Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de

Transcription

Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de
Dangerosité des appareils électroniques de jeu
et
mesures de protection
Jean Leblond, Ph. D. (psychologie)
Document d’analyse remis au
Directeur de santé publique
de la Capitale-Nationale
Dans le cadre des travaux de rédaction de
l’Avis de santé publique sur l’implantation des salons de jeux au Québec
20 février 2007
2
Référence suggérée :
Leblond, J. (2007). Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de
protection. Document d’analyse remis au Directeur de santé publique de la Capitale
Nationale dans le cadre des travaux de rédaction de l’Avis de santé publique sur
l’implantation des salons de jeux au Québec. Québec, QC.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 2
Présentation du document
Ce document, commandé par la Direction de la santé publique de la Capitale-Nationale,
a pour objectif d’appuyer la réflexion des spécialistes de la santé publique dont le
mandat est de maintenir la population en santé à l’égard du jeu. L’approche est ainsi
résolument centrée sur l’identification des comportements sains, c’est-à-dire des
comportements sécuritaires.
Le concept de jeu sécuritaire
Le concept de jeu sécuritaire consiste à préciser dans quelles limites la population
québécoise peut jouer sans craindre de développer une dépendance à l’égard du jeu ou
d’y subir des dommages. Une promotion proactive de la santé permet ainsi d’identifier
les limites à l’intérieur desquelles il est possible de satisfaire, de manière éthique, le
désir légitime de la population de jouer en s’amusant pleinement.
Par des mises en garde, l’environnement de jeu doit garantir que la personne est
pleinement informée des risques, des moyens de s’en prémunir, des mesures curatives
ou palliatives disponibles, des difficultés éventuelles à résoudre ou contenir les
problèmes de jeu ainsi que de l’ampleur des dommages auxquelles elle s’expose
lorsque les limites sont dépassées.
Ce concept contraste radicalement avec le concept de jeu responsable dont l’objectif est
surtout de dépister l’insanité et de tenter de minimiser les méfaits, les dommages. Cette
approche intervient trop tardivement dans l’évolution des problèmes de jeu. Le rôle de la
Santé publique ne doit pas se limiter à celui d’ambulancier lorsque la personne est déjà
détruite par le jeu.
Les critères du jeu sécuritaire
Des critères de jeu sécuritaire ont été recherchés. Après avoir inventorié la littérature
scientifique, une seule étude a proposé des critères opérationnels, raisonnablement
quantifiables, et qui peuvent être facilement compris.
Ainsi, une étude complémentaire1 de l’ESCC2 a tracé des courbes de risque en fonction
de la fréquence et de la dépense au jeu. Les auteurs ont alors défini trois critères à
l’intérieur desquels le jeu peut être considéré comme exempt de problèmes. Ces critères
de jeu sécuritaire sont :
1
Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of
harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling
activities. Addiction, 101, 570-580.
2
L’enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) a été réalisée en 2002 par
Statistique Canada. Voir : Statistique Canada. (2002). Enquête sur la santé dans les collectivités
canadiennes: santé mentale et bien-être. Document 82-617-XIF. Ottawa, ON : auteur.
Présentation du document - 4
•
Ne pas jouer plus de 2 ou 3 fois par mois.
•
Ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à
1000 dollars si on inclut les billets de loterie).
•
Ne pas dépenser au jeu plus de 1% du revenu familial brut.
Dès que la personne outrepasse un seul de ces critères, elle doit être consciente qu’elle
s’engage dans une zone à risque d’autant plus que l’écart est grand. Lorsque les écarts
vont en s’accroissant continuellement, il y a lieu de considérer qu’il y a perte de contrôle
sur la dépense au jeu.
Ces critères ne sont pas définitifs. Des études, spécifiquement dédiées à l’identification
des critères du jeu sécuritaire, consolideraient l’identification du répertoire des
comportements à suivre et la précision des seuils. Ces critères peuvent être nuancés,
par exemple, en fonction des catégories socioéconomiques, des structures familiales,
des activités de jeu ou des régions.
