Annuel Mensuel 2,6% Hebdomadaire Figure 30 Taux d'adoption des ALV Moyenne 80% 73,7% 60% 42,4% 40,9% Mensuel Hebdomadaire 40% 20% 0% Annuel AL2001 AL1997 AL1993 8% SA2001 11% SA1993 QC2002 9% MA2001 QC1999 8% 4% 2% QC2004 QC1997 À vie 20% 23% Annuel 11% 21% 23% 19% 15% 19% 15% 13% Mensuel 6% 5% 4% Hebdomadaire 3% 5% 4% 2% 2% IPE2005 IPE1999 NB2001 NB1996 NB1992 NÉ2003 NÉ1997 NÉ1996 TN2005 Tableau 11 Taux de pénétration des ALV Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 43 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 44 2.5.2 Le profil sociodémographique des joueurs sur ALV En raison de la grande taille des échantillons, les études de prévalence rapportent fréquemment des différences significatives entre diverses catégories sociodémographiques. Typiquement, le joueur excessif sur ALV est présenté comme un jeune homme, célibataire sans enfant, et ayant relativement peu de revenu. En fait, ce profil ne décrit qu’une légère tendance qui ne doit pas conduire à un stéréotype. Plus justement, à l’exception des aînées, à peu près tous les segments de la population s’intéressent à peu près également aux ALV, et ceux qui s’y adonnent développent à peu près également des problèmes de jeu. L’étude réalisée à Terre-neuve en 2005 permet de comparer les profils (a) de l’échantillon global, c’est-à-dire de la population, (b) des joueurs en général [84% de la population], (c) des joueurs annuels sur ALV [11%], et (d) des joueurs excessifs [3,4%], soit ceux qui manifestent un risque modéré ou plus à l’ICJE. Comme l’indique la Figure 31, les profils de la population (en jaune) et des joueurs en général (en bleu) sont quasi identiques. Cela n’est pas étonnant puisque 84% de la population joue. Par contre, le profil des joueurs annuels sur ALV (en rouge) se distingue par le fait qu’il y existe un peu plus d’hommes, célibataires ou conjoints de fait, de moins de 25 ans. Ce profil ne se démarque cependant pas particulièrement. Le profil des joueurs excessifs (en bleu pâle) est un peu plus prononcé, mais varie souvent dans le même sens que celui des joueurs annuels sur ALV. Figure 31 Joueurs annuels sur ALV Joueurs excessifs > $100 000 $60 001 à $80 000 $40 001 à $60 000 $20 001 à $40 000 < $20 000 Université DES < DES Divorcé ou séparé Veuf Célibataire Conjoint de fait Marié 65 ans et + 55-64 ans 45-54 ans 35-44 ans 24-34 ans Joueurs $80 001 à $100 000 Population 19-24 ans Femmes Hommes 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Post DES Terre-Neuve-et-Labrador, 2005 : Comparaison des profils sociodémographiques en fonction de la pratique de jeu Les résultats de l’étude de Terre-Neuve sont corroborés par l’étude de prévalence réalisée en 2003 en Nouvelle-Écosse (voir Figure 32). Cette fois, il est possible de comparer en plus le profil des joueurs mensuels sur ALV. Ce ne sont pas des caractéristiques sociodémographiques qui expliquent l’adoption d’une fréquence de jeu mensuelle sur ALV. Par rapport à la population, les principales différences résident dans les faits qu’on est moins susceptible d’être un joueur sur ALV lorsqu’on est une femme, ou lorsqu’on a 65 ans ou plus. Ces tendances sont cependant peu marquées. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 44 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 45 Figure 32 Nouvelle-Écosse, 2003 : Comparaison des profils sociodémographiques en fonction de la pratique de jeu 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% Population Joueurs annuels sur ALV Joueurs mensuels sur ALV $60 000 ou plus $30 000 à $59 999 Moins de $30 000 65 ans ou plus 55-64 ans 45-54 ans 35-44 ans 25-34 ans 19-24 ans Femmes Hommes 0% Joueurs excessifs Une étude antérieure66, réalisée en 1997-1998 en Nouvelle-Écosse et consacrée exclusivement aux joueurs sur ALV, permet de comparer, de manière plus détaillée, les profils (a) de la population, (b) des non joueurs, (c) des joueurs occasionnels qui utilisent rarement des ALV , (d) des joueurs qui misent peu souvent sur les ALV, mais qui le font régulièrement, (e) des joueurs réguliers qui jouent à chaque mois, et (f) des joueurs réguliers, fréquents, qui éprouvent des problèmes de jeu sur ALV (voir Figure 33 et Figure 34). Ces profils sont très similaires. Ils ne présentent que des différences mineures. Davantage d’hommes jouent sur les ALV, davantage y jouent régulièrement, et davantage y développent au moins un problème de jeu. Un peu plus de personnes de 19 à 24 ans utilisent des ALV, alors que les personnes de 60 ans ou plus y sont particulièrement absentes. Les différences les plus associées à une pratique régulière fréquente de jeu sur ALV, et aux problèmes de jeu sur ALV, sont le fait d’être célibataire, de n’avoir aucun enfant à la maison, de ne pas être universitaire et de ne pas avoir de revenu supérieur. Ces différences sociodémographiques restent néanmoins des tendances peu marquées qui ne permettent pas de dépister des joueurs à risque ou avec problème de jeu. 66 (a) Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. (b) Schrans, T., Schellinck, T., & Walsh, G. (2001). The 2000 regular VLT players follow-up survey. Halifax, Nava Scotia : Nova Scotia Department of Health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 45 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 46 Figure 33 Nouvelle-Écosse 1997-1998: Profils sociodémographiques des joueurs - partie A Population Non-joueur Occasionnels Régulier peu fréquent Régulier fréquent 1 enfant ou + Aucun enfant à la maison Divorcé, séparé ou veuf Marié ou conjoint de fait Célibataire 60 ans ou + 50-59 ans 45-49 ans 40-44 ans 35-39 ans 30-34 ans 25-29 ans 19-24 ans Hommes Femmes 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Avec problème Figure 34 Nouvelle-Écosse 1997-1998: Profils sociodémographiques des joueurs - partie B 80% 70% 60% 50% Population Non-joueur Occasionnels Régulier peu fréquent Régulier fréquent > 45 000 25 000 à 45 000 < 25 000 $ Université Université incomplète DES ou - Handicapé Retraité Ménagère Étudiant Sans emploi Temps partiel Temps complet 10% 0% DEC 40% 30% 20% Avec problème 2.5.3 Les profils d’adoption de la fréquence de jeu sur ALV Tony Schellinck et Tracy Schrans, les auteurs de l’étude de la Nouvelle-Écosse67, ont fait un lien entre le profil sociodémographique des joueurs sur ALV et la clientèle des 67 Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 46 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 47 bars où se situent les ALV68. Par exemple, si les femmes participent moins souvent aux jeux sur ALV, cela peut être simplement en raison du fait qu’elles sont moins nombreuses à fréquenter les bars, et lorsqu’elles le font, celles-ci sont des clientes moins assidues que les hommes69. S’il y a moins de femmes qui utilisent régulièrement des ALV, ou qui y développent des problèmes, cela n’est pas nécessairement parce qu’elles sont moins enclines à le faire. Cela peut être simplement parce qu’elles ont un accès moins favorables aux ALV; ce qui peut changer radicalement si des ALV sont déplacés des bars vers des salons de jeu qui sont conçus pour un public plus général. En ce sens, l’attrait des ALV peut varier considérablement selon que les comportements de jeu sur ALV sont étudiés en fonction de la population entière, des seuls joueurs en général, des joueurs annuels sur ALV, des joueurs réguliers sur ALV, des joueurs fréquents sur ALV ou des joueurs excessifs sur ALV. Pour illustrer ces différences, les auteurs ont étudié les taux d’adoption. Une fois rendu dans un bar, combien de personnes entreprennent de jouer occasionnellement sur les ALV? Si on ne considère que les joueurs occasionnels, combien adoptent ensuite une fréquence régulière de jeu sur ALV? Lorsque des personnes jouent régulièrement sur les ALV, combien entreprennent ensuite d’y jouer fréquemment au moins une fois par mois? Enfin, parmi les joueurs réguliers fréquents, combien développent des problèmes de jeu? La Figure 35 illustre les résultats de cette analyse en fonction du sexe du joueur. Figure 35 29% Hommes Femmes Développe un problème sur les ALV Joue fréquemment 16% Joue régulièrement 14% 30% 49% 57% 47% 31% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Joue occasionnellement Taux d'adoption par rapport au comportement précédent Nouvelle-Écosse 1997-1998 Sexe - analyse des taux d'adoption Les résultats indiquent que 47% des hommes adultes en Nouvelle-Écosse jouent au moins occasionnellement sur les ALV. Parmi ceux-ci, 16% en viennent à jouer régulièrement. Parmi les joueurs réguliers, 57% décident de jouer fréquemment. Enfin, chez les joueurs fréquents, 29% développent un problème de jeu sur les ALV. Par rapport aux hommes, les femmes ont un intérêt initial moindre à l’égard des ALV (31% c. 47%) et elles adoptent moins souvent une grande fréquence de jeu (49% c. 57%). Par contre, une fois qu’elle ont commencé à jouer occasionnellement, elles sont autant 68 Voir aux pages VI, VIII, 2-25 et 3-11 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 69 Voir à la page 2-41 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 47 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 48 sollicitées que les hommes à y adopter un jeu régulier (14% c. 16%). De plus, une fois qu’une femme a adopté une grande fréquence de jeu régulier sur ALV, elle se trouve aussi vulnérable à l’égard des problèmes de jeu (30% c. 29%). En ce sens, sur les ALV, il existe des différences entre les hommes et les femmes, mais seulement à certaines étapes du cheminement vers les problèmes de jeu. Dans la Figure 36, une analyse identique est faite en fonction des groupes d’âge. La décroissance de la pratique de jeu en fonction de l’âge est manifeste uniquement chez les personnes qui jouent occasionnellement. En contrepartie, l’âge semble beaucoup moins déterminant dans la décision de commencer à jouer régulièrement. Peut-être, mais à l’inverse, est-il impliqué dans le choix de commencer à jouer fréquemment? Mais, en bout de cheminement, l’âge ne semble pas du tout associé à la probabilité de développer un problème de jeu. Dès lors, l’identification du joueur excessif sur ALV à une jeune personne est circonstancielle. Dans la mesure où les ALV peuvent être déplacés à des endroits où se trouvent d’autres segments de la population, les joueurs excessifs sur ALV présenteront des caractéristiques sociodémographiques différentes. L’analyse du cheminement des joueurs vers les problèmes de jeu en fonction du revenu des joueurs est aussi intéressante (voir Figure 37). Plus on est fortuné, plus il est probable que l’on va jouer occasionnellement sur un ALV lorsqu’on est dans un bar. Ce sont cependant les moins fortunés qui risquent d’y adopter une fréquence régulière de jeu. Le revenu ne semble pas impliqué dans l’adoption d’une fréquence élevée de jeu. Par contre, le fait d’être plus fortuné semble protéger les joueurs contre le développement des problèmes de jeu. Évidemment, plus on est fortuné, plus les pertes sont faciles à absorber. Figure 36 Taux d'adoption par rapport au comportement précédent Nouvelle-Écosse 1997-1998 Âge - analyse des taux d'adoption 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Joue occasionnellement Joue régulièrement Joue fréquemment 19-24 ans 25-29 ans 30-34 ans 45-49 ans 50-59 ans 60 ans ou + 35-39 ans Développe un problème sur les ALV 40-44 ans Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 48 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 49 Figure 37 Taux d'adoption par rapport au comportement précédent Nouvelle-Écosse 1997-1998 Revenu - analyse des taux d'adoption 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Joue occasionnellement Joue régulièrement Joue fréquemment <10 000 $ 10 000 à 25 000 25 001 à 35 000 45 001 à 60 000 60 001 à 75 000 > 75 000 Développe un problème sur les ALV 35 001 à 45 000 Dans la Figure 38, il apparaît que le fait d’être célibataire incite davantage à jouer occasionnellement, et que le fait d’être divorcé, séparé ou veuf, produit l’effet contraire. Ceci reflète sans doute uniquement le plus jeune âge des célibataires, et conséquemment l’âge nécessairement plus avancé des divorcés, des séparées et des veufs. Sinon, l’état civil ne semble pas jouer un rôle cohérent dans la suite des événements. Les universitaires faisant exception, plus on est instruit, moins il semble probable que l’on adopte une pratique régulière fréquente de jeu sur ALV et, le cas échéant, que l’on développe des problèmes de jeu. Cette relation est cependant ici incertaine. Par ailleurs, l’analyse du nombre de personnes qui contribuent au revenu familial (voir Figure 40) présente un intérêt appréciable. Plus il y a de personnes dans un foyer qui contribuent au revenu familial, plus les joueurs sont incités à jouer occasionnellement sur les ALV, et même à y jouer régulièrement. Par contre, dès qu’on y joue régulièrement, ce facteur ne semble plus jouer dans la suite des événements. Enfin, dans la Figure 41, il est possible de constater qu’il est possible que les appareils en milieu urbain incitent un peu plus de joueurs à adopter l’étape suivante conduisant à des problèmes de jeu. Cet aspect devrait être mieux étudié. En résumé, l’endroit où se situent les ALV a un impact sur la composition sociodémographique de la clientèle des joueurs. Par contre, dès que les joueurs entreprennent de jouer fréquemment sur les ALV, cet impact disparaît. Incidemment, le passage du jeu fréquent aux problèmes de jeu ne semble pas pouvoir être expliqué par des caractéristiques sociodémographiques des joueurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 49 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 50 Nouvelle-Écosse 1997-1998 État civil - analyse des taux d'adoption Nouvelle-Écosse 1997-1998 Scolarité - analyse des taux d'adoption 60% 50% 40% 30% 20% Mariés ou conjoints de fait Secondaire ou moins Collégial Divorcé, séparé ou veuf Université incomplète Université Nouvelle-Écosse 1997-1998 N. personnes qui contribuent au revenu familial - analyse des taux d'adoption Nouvelle-Écosse 1997-1998 Résidence - analyse des taux d'adoption Une Deux Trois ou plus Urbaine Développe un problème sur les ALV Joue fréquemment Joue régulièrement 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Joue occasionnellement Développe un problème sur les ALV Joue fréquemment Joue régulièrement Joue occasionnellement 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Taux d'adoption par rapport au com portem ent précédent Figure 41 Taux d'adoption par rapport au comportement précédent Figure 40 Développe un problème sur les ALV Joue fréquemment Célibataire Joue régulièrement 10% 0% Joue occasionnellement Développe un problème sur les ALV Joue fréquemment Joue régulièrement Joue occasionnellement 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Taux d'adoption par rapport au comportement précédent Figure 39 Taux d'adoption par rapport au comportement précédent Figure 38 Rurale Dès lors, il n’existe aucun fondement à l’idée que les personnes qui développent des problèmes de jeu sur ALV sont typiquement des jeunes hommes célibataires qui, sans responsabilité familiale, flambent de l’argent qu’ils auraient de toute manière flambé ailleurs. Dans la mesure où les salons de jeu vont attirer une clientèle plus féminine, plus âgée, la clientèle régulière des ALV va s’adapter en conséquence. Dès que ces personnes adopteront une grande fréquence de jeu, elles seront tout aussi susceptibles de développer des problèmes de jeu. En ce sens, le déplacement des ALV des bars Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 50 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 51 vers les salons de jeu pose un risque majeur d’une infiltration des problèmes de jeu dans des segments de la population jusque-là épargnés. 2.6 La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu Une des statistiques les plus intéressantes de l’étude des joueurs sur ALV réalisée en Nouvelle-Écosse est celle qui concerne ce que les auteurs désignent sous le nom de « churn »70. Il s’agit de la comparaison, pour une année donnée, entre le nombre de joueurs qui commencent à jouer sur les ALV et le nombre de joueurs qui cessent. Les données indiquent qu’à chaque année, environ le quart des joueurs ont entrepris de commencer à jouer cette année-là, et que le quart des joueurs ont quitté le jeu sur ALV pendant la même période. Dit autrement, lorsqu’un joueur cesse de jouer, il est immédiatement remplacé par un nouveau joueur. Dès lors, le volume des joueurs annuels est constant, d’une année à l’autre, bien que ce ne sont pas les mêmes personnes qui y perdent. Ce constat est très important car il révèle à quel point le taux de prévalence actuelle71 du jeu pathologique peut être trompeur. Le jeu pathologique est un phénomène épisodique. Les joueurs pathologiques peuvent parfois demeurer longtemps en retrait des activités de jeu avant de connaître une rechute. Parfois, le retrait est forcé en raison de l’épuisement des ressources financières pour jouer. Parfois, des parents ou amis peuvent inciter et appuyer des joueurs pathologiques à rester loin des occasions de jeu. Entre deux mesures de la prévalence actuelle, bon nombre de joueurs pathologiques peuvent avoir commencé à subir des dommages, épuisé leur capacité financière et abandonné temporairement le jeu. Dans ce contexte de nombreux joueurs pathologiques peuvent être omis par les statistiques de prévalence actuelle si un délai trop long72 sépare deux études. De plus, parce que les joueurs excessifs consacrent presque tout leur temps libre au jeu, et qu’ils doivent souvent couper des dépenses73 pour financer leur jeu, il est concevable qu’il soit très difficile de les contacter par téléphone durant cette période74. 70 Voir aux pages V et 2.5 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 71 Généralement évaluée en fonction d’une période limitée aux douze derniers mois. Les expressions prévalence annuelle, prévalence actuelle et prévalence courante sont alors synonymes. 72 Idéalement, une étude de prévalence annuelle devrait être faite à chaque année. Compte tenu du concept de « churn », un délai de plus de quatre années n’est pas acceptable en ce qui concerne les ALV. De plus, si plus d’une année séparent deux études, les comportements durant l’ensemble de cet intervalle devraient aussi être investigués. 73 Par exemple, l’abonnement au service téléphonique. 74 Voir aux pages 329 et 330 dans : Lesieur, H. R. (2002). Epidemiological surveys of pathological gambling : critique and suggestions for modification. In J. J. Marotta, J. A. Cornelius, & W. R. Eadington (editors), The downside : problem & pathological gambling (pp. 325-338). University of Nevada, Reno, NV: Institute for the study of gambling and commercial gaming institute. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 51 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 52 En ce sens, une baisse d’un taux de prévalence, établi sur une courte période, peut tout aussi bien refléter une intensification de la pratique de jeu chez des personnes malades du jeu. Un taux de prévalence à vie permet mieux de rejoindre des personnes qui ont déjà vécu ce phénomène et qui en sont en rémission. Une condition sine qua none des taux de prévalence est donc d’éviter que de longs intervalles de temps ne soient pas investigués. Entre les études québécoises de prévalence du jeu pathologique de 1989 75 et 1996 76, la taux de prévalence à vie est passée de 1,2% à 2,1%; ce qui représente une augmentation de 75% 77. En raison de difficultés techniques78 survenues lors de l’étude de prévalence de 2002, aucune mesure de la prévalence vie ne peut être inférée. Une sérieuse incertitude quant à la qualité du dépistage empêche aussi d’apprécier raisonnablement les taux de prévalence actuelle. Outre le problème de la validité des diagnostics, il doit être mentionné que, suite à une campagne médiatique du MSSS pour sensibiliser la population aux problèmes de jeu (voir la section 6.4.9.1 à la page 283), l’année 2002 a été marquée par une inflexion de la courbe de croissance des revenus de Loto-Québec (voir Figure 3 à la page 16 et, pour les ALV, Figure 12 à la page24). Cette année-là, plusieurs joueurs excessifs pourraient s’être retirés temporairement du jeu. En conformité avec la méthodologie de l’étude, ces personnes ont paradoxalement été classifiées parmi les non joueurs. 75 L’année de l’étude précédente. Voir : Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gambling in Quebec. Canadian Journal of Psychiatry, 36(10), 732-734. 76 Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. 77 Cette augmentation n’est pas statistiquement significative, quoiqu’elle est à l’orée de l’être. L’échantillon de 1996 était toutefois composé d’une trop grande proportion d’universitaires et de diplômés du collégial, soient des personnes moins souvent aux prises avec une dépendance pathologique à l’égard du jeu. En corrigeant ce problème par une actualisation du calcul de la pondération des participants, le taux actualisé de la prévalence vie s’avère plutôt être 2,8%, soit une augmentation statistiquement significative de 131%. Voir : Voir à la page 247 dans l’annexe G du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 78 Ces difficultés ont été posées par la perte des informations concernant la prévalence à vie, ainsi que des pourcentages inacceptables de faux positifs (82%) et de faux négatifs (4 sur 7 joueurs pathologiques réévalués lors d’une entrevue clinique). Sans équivoque, la firme de sondage, mandatée lors de cette étude, n’a pas réussi à poser des diagnostics valides. Le dépistage téléphonique des problèmes de jeu exige une excellente formation d’intervenant comme celle, par exemple, de la ligne « Jeu : aide et référence ». En conséquence, dans l’étude de prévalence de 2002, tous les estimés faisant référence à une évaluation psychodiagnostique sont invalides. Voir : (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. (b) Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 52 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 53 Compte tenu de ces difficultés, impossibles à corriger, rien n’appuie l’opinion que la prévalence du jeu pathologique est actuellement stable au Québec. Le même problème s’est récemment posé en Ontario79 alors que le taux de prévalence actuel entre 2001 et 2005 est apparu comme étant stable. Les auteurs admettent cependant qu’il n’y a pas moyen de savoir si les personnes qui subissent des dommages sont les mêmes en 2005 qu’en 2001 : “Whereas prevalence rates were consistent at the aggregate level and remained unchanged over time, results showed that individual level problem gambling rates were transitory and episodic. It should be noted that the stable problem gambling rates from 2001 to 2005 do not distinguish between continuity in the same individuals, or a new grouping of individuals with gambling problems. Applying the findings from the longitudinal study conducted by Slutske et al. (2003) would suggest that the lifetime prevalence of problem gambling in Ontario has increased.” (Wiebe, Mun et Kauffman, 2006, page 52) 2.7 Les problèmes de jeu L’analyse des problèmes de jeu sur les ALV conduit à un constat particulièrement utile pour la planification des interventions sociosanitaires. En effet, plus on est joueur pathologique, plus il est probable que l’on soit souvent présent à jouer sur un ALV. Les trois-quarts des joueurs pathologiques de la population vont miser sur un ALV au moins une fois dans l’année. Durant leur session de jeu, ceux-ci y dépensent beaucoup et demeurent longtemps sur le site. En comparaison, il est peu probable de trouver un joueur sain dans l’environnement d’un ALV. Lorsqu’il le fait, il y dépense peu et ne s’y attarde pas longtemps. En conséquence, l’ALV, et le site de jeu, constituent un environnement privilégié pour faire une mise en garde, de la prévention ou du dépistage intensifs car on y retrouve une clientèle particulièrement ciblée, parmi les gens qui ont besoin d’aide, sans importuner outrancièrement les joueurs sains car, selon toute probabilité, ceux-ci sont généralement ailleurs. 2.7.1 Les problèmes de jeu en fonction du taux de pénétration des ALV Une étude de la Nouvelle-Écosse (voir la Figure 42 et le Tableau 12) permet d’examiner la distribution de la population dans les catégories de l’ICJE par rapport aux distributions des joueurs annuels ou des joueurs mensuels. Il apparaît que les joueurs mensuels sur ALV (20,0%) sont davantage présents parmi les catégories de risque modéré ou de problème de jeu que les joueurs annuels (8,6%), et que ces derniers y sont davantage présents que la population en général (2,1%). 79 Wiebe, J., Mun, P., & Kauffman, N. (2006, May). Gambling and problem gambling in Ontario 2005. Final report submitted to the Ontario problem gambling research centre. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 53 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 54 Figure 42 Nouvelle-Écosse, 2003 -Répartition des joueurs dans les catégories de l'ICJE Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Risque modéré ou plus 0% 10 % Joueurs mensuels 20 30 40 50 % % % % Joueurs annuels 60 70 80 % % % Population 90 % Tableau 12 Répartition des joueurs dans les catégories de l'ICJE en fonction du taux de pénétration des ALV Catégories de l'ICJE Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Risque modéré ou + Saskatchewan, 2001 Population 71,4% 9,3% 4,7% 1,2% 5,9% Joueurs annuels 59,9% 20,2% 14,4% 5,5% 19,9% Joueurs hebdomadaires 26,7% 22,2% 26,7% 24,4% 51,1% Alberta, 2001 Population 67,0% 9,8% 3,9% 1,3% 5,2% Joueurs annuels 58,3% 22,7% 13,2% 5,8% 19,0% Joueurs hebdomadaires 20,0% 16,7% 36,7% 26,7% 63,3% Nouvelle-Écosse, 2003 Population 82,6% 4,8% 1,3% 0,8% 2,1% Joueurs annuels 78,0% 13,3% 8,6% Joueurs mensuels 57,0% 23,0% 20,0% Cette démarcation est encore plus accentuée lorsqu’on compare les joueurs hebdomadaires sur ALV aux joueurs annuels ou à la population en général. Des études de la Saskatchewan (voir la Figure 43 et le Tableau 12) et de l’Alberta (voir la Figure 44 et le Tableau 12) permettent de comparer ces distributions. En Saskatchewan, en 2001, 24% des adultes qui jouent à chaque semaine éprouvent des problèmes de jeu, et 51% sont au moins à risque modéré d’éprouver des problèmes de jeu. En Alberta, en 2001, la situation était encore plus accentuée avec 27% des joueurs hebdomadaires qui éprouvaient des problèmes de jeu, et 63% qui étaient au moins à risque modéré. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 54 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 55 Figure 43 Saskatchewan, 2001 -Répartition des joueurs dans les catégories de l'ICJE Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Risque modéré ou plus 0% 10 20 30 40 50 60 70 80 90 % % % % % % % % % Joueurs hebdomadaires Joueurs annuels Population Figure 44 Alberta, 2001 -Répartition des joueurs dans les catégories de l'ICJE Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Risque modéré ou plus 0% 10 20 30 40 50 60 70 80 90 % % % % % % % % % Joueurs hebdomadaires Joueurs annuels Population Sans équivoque, plus on joue souvent sur les ALV, plus il est probable que l’on soit un joueur pathologique. Ces données ne permettent cependant pas de distinguer les joueurs déjà pathologiques, qui ont changé leurs comportements de jeu pour adopter les ALV, des joueurs antérieurement sains qui sont devenus joueurs pathologiques lors de leur expérience de jeu sur les ALV. 2.7.2 L’attrait des ALV auprès des diverses catégories de joueurs Cinq études provinciales permettent de déterminer à quel point les ALV vont chercher l’intérêt des diverses catégories de joueurs identifiées par l’ICJE. En moyenne, à peine 12% des joueurs sans problème de jeu vont miser sur un ALV au moins une fois dans l’année. Cette proportion grimpe à 44% pour les joueurs à faible risque, et à 50% pour les joueurs à risque modéré. Par contre, 73% des joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu vont miser sur un ALV au moins une fois dans l’année. L’ALV, et son Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 55 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 56 environnement, constituent alors une occasion exceptionnelle pour atteindre, de manière ciblée, les personnes qui ont besoin d’aide. Ainsi, les trois-quarts des bénéficiaires potentiels peuvent être aidés directement sans nuire au plaisir des joueurs sains puisque ceux-ci sont beaucoup moins présents sur les ALV. À peine un joueur sains sur huit ira jouer sur les ALV au moins une fois par année. Figure 45 Participation annuelle Attrait des ALV auprès des diverses catégories de joueurs 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Risque modéré ou + Catégories de l'ICJE Terre-Neuve, 2005 Saskatchewan, 2001 Nouvelle-Écosse, 2003 IPE, 2005 Alberta, 2001 2.7.3 Le risque de développer une dépendance lorsque l’ALV est la première activité de jeu explorée par un nouveau joueur En général, les statistiques décrivant les problèmes de jeu sur ALV ne permettent pas de distinguer ceux associés à des joueurs déjà excessifs, en raison de leur expérience de jeu antérieure à d’autres activités de jeu, et ceux découlant de nouveaux joueurs excessifs qui ont développé leur dépendance sur les seuls ALV. Des données de l’étude de prévalence réalisée en 2005 à Terre-Neuve-et-Labrador, permettent de combler cette lacune. Tous les participants ont été interrogés quant à leur première activité en carrière de jeu, même s’ils n’avaient pas joué au cours des 12 derniers mois. Dans la Figure 46, on peut constater que les gens qui ont commencé à jouer sur les ALV, comparativement aux autres activités, sont plus à risque, et de beaucoup, d’éprouver des problèmes de jeu. En fait, seulement 58% des joueurs qui ont commencé leur carrière sur les ALV sont sans risque de problème de jeu, alors que cette proportion atteint 86% pour les loteries traditionnelles. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 56 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 57 Figure 46 Terre-neuve, 2005: Répartition des joueurs en fonction de l'activité initiale de jeu Loterie traditionnelles Bingo 90,0% Cartes - Poker 80,0% 70,0% Loterie instantanée 60,0% ALV 50,0% 40,0% 30,0% Loterie traditionnelles 20,0% Bingo 10,0% Cartes - Poker 0,0% e Av ec prob lèm é Risque m odér Faibl e ris que e Sans problèm ICJE Non joueur Loterie instantanée ALV Il est clair que la probabilité de développer des problèmes de jeu est beaucoup plus élevée lorsque les joueurs débutent leur carrière directement sur les ALV. Ces données supportent peu l’interprétation suggérant que la plupart des dommages sur les ALV ne sont qu’un déplacement des dommages que des personnes subiraient déjà dans d’autres activités. 2.7.4 Le risque de mortalité Le risque de mortalité chez les joueurs d’ALV est essentiellement celui du suicide. Les données actuelles, fournies par les coroners du Québec, permettent d’apprécier raisonnablement si un suicide est lié au jeu pathologique. Toutefois, ces données ne permettent pas encore de lier sans équivoque les ALV à ces suicides. Quoi qu’il en soit, il est plausible que les ALV soient un facteur critique dans la grande majorité des cas parce que la grande majorité des demandeurs d’aide clinique témoignent d’une perte de contrôle de leurs comportements de jeu sur ALV. En fait, les ALV sont au cœur des problèmes de jeu de presque tous les joueurs pathologiques qui ont réclamé une aide clinique. Si on reprend une partie du Tableau 9, et qu’on y ajoute les données sur les suicides qui ont été reliés au jeu par les coroners du Québec, il y a lieu d’estimer qu’un joueur annuel sur ALV, parmi 16 569, se suicidera durant l’année. Il est cependant plus probable que les joueurs qui se suicident se trouvent davantage parmi la clientèle des joueurs réguliers qui dépensent sur les ALV au moins une fois par mois. Dans un tel cas, puisque le taux d’adoption d’une fréquence mensuelle de jeu est de 42%, le risque serait d’environ un suicide durant l’année pour environ 7 000 joueurs mensuels sur ALV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 57 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 58 Tableau 13 Estimation de la prévalence du suicide lié au jeu en fonction de la pénétration annuelle des ALV Année Population adulte1 Taux de pénétration2 Nombre de joueurs3 Nombre de suicides-jeu4 1997 5 609 967 8,5% 476 847 ? 1999 5 706 445 10,7% 610 590 36 1 / 16 961 2002 5 878 550 7,8% 458 527 30 1 / 15 284 2004 6 002 655 9,6% 576 255 33 1 / 17 462 Un suicide / N. joueurs annuels sur ALV 1 Population le 1 juillet selon Statistique Canada, tableau CANSIM 051-00011,2,6. Selon les rapports annuels de Loto-Québec ainsi que l’étude de prévalence de 2002. 3 Nombre de joueurs annuels = population adulte multipliée par le taux de pénétration annuel. 4 Nombre de suicides liés au jeu selon les coroners du Québec. 2 Il est, par ailleurs, plausible que la fréquence des suicides soit supérieure car les joueurs ne se suicident pas nécessairement durant l’année où ils ont joué. À cet égard, entre 1999 et 2004, il y a eu 186 suicides liés au jeu. Déjà 23 suicides ont été identifiés pour l’année 2005. 2.8 Description du comportement des joueurs sur ALV Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a entrepris en 1997 une étude exhaustive des joueurs réguliers80 sur les ALV. Ce groupe est constitué par 5,7% des adultes de cette province. Aux fins d’analyse, ceux-ci ont été divisés en trois sous-groupes81 : (a) les joueurs peu fréquents qui utilisent les ALV moins de 4 fois par mois, (b) les joueurs fréquents, sans problème de jeu, qui utilisent les ALV quatre fois ou plus à chaque mois, et (c) les joueurs qui éprouvent des problèmes en raison de leur comportement de jeu sur les ALV. Bien que les joueurs avec problèmes ne représentent que 16% des joueurs réguliers, soit 0,96% de la population adulte, ceux-ci contribuent à 55% du revenu obtenu des joueurs réguliers, ou à 53% du revenu total des ALV82 (voir aux lignes 1 et 2 dans le Tableau 14). 80 Les joueurs réguliers sont ceux qui misent au moins une fois par mois sur les ALV. Ceux-ci représentent 5,7% de la population adulte de la Nouvelle-Écosse et environ 25% des joueurs annuels sur ALV. En contrepartie, ils contribuent pour 96% du revenu annuel tiré des ALV. Voir à la page IV dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 81 Voir à la page 3-3 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 82 Voir à la page 3-43 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 58 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 59 Les jeux sur ALV ne sont pas majoritairement appréciés par les joueurs (ligne 7), malgré que les joueurs avec problèmes soient incapables de s’en détacher (lignes 53 à 62). Ces jeux ne sont pas perçus par l’ensemble de joueurs comme une bonne activité de socialisation (voir à la ligne 8). Typiquement, le joueur avec problème de jeu initie sa session de jeu en insérant $12,34 dans l’appareil (ligne 11). Il prévoit y dépenser $73,93 (ligne 9), mais se retrouve finalement à dépenser $82,29 (ligne 12). Au bout du mois, il a perdu $808,88 dans les ALV (ligne 13). Pour la moitié des joueurs avec problèmes (ligne 33), cela inclut des montants d’argent prévus à d’autres budgets. La plupart (90%) continuent de jouer tant qu’il reste de l’argent dans le solde (ligne 27), et même le quart empruntent de l’argent afin de continuer à jouer (ligne 32). La moitié (56%) obtiennent aussi des montants additionnels en utilisant leur carte bancaire (ligne 34). Il est alors peu important que le guichet soit ou non près de l’aire de jeu. Pourtant, la moitié d’entre eux se fixent une limite au début de la session de jeu (ligne 23). Il y est difficile de gagner car 88% indiquent ne pas être capables de cesser de jouer tant que le solde est supérieur au montant d’argent inséré dans l’ALV (ligne 26). Le montant du solde incitant à l’encaissement est d’environ $ 80 (ligne 16), mais 54% d’entre eux continuent de jouer après un encaissement (ligne 17). Les trois-quarts réinvestissent immédiatement au jeu un gain de $ 20 (ligne 28), et la moitié réinvestissent des gains allant jusqu’à $ 100 (lignes 29 et 30). La différence entre les joueurs fréquents et les joueurs avec problèmes de jeu semble surtout consister en une opinion un peu plus favorable des jeux par ces premiers (ligne 7), et une plus grande dépense au jeu par ces derniers (lignes 9 à 13). Compte tenu que la moitié des joueurs avec problèmes dépensent de l’argent prévu à d’autres fins (ligne 33), et que 85% éprouvent de la culpabilité à l’égard de leur dépense au jeu (ligne 31), ceci appuie l’interprétation selon laquelle la différence entre les joueurs fréquents sans problème et les joueurs fréquents avec problèmes réside surtout dans le fait que ces derniers dépensent des montants qu’ils n’ont pas les moyens de perdre contrairement aux premiers. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 59 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 60 Tableau 14 Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de la Nouvelle-Écosse en 1997-1998 Catégories de joueurs réguliers Variable (page des résultats) Peu fréquents Fréquents Avec problèmes 1 - Répartition des joueurs réguliers (3-43, D-6) 46% 38% 16% 2 - Contribution au revenu tiré des joueurs réguliers sur ALV (3-43) 10% 35% 55% Types de jeu utilisés sur les ALV 3 - Jeu de lignes le plus populaire (D-36) 89% 84% 75% 4 - Jeu de poker le plus populaire (D-37) 13% 18% 24% 5 - Jeu de blackjack (D-37) 1% < 1% --- < 1% < 1% 2% 6 - Jeu de keno (D-37) Appréciation du jeu sur ALV 7 - Les jeux sur ALV sont amusants et divertissants (D-23) 39% 52% 43% 8 - Le jeu sur ALV est bonne activité pour passer du temps avec des amis (D-23) 24% 30% 24% Dépense au jeu sur les ALV 9 - Montant d’argent prévu, par session de jeu, pour jouer sur les ALV (D-38) $ 16,48 $ 23,34 $ 73,93 10 - Proportion des joueurs qui dépensent tout l’argent prévu à chaque session de jeu (D-38) 33% 33% 48% 11 - Montant d’argent initialement inséré dans l’ALV avant de commencer à jouer (D-38) $ 5,49 $ 5,88 $ 12,34 12 - Montant total d’argent finalement sorti des poches à chaque session de jeu (D-33) $16,33 $29,44 $82,29 13 - Estimation de la dépense mensuelle au jeu sur ALV (D-33) $ 53,49 $ 228,50 $ 808,88 14 - Plus gros montant gagné sur les ALV $ 211,95 $ 358,41 $ 650,63 15 - Plus gros montant perdu sur les ALV $ 39,11 $ 79,20 $ 410,59 16 - Montant d’argent qui incite à l’encaissement du solde (D-51) $ 24,13 $ 37,56 $ 80,50 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 60 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 61 Tableau 14 Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de la Nouvelle-Écosse en 1997-1998 Catégories de joueurs réguliers Variable (page des résultats) Peu fréquents Fréquents Avec problèmes 17 - Proportion des joueurs qui continuent de jouer sur les ALV au moins la moitié des fois après un encaissement 12% 28% 54% 18 - Nombre de crédits par mise (D-38) 11,0 12,0 18,5 19 - Montant total de la mise par set (D-38) $ 0,66 $ 0,71 $ 1,12 20 - Budget mensuel moyen consacré au divertissement (D-21) $ 102 $ 141 $ 105 21 - Je joue parfois sur les ALV dans l’espoir de payer des factures (D-23) 3% 4% 45% 22 - Je joue parce que j’ai des chances de gagner de l’argent (D-25) 29% 26% 21% Contrôle sur la dépense au jeu sur les ALV 23 - Proportion des joueurs qui fixent une limite à leur dépense au jeu (D-67) 68% 67% 54% 24 - Proportion des joueurs qui cessent de jouer au moins 50% des fois lorsque la dépense au jeu prévue est atteinte (D-47) 73% 74% 63% 25 - Proportion des joueurs qui limitent leur dépense au jeu en n’apportant que le montant d’argent qu’ils acceptent de perdre (D-68) 8% 13% 29% 26 - Proportion des joueurs à qui il arrive de ne pas pouvoir quitter la session de jeu lorsque leur solde est supérieur au montant inséré dans l’ALV (D-45) 33% 47% 88% 27 - Proportion des joueurs à qui il arrive de ne pas pouvoir quitter la session de jeu tant qu’il reste de l’argent dans le solde (D-46) 34% 48% 90% 28 - Proportion des joueurs qui continueraient de jouer un gain de $20 (D-41) 26% 34% 74% 29 - Proportion des joueurs qui continueraient de jouer un gain de $50 (D-41) 17% 29% 58% 30 - Proportion des joueurs qui continueraient de jouer un gain de $100 (D-41) 13% 21% 48% Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 61 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 62 Tableau 14 Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de la Nouvelle-Écosse en 1997-1998 Catégories de joueurs réguliers Variable (page des résultats) 31 - Proportion des joueurs qui se sentent coupables des montants qu’ils dépensent sur les ALV (D-61) Peu fréquents Fréquents Avec problèmes 9% 13% 85% Financement du dépassement du budget de jeu 32 - Proportion des joueurs qui empruntent de l’argent pour continuer à jouer (D-39) 4% 9% 27% 33 - Proportion des joueurs qui dépensent parfois sur les ALV des montants prévus à d’autres budgets (D-61) 3% 3% 49% 34 - J’utilise parfois une carte bancaire pour obtenir plus d’argent pour jouer durant la journée (D-27) 6% 16% 56% 35 - J’utilise ma carte bancaire sur le site de jeu (D27) 3% 9% 32% 36 - Je quitte le site de jeu pour utiliser ma carte bancaire (D-27) 4% 10% 32% 37 - Utilisation des services de crédit offerts par les sites de jeu (D-28) <1% 2% 6% 38 - Encaissement d’un chèque sur le site de jeu (D-28) <1% 3% 12% Contrôle sur la durée de jeu sur les ALV 39 - Proportion des joueurs qui peuvent perdre la notion du temps en jouant sur les ALV (D-45) 17% 30% 75% 40 - Proportion des joueurs qui cessent de jouer au moins 50% des fois lorsque la durée de jeu prévue est atteinte (D-47) 28% 37% 31% Comportement de jeu sur les ALV 41 - Nombre de sessions de jeu au cours des trois derniers mois (D-33) 1,6 7,2 8,0 42 - Durée moyenne (en minutes) de la session de jeu (D-33) 43,3 66,8 150,1 43 - Proportion des joueurs qui utilisent plus d’un ALV à la fois (D-41) 4% 15% 36% Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 62 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 63 Tableau 14 Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de la Nouvelle-Écosse en 1997-1998 Catégories de joueurs réguliers Variable (page des résultats) Peu fréquents Fréquents Avec problèmes 44 - Proportion des joueurs qui ont besoin de miser sur toutes les lignes offertes (D-38) 57% 63% 84% 45 - Proportion des joueurs qui modifient la valeur de leurs mises afin d’augmenter leurs chances de gagner (D-42) 4% 6% 12% 46 - Proportion des joueurs qui utilisent le bouton d’arrêt afin d’augmenter leurs chances de gagner (D-42) 2% 5% 10% 47 - Proportion des joueurs qui bloquent le bouton jouer afin que l’appareil joue automatiquement (D41) 9% 21% 39% 48 - Proportion des joueurs qui peuvent se sentir inconfortables si d’autres personnes les regardent jouer (D-45) 20% 27% 57% 49 - Proportion des joueurs qui jouent sur les ALV après 22:00 heures (D-36) sur semaine 10% 16% 16% 50 - Proportion des joueurs qui jouent sur les ALV après 22:00 heures (D-36) les fins de semaine 21% 16% 20% 51 - Consommation d’alcool au moins la moitié des fois durant le jeu sur ALV (D-55) 41% 37% 35% 52 - Consommation habituelle de cigarettes en jouant sur les ALV (D-55) 59% 63% 70% Capacité d’auto-contrôle 53 - Dépendance psychologique envers les ALV (D-25) 2% 1% 38% 54 - Depuis combien de mois, cette dépendance existe-elle? (D-65) --- --- 29,5 55 - Proportion des joueurs qui ont fait des tentatives pour contrôler la fréquence ou leur dépense au jeu (D-65) --- --- 54% 56 - Nombre d’essais faits pour reprendre le contrôle sur leur comportement de jeu sur ALV. 57 - La plupart du temps que je suis en un lieu où il y a des appareils, j’ai envie de jouer (D-24) 6,0 11% 26% 65% Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 63 Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 64 Tableau 14 Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de la Nouvelle-Écosse en 1997-1998 Catégories de joueurs réguliers Variable (page des résultats) Peu fréquents Fréquents Avec problèmes 58 - Je peux cesser de jouer sur les ALV aussitôt que j’en ai envie (D-24) 91% 79% 34% 59 - J’ai parfois de la difficulté à cesser de jouer alors que je sais que je devrais arrêter (D-23) 4% 9% 75% 60 - Je préférerais qu’il n’y ait que 3 ou 4 sites de jeu dans toute la Nouvelle-Écosse (D-23) 39% 32% 78% 61 - Proportion des joueurs qui indiquent qu’aucune stratégie de contrôle ne parvient à réduire leur dépense au jeu (D-69) 4% 11% 40% 62 - Proportion des joueurs qui croient à l’utilité éventuelle de brochures ou de dépliants quant aux moyens de contrôler la dépense au jeu sur les ALV (D-81) 11% 9% 40% Autres activités de jeu [ fréquentation ; dépense mensuelle ] (page D-32) 63 - Tables de jeu au casino 23% ; $4,11 33% ; $8,83 18% ; $4,74 64 - Machines à sous au casino 55% ; $5,87 57% ; $9,55 60% ; $29,70 65 - Courses de chevaux 5% ; $0,55 9% ; $6,16 11% ; $0,21 Les données en caractères gras et italiques indiquent que la différence est statistiquement significative. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 64 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 65 Chapitre 3 La dangerosité des appareils électroniques de jeu Dans cette annexe, nous faisons un inventaire des constats de la dangerosité des appareils électroniques de jeu (AÉJ), et nous explicitons un modèle explicatif des causes de la dépendance pathologique à leur égard. Ce modèle est présenté afin de préciser ultérieurement comment des mesures d’atténuation du danger, ou de protection, peuvent être développées, de manière mieux ciblée, en intervenant directement dans le processus pathogène. 3.1 Bref historique des appareils de jeu au Québec Il existe, ou a existé, quatre types d’appareils de jeu au Québec : • les gobe-sous (GS) entre 1930 et 1955, • les appareils de poker vidéo (APV) du marché gris entre 1976 et 1991, • les machines à sous (MAS) au casino depuis octobre 1993, et • les appareils de loterie vidéo (ALV) dans les bars depuis juin 1994. Le premier type correspond à des appareils mécaniques; les trois autres à des appareils électroniques, c’est-à-dire des AÉJ. Parallèlement, il subsisterait un marché clandestin d’environ 5 000 appareils quoique cette information n’a jamais été confirmée publiquement par une étude scientifique. Du moins, sa validité n’a jamais été examinée par des scientifiques spécialistes du jeu pathologique. 3.2 Les constats de la dangerosité des AÉJ 3.2.1 La dangerosité des gobe-sous On sait très peu de chose au sujet des gobe-sous. Bizier et al83 rapportent qu’il y en aurait84 eu 200 000 au Québec depuis les années 1930 jusqu’en 1955 alors que le gouvernement canadien les a formellement interdits. Associés au folklore criminel de Montréal, ces appareils étaient réputés alimenter grassement la pègre. Rien cependant 83 Voir à la page 115 dans : Bizier, H. A., Darveau-Cardinal, J., Fleury, J.-L., Lamarre, L., & Mozarain, J. (1996). Loto-Québec, un succès collectif. Montréal, QC : Forces. 84 De nos jours, il y a des ALV partout, et pourtant ils ne sont qu’environ 14 000. S’il y avait eu 200 000 GS, cela représenterait une densité d’appareils 14 fois supérieure. Cela est peu vraisemblable. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 65 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 66 dans les documents historiques, ne permet de confirmer un lien précis entre les GS et des organisations criminelles. 3.2.1.1 La distribution des GS Selon le témoignage de Pacifique Plante85, les premiers appareils de jeu sont apparus au Québec peu après la dépression économique des années 30. À Montréal, des gobesous (GS) avaient été installés par de nombreux petits commerçants, notamment les restaurateurs, à la vue évidente des clients. À cette époque, parce que les GS étaient illégaux mais tolérés, les petits commerçants étaient surtout victimes de policiers corrompus qui faisaient payer un service de protection86. 3.2.1.2 La rentabilité des GS D’après les interventions policières réalisées par Pacifique Plante, les GS généraient typiquement, durant les années 40, un profit minimum de 100 dollars par mois87, soit au moins 1 200 dollars par année. 3.2.1.3 Les problèmes de jeu durant les années 40 Pour la population, ce ne sont pas les GS qui ont causé le plus de ravages. C’est plutôt le jeu de barbotte88 qui a créé d’importants problèmes de santé publique. Certains joueurs en devenaient rapidement dépendants comme certains joueurs deviennent aujourd’hui dépendants des ALV. De plus, étant de collusion avec des joueurs rabatteurs, les tenanciers des tripots utilisaient parfois des dés truqués pour arnaquer des clients naïfs. Par ailleurs, un service téléphonique89 clandestin de paris sur les courses permettait aux joueurs de miser à crédit en accumulant des comptes mensuels qu’ils ne pouvaient pas payer. Les tentatives violentes de recouvrer ces comptes ont créé suffisamment de désordre pour susciter une croisade anti pègre. 85 Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale. 86 Comme ce sera le cas avec les APV, c’est la relation tenancier-fournisseur, plutôt que la relation tenancier-client, qui a posé davantage de problèmes. 87 Voir à la page 40 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale. 88 Il s’agit d’un jeu de dés à fréquence rapide de tirage dont le taux de remise est élevé à 95% ou 97%. Le jeu de barbotte se pratiquait dans des salons de paris clandestins. Voir aux pages 33 et 34 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale. 89 Voir aux pages 10 et 11 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 66 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 67 De nos jours, il subsiste de cette époque la certitude que l’intégrité des jeux est rapidement menacée en l’absence de réglementation et d’organismes de surveillance. Il y a aussi la certitude que le fait de faire crédit aux joueurs conduit nécessairement à un désastre social. En revanche, la leçon du jeu de barbotte semble avoir été oubliée90. C’est ce jeu de dés à taux de remise élevé, et non les GS, qui a créé le plus de méfaits et qui a, avec les paris sur les courses, vraisemblablement financé des organisations criminelles. Les GS finançaient surtout des petits commerçants, en marge de la loi, mais pas particulièrement asociaux. La seule criminalité documentée, associée aux GS, était l’œuvre d’une police du jeu. 3.2.2 La dangerosité des appareils de poker vidéo L’expansion des APV a suivi la même voie que celle des GS. Introduits comme des dispositifs d’amusement, les APV ont fait leur apparition au Québec en juin 197691, tôt après leur conception92 aux États-Unis en 1975. En principe, les APV ne pouvaient que faire gagner des parties gratuites. Aucun lot en argent ou en biens ne pouvait être remis aux joueurs. Ces appareils, qui n’offraient que des jeux de cartes, étaient exploités sans réglementation par des petits commerçants indépendants qui, le plus souvent, les louaient93 de distributeurs qui encaissaient la moitié des profits94. Afin d’éviter la situation anarchique des années 1950, entre 1979 et 1991, les commerçants ont dû acheter de la Régie des loteries du Québec95 un permis d’exploitation pour les APV. Pour cette raison, ces APV sont désignés sous le nom de marché gris, tandis que le marché clandestin, ou marché noir, englobe les appareils sans permis. 90 Les taux de remise au-delà de 90% et une fréquence rapide des tirages sont deux puissants facteurs dans le processus pathogène. 91 Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Page CI-1825, Gouvernement du Québec. 92 Sion, M. (2002, june 13th). Video poker has special allure. Reno Gazette Journal. 93 La concurrence obligeait les commerçants à renouveler continuellement les appareils afin de les adapter à l’évolution de ce que la clientèle désirait. Devenant rapidement obsolètes, il aurait été trop onéreux de les acheter. De plus, lorsqu’un modèle était saisi, un modèle un peu différent pouvait être rapidement installé. 94 (a) Voir à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b) Voir à la page CI-1986 dans la déclaration de monsieur Alain Bouchard, membre du conseil d’administration de l’Association des détaillants en alimentation du Québec, à la Commission permanente des institutions (15 juin 1993), Journal des débats, 48, Gouvernement du Québec. 95 Voir à la page 13 dans : Régie des alcools, des courses et des jeux. (1994). Rapport annuel 1993-1994. Québec, QC : Les publications du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 67 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 68 3.2.2.1 La distribution des APV Les APV du marché gris étaient distribués au grand jour dans les arcades, les dépanneurs, les foires et autres commerces publics. Incidemment, la distribution des APV du marché gris les rendaient omniprésents dans les lieux où se trouvaient des personnes de moins de 18 ans, et ceux-ci pouvaient y jouer. 3.2.2.2 Le nombre d’APV Comme en témoignent les statistiques de la Régie des loteries du Québec, le nombre des APV avec permis a graduellement augmenté jusqu’à atteindre 18 581 en 1990-1991 (voir Figure 47) avant de connaître une éradication rapide. Selon le président de la Régie des loteries du Québec96, en 1991, les enquêteurs de la régie ont évalué que 75% des APV étaient dotés d’une vignette. Ainsi, il y aurait eu environ 6 194 APV sans permis97, pour un total approximatif de 24 775 APV. Figure 47 Milliers Nombre d'AÉJ Nombre d'appareils de poker vidéo détenant une licence de la Régie des loteries du Québec 20 15 10 5 1991-1992 1990-1991 1989-1990 1988-1989 1987-1988 1986-1987 1985-1986 1984-1985 1983-1984 1982-1983 1981-1982 1980-1981 1979-1980 0 Poker vidéo Le nombre d’APV, utilisés pour parier, est difficile à préciser car ces appareils étaient programmés pour ne donner que des parties gratuites. Il n’y avait aucun dispositif pour payer des lots automatiquement. Les commerçants versaient les lots lorsqu’un utilisateur le réclamait. On ne peut pas assumer que tous les commerçants ont offert de payer en argent les parties gratuites obtenues par les joueurs. 96 Voir à la page CBA-201 dans les déclarations de monsieur Marcel Savard, président de la Régie des loteries du Québec, à la Commission permanente du budget et de l’administration (15 avril 1992), Journal des débats, 6, Gouvernement du Québec. 97 Advenant qu’il y ait eu davantage d’appareils clandestins, la population n’y a pas eu plus accès que les inspecteurs de la Régie des loteries du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 68 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 69 En 1993, lors de l’étude de la loi 8498, des représentants de la Sûreté du Québec ont avancé une estimation de plus de 45 000 appareils illégaux99, voire 50 000100. Une estimation de 40 000 appareils illégaux en 1989 a aussi été proposée par des chercheurs101. S’il en était ainsi, le marché clandestin aurait été plus de deux fois102 plus étendu que le marché gris qui œuvrait pourtant publiquement. 3.2.2.3 La rentabilité des APV Lors d’une audition concernant la loi 84103, un distributeur d’APV104 a communiqué les résultats d’une étude de la firme Samson, Bélair, Deloitte & Touche selon laquelle le montant moyen misé à chaque semaine sur les APV était de 630 dollars par unité105, et 98 Il s’agit de la loi qui a autorisé la création du parc d’ALV de Loto-Québec. 99 Voir à la page 118 dans : Bizier, H. A., Darveau-Cardinal, J., Fleury, J.-L., Lamarre, L., & Mozarain, J. (1996). Loto-Québec, un succès collectif. Montréal, QC : Forces. Assez étonnamment, ce nombre diminue à 25 000 à la page 8 du document : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs. 100 Citation faisant référence à des propos de monsieur Gilles Lacaille, vice-président de la Corporation du loisir automatique du Québec, lors de la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. 101 Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling : A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. Ultérieurement, cette estimation a été gonflée à 50 000. Voir à la page 34 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs. 102 En 1988-1989, la RACJ a autorisé 13 714 APV. En soustrayant ces appareils du nombre 40 000, il aurait resté 26 286 appareils clandestins. Cela aurait été le double (192%) du marché gris. 103 La loi 84, adoptée en juin 1993, a légalisé les casinos et les ALV au Québec. 104 Voir aux pages CI-1864 et CI-1870 dans la déclaration de monsieur Henley Song, président de l’Association de l’amusement du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. 105 (a) Selon le directeur général de la Sûreté du Québec : « C’est un chiffre lancé en l’air, comme ça; on n’a pas fait d’étude précise là-dessus, mais on dit que ça rapporte à peu près 600 $ par machine, par semaine. » Voir à la page CI-1834 dans la déclaration de monsieur Robert Lavigne à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b) Les 2300 APV saisis par le SPCUM entre 1984 et 1993 contenaient au total 200 000 dollars, soit environ 86 dollars par unité. Il s’agissait sans doute d’une partie de la recette quotidienne. Voir à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (c) Une estimation de 2 000 $ par semaine par unité a été proposée pour des APV au centre-ville de Montréal. Voir à la page CI-1879 dans la déclaration de monsieur Jean Legros, commandant de la section Moralité et jeu du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 69 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 70 le bénéfice net annuel par unité était de 14 064 dollars (voir Tableau 15). Dans ce tableau, les frais incluent les montants remis aux joueurs sous forme de lots ainsi que les frais d’opération. Ce tableau transpose aussi ces données en fonction des scénarii suggérant qu’il y aurait eu 25 000 ou 45 000 APV. Tableau 15 Données de l’étude des APV par la firme comptable Samson, Bélair, Deloitte et Touche* Par unité Projection annuelle Annuel Hebdomadaire 25 000 APV 45 000 APV Montants misés 32 760 $ 630 $ (100%) 819 000 000 $ 1 474 200 000 $ Frais 18 696 $ 360 $ (57%) 467 400 000 $ 842 400 000 $ Bénéfice net 14 064 $ 270 $ (43%) 351 600 000 $ 632 880 000 $ * Voir aux pages CI-1864 et CI-1870 dans la déclaration de monsieur Henley Song, président de l’Association de l’amusement du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (en bleu : les données communiquées) Lors du débat concernant l’adoption du principe de la loi 84, le Ministre de la sécurité publique106 a indiqué que les 25 000 APV auraient rapporté un bénéfice net hebdomadaire entre 300 et 500 dollars par unité; ce qui équivaut à un total de 520 millions de dollars annuellement. D’après Loto-Québec, un minimum de 25 000 appareils illégaux auraient généré annuellement des revenus de 600 millions de dollars107. Pour 25 000 APV, cela représente un revenu annuel de $ 24 000 par unité. Compte tenu que les distributeurs encaissaient la moitié du bénéfice net108, les détaillants auraient retiré environ sept mille dollars par unité. Après que le gouvernement du Québec ait étatisé les APV pour les remplacer par des ALV, Loto-Québec a versé aux détaillants une commission annuelle moyenne qui est passée de $ 2 308 en 19941995 à $ 20 714 en 2000-2001 (voir Figure 48). Depuis le 1 mai 2001, la commission 106 Déclaration de monsieur Claude Ryan, Ministre de la sécurité publique, lors des débats de l’Assemblée nationale (11 mai 1993), Journal des débats, 32(94), Gouvernement du Québec. 107 Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs. 108 (a) Voir à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b) Voir à la page CI-1986 dans la déclaration de monsieur Alain Bouchard, membre du conseil d’administration de l’Association des détaillants en alimentation du Québec, à la Commission permanente des institutions (15 juin 1993), Journal des débats, 48, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 70 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 71 aux détaillants a été conservée stable, à environ vingt mille dollars, en raison de deux diminutions109 de la commission versée aux détaillants. Figure 48 Commission annuelle moyenne Commission versée au détaillant pour chaque ALV du parc de Loto-Québec $25 000 $20 000 $15 000 $10 000 $5 000 $0 1994- 1995- 1996- 1997- 1998- 1999- 2000- 2001- 2002- 2003- 2004- 20051995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 3.2.2.4 L’intégrité des APV En principe, les joueurs ne payaient que pour le plaisir de jouer, et de gagner des crédits ou des parties gratuites110. À leur initiative, certains commerçants attribuaient toutefois des lots en argent, ou en biens, lorsque les joueurs obtenaient des combinaisons gagnantes. Le paiement des lots était au gré des commerçants qui pouvaient choisir, pour un même lot, de payer davantage certains clients que d’autres111. Lorsqu’ils en avaient le pouvoir, les commerçants pouvaient choisir de ne pas payer du tout sans que les joueurs n’aient de recours. En manipulant des interrupteurs internes, il était possible de régler le taux de remise. Selon des statistiques produites par le gouvernement de l’Alberta112, les propriétaires pouvaient, à leur gré, varier le taux de remise entre 54% et 78%. Pour les APV du Québec, les données du Tableau 15 indiquent que les frais, incluant les montants remis aux joueurs sous forme de lots, totalisaient 57% des montants misés. Si tous les APV 109 Le 1 mai 2001, la commission aux détaillants est passée de 30% à 26% du revenu net (voir à la page 45 du rapport annuel de 2001-2002 de Loto-Québec). Le 16 novembre 2003, la commission est passée de 26% à 22% (voir à la page 16 du rapport annuel de 2003-2004). 110 Voir à la page 115 dans : Bizier, H. A., Darveau-Cardinal, J., Fleury, J.-L., Lamarre, L., & Mozarain, J. (1996). Loto-Québec, un succès collectif. Montréal, QC : Forces. 111 Voir le témoignage de monsieur Simon Brodeur (10:50). Dans : Assemblé Nationale du Québec. (1995-03-15). Examen des orientations, des activités et de la gestion de la Société des loteries du Québec. Journal des débats, 15 mars 1995, Commission permanente du budget et de l’administration. 112 Voir à la page 14-28 dans : Alberta Gaming and Liquor Commission. (2001). Achieving a balance: gaming licensing policy review, volume one. St-Albert, Alberta : Alberta Gaming and Liquor Commission. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 71 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 72 étaient utilisés illégalement, le taux de remise aurait nécessairement été inférieur113 à 57%. Toutefois, certains APV ont plausiblement été utilisés légalement. Ceux-ci ne gratifiant les joueurs qu’avec des parties gratuites, aucune somme n’était retournée à ces joueurs. En ce sens, il est plausible que le taux de remise ait été supérieur à 57%. Cependant, avec de telles données financières, il est certain que le taux de remise des APV était de beaucoup inférieur à ceux des ALV actuels qui se situe à 92%. Par ailleurs, aucune vérification n’était faite quant à la composition des jeux de cartes ou à la probabilité d’occurrence de chacune des cartes. Des combinaisons gagnantes pouvaient survenir beaucoup moins souvent que les joueurs ne l’anticipaient. 3.2.2.5 Les APV comme source de financement du crime organisé Il persiste une croyance répandue selon laquelle le principal motif de l’étatisation des AÉJ a été le besoin de briser la mainmise du crime organisé sur les APV, et conséquemment de le priver des revenus qu’ils généraient. La réapparition massive des appareils de jeu a certainement rappelé l’époque de Pacifique Plante. Quoi qu’Il en soit, nulle part dans sa documentation officielle, Loto-Québec n’a exprimé agir autrement que pour endiguer une simple fuite économique114. L’exploitation des APV a été déclarée illégale parce que les exploitants remettaient aux joueurs des lots en argent ou des biens en échange des parties gratuites. Cela signifie que des revenus échappaient au fisc. Toutefois, les profiteurs n’étaient pas nécessairement des personnes socialement nuisibles autrement que par un manque de solidarité économique115. Il existe des témoignages policiers116 qui suggèrent que les distributeurs se sont querellés violemment pour le contrôle des établissements, surtout lorsque le gouvernement a annoncé son intention d’installer les ALV dans des bars. Toutefois, règle générale, en contact uniquement avec les tenanciers117, les joueurs 113 Puisqu’il faut prélever les frais d’opération. 114 Une exception a été constatée dans un article du Devoir en date du 4 novembre 2006. 115 Voir à la page CI-1833 dans les déclarations de messieurs Robert Lavigne et Claude Quinn, de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. 116 (a) Des querelles violentes ont été rapportées par la Sûreté du Québec en ce qui concerne une compétition entre des fournisseurs d’APV qui fonctionnaient par location. Voir la déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b) Voir aussi à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. 117 Lorsque les AÉJ ont été étatisés, le président de Loto-Québec a indiqué ne pas vouloir écarter les propriétaires des sites où sont situés les APV, dans la mesure où ceux-ci opèrent des sites qui seront conformes à la réglementation. Ce sont les distributeurs que Loto-Québec a voulu éliminer du marché des AÉJ. Voir à la page CI-1845 dans la déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 72 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 73 n’étaient pas sous la mainmise du crime organisé. Au pire, des prêts sur carte de crédit, jusqu’à 300 dollars, ont été occasionnellement consentis à des joueurs pour les inciter à jouer118. Mais, compte tenu de l’illégalité évidente, cette pratique devait obligatoirement être cachée et nécessairement marginale119. Quel intérêt le crime organisé aurait-il trouvé, durant les années 1976 à 1991, à exercer une mainmise sur la clientèle des dépanneurs du Québec? Cette mainmise du crime organisé apparaît plus probable dans le cas de la portion des APV distribuée dans les bars120, comme le sont aujourd’hui tous les ALV. Dans cette perspective, les joueurs québécois sont aujourd’hui plus exposés à l’emprise du crime organisé qu’à l’époque des APV. Après l’adoption de la loi 84 en juin 1993, la saisie subséquente des APV n’a pas révélée qu’il a existé beaucoup d’autres APV que ceux détenant un permis de la Régie des loteries du Québec. En 1990-1991, il y a eu 18 581 permis accordés par la régie. Entre 1994-1995 et 1997-1998, il n’y a eu que 13 871 APV qui ont été saisis121. Pourtant, la résistance du marché gris a été, à toutes fins pratiques, complètement résorbée en 1996122. Dans ce cas, on ne trouve aucune trace des dizaines de milliers d’APV qui auraient constitué un marché clandestin. On ne constate pas dans les juridictions voisines des plaintes concernant une arrivée massive d’APV provenant du Québec. Néanmoins, les données de la Régie des loteries indiquent que 4 710 appareils avec permis sont disparus. 3.2.2.6 La prévalence du jeu pathologique sur APV À l’époque du marché gris, les problèmes de jeu concernaient davantage les courses de chevaux et les jeux de cartes. Les APV n’étaient toutefois pas inoffensifs car il existe 118 Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. 119 Voir à la page 9 dans : Sécurité publique – Québec. (2006, février). Avis du ministère de la Sécurité publique : relocalisation du casino de Montréal : implications en matière de sécurité publique. Montréal, QC : auteurs. 120 La violence exercée auprès des propriétaires de bars est une préoccupation majeure du ministère de la Sécurité publique. En l’occurrence, ce ministère a collaboré à la conception de trois éditions du magazine Infobars destinées à renseigner les propriétaires de bars quant aux moyens de lutter contre une mainmise du crime organisé sur leurs établissements. (a) Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2001, février). Numéro spécial : non à l’intimidation. Infobars, 3(8). (b) Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2002, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 3(12). (c) Sécurité publique – Québec. (2005, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 4(2). 121 Voir à la page 23 dans : Ministère des finances. (1998). Budget 1998-1999 : Favoriser l’intégrité du régime fiscal. Québec, QC : Gouvernement du Québec. 122 Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 73 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 74 quelques historiques de joueurs pathologiques qui ont subi des dommages ou développé une pathologie en jouant sur les APV123. Il n’y a pas eu d’étude de prévalence du jeu pathologique concernant l’utilisation des APV. Il y a cependant eu quatre études scientifiques124 qui ont recrutés des joueurs réguliers sur APV sans qu’un diagnostic ne fasse partie des critères de sélection. Au total, ces études ont regroupé 51 joueurs. Aucun de ces joueurs réguliers n’a été diagnostiqué joueur pathologique. Par ailleurs, la ligne Jeu : aide et référence n’a pas débuté par un grand nombre d’appels concernant les appareils de jeu hors casino. Le nombre de ces appels a surtout augmenté après que les ALV aient été bien implantés (voir Figure 49). 123 (a) Sylvain, C., & Ladouceur, R. (1992). Correction cognitive et habitudes de jeu chez les joueurs de poker vidéo. Revue canadienne des sciences du comportement, 24(4), 479-489. (b) Bujold, A., Ladouceur, R., Sylvain, C., & Boisvert, J.-M. (1994). Treatment of pathological gamblers : an experimental study. Journal of behavior therapy and experimental psychiatry, 25(4), 275-282. (c) Sylvain, C., Ladouceur, R., & Boisvert, J.-M. (1997). Cognitive and behavioural treatment of pathological gambling : A controlled study. Journal of Consulting and Clinical Psychology, 65(5), 727-732. 124 (a) Ladouceur, R., Sylvain, C., Duval, C., Gaboury, A., & Dumont, M. (1989). Correction des verbalisations irrationnelles chez des joueurs de poker-vidéo. International journal of psychology, 24, 43-56. (b) Dumont, M., & Ladouceur, R. (1990). Evaluation of motivation among video-poker players. Psychological reports, 66, 95-98. (c) Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance, N., & Tremblay, S. (1991). Ecological validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal of gambling studies, 7(2), 109-116. (d) Coulombe, A., Ladouceur, R., Desharnais, R., & Jobin, J. (1992). Erroneous perceptions and arousal among regular and occasional video poker players. Journal of gambling studies, 8(3), 235-244. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 74 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 75 Figure 49 N om bre d'appels Appels à la ligne Jeu, aide et référence concernant les appareils de jeu hors casino 7 000 6 000 5 000 4 000 3 000 2 000 1 000 0 19951996 19961997 19971998 19981999 19992000 20002001 20012002 20022003 20032004 3.2.2.7 La légalité des APV En 1985, une modification au Code criminel du Canada a accordé aux provinces le pouvoir exclusif d’exploiter les dispositifs de jeu, notamment les AÉJ125. Conséquemment, la police de Montréal a effectué une saisie des APV chez un commerçant. Deux ans plus tard, la Cour municipale de Montréal a déclaré les APV illégaux126, et ce jugement a été confirmé définitivement le 31 octobre 1991 lorsque la Cour suprême du Canada a refusé d’autoriser l’audition d’un appel127. À partir de cette date, les APV ont été systématiquement saisis, et leur éradication128 aurait été achevée avant 1996. Les APV n’ont apparemment pas causé de crise sociale en raison des gestes morbides de joueurs y ayant perdu le contrôle. Incidemment, les taux de remise inférieurs à 80%, surtout quand les exploitants les modifiaient à la baisse129, rendaient rares les événements pouvant constituer un gain significatif, d’où une faible probabilité d’illusion de contrôle et du développement conséquent d’une dépendance pathologique. Les APV du marché gris ont surtout posé des problèmes légaux, fiscaux, économiques ou de protection des consommateurs. Ceux-ci aurait pu simplement disparaître sans être remplacés. Prétextant vouloir éviter le développement d’un important marché 125 Voir à la page ix dans : Campbell, C. S. (1994). Gambling in Canada : the bottom line. Burnaby, BC: Simon Fraser University, Criminology research centre. 126 R. c. Laniel Canada Inc., Cour municipale de Montréal, no 15-13022, 17 juin 1987. 127 Demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême du Canada rejetée, no 22441, 31 octobre 1991. 128 Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs. 129 Un taux de remise de 54% équivaut à celui des loteries traditionnelles. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 75 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 76 clandestin, le gouvernement du Québec a décidé d’étatiser les APV. Mais, au lieu de simplement standardiser les APV en fonction des paramètres qui satisfaisaient déjà leur clientèle, le gouvernement a proposé d’autres types d’appareils dont les paramètres de jeu sont agencés de manière très différente, potentiellement plus pathogène. 3.2.3 La dangerosité des machines à sous au casino Les machines à sous sont exclusivement installées dans les casinos québécois depuis octobre 1993. À comparer aux ALV (voir plus loin), il existe peu de données permettant d’évaluer leur dangerosité. Néanmoins, la dangerosité des MAS peut être estimée sous quatre perspectives. La première consiste à établir le taux de prévalence du jeu excessif parmi les joueurs que l’on rencontre sur les MAS. Il est alors intéressant de comparer la prévalence du jeu excessif parmi les joueurs sur les MAS par rapport à celle de la population en général. Ce rapport est un estimateur valable de l’attrait des MAS auprès des joueurs excessifs, peu importe que ceux-ci aient été excessifs avant leur initiation aux MAS ou conséquemment à leur expérience de jeu sur les MAS. La seconde consiste à déterminer l’attrait des MAS auprès des joueurs excessifs130 par rapport aux joueurs sans problème de jeu. Si le taux de pénétration des MAS parmi les joueurs excessifs est très élevé, et qu’il est très bas pour les joueurs sans problème de jeu, ces appareils constituent alors un médium ou un environnement privilégiés pour faire des interventions préventives ou curatives ciblées. La contribution des joueurs excessifs aux revenus du jeu, toutes activités confondues, a été analysée dans plusieurs juridictions. En moyenne, alors que les joueurs excessifs représentent 4% de la population, ceux-ci contribuent pour 23% des revenus totaux du jeu131. Cette disproportion s’accentue lorsque le diagnostic se précise. En l’occurrence, 130 C’est-à-dire les joueurs à risque plus les joueurs pathologiques. 131 (a) Alberta, 1993 = 24,4% des revenus provenant de 5,4% de joueurs excessifs : Australian Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Nouvelle-Écosse, 1996 = 7,3% provenant de 3,9% : Williams, R. J., & Wood, R. T. (2004). The proportion of gaming revenue derived from problem gamblers: examining the issues in a canadian context. Analyses of social issues and public policy, 4(1), 3345. (c) Alberta, 1997 = 17% provenant de 4,8% : Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission. (1998, juin). Adult gambling and problem gambling in Alberta. Summary report. Edmonton, Alberta: auteurs. (d) Île-du-Prince-Édouard, 1999 = 6,3% provenant de 3,1% : Voir Williams & Wood (2004). (e) États-Unis, 1999 = 15% provenant de 2,5% : Gerstein, D., Murphy, S., Toce, M., Hoffmann, J., Palmer, A., Johnson, R., Larison, C., Chuchro, L., Bard, A., Engelman, L., Hill, M. A., Buie, T., Volberg, R., Harwood, H., Tucker, A., Christiansen, E., Cummings, W., & Sinclair, S. (1999). Gambling impact and behavior study: report to the national gambling impact study commission. Chicago: National opinion research center. (f) Nouvelle-Zélande, 1999 = 19% provenant de 1,3% : Abbott, M. W., & Volberg, R. A. (2000). Taking the pulse on gambling and problem gambling in New Zealand: a report on phase one of the 1999 national prevalence survey. New Zealand: Department of internal affairs, Government of New Zealand. (g) NouveauBrunswick, 2001 = 32,6% provenant de 3,2% : Voir Williams & Wood (2004). (h) Ontario, 2001 = 37,5% provenant de 3,8% : Voir Williams & Wood (2004). (i) Manitoba, 2001 = 18,9% provenant de 3,4% : Voir Williams & Wood (2004). (j) Saskatchewan, 2001 = 25,2% provenant de 5,9% : Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 76 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 77 en ne considérant que les joueurs pathologiques, une importante commission australienne est parvenue à la conclusion que ceux-ci représentent 2,1% des joueurs et contribuent pour 33% des revenus du jeu. Conséquemment, la troisième perspective consiste à calculer le pourcentage des revenus des MAS qui provient exclusivement des joueurs pathologiques lorsque ceux-ci utilisent des MAS. Enfin, une quatrième perspective consiste à évaluer la dépense mensuelle individuelle au jeu sur les MAS. En effet, si la proportion de la contribution globale des joueurs excessifs au revenu des MAS peut être élevée, cela ne signifie pas nécessairement que la contribution des joueurs représente un montant qui leur est individuellement dommageable. Dans ce cas, il faut établir que la contribution individuelle représente une dépense qui outrepasse la capacité financière des joueurs. Pour les joueurs excessifs, une dépense au jeu importante signifie nécessairement des dommages importants. 3.2.3.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur MAS Cinq provinces canadiennes132 ont diagnostiqué, en fonction de l’ICJE133, les problèmes de jeu parmi les joueurs qui ont parié sur des MAS au cours des 12 derniers mois134 (voir Figure 50). Globalement, environ un joueur sur neuf (11%) a été diagnostiqué joueur excessif. Voir Williams & Wood (2004). (k) Alberta, 2001 = 31% provenant de 5,2% : Voir Williams & Wood (2004). (l) Colombie-Britannique, 2002 = 26,2% provenant de 4,6% : Voir Williams & Wood (2004). (m) Ontario, 2003 = 35% provenant de 4,8% : Williams, R., & Wood, R. (2004, june 23). The demographic sources of Ontario gaming revenue. Final report. Ontario problem gambling research centre. (n) Terre-Neuve, 2005 = 30% provenant de 3,4% : Marketquest research group, Inc. (2005, november). Newfoundland and Labrador gambling prevalence study. St John's, NL: Government of Newfoundland and Labrador, Department of health and community services. 132 (a) Voir à la page 50 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001, december 04). Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Toronto, ON: Canadian centre on substance abuse. Responsible gambling council (Ontario). (b) Voir à la page 46 dans : Wynne, H. J. (2002, January). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Final report. Ottawa, ON: Canadian centre on substance abuse. (c) Voir à la page 35 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. (d) Voir à la page 3-18 dans : Schrans, T., & Schellinck, T. (2004, june). 2003 Nova Scotia gambling prevalence study. Final report. Halifax, NS: Nova Scotia office of health promotion. 133 L’Indice canadien du jeu excessif (ICJE) est un outil psychométrique construit pour évaluer les risques et les problèmes de jeu dans une population. (a) Ferris, J., Wynne, H., & Single, E. (1999, 22 avril). Measuring problem gambling in Canada: final report – phase I. Ottawa, ON: Canadian centre on substance abuse. (b) Ferris, J., & Wynne, H. (2001 19 février). The Canadian problem gambling index: Final report. Ottawa, ON: Canadian centre on substance abuse. (c) Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. 134 Les données de la Nouvelle-Écosse concernent en fait des joueurs mensuels. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 77 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 78 Figure 50 80% 76% 69% 65% 69% 89% Prévalence chez les joueurs sur MAS selon les études de prévalence 0% Sans problème Faible risque Risque modéré Pathologiques 7% 14% 15% 11% 7% 20% 1% 3% 3% 15% 18% 20% 20% 5% 40% 6% 11% 12% 60% Excessifs Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE) Selon les comportements de jeu au cours des 12 derniers mois Ontario, 2001 Saskatchewan, 2001 Nouvelle-Écosse, 2003 Île-du-Prince-Édouard, 2005 Alberta, 2002 Le taux de prévalence du jeu excessif spécifique aux MAS135 est alors 3,1 fois celui de la population en général. 3.2.3.2 Les MAS sont une activité de jeu attrayante pour les joueurs excessifs136 Ces cinq provinces canadiennes ont aussi évalué la popularité des MAS parmi les diverses catégories de joueurs de l’ICJE (voir Figure 51). Ainsi, ces appareils captent, en moyenne, l’attrait de 51% des joueurs pathologiques à comparer à 19% des joueurs sans problèmes de jeu. En Ontario, où les casinos sont peu en compétition avec les ALV, on retrouve 63% des joueurs pathologiques sur les MAS. En Alberta, en Saskatchewan, en Nouvelle-Écosse et à l’Île-du-Prince-Édouard, où il existe d’importants parc d’ALV, les joueurs pathologiques se retrouvent en moins grande proportion sur les MAS, soit environ 45%. Ces données sont conformes au constat que les ALV exercent un attrait plus puissant auprès des joueurs pathologiques. Selon les données de la Figure 51, lorsque les ALV et les MAS sont mis en compétition, les ALV captent plus facilement les joueurs excessifs que les MAS. 135 Par province, les rapports sont pour l’Ontario (1,9), la Saskatchewan (2,3), l’Alberta (2,9), la Nouvelle-Écosse (5,2) et l’Île-du-Prince-Édouard (3,4). 136 Lorsqu’évalués par le SOGS, les joueurs excessifs englobent les joueurs à risque et les joueurs pathologiques. Lorsqu’évalués par l’ICJE, ce sont les joueurs à risque modéré plus les joueurs avec problème (pathologiques). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 78 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 79 Figure 51 Sans problème Faible risque 63% 48% 43% 43% 25% 57% 47% 46% 50% 39% 33% 46% 25% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 32% 20% 15% 23% 7% Taux de pénétration annuel Utilisation des MAS par les diverses catégories de joueurs Risque modéré Risque Pathologiques modéré ou + Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE) Ontario, 2001 Saskatchewan, 2001 Nouvelle-Écosse, 2003 Île-du-Prince-Édouard, 2005 Alberta, 2002 3.2.3.3 La proportion des revenus tirés des MAS provenant des joueurs excessifs La proportion des revenus varie aussi en fonction de l’activité de jeu. Dans le cas des MAS, huit études nord-américaines ont constaté que les joueurs pathologiques contribuent en moyenne à 26% des revenus137. Dans la mesure où les joueurs pathologiques constituent 11% de la clientèle, ceux-ci contribuent pour deux fois leur part et même davantage. 3.2.3.4 La dépense au jeu mensuelle sur les MAS Au Canada, trois études canadiennes rapportent des dépenses mensuelles médianes. 137 (a) Alberta, 1993 = 10,1% : Australian Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Iowa, 1995 = 15,3% : Voir Australian Productivity Commission (1999). (c) Mississippi, 1996 = 18,5% : Voir Australian Productivity Commission (1999). (d) New York, 1996 = 37,2% : Volberg, R.A., Gerstein, D.R., Christiansen, E.M., & Baldridge, J. (2001). Assessing selfreported expenditures on gambling. Managerial and Decision Economics, 22, 77-96. (e) Louisiane, 1999 = 30,6% : Voir Volberg, Gerstein, Christiansen & Baldridge (2001). (f) Île-du-Prince-Édouard, 1999 =16% : Doiron, J., & Nicki, R. (1999, octobre). The prevalence of problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, IPE: Prince Edward Island Department of Health and Social Services. (g) Alberta, 2002 = 20,5% : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. (h) Ontario, 2003 = 60% : Williams, R., & Wood, R. (2004, june 23). The demographic sources of Ontario gaming revenue. Final report. Ontario problem gambling research centre. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 79 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 80 Tableau 16 Dépense mensuelle médiane au jeu sur les MAS selon la catégorie de joueurs telle qu’évaluée par l’Indice canadien de jeu excessif Juridiction Saskatchewan en 2001138 Alberta en 2001139 Île-du-Prince-Édouard, 2005140 Sans problème $ 10 $ 11 $ 35 Catégories de l’ICJE Faible risque Risque Avec modéré problème $ 20 $ 40 $ 200 $ 20 $ 50 $ 125 $ 50 $ 110 Au niveau individuel, la contribution des joueurs pathologiques au revenu des MAS pourrait être appréciable sur les finances des personnes les plus pauvres, quoique celleci n’apparaît pas critique pour la plupart des gens. 3.2.4 La dangerosité des appareils de loterie vidéo Il existe davantage de données empiriques permettant d’évaluer la dangerosité des ALV. Il est d’abord possible de l’évaluer en fonction des quatre perspectives sous lesquelles les MAS ont été analysées. Par ailleurs, compte tenu du grand nombre de joueurs sur ALV demandant une aide clinique, la dangerosité se constate dans la nature des appels faits aux lignes téléphoniques de référence vers les services cliniques, ainsi que par l’analyse des problèmes de jeu des personnes évaluées par ces services. La dangerosité des ALV s’évalue aussi par le constat d’une importante sous-estimation, par les joueurs, de la dépense qu’ils font sur les ALV. Enfin, la dangerosité des ALV se constate particulièrement en répertoriant les dommages exceptionnellement intenses qui découlent d’une perte de contrôle sur la dépense au jeu. 138 Voir à la page 53 dans : Wynne, H. J. (2002, January). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Ottawa, Ontario: Canadian centre on substance abuse. 139 Voir à la page 43 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002 February). Using the Canadian problem gambling index (C.P.G.I.). Alberta gaming research institute. 140 Voir à la page 54 dans : Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 80 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 81 3.2.4.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur ALV Sept provinces canadiennes141, ainsi qu’une étude pan-canadienne, ont diagnostiqué les problèmes de jeu parmi les joueurs qui ont parié sur des ALV au cours des 12 derniers mois142 (voir Figure 52). Globalement, environ un joueur sur cinq (19%) a été diagnostiqué comme étant un joueur excessif. Huit pour cent (8%) rencontrent les critères du jeu pathologique143. Ainsi, le taux de prévalence du jeu pathologique parmi les joueurs annuels sur ALV est en moyenne 6,2 fois le taux de la population en général, toutes activités confondues144. Ce rapport décrivant l’attrait des ALV est le double de celui des MAS, ce qui suggère une dangerosité aussi doublée. Figure 52 Sans problème Faible risque Risque modéré Pathologiques 27% 20% 20% 19% 20% 18% 15% 12% 8,6% 3% 0% 19% 6% 6% 6% 9% 9,7% 20% 8% 15% 14% 13% 17% 21% 20% 23% 23% 40% 8% 13% 60% 76% 74% 80% 56% 58% 60% 58% 57% Prévalence chez les joueurs sur ALV selon les études de prévalence Excessifs Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE) Selon les comportements de jeu au cours des 12 derniers mois Nouveau-Brunswick, 2001 Ontario, 2001 Saskatchewan, 2001 Alberta, 2002 Nouvelle-Écosse, 2003 Terre-Neuve, 2005 Île-du-Prince-Édouard, 2005 Canada, 2002 La prévalence du jeu pathologique augmente toutefois lorsqu’elle est mesurée chez des personnes qui jouent plus fréquemment qu’au moins une fois par année. Ainsi, au 141 Voir les études répertoriées à la note 148 ainsi que (e) Focal research (2001). 2001 Survey of gambling and problem gambling in New Brunswick. Moncton, NB: New Brunswick department of health and wellness. (f) Marshall, K., & Wynne, H. (2003, December). Fighting the odds. L’emploi et le revenu en perspective, 4(12), Ottawa, ON : Statistique Canada, 75-001-XIE. 142 Les données de la Nouvelle-Écosse concernent en fait des joueurs mensuels. 143 Les taux de prévalence des problèmes de jeu sur ALV sont moindres pour l’ensemble du Canada puisque l’Ontario et la Colombie-Britannique ne possèdent pas de parc d’ALV sauf les appareils installés aux hippodromes. 144 Par province, les rapports sont pour le Nouveau-Brunswick (8,4), l’Ontario (5,4), la Saskatchewan (3,4), l’Alberta (3,7), la Nouvelle-Écosse (9,5), Terre-Neuve (5,4) et l’Île-du-PrinceÉdouard (7,9). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 81 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 82 Nouveau-Brunswick145 en 1996, 7% des joueurs à vie sur ALV sont pathologiques. On en retrouve seulement 2% chez les joueurs annuels, mais 35% chez les joueurs hebdomadaires. Au Québec en 1996146, 7% des joueurs annuels sur ALV sont diagnostiqués joueurs pathologiques à comparer à 20% des joueurs mensuels. En Australie147 en 1999, 4,7% des joueurs annuels sur AÉJ sont pathologiques. Cette proportion augmente à 22,6% chez les joueurs hebdomadaires. Plus on joue fréquemment sur les ALV, plus il est probable que l’on soit un joueur pathologique. 3.2.4.2 Les ALV sont une activité de jeu particulièrement attrayante pour les joueurs excessifs Six provinces canadiennes148 ont évalué la popularité des ALV parmi les diverses catégories de joueurs de l’ICJE (voir Figure 53). Sans équivoque, les ALV intéressent peu les joueurs sans problème de jeu. En contrepartie, plus le risque de problème de jeu augmente, plus les ALV sont une activité de jeu populaire. Là où les ALV sont largement distribués dans les bars, entre 60% et 80% des joueurs pathologiques y jouent. On y retrouve aussi environ la moitié des joueurs à risque modéré. Ces données confirment des estimations plus anciennes obtenues avec le SOGS149. 145 Voir aux pages 84 et 85 dans : Baseline Market Research. (1996). Appendix E - Final report, prevalence study, problem gambling, wave 2. Dans Video lottery program review. Moncton, NB: Gouvernement du Nouveau-Brunswick. 146 Ces données non publiées du CQEPTJ ont été rapportées (voir à la page 265) dans l’annexe G (Actualisation de l’étude québécoise de prévalence réalisée en 1996) du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 147 Voir au tableau 6.15 à la page 6.54 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. 148 (a) Voir à la page 50 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001, december 04). Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Toronto, ON: Canadian centre on substance abuse. Responsible gambling council (Ontario). (b) Voir à la page 46 dans : Wynne, H. J. (2002, January). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Final report. Ottawa, ON: Canadian centre on substance abuse. (c) Voir à la page 35 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. (d) Voir à la page 3-18 dans : Schrans, T., & Schellinck, T. (2004, june). 2003 Nova Scotia gambling prevalence study. Final report. Halifax, NS: Nova Scotia office of health promotion. (e) Voir à la page 55 dans : Marketquest research group, Inc. (2005, november). Newfoundland and Labrador gambling prevalence study. St John's, NL: Government of Newfoundland and Labrador, Department of health and community services. (f) Voir à la page 53 dans : Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health. 149 Les données du SOGS ont comparé les joueurs sans problèmes de jeu aux joueurs excessifs. (a) 18% c. 61% dans : Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission. (1998, juin). Adult gambling and problem gambling in Alberta. Summary report. Edmonton, Alberta: auteurs. (b) 14% c. 57% dans : Doiron, J., & Nicki, R. (1999, octobre). The prevalence of problem gambling in Prince Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 82 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 83 Les données de l’Ontario indiquent un intérêt moindre des joueurs à l’égard des ALV. Cela est dû vraisemblablement au fait que ces appareils ne sont pas disponibles dans les bars, et que l’offre de jeu y est surtout constitué de MAS dans des casinos. La capacité des ALV à attirer les joueurs pathologiques, ou à les créer, est illustrée autrement par une étude150 du comportement des joueurs sur ALV en Alberta selon laquelle les joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu ont commencé à jouer plus tôt sur les ALV que ceux qui n’ont pas de problème de jeu (voir Figure 54). Dit autrement, plus on joue sur les ALV depuis longtemps, plus il est probable que l’on soit un joueur pathologique. Dans cette province, les ALV sont disponibles depuis mars 1992. Edward Isalnd. Charlottetown, IPE: Prince Edward Island Department of Health and Social Services. 150 Voir aux pages 87 et 88 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2004, january). VLT gambling in Alberta: a preliminary analysis. Final report. Edmonton, AB: Alberta gaming research institute. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 83 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 84 Figure 53 20% 0% Sans problème Faible risque 81% 78% 61% 81% 50% 18% 40% 5% 60% 10% 39% 31% 53% 37% 58% 80% 55% 45% 82% 100% 2% 15% 12% 18% 9% 8% Taux de pénétration annuel Utilisation des ALV par les diverses catégories de joueurs Risque modéré Risque Pathologiques modéré ou + Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE) Ontario, 2001 Saskatchewan, 2001 Alberta, 2002 Nouvelle-Écosse, 2003 Terre-Neuve, 2005 Île-du-Prince-Édouard, 2005 Figure 54 100% 80% 60% 40% 20% 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1995 1996 1994 1993 1992 1991 1990 1988 1989 1987 1986 1985 1984 1983 0% 1982 Distribution cumulée Alberta (2004) : Année du début du jeu sur ALV en fonction de la catégore de joueurs Année du début du jeu sur AÉJ Non-problem Low-risk Moderate-risk Problem gamblers Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 84 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 85 3.2.4.3 La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs pathologiques Huit études ont constaté que les joueurs pathologiques contribuent en moyenne à 46% des revenus des ALV151. Les proportions varient entre 27% et 67%. Comparativement, dans le cas des MAS, la contribution moyenne était de 26% des revenus. Les joueurs sont toutefois de mauvais estimateurs de leur dépense au jeu152, en particulier sur AÉJ153. À cet égard, les études de prévalence n’offrent pas les meilleures données pour estimer cette contribution. Typiquement, les répondants sont appelés au téléphone, interrompus sans avertissement dans leurs activités quotidiennes, et on leur demande de faire une estimation rétrospective de leur dépense au jeu au cours des 12 derniers mois. Cette tâche implique trop d’incertitude. Il est néanmoins possible de procéder autrement en effectuant des mesures plus objectives, moins rétrospectives. 151 (a) Alberta, 1993 = 45,9% : Australian Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Alberta, 1997 = 67% : Azmier, J., & Smith, G. (1998). The state of gambling in Canada: an interprovincial roadmap of gambling and its impact. Calgary, AB: Canada west foundation. (c) Nouvelle-Écosse, 1997-1998 = 53% : Nova Scotia Department of Health. (1998a). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : auteur. (d) Australie, 1997-1998 = 42,3% : Australian Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (e) Montana, 1998 = 36,2% : Volberg, R.A., Gerstein, D.R., Christiansen, E.M., & Baldridge, J. (2001). Assessing selfreported expenditures on gambling. Managerial and Decision Economics, 22, 77-96. (f) Louisiane, 1999 = 27,1% : Voir Volberg, Gerstein, Christiansen & Baldridge (2001). (g) Île-duPrince-Édouard, 1999 = 36,2% : Doiron, J., & Nicki, R. (1999, octobre). The prevalence of problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, IPE: Prince Edward Island Department of Health and Social Services. (h) Alberta, 2002 = 63,2% : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. 152 (a) Blaszczynski, A., Dumlao, V., & Lange, M. (1997). "How much do you spend gambling?" Ambiguities in survey questionnaire items. Journal of gambling studies, 13(3), 237-252. (b) Voir aux pages 16.25 et 16.26 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (c) Blaszczynski, A., Ladouceur, R., Goulet, A., & Savard, C. (2006). ‘How much do you spend gambling?’ : Ambiguities in questionnaires items assessing expenditure. International gambling studies, 6(2), 123-128. 153 Voir aussi à la Figure 55 à la page 90 de la présente annexe. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 85 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 86 Seize études scientifiques154 ont cherché à recruter des joueurs réguliers sur AÉJ sans que la condition clinique ne soit un critère de sélection des participants. En moyenne, les auteurs de ces études ont diagnostiqué 35% de joueurs pathologiques parmi les joueurs réguliers sur AÉJ. Dans ces seize études, les proportions de joueurs pathologiques varient entre 13% et 64%. Si en moyenne à chaque instant, il y a toujours 35% de joueurs pathologiques parmi la clientèle, il est vraisemblable que leur contribution financière soit au moins égale à cette proportion. Considérant que, dans l’étude de la Nouvelle-Écosse155, à chaque fois qu’une personne a pressé le bouton Jouer , la mise des joueurs pathologiques a été de 57,7% fois plus grande que celle des joueurs sans problème de jeu, 35% de joueurs pathologiques contribueraient alors pour 46% des revenus bruts des ALV. Ceci est sans compter que, pour certains joueurs pathologiques, l’intervalle de temps pourrait être plus court156 entre 154 (a) 18,0% : Griffiths, M. (1991). Psychobiology of the near-miss in fruit machine gambling. The journal of psychology, 125(3), 347-357. (b) 29,4% ; Dickerson , M. (1996). Problem gambling in Australia. Australian Institute of Gambling Research, 1st National gambling conference papers. (c) 38,5% : Breen, R. (1997). Clinical interviews with frequent slot machines players. In W. Mateja, R. Wilson, & B. Ableman, A survey of gambling in Delaware. Newark, DE: Health Services Policy Research Group, University of Delaware School of Urban Affairs and Public Policy. (d) 20,0% : Pike, C., & Quinn, F. L. (1997). Preliminary report of the Quinn-Pike video gaming study. South Carolina: auteurs. (e) 41,3% : Othtsuka, K., Bruton, E., Deluca, L., & Borg, V. (1997). Sex differences in pathological gambling using gaming machines. Psychological Reports, 80, 1051-1057. (f) 64% : Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling Journal of gambling behavior, 13(3), 253-266. (g) 30,5% : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. (h) 39,5% : Trevorrow, K., & Moore, S. (1998). The association between loneliness, social isolation and women's electronic gaming machine gambling. Journal of gambling behavior, 14(3), 263-284. (i) 22,6% : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (j) 48,3% : Loba, P., Stewart, S. H., Klein, R. M., & Blackburn, J. R. (2001). Manipulations of the features of standard video lottery terminal (VLT) games: effects in pathological and non-pathological gamblers. Journal of gambling studies, 17(4), 297-320. (k) 58,1% : Oliveira, M. P. M. T., & Silva, M. T. A. (2001). A comparison of horse-race, bingo, and video poker gamblers in Brazilian gambling settings. Journal of gambling studies, 17(2), 137-149. (l) 22,5% : Tremayne, K., Masterman-Smith,H., & McMillen, J. (2001). Survey of the nature and extent of gambling and problem gambling in the ACT (Australian Capital Territory). Sydney, Australia : Australian Institute for Gambling Research. (m) 12,7% : Hing, N., & Breen, H. (2002). A profile of gaming machine players in clubs in Sydney, Australia. Journal of gambling behavior, 18(2), 185-205. (n) 35,8% : Rodda, S., Brown, S. L., & Phillips, J. G. (2004). The relationship between anxiety, smoking, and gambling in electronic gaming machine players. Journal of gambling studies, 20(1), 71-81. (o) 37,2% : Omnifacts Bristol research. (2005, september 21st). Nova Scotia player card research project : stage 1 research report, final. Halifax, NS: Nova Scotia gaming corporation. (p) 46,5% : Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on gambling. International gambling studies, 5(2), 139-154. 155 Voir à la page 3-51 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 156 Voir aux pages 3-51 et 3-58 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 86 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 87 deux pressions du bouton Jouer . La contribution des joueurs pathologiques serait alors encore plus élevée. En Australie, d’autres chercheurs ont constaté que la mise moyenne des joueurs pathologiques a été 2,06 fois celle des joueurs récréatifs157. Dans un tel cas, la proportion des revenus des AÉJ tirés de 35% de joueurs pathologiques serait de 53%. En contrepartie, les deux groupes de joueurs ont joué à une vitesse égale de 7,5 secondes entres les pressions du bouton Jouer . Comme tenu de ces estimations, il est raisonnable d’envisager qu’environ la moitié des revenus des ALV provient des joueurs pathologiques. En Alberta, où les ALV sont très similaires à ceux du Québec, cette estimation a été évaluée par deux fois à 67% et 63% des revenus158. Par surcroît, dans la mesure où l’on considère que les joueurs excessifs159 composent nécessairement plus que 35% de la clientèle présente à jouer sur les ALV, il y a lieu de considérer que beaucoup plus que la moitié des revenus proviennent de personnes qui éprouvent de sérieuses difficultés de contrôle à l’égard des ALV. 3.2.4.4 La dépense au jeu mensuelle sur les ALV Au niveau individuel, la contribution des joueurs pathologiques au revenu des ALV pèse lourd sur les finances personnelles, et certainement sur le budget familial. Au Canada, l’étude160 la plus précise indique que, parmi les joueurs réguliers161 sur ALV, les joueurs peu fréquents y dépensent en moyenne $ 54 par mois. Les joueurs fréquents, sans problème de jeu, y consacrent $ 229. Les joueurs qui éprouvent des problèmes sur ALV y perdent $ 809 par mois. Ces données sont corroborées par trois autres études canadiennes qui rapportent toutefois des dépenses médianes. 157 Voir à la page 58 dans : Blaszczynski, A., Sharpe, L., & Walker, M. (2001, November). The assessment of the impact of the reconfiguration on electronic gaming machines as harm minimisation strategies for problem gambling. Final report. A report for the gaming industry operators group. Sidney, Australia: The University of Sydney gambling research unit. 158 (a) Alberta, 1997 = 67% : Azmier, J., & Smith, G. (1998). The state of gambling in Canada: an interprovincial roadmap of gambling and its impact. Calgary, AB: Canada west foundation. (b) Alberta, 2002 = 63,2% : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. 159 Les joueurs excessifs (en anglais, problem gamblers), sont constitués des joueurs pathologiques ainsi que des joueurs à risque. Compte tenu que les outils de dépistage ou de diagnostique se fondent sur le constat de dommages, les dommages, consécutifs d’une dépendance pathologique à l’égard du jeu, surviennent avant qu’un diagnostic de jeu pathologique puisse être formellement établi. 160 Voir à la page D-23 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 161 Ceux qui jouent au moins une fois par mois. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 87 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 88 Tableau 17 Dépense mensuelle médiane au jeu selon la catégorie de joueurs telle qu’évaluée par l’Indice canadien de jeu excessif Juridiction Saskatchewan en 2001162 Alberta en 2001163 Île-du-Prince-Édouard, 2005164 Sans problème $ 10 $ 10 $ 20 Catégories de l’ICJE Faible risque Risque Avec modéré problème $ 20 $ 40 $ 200 $ 20 $ 100 $ 700 $ 100 $ 900 Sans équivoque, les joueurs pathologiques misent davantage que les autres catégories de joueurs. Dans la mesure où ceux-ci représentent 35% de la clientèle observable à n’importe quel moment, et qu’ils jouent plus rapidement avec des mises plus onéreuses, il est raisonnable de considérer que la contribution réelle des joueurs pathologiques aux revenus tirés des ALV va nettement au-delà de 35%, plausiblement aussi au-delà des 46% précédemment rapportés. En ce sens, une estimation de 60%, encore à être démontrée exactement, n’est pas aberrante. 3.2.4.5 La capacité des ALV de créer une dépendance pathologique chez les joueurs novices ou jusque-là sains Entre 1996 et 1999165, dans le cadre des recherches sur le traitement cognitif du jeu pathologique, 336 joueurs pathologiques exclusifs166 ont eu la possibilité de réclamer une aide clinique au CQEPTJ de l’Université Laval167. Parmi ceux-ci, 333 ont été en mesure de faire l’historique de leurs pratiques et problèmes de jeu. Cent quarante-huit (44%) ont commencé à éprouver des problèmes de jeu avant 1994, et 136 (41%) n’ont commencé à avoir des problèmes qu’après 1994, soit après l’implantation des ALV de Loto-Québec168. 162 Voir à la page 53 dans : Wynne, H. J. (2002 january). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Ottawa, Ontario: Canadian centre on substance abuse. 163 Voir à la page 43 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002 February). Using the Canadian problem gambling index (C.P.G.I.). Alberta gaming research institute. 164 Voir à la page 54 dans : Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health. 165 C’est-à-dire entre 2 et 5 ans après l’implantation du parc d’ALV de Loto-Québec en juin 1994. 166 Sans autre pathologie. 167 Ces données non publiées du CQEPTJ ont été rapportées (voir à la page 286) dans l’annexe H (Profil des joueurs pathologiques sur ALV ayant demandé une aide clinique) du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 168 Pour 49 joueurs, il n’a pas été possible de déterminer si leur problème de jeu s’était développé avant ou après l’implantation des ALV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 88 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 89 Parmi ceux dont les problèmes sont plus anciens, 64% n’éprouvaient des problèmes qu’avec les ALV; tandis que c’était le cas de 84% des joueurs dont les problèmes sont plus récents169. Deux interprétations sont possibles : (a) en comparaison des APV, les ALV captent davantage l’attention des joueurs pathologiques; ou bien, (b) les ALV ont créé des joueurs pathologiques que les APV n’auraient pas pu créer. Incidemment, parmi les 333 joueurs étudiés, 114 n’ont joué à aucune autre activité de jeu que les AÉJ, et n’avaient jamais développé de problèmes de jeu avant d’être mis en contact avec les ALV de Loto-Québec. Il ne s’agit pas de jeunes joueurs puisque l’âge moyen de l’initiation aux ALV de ce groupe est d’environ 37 ans170. Pour la plupart, il s’agissait de personnes qui ne s’étaient pas intéressées au jeu, pendant plusieurs années de leur vie adulte, avant d’être mis en contact avec les ALV. Une autre indication probante de la capacité des ALV à créer de nouveaux joueurs pathologiques est l’absence de cannibalisation des revenus entres les diverses activités de Loto-Québec171. Les ALV ne semblent nullement avoir affecté négativement les revenus des loteries ou des casinos. Il est certain que les ALV n’ont pas nui au pari mutuel dans la proportion des revenus qu’ils ont générés. Ainsi, les ALV ont causé une nouvelle dépense au jeu, et cette dépense est considérable. L’ampleur de cette dépense additionnelle est telle qu’elle peut difficilement être expliquée autrement que par la création de nouveaux joueurs pathologiques spécifiquement dépendants des ALV. Dès lors, il existe un lien observable entre la pratique de jeu sur ALV et les problèmes de jeu. D’une part, l’expérience de jeu vécue sur les ALV a le potentiel de créer une dépendance pathologique chez des joueurs novices ou ceux jusque-là sains. D’autre part, les AÉJ sont très attrayants pour les joueurs qui ont déjà développé une dépendance envers d’autres activités de jeu. Dans ce cas, ils captent une dépense au jeu déjà dommageable, et ils en accentuent l’intensité en raison, notamment, d’une fréquence accélérée des mises et des tirages. 3.2.4.6 La capacité des joueurs à estimer leur dépense au jeu Dans les études de prévalence précédemment analysées, la dépense au jeu est souvent estimée par les joueurs eux-mêmes. Il est alors intéressant de comparer la dépense rapportée par la population aux revenus réellement obtenus du jeu par les établissements de jeu. Au Québec, une étude de prévalence, réalisée en 2002, a interrogé les Québécois quant à leur dépense dans 20 activités de jeu. Pour neuf d’entre elles, il est possible de vérifier la justesse de ces auto-évaluations (voir Figure 55). Ainsi, les Québécois font une évaluation remarquablement juste de leur dépense dans les loteries, sauf les loteries instantanées. La dépense au bingo est nettement surestimée, vraisemblablement parce que les joueurs rapportent surtout l’argent qu’ils ont dépensé pour acheter les cartes sans tenir compte des gains obtenus. En contrepartie, les 169 Cette différence est statistiquement significative. 170 Voir aux pages 292 à 294 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 171 Voir à l’annexe 1 : La dépense au jeu de la population québécoise. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 89 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 90 personnes interrogées n’ont rapporté une dépense sur ALV ou aux MAS qui n’est que le tiers de la dépense réelle. La dépense estimée aux courses de chevaux n’est que la moitié de la réalité. Figure 55 Justesse de l'auto-évaluation de la dépense au jeu AÉJ (ALV + MAS) 34% Course de chevaux 48% Bingo 245% ALV 35% Casino - machines à sous 35% Casino - jeux de table Casino - total Loterie sportive 140% 76% 306% Loterie instantanée 74% Loterie quotidienne 117% Loterie ordinaire 118% Loterie - total 104% Jeux étatisés 73% 0% 20% 40% 60% 80% 100% 120% 140% Portion de la dépense réelle qui a été rapportée lors de l'étude de prévalence de 2002 (Une valeur inférieure à 100% indique que les personnes sous-évaluent leur dépense) Le fait de sous-estimer ainsi la dépense réelle contribue à la dangerosité de ces activités. De plus, il y a lieu de considérer que l’estimation des proportions de revenus provenant des joueurs pathologiques a été réalisée avec des auto-évaluations de la dépense au jeu. S’il en est ainsi, et si ce sont les joueurs pathologiques qui font les pires estimations172, la contribution des joueurs pathologiques aux revenus des ALV pourrait être nettement au-delà des 46% ici mesurés. 3.2.5 La nature des demandes d’aide Aux États-Unis, jusqu’au début des années 90 lorsque les ALV hors casinos ont commencé à être disponibles, les courses de chevaux ou de chiens173 ont été l’activité 172 Incidemment, en Nouvelle-Écosse, Schellinck et Schrans ont constaté que 53% des joueurs avec problèmes de jeu perdaient la notion du temps écoulé au moins 25% des fois qu’ils ont joué sur ALV. Cela n’arrive qu’à 13% des joueurs fréquents sans problème de jeu et à 5% des joueurs peu fréquents. (a) Voir à la page 3-61 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 173 Voir à la page 646 dans : Petry, N. M. (2003). A comparison of treatment-seeking pathological gamblers based on preferred gambling activity. Addiction, 98, 645-655. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 90 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 91 de jeu la plus étroitement associée au jeu pathologique. Au Québec, bien que la situation n’a pas été investiguée scientifiquement avant 1993, les courses de chevaux étaient l’activité de jeu causant le plus de problèmes. La situation a beaucoup changé depuis. En Australie du Sud, Paul Delfabbro174 a constaté que 25% de la variance dans les inscriptions à un service d’aide pour les joueurs excessifs, entre 1996 et 2002, est simplement expliquée par le nombre d’AÉJ disponibles dans le bassin de population de ces services d’aide. En milieu clinique, les données, recueillies au CQEPTJ175 entre 1996 et 1999, révèlent que 93% des joueurs pathologique, qui ont requis une aide clinique, éprouvent des difficultés de contrôle sur les ALV. Il en est de même de 94% des joueurs inscrits à la Maison Claude-Bilodeau176. Parmi les joueurs pathologiques qui ont demandé une aide clinique au MSSS depuis 2001, 71% des personnes jouaient sur les ALV plus d’une fois par semaine177. Un constat longitudinal illustre à quel point les ALV ont rapidement créé ou capté l’intérêt des joueurs pathologiques. Depuis l’ouverture du casino de Montréal en 1993, le Centre de référence du Grand-Montréal, un OBNL, traite tous les appels de la ligne téléphonique Jeu : aide et référence, (527-0140 / 1-800-461-0140) ainsi que tous les appels de la ligne 1-866-SOS-JEUX de la fondation Mise sur toi. Environ 90% des appels sont logés par des personnes directement préoccupées par des comportements de jeu, plus du trois-quarts des appels sont faits par les joueurs eux-mêmes. (voir Figure 56). Environ 90% des appels révèlent des préoccupations concernant les AÉJ. Plus de 80% des appels concernent les ALV plus spécifiquement (voir Figure 57). La prédominance actuelle des appels par les ALV ne signifie pas que d’autres modalités de jeu ne sont pas dangereuses. Elle signifie surtout que, dans les conditions actuelles, les ALV exercent un attrait plus puissant auprès des joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu, et que les dommages subis sont plus rapides. La juxtaposition d’une importante concentration d’ALV aux hippodromes pourrait changer cette situation. 174 Voir à la page 127 dans : Delfabbro, P. (2002, November). Appendix E : The distribution of electronic gaming machines (EGMs) and gambling-related harm in Metropolitan Adelaide. Dans Independent gambling authority. (2003). Inquiry into management of gaming machine numbers. Adelaide, South Australia: author. 175 Voir à la page 285 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 176 Communication de Robert Ladouceur rapportée à la page 10 dans : Régie des alcools, des courses et des jeux. (2000). Les appareils de loterie vidéo et le jeu pathologique. Québec, Qc: Régie des alcools, des courses et des jeux, Gouvernement du Québec. 177 Voir à la page 36 dans : Audet, C., St-Laurent, D., Chevalier, S., Allard, D., Hamel, D., & Crépin, M. (2003). Évaluation du programme expérimental sur le jeu pathologique. Rapport 7. Monitorage évaluatif – indicateurs d’implantation – données rétrospectives. Montréal, QC : Institut national de santé publique du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 91 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 92 Figure 56 Personnes préoccupées par leurs comportements de jeu Figure 57 Activité de jeu associée aux préoccupations Joueurs Proches ALV 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 99-2000 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 99-2000 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 1993-94 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% MAS 3.2.6 Les désastres causés par des joueurs laissés sans aide Durant les années 1990, l’entrée des joueurs excessifs dans les services d’aide se faisait typiquement par l’intermédiaire d’un autre problème de santé. Par manque de fonds personnels, d’accessibilité, de disponibilité ou par ignorance de l’existence des services spécialisés, une majorité de joueurs a été laissée sans soin178. Leur condition clinique s’est fréquemment détériorée jusqu’à l’alcoolisme, la toxicomanie, la dépression, ou la criminalité. En conséquence, des proportions anormalement élevées de joueurs pathologiques ont été constatées dans les cliniques ou groupes d’entraide pour alcooliques ou toxicomanes179 ainsi que dans les services correctionnels en milieu carcéral180. Il en a été de même pour les refuges destinés aux sans-abris181. 178 Au Québec, en 1989, seulement 11,4% des joueurs excessifs en crise avaient reçu une aide professionnelle. En 1996, cette proportion était de 6,2%. (a) Voir à la page 382 dans : Ladouceur, R. (1993). Prevalence estimates of pathological gamblers in Québec, Canada. Dans W. R. Eadington, & J. A., Cornelius (éditeurs), Gambling behavior and problem gambling (pp. 379-384), Reno, NV: Institute for the study of gambling and commercial gaming. University of Nevada. (b) Donnée communiquée par Jean Leblond à partir de la banque de données de la version actualisée de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique réalisée au Québec en 1996. 179 (a) Ciarrocchi, J. W. (1993). Rates of pathological gambling in publicly funded outpatient substance abuse treatment. Journal of gambling behavior, 9(3), 289-293. (b) Spunt, B., Lesieur, H., Liberty, H. J., & Hunt, D. (1996). Pathological gamblers in methadone treatment: a comparison between men and women. Journal of gambling behavior, 12(4), 431-449. (c) Zimmerman, M., Chelminski, I., & Young, D. (2006). Prevalence and diagnostic correlates of DSM-IV pathological gambling in psychiatric outpatients. Journal of gambling studies, 22(2), 255262. 180 (a) Templer, D.I., Keisser, G., & Scicode, K. (1993). Correlates of pathological gambling propensity in prison inmates. Comprehensive Psychiatry, 34, 347–351. (b) Meyer, G., & Fabian, T. (1996). Pathological gambling and criminal culpability: an analysis of forensic evaluations presented to German penal courts. Journal of gambling studies, 12(1), 33-47. (c) Walters, G. D. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 92 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 93 Partout dans le monde, des cliniques, spécialisées dans la solution des problèmes de jeu, ont rapidement alerté les autorités, et la communauté scientifique, d’une affluence subite, et hors de proportion, de personnes éprouvant de sérieux problèmes avec les AÉJ182. Par rapport aux activités de jeu plus traditionnelles, les dommages s’y concrétisaient plus rapidement183 avec une intensité démesurée. À cette époque, et (1997). Problem gambling in a federal prison population: results from the South Oaks gambling screen. Journal of gambling studies, 13(1), 7-24. (d) Walters, G. D., & Contri, D. (1998). Outcome expectancies for gambling: empirical modeling of a memory network in federal prison inmates. Journal of gambling studies, 14(2), 173-191. (e) Meyer, G., & Stadler, M. A. (1999). Criminal behavior associated with pathological gambling. Journal of gambling studies, 15(1), 29-43. 181 Bon nombre de joueurs ayant perdu le contrôle sur leur dépense de jeu ont conduit leur famille ou leurs entreprises à la ruine. Ces personnes se sont ajoutées à la clientèle traditionnelle des organismes qui se consacrent à lutter contre la pauvreté. Voir (a) Lepage, C., Ladouceur, R., & Jacques, C. (2000). Prevalence of problem gambling among community service users. Community Mental Health Journal, 36, 587-601. 182 (a) Allemagne, 1992 : Bühringer, G., & Konstanty, R. (1992). Intensive gamblers on germanstyle slot-machines. Journal of gambling studies, 8(1), 21-38. (b) Autriche, 1992 : Horodecki, I. (1992). 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(h) Finlande, 1994: Murto & Niemela (1996) rapporté dans Griffiths & Wood (1999). (i) South Dakota, 1996: Carr, R. D., Buchkoski, J. E., Kofoed, L., & Morgan, T. J. (1996). “Video lottery” and treatment for pathological gambling. The South Dakota Journal of Medicine, 49, 30-32. + Morgan, T., Kofoed, L., Buchkoski, J., & Carr, R. D. (1996). Video lottery gambling : effects on pathological gamblers seeking treatment in South Dakota. Journal of Gambling Studies, 12(4), 451-460. (j) Oregon, 1997 : Volberg, R. A. (1997b). Gambling and problem gambling in Oregon : report to the Oregon gambling addiction treatment foundation. Northampton, MA: Gemini research. (k) Alberta, 1998-1999, voir à la page A3-6 dans : Alberta Gaming and Liquor Commission. (2001). Achieving a balance : gaming licensing policy review, volume two. St-Albert, Alberta : Alberta Gaming and Liquor Commission. (l) Manitoba, 1999: Beaudouin, C. M., Cox, B. J. (1999). 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Expertise déposée au dossier numéro 200-06000017-015 de la Cour supérieure du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 93 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 94 parfois encore aujourd’hui, les services cliniques n’étaient pas préparés à l’arrivée d’une clientèle ayant des besoins différents découlant d’une nouvelle technologie de jeu. Sans équivoque, l’attrait des AÉJ auprès des joueurs déjà pathologiques, et le potentiel des appareils à générer de nouveaux joueurs pathologiques, a dépassé les capacités d’orientation et d’accueil des services cliniques ou communautaires. 3.3 L’urgence pour des changements majeurs dans la manière d’exploiter les AÉJ Les dommages subis par les joueurs appartiennent à deux catégories. L’argent perdue au jeu est une première catégorie de dommages. L’argent que le joueur ne peut pas perdre est une seconde catégorie particulièrement génératrice de comorbidité. À cet égard, l’analyse des données financières concernant les MAS et les ALV suggère une intensité de dommages considérables dans la population québécoise. Dès lors, il est impératif de mieux délimiter les problèmes de jeu en faisant appel à des critères financiers, car le facteur central des méfaits demeure l’argent perdu au jeu. 3.3.1 Les critères du jeu sécuritaire Une étude pancanadienne récente vient de spécifier trois critères délimitant le jeu sécuritaire184. Les critères du jeu sécuritaire définissent concrètement les limites dans lesquelles les joueurs peuvent s’amuser sans craindre le risque de dommages importants. Dès que la personne outrepasse un seul de ces critères, elle doit être consciente qu’elle s’engage dans une zone à risque d’autant plus que l’écart est grand. Lorsque les écarts vont en s’accroissant continuellement, il y a lieu de considérer qu’il y a perte de contrôle sur la dépense au jeu. Dans ce contexte, la dépense au jeu est un indicateur valable des problèmes de jeu vécus par la population. Ces critères sont : • Ne pas jouer plus de 2 ou 3 fois par mois. • Ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). • Ne pas dépenser au jeu plus de 1% du revenu familial brut. 3.3.2 La dépense au jeu par unité et par site Les AÉJ de Loto-Québec génèrent des revenus considérables par rapport aux appareils qu’ils ont remplacés. En 1949, les vieux gobe-sous ne produisaient qu’un revenu annuel brut de $ 10 908 par unité, en dollars actualisés de 2006 (voir Tableau 18). Quarantedeux ans plus tard en 1991, les APV du marché gris ont suscité une dépense au jeu trois fois plus grande, atteignant $ 32 050. Toutefois, à peine trois ans plus tard, après leur première année complète d’opération, les MAS du casino de Montréal ont immédiatement suscité une dépense au jeu cinq fois plus grande que celle des APV. En 2002-2003, la multiplication subséquente du nombre de MAS a toutefois réduit cette 184 Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 94 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 95 dépense par unité à $ 105 640. Par la suite, les données financières des MAS n’ont plus été publiées. À leur première année complète d’opération, les ALV ont connu un début plus modeste avec une dépense au jeu par unité de $ 26 751. En contrepartie, la progression de la dépense au jeu par unité est continuelle depuis leur implantation. En 2005-2006, chaque ALV a suscité une dépense au jeu moyenne de $ 98 874. Pourtant, le volume de la clientèle annuelle ne progresse pas185. Plus les années passent, plus les joueurs perdent individuellement plus d’argent sur les ALV. À noter que, d’une année à l’autre, ce ne sont pas nécessairement les mêmes personnes qui perdent au jeu186. Le nombre d’ALV a culminé en 1998-1999. Entre 1998-1999 et 2002-2003, le parc d’ALV a continuellement rétréci. Le nombre d’ALV a diminué de 7%, et le nombre de sites de 12%. Pourtant, le revenu brut global des ALV a augmenté de 29%. L’année 2002-2003 a marqué le début du remplacement des ALV par les nouveaux modèles187 dotés des mesures s’inscrivant dans une stratégie commerciale centrée sur la notion de jeu responsable. La réponse des joueurs n’a pas été immédiate car la dépense par unité est restée sensiblement la même en 2003-2004. Par contre, en 20052006188 par rapport à 2002-2003, le nombre d’ALV avait diminué d’un autre 6% et le nombre de sites d’un 15% de plus. Malgré cette réduction, le revenu brut a continué à augmenter de 17%. 185 La clientèle des ALV était composée de 8,5% de la population adulte du Québec en 1997, de 10,7% en 1999, de 7,8% en 2002 et de 9,6% en 2004. (a) Voir à la page 53 dans : Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Voir le tableau A.12 à la page 53 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (c) Voir à la page 26 dans : Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal, QC : auteur. 186 En Nouvelle-Écosse, où les ALV sont à peu près similaires à ceux du Québec, il a été estimé que le volume de la clientèle régulière sur ALV se maintient constante d’une année à l’autre avec environ 25% de nouveaux joueurs et environ 25% de joueurs qui quittent le jeu, notamment en raison de l’épuisement de leur capacité financière ou de problèmes de jeu. En ce sens, la stabilité du volume de la clientèle annuelle n’indique pas que ce sont toujours les mêmes joueurs qui éprouvent des problèmes, et que l’incidence de nouveaux joueurs pathologiques est rare. Voir aux pages V et 2-5 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. 187 Voir à la page 16 dans : Loto-Québec. (2004). Rapport annuel 2003-2004 : un équilibre à maintenir. Montréal, QC : auteurs. 188 En comparaison de l’année 2002-2003. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 95 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 96 Tableau 18 Revenu brut annuel par appareil Appareil Année N. appareils Revenu annuel Revenu actualisé en 2006 $1 200 $ 10 908 Gobe-sous (GS)189 1949 Poker vidéo (APV)190 1991 25 000 $ 24 000 $ 32 050 Machine à sous (MAS)191 1994-1995 1 835 $ 118 069 $ 151 530 Machine à sous (MAS) 192 1997-1998 3 158 $ 91 472 $ 112 049 Machine à sous (MAS) 193 2002-2003 5 730 $ 96 499 $ 105 640 1995-1996 14 644 $ 21 209 $ 26 751 Loterie vidéo (ALV) 194 Loterie vidéo (ALV) 195 1998-1999 15 314 $ 38 349 $ 46 501 Loterie vidéo (ALV) 196 2002-2003 14 301 $ 75 305 $ 82 439 Loterie vidéo (ALV)197 2003-2004 14 293 $ 78 979 $ 84 771 198 2005-2006 13 516 $ 96 094 $ 98 874 Loterie vidéo (ALV) 189 Voir à la page 40 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale. 190 Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteur. 191 Revenu par unité des MAS au casino de Montréal. Voir aux pages 10 et 11 dans : LotoQuébec. (1995). Rapport annuel 1994-1995. Montréal, QC : auteur. 192 Revenu par unité des MAS au casino de Montréal. Voir à la page 15 dans : Loto-Québec. (1998). Rapport annuel 1997-1998. Montréal, QC : auteur. 193 Revenu par unité des MAS des trois casinos. Voir KPMG. (2004). Canadian gaming industry highlights : updated – 2003 results. http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf 194 Voir à la page 14 dans : Loto-Québec. (1996). Rapport annuel 1995-1996. Montréal, QC : auteurs. 195 Il s’agit de l’année où le nombre d’ALV a culminé. Voir à la page 24 dans : Loto-Québec. (1999). Rapport annuel 1998-1999. Montréal, QC : auteurs. 196 Voir à la page 16 dans : Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs. 197 Voir aux pages 16 et 57 dans : Loto-Québec. (2004). Rapport annuel 2003-2004 : un équilibre à maintenir. Montréal, QC : auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 96 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 97 La moyenne de la dépense au jeu dans chaque site a aussi augmenté continuellement (voir Tableau 19). La transition entre les années 2002-2003 et 2003-2004 est intéressante puisque le nombre d’ALV et la dépense par unité sont restés les mêmes, alors que la dépense par site a considérablement augmenté. Les joueurs ont simplement suivis les ALV là où ils ont été déplacés. Tableau 19 Revenu brut annuel par site Appareil Année N. de sites Revenu annuel Revenu actualisé en 2006 Loterie vidéo (ALV) 1995-1996 4 242 $ 73 215 $ 92 346 Loterie vidéo (ALV) 1998-1999 4 175 $ 183 945 $ 223 045 Loterie vidéo (ALV) 2002-2003 3 663 $ 294 006 $ 321 857 Loterie vidéo (ALV) 2003-2004 3 362 $ 335 767 $ 360 391 Loterie vidéo (ALV) 2005-2006 3 122 $ 416 017 $ 428 051 3.3.3 La dépense au jeu par joueur Il est possible d’estimer en quelques occasions la dépense moyenne par joueur annuel (voir Tableau 20). En 2002, la dépense sur les MAS dépassait le second critère du jeu sécuritaire. À noter ici qu’il s’agit d’une estimation représentant la moyenne des joueurs. En ce sens, plus de la moitié des joueurs sur ALV dépasseraient ce critère. En 1997, à peine trois ans après l’avènement des ALV, la dépense moyenne par joueur annuel était de trois supérieure au second critère du jeu sécuritaire. C’est énorme surtout si on considère que cette dépense est plus élevée pour les seuls joueurs mensuels, et encore plus élevée pour les joueurs hebdomadaires. Sans que le volume de la clientèle ne soit plus grand, la dépense par joueur annuel a continuellement progressé jusqu’en 2002, et cette dépense est encore beaucoup plus élevée en 2004. D’une année à l’autre, les joueurs, individuellement, perdent plus d’argent sur les ALV. À la lumière des données financières, l’ampleur des dommages que subissent les joueurs sur ALV n’est certainement pas stabilisée au Québec. 198 Voir aux pages 29 et 78 dans : Loto-Québec. (2006). Rapport annuel 2005-2006 : divertir au profir de la collectivité. Montréal, QC : auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 97 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 98 Tableau 20 Revenu brut annuel par joueur Année Joueurs annuels Revenu brut total Dépense / joueurs Dépense actualisée en 2006 Machines à sous 199 (MAS) 2002 16,3% $ 552 938 000 $ 577 $ 632 Loterie vidéo (ALV)200 1997 8,5% $585 431 000 $ 1 228 $ 1 504 Loterie vidéo (ALV)201 1999 10,7% $928 412 000 $ 1 521 $ 1 797 202 2002 7,8% $1 076 943 000 $ 2 349 $ 2 571 Loterie vidéo (ALV)203 2004 9,6% $1 236 884 000 $ 2 146 $ 2 256 Appareil Loterie vidéo (ALV) 199 (a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir le tableau A.10 à la page 51 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (b) Les MAS ont généré un revenu brut de $ 552 938 000 en 2002-2003. Voir KPMG. (2004). Canadian gaming industry highlights : updated – 2003 results. (c) Selon le tableau 051-00011,2,6 de CANSIM (Statistique Canada), il y avait 5 878 550 personnes adultes au Québec en 2002. (d) Ainsi, les 958 204 joueurs ont dépensé en moyenne $ 577,06. 200 (a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir à la page 53 dans : Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Pour le revenu brut des ALV, voir à la page 45 dans : Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1997-1998. Montréal, QC : auteur. (c) Selon le tableau 050-00011,2,6 de CANSIM, il y avait 5 609 967 personnes adultes au Québec en 1997. 201 (a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir à la page 53 dans : Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Pour le revenu brut des ALV, voir à la page 51 dans le même rapport annuel. (c) Selon le tableau 050-00011,2,6 de CANSIM, il y avait 5 706 445 personnes adultes au Québec en 1999. 202 (a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir le tableau A.12 à la page 53 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (b) Pour le revenu brut des ALV, voir à la page 53 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteur. (c) Selon le tableau 051-00011,2,6 de CANSIM (Statistique Canada), il y avait 5 878 550 personnes adultes au Québec en 2002. 203 (a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir à la page 26 dans : Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal, QC : auteur. (b) Pour le revenu brut des ALV, voir à la page 65 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal, QC : auteur. (c) Selon le tableau 051-00011,2,6 de CANSIM (Statistique Canada), il y avait 6 002 655 personnes adultes au Québec en 2004. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 98 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 99 3.3.4 Les dommages ne dépendent pas prioritairement du nombre de sites ou du nombre d’ALV Comme le signale Paul Delfabbro204, une limitation du nombre maximal d’AÉJ est efficace à contrôler l’accessibilité bien qu’elle n’empêche pas la croissance annuelle du revenu par site. Dans le cas du Québec, malgré que le nombre de sites a chuté de 40% depuis 1996-1997, le revenu brut moyen des ALV par site a augmenté de 290% (voir Figure 58). Figure 58 Revenu brut moyen par site en fonction du nombre de sites $450 000 2005-2006 Revenu brut par site $400 000 2004-2005 $350 000 2003-2004 $300 000 2002-2003 2001-2002 2000-2001 1999-2000 $250 000 $200 000 1998-1999 $150 000 1997-1998 1996-1997 $100 000 1995-1996 $50 000 $0 2500 1994-1995 3000 3500 4000 4500 5000 Nombre de sites au Québec Dans le cas des ALV, peu importe si le nombre augmente ou diminue, le revenu brut moyen par ALV augmente continuellement. Malgré une chute du nombre d’ALV de 13% depuis 1998-1999, le revenu brut moyen par appareil a augmenté de 92% (voir Figure 59). 204 Voir à la page 130 dans : Delfabbro, P. (2002, november). Appendix E : The distribution of electronic gaming machines (EGMs) and gambling-related harm in Metropolitan Adelaide. Dans Independent gambling authority. (2003). Inquiry into management of gaming machine numbers. Adelaide, South Australia: author. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 99 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 100 Figure 59 Revenu brut moyen par ALV en fonction du nombre d'ALV $100 000 2005-2006 Revenu brut par ALV $90 000 2004-2005 $80 000 2002-2003 $70 000 2003-2004 2001-2002 2000-2001 1999-2000 $60 000 $50 000 1998-1999 $40 000 1997-1998 1996-1997 $30 000 1995-1996 $20 000 $10 000 1994-1995 $0 6000 8000 10000 12000 14000 16000 18000 Nombre d'ALV au Québec Compte tenu que le volume de la clientèle annuelle des ALV de Loto-Québec n’a pas augmenté depuis 1996205, que le revenu par joueur sur ALV dépasse les $ 2 000 depuis au moins 2002-2003206, qu’une telle dépense est associée à un risque élevé de développer des problèmes de jeu207, et que 46% des revenus des ALV proviennent généralement des seuls joueurs pathologiques208, l’augmentation fulgurante des revenus 205 La clientèle des ALV était composée de 8,5% de la population adulte du Québec en 1997, de 10,7% en 1999, de 7,8% en 2002 et de 9,6% en 2004. (a) Voir à la page 53 dans : Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Voir le tableau A.12 à la page 53 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (c) Voir à la page 26 dans : Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal, QC : auteur. 206 En 2002-2003, 7,8% de la population adulte du Québec (463 310 personnes) a dépensé sur les ALV un montant global de 1,077 milliards de dollars. La dépense moyenne par joueur est alors de $ 2 324. En 2004-2005, 9,6% de la population adulte du Québec (581 766 personnes) a dépensé sur les ALV un montant global de 1,237 milliards de dollars. La dépense moyenne par joueur est alors de $ 2 126. 207 Il s’agit de 4 fois la limite proposée par le second critère à la page 577 dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. 208 Voir à la page 85, la section 3.2.4.3 : La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs pathologiques. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 100 Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 101 des ALV par unité, en particulier dans le contexte d’une diminution du nombre d’ALV, n’a guère d’autre explication raisonnable qu’une capture toujours croissante de l’argent des joueurs pathologiques par les ALV. Il en découle nécessairement une aggravation continuelle des dommages et des méfaits. 3.3.4.1 L’importance de limites établies en fonction du budget familial En 2001, Statistique Canada209 a répertorié la proportion des ménages, dans chaque province canadienne, qui a parié de l’argent sur les ALV ou dans les casinos210 au cours de l’année. Par ailleurs, Statistique Canada211 a mesuré, en 2002, la prévalence du jeu excessif dans les provinces canadiennes. Lorsque ces données sont mises en relation, la corrélation de rang est de 0,9 (p = ,0004; voir Figure 60). Encore une fois, plus on joue sur les AÉJ, plus les problèmes de jeu sont probables. Figure 60 ICJE - Rrisque modéré ou plus en 2002 Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la participation au jeu 3,5% Manitoba Saskatchewan 3,0% ColombieBritannique 2,5% 2,0% 1,5% Terre-Neuve-etLabrador Île-du-Prince- Alberta Ontario Nouvelle-Écosse Québec Édouard 1,0% Nouveau-Brunswick 0,5% 0,0% 5% 10% 15% 20% 25% 30% Pourcentage des ménages qui ont joué aux casinos, MAS ou ALV en 2001 209 Marshall, K. (2003, avril). Fiche : jeux de hasard, L’emploi et le revenu en perspective, 4(4), Ottawa, ON : Statistique Canada, 75-001-XIF. 210 Malheureusement, il n’est pas possible de départager la participation aux MAS et aux tables de jeu. Quoi qu’il en soit, plus des trois-quarts des revenus des casinos proviennent des MAS. 211 Statistique Canada. (2002). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes : santé mentale et bien-être. Risque de problème de dépendance au jeu, selon le sexe, population à domicile de 15 ans et plus, Canada et provinces, 2002. Ottawa, ON: auteurs. http://www.statcan.ca/francais/freepub/82-617-XIF/htm/5110076_f.htm Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 101 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 102 Chapitre 4 La dangerosité croisée des activités de jeu Au Canada, les courses de chevaux n’ont pas été longtemps interdites par la loi. Au moment de l’adoption du Code criminel en 1892, elles ont été rendues illégales dans un mouvement de prohibition générale du jeu. Dès 1910, un amendement les a autorisées. Elle ont été interdites à nouveau au temps de la Première guerre mondiale, puis définitivement autorisées212 en 1919. Jusqu’en 1980, les courses ont connu une progression constante de leur revenu, puis un déclin rapide; au point que cette industrie risque de disparaître. Actuellement, au Québec et ailleurs en Amérique du Nord, malgré que des personnes continuent d’y subir des dommages, les courses de chevaux ne figurent pas parmi les plus importants problèmes de santé publique. Il n’en a pas toujours été ainsi213. Les courses de chevaux, alors qu’elles étaient populaires, ont longtemps été identifiées à des déchéances de joueurs qui ont conduit leur famille à vivre misérablement214. La quasi éradication des problèmes de jeu, associés aux courses de chevaux, n’est pas attribuée à des changements dans la structure de jeu. Celle-ci n’a pas beaucoup changé. De plus, les systèmes de paris à distance se sont considérablement développés. L’éradication est plutôt attribuable au fait que la clientèle a de plus en plus déserté les hippodromes au profit d’une activité concurrente plus attrayante215 pour les joueurs216. Parce que rien n’a fondamentalement changé dans la dangerosité de cette activité, l’idée d’une relance des courses de chevaux fait ressurgir les craintes d’une réapparition des courses parmi les principaux problèmes de santé publique découlant du jeu. Dans cette perspective, en 1999, la National gambling impact study commission (NGISC) 212 Campbell, C. S. (1994). Introduction. Dans C. S. Campbell (Éd.), Gambling in Canada : the bottom line (pp. v-x). Burnaby, CB: Simon Fraser University. 213 Voir à la page 646 dans : Petry, N. M. (2003). A comparison of treatment-seeking pathological gamblers based on preferred gambling activity. Addiction, 98, 645-655. 214 Des anecdotes, dont on ne peut pas estimer la représentativité, sont rapportées dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale. 215 Il ne s’agit pas d’une situation particulière au Québec. En 1978, l’avènement des casinos à Atlantic City a initié un vaste mouvement de légalisation des casinos près des grands centres urbains. Les courses se sont trouvées en concurrence directe avec une offre de jeu diversifiée et populaire. Ce déclin des courses de chevaux a été observé en de nombreux pays où l’opération de casinos a été autorisée. 216 (a) Loren C. Scott & Associates, Inc. (2003, June 15). The economic impact of a new racetrack on horse racing in Louisiana. Baton Rouge, LA: auteur. http://www.lorenscottassociates.com/Reports/PolicyRaceTrack.pdf (b) Okada, S. S. (2007). New York racinos : casinos of convenience. San Francisco, CA : HVS gaming services. http://www.hotelnewsresource.com/pdf/hvs2091.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 102 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 103 avait recommandé217 de ne pas tenter d’utiliser des AÉJ afin de relancer une industrie que le marché éliminait naturellement : “3.12 The Commission recommends that states should refuse to allow the introduction of casinostyle gambling into pari-mutuel facilities for the primary purpose of saving a parimutuel facility that the market has determined no longer serves the community or for the purpose of competing with other forms of gambling.” (National gambling impact study commission, 1999, page 3-18) Actuellement, les ALV sont l’activité qui capte le plus l’attention des joueurs excessifs. Les salons de jeux vont ramener cette clientèle dans les hippodromes où ils auront davantage d’occasions de subir des dommages. 4.1 Le déclin des courses de chevaux au Québec Le déclin des courses est uniformément constaté dans (1) les données financières, (2) les taux de participation révélés par les études de prévalence du jeu, ainsi que dans (3) l’assistance rapportée annuellement. 4.1.1 Les données financières Bénéficiant d’un monopole sur les paris jusqu’à l’avènement des loteries en 1970, les courses de chevaux ont connu une croissance régulière de leur revenu jusqu’en 1980 (voir Figure 61). Le premier déclin est survenu lorsque les APV illégaux ont commencé à être largement implantés218. Un second déclin, encore plus accentué, est associé à l’avènement des casinos et à l’étatisation des AÉJ (MAS + ALV). Figure 61 $400 $300 $200 $100 $0 1955-1956 1956-1957 1957-1958 1958-1959 1959-1960 1960-1961 1961-1962 1962-1963 1963-1964 1964-1965 1965-1966 1966-1967 1967-1968 1968-1969 1969-1970 1970-1971 1971-1972 1972-1973 1973-1974 1974-1975 1975-1976 1976-1977 1977-1978 1978-1979 1979-1980 1980-1981 1981-1982 1982-1983 1983-1984 1984-1985 1985-1986 1986-1987 1987-1988 1988-1989 1989-1990 1990-1991 1991-1992 1992-1993 1993-1994 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 Millions Dépense annuelle des adultes québécois dans le pari mutuel En raison de comptes publics égarés dans les rayons de la bibliothèque, il existe des données manquantes pour les années 1963-1964 et 1971-1972. 217 National Gambling Impact Study Commission. (1999, juin). National Gambling Impact Study Commission, Final report. Washington, DC: auteurs. 218 D’autres facteurs peuvent aussi avoir participé à ce déclin, notamment une perte de confiance dans l’intégrité de certaines composantes de l’industrie. Cet aspect n’a pas été analysé ici. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 103 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 104 La courbe de la dépense au jeu peut être divisée en sept intervalles : • Sans compétition jusqu’en 1970, les revenus du pari mutuel ont été en constante progression. • L’avènement des loteries de Loto-Québec en 1970 (barre colorée en noir) pourrait avoir temporairement stoppé la progression des revenus jusqu’en 19741975. • Par la suite, la progression reprend son cours jusqu’en 1980-1981. À noter que le saut de 76 millions entre 1979-1980 et 1980-1981 est un artéfact dû à un changement dans la méthode d’estimation de la dépense au jeu. • Entre 1980-1981 et 1987-1988, un premier déclin est constaté. Il pourrait s’agir d’une conséquence de l’arrivée des appareils de poker vidéo (APV) survenue à partir de juin 1976 (barre colorée en bleu) mais qui ont surtout connu une forte progression en 1982. • Entre 1988-1989 et 1991-1992, il y a une recrudescence de la dépense au pari mutuel. Il pourrait s’agir d’une réponse des parieurs au fait que le taux de remise du pari mutuel est passé de 64% en 1983 à 73% en 1987 (barre colorée en rose). Selon les appareils saisis, les APV illégaux avaient alors un taux de remise entre 54% et 72%. • Entre 1992-1993 et 1995-1996, se produit un second déclin. Le casino de Montréal a ouvert ses portes en octobre 1993 (barre colorée en rouge) et les ALV ont été implantés en juin 1994 (barre colorée en jaune). • Enfin depuis l’année 1996-1997, la dépense au jeu a ré-augmenté pour se stabiliser depuis. En 1996, le gouvernement du Québec a choisi d’implanter un grand nombre d’appareils dans des salons de jeu attenant aux hippodromes du Québec (barre colorée en orange). À noter que l’avènement du bingo en réseau (barre colorée en vert) ne semble pas avoir eu d’impact sur le pari mutuel. Jusqu’à présent, ces clientèles ont été manifestement séparées. 4.1.2 Les taux de participation révélés par les études de prévalence du jeu Malheureusement, la première étude québécoise de la prévalence du jeu pathologique, réalisée en 1989, n’a pas détaillé les comportements de jeu219. Les données de la seconde, réalisée en 1996, sont illustrées dans Figure 63. Un dernier estimé a été produit lors de l’étude de prévalence du jeu réalisée en 2002 (voir Figure 64). 219 L’étude de prévalence de 1989 a été une des premières réalisées au monde, et ce détail ne faisait pas alors partie des procédures standards. Voir : Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gambling in Quebec. Canadian Journal of Psychiatry, 36(10), 732-734. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 104 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 105 Déjà en 1996, la participation annuelle s’avérait très faible par rapport aux personnes qui avaient déjà parié aux courses de chevaux. Seulement 15% des amateurs220 se rendaient encore à l’hippodrome au moins une fois par année. À peine 3% des amateurs y allaient régulièrement221. En 2002, la clientèle avait chuté de moitié depuis 1996. 4.1.3 Assistance dans les hippodromes québécois Les données de la Commission des courses de chevaux du Québec, puis de la RACJ, témoignent de la baisse d’assistance aux courses de chevaux. Une désertion particulièrement marquée s’est produite à l’avènement des casinos, en octobre 1993, et à l’implantation des ALV, en juin 1994. L’ajout d’ALV dans les hippodromes a peut-être entraîné un regain, quoique ce phénomène ne semble pas avoir persisté. Le nombre d’ALV aux hippodromes a peut-être été insuffisant pour soutenir cette relance. Figure 62 220 C’est-à-dire les personnes qui y ont parié au moins une fois dans leur vie. 221 C’est-à-dire au moins une fois par mois. 1997-1998 1996-1997 1995-1996 1994-1995 1993-1994 1992-1993 1991-1992 1990-1991 1989-1990 1988-1989 2 500 000 2 000 000 1 500 000 1 000 000 500 000 0 1987-1988 N. d'entrées Assistance dans les hippodromes du Québec Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 105 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 106 Figure 63 Mensuelle Hebdomadaire 13,4% 8,6% 4,2% 2,3% 0,1% 11,3% 7,1% 3,3% 2,2% 1,2% 4,8% 1,1% 0,1% 0,1% 0,0% Jeux d'adresse Spéculation boursière Jeux de dés Événements sportifs 19,8% 12,2% 4,4% 1,6% 0,2% 24,7% Courses d'animaux Casino Annuelle 3,8% 0,7% 0,4% 0,0% 37,8% Participation à vie 16,4% 1,0% 0,2% 0,0% 4,4% 1,6% 0,2% 21,0% AÉJ Bingo Cartes 15,1% 5,1% 3,0% 0,2% 40,5% 40,9% 18,1% 5,3% 2,6% 0,1% 2,1% 40,2% 67,0% 47,1% Loteries 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 93,2% 88,0% Taux de participation à différentes activités de jeu au Québec en 1996 Quotidienne En 1996, la population adulte québécoise participait peu aux courses de chevaux. Bien que le quart de la population y avaient déjà parié, seulement 3,8% y sont retournés cette année-là. À peine, 0,7% de la population fréquentait les hippodromes mensuellement; 0,4% y pariait à chaque semaine222. 222 Ces données n’étant pas publiées dans le rapport de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique au Québec, elles proviennent de l’actuation qui a été faite de cette étude. (a) Voir l’annexe G dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. (b) Le rapport initial : Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 106 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 107 Figure 64 70% 65,3% 68,1% 80% 73,1% Taux de participation à différentes activités de jeu au Québec en 2002 Annuelle 21,3% 1,3% AÉJ (ALV + MAS) 1,1% 7,8% ALV 0,2% 16,3% Casino machines à sous 0,0% 3,1% Keno 2,7% 0,1% Poker 2,9% 0,1% Blackjack 0,1% 2,4% Roulette 0,2% 7,5% Casino jeux de table 17,6% 0,4% Casino total 1,9% 0,2% Course de chevaux 9,0% 0,5% 2,4% 1,8% Bingo Loterie instantanée Loterie quotidienne Loterie ordinaire 0% Loterie sportive 10% 8,2% 37,0% 9,2% 20% 3,3% 30% 29,9% 32,6% Loterie total 40% 33,7% 50% Jeux étatisés 60% Hebdomadaire En 2002, la fréquentation annuelle des hippodromes avait diminué de moitié depuis 1996 223. Malheureusement, la trop faible proportion empêche de conclure rasionnablement quant à la fréquentation hebdomadaire. Néanoins, celle-ci apparaît aussi diminuée de moitié. 223 Les taux de pénétration de cette étude sont valides bien que l’échantillon est surreprésenté par des personnes de scolarité collégiale ou universitaire. Voir : (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. (b) Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 107 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 108 4.2 Un rapprochement anticipé Contrairement à la recommandation de la NGISC, le projet des salons de jeu va rapprocher les ALV des hippodromes québécois. En très peu de temps, le nombre d’appareils qu’on y trouve va quadrupler (voir Tableau 21). L’interaction entre les activités de jeu est un facteur du concept d’accessibilité. Dans cette perspective, ce projet constitue une augmentation de 342% de l’accessibilité croisée. Tableau 21 Présence des ALV dans les hippodromes du Québec Hippodrome Situation actuelle Situation prévue Augmentation Montréal 200 1300 550% Québec 100 335 235% Trois-Rivières 65 200 208% Aylmer 65 65 0% Total 430 1900 342% Le croisement de deux activités de jeu potentiellement pathogènes peut multiplier la dangerosité. • La plus grande densité de l’offre de jeu peut inciter plus de gens à jouer, ou à jouer davantage, d’où un risque accru de développer une dépendance envers l’une ou l’autre des activités. • Un joueur excessif à une activité moins dommageable peut en venir à participer plus fréquemment à l’activité la plus dommageable, et cela sans nécessairement délaisser la première activité. 4.3 Le revenu plus élevé des ALV situés dans les hippodromes du Québec Au Québec, les ALV dans les hippodromes produisent un revenu moyen de 102 093 dollars comparativement à 74 475 dollars pour les autres sites. Il s’agit d’un avantage de 37%; ce qui représente 27 618 dollars en moyenne 224. Dans un tel cas, selon les données de 2002, la commission au détaillant225 sera de 22 460 dollars par unité. Pour 224 Données calculées à partir du document : KPMG. (2004). Current and potential racinos in Canada. http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf À titre de comparaison, les données de 2004 pour l’hippodrome de Trois-Rivières proviennent d’un rapport qui a été présenté au député André Gabias : Caron, C. et al. (2004). La survie des courses à Trois-Rivières. Trois-Rivières, QC : Groupe de travail Hippodrome de Trois-Rivières 2004. 225 Cette commission est actuellement de 22% du revenu. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 108 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 109 1900 ALV, le revenu annuel du gestionnaire des hippodromes pourrait atteindre 43 millions de dollars. Cette hypothèse est vrai dans la mesure où le rendement plus élevé est la conséquence d’un environnement qui stimule la dépense sur ALV. Les présentes données ne permettent cependant pas de vérifier ou d’infirmer cette hypothèse. Figure 65 Revenu annuel net moyen par ALV Dépense au jeu sur les ALV selon leur emplacement $120 000 $100 000 $80 000 $60 000 $40 000 $20 000 $0 Aylmer Montréal Québec Trois-Rivières ALV hors hippodromes Hippodrome où les ALV sont situés 2002-2003 2004 4.4 Les juridictions qui combinent l’exploitation des AÉJ et des courses de chevaux Le mot racino226 désigne un champ de courses qui héberge des AÉJ. Les hippodromes sont des champs de courses où des chevaux courent. Sinon, il s’agit de courses de chiens. L’objectif habituel est de sauver ces établissements de la faillite en espérant que les ALV, en rapatriant une clientèle perdue, vont entraîner une relance du pari mutuel. À défaut d’une relance, une partie des profits des ALV peut servir à compenser le manque à gagner du pari mutuel. La compagnie Casino City a dressé une liste des racinos à travers le monde. Il n’est pas certain à quel point cette liste est exhaustive227. Elle donne néanmoins une bonne idée de la répartition de ce marché (voir Tableau 22). Ainsi, 59% des racinos sont situés aux États-Unis et 34% au Canada. Il s’agit d’un phénomène principalement nord-américain. En Amérique du Nord, 21 juridictions ont implanté des parcs d’AÉJ directement sur les sites des champs de course. Les dates d’implantation ont été retracées pour 17 d’entre elles (voir Tableau 23). 226 Dans le jargon des spécialistes du jeu, un champ de courses, qui héberge un grand nombre d’AÉJ, est appelé « racino ». Il s’agit de la contraction du mot anglais, racing, et du mot casino. 227 En l’occurrence, il manque des informations sur l’état de Maine qui vient d’approuver les racinos sur son territoire. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 109 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 110 Tableau 22 Liste des racinos à travers le monde Nombre de racinos Total Marché Chevaux Chiens États-Unis 32 19 51 59% Canada 29 0 29 34% Australie 1 0 1 1% Royaume-Uni 0 1 1 1% France 1 0 1 1% Autriche 1 0 1 1% Colombie 1 0 1 1% 0 Argentine 1 1 1% Total 66 20 86 100% Selon le site http://www.casinocity.com/casinos.html Consulté le 18 février 2007 Au Canada, sept provinces exploitent des ALV dans les hippodromes. Au Québec des ALV sont situés dans quatre hippodromes depuis 1996 (voir Tableau 21). Tableau 23 Les juridictions nord-américaines qui exploitent des racinos Date Juridiction Selon www.casinocity.com/casinos.html 1990-06-09 Virginie Occidentale Test pilote; implantation réelle en 1994228 1992 Louisiane Seulement 221 ALV dans 3 hippodromes229 1992-09 Rhode Island 1 courses de chiens 1992-09 Manitoba 1 hippodrome 1994 Virginie Occidentale 2 hippodromes + 2 courses de chiens 1995 Iowa 1 hippodrome + 2 courses de chiens 1995-12 Delaware 3 hippodromes 1996 Québec 4 hippodromes 1996-10 Alberta 3 hippodromes 1998-12 Ontario 17 hippodromes 1999 Nouveau-Mexique 5 hippodromes 228 Voir à la page 532 dans : Thalheimer, R. (1998). Parimutuel wagering and video gaming: a racetrack portfolio. Applied economics, 30(4), 531-544. 229 Voir à la page 11 dans Mulier, M., & Pulli, J. (2004, December). 2004 Update of U.S. racino legislation. University of Arizona : Race track industry program. For Harness tracks of America and thoroughbred racing associations. http://cals.arizona.edu/rtip/STUDENT/Research/Student/PDF/Racino%20legislation%202004%20 update%20mulier%20and%20pulli.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 110 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 111 Tableau 23 Les juridictions nord-américaines qui exploitent des racinos Date Juridiction Selon www.casinocity.com/casinos.html 2002-02 Louisiane Implantation massive d’ALV 2004 New York 8 hippodromes 2004 Colombie-Britannique 1 hippodrome 2005 Île-du-Prince-Édouard 2 hippodromes 2005-11 Maine Non répertorié 2005-10-17 Oklahoma 3 hippodromes 2006 Pennsylvanie 2 hippodromes 2006-07-23 Saskatchewan 1 hippodrome ? Arkansas 1 courses de chiens ? Floride 3 hippodromes + 11 courses de chiens ? Minnesota 1 hippodrome ? New Hampshire 1 hippodrome + 2 courses de chiens 4.5 Impact des AÉJ sur le pari mutuel Les AÉJ ne font pas qu’apporter des revenus supplémentaires aux hippodromes. Vraisemblablement, ils peuvent autant stimuler la dépense au pari mutuel qu’une dépense additionnelle dans les ALV. Si ces revenus additionnels proviennent surtout des joueurs excessifs, ceux-ci signifient nécessairement une hausse des dommages subis. 4.5.1 La situation aux États-Unis Aux États-Unis, à l’exception de la Louisiane, les AÉJ ont tendance à être installés dans les hippodromes des états qui ont choisi de ne pas beaucoup investir dans les casinos. En maintenant le principe de la concentration des AÉJ dans de grandes surface de jeu, les hippodromes offrent un environnement qui constitue la meilleure option de remplacement. Au Delaware, en Pennsylvanie et au Rhode Island, les états doivent concurrencer d’immenses casinos installés au New Jersey et au Connecticut. L’Iowa est confronté au phénomène des casinos flottants du Mississippi. Bien qu’il y soit associé, le NouveauMexique réagit à l’émergence de nombreux casinos amérindiens. L’état de New York a vu des casinos canadiens venir s’installer à sa frontière. Dans ces états américains, contrairement aux provinces canadiennes, les AÉJ ne sont pas tant utilisés pour sauver des hippodromes que pour contrer l’offre de jeu de juridictions voisines. Ce sont les hippodromes qui mettent leur équipement au profit des AÉJ. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 111 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 112 4.5.1.1 La Virginie Occidentale En Amérique du Nord, l’état de la Virginie Occidentale a initié le mouvement des racinos. Les données, publiées par ce gouvernement, illustrent une croissance régulière du pari mutuel jusqu’en 1986, avec une décroissance subséquente jusqu’en 1997. Ce déclin est associé à l’incapacité des hippodromes à rivaliser seuls des casinos qui exercent une attraction plus puissante sur les joueurs. L’implantation subséquente. des ALV dans les hippodromes en 1994 coïncide, quatre ans plus tard230, avec un renversement de cette tendance. Pendant cinq ans, les montants misés au pari mutuel ont connu une croissance qui a été proportionnelle231 à celle de la dépense au jeu sur les ALV (Voir Figure 66). Ainsi, pour les gestionnaires des hippodromes, l’intérêt d’offrir des ALV est double puisque ces appareils produisent des profits tout en stimulant celui du pari mutuel. Figure 66 Millions Montants Montants misés au pari mutuel en Virginie Occidentale et montants dépensés sur les AÉJ situés aux hippodromes $1 200 $1 000 $800 $600 $400 $200 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 $0 Pari mutuel ALV (Montants divisés par 10) 4.5.1.2 L’Iowa Une situation similaire est constatée en Iowa. L’avènement des AÉJ aux hippodromes a coïncidé avec une hausse de la dépense au pari mutuel. Dans le cas présent, les données financières permettent de constater que l’impact des AÉJ est essentiellement observable dans le pari hors piste, et que les AÉJ ne sont pas parvenu à freiner 230 Ce délai a créé un doute initial quant à l’efficacité des racinos à sauver les hippodromes de la faillites. Voir dans : Garrett, T. A., & Sobel, R. S. (1999). Betting on the future: policy issues and implications for the West Virginia lottery. The West Virginia public affairs reporter, 16(2), 2-5. http://www.polsci.wvu.edu/ipa/par/report_16_2.pdf 231 Pour mieux illustrer cette relation, l’échelle des montants misés sur les ALV a été divisée par 10. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 112 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 113 l’important déclin de l’industrie locale des courses. De plus, la stimulation du pari mutuel semble s’estomper après quelques années. Figure 67 Millions Montants Montants misés au pari mutuel en Iowa et montants dépensés sur les AÉJ situés aux hippodromes $400 $350 $300 $250 $200 $150 $100 Courses Pari en ligne Pari mutuel (total) 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 1989 1988 1987 1986 1985 $50 $0 AÉJ à l'hippodrome 4.5.1.3 L’état de New York Dans l’état de New York, l’arrivée des ALV en 2004 a coïncidé avec une augmentation de la clientèle des hippodromes, et conséquemment un arrêt de la chute du revenu du pari mutuel, voire un retour à la croissance. Bien que les nouveaux clients seraient surtout attirés par les ALV, ceux-ci profiteraient néanmoins de l’occasion pour dépenser aussi au pari mutuel. À noter que les visiteurs additionnels proviennent de la population locale car les racinos newyorkais ne parviennent pas à drainer des joueurs sur une longue distance232. Ces racinos ne sont pas une menace concrète qui pourrait justifier le développement des salons de jeux au Québec. 4.5.1.4 La Louisiane Après le Nevada, la Louisiane est l’état américain qui a distribué des AÉJ le plus largement sur son territoire. On les retrouve depuis longtemps dans des casinos flottants (octobre 1993), charitables ou amérindiens ainsi que, depuis 1994, dans des salons de paris hors piste, bars, restaurants, hôtels et haltes-routières. En octobre 1999, des casinos d’État, sur terre ferme, ont commencé à offrir des AÉJ qui semblent s’être accaparés, sans autre impact, d’une partie du marché des appareils de 232 Voir aux pages 8 et 2 dans : Okada, S. S. (2007). New York racinos : casinos of convenience. San Francisco, CA : HVS gaming services. http://www.hotelnewsresource.com/pdf/hvs2091.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 113 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 114 poker vidéo distribués dans les bars, restaurants, hôtels et haltes-routières (voir Figure 68). Une fois le partage effectué, les deux groupes d’appareils ont continué à progresser au rythme des AÉJ de l’offre proximale auparavant. Figure 68 Millions Montants misés au pari mutuel en Louisiane et montants dépensés à d'autres activités de jeu $1 600 Casinos flottants $1 400 $1 200 $1 000 $800 $600 $400 $200 Poker vidéo Pari m utuel Casinos d'État Casinos am érindiens AÉJ (racino) Casinos charitables $0 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 En février 2002, les AÉJ ont commencé à être disponibles directement sur le terrain des hippodromes, alors qu’ils l’étaient depuis 1994 dans les salons de paris hors piste. Cet ajout ne semble pas avoir encore bénéficié au pari-mutuel. Par contre, comme en témoigne la similarité des pentes, les casions flottants ont enregistré en même temps une diminution de leurs revenus. En bref, le marché de la Louisiane s’est surtout développé en fonction des casinos flottants et, à un moindre degré, des AÉJ distribués dans les bars, restaurants, hôtels et haltes-routières. Sans nuire au pari mutuel, ni aux casinos charitables ou amérindiens, les casinos d’État ont entraîné un déplacement plausible de la clientèle des AÉJ de l’offre proximale. Les AÉJ aux hippodromes ont déplacé plausiblement une clientèle plus habituée aux casinos flottants. La Louisiane est ainsi l’exemple d’un déplacement de clientèle sans impact sur le parimutuel. Sinon, les AÉJ ne sont pas encore à l’hippodrome depuis assez longtemps pour avoir eu un impact. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 114 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 115 4.5.1.5 Le Delaware Au Delaware, les AÉJ dans les hippodromes n’ont pas davantage eu d’impact sur un pari mutuel qui a continué son déclin. La contribution des ALV, servant à bonifier les bourses offertes aux coureurs, permet alors une survie financière artificielle puisqu’elle ne relance pas l’industrie des courses. Figure 69 Millions Montants misés au pari mutuel au Delaware et montants dépensés sur les AÉJ situés aux hippodromes $700 $600 $500 $400 $300 $200 $100 $0 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Courses Pari hors piste Pari mutuel (total) ALV 4.5.2 La situation au Canada Au Canada, les provinces ne sont pas confrontées à une importante rivalité de la part de l’offre de jeu de juridictions voisines. Les ALV sont essentiellement utilisés pour sauver l’industrie des courses de chevaux. Tableau 24 Développement de l’offre de jeu sur AÉJ au Canada Date d'implantation Terre-Neuve-et-Labrador Île-du-Prince-Édouard Nouvelle-Écosse Nouveau-Brunswick Québec Ontario Manitoba Saskatchewan Alberta Colombie-Britannique ALV Racino Casino d'état 1991 1991 1991 1990 1994 --1991 1993 1992 --- --2005 ----1996 1998 1994 2006 1996 2004 ----1995 --1993 1994 1993 1996 1996 1986 Casinos amérindiens ------Oui --1994 2002 1996 ----- Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 115 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 116 Plusieurs provinces canadiennes, qui ont investi dans des racinos, ont aussi constaté une stimulation du pari mutuel. Les revenus du pari-mutuel des dix provinces canadiennes sont affichés dans les figures suivantes, selon l’échelle du revenu annuel. Figure 70 Millions Revenus du pari-mutuel $1 350 $1 300 $1 250 $1 200 $1 150 $1 100 $1 050 Ontario 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 $1 000 Les triangles représentent l’année d’implantation des casinos, et les carrés indiquent quand des AÉJ ont été installés dans les hippodromes (colonne Racino du Tableau 24). Figure 71 Millions Revenus du pari-mutuel $350 Québec $300 Colom bieBritannique $250 $200 $150 Alberta 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 $100 Au Québec (bleu pâle), en Ontario (jaune), et en Alberta (vert), il est clair que l’arrivée des AÉJ a relancé une dépense décroissante au pari-mutuel. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 116 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 117 Figure 72 Millions Revenus du pari-mutuel $60 $50 Manitoba $40 $30 Saskat-chew an $20 Nouvelle-Écosse $10 2005 2004 2003 2002 2001 2000 1999 1998 1997 1996 1995 1994 1993 1992 1991 1990 $0 Au Manitoba (olive), cet impact semble avoir un peu tardé. Par ailleurs, les racinos sont encore trop récents en Colombie-Britannique (rose), à l’Île-du-Prince-Édouard (mauve) et en Saskatchewan (en bleu) pour que leur impact puisse être évalué. Nulle part, les AÉJ dans les hippodromes ont rivalisé le pari-mutuel. Il n’y a pas eu de déplacement de la dépense au jeu. Au contraire, ceux-ci ont renversé une chute des revenus. En rappel : la hausse des revenus n’est pas attribuable aux montants insérés dans les appareils. Il s’agit bien d’une hausse des sommes pariées sur les courses de chevaux. Les données canadiennes indiquent toutefois qu’il n’y a pas que les AÉJ aux hippodromes qui pourraient stimuler le pari mutuel. Sans apport d’AÉJ, l’ouverture de casinos en Ontario (jaune) a coïncidé avec une importante augmentation de la dépense aux courses de chevaux. Celle-ci n’a cependant duré que deux ans. En Saskatchewan (bleu), une réponse identique a été constatée pendant six ans. En contrepartie, l’ouverture de casino en Nouvelle-Écosse (rouge) pourrait avoir eu un effet contraire de très courte durée. Sinon, au Nouveau-Brunswick et à Terre-neuve, où rien n’a changé, le pari mutuel n’a pas connu une très grande fluctuation. 4.6 La dangerosité des activités de jeu Sans étude expérimentale, il n’est pas possible de séparer deux composantes de la dangerosité des activités de jeu. En effet, une activité peut être dangereuse parce qu’elle a le potentiel de créer une dépendance pathologique à son égard. En contrepartie, elle peut aussi être dangereuse parce qu’elle attire vers elle des personnes qui éprouvent déjà des problèmes de jeu et qu’elle leur cause des dommages plus intenses. Il existe très peu de données permettant d’examiner la dangerosité croisée des AÉJ et des hippodromes. Au Québec, elles se situent dans (1) les données de l’étude de prévalence du jeu pathologique réalisée en 1996, (2) les appels à la ligne téléphonique « Jeu : aide et référence », et (3) les données de l’ESCC, et (4) le profil des demandeurs d’aide clinique au CQEPTJ entre 1996 et 1999. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 117 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 118 4.6.1 Les données de l’étude de prévalence du jeu pathologique de 1996 Les taux de prévalence témoignent globalement de cette double dangerosité sans qu’il ne soit possible de déterminer comment une dépendance s’est instaurée. Ceux-ci décrivent néanmoins l’ampleur démographique des dommages. Dans la Figure 73, les taux de prévalence à vie du jeu pathologique ont été calculés en ne considérant que les joueurs à chaque activité. Lorsque le taux est très faible, l’estimation implique un très petit nombre d’observations au numérateur. Ces taux doivent donc être examinés prudemment. Parmi les joueurs annuels, les courses de chevaux et les jeux d’adresse sont les plus associés aux dommages. En 1996, les AÉJ (MAS + ALV) n’étaient implantées que depuis environ deux années. Il était peut-être encore un peu tôt pour en mesurer l’impact. Néanmoins, parmi les joueurs mensuels sur AÉJ, un joueur sur cinq éprouvait ou avait déjà éprouvé des problèmes de jeu. Figure 73 Prévalence à vie (SOGS 5+) du jeu pathologique en fonction du degré de participation à différentes activités de jeu 25% 20% 15% 10% 5% 0% Courses Événemen Jeux Spéculatio Jeux de d'animaux ts sportifs d'adresse n dés Loteries Cartes Bingo AÉJ Casino Participation à vie 2,8% 5,8% 3,7% 5,5% 2,2% 4,7% 9,6% 13,9% 2,3% Annuelle 2,8% 9,6% 5,6% 7,1% 3,7% 14,9% 7,8% 14,3% 2,7% Mensuelle 3,3% 8,6% 8,0% 20,2% 3,7% 18,3% 3,6% 4,5% Les données précédentes ne reflètent pas nécessairement la situation actuelle en 1996. Dans la Figure 74, les taux de la prévalence actuelle, établie sur 12 mois, sont présentés. Parmi les personnes qui ont déjà pariées au courses, seulement 1,6% d’entre elles ont été dépistées comme étant des joueurs pathologiques. Par contre, si on ne considère que ceux qui ont été parier récemment, au moins une fois dans l’année, cette proportion était de 7,6%. Sans équivoque, des joueurs pathologiques se retrouvent aux champs de courses dans une proportion nettement plus grande que celle que l’on retrouve dans la population adulte en générale. Dans un tel cas, les hippodromes exercent une attraction sur les joueurs pathologiques. Lors de l’étude de 1996, malgré leur récence, les AÉJ ont aussi témoigné de leur pouvoir d’attirer ou de créer des joueurs pathologiques. La revue de littérature présentée dans le Chapitre 3 a établi plus clairement la dangerosité des AÉJ dans des marchés plus matures. Malheureusement, la taille de l’échantillon n’a pas permis d’examiner l’interaction entre la dangerosité des AÉJ et celle des hippodromes. En raison de difficultés techniques, les données de l’étude de 2002 ne permettent pas une comparaison similaire. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 118 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 119 Figure 74 Prévalence actuelle (SOGS 5+) du jeu pathologique en fonction du degré de participation à différentes activités de jeu 10% 8% 6% 4% 2% 0% Courses Événemen Jeux Spéculatio Jeux de d'animaux ts sportifs d'adresse n dés Loteries Cartes Bingo AÉJ Casino Participation à vie 1,2% 2,6% 1,6% 2,5% 1,4% 1,6% 3,7% 3,9% 1,9% Annuelle 1,3% 5,2% 2,8% 3,7% 3,4% 7,6% 3,4% 6,2% 2,2% Mensuelle 1,6% 8,4% 7,6% 8,6% 0,4% 4,6% 3,6% 0,2% 4.6.2 Les appels à la ligne téléphonique Jeu : aide et référence Dès l’implantation du casino de Montréal, en octobre 1993, le Centre de référence du Grand Montréal a obtenu le mandat de recevoir les appels des personnes désirant en savoir plus sur le jeu. Depuis l’année 1995-1996, tout en préservant l’anonymat des appelants, cet organisme a maintenu un registre de la nature des appels. La majeure partie des appels a été faite par des joueurs préoccupés par leurs habitudes de jeu. En examinant ces seuls appels, il est possible de constater que les préoccupations des joueurs ont surtout concerné les ALV, et à un degré moindre les MAS (voir Figure 75). Figure 75 Activités de jeu motivant les joueurs à appeler la ligne Jeu: aide et référence Nombre d'appels 6 000 5 000 ALV 4 000 Machines à sous Loteries 3 000 Casino - jeux de table 2 000 Courses de chevaux 1 000 0 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 Année se term inant le 31 m ars Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 119 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 120 Ces données témoignent des sources des problèmes dans la mesure où ces activités de jeu ont été populaires. La quasi absence233 de préoccupation à l’égard des courses de chevaux ne signifie pas que cette activité soit moins dangereuse. Elle est la conséquence crédible du fait que les joueurs sont ailleurs. 4.6.3 Les données de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes – santé mentale et bien-être Entre mai et décembre 2002, Statistique Canada234 a procédé à la seconde phase d’une vaste enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. À cette occasion, des données ont été recueillies en ce qui concerne la pratique et les problèmes de jeu. Dans cette section, nous présentons des analyses réalisées avec un fichier de microdonnées à grande diffusion qui garantit l’anonymat des participants. Réalisées indépendamment de Statistique Canada, ces analyses sont les nôtres. Durant cette enquête, 36 984 citoyens canadiens de 15 ans ou plus ont été interrogés lors d’une entrevue réalisée à domicile235. L’inclusion de personne de moins de 18 ans entraîne nécessairement des taux de prévalence légèrement moins élevés que ceux publiés dans des études provinciales réalisées à la même époque. En effet, ces personnes n’ont pas un accès libre au jeu. Parmi les participants, 5 332 étaient des résidents du Québec. Il est possible d’analyser ce sous-échantillon séparément. C’est le cas des résultats rapportés dans les figures où le titre indique « Québec uniquement ». Sinon, les données des citoyens canadiens sont réparties en deux groupes selon que ces personnes résident dans une province où les ALV sont distribués comme au Québec, c’est-à-dire surtout dans les bars et un peu dans les hippodromes, ou dans une province où les ALV sont distribués uniquement dans les hippodromes. Au Canada, seules l’Ontario et la Colombie-Britannique ont limité les ALV aux hippodromes. Les huit autres provinces les ont largement distribués dans les bars et les hippodromes. 4.6.3.1 Nos définitions Dans cette enquête, le jeu pathologique a été évalué en fonction d’une version modifiée236 de l’Indice canadien du jeu excessif (ICJE). Les personnes sont conséquemment classifiées parmi l’une des cinq catégories possibles (voir Tableau 25). 233 Entre 7 et 34 appels par année. 234 Statistique Canada. (2004). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes : cycle 1.2 – Santé mentale et bien-être. Guide du fichier de microdonnées à grande diffusion. Ottawa, Canada : auteur. 235 En raison de l’éloignement ou de difficultés particulières, 14% des entrevues ont cependant été réalisées au téléphone. 236 Approuvée par les concepteurs de l’outil psychométrique. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 120 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 121 Si le joueur s’identifie comme une personne qui ne joue pas, elle est classifiée ainsi quels que soient ses comportements. Les catégories peuvent être désignées différemment selon le risque ou le dommage associés au jeu. Dans ces annexes, lorsque mesurée par l’ICJE, un joueur excessif est une personne dont le score est supérieur à trois. Ce groupe englobe ainsi les joueurs à risque modéré et les joueurs avec problème de jeu. Dans les figures suivantes, l’expression « risque modéré ou plus » désigne les joueurs excessifs. Tableau 25 Catégories de l’Indice canadien du jeu excessif Score Échelle Auto-évalué 0 1-2 3-7 8 ou + Risque Non joueur Aucun risque Faible risque Risque modéré Risque sévère Dommage Non joueur Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Les réponses se réfèrent uniquement aux événements survenus au cours des 12 derniers mois. Les données décrivent conséquemment les problèmes actuels de jeu, et non les problèmes antérieurement vécus. En conformité avec la formulation des questions de cette enquête, un joueur régulier est une personne qui a parié à une activité au moins une fois par mois. Un joueur occasionnel a parié au moins une fois dans l’année, mais moins d’une fois par mois. Un non joueur est la personne qui n’a pas parié au cours des 12 derniers mois; ce qui n’implique pas qu’elle n’a jamais participé à cette activité au cours de sa vie. Les dommages ici constatés ne concernent que les dommages qui se concrétisent actuellement et ne révèlent en rien les dommages passés subis par la population si ceux-ci sont survenus plus d’un an avant l’enquête. 4.6.3.2 Qualité de nos estimations Prenant en considération le coefficient de variation des estimations, Statistique Canada demande que les résultats compilés soient accompagnés d’un suffixe (les lettres E ou F) pour indiquer quand la taille des échantillons rend ces estimations incertaines. La présente analyse s’étant limité à l’examen du fichier de microdonnées à grande diffusion, et les tableaux de CV n’étant pas disponibles pour les variables étudiées, nous avons adopté d’autres critères en remplacement. Pour cette raison, les estimations, ici présentées, sont utiles à des fins de recherche, mais elles ne peuvent pas remplacer les études ciblées nécessaires pour concevoir les services à rendre à la population. Des pourcentages sont présentés seulement si la banque de données contient au moins 30 observations pour le dénominateur237 et au moins 10 observations pour le 237 Une observation est une personne interviewée. Tel que recommandé par Statistique Canada, la validité des pourcentages a d’abord été vérifiée en fonction des effectifs non pondérés. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 121 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 122 numérateur238. Lorsque l’aire d’un histogramme est affichée en pointillée, cela signifie que le numérateur a été estimé avec au moins 10 observations239. Sinon, lorsque l’aire est de couleur unie, il y a au moins 30 observations au numérateur. 4.6.3.3 Les taux de prévalence de base Les taux de prévalence du jeu pathologique, pour la population en général, sont indiqués dans le Tableau 26. Ces taux constituent une référence de base. Les taux canadiens sont présentées séparément selon le mode de distribution des ALV. Pour l’ensemble de la population, il n’existe pas de différence au Canada entre les provinces lorsqu’elles sont partitionnées en fonction de leur mode de distribution des ALV. Tableau 26 Prévalence des problèmes de jeu parmi la population de 15 ans ou plus Canada 48,8% 48,3% 48,5% Sans problème 46,6% 46,8% 46,7% Faible risque 2,7% 2,9% 2,8% Risque modéré 1,4% 1,5% 1,5% Avec problème 0,5% 0,5% 0,5% Risque modéré ou plus 1,9% 2,0% 2,0% 49,4% 46,6% 2,0% 1,3% 0,3% 1,6% Non joueur Surtout dans les bars Uniquement dans les hippodromes Total Québec Surtout dans les bars Par rapport à l’ensemble des provinces canadiennes qui distribuent surtout leurs ALV dans les bars, le Québec a un taux de prévalence du jeu excessif240 qui est moindre, quoique la différence n’est pas statistiquement significative241. Cette hypothèse reste incertaine. Les modes de distribution des AÉJ au Canada 238 Le critère d’un numérateur au moins égal à 10 garantit qu’aucune pourcentage n’est artificiellement gonflé en raison d’une ou deux observations qui auraient un poids disproportionné. Ce risque est considérablement contrôlé avec l’exigence d’au moins dix observations au numérateur. 239 Lorsqu’il y a au moins 30 observations au numérateur, l’estimation du pourcentage est excellente. Entre 29 et 10 observations au numérateur, l’estimation est raisonnable pour comparer des groupes bien qu’il reste imprudent d’utiliser ces proportions lorsqu’un calcul exige une grande précision, par exemple si la dangerosité d’un dosage peut être influencée par de petites variations de la quantité. Dans un tel cas, des enquêtes additionnelles, mieux ciblées, sont nécessaires. 240 Pour le Québec, la catégorie « Avec problème de jeu » a été estimée avec 21 observations au numérateur. Statistique Canada a accolé le suffixe E à la catégorie des joueurs à risque modéré et celle des joueurs avec problème de jeu. 241 Logiciel R (2.2.0), prop.test, p = ,1008. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 122 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 123 L’Ontario et la Colombie-Britannique ont choisi de n’implanter des AÉJ que dans les hippodromes ou les casinos. Les huit autres provinces canadiennes ont distribué la majorité de leurs AÉJ dans les bars, et une minorité dans des hippodromes ou des casinos. Les données de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, réalisée par Statistique Canada en 2002, permet alors de comparer ces deux modes de distribution des AÉJ. 4.6.3.4 La prévalence des problèmes de jeu sur ALV L’examen de l’échantillon canadien témoigne d’une dangerosité nettement plus grande des ALV lorsqu’ils sont distribués dans les bars et les hippodromes. Tandis que la proportion de joueurs excessifs est plus élevée chez les joueurs réguliers (31%), cette proportion est moindre chez les joueurs occasionnels (5%) ou chez ceux qui ne jouent pas sur les ALV (1%) (voir Figure 76)242. Ces données sont conformes avec le constat selon lequel les ALV captent puissamment l’intérêt des joueurs excessifs. Chez les joueurs réguliers, il y a 16% de joueurs excessifs sur les ALV lorsque ceux-ci ne sont distribués que dans les hippodromes, et pas ailleurs. Lorsque les ALV sont distribués dans les bars et hippodromes, on retrouve 31% de joueurs excessifs parmi les joueurs réguliers sur ALV. C’est presque le double. Ce constat n’est pas favorable au maintien d’un grand nombre d’ALV dans les bars, là où des salons de jeux seront implantés. Figure 76 Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la fréquence de jeu sur ALV, et du type de distribution des ALV ( Statistique Canada, 2002, ESCC ) Catégories de l'ICJE Hippodromes uniquement 1,8% Ne joue pas 8,5% Jeu occasionnel 15,7% Risque modéré ou + Jeu régulier Surtout dans les bars 0,7% Ne joue pas Jeu occasionnel 4,6% 30,9% Jeu régulier Parmi les provinces qui distribuent leurs ALV surtout dans les bars, en ce qui concerne le jeu excessif sur ALV, le Québec ne se distingue pas parmi les autres provinces (voir Figure 77)243. On y observe un profil des taux de prévalence statistiquement identique. 242 Logiciel R, prop.test (deux groupes séparés), comparaison « surtout dans les bars » c. « hippodromes uniquement » : joueurs réguliers (p = ,0154), joueurs occasionnels (p = ,0070), non joueurs sur ALV (p = ,0000). 243 Logiciel R, prop.test (un groupe dans une population), comparaison « Québec » c. « Canada – surtout dans les bars » : joueurs réguliers (p = ,6640), joueurs occasionnels (p = ,4611), non joueurs sur ALV (p = ,8592). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 123 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 124 Dans cette figure et dans les suivantes, les statistiques concernant le Québec présentent aussi des données pour la catégorie des joueurs à faible risque. Figure 77 Catégories de l'ICJE Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la fréquence de jeu sur ALV ( Statistique Canada, 2002, ESCC, Québec uniquement ) 33,4% Risque modéré ou + 5,8% 0,7% 21,6% Faible risque 7,0% 1,3% Ne joue pas Joueur occasionnel Joueur régulier sur ALV 4.6.3.5 La prévalence des problèmes de jeu aux courses de chevaux L’analyse ne permet pas de constater de différence de jeu excessif chez les parieurs réguliers aux courses de chevaux, quoique cette prévalence soit supérieure chez les joueurs occasionnels (13,1%) dans les hippodromes là où des ALV sont aussi distribués largement dans les bars (voir Figure 78). En ce sens, la présence des ALV dans les bars pourrait inciter les joueurs pathologiques qui y sont accrochés à parier aussi occasionnellement sur les courses de chevaux. Dans le même sens, une plus grande prévalence du jeu excessif parmi les personnes qui ne fréquentent pas les hippodromes (1,7%), là où les ALV ne se trouvent pas dans les bars, témoigne sans doute que les joueurs excessifs vont plus probablement ailleurs que dans les hippodromes. Figure 78 Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la fréquence de jeu aux courses, et du type de distribution des ALV ( Statistique Canada, 2002, ESCC ) Catégories de l'ICJE Hippodromes uniquement 1,7% Ne joue pas 9,3% Jeu occasionnel 17,4% Risque modéré ou + Jeu régulier Surtout dans les bars 0,6% Ne joue pas Jeu occasionnel 13,1% 22,6% Jeu régulier Ces données sont conformes avec l’interprétation selon laquelle la présence simultanée d’ALV dans les bars et dans les hippodromes favorise le déplacement des joueurs des Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 124 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 125 bars vers les courses de chevaux, quoique ce déplacement semble encore uniquement occasionnel. Il est à noter que, actuellement, les ALV dans les hippodromes proposent un environnement quasiment identique à celui des bars. Cela ne sera plus le cas avec les salons de jeux qui offriront un environnement de jeu beaucoup plus diversifié. Figure 79 Catégories de l'ICJE Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la fréquence de jeu aux courses de chevaux ( Statistique Canada, 2002, ESCC, Québec uniquement ) Risque modéré ou + 14,7% 0,6% Faible risque 11,7% 1,3% Ne joue pas Jeu occasionnel 4.6.3.6 Où se retrouvent les joueurs excessifs? Là où les ALV sont situés uniquement dans les hippodromes, 22% des joueurs excessifs parient à l’hippodrome au moins une fois par année, alors que seulement 14% des joueurs excessifs des autres provinces s’y rendent. Cette exclusivité des ALV contribue alors à une présence accrue de 57% des joueurs excessifs aux hippodromes (Voir Figure 80). 4.6.4 Les données du CQEPTJ Entre 1996 et 1999, les adultes québécois, qui éprouvaient des problèmes de jeu, pouvaient appeler au Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) afin d’obtenir une aide clinique à peu de frais. Parmi les dossiers de ce centre, il existe 255 joueurs qui ont participé à une évaluation détaillée de leurs habitudes de jeu qui peut servir à la présente évaluation de la dangerosité croisée244. Tous les joueurs de ce groupe ont été diagnostiqués joueurs pathologiques par un spécialiste du jeu pathologique. La Figure 81 illustre le lien entre le nombre d’activités de jeu auxquelles les joueurs ont participé et le nombre d’activités auxquelles ils ont perdu le contrôle. Typiquement, ces demandeurs d’aide clinique ne participaient qu’à deux ou trois activités, et ils n’éprouvaient des problèmes qu’à une ou deux activités. Le profil du joueur pathologique 244 Un profil détaillé des demandeurs d’aide clinique au CQEPTJ a été rendu public dans l’annexe H du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 125 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 126 accroché à de nombreuses activités est une image hollywoodienne qui est exceptionnellement observée dans les banques de données objectives. Parmi les demandeurs d’aide clinique au CQEPTJ, 56,1% d’entre eux n’éprouvaient de difficultés qu’avec une seule activité de jeu (voir Tableau 28). Parmi eux, 84% n’avaient de problème qu’avec les ALV. Toujours parmi les demandeurs d’aide clinique au CQEPTJ, 31,8% éprouvaient des problèmes avec deux activités. Pour 69% d’entre eux, il s’agissait des seuls ALV et MAS. Sans équivoque, au cours des dernières années, les joueurs pathologiques québécois ont surtout subi des dommages sur les AÉJ. Dans l’ensemble, 94,1% des joueurs éprouvaient des difficultés avec les ALV, les MAS ou les courses de chevaux. La répartition de ces joueurs est affichée dans la Figure 82. Figure 80 ALV surtout situés dans les bars ALV dans les hippodromes Répartition des joueurs à risque modéré ou plus selon la participation aux courses, au jeu sur MAS ou au jeu sur ALV ( Statistique Canada, 2002, ESCC ) Répartition des joueurs à risque modéré ou plus selon la participation aux courses, au jeu sur MAS ou au jeu sur ALV ( Statistique Canada, 2002, ESCC ) Les trois 3,7% Les trois 5,0% MAS & Courses 4,7% Aucune 17,8% Aucune 35,5% MAS & ALV 7,3% MAS & ALV 35,0% ALV 24,8% MAS 8,2% N = 343 MAS & Courses 14,1% ALV 0,5% Courses 2,0% MAS 34,2% Courses & ALV 2,6% Courses & ALV 0,5% Courses 4,2% N = 383 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 126 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 127 Figure 81 Nombre d'activités de jeu qui génèrent des problèmes Association entre la pratique d ejeu et les problèmes de jeu 8 7 6 5 4 3 2 1 0 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Nombre d'activités de jeu pratiquées (CQEPTJ, 1996-1999, N = 255) Figure 82 Répartition des problèmes de jeu parmi la clientèle de CQEPTJ entre 1996 et 199 Entre 1996 et 1999, il y a eu peu d’interaction entre le jeu sur les AÉJ et les courses de chevaux. Ce profil n’a sans doute pas encore beaucoup changé. Les joueurs pathologiques du Québec se tiennent loin des hippodromes. Ils sont davantage près des ALV. Pour cette raison, il peut être très nocif de déplacer les ALV dans les hippodromes. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 127 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 128 Enfin, la banque de données du CQEPTJ recèle un constat inquiétant. Si on divise ces joueurs en deux groupes, soient ceux qui ont des problèmes uniquement avec les ALV et ceux qui ont aussi des problèmes avec au moins une autre activité, il n’existe pas de différence significative dans leur bilan des pertes financières au jeu. Figure 83 Distributions cumulées de la perte financière au jeu 100% 90% 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% $10 000 $20 000 $30 000 $40 000 $50 000 $60 000 $70 000 $80 000 $90 000 $100 000 Plus Perte financière en carrière ALV + autre activité (N = 102) ALV seulement ( N = 117) Cela signifie vraisemblablement qu’un joueur pathologique ne demande pas d’aide avant d’avoir épuisé ses capacités financières et que le poids de la dette l’ait obligé à consulter. Pour les joueurs plus pauvres, cela survient plus rapidement. Pour les joueurs plus riches, cela survient plus tardivement. En effet, en général, les joueurs qui en viennent à demander une aide clinique, pour résoudre une dépendance envers le jeu, attendent d’en être rendus à une situation financière intenable appelée la phase du désespoir245. Lorsque les AÉJ ont commencé à être implantés partout dans certaines juridictions, les spécialistes du jeu et les responsables des centres d’aide pour les joueurs ont souligné la très grande vitesse avec laquelle les AÉJ précipitaient les joueurs vers les services d’aide246. Il en a été ainsi parce que les activités de jeu jusqu’alors existantes ne créaient pas des dommages aussi rapidement : “In the past, a gambler might experience 15 to 25 years of disordered gambling at the track before reaching the so-called “desperation” phase. Today, it is not uncommon for a 245 Voir aux pages 112 à 119 dans : Custer, R., & Milt, H. (1985). When luck runs out. New York, NY : Facts on file publications. 246 (a) Breen, R. B., & Zimmerman, M. (2002). Rapid onset of pathological gambling in machine gamblers. Journal of gambling behavior, 18(1), 31-43. (b) Voir notamment la figure 1 à la page 46 : Breen, R. B. (2004). Rapid Onset of Pathological Gambling in Machine Gamblers: A Replication, International journal of mental health and addiction, 12(April), 44-49. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 128 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 129 gambler addicted to slot or video poker machines to progress into the desperation phase in a matter of months.” (Addiction messenger, 2006, page 2)247 Si, en juxtaposant les AÉJ et les courses de chevaux, les joueurs précipitent leur dépense au jeu, ceux-ci arriveront plus rapidement au point où ils accepteront de demander de l’aide. Les centres d’aide risquent alors d’avoir à absorber rapidement un surplus de clientèle. Une révision des ressources disponibles devra être faite. 4.6.5 Un rappel de données anciennes En terminant, si les demandeurs d’aide n’éprouvent pas actuellement beaucoup de problèmes avec les courses de chevaux, il est utile de rappeler des données publiées en 1984 par Henry Lesieur248. Il y a longtemps, avant l’envahissement des AÉJ, près de la moitié des demandeurs d’aide consultaient en raison de problèmes avec les courses. On ne doit pas oublier la passé difficile de cette industrie qui n’a pas fondamentalement changé. Tableau 27 Répartition des demandeurs d’aide rapportée par Henry Lesieur en 1984 Courses Courses et autres Sports Sports et autres Cartes Cartes et autres N 5 18 6 15 1 5 Total 50 % 10% 36% 12% 30% 2% 10% 46% 42% 12% 247 Northwest frontier addiction technology transfer center. (2006, January). Problem gambling – part 1 – Gambling: the hidden addiction. Addiction messenger, 9(1), 1-3. http://www.oregon.gov/DHS/addiction/gambling/hidden-add.pdf 248 Voir à la page 24 dans : Lesieur, H. R. (1984). The chase. Rochester, VT : Schenkman books, Inc. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 129 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 130 Tableau 28 Combinaisons des activités de jeu auxquelles les joueurs ont éprouvé des difficultés de contrôle Activités causant des problèmes ALV ALV + 1 activité ALV + 2 activités ALV + 3 activités ALV + MAS ALV + MAS + 1 activité ALV + MAS + 2 activités ALV + MAS + 3 activités ALV + MAS + 4 activités ALV + Courses ALV + Courses + 1 activité ALV + Courses + 5 activités ALV + MAS + Courses ALV + MAS + Courses + 1 activité ALV + MAS + Courses + 5 activités MAS MAS + 1 activité Courses 1 activité 2 activités 3 activités Total N % 119 19 5 1 56 9 3 2 1 2 1 1 2 1 1 13 2 2 9 2 4 255 46,7% 7,5% 2,0% 0,4% 22,0% 3,5% 1,2% 0,8% 0,4% 0,8% 0,4% 0,4% 0,8% 0,4% 0,4% 5,1% 0,8% 0,8% 3,5% 0,8% 1,6% ALV MAS AÉJ 73,7% AÉJ + 1 activité AÉJ AÉJ + Courses 86,3% 87,5% 93,3% 94,1% 5,9% Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 130 Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 131 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 131 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 132 Chapitre 5 Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages Une approche du jeu, axé sur la promotion de la santé, n’est possible que si l’environnement de jeu est sécuritaire. Cela peut être atteint par une mise en garde des joueurs, par une accessibilité bien dosée, et par des AÉJ dont les paramètres sont agencées pour ne pas solliciter les facteurs qui participent au processus pathologique menant à la dépendance à l’égard du jeu sur AÉJ. Dans le but d’examiner les mesures de protection en fonction d’un objectif de jeu sécuritaire, un modèle du jeu pathologique sur AÉJ est explicité dans ce chapitre. 5.1 Les processus psychologiques conduisant à une dépendance pathologique envers les AÉJ D’emblée, il importe de spécifier que les personnes qui s’initient aux jeux sur les AÉJ ont des historiques cliniques très différents. Bon nombre des gens249, qui vont y perdre le contrôle, n’avaient jamais éprouvé antérieurement de problèmes de jeu. D’autres sont des joueurs pathologiques sévères ayant déjà perdu le contrôle à une autre activité de jeu, sinon plusieurs. Certains sont intelligents, d’autres le sont moins. Certains sont dépressifs, narcissiques ou boiteux. On retrouve, parmi les joueurs excessifs sur AÉJ, tout ce qui se trouve dans une population. Lors du traitement des dépendances envers les AÉJ, les cliniciens n’établissent pas de plans d’intervention différents en fonction de la condition clinique antérieure à l’expérience de jeu sur AÉJ250. Peu importe l’historique, les processus psychologiques sollicités par l’expérience de jeu sur AÉJ sont les mêmes pour tous251. Résoudre une dépendance envers les AÉJ ne résout pas nécessairement les problèmes antérieurs de la personne. Ces appareils ajoutent un problème supplémentaire qui, par sa préséance, devient central dans la dynamique psychologique, et par sa dangerosité, 249 Parmi les joueurs pathologiques québécois, qui ont requis une aide clinique au CQEPTJ entre 1996 et 1999, 74% ont indiqué avoir des problèmes de jeu uniquement avec les AÉJ, alors que 19% ont indiqué éprouver des problèmes sur les AÉJ et à au moins une autre activité de jeu. Seulement 7% des joueurs n’ont pas rapporté de problème avec les AÉJ. Ces données sont rapportées à la page 285 dans Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec : recours collectif des joueurs pathologiques contre Loto-Québec. 250 (a) Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., Lachance, S., Doucet, C., Leblond, J., & Jacques, C. (2001). Cognitive treatment of pathological gambling. Journal of Nervous and Mental Disease, 189, 766-773. (b) Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., Lachance, S., Doucet, C., & Leblond, J. (2003). Group Therapy for Pathological Gamblers : A Cognitive Approach. Behaviour Research and Therapy, 41, 587-596. 251 Leblond, J. (2004). Comparaison des résultats du programme expérimental sur le jeu pathologique du MSSS aux résultats des études scientifiques menées à l'Université Laval. L'intervenant, 20(3), 4-6. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 132 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 133 accélère et complexifie les dommages subis. Il ne s’agit pas d’un simple déplacement de problème. Pour éviter de proposer un ensemble hétéroclite de mesures mal ciblées, il importe de préciser un modèle des processus psychologiques sur lesquels des modifications structurales apportées aux AÉJ doivent exercer une influence. L’état actuel des connaissances dans le domaine du jeu pathologique permet dorénavant cette modélisation. 5.1.1 La modélisation des processus psychologiques impliqués dans la dépendance au jeu sur AÉJ Le modèle comportemental252 du jeu pathologique suggère que la perte de contrôle sur la dépense au jeu pourrait être la conséquence d’un apprentissage résistant au processus d’extinction. Il suffit d’observer des joueurs sur AÉJ pour être convaincu que les mécanismes du conditionnement, classique ou opérant, sont impliqués dans la genèse du jeu pathologique sur les AÉJ. Ce modèle explique bien la persistance au jeu en dépit du fait que la situation est généralement perdante à moyen terme. Par contre, il est insuffisant pour expliquer la persistance à long terme, et même l’accroissement de la dépense au jeu lorsque la pathologie est instaurée. En ce sens, le modèle comportemental est utile pour comprendre le comportement des joueurs jusqu’à la dernière étape précédant la perte de contrôle sur la dépense au jeu. 252 (a) Skinner, B. F. (1953). Science and human behaviour. New York, NY : Free Press. (b) Ferster, C. B., & Skinner, B. F. (1957). Schedules of reinforcement. New York, NY: AppletonCentury Crofts. (c) Knapp, T. J. (1976). A functional analysis of gambling behavior. Dans W. R. Eadington (Éditeur), Gambling and society: Interdisciplinary studies on the subject of gambling. Springfield, IL: Charles C Thomas. (d) Frank, M. L. (1979). Why people gamble: a behavioral perspective. Dans D. Lester (éditeur), Gambling today. Springfield, IL: Charles C. Thomas. (e) Dickerson, M. G., Hinchy, J., Legg-England, S., Fabre, J., & Cunningham, R. (1992). On the determinants of persistent gambling behaviour. I. High-frequency poker machine players. British journal of psychology, 83, 237-248. (f) Delfabbro, P. H., & Winefield, A. H. (1999a). Pokermachine gambling : an analysis of within session characteristics. British journal of psychology, 90, 425-439. (g) Haw, J. E. (2000). An operant analysis of gaming machine play. Doctoral dissertation, University of Western Sydney, Australia Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 133 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 134 Il existe plusieurs modèles cognitifs253 qui ont été proposés en remplacement du modèle comportemental. Le modèle fondé sur l’illusion de contrôle254 apporte une explication crédible du passage de l’état sain à celui du jeu pathologique. Une intervention clinique255 destinée à briser cette illusion est très efficace à atténuer ou à faire cesser le désir obsessionnel de jouer. Les cliniciens rapportent cependant éprouver des difficultés considérables lorsque la dépendance est installée depuis trop longtemps, ou lorsqu’il y a une comorbidité sévère, comme si le comportement de jeu était devenu automatisé, robotisé256. Le modèle cognitif fondé sur l’analyse des croyances erronées ne permet pas de prédire qui perdra le contrôle sur sa dépense au jeu, mais il explique de manière satisfaisante comment le terrain a été préparé pour qu’une illusion de contrôle puisse s’installer257. Ce modèle décrit l’action de processus heuristiques qui génèrent une interprétation erronée de la situation de jeu. En cela, il rejoint une autre catégorie de modèle fondé sur l’analyse de la conscience de la situation258 alors que des personnes compétentes en viennent à commettre des erreurs très graves qu’elles ne détectent qu’à la dernière minute alors qu’il est pratiquement trop tard pour redresser la situation. 253 (a) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence Erlbaum Associates. (b) Griffiths, M. D. (1990). The cognitive psychology of gambling. Journal of gambling behavior, 6(1), 31-42. (c) Walker, M. B. (1992). The psychology of gambling. New York, NY: Pergamon Press. (d) Griffiths, M. D. (1994). The role of cognitive bias and skill in fruit machine gambling. British journal of psychology, 85, 351-369. (e) Ladouceur, R., & Walker, M. (1996). A cognitive perspective on gambling. Dans P. M. Salkovskis (éditeur), Trends in cognitive and behavioral therapies (pp. 89-120). New York, NY: John Wiley & sons. (f) Toneatto, T., BlitzMiller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (g) Baboushkin, H. R., Hardoon, K. K., Derevensky, J. L., & Gupta, R. (2001). Underlying cognitions in gambling behavior among university students. Journal of applied social psychology, 31(7), 1409-1430. (h) Sharpe, L. (2002). A reformulated cognitive-behavioral model of problem gambling: a biopsychosocial perspective. Clinical psychology review, 22, 1-25. 254 (a) Langer, E. J. (1975). The illusion of control. Journal of personality and social psychology, 32(2), 311-328. (b) Presson, P. K., & Benassi, V. A. (1996). Illusion of control: a meta-analytic review. Journal of social behavior and personality, 11(3), 493-510.(c) Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, Québec : Les Éditions de l’Homme. 255 Voir la note numéro 250. 256 Un modèle physiologique, suggérant des dommages neurochimiques ou une réorganisation corticale, constitue alors une explication intéressante, là où les modèles cognitifs échouent. 257 (a) Walker, M. B. (1992). The psychology of gambling. New York, NY: Pergamon Press. (b) Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, Québec : Les Éditions de l’Homme. (c) Leblond, J. (2004). Comparaison des résultats du programme expérimental sur le jeu pathologique du MSSS aux résultats des études scientifiques menées à l'Université Laval. L'intervenant, 20(3), 4-6. 258 Endsley, M. R. (1999). Situation awareness and human error: designing to support human performance. Proceedings of the high consequence systems surety conference. Albuquerque, NM. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 134 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 135 Parallèlement, le concept d’optimisme irréaliste259 est un modèle particulièrement prometteur pour expliquer un autre aspect fondamental de la manière dont la structure est préparée pour permettre l’ancrage d’une illusion de contrôle. En plus, une attitude d’optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une pathologie retarde l’admission des problèmes et surtout la décision de consulter une aide externe. Aucun de ces modèles ne permet à lui seul d’expliquer l’ensemble des processus qui s’articulent pour mener une personne jusqu’au jeu pathologique et à l’y maintenir. Toutefois, en segmentant cette démarche, il est possible de percevoir un enchaînement de processus qui tantôt relèvent d’un modèle puis ultérieurement d’un autre modèle. Le développement du jeu pathologique sur les AÉJ apparaît ainsi être une succession de stades au cours de laquelle la dynamique à un stade est dominée par des processus spécifiques qui sont indépendants des processus qui sont actifs lors des stades antérieurs ou postérieurs. Dans la mesure où il est possible de décrire la liste et l’interaction des caractéristiques des AÉJ influençant le comportement des joueurs à chaque stade, il est possible de sélectionner et d’adopter des stratégies qui interviennent au bon moment dans la dynamique des joueurs. 5.1.2 Une modélisation par stades du jeu pathologique L’expérience de jeu sur les ALV est relativement simple. Stade 1 : Avant même de s’initier aux ALV, la plupart des joueurs entretiennent des croyances naturelles erronées260, parfois étonnamment utiles dans un environnement concret261, mais qui s’avèreront systématiquement dommageables dans l’environnement artificiel des jeux de hasard. Les croyances erronées appartiennent à deux catégories : (a) la certitude qu’il puisse exister un lien de cause à effet entre des événements 259 (a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (c) Taylor, S. E., & Brown, J. D. (1988). Illusion and well-being: a social psychological perspective on mental health. Psychological bulletin, 103(2), 193-210. 260 (a) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence Erlbaum Associates. (b) Gaboury, A., & Ladouceur, R. (1989). Erroneous perceptions and gambling. Journal of social behavior and personality, 4(4), 411-420. (c) Ladouceur, R., Sylvain, C., Duval, C., Gaboury, A., & Dumont, M. (1989). Correction des verbalisations irrationnelles chez des joueurs de poker-vidéo. International journal of psychology, 24, 43-56. (d) Toneatto, T., BlitzMiller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (e) Caron, A., & Ladouceur, R. (2003). Erroneous verbalizations and risk taking at video lotteries. British Journal of Psychology, 94, 189194. (f) Ladouceur, R. (2004). Perceptions among pathological and non pathological gamblers. Addictive behaviors, 29, 555-565. 261 Gigerenzer, G. (2000). Ecological intelligence (pp. 59-76). Dans Adaptive thinking : rationality in the real world. New York, NY : Oxford university press. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 135 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 136 pourtant aléatoires, et (b) un optimisme irréaliste à l’égard de développer une maladie en jouant262. Stade 2 : La première expérience de jeu est habituellement suscité par la simple curiosité. Stade 3 : Durant une session de jeu, la fréquence des récompenses est irrégulière. Par simple jeu du hasard, les récompenses sont parfois massées. Parfois elles sont plus rares qu’en moyenne. Durant ces derniers événements, la persistance à jouer doit être renforcée afin d’éviter l’extinction de l’intérêt à jouer. Or, le simple fait d’attribuer des récompenses irrégulièrement instaurent immédiatement, par une technique de renforcement partiel, une résistance à l’extinction. Dans un tel cas, le comportement de jeu persiste pendant plusieurs sessions de jeu malgré qu’il s’agisse d’une situation invariablement perdante à long terme. Stade 4 : Durant la période de jeu soutenue essentiellement par une résistance à l’extinction, l’absence263 d’une analyse normative264 de la situation de jeu favorise une dérive de la conscience de la situation en raison d’une prédominance des processus heuristiques265 ou automatiques. Il s’agit d’une réponse naturelle des processus cognitifs. Le comportement n’est pas encore pathologique. Stade 5 : L’élément central du développement de la pathologie survient lorsque la personne obtient un gain significatif266, c’est-à-dire lorsqu’elle vit une séquence de 262 (a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (c) Voir aux pages 206 à 217 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 263 Les gens vont jouer pour se détendre. Ils abordent alors les ALV avec plus ou moins d’attention. Quoi qu’il en soit, si un joueur tentait de faire une analyse normative, il n’y parviendrait pas car l’information nécessaire n’est pas disponible. Cela lui serait impossible à moins d’avoir accès aux résultats de millions de parties. Voir à la page 16 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs. 264 Une analyse normative consiste à faire une analyse parfaitement logique qui tienne compte de tous les aspects du problème à résoudre. Ceci implique que la personne a accès à toutes les données utiles pour juger, qu’elle possède la formation nécessaire pour appliquer les règles logiques requises, et qu’elle possède le temps qu’il faut pour compléter son jugement. 265 Les processus heuristiques sont des processus de la pensée qui utilisent les croyances erronées quant au hasard. 266 Il n’est pas nécessaire que la personne ait obtenu l’argent du gain. Il suffit qu’elle ait observé que ce gain aurait pu être obtenu si la mise avait été disposée autrement. Voir (a) Custer, R. L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans P. A. Carone et al. (éditeurs), Addictive disorders update. New York, NY : Human sciences press. (b) Greene, J. (1982). The gambling trap. Psychology today, 16(9), 50-55. (c) Custer, R. L. & Milt, H. (1985). When lucks runs out. New York, NY : Facts on public file. (d) Voir aux pages 150 et 152 dans : Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 136 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 137 succès si étonnante qu’il devient difficile de la considérer comme étant uniquement causée par le hasard. Les processus attentionnels sont conséquemment sollicités afin d’aborder la situation de jeu en fonction d’une analyse normative. La conscience de la situation étant faussé, cela semble possible. Cela est illusoire. Stade 6 : Durant la phase dominée par une illusion de contrôle, les joueurs investissent leur argent. Ils n’attendent pas un gain immédiat. Ceux-ci s’estiment en apprentissage, en période d’exploration afin de découvrir le truc. Ces investissements n’aboutissent jamais de sorte que les personnes ont souvent dépensé beaucoup plus que leurs revenus. Des biens ont été sacrifiés. Les options de crédit ont été utilisées. Des emprunts ont été faits auprès de la famille, des amis ou à de multiples autres sources. Lorsque l’espoir de trouver le truc s’estompe, les joueurs prennent conscience qu’il faut maintenant récupérer de l’argent, surtout si des montants ont été subtilisés à l’insu de personnes qui y ont droit. Stade 7 : Le besoin de se refaire instaure une dynamique psychologique particulière267. À chaque partie, le joueur est confronté au choix de garder dans ses poches une pièce de monnaie qui ne résoudra certainement pas ses problèmes, ou de la miser avec la possibilité d’obtenir un gain appréciable. L’enfoncement n’implique jamais autre chose qu’une dépense insignifiante. Partie après partie, le risque supplémentaire apparaît toujours négligeable face à l’espoir d’un gros gain. L’enfoncement est graduel, lent mais certain. Stade 8 : Puis, vient un temps où la catastrophe semble quasi inévitable. La faillite, la dénonciation, ou la rupture familiale ne peuvent plus être évitées par une meilleure gestion des revenus, un étalement de la dette ou des biens additionnels à vendre. Le gros gain est requis urgemment. C’est la seule solution, et elle doit survenir vite. La dépense au jeu sera massive. Tout ce qui reste est appelé à être dépensé car ces biens risquent d’être perdus de toutes manières en raison du désastre financier. En moyenne, les joueurs qui en viennent à demander une aide clinique dévoilent une perte d’environ 12 000 dollars par année sur les seuls ALV268. Lesieur, H. R., & Custer, R. L. (1984). Pathological gambling: roots, phases, and treatment. Annals of the American academy of political and social science, 474, 146-156. (e) Dickerson, M. G., Hinchy, J., Legg-England, S., Fabre, J., & Cunningham, R. (1992). On the determinants of persistent gambling behaviour. I. High-frequency poker machine players. British journal of psychology, 83, 237-248. (f) Voir aux pages 33 à 36 dans : Schrans, T., Schellinck, T., & Walsh, G. (2001). The 2000 regular VL players follow-up. Technical report. A comparative analysis of problem development & resolution. Halifax, Nava Scotia : Nova Scotia Department of Health. (g) Voir aux pages 20 et 21 dans : Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, QC : Les éditions de l’homme. (h) Voir aux pages 294, 295 et 301 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 267 Lesieur, H. R. (1984). The chase. Rochester, VT : Schenkman books, Inc. 268 Voir à la page 296 dans Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec : recours collectif des joueurs pathologiques contre Loto-Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 137 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 138 5.2 Les paramètres des AÉJ ayant une incidence sur les processus impliqués dans la dépendance pathologique Le Tableau 29 présente un répertoire des paramètres critiques, pour le jeu pathologique, de la situation de jeu sur les AÉJ de Loto-Québec. En agissant sur ces paramètres, il est possible d’intervenir directement dans les processus pathogènes. L’état actuel des connaissances scientifiques ne permettent pas de quantifier exactement comment ces paramètres doivent être agencés. Notamment, les spécialistes de la santé publique n’ont pratiquement pas accès aux informations nécessaires pour le faire. Quoi qu’il en soit, dans la mesure où le gouvernement du Québec a une plus grande marge de manœuvre pour protéger sa population contre les dommages causés par le jeu excessif, des modifications apportées à ces paramètres offrent une perspective plus réaliste, de bénéfices tangibles, qu’une approche centrée sur le concept de jeu responsable. Ceci implique une collaboration plus étroite entre Loto-Québec et les organismes de santé. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 138 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 139 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 139 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 141 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 1 Taux de remise (ou taux de retour) (ou taux de retour théorique) Situation au Québec Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Par la loi, la réglementation oblige un taux de remise moyen de 92% pour les jeux sur ALV. Le taux de remise est le paramètre qui a le plus d’impacts sur le jeu pathologique. Plus il est élevé, plus l’agencement des paramètres de jeu a le potentiel d’être pathogène. Pour réduire l’incidence du jeu pathologique, le taux de remise doit être conservé le plus bas possible. Le taux des MAS doit être au moins égal à 83%. Dans les faits, il est beaucoup plus élevé. Avant 1994, les appareils illégaux, qui ont motivé l’instauration des MAS et ALV, avaient des taux de 54% à 78%. Ce taux délimite les possibilités d’ajustement du taux de récompense ainsi que de la valeur des lots. Le seul motif pour hausser un taux de remise est l’existence d’une offre de jeu concurrente plus attrayante. Actuellement, en l’absence d’une offre de jeu concurrente tangible, les taux de remise au Québec sont beaucoup trop élevés, donc pathogènes et dommageables. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 141 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 142 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 2 Taux de remise effectif Situation au Québec Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Concrètement, le taux de remise théorique n’est obtenu qu’après des millions de parties. Le taux de remise effectif correspond à ce que le joueur peut, réalistement, espérer obtenir dans une session normale de jeu, c’est-à-dire en quelques centaines ou quelques milliers de parties. Ayant alors peu de chance d’encaisser le gros lot, le taux de remise effectif est toujours inférieur au taux de remise théorique. Lorsque la différence est trop grande, les joueurs, qui calculent leurs résultats, développent l’impression fausse que l’exploitant a altéré les appareils pour produire moins que prévu. C’est démotivant. Cela semble paradoxal, mais quand une offre de jeu concurrente doit être neutralisée, augmenter la valeur des lots importants est le meilleur moyen de réduire l’incidence des problèmes de jeu tout en conservant sa clientèle. L’augmentation des lots importants attire la clientèle parce que les lots sont plus payants. Par contre, la probabilité d’un gain significatif s’en trouve diminuée. L’écart est déterminé par la taille et la probabilité des lots les plus importants. Sur les ALV, le lot maximal est de $500. Pourtant, la réglementation permet un gros lot de $1000. En réduisant les montants accordés pour les lots les plus rares, il est possible de maintenir un taux de remise effectif qui demeure près du taux de remise théorique. En contrepartie, en proposant des montants plus élevés, il est possible de réduire le taux de remise effectif sans modifier le taux de remise théorique. Les salons de jeu sont un environnement privilégié pour offrir des lots plus importants que $500. Toutefois, cela devra obligatoirement être fait sans une augmentation du taux de remise théorique ni branchement des appareils en ilots. Pour pallier au fait que des lots plus importants risquent d’attirer une nouvelle clientèle, des mises en garde et des ressources d’aide doivent être présentes sur le site. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 142 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 143 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 3 Taux d’encaissement Situation au Québec Le taux d’encaissement sur les ALV est aux environs de 75%. Attention, ce taux est différent du taux de remise théorique ainsi que du taux de remise effectif. Cette confusion est fréquente. Impacts Si une personne insère $ 50 dans un appareil et qu’elle joue jusqu’à ce qu’il ne reste plus à son solde que $ 30, le taux d’encaissement sera de 60%. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Les montants insérés pour chacun des jeux sur les AÉJ ainsi que les taux d’encaissement doivent être mieux communiqués aux spécialistes de la santé publique. L’argent inséré est une mesure de l’attrait que l’AÉJ exerce sur la personne, le taux d’encaissement indique à quel point l’expérience de jeu a satisfait cet attrait. Ces informations influencent surtout les gestionnaires. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 143 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 144 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 3 Affichage des résultats par set plutôt que par partie Situation au Québec Une partie équivaut à miser un crédit. Un set équivaut à une pression du bouton Jouer. Avant de presser le bouton Jouer, la personne peut miser plus d’un crédit par ligne (jeu multicrédits) ou miser sur plus d’une ligne (jeu multilignes). Elle réalise alors plusieurs parties simultanément. 4 Annonce du gain indépendamment de la valeur de la mise Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Ce mode d’affichage augmente artificiellement l’impression de récompense. L’annonce des résultats du set peut être globale. Elle doit cependant être assez détaillée pour que la personne puisse faire un bilan complet et détaillé des parties du set. Plus le joueur a l’impression d’être récompensé fréquemment, plus il développe une résistance à l’extinction, c’est-à-dire une plus grande persistance à continuer à jouer en dépit du fait qu’à l’occasion les récompenses deviennent plus rares. À l’écran, le joueur n’est informé que du résultat global du set. Si une personne a misé 1 crédit sur chacune de 5 lignes, sa mise globale pour le set est de 5 crédits. Si un lot de 8 crédits est obtenu pour une seule des lignes, l’appareil annonce un gain et ne fait aucune mention des pertes. En fait, le joueur a gagné pour une partie et perdu pour les 4 autres. La résistance à l’extinction est un concept classique en psychologie de l’apprentissage. Cet effet est particulièrement facile à induire ou supprimer par l’ajustement du renforcement partiel. Si une mise de 5 crédits entraîne un lot global de 3 crédits, l’ALV annonce un gain de 3 crédits plutôt qu’une perte de 2 crédits. Cette définition du gain stimule une impression artificiellement accrue de récompense. En continu, aux côtés du solde, l’affichage doit mentionner, en pourcentage, la fréquence réelle des récompenses par partie. Une option d’affichage doit permettre au joueur de faire une rétrospective réaliste des récompenses obtenues. Sans résistance à l’extinction, il serait rarissime qu’une personne persiste à perdre pendant plusieurs dizaines de milliers de parties. Les joueurs délaisseraient les AÉJ bien avant l’expérience d’un gain significatif. L’affichage doit permettre un bilan complet du résultat des parties. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 144 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 145 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 5 Taux de récompense (ou taux de renforcement partiel) Situation au Québec Impacts Le taux de récompense des parties est habituellement inférieur à 20%. Les dommages importants ne surviennent pas lorsque le jeu est uniquement motivé par une résistance à l’extinction. Cependant, lorsque la personne mise sur plus d’une ligne à la fois, l’appareil peut annoncer des gains beaucoup plus fréquemment car les résultats ne sont pas annoncés partie par partie, mais à chaque set (pression du bouton Jouer ). Ce taux peut alors atteindre plus de 80%. Les dommages surviennent surtout lorsqu’il se produit un gain significatif et que la personne développe conséquemment une illusion de contrôle. Toutefois, la probabilité d’expérimenter un gain significatif augmente en fonction de la résistance à l’extinction. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu En augmentant le nombre des combinaisons donnant droit à des lots de peu de valeur, il est possible d’augmenter le plaisir de jouer car les récompenses deviennent plus fréquentes. Si le taux de remise n’est pas augmenté, et que les montants accordés pour les lots importants ne sont pas diminués, ce changement diminuerait les problèmes de jeu en rendant plus rares les occasions d’obtenir un gain significatif. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 145 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 146 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 6 Juxtaposition de jeux de pur hasard à des jeux de hasard et d’adresse Situation au Québec Impacts Les jeux de lignes et de keno sont des jeux de purs hasard. En jouant aux jeux de cartes, les joueurs peuvent développer, avec raison, l’impression de pouvoir s’améliorer. Lorsque ceux-ci transfèrent cette impression aux jeux de ligne, cette impression devient une illusion de contrôle. Aux jeux de cartes (poker et blackjack), les choix ont une incidence sur les résultats, donc sur les pertes ou les gains. Sur les appareils, ou dans les environnements de jeu, aucun signe ne démarque ces types de jeu. L’amélioration aux jeux de cartes laisse entrevoir qu’elle pourrait augmenter jusqu’à une situation gagnante. En fait, l’amélioration ne peut que diminuer la vitesse des pertes à long terme. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Pour chaque appareil, une mise en garde doit informer les joueurs que les possibilités d’influencer les résultats ne sont pas les mêmes d’un jeu à l’autre. Pour chaque jeu, une mise en garde doit informer les joueurs des possibilités réelles d’influencer les résultats des parties. Advenant le cas, la mise en garde doit indiquer qu’il n’est jamais possible de s’améliorer jusqu’à obtenir une espérance positive de gain. Quoi qu’il arrive, la situation de jeu sera toujours perdante à long terme. L’efficacité des mises en garde doit être vérifiée empiriquement. 7 Jeu continu Avec les loteries, les tirages sont hebdomadaires ou quotidiens. Au bingo ou aux courses, plusieurs minutes s’écoulent avant que les résultats ne soient connus. Avec les AÉJ, une partie ne dure que quelques secondes. Lorsque l’intervalle entre les tirages est moins de quelques minutes, les joueurs n’ont pas l’occasion de vaquer à d’autres activités entre deux tirages. En conséquence, le contenu de la mémoire de travail (working memory) n’est pas altéré entre deux tirages. Les nouveaux ALV proposent de casser le rythme de la session de jeu par des pauses programmées selon les spécifications initiales des joueurs quant à la durée souhaitée de la session de jeu, ou l’obtention d’un gros gain. Le processus est encore mal connu. Néanmoins, le jeu continu est la modalité la plus étroitement associée aux dommages subis par les joueurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 146 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 147 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 8 Jeu rapide Situation au Québec Une partie se déroule en à peine quelques secondes. En moyenne, les joueurs semblent préférer un intervalle d’environ 7,5 secondes. Dans les jeux continus, une nouvelle partie peut être débutée avant que le souvenir de la partie précédente ne se soit estompée de la mémoire à court terme. L’impression de récompense s’étend alors au-delà des parties subséquentes plausiblement perdantes. Il peut s’ensuivre une impression erronée du taux de récompense. Impacts Plus les tirages sont fréquents, plus les joueurs perdent leur argent rapidement. Si les joueurs misent des sommes qu’ils ne peuvent se permettre de perdre, les dommages sont alors proportionnels. En l’absence de compteurs à l’écran, l’information normative n’a pas le temps d’être intégrée à la structure décisionnelle. Ce sont des processus heuristiques, associatifs ou automatiques qui agissent en remplacement. Ces processus sont favorables au développement des illusions de contrôle. Une vitesse rapide de jeu favorise aussi le développement d’automatismes qui pourraient être responsables d’importantes difficultés à se défaire d’une dépendance malgré que l’illusion de contrôle ait été complètement brisée par le traitement cognitif préconisé par le MSSS. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu La seule manière de déterminer la vitesse idéale de jeu est d’offrir en laboratoire des appareils dont la vitesse de jeu peut être ajustée par les joueurs. En comparant les ajustements réalisés par les joueurs sans problème de jeu, par rapport à ceux qui éprouvent des problèmes de jeu, il serait possible de déterminer la vitesse la plus sécuritaire. Cette vitesse ne peut pas être ajustée a priori. La désactivation du bouton jouer n’est pas un moyen réaliste de réduire la vitesse de jeu. Les options d’affichage doivent aussi permettre au joueur de consulter des graphiques lui permettant de faire une rétrospective des variations du solde de la banque, et de visualiser l’évolution de sa vitesse de dépense. Afin d’éviter le développement d’automatismes, la vitesse de jeu doit être irrégulière, imprédictible, d’une partie à l’autre. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 147 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 148 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 9 Informations non pertinentes Situation au Québec Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu L’interface des AÉJ regorge d’éléments inutiles, tels que des sons, des clignotants, l’impression donnée de mouvements mécaniques, et la vue de pièces de tirage sur lesquelles aucune mise n’est faite. Même si le joueur ne mise pas sur toutes les lignes, il en voit le résultat. L’observation d’une combinaison payante sur une ligne non misée a une valeur cognitive identique à celle d’un gain encaissé. Cette observation contribue à l’impression d’avoir vécu un gain significatif. L’interface devrait être dépouillée de tout élément non pertinent à la mise. Ainsi, un joueur ne misant que sur une seule ligne, ne devrait pas devoir constater les résultats obtenus sur les autres lignes. Plus l’interface est inutilement complexe, plus il existe subséquemment des éléments d’ancrage pour les illusions de contrôle. 10 Limitation du lot maximal (ou limitation du gros lot) Par réglementation, le lot maximal pour une mise de 1 crédit est de $ 500 dollars. Pourtant, la réglementation permet $ 1000. Plus le lot maximal est élevé, plus il existe un grand écart entre le taux de remise théorique et le taux de remise effectif. Lorsque perçu, cela génère de l’insatisfaction chez les joueurs. Par ailleurs, l’abaissement du lot maximal a comme conséquence de rendre plus fréquente l’obtention des petits lots, d’où une résistance accrue à l’extinction. Cela prolonge le temps pendant lequel la personne accepte de jouer sans obtenir de récompense. La probabilité du gain significatif est augmentée. Des gros lots de faible valeur permettent un agencement pathogène des paramètres de jeu. À tout le moins, après qu’il ait été mis en garde des dangers, le joueur devrait avoir le choix entre un affichage minimal ou des affichages plus complexes. La loterie vidéo doit être une véritable loterie. Il faut revenir au concept fondamental de la loterie, c’est-à-dire acheter à un coût non dommageable la possibilité rarissime de gagner un lot exorbitant. C’est ce que le joueur récréatif désire. Le joueur pathologique cherche plutôt à répéter fréquemment un gain plus modeste. Pour lutter contre le jeu pathologique, il faut réduire l’espérance d’obtenir des gains appréciables dont la portée apparaît réaliste en quelques milliers de parties. Ceci doit être réalisé sans brancher les appareils en îlots. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 148 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 149 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 11 Dénomination Situation au Québec Une partie équivaut à miser un crédit. (ou valeur du crédit) Actuellement, les crédits sur ALV valent 5¢ ou 25¢. Ailleurs dans le monde, des appareils à 1¢ ou 2¢ sont aussi très populaires. Au casino, le crédit des MAS peut atteindre $ 500. Impacts En moyenne, le gain significatif ne survient qu’après quelques dizaines de milliers de parties. Plus on joue, plus ce gain devient probable. Pour un budget donné, moins le crédit vaut cher, plus les personnes peuvent jouer un grand nombre de parties. Une faible valeur du crédit rend alors plus probable l’avènement de cet important facteur du jeu pathologique. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu L’offre de jeu à faible dénomination n’est surtout pas un moyen d’être respectueux envers les personnes pauvres. Lorsque le budget de jeu est faible, les faibles dénominations augmentent la dangerosité des AÉJ. Dans la mesure où des gens peu fortunés ont accès aux AÉJ, les jeux à faible dénomination devraient disparaître. Le gain significatif a comme conséquence possible la concrétisation d’une illusion de contrôle. Lorsque c’est le cas, en attendant de « découvrir le truc », les jeux à faible dénomination augmentent l’espoir de diminuer le coût de la période d’exploration du mécanisme de tirage. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 149 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 150 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 12 Jeu multicrédits Situation au Québec Impacts Il est possible de miser plus qu’un crédit par ligne. On joue alors plusieurs parties simultanément quoi qu’il n’y a qu’un résultat commun pour toutes ces parties. Le jeu multicrédits augmente la taille perçue des lots, et delà la motivation à jouer. Le lot maximal de $ 500 est défini en fonction d’une mise de 1 crédit. Si trois crédits ont été misés, le lot obtenu sera de $ 1500. En contrepartie, parce que le budget de jeu s’épuise en observant moins de résultats différents, le jeu multicrédits réduit la probabilité d’observer une séquence de gains constituant un gain significatif. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Permettre, à chaque jeu, de miser plus d’un crédit par ligne sans être obligé de miser préalablement sur toutes les autres lignes. Certains jeux obligent les joueurs à miser sur toutes les lignes avant de pouvoir miser un crédit additionnel sur la même ligne. 13 Jeu multilignes Une partie équivaut à miser 1 crédit sur une ligne. Avant de presser le bouton Jouer, le joueur peut miser sur plusieurs lignes, jouant alors plusieurs parties simultanément. Contrairement au jeu multicrédits, le jeu multilignes diversifie les résultats observés par le joueur. Ceci augmente la probabilité d’observation d’un gain significatif. Le jeu multilignes accélère la vitesse au jeu sans réduire le nombre de parties jouées. Cela maintient la probabilité d’observer un gain significatif tout en accélérant son avènement dans le temps. Réduire les options de jeu multilignes est un moyen efficace pour retarder l’avènement du gain significatif. De plus, cela permet de diminuer la vitesse des dépenses. Entre-temps, la personne a davantage de temps pour mieux interpréter son expérience de jeu. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 150 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 151 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 14 Mise maximale Situation au Québec Impacts Sur les ALV, quelle que soient les possibilités multilignes et multicrédits, la mise maximale ne peut pas excéder 2,50 dollars. La mise maximale a comme conséquence d’étirer le budget de jeu dans un nombre plus ou moins grand de parties. S’il n’y avait pas de mise maximale, le joueur pourrait tout perdre en un seul coup. Avec une mise maximale basse, le joueur doit nécessairement jouer plus de parties pour épuiser son budget. Il se développe une plus grande résistance à l’extinction et il y a une plus grande probabilité que le joueur ait un budget suffisant pour se rendre au gain significatif. La limitation de la mise maximale a comme conséquence de minimiser le jeu multicrédits au profit du jeu multilignes. Cette situation diversifie davantage le répertoire des résultats observés, d’où une probabilité accrue de croire en un gain significatif possible. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Au casino, où les mises peuvent atteindre $ 500 le crédit, les MAS causent moins de dommages que les ALV. Sur les ALV, au lieu de limiter la mise maximale, il serait plus opportun d’imposer une mise minimale. Il importe de briser le cycle qui consiste à estimer répétitivement qu’il y a un coût insignifiant à faire une nouvelle tentative de régler miraculeusement une dette de jeu déjà énorme. Ceci n’inciterait pas davantage le joueur désespéré à miser des montants énormes puisqu’il a déjà cette possibilité sur les MAS au casino. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 151 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 152 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 15 Absence d’information sur les probabilités d’obtention des lots Situation au Québec Les tables de lots indiquent la nature des combinaisons gagnantes ainsi que la taille des lots qui sont payés. Il n’y a cependant jamais mention de la probabilité d’obtenir chacun des lots. Impacts Cette information manquante empêche d’évaluer préalablement l’espérance de gain. Pour le savoir, il faut jouer des dizaines de milliers de parties, et en faire ensuite une estimation empirique. Cette tâche cognitive prolonge le délai avant que la résistance à l’extinction ne soit nécessaire pour maintenir le joueur en jeu. Sans cette information, l’expérience de jeu ne peut pas être évaluée en fonction de la pensée normative. Le joueur est contraint à utiliser des processus heuristiques. L’activation de ces derniers est le niveau de pensée le plus favorable aux illusions de contrôle. 16 Absence d’information sur la composition des rouleaux ou des jeux de cartes Aux jeux de ligne, on voit différents symboles dont on ignore la fréquence réelle. On ignore aussi si tous les rouleaux sont identiques. Il faut jouer pour l’estimer. Au poker ou au blackjack, on ne sait pas si ce sont des jeux de 52 ou 104 cartes ou plus, ni si ces jeux contiennent toutes les cartes. Le temps que le joueur met à se construire une représentation des rouleaux ou des jeux de cartes retarde le moment où la résistance à l’extinction est le seul facteur qui maintien le joueur en jeu. Des erreurs d’estimation peuvent générer une espérance de gain artificiellement accrue. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Il doit être obligatoire d’afficher les probabilité d’occurrence de tous les lots dans tous les jeux. Aux jeux de lignes, s’il existe des combinaisons pour lesquelles il est impossible de calculer la probabilité, les tables de lots doivent être modifiées pour les éliminer. Aux jeux de carte, la probabilité doit être spécifiée en fonction du jeu optimal, et il doit être mentionné que peu de joueurs y parviennent vraiment. Avant la partie, la composition des rouleaux ainsi que des jeux de cartes doit pouvoir être examinée par les joueurs. Avec les interfaces électroniques, cela est facile à réaliser. Il n’est pas nécessaire d’ouvrir le boîtier. Il n’y a aucune possibilité de fraude. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 152 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 153 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 17 Absence d’information sur le mécanisme de tirage Situation au Québec Des événements se déroulent à l’écran comme si leur interaction déterminait le résultat. En fait, celui-ci est déterminé indépendamment par une puce électronique. Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Dans tout ce qui bouge à l’écran, il n’y a rien qui détermine le résultat des parties. Ces informations superflues constituent des éléments d’ancrage des illusions de contrôle. Les routines des générateurs de nombres pseudo-aléatoires (GNPA) sont protégées par des brevets. Toutefois, il serait bénéfique d’expliquer aux joueurs comment ces GNPA opèrent pour déterminer les résultats. En aucun temps, ces opérations ne sont influencées par ce que le joueur voit à l’écran ou par les gestes antérieurement commis par le joueur, notamment une variation des configuration ou montant des mises. Ceci doit être compris. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 153 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 154 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 18 19 Occurrence des quasisuccès Banque maximale du joueur (ou budget maximal de jeu) (ou capacité du solde) Situation au Québec Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Le quasi-succès est un résultat dont la combinaison est, à un détail près, celle d’un donnant droit à un lot. Ceux-ci sont inévitables quoique la composition des rouleaux peut multiplier artificiellement leur fréquence, ou bien la diminuer. Des quasi-succès fréquents conduisent à une exagération de l’impression du taux de récompense. Il s’agit d’un mécanisme supplémentaire qui vient en appui aux processus générant une résistance à l’extinction. Pour atténuer les effets des quasisuccès, il est préférable d’utiliser des jeux à cinq rouleaux par ligne, plutôt que trois. Actuellement, le joueur ne peut pas insérer plus de $60 avant de commencer à jouer. Avant 20022003, c’était $100. Plusieurs joueurs pathologiques rapportent qu’une fois l’argent inséré dans l’appareil, celui-ci est oublié. Comme il faut sortir plus fréquemment de l’argent de sa poche, la diminution du budget maximal favorise la prise de conscience de la dépense au jeu. 269 Selon une étude du comportement des joueurs sur ALV en NouvelleÉcosse, les joueurs occasionnels dépensent en moyenne $24 par session de jeu, et les joueurs réguliers sans problèmes de jeu dépensent $35. La dépense des joueurs excessifs atteint $97 par session. La banque maximale pourrait sans doute être encore baissée. Anciennement, sur les MAS, il fallait insérer des pièces à chaque partie. Le taux d’encaissement habituel est d’environ 75%. Cela signifie que les joueurs terminent en moyenne leur session de jeu après avoir perdu le quart de la banque initiale. 269 Impacts Un maximum élevé contribue à faire oublier la perte financière jusqu’à l’encaissement du solde quand il y en a un. Il est aussi préférable d’utiliser des rouleaux qui sont tous identiques. Les spécialistes de la santé publique ne peuvent pas préciser la limite optimale sans avoir accès aux enregistrements des sessions de jeu; ce qu’ils n’ont pas actuellement. Voir à la page D-23 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 154 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 155 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 20 Maximum de la banque de crédit en cours de jeu Situation au Québec En situation de jeu, un encaissement automatique se produit lorsque la personne obtient un lot égal ou supérieur à $500. Impacts Avec les MAS au casino, les lots tombent en pièces sonnantes dans les mains des joueurs dès qu’ils sont acquis. Sur les ALV, les lots intermédiaires sont conservés dans l’appareil. Il est alors plus probable que cet argent soit rejoué et perdu que si cet argent retournait dans la poche du joueur. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Il n’est pas clair si l’encaissement automatique se produit lorsque la banque dépasse $500 malgré que le lot obtenu soit inférieur à $500. L’encaissement automatique pourrait se faire à des valeurs inférieures. Les spécialistes de la santé publique ne peuvent pas préciser la limite optimale sans avoir accès aux enregistrements des sessions de jeu; ce qu’ils n’ont pas actuellement. 21 Paiement par coupon Les ALV ne retournent jamais d’argent aux joueurs. Les MAS au casino adoptent aussi ce mode de paiement. Tout aspect qui retarde le moment où le lot se retrouve en argent dans la poche des joueurs augmente la probabilité que ce montant soit rejoué et perdu. Pour obtenir le paiement d’un solde, le joueur doit demander l’impression d’un coupon de remboursement et se présenter à une caisse. Lorsqu’il ne reste que quelques crédits, c’est plus compliqué ou gênant de réclamer le solde à un cassier. Ces miettes sont alors rejouées jusqu’à la perte. Cela ajoute à l’expérience de jeu jusqu’au gain significatif. Pour pallier au fait que l’argent devient virtuel, en tout temps, l’affiche doit indiquer le total des montants insérés et celui des montants misés. Cet affichage devrait aussi indiquer la vitesse des dépenses, notamment le montant horaire dépensé au jeu. Un indicateur doit pouvoir signaler au joueur quand sa vitesse de dépense augmente et quand elle diminue. Le remboursement des soldes inférieurs à $5 devrait pouvoir être fait directement à partir de l’appareil. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 155 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 156 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 22 Message de modération Situation au Québec Entre 1994 et 2002, les ALV affichaient le message « Jouez avec modération pour que le jeu demeure un jeu ». Impacts Toute incitation proposant la modération comme un moyen de prévenir, contrôler, atténuer ou combattre une perte de contrôle est plausiblement iatrogène. Des dommages majeurs peuvent survenir. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Éviter à tout prix de proposer aux joueurs qu’il est possible de gérer une dépendance pathologique au jeu simplement en faisant des efforts personnels de modération. Les effets iatrogènes des messages doivent impérativement être vérifiés empiriquement. 23 Références à une ligne téléphonique Depuis 2002, les messages sont du type « Avant qu’il ne soit trop tard … » et informent de l’existence d’un numéro de téléphone 1-866-SOS-JEUX. Les textes des nouveaux messages sont imprécis : avant qu’il ne soit trop tard pour quoi? De plus, le numéro de téléphone de la Fondation Mise sur toi sert à quoi? À faire un don d’organe? S’agit-il d’une publicité, d’un service pour faire des mises au téléphone ou d’une offre d’aide pour les joueurs en difficulté? Cela n’est pas évident. L’offre d’aide est trop peu invitante. Le joueur en difficulté ne sait pas qui va répondre, quelle est sa formation, quels sont les solutions disponibles, ni pour quels motifs peut-on appeler. Les messages ne doivent pas uniquement survenir lorsqu’il n’y a personne pour jouer. Les AÉJ sont des outils de jeu potentiellement très dangereux. Les messages doivent constituer des mises en garde non iatrogènes qui sollicitent l’attention, qui informent des dangers ainsi que des moyens concrets pour s’en prémunir, qui permettent d’évaluer l’ampleur des dommages possibles et qui orientent les personnes en difficulté vers des ressources externes pouvant les aider. Les mises en garde doivent impérativement contrer un optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une dépendance pathologique à l’égard du jeu sur ALV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 156 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 157 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre 24 Bouton d’arrêt Situation au Québec Impacts Un mécanisme permettant d’arrêter prématurément le déroulement de la partie afin que le résultat s’affiche immédiatement. Ce mécanisme est actuellement désactivé sur les ALV. L’utilisation du bouton d’arrêt permettait d’augmenter la vitesse de jeu, et conséquemment la vitesse de la dépense au jeu. Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu Il n’est pas souhaitable de restaurer cette fonction. De plus, la possibilité de presser le bouton à différents moments était une occasion de concrétiser une illusion de contrôle. 25 Les sons d’appel Les ALV émettent des sons d’appel. Ce sont essentiellement des tonalités. Les ALV ne parlent pas. Les sons d’appel visent à attirer l’attention en ce qui concerne la présence d’ALV. Les sons ne doivent pas pouvoir être entendus en dehors de l’aire de jeu. 26 Les sons de récompense L’obtention des lots est signalé par des sons assimilables aux sons d’appel. S’il y a conditionnement classique, ces sons rappellent à la mémoire des événements de jeu antérieurs. Les sons d’appel agissent alors en sons de rappel de récompense. Les joueurs doivent avoir la possibilité de rendre l’AÉJ muet. Quand un bruit de fond est composé de sons extrêmement réguliers, ceux-ci sollicitent l’activation des automatismes en particulier la pression du bouton Jouer . Il faut conserver à l’esprit qu’une session de jeu est souvent composée de milliers de parties. Les sons devraient être variés et non associés à des événements en particulier. Sinon, il faut éviter que les sons d’appel et de récompense soient assimilables. Pour éviter de cadencer des automatismes, les intervalles entre les sons doivent être irréguliers. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 157 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 158 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre Situation au Québec Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu 27 Les sons de mécanisme Dans les AÉJ, ce qui est perçu à l’écran est complètement virtuel. Il n’y a pas de pièces mécaniques sous-jacentes. Les sons suggèrent néanmoins l’existence d’une telle mécanique. L’impression d’une mécanique sous-jacente est un puissant facteur d’ancrage des illusions de contrôle. L’interface doit éviter toute incitation à une croyance en un procédé de tirage impliquant l’activation de pièces mécaniques. 28 Horloge à l’écran Depuis 2002-2003, les écrans des ALV affichent une horloge. Cette horloge peut aider les joueurs à ne pas perdre la notion du temps. Un signal visuel est en concurrence avec les éléments du jeu. Un signal sonore est plutôt traité en parallèle aux stimuli visuels. Les salons de jeu devraient offrir de belles horloges grand-père qui sonnent aux heures et aux demi-heures. 29 Dispositif requérant la durée de jeu souhaitée Depuis 2002, avant de commencer à jouer, le joueur doit préalablement préciser la durée de jeu qu’il désire. Ce dispositif est utile à empêcher la perte de la notion du temps. Au choix initial du joueur, un dispositif empêchant de remettre de l’argent dans l’appareil sans un encaissement obligatoire du solde serait utile. Un dispositif requérant la limite souhaitée de la vitesse de la dépense au jeu serait encore plus utile. 30 Écran lumineux et coloré La forte luminosité des écrans des ALV contraste beaucoup avec la luminosité atténuée des sites. Ce contraste fait sortir le joueur de son monde et le capte complètement dans l’expérience de jeu. Cela favorise l’évasion, la dissociation ainsi qu’une sous-estimation de la durée de jeu. Ces facteurs constituent des problèmes pour les joueurs pathologiques. Dans les salons de jeu, les joueurs devront avoir la possibilité de jouer dans des environnements variés, soit à luminosité réduite ou près de fenêtres donnant un large accès à l’extérieur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 158 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 159 Tableau 29 Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique Paramètre Situation au Québec Impacts Commentaires et recommandations pour réduire les problèmes de jeu 31 Couleur de la console La console des anciens ALV n’était pas obligatoirement noire. Maintenant, c’est le cas. Aucun clinicien n’a jamais rapporté que cette couleur ait pu jouer un rôle quelconque dans la genèse d’une dépendance pathologique à l’égard du jeu. La couleur du boîtier est sans intérêt. 32 Absence de croupier L’ALV est complètement automatisé. Il n’y a qu’un joueur en face d’une machine. Au plus, il y a à un comptoir pouvant être éloigné un cassier occupé à servir d’autres clients. Le rôle du croupier n’est pas de prévenir le jeu pathologique. Il peut néanmoins rendre témoignage aux dirigeants ou à la sécurité des problèmes des joueurs. La présence d’un personnel mieux formé et d’un service de sécurité peut aider les salons de jeu à proposer un environnement de jeu plus sécuritaire que les bars. Tout dépend des possibilités d’intervention de ces personnes. Sur un ALV, à moins d’un effort exprès pour le faire, il n’y a personne pour documenter les problèmes de jeu. 33 Absence d’adversaires humains Un facteur important d’atténuation de la dépense au jeu est la crainte de ne pas être aussi habile que ses partenaires de jeu. Il y a aussi la crainte d’apparaître peu compétent. Avec les ALV, il n’y a pas de compétition ni de témoin. Ce facteur de protection est éliminé. Idéalement, les établissements de jeu devraient offrir uniquement des jeux à espérance nulle de gain impliquant des partenaires humains. Le profit devrait découler d’un droit d’entrée ou de services plutôt qu’une cote sur les paris. 34 Vitesse de jeu adaptée au désir du joueur En présence de croupier ou partenaires de jeu, la vitesse est aussi déterminée par le désir des autres joueurs. Ceci peut constituer un irritant qui diminue le plaisir de jouer. Avec un appareil automatisé, tout se passe exactement à la vitesse désirée. Des pauses peuvent être prises au besoin. Des périodes de jeu intense peuvent être commandées à volonté. Cette caractéristique permet d’éliminer un irritant au plaisir. La vitesse de jeu doit être limitée. Les spécialistes de la santé publique ne peuvent pas préciser la limite optimale sans avoir accès aux enregistrements des sessions de jeu; ce qu’ils n’ont pas actuellement. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 159 Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 160 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 160 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 161 Chapitre 6 Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ L’analyse scientifique de la validité des mesures de protection270, découlant du jeu sur les AÉJ, est une tâche particulièrement complexe et décevante en raison de l’état lamentable de la documentation à cet égard. Partout au monde, le constat qui se dégage des études au sujet des nouveaux modèles d’AÉJ, et de l’environnement de jeu responsable dans lequel on les insère, suggère une inaptitude globale de ces changements à avoir un impact autre que négligeable. Lorsque des résultats statistiquement significatifs sont présentés, la taille des effets n’est pratiquement jamais quantifiée. Dans ces cas, l’analyse des graphiques ou des commentaires des chercheurs ne permet jamais d’entrevoir des retombées importantes pour la protection des joueurs ou la santé publique. Raisonnablement, aucune étude empirique ne permet de prévoir que le regroupement des AÉJ dans des salons de jeux puisse avoir un impact bénéfique important sur la protection des joueurs. Cet état de chose ne signifie toutefois pas qu’aucune modification ne pourrait diminuer la dangerosité des AÉJ, car de nombreux paramètres de leur fonctionnement, qui ont un impact plus direct sur les causes de la dépendance à l’égard des AÉJ271, sont rarement l’objet des études272. Dans l’état actuel des choses, incluant celui des futurs salons de jeux, les AÉJ doivent être considérés comme des produits dangereux qui risquent de causer des problèmes de santé majeurs chez les utilisateurs. L’inefficacité actuelle à empêcher les dommages, associée à une capacité encore trop limitée des traitements à restaurer une condition 270 C’est-à-dire l’ensemble des mesures destinées à prévenir, empêcher, atténuer, ou réparer les méfaits du jeu qui sont conséquents à l’expérience de jeu sur AÉJ. 271 Par exemple, la probabilité d’un gain significatif, principal élément déclencheur de la pathologie, varie en fonction du taux de remise, du taux de récompense, de la valeur des lots importants, des possibilités de jeu multilignes et multicrédits, de la mise maximale ainsi que de la vitesse de jeu. Parmi les études gouvernementales, ces aspects ne sont jamais l’objet d’études crédibles. L’industrie du jeu publie exceptionnellement de tels résultats. Par ailleurs, l’information donnée aux joueurs manque de spécificité. On y discute du jeu en général, plutôt que des problèmes de jeu associés directement aux AÉJ. Cette information renseigne mal au sujet de l’optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une dépendance pathologique à l’égard des jeux sur AÉJ. On n’y trouve aucun renseignement direct concernant la dynamique psychologique associée au gain significatif et à l’illusion de contrôle subséquente. À lire cette documentation, on perçoit mal comment le besoin de se refaire conduit à une spirale de l’endettement, alors que les spécialistes du jeu comprennent parfaitement bien ce piège. Il n’existe pas assez d’emphase pour contrer l’espoir, chez le joueur excessif, que le jeu, continuellement générateur de perte, ne peut pas être un moyen de rembourser de l’argent. 