Le concept de dangerosité
Un autre objectif de ce document a été de répertorier les indices de dangerosité des
appareils électroniques de jeu (AÉJ) ainsi que les mesures de protection qui pourraient
rendre ces appareils sécuritaires.
Avant même de commencer à jouer, il existe des indices de dangerosité des AÉJ parce
que ces appareils sollicitent vers la morbidité des processus potentiellement sains. Ce
sont l’intelligence écologique et l’optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer
une maladie.
Des croyances erronées quant au hasard se manifestent typiquement, de manière
naturelle, chez la plupart des individus. Elles ne sont pas pathologiques. Elles
correspondent à un mécanisme d’adaptation3, issu de l’évolution humaine, et qui est
qualifié d’intelligence écologique4. Dans le hasard, contrairement au monde réel, il n’y a
pas de relation de cause à effet. Dans un tel contexte, les jeux de hasard sont des
environnements artificiels qui posent des pièges exploitant les failles naturelles de cette
intelligence écologique.
3
(a) Todd, P. M. (2001). Fast and frugal heuristics for environmentally bounded minds (pp. 5170). Dans G. Gigerenzer et R. Selten (éditeurs), Bounded rationality : the adaptive toolbox.
Cambridge, MA : MIT press. (b) Sadrieh, A. et al. (2001). Group report : is there evidence for an
adaptive toolbox? (pp. 83-102). Dans G. Gigerenzer et R. Selten (éditeurs), Bounded rationality :
the adaptive toolbox. Cambridge, MA : MIT press. (c) Martignon, L. (2001). Comparing fast and
frugal heuristics and optimal models (pp. 147-171). Dans G. Gigerenzer et R. Selten (éditeurs),
Bounded rationality : the adaptive toolbox. Cambridge, MA : MIT press.
4
Gigerenzer, G. (2000). Ecological intelligence (pp. 59-76). Dans Adaptive thinking : rationality in
the real world. New York, NY : Oxford university press.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 4
Présentation du document - 5
Un optimisme irréaliste à l’égard de développer des maladies est un concept phare de la
psychologie de la santé5. L’absence d’optimisme irréaliste conduit à des états
dépressifs6. Lorsqu’on est préalablement en santé, il est ainsi naturel de se croire
résistant au danger.
Par ailleurs, il est évident que la structure des jeux sur AÉJ sollicite une activation des
processus mentaux qui ne peut que favoriser une dépendance psychologique à leur
égard. Pour jouer, la personne doit accepter de diminuer la portée de ses
raisonnements. En effet, le jeu sur AÉJ omet délibérément de préciser des informations
cruciales au raisonnement normatif. Dans cette situation, les seuls processus mentaux
qui peuvent s’activer conduisent essentiellement au développement d’automatismes,
d’une persistance à jouer et au développement d’une conscience erronée de la situation.
Dès qu’une expérience fortuite de gains apparaît comme étant significativement
différente du hasard, de fortes illusions de contrôles incitent les joueurs à dépenser de
l’argent qu’ils ne peuvent pas perdre. Il s’enclenche alors un surinvestissement dans la
dépense au jeu dans l’espoir de se refaire, de récupérer des montants qui sont pourtant
définitivement perdus. Dès lors, si une aide n’est pas apportée, des dommages sévères
sont quasiment inévitables. Si la personne n’est pas mise en garde contre ce processus
pathogène, elle a peu de chance de le réaliser pendant que ce processus s’installe.
Le jeu pathologique sur AÉJ est particulièrement insidieux parce que ses racines se
développent durant une phase gagnante. En effet, le gain significatif est le principal
facteur pathogène qui concrétise les illusions de contrôle. Durant cette phase gagnante,
la personne a un plaisir réel à jouer, et elle ne subit aucun dommage financier. La
conscience du problème de jeu survient ultérieurement lorsque les pertes se sont déjà
accumulées, parfois jusqu’à l’endettement. Dans un tel cas, l’épuisement des
ressources financières diminue, de manière critique, la capacité de la personne à
financer les initiatives qu’elle devrait entreprendre pour résoudre son problème de jeu.
La « solution » morbide est alors de retourner au jeu dans l’espoir d’y faire le gros gain
qui restaurerait la capacité financière.
L’expérience de jeu sur AÉJ peut induire une dépendance psychologique, et elle peut
conséquemment entraîner des dommages. En particulier, les AÉJ sont des produits
dangereux parce qu’ils ont la capacité :
5
(a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality
and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about
susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of
behavioral medicine, 10(5), 481-500. (c) Taylor, S. E., & Brown, J. D. (1988). Illusion and wellbeing: a social psychological perspective on mental health. Psychological bulletin, 103(2), 193210.
6
Alloy, L. B., & Ahrens, A. H. (1987). Depression and pessimism for the future: biased use of
statistically relevant information in predictions for self versus others. Journal of personality and
social psychology, 52(2), 366-378.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 5
Présentation du document - 6
•
d’induire une dépendance pathologique,
o
•
et conséquemment de causer des dommages considérables,
de capter une dépendance déjà existante à l’égard d’une autre activité de jeu,
o
et conséquemment d’aggraver les dommages subis par les joueurs déjà
excessifs.
Ils sont aussi dangereux en raison de l’incapacité actuelle des traitements à restaurer un
état sain chez tous les utilisateurs qui y ont développé une dépendance pathologique.
Des progrès importants ont été réalisés au Québec dans le domaine du traitement
cognitif du jeu pathologique. L’application à grande échelle témoigne cependant de
quelques difficultés qu’il reste à résoudre.
Qu’est-ce qu’un appareil électronique de jeu?
Les AÉJ englobent tous les appareils permettant de jouer à des jeux de hasard et
d’argent dont le mécanisme de tirage est électronique.
Au Québec, il existe deux catégories d’AÉJ. Les machines à sous (MAS) et les appareils
de loterie vidéo (ALV). Une nouvelle catégorie fera son apparition dans les salons de
jeu, soient les tables de jeu automatisées7 (TJA). Avant l’étatisation des AÉJ en 1993, il
existait des appareils de poker vidéo (APV) qui étaient souvent opérés illégalement.
Les MAS sont situées uniquement dans les casinos. Leur fonctionnement est soumis à
la réglementation des jeux de casinos. Typiquement, les MAS n’offrent qu’un seul jeu
quoique des MAS voisines peuvent offrir une grande variété de jeux.
Les ALV sont situés dans les bars ou dans les hippodromes où ils sont opérés par des
détaillants privés qui sont titulaires d’un permis de la Régie des alcools et des jeux du
Québec (RACJ). Afin de vérifier l’intégrité des détaillants, les ALV sont reliés en réseau
et leur fonctionnement est supervisé à partir d’un ordinateur central. Ils offrent plusieurs
jeux. Leur fonctionnement est soumis à la réglementation des appareils de loterie vidéo.
Les TJA sont de véritables tables de jeu pouvant offrir des jeux de roulette, de cartes et
même des simulations de courses de chevaux. Outre l’absence de croupier, les joueurs
ont la possibilité d’y jouer sans que les partenaires de jeu ne puissent porter un
jugement sur l’habileté ou la compétence d’autrui8. Les mises sont inscrites discrètement
sur un écran individuel. Les gains ou pertes ne sont pas davantage connues des
partenaires de jeu. Les TJA offrent une discrétion que ne procurent pas les tables de
jeu.
7
En anglais, multiplayers games.