272 Du moins, parmi les études qui ont été publiées. Des modifications pouvant avoir des impacts plus directs sur les processus pathogènes sont proposées à la section 1.5 – « Les paramètres des AÉJ ayant une incidence sur les processus impliqués dans la dépendance pathologique », dans l’Annexe 3 – La dangerosité des appareils électroniques de jeu. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 161 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 162 saine chez de nombreux joueurs, obligent les établissements de jeu à prévenir les utilisateurs contre les dangers et dommages découlant de l’utilisation des AÉJ, à exercer un dépistage proactif des joueurs qui jouent excessivement, à renseigner les joueurs quant aux moyens de se prémunir contre les dommages inhérents au jeu sur AÉJ, et particulièrement dans le cas des gouvernements, à offrir gratuitement un accès raisonnable à des ressources cliniques, communautaires ou juridiques aptes à régler les problèmes de jeu. En priorité, les mesures doivent assurer que les paramètres de fonctionnement des AÉJ, et leur environnement, sont sécuritaires en ce qui concerne la santé mentale des joueurs. La promotion de la santé doit être proactive. Les joueurs doivent être avisés quant aux pratiques de jeu qui les maintiennent en santé au lieu de les inciter, trop discrètement ou trop tardivement, à un auto-dépistage des problèmes de jeu. 6.1 L’irréalisme du concept de Jeu responsable En répertoriant les études récentes provenant de plusieurs pays, on constate que cellesci ont davantage eu comme conséquences d’alléger le fardeau des organismes en ce qui concerne la protection de leur clientèle, ou de légitimer une augmentation de l’offre de jeu, plutôt que d’offrir un environnement de jeu sécuritaire. En particulier depuis l’an 2000, les études ont principalement été consacrées à la promotion du concept de jeu responsable, c’est-à-dire un encadrement surtout défini et financé par les établissements de jeu. Concrètement, par ce concept, les établissements réduisent leur admission de responsabilité à l’égard des problèmes de jeu en transférant aux joueurs l’impression qu’il leur appartient d’assumer la plupart des responsabilités. Ceci est irréaliste puisque des responsabilités exigeantes doivent alors être assumées, à titre individuel, nonobstant le fait qu’elles impliquent des aptitudes et des connaissances pouvant être hors de portée pour des personnes qui ne sont pas des expertes du jeu, à l’occasion des personnes trop peu scolarisées ou démunies intellectuellement. Ces responsabilités sont : • Par-delà la confiance que les citoyens éprouvent à l’égard de leurs gouvernements, la personne doit avoir compris que l’étatisation, la création d’organismes de contrôle, ou l’adoption de code d’éthique ou de commercialisation, ne sont pas des garanties selon quoi les établissements ont pris, ou sont capables de prendre, toutes les précautions essentielles pour s’assurer que les environnements de jeu sont sécuritaires. • Un optimisme irréaliste, quant au risque de développer une pathologie, est une prédisposition naturelle de l’esprit humain273. N’étant pas mis en garde, et n’étant 273 (a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1982a). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem. Journal of behavioral medicine, 5(4), 441-460. (c) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (d) Nezlek, J. B., & Zebrowski, B. D. (2001). Implications of the dimensionality of unrealistic optimism for the study of perceived health risks. Journal of social and clinical psychology, 20(4), 521-537. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 162 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 163 pas un expert de la psychologie, le joueur a la responsabilité personnelle de découvrir l’influence insidieuse que peut exercer un optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une dépendance pathologie en tant que conséquence de l’utilisation des AÉJ. 274 • Sans être explicitement mise en garde des dangers spécifiques à la situation de jeu sur AÉJ, la personne doit avoir la préscience que ces dangers existent. L’élément déclencheur274 du jeu pathologique survient plus souvent durant la phase gagnante275, bien avant que la personne ne puisse réaliser qu’elle s’est engagée dans des croyances et comportements dommageables. Compte tenu que les dommages se concrétisent rarement avant que le joueur n’en soit rendu à dépenser de l’argent qu’il ne peut pas perdre276, le développement insidieux de la pathologie s’incruste d’autant plus que les ressources financières initiales, ou le gain significatif, sont élevés. • Analyser la situation de jeu sans connaître précisément les valeurs et probabilités d’obtention de chacun des lots ne permet pas de prendre une décision rationnelle quant aux risques financiers qu’implique le jeu sur AÉJ277. Les établissements de jeu refusant catégoriquement de dévoiler les probabilités des combinaisons payantes, il revient au joueur de les trouver, à défaut de quoi il est contraint à ne pas jouer ou à limiter dangereusement278 son raisonnement à des processus cognitifs qui sont inefficaces à le protéger contre le développement d’une dépendance pathologique à l’égard du jeu sur AÉJ. S’il n’est pas un expert de la psychologie du jeu, le joueur ne peut pas comprendre la portée réelle du danger de se confronter au hasard en limitant son raisonnement aux processus heuristiques279. Il s’agit en particulier de l’obtention d’un gain significatif tôt durant l’expérience de jeu sur AÉJ. 275 Cette observation n’est pas une découverte récente. (a) Voir à la page 115 dans : Custer, R. L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans P. A. Carone et al. (éditeurs), Addictive disorders update. New York, NY : Human sciences press. (b) Voir aux pages 99 à 105 dans : Custer, R., & Milt, H. (1985). When luck runs out. New York, NY : Facts on file publications. (c) Voir la figure 1 dans : Dickerson, M. G. (1984). Compulsive gamblers. London, UK: Longman. (d) Lesieur, H. R. (1984). The chase. Rochester, VT : Schenkman books, Inc. 276 La personne est alors particulièrement démunie financièrement pour entreprendre des mesures correctrices. 277 Compte tenu que personne ne peut pas jouer des millions de parties avant de subir des dommages majeurs, la publication du seul taux de remise est insuffisante car la décision doit plutôt être fondée sur le taux de remise effectif qu’il est raisonnable d’anticiper lors d’une session normale de jeu. 278 Un environnement de jeu sécuritaire consiste, d’abord et avant tout, à ne pas exiger du joueur qu’il limite déraisonnablement sa capacité d’analyse. Il n’est pas raisonnable d’attribuer au joueur la responsabilité de comprendre qu’aborder un jeu de hasard en ayant surtout recours à des processus heuristiques conduit à une dérive de la conscience de la situation. 279 (a) Wagenaar, W.A. (1988). Paradoxes of gambling behaviour. London, UK: Lawrence Erlbaum Associates. (b) Ladouceur, R., & Walker, M. (1996). A cognitive perspective on Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 163 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 164 • Pour évaluer à quel point elle doit se sentir interpelée par l’information que l’établissement de jeu lui communique, la personne doit réaliser que la documentation au sujet des problèmes de jeu concerne le jeu en général, et non le jeu sur AÉJ en particulier. Elle doit faire le tri entre les informations utiles et celles qui pourraient fausser280 son interprétation de la situation. • N’étant pas informée par les établissements, si la personne réalise la plausibilité de dangers inhérents au jeu sur AÉJ, elle a la responsabilité de trouver l’information définissant ces dangers. Elle doit aussi identifier personnellement les moyens de s’en prémunir. • Antérieurement à l’acquisition d’une expérience de jeu suffisante pour le faire, le joueur a la responsabilité de définir les limites raisonnables de la fréquence, de la durée et de la dépense au jeu. Sur les AÉJ, l’élément déclencheur281 de la pathologie peut survenir bien avant que cette expérience ne soit acquise. • Bien qu’on l’invite à jouer pour se détendre et relaxer, le joueur a la responsabilité d’être attentif aux événements282, survenant en situation de jeu, qui sont associés aux processus pathogènes spécifiques à la situation de jeu sur AÉJ. À moins d’être informé par l’établissement, ou être un expert du jeu, le joueur ne peut pas raisonnablement faire un lien entre ces événements et les processus pathogènes. • Ayant en main une brochure283 minimalement explicative, le joueur a la responsabilité d’auto-dépister quand son comportement révèle des indices d’une dépendance pathologique à l’égard du jeu sur AÉJ. Or, l’auto-dépistage peut être gambling. In P. M. Salkovskis (Ed.), Trends in cognitive therapy (pp. 89-120). Oxford : Wiley. (c) Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (d) Sunstein, C. R. (2002, November). Hazardous heuristics. Chicago, IL: Chicago public law and legal theory working paper, 33. (e) Delfabbro, P. (2004). The stubborn logic of regular gamblers: obstacles and dilemmas in cognitive gambling research. Journal of gambling studies, 20(1), 1-21. 280 En particulier, en raison du risque d’instaurer un optimisme irréaliste, il est dangereux d’affirmer aux joueurs que seulement 2% de la population éprouvent des problèmes de jeu, alors qu’il y a 19% des joueurs annuels sur ALV qui éprouvent des problèmes de jeu. Voir à la section 1.2.4.1 – « La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur ALV », dans l’annexe 3 – La dangerosité des appareils électroniques de jeu. 281 Il s’agit en particulier de l’obtention d’un gain significatif durant l’expérience de jeu sur AÉJ. 282 Outre le gain significatif, ce sont les quasi-succès, la vitesse des événements, l’intensité accentuée des stimuli, les coïncidences associant des gains à des stimuli non pertinents tels que les sons, une distorsion fortuite dans la fréquence d’occurrence de certains symboles, ainsi que l’impression naturelle de l’existence d’un rythme dans la séquence des événements. 283 Il existe autant de brochures qu’il y a d’établissements de jeu qui les utilisent. Elles sont cependant toutes similaires quant à leur stratégie d’intervention, c’est-à-dire la promotion du concept de jeu responsable. En ce sens, elles négligent fondamentalement le concept d’optimisme irréaliste à l’égard des risques de développer une pathologie. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 164 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 165 considérablement entravé, ou retardé de manière critique, par un optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer cette dépendance. La brochure devrait d’abord surmonter cette difficulté; ce que, typiquement, elle ne fait pas. De plus, l’auto-dépistage ne décèle les problèmes qu’une fois que ceux-ci sont manifestes, que les dommages sont déjà débutés sinon avancés. À cette étape, la personne a généralement perdu de l’argent qu’elle ne pouvait pas perdre. Il lui est ainsi difficile de financer284 les services qui pourraient lui venir en aide. • Le joueur a la responsabilité d’identifier les moyens susceptibles de restaurer son contrôle sur son comportement de jeu. Sans l’indication explicite qu’il s’agit d’un service d’aide, le joueur a la responsabilité de comprendre que le numéro de téléphone qu’on lui propose, 1-866-SOS-JEUX, n’est pas l’hameçon d’un service de vente par téléphone285 pour qu’il achète des produits additionnels. • Le joueur a la responsabilité de mettre en application tous les moyens qu’il a identifiés, à moins que des services ne soient une obligation légale de l’établissement de jeu286. • Sans être explicitement informé d’une quelconque obligation légale des établissements de jeu à fournir des services, le joueur a la responsabilité d’exiger, voire de forcer, leur application par les établissements de jeu. À cette étape, le joueur excessif n’a pas de moyens financiers disponibles pour le faire. En contrepartie, les responsabilités des établissements de jeu à l’égard de leur clientèle sont comparativement peu nombreuses. Actuellement, outre les responsabilités qui incombent à n’importe commerce public, au Québec : • En raison d’une exception au Code criminel, le gouvernement doit être le maître d’œuvre des activités de jeu. • L’établissement de jeu a la responsabilité d’interdire l’accès aux personnes de moins de 18 ans. 284 L’aide gratuite offerte par l’état-croupier est un apport indéniable à la santé publique. Toutefois, le double rôle de l’État peut inciter une personne à ne pas faire confiance, pour la soigner, à un commerçant qui l’a exposé à un produit qui lui a causé des dommages importants. Il est compréhensible que des personnes puissent exiger une aide indépendante. En ce sens, l’offre d’un service public gratuit ne répond pas automatiquement à tous les besoins en ressources cliniques. 285 Même l’expression « Jeu : aide et référence » peut être interprétée comme un service téléphonique où on explique comment jouer sur les ALV, comment insérer de l’argent et choisir un jeu. L’expression « Mise sur toi » est encore plus ambiguë. 286 Dans une gestion axée sur le concept de jeu responsable, les établissements de jeu proposent que ce soit la responsabilité du joueur de s’auto-dépister et de réclamer le service d’auto-exclusion. Les établissements offrent, par courtoisie et sans obligation légale de leur part, des dépliants d’auto-dépistage et le service d’auto-exclusion. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 165 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 166 • L’intégrité d’un jeu doit avoir été approuvée par la RACJ en fonction d’une réglementation précisée par le gouvernement. • L’établissement de jeu doit interdire à tous de fumer à l’intérieur du bâtiment ou aux environs. Sans admission de responsabilité supplémentaire, il n’existe aucune obligation précise pour les établissements d’appliquer et de faire le monitorage des autres mesures si le mandataire, c’est-à-dire le gouvernement, n’impose pas ce devoir. Dès lors, les gouvernements de plusieurs juridictions ont commencé à définir des codes de commercialisation. Au Québec, ce code oblige, par exemple, certains établissements à refuser de faire crédit aux joueurs, à consommer de l’alcool dans l’aire de jeu, d’enfreindre un code vestimentaire. Il s’agit de responsabilités que les établissements ont envers le maître d’œuvre des jeux, et non envers les joueurs. À l’exception de ce transfert de responsabilité vers le joueur, le concept de jeu responsable ne change pas grand-chose à la problématique de santé publique qui existe déjà en ce qui concerne les AÉJ. 6.2 Les obstacles L’incapacité de diminuer la dangerosité des AÉJ est causée par des obstacles qui seraient surmontables si les scientifiques obtenaient les ressources et les conditions dont ils ont besoin pour faire un travail crédible. Ces obstacles sont d’abord et avant tout révélateurs de l’absence d’une politique globale de santé publique sur le jeu287. Il n’est pas réaliste de croire qu’il est possible de créer des environnements de jeu sécuritaire lorsqu’il faut continuellement réagir a posteriori à des projets devenus quasi immuables parce que des dépenses importantes sont déjà engagées. Ces obstacles sont : • L’absence quasi-totale de données empiriques valides concernant l’efficacité des mesures • L’accès interdit aux paramètres des AÉJ ainsi qu’aux données enregistrées • L’absence d’analyse cognitive détaillée des conditions de vie des joueurs • L’adoption de mesures copiées du savoir-faire de d’autres organisations • L’absence de suivi des mesures implantées 287 Conscients que le concept de jeu responsable implique des engagements qui peuvent contrevenir aux fondements des politiques sociales, qui sont différents dans chaque juridiction, trois des principaux promoteurs du concept ont souligné l’importance, avant d’implanter quoi que ce soit, d’entreprendre une vaste consultation publique, en vue d’énoncer une politique globale sur le jeu, au cours de laquelle ces engagements auraient été pleinement compris et endossés. Voir : Blaszczynski, A., Ladouceur, R., & Shaffer. H. J. (2004). A science-based framework for responsible gambling: the Reno model. Journal of gambling studies, 20(3), 301-317. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 166 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 167 • L’exigence de ne considérer que des mesures qui n’ont aucune incidence sur le comportement des joueurs sans problème de jeu • La restriction à des mesures qui n’interviennent pas directement dans le processus pathogène qui conduit aux dommages 6.2.1 L’absence quasi-totale de données empiriques valides concernant l’efficacité des mesures Malgré que cela ait été demandé, Loto-Québec n’a communiqué aux directions de santé publique aucune étude susceptible d’appuyer les affirmations selon lesquelles les salons de jeux contribueraient à une meilleure protection des joueurs ou de la population. Dans la documentation promotionnelle, il n’y a qu’une mention concernant trois études288 qui seraient à l’appui des changements proposés. En fait, il s’agit plutôt d’une seule étude, en trois étapes, composée d’une revue de littérature, d’un groupe de discussion et d’une session de jeu réalisée en laboratoire. Cette étude a été commandée par la RACJ et ne semble pas en lien direct avec le projet de Loto-Québec. En examinant ce qui a été fait ailleurs dans le monde, il n’a pas été davantage possible de répertorier des études dont l’efficacité est démontrée de manière probante. Les évaluations faites en situation réelle de jeu sont rares. Le plus souvent, des conclusions sont tirées de sessions de jeu qui n’ont duré que quelques minutes en laboratoire. Il est vraisemblable qu’aucun des participants n’a développé une dépendance pathologique durant ces expérimentations. 6.2.1.1 Les études spéculent sur des effets dont on ne connaît pas la taille Bien que plusieurs rapports de recherche rapportent des résultats statistiquement significatifs, il est rare que les auteurs précisent la taille des effets. Malgré des valeurs p infinitésimales, les effets pourraient être limités à des impacts négligeables sur le jeu pathologique. Aucune mesure n’est crédible si elle se limite à réduire de seulement quelques pour cent le score à un test de dépistage sans qu’il ne soit établi que cela se répercute en un changement de la condition clinique. De plus, la mise en commun de plusieurs mesures ne signifie pas automatiquement un élargissement de la portée des mesures289. Mettre en commun 10 mesures influençant 2% de la variance n’équivaut pas à influencer 20% de la variance. Des mesures peuvent avoir des effets non additifs ou, pire, antagonistes. De plus, il est réaliste de considérer que plusieurs mesures pourraient agir sur les mêmes processus psychologiques, et delà 288 (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2003). Rapport d’étude sur le format, la disposition et le mode de disponibilité des appareils de loterie vidéo. Québec, Université Laval. (b) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on gambling. International gambling studies, 5(2), 139-154. 289 Voir à la page 304 dans : Blaszczynski, A., Ladouceur, R., & Shaffer. H. J. (2004). A sciencebased framework for responsible gambling: the Reno model. Journal of gambling studies, 20(3), 301-317. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 167 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 168 elles bénéficieraient toujours aux mêmes personnes. Pour ces raisons, chaque mesure doit d’abord être évaluée isolément. Ensuite, il est nécessaire d’étudier l’ensemble complet des mesures. 6.2.1.2 La représentativité des échantillons est trop incertaine Souvent, il n’est pas possible de vérifier si les personnes évaluées sont réellement des joueurs réguliers, ou même des personnes qui s’intéressent vraiment au jeu. En particulier, les études réalisées en laboratoire avec des étudiants universitaires ne renseignent pas beaucoup sur ce qui pourrait bénéficier à une population. Les besoins financiers des étudiants les motivent à rechercher les compensations financières attribuées lors des recherches. Malgré qu’ils l’affirment, ces participants s’intéressent-ils vraiment aux AÉJ? De plus, les universitaires sont des personnes mieux formées pour résister aux pièges cognitifs du jeu. Ceux-ci manifestent moins fréquemment des problèmes de jeu. 6.2.1.3 Les problèmes de validité écologique des études réalisées en laboratoire Les études, réalisées en laboratoire, souffrent d’importantes lacunes écologiques290. En effet, les joueurs y risquent rarement leur propre argent291. Le moment de la session de jeu est surtout déterminé en fonction de la disponibilité du laboratoire plutôt que par une impulsion ou un besoin de jouer. En particulier, les participants ne se rendent pas au laboratoire parce qu’ils ont subitement un besoin pressant de financer un achat ou de payer une dette. Les résultats des parties étant habituellement contrôlés, ceux-ci n’offrent qu’une expérience de jeu artificielle, limitée aux événements déjà connus par les chercheurs. En effet, ces séquences préprogrammées ne contiennent pas nécessairement tous les éléments pathogènes du jeu. Aussi compétent soit-il, un concepteur de recherche ne peut pas inscrire dans une séquence préprogrammée des facteurs pathogènes dont il ignore l’existence. Or, ces facteurs pathogènes, connus et inconnus, surviennent nécessairement durant la longue carrière des joueurs pathologiques. 290 Ce problème n’a jamais été investigué à fond. Dans un laboratoire, des joueurs réguliers de blackjack ont manifesté des comportements différents de ceux qu’ils ont au casino (Anderson et Brown, 1984). Les auteurs de l’étude, ont observé d’importantes modifications de comportement que Ladouceur et al. (1991) n’ont pas observé chez des joueurs utilisant des appareils de poker vidéo situés dans des dépanneurs. Anderson, G., & Brown, R. I. F. (1984). Real and laboratory gambling, sensation-seeking and arousal. British journal of psychology, 75, 401-410. Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance, N., & Tremblay, S. (1991). Ecological validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal of gambling studies, 7(2), 109-116. 291 Sauf celui qu’ils obtiennent en compensation de leur participation à la recherche. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 168 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 169 De plus, les protocoles de recherche ne permettent jamais d’obtenir un gain significatif durant la session de jeu. Si cela arrivait, il n’aurait pas l’impact habituel parce que le joueur, n’ayant plus ensuite accès au laboratoire, celui-ci n’a pas l’occasion de chercher à reproduire ce gain sur cet appareil en particulier. En ce sens, le principal facteur pathogène associé à l’expérience de jeu n’est pas étudié. 6.2.1.4 Il faut pouvoir être capable d’observer le phénomène à prévenir ou à contrer La seule vérification crédible des impacts bénéfiques des modifications apportées aux AÉJ exige une acquisition in situ de données issues de joueurs qui exercent leurs activités de jeu exactement dans leurs conditions habituelles, sinon dans des conditions qui leur deviennent habituelles. La durée d’observation doit être assez longue pour que des joueurs novices aient eu raisonnablement l’occasion d’avoir vécu l’essentiel des conditions qui conduisent au jeu excessif et le temps d’y avoir développé les dommages conséquents. En moyenne, la perte de contrôle sur les ALV du Québec commence entre 1,5 et 1,7 années après l’initiation au jeu sur ALV, et celle-ci dure 1,9 années avant que la personne ne se convainque d’appeler pour obtenir de l’aide292. Pour être certain, une étude longitudinale d’au moins quatre années est nécessaire. Une évaluation clinique initiale doit permettre de classifier les joueurs, avant qu’ils ne s’initient aux appareils modifiés, et il doit y avoir une évaluation comparable au moins à la fin de la recherche. Les dommages étant surtout causés par une perte financière qui dépasse la capacité des joueurs à l’absorber, les ressources et dépenses financières doivent être évaluées dès le début de la recherche, et réévaluées, au moins une fois, à la fin de la recherche. Aucune recherche n’a jamais rencontré ces critères minimaux. Pour démontrer l’efficacité d’une mesure, il est nécessaire d’évaluer longuement, de manière longitudinale, le statut diagnostique de joueurs réguliers représentatifs dont l’historique de jeu est raisonnablement documenté. 6.2.1.5 L’utilisation inappropriée des groupes de discussion (focus groups) Témoin vraisemblable d’une grande influence des impératifs de marketing lors de la conception des études, le recours à des groupes de discussion est une technique de plus en plus utilisée pour évaluer les impacts des mesures. Il s’agit certainement d’une bonne manière pour anticiper l’acceptabilité sociale initiale d’une innovation. Par contre, la qualité du matériel obtenu ne dépasse guère celui des opinions. En matière de prévention du jeu pathologique, il n’y a aucune utilité à faire spéculer des joueurs sans problème de jeu quant à des situations hypothétiques dont ils n’ont pas l’expérience. L’opinion des gestionnaires de jeu est loin d’être objective car une meilleure protection des joueurs implique nécessairement un amoindrissement considérable de la performance financière de leur établissement. 292 Voir aux pages 292 à 294 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 169 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 170 L’inclusion de joueurs pathologiques pose aussi des difficultés. Lorsqu’ils commence un traitement, les joueurs pathologiques doivent faire un travail considérable afin de comprendre comment s’est installé en eux une dépendance pathologique envers les AÉJ. Ces personnes expriment avec conviction des croyances erronées quant au hasard. Leur impression de contrôle sur les événements est illusoire. Souvent, ces joueurs sont encore en plein déni de leurs comportements réels de jeu. L’interprétation de leur expérience de jeu est alors faussée par ces filtres cognitifs. 6.2.1.6 La communication occulte des résultats de recherche dans des publications inaccessibles En dernier lieu, il importe de souligner une situation, certes exceptionnelle, mais qui n’a pas de raison de se reproduire. Pour déterminer la validité des mesures proposées par Loto-Québec, nous avons tenté de réunir tous les documents pouvant concerner plus particulièrement les travaux réalisés au Québec. Il s’avère que Loto-Québec a financé deux études293 directement pertinentes aux mesures de protection. Les résultats de ces études ont été publiés dans une revue scientifique australienne qui n’est pas répertoriée par les principales banques de données, qui est introuvable au Québec, qui n’est pas accessible par les services de prêts interbibliothèques, et qui ne peut être obtenue que d’un éditeur qui n’a pas répondu au courriel. Par surcroît, lorsque des tirés à part ont été demandés aux auteurs. Ceux-ci n’ont pas plus répondu au courriel. À l’égard de la population québécoise, il y a un problème à communiquer aux seuls Australiens des travaux financés par des fonds québécois, et destinés à améliorer la protection des joueurs québécois. De tels documents doivent être largement accessibles à tous les citoyens désireux d’évaluer les risques auxquels ils se confrontent lorsqu’ils acceptent de participer à des activités de jeu de Loto-Québec. 6.2.2 L’accès interdit aux paramètres des AÉJ ainsi qu’aux données enregistrées Compte tenu des dommages considérables auxquels la population est exposée, il n’est pas raisonnable de spéculer sur des amalgames disparates de mesures qui sont implantées sur des AÉJ dont on connaît très peu les paramètres de fonctionnement. Les appareils des autres juridictions ne sont pas tous agencés d’une manière qui correspond au niveau de dangerosité des appareils implantés au Québec. 6.2.2.1 Les paramètres des jeux sur AÉJ Sous prétexte de protéger des secrets commerciaux, les exploitants refusent systématiquement de communiquer aux scientifiques les caractéristiques précises des jeux qu’on leur demande d’évaluer. 293 (a) Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2003). Video Lottery Terminal Warning Messages and the Persistence to Gamble. Gambling Research, 15(1), 45-50. (b) Sani, A., Carlevaro, T., & Ladouceur, R. (2005). Impact of a Counselling Session on at-risk Casino patrons : A Pilot Study. Gambling Research, 17, 47-52. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 170 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 171 Lorsqu’une organisation achète un jeu, le fabricant propose diverses tables de lots correspondant à des taux de remise, des taux de récompense et des valeurs de lot différents. D’une juridiction à l’autre, d’un établissement à l’autre, ou même à l’intérieur d’un même établissement, les chercheurs sont incapables d’évaluer si des expériences de jeu sont réellement comparables. Plus le taux de remise d’un AÉJ est élevé, plus cet appareil peut générer une expérience de jeu susceptible d’instaurer une dépendance pathologique. Il existe alors un danger considérable à extrapoler des résultats, cueillis sur des AÉJ dont le taux de remise est aux environs de 90%, à des AÉJ dont le taux de remise avoisine plutôt 95%. Ce problème se pose particulièrement lorsque des jeux australiens sont présentés comme peu dangereux. En Australie, les taux de remise ont une moyenne de 89%. Au Québec, cette moyenne est d’environ 92%. Lorsque des études de la Nouvelle-Écosse suggèrent une mesure de protection, il faut savoir qu’elle a été étudiée dans un environnement autrement pathogène où les taux de remise varient entre 93% et 95%. Cette mesure peut réagir à des événements dont l’avènement est probable lorsque le taux de remise est de 95%, mais qui ne se produisent que rarement lorsque le taux de remise est de 92%. Dès lors, cette mesure n’est pas transférable. A priori, ces différences de taux de remise semblent peu importantes; à peine un, deux ou trois pour cent. Il n’en est rien. Les données présentées dans la Figure 84 illustrent les conséquences de variations infimes du taux de remise. En effet, le Colorado publie mensuellement des données financières concernant les AÉJ qu’il exploite dans des casinos. La somme des montants insérés dans les appareils et le bénéfice brut sont publiés en fonction de la dénomination (valeur du crédit). Pour chaque mois, ceci permet de calculer le nombre de parties jouées294 ainsi que le taux de retour effectif295 des appareils. Il est alors évident que les joueurs complètent beaucoup plus de parties avec un taux de retour élevé. Ceci augmente la probabilité d’avènement d’un gain significatif, soit une cause directe des problèmes de jeu. Tel que le confirme cette figure, avec un montant de 2000 dollars, à un jeu à 25 cents le crédit, il est possible de jouer environ 100 000 parties lorsque le taux de remise est de 92%. Selon le même calcul, en haussant ce taux à 95%, statistiquement, le nombre de parties est supposé grimper à 160 000. Dans le cas du Colorado, le nombre de parties jouées avec des AÉJ à 95% est plutôt d’environ 250 000. L’impact de l’augmentation du taux de remise est alors de beaucoup supérieur au simple fait qu’il est possible de jouer pendant plus longtemps avec un même capital. Cette persistance accrue à miser 294 Le nombre de parties est égal à : (montant dépensé) / [(valeur du crédit) x (1 – taux de remise)]. Pour être exact, ce nombre devrait ensuite être diminué de 11,5 parties. Voir à la page 395 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 295 Le taux de retour effectif est égal au montant des lots remis aux joueurs divisé par le montant des sommes pariées. Par rapport au taux de remise théorique, il s’agit d’une valeur concrète. À l’échelle d’une population, le taux de remise effectif est quasiment égal au taux de remise théorique. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 171 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 172 témoigne au moins d’une augmentation de la résistance à l’extinction, soit une autre cause directe des problèmes de jeu. Figure 84 Appareils de jeu au Colorado - Jeux à 25 cents le crédit Nombre mensuel moyen de parties jouées par appareil en fonction du taux de remise N. de parties jouées par appareil 300 000 250 000 200 000 150 000 100 000 50 000 0 90% 91% 92% 93% 94% 95% 96% Taux de remise effectif Il existe d’autres paramètres critiques que les chercheurs ignorent lorsqu’ils font leurs études. Quelle est la probabilité d’événements importants, tels que l’acquisition d’un lot de grande valeur, l’avènement d’un quasi-succès? Quelle est la capacité du générateur de nombre aléatoire de créer des événements réellement indépendants? Les chercheurs concluent sans connaître ces détails critiques. Par ailleurs, d’autres informations peuvent être connues parce qu’elles sont observables directement en jouant sur les AÉJ. Il s’agit en l’occurrence du taux de récompense qui est aussi lié directement aux causes des problèmes de jeu. Il faut toutefois jouer des millions de parties pour être certain que les estimations soient justes. Les budgets et les impératifs de production des chercheurs ne permettent pas un tel travail. 6.2.2.2 Les statistiques compilées automatiquement par les AÉJ Toujours en raison du secret commercial, les scientifiques n’ont pas accès aux statistiques qui décrivent le comportement réel des joueurs, c’est-à-dire in situ, en situation réelle de jeu. Or, parce que l’organisme de jeu doit vérifier régulièrement l’intégrité des appareils, les AÉJ enregistrent des informations particulièrement importantes en ce qui concerne l’évaluation de la dangerosité des jeux. Ce sont principalement le choix des jeux, les montants insérés dans les AÉJ, les soldes encaissés, la durée de jeu avant l’encaissement, les dénominations utilisées, les montants des mises, les caractéristiques multilignes et multicrédits des mises, et le nombre de parties jouées entre les additions de montants supplémentaires et l’encaissement. Pour véritablement développer un environnement de jeu sécuritaire, ces informations doivent être mises à la disposition des chercheurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 172 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 173 6.2.3 L’absence d’analyse cognitive détaillée des conditions de vie des joueurs Bien que les outils psychométriques soient indispensables pour l’objectivité des études, on ne doit pas se limiter à ceux-ci. Il est nécessaire de décrire en profondeur les structures cognitives des joueurs, notamment les objectifs de vie, les croyances déterminantes, les chaînes de comportements296, les motifs de jeu, les responsabilités interpersonnelles, en fait tout ce qui est déterminant. Actuellement, ces informations sont surtout tirées des joueurs que des cliniciens accueillent en consultation. Le plus souvent, ce sont des informations trop rétrospectives. Il faut les obtenir plus près des événements, avant et pendant que les joueurs ne deviennent pathologiques. De plus, sans une évaluation précise de la valeur de l’argent pour les joueurs, il est difficile de considérer réaliste de transférer une mesure évaluée dans une autre juridiction, ou à l’intérieur d’une juridiction où la richesse est très inégalement répartie. Les montants pouvant constituer des gains significatifs varient d’une personne à l’autre selon sa richesse personnelle, ses projets de dépense ou de remboursement. De plus, les problèmes de jeu se concrétisent surtout lorsque des personnes en viennent à perdre des sommes qu’elles n’ont pas les moyens de perdre. Si une mesure est développée dans un environnement financièrement aisé, où des revenus additionnels peuvent être acquis facilement, elle pourrait être particulièrement iatrogène dans un milieu plus pauvre où ces options n’existent pas. 6.2.4 L’adoption de mesures copiées du savoir-faire de d’autres organisations Actuellement à la mode dans bon nombre de juridictions, les établissements de jeu achètent ou copient le savoir-faire d’autres organisations297, associations commerciales298 299 ou centre de recherche financés par l’industrie du jeu300. Les 296 La méthode GOMS est particulièrement appropriée au contexte des AÉJ qui sont fondamentalement une interface humain-ordinateur. Une explication de la méthode GOMS (Goals, Operations, Methods, and Selection rules) est disponible dans les sites suivants : http://pages.cpsc.ucalgary.ca/~ericp/projects/681/GOMS/CPSC_681_Topic_GOMS.pdf www.it.bton.ac.uk/staff/rng/teaching/notes/GOMS.html www.info.fundp.ac.be/~jml/CD_IHM/Chap7/goms.html 297 Parmi lesquels, il y a, au premier plan, les casinotiers Harrah’s (www.harrahs.com) et Holland Casino (www.hollandcasino.nl) ainsi que le fabricant d’AÉJ International Gaming Ternology (IGT) (www.igt.com). 298 Des établissements de jeu sont regroupés en association nationale telles que l’American Gaming Association (1995) (www.americangaming.org), la Canadian Gaming Association (2005) (www.canadiangaming.ca), l’Australian Gaming Council (www.austgamingcouncil.org.au). 299 Les organisations gouvernementales de jeu ont leur propres associations telles que la World Lotteries Association (dont Loto-Québec est ****), l’International Association of Gaming Regulators (www.iagr.org). 300 Aux États-Unis, le National Centre for Responsible Gaming (www.ncrg.org) a reçu des dons de plus de 100 000 dollars uniquement par des grands casinotiers et manufacturiers tels que Caesars, Harrah’s, IGT, Mandalay Resort Group, MGM Mirage, Argosy Gaming, Boyd Gaming, Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 173 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 174 produits, qui en résultent, apparaissent être davantage l’œuvre de spécialistes en marketing que celle d’experts en santé publique. Lorsque des gestionnaires de jeu agissent ainsi, ceux-ci importent des protocoles tous prêts, qui exigent d’être appliqués intégralement, et surtout aveuglément puisque l’organisme vendeur ne dévoile pas ses secrets commerciaux. Les scientifiques, qui doivent appuyer les organismes de santé publique, sont alors confrontés insidieusement à un renversement du fardeau de la preuve car il faut des arguments irréfragables pour convaincre les gestionnaires qu’il est nécessaire d’adapter ces protocoles. Compte tenu que ces produits commerciaux ne conviennent pas nécessairement aux risques et méfaits du jeu spécifiques à chaque juridiction, ce renversement pose un danger pour les populations car l’efficacité de ces produits n’est pas préalablement démontrée. Ayant besoin de données empiriques récoltées in situ et de conclusions objectives, les scientifiques ne trouvent pas, dans la documentation de ces produits, l’information minimale dont ils ont besoin pour s’assurer des bénéfices que ces produits sont supposés apporter aux populations301. D’ailleurs, les organisations qui vendent leur savoir-faire exportent des produits finis élaborées en fonction de documents en langue étrangère. Dans le cas des salons de jeux, il n’est pas possible de faire une évaluation pertinente sans avoir à se démêler avec des documents écrits en néerlandais302. Enfin, la problématique de la gestion du jeu n’est pas nécessairement généralisable au Québec. En l’occurrence, les difficultés des gouvernements aux États-Unis ou en Australie à contraindre l’entreprise privée aux impératifs de la santé publique n’existent pas ici car l’État est à la fois le régulateur et l’opérateur. Contrairement aux établissements européens qui font un enregistrement systématique des visiteurs, les clients des établissements de jeu, incluant les bars où les ALV sont situés, n’ont pas à Isle of Capri Casinos, Aztar Corporation, Station Casinos, WMS (www.wms.com). Plusieurs ont contribué pour un million de dollars ou plus. En raison de petites contributions plus nombreuses, le National Council on Problem Gambling (http://www.ncpgambling.org) a un financement plus varié mais celui-ci englobe aussi des grands casinotiers et manufacturiers parmi lesquels on retrouve en plus Isleta Casino & Resort, GTech (www.gtech.com), et l’immense casino amérindien Mohegan Sun. 301 Voir aux pages 5 et 7 dans : Blaszczynski, A. (2001). Harm minimization strategies in gambling: An overview of international initiatives and interventions. Melbourne: Australian Gambling Council. 302 Par exemple: (a) De Bruin, D.E., F.R.J. Leenders, M. Fris, H.T. Verbraeck, R.V. Braam, G.F. van de Wijngaart (2001). Gasten van Holland Casino. Effectiviteit van het preventiebeleid kansspelverslaving. Utrecht: Centrum voor Verslavingsonderzoek. ISBN: 90-71772-31-4 http://www.drugresearch.nl/en/GastenVanHollandCasino.EffectiviteitVanHetPreventiebeleidKanss pelverslaving (b) de Bruin, D., Benschop, A., Braam, R., & Korf., D.J. (2006). Meerspelers: Meerjarige monitor en follow-uponderzoek naar amusementscentra en bezoekers. Utrecht, Amsterdam: CVO, Universiteit van Amsterdam. http://www.drugresearch.nl/en/AFiveyearMonitoringAndFollowupStudyOnTheEffectsOfProductDifferentiationAndStricterAdmissionControlsInAmusementCentre s (c) KPMG Business advisory services B. V. (2005, December). Onderzoek kengetallen speelautomatenbranche. Periode 2002-2004. Rapportage. (d) VAN Speelautomaten Amusementscentra. http://www.vaninfo.nl/assets_VAN/pdf/VAN%20brochure.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 174 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 175 s’identifier avant d’entrer. En particulier, l’expérience des Pays-Bas ne vaut que dans la mesure où les établissements néerlandais détectent les joueurs fréquents et les invitent à discuter des risques à jouer trop régulièrement. Ceci ne se fait pas au Québec. 6.2.5 L’absence de suivi des mesures implantées En raison des disparités très grandes entre les types d’AÉJ qui y sont exploités, la simple généralisation des mesures de protection d’une juridiction à l’autre ne donne aucune garantie que les effets observés en un endroit vont nécessairement se reproduire ailleurs. Lorsque des mesures sont importées d’une autre organisation de jeu, cette grande incertitude oblige à faire un suivi d’implantation. Dans la documentation de Loto-Québec ou de la RACJ, nous n’avons trouvé aucune étude ayant vérifié l’efficacité des mesures et modifications structurales apportées aux ALV depuis 2002. La grande importance de ces modifications avait pourtant été affirmée lors d’un Forum sur le jeu pathologique organisé en novembre 2001303 ainsi qu’une Table de concertation interministérielle304. Ce manque de suivi des implantations n’est pas particulier au Québec. Il s’agit d’une situation courante parmi les établissements de jeu. En 1999, la firme Wynne Resources a expédié, au Canada et aux États-Unis, un questionnaire à 31 agences gouvernementales, 22 compagnies privées et 65 organisations non gouvernementales concernant les programmes de prévention que ces 118 organismes ont développé. Quarante-deux (36%) ont accepté de répondre305. Seulement 21 organismes ont indiqué avoir un processus général306 d’évaluation de leur programme de prévention. Aucun n’avait entrepris de vérifier directement les impacts prévus des plans de prévention307. 303 (a) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). Jeu pathologique : connaître, comprendre, agir. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca (b) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique : document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca 304 Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. (2002). Agir ensemble : plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005. Québec, QC : Gouvernement du Québec, Table de concertation interministérielle sur le jeu pathologique. 305 Les auteurs indiquent que, malgré un taux de réponse de 36%, les participants étaient suffisamment diversifiés pour représenter adéquatement l’ensemble des organismes visés. Voir à la page 18 dans : Wynne Resources. (1999, October). Problem gambling public awareness campaigns in North America. A report submitted to: Ontario substance abuse bureau. Edmonton, Alberta: auteurs. 306 Typiquement, un seul indicateur général, par exemple la variation du nombre d’appels à une ligne d’aide ou des demandes pour des pamphlets, sert à évaluer l’efficacité des programme de prévention. Voir à la page 32 dans : Wynne Resources. (1999, October). Problem gambling public awareness campaigns in North America. A report submitted to: Ontario substance abuse bureau. Edmonton, Alberta: auteurs. 307 Voir à la page 53 dans : Wynne Resources. (1999, October). Problem gambling public awareness campaigns in North America. A report submitted to: Ontario substance abuse bureau. Edmonton, Alberta: auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 175 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 176 Seulement récemment, la World lottery association a annoncé un plan prévoyant l’évaluation des mesures associées au concept de jeu responsable308. Les détails de cette évaluation ne sont pas encore précisés publiquement. 6.2.6 L’exigence de ne considérer que des mesures qui n’ont aucune incidence sur le comportement des joueurs sans problème de jeu Mandatés par des organisations qui obtiennent d’importants bénéfices du jeu, les équipes de recherche, qui ont développé des modifications, ont pris en considération le besoin pour des mesures qui n’ont que peu d’impacts sur les joueurs occasionnels, ceux qui n’ont pas de problème de jeu309. Limitées par cet objectif, les mesures possibles ne peuvent guère faire plus qu’aider les joueurs excessifs à conserver leur dépense au jeu dans des limites raisonnables, sinon d’attirer leur attention sur un numéro de téléphone. Il s’agit alors d’intervenir après le développement de la dépendance, surtout lorsque les dommages commencent à dépasser la limite que les joueurs peuvent assumer financièrement. Dans la mesure où près de la moitié des revenus des AÉJ proviennent des joueurs excessifs, il est illusoire de croire pouvoir réduire appréciablement les méfaits des AÉJ sans que cela n’entraîne une diminution tout aussi appréciable des revenus. De plus, la plupart des mesures proposées sont issues de l’observation des comportements des joueurs réguliers qui conservent le contrôle sur leur dépense au jeu par opposition aux joueurs excessifs. On propose alors aux joueurs excessifs d’imiter le comportement des joueurs réguliers sans problème de jeu. Or, il n’est pas établi que les joueurs excessifs ont les moyens ou les capacités de le faire. Il n’a pas été vérifié si les joueurs réguliers, présentés comme modèles, ne seraient pas en voie de développer des problèmes de jeu. Personne ne sait si ces joueurs réguliers auraient été capables de maintenir leur contrôle s’ils avaient vécu les mêmes événements qu’ont expérimentés les joueurs qui sont devenus dépendants des AÉJ. Ce modèle n’est pas un contrôle valide. Sauf à titre d’anecdote individuelle, aucune étude n’a démontré l’existence de joueurs réguliers de longue date qui n’ont jamais éprouvé de problème de jeu. Si des comportements doivent être proposés comme modèles, ceux-ci doivent avoir été longuement examinés lors d’études longitudinales. 308 Communiqué de presse du 21 novembre 2006 de la World lottery association : http://www.world-lotteries.org/news/wla_news_1.php?news_id=2592 309 (a) Voir à la page 2 dans : Dickerson, M. (1998). EGM players and responsible gambling. NAGS Practitioners Conference Proceedings (2000), Melbourne: National Association of Gambling Studies (pp. 33-42). (b) Voir aux pages 4 et 8 dans : Blaszczynski, A. (2001). Harm minimisatation strategies in gamblbling: An overview of international initiatives and interventions. Melbourne: Australian Gambling Council. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 176 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 177 6.2.7 La restriction à des mesures qui n’interviennent pas directement dans le processus pathogène qui conduit aux dommages Les mesures qui empêchent le joueur de se suicider ou de perdre son pouvoir de dépenser, sans régler fondamentalement le problème de jeu, pourrait n’avoir d’autre conséquence que de maintenir les joueurs dans un cycle continuel de dommages. C’est particulièrement le cas des contrats d’auto-exclusion dont la durée ne dépasse pas une année ou deux. Généralement, le joueur excessif ne demande pas d’aide avant d’avoir perdu des montants d’argent qu’il en pouvait pas perdre. Durant la durée de l’auto-exclusion, un contrôle plus efficace de la dépense au jeu peut aider le joueur à restaurer sa capacité financière. Toutefois, parce que le problème de dépendance n’est pas réglé, une nouvelle perte de contrôle se produira plausiblement dès que le comportement de jeu reprendra. En aidant ainsi le joueur à se maintenir continuellement à la surface entre la santé et l’insanité, mais sans le sortir de la dépendance, la mesure de prévention pourrait être iatrogène en maintenant le joueur dans un cycle continuel de rechutes. Encore une fois, ce sont des études longitudinales sur des joueurs réguliers représentatifs qui peuvent renseigner les chercheurs sur ce danger. 6.3 Aperçu des mesures implantées dans d’autres juridictions S’il est si difficile de discerner les fondements des mesures de protection proposées pour les salons de jeux, c’est parce que le Québec n’est pas un leader en matière de développement des mesures de protection. À peu près toutes les mesures sont copiées ou importées de l’historique et du savoir faire d’organisations étrangères. Les concepteurs ne sont pas au Québec, et ceux-ci n’ont pas travaillé à partir du contexte qu’on y trouve. La firme Holland Casino a été le principal consultant qui a guidé la conception des casinos québécois310. Pour approfondir les fondements des mesures que cette firme a conseillées, il faut retracer des documents écrits en néerlandais302. Cela ne laisse guère de chance aux spécialistes de la santé publique pour apprécier la justesse des mesures de protection. En contrepartie, les ALV ayant été achetés de compagnies américaines, on y décèle davantage des influences que l’on retrouve regroupées dans l’American Gaming Association. Cet organisme travaille, au profit de l’entreprise privé, à minimaliser les contraintes d’exploitation imposées par les gouvernements. Les mesures, dont l’American Gaming Association fait la promotion, sont des réponses à des questions qui ne se posent pas nécessairement au Québec. En effet, le gouvernement du Québec est l’actionnaire unique de Loto-Québec. À titre de régulateur, il n’a pas à adopter des mesures pour se forcer à adopter des mesures à titre d’opérateur. 310 (a) Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1837, CI-1838, CI1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec. (b) Déclaration de monsieur Claude Quinn, directeur général adjoint aux enquêtes criminelles et aux supports techniques de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1837, CI-1838, CI-1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 177 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 178 6.3.1 Les mesures développées aux États-Unis La situation actuelle des AÉJ aux États-Unis est l’aboutissement d’un long historique qui incite les gouvernements à contenir les AÉJ uniquement dans des grandes surfaces situées dans des casinos ou, à défaut, dans des hippodromes. Typiquement, les AÉJ ne sont pas disponibles ailleurs, par exemple dans les bars. Seuls quelques petits états ont recours à cette stratégie. Une concentration géographique des casinos, hébergeant une forte densité d’AÉJ, est ainsi la mesure de contrôle traditionnelle. Les joueurs qui se rendent dans des villes ou quartiers, où il y a des casinos, s’y rendent expressément pour jouer. Il s’agit d’une clientèle dite de destination. Le touriste qui s’y rend est fondamentalement un joueur. 6.3.1.1 L’échec initial de la distribution proximale Les premiers appareils de jeu sont apparus à la fin du 19ième siècle311. À la faveur d’une politique très libérale, des gobe-sous de toutes sortes étaient distribués partout dans des petits commerces. Avec leur expansion, des objections, surtout morales, ont obligé le gouvernement fédéral à légiférer. Les problèmes soulevés par la distribution proximale312 des appareils de jeu ont laissé des traces qui perdurent encore aujourd’hui. Finalement, en 1951, le Johnson Act a obligé le retrait des appareils dans les seuls casinos du Nevada ainsi que dans quelques établissements du Maryland et de l’Idaho313. À toutes fins pratiques repoussés en plein désert, les AÉJ ne deviennent accessibles qu’à l’occasion d’un voyage qui nécessite un déplacement de plus d’une journée. 6.3.1.2 Les mesures développées au Nevada Dès leur création en 1931, la principale crainte des autorités, ou des populations, à l’égard des casinos du Nevada a été leur emprise par les milieux interlopes. Le fonctionnement des casinos a été encadré par des mesures destinées à (1) éliminer la présence des criminels, (2) assurer l’intégrité des opérations, (3) forcer une reddition 311 Fey, M. (1997). Slot machines: a pictorial history of the first 100 years. Fifth edition. Reno, Nevada: Liberty Belle Books. 312 La distribution proximale des AÉJ consiste à en placer partout près des domiciles, des lieux de travail et des centres communautaires. À chaque site, il y a peu d’AÉJ. Il n’est jamais nécessaire de franchir une longue distance pour avoir accès à un AÉJ. Ce mode de distribution est à l’opposé de celui qui consiste à regrouper un très grand nombre d’AÉJ dans des grandes surfaces rapprochées géographiquement. 313 Voir aux pages 141 à 148 dans : Fey, M. (1997). Slot machines: a pictorial history of the first 100 years. Fifth edition. Reno, Nevada: Liberty Belle Books. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 178 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 179 réelle des comptes, et (4) garantir l’honnêteté des jeux314. Les premières mesures répondaient ainsi à des objectifs de sécurité et d’intégrité. Avec le Johnson Act en 1951, les casinos du Nevada ont dû héberger les gobe-sous qu’ils ont transformé en MAS315. Dès lors, les appareils de jeu ne devenaient accessibles que pour ceux qui étaient capables de voyager. Les plus pauvres n’avaient pas les moyens de payer pour le transport et l’hébergement. De plus, quels que soient les débordements ou les crimes causés par le jeu, ceux-ci survenaient loin de populations. En complément à la concentration géographique, l’isolement géographique a alors constitué une mesure additionnelle, répondant toujours à l’objectif de sécurité. Jusqu’en 1975, les intérêts de la clientèle ont été relativement stables. Les deux tiers de la dépense au jeu se faisaient aux tables de jeu. Puis, les MAS ont commencé à devenir de plus en plus populaires. En 1982, la dépense au jeu dans les MAS a surpassé celle aux tables de jeu (voir Figure 85). Figure 85 80% 70% 60% 50% 40% 30% 20% 10% 0% 1963 1964 1965 1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1976 1977 1978 1979 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 Proportion Proportion du revenu des casinos du Nevada attribuée aux MAS Jeux de tables MAS Données tirées de : DePolo, R., & Pingle, M. (1997). Nevada gaming: revenues and taxes (1945-95). Journal of gambling behavior, 13(1), 49-67. Ce changement est surtout attribuable à un changement de clientèle plutôt qu’à un changement de comportement. En effet, en raison d’un transport et d’un hébergement moins onéreux, la clientèle était davantage composée par la classe moyenne. Malgré ce changement considérable en ce qui concerne la santé publique, les objectifs des mesures de protection se semblent pas avoir été immédiatement adaptés. 314 Nichols, M. W. (1998). The impact of deregulation on casino win in Atlantic City. Review of industrial organization, 13, 713-726. 315 Situé près de la caisse dans les commerces au détail ou lieux de divertissement, le gobe-sous a été exploité afin de recueillir la menue monnaie que des commerçants remettaient aux clients. À leur arrivée dans les casinos, les gobe-sous ont été transformés en machines à sous, c’est-àdire en appareils où l’on joue avec des sous plutôt que pour des sous. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 179 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 180 6.3.1.3 Les mesures développées au New Jersey Le quasi monopole du Nevada a perduré jusqu’en 1978. À cette époque, le New Jersey a entrepris de sauver Atlantic City de la banqueroute en y ouvrant un second site de destination pour la clientèle des casinos316. Atlantic City est toutefois à seulement quelques heures d’autoroute d’importants centres urbains, notamment New York. Dans le but d’atténuer les craintes concernant l’ordre public dans l’est américain, la Casino control commission du New Jersey a initialement exercé un contrôle sévère sur les casinotiers. Mark Nichols317 rapporte des règles limitant les heures d’ouverture, le taux de remise minimal, la surface allouée aux MAS, la largeur des allées entre les MAS, et la taille des sièges. Les premières règles visaient à diminuer les problèmes de jeu, mais, compte tenu d’un intérêt démesurée des gestionnaires envers les MAS, les dernières devaient surtout assurer la tranquillité des joueurs aux tables de jeu, une plus grande diversité des activités de jeu ainsi que le confort des joueurs. Sortis de l’isolement, rapprochés des grands centres urbains, outre les objectifs de sécurité et d’intégrité, les impératifs d’ordre public ont incité les casinotiers à se préoccuper de leur image publique. Pour y parvenir, l’industrie du jeu a entrepris de développer des mesures d’autoréglementation318. L’objectif a été d’éviter d’être contrainte par trop de réglementations gouvernementales. En effet, ces réglementations pouvant être aussi diversifiées que ne le sont les états américains. Dès lors, l’attitude proactive des casinotiers a été efficace (1) à entretenir une collaboration harmonieuse avec les commissions de jeu, et (2) à obtenir une réglementation relativement uniforme d’un état à l’autre. 6.3.1.4 L’éclatement du principe de concentration La situation a changé radicalement en 1988. L’adoption de l’Indian Gaming Regulatory Act, par le gouvernement fédéral américain, autorise les nations amérindiennes à ouvrir des établissements de jeu là où des gouvernements exploitent déjà des activités de jeu319. Les nations amérindiennes utilisent ce privilège pour ouvrir des casinos qui ne 316 (a) New Jersey Statutes, L. 1977, c110, s. 1; amended L. 1995, c.18, s. 1. (b) Braunlich, C. G. (1996). Lessons from the Atlantic City casino experience. Journal of travel research, 3, 46-56. (c) New Jersey Casino Control Commission (1998, janvier). Casino gambling in New Jersey: a report to the National gambling impact study commission. Atlantic City , NJ : auteurs. (d) Nelson, M. K. (1999). Casino gambling in Atlantic City: a sure bet for whom? Proceedings for 1999 National planning conference: approaching the millennium. http://www.asu.edu/caed/HCDE/onlineplanner/proceedings/index.html (e) New Jersey Casino Control Commission (2002). Annual report 2002. Atlantic City , NJ : auteurs. 317 Nichols, M. W. (1998). The impact of deregulation on casino win in Atlantic City. Review of industrial organization, 13, 713-726. 318 Nichols, M. W. (1998). The impact of deregulation on casino win in Atlantic City. Review of industrial organization, 13, 713-726. 319 (a) Barker, T., & Britz, M. (2000). Jokers wild. Legalized gambling in the twenty-first century. Westport, Connecticut : Praeger. (b) McCulloch, A. M. (1994). The politics of indian gaming : tribe/state relations and american federalism. Publius, 24(3), 99-112. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 180 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 181 respectent plus les règles d’isolement et de concentration géographique. De plus, l’activité économique ainsi générée échappe au pouvoir de taxation et à la réglementation des états. L’IGRA a provoqué une surenchère des établissements de jeu. Certains états américains ont choisi de collaborer avec les nations amérindiennes et de partager les revenus des casinos amérindiens. D’autres états ont choisi de les rivaliser par des casinos d’état ou des casinos commerciaux taxables. Là où il n’y a pas de casino, des AÉJ on été distribués dans des hippodromes. Là où cela n’est pas possible, des états moins fortunés tentent d’endiguer l’évasion de la dépense au jeu en ayant plutôt recours à des AÉJ distribués en mode proximal, c’est-à-dire partout près des domiciles, des lieux de travail et des centres communautaires320. Cette dernière réponse a exigé la création d’un nouveau type d’AÉJ : l’ALV321. Contrairement au Canada, il y a cependant peu d’endroits où les gouvernements ont autorisé un accès à des AÉJ dans des bars322, c’est-à-dire ailleurs que dans des grandes surfaces dédiées spécifiquement au jeu. En 2005323, dix états exploitaient des AÉJ dans des salons de jeux situés dans des hippodromes : le Delaware (1995), l’Iowa (1995), la Louisiane (1992), le Maine (2005), New York (2004), le Nouveau-Mexique (1999), l’Oklahoma (2005), la Pennsylvanie (2006), le Rhode Island (1992), et la Virginie Occidentale (1994). Quatre autres états s’y ajoutent324. Ce sont la Floride, l’Arkansas, le Minnesota et le New Hampshire. Six325 326états exploitent des ALV distribués en mode 320 Voir aux pages 30 à 35 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 321 Parmi les AÉJ, les MAS se distinguent des ALV surtout par leur lieu d’exploitation. Les MAS sont situées dans les casinos. Des centaines, sinon des milliers, sont regroupées dans des grandes surface de jeu. Elles n’offrent qu’un seul jeu. Les ALV sont conçus pour être exploités, isolément, en dehors des établissements de jeu, notamment dans des commerces dont le jeu n’est pas la raison d’être … en principe! Ce sont de véritables micro-casinos autonomes qui offrent plusieurs types de jeu (jeux de lignes, jeux de cartes, keno). Requérant peu d’entretien, les ALV deviennent de plus en plus le type d’appareil sélectionné par les gestionnaires de racinos, c’est-à-dire les salons de jeux situés dans les hippodromes. 322 Outre le Nevada, ce sont les états moins populeux du Montana, du Dakota du Sud, de l’Oregon, de la Louisiane et de la Virginie Occidentale. Limités aux hippodromes ou casinos, des ALV existent aussi en Iowa, au Rhode Island, au Delaware, au Nouveau-Mexique et dans l’état de New York. En l’an 2000, la Caroline du Sud a éradiqué les ALV qu’elle avait antérieurement autorisés. Aux prises avec un marché gris, l’état de Géorgie a suivi en 2002. 323 American gaming association. (2006). State of the states. http://www.americangaming.org/assets/files/2006_Survey_for_Web.pdf 324 Selon le site http://www.casinocity.com/casinos.html (consulté le 18 février 2007). 325 La Caroline du Sud a autorisé des ALV entre 1986 et l’an 2000. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 181 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 182 proximal : la Louisiane (1991), le Montana (1986), le Nevada (1931), l’Oregon (1992), le Dakota du Sud (1989) et la Virginie Occidentale (1994). 6.3.1.5 Les mesures initiales des premiers états américains qui ont implantés des ALV Avant l’IGRA, le Montana et la Caroline du Sud avaient déjà entrepris des tests pilotes en autorisant l’exploitation des APV à partir de 1986. L’intérêt des joueurs envers ces appareils démontrait le potentiel des AÉJ à capter rapidement une dépense au jeu considérable. En 1988, lorsque l’IGRA a entraîné l’émergence de nombreux casinos amérindiens, des états peu populeux n’ont pas été en mesure de rivaliser des établissements de jeu aussi gigantesques que ceux de leurs concurrents. Il n’y avait pas que le concurrent amérindien. Certains états dépourvus de nations amérindiennes sur leur territoire ont aussi dû développer des moyens de contrecarrer l’offre de jeu d’états voisins qui sont en compétition avec les nations amérindiennes. S’inspirant du Montana, le Dakota du Sud a entrepris en 1989 d’endiguer cette fuite économique en opposant aux casinos des AÉJ conçus pour être distribués partout sur le territoire, c’est-à-dire des ALV. Ainsi, si l’attrait de l’ALV auprès des joueurs excessif est plus grand que celui des casinos, la dépense au jeu de la population pouvait être endiguée dans une activité taxable. La stratégie du Dakota du Sud a immédiatement été imitée par l’Oregon en 1990. Cet état n’a pas doté les ALV de caractéristiques destinées à protéger les joueurs. En revanche, l’Oregon a initié des démarches convaincantes pour dépister les joueurs excessifs et les orienter327 vers des ressources cliniques aptes328 à résoudre la 326 Depuis mai 2003, en plus des ALV dans les hippodromes, l’Iowa a distribué dans les bars un AÉJ, appelé TouchPlay, qui n’a pas le statut légal d’un ALV en raison d’une restriction imposée au caractère aléatoire de l’attribution des lots. Il s’agit néanmoins d’un appareil très similaire qui pourrait être classifié dans les AÉJ. Voir dans : Iowa department of management. (2006, March 8). TouchPlay task force report. http://www.dom.state.ia.us 327 Trois études de prévalences ont été réalisées afin de déterminer la quantité des ressources cliniques qui devaient être rendues disponibles : (a) Volberg, R. A. (1997). Gambling and problem gambling in Oregon : report to the Oregon gambling addiction treatment foundation. Northampton, MA: Gemini research. (b) Volberg, R. A. (2001). Changes in gambling and problem gambling in Oregon: results from a replication study, 1997 to 2000. Northampton, MA: Gemini research. (c) Moore, T. (2006). The prevalence of disordered gambling among adults in Oregon : a replication study. Portland, OR : Oregon gambling addiction treatment foundation. Voir : http://www.gamblingaddiction.org/ 328 Le monitorage de l’efficacité des programmes cliniques a ensuite été l’objet d’un suivi constant : (a) Moore, T. (2001). Gambling treatment programs evaluation update 2000-2001. Salem, OR: Department of Human Services, Office of Mental Health and Addictions Services. (b) Moore, T. (2003). Oregon gambling treatment programs evaluation update 2002. Salem, OR: Department of Human Services, Office of Mental Health and Addictions Services. (c) Moore, T. L., & Marotta, J. J. (2004). Gambling treatment programs evaluation update – 2003. Salem, OR: Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 182 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 183 dépendance au jeu. Dès lors, la population de l’Oregon pouvait devenir moins vulnérable à l’égard de l’offre de jeu des juridictions concurrentes. Les risques de fuite économique étaient colmatés non pas en rivalisant la concurrence, mais solvant la dynamique psychologique qui aurait pu inciter des citoyens de l’Oregon à dépenser excessivement dans des activités de jeu non taxables. Les ressources d’aide et cliniques ont été financées à même les revenus des ALV. En 1994, l’Iowa a utilisé les AÉJ de la même manière, sauf que la distribution n’a pas été aussi proximale. Les AÉJ ont surtout été installés dans des grandes surfaces situées dans les hippodromes. Des AÉJ étaient aussi disponibles dans des casinos répartis partout en Iowa. Les appareils n’étaient pas dotés de mesures de prévention, mais un programme de dépistage329 et de traitement330 a été immédiatement mis en place. Similairement, en 1992, le Rhode Island eu recours à des ALV distribués dans les hippodromes afin de contrer une fuite économique vers les casinos amérindiens gigantesques du Connecticut. Toutefois, la disponibilité des ressources cliniques331 a un peu tardé, n’étant véritablement disponible qu’en 1999. En 1996, afin de contrer l’attrait des casinos d’Atlantic City, le Delaware a aussi utilisé des ALV dans les hippodromes afin de dépister et de traiter les joueurs excessifs332. On constate, dans ces états américains, que l’implantation des ALV n’a pas été accompagnée de mesures destinées à prévenir le jeu excessif. Cela aurait été contraire à l’objectif d’endiguement de la dépense excessive qui requiert un repérage des joueurs excessifs. Il faut donc les voir concrètement. À la place, des programmes de dépistage et de traitement ont été immédiatement implantés afin de résoudre la dépendance au jeu. Au départ, du moins, ces états ne semblent pas avoir cherché à obtenir un revenu maximal des AÉJ. L’objectif prioritaire a été de conserver l’argent des joueurs dans l’économie de ces états. À noter, cependant, qu’il n’est pas encore établi que le dépistage des joueurs excessifs a été suffisant. Sans un dépistage quasiment parfait, il existe de sérieux problèmes d’éthique à ne pas mettre les joueurs en garde contre les dangers des ALV. Department of human services, Office of mental health and addictions services. Voir : http://www.gamblingaddiction.org/ 329 Volberg, R. A. (1995). Gambling and problem gambling in Iowa: a replication survey. Roaring Spring, PA: Gemini research. 330 (a) Iowa department of public health. (1998, décembre). Iowa gambling treatment program. Des Moines, IA: auteurs. (b) Shaffer, H. J., LaBrie, R. A., LaPlante, D. A., & Kidman, R. C. (2002, October 25). The Iowa department of public health gambling treatment services : four years of evidence. Boston, MA : Harvard medical school. Division on addictions. Technical report #101102-200. 331 Voir le site du Rhode Island Hospital où ce traitement est décrit et analysé: http://www.lifespan.org/rih/services/mentalhealth/gambling/ 332 (a) Mateja, W., Wilson, R., & Ableman, B. (1998). A Survey of gambling in Delaware. http://www.udel.edu/healthserpolresgrp/Publications.htm (b) Wilson, R., Collins, J., & Powell, P. (1998). Focus groups with treatment personnel problem gamblers and families of gamblers. http://www.udel.edu/healthserpolresgrp/Publications.htm Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 183 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 184 Dans la mesure où la stratégie est de retenir l’argent du jeu dans la juridiction, il était important d’implanter des ALV capables d’exercer sur les joueurs un attrait plus puissant que celui des casinos des autres juridictions. Les paramètres de jeu sont réglés en conséquence. Lorsque les états en profitent pour détecter rapidement les joueurs excessifs et les orienter vers des services cliniques, cette puissance des ALV peut être utilisée positivement. Par contre, lorsque les joueurs sont laissés sans ressources, les ALV constituent des appareils potentiellement extrêmement dommageables. Dans cette situation, des joueurs sans aide en viennent à commettre les gestes morbides que dénoncent les médias, dont le suicide. Dans cette stratégie d’endiguement, les mesures de prévention du jeu excessif ne sont donc pas souhaitées parce qu’elles retarderaient le dépistage et le traitement des joueurs. D’un point de vue éthique, cette stratégie exige que le dépistage se fasse très rapidement, que l’accessibilité au traitement soit facile, et que celui-ci parvienne à résoudre la dépendance au jeu. 6.3.1.6 Les mesures des appareils TouchPlay en Iowa À partir de 2003, l’Iowa a quelque peu changé sa stratégie en implantant, en mode proximal, des AÉJ dotés de caractéristiques visant à prévenir les problèmes de jeu. Ceci répondait à un besoin d’augmenter les revenus de l’état en n’obtenant que des revenus provenant des joueurs occasionnels. L’Iowa333 disposait déjà de 10 casinos commerciaux, de 4 casinos amérindiens, et de 3 salons de jeux dans des hippodromes. Ces marchés étaient apparemment saturés. Ainsi, l’état a investi dans un système d’AÉJ, appelés TouchPlay334, distribués selon un mode proximal. Afin d’écarter les joueurs excessifs des appareils TouchPlay et des autres établissements de jeu, il existe en Iowa une banque de données centrale informatisée qui maintient à jour une liste de personnes inscrites au programme d’auto-exclusion. Pour pouvoir jouer sur un AÉJ de type TouchPlay, il faut d’abord répondre à des questions qui impliquent un engagement selon quoi la personne affirme avoir 21 ans ou plus et ne pas être inscrite au registre d’auto-exclusion. L’argent ne peut être inséré qu’à cette condition. Pour encaisser un coupon de remboursement, il est nécessaire d’inscrire son numéro de permis de conduire. Dès lors, en communiquant avec la banque de données centrale, il est possible de vérifier avant paiement si la personne avait moins de 21 ans ou était sur la liste d’auto-exclusion. Dans ce cas, le solde ne peut pas être encaissé. Un autre intérêt des appareils TouchPlay réside dans le mécanisme de tirage des lots. Il s’agit d’un tirage sans remise. Lorsque l’appareil débute un cycle, tous les lots sont 333 American gaming association. (2006). State of the states. http://www.americangaming.org/assets/files/2006_Survey_for_Web.pdf 334 Les appareils de type TouchPlay sont similaires aux ALV quoique les lots ne sont pas attribués selon une formule complètement aléatoire. Voir dans : Iowa department of management. (2006, March 8). TouchPlay task force report. http://www.dom.state.ia.us Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 184 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 185 disponibles. Au fur et à mesure que les lots sont gagnés, ils ne sont plus disponibles avant le début d’un nouveau cycle. Cet événement reste inconnu du joueur. Il en résulte une situation où le gagnant du lot maximal n’a pas du tout intérêt à continuer à jouer sur l’appareil puisqu’il lui est impossible335 d’en obtenir un second avant longtemps. Évidemment, pour que cette mesure de protection puisse agir, il ne faut pas qu’il y ait un autre appareil dans le voisinage immédiat. Malheureusement, la popularité des AÉJ de type TouchPlay a rapidement instauré une grande rivalité entre les casinos et les détaillants qui a conduit à l’arrêt de ce projet336. La légalité d’un système de tirage sans remise est aussi incertaine337. 6.3.1.7 Les mesures associées au savoir-faire des compagnies privés Bien que les revenus des AÉJ proviennent en majeure partie des joueurs pathologiques (voir les sections 3.2.3.3 et 3.2.4.3 aux pages 79 et 85), celui, qui en vient à commettre des gestes morbides, risque de causer une importante diminution des profits en raison des pressions populaires qui pourraient forcer les organismes de contrôle à imposer des règles plus sévères. Pour se protéger, les établissements ont développé des mesures qui sont issues d’un savoir-faire qui s’est développé graduellement. De nos jours, ces mesures sont rassemblées dans des codes de commercialisation338 qui tendent à être 335 Dans le système habituel avec remise des lots, le lot maximal peut être obtenu, en principe, dès la partie suivante. Il n’y a aucun incitatif à ne pas rejouer son gain. 336 (a) Arthur, T. (2006, February 17). TouchPlay machines bring profits, controversy to Iowa. Iowa state daily. www.iowastatedaily.com/news/2006/02/17/News/Touchplay.Machines.Bring.Profits.Controversy. To.Iowa-1618157.shtml (b) Henderson, O. K. (2006, February, 23). TouchPlay task force: gambling machines should only be certain businesses. Radio Iowa. www.radioiowa.com/gestalt/go.cfm?objectid=2AADA31F2814-4B55-A3A683DA0EB9944C (c) Eby, C. (2006, March 14). House goes along with TouchPlay ban. Quad City Times. www.qctimes.com/articles/2006/03/14/news/local/doc44177d2825178139650079.txt (d) Henderson, O. K. (2006, October 21). Nussle accuses Culver of making « secret deal » with TouchPlay industry. Radio Iowa. www.radioiowa.com/gestalt/go.cfm?objectid=E42535A9-D05D4681-B9D3FE61BF7DC759&dbtranslator=local.cfm 337 Dans les salles de bingo du Québec, un système de tirage sans remise est exploité avec des loteries instantanées de type pulltab. Une boîte ne contient qu’un nombre limité de billets gagnants. Lorsque les ventes tardent, et que le lot maximal n’est pas sorti, des organisateurs annoncent publiquement un changement à la probabilité de gain. Il n’existe plus d’égalité entre les premiers acheteurs et les derniers. 338 Loto-Québec. (2006). Le code de commercialisation responsable. Montréal, QC. http://www.loto-quebec.com/pdf/code_commercialisation.pdf Parmi les autres pays: (a) American gaming association. (2003). Code of conduct for responsible gaming. http://www.americangaming.org/programs/responsiblegaming/code_of_conduct.cfm (b) Harrah’s entertainment. (2000). Code of commitment. http://www.harrahs.com/harrahs-corporate/about-us-code-of-commitment.html (c) World lottery association. (2006). WLA responsible gaming principles. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 185 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 186 de plus en plus uniformes, souvent en adoptant intégralement de code de l’American gaming association ou celui de la World lottery association. Ces mesures de savoir-faire sont quelque peu équivoques parce qu’elles tentent à la fois de protéger les établissements tout en protégeant les joueurs. Il n’est pas certain que les intérêts des joueurs subsistent lorsqu’ils viennent en conflit avec ceux des établissements. L’absence d’études publiques, quant à leurs fondements, ne permet pas d’en faire une évaluation scientifique. 6.3.1.8 Les initiatives pionnières du casinotier Harrah’s entertainment Les dénonciations médiatiques des dommages subis par les joueurs dans les établissements de jeu constituent une situation que l’industrie du jeu dénonce depuis longtemps comme n’étant pas représentative du bonheur vécu au jeu par la majorité des joueurs339. La notion de jeu responsable est une initiative attribuée au casinotier américain Harrah’s entertainment qui l’a développé dès le début des années 80. Confrontée à l’éventualité de réglementations gouvernementales plus contraignantes, cette organisation a été proactive en assumant le leadership d’une stratégie d’autoréglementation de l’industrie du jeu. Le succès subséquent de la compagnie Harrah’s entertainment a démontré l’efficacité de cette stratégie pour éviter un resserrement de la réglementation gouvernementale, et pour conduire à une atténuation de la dénonciation médiatique. Depuis, cette compagnie a multiplié des initiatives qui ont été copiées ou adoptées par de nombreuses autres organisations de jeu. Compte tenu de l’origine du concept de jeu responsable, il importe de ne pas oublier qu’il a davantage été développé à des fins de marketing plutôt qu’à des fins de santé http://www.world-lotteries.org/documents/WLAgamingprinciples_0206.pdf (d) Australian gaming council. (2001). Responsible gaming code: a framework for responsible gaming. Melbourne, Victoria, Australia. http://www.austgamingcouncil.org.au/index.php (e) Games of chance project office. (2005). Code of conduct for promotional games of chance. The Hague, The Netherlands: Ministry of justice. http://english.justitie.nl/images/Code%20of%20conduct%20for%20promotional%20games%20of %20chance_tcm75-123707_tcm35-14273.pdf (f) VAN. (2004). VAN Ondernemerscode. Pays-Bas. http://www.vaninfo.nl/assets_VAN/pdf/20041104%20Ondernemerscode%20versie%201.4.pdf (g) Queensland office of gaming regulation. (2005). Queensland responsible gaming code of practice. Brisbane, Queensland, Australia. http://www.responsiblegambling.qld.gov.au/knowledge/industry-resources/code-ofpractice/CoP.pdf (h) Charity gaming association. (2006). CGA code of practice. Wellington, New Zealand. http://www.cga.org.nz/uploaded/060404_Final_CoP.pdf 339 Shaffer, H. J. (2003, February 25). A public health perspective on gambling : the four principles. AGA responsible gaming lecture series, 2(1), 1-27. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 186 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 187 publique. En effet, les mesures conséquentes n’ont pas été évaluées par des chercheurs indépendants. Elles ne sont pas davantage l’objet d’un examen publique. Depuis l’an 2000, un code de commercialisation énonce clairement les engagements que la compagnie exprime à l’égard de sa clientèle, de ses employés et des collectivités où elle est implantée340. La compagnie Harrah’s entertainment insiste pour rappeler que ses employés ne sont pas des travailleurs sociaux. Néanmoins, cette compagnie a initié des programmes de formation de ses employés afin de les guider dans la réponse que l’organisation souhaite apporter aux joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu. 6.3.1.9 Les recommandations de la National gambling impact study commission (NGISC) aux États-Unis en 1999 Créée par le Congrès américain en 1996, la NGISC341 a fait une vaste enquête nationale afin de répertorier l’ensemble de la situation du jeu aux États-Unis. En 1999, la commission a émis plusieurs recommandations, dont plusieurs ont été analysées lors du Forum sur le jeu pathologique qui s’est tenu à Montréal en novembre 2001342. En ce qui concerne le projet des salons de jeux, la commission a fait quelques recommandations qui méritent d’être rappelées. 340 Harrah’s entertainment, Inc. (2000). Code of commitment. 341 National Gambling Impact Study Commission. (1999, juin). National Gambling Impact Study Commission, Final report. Washington, DC: auteurs. 342 Voir à la section 3.1.3.1 aux pages 73-74 (ou pages 77-78 dans le document imprimé) dans : Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique : document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 187 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 188 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux 3.4 3-17 Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux The Commission recommends that warnings regarding the dangers and risks of gambling, as well as the odds where feasible, should be posted in prominent locations in all gambling facilities. (a) L’installation de mises en garde au sujet des dangers et risques du jeu sur ALV convient à l’environnement proposé par les salons de jeux. À chaque instant, au moins le tiers de la clientèle des ALV éprouve des problèmes de jeu. C’est l’endroit le mieux ciblé pour aider les joueurs excessifs. Lorsqu’ils débutent, les dommages associés au jeu sur les ALV atteignent rapidement une grande sévérité. Le traitement d’une dépendance au jeu à l’égard des ALV n’est pas parfaitement efficace à restaurer un état sain. (b) Afin de permettre aux joueurs de prendre une décision de jouer ou non véritablement rationnelle, les probabilités de gain doivent impérativement être affichées. Le taux de remise n’est pas une indication suffisante, ni réaliste, de la probabilité de gain. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 188 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 189 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux 3.6 3-18 The Commission received testimony that convenience gambling, such as electronic devices in neighborhood outlets, provides fewer economic benefits and creates potentially greater social costs by making gambling more available and accessible. Therefore, the Commission recommends that states should not authorize any further convenience gambling operations and should cease and roll back existing operations. Les ALV, distribués en dehors des établissements de jeu de l’état, devraient être complètement retirés dans les agglomérations où il existe déjà suffisamment d’ALV pour financer un salon de jeux. 3.12 3-18 The Commission recommends that states should refuse to allow the introduction of casinostyle gambling into pari-mutuel facilities for the primary purpose of saving a pari-mutuel facility that the market has determined no longer serves the community or for the purpose of competing with other forms of gambling. Il ne faut pas tenter d’utiliser des AÉJ afin de relancer l’industrie des courses de chevaux. Les AÉJ relancent davantage le pari hors piste que les courses locales. 3.18 3-19 The Commission recommends that jurisdictions considering the introduction of new forms of gambling or the significant expansion of existing gambling operations should sponsor comprehensive gambling impact statements. Such analyses should be conducted by qualified independent research organizations and should encompass, in so far as possible, the economic, social, and regional effects of the proposed action. C’est le cas particulier du projet des salons de jeux qui n’a pas été l’objet d’études sérieuses en ce qui concerne les problèmes de jeu et la protection de la population. 3.19 3-19 The Commission recommends that states with lotteries reduce their sales dependence on low-income neighborhoods and heavy players in a variety of ways, including limiting advertising and number of sales outlets in low-income areas. Des efforts vont être faits en ce sens. Un monitorage devra en établir l’efficacité. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 189 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 190 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux 3.20 3-19 Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux The Commission recommends that states with lotteries create a private citizen oversight board. The board would make data-based policy decisions on types of games to offer, marketing strategies to follow, etc. Le gouvernement, désirant diminuer le nombre d’organismes de contrôle, vient d’écarter la création du Conseil québécois sur le jeu responsable. En matière de jeu, en raison de la mixité des subventions, de la non obligation de répondre aux questions des citoyens et de l’absence d’un protocole crédible d’audition des plaintes, les centres universitaires de recherche ne peuvent pas assumer le rôle de protection des joueurs. 3.22 4.1 b) 3-19 4-19 Heavy governmental promotion of lotteries, largely located in neighborhoods, may contribute disproportionately to the culture of casual gambling in the United States. The Commission therefore recommends that states curtail the growth of new lottery games, reduce lottery advertising, and limit locations for lottery machines. Au-delà du nombre d’appareils, les salons de jeux constituent un développement majeur de l’offre de jeu au Québec. La notoriété des sites, la densité des appareils, la diversité des jeux, la dangerosité croisée, l’accessibilité, la banalisation du jeu seront toutes augmentées. The Commission respectfully recommends that all relevant governmental gambling regulatory agencies require - as a condition of any gambling facility’s license to operate - that each applicant adhere to the following: Appoint an executive of high rank to execute and provide ongoing oversight of the corporate mission statement on problem and pathological gambling. Loto-Québec doit préciser à qui appartient cette tâche. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 190 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 191 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux d) Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux Under a state “hold harmless” statute, refuse service to any customer whose gambling behavior convincingly exhibits indications of problem or pathological gambling. Il s’agit d’une pratique déjà implantée, aux Pays-Bas, par le principal consultant de LotoQuébec en matière de casino : Holland casino (voir section 6.3.3.1.1 à la page 219). Non seulement, l’établissement a le pouvoir de refuser de servir un client, dès que celui-ci donne l’indication d’éprouver un problème de contrôle au jeu, un gestionnaire doit établir un contact personnel avec cette personne et vérifier son besoin d’aide. Aux Pays-Bas, cette expertise existe. Ce programme fonctionne. Cette mesure doit impérativement être intégrée aux salons de jeu. e) 4.2 Under a state “hold harmless” statute, respectfully and confidentially provide the customer (as described above) with written information that includes a stateapproved list of professional gambling treatment programs and staterecognized self-help groups. 4-19 La liste des resources disponibles est surtout accessible par un appel à la ligne 1-866-SOSJEUX. The Commission recommends that each state and tribal government enact, if it has not already done so, a Gambling Privilege Tax, assessment, or other contribution on all gambling operations within its boundaries, based upon the gambling revenues of each operation. A sufficient portion of such monies shall be used to create a dedicated fund for the development and ongoing support of problem gambling-specific research, prevention, education, and treatment programs. The funding dedicated for these purposes shall be sufficient to implement the following goals: Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 191 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 192 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux a) Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux Undertake biennial research by a non-partisan firm, experienced in problem gambling research, to estimate the prevalence of problem and pathological gambling among the general adult population. Specific focus on major subpopulations including youth, woman, elderly and minority group gamblers should also be included. An estimate of prevalence among patrons at gambling facilities or outlets in each form of gambling should also be included. Au Québec, les études de prévalence du jeu ont eu lieu en 1989, 1996 et 2002. Les échantillons sont trop petits pour former des sous-groupes de plus de deux ou trois catégories. Les estimations des taux de prévalence pour chaque activité sont déficientes. 4.6 4-20 The Commission recommends that each staterun or approved gambling operation be required to conspicuously post and disseminate the telephone numbers of at least two state-approved providers of problem-gambling information, treatment, and referral support services. Tous les joueurs sont orientés vers un numéro unique aboutissant au Centre de référence du Grand Montréal. 7.1 7-30 Because of the easy availability of automated teller machines (ATM’s) and credit machines encourages some gamblers to wager more than they intended, the Commission recommends that states, tribal governments, and pari-mutuel facilities ban credit card cash advance machines and other devices activated by debit or credit cards from the immediate area where gambling takes place. La définition de la proximité de l’aire de jeu pose une difficulté. De préférence, les guichets devraient être situés à l’extérieur des salons de jeux (bâtiments) sinon dans le hall près de la sortie. Ce sont surtout les joueurs excessifs qui les utilisent. 7.3 et 7.4 7-30 7.3 The Commission recommends to state, local and tribal governments that (when considering the legalization of gambling or the repeal of gambling that is already legal) they should recognize that, especially in economically depressed communities, casino gambling has demonstrated the ability to generate economic development through the creation of quality jobs. Sans étude crédible, le projet des salons de jeux ne permet pas d’inférer aucune conclusion à cet égard. 7.4 The Commission recommends to state, local and tribal governments that (when considering the legalization of gambling or the repeal of gambling that is already legal) they should recognize that lotteries, Internet gambling, and noncasino electronic gambling devices do not create a concentration of good quality jobs and do not generate significant economic development. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 192 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 193 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux 7.5 7-30 The Commission recommends to state, local and tribal governments that (when they are considering the legalization of casino gambling) casino development should be targeted for locations where the attendant jobs and economic development will benefit communities with high levels of unemployment and underemployment and a scarcity of jobs for which the residents of such communities are qualified. Les salons de jeux doivent être écartés des quartiers pauvres. 7.6 7-30 The Commission recommends to state, local and tribal governments that studies of gambling’s economic impact and studies contemplating the legalization of gambling or the repeal of gambling that is already legal should include an analysis of gambling industry job quality, specifically income, medical benefits, and retirement benefits, relative to the quality of other jobs available in comparable industries within the labor market. Ces études n’ont pas été réalisées. 7.7 7-30 The Commission recommends to state, local and tribal governments that when planning for gambling-related economic development, communities with legal gambling or that are considering the legalization of gambling should recognize that destination resorts create more and better quality jobs than casinos catering to a local clientele. Les casinos étant plus éloignés, les salons de jeux consistent à rapprocher les grandes surfaces de jeu des quartiers densément peuplés. Leur clientèle sera essentiellement locale. 8.3 8-2 The Commission recommends that Congress direct all federal agencies conducting or supporting longitudinal research panels to consider the feasibility of adding a gambling component to such surveys and, where appropriate, entertain applications to add such components that are determined to be of high scientific merit through scientific peer review. In addition to addressing gambling behavior, these components should include questions about treatment-seeking behavior, in order to begin to address the issue of the unmet need for treatment, which is currently unknown. Un premier pas devrait plutôt être de rendre accessibles à la communauté les rapports de recherche qui existent déjà et qui, parfois, sont introuvables. Un second pas devrait être la production de rapports techniques qui procurent suffisamment d’informations pour chacun puisse juger de la méthodologie et de la validité de l’étude. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 193 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 194 Tableau 30 Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux 8.17 8-5 Recommandations Commentaires concernant les salons de jeux The Commission respectfully recommends to state and tribal governments that they should authorize and fund every 2 years an objective study of the prevalence of problem and pathological gamblers among their state’s residents by a nonpartisan research firm, whose work meets peer review standards. Specific focus on major sub-populations including youth, women, elderly and minority group gamblers should also be included. An estimate of prevalence among patrons at gambling facilities or outlets in each form of gambling should also be included. Au Québec, les études de prévalence du jeu ont eu lieu en 1989, 1996 et 2002. Les échantillons sont trop petits pour former des sous-groupes de plus de deux ou trois catégories. Les estimations des taux de prévalence pour chaque activité sont déficientes. À l’égard des salons de jeux, dans l’éventualité d’une conformité avec les recommandations listées dans le Tableau 30, le gouvernement du Québec, et Loto-Québec, satisfont, au moins en partie343, aux recommandations 3.1, 3.2 344, 3.9, 3.11, 3.14, 3.15, 3.16, 3.21, 4.1a, 4.1c, 4.1f, 4.2c, 4.2d, 4.2e, 4.3, 4.4, 4.5, 7.2, 7.9. Les articles 3.10, 3.17, 4.2b, 7.8 ne concernent pas le projet des salons de jeux. Sauf les recommandations 8.3 et 8.17, la section 8 traite de recommandations qui devraient faire l’examen lors de discussions publiques en vue de produire une politique générale du jeu au Québec. Les autres recommandations ne s’appliquent pas. 343 Des initiatives sont entreprises sans qu’elles ne soient nécessairement suffisantes. Pour le savoir, il faut vérifier leur efficacité empiriquement. 344 En tenant compte que l’âge de la majorité est 18 ans au lieu de 21 ans. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 194 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 195 6.3.2 Les mesures développées au Canada Au Canada, avant 2001, il n’y a aucune publication concernant une étude destinée à rendre les ALV moins dangereux ou moins dommageables. L’intérêt subit des Canadiens survient après les travaux de la National gambling impact study commission (NGISC)341 et de la Productivity commission378 en Australie; dont les rapports ont été publiés en 1999. Essentiellement, trois provinces y travaillent : la Nouvelle-Écosse, l’Alberta et le Québec par l’intermédiaire des initiatives du CQEPTJ. L’objectif est typiquement de trouver des moyens de réduire les dommages chez les joueurs excessifs sans que les joueurs récréatifs ne soient affectés par les mesures de protection. Ces mesures visent surtout à renforcer le contrôle des joueurs sur leur dépense au jeu, du moins à éviter que le joueur ne perde le contrôle parce qu’il est trop stimulé ou qu’il a perdu la notion du temps. Quelques mesures commencent à prouver leur utilité quoique celles-ci demeurent toujours en périphérie du processus pathogène. 6.3.2.1 Une étude pionnière Une première étude345 a comparé les conséquences d’appareils offrant (1) des vitesses de jeu réduire, (2) l’absence de sons, (3) l’affichage du solde en argent plutôt qu’en crédit, ainsi que (4) la désactivation du bouton d’arrêt. Malheureusement, le faible nombre de participants n’a pas permis de tester chacune de ces modifications isolément, puis en interaction. Il en résulte une situation où les effets de plusieurs modifications structurales se confondent. Les résultats indiquent que les joueurs pathologiques n’apprécient pas une réduction de la vitesse de jeu ou la disparition des sons produits par l’appareil. Toutefois, à comparer aux joueurs sans problème de jeu, ces modifications leur ont donné le même sentiment de pouvoir s’arrêter, alors qu’ils s’en sentent moins capables avec les paramètres usuels de jeu. De plus, la consultation d’un compteur de la dépense au jeu a aidé les joueurs pathologiques à cesser de jouer plus tôt. Bien que statistiquement significatif, cet effet semble néanmoins sans grand impact. Réalisée en laboratoire, cette étude ne permet pas de constater si ces mesures pourraient diminuer l’incidence de jeu pathologique. On connaît surtout leur impact global sur les attitudes des joueurs. Ces attitudes n’influencent pas nécessairement les comportements nocifs. 345 Loba, P., Stewart, S. H., Klein, R. M., & Blackburn, J. R. (2001). Manipulations of the features of standard video lottery terminal (VLT) games: effects in pathological and non-pathological gamblers. Journal of gambling studies, 17(4), 297-320. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 195 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 196 6.3.2.2 Les mesures de jeu responsable implantées en Nouvelle-Écosse La Nouvelle-Écosse a été la première juridiction en Amérique du Nord à publier des études consacrées à l’évaluation des modifications structurales des ALV. À trop vouloir en faire d’un seul coup, les résultats des premières études sont confus. Il est difficile de discerner quelle modification a causé quoi. Quoi qu’il en soit, ces études ne laissent pas entrevoir des bénéfices importants des modifications structurales qui ont été apportées aux ALV. Typiquement, ces études visaient à appuyer le joueur afin qu’il maintienne une perception adéquate du temps lorsqu’il joue sur les ALV. En contrôlant le temps, on estimait que le joueur pourrait mieux contrôler sa dépense au jeu. Cela n’a pas bien fonctionné. Les résultats ont été très maigres. Au lieu de demander préalablement au joueur combien de temps il a l’intention de jouer, il aurait été sans doute plus simple et plus efficace de lui demander combien d’argent est-il prêt à perdre. Les résultats des deux derniers rapports de recherche présentent néanmoins des mesures qui apparaissent comme réellement efficaces. Ce sont la fermeture des ALV à minuit, la réduction de 25% du nombre d’ALV, la désactivation du bouton d’arrêt et la réduction de 30% de la vitesse de jeu. L’analyse des résultats est très complexe, très détaillée. Il n’est pas facile de la suite. C’est déjà une raison pour les aborder avec prudence. Comme en témoigne le texte suivant, la complexité rend difficile de conclure. Afin de ne pas surcharger le présent document d’analyse, nous estimons qu’un résumé détaillé de la première étude suffit à faire apprécier ces travaux. Contexte Les ALV sont apparus pour la première fois en Nouvelle-Écosse en mai 1991. Dix ans après leur implantation, les vieux modèles (ALV-vx) ont été remplacés par un modèle technologiquement plus avancé (ALV-1) qui incorporait quatre modifications structurales; cela dans le but d’inciter les joueurs à adopter des comportements conformes au concept de jeu responsable. Deux ans plus tard, des modifications additionnelles ont été apportées afin de poursuivre le remplacement des ALV-vx avec un modèle révisé (ALV-2). En janvier 2006, une troisième série de modification a donné naissance aux ALV-3. Plusieurs études ont conséquemment été publiées (voir Tableau 31). La liste des modifications structurales est présentée brièvement dans le Tableau 32. L’explication de ces modifications est détaillée ultérieurement dans ce texte. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 196 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 197 Tableau 31 Liste des études Étude Sigle Référence346 A NS-VL-RGF-2002 Schellinck, T., & Schrans, T. (2002, October). Video lottery responsible gaming feature research - final report. Halifax, NS: Atlantic lottery corporation & Focal research. B NS-VL-RGF-2003 Schrans, T., Grace, J., & Schellinck, T. (2004, October). 2003 NS VL responsible gaming features evaluation – final report. Halifax, NS: Atlantic lottery corporation & Focal research. C NS-VL-RGF-2004 Schrans, T., Schellinck, T., & Grace, J. (2004, December). 2004 NS VL self exclusion program process test. Final report. Halifax, NS: Focal research consultants, Ltd. D NS-VL-RGF-2005a Omnifacts Bristol research. (2005, September 21). Nova Scotia palyer card research project. Halifax, NS: Nova Scotia gaming corporation. E NS-VL-RGF-2005b Corporate research associates Inc. (2005, November). VLT time change – Findings report. Halifax, NS : Nova Scotia gaming corporation. F NS-VL-RGF-2006 Corporate research associates Inc. (2006, July). Video lottery program changes – impact analysis. Halifax, NS: auteurs, 346 Dans cette section, les références sont indiquées en fonction de la lettre correspondante à l’étude citée dans ce tableau, suivie du numéro de page. Par exemple, ( A 3-2 ) réfère à la page 3-2 du rapport : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002, October). Video lottery responsible gaming feature research - final report. Halifax, NS: Atlantic lottery corporation & Focal research. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 197 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 198 Tableau 32 Modifications apportées aux ALV en Nouvelle-Écosse Étude ALV A ALV-1 Modifications • • • • • • • • • B ALV-2 • • • • • • E ALV-3 • • Nouveaux jeux. Interface graphique améliorée. Ajout d’un accepteur de billets. Vitesse de jeu plus rapide. Affichage en dollars du montant de la mise, de la remise et du solde. Horloge visible à l’écran. Messages en mode fenêtre après 60, 90 et 120 minutes de jeu continu indiquant le temps écoulé. Après 145 minutes de jeu continu, un message en mode fenêtre indiquant un encaissement forcé dans cinq minutes. Après 150 minutes de jeu continu, un encaissement forcé se produit. Un coupon de remboursement est émis, le solde est mis à zéro et le chronomètre est réinitialisé. Avant de commencer à jouer, le joueur a la possibilité d’indiquer la durée souhaitée de la session de jeu. Un message en mode fenêtre apparaît après 30 minutes de jeu continu. Le message en mode fenêtre ne permet pas de jouer à moins que le joueur n’ait indiqué, oui ou non, s’il désire continuer. Augmentation de la visibilité de l’horloge. Élimination de l’affichage en crédits et augmentation de la visibilité des montants de la mise et du solde. Avertissement de 10 minutes, au lieu de 5, avant l’encaissement forcé après 150 minutes de jeu continu. Désactivation du bouton d’arrêt Réduction de la vitesse de jeu de 30%. La stratégie initiale de prévention de la Nouvelle-Écosse a consisté essentiellement à appuyer les joueurs, uniquement durant la session de jeu, en les aidant à maintenir une représentation correcte du temps écoulé et de la dépense au jeu ( A 1-3 ). 6.3.2.2.1 Étude A – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-1) Le remplacement des ALV-vx s’est fait en plusieurs étapes. La première a consisté à implanter des ALV-1 à partir de mai 2001 ( A 2-11 ). En janvier 2002, lorsque cette étape a été complétée, les ALV-1 remplaçaient environ 38% des ALV-vx ( A 1-1 ). L’étude A a été consacrée à mesurer les impacts de ces nouveaux appareils. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 198 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 199 Tableau 33 Répartition des joueurs selon le modèle d’ALV à chaque étape de la recherche NS-VL-RGF-2002 Pré-test Post-test 1 Post-test 2 Post-test 3 T1 T2 T3 T4 5 au 25 juin 2001 20 août au 13 septembre 2001 5 au 22 novembre 2001 23 janvier au 4 février 2002 179 139 108 71 34 83 87 93 213 222 195 164 Temps de mesure Date A N. de joueurs sur les ALV-vx B N. de joueurs sur les ALV-1 B N. total de joueurs N. joueurs qui ont cessé de jouer C 58 Taux d’adoption des ALV-1 16% 37% 44% 57% Utilisation occasionnelle des ALV-1 au cours du dernier mois D 37% 66% 61% 71% A Voir A 1-18 Voir A 3-9 C Voir A 1-13 et 1-14 D Voir A 2-51 B Malheureusement, les auteurs n’ont pas pu réaliser une évaluation du comportement des joueurs avant le début de l’implantation des ALV-1 ( A 1-4 et 1-10 ). Lorsque les chercheurs ont commencé à recruter des participants, bien que l’implantation ne faisait que commencer, 16% des joueurs au pré-test jouaient déjà régulièrement sur les nouveaux modèles (voir Tableau 33). La première étape du remplacement partiel des ALV-vx ne s’est terminée qu’en janvier 2002, c’est-à-dire à peine quelques jours avant la mesure à T4. En ce sens, les expressions pré-test et post-test sont ici inappropriées. Il est préférable d’utiliser les expressions associées aux temps de mesure. 6.3.2.2.1.1 Plan de recherche de l’étude A Les joueurs ont été recrutés in situ dans 81 sites de jeu. Pour être sélectionné ( A 1-13 ), il fallait être un joueur régulier347 sur ALV de 19 ans ou plus et être résident de la Nouvelle-Écosse. Les résultats de l’étude A ont été analysés par les auteurs selon trois répartitions des joueurs. • 347 Dans la section 2 du rapport, les données sont analysées selon que les joueurs aient adopté, ou non, à T4 les ALV-1 au moins 75% des fois qu’ils ont joué. Parce que la plupart des joueurs à T4 ont été exposés à l’existence des ALV-1 Il fallait donc jouer régulièrement au moins une fois par mois. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 199 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 200 depuis six à huit mois, cette division n’est pas sensible à un effet de nouveauté ( A 4-5 ). Les adoptants à long terme sont alors comparés aux non-adoptants. • L’adoption des ALV-1 n’était pas nécessairement permanente. Certains joueurs sont revenus aux ALV-vx. Dans la section 3, l’analyse porte sur les sessions de jeu plutôt que sur les individus. Peu importe le temps de mesure, toutes les sessions de jeu réalisées sur les ALV-1 sont comparées aux sessions de jeu sur les ALV-vx. Les temps de mesure étant réunis348, certains participants contribuent aux données des sessions sur ALV-1 (ou sur ALV-vx) une, deux, trois ou quatre fois selon la constance de leur adoption des ALV-1 (ou des ALVvx). • Dans la section 4 du rapport A, les joueurs qui utilisaient surtout les ALV-vx à T1, et qui ont changé pour adopter surtout les ALV-1 à T4, constituent un groupe de 55 joueurs changeants. Ceux-ci ont été comparés à un groupe de joueurs stables composé des participants dont la préférence a été la même à T1 et à T4. Parmi les joueurs stables, 20 avaient déjà adopté les ALV-1 à T1, et 89 ont résisté à l’attrait des nouveaux modèles tant à T1 qu’à T4. Il aurait été préférable de ne pas inclure les 20 premiers joueurs, car le groupe des joueurs stables semble alors trop hybride pour vraiment agir à titre de groupe contrôle des joueurs changeants. Les conclusions de la section 4 sont à interpréter en conséquence, c’est-à-dire avec prudence. Enfin, lorsque les joueurs sont comparés en fonction de leur catégorie clinique, il s’agit de la seule évaluation qui a été faite à T1. Il n’a pas été vérifié si des joueurs ont développé une dépendance pathologique au jeu durant les neuf mois écoulés entretemps. Cela aurait été utile349 pour établir sans équivoque que les changements de comportement sont suffisamment importants pour conduire à une amélioration de la condition clinique des joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu. 6.3.2.2.1.2 Caractéristiques des nouveaux ALV Les ALV ont été modifiés dans le but d’offrir de nouveaux jeux, une interface graphique améliorée, un accepteur de billets ainsi que 5 caractéristiques destinées à favoriser le jeu responsable (page 1-1 et 5-1)350: 348 • Une horloge continuellement visible à l’écran • L’affichage du montant de la mise, de la remise et du solde en dollars plutôt qu’en crédits En anglais, l’expression pooled décrit mieux cette procédure. 349 Il aurait néanmoins fallu que les évaluations subséquentes se fassent après un ou deux ans de jeu régulier sur les ALV-1. 350 De plus, la vitesse de jeu s’avère plus rapide sur les nouveaux ALV ( A 2-41). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 200 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 201 • Des messages en mode fenêtre351 signalant qu’il s’écoulé 60, 90 ou 120 minutes depuis le début de la session de jeu. Le joueur peut alors indiquer qu’il désire ou non terminer la session de jeu. Par contre, la réponse du joueur n’est pas obligatoire. Si le joueur n’a pas répondu après 60 secondes, la fenêtre se ferme automatiquement et permet la poursuite de la session de jeu. • Un avertissement survenant, après 145 minutes de jeu continu, signalant qu’il ne reste plus que 5 minutes avant un encaissement forcé du solde. • Un encaissement forcé après 150 minutes de jeu continu. L’impact de ces caractéristiques est ainsi confondu avec l’avènement de nouveaux jeux, d’une interface graphique plus attrayante, une vitesse de jeu plus rapide ainsi que de la présence d’un accepteur de billets (A 1-5 ). Ceci limite considérablement la certitude des conclusions car il a pu y avoir des effets antagonistes. Les modifications structurales apportées aux ALV-1 visent ( A 1-3 ) surtout à appuyer les joueurs, durant la session de jeu, afin qu’ils ne perdent pas la notion du temps écoulé. L’horloge est une fonction passive qui requiert que le joueur décide expressément d’y porter attention. Les fenêtres en mode écran sont des fonctions actives qui s’exécutent automatiquement, indépendamment de la pensée du joueur. En contrepartie, il n’y a qu’une fonction passive, l’affichage de la mise et du solde en dollars, pour appuyer les joueur à ne pas perdre la notion de l’argent dépensé. Il n’y a alors aucune interruption du jeu qui a été faite en fonction de la dépense au jeu352. Les objectifs de jeu responsable doivent être atteints sans affecter les joueurs sans problème de jeu ou ceux à faible risque ( A 1-3, 1-24 et 2-24 ). Compte tenu de cette dernière exigence, il est difficile de prétendre qu’il s’agit de mesures préventives car leur impact n’est observable que chez les personnes qui éprouvent déjà des problèmes de jeu. 6.3.2.2.1.3 Attrait des ALV-1 Les ALV-1 ont suscité la curiosité des utilisateurs réguliers car 84% des participants les ont essayé au moins une fois ( A 2-51 et 5-4). Le taux d’adoption a continuellement augmenté de 16% à T1 jusqu’à 57% à T4 (voir Tableau 33). Donc, au moins 27% des participants ont préféré revenir aux anciens modèles après avoir fait au moins une tentative avec les nouveaux. Parmi les joueurs réguliers qui ont complété toutes les étapes de l’étude, 46% ont adopté ALV-1 à T4 au moins 75% des fois qu’ils ont joué ( A 2-15 et 2-16 ). À T1, ces joueurs manifestaient déjà une plus grande implication dans le jeu que ceux qui sont restés fidèles aux anciens modèles. Ainsi, les ALV-1 ont attiré des joueurs qui utilisaient les ALV plus souvent (+29%) à chaque mois, qui jouaient plus longtemps (+45%) à chaque session de jeu et qui dépensaient davantage (+114%) ( A 2-23 et 5-4). 351 En anglais, pop up messages. 352 Ceci est pourtant facile à réaliser techniquement. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 201 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 202 Plus le risque était élevé à T1 de développer une dépendance au jeu, plus les joueurs ont Catégories de l’Indice canadien de jeu excessif été attirés par les ALV-1 (voir Tableau Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème 34). En effet, 25% 50% 49% 66% l’adoption des ALV-1 à T4 a surtout caractérisé les joueurs avec problème tandis que peu de joueurs sans problème s’y sont intéressés. Cela peut être parce que les nouveaux jeux ont davantage sollicité les illusions de contrôle ou parce que les caractéristiques ajoutées donnaient l’impression de pouvoir atténuer la perte de contrôle sur le comportement de jeu. Tableau 34 Adoption du jeu régulier sur les nouveaux ALV en fonction des catégories cliniques de l’ICJE ( A 2-16 et 5-4 ) 6.3.2.2.1.4 La fréquence mensuelle de jeu Entre T1 et T4, les joueurs ont diminué de 33% le nombre mensuel des sessions de jeu. Il n’y a pas eu de différence entre les adoptants et les non adoptants malgré qu’au départ les adoptants jouaient 29% plus souvent à chaque mois. Le déclin de la fréquence mensuelle de jeu semble surtout attribuable au fait que, nonobstant l’appareil, les joueurs avec problème de jeu ont diminué leur fréquence mensuelle de jeu de 43%. En ce sens, les ALV-1 n’ont eu aucun impact particulier sur la fréquence mensuelle de jeu ( A 2-25 à 2-27 ). 6.3.2.2.1.5 La durée des sessions de jeu Entre T1 et T4, les adoptants ont diminué de la durée de leurs sessions de jeu de 14%, passant de 135 minutes à 116 minutes. En comparaison, cette durée est demeurée stable à environ 90 minutes chez les non adoptants ( A 2-28 à 2-30, 4-7 et 5-4). À noter toutefois que contrairement aux autres catégories de joueurs, les joueurs à faible risque de développer un problème sur les ALV-vx ont augmenté leur durée de jeu sur les ALV-1 ( A 3-27 à 3-28). En s’exposant davantage aux événements survenant en situation de jeu, ces personnes ont plausiblement augmenté leur risque de développer une dépendance pathologique. 6.3.2.2.1.6 Aucun impact sur la dépense au jeu Bien que des changements de comportement se soient produits sur les ALV-1, ceux-ci n’ont eu aucun impact sur les montants dépensés au jeu, et ce quelle que soit la catégorie clinique des joueurs ( A 2-30 à 2-32, 3-32, 4-8 et 5-5). Considérant que le risque de développer des problèmes augmente surtout en fonction de la dépense globale au jeu ( A 2-32 ), il ne semble pas que les ALV-1 puissent aider à diminuer les dommages causés par le jeu excessif. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 202 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 203 6.3.2.2.1.7 La vitesse de la dépense au jeu La durée écourtée des sessions de jeu et la stabilité de la dépense révèle que les joueurs ont simplement perdu leur argent plus rapidement sur les ALV-1. Les auteurs ont alors considéré que la rentabilité par appareil pouvait augmenter avec les ALV-1 car, en période d’affluence, les joueurs peuvent être remplacés plus rapidement par d’autres joueurs ( A 5-5 ). Les données financières récentes sont cohérentes avec cette idée quoiqu’une croissance des revenus par appareil avait déjà commencé avant l’implantation des ALV-1. Figure 86 2004-05 2003-04 2002-03 2001-02 2000-01 1999-00 1998-99 1997-98 1996-97 1995-96 1994-95 1993-94 1992-93 $60 000 $50 000 $40 000 $30 000 $20 000 $10 000 $0 1991-92 Revenu annuel net Revenu par ALV en Nouvelle-Écosse 6.3.2.2.1.8 Perte de la notion du temps écoulé À T1, les adoptants (46%) perdaient la notion du temps écoulé plus souvent que les non adoptants (31%). À T4, il n’existait plus de différence significative. Seulement 15% des joueurs perdaient alors la notion du temps écoulé ( A 2-36 ). De plus, dans l’ensemble, 28% des joueurs ont indiqué qu’il leur arrive moins souvent de jouer plus longtemps que prévu. Ces données n’appuient pas l’hypothèse d’un rôle causal des ALV-1 dans l’amélioration de la performance. D’une part, les non adoptants manifestent une amélioration considérable qui doit alors été attribuée à d’autres facteurs. Ces facteurs ont aussi agi sur les adoptants. D’autre part, si l’amélioration semble plus importante pour les adoptants, il importe de signaler que les joueurs qui ont choisi les ALV-1 sont au départ des personnes qui sont davantage impliquées dans le jeu. Le potentiel d’amélioration était alors initialement plus grand sans que l’ALV-1 n’y contribue. 6.3.2.2.1.9 Perte de la notion de la dépense au jeu À T1, les adoptants (26%) perdaient la notion de la dépense au jeu plus souvent que les non adoptants (17%). À T4, il n’existait plus de différence significative. Seulement 10% des joueurs perdaient alors la notion de la dépense au jeu ( A 2-37 ). Sur les ALV-1, environ 1 joueur sur 5, qui dépensait plus que prévu, a amélioré la fréquence de cette perte de contrôle, alors qu’aucune amélioration n’a été notée chez les non adoptants. Néanmoins, il faut le rappeler, les ALV-1 n’ont pas modifié la dépense globale au jeu de l’ensemble des joueurs ( A 2-30 à 2-32, 3-32, 4-8 et 5-5). L’affichage de l’argent a Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 203 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 204 vraisemblablement augmenté l’impression de contrôle, mais sans affecter aucunement la dépense excessive. 6.3.2.2.1.10 Impact du accepteur de billets Le gobeur de billet est une caractéristique nouvelle sur les ALV-1. Ainsi, les ALV-1 ont incité les joueurs à insérer deux fois plus d’argent avant de commencer à jouer. Au lieu de commencer avec un billet de 10 dollars, les joueurs à risque ou avec problème ont commencé avec un billet de 20 dollars ( A 3-13 à 3-14 ). De plus, les joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu ont utilisé davantage le accepteur de billets ( A 3-21). 6.3.2.2.1.11 Utilité des messages en mode fenêtre Les messages en mode fenêtre survenaient automatiquement après 60, 90 ou 120 minutes de jeu continu. Ils provoquaient alors une interruption de jeu parce que, pour s’en débarrasser, le joueur devait indiquer s’il désirait continuer à jouer ou non. De plus, un message à 145 minutes indiquait qu’il ne restait plus que 5 minutes avant un encaissement forcé qui était signalé par un autre message à 150 minutes. Il existe une différence appréciable entre l’exposition aux messages en mode fenêtre chez les adoptants par rapport aux non adoptants (voir Figure 87). Cela n’est pas étonnant puisque les non adoptants n’utilisaient pas beaucoup les nouveaux ALV ( A 2-57 ). Dans l’ensemble, les joueurs ont surtout été exposés au message survenant après 60 minutes, mais guère aux messages subséquents ( A 3-20 à 3-22, 4-18). À cet égard, les auteurs signalent avec justesse que les messages subséquents tendent à survenir surtout durant les sessions de jeu gagnantes ( A 3-22 ), sinon les joueurs perdent la totalité de leur budget de jeu bien avant. En ce sens, il est douteux que ces messages puissent contribuer à diminuer les pertes. Ceux-ci pourraient surtout être efficaces à préserver les gains, et en cela, il existe ici un effet iatrogène possible qui doit être évalué. Figure 87 Proportion des joueurs qui ont vu les différents messages en mode fenêtre 80% 60% Non adoptants 40% Adoptants 20% 0% 60 90 120 145 150 Temps de jeu continu (en minutes) Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 204 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 205 Plus spécifiquement, les joueurs avec problème ont été plus souvent exposés au message de 60 minutes ainsi qu’à l’encaissement forcé ( A 2-58 ). En désaccord avec ce que suggèrent les auteurs ( A 2-58 et 2-59 ), il n’existe ici aucun appui empirique pour proposer une relation causale entre les messages en mode fenêtre et un meilleur contrôle sur la dépense au jeu. Si les joueurs avec problème ont été exposés plus souvent aux messages en mode fenêtre, c’est plausiblement parce qu’ils sont plus enclins à choisir les ALV-1, et aussi parce qu’ils ont inséré davantage d’argent au début de la session de jeu. En l’occurrence, les ALV-1 n’ont pas diminué la perte au jeu chez les joueurs avec problème ( A 2-30 à 2-32, 3-32, 4-8 et 5-5). 6.3.2.2.1.12 Encaissement et réinsertion d’argent Les ALV-1 n’ont eu aucun impact sur la fréquence des comportements suivants : (a) recommencer à jouer après avoir encaissé, (b) insérer davantage d’argent après que le solde ait atteint zéro, et (c) tenter de se refaire afin de récupérer de l’argent perdu (A 2-38 ). 6.3.2.2.1.13 Interruption de la session de jeu Durant l’utilisation des ALV-1, les joueurs excessifs ont interrompu moins souvent leur jeu en raison d’un encaissement volontaire, du désir de prendre une pause ou du choix de changer d’appareil ( A 3-17 ). Par contre, les joueurs excessifs ont plus souvent laissé leur solde diminuer jusqu’à zéro ( A 3-17 ) et ont expérimenté des périodes ininterrompues de jeu plus longues ( A 3-19 ). À chaque fois que les joueurs excessifs ont laissé le solde atteindre zéro avant d’insérer d’autre argent, le compteur de temps s’est remis à zéro. Dès lors, l’utilité des messages en mode fenêtre s’en trouve tout autant diminué. À l’évidence, les messages en mode fenêtre auraient avantage à apparaître en fonction de la dépense au jeu plutôt qu’en fonction du temps écoulé. 6.3.2.2.1.14 Le jeu impulsif et le jeu planifié Si la personne joue sans que cela n’était spécifiquement son intention lorsqu’elle a décidé de se rendre au bar où les ALV sont situés, il s’agit d’un comportement dit impulsif, sinon il s’agit d’un comportement dit planifié. Les ALV-1 n’ont eu aucun impact sur les comportements de jeu impulsif ou planifié ( A 3-11 à 3-12 ), et cela quelle que soit la catégorie clinique des joueurs. 6.3.2.2.1.15 Le jeu social Les ALV-1 n’ont eu aucun impact sur le fait de jouer seul ou en groupe ( A 3-12 à 3-13 ). 6.3.2.2.1.16 Les motifs pour terminer la session de jeu Les ALV-1 n’ont eu aucun impact en ce qui concerne les motifs pour terminer la session de jeu ( A 3-24 à 3-26 ). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 205 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 206 6.3.2.2.1.17 Conclusions pour l’étude A À chaque site, il y avait des anciens et des nouveaux ALV. Les joueurs étaient libres d’utiliser les modèles de leur choix ( A 1-4 et 1-5 ). Les conclusions de cette étude se limitent ainsi aux joueurs qui choisissent délibérément les ALV-1. On ne sait rien des impacts de ces nouveaux modèles sur une clientèle qui se verrait contrainte à leur usage, par exemple, si le remplacement avait été total. Malheureusement, malgré qu’il s’agissait d’une étude longitudinale, il n’y a pas eu de réévaluation clinique à la fin de l’étude. Le court délai entre T1 et T4 n’aurait sans doute pas permis de constater une variation statistiquement significative du nombre de joueurs avec problème de jeu. Par contre, il aurait permis de déterminer si les joueurs excessifs à T1 avaient tout simplement quitté l’étude à T4, de sorte que toute amélioration constatée aurait été attribuable à la mortalité expérimentale des joueurs qui ont des problèmes de jeu plutôt qu’aux nouvelles caractéristiques. En l’occurrence, 31% des participants à T1 ne faisaient plus partie de l’étude à T4 ( A 5-3 ). En comparant les ALV-1 aux ALV-vx, là où il existe des différences statistiquement significatives, celles-ci sont minimes ( A 4-17 et 4-28) de sorte qu’il n’est pas réaliste d’anticiper des impacts cliniques notables au niveau individuel. En particulier, les changements minimes de comportement observés ne se sont répercutés en aucune modification de la dépense au jeu ( A 2-30 à 2-32) ce qui aurait été une conséquence attendue si les ALV-1 avaient été profitables aux joueurs excessifs. Les ALV-1 ont néanmoins permis aux joueurs, surtout aux joueurs excessifs, de conserver une meilleure représentation du temps écoulé ( A 3-29), en raison de l’horloge affichée à l’écran et peut-être aussi du message en mode fenêtre apparaissant après 60 minutes de jeu. Par contre, l’affichage du solde en dollars plutôt qu’en crédits n’a pas concrètement aidé les joueurs avec problème à conserver une meilleure représentation de la dépense au jeu ( A 3-33). Il apparaît clair que l’apparition des messages en mode fenêtre devraient plutôt être déterminés par la dépense au jeu plutôt que par la durée de jeu. Dans cette étude, les caractéristiques destinées à inciter des comportements conformes au concept de jeu responsable ne sont pas obligatoirement responsables de l’échec à influencer appréciablement la perte au jeu. Les caractéristiques semblent avoir atteint leur but d’appuyer une représentation plus adéquate du temps écoulé. C’est peut-être simplement la nature du concept de jeu responsable qui a empêché une concrétisation des gains en une diminution de la perte financière au jeu. Certes, cet échec peut avoir été causé par l’ajout concomitant de nouveaux jeux, d’une interface graphique améliorée et d’un accepteur de billets. La méthodologie de cette étude ne permet pas de distinguer entre des effets qui aurait pu être antagonistes. Enfin, cette étude longitudinale ayant été réalisée en moins d’un an, les variations saisonnières dans la pratique de jeu n’ont pas été prises en compte. Lorsque les groupes comparés expriment tous des changements à peu près identiques, dans la même direction, il peut simplement s’agir d’une variation saisonnière qui n’a rien à voir avec les modifications apportées aux ALV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 206 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 207 6.3.2.2.2 L’étude B – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-2) 6.3.2.2.2.1 Plan de recherche de l’étude B Cette seconde étude a été réalisée selon une méthodologie plus conforme aux usages scientifiques. Les joueurs réguliers sur ALV de deux régions, englobant 17 ou 18 sites, ont été évalués avant l’implantation d’un second nouveau modèle d’ALV. Ces appareils ont ensuite été implantés dans une seule région, l’autre servant de région témoin. Environ 4 mois plus tard, les mêmes joueurs ont été évalués à nouveau. Le temps de mesure 1 (T1) a été réalisé entre le 27 octobre et le 19 novembre 2003. Les ALV modifiés ont été implantés en novembre 2003. Le temps de mesure 2 (T2) a été complété entre le 12 mars et le 13 avril 2004. 6.3.2.2.2.2 Caractéristiques du second modèle des nouveaux ALV Le second modèle est une modification du premier modèle (voir Tableau 32). En plus des caractéristiques de l’ALV-1, le joueur a dorénavant la possibilité de préciser initialement la durée qu’il entend consacrer à sa session de jeu. L’horloge est plus visible. L’affichage des crédits se fait uniquement en argent, et il est plus gros. Un message en mode fenêtre a été ajouté à 30 minutes, et il n’est pas possible de continuer à jouer sans presser un bouton spécifique pour fermer cette fenêtre. L’avertissement final du temps écoulé se produit cinq minutes plus tôt. 6.3.2.2.2.3 Résultats de l’étude B Bien qu’une majorité des joueurs ont essayé les options proposées, la plupart ne les ont pas adoptées sur une base régulière. Celles-ci ont eu très peu d’impact sur les comportements. 6.3.2.2.3 Conclusion des deux premières études Bref, ni les ALV-1, ni les ALV-2, ne satisfont au besoin de protéger les joueurs. Dès lors, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a moins insisté sur l’appui au joueur en ce qui concerne la perception de la durée de jeu. Une première solution de rechange a été cherchée dans le concept d’autoexclusion. Les études C et D y sont consacrées. 6.3.2.2.4 L’étude C – Le programme d’autoexclusion pour les joueurs sur ALV L’efficacité d’un programme d’auto-exclusion a été vérifiée dans 45 bars sur une période de 3 mois. Trente d’entre eux ont fourni des rapports de détection. Les détaillants devaient fournir un rapport à chaque fois qu’ils croyaient avoir détecté un joueur sur la liste d’autoexclusion. Ceux-ci ne sont parvenus à identifier un inscrit qu’une Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 207 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 208 fois sur quatre. Pour chaque cinq signalements, ils se sont trompés trois fois. L’accès aux photographies des inscrits n’a pas aidé à la détection des auto-exclus. Les conclusions des auteurs de l’étude sont claires. Le programme ne satisfait pas aux exigences. D’autres solutions doivent être recherchées. “In the Video Lottery Self-Exclusion Process Test the retail monitoring component of the Program proposed for multi-site Video Lottery was not sufficient to support program objectives or expectations. The results indicate that reliance on the ability of retail staff to subjectively detect and accurately report on the gaming activity of an “excluded” player is neither reasonable nor appropriate.” (page xx) “The Video Lottery Self-Exclusion Pilot Working Committee is advised to explore other options for player monitoring, such as player card technology or “restricted access” gaming areas, in order to meet “duty of care” program standards. ” (page xx) 6.3.2.2.5 L’étude D – La carte-client L’échec de la détection, avec le programme d’autoexclusion dans les bars, a conduit à la suggestion d’utiliser une carte magnétique afin que le joueur gère lui-même son programme d’autoexclusion. Un test pilote a été réalisé dans dix sites hébergeant 70 ALV. L’utilisation de la carte n’était pas obligatoire. La carte-client expérimentale était dotée de quatre caractéristiques rendant possible : (a) l’affichage d’un bilan la dépense au jeu, (b) un arrêt de jeu forcé lorsque la dépense au jeu atteint une limite préalablement fixée par le joueur, (c) dans une perspective d’autoexclusion, l’impossibilité de jouer certains jours spécifiés par le joueur, et (d) dans le but d’empêcher le désir de se refaire, une abstinence forcée de 48 heures après une session de jeu. Sans équivoque, pour être efficace, l’utilisation de la carte client doit être obligatoire. En effet, durant le test pilote, seulement 44% des joueurs l’ont utilisé à chaque session de jeu, et cette proportion diminue à 28% pour les joueurs pathologiques. Lorsqu’ils ont atteint la dépense limite, 44% des joueurs ont simplement retiré la carte et continué à jouer sans elle. Le bilan de la dépense au jeu a été une caractéristique très appréciée. Toutefois, les options d’auto-exclusion ont été plus rarement utilisées. En l’occurrence, seulement 15% des joueurs, pathologiques ou pas, ont utilisé l’option d’abstinence forcée. L’impossibilité de jouer certains jours a néanmoins été explorée par environ la moitié des joueurs. La carte client a été jugée utile bien que cette opinion ne garantit pas qu’elle soit réellement efficace à diminuer les dommages des joueurs excessifs. Cet aspect n’a pas été mesuré lors de l’étude pilote. Par ailleurs, la lecture des données de la carte client doit être immédiate sinon, s’il faut la réintroduire plusieurs fois, celle-ci se trouve surtout rejetée par les joueurs à risque élevé de problème de jeu. Enfin, la satisfaction à l’égard de la carte n’a pas déterminé si le joueur allait l’utiliser ou pas. Une difficulté de ce système sera d’obtenir l’acception qu’elle soit obligatoire et qu’il ne doit y avoir qu’une carte par personne, et une seule personne par carte. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 208 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 209 En contrepartie, la possibilité de dépenser sur les ALV en ayant recours à une carte client est une idée qui intéresse beaucoup les gestionnaires, les spécialistes du marketing et les chercheurs, qui auraient ainsi de meilleurs données pour comprendre et anticiper les habitudes des joueurs. Dans cette perspective, Mark Dickerson propose d’utiliser aussi cette carte afin d’obliger les joueurs à acheter leur budget de jeu bien avant d’être dans l’aire de jeu353. Ainsi, les joueurs, surtout ceux qui éprouvent des problèmes de contrôle, détermineraient leurs pertes acceptables pendant qu’ils sont à froid. 6.3.2.2.6 Conclusion des études C et D Il est certain que le programme d’autoexclusion, appliqué par les détaillants, est un échec. Cette solution est à éviter. L’idée de laisser le joueur déterminer lui-même ses périodes d’autoexclusion, à l’aide d’une carte-client, est intéressante quoi qu’il subsiste d’importantes difficultés. Il faut d’abord qu’elle soit obligatoire pour tout le monde. Le joueur ne doit pas avoir la possibilité de contourner ses limitations en ayant accès à d’autres cartes-clients. Mais, surtout, le joueur devrait avoir la possibilité d’inscrire ses périodes d’autoexclusion sans avoir à insérer sa carte dans un ALV. Cela devrait pouvoir être fait dans des terminaux situés ailleurs que sur les sites de jeu. Les kiosques de billets de loterie sont une solution de remplacement à considérer. 6.3.2.2.7 L’étude E – Fermeture des ALV à minuit Le 1 juillet 2005, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a forcé la fermeture des ALV à minuit. Avant cette mesure, 48% des joueurs avec problème jouaient dépassé minuit alors que seulement 4% des joueurs sans problème le faisaient. Cette mesure a eu comme conséquence de diminuer les revenus des ALV de 5,1% à 8,7%. En ce sens, l’argent qui, autrefois, était dépensé après minuit n’a pas été dépensé à d’autres heures. En fait, seulement 2% des joueurs ont déplacé leur horaire de jeu. Plus les joueurs sont à risque d’éprouver des problèmes de jeu, plus ils ont choisi de ne pas jouer à d’autres heures. Dix-huit pour cent des joueurs avec problèmes de jeu ont simplement choisi de faire autre chose après minuit. Ils ne se sont pas réinvesti dans le jeu à une autre période de la journée. Il s’agit de la première mesure efficace, démontrée à ce jour, qui est parvenu à réduire la dépense au jeu plutôt que de la déplacer. Cette mesure a surtout eu un impact sur les joueurs excessifs sans trop affecter les joueurs récréatifs. Il s’agit d’une mesure crédible à considérer pour les salons de jeu. 353 Dickerson, M. (2003). Exploring the limits of ‘responsible gambling’: Harm minimization or consumer protection? Proceedings of the 12th Annual Conference of the National Association for Gambling Studies. Melbourne, Australia. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 209 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 210 6.3.2.2.8 L’étude F – Désactivation du bouton d’arrêt et ralentissement du jeu (ALV-3) Lors d’une dernière étude, l’impact conjoint d’une série de mesures a été évalué : (1) la fermeture des ALV à minuit, (2) la réduction de 25% du nombre d’ALV, (3) la désactivation du bouton d’arrêt, et (4) la réduction de 30% de la vitesse de jeu. Ces changements ont eu un impact positif sur les joueurs excessifs. Notamment, ce sont surtout eux qui ont diminué leur perte financière (voir Tableau 35). Tableau 35 Diminution de la dépense au jeu (en dollars) en fonction des mesures prises Catégories de l’ICJE Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème Global Fermeture des ALV à minuit 25 70 140 75 86 Diminution du nombre d’ALV 37 46 62 146 67 Réduction de la vitesse de jeu et désactivation du bouton d’arrêt 21 30 71 219 114 Dans ce rapport de recherche, il n’est cependant pas clair à quel point la vitesse de jeu a été réduite. La désactivation entraîne automatiquement une réduction de la vitesse moyenne de jeu. Il n’est pas précisé si tous les joueurs ont vécu une diminution de la vitesse à chaque partie jouée. Quoiqu’il en soit, cette mesure a été trois plus profitable que la fermeture des ALV à minuit. 6.3.2.2.9 Conclusion des études E et F Il s’agit de solutions à considérer. Parmi celles-ci, la réduction de la vitesse de jeu est à considérer en autant qu’il s’agit d’une réduction réelle, et non une conséquence de la seule désactivation du bouton d’arrêt. La réduction des heures d’opération des ALV est aussi une mesure raisonnablement établie. Nonobstant ces mesures, celles-ci agissent néanmoins en périphérie du processus pathogène. Il demeure préférable d’envisager des mesures plus directes telle que des mises en garde efficaces, l’affichage de la probabilité d’obtention des lots, la réduction de la probabilité de vivre un gain significatif, de l’optimisme irréaliste, des croyances erronées, ainsi que du taux de remise effectif. 6.3.2.3 Les mesures de jeu responsable implantées en Alberta La province de l’Alberta a remplacé son parc d’ALV en 2003-2004 en implantant des appareils auxquels quatre mesures de jeu responsable ont été ajoutées : (a) une horloge, (b) l’affichage du solde en dollars, (c) des messages du temps écoulé par tranches de 30 minutes, et (d) le numéro de téléphone d’une ligne d’aide. Par surcroît, des affiches et des pamphlets, faisant la promotion du concept de jeu responsable, ont été placés dans l’environnement de jeu. Un programme de formation, en vue d’assister Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 210 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 211 les personnes éprouvant des problèmes de jeu, a aussi été donné aux employés des bars. Avant et après l’implantation, l’impact des nouveaux ALV a été examiné354 auprès de 124 joueurs rencontrés in situ. Un groupe de 41 joueurs, persistant à jouer exclusivement sur les anciens modèles, a servi de groupe contrôle. Huit mois après l’implantation, la plupart des joueurs étaient conscients de l’existence de ces nouvelles caractéristiques. Tandis que 69% des joueurs ont déclaré se fixer un objectif de dépense, à peine 14% ont mentionné avoir eu un objectif de durée de jeu. Globalement, quelle que soit la catégorie diagnostique, à l’exception de l’affichage du solde en dollars, les nouvelles caractéristiques n’ont pas influencé les comportements des joueurs. L’horloge et les messages du temps écoulé n’ont aucun impact notable. 6.3.2.4 Les mesures évaluées au Québec Le Québec n’a pas de programme de recherche visant à développer des ALV plus sécuritaires. Toutefois, à l’Université Laval, des études ont été entreprises par le Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) afin d’évaluer l’impact de quelques modifications. Les recherches répertoriées dans le Tableau 36 sont intéressantes parce qu’elles confirment qu’il est possible de modifier les ALV, ou leur environnement, afin d’influencer positivement les croyances que les joueurs développent lors de leur expérience de jeu ainsi que la persistance à jouer. Ces recherches se sont cependant limitées à des périodes d’observation très brèves réalisées avec des joueurs non pathologiques. Quoiqu’il en soit, même limité, ce matériel est plus profitable que l’approche trop confuse de la Nouvelle-Écosse. Il aurait été intéressant que le CQEPTJ s’intéresse au taux de retour effectif, à la fréquence des récompenses, à la conscience de la situation355, à l’avènement des gains significatifs, à la surcharge mentale356, au développement des automatismes357, ainsi 354 Wynne, H. J., & Stinchfield, R. (2004, April). Evaluating VLT responsible gaming features and interventions in Alberta. Phase I, final report. Prepared for : Alberta gaming and liquor commission. 355 (a) Endsley, M. R. (1999). Situation awareness and human error: designing to support human performance. Proceedings of the high consequence systems surety conference. Albuquerque, NM. (b) Endsley, M. R. (2000a). Theoretical underspinnings of situation awareness: a critical review. In M. R. Endsley et D. J. Garland (editors), Situation awareness analysis and measurement (pp. 3-32). Mahwah, NJ: Lawrence Erlbaum associates. 356 Gopher, D., & Donchin, E. (1986). Workload – an examination of the concept. In K. R. Boff, L. Kaufman, & J. P. Thomas (editors), Handbook of perception and human performance. (Volume II: Cognitive process and performance) (pp. 41-1 à 41-49). New York, NY: John Wiley and Sons. 357 (a) Schneider, W., & Shiffrin, R. M. (1977). Controlled and automatic human information processing : I. detection, search, and attention. Psychological review, 84(1), 1-66. (b) Shiffrin, R. M., & Schneider, W. (1977). Controlled and automatic human information processing: II. Perceptual learning, automatic attending, and a general theory. Psychological review, 84(2), 127-190. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 211 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 212 qu’à des mises en garde agissant d’abord sur l’optimisme irréaliste358. À l’exception de l’examen du bouton d’arrêt, les modifications étudiées jusqu’ici semblent encore trop en périphérie des aspects centraux du processus pathogène. Il serait aussi approprié que davantage d’études longitudinales in situ puissent être réalisées. Tableau 36 Études réalisées au CQEPTJ en vue d’atténuer la dangerosité des ALV Étude Référence A Ladouceur, R., Vézina, L., Jacques, C., & Ferland, F. (2000). Does a brochure about pathological gambling provide new information? Journal of Gambling Studies, 16, 103108. B Ladouceur, R., Jacques, C., Giroux, I., Ferland, F., & Leblond, J. (2000). Analysis of a Casino’s self-exclusion program. Journal of Gambling Studies, 16, 453-460. C Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2002) Symbols presentation modality as a determinant of gambling behavior. Journal of Psychology, 136(4), 443-448. D Ladouceur, R., Sévigny, S., Blaszczynski, A., O’Connor, K., & Lavoie, M. E. (2003). Video lottery: Winning expectancies and arousal. Addictions, 98, 733-738. E Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2003). Video Lottery Terminal Warning Messages and the Persistence to Gamble. Gambling Research, 15(1), 45-50. F Côté, D., Caron, A., Aubert, J., Desrochers, V., & Ladouceur, R. (2003). Near wins prolong gambling on a video lottery terminal. Journal of Gambling Studies, 19, 433-438. G Ladouceur, R., Boutin, C., Doucet, C., Dumont, M., Provencher, M., Giroux, I., & Boucher, C. (2004). Awareness promotion about excessive gambling among Video Lottery retailers. Journal of Gambling Studies, 20, 181-185. H Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2005). Structural characteristics of video lotteries: Effects of a stopping device on illusion of control and gambling persistence. Journal of Gambling Studies, 21(2), 117-131. I Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on gambling, International Gambling Studies, 5, 139–154. J Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2006). The impact of video lottery game speed on gamblers. Journal of gambling issues, 17. 358 (a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1982a). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem. Journal of behavioral medicine, 5(4), 441-460. (c) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (d) Weinstein, N. D. (1989). Optimist biases ablout personal risks. Science, 246, 1232-1233. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 212 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 213 Tableau 36 Études réalisées au CQEPTJ en vue d’atténuer la dangerosité des ALV Étude Référence Cloutier, M., Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2006). Responsible gambling tools : pop-up messages and pauses on video lottery terminals. Journal of psychology, 140(5), 434438. K 6.3.2.4.1 Étude A – Brochure d’information La première étude ne concerne pas les ALV directement. Il s’agissait de tester l’impact d’une brochure d’information sur le jeu excessif. La caricature frontispice représente toutefois un ALV en train de dévorer un joueur. Recrutés dans les lieux publics, les participants n’étaient pas nécessairement des joueurs. Bien que la brochure a significativement augmenté la quantité des connaissances des personnes, une minorité des personnes ont retenu plusieurs informations importantes, dont la disponibilité des ressources d’aide et la possibilité de développer une dépendance au jeu. Tableau 37 Résultats de l’étude A concernant l’information procurée par une brochure Lecture de la brochure Non ( N = 56 ) Oui ( N = 59 ) Connaissance du fait que 96% de la population a déjà joué 0% 27% Rétention du taux de prévalence du jeu excessif 4% 41% Capacité de nommer 2 à 4 comportements à risque 43% 74% Nombre de comportements à risque connus 1,42 2,50 Connaissance qu’il est possible de développer une dépendance au jeu 13% 39% Connaissance de l’existence de jeu pathologique chez les jeunes 11% 34% Connaissance du fait que les joueurs excessifs dépensent au jeu plus que prévu 4% 12% Connaissance de la disponibilité des services d’aide 9% Half Variable Il est à noter que 41% des personnes ont retenu le taux de prévalence du jeu excessif qui était indiqué dans la brochure. Cette information est extrêmement importante car si la donnée présentée est irréaliste, la brochure est susceptible d’instaurer un optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une dépendance sur les AÉJ. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 213 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 214 6.3.2.4.2 Étude B – Le programme d’autoexclusion du casino de Montréal L’analyse du programme d’autoexclusion du casino de Montréal a indiqué que 95% des joueurs qui demandent à s’y inscrire sont des joueurs pathologiques. Les autres étaient des joueurs à risque. Trente pour cent n’ont jamais obtenu un gros gain, alors que 10% ont gagné une fois $ 10 000 ou plus. Le plus gros gain médian est de $ 1 200, et la plus grande perte médiane est de $ 2 000. La plupart des inscrits (87%) ont indiqué avoir perdu de fortes sommes au casino. La dette de jeu moyenne était de $ 11 962. La plupart des inscrits (83%) ont rapporté vouloir cesser de jouer mais qu’ils étaient incapables. La plupart des joueurs (76%) s’inscrivaient pour la première fois au programme d’autoexclusion, tandis que 17% s’y inscrivaient pour une seconde fois, et 7% l’ont fait plusieurs fois. Les deux tiers ont requis une autoexclusion de 12 mois ou moins, alors que le quart ont exigé la durée maximale de 5 ans. Parmi les joueurs qui n’en étaient pas à leur première inscription, 80% étaient satisfaits du service. Ceux-ci ont néanmoins témoigné qu’il leur était facile de retourner au casino. En l’occurrence, 36% des joueurs sont retournés au casino environ 6 fois durant leur période d’autoexclusion. La moitié ont simplement choisi d’aller plutôt jouer sur les ALV. Quoiqu’il en soit, 30% des réinscrits ont indiqué que leur première période d’autoexclusion a été efficace à les maintenir loin du casino. En contrepartie, les joueurs ont indiqué que ce programme pouvait être inutile s’il n’y a pas un suivi réalisé par un professionnel. Seulement 10% des joueurs ont pris l’initiative d’aller consulter par soi-même. En résumé, l’autoexclusion ne semble pas capter l’intérêt des joueurs à risque. Elle ne capte pas non plus la majorité des joueurs pathologiques. Moins de 2% des joueurs excessifs y font appel359. En ce sens, elle n’est pas une mesure préventive. Néanmoins, c’est un programme qui peut aider des joueurs pathologiques à rester abstinents pendant quelques mois. Toutefois, si aucun suivi clinique n’est apporté, les joueurs ne confirment pas la viabilité de ce moyen à long terme. En ce sens, il peut s’agir d’une mesure transitoire le temps que la personne chemine vers l’acceptation de son problème de jeu. Dans ce cas, un suivi s’avère essentiel. Ces données ne sont pas favorables à des stratégies de prévention ou de minimisation des méfaits pour lesquelles l’autoexclusion serait la mesure centrale. 6.3.2.4.3 Étude C – Le mode d’arrêt des rouleaux Un ALV, similaire à ceux disponibles dans les bars du Québec, a été modifié afin de produire un arrêt simultané des rouleaux à comparer à un arrêt séquentiel. Les joueurs exposés à l’arrêt séquentiel ont joué 48% plus de parties que ceux exposés à l’arrêt simultané. Ces joueurs n’étaient pas pathologiques. 359 Voir à la page 11 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 214 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 215 Les auteurs ont proposé que le délai lors de l’arrêt séquentiel des rouleaux génère davantage d’espoir de gagner et qu’il en résulte un optimisme accentué. 6.3.2.4.4 Étude D – La récompense monétaire Outre une compensation financière de base de 10$, des joueurs sur ALV ont été invités à jouer pour le plaisir, alors que d’autres joueurs ont eu la possibilité de gagner 40$ additionnels. Les résultats indiquent clairement que l’excitation à jouer ne dérive pas du plaisir à jouer, mais de la possibilité de gagner de l’argent. 6.3.2.4.5 Étude E – Des messages d’information La revue Gambling Research est inaccessible. Le contenu de cette étude n’est connu que par ce qui en a été rapporté ailleurs360. Des messages apparaissant en mode fenêtre, ou des pauses forcées dans le rythme de jeu, ont comme conséquence de réduire le nombre de parties jouées. En ce qui a trait aux messages, il y a lieu de citer quelques travaux similaires réalisés aux États-Unis. Les messages étudiés visent généralement à corriger des croyances erronées quant au hasard. À cet égard, des travaux initiaux361 se sont avérés efficaces à les corriger partiellement, mais sans modifier les comportements de jeu. Toutefois, une expérimentation récente362, ayant eu recours à des messages courts et précis, précédés du préfixe « CAUTION », est parvenu non seulement à modifier les croyances erronées, mais aussi à réduire les montants risqués au jeu sans diminuer le plaisir de jouer. Il est aussi possible que les messages en mode fenêtre agissent sur le comportement simplement parce qu’elles forcent un temps d’arrêt dans le jeu. Un tel effet a été justement rapporté par Ladouceur et Sévigny363 dans l’article dont il est ici question. 6.3.2.4.6 Étude F – Le quasi-succès 360 Voir à la page 140 dans : Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on gambling, International Gambling Studies, 5, 139–154. 361 Steenbergh, T. A., Whelan, J. P., Meyers, A. W., May, R. K., & Floyd, K. (2004). Impact of warning messages and self-regulatory information on gambling knowledge and behavior. International gambling studies, 4, 3-16. 362 Cette étude a été réalisée en laboratoire avec des étudiants universitaires qui n’éprouvaient pas nécessairement des problèmes de jeu. Voir : Floyd, K., Whelan, J. P., & Meyers, A. W. (2006). Use of warning messages to modify gambling beliefs and behavior in a laboratory investigation. Psychology of addictive behaviors, 20(1), 69-74. 363 Le magazine Gambling research n’est pas répertorié par les banques de données. Il n’est pas accessible par le prêt inter-bibliothèque. Il n’a pas été possible d’obtenir un tiré à part des auteurs ni de l’éditeur. Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2003). Interactive messages on video lottery terminals and persistence in gambling. Gambling research, 15(1), 45-50. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 215 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 216 Le quasi-succès consiste à présenter à l’écran une succession de symboles, qui donne l’impression qu’un lot pourrait être gagné, mais qui échoue au dernier moment. Des joueurs récréatifs ont participé à une session de jeu qui a commencé avec 48 parties régulières, et une possibilité de 240 parties subséquentes qui étaient toutes perdantes. Durant les parties systématiquement perdantes, le groupe contrôle n’a été exposé à aucun quasi-succès. Le groupe expérimental a été exposé à des quasi-succès lors de 25% des parties. L’observation des quasi-succès a incité les joueurs à jouer 33% plus de parties. 6.3.2.4.7 Étude G – La sensibilisation des détaillants Loto-Québec soumets ses détaillants à une session obligatoire de sensibilisation au jeu excessif. Lors de cette étude, l’impact d’un vidéo a été évalué. À la fin du visionnement, les détaillants ont indiqué mieux percevoir l’importance de recevoir de l’information sur le jeu excessif, et mieux le comprendre. Ils estimaient mieux comprendre le meilleur moyen pour entrer en contact avec un joueur excessif, et mieux saisir quand il était approprié pour le faire. Ceux-ci ont aussi indiqué qu’il était important que leurs employés soient aussi sensibilisés car ils sont les personnes les mieux placées pour aborder les joueurs excessifs. Lors d’un suivi, réalisé six mois plus tard, les détaillants ont indiqué avoir abordé plus souvent un joueur apparemment excessif, discuté plus souvent des services d’aide et suggéré moins souvent de jouer sur un autre ALV. Bien que ces résultats sont statistiquement significatifs, les auteurs ne précisent pas la taille des effets. Combien de fois les détaillants ont-ils plus souvent abordé un joueur? Les auteurs n’ont pas jugé bon de le préciser. Ce manque de précision est étonnant, et ne laisse pas vraiment présager une très grande utilité à ce visionnement. Il est certain que la plupart des détaillants, forcés par Loto-Québec à participer à un visionnement, vont y percevoir des mérites formidables. 6.3.2.4.8 Étude H – Le bouton d’arrêt Lors d’une première expérimentation, des joueurs non pathologiques ont joué 30 parties sans la possibilité de presser le bouton d’arrêt, puis 30 parties en ayant la possibilité de le faire. Après les 30 premières parties, aucun joueur n’a développé une croyance illusoire. Après les 30 parties suivantes, 87% des joueurs ont indiqué croire que l’usage du bouton pouvait modifier les résultats, 57% qu’il était ainsi possible de contrôler les résultats, 41% que l’habilité était profitable lors de ce jeux de ligne, et 26% y ont acquis une illusion de contrôle. Lors d’une seconde expérimentation, la moitié seulement des participants a été autorisée à utiliser le bouton d’arrêt après 40 parties initiales où il n’était pas possible de le faire. Par la suite, les deux groupes pouvaient jouer autant qu’ils le désiraient. Dans un tel cas, les joueurs qui avaient la possibilité d’utiliser le bouton d’arrêt ont persisté à jouer deux fois plus longtemps que ceux qui étaient privés de ce bouton. Ceux-ci exprimaient alors les mêmes croyances illusoires que lors de la première expérimentation. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 216 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 217 Ces données indiquent le l’utilisation du bouton d’arrêt a un impact sur le développement des croyances illusoires, et que ces croyances se concrétisent en une persistance accrue à jouer. Par ailleurs, le bouton d’arrêt n’est pas fréquemment utilisé par les joueurs pour tenter d’influencer le résultat des parties. Seulement 5% des joueurs réguliers y ont recours, 10% parmi les joueurs excessifs364. 6.3.2.4.9 Étude I – la disposition des ALV dans l’environnement de jeu Commandée par la RACJ, cette étude visait à évaluer différents formats, disposition et accessibilité des ALV dans les sites hors casinos. L’étude comprend une revue de littérature, une discussion en groupe focus et une brève session de jeu en laboratoire. Il ne ressort pas grand-chose de cette étude autres que des opinions qui pourraient n’avoir aucun impact sur les comportements. Les auteurs recommandent d’enlever les isoloirs, sauf là où des mineurs pourraient être exposés à la vue des ALV. Là où ce retrait élimine un obstacle libérant l’accès à un comptoir de bar proche, il est recommandé de vérifier si cette proximité a un impact. Enfin, les participants ont exprimé l’opinion qu’il serait préférable de réduire le nombre de sites où sont installés les ALV. 6.3.2.4.10 Étude J – Le ralentissement de la vitesse de jeu La vitesse de jeu habituelle au Québec est d’environ 5 secondes par set365. Le ralentissement des ALV à 15 secondes par set a réduit le nombre de parties jouées, mais pas la durée de la session de jeu. Tandis que le rythme rapide des parties a grandement fait sous-estimer le nombre de parties jouées, cette sous-estimation a été considérablement réduite avec le rythme moins rapide. Par ailleurs, ce changement n’a pas diminué le plaisir à jouer ni augmenté la concentration des joueurs à l’égard d’un stimulus366 causant une distraction. Les auteurs concluent que le ralentissement de la vitesse de jeu pourrait atténuer les dommages simplement parce que les joueurs dépensent moins rapidement leur argent. C’est logique quoiqu’il serait préférable, avant de conclure, de vérifier si le ralentissement n’incite pas à une augmentation de la valeur des mises dans le but de jouer simultanément sur plus de lignes. 364 Voir à la page D-42 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. 365 Un set équivaut à presser une fois sur le bouton Jouer . Si un seul crédit est misé, le set correspond à une seule partie. Si des crédits sont misés sur plusieurs lignes, le set englobe l’exécution de plusieurs parties réalisées simultanément. 366 Une sonnerie de téléphone. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 217 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 218 Dans cette recherche, il y a une amorce pour étudier les conséquences de la pression temporelle sur la charge mentale en situation de jeu. Malheureusement, la détection d’une sonnerie de téléphone n’est pas la meilleure variable pour mesurer ce phénomène. La production d’intervalles temporels aurait été une mesure mieux standardisée et plus détaillée. 6.3.2.4.11 Étude K – L’imposition de pauses en situation de jeu L’avènement aléatoire de pauses de 7 secondes, ou de messages répétant des croyances exactes quant au caractère incontrôlable de la situation de jeu, a la capacité de diminuer le nombre de croyances erronées, sans les éliminer complètement, mais elle a surtout comme conséquence appréciable de diminuer la certitude à l’égard des croyances erronées. Ce rapport de recherche a le grand mérite de préciser la taille des effets observés. Dès lors, les auteurs appuient raisonnablement leur conclusion quant à l’utilité réelle d’insérer des pauses ou des messages. La diminution de la certitude envers les croyances erronées crée une condition propice pour de nombreuses autres interventions directes visant à contrecarrer les facteurs pathogènes de l’expérience de jeu sur ALV. Sans autre modification structurale, l’impact des pauses ou des messages risque cependant de ne pas se concrétiser en une meilleure protection des joueurs. 6.3.3 Les mesures développées en Europe À l’exception des Pays-Bas, les mesures développées en Europe sont peu connues. Traditionnellement, les établissements de jeu se limitent à des petits casinos situés dans des endroits de villégiature. Les problèmes de jeu pathologique y sont moins dénoncés. La pression pour développer des mesures de protection y est moindre. 6.3.3.1 Les mesures développées aux Pays-Bas Aux Pays-Bas, la gestion des casinos est un monopole accordé à la firme Holland Casino367. À l’occasion du projet du casino de Montréal, Loto-Québec a consulté cette firme qui a considérablement influencé l’ensemble de la gestion subséquente des casinos québécois368. Il existe aussi aux Pays-Bas des Amusements Centra qui ressemblent aux salons de jeux que Loto-Québec entend développer. À l’exception d’y installer des appareils de type Nijpels, il ne semble pas y avoir de mesures de protection particulières. 367 www.hollandcasino.nl 368 (a) Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1837, CI-1838, CI1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec. (b) Déclaration de monsieur Claude Quinn, directeur général adjoint aux enquêtes criminelles et aux supports techniques de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1837, CI-1838, CI-1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 218 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 219 6.3.3.1.1 Les mesures adoptées par la compagnie Holland casino. L’opération des 14 casinos néerlandais est un monopole accordé à la compagnie Holland Casino369. Comme ailleurs en Europe, les visiteurs doivent obligatoirement s’identifier à l’entrée. Il existe un registre central informatisé qui conserve l’historique de fréquentation de chaque visiteur. Sur place, une brochure370 est offerte aux joueurs dans laquelle ceux-ci sont invités à s’adresser immédiatement au personnel du casino si le jeu devient un problème. La brochure englobe un formulaire permettant de requérir une autoexclusion. Si les joueurs estiment ce service insuffisant, la brochure indique qu’il est possible de s’adresser aux Joueurs anonymes. Les coordonnées sont alors indiquées. Il n’y a pas de référence à une ligne téléphonique de type « Jeu : aide et référence ». Le personnel a été formé à dépister les joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu et à initier une discussion avec ces personnes. Holland casino favorise ce type de contact bien qu’elle ne l’impose pas systématiquement. Lors de cette discussion, le personnel tente d’aborder les signes révélant l’existence d’un problème de jeu et mentionne les services offerts par le casino, essentiellement un programme d’autoexclusion. Le programme d’autoexclusion offre deux options371. Les joueurs ont la possibilité, pendant 6 mois ou un an, de faire limiter leur nombre de visites mensuelles à 8 présences ou moins. Autrement, les joueurs peuvent exiger une exclusion complète pendant 6 mois, un an, ou une durée indéfinie de plus d’un an. À la fin de la durée de l’autoexclusion, une rencontre est prévue avec un membre du personnel afin de déterminer s’il est approprié de mettre fin à cette mesure ou à quelles conditions celle-ci pourrait être ne pas renouvelée. En raison du registre des visiteurs, l’autoexclusion s’applique efficacement à l’ensemble des casinos quoiqu’il subsiste de nombreux autres accès aux AÉJ dans les centres d’amusement ou dans les hôtels. 369 Cette compagnie est le principal consultant de Loto-Québec en matière de gestion des casinos et d’exploitation des AÉJ. 370 Laat spelen een spel blijven. (Les jeux doivent demeurer un jeu). http://www.hollandcasino.nl/NR/rdonlyres/6E13DAF0-52B4-4053-9DD64EB6F11DE160/0/laatspeleneenspelblijven.pdf Consulté le 5 janvier 2007. 371 Remmers, P. (2001, October). Responsible service of gambling in Europe and South-Africa. RCG conference – Practical applications for the gambling industry. Conférence tenue le 27 novembre 2001 au Stamford Grand Hotel, North Ryde. http://www.betsafe.com.au/conferences/nov01/premmers.ppt Consulté le 5 janvier 2007. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 219 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 220 Selon une étude de la clientèle des casinos372, le contact direct des employés avec les joueurs a rejoint 16% des joueurs pathologiques. Pour y parvenir, 1,5% de la clientèle totale a été abordée pour un total de plus de 7 000 entrevues. C’est relativement peu compte tenu que 5,1% des visiteurs présents au casino, à n’importe quel moment, étaient des joueurs pathologiques (2,2% de la clientèle totale). Néanmoins, la majorité (63%) de ceux qui ont été contactés ont apprécié cette expérience, tandis que 19% l’ont considérée comme négative. Par ailleurs, 24% des joueurs pathologiques ont eu recours au programme d’autoexclusion, et 18% ont requis une limitation de la fréquence de leurs visites au casino. C’est plus qu’ailleurs dans le monde. 6.3.3.1.2 Les AÉJ de type Nijpels Aux Pays-Bas, une commission parlementaire373 au sujet des AÉJ, tenu entre 1994 et le 1 avril 1995, a proposé quatre stratégies pour modifier les appareils afin de les rendre moins dommageables : • Briser l’automatisme du jeu • Réduire la durée de jeu, • Limiter l’excitation au jeu, • Réduire le caractère sollicitant de l’appareil de jeu. En juin 2000, une loi adoptée par le gouvernement néerlandais a forcé les opérateurs à intégrer, au plus tard le 1 janvier 2002, 14 des modifications proposées afin de concrétiser ces stratégies. Ce sont : 1. Une nouvelle partie ne peut être commencée que par un geste conscient de la part du joueur. Un bouton démarreur doit obligatoirement être enfoncé et relâché. 2. Tous les lots gagnés doivent être déposés dans un solde de gain. Les mises ne peuvent pas être payées à partir de ce solde. 3. Encaissement automatique 372 (a) De Bruin, D.E., F.R.J. Leenders, M. Fris, H.T. Verbraeck, R.V. Braam, G.F. van de Wijngaart (2001). Gasten van Holland Casino. Effectiviteit van het preventiebeleid kansspelverslaving. Utrecht: Centrum voor Verslavingsonderzoek. ISBN: 90-71772-31-4 http://www.drugresearch.nl/en/GastenVanHollandCasino.EffectiviteitVanHetPreventiebeleidKanss pelverslaving Consulté le 2 décembre 2006. (b) Centrum voor Verslavingsonderzoek. (2001). Visitors of Holland Casino : effectiveness of the policy for the prevention of compulsive gambling (Synopsis). www.toezichtkansspelen.nl_information.html Consulté le 20 décembre 2006. 373 La Commissie Kansspelautomaten est connue sous le nom de Commission Nijpels, du nom du parlementaire qui l’a dirigé. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 220 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 221 Dès que le solde de gain atteint la valeur de 40 Euros. Lors de l’obtention du lot maximal de 200 crédits (40 Euros). 4. Après un encaissement automatique, l’appareil n’accepte aucune nouvelle commande pendant 15 secondes. 5. Obligation d’une limite maximale de 40 Euros – en combinaison avec un module d’information sur le jeu. Ce module doit être activé : À la demande du joueur; Lors de l’obtention de la limite; Lors de l’encaissement d’un prix; Lorsque le joueur met un terme à la session de jeu. 6. Les machines à sous doivent être conçues de manière à ce qu’elle ne permettent pas de passer d’un jeu à l’autre avec plus de 200 crédits. Sinon, un encaissement automatique doit être provoqué. 7. Quoi qu’il fasse, un joueur ne peut pas perdre plus de 40 Euros à chacun de ses gestes. 8. La moyenne de la durée des parties doit être augmentée à 4 secondes, et la durée d’une partie doit être d’au moins 3,5 secondes. 9. Impossibilité de répéter rapidement les mises en bloquant le bouton Jouer . 10. Éclairage inerte des appareils lorsqu’ils ne sont pas en fonctionnement. 11. Limitation des sons des appareils lors de l’encaissement. 12. Aucun dispositif de change (accepteur de billets) directement sur l’appareil. 13. Message sur l’appareil indiquant qu’il s’agit de jeux de hasard. 14. Implantation rapide de cette réglementation. 6.3.3.1.3 Les mesures adoptées dans les centres d’amusements Les centres d’amusement (Amusements Centra) sont essentiellement des salons de jeu où on retrouve des AÉJ et des TJI (Meerspeelers). Ils ressemblent aux salons de jeux proposés par Loto-Québec, mais sans autres activités de divertissement plus générales. Exploités par l’entreprise privée, on n’en sait que très peu de chose. À tout le moins, les centres d’amusements qui ont implanté des programmes de prévention du jeu excessif Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 221 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 222 plus intensifs ont constaté une plus grande diminution de leur clientèle374. Pour apprécier cette expérience, la documentation écrite en néerlandais devrait être traduite. Depuis le 1 janvier 2002, les centres d’amusement doivent offrir des appareils de type Nijpels. Il serait important d’obtenir une évaluation de cette expérimentation avant d’implanter des ALV dans les salons de jeux. 6.3.3.2 Les mesures expérimentées dans un casino suisse Le casino de Locarno, en Suisse, a formé ses employés à détecter les personnes qui pourraient éprouver des problèmes de jeu. En présence d’un tel joueur, les employés signalent sa présence à un superviseur qui entreprend de répertorier les comportements du joueur : (1) le temps passé à jouer, (2) le nombre de visites, (3) les montants d’argent misés, et (4) les montants perdus. Si les comportements du joueur confirment des habitudes de jeu excessives, le psychologue de l’établissement invite le joueur à une rencontre au cours de laquelle une période de monitorage est proposée. Si le joueur accepte, une entrevue explicative sur le jeu excessif est accordée et ses comportements ultérieurs de jeu sont comptabilisés durant la période de monitorage. Durant cette période, le superviseur fournit au joueur un compte-rendu des observations qui ont été faites de son comportement. Au terme de cette période, une mesure d’auto-exclusion est proposée s’il s’avère que le monitorage n’est pas suffisant. Une étude pilote375 a permis de constater des résultats intéressants, bien que la taille de l’échantillon n’a pas permis de démontrer un apport statistiquement significatif. Comparé à un groupe contrôle (N = 6), le groupe expérimental (N=6) a, durant la période de monitorage, passé moins de temps au casino, a fait moins de visites, a misé moins d’argent et il en a perdu moins. Ces résultats préliminaires méritent d’être approfondis. Toutefois, il serait utile de pouvoir séparer les impacts de l’entrevue explicative et ceux attribuables à l’information donnée quant aux comportements observés. 6.3.4 Les mesures développées en Océanie 6.3.4.1 Les mesures implantées en Australie L’Australie est le pays le plus expérimenté au monde avec les AÉJ. Dans l’état de la Nouvelle Galles du Sud, ils y sont implantés depuis 1956. Les AÉJ sont cependant plus récents dans les autres états. 374 de Bruin, D., Benschop, A., Braam, R., & D.J. Korf. (2006). A five-year monitoring and followup study on the effects of product differentiation and stricter admission controls in amusement centres. Utrecht, Amsterdam: CVO, Universiteit van Amsterdam. 375 Sani, A., Carlevaro, T., & Ladouceur, R. (2005). Impact of a Counselling Session on at-risk Casino patrons : A Pilot Study. Gambling Research, 17, 47-52. N’ayant pas pu obtenir un exemplaire de cette publication, le manuscrit a pu être consulté à l’adresse suivante : http://www.jeu-excessif.ch/pdf/congres/2005/ressources/Sani_Carlevaro_Ladouceur.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 222 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 223 Tandis que le taux de pénétration annuel des ALV est d’environ 10% au Québec, le taux de pénétration mensuel des AÉJ en Australie est de 38% 376. En contrepartie, le taux de remise moyen y est d’environ 88%-89% 377 alors qu’il est de 92% au Québec. C’est un monde de différence. Pour cette raison, nous ne ferons qu’un survol sommaire des travaux réalisés en Australie. Leur applicabilité au Québec est incertaine. La politique très libérale de l’Australie en matière de jeu laisse peu de marge de manœuvre aux états pour imposer des restrictions aux entreprises privées qui gèrent le jeu. Il en résulte un surinvestissement dans des programmes d’autoexclusion. Les états essaient beaucoup de légiférer et réglementer afin d’imposer des responsabilités civiles aux entreprises privées en ce qui a trait à l’efficacité de leur programme d’autoexclusion. Par des dépliants d’auto-dépistage, on souhaite que les joueurs prennent conscience le plus rapidement possible de leur problème, et qu’ils exigent des établissements que ceux-ci appliquent sévèrement le programme. Placer ainsi l’auto-dépistage et l’autoexclusion au centre des mesures de protection semble voué à l’échec. 6.3.4.1.1 Les mesures proposées en Australie par la Productivity Commission L’Australie est un Commonwealth, dirigé par un gouvernement fédéral, qui regroupe six états provinciaux et deux territoires. Les états et territoires ont la responsabilité de gérer le jeu à l’intérieur de leur juridiction, mais le gouvernement fédéral a conservé des pouvoirs afin de s’assurer que les réglementations provinciales demeurent fidèles à la politique très libérale des Australiens à l’égard du jeu. Dans cette perspective, le gouvernement australien a mandaté un organisme, la Productivity Commission, afin d’entreprendre une évaluation exhaustive des besoins de jeu, de l’offre conséquente, du comportement des joueurs, des problèmes de jeu ainsi que des mesures qui pourraient appuyer une politique plus globale concernant le jeu. Entre août 1998 et juillet 1999, cette commission a réuni des représentants des organismes publics et de l’industrie du jeu. De nombreuses audiences ont été tenues au cours desquelles 290 mémoires ont été examinés publiquement. La Commission a aussi reçu 39 mémoires confidentiels. À terme, la Commission a publié un imposant rapport378 qui constitue un impressionnant modèle à suivre … un modèle, pas nécessairement un contenu. Traditionnellement, les MAS et APV sont distribués dans des clubs qui ont une vocation récréative afin de générer un revenu complémentaire. Ces clubs sont toutefois souvent en compétition avec un hôtel-casino379 qui dispose aussi d’un très grand nombre d’AÉJ, et quelques hôtels qui sont cependant limités à 30 AÉJ chacun. 376 Voir à la page 10 dans : Productivity Commission (1999). Australia’s Gambling Industries, Report No. 10. AusInfo: Canberra, Australia. 377 Voir à la page 33 dans : Banks, G. (2002). The Productivity commission’s gambling inquiry : 3 years on. Keynote address to the 12th annual conference of the National association for gambling studies (NAGS), 21 November 2002, Melbourne, Australia. 378 Productivity Commission (1999). Australia’s Gambling Industries, Report No. 10. AusInfo: Canberra, Australia. 379 Typiquement, il n’y a qu’un seul casino par ville. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 223 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 224 Les états et territoires sont confrontés à une industrie qui exerce de fortes pressions pour une déréglementation la plus large possible du jeu (pages 12.14, 12.15 et 12.20). L’industrie avance que trop de contraintes ne peut qu’inciter les Australiens à se diriger vers des sites illégaux qui leur offrirait un environnement de jeu libre d’une réglementation qui ne serait pas appréciée. Il existe en Australie un concept populaire, celui de la souveraineté du consommateur, selon lequel l’individu est mieux placé pour évaluer quand les coûts dépassent les bénéfices. Les efforts de réglementation sont aisément qualifiés de paternalisme et de contrôle social excessif. De l’avis de la commission, il s’ensuit que les juridictions ont adopté des politiques qui reposent sur des objectifs qui sont mal définis (pages 12.14 et 12.15). 6.3.4.1.1.1 La modification structurale des AÉJ Considérant une modification structurale à apporter aux appareils ou aux sites, la commission a conclu qu’il n’est probablement pas possible de diminuer véritablement les dommages causés aux joueurs excessifs sans imposer des inconvénients pour les joueurs sans problème de jeu : “For example, one strand of harm minimisation aims to reduce problem gambling by changing the designs of gambling technology and venues. For this to be worthwhile, the benefits from reducing problem gambling have to be greater than the costs for recreational gamblers. Some design changes will not pass this test.” (Productivity commission, 1999, page 12.15) Conséquemment, la commission s’est clairement prononcée en faveur d’une politique de minimisation des méfaits plutôt qu’une de prévention des méfaits en ce sens que la minimisation implique que les mesures ne doivent pas affecter les bénéfices tirés de l’exploitation du jeu (page 12.21)380. Six catégories de mesures ont été identifiées comme étant envisageables (pages 16.2 et 16.3) : Tableau 38 Catégories des mesures possibles selon la Productivity commission (voir pages 16.2 et 16.3) Catégorie Commentaire 1 - Interdire les activités de jeu qui sont dommageables. Sur les AÉJ, elles ont toutes le potentiel d’être dommageables. 2 - Augmenter les connaissances des joueurs afin de les prémunir contre le risque de développer une dépendance pathologique à l’égard du jeu. Les mesures existantes prennent la forme de brochures, de bornes interactives ou de modules explicatifs. 380 À l’appui de sa position, la commission cite l’automobile, en exemple, qui est un produit dangereux qui ne saurait être interdit en raison des nombreux bénéfices qu’elle apporte à la quasi-totalité de la population. Comparer les bénéfices de l’automobile aux bénéfices des activités de jeu semble toutefois extraordinairement disproportionné. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 224 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 225 Tableau 38 Catégories des mesures possibles selon la Productivity commission (voir pages 16.2 et 16.3) Catégorie Commentaire 3 - Contrôler l’environnement de jeu afin de prévenir la perte de contrôle chez les joueurs excessifs. La principale mesure consiste à instaurer un programme d’autoexclusion. Sur les AÉJ, il serait possible de limiter la durée de jeu ou les montants dépensés. 4 - Préciser dans la loi les responsabilités (duty of care) des exploitants à l’égard de leurs clients. La stratégie australienne mise beaucoup sur l’auto-dépistage des problèmes de jeu, par les joueurs excessifs, afin de les inciter à réclamer des exploitants des mesures pour minimiser leurs dommages. Si la loi définit clairement les obligations, la crainte des poursuites judiciaires forcerait les exploitants à multiplier les mesures d’atténuation des dommages. 5 - Vérifier continuellement l’intégrité des jeux. 6 - Dispenser une aide directe aux joueurs qui subissent des dommages en raison du jeu excessif. De plus, la commission a estimé qu’il n’y a aucun motif clair pour lier les permis d’exploiter des AÉJ aux permis d’alcool. La commission n’a pas évalué que la réduction du nombre d’appareils ou du nombre de sites pourraient être des mesures efficaces pour diminuer les méfaits du jeu excessif, sauf là où le nombre d’appareils ou de sites est préalablement peu élevé (chapitre 15). En ce qui concerne la réglementation des AÉJ, il n’a pas jugé bon de proposer un taux de remise maximal obligatoire ou un abaissement du taux de remise minimal (page 16.21 et 16.22). Bref, on ne touche pas au processus pathogène. 6.3.4.1.1.2 La liberté de choix des utilisateurs La liberté de choix des utilisateurs doit être appuyée par la divulgation, pour chaque jeu et chaque appareil, des montants qui peuvent être perdus à chaque heure381 ainsi que de la probabilité d’obtention de chacun des lots importants figurant dans la table de lots (page 16.21). La nature des jeux doit être mieux expliquée (pages 16.22 à 16.25). Lorsque des établissements de jeu ont recours à des cartes électroniques qui font le monitorage de la dépense individuelle au jeu, un relevé des dépenses devrait être posté régulièrement aux joueurs (page 16.27). 381 En tenant compte d’une vitesse moyenne de jeu. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 225 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 226 6.3.4.1.1.3 Le notion de « duty of care » Selon la commission (pages 16.44 à 16.51), le meilleur incitatif pour que les exploitants construisent des environnements de jeu sécuritaire consiste en une définition juridique plus précise du « duty of care ». Une définition efficace de ce concept aurait comme conséquences d’obliger les exploitants à : • sensibiliser leurs employés au jeu excessif et à les inciter à détecter les joueurs qui éprouvent conséquemment des problèmes de jeu; • développer des messages et mises en garde au sujet des risques découlant du jeu excessif; • référer les personnes qui éprouvent des problèmes de jeu à des services qui viennent en aide aux joueurs excessifs; • éviter que les joueurs soient incités ou en arrivent à consommer trop d’alcool; • adopter des mesures cohérentes avec le concept de jeu responsable (en ce qui concerne les lieux des guichets automatiques, l’achat d’AÉJ sécuritaires une publicité équitable). La crainte des poursuites judiciaires, intentées par des joueurs qui auraient perdu des sommes importantes en raison d’une faute de l’exploitant, motive certainement tous les efforts pour définir des codes de commercialisation plus éthiques. Ayant sans doute l’aval de nombreux conseillers juridiques, ces codes ne sont toutefois jamais évalués par des spécialistes des problèmes de jeu. On ne connaît pas leur efficacité au-delà des salles d’audience. 6.3.4.1.1.4 Le concept d’accessibilité En Australie, la Productivity commission a proposé d’évaluer l’accessibilité en fonction de neuf dimensions. Voici comment ces dimensions s’appliqueront à l’offre de jeu lorsque les salons de jeux ouvriront. Tableau 39 Évaluation de l’accessibilité en fonction des neuf dimensions proposées par la Productivity commission en Australie Dimension Casinos ALV dans les bars Salons de jeu Nombre d’AÉJ 5 900 13 870 Réduit à 11 370 (-18%) 1 770 Mais 13 140 (-5%) si on considère les 1 770 ALV déplacés dans les salons de jeux Distribution spatiale Casinos situés en retrait des quartiers densément peuplés. Bars situés partout au Québec, près des domiciles et des lieux de travail Montréal (+650%) Québec (+335%) Trois-Rivières (+308%) Mont-Tremblant Trois hippodromes et une station touristique Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 226 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 227 Tableau 39 Évaluation de l’accessibilité en fonction des neuf dimensions proposées par la Productivity commission en Australie Dimension Casinos ALV dans les bars Salons de jeu Nombre de sites 3 3 663 Réduit à 2 521 (-31%) 4 Nombre d’ALV par site Montréal (3 172) Charlevoix (825) Lac Leamy (1 903) 3,8 en moyenne Augmenté à 4,5 (+19%) Minimum = 1 Maximum = 55 Montréal (1 300) Québec (335) Trois-Rivières (200) Mont-Tremblant (300) Heures d’ouverture 7 jours sur 7 Montréal (24h) Charlevoix (10h – 3h) Lac Leamy (9h – 4h) 7 jours sur 7 8h – 3:30h 7 jours sur 7 Moins d’heures que dans les bars (?) Critères d’admission 18 ans ou plus Critère peu sévère d’habillement 18 ans ou plus 18 ans ou plus Habillement Facilité d’utilisation des AÉJ Facile Facile Facile Budget de jeu Dépense par visiteur = environ $ 50 Convivialité du site Gérés directement par l’état, les Québécois y sont chez eux. Inconnue Accessibilité réduite aux personnes qui aiment fréquenter des bars gérés par des propriétaires privés. Gérés directement par l’état, les Québécois y sont chez eux. 6.3.4.1.1.5 Le bilan trois ans plus tard Trois ans plus tard, le président de la commission a dressé un bilan382 des impacts de la publication du rapport. Les gouvernements et l’industrie du jeu ont entrepris plusieurs initiatives (pages 2, 3 et 8). Ainsi, le gouvernement fédéral australien a instauré un Conseil ministériel sur le jeu et interdit le jeu interactif. La plupart des états et territoires ont développé des politiques de jeu responsable. L’industrie du jeu a créé une association (Australian Gaming Council), et a commencé à considérer une modification des appareils. Plusieurs exploitants ont adopté un code de commercialisation axé sur le jeu responsable. À l’époque de la commission, il y avait déjà une expansion des services d’aide et une plus grande sensibilisation de la population aux problèmes de jeu. Toutefois, bien que ces initiatives apparaissent utiles, celles-ci n’ont pas empêché une progression additionnelle de la dépense au jeu, quoiqu’à un rythme moins rapide que 382 Banks, G. (2002). The Productivity commission’s gambling inquiry : 3 years on. Keynote address to the 12th annual conference of the National association for gambling studies (NAGS), 21 November 2002, Melbourne, Australia. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 227 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 228 par les années précédentes (pages 8 et 9). Or, il s’agit d’une des principales variables par laquelle une amélioration de la situation aurait pu être constatée : “Before looking at these initiatives more closely, it may be instructive to see what has happened to expenditure on gambling in the period since the Commission’s inquiry. Problem gamblers account for a sizeable proportion of total gambling expenditure, or industry revenue. If measures to address the problem are working, this could be expected to become apparent in the data.” (Banks, 2002, page 8) L’analyse détaillée de la croissance des revenus (pages 8 à 11) suggère que le ralentissement serait davantage attribuable à une maturation des marchés ainsi qu’à une diminution du taux de remise dans deux des trois juridictions où il y a le plus d’AÉJ. Toujours en 2002, comparant états et territoires, Hing et Dickerson383 ont réalisé une revue détaillée des réglementations gouvernementales et des mesures volontaires, notamment en ce qui concerne la promotion du concept de jeu responsable. La conclusion se résume brièvement : les auteurs n’ont trouvé aucune étude scientifique justifiant les programmes de prévention mis en place, et aucune organisation n’a réalisé d’étude d’impact. 6.3.4.2 Une étude australienne particulière Il existe en Australie un grand nombre d’études qui ont tenté de modifier des aspects des AÉJ ou de leur environnement. Compte tenu qu’il en ressort peu d’avantages, il vaut mieux ne pas les détailler ici. Un étude384 mérite néanmoins qu’on s’y attarde. Réalisée in situ, Blaszczynski, Sharpe et Walker ont analysé trois modifications structurales des AÉJ : (1) une réduction de la mise maximale de 10 dollars australiens à un seul dollar, (2) une réduction de la vitesse de jeu de 3,5 secondes à 5 secondes par set, et (3) une limitation de l’accepteur de billets à seulement 20 dollars au total. La seule mesure qui a porté fruit a été la limitation de l’accepteur de billets. Pourtant, les auteurs ont rejeté cette solution parce qu’elle a diminué les revenus des AÉJ de 42%. 6.3.4.3 Les mesures adoptées dans les casinos néo-zélandais Lorsque le gouvernement néo-zélandais a autorisé la création de casinos en 1990, le gestionnaire du premier casino a porté une attention particulière à éviter que les médias n’en viennent à continuellement blâmer l’établissement de jeu pour les cas sensationnels de joueurs qui ont perdu le contrôle sur leur dépense au jeu. Il était estimé que les problèmes de jeu ne sont pas causés par le casino, et que l’établissement était 383 Hing, N., & Dickerson, M. (2002). Responsible Gambling, Australian Voluntary and Mandatory Approaches. Australian Gaming Council: http://www.austgamingcouncil.org.au 384 Blaszczynski, A., Sharpe, L. & Walker, M. (2001). The Assessment of the Impact of the Configuration on Electronic Gaming Machines as Harm Minimisation Strategies for Problem Gambling. University of Sydney Gambling Research Unit, Sydney, Australia. http://www.agmma.com.au/pdf/reports/Sydney_Uni_Research_Report.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 228 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 229 plutôt victime d’une minorité de joueurs malfaisants. L’objectif n’était pas de réduire les méfaits du jeu, mais de protéger l’établissement contre la dénonciation médiatique. Cinq mesures ont été adoptées385 : • Un code vestimentaire et comportemental stricte afin de promouvoir le site comme un lieu de divertissement. • Le financement d’un centre de traitement dans lequel l’Armée du salut était impliquée. • La création d’un programme d’auto-exclusion. • Un plan de marketing, à grande visibilité, pour impliquer le casino dans une multitude d’événements associés à la charité. • Un plan de communications pour rappeler continuellement aux consommateurs et aux médias locaux à quel point l’établissement entreprend des actions positives socialement responsables. Un aspect important du plan de marketing du casino est de parvenir à obtenir des rapports positifs provenant d’organismes indépendants. Il s’agit alors d’une mesure du succès du plan de marketing. 6.4 La situation au Québec Traditionnellement limitée aux loteries, l’avènement des casinos, et celui du parc des ALV, ont été deux changements radicaux dans l’offre de jeu au Québec. La gestion de ces changements radicaux s’est faite au jour le jour sans la planification d’études d’impact386 ni un monitorage satisfaisant387 de la fluctuation des problèmes de jeu. Un 385 Voir à la page 152 dans : Pitcher, A. (1999). Responsible promotion of gaming and dealing with problem gamblers. Journal of gambling behavior, 15(2), 149-159. 386 Quelques études ont surtout été l’initiative du Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) de l’université Laval : (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. (b) Jacques, C., Ladouceur, R., & Ferland, F. (2000). Impact of availability on gambling: A longitudinal study. Canadian Journal of Psychiatry, 45, 810-815. (c) Ladouceur, R., Jacques, C., Giroux, I., Ferland, F., & Leblond, J. (2000). Analysis of a Casino’s self-exclusion program. Journal of Gambling Studies, 16, 453-460. (d) Jacques, C., & Ladouceur, R. (2006). A prospective study of the impact of opening a casino on gambling behaviours : 2- and 4-year follow-ups. Canadian journal of psychiatry, 51(12), 764-773. 387 Avant l’étatisation des AÉJ, il y a eu une étude nationale (québécoise) de prévalence réalisée en 1989. Deux ans après l’étatisation, une seconde étude nationale a été réalisée. Formellement mandatée par le MSSS, une troisième étude nationale a été réalisée seulement en 2002. Par leur méthodologie, les études de 1989 et 1996 sont comparables pour la prévalence à vie, et les études de 1996 et 2002 sont comparables seulement pour la prévalence actuelle établie sur 12 mois. Des difficultés techniques, notamment dans l’étude de 2002, empêchent cependant de faire des comparaisons qui constitueraient un suivi satisfaisant. Outre des problèmes de pondération de l’échantillon ou de dépistage des joueurs pathologiques, l’absence de données concernant la Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 229 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 230 effort particulier a néanmoins été manifeste pour contrôler l’intégrité et la sécurité aux casinos, ainsi que l’intégrité des ALV. Plus de sept ans après l’implantation, en 2001 et 2002, des appréhension à l’égard de la santé publique ont finalement conduit à un Forum sur le jeu pathologique388 et à une Table de concertation interministérielle389. Ces initiatives ont mené à la proposition de recentrer l’exploitation des AÉJ, et du reste des activités de jeu, en fonction d’un concept de jeu responsable. Les changements apportés depuis n’ont pas été l’objet d’études d’impact. Un troisième changement radical se produira en 2007. Le projet des salons de jeux n’implique pas qu’un déplacement de l’offre de jeu déjà existante sans impact sur la situation actuelle. Il s’agit d’une modification radicale dans la configuration de l’offre de jeu dont on peut anticiper qu’elle augmentera considérablement l’attrait390 des sites, la proximité des grandes surfaces de jeu consacrées aux AÉJ, l’accessibilité, la diversité des types de jeux et d’appareils, ainsi que des occasions croisées391 de dépenser au jeu. De plus, en rapprochant les activités de jeu des autres activités de divertissement, il y aura un transfert probable du budget de loisir vers le budget de jeu392. prévalence à vie ignore les dommages subis par de nombreux joueurs excessifs qui ont commencé à jouer après 1996 et qui ne jouaient plus en 2002. (a) Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gamblers in Québec. Canadian Journal of Psychiatry, 36, 732-734. (b) Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. (c) Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. (d) Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. 388 (a) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). Jeu pathologique : connaître, comprendre, agir. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca (b) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique : document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca 389 Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. 390 En plus des jeux d’argent, plusieurs autres activités de divertissement seront concentrées dans l’environnement des salons de jeux. Comme les casinos, les salons de jeux vont présenter une façade plus prestigieuse que le bar du coin. La densité et la diversité de l’offre de jeu sera plus attrayante pour les amateurs des jeux. 391 En l’occurrence, les parieurs à l’hippodrome auront accès à des ALV plus souvent libres parce que plus nombreux. Dans la mesure où les salons de jeux capteront la clientèle des bars ou des casinos, celle-ci sera davantage exposée aux hippodromes. 392 (a) Voir aux pages 9, 30, 5.32-5.34 et 7.55-7.57 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Voir à la page XIII dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 230 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 231 Les salons de jeux auront aussi comme conséquence plausible d’augmenter les revenus tirés des ALV. Au Québec, en 2002-2003, le revenu net annuel des ALV dans les hippodromes a été de 102 093 dollars, tandis qu’il n’a été que de 74 475 dollars dans les bars (voir la Figure 14 à la page26)393. Les appareils déplacés pourraient alors augmenter leur rendement de 37%; ce qui compenserait largement la réduction anticipée de 5% du nombre total d’ALV. Il est ici utile de rappeler que, parce qu’ils perdent déjà de l’argent qu’ils ne peuvent pas perdre, une augmentation de la dépense au jeu des joueurs excessifs se traduit nécessairement par une augmentation des dommages. Localement, à Montréal, une bonne partie de la clientèle des machines à sous va plausiblement se diriger vers le salon de jeux. Ceci libérera de l’espace au casino afin d’aménager des services qui semblent ne pas pouvoir l’être actuellement en raison de l’exiguïté des lieux. Dès lors, les salons de jeux peuvent avoir un impact indirect sur les casinos qui se concrétisera par une augmentation de l’offre de jeu en ce qui a trait globalement aux AÉJ et aux jeux de table. 6.4.1 Les objectifs de l’étatisation des AÉJ Il est clair que le projet des salons de jeux va favoriser un objectif de financement. Par rapport aux autres objectifs, qui ont motivé l’étatisation des AÉJ, la contribution des salons de jeux est cependant moins claire. En 1993, Loto-Québec a entrepris d’étatiser les AÉJ afin de répondre à cinq objectifs. Un sixième objectif a été ajouté en 2002 (voir Tableau 40). Tableau 40 Objectifs motivant l’exploitation des AÉJ par le gouvernement du Québec Objectif Commentaire Objectifs initiaux Financement L’état a besoin de générer des revenus pour financer les services publics, sinon pour rembourser sa dette. Ces revenus sont versés au Fonds consolidé du Québec. Protectionnisme Les offres de jeu des juridictions concurrentes, ou des marchés clandestins, peuvent entraîner une fuite économique vers des établissements qui n’ont pas à assumer les coûts sociaux du jeu excessif. 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. 393 Données calculées à partir du document : KPMG. (2004). Current and potential racinos in Canada. http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 231 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 232 Tableau 40 Objectifs motivant l’exploitation des AÉJ par le gouvernement du Québec Objectif Commentaire Service La population du Québec s’intéresse aux jeux de hasard et d’argent, et elle a le droit à tous les services qu’elle désire dans la mesure où ceux-ci proposent des activités qui n’exploitent pas indûment des personnes vulnérables. Sécurité La gestion de l’offre de jeu par l’état permet aux citoyens de jouer en confiance, en toute légalité, sans risque d’être la victime de criminels. Intégrité Sans surveillance, les opérateurs peuvent modifier les dispositifs de jeu au détriment des joueurs. Objectif additionnel depuis 2002 Jeu responsable Loto-Québec a entrepris de modifier les ALV, et leur environnement, afin de promouvoir des comportements conformes au concept de jeu responsable. 6.4.1.1 Financement Depuis la création de Loto-Québec en 1969, le gouvernement a récolté un bénéfice net394 de plus de 20 milliards de dollars, dont 11 proviennent des loteries, 6 des ALV et 3 des casinos. Au cours des cinq dernières années, le service de la dette du gouvernement du Québec a coûté environ sept milliards de dollars annuellement. À ce titre, le bénéfice net annuel de Loto-Québec représente un peu plus que 20% de ce fardeau fiscal. Dorénavant, cette contribution provient majoritairement des profits des AÉJ395. Pour le gouvernement, Loto-Québec est un contributeur aussi important que l’est Hydro-Québec, et elle est trois fois plus rentable que la SAQ396. À cet égard, l’objectif de financement est sans fin. Annuellement, le service de la dette annule complètement les contributions d’Hydro-Québec, de Loto-Québec et de la SAQ qui, à elles trois, ne comblent que les deux tiers du montant à rembourser. Dès lors, il existe un risque important que l’état-croupier devienne dépendant des revenus du jeu397. 394 La dépense au jeu de la population québécoise, et de quelques touristes, dans les activités de Loto-Québec s’élève à environ 36 milliards de dollars (voir à la page 17 du présent document). C’est ce qui en a coûté aux Québécois pour générer ces 20 milliards de profit pour le gouvernement. Le bénéfice net est la dépense au jeu moins les frais d’opération. Voir aussi la Figure 5 à la page 18 du présent document. 395 Voir la Figure 6 à la page 18 du présent document. 396 Voir la Figure 4 à la page 17 du présent document. 397 Blaszczynski, A. (2000). Are governments addicted to gambling? Addiction, 95(10), 15831584. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 232 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 233 Cette situation pose un problème d’éthique publique puisque les revenus des AÉJ sont une taxe régressive398 dont le fardeau incombe davantage aux jeunes, aux démunis et aux personnes moins scolarisées. Par surcroît, une portion importante, sinon majoritaire, des revenus des AÉJ provient des joueurs excessifs, souvent des gens malades du jeu399. Considérant la difficulté éthique de l’objectif de financement, le projet des salons de jeux ne convainc pas encore de sa capacité à générer des revenus, qui ne seraient pas obtenus autrement, sans générer un important problème de santé publique additionnel. 6.4.1.2 Protectionnisme Le Québec n’a jamais connu de difficulté posée par des établissements de jeu étrangers situés à ses frontières. Les nations amérindiennes ont des pouvoirs très limités pour organiser des activités de jeu. Le jeu clandestin n’est pas un objet particulier de préoccupation. Les seules occasions de fuite économique sont les voyages à l’étranger et le jeu sur Internet. À l’occasion de l’étude de prévalence du jeu400, réalisée en 2002, les Québécois ont été interrogés sur leur dépense annuelle dans 20 activités de jeu. La répartition de cette dépense est présentée dans la Figure 88. Toutes les activités étiquetées dans la partie gauche de la figure sont gérées par Loto-Québec. Dans la partie droite, en haut, il y a le pari mutuel, le bingo et les tirages qui sont étroitement supervisées par la RACJ. Les jeux de cartes entre amis et les jeux d’habileté sont essentiellement à espérance nulle de gain401. Les occasions de fuite économique se situent alors dans les activités liées à Internet, celles gérées illégalement par les preneurs au livre, et, lorsqu’organisées par des fraudeurs, les pools sportifs, les autres paris sportifs et les jeux de cartes d’arrièreboutique entre inconnus. Considérant les données ici présentées, en 2002, les occasions de fuite économique constituaient moins de 4% de la dépense estimée. Compte tenu que 96% de la dépense au jeu est déjà endiguée dans des activités contrôlées, ou à espérance nulle de gain, et qu’il est peu réaliste de croire pouvoir faire mieux, l’objectif de protection ne peut pas justifier le projet des salons de jeux. 398 Voir aux pages 30 et 54 ainsi qu’à la section 10.5 aux pages 10.38-10.56 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. 399 Voir la section 3.2.4.3 - La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs pathologiques à la page 85 du présent document. 400 Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. 401 Pour cette raison, ils ne posent aucun risque de fuite économique. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 233 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 234 Figure 88 Répartition de la dépense au jeu estimée en 2002 Casino - roulette 2% Casino - keno 1% MAS ALV 7% 14% Pari mutuel 3% Bingo 8% Casino - blackjack 5% Tirages 4% Cartes (familles, amis) 2% Casino - poker 4% Jeux d'habileté 8% oterie instantanée 8% Loterie sportive 2% Loterie quotidienne 3% Pools sportifs 1% Loterie ordinaire 23% Autres paris sportifs 1% Cartes hors amis 1% Internet 1% Preneur au livre 0% 6.4.1.3 Service Il n’existe pas d’étude publique permettant d’identifier comment la population québécoise juge équitable de développer l’offre de jeu. À cet égard, il ne s’agit pas d’identifier à quelles activités les personnes accepteraient de dépenser leur argent si celles-ci devenaient disponibles, ou si on parvenait à leur faire connaître. Ce ne sont pas des études de marketing, ou de simples études de marché, qui peuvent répondre à ce besoin. Un large débat public est nécessaire pour atteindre cet objectif. Plutôt que d’être sondés au téléphone sans avertissement ni préparation, les citoyens doivent pouvoir se prononcer après avoir entendu l’ensemble des points de vue de leurs concitoyens. 6.4.1.4 Sécurité En 1978, après avoir étudié les impacts des casinos au Nevada et au Colorado, une étude de la Sûreté du Québec a produit un rapport très réfractaire à l’implantation des casinos au Québec402. En 1982, le gouvernement du Québec n’avait pas jugé bon d’implanter des casinos sur le modèle américain car la principale faille de ce modèle était son incapacité à empêcher le crime organisé d’infiltrer les établissements de jeu. Toutefois, en 1990, un comité interministériel a visité plusieurs casinos européens. Il y a constaté des établissements de jeu où les problèmes de criminalité étaient mineurs. 402 Pour un historique des démarches entreprises par la Sûreté du Québec entre 1978 et 1992, voir un mémoire présenté par monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 234 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 235 Ainsi, en 1992, dans un objectif de sécurité, le gouvernement du Québec a privilégié le développement de casinos dont l’organisation était largement inspirée du modèle européen403. À cette occasion, la Sûreté du Québec404 a émis un avis favorable aux casinos de type européen, mais un avis franchement réfractaire à la distribution d’AÉJ dans les bars et autres commerces, comme l’étaient les APV. Au mieux, la Sûreté du Québec a proposé de créer des « salons de vidéopkers » qui seraient entièrement exploités par l’État. La concrétisation de cette réflexion a été un compromis vaguement fidèle à la recommandation de privilégier le modèle européen. En effet, la comparaison des modèles permet de constater que les casinos québécois sont nord-américains dans l’offre de jeu, sur le plancher, mais européens dans leur gestion financière, dans leur marketing, et, dans une mesure moins exigeante, dans leur gestion des problèmes posés par la clientèle (voir Tableau 41). Comme les casinos européens, les casinos québécois sont entièrement une propriété publique, et les revenus profitent principalement au gouvernement. Ils font peu de publicité, et ils ne permettent pas de faire crédit aux joueurs, d’accorder des gratuités fréquentes, ni de consommer de l’alcool dans l’aire de jeu. Par rapport aux casinos européens, les casinos québécois se démarquent toutefois en étant situés plus près des grands centres urbains où ils attirent une clientèle moins touristique. Contrairement aux casinos européens, il n’est pas nécessaire de s’identifier et aucun frais d’entrée n’est imposé. Le code vestimentaire et le programme d’autoexclusion sont beaucoup moins contraignants. En contrepartie, comme dans les casinos nord-américains, bien qu’il y existe une certaine clientèle internationale de joueurs très riches, la clientèle des casinos québécois est principalement locale. L’accès est libre, instantané et gratuit. Les visiteurs, nombreux, jouent principalement sur des MAS. L’environnement est bruyant. À Montréal, la clientèle étrangère provient surtout du tourisme d’affaires. À Gatineau, les touristes proviennent beaucoup de la « banlieue » ontarienne. On n’y décèle pas l’idée européenne que le casino est surtout un lieu de rencontre où une clientèle touristique de villégiature peut se divertir en soirée. 403 (a) Voir à la page CET-194 la déclaration de monsieur André Vallerand, ministre du Tourisme, à la Commission permanente de l’économie et du travail (30 avril 1992), Journal des débats, 3, Gouvernement du Québec. (b) Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente du budget et de l’administration (28 avril 1993), Journal des débats, 54, Gouvernement du Québec. (c) Déclaration de monsieur Ghyslain K.-Laflamme, président de la Régie des alcools du Québec, à la Commission permanente des institutions lors des auditions et étude détaillée du projet de loi 84 – loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux et modifiant diverses dispositions législatives (16 juin 1993), Journal des débats, 49, Gouvernement du Québec. 404 Voir à la page CI-387 dans la déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (6 mai 1992), Journal des débats, 12, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 235 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 236 Par ailleurs, il existe en Europe des salons de jeux semblables à ceux qui seront implantés au Québec, notamment les Amusements centra aux Pays-Bas. En Amérique du Nord, les salons de jeux sont rares car l’offre de jeu est surtout concentrée dans les casinos. Les AÉJ situés dans les hippodromes n’impliquent aucune autre occasion de dépense à part le pari mutuel. Néanmoins, le projet des salons de jeux marque un rapprochement vers le modèle nord-américain. En raison de l’interdépendance avec les hippodromes, les intérêts d’un partenaire privé pourraient amoindrir l’importance des impératifs de santé publique dans les préoccupations gouvernementales. L’offre de jeu consistera uniquement en des AÉJ distribués très près de quartiers populeux à revenu modeste. Il en résultera vraisemblablement une compétition importante de la part des propriétaires des bars voisins. Il est ainsi difficile de prédire si l’objectif de sécurité sera moins bien atteint en raison des salons de jeux. En principe, avec ce projet, le gouvernement s’éloigne de sa politique initiale. Bien qu’il existe un équivalent européen, le modèle des Amusements centra n’a jamais été évalué comme offrant les mêmes garanties de sécurité que les casinos européens. Une révision de cet objectif serait appropriée. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 236 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 237 Tableau 41 Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405 Casino nord-américain 1. Objectifs financiers Casino européen Casino québécois Salon de jeu de LotoQuébec Profits pour l’entreprise privée. Équipement de loisir communautaire. Revenus pour financer les services publics. Revenus pour financer les services publics. Création d’emplois. Occasion de socialisation entre la population et les touristes. Création d’emplois. Sauvetage des hippodromes. Stimulation de l’économie touristique. Stimulation de l’économie touristique. Espace libéré au casino disponible pour des services destinés à la clientèle touristique. Faible création d’emplois. 2. Propriété Privée. Mixte, mais typiquement contrôlée par le gouvernement. Gouvernement du Québec. Gouvernement du Québec en tenant compte des intérêts du gestionnaire des hippodromes. 405 Thompson, W.N. (1998). Casinos de juegos del mundo: A survey of world gambling. Annals of the American Academy of Political and Social Science, 556, 11–21. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 237 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 238 Tableau 41 Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405 Casino nord-américain Casino européen Casino québécois Salon de jeu de LotoQuébec 3. Sites Les casinos sont concentrés dans un espace limité. Dans une ville, ils sont situés très près les uns des autres. Généralement situés dans des petites villes éloignées les unes des autres. Il n’y a guère plus d’un casino par ville. Sauf l’exception historique de Charlevoix, les casinos sont situés près des marchés les plus lucratifs (Montréal et l’Ontario), mais un peu éloignés du centre urbain. Sauf pour le Mont Tremblant, les salons de jeux, attenant aux hippodromes, seront situés dans des quartiers populeux défavorisés ou à revenu moyen. 4. Taxation Minimale, adaptée aux besoins de l’entreprise privée, c’est-à-dire entre 6 et 8 pour cent. Très élevée, entre 50 et 90 pour cent. Tous les bénéfices vont au gouvernement. 22% des revenus de 1900 ALV vont être distribués au gestionnaire des hippodromes. Les autres revenus iront au gouvernement. 5a. Accès Libre et gratuit. Frais d’entrée. Libre et gratuit Libre et gratuit 5b. Identification Sans obligation de s’identifier. Enregistrement de l’identité des visiteurs. Les résidents peuvent être empêchés. Sans obligation de s’identifier. Sans obligation de s’identifier. 5c. Code vestimentaire Minimal ou inexistant. Tenue de soirée. Minimal Minimal Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 238 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 239 Tableau 41 Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405 Casino nord-américain 5d. Auto-exclusion Liste minimale Casino européen Casino québécois Un liste d’exclusion comprend les noms de joueurs volontaires, ou de ceux forcés par leur famille ou l’établissement en raison du jeu excessif. Seuls les joueurs volontaires sont inscrits sur la liste. Salon de jeu de LotoQuébec Programme semblable à celui des casinos québécois. Le casino exclut des joueurs en raison de pratiques indésirables. 6. Heures d’ouverture Sept jours sur 7. Vingtquatre heures sur 24. Heures limitées, surtout en soirée. Fermés les jours de congé. Ouverts tôt le matin et fermés tard dans la nuit lorsqu’ils le sont. Heures d’ouverture moindres que dans les casinos québécois. 7. Clientèle Volume important. Nationale et internationale. Volume peu important. Locale ou régionale. Volume important. Locale, provinciale, et un peu internationale. Volume plausiblement important surtout composé d’une clientèle très locale. 8a. Promotions et publicité Abondantes avec beaucoup de publicité. Peu de promotions. Pas de publicité. Pas de publicité. Pas de publicité. 8b. Gratuités Voyages ou hébergements subventionnés. Peu de gratuités. Gratuités accordées aux membres d’un club privilège. Non précisé. Nombreuses gratuités. Cadeaux dispendieux distribués aux plus gros clients. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 239 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 240 Tableau 41 Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405 Casino nord-américain Casino européen Casino québécois Salon de jeu de LotoQuébec 9. Crédit Crédit accordé aux joueurs. Encaissement de chèque. Pas de crédit fait aux joueurs. Opportunités limitées d’encaissement de chèques. Pas de crédit fait aux joueurs. Aucun encaissement de chèque. Pas de crédit fait aux joueurs. Aucun encaissement de chèque. 10. Implication de la collectivité Mixte. Essentielle. Minimale. Minimale. 11. Environnement de jeu Bruyant, vaste, scintillant, lumineux, rouge et fermé (sans fenêtre). Tranquille, petit, élégant, bleu et ouvert (avec fenêtre) Mixte : bruyant autour des MAS et plus calme aux tables de jeu, surtout dans les sections à hautes mises. Plausiblement à l’américaine. 12. Alcool Gratuit. Distribution libre. Limité en dehors des aires de jeu. Limité en dehors des aires de jeu. Limité en dehors des aires de jeu. 13. Jeux Surtout des MAS. MAS et tables de jeu entremêlées. Surtout des tables de jeu. Il y a peu de MAS, et elles sont situés à part. Surtout des MAS avec des tables de jeu en retrait. Des ALV auxquels des tables de jeu automatisées pourraient être ajoutées. 14. Personnel Remplacement rapide d’un personnel non syndiqué qui est formé autrement que par les casinos. Les casinos forment leur personnel qu’ils conservent en permanence. Ceux-ci sont syndiqués. Les casinos forment leur personnel qui semble relativement stable. Ceuxci sont syndiqués. Peu de formation requise. Il y aura peu d’employés. Syndicalisation attendue. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 240 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 241 Tableau 41 Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405 15. Joueurs excessifs Casino nord-américain Casino européen Les entreprises craignent l’image négative des joueurs excessifs. Sinon, ils ne sont pas l’objet d’une grande attention des gestionnaires. Les joueurs excessifs ne sont pas encouragés à dépenser outrancièrement, ou ils sont invités à s’autoexclure. Casino québécois Quelques efforts pour inciter les joueurs excessifs à prendre conscience de leur problème de jeu, mais en autant que cela soit sans impact démotivant sur les autres joueurs. Salon de jeu de LotoQuébec Programme d’autoexclusion volontaire. Programme d’autoexclusion volontaire. Un psychologue peut être appelé au casino si un client en éprouve le besoin. 16. Crime On le sent un peu partout. Problème au niveau du contrôle des casinos. Ne pose pas de problème particulier. Prêt usuraire mal contrôlé. Incertitude quant au blanchiment d’argent. Suicides. Indéterminable. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 241 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 242 6.4.1.5 Intégrité L’intégrité des jeux au Québec a bonne réputation. Le projet des salons de jeux ne peut donc pas se justifier par un besoin d’augmenter cette intégrité. 6.4.1.6 Jeu responsable Depuis 2002, une gestion du jeu centrée sur le concept de jeu responsable transfert aux joueurs un fardeau de responsabilités qui est irréaliste406. Aucune étude n’a été réalisée afin de déterminer si les joueurs ont ajusté leur comportement en conséquence. Aucune étude n’a été réalisée pour établir l’impact de la promotion de ce concept sur les problèmes de jeu. Indice troublant, la dépense au jeu sur les AÉJ continue de progresser d’année en année407 sans que le volume de la clientèle ne progresse. En effet, bon an mal an, le taux de pénétration annuel des ALV demeure légèrement en deçà de 10% de la population adulte408. Or, si le volume n’augmente pas et que les revenus augmentent, il est évident que les joueurs sur ALV ne modèrent pas leur dépense au jeu, loin de là. Entre 1996-1997 et 2004-2005, la dépense moyenne par joueur sur ALV409, sans égard à la fréquence de jeu410, est passée de $ 988 à $ 2 146, soit une augmentation de 117%. En raison d’un remplacement continuel des joueurs411, le volume stable de la clientèle annuelle cache une augmentation des personnes qui subissent des dommages sur les ALV. Ce phénomène a aussi été documenté en Australie. Plus les ALV existent depuis longtemps dans un environnement, plus les joueurs y dépensent beaucoup d’argent individuellement412. Plus un marché atteint sa maturité, plus les AÉJ peuvent entraîner des dommages importants pour les joueurs qui décident d’y jouer régulièrement. 406 Voir à la section 6.1 - L’irréalisme du concept de Jeu responsable à la page 162 au début de ce chapitre. 407 Voir la Figure 12 à la page 24 du présent document. 408 Voir la Figure 11 à la page 23 du présent document. 409 Voir la section ALV dans le Tableau 1 - Dépense per capita et dépense par joueur à différentes activités de jeu à la page 11 du présent document. 410 Pour être considéré parmi les joueurs, il suffit d’avoir joué sur un ALV au moins une fois dans l’année. Ces montants seraient plus élevés si, au lieu de considérer les joueurs annuels, seule la dépense des joueurs mensuels était comptabilisée. 411 Voir la section 2.6 - La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu à la page 51 du présent document. 412 Voir aux pages 113, 118 et 130 dans : Delfabbro, P. (2002, November). Appendix E : The distribution of electronic gaming machines (EGMs) and gambling-related harm in Metropolitan Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 242 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 243 6.4.2 Les étapes de l’étatisation des AÉJ Au Québec, en juin 1976413, un marché non réglementé d’appareils de poker vidéo414 s’est développé à titre de dispositifs de jeu donnant droit uniquement à des parties gratuites. Parce que les exploitants payaient en argent les crédits obtenus par les joueurs, ces appareils étaient illégaux. Peu avant l’étatisation, le parc des APV aurait généré des profits d’environ 350 millions de dollars. Prenant prétexte qu’une partie importante de ces revenus aurait pu échapper au fisc415, le gouvernement du Québec a entrepris d’étatiser les AÉJ. Le gouvernement a alors surtout cherché à se débarrasser des distributeurs sans nécessairement priver les détaillants de revenus416. Les APV ont alors été remplacés par des ALV. Dorénavant, les détaillants devaient cependant posséder un permis d’alcool. Le processus d’étatisation et d’implantation a été marqué par plusieurs étapes, chacune introduisant de nouvelles mesures pour contrer des problèmes417 associés au jeu : • En juin 1993, par la loi 84, la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ) a été créée, et le gouvernement du Québec a enclenché le processus d’étatisation des AÉJ. • La Société des casinos du Québec a été créée. Ses activités ont immédiatement été encadrées par une loi ainsi qu’un règlement418. Avec l’inauguration du casino de Montréal en octobre 1993, la population a eu un premier accès légal à 1 200 MAS419, en plus d’un jeu de keno, et de 65 tables de jeu. Par la suite, le casino Adelaide. Dans Independent gambling authority. (2003). Inquiry into management of gaming machine numbers. Adelaide, South Australia: author. 413 Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Page CI-1825, Gouvernement du Québec. 414 L’historique des APV est résumé, dans le présent document, à la section 3.2.2 - La dangerosité des appareils de poker vidéo. 415 On ne sait pas quelle proportion des revenus a été déclarée à l’impôt par les distributeurs et les détaillants. Compte tenu que les trois-quarts des APV étaient détenteurs d’une licence de la Régie de loteries du Québec, il est vraisemblable qu’une partie des 350 millions ait quand même été déclarée à l’impôt par les détaillants. 416 Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, page CI-1845, Gouvernement du Québec. 417 Il peut s’agir des problèmes des joueurs (jeu excessif), ou ceux des établissements (sécurité, image publique). 418 Les MAS sont réglementées par les articles 87 à 95 du Règlement sur les jeux de casino de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r1.01). 419 Les MAS n’offrent qu’un jeu par appareil. Il s’agit typiquement d’un jeu de ligne. Certaines MAS offrent néanmoins un jeu de carte, poker ou blackjack, qui techniquement en font des APV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 243 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 244 de Charlevoix a ouvert ses portes en juin 1994, et le casino du Lac Leamy a suivi en mars 1996. • La Société des loteries vidéo du Québec a été créée, et ses activités ont aussi été encadrées par une loi ainsi qu’un règlement420 qui sont propres à cette filiale. Le 28 juin 1994, Loto-Québec a commencé le déploiement d’un important parc d’ALV exclusivement distribués dans les bars du Québec. Un maximum de 5 ALV est accordé par permis d’alcool, et non par établissement. • En 1996, le gouvernement du Québec accepte de soutenir l’industrie du pari mutuel en accordant aux quatre principaux hippodromes du Québec des super licences leur permettant d’exploiter un grand nombre d’ALV. Sans en avoir le titre, il en résulte des salons de jeux équivalant à des mini-casinos sans table de jeu. • En 1996, une étude de prévalence du jeu pathologique, publiée en 1999, révèle une augmentation de 75% de la prévalence du jeu pathologique au Québec depuis 1989. Cette augmentation est à l’orée du seuil pour être statistiquement significative. • En 1997, Loto-Québec entreprend de financer des centres universitaires de recherche dédiés exclusivement au jeu. Dans les faits, ces centres se font confier le mandat d’exercer indépendamment des responsabilités que ne peut pas assumer un état-croupier. • En 1998, Loto-Québec a diffusé sur TVA et CFCF une émission de sensibilisation intitulée « Savez-vous jouer … sans perdre la tête? ». • En 2001, le gouvernement du Québec investit le MSSS pour assumer les responsabilités relatives à la prévention du jeu pathologique. Un programme expérimental de traitement du jeu pathologique est l’objet d’un test pilote. Un Forum sur le jeu pathologique421 a été organisé les 8 et 9 novembre 2001. • Suite à une Table de concertation interministérielle422, tenue en 2002 consécutivement au Forum sur le jeu pathologique, le gouvernement du Québec impose une gestion du jeu orientée vers le concept de jeu responsable. Des premières modifications sont apportées aux ALV. 420 L’exploitation des ALV est délimitée par le Règlement sur le système de loterie vidéo de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r.6). 421 (a) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). Jeu pathologique : connaître, comprendre, agir. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca (b) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique : document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca 422 Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 244 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 245 • Le 15 mars 2002, la RACJ a décrété un moratoire concernant l’attribution de nouvelles licences pour les ALV. • À partir de janvier 2003, le remplacement du parc d’ALV par des appareils technologiquement plus avancés permet de compléter l’adaptation du parc d’ALV à une approche commerciale axée sur le jeu responsable. • Une étude de prévalence du jeu a été réalisée en 2002, mais publiée seulement en mai 2004. Celle-ci révèle que 96% de la dépense au jeu des Québécois est déjà captée par l’offre de jeu de Loto-Québec, par le pari mutuel ou les activités de jeu des organismes charitables. • En 2005, Loto-Québec propose de modifier la distribution des ALV, jusque-là distribués à 96,8% dans les bars et à 3,2% dans les hippodromes. En déplaçant 1770 ALV des bars vers quatre salons de jeux, 16,2% des ALV se retrouveront ailleurs que dans les bars, c’est-à-dire dans trois salons de jeux attenant à des hippodromes (13,5%), dans le salon de jeu du Mont Tremblant (2,2%) et à l’hippodrome d’Aylmer (0,5%); tandis que 83,8% des ALV resteront dans les bars du Québec. 6.4.3 Les mesures instaurées lors de l’installation des MAS dans les casinos en 1993 En 1992, le gouvernement a créé La société des casinos du Québec (SCQ), et le premier casino a ouvert ses portes à Montréal en octobre 1993. À cette occasion, l’opération des casinos, des jeux de tables et des MAS a été encadrée par une loi, un règlement423 ainsi que diverses mesures additionnelles décidées par la SCQ. La conception du casino a été beaucoup influencée par les discussions que LotoQuébec424 a réalisé avec des consultants provenant d’établissements de jeu néerlandais, américains ou canadiens, ainsi que quelques visiteurs français ou espagnols. Des études ont eu pour conclusion425 de privilégier le modèle européen de casino plutôt que le modèle américain426. 423 Les MAS sont réglementées par les articles 87 à 95 du Règlement sur les jeux de casino de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r1.01). 424 Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente du budget et de l’administration (28 avril 1993), Journal des débats, 54, Gouvernement du Québec. 425 Voir à la page CET-194 la déclaration de monsieur André Vallerand, ministre du Tourisme, à la Commission permanente de l’économie et du travail (30 avril 1992), Journal des débats, 3, Gouvernement du Québec. 426 Voir le Tableau 41 - Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998) à la page 237 du présent document. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 245 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 246 6.4.3.1 Les mesures inscrites dans la réglementation Les MAS sont réglementées par les articles 87 à 95 du Règlement sur les jeux de casino de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r1.01). Les mesures associées à la réglementation sont présentées dans le tableau suivant. Tableau 42 Articles du règlement sur les jeux de casino constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 2 La Société des Casinos du Québec doit mettre les règles pour chaque jeu offert à la disposition du public qui fréquente les lieux où les jeux de casino sont exploités. Cette mesure oblige la SCQ à mettre à la disposition du public les règles des jeux. Selon les articles 89 à 91, l’interface des machines à sous doit indiquer « le nom du jeu, le coût unitaire d’une mise, les lots à gagner ainsi que leur mode d’attribution » en plus de la description du lot qui est offert, soit de l’argent ou un bien, et, lorsque des appareils sont branchés en îlots, la valeur du lot progressif. Ainsi, sur chaque appareil, les combinaisons payantes et les lots payés sont affichés. Chaque joueur, qui qu’il soit, obtient les montants qui lui reviennent. L’état garantit ces paiements. Pour autant que l’intégrité est concernée, il s’agit d’un progrès indéniable pour les joueurs. Toutefois, cette sécurité a plausiblement créé beaucoup de nouveaux joueurs qui, à défaut d’une protection gouvernementale, auraient été trop craintifs des conditions de jeu incertaines ou arbitraires. Dans la mesure où les problèmes de jeu se développent en fonction de la pratique du jeu, le gain d’intégrité obtenu pour une minorité de joueurs est anéanti par une prévalence augmentée des problèmes de jeu dans un segment plus large de la population. À cet égard, entre 1989427 et 1996428, la prévalence à vie du jeu pathologique au Québec est passée de 1,2% à 2,1%. Cette augmentation de 75% est à l’orée429 d’être statistiquement significative. 427 Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gambling in Quebec. Canadian Journal of Psychiatry, 36(10), 732-734. 428 Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling : A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. 429 L’échantillon de l’étude de prévalence de 1996 présente une distorsion importante par rapport à la population, notamment en ce qui concerne la scolarité des sondés. Cette situation a créé une sous-estimation du taux de prévalence en 1996. Leblond a proposé une pondération plus complète des données qui a révélé un taux de prévalence à vie plutôt égal à 2,8%; ce qui représente une augmentation significative de 131%. Voir aux pages 247 et 250 dans Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 246 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 247 Tableau 42 Articles du règlement sur les jeux de casino constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 5 Aucun crédit, sous quelle que forme que ce soit, ne peut être accordé par la Société. Cette mesure est typique des casinos européens. Il s’agit aussi d’une leçon qui a été tirée de l’époque de Pacifique Plante à Montréal430. Les joueurs qui ont besoin de crédit sont les joueurs excessifs, et les joueurs excessifs misent des montants qu’ils n’ont pas les moyens de perdre. 88 Le résultat d’un jeu sur une machine à sous doit reposer sur le hasard même lorsque le joueur peut faire des choix. Dans le cas des jeux de poker ou de blackjack offerts sur les MAS, les joueurs ont la capacité d’influencer les résultats. Par rapport au taux de remise, les choix peuvent uniquement influencer à la baisse les montants remis au joueur. En fait, l’application faite de cet article est que le résultat repose surtout sur le hasard, et non uniquement sur le hasard. Dans un tel cas, les jeux de cartes sont davantage préjudiciables aux joueurs moins méthodiques, moins intelligents. De plus, les jeux de cartes sont surtout utilisés par les joueurs réguliers ou ceux qui éprouvent des problèmes de jeu431. 89 Le nom du jeu, le coût unitaire d’une mise, les lots à gagner ainsi que leur mode d’attribution doivent être inscrits sur la machine à sous ou être accessibles au joueur sur l’écran avant le début du jeu. Avec ces informations, le joueur ne peut pas décider rationnellement de son intérêt à jouer ou pas car, pour ce faire, il manque la probabilité d’acquisition de chacun des lots. L’absence d’une information complète entrave l’activation des processus de raisonnement normatifs432. Si le désir de jouer subsiste, le joueur doit alors se limiter à des raisonnements fondés sur des processus heuristiques. Ces processus ne sont pas adaptés pour les jeux de hasard. Leur activation conduit nécessairement à une interprétation erronée de la situation, d’où une grande vulnérabilité à l’illusion de contrôle. Cette mesure est iatrogène. 430 Voir la section 3.2.1.3 - Les problèmes de jeu durant les années 40 à la page 66 dans le présent document. 431 Voir aux pages 3-49 et 3-50 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. 432 Une décision normative implique que la personne est informée de toutes les données nécessaires à sa décision, qu’elle maîtrise les règles logiques devant s’appliquer, qu’elle a le temps de compléter son raisonnement, et que son jugement n’est pas affaibli par des interférences diminuant ses capacités attentionnelles. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 247 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 248 Tableau 42 Articles du règlement sur les jeux de casino constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte 90 Lorsque le lot offert est un bien autre que de l’argent, une description du bien offert ou le bien luimême doit être affiché près de la machine à sous concernée. Commentaire Ceci est une mesure d’intégrité qui est indiscutable. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 248 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 249 Tableau 42 Articles du règlement sur les jeux de casino constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 91 Un panneau d’affichage indiquant de façon continue le montant du lot progressif doit être placé au-dessus des machines à sous qui alimentent ce type de lot. Typiquement, les joueurs excessifs perdent de l’argent qu’ils ne peuvent pas perdre. Lorsqu’ils le font, ceux-ci essaient de se refaire en pourchassant leurs pertes. Il en résulte un déficit continuellement croissant. Les AÉJ avec lots progressifs laissent miroiter l’espoir de se refaire d’un seul coup malgré que le déficit soit devenu énorme. Cette possibilité nuit au constat salutaire qu’il est irréaliste de pouvoir régler providentiellement ses problèmes de jeu avec le montant d’une seule mise. Lorsqu’ils sont offerts à une population strictement locale, les AÉJ ne devraient pas offrir de lots progressifs, car ces lots sont surtout utiles à attirer des touristes ou retenir une fuite vers une offre de jeu concurrente qui en proposerait. Ceci n’est pas le cas au Québec. Compte tenu que les salons de jeux situés dans les hippodromes n’ont pas pour objectif de développer une clientèle touristique, l’option de proposer des lots progressifs est contraire à la santé publique. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 249 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 250 Tableau 42 Articles du règlement sur les jeux de casino constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte 93 Le taux de retour de chaque jeu offert par une machine à sous ne peut être inférieur à 83%. Commentaire Cette mesure oblige que le taux de remise433 ne soit pas inférieur à 83%. Il s’agit d’un seuil plus élevé que les taux de 54% à 78% qui ont été constatés dans les APV illégaux434. Aucun maximum n’a été imposé. Dans les faits, les taux de remise des MAS sont plus élevés aux environs de 92%, soit celui imposé aux ALV. Il n’existe pas d’étude publique qui a fait un lien direct entre le taux de remise et la prévalence du jeu pathologique parmi la clientèle des joueurs. Il doit cependant être précisé que le taux de remise est le principal paramètre de jeu qui a un impact sur les caractéristiques susceptibles d’instaurer une dépendance pathologique à l’égard des AÉJ435. Plus le taux de remise est élevé, plus le taux de récompense peut être élevé, plus le gros lot ou les lots intermédiaires peuvent être importants, plus le gain significatif peut survenir tôt et fréquemment durant l’expérience de jeu436. La compréhension des processus psychologiques conduisant à une dépendance pathologique à l’égard des jeux sur AÉJ concorde pour affirmer qu’une augmentation du taux de remise favorise la perte d’argent au jeu. L’obligation d’augmenter les taux de remise des MAS par rapport aux APV illégaux n’est pas de nature à réduire les méfaits causés par les AÉJ. Une diminution du taux de remise diminuerait l’incidence des problèmes de jeu. 433 Le texte du règlement utilise l’expression « taux de retour » au lieu de « taux de remise ». Il s’agit alors d’une traduction littérale de l’expression anglaise « return rate ». 434 Voir à la page 14-28 dans : Alberta Gaming and Liquor Commission. (2001). Achieving a balance : gaming licensing policy review, volume one. St-Albert, Alberta : Alberta Gaming and Liquor Commission. 435 Voir le Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages, à la page 132 du présent document. 436 Voir le Tableau 29 - Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique, à la page 141 dans le présent document. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 250 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 251 6.4.3.2 Les mesures associées au savoir-faire des consultants À l’époque de l’implantation des casinos, des chercheurs québécois437 avaient déjà commencé à faire un lien entre l’expérience de jeu sur les AÉJ438 et un processus psychologique pouvant conduire au jeu pathologique. Malgré cela, il ne semble pas y avoir eu d’étude préliminaire afin de déterminer des mesures de protection fondées sur des travaux scientifiques plutôt que le savoir-faire des établissements de jeu entendus en consultation. On ne connaît pas toujours les fondements des mesures associées au savoir-faire des organisations qui agissent comme consultants. On comprend que leur mandat est d’assurer la profitabilité tout en favorisant la bonne réputation des établissements de jeu. Il est plausible que les consultants investissent des efforts considérables pour trouver des solutions à chacun des problèmes. Toutefois, afin de préserver leur position concurrentielle, ces organisations dévoilent peu les données et démarches qui motivent le choix d’une mesure plutôt qu’une autre. De plus, elles ne font pas d’admission publique concernant les problèmes qui restent non résolus ou ceux qui peuvent être des effets secondaires des mesures proposées. En particulier, on ne trouve aucun document qui explique les fondements des codes d’éthique, de conduite, de pratique ou de commercialisation qui abondent dans la documentation promotionnelle des établissements de jeu. Ces documents apparaissent rassurants. Mais à quel point rassemblent-ils des mesures véritablement efficaces à protéger les joueurs? 6.4.3.2.1 Pas d’alcool dans les aires de jeu Les joueurs ne peuvent pas consommer d’alcool dans les aires de jeu. Cette interdiction est inscrite à l’article 8 dans les Règles sur les normes relatives à l’admission du public, au maintien de l’ordre public et à la sécurité des personnes dans les casinos d’État de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L6, r.6.1). Cette mesure se justifie amplement. Plusieurs études ont établi la corrélation entre la consommation d’alcool et les problèmes de jeu439. 437 (a) Ladouceur, R., Sylvain, C., Duval, C., Gaboury, A., & Dumont, M. (1989). Correction des verbalisations irrationnelles chez des joueurs de poker-vidéo. International journal of psychology, 24, 43-56. (b) Dumont, M., & Ladouceur, R. (1990). Evaluation of motivation among video-poker players. Psychological reports, 66, 95-98. (c) Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance, N., & Tremblay, S. (1991). Ecological validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal of gambling studies, 7(2), 109-116. (d) Coulombe, A., Ladouceur, R., Desharnais, R., & Jobin, J. (1992). Erroneous perceptions and arousal among regular and occasional video poker players. Journal of gambling studies, 8(3), 235-244. 438 Dans le cas présent, les APV du marché gris. 439 (a) Ellery, M., Stewart, S. H., & Loba, P. (2005). Alcohol's effects on video lottery terminal (VLT) play among probable pathological and non-pathological gamblers. Journal of gambling studies, 21(3), 299-324. (b) Zack, M., Stewart, S. H., Klein, R. M., Loba, P., & Fragopoulos, F. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 251 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 252 Des bars sont cependant disponibles à l’intérieur des casinos, comme ils le seront dans les salons de jeux. Bien encadrés440, ces services peuvent convenir raisonnablement à la norme sociale de la population québécoise. Le principal problème à corriger est certainement la trop grande disponibilité de l’alcool autour des ALV situés dans les bars. 6.4.3.2.2 Interdiction d’entrée pour les personnes de moins de 18 ans. Cette interdiction est inscrite à l’article 2 dans les Règles sur les normes relatives à l’admission du public, au maintien de l’ordre public et à la sécurité des personnes dans les casinos d’État de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.6.1). Au Royaume-Uni, le Gaming Act de 1968 a permis aux personnes mineures de parier sur les MAS. Dès lors, les jeunes ont eu un accès pratiquement sans entrave aux Fruit machines, c’est-à-dire à des appareils offrant essentiellement des jeux de ligne. Bien que des études, réalisées entre 1985 et 1990, ne soient pas unanimes, la plupart ont constaté un lien probant entre l’utilisation des Fruit machines et des conséquences non désirables chez les adolescents441. Ces conséquences sont typiques des comportements des personnes qui éprouvent des problèmes de jeu, notamment une fréquence ou une dépense au jeu excessives, des emprunts pour jouer ainsi que des actes de délinquance442. En 1992, une évaluation psychométrique a finalement établi que 9% des adolescents jouant sur les Fruit machines étaient des joueurs pathologiques443. L’existence de joueurs pathologiques adolescents sur les Fruit machines a été ultérieurement confirmée444. (2005). Contingent gambling-drinking patterns and problem drinking severity moderate implicit gambling-alcohol associations in problem gamblers. Journal of gambling studies, 21(3), 325-354. (c) Baron, E., & Dickerson, M. (1999). Alcohol consumption and self-control of gambling behavior. Journal of gambling studies, 15(1), 3-15. (d) Stewart, S. H., & Kushner, M. G. (2005). Introduction to the special issue on "relations between gambling and alcohol use". Journal of gambling studies, 21(3), 223-231. 440 C’est-à-dire sans incitation à la consommation d’alcool, sans gratuité offerte aux joueurs, et en refusant de servir un client en état d’ébriété. 441 (a) Fisher, S. (1991). Governmental response to juvenile fruit machine gambling in the U. K.: where do we go from here? Journal of gambling behavior, 7(3), 217-247. (b) Griffiths, M. (1993). Fruit machine addiction in adolescence: a case study. Journal of gambling behavior, 9(4), 387399. 442 En plus de Fisher (1991), voir aussi : Huxley, J., & Carroll, D. (1992). A survey of fruit machine gambling in adolescents. Journal of gambling behavior, 8(2), 167-179. 443 Fisher, S. (1992). Measuring pathological gambling in children: the case of fruit machines in the U. K. Journal of gambling behavior, 8(3), 263-285. 444 (a) Griffiths, M. (1993). Factors in problem adolescent fruit machine gambling: results of a small postal survey. Journal of gambling behavior, 9(1), 31-45. (b) Fisher, S. (1993). Gambling and pathological gambling in adolescents. Journal of gambling behavior, 9(3), 277-288. (c) Fisher, S., & Griffiths, M. (1995). Current trends in slot machine gambling: research and policy issues. Journal of gambling behavior, 11(3), 239-247. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 252 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 253 Au Québec, un sondage réalisé auprès de 1320 enfants, entre 8 et 13 ans, a constaté que 29% d’entre eux avaient déjà joué sur les APV445, soit seuls ou en compagnie de leurs parents, et 3,4% y avaient joué au moins une fois par semaine. Dans un tel contexte, il était impératif de ne pas distribuer les AÉJ aux mêmes endroits où les APV étaient antérieurement installés. Depuis 1994, les ALV ont été expressément distribués dans les bars afin de les rendre inaccessibles aux personnes de moins de 18 ans. Toutefois, les bars ne sont parfois qu’un comptoir à peine isolé dans les restaurants ou les centres de loisirs (salles de quilles, billards). Dans la mesure où les appareils étaient parfois dissimulés derrière des isoloirs, le personnel pouvait difficilement être en mesure d’assurer une surveillance constante. Seule l’encaissement du coupon de remboursement est un obstacle quoique facilement contournable si le mineur est accompagné d’un adulte complaisant446. L’interdiction des mineurs dans l’aire de jeu des salons de jeux sera appliquée dans l’espoir de réaliser un meilleur « filtrage » de la clientèle447. C’est réaliste. Toutefois, il restera, dans les bars du Québec, 11 370 ALV répartis dans 2 521 sites448. 6.4.3.2.3 Le programme d’auto-exclusion L’auto-exclusion est une mesure qui devient de plus en plus centrale dans les politiques de prévention des problèmes de jeu. Cette disposition est autorisée par la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q., c. L-6, a. 20.2, 1 er al., par. g), et appliquée selon l’article 3 dans les Règles sur les normes relatives à l’admission du public, au maintien de l’ordre public et à la sécurité des personnes dans les casinos d’État de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.6.1). 6.4.3.2.3.1 Les données de Loto-Québec Dans quelques rapports annuels449, Loto-Québec révèle qu’un nombre appréciable de joueurs ont eu recours à ce service, bien que ceux-ci représentent une très faible 445 (a) Ladouceur, R., Dubé, D., & Bujold, A. (1994). Gambling among primary school students. Journal of gambling behavior, 10(4), 363-370. (b) Aussi 28% des adolescents en Ontario, voir Govoni, R., Rupcich, N., & Frisch, G. R. (1996). Gambling behavior of adolescent gamblers. Journal of gambling behavior, 12(3), 305-317. 446 Cela est interdit par l’article 46 des Règles sur les appareils de loterie vidéo (c. L-6, r.2.01) de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1, 1er al., par. a à m et 2e al.). 447 Voir à la page 24 dans : Loto-Québec. (2004). Plan de développement 2004-2007. Montréal, QC : auteur. 448 Voir à la page 35 dans : Loto-Québec. (2004). Plan de développement 2004-2007. Montréal, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 253 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 254 proportion des joueurs pathologiques. Depuis l’an 2000, ce service s’est stabilité à environ 1 500 contrats signés à chaque année, pour un total d’environ 3 000 contrats actifs et environ 11 000 repérages annuellement450. Répartition de la clientèle Figure 89 Nombre de contrats d'autoexclusion actifs dans les casinos québécois 4000 3000 2000 1000 0 19961997 19971998 19981999 19992000 20002001 20012002 Rappelons que, selon l’enquête de Statistique Canada451 réalisée en 2002, il y aurait, au Québec, environ 20 000 joueurs avec problèmes de jeu et 75 000 joueurs à risque modéré452. Toutes ces personnes pourraient bénéficier du programme d’autoexclusion. Ce programme bénéficierait donc à environ 3% des joueurs excessifs. 449 Loto-Québec a cessé de produire des statistiques détaillées sur l’autoexclusion des casinos en l’an 2000. 450 Voir à la page 33 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale 2004-2005 : Pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteur. 451 Statistique Canada. (2002). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes: santé mentale et bien-être. Document 82-617-XIF. Ottawa, ON : auteur. 452 Les taux provinciaux de prévalence du jeu pathologique proviennent du fichier CANSIM 82617-XIF produit par Statistique Canada. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 254 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 255 Répartition de la clientèle Figure 90 60% Durée des contrats d'autoexclusion dans les casinos québécois 50% 40% 30% 1998-1999 20% 1999-2000 10% 0% Moins de 6 mois 6 mois à 1 an à 2 2 ans à 3 ans à 4 ans à Plus de 1 an ans 3 ans 4 ans 5 ans 5 ans Environ la moitié des contrats d’auto-exclusion ont une durée de 4 à 5 ans. Très peu requièrent une durée plus longue. La plupart des autres autoexclus demandent plutôt des périodes d’exclusion de 6 mois à 3 ans; ce qui est bref compte tenu du problème à régler. À l’automne 2005, le programme a été bonifié en accordant aux autoexclus le soutien d’un conseiller durant la durée de l’auto-exclusion453. 6.4.3.2.3.2 L’évaluation des chercheurs D’après une étude réalisée dans les casinos québécois454, la principale utilité du programme d’auto-exclusion est de proposer une solution intermédiaire entre les tentatives d’autocontrôle et l’inscription formelle dans un programme de traitement. Il s’agit d’une solution efficace pour 30% des personnes inscrites. En contrepartie, 36% des inscrits contournent le système de détection environ 6 fois durant la durée du contrat455. Malgré les rechutes, le taux de satisfaction demeure très élevé à 80%. Le programme d’auto-exclusion n’a cependant pas une portée suffisante : 50% des personnes auto-exclues ont indiqué s’être rabattues sur les ALV dans les bars durant la durée de leur contrat. Il importe aussi de noter que 71% des inscrits ont déclaré avoir une dette de jeu moyenne de 11 962 dollars canadiens, et que les deux-tiers doivent 453 Voir à la page 54 dans : Loto-Québec. (2006). Rapport annuel 2005-2006 : Divertir au profit de la collectivité. Montréal, QC : auteur. 454 Ladouceur, R., Jacques, C., Giroux, I., Ferland, F., & Leblond, J. (2000). Analysis of a casino'’ self-exclusion program. Journal of gambling studies, 16(4), 453-460. 455 Dans la province de Victoria en Australie, 15% des personnes auto-exclues sont parvenues à contourner l’interdiction d’entrée en moyenne 3,2 fois. Voir à la page vi dans : South Australian centre for economic studies. (2003, February). Evaluation of self-exclusion programs and harm minimisation measures. Report A. Adelaide, South Australia : Adelaide & Flinders Universities. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 255 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 256 emprunter de l’argent pour jouer. Dans une étude américaine456, la dette moyenne des inscrits s’est élevée à 19 608 dollars américains. En ce sens, l’auto-exclusion est une mesure à laquelle le joueur fait appel tardivement, après avoir subi des dommages considérables. Lorsqu’il est véritablement endossé par l’établissement de jeu, le concept d’autoexclusion est une mesure utile aux joueurs qui en font la demande. Par contre, il n’y a pas plus que 0,4% à 1,5% des joueurs excessifs canadiens qui font cette demande457. Il n’y a qu’aux Pays-Bas où l’auto-exclusion a été utilisé massivement par les joueurs pathologiques458. Incidemment, dans les établissements de la compagnie Holland Casino, le personnel suit une politique active de dépistage et d’intervention auprès des joueurs excessifs. On ne connaît pas encore assez bien les motifs réels conduisant à l’auto-exclusion. Il est certain que les personnes qui demandent à être auto-exclues sont celles qui ne parviennent plus à financer leur pratique de jeu. Il est possible que l’auto-exclusion soit un moyen de contrôler la perte financière le temps qu’une dette soit remboursée ou qu’un capital puisse être réacquis. Mais qu’advient-il lorsque la capacité financière de dépenser est restaurée? Les difficultés financières des auto-exclus n’ont jamais été investiguées. Il est alors possible que l’auto-exclusion ait un effet inverse à celui prévu, c’est-à-dire que ce programme puisse maintenir le joueur dans un cycle viable de pertes répétées simplement parce qu’on lui procure un moyen efficace d’éviter la faillite ou le suicide. À cet égard, il est impératif de considérer la suggestion d’imposer une durée minimale et irrévocable de cinq années459. Habituellement, les joueurs peuvent revenir au casino au terme de leur contrat d’autoexclusion. Des exceptions existent460. Au Manitoba, les personnes sont auto-exclues pour un minimum de deux années au cours desquelles elles sont invitées à participer à un programme d’information sur le jeu excessif. Au terme du contrat, les joueurs doivent s’adresser par écrit afin de réacquérir le droit de fréquenter le casino. 456 Steinberg, M., & Velardo, W. (2002). Preliminary evaluation of a casino selfexclusion program. Responsible Gambling Council’s Discover 2002 Conference, Niagara Falls: Canada. 457 Voir à la page 11 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25. 458 Voir à la page 128 dans : De Bruin, D.E., F.R.J. Leenders, M. Fris, H.T. Verbraeck, R.V. Braam, G.F. van de Wijngaart (2001). Gasten van Holland Casino. Effectiviteit van het preventiebeleid kansspelverslaving. Utrecht: Centrum voor Verslavingsonderzoek. ISBN: 9071772-31-4 http://www.drugresearch.nl/en/GastenVanHollandCasino.EffectiviteitVanHetPreventiebeleidKanss pelverslaving 459 Voir aux pages 13 et 14 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25. 460 Voir aux pages 7 et 8 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 256 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 257 Actuellement, les casinos ne sont pas tenus légalement responsables des joueurs qui parviennent néanmoins à fréquenter leurs établissements. Ils sont protégés légalement lorsqu’ils excluent une personne inscrite au programme, et ils n’ont pas à payer les éventuels gains des joueurs auto-exclus461. Que ces programmes soient efficaces ou pas, les casinos n’assument pratiquement aucun risque462. Cette situation a été désapprouvée par la Productivity commission en Australie. De l’avis de cette commission, l’imputabilité des établissements de jeu est une condition sine qua none de l’utilité des programmes d’auto-exclusion. 6.4.3.2.4 Code vestimentaire. Dans l’avis du ministère de la Sécurité publique concernant l’hypothèse d’un déménagement du Casino de Montréal dans des quartiers populeux463, les auteurs ont fait un lien entre l’exigence d’un décorum et une limitation des occasions de criminalité. Le ministère propose de réduire les occasions d’incivilité car celles-ci peuvent constituer « un signal de déclin de l’ordre public pouvant agir comme catalyseur de dégradation d’un quartier »464. L’imposition d’un code vestimentaire est une suggestion courante465 pour contrer la dénonciation médiatique des joueurs qui deviennent des épaves après avoir tout dépensé au jeu. 6.4.3.2.5 Borne interactive Depuis 1999466, les casinos disposent de bornes interactives où les joueurs peuvent obtenir de la documentation concernant la nature du hasard, la nature du jeu. À présent, les chercheurs n’ont pas encore trouvé comment renforcer les connaissances en statistiques d’une manière qui réduise le jeu excessif. Des étudiants universitaires, 461 Voir à la page 4 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25. 462 Napolitano, F. (2003). The self-exclusion program: legal and clinical considerations. Journal of gambling studies, 19(3), 303-315. 463 Voir aux pages 4 et 30 dans : Sécurité publique – Québec. (2006, février). Avis du ministère de la Sécurité publique : relocalisation du casino de Montréal : implications en matière de sécurité publique. Montréal, QC : auteurs. 464 Voir à la page 28 dans : Sécurité publique – Québec. (2006, février). Avis du ministère de la Sécurité publique : relocalisation du casino de Montréal : implications en matière de sécurité publique. Montréal, QC : auteurs. 465 Pitcher, A. (1999). Responsible promotion of gaming and dealing with problem gamblers. Journal of gambling behavior, 15(2), 149-159. 466 Voir à la page 35 dans : Loto-Québec (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 257 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 258 dont la formation implique des cours en statistiques, témoignent des mêmes croyances erronées quant au hasard que d’autres étudiants universitaires dont la formation n’implique pas ces cours467. Toutefois, sur les ALV468, les connaissances en calcul des probabilités sont inutiles car les joueurs n’ont pas les moyens de connaître les probabilités réelles des événements. De plus, ce qui ne fonctionne pas avec les universitaires469, pourrait fonctionner avec d’autres personnes. Cette vérification reste à faire. En contrepartie, il est certain que l’expression de croyances erronées quant au hasard peut être considérablement réduite470 par une lecture préalable concernant le concept d’indépendance entre les événements aléatoires471. Malheureusement, cette étude n’a pas établi à quel point les deux groupes étaient préalablement égaux quant à leur méconnaissance initiale de ce concept. Il est alors difficile de distinguer si la lecture du texte a enseigné une information nouvelle, ou si elle a placé en mémoire de travail472 des connaissances déjà existantes473. Dès lors, il est envisageable que le gain d’un enseignement quant au calcul des probabilités exige préalablement que le concept d’indépendance entre les événements soit préalablement compris ou mis en mémoire de travail. À cet égard, comme le signalent Karim Benhsain et Robert Ladouceur474, il est sage de ne pas se contenter d’informer les joueurs des seuls calculs statistiques, car des étudiants plus compétents en calcul des probabilités semblent s’investir davantage dans des croyances erronées s’ils croient pouvoir découvrir des liens entre les événements. 467 Dans cette recherche, les étudiants mieux formés en statistiques ont autant tenté de manipuler l’ALV que les autres étudiants. Il n’est cependant pas certain que ce comportement aurait perduré longtemps après que les étudiants soient devenus pleinement familier avec l’ALV. Une période d’observation nettement plus longue aurait été requise pour pleinement supporter la conclusion. Voir : CQEPTJ. (2005, mai). Connaissances en mathématiques et jeux de hasard et d’argent. A tout hasard, 7(1), http://gambling.psy.ulaval.ca 468 Il est vrai que des résultats identiques ont été constatés avec un jeu de dés où il est facile de déduire les probabilités. 469 Les universitaires éprouvent moins fréquemment des problèmes de jeu excessif. 470 Benhsain, K., Taillefer, A., & Ladouceur, R. (2004). Awareness of independence of events and erroneous perceptions while gambling. Addictive Behaviors, 29, 399-404. 471 Typiquement, les joueurs excessifs croient qu’il est possible de découvrir des liens entre les tirages. Pourtant, ces tirages surviennent aléatoirement; ce qui rend cet espoir complètement illusoire. Voir : Ladouceur, R., & Walker, M. (1996). A cognitive perspective on gambling. In P. M. Salkovskis (Editors), Trends in cognitive therapy (pages 89-120). Oxford : Wiley. 472 En anglais, working memory. 473 Dans un tel cas, la répétition de cette information, plusieurs fois en situation de jeu, serait requise. 474 Benhsain, K., & Ladouceur, R. (2004). Is knowledge in statistics a protective factor for excessive gambling? Gambling Research, 16, 25-31. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 258 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 259 6.4.3.2.6 Explication du fonctionnement des appareils Au casino, les personnes qui le désirent peuvent se rendre à un local où un employé est à leur disposition pour expliquer le fonctionnement des machines à sous. L’efficacité de cette mesure a été évaluée par Paul Delfabbro475 qui a conclu qu’il peut s’agir d’un bon moyen pour aider les joueurs sans problème à maintenir leur comportement de jeu dans les limites du jeu sécuritaire, mais que cela n’apporte pas d’aide au joueur qui éprouve déjà des problèmes de jeu. Un effet iatrogène a été rapporté par Delfabbro. À l’explication du concept de taux de remise, bon nombre de personnes développent la croyance qu’il existe un mécanisme de correction de sorte que si l’appareil produit peu pendant un certain temps, ce mécanisme rendra cet appareil plus payant dans un avenir proche. Afin d’éviter les effets iatrogènes, Delfabbro recommande de ne pas insister sur le fonctionnement des processus aléatoires. En fait, les données de Delfabbro suggèrent plutôt de ne pas se contenter d’indiquer de retour théorique des jeux si les joueurs ne sont pas, en même temps, mis en garde contre les dangers de conclure erronément en l’existence de liens entre les tirages. 6.4.3.3 Services spécifiques à la communauté chinoise de Montréal En 1995, en collaboration avec le Service à la famille chinoise du Grand Montréal, LotoQuébec a créé un programme de prévention. Il n’est pas clair si les personnes de culture chinoise ont vraiment plus de problèmes de jeu476. La traduction des tests de dépistage pourrait causer un artéfact477. Quoi qu’il en soit, les personnes de culture chinoise pourraient bénéficier d’une meilleure protection par des services culturellement adaptés en raison d’une manière différente de concevoir le hasard478. 475 Voir aux pages 96 à 99 dans : Delfabbro, P., & LeCouteur, A. (2003, novembre). A decade of gambling research in Australia and New Zealand (1992-2002) : implications for policy, regulation and harm minimisation. A report prepared for the Independent gambling authority of South Australia. 476 Blaszczynski, A., Huynh, S., Dumlao, V. J., & Farrell, E. (1998). Problem gambling within a Chinese speaking community. Journal of gambling studies, 14(4), 359-380. 477 Lai, D. W. L. (2006). Gambling and the older Chinese in Canada. Journal of gambling studies, 22(1), 121-141. 478 Papineau, E. (2005). Pathological gambling in Montreal's Chinese community: an anthropological perspective. Journal of gambling studies, 21(2), 157-178. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 259 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 260 Cette initiative intéressante mériterait encore plus d’être développée pour les communautés amérindiennes du Québec car des taux de prévalence de jeu pathologique et à risque très élevés ont été rapportés au Canada479. 6.4.4 Les mesures instaurées en 1994 lors de l’implantation des ALV dans les bars Les casinos constituent des environnements de jeu très contrôlés parce que le territoire du casino est clairement délimité, et qu’il est surveillé par un imposant service de sécurité. Dans les bars, cela n’est pas possible. En ce sens, les mesures de protection encadrant l’exploitation des ALV demandaient à être mieux encadrées. 6.4.4.1 Les mesures recommandées par la Sûreté du Québec en 1993 Le 3 juin 1993, lors de l’étude détaillée du projet de loi qui a créé la RACJ, le directeur général480 de la Sûreté du Québec a déclaré que le Québec n’avait que deux options : l’éradication complète des AÉJ ou la création d’un parc d’ALV contrôlé par l’état. La Sûreté du Québec a alors énoncé cinq prérequis (voir tableau suivant). Tableau 43 Les mesures constituant un prérequis de la Sûreté du Québec Citation Commentaire 1 que les appareils soient inaccessibles aux mineurs; Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252 du présent document. 2 que les appareils soient situés dans une aire exclusive à leur exploitation La recommandation de la Sûreté du Québec était très défavorable à l’installation des ALV dans les bars. S’il fallait absolument étatiser les AÉJ, la Sûreté du Québec a proposé que les ALV soient uniquement situés dans des salons de jeux481. 3 et que la consommation de boissons alcooliques soit prohibée dans cette section; Voir la section 6.4.3.2.1 à la page 251 du présent document. 479 Wardman, D., el-Guebaly, N., & Hodgins, D. (2001). Problem and pathological gambling in North american aboriginal populations: a review of the empirical literature. Journal of gambling studies, 17(2), 81-100. 480 Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1826 et CI-1827, Gouvernement du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 260 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 261 Tableau 43 Les mesures constituant un prérequis de la Sûreté du Québec Citation Commentaire 4 que des mécanismes de détection des joueurs compulsifs soient mis sur pied pour venir en aide à ces derniers; Dans les casinos, il y a un service d’autoexclusion sans dépistage actif des besoins. Dans les bars, il n’y a eu absolument aucun effort de dépistage jusqu’en 2002. À cette occasion, des dépliants d’auto-dépistage ont été apposés aux côtés des ALV, et une formation sur le jeu pathologique a été donnée aux exploitants des ALV. À toutes fins pratiques, à peu rien d’utile n’a été fait. 5 qu’un système central de contrôle et de gestion soit instauré afin d’empêcher l’infiltration du crime organisé. La gestion du parc d’ALV est raisonnablement à l’abri d’une infiltration du crime organisé. C’est le contrôle des bars qui est plus problématique. En l’occurrence, dès mai 1992, la Sûreté du Québec avait insisté en faveur de la création de salons de jeux481, contrôlés exclusivement par l’État, plutôt qu’une distribution des ALV dans les bars. Une concentration des ALV dans quelques lieux contrôlés était acceptable, mais non la distribution proximale de seulement quelques ALV par site sur un grand territoire. Le directeur général a aussi fait un commentaire important482, similaire au constat principal de la Commission Prévost qui était défavorable à l’émission de permis à des détaillants privés : « Le milieu interlope va tenter de prendre en main les endroits lucratifs d’exploitation; des membres du crime organisé pourront, par exemple, offrir à un exploitant les fonds nécessaires qui lui permettront d’atteindre les quotas fixés par la réglementation, moyennant que ce dernier, en échange, accepte de leur servir de prête-nom. » (Lavigne, 1993) En effet, en 1967, peu avant la création de Loto-Québec, la Commission Prévost483 a recommandé de socialiser le jeu au Québec en autant que le gouvernement assume directement la gestion du jeu sans intermédiaire, sans émission de permis : 481 Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (6 mai 1992), Journal des débats, 12, page CI-387, Gouvernement du Québec. 482 Voir à la page CI-1827 dans la déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. 483 Voir aux pages 80 à 108 dans : Commission d’enquête sur l’administration de la justice en matière criminelle et pénale au Québec. (1967). La société face au crime. Volume III, tome 3 : Le crime au Québec : Le crime organisé. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 261 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 262 « Ils [ les corps policiers ] affirment, quant à eux, que le fait de légaliser le jeu ne le tire pas du tout des griffes du crime organisé. Ils affirment, en se basant sur certains exemples réels et spectaculaires, que le crime organisé fait rapidement main basse sur tous les permis que peut émettre un État tolérant en matière de jeu. [ … ] De cette manière, la légalisation du jeu ne servirait, d’après les policiers, qu’à remettre officiellement au crime organisé ce qu’il possédait précédemment de façon officieuse et clandestine. » (Commission Prévost, 1967, page 90) « Notre proposition se résume donc de façon fort simple : il faut socialiser le jeu. Entendons par là que l’État autorise le jeu, mais l’organise lui-même à son bénéfice et sans intermédiaire. Il n’y a donc aucune émission de permis ou de licence en faveur de l’entreprise privée. Ceci nous apparaît la seule attitude réaliste. » (Commission Prévost, 1967, page 95) La non-considération de cette recommandation est une erreur que pourrait rectifier le projet des salons de jeux484 dans la mesure où, dans toutes les villes où le nombre d’ALV pourrait rentabiliser un salon de jeux, tous les ALV, situés dans un même environnement urbain, soient déplacés dans ce salon opéré par Loto-Québec. Cela fait maintenant plus de 12 ans que les ALV sont opérés dans les bars. Les problèmes qui persistent ne sont plus transitoires. Les bars sont des endroits où il est dangereux d’installer des ALV, notamment en raison de la grande disponibilité de l’alcool485, de l’intérêt financier du tenancier486 à stimuler une dépense au jeu maximale, de l’isolement des joueurs487, de l’absence quasi totale de contrôle quant à la présence de profiteurs ou de criminels488 qui trouvent, dans les joueurs excessifs, des personnes 484 À la condition que la création des salons de jeux soit estimée nécessaire au terme de débats publics concernant une politique générale sur le jeu au Québec. 485 Il existe un lien étroit entre les dommages causés par le jeu pathologique et la consommation d’alcool. Voir : (a) Ellery, M., Stewart, S. H., & Loba, P. (2005). Alcohol's effects on video lottery terminal (VLT) play among probable pathological and non-pathological gamblers. Journal of gambling studies, 21(3), 299-324. (b) Zack, M., Stewart, S. H., Klein, R. M., Loba, P., & Fragopoulos, F. (2005). Contingent gambling-drinking patterns and problem drinking severity moderate implicit gambling-alcohol associations in problem gamblers. Journal of gambling studies, 21(3), 325-354. (c) Baron, E., & Dickerson, M. (1999). Alcohol consumption and selfcontrol of gambling behavior. Journal of gambling studies, 15(1), 3-15. (d) Stewart, S. H., & Kushner, M. G. (2005). Introduction to the special issue on "relations between gambling and alcohol use". Journal of gambling studies, 21(3), 223-231. 486 Sans chercher à accoler une image négative aux tenanciers, force est d’admettre que ces personnes sont en affaires pour réaliser des profits et qu’elles n’ont pas nécessairement la formation professionnelle, malgré les tournées d’information du CQEPTJ, pour saisir toute la portée, la dynamique et la signification des difficultés d’une personne aux prises avec une dépendance pathologique. 487 Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2003). Rapport d’étude sur le format, la disposition et le mode de disponibilité des appareils de loterie vidéo. Québec, Université Laval. 488 La violence exercée auprès des propriétaires de bars est une préoccupation majeure du ministère de la Sécurité publique. En l’occurrence, ce ministère a collaboré à la conception de Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 262 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 263 extrêmement vulnérables à leurs pièges. À cet égard, le projet actuel des salons de jeux laisse encore beaucoup trop d’ALV dans des bars qui, souvent, seront situés à seulement quelques rues des salons de jeux. 6.4.4.2 Les mesures associées aux règlements et règles. Nonobstant les réticences de la Sûreté du Québec, les ALV ont été distribués en mode proximal dans des milliers de bars du Québec. À cette occasion, la gestion du parc d’ALV a été encadrée par plusieurs obligations imposées par la loi, dont notamment : • Le Règlement sur le système de loterie vidéo de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r.6). • Les Règles sur les appareils de loterie vidéo (c. L-6, r.2.01) de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1, 1er al., par. a à m et 2e al.). • Le Règlement sur le taux de retour des loteries vidéo de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.10). • L’article 36.3 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 36.3). • L’article 52.2 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 52.2). • L’article 52.15 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 52.15). Ultérieurement, en 1995, une disposition supplémentaire a permis la création de super licences pour les hippodromes. • L’article 20.1.1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1.1). 6.4.4.2.1 La réglementation sur le système de loterie vidéo L’exploitation des ALV a été délimitée par le Règlement sur le système de loterie vidéo de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r.6). Loto-Québec doit veiller à son application. trois éditions du magazine Infobars destinées à renseigner les propriétaires de bars quant aux moyens de lutter contre une mainmise du crime organisé sur leurs établissements. (a) Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2001, février). Numéro spécial : non à l’intimidation. Infobars, 3(8). (b) Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2002, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 3(12). (c) Sécurité publique – Québec. (2005, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 4(2). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 263 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 264 Cette réglementation ne protège pas les joueurs. En effet, l’article 5 est favorable au transfert des illusions de contrôle. Les articles 6 et 7 sont plausiblement iatrogènes parce qu’ils prolongent l’expérience de jeu. Dans ce cas, la probabilité d’obtenir un gain significatif489 est augmentée. Pour jouer, l’article 8 oblige la personne à limiter la portée de son raisonnement à des processus mentaux qui ne peuvent pas la protéger contre le jeu pathologique490. Les mesures associées à cette réglementation sont présentées dans le tableau suivant. 489 Le gain significatif est le principal facteur pathogène du jeu sur AÉJ. Voir à la page 136 le Stade 5 du modèle du jeu pathologique. Voir aussi (a) Custer, R. L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans P. A. Carone et al. (éditeurs), Addictive disorders update. New York, NY : Human sciences press. (b) Greene, J. (1982). The gambling trap. Psychology today, 16(9), 50-55. (c) Custer, R. L. & Milt, H. (1985). When lucks runs out. New York, NY : Facts on public file. (d) Voir aux pages 150 et 152 dans : Lesieur, H. R., & Custer, R. L. (1984). Pathological gambling: roots, phases, and treatment. Annals of the American academy of political and social science, 474, 146-156. (e) Dickerson, M. G., Hinchy, J., Legg-England, S., Fabre, J., & Cunningham, R. (1992). On the determinants of persistent gambling behaviour. I. High-frequency poker machine players. British journal of psychology, 83, 237-248. (f) Voir aux pages 33 à 36 dans : Schrans, T., Schellinck, T., & Walsh, G. (2001). The 2000 regular VL players follow-up. Technical report. A comparative analysis of problem development & resolution. Halifax, Nava Scotia : Nova Scotia Department of Health. (g) Voir aux pages 20 et 21 dans : Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, QC : Les éditions de l’homme. (h) Voir aux pages 294, 295 et 301 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. 490 Sans la probabilité d’obtention des lots, la personne ne peut pas faire une analyse normative de la situation de jeu. Dans ce cas, elle est limitée aux processus heuristiques, associatifs et automatiques. En particulier, les processus heuristiques génèrent les croyances erronées à partir desquelles s’élaborent les illusions de contrôle. Voir : (a) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence Erlbaum Associates. (b) Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (c) Baboushkin, H. R., Hardoon, K. K., Derevensky, J. L., & Gupta, R. (2001). Underlying cognitions in gambling behavior among university students. Journal of applied social psychology, 31(7), 1409-1430. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 264 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 265 Tableau 44 Articles du règlement sur le système de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 5 Le résultat d’un jeu de loterie vidéo doit reposer sur le hasard même lorsque le joueur peut faire des choix. Les jeux de cartes (poker et blackjack) permettent au joueur d’influencer le résultat des parties. Le hasard détermine le choix des cartes, mais son influence sur le résultat n’est que partielle. En pratiquant et en analysant les règles de jeu, le joueur peut améliorer sa performance. L’impression d’un contrôle réel, quoique partiel, peut se développer. Malgré que les joueurs puissent s’améliorer aux jeux de cartes, ils ne peuvent cependant jamais devenir gagnants à long terme. L’amélioration consiste à perdre moins. Au contraire, les jeux de lignes ou de keno sont des jeux de parfait hasard … dans la limite où le matériel informatique parvient à simuler le hasard. Quels que soient les efforts et la pratique des joueurs, ceux-ci ne peuvent jamais s’améliorer. Toute impression de contrôle est illusoire. Dès lors, la juxtaposition de jeux de cartes aux jeux de ligne ou de keno crée un environnement où il existe le danger qu’une impression de contrôle réel soit transférée à des jeux où le contrôle est illusoire491. Ce transfert a le potentiel d’aggraver sérieusement les dommages, car les jeux de cartes sont surtout utilisés par les joueurs réguliers et ceux qui éprouvent des problèmes de jeu492. Dans ce cas, le joueur excessif peut conclure erronément à une validation de son illusion. 6a Aucune mise ne peut être supérieure à 2,50 $ et le lot offert par un jeu de loterie vidéo pour une mise ne peut excéder la valeur de 1 000 $. Pour un budget donné, en limitant la valeur de la mise, l’ALV incite le joueur à réaliser un plus grand nombre de parties. Son expérience de jeu est alors plus diversifiée, d’où une probabilité plus grande de vivre un gain significatif. En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est potentiellement iatrogène. 491 Done, C., & Coventry, K. R. (2000). Transfer of the illusion of control between two gambling tasks. Current psychology letters, 2, 37-46. 492 Voir aux pages 3-49 et 3-50 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 265 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 266 Tableau 44 Articles du règlement sur le système de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 6b Aucune mise ne peut être supérieure à 2,50 $ et le lot offert par un jeu de loterie vidéo pour une mise ne peut excéder la valeur de 1 000 $. Loto-Québec a pris l’initiative de limiter le lot maximal à 500 dollars au lieu de 1 000. À un taux de remise donné, la diminution de la valeur du lot maximal permet de redistribuer l’espérance de gain dans un plus grand nombre de lots intermédiaires. Le joueur obtient alors des récompenses plus fréquemment. L’augmentation du taux de récompense instaure une plus grande résistance à l’extinction, d’où une probabilité plus grande de vivre un gain significatif. En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est potentiellement iatrogène. Paradoxalement, une augmentation de la valeur du gros lot, sans connexion des ALV en îlots, aurait été préférable. 7 Le coût d’un crédit est d’au plus 0,25 $. Pour un budget de jeu donné, la limitation des mises oblige le joueur à réaliser un plus grand nombre de parties. Son expérience de jeu est alors plus diversifiée, d’où une probabilité plus grande de vivre un gain significatif. En illusion de contrôle, le joueur pathologique peut se rabattre sur les jeux à faible dénomination (à 5¢ le crédit) afin de minimiser les coûts des hypothèses illusoires qu’il cherche à tester. En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est potentiellement iatrogène. Il aurait été préférable d’imposer cette valeur comme un minimum. 8 Avant le début d’une partie, le joueur doit avoir accès, sur l’écran de l’appareil de loterie vidéo ou sur l’appareil, aux informations suivantes : 1° le nom du jeu; 2° le coût d’un crédit; 3° les lots à gagner; 4° le mode d’attribution des lots à gagner. Avec ces informations, le joueur ne peut pas décider rationnellement de son intérêt à jouer ou pas car, pour ce faire, il manque la probabilité d’acquisition de chacun des lots. L’absence d’une information complète entrave l’activation des processus normatifs. Si le désir de jouer subsiste, le joueur doit alors se limiter à des raisonnements fondés sur des processus heuristiques. Ces processus ne sont pas adaptés pour les jeux de hasard. Leur activation conduit nécessairement à une interprétation erronée de la situation, d’où une grande vulnérabilité à l’illusion de contrôle. Parce qu’il force le joueur à abandonner des processus mentaux cruciaux pour sa protection, ce manque d’information est potentiellement iatrogène. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 266 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 267 Tableau 44 Articles du règlement sur le système de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte 9 Tout coupon de remboursement doit reproduire les renseignements suivants : 1° le nom du système de loterie; 2° une donnée permettant d’identifier le titulaire de la licence; 3° le numéro de série de l’appareil qui a émis le coupon de remboursement; 4° la date et l’heure de l’impression du coupon de remboursement; 5° la valeur en devises canadiennes des crédits remboursables; 6° un numéro de contrôle. Il s’agit davantage d’une mesure protégeant Loto-Québec contre ses détaillants. Le paiement d’un coupon de remboursement peut uniquement être effectué en argent ou par un chèque émis au nom du détenteur du coupon. Certains établissements de jeu imposent le paiement par chèque dès que la valeur du coupon dépasse un seuil. Un objectif de cette mesure est de limiter le blanchiment d’argent. 15 Commentaire Il n’a jamais été vérifié si les personnes, manifestant des problèmes cognitifs, des déficiences intellectuelles, un analphabétisme fonctionnel ou ne parlant pas français ou anglais, sont capables de comprendre la valeur du solde à laquelle elles ont droit. Compte tenu que le tenancier est l’exécuteur et le seul témoin de la transaction, cette mesure dépend de l’intégrité personnelle du tenancier ou de son employé. En raison de l’article 14 du règlement, le joueur est forcé d’encaisser le coupon de remboursement là où il a été obtenu. Une mesure adéquate aurait été de permettre d’encaisser ces coupons à n’importe quel point de vente des produits de Loto-Québec dans les limites qui existent pour les loteries. À l’avenir, le paiement des lots devrait pouvoir se faire par un dépôt sur une carte magnétique dont le solde pourrait être déposé dans un compte bancaire à n’importe quel guichet automatique, sans qu’une transaction inverse ne puisse être réalisée. Pour les joueurs excessifs, cette mesure pourrait néanmoins différer les occasions de dilapider rapidement un gain. Compte tenu qu’elle entrave le droit de chacun à disposer librement de ses biens, il devrait être préalablement établi que les joueurs excessifs en retirent une protection suffisamment grande pour justifier que chacun doive y concéder un droit. 6.4.4.2.2 Les règles sur les appareils de loterie vidéo L’exploitation des ALV a aussi été délimitée par des Règles sur les appareils de loterie vidéo (c. L-6, r.2.01) de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1, 1er al., par. a à m et 2e al.). Cette fois, la RACJ doit veiller l’application de ces règles. Plus spécifiquement, la conformité des ALV aux règles Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 267 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 268 doit être vérifiée par le Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale493. Cet organisme relève du ministère de la Sécurité publique. Les objectifs et les moyens de vérification ne sont pas publics. Les mesures associées aux règles sont présentées dans le tableau suivant. Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 3 Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner de façon à ce que le joueur puisse jouer en pressant des boutons mécaniques ou des touches digitales ou une combinaisons des deux. Une partie ne peut être initiée par l’action d’un levier mécanique ou électrique. La pression d’un bouton est un geste très simple qui laisse moins facilement croire qu’il serait possible de contrôler le résultat par diverses manipulations qui étaient auparavant possibles avec le levier (force ou saccades dans le mouvement). 4a Tout appareil de loterie vidéo doit être fabriqué et doit fonctionner de manière à rejeter toute mise excédant 2,50 $ et de manière à offrir un lot n’excédant pas une valeur de 1 000 $. Voir l’article 6a dans le Tableau 44 à la page 265. Tout appareil de loterie vidéo doit être fabriqué et doit fonctionner de manière à rejeter toute mise excédant 2,50 $ et de manière à offrir un lot n’excédant pas une valeur de 1 000 $. Voir l’article 6b dans le Tableau 44 à la page 266. Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner de manière à indiquer au joueur, pour chaque nombre de crédits misés, chaque possibilité de combinaisons gagnantes et le nombre de crédits qu’elles rapportent. Avec ces informations, le joueur ne peut pas décider rationnellement de son intérêt à jouer ou pas car, pour ce faire, il manque la probabilité d’acquisition de chacun des lots. 4b 5 En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est potentiellement iatrogène. En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est potentiellement iatrogène. Parce qu’il force le joueur à abandonner des processus mentaux cruciaux pour sa protection, ce manque d’information est potentiellement iatrogène. Voir aussi l’article 8 dans le Tableau 44 à la page 266. 493 Voir à la page 24 dans Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 268 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 269 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 6 Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner de manière à ce qu’il émette automatiquement un coupon de remboursement lorsque le nombre de crédits accumulés atteint ou dépasse une valeur de 1 000 $. Cette mesure oblige le joueur à faire un temps d’arrêt après l’obtention d’un lot important. Il peut s’agir du gros lot, ou d’un lot intermédiaire multiplié par le nombre de crédits de la mise. Pour l’application des présentes règles, on entend par « coupon de remboursement » : un relevé écrit émis par un appareil de loterie vidéo pour confirmer au moins le nombre de crédits remboursables ainsi que leur valeur en devises canadiennes. En raison le l’article 40 des présentes règles (voir à la page 274), le joueur doit s’identifier à la caisse pour encaisser son coupon. Le lien électronique de l’appareil de loterie vidéo doit permettre à l’ordinateur central d’avoir accès au moins aux données suivantes : Si ces données devenaient accessibles aux spécialistes de la santé publique, de critères plus précis du jeu sécuritaire pourraient être élaborés. 10 1° le montant inséré dans l’appareil, soit en crédit, soit en devises canadiennes; Par contre, en insérant de l’argent supplémentaire dans l’ALV, le joueur peut continuer à jouer sans avoir à encaisser son coupon immédiatement. En ce sens, le temps d’arrêt peut être bref. À ces informations, il faut aussi ajouter le nom du jeu auquel le joueur a joué. 2° le montant gagné, soit en crédit, soit en devises canadiennes; 3° le montant payé, soit en crédit, soit en devises canadiennes; 4° le montant misé, soit en crédit, soit en devises canadiennes; 5° les ouvertures de la porte qui protège le circuit logique; 6° les ouvertures de la porte centrale du cabinet. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 269 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 270 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. 12 Texte Tout appareil de loterie vidéo doit contenir un dispositif lui permettant de conserver en mémoire toutes les données opérationnelles de celui-ci durant une période d’au moins 90 jours en cas de panne. Commentaire Si ces données devenaient accessibles aux spécialistes de la santé publique, de critères plus précis du jeu sécuritaire pourraient être élaborés. Un rapport trimestriel devrait être produit. 17 L’appareil de loterie vidéo doit contenir une imprimante dont le fonctionnement permet, en une seule impression, d’émettre un coupon de remboursement et d’en conserver une copie conforme à l’intérieur de l’appareil. Si ces données devenaient accessibles aux spécialistes de la santé publique, de critères plus précis du jeu sécuritaire pourraient être élaborés. 19 Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner de manière à ce qu’il permette au joueur, en tout temps, d’obtenir un coupon de remboursement pour les crédits qu’il a accumulés ou qu’il n’a pas utilisés. Cette mesure est favorable pour maintenir les joueurs en santé ou pour atténuer les dommages. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 270 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 271 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. 26 Texte Les catégories d’établissements où peuvent être exploités les appareils de loterie vidéo sont les suivantes : Commentaire 1° un bar pour lequel un permis de bar délivré par la Régie est en vigueur et non suspendu; Cet article témoigne d’un effort appréciable pour éloigner les ALV des personnes de moins de 18 ans. En l’occurrence, la définition des sites oblige à ce qu’un commerce soit raisonnablement un lieu d’adultes. 2° une brasserie pour laquelle un permis de brasserie délivré par la Régie est en vigueur et non suspendu; En contrepartie, la juxtaposition du jeu et de l’alcool pose un sérieux problème 439 179 . 3° une taverne pour laquelle un permis de taverne délivré par la Régie est en vigueur et non suspendu; Malgré le premier alinéa, le titulaire d’un permis de bar, de brasserie ou de taverne ne peut mettre à la disposition du public des appareils de loterie vidéo lorsque la capacité inscrite sur le permis est inférieur à 15 ou lorsque l’une des mentions suivantes est inscrite à la section intitulée « particularité d’exploitation » ou à la section intitulée « localisation » sur le permis : 1° théâtre; 2° amphithéâtre; 3° centre sportif; 4° terrasse; 5° pavillon de chasse ou de pêche; 6° transporteur public; 7° aire commune de restauration ou d’exposition. De même, ce titulaire de permis ne peut mettre à la disposition du public des appareils de loterie vidéo lorsque le permis est exploité dans un lieu de fabrication artisanale de boissons alcooliques ou lorsque la Régie n’a pas déterminé de capacité sur le permis tels les mini-bars ou les distributrices de boissons alcooliques exploités dans un établissement. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 271 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 272 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. 27 Texte Commentaire À l’intérieur d’un établissement, les appareils de loterie vidéo ne doivent pas être installés dans les endroits suivants : Le premier point se justifie pleinement par la remarque faite à l’article précédent. 1° les aires de préparation des boissons alcooliques; Le second point a été l’objet d’une révision récente qui n’a pas validé l’option de changer cette règle494. 2° sur les comptoirs de service de celles-ci; 3° dans les salles de toilettes; 4° les vestiaires; Le cinquième point est particulièrement important en raison des problèmes que les employés des établissements de jeu éprouvent à force d’être en contact avec le jeu495. 5° les aires réservées aux employés de l’établissement. 28 Le titulaire d’une licence d’exploitant de site doit tenir affichée à la vue du public et à proximité des appareils de loterie vidéo, en tout temps, dans son établissement, un avis indiquant qu’il est interdit à une personne âgée de moins de 18 ans de jouer avec un appareil de loterie vidéo. Cette affichage est essentiel. Voir aussi la section 6.4.3.2.2 à la page 252. 494 (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2003). Rapport d’étude sur le format, la disposition et le mode de disponibilité des appareils de loterie vidéo. Québec, Université Laval. (b) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on gambling. International gambling studies, 5(2), 139-154. 495 (a) Shaffer, H. J., Vander Bilt, J., & Hall, M. N. (1999). Gambling, drinking, smoking and other health risk activities among casino employees. American journal of industrial medicine, 36, 365378. (b) Shaffer, H. J., & Hall, M. N. (2002). The natural history of gambling and drinking problems among casino employees. The journal of social psychology, 142(4), 405-424. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 272 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 273 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 29 Au plus cinq appareils de loterie vidéo peuvent être autorisés dans un établissement où est exploitée une licence d’exploitant de site. En 2002, en raison de la multiplication des permis d’alcool par établissement, 13% des sites possédaient plus que 5 ALV. Dans la région de Laval-LaurentidesLanaudière, deux sites offraient 50 ALV ou plus. À noter que les hippodromes de Aylmer et de TroisRivières ne possèdent que 65 ALV. 31 Pour obtenir une licence d'exploitant de site, tout titulaire d'un permis de bar, de brasserie ou de taverne doit respecter les conditions suivantes: Cette mesure est unanimement appuyée par tous les organismes oeuvrant à la protection de la population. 1° au cours des 5 années qui précèdent la date de sa demande de licence, ne pas s'être reconnue coupable ou avoir été reconnue coupable d'un acte criminel ou d'une infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité et pour laquelle elle n'a pas obtenu de pardon ou de réhabilitation relativement à l'une des dispositions des articles 201 à 209 du Code criminel; Elle reste néanmoins vulnérable au recours à des prête-noms, en particulier dans le milieu des bars qui éprouve de nombreuses difficultés à contrer une infiltration par des intérêts criminels496. 2° supprimé; 3° ne pas avoir vu son permis d'alcool révoqué, à l'exception d'une révocation de plein droit, depuis 5 ans à compter de la date de sa demande de licence; 4° ne pas avoir vu son permis d'alcool suspendu pour une période cumulative de 6 mois et plus au cours des 3 années précédant sa demande de licence; 5° ne pas avoir vu une autre de ses licences d'exploitant de site suspendue au cours des 5 dernières années précédant la date de sa demande. 496 La violence exercée auprès des propriétaires de bars est une préoccupation majeure du ministère de la Sécurité publique. En l’occurrence, ce ministère a collaboré à la conception de trois éditions du magazine Infobars destinées à renseigner les propriétaires de bars quant aux moyens de lutter contre une mainmise du crime organisé sur leurs établissements. (a) Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 273 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 274 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 40 Le titulaire d'une licence d'exploitant de site doit tenir un registre dans lequel sont inscrits les nom et adresse de chaque personne à qui il paie un coupon de remboursement de 500 $ ou plus ainsi que la date de ce paiement et le montant de celui-ci. Cette mesure vise essentiellement à contrer le blanchiment d’argent. 41 Le titulaire d'une licence doit conserver, dans l'établissement où il exploite sa licence, les registres qu'il doit tenir en vertu de la présente section pendant une période de 3 ans, à compter de la date de la dernière inscription. Cette mesure vise essentiellement à contrer le blanchiment d’argent. 42 Le titulaire d'une licence d'exploitant de site doit assister aux séances de formation et d'information organisées par la Régie ou par la Société. Il s’agit d’abord et avant tout de séances d’information sur la manière d’opérer des ALV. À partir de l’an 2000497, s’est ajoutée l’obligation de participer à une session de formation sur le jeu pathologique. Certains détaillants peuvent utiliser cette formation pour aider les joueurs excessifs; tandis que d’autres peuvent l’utiliser pour repérer une clientèle très payante. Cette mesure doit être très précisément évaluée. 43 Le titulaire d'une licence d'exploitant de site doit donner une formation d'au moins une heure à son personnel relative aux droits et obligations liés à l'exploitation de sa licence. Voir le commentaire de l’article précédent. 45 Le titulaire d'une licence d'exploitant de site doit mettre à la disposition du public les règles de jeux, les tables de paiement et les instructions relatives au fonctionnement des appareils de son établissement. Voir l’article 2 dans le Tableau 44 à la page 246. Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2001, février). Numéro spécial : non à l’intimidation. Infobars, 3(8). (b) Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2002, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 3(12). (c) Sécurité publique – Québec. (2005, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 4(2). 497 Voir à la page 17 dans : Loto-Québec. (2001). Rapport annuel 2000-2001. Montréal, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 274 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 275 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 46 Le titulaire d'une licence d'exploitant de site, la personne responsable visée au paragraphe 4º de l'article 33 ou un membre du personnel de l'établissement ne peut effectuer le paiement d'un coupon de remboursement sans avoir préalablement vérifié au moyen d'un passeport, d'une copie d'un acte de naissance, d'un permis de conduire d'un véhicule automobile ou d'une carte d'identité, que la personne qui réclame le paiement d'un coupon de remboursement est majeure ou si elle l'est, qu'elle ne réclame pas ce paiement pour le compte d'une personne mineure. Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252 du présent document. 47 Le paiement d'un coupon de remboursement ne peut être effectué qu'en argent ou par chèque. 49 Nul ne peut, dans un établissement, accorder un prêt, un crédit ou autrement avancer de l'argent, sous quelque forme que ce soit, à une personne pour lui permettre de jouer avec un appareil de loterie vidéo. Voir l’article 5 à la page 247. 50 Il est interdit au titulaire de licence d'exploitant de site, à la personne responsable visée au paragraphe 4º de l'article 33, ainsi qu'à tout membre du personnel de l'établissement de permettre ou de tolérer qu'une personne, manifestement en état d'ivresse ou sous l'influence d'une drogue, d'un médicament ou d'une autre substance, joue avec un appareil de loterie vidéo. L’interdiction de jouer sur plus d’un appareil est une excellente mesure. De même, il est interdit à ces personnes de permettre ou de tolérer qu’une personne joue avec plus d’un appareil de loterie vidéo à la fois. 51 Il est interdit au titulaire d'une licence d'exploitant de site, à la personne responsable visée au paragraphe 4º de l'article 33, ainsi qu'à tout membre du personnel de l'établissement d'inciter une personne à jouer avec un appareil de loterie vidéo. Mesure parfaitement appropriée 55 Il est interdit à une personne mineure de jouer avec un appareil de loterie vidéo. Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252 du présent document. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 275 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 276 Tableau 45 Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. Texte Commentaire 56 Il est interdit au titulaire d'une licence d'exploitant de site ou à la personne responsable visée au paragraphe 4º de l'article 33 ainsi qu'à tout membre du personnel de l'établissement de tolérer ou de permettre à une personne mineure de jouer, directement ou par l'entremise d'une personne majeure, avec un appareil de loterie vidéo. Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252 du présent document. 57 Il est interdit au titulaire de licence d'exploitant de site de tolérer ou de permettre que des appareils de loterie vidéo soient reliés entre eux afin d'alimenter un lot progressif. Mesure appropriée. Pour l'application de la présente règle, on entend par: «lot progressif»: un gros lot, remporté par un seul joueur, dont le montant correspond à un pourcentage déterminé de chacune des mises placées sur chacun des appareils participants. 59 Il est interdit au titulaire de licence d'exploitant de site de faire crédit, d'échanger des chèques, de recevoir, directement ou indirectement, par échange ou autrement, des biens ou des services en échange de parties jouées avec un appareil de loterie vidéo dans son établissement. 62 Une publicité peut s'adresser à une personne mineure ou utiliser une personne mineure uniquement lorsqu'elle vise à promouvoir l'abstinence ou la modération au jeu avec un appareil de loterie vidéo ou à donner de l'information sur les effets ou les conséquences d'une participation excessive au jeu. Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252 du présent document. 6.4.4.2.3 Le règlement sur le taux de remise Le pouvoir de réglementer le taux de remise des ALV est assumé directement par le gouvernement, plutôt que la RACJ ou Loto-Québec, en raison de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 119, par. g). Celui-ci est fixé par le Règlement sur le taux de retour des loteries vidéo de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.10). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 276 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 277 Tableau 46 Article du règlement sur le taux de retour des loteries vidéo constituant une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits No. 1 Texte Commentaire Pour tous les jeux offerts par les appareils de loterie vidéo faisant partie d'un système de loterie vidéo au sens du paragraphe l de l'article 1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement (L.R.Q., c. L-6), le taux de retour ne doit pas être inférieur à 83 %. En fait, le taux de remise se situe à 92%. 6.4.4.2.4 Autres articles de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement Il existe d’autres dispositions qui s’appliquent plus généralement. Tableau 47 Article 36.3 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement No. Texte 36.3 Malgré tout règlement municipal adopté en vertu d'une loi générale ou spéciale, l'exploitation d'un appareil de loterie vidéo est permise sous réserve que celle-ci ait lieu dans les conditions prévues par la présente loi ou ses textes d'application. 52.2 Commentaire Ainsi, le gouvernement du Québec force toutes les collectivités sur son territoire à accepter la présence des ALV dès qu’un propriétaire de bar obtient un permis, et cela quelle que soit la volonté de la collectivité. Dans certaines juridictions, par exemple en Alberta et en Louisiane, les citoyens peuvent tenir un référendum pour empêcher le déploiement des ALV dans leur municipalité. Nul ne peut exploiter un appareil de loterie vidéo s'il n'est pas la propriété de la Société des loteries du Québec ou de l'une de ses filiales et s'il n'est pas relié à l'ordinateur central de contrôle d'un système de loterie vidéo mis sur pied et exploité par la Société. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 277 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 278 Tableau 47 Article 36.3 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement No. Texte 52.15 La Société des loteries du Québec doit, avant leur acquisition, ensuite selon la fréquence déterminée par les règles de la Régie ou sur demande de celle-ci, faire vérifier et certifier par un laboratoire relevant de la responsabilité du ministre les appareils de jeu et le matériel électronique directement liés aux systèmes de loterie de casino qu'elle exploite dans un casino d'État, pour s'assurer que leur fonctionnement repose uniquement sur le hasard et que les appareils sont adéquats. Commentaire Restriction. La même obligation s'impose, selon le cas, à la Société ou aux titulaires de licences pour les appareils de loterie vidéo exploités ailleurs que dans un casino d'État, avant que ceux-ci ne soient immatriculés, ensuite selon la fréquence déterminée par les règles de la Régie ou sur demande de celle-ci. 6.4.4.3 Message incitant à la modération Entre juin 1994 et juin 2002, tous les ALV ont été doté d’un message incitant à la modération498 : « Jouez avec modération pour que le jeu demeure un jeu ». Le caractère iatrogène de ce message est présentement l’objet d’un litige devant la cour supérieure. Il n’est pas possible de le commenter ici. D’ailleurs, ce message n’est pas pertinent pour évaluer le projet des salons de jeux. 6.4.4.4 Dépliant Entre 1996 et 2001, un dépliant intitulé « Jouez avec modération pour que le jeu demeure un jeu » était placé aux côtés des ALV. Le caractère iatrogène de ce dépliant est présentement l’objet d’un litige devant la cour supérieure. Il n’est pas possible de le commenter ici. D’ailleurs, ce dépliant n’est pas pertinent pour évaluer le projet des salons de jeux. 498 Voir à la page 14 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 278 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 279 6.4.4.5 Pas de connexion en îlots entre les ALV Dans les casinos, certaines MAS sont connectées en îlots afin de pouvoir offrir un gros lot de très grande valeur. Cela n’est pas permis pour les ALV dans les bars, et il semble que les salons de jeux ne le permettront pas non plus. C’est une décision sage. 6.4.4.6 Banques de données sur les comportements de jeu En juin 1994, le parc de la SLVQ était composé d’ALV provenant de trois fabricants, offrant des jeux similaires. À des fins de surveillance, chaque appareil était connecté à un réseau centralisé. Ainsi, d’importantes banques de données ont été accumulées sur les habitudes de jeu des Québécois. Ces banques englobent le choix des jeux, le nombre de parties jouées, le montant des mises, les dénominations utilisées, la durée de jeu avant l’encaissement, les montants insérés dans les appareils durant une session de jeu, le taux de remise effectif, le taux d’encaissement, et les changements de jeux avant encaissement. Malgré des demandes en ce sens, ces données n’ont jamais été mises à la disposition des chercheurs et spécialistes de la santé publique. Elles seraient très utiles. 6.4.5 L’implantation des ALV dans quatre hippodromes du Québec En 1995, la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement a été modifiée afin de créer des super licences pour l’exploitation d’ALV dans les hippodromes (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1.1). Des dispositions spéciales ont été adoptées. Tableau 48 Article 20.1.1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement Texte Malgré le nombre maximum d'appareils de loterie vidéo déterminé par la Régie en vertu de ses règles, les titulaires d'une licence d'exploitant de site qui sont également titulaires d'une licence de courses ou de piste de courses de chevaux de catégorie A ou B délivrées en vertu de la Loi sur les courses ( chapitre C-72.1) peuvent être autorisés à détenir le nombre maximum suivant d'appareils de loterie vidéo; Commentaire La situation actuelle est 200 à Montréal, 100 à Québec, 65 à TroisRivières et 65 à Aylmer. — 125 appareils à la piste de courses de Montréal; — 100 appareils à la piste de courses de Québec; — 50 appareils à la piste de courses de Trois-Rivières. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 279 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 280 Tableau 48 Article 20.1.1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement Texte Nombre d'appareils Commentaire Ceci explique le commentaire précédent. Le gouvernement peut, sur la recommandation conjointe du ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, du ministre des Finances et du ministre de la Sécurité publique, modifier le nombre maximum d'appareils de loterie vidéo pour chacune des pistes de courses désignée au premier alinéa. Pistes de courses Cette disposition n’a pas été appliquée. La Régie peut désigner d'autres pistes de courses de chevaux de catégorie A ou B et déterminer pour chacune d'elles, le nombre maximum d'appareils de loterie vidéo qui peut y être autorisé. Approbation L'exercice par la Régie des pouvoirs visés au troisième alinéa est soumis à l'approbation du gouvernement. Celui-ci en est saisi sur recommandation conjointe du ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation, du ministre des Finances et du ministre de la Sécurité publique. Local approprié Les appareils doivent être placés dans un local pour lequel le titulaire de la licence de courses ou de piste de courses est titulaire d'un permis de bar. Ils peuvent être répartis dans plusieurs locaux. Toutefois, un seul local peut regrouper un nombre d'appareils supérieur au maximum déterminé par la Régie en vertu de ses règles. Ceci implique vraisemblablement qu’outre l’aire principale des salons de jeux, des îlots de cinq ALV pourrait être disséminés à l’intérieur de bâtiment. Pour contrôler le jeu excessif, cela n’apparaît pas souhaitable. Licence d'exploitant Une licence d'exploitant de site pour la piste de courses de Montréal, de Québec ou de Trois-Rivières, ou pour toute autre piste de courses désignée en vertu du présent article, ne peut être délivrée qu'à un titulaire d'une licence de courses ou de piste de courses. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 280 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 281 6.4.6 L’étude de prévalence du jeu pathologique réalisée en 1996 Les efforts pour effectuer un monitorage des impacts de l’accroissement de l’offre de jeu au Québec sont surtout l’initiative du chercheur Robert Ladouceur de l’Université Laval (voir Tableau 49). Une première étude québécoise de prévalence a eu lieu en 1989, avant l’étatisation des AÉJ. Les APV illégaux étaient déjà présents depuis 1976. Parmi la population, l’auteur a estimé qu’il y avait 1,2% de joueurs pathologiques probables, et 2,6% de joueurs à risque, pour un total de 3,6% de la population adulte qui jouait excessivement. Cette étude n’a fourni que des taux de prévalence à vie. En 1996, trois ans après l’avènement des casinos et deux ans après l’implantation des ALV, les auteurs de la seconde étude québécoise de prévalence ont estimé que la proportion des joueurs pathologiques probables avait augmenté à 2,1%, soit une hausse de 75%. Cette augmentation était à l’orée du seuil de signification statistique, mais non significative. Parce que l’échantillon de 1996 contenait trop d’universitaires, et d’adultes d’âge moyen, une révision du calcul de la pondération des participants s’avère nécessaire501. Lorsque les taux de prévalence sont ainsi actualisés, la proportion le pourcentage de joueurs pathologiques probables grimpe à 2,8%; ce qui représente alors une augmentation statistiquement significative de 131%. Bien que cette seconde étude témoigne d’une croissance plausible des problèmes de jeu dans la population québécoise, et qu’entre-temps l’offre de jeu s’était surtout développée par un important déploiement d’AÉJ, il n’y a pas eu d’étude supplémentaire pour préciser cette constatation. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 281 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 282 Tableau 49 Résultats des études de prévalence du jeu pathologique réalisées au Québec Catégories de joueurs Année N Outil Pathologiques probables À risque Excessifs Première étude de prévalence du jeu pathologique499 1989 1002 SOGS-vie 1,2% 2,6% 3,8% Seconde étude de prévalence du jeu pathologique500 1996 1257 SOGS-vie 2,1% 2,4% 1996 1257 SOGS-12 mois 1,4% 1,0% 4,5% 2,4% 501 Actualisation de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique 1996 1263 SOGS-vie 2,8% 2,3% 5,1% 1996 1263 SOGS-12 mois 1,3% 1,3% 2,6% 6.4.7 La création des centres de recherche universitaires En 1997, Loto-Québec a entrepris de financer des centres de recherche universitaires présentés comme des organismes indépendants. Dans les faits, ces équipes de recherche dépendent d’une manière critique de leur principale source de financement qui est soit Loto-Québec directement, ou d’autres agences gouvernementales indirectement. Lorsque le financement ne provient pas de la dépense au jeu de la population québécoise, il provient d’organisations de jeu américains ou australiens. Ces centres ne peuvent pas assumer une délégation de la responsabilité gouvernementale de prémunir les citoyens contre les méfaits du jeu. Ils ne sont pas davantage des organismes indépendants. De plus, les centres universitaires ne sont pas tenus de répondre aux questions ou appréhensions de citoyens. Les contrats ne contiennent aucun engagement à recevoir les plaintes de citoyens avec les mêmes garanties d’audition que procurent les services gouvernementaux. 499 Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gamblers in Québec. Canadian Journal of Psychiatry, 36, 732-734. 500 (a) Prévalence vie : Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. (b) Prévalence annuelle : Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. 501 Voir à la page 247 dans l’annexe G du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06000017-015 de la Cour supérieure du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 282 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 283 6.4.8 L’émission « Savez-vous jouer … sans perdre la tête? Les 10 et 11 décembre 1998, par l’intermédiaire des réseaux TVA et CFCF, Loto-Québec a diffusé une émission de sensibilisation au jeu qui a été accompagnée d’une brochure du même titre502. Aucune documentation n’est accessible quant aux objectifs de cette émission. Il n’y a eu aucune évaluation des impacts. 6.4.9 Le transfert de la responsabilité du jeu pathologique au MSSS En 2001, le gouvernement a transféré la responsabilité du jeu pathologique de LotoQuébec vers le ministère de la Santé et des services sociaux. À cette occasion, le MSSS a entrepris immédiatement une campagne médiatique pour sensibiliser la population aux indices ou conséquences du jeu pathologique. 6.4.9.1 Campagnes nationales de sensibilisation Il existe peu de données sur l’efficacité des campagnes médiatiques auprès des joueurs pathologiques. Le principal doute qui existe quant à cette mesure est soulevé par le fait que les joueurs en pleine crise passent davantage des heures devant un écran d’ALV plutôt qu’à l’écoute des médias. Dans l’état de l’Australie-du-sud, il a été constaté que seulement 31% de la population pouvait décrire au moins une des annonces faites dans les médias503. Cette proportion grimpe à 40% pour les joueurs pathologiques, bien que la différence ne soit pas significative. Il est possible que les annonces dans les médias marquent davantage l’attention des joueurs pathologiques. Dans ce cas, l’impact serait toutefois peu important compte tenu des coûts de telles campagnes. 6.4.9.2 Le forum sur le jeu pathologique Le 8 et 9 novembre 2001, un forum sur le jeu pathologique a réuni à Montréal plusieurs intervenants dans le domaine du jeu. Ce forum a été une première activité de rassemblement qui a surtout fourni la base pour la création d’une table de concertation interministérielle (voir la section 6.4.10 à la page 284). 502 Voir à la page 41 dans : Loto-Québec. (1999). Rapport annuel 1998-1999. Montréal, QC : auteur. 503 Voir aux pages 111 et 112 dans : Taylor, A. et al (2001 may). Gambling patterns of South Australians and associated health indicators. South Australia: South Australian department of human services, Centre for population studies in epidemiology. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 283 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 284 6.4.9.3 Le programme expérimental sur le traitement du jeu pathologique L’évaluation du programme expérimental du jeu pathologique a déjà été l’objet d’une évaluation de la part de l’Institut national de santé publique504 puis d’une publication indépendante qui l’a comparé aux travaux antérieurs du CQEPTJ505. Dans l’ensemble, le traitement cognitif du jeu pathologique adopté par le MSSS fonctionne bien, quoique l’implantation à grande échelle a posé quelques difficultés d’acceptation. Une plus grande souplesse d’application serait souhaitable. 6.4.10 La table de concertation interministérielle En décembre 2000, une table de concertation interministérielle a réuni le MSSS, le ministère des Finances, la RACJ, la Sécurité publique ainsi que Loto-Québec. Cette réflexion a conduit à la rédaction du document « Plan d’action gouvernemental 20022005 : agir ensemble » 506. À cette occasion, la table de concertation a axé la priorité sur le concept de jeu responsable507. Par ailleurs, encore en vigueur aujourd’hui, la RACJ a décrété un moratoire sur l’octroi de nouvelles licences. En ce qui concerne les ALV, six mesures de dissuasion ont été adoptées508 : (a) des boîtiers de couleur noire, (b) réduction de 23 à 10 jeux, dont un maximum de 5 par appareil, (c) réduction de la vitesse de jeu par la désactivation du bouton d’arrêt, (d) réduction de la banque maximale par session de $ 100 à $ 60, (e) affichage à l’écran d’une horloge visible en tout temps, et (f) désactivation des ALV en dehors des heures autorisées par le permis d’alcool. De plus, trois mesures ont été adoptées afin d’augmenter le fardeau de responsabilité des joueurs509 : (a) la nécessité de fixer la 504 (a) Audet, C., St-Laurent, D., Chevalier, S., Allard, D., Hamel, D., & Crépin, M. (2003). Évaluation du programme expérimental sur le jeu pathologique. Rapport 7. Monitorage évaluatif – indicateurs d’implantation – données rétrospectives. Institut national de santé publique du Québec. 505 Leblond, J. (2004). Comparaison des résultats du programme expérimental sur le jeu pathologique du MSSS aux résultats des études scientifiques menées à l'Université Laval. L'intervenant, 20(3), 4-6. 506 Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. 507 Voir à la page 18 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. 508 Voir à la page 24 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. 509 Voir à la page 24 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 284 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 285 durée de jeu souhaitée, (b) l’activation d’une fenêtre de type pop-up à la fin de la durée spécifiée, et (c) l’affichage préférentiel des crédits en dollars. Malheureusement, aucune de ces modifications n’a fait l’objet d’un suivi qui a été publié. Il est difficile de les apprécier avec certitude. Voici les mesures qui sont la conséquences des travaux de la Table de concertation interministérielle. 6.4.10.1 Les boîtiers des ALV seront dorénavant de couleur noire Il s’agit certainement de la mesure la moins intéressante de toute la littérature sur les mesures de protection! 6.4.10.2 La réduction du nombre de jeux de 23 à 10, dont un maximum de cinq par appareil. Il suffit d’un seul jeu pour rendre un AÉJ dangereux. Un jeu de cartes et un jeu de lignes sont déjà une combinaison interactive dangereuse. En général, incluant les joueurs québécois510, les joueurs n’utilisent qu’un ou deux jeux par session de jeu511. À peine un joueur sur cinq, quelle que soit sa catégorie, utilise plus d’un jeu par session512. Deux fois sur trois, les joueurs préfèrent les jeux de ligne513. À noter que la réduction du nombre de jeu a été rendue facile par le retrait des appareils de la compagnie Williams en 2003. 6.4.10.3 La réduction de la vitesse de jeu par la désactivation du bouton d’arrêt Cette mesure peut être profitable (voir section 6.3.2.2.8 à la page 210). Elle devra cependant être évaluée empiriquement. 510 En moyenne, 1,8 jeux par session sur ALV en 1997 et 1,7 jeux en 1999. Voir à la page 7 dans : Multi-Reso. (1999). SLVQ sondage-population 1999. Synthèse des résultats. Montréal, QC : auteurs. 511 Voir à la page 3-23 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd. 512 Voir à la page 3-49 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. 513 Voir à la page 3-24 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 285 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 286 De plus, la réduction de la vitesse de jeu s’applique surtout aux jeux de lignes. Or, bien que les jeux de lignes demeurent les préférés des toutes les catégories de joueurs, les joueurs pathologiques participent davantage aux jeux de cartes514. 6.4.10.4 La réduction de la banque maximale par session de $ 100 à $ 60 Alors que cette limite était fixée auparavant à 100 dollars, les joueurs ne peuvent plus insérer des billets dans l’appareil dès que leur banque dépasse 60 dollars515. Cette mesure va dans la bonne direction (voir section 6.3.4.2 à la page 228) quoique le seuil maximal est peut être encore trop élevé. Pour en juger, les chercheurs doivent avoir accès aux données enregistrées par les ALV. De plus, l’émission automatique d’un coupon de remboursement provoque un encaissement forcé dès que la banque du joueur atteint 500 dollars, soit le montant du gros lot maximal pour une mise de 1 crédit516. 6.4.10.5 L’affichage à l’écran d’une horloge visible en tout temps Les études de la Nouvelle-Écosse n’ont pas trouvé une grande utilité à cette mesure (voir sections 6.3.2.2.1 à la page 198 et 6.3.2.2.2 à la page207). Il a été constaté que les joueurs pathologiques expriment un horizon temporel plus court que les joueurs sans problème de jeu517. Les joueurs pathologiques semblent ainsi plus enclins à se concentrer sur les aspects hédonistes du présent ainsi que sur des événements passés. Par contre, ceux-ci n’expriment pas de difficulté à se référer à des événements futurs. Les différences de moyennes observées, quoique statistiquement significatives, sont minces. De plus, les auteurs signalent que les effets observés pourraient être causés par le stress généré par le problème de jeu, et non par une caractéristique de la personnalité des joueurs pathologiques. 514 Voir à la page 3-50 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. 515 (a) Voir à la page 15 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs. (b) Voir à la page 33 dans Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs. 516 (a) Voir à la page 15 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs. (b) Voir à la page 33 dans Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs. 517 Hodgins, D. C., & Engel, A. (2002). Future time perspective in pathological gamblers. Journal of nervous and mental disease, 190(11), 775-780. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 286 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 287 6.4.10.6 Désactivation automatique des ALV en dehors des heures d’ouverture autorisées par le permis d’alcool Très peu de joueurs jouent la nuit. Une étude518 réalisée en Alberta indique que seulement 3% des joueurs utilisent les ALV entre 1:00 et 7:00 du matin. Cette mesure vise cependant à empêcher les propriétaires et les employés à utiliser les ALV après la fermeture du bar. Le taux de prévalence du jeu pathologique parmi les employés des établissements de jeu est plus élevé que celui de la population en général519. Par leur fonction, ces employés sont constamment témoins des performances des ALV durant la journée. Dès qu’un employé devient convaincu que l’appareil est dû pour payer, notamment parce que personne n’y a gagné gros au cours de la journée, il existe une forte pression pour cueillir un lot imminent qui autrement semblerait perdu520. De plus, il existe la possibilité que, durant le reste de la nuit, le bar licite, devienne un bar clandestin pour une partie sélecte de la clientèle. En terme de mesure de protection pour l’ensemble de la population, le seul paramètre vérifié expérimentalement consiste à fermer les ALV à minuit (voir la section 6.3.2.2.7 à la page 209). 6.4.10.7 Les nouveaux messages Entre juin 2002 et octobre 2002, le seul message à l’écran a été de numéro de téléphone 1-866-SOS-JEUX ainsi que le sigle de la fondation Mise sur toi. Depuis octobre 2002, divers messages apparaissent du type « Avant qu’il ne soit trop tard … Mise sur toi 1-866-SOS-JEUX. « Avant qu’il ne soit trop tard … mise sur toi » … le caractère potentiellement iatrogène de ce message saute aux yeux. On dit à des joueurs qui sont plausiblement en illusion de contrôle, qui ont une confiance exagéré en eux-mêmes de miser sur leurs croyances erronées. Au lieu d’inviter les gens à miser, il aurait été moins équivoque d’inscrire « Avant qu’il ne soit trop tard, retourne chez toi, va consulter ». Le rôle du numéro de téléphone doit aussi être beaucoup plus explicite. S’agit-il d’un numéro auquel on peut s’adresser pour trouver de l’aide à savoir comment jouer? À ce numéro, va-t-on essayer de nous vendre des produits de jeu additionnels? Un joueur 518 Voir à la page 70 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2004, january). VLT gambling in Alberta: a preliminary analysis. Final report. Edmonton, AB: Alberta gaming research institute. 519 (a) Shaffer, H. J., Vander Bilt, J., & Hall, M. N. (1999). Gambling, drinking, smoking and other health risk activities among casino employees. American journal of industrial medicine, 36, 365378. (b) Shaffer, H. J., & Hall, M. N. (2002). The natural history of gambling and drinking problems among casino employees. Journal of social psychology, 142(4), 405-424. 520 Une telle attitude reflète une illusion de contrôle associée à une dépendance pathogène envers les ALV. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 287 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 288 excessif en pleine détresse ne désire surtout pas se faire relancer. Il faut impérativement indiquer au côté du numéro de téléphone qu’il s’agit d’un service d’aide gratuit et confidentiel. 6.4.10.8 La nécessité de fixer préalablement des limites de temps ou de dépense Les joueurs excessifs se déplacent spécifiquement pour jouer521. Il ne s’agit pas d’occasions impulsives de jeu. Dans une perspective de jeu planifié, il a été proposé de demander aux joueurs de préciser les limites dans lesquelles ils désirent demeurer522. En général, les joueurs, toutes catégories confondues, préfèrent se donner un budget limite plutôt que de limiter la durée de la session de jeu523. Incidemment, les joueurs pathologiques ont une tendance plus marquée à dépasser leur budget plutôt à excéder le temps de jeu souhaité. 6.4.10.9 Les messages en mode fenêtre indiquant le temps écoulé Comme le font très pertinemment remarquer Schellinck et Shranks524, il est beaucoup plus probable que le joueur soit exposé aux messages pop-up lorsqu’il est durant une phase gagnante que lorsqu’il perd. En phase perdante, il est fréquent que le solde atteigne fréquemment zéro, ce qui réinitialise le compteur temporel à chaque fois. Le principal motif pour lequel un joueur réinvestirait de l’argent avant que le solde n’atteigne zéro est l’impression que l’appareil est près de payer une forte somme. Dans un tel cas, le joueur ne s’intéresse surtout pas à savoir depuis combien de temps il joue. Continuer pendant encore quelques minutes est alors perçu comme étant impératif. 521 Dans plus de 70% des occasions. Voir à la page 3-11 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd. 522 Voir à la page 3-1 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd. 523 Voir à la page 91 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2004, january). VLT gambling in Alberta: a preliminary analysis. Final report. Edmonton, AB: Alberta gaming research institute. 524 Voir à la page 3-22 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 288 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 289 6.4.10.10 Module explicatif sur le hasard Paul Delfabbro525 a étudié comment les joueurs réagissaient à des explications fondamentales concernant le fonctionnement du hasard. Celui-ci a constaté que bon nombre des joueurs ont beaucoup de difficultés à intégrer le concept de hasard. Bien que les explications sont techniquement correctes, les joueurs tendent à conclure qu’il existe un mécanisme correcteur qui égalisera les résultats. Si l’appareil n’a pas payé récemment, ce mécanisme correcteur ferait en sorte que l’appareil deviendrait ultérieurement plus payant. Or, cette croyance est précisément celle sur laquelle se construisent les illusions de contrôle526. 6.4.10.11 Dépliant « Votre portrait de joueur en 8 questions » À partir d’un répertoire de 35 questions jugées valables par un groupe d’experts, et d’une vérification auprès de 1000 patients australiens de pratique générale, un ensemble de 8 questions a été sélectionné comme étant le mieux apparié aux résultats du SOGS527. La capacité discriminative des 8 questions n’a jamais été vérifiée en fonction de joueurs diagnostiqués valablement par un clinicien. En ce sens, ces 8 questions ne peuvent pas faire mieux que le SOGS. Alors pourquoi ne pas utiliser le SOGS directement puisqu’il s’agit déjà d’un test de dépistage? Certes, la réduction de 20 à 8 items à vérifier est un avantage. Toutefois, il y est beaucoup moins question des problèmes d’argent, ce qui est le principal facteur des dommages. Une seconde section du dépliant présente trois phases du développement des problèmes de jeu. Il est particulièrement pertinent d’attirer l’attention sur le fait que le processus pathogène commence à s’installer durant la phase gagnante528. L’impact du 525 Voir aux pages 96 à 99 dans : Delfabbro, P., & LeCouteur, A. (2003, novembre). A decade of gambling research in Australia and New Zealand (1992-2002) : implications for policy, regulation and harm minimisation. A report prepared for the Independent gambling authority of South Australia. 526 (a) Voir aux pages 113 à 133 dans : Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, QC: Les Éditions de l’Homme. (b) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence Erlbaum Associates. (c) Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (d) Baboushkin, H. R., Hardoon, K. K., Derevensky, J. L., & Gupta, R. (2001). Underlying cognitions in gambling behavior among university students. Journal of applied social psychology, 31(7), 1409-1430. (e) Joukhador, J., MacCallum, F., & Blaszczynski, A. (2003). Differences in cognitive distortions between problem and social gamblers. Psychological reports, 92, 12301214. 527 Voir aux pages 47 et 48 dans : Delfabbro, P., & LeCouteur, A. (2003, novembre). A decade of gambling research in Australia and New Zealand (1992-2002) : implications for policy, regulation and harm minimisation. A report prepared for the Independent gambling authority of South Australia. 528 (a) Custer, R. L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans Carone, P. A., Yolles, S. F., Kieffer, S. N., & Krinsky, L. W. (éditeurs), Addictive disorders update (pp. 107-124). New York, NY : Human sciences press. (b) Voir la figure 1 dans : Dickerson, M. G. (1984). Compulsive Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 289 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 290 gain est cependant expliqué de manière tendancieuse. La principale conséquence d’un gain important est cognitive. C’est cet événement qui convainc du « réalisme » de l’idée fausse qu’il serait possible de contrôler les événements. Ici, la suggestion du dépliant est que l’impact serait plutôt émotionnel529. En dirigeant l’attention des joueurs vers des effets plausiblement sans conséquence plutôt que vers les conséquences causales du gain significatif, cette formulation peut retarder la prise de conscience du problème de jeu. Cet effet iatrogène possible doit être impérativement vérifié par une évaluation empirique de ce dépliant. Dans une troisième section, les critères déterminant les zones verte, jaune et rouge530 sont arbitraires. La zone verte est proposée comme une zone de jeu sécuritaire. Malheureusement, on n’aide en rien la personne à préciser concrètement ce qu’est un comportement de jeu sécuritaire. Pourtant, des critères existent. Une étude pancanadienne récente vient de spécifier trois critères délimitant le jeu sécuritaire531. Ce sont : (1) ne pas jouer plus souvent que 2 ou 3 fois par mois, (2) à l’exception des loteries, ne pas dépenser au jeu plus de 250 à 500 dollars annuellement, et (3) ne pas dépenser au jeu plus de 1% du revenu familial brut. Actuellement, seuls ces critères peuvent définir scientifiquement ce que peut être une zone verte. Le dépassement d’un seul critère suggère l’entrée dans la zone jaune, et le dépassement de plus d’un critère, surtout si l’écart s’agrandit continuellement, délimite la zone rouge. Dans un tel cas, Loto-Québec a la responsabilité de spécifier au joueur la nécessité de consulter un clinicien apte à évaluer si une dépendance pathologique est en développement. Cela n’est pas fait dans ce dépliant. Incidemment, le numéro de téléphone indiqué conduit à un service de référence qui n’est pas en mesure « … de fournir des renseignements pertinents afin d’aider à briser la dépendance aux jeux de hasard et d’argent … »532. Le dépliant englobe aussi, sous le titre « Signes avant-coureurs », les 10 items du DSMIV. Ce ne sont pas des signes avant-coureurs car les critères du DSM-IV ne sont pas conçus pour évaluer un processus en développement. Ce sont des indices gamblers. London, UK: Longman. (c) Voir Custer, R., & Milt, H. (1985). The phases in the life of the compulsive gambler. Dans, When luck runs out (pp. 96-121). New York, NY: Facts on file publications. 529 Il existe un impact émotif au gain significatif. Il n’est cependant pas démontré que cet impact est une cause des problèmes de jeu plutôt qu’un effet non déterminant. 530 Une personne qui assistait à une conférence a déjà signalé qu’il manquait une couleur à ce groupe : la couleur noire. Il existe des personnes qui sont décédées en raison de leur perte de contrôle sur leurs comportements de jeu. Bien que rare, le jeu sur AÉJ est un risque néanmoins mortel. 531 Les critères du jeu sécuritaire définissent concrètement les limites dans lesquelles les joueurs peuvent s’amuser sans craindre le risque de dommages importants. Voir : Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101, 570-580. 532 Voir à la page 31 dans : Chevalier, S., Papineau, É., & Geoffrion, C. (2003). Évaluation du programme expérimental sur le jeu pathologique. Rapport 9. Les lignes téléphoniques dédiées aux jeux de hasard et d’argent. Institut national de santé publique du Québec. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 290 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 291 diagnostiques permettant d’évaluer si une pathologie est déjà installée533. Il y a ici une distorsion qui pourrait inciter les joueurs à croire que leurs comportements de jeu sont sécuritaires tant et aussi longtemps que la pathologie ne se soit déjà bien installée. Cet effet iatrogène possible doit être impérativement vérifié par une évaluation empirique de ce dépliant. En bref, ce dépliant doit être jugé potentiellement dangereux jusqu’à ce qu’une évaluation empirique n’en démontre l’utilité. 6.4.10.12 Brochure « Les loteries vidéo et le hasard » Cette brochure explicite les éléments du dépliant « Votre portrait de joueur en 8 questions ». Les mêmes difficultés y sont constatées sauf qu’on y apporte des réponses un peu plus précises aux questions et qu’on y indique la nature exacte des critères du DSM-IV. En contrepartie, on y ajoute la mention : « On estime qu’environ 2 % des joueurs adultes au Québec s’identifient aux joueurs excessifs. Un autre 2 à 3 % de joueurs risquent de développer une dépendance au jeu s’ils n’y prennent pas garde. » Cela est faux. Il s’agit d’une sous-estimation trompeuse. Ces statistiques concernent l’ensemble de la population, incluant les non joueurs. Le risque de développer une dépendance pathologie envers le jeu doit être estimé en fonction des seuls joueurs. De plus, ce risque varie considérablement selon l’activité de jeu pratiquée, et surtout selon la fréquence des sessions de jeu. En fait, environ 35% des joueurs sur ALV recrutés in situ s’avèrent être des joueurs pathologiques. L’information contenu dans la brochure est alors susceptible de générer un optimisme irréaliste à l’égard de développer une dépendance à l’égard des ALV. Cet optimisme irréaliste est un facteur du processus pathogène. 6.4.10.13 Programme d’auto-exclusion volontaire Dans les bars, un programme d’auto-exclusion volontaire est annoncé depuis les travaux de la table de concertation interministérielle en 2002534. Dans les casinos, les programmes d’auto-exclusion sont un contribution potentielle pour aider les joueurs pathologiques à rester loin des occasions de jeu. Les casinos étant très distants géographiquement, il n’est pas réaliste d’envisager pouvoir contourner régulièrement l’auto-exclusion en se rendant à un autre casino. Avec un grand nombre de bars dans tous les quartiers populeux, et même dans des villages, il est illusoire d’imaginer qu’un joueur pathologique ne va pas simplement changer ses lieux de 533 (a) American Psychiatric Association (1994). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, fourth edition. Washington, DC: auteurs. (b) American Psychiatric Association (2000). Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, fourth edition, text revision. Washington, DC: auteurs. 534 Voir à la page 15 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 291 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 292 fréquentation. Quoi qu’il en soit, un test pilote est actuellement réalisé en Mauricie, et cette vérification empirique devra être étudiée au mérite de sa méthodologie. 6.4.10.14 Installation de contrôleurs de sites Les contrôleurs de sites sont des consoles informatisées qui font la liaison entre les ordinateurs centraux de Loto-Québec et les ALV. Ces contrôleurs permettent une gestion précise de nombreuses statistiques concernant les comportements de jeu535. 6.4.10.15 Programme de formation des employés de bars L’article 42 des règles de la RACJ oblige les détaillants d’ALV à suivre une formation sur le jeu pathologique prodiguée par le CQEPTJ536. L’impact du visionnement d’un vidéo d’information sur le comportement des joueurs pathologiques sur ALV a modifié la compréhension du jeu pathologique chez les détaillants ainsi que les interventions subséquentes des détaillants auprès des joueurs537. À partir des informations publiées, il est cependant impossible de déterminer la taille des effets. On ne sait pas combien de détaillants comprennent mieux le processus pathogène sur ALV, ni même s’il y en a qui comprennent moins. On ne sait pas combien sont intervenus pour aider les joueurs pathologiques. On ne sait pas si certains détaillants n’ont pas plutôt utilisé leurs nouvelles connaissances pour mieux repérer les joueurs pathologiques et les inciter à accrocher encore plus au jeu sur ALV. Pour apprécier les impact de ce vidéo, les données précises de cette étude devraient être publiées en monographie. 6.4.11 Le moratoire sur l’octroi de nouvelles licences d’exploitant de site d’appareils de loterie vidéo Le 15 mars 2002, la RACJ a décrété un moratoire d’un an sur l’octroi de nouvelles licences de sites où se trouvent des ALV ainsi que sur une augmentation du nombre d’ALV dans ces sites. Encore en vigueur, celui-ci est renouvelé à chaque année. Depuis son maximum en 1998-1999, le nombre d’ALV a diminué de 13%; incluant 9% depuis le moratoire. Depuis son maximum en 1996-1997, le nombre de sites a diminué de 40%; incluant 23% depuis le moratoire. Les nombres de sites et d’ALV avaient ainsi déjà commencé à décliner lorsque le moratoire a été adopté (voir Figure 91). C’était particulièrement le cas du nombre de sites qui a pratiquement toujours été en décroissance. 535 Voir à la page 28 dans Loto-Québec. (2002). Rapport annuel 2001-2002 : au-delà du jeu. Montréal, QC : auteurs. 536 Voir à la page 28 dans Loto-Québec. (2002). Rapport annuel 2001-2002 : au-delà du jeu. Montréal, QC : auteurs. 537 Ladouceur, R., Boutin, C., Doucet, C., Dumont, M., Provencher, M., Giroux, I., & Boucher, C. (2004). Awareness promotion about excessive gambling among video lottery retailers. Journal of gambling studies, 20(2), 181-185. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 292 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 293 Figure 91 Nombre de sites 5000 4000 3000 2000 1000 0 Nombre d'ALV 16000 12000 8000 4000 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 1994-1995 1995-1996 1996-1997 1997-1998 1998-1999 1999-2000 2000-2001 2001-2002 2002-2003 2003-2004 2004-2005 2005-2006 0 6.4.12 Remplacement du parc d’ALV en 2003. Bien que les ALV étaient auparavant connectés à un réseau, il n’était pas possible d’intervenir à partir d’un ordinateur central afin de remplacer un jeu ou de modifier ses paramètres. En l’an 2000, le gouvernement du Québec a autorisé le remplacement de ces appareils désuets pour les remplacer par de nouveaux modèles technologiquement plus avancés538. Après une période d’essai réalisée en 2002, les nouveaux ALV ont été largement distribués dès janvier 2003539. L’objectif premier du développement des casinos et de l’étatisation des AÉJ était d’endiguer une dépense au jeu qui se serait dirigée vers une économie souterraine, à notre avis le marché gris, à l’avis de Loto-Québec vers des milieux criminels. En 2003, nonobstant que le besoin d’un endiguement n’a jamais été clairement démontré, l’offre de jeu captait à peu près toute la dépense possible dans le domaine des jeux à espérance négative540 de gain (voir la Figure 88 à la page 234). Les ALV, tels qu’ils étaient, faisaient très bien le travail. Initialement541, le remplacement des ALV a été justifié par l’abandon prochain du support technique pouvant être apporté par les manufacturiers. De plus, l’ajout d’un contrôleur pouvait augmenter le contrôle des appareils à partir d’un ordinateur central. Un objectif de réduire l’incidence du jeu pathologique n’est mentionné que dans la lettre de présentation faite par le président de Loto-Québec. L’année suivante, on ne fait que mentionner que les nouveaux appareils sont dotés de différents mécanismes et 538 Voir aux pages 8 à 9 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs. 539 Voir à la page 15 dans : Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs. 540 Les jeux à espérance nulle de gain ne posent aucune menace de fuite économique, et ceux-ci ne sont jamais associés au jeu pathologique. 541 Voir à la page 27 dans : Loto-Québec. (2002). Rapport annuel 2001-2002 : Au-delà du jeu. Montréal, QC : auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 293 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 294 dispositifs favorisant le jeu responsable542. Puis, l’autre année après, les mêmes dispositifs existent pour prévenir et contrer le jeu excessif543. Ce ne sont pas que des expressions rhétoriques. En ce qui concerne le jeu pathologique, les objectifs ne sont pas clairement exprimés. Les nouveaux appareils n’étaient pas essentiels pour assumer le devoir de prémunir la population contre les problèmes de jeu. En effet, des mesures destinées à « accentuer l’effet dissuasif auprès des joueurs excessifs » avaient déjà commencé à être installées sur les anciens modèles d’ALV. La désactivation du bouton d’arrêt était possible ainsi que l’affichage d’une horloge et celui des crédits en dollars. La modification des messages, tel que « Jouez avec modération pour que le jeu demeure un jeu », était simple à réaliser, de même que la réduction de la vitesse de jeu. Il était aussi facile d’activer de manière logicielle la requête d’encaisser le solde et les modules destinés à requérir la durée de jeu désirée. Sous réserve de la quantité de mémoire disponible, il était possible d’y installer le module explicatif du hasard. En limitant le nombre de jeux à cinq, cette mémoire devenait disponible. Enfin, la capacité du accepteur de billets était déjà limitée à 100 dollars. La réduction à 60 dollars n’était qu’un détail. Vraisemblablement, les nouveaux ALV n’ont apporté que la capacité de désactiver les appareils en dehors des heures permises. 6.4.13 La création de la fondation Mise sur toi En 2001, le gouvernement a transféré au ministère de la Santé et des services sociaux la responsabilité de prémunir les citoyens contre les méfaits du jeu. En mars 2002, LotoQuébec a dupliqué cette responsabilité en créant « … la Fondation Mise sur toi afin de poursuivre ses efforts de prévention du jeu excessif et d’offrir à la population un environnement de jeu à la fois divertissant et sécuritaire. »544 L’imposition d’une taxe aux établissements de jeu, afin de financer des programmes de santé assumés par les gouvernements, n’a pas bonne réputation depuis le témoignage d’un gestionnaire de casino en Nouvelle-Zélande545. En effet, l’argent qui devait être consacrée en aide directe aux joueurs était plutôt dispersée dans des programmes de santé plus généraux. En conséquence, les joueurs à problème n’étaient pas traités et leurs frasques continuaient à ternir l’image du casino. La conclusion de ce témoignage suggère que, pour maintenir une image publique positive, l’établissement de jeu doit impérativement conserver son pouvoir d’intervenir directement auprès des joueurs qui 542 Voir à la page 15 dans : Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs. 543 Voir à la page 16 dans : Loto-Québec. (2004). Rapport annuel 2003-2004 : un équilibre à maintenir. Montréal, QC : auteurs. 544 Voir à la page 35 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs. 545 Pitcher, A. (1999). Responsible promotion of gaming and dealing with problem gamblers. Journal of gambling behavior, 15(2), 149-159. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 294 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 295 pourraient nuire à l’image de l’établissement. Il s’agit d’abord et avant tout de ne pas perdre le contrôle de l’image. Certes, la duplication des initiatives de santé peut aider les joueurs. Toutefois, cet apport additionnel n’est vraisemblablement motivé que par la volonté de contrôler dénonciation médiatique. Les aspects des problèmes de santé publique non traités par les médias pourraient ne pas bénéficier de cette mesure. 6.4.14 L’étude de prévalence du jeu de 2002 Voir à la section 2.6 - La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu à la page 51. 6.5 Conséquences additionnelles posées par les salons de jeux 6.5.1 Inclusion des ALV dans des centres plus généraux de divertissement L’insertion des ALV dans des centres plus généraux de divertissement pose le risque considérable d’une augmentation des problèmes de jeu pathologique chez les femmes. En effet, les femmes sont moins enclines que les hommes à fréquenter des bars. Les salons de jeux leur offriront un environnement plus convivial. En établissant un profil des femmes, joueuses pathologiques, Karen Trevorrow et Susan Moore546 ont constaté que ces femmes ont un attrait particulier pour les AÉJ, qu’elles ont davantage, que les autres femmes, de la famille ou des amis pour qui le jeu est une norme sociale, et que, sans déficit d’habileté psychosociale, elles éprouvent un sentiment d’aliénation sociale, soit qu’elles ne se sentent pas vraiment comprises par les autres. Les auteures anticipent que les sites de jeu qui proposent un milieu où le jeu est présenté comme une activité de divertissement entre amis peuvent inciter les femmes à risque de venir y jouer socialement. Toutefois, lorsque les problèmes de jeu commenceront à survenir, ces femmes ne seront pas disposées à échanger avec leurs amis des difficultés de contrôle qu’elles commencent à éprouver. Dès lors, cette situation pourrait être plus pathogène pour les femmes. De plus, le jeu risque d’absorber les dépenses que les familles consacrent habituellement à leur divertissement. L’étude des impacts des casinos flottants au Missouri n’a permis d’observer qu’un seul effet de substitution547. En général, il n’y a pas eu de déplacement d’argent des autres activités économiques vers les casinos flottants, sauf pour une exception : l’argent consacré aux autres activités de loisir. Si un phénomène semblable se produit pour les salons de jeux, il y a un risque que les autres 546 Voir aux pages 281-282 dans : Trevorrow, K., & Moore, S. (1998). The association between loneliness, social isolation and women's electronic gaming machine gambling. Journal of gambling behavior, 14(3), 263-284. 547 Siegel, D., & Anders, G. (1999). Public policy and the displacement effects of casinos: a case study of riverboat gambling in Missouri. Journal of gambling behavior, 15(2), 105-121. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 295 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 296 activités de divertissement attirent aux salons de jeux des personnes qui ne sont pas spontanément intéressées par le jeu, et que la proximité des ALV capte le budget de loisir de ces personnes. 6.5.2 Retrait de 16% des ALV du contrôle de la RACJ Les AÉJ de jeu exploités directement par Loto-Québec ne sont pas soumis au contrôle de la RACJ. C’est le cas depuis 1993 pour les MAS dans les casinos. Lors de l’inauguration des salons de jeux, 2 200 des 13 570 ALV passeront de la SLVQ à la SSJQ. Cette dernière n’est pas contrainte par les lois et règlements contraignant la SLVQ. Dès lors, 16% des ALV 6.5.3 Visibilité réduite des ALV Bien que les jeunes ne puissent pas jouer sur les ALV, ceux-ci sont aisément témoins d’adultes qui y jouent et qui affirment y réaliser parfois des gains importants. On peut comprendre qu’il s’agit d’un puissant moyen d’incubation du désir de jouer. Dans la mesure où les salons de jeux seront aussi d’importants centres de divertissement pour la famille, la grande visibilité des ALV, ou autres occasions de jeu d’argent, à l’intérieur des établissements risque d’entraîner une stimulation accrue de l’incubation du désir de jouer. Les jeunes seront mieux protégés jusqu’à l’âge de 18 ans. Toutefois, cette protection temporaire pourrait se transformer en une protection diminuée chez les jeunes adultes. Il est impératif d’étudier comment les mesures de protection des personnes mineures agissent lorsque l’interdiction est subitement levée chez les très jeunes adultes. 6.5.4 Contrôle rigoureux de l’âge pour toute personne paraissant moins de 30 ans Cette mesure est inspirée du programme « Project 21 » du casinotier Harrah’s. Ce programme a été développé aux États-Unis au début des années 80. 6.6 Les mesures non considérées par Loto-Québec Les mesures proposées par Loto-Québec s’inscrivent dans la perspective des gouvernements possédant un pouvoir limité de contraindre des établissements de jeu gérés par l’entreprise privée. Or, cette contrainte n’existe pas au Canada. 6.6.1 Abandon du concept de jeu responsable pour le concept de jeu sécuritaire Le concept de jeu responsable mise essentiellement sur la capacité des joueurs à reconnaître un problème de jeu à partir de critères indiquant qu’un processus pathogène est déjà installé. À cet égard, il importe d’évaluer préalablement la capacité des joueurs excessifs à admettre avoir un problème de jeu. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 296 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 297 6.6.1.1 Propension des joueurs excessifs à admettre un problème de jeu Le Tableau 50 répertorie l’endossement de l’item du SOGS548 relatif à la question « Pensez-vous avoir un problème de jeu? » par les catégories de joueurs, et le Tableau 51 procure une information équivalente pour les études, plus récentes, ayant utilisé l’ICJE549. Les données du SOGS ne permettent pas d’entrevoir que cette stratégie puisse intervenir tôt dans le problème de jeu. Les joueurs à risque estiment peu avoir des problèmes de jeu. De plus, l’aveu d’un problème de jeu varie entre 32% et 71% chez les joueurs pathologiques, pour une moyenne de 55%. Tableau 50 Pourcentage des joueurs qui considèrent avoir un problème de jeu en fonction des catégories de joueurs évaluées par le South Oaks gambling screen Catégories du SOGS Étude Sans problème À risque Pathologique Québec, 1996 0% 4% 57% Québec, 1997 3% 12% 48% Australie, 1999 3% 12% 68% Australie - SA, 2001 32% Australie - ACT, 2001 2% 12% 71% 548 (a) Québec, 1996 - Données communiquées par Jean Leblond à partir de la banque de données de la version actualisée de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique réalisée au Québec en 1996. (b) Québec, 1997 - Voir à la page 74 dans : Ladouceur, R., Arsenault, C., Dubé, D., Freeston, M. H., & Jacques, C. (1997). Psychological characteristics of volunteers in studies on gambling. Journal of gambling behavior, 13(1), 69-84. (c) Australie, 1999 - Voir à la page 6.25 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (d) Taylor, A. et al (2001 may). Gambling patterns of South Australians and associated health indicators. South Australia: South Australian department of human services, Centre for population studies in epidemiology. (e) Australie, 2001 - Voir à la page 80 dans : Tremayne, K., Masterman-Smith,H., & McMillen, J. (2001). Survey of the nature and extent of gambling and problem gambling in the ACT (Australian Capital Territory). Sydney, Australia : Australian Institute for Gambling Research. 549 (a) Nouvelle-Écosse, 2003 - Voir à la page 3-5 dans : Focal research. (2004, june). 2003 Nova Scotia gambling prevalence study: final report. Halifax, NS: Nova Scotia office of health promotion. (b) Ontario, 2001 - Voir à la page 48 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001). Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Ottawa, ON: Canadian Centre on Substance Abuse & Responsible Gambling Council. (c) Ontario, 2002 - Voir à la page 16 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2003, octobre). Psychological and social factors associated with problem gambling in Ontario: a one-year follow-up study. Ottawa, ON: Canadian Centre on Substance Abuse & Responsible Gambling Council. (d) Saskatchewan, 2001 - Voir à la page 59 dans : Wynne, H. J. (2002 january). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Ottawa, Ontario: Canadian centre on substance abuse. (e) Alberta, 2001 - Voir à la page 48 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. (f) Queensland, 2003-2004 - Voir à la page 39 dans : Queensland office of gaming regulation, & Office of economic and statistical research. (2004). Queensland household gambling survey 2003-04. Brisbane, Australia: auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 297 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 298 Les résultats obtenus avec l’ICJE font entrevoir une efficacité médiocre chez les joueurs qui présentent des risques modérés. Seuls les joueurs présentant des risques sévères de dommages admettent spontanément avoir un problème de jeu. Tableau 51 Pourcentage des joueurs qui considèrent avoir un problème de jeu en fonction des catégories de joueurs évaluées par l’Indice canadien de jeu excessif Étude Nouvelle-Écosse, 2003 Ontario, 2001 Ontario, 2002 Saskatchewan, 2001 Alberta, 2001 Queensland, 2003-2004 Sans problème 0% 0% 0% 0% 0% Catégories de l'ICJE Faible risque Risque modéré Risque sévère 3% 55% 6% 30% 85% 8% 34% 83% 4% 42% 91% 6% 34% 91% 5% 46% 95% 6.6.2 L’aire de jeu doit mettre les joueurs en garde contre les dommages potentiels associés à l’utilisation des appareils de jeu En Australie, l’industrie du jeu admet que des personnes subissent des dommages lors de l’utilisation des AÉJ, et elle s’admet incapable de déceler, a priori, qui est un joueur excessif ou qui est à risque de le devenir550. Un tel constat s’applique à l’ensemble de l’industrie mondiale du jeu. Dans un tel cas, l’aire de jeu, l’appareil en particulier, doit préalablement signaler aux utilisateurs les dangers auxquels ces personnes s’exposent ainsi que la capacité insuffisante de l’exploitant à les prévenir. 6.6.3 Assurer que les joueurs sont en mesure de décider rationnellement de jouer ou pas Les gouvernements, états-croupiers, investissent considérablement dans l’intégrité des jeux afin de protéger les consommateurs. Pourtant, comme l’a signalé la Productivity commission, l’objectif de protection des consommateurs exige en premier lieu que les gouvernements s’assurent que les joueurs possèdent toutes les informations nécessaires à la décision de jouer ou pas. Or, il s’agit d’un aspect particulièrement négligé par les gouvernements551. 550 Voir à la page iv dans : South Australian centre for economic studies. (2003, February). Evaluation of self-exclusion programs and harm minimisation measures. Report A. Adelaide, South Australia : Adelaide & Flinders Universities. 551 Voir à la page 34 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 298 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 299 Les joueurs doivent d’abord connaître préalablement la probabilité d’occurrence des lots552, ainsi que leur valeur. Actuellement, ils n’en connaissent que leur valeur. Pour connaître la probabilité des lots, il est nécessaire de jouer des millions de parties, et donc de les payer. Ce n’est pas une connaissance préalable à la décision de jouer. Les joueurs doivent aussi connaître les risques de développer une dépendance envers les jeux offerts sur les AÉJ. Les statistiques de risque ne doivent pas être dilués parmi l’ensemble de la population. Ces statistiques doivent faire directement référence aux seuls joueurs sur AÉJ, en particulier aux joueurs qui adoptent une fréquence régulière de jeu. Les joueurs doivent connaître les processus par lesquels une dépendance pathologique peut s’instaurer. La conscience d’un engagement vers un processus pathogène requiert que les joueurs soient appuyés dans leur détection des événements qui sont des déclencheurs de ces processus. La prise de conscience ne doit pas se limiter à la constatation que le processus est déjà en place et qu’il produit des dommages. Les joueurs doivent être informés de l’ampleur des dommages auxquels ils s’exposent. 6.6.4 Une zone d’exclusion des ALV Dans la mesure où Loto-Québec propose de maintenir des ALV dans les bars afin de contrer un marché gris ou un marché clandestin, un tel besoin ne se justifie plus aux alentours des salons de jeux. 6.6.5 Accès maximalement limité aux guichets automatiques bancaires (GAB) Ne pas placer de GAB dans les aires de jeu aura un impact négligeable si un GAB se trouve à quelques mètres seulement des portes d’entrée ou de sortie des aires de jeu. Dans une perspective de santé publique, aucun GAB ne devrait se situer sur le territoire des salons de jeux. Advenant que la présence des GAB ne puissent pas être évitée, ceux-ci devront être modifiés et mieux encadrés car ces guichets ne devraient pouvoir servir qu’à un dépannage occasionnel. Comme pour le jeu sur Internet, les transactions avec cartes de crédit devraient être interdites sur tout GAB installé sur le territoire des salons de jeux. Il n’est pas davantage utile que ces GAB autorisent les virements. Dans les lieux communs, les GAB ne devraient se situer qu’en un seul endroit bien visible du service de sécurité. Sinon, ceux-ci pourraient être disposés à l’intérieur553 des aires consacrées aux autres activités de divertissement. 552 Voir à la page 40 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. 553 C’est-à-dire dans un secteur où on a accès qu’après avoir acquitté un droit d’entrée. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 299 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 300 Il doit être clairement pris en considération que les GAB constituent un danger fréquent de dommages majeurs pour les joueurs pathologiques comparé aux inconvénients bénins et peu fréquents qui pourraient être causés aux joueurs occasionnels s’il n’y a pas de GAB sur le territoire des salons de jeux554. 6.6.6 La disparition complète des ALV dans les bars Sans équivoque, les joueurs sont trop laissés sans ressources dans les bars. Il est illusoire de croire que les employés, malgré la formation qui leur est prodiguée, puissent réellement intervenir autrement qu’épisodiquement pour aider les personnes qui éprouvent des problèmes de jeu. Une portion importante des revenus tirés des ALV proviennent des joueurs excessifs. Lutter contre le jeu pathologique entraîne une diminution importante des revenus pour les détenteurs de licence. Dans la mesure où ces revenus deviennent essentiels pour la survie de l’établissement, il est douteux que les intérêts des joueurs pathologiques seront pris en considération avant ceux des employés et des propriétaires. Parallèlement aux salons de jeux, Loto-Québec insiste sur le maintien d’un important parc d’ALV dans les bars du Québec afin de contrer l’émergence d’appareils illégaux qui alimenteraient le crime organisé. Ceci présume que les propriétaires de bars n’ont pas déjà des liens avec le crime organisé. Ce postulat est peu crédible. En l’occurrence, la commission Prévost555 qui a posé les fondements de la socialisation du jeu au Québec, et donc de la création de Loto-Québec, a posé une seule limite à la légalisation du jeu : l’état doit assumer complètement la gestion des jeux en évitant expressément l’attribution de licences d’exploitation à des intérêts privés. Sinon, grâce aux revenus illicites tirés par ailleurs, les membres de groupes organisés pourront plus facilement organiser des commerces satisfaisant aux critères d’admissibilité. 6.6.7 La réduction du taux de remise Le taux de remise est le paramètre le plus déterminant des caractéristiques potentiellement pathogène des ALV. Sa diminution entraîne presque obligatoirement une diminution de la possibilité de développer une résistance à l’extinction, ainsi qu’une raréfaction des lots importants. Il s’ensuit une probabilité moins grande de vivre l’expérience d’un gain significatif. Une telle intervention permet d’intervenir avant la concrétisation des dommages. 554 Voir aux pages 44 et 45 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. 555 Voir aux pages 90 et 104 dans : Commission d’enquête sur l’administration de la justice en matière criminelle et pénale au Québec. (1967). Les activités voulues par le public. Exemple : le jeu, dans La société face au crime. Volume III, tome 3. (pages 80-108). Québec, QC : auteurs. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 300 Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 301 6.6.8 L’augmentation de la taille des lots importants Cela semble paradoxal, mais l’augmentation du gros lot de 500 à 5000 dollars pourrait être bénéfique aux joueurs si le taux de remise n’est pas augmenté. En effet, si l’espérance de gain doit davantage être réservée pour la constitution d’un gros magot, il reste peu de ressources pour offrir des lots intermédiaires. Il en résulte un taux de récompense diminué, et conséquemment une probabilité moindre de vivre l’expérience d’un gain significatif. Dans la mesure où, pour ne pas favoriser l’offre de jeu concurrente, il n’est pas possible de diminuer le taux de remise, l’augmentation de la taille du gros lot permet d’arriver aux mêmes fins tout en motivant davantage les joueurs occasionnels. 6.6.9 La réduction du jeu multi-lignes Les mises plus élevées des joueurs pathologiques sur ALV découlent surtout du besoin plus grand de placer une mise sur chaque ligne avant d’initialiser le set556. 6.6.10 Des mises en garde efficaces, vérifiées expérimentalement Il existe encore des questions non résolus concernant l’étiologie du jeu pathologique. Les mesures préventives et les traitements sont encore imparfaits. Compte tenu que les établissements de jeu sont encore loin de pouvoir offrir un environnement sécuritaire, où les dangers sont contrôlés, il est nécessaire d’en informer les joueurs. 556 Voir à la page 3-51 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of Health. Problem gambling services. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 301 Lexique - 302 Lexique 1. Aléatoire Du latin alea signifiant hasard, chance, ou destin, un événement aléatoire est simplement un événement déterminé par le hasard. 2. Appareil de jeu Toute console de jeu, fonctionnant de manière automatique, pouvant accepter le montant d’une mise, effectuer un tirage et, s’il y a lieu, remettre un lot. Ces appareils peuvent être entièrement mécaniques, ou inclure des composantes électriques, électroniques ou vidéo. Au début du siècle, les appareils de jeu ne pouvaient pas remettre automatiquement les lots. 3. Appareil électronique de jeu (AÉJ) Appareil de jeu, dont le fonctionnement est essentiellement informatisé, et dont le tirage s’effectue par un générateur de nombres pseudo-aléatoires (GNPA). L’interface de l’AÉJ est composé d’un écran électronique, parfois tactile, et d’un clavier composé de seulement quelques boutons. En différents endroits, des expressions concernant des appareils particuliers ont été généralisées, à tort, à l’ensemble des AÉJ. Il s’agit des expressions « slot machine » aux États-Unis, « pokies » en Australie, et de « Fruit machines » au Royaume-Uni. Au Québec, on entend encore parfois l’expression « vidéopoker » pour désigner les appareils de loterie vidéo dans les bars ou les machines à sous au casino. 4. Appareil de poker vidéo (APV) Appareil électronique de jeu n’offrant que des jeux de cartes, essentiellement le poker et le blackjack. Voir aussi Appareil électronique de jeu (AÉJ). 5. Appareil de loterie vidéo (ALV) Appareil électronique de jeu offrant plusieurs types de jeu qui ne sont pas de même nature, notamment des jeux de cartes et des jeux de lignes. On y retrouve aussi souvent des jeux de keno ou de bingo. L’ALV est en soi un mini-casino. Voir aussi Appareil électronique de jeu (AÉJ). Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 302 Lexique - 303 6. Budget de jeu Montant d’argent inséré dans l’appareil avant de commencer à jouer plus les autres sommes investies par la suite. Le rapport entre le budget de jeu et le capital de jeu indique l’attrait qu’exerce l’appareil de jeu. Un appareil maximalement attrayant persuade le joueur de tout insérer le capital de jeu. Le rapport entre l’encaisse et le budget de jeu indique la satisfaction du joueur. En principe, le joueur sain investit un budget de jeu dans l’attente d’obtenir un plaisir à jouer. Un jeu peu satisfaisant conduit à une encaisse rapide avant l’épuisement du budget. Dans le cas de joueur excessif, ce rapport est plutôt une mesure de la force de la dépendance. 7. Capital de jeu Le capital de jeu correspond au montant d’argent que la personne a apporté pour jouer. Elle ne le misera pas nécessairement au complet. Dans la mesure où la personne partait avec l’intention de risquer tout ce montant, le capital de jeu procure une bonne idée du potentiel de revenu d’une activité de jeu pour l’établissement de jeu. 8. Comorbidité Il s’agit de la présence simultanée deux ou plusieurs pathologies. Il est possible qu’une personne, déjà atteinte d’une pathologie comme la schizophrénie, s’expose au jeu et en devienne dépendante. Il est aussi possible qu’une personne, qui a une importante dette de jeu, comme à boire beaucoup d’alcool jusqu’à en devenir dépendante. La présence de comorbidité ne révèle pas nécessairement que des pathologies ont des causes communes. 9. Croyance erronée quant au hasard Il en existe plusieurs. Elles ont cependant toutes la caractéristique commune de présumer qu’il existe des liens de causalité entre des événements qui n’en n’ont pas. Tirer 20 fois pile, au jeu de pile ou face, avec une pièce parfaitement équilibré n’est pas un prétexte pour croire qu’il y a davantage de chances que, la prochaine fois, ce sera pile (erreur de récence positive) ou que ce sera face (erreur de récence négative). Le hasard n’a pas de mémoire. Il n’y a nulle part un accumulateur qui permettrait de rectifier un historique déséquilibré des événements antérieurs. Jamais deux sans trois, la loi de la moyenne sont autant d’expressions qui expriment des erreurs de récence fondées sur une croyance erronée quant au hasard. Une autre croyance erronée fréquemment observée est l’attribution d’une nature cyclique au hasard. Après une longue série de perte, une vague de succès est inévitable. Les croyances erronées ne sont pas la cause du jeu pathologique. Elles en sont toutefois la condition sine qua none. Pour brûler du carburant, un moteur a besoin d’un comburant, dans ce cas de l’oxygène. C’est le carburant qui fait avancer le véhicule, mais sans comburant le moteur s’arrête. L’illusion de contrôle est le carburant du jeu Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 303 Lexique - 304 pathologique. Les croyances erronées en sont le comburant. Quand le traitement cognitif du jeu pathologique s’attarde à corriger les croyances erronées, il agit en privant le feu d’oxygène. Les croyances erronées quant au hasard sont communément répandues parmi la population. Il ne s’agit pas d’une condition morbide. Ces croyances sont parfaitement adaptées pour un mode réel. Le hasard étant une situation artificielle, l’esprit humain est mal préparé à s’y confronter. 10. Dépendance pathologique à l’égard du jeu Incapacité de cesser de jouer alors que le comportement de jeu conduit à des dommages non désirés. La dépendance pathologique est typiquement identifiée par des critères diagnostiques, tels que ceux du DSM-IV, et dépistée par des outils psychométriques, tels que notamment le SOGS et l’ICJE. 11. Dépense au jeu La dépense réelle faite par les joueurs est la somme des mises moins l’argent des lots obtenus à l’occasion de gains. Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense au jeu, par l’ensemble de la population, au casino ou sur les loteries vidéo est indiquée par le bénéfice brut. Pour les bingo et loteries conventionnelles, il faut soustraire du bénéfice brut les lots attribués aux joueurs. 12. DSM-III Critères diagnostiques du jeu pathologique proposés en 1980 par l’American psychiatric association. Ces critères ont été remplacés en 1994 par ceux du DSM-IV. 13. DSM-IV Critères diagnostiques du jeu pathologique. Quiconque endosse cinq items sur 10 est considéré comme un joueur pathologique. Proposés par l’American psychiatric association, ces critères ont été adoptés par l’ensemble des spécialistes du jeu pathologique. 14. Espérance de gain Proportion de l’argent misé remis au joueur. Les jeux des établissements de jeux sont typiquement à espérance négative de gain car ceux-ci remettent moins d’argent aux joueurs que ceux-ci n’en ont misé. L’établissement conserve alors systématiquement une cote sur les paris. Les joueurs s’appauvrissent d’autant plus qu’ils jouent. Les jeux à espérance nulle de gain ne font que redistribuer tout l’argent misé entre les joueurs. Les cartes entre amis en sont le meilleur exemple. À long terme, le hasard a distribué également les chances de gain. Seul un manque d’habileté peut rendre un Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 304 Lexique - 305 joueur déficitaire. À compétence égale, les joueurs peuvent jouer éternellement sans s’appauvrir. Les jeux à espérance positive de gain, tel que le blackjack utilisant un seul sabot de 52 cartes, permettent à la personne jouant parfaitement de s’enrichir. Les établissements n’offrent plus ces jeux. Voir Taux de remise. 15. Gain significatif Observation d’une séquence de combinaisons gagnantes qui convainc le joueur que le seul hasard ne peut pas expliquer un tel succès. Il n’est pas nécessaire que le joueur ait obtenu l’argent car les combinaisons observées peuvent survenir sur des lignes non misées, ou même sur un appareil voisin. Le gain significatif n’est pas la conséquence d’une récompense. Il s’agit d’un élément cognitif qui réorganise des croyances. Lorsque le gain significatif conduit au développement d’une illusion de contrôle, et que la personne continue à jouer, le joueur s’engage dans un processus qui le rend pathologiquement dépendant du jeu. Le gain significatif n’implique pas nécessairement l’observation de lots donnant droit à des montants importants. Il peut s’agir de sommes inférieures à 100 dollars. Tout dépend de la condition financière des joueurs. Voir Gros gain. 16. Gros gain Gain équivalant à un salaire de plusieurs mois. Cette définition découle des témoignages de joueurs de casino, de loterie ou aux courses où les gros lots se calculent généralement en plusieurs milliers de dollars. Avant l’avènement des appareils électroniques de jeu, le gros gain était perçu comme un facteur déclencheur probable du jeu pathologique. Le gros lot modeste des appareils de loterie vidéo a forcé une redéfinition de ce gain. Dans la perspective des modèles cognitifs, le gain significatif apparaît comme un concept mieux défini. Voir Gain significatif. 17. Heuristique (Voir Processus heuristique) 18. Iatrogène Littéralement, un effet iatrogène est un effet causé par un traitement. En science clinique, ce terme désigne surtout une conséquence indésirable contraire à l’objectif du traitement. Ce qui est supposé guérir, rend malade. L’effet de la thalidomide chez les femmes enceintes est l’exemple le plus célèbre. La thalidomide était prescrite pour soulager les nausées matinales des futures mères. Ce médicament était efficace à cet égard. Il a cependant entraîné de nombreuses malformations d’embryons. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 305 Lexique - 306 19. ICJE (Indice canadien de jeu excessif) Questionnaire de dépistage des risques de développer des problèmes de jeu. Tableau 52 Catégories de l’Indice canadien de jeu excessif Score Ne joue pas Version originale Version 2 Non joueur Non joueur 0 Joueur sans problème Joueur sans problème 1 à 2,5 Joueur à faible risque Joueur à faible risque 3 à 7,5 Joueur à risque modéré Joueur à risque modéré 8 à 27 Joueur avec problème Joueur à risque sévère 20. Illusion de contrôle C’est la certitude sans fondement selon quoi un phénomène incontrôlable pourrait être contrôlé. L’illusion de contrôle a deux volets : (a) la croyance qu’il est possible de prédire un événement, et (b) la croyance qu’il est possible de provoquer un événement. 21. Îlotage Branchement en réseau de plusieurs appareils électroniques de jeu dans le but de proposer un gros lot progressif pouvant atteindre un montant extraordinaire de plusieurs dizaines ou centaines de milliers de dollars, voire plus de 1 million. À chaque partie, une portion infime du taux de remise est réservée pour un gros lot qui est commun à tous les appareils de l’îlot. Lorsque la combinaison payante, rarissime, survient sur n’importe quel appareil de l’îlot, le joueur gagne le gros lot progressif. 22. Incidence du jeu excessif Nombre des personnes, dans une population, qui ont développé de nouveaux problèmes de jeu au cours d’une période donnée. Typiquement, l’incidence se mesure annuellement. 23. Incidence du jeu pathologique Nombre des personnes, dans une population, qui ont développé une première dépendance pathologique envers le jeu au cours d’une période donnée. Typiquement, l’incidence se mesure annuellement. 24. Jeu En français, cette expression englobe trois termes anglais : wagering, gambling, et gaming. Le premier englobe tous les paris faits à des courses d’animaux ou des événements sportifs. Le second regroupe tous les paris d’argent faits aux autres Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 306 Lexique - 307 activités de jeu. Le terme gaming signifie, en principe, l’action de s’amuser à des jeux électroniques, de type Nintendo, où on doit faire preuve d’adresse pour vaincre un adversaire. Par euphémisme, certaines organisations tentent de substituer le terme gaming au terme gambling. 25. Jeu charitable Tirage organisé par un organisme de charité. 26. Jeu de cartes Jeu comprenant un sabot de 52 cartes, ou réunissant plusieurs sabots. Classiquement, il s’agit du jeu de draw poker où l’on offre une main de cinq cartes, ainsi que la possibilité au joueur d’en retirer aucune, quelques-unes ou toutes avant d’effectuer un dernier tirage complémentaire. Le jeu de blackjack est aussi généralement offert. Dans tous les cas, les joueurs jouent contre la machine. Il n’y a pas d’autres adversaires. Les jeux sur Internet vont modifier cette règle. 27. Jeu de keno Sans que cela ne soit apparent, le jeu de keno est une version complexe des loteries numériques de type 6/49 ou super 7. Il s’agit de choisir une combinaison de nombres devant faire partie des résultats d’un tirage de 20 nombres choisis parmi 80. Les lots varient en importance en fonction de la taille de la combinaison initialement choisie par le joueur. 28. Jeu de lignes Traditionnellement, le jeu de lignes est typique des machines à sous. On le retrouve aussi sur les appareils de loterie vidéo. Le jeu de lignes est construit à partir de rouleaux. Il ne s’agit pas d’un jeu de carte. Sur les machines à sous, l’arrangement ancien est de trois rouleaux formant une seule ligne. Neuf rouleaux disposés sur trois lignes forment un jeu octoligne car on y offre généralement de pouvoir miser sur trois lignes, trois colonnes ou deux diagonales. Quinze rouleaux disposés sur trois lignes forment une autre configuration populaire. On peut alors miser sur chacune des trois lignes ou sur une combinaison formant un V ou un V inversé. On le considère alors comme un jeu à cinq lignes. De nombreuses versions existent, incluant des lignes composées uniquement des rouleaux situés aux quatre coins de l’écran. Le concept de ligne signifie dorénavant un gabarit. Le jeu de ligne est un jeu de pur hasard où le joueur n’a aucun choix à faire sauf celui de choisir la configuration de ses mises parmi les lignes possibles. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 307 Lexique - 308 29. Jeu multicrédits Action de jouer en misant plus d’un crédit par ligne. Voir Partie. Voir Set. 30. Jeu multilignes Action de jouer en misant sur plus d’une ligne par set. Voir Partie. Voir Set. 31. Jeu responsable Le jeu responsable consiste à éviter les occasions de perte de contrôle sur le comportement de jeu. Il appartient au joueur excessif de prendre conscience de son problème de jeu, et, à son initiative, de s’imposer des mesures aptes à régler ou contenir ce problème. Les établissements de jeu peuvent offrir des services pour aider les joueurs excessifs à atteindre cet objectif. Toutefois, les établissements ne permettent pas que ces services entravent le moindrement les joueurs sans problèmes de jeu. 32. Jeu sécuritaire Le jeu sécuritaire consiste à délimiter les comportements de jeu à l’intérieur desquels il est constaté empiriquement que les joueurs ne vivent pas de problème de jeu. L’organisme de jeu doit indiquer dans quelles limites les joueurs peuvent s’amuser sans risque important de devenir dépendants du jeu. Par des mises en garde, l’environnement de jeu doit garantir que la personne est pleinement informée des risques, des moyens de s’en prémunir, des mesures curatives ou palliatives disponibles, des difficultés éventuelles à résoudre ou contenir les problèmes de jeu ainsi que de l’ampleur des dommages auxquelles elle s’expose lorsque les limites sont dépassées. Une stratégie de prévention axée sur le jeu sécuritaire propose des critères précis notamment en ce qui concerne les dépense, fréquence ou durée de jeu. 33. Joueur à risque Joueur qui manifeste des comportements habituellement associés à une dépendance pathologique à l’égard du jeu, mais qui ne manifeste pas d’importants problèmes de jeu. 34. Joueur avec problème de jeu Joueur qui dépense plus d’argent qu’il n’est capable d’en perdre. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 308 Lexique - 309 35. Joueur excessif Joueur qui perd de l’argent qu’il n’a pas les moyens de perdre. Il en résulte des problèmes de jeu. Le joueur excessif n’est pas obligatoirement un joueur pathologique. Lorsque le test de dépistage est le SOGS, les joueurs excessifs regroupent les joueurs à risque et les joueurs pathologiques. Lorsque le test de dépistage est l’ICJE, les joueurs excessifs regroupent les joueurs à risque modéré ou à risque sévère. Les critères du DSM-IV ne permettent pas d’identifier les joueurs excessifs. 36. Joueur occasionnel (Voir Joueur sans problème de jeu) 37. Joueur pathologique Joueur qui manifeste une dépendance pathologique à l’égard du jeu. 38. Joueur récréatif (Voir Joueur sans problème de jeu) 39. Joueur sans problème de jeu Joueur sain qui n’éprouve aucune perte de contrôle sur son comportement de jeu et dont la dépense au jeu ne cause aucun problème. 40. Lot (voir Remise) 41. Lot progressif (voir Îlotage) 42. Loterie Historiquement, la loterie est un tirage parmi un très grand nombre de billets, qui coûtent chacun un montant infime, et qui donnent la possibilité, rarissime, de gagner un gros lot fabuleux. Tous les billets ont la même probabilité de gain. Il importe peu que l’acheteur soit habile ou non. L’intervalle entre les tirages est habituellement de plusieurs jours. 43. Loterie vidéo Jeu disponible sur les appareils de loterie vidéo, incluant les jeux de cartes. À comparer à la véritable loterie, le gros lot y est de peu de valeur. Les tirages sont extrêmement rapides en à peine quelques secondes. 44. Machine à sous (MAS) Appareil de jeu offrant uniquement des jeux de lignes. Les vieux modèles étaient mécaniques ou électriques. Les nouveaux modèles sont électroniques. Loto-Québec utilise cette expression pour englober tous les appareils électroniques de jeu situés au casino, ce qui inclut des appareils de poker vidéo. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 309 Lexique - 310 Voir aussi Appareil électronique de jeu (AÉJ). 45. Montant inséré Total de l’argent qui est sorti de la poche du joueur pour être inséré dans l’appareil. Il n’est pas certain que la personne a misé tout cet argent. 46. Montant misé Total de l’argent misé, incluant les remises qui ont été rejouées. 47. Pari mutuel Montant d’argent parié à l’hippodrome aux courses de chevaux. 48. Paritel Système téléphonique permettant de parier à distance sur les courses de chevaux. 49. Partie Sur un appareil électronique de jeu, une partie équivaut à miser un crédit. Lorsque la personne mise sur plusieurs lignes, elle joue plusieurs parties simultanément. Lorsque la personne mise plus d’un crédit par ligne, elle joue plusieurs parties simultanément, mais toutes les parties de cette ligne ont le même résultat. Voir Set. 50. Pokies Expression populaire en Australie pour désigner l’ensemble des appareils de jeu. Cette expression n’est donc pas limitée aux seuls appareils de poker vidéo. En fait, elle désigne plus souvent des appareils offrant des jeux de lignes. 51. Prévalence du jeu Fréquence des habitudes de jeu parmi une population. 52. Prévalence du jeu excessif Fréquence des problèmes de jeu dans une population. 53. Prévalence du jeu pathologique Fréquence de la dépendance pathologique au jeu dans une population. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 310 Lexique - 311 54. Processus associatif Processus par lequel les organismes apprennent que des signaux sont associés à des conséquences (conditionnement classique) ou que des comportements sont associés à des récompenses (conditionnement opérant). Il n’est pas nécessaire que l’organisme ait porté attention à ce qu’il a perçu ou fait. 55. Processus automatique Processus par lequel les organismes établissent des liens entre des comportements et des objectifs. Les automatismes se développent sans la participation de l’attention par la simple répétition des gestes. 56. Processus heuristique Lorsque toutes les informations nécessaires à une prise de décision rationnelle ne sont pas disponibles, lorsque le temps manque pour compléter un raisonnement, ou lorsque des interférences nuisent à la concentration, la pensée humaine utilise, en remplacement, des informations ou des moyens de substitution qui sont imparfaits mais néanmoins généralement adaptés. Ce sont les heuristiques. Par exemple, en l’absence de données démographiques, il est relativement efficace d’identifier la plus populeuse entre deux villes en sélectionnant la plus connue. Cette règle est très imparfaite bien qu’elle réussisse mieux que le hasard. 57. Processus normatif La pensée normative consiste à décider rationnellement en tenant compte de tous les éléments pertinents, selon toutes les règles logiques appliquées avec compétence. Les processus normatifs exigent alors du temps, de la compétence et des informations exactes. 58. Remise Montant d’argent remis au joueur lorsque cette personne obtient une combinaison gagnante. 59. Salon de jeu Établissement regroupant exclusivement des appareils électroniques de jeu. Il s’agit de véritables casinos, mais sans table de jeu. 60. Salon de pari Établissement retransmettant par vidéo les courses de chevaux des hippodromes. 61. Set Ensemble des parties jouées lorsque la personne presse le bouton Jouer . Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 311 Lexique - 312 Voir Partie. 62. SOGS (South Oaks gambling screen) Questionnaire de dépistage d’une dépendance pathologique envers le jeu. Tableau 53 Catégories du South Oaks gambling screen Score Version originale 0 Version 2 Non joueur ou joueur récréatif Joueur occasionnel 1 ou 2 Joueur récréatif 3 ou 4 Joueur à risque Joueur à risque 5à9 Joueur pathologique probable Joueur pathologique 10 à 20 Version 3 Joueur occasionnel Joueur excessif Joueur pathologique extrême 63. Taux d’encaissement Le rapport entre le solde encaissé à la fin de la session de jeu et l’argent inséré dans l’appareil pour jouer constitue le taux d’encaissement. Les joueurs confondent souvent le taux d’encaissement et le taux de remise. Ces deux taux sont parfaitement indépendants. Un joueur qui insère 100 dollars, et qui perd deux mises de 1 dollar avant d’encaisser le solde a un taux d’encaissement de 98% et un taux de remise de 0%. 64. Taux d’incidence (voir Incidence du jeu excessif) 65. Taux de prévalence (voir Prévalence du jeu) 66. Taux de remise Proportion de l’argent des mises qui est redonnée aux joueurs sous forme de lots de différentes valeurs. Pour un taux de remise de 92%, le concepteur du jeu doit prévoir remettre aux joueurs 92 cents pour chaque dollar misé. Évidemment, le joueur n’obtient pas une remise à chaque partie. La remise peut s’accumuler pour former un gros lot, ou des lots intermédiaires, distribués seulement occasionnellement, sinon rarement. Parce que les lots importants ne sont pas souvent obtenus durant une session normale de jeu, le taux de remise effectivement obtenu est habituellement inférieur au taux de remise théorique. Cet écart est une source fréquente de plainte des joueurs qui calculent leurs résultats et qui estiment obtenir une remise d’environ 75% plutôt que 92%. En fait le taux de remise théorique n’est atteint qu’après des millions de parties. Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 312 Lexique - 313 67. Taux de remise effectif Argent des mises concrètement remis aux joueurs durant une session de jeu. Voir Taux de remise. 68. Taux de retour (Voir Taux de remise) Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 313 Lexique - 314 Tableau 54 Dictionnaire anglais-français Anglais Français No. Big win Gros gain 16 Card game Jeu de cartes 26 CPGI Canadian problem gambling index 17 Voir ICJE (Indice canadien de jeu excessif) Electronic gaming machine (EGM) Appareil électronique de jeu (AÉJ) 3 Expectancy Espérance de gain 14 Expenditure Dépense au jeu 11 Gaming Jeu vidéo d’adresse, tel que les jeux sur Nintendo. 24 (Voir aussi Jeu) Gaming machine Jeu 24 Gambling Jeu 24 Gross profit Gross revenue Bénéfice brut Handle Budget de jeu 6 Keno Jeu de keno 27 Line game Jeu de ligne 28 Linked jackpots Îlotage 21 Out-of-pocket money Budget de jeu 6 Outlay Montant misé 46 Pari-mutuel Pari mutuel 47 Payout ratio Taux de remise 66 PGSI Problem gambling severity index 19 Voir ICJE (Indice canadien de jeu excessif) Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 314 Lexique - 315 Tableau 54 Dictionnaire anglais-français Anglais Français No. Poker video Appareil de poker vidéo (APV) 4 Pokies Pokies 50 Problem gambler Problem gambling Joueur excessif 35 Random Aléatoire 1 Responsible gaming Jeu responsable 31 Return rate Taux de remise 66 Slot machine Machine à sous (MAS) 44 Turnover Montant misé 46 Video lottery terminal (VLT) Appareil de loterie vidéo (ALV) 5 Wagering Pari aux courses ou sur les événements sportifs 24 (Voir aussi Jeu) Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 315 Table des matières - 317 Table des matières Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de protection....................... 1 Présentation du document ................................................................................................ 3 Chapitre 1 La dépense au jeu de la population québécoise ........................................... 11 1.1 Définitions.............................................................................................................. 12 1.2 La dépense au jeu globale de la population adulte du Québec............................. 12 1.3 Considération du revenu familial brut .................................................................... 14 1.4 Considération de la dépense per capita, tous jeux confondus .............................. 16 1.5 L’offre de jeu de Loto-Québec ............................................................................... 17 1.5.1 La dépense dans les loteries .......................................................................... 19 1.5.2 La dépense au casino..................................................................................... 21 1.5.3 La dépense dans les appareils de loterie vidéo.............................................. 22 1.5.4 La dépense dans le bingo en réseau.............................................................. 26 1.5.5 La dépense dans les loteries multimédia........................................................ 27 1.6 Le bingo des organismes charitables .................................................................... 27 1.7 Les hippodromes, les salons de jeu et partiel ....................................................... 28 1.8 Les tirages des organismes communautaires ou commerciaux............................ 30 1.9 Les casinos des organismes charitables............................................................... 30 1.10 La spéculation boursière ..................................................................................... 31 1.11 Les activités des nations amérindiennes............................................................. 32 1.12 L’offre de jeu des juridictions étrangères............................................................. 32 1.13 Le jeu sur Internet................................................................................................ 33 1.14 Les activités illégales de jeu ................................................................................ 33 1.15 En conclusion ...................................................................................................... 34 Chapitre 2 La loterie vidéo : état de la situation au Canada ........................................... 35 2.1 Le nombre d’ALV au Canada ................................................................................ 36 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 317 Table des matières - 318 2.2 Les paramètres de jeu sur ALV ............................................................................. 38 2.3 Les revenus des ALV ............................................................................................ 38 2.4 La dépense par joueur........................................................................................... 39 2.5 Le comportement des joueurs ............................................................................... 41 2.5.1 Les taux de pénétration et d’adoption des ALV .............................................. 42 2.5.2 Le profil sociodémographique des joueurs sur ALV ....................................... 44 2.5.3 Les profils d’adoption de la fréquence de jeu sur ALV.................................... 46 2.6 La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu ....................... 51 2.7 Les problèmes de jeu ............................................................................................ 53 2.7.1 Les problèmes de jeu en fonction du taux de pénétration des ALV................ 53 2.7.2 L’attrait des ALV auprès des diverses catégories de joueurs ......................... 55 2.7.3 Le risque de développer une dépendance lorsque l’ALV est la première activité de jeu explorée par un nouveau joueur ....................................................... 56 2.7.4 Le risque de mortalité ..................................................................................... 57 2.8 Description du comportement des joueurs sur ALV .............................................. 58 Chapitre 3 La dangerosité des appareils électroniques de jeu ....................................... 65 3.1 Bref historique des appareils de jeu au Québec.................................................... 65 3.2 Les constats de la dangerosité des AÉJ ............................................................... 65 3.2.1 La dangerosité des gobe-sous........................................................................ 65 3.2.1.1 La distribution des GS .............................................................................. 66 3.2.1.2 La rentabilité des GS................................................................................ 66 3.2.1.3 Les problèmes de jeu durant les années 40 ............................................ 66 3.2.2 La dangerosité des appareils de poker vidéo ................................................. 67 3.2.2.1 La distribution des APV ............................................................................ 68 3.2.2.2 Le nombre d’APV ..................................................................................... 68 3.2.2.3 La rentabilité des APV.............................................................................. 69 3.2.2.4 L’intégrité des APV................................................................................... 71 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 318 Table des matières - 319 3.2.2.5 Les APV comme source de financement du crime organisé.................... 72 3.2.2.6 La prévalence du jeu pathologique sur APV ............................................ 73 3.2.2.7 La légalité des APV .................................................................................. 75 3.2.3 La dangerosité des machines à sous au casino ............................................. 76 3.2.3.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur MAS ........................ 77 3.2.3.2 Les MAS sont une activité de jeu attrayante pour les joueurs excessifs.. 78 3.2.3.3 La proportion des revenus tirés des MAS provenant des joueurs excessifs ............................................................................................................................. 79 3.2.3.4 La dépense au jeu mensuelle sur les MAS .............................................. 79 3.2.4 La dangerosité des appareils de loterie vidéo ................................................ 80 3.2.4.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur ALV ......................... 81 3.2.4.2 Les ALV sont une activité de jeu particulièrement attrayante pour les joueurs excessifs.................................................................................................. 82 3.2.4.3 La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs pathologiques ....................................................................................................... 85 3.2.4.4 La dépense au jeu mensuelle sur les ALV ............................................... 87 3.2.4.5 La capacité des ALV de créer une dépendance pathologique chez les joueurs novices ou jusque-là sains ...................................................................... 88 3.2.4.6 La capacité des joueurs à estimer leur dépense au jeu ........................... 89 3.2.5 La nature des demandes d’aide...................................................................... 90 3.2.6 Les désastres causés par des joueurs laissés sans aide ............................... 92 3.3 L’urgence pour des changements majeurs dans la manière d’exploiter les AÉJ .. 94 3.3.1 Les critères du jeu sécuritaire ......................................................................... 94 3.3.2 La dépense au jeu par unité et par site........................................................... 94 3.3.3 La dépense au jeu par joueur ......................................................................... 97 3.3.4 Les dommages ne dépendent pas prioritairement du nombre de sites ou du nombre d’ALV .......................................................................................................... 99 3.3.4.1 L’importance de limites établies en fonction du budget familial ............. 101 Chapitre 4 La dangerosité croisée des activités de jeu................................................. 102 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 319 Table des matières - 320 4.1 Le déclin des courses de chevaux au Québec.................................................... 103 4.1.1 Les données financières ............................................................................... 103 4.1.2 Les taux de participation révélés par les études de prévalence du jeu ........ 104 4.1.3 Assistance dans les hippodromes québécois ............................................... 105 4.2 Un rapprochement anticipé ................................................................................. 108 4.3 Le revenu plus élevé des ALV situés dans les hippodromes du Québec............ 108 4.4 Les juridictions qui combinent l’exploitation des AÉJ et des courses de chevaux ................................................................................................................................... 109 4.5 Impact des AÉJ sur le pari mutuel....................................................................... 111 4.5.1 La situation aux États-Unis ........................................................................... 111 4.5.1.1 La Virginie Occidentale .......................................................................... 112 4.5.1.2 L’Iowa ..................................................................................................... 112 4.5.1.3 L’état de New York ................................................................................. 113 4.5.1.4 La Louisiane ........................................................................................... 113 4.5.1.5 Le Delaware ........................................................................................... 115 4.5.2 La situation au Canada ................................................................................. 115 4.6 La dangerosité des activités de jeu ..................................................................... 117 4.6.1 Les données de l’étude de prévalence du jeu pathologique de 1996........... 118 4.6.2 Les appels à la ligne téléphonique Jeu : aide et référence........................... 119 4.6.3 Les données de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes – santé mentale et bien-être ............................................................................................... 120 4.6.3.1 Nos définitions........................................................................................ 120 4.6.3.2 Qualité de nos estimations ..................................................................... 121 4.6.3.3 Les taux de prévalence de base ............................................................ 122 4.6.3.4 La prévalence des problèmes de jeu sur ALV........................................ 123 4.6.3.5 La prévalence des problèmes de jeu aux courses de chevaux.............. 124 4.6.3.6 Où se retrouvent les joueurs excessifs? ................................................ 125 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 320 Table des matières - 321 4.6.4 Les données du CQEPTJ ............................................................................. 125 4.6.5 Un rappel de données anciennes ................................................................. 129 Chapitre 5 Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages......... 132 5.1 Les processus psychologiques conduisant à une dépendance pathologique envers les AÉJ ...................................................................................................................... 132 5.1.1 La modélisation des processus psychologiques impliqués dans la dépendance au jeu sur AÉJ........................................................................................................ 133 5.1.2 Une modélisation par stades du jeu pathologique ........................................ 135 5.2 Les paramètres des AÉJ ayant une incidence sur les processus impliqués dans la dépendance pathologique ......................................................................................... 138 Chapitre 6 Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ.......................................................................................................................... 161 6.1 L’irréalisme du concept de Jeu responsable ....................................................... 162 6.2 Les obstacles....................................................................................................... 166 6.2.1 L’absence quasi-totale de données empiriques valides concernant l’efficacité des mesures .......................................................................................................... 167 6.2.1.1 Les études spéculent sur des effets dont on ne connaît pas la taille ..... 167 6.2.1.2 La représentativité des échantillons est trop incertaine ......................... 168 6.2.1.3 Les problèmes de validité écologique des études réalisées en laboratoire ........................................................................................................................... 168 6.2.1.4 Il faut pouvoir être capable d’observer le phénomène à prévenir ou à contrer ................................................................................................................ 169 6.2.1.5 L’utilisation inappropriée des groupes de discussion (focus groups) ..... 169 6.2.1.6 La communication occulte des résultats de recherche dans des publications inaccessibles .................................................................................. 170 6.2.2 L’accès interdit aux paramètres des AÉJ ainsi qu’aux données enregistrées ...............................................................................................................................170 6.2.2.1 Les paramètres des jeux sur AÉJ .......................................................... 170 6.2.2.2 Les statistiques compilées automatiquement par les AÉJ ..................... 172 6.2.3 L’absence d’analyse cognitive détaillée des conditions de vie des joueurs.. 173 6.2.4 L’adoption de mesures copiées du savoir-faire de d’autres organisations ... 173 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 321 Table des matières - 322 6.2.5 L’absence de suivi des mesures implantées ................................................ 175 6.2.6 L’exigence de ne considérer que des mesures qui n’ont aucune incidence sur le comportement des joueurs sans problème de jeu ............................................. 176 6.2.7 La restriction à des mesures qui n’interviennent pas directement dans le processus pathogène qui conduit aux dommages................................................. 177 6.3 Aperçu des mesures implantées dans d’autres juridictions................................. 177 6.3.1 Les mesures développées aux États-Unis.................................................... 178 6.3.1.1 L’échec initial de la distribution proximale .............................................. 178 6.3.1.2 Les mesures développées au Nevada ................................................... 178 6.3.1.3 Les mesures développées au New Jersey............................................. 180 6.3.1.4 L’éclatement du principe de concentration............................................. 180 6.3.1.5 Les mesures initiales des premiers états américains qui ont implantés des ALV..................................................................................................................... 182 6.3.1.6 Les mesures des appareils TouchPlay en Iowa..................................... 184 6.3.1.7 Les mesures associées au savoir-faire des compagnies privés ............ 185 6.3.1.8 Les initiatives pionnières du casinotier Harrah’s entertainment ............. 186 6.3.1.9 Les recommandations de la National gambling impact study commission (NGISC) aux États-Unis en 1999 ....................................................................... 187 6.3.2 Les mesures développées au Canada ......................................................... 195 6.3.2.1 Une étude pionnière ............................................................................... 195 6.3.2.2 Les mesures de jeu responsable implantées en Nouvelle-Écosse ........ 196 6.3.2.2.1 Étude A – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-1).. 198 6.3.2.2.2 L’étude B – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-2)207 6.3.2.2.3 Conclusion des deux premières études........................................... 207 6.3.2.2.4 L’étude C – Le programme d’autoexclusion pour les joueurs sur ALV ........................................................................................................................ 207 6.3.2.2.5 L’étude D – La carte-client............................................................... 208 6.3.2.2.6 Conclusion des études C et D ......................................................... 209 6.3.2.2.7 L’étude E – Fermeture des ALV à minuit......................................... 209 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 322 Table des matières - 323 6.3.2.2.8 L’étude F – Désactivation du bouton d’arrêt et ralentissement du jeu (ALV-3) ........................................................................................................... 210 6.3.2.2.9 Conclusion des études E et F.......................................................... 210 6.3.2.3 Les mesures de jeu responsable implantées en Alberta........................ 210 6.3.2.4 Les mesures évaluées au Québec......................................................... 211 6.3.2.4.1 Étude A – Brochure d’information.................................................... 213 6.3.2.4.2 Étude B – Le programme d’autoexclusion du casino de Montréal .. 214 6.3.2.4.3 Étude C – Le mode d’arrêt des rouleaux ......................................... 214 6.3.2.4.4 Étude D – La récompense monétaire .............................................. 215 6.3.2.4.5 Étude E – Des messages d’information........................................... 215 6.3.2.4.6 Étude F – Le quasi-succès .............................................................. 215 6.3.2.4.7 Étude G – La sensibilisation des détaillants .................................... 216 6.3.2.4.8 Étude H – Le bouton d’arrêt............................................................. 216 6.3.2.4.9 Étude I – la disposition des ALV dans l’environnement de jeu ........ 217 6.3.2.4.10 Étude J – Le ralentissement de la vitesse de jeu .......................... 217 6.3.2.4.11 Étude K – L’imposition de pauses en situation de jeu ................... 218 6.3.3 Les mesures développées en Europe .......................................................... 218 6.3.3.1 Les mesures développées aux Pays-Bas .............................................. 218 6.3.3.1.1 Les mesures adoptées par la compagnie Holland casino. .............. 219 6.3.3.1.2 Les AÉJ de type Nijpels................................................................... 220 6.3.3.1.3 Les mesures adoptées dans les centres d’amusements................. 221 6.3.3.2 Les mesures expérimentées dans un casino suisse.............................. 222 6.3.4 Les mesures développées en Océanie......................................................... 222 6.3.4.1 Les mesures implantées en Australie .................................................... 222 6.3.4.1.1 Les mesures proposées en Australie par la Productivity Commission ........................................................................................................................ 223 6.3.4.2 Une étude australienne particulière........................................................ 228 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 323 Table des matières - 324 6.3.4.3 Les mesures adoptées dans les casinos néo-zélandais ........................ 228 6.4 La situation au Québec........................................................................................ 229 6.4.1 Les objectifs de l’étatisation des AÉJ............................................................ 231 6.4.1.1 Financement........................................................................................... 232 6.4.1.2 Protectionnisme...................................................................................... 233 6.4.1.3 Service ................................................................................................... 234 6.4.1.4 Sécurité .................................................................................................. 234 6.4.1.5 Intégrité .................................................................................................. 242 6.4.1.6 Jeu responsable ..................................................................................... 242 6.4.2 Les étapes de l’étatisation des AÉJ .............................................................. 243 6.4.3 Les mesures instaurées lors de l’installation des MAS dans les casinos en 1993 ....................................................................................................................... 245 6.4.3.1 Les mesures inscrites dans la réglementation ....................................... 246 6.4.3.2 Les mesures associées au savoir-faire des consultants ........................ 251 6.4.3.2.1 Pas d’alcool dans les aires de jeu ................................................... 251 6.4.3.2.2 Interdiction d’entrée pour les personnes de moins de 18 ans. ........ 252 6.4.3.2.3 Le programme d’auto-exclusion ...................................................... 253 6.4.3.2.4 Code vestimentaire.......................................................................... 257 6.4.3.2.5 Borne interactive.............................................................................. 257 6.4.3.2.6 Explication du fonctionnement des appareils .................................. 259 6.4.3.3 Services spécifiques à la communauté chinoise de Montréal................ 259 6.4.4 Les mesures instaurées en 1994 lors de l’implantation des ALV dans les bars ...............................................................................................................................260 6.4.4.1 Les mesures recommandées par la Sûreté du Québec en 1993........... 260 6.4.4.2 Les mesures associées aux règlements et règles. ................................ 263 6.4.4.2.1 La réglementation sur le système de loterie vidéo .......................... 263 6.4.4.2.2 Les règles sur les appareils de loterie vidéo.................................... 267 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 324 Table des matières - 325 6.4.4.2.3 Le règlement sur le taux de remise ................................................. 276 6.4.4.2.4 Autres articles de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement ............................................................................. 277 6.4.4.3 Message incitant à la modération........................................................... 278 6.4.4.4 Dépliant .................................................................................................. 278 6.4.4.5 Pas de connexion en îlots entre les ALV................................................ 279 6.4.4.6 Banques de données sur les comportements de jeu ............................. 279 6.4.5 L’implantation des ALV dans quatre hippodromes du Québec..................... 279 6.4.6 L’étude de prévalence du jeu pathologique réalisée en 1996....................... 281 6.4.7 La création des centres de recherche universitaires .................................... 282 6.4.8 L’émission « Savez-vous jouer … sans perdre la tête?................................ 283 6.4.9 Le transfert de la responsabilité du jeu pathologique au MSSS ................... 283 6.4.9.1 Campagnes nationales de sensibilisation .............................................. 283 6.4.9.2 Le forum sur le jeu pathologique ............................................................ 283 6.4.9.3 Le programme expérimental sur le traitement du jeu pathologique ....... 284 6.4.10 La table de concertation interministérielle................................................... 284 6.4.10.1 Les boîtiers des ALV seront dorénavant de couleur noire ................... 285 6.4.10.2 La réduction du nombre de jeux de 23 à 10, dont un maximum de cinq par appareil. ....................................................................................................... 285 6.4.10.3 La réduction de la vitesse de jeu par la désactivation du bouton d’arrêt ........................................................................................................................... 285 6.4.10.4 La réduction de la banque maximale par session de $ 100 à $ 60 ...... 286 6.4.10.5 L’affichage à l’écran d’une horloge visible en tout temps..................... 286 6.4.10.6 Désactivation automatique des ALV en dehors des heures d’ouverture autorisées par le permis d’alcool........................................................................ 287 6.4.10.7 Les nouveaux messages...................................................................... 287 6.4.10.8 La nécessité de fixer préalablement des limites de temps ou de dépense ........................................................................................................................... 288 6.4.10.9 Les messages en mode fenêtre indiquant le temps écoulé ................. 288 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 325 Table des matières - 326 6.4.10.10 Module explicatif sur le hasard........................................................... 289 6.4.10.11 Dépliant « Votre portrait de joueur en 8 questions » .......................... 289 6.4.10.12 Brochure « Les loteries vidéo et le hasard » ...................................... 291 6.4.10.13 Programme d’auto-exclusion volontaire ............................................. 291 6.4.10.14 Installation de contrôleurs de sites ..................................................... 292 6.4.10.15 Programme de formation des employés de bars ............................... 292 6.4.11 Le moratoire sur l’octroi de nouvelles licences d’exploitant de site d’appareils de loterie vidéo....................................................................................................... 292 6.4.12 Remplacement du parc d’ALV en 2003. ..................................................... 293 6.4.13 La création de la fondation Mise sur toi ...................................................... 294 6.4.14 L’étude de prévalence du jeu de 2002........................................................ 295 6.5 Conséquences additionnelles posées par les salons de jeux ............................. 295 6.5.1 Inclusion des ALV dans des centres plus généraux de divertissement ........ 295 6.5.2 Retrait de 16% des ALV du contrôle de la RACJ.......................................... 296 6.5.3 Visibilité réduite des ALV .............................................................................. 296 6.5.4 Contrôle rigoureux de l’âge pour toute personne paraissant moins de 30 ans ...............................................................................................................................296 6.6 Les mesures non considérées par Loto-Québec................................................. 296 6.6.1 Abandon du concept de jeu responsable pour le concept de jeu sécuritaire 296 6.6.1.1 Propension des joueurs excessifs à admettre un problème de jeu........ 297 6.6.2 L’aire de jeu doit mettre les joueurs en garde contre les dommages potentiels associés à l’utilisation des appareils de jeu ........................................................... 298 6.6.3 Assurer que les joueurs sont en mesure de décider rationnellement de jouer ou pas .................................................................................................................... 298 6.6.4 Une zone d’exclusion des ALV ..................................................................... 299 6.6.5 Accès maximalement limité aux guichets automatiques bancaires (GAB) ... 299 6.6.6 La disparition complète des ALV dans les bars ............................................ 300 6.6.7 La réduction du taux de remise..................................................................... 300 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 326 Table des matières - 327 6.6.8 L’augmentation de la taille des lots importants ............................................. 301 6.6.9 La réduction du jeu multi-lignes .................................................................... 301 6.6.10 Des mises en garde efficaces, vérifiées expérimentalement...................... 301 Lexique.......................................................................................................................... 302 1. Aléatoire ............................................................................................................. 302 2. Appareil de jeu ................................................................................................... 302 3. Appareil électronique de jeu (AÉJ)..................................................................... 302 4. Appareil de poker vidéo (APV) ........................................................................... 302 5. Appareil de loterie vidéo (ALV)........................................................................... 302 6. Budget de jeu ..................................................................................................... 303 7. Capital de jeu ..................................................................................................... 303 8. Comorbidité ........................................................................................................ 303 9. Croyance erronée quant au hasard.................................................................... 303 10. Dépendance pathologique à l’égard du jeu .................................................... 304 11. Dépense au jeu............................................................................................... 304 12. DSM-III............................................................................................................ 304 13. DSM-IV ........................................................................................................... 304 14. Espérance de gain.......................................................................................... 304 15. Gain significatif ............................................................................................... 305 16. Gros gain ........................................................................................................ 305 17. Heuristique (Voir Processus heuristique) ....................................................... 305 18. Iatrogène......................................................................................................... 305 19. ICJE (Indice canadien de jeu excessif)........................................................... 306 20. Illusion de contrôle.......................................................................................... 306 21. Îlotage ............................................................................................................. 306 22. Incidence du jeu excessif................................................................................ 306 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 327 Table des matières - 328 23. Incidence du jeu pathologique ........................................................................ 306 24. Jeu .................................................................................................................. 306 25. Jeu charitable ................................................................................................. 307 26. Jeu de cartes .................................................................................................. 307 27. Jeu de keno .................................................................................................... 307 28. Jeu de lignes................................................................................................... 307 29. Jeu multicrédits............................................................................................... 308 30. Jeu multilignes ................................................................................................ 308 31. Jeu responsable ............................................................................................. 308 32. Jeu sécuritaire ................................................................................................ 308 33. Joueur à risque ............................................................................................... 308 34. Joueur avec problème de jeu ......................................................................... 308 35. Joueur excessif............................................................................................... 309 36. Joueur occasionnel (Voir Joueur sans problème de jeu)................................ 309 37. Joueur pathologique ....................................................................................... 309 38. Joueur récréatif (Voir Joueur sans problème de jeu)...................................... 309 39. Joueur sans problème de jeu ......................................................................... 309 40. Lot (voir Remise) ............................................................................................ 309 41. Lot progressif (voir Îlotage) ............................................................................. 309 42. Loterie............................................................................................................. 309 43. Loterie vidéo ................................................................................................... 309 44. Machine à sous (MAS) ................................................................................... 309 45. Montant inséré ................................................................................................ 310 46. Montant misé .................................................................................................. 310 47. Pari mutuel...................................................................................................... 310 48. Paritel.............................................................................................................. 310 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 328 Table des matières - 329 49. Partie .............................................................................................................. 310 50. Pokies ............................................................................................................. 310 51. Prévalence du jeu ........................................................................................... 310 52. Prévalence du jeu excessif ............................................................................. 310 53. Prévalence du jeu pathologique ..................................................................... 310 54. Processus associatif ....................................................................................... 311 55. Processus automatique .................................................................................. 311 56. Processus heuristique .................................................................................... 311 57. Processus normatif ......................................................................................... 311 58. Remise............................................................................................................ 311 59. Salon de jeu.................................................................................................... 311 60. Salon de pari................................................................................................... 311 61. Set .................................................................................................................. 311 62. SOGS (South Oaks gambling screen)............................................................ 312 63. Taux d’encaissement...................................................................................... 312 64. Taux d’incidence (voir Incidence du jeu excessif) .......................................... 312 65. Taux de prévalence (voir Prévalence du jeu) ................................................. 312 66. Taux de remise ............................................................................................... 312 67. Taux de remise effectif ................................................................................... 313 68. Taux de retour (Voir Taux de remise)............................................................. 313 Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 329