8
Faust, F. (2006-2007). New breed of table games. Canadian gaming business, 1(3), 22-26.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 6
Présentation du document - 7
Les chapitres
Le premier chapitre inventorie la dépense au jeu de la population adulte québécoise. Là
où c’est possible de le faire, la dépense a été analysée en fonction de chaque activité de
jeu. La dépense per capita (DPC) et la dépense par joueur (DPJ) sont comparées au
second critère du jeu sécuritaire, donc par rapport au seuil d’une dépense de 500 dollars
annuellement. Le constat qui émerge de cette analyse est que la DPC est un estimateur
trompeur de la situation réelle. Selon cette estimateur, la dépense moyenne des
Québécois se maintiendrait à l’intérieur du second critère du jeu sécuritaire. Mais, tous
les adultes québécois ne jouent pas. Lorsque la DPJ est analysée, les dépenses
moyennes au jeu, les plus récentes, dans les loteries vidéo ($ 2 146), dans les courses
de chevaux $ 1 523) ou dans les casinos ($ 722) dépassent, à elles seules, le second
critère du jeu sécuritaire. Comme il s’agit d’estimations moyennes, de tels montants
suggèrent qu’une portion considérable des joueurs, à ces activités, éprouvent des
problèmes de jeu. Cela est d’autant plus préoccupant que la catégorie des joueurs a été
définie comme étant n’importe quel adulte qui a misé au moins une fois dans l’année à
cette activité. De nombreux joueurs très occasionnels étaient inclus. Si au lieu de
prendre en considération tous les joueurs annuels, la DPJ s’était limitée aux joueurs
mensuels, c’est-à-dire les joueurs réguliers, les estimations moyennes auraient été
nettement supérieures.
Le second chapitre dresse un portrait des ALV au Canada. Compte tenu que
l’exploitation des ALV est presque similaire dans les huit provinces canadiennes qui les
exploitent, des parallèles intéressants peuvent être fait. De plus, la mise en commun de
plusieurs estimations procurent des données statistiques plus stables, plus résistantes
aux cas particuliers.
Le troisième chapitre traite expressément de la dangerosité des AÉJ. Ceux-ci sont
dangereux parce qu’ils ont le potentiel de créer de nouveaux joueurs pathologiques,
ainsi que la capacité d’attirer plus puissamment les joueurs qui sont déjà pathologiques.
La dangerosité est constatée de plusieurs façons, dont (a) la prévalence de jeu excessif
parmi les joueurs sur AÉJ, (2) le pourcentage de joueurs excessifs qui s’intéressent aux
AÉJ, (3) la proportion des revenus des AÉJ qui provient des joueurs excessifs, (4)
l’intensité de la dépense mensuelle sur les AÉJ, (5) l’incapacité à faire une autoévaluation correcte de la dépense sur les AÉJ, et (7) le pourcentage des demandes
d’aide provenant de joueurs accrochés aux AÉJ.
Le quatrième chapitre explore la dangerosité croisée qu’il y a à rapprocher les AÉJ des
hippodromes. On ne doit pas oublier que les courses de chevaux ont un passé trouble
avec le jeu pathologique. La relance des courses de chevaux pourrait aussi signifier la
relance du jeu pathologique. Ce risque est d’autant plus préoccupant que les exemples
provenant de d’autres juridictions laissent entrevoir que les AÉJ pourraient surtout
contribuer à la relance du pari hors course. Dans ce cas, les travailleurs des champs de
courses québécois ne seraient pas les gagnants de cette relance du jeu pathologique.
Le chapitre cinq modélise le processus pathogène conduisant aux problèmes de jeu.
Une stratégie de santé publique implique alors que l’on intervienne directement dans le
processus pathogène en imposant des modifications structurales aux AÉJ qui sont
susceptibles d’empêcher que les conditions de déclenchement du jeu pathologique ne
surviennent.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 7
Présentation du document - 8
Le chapitre six répertorie et évalue de nombreuses mesures de protection qui ont été
explorées de par le monde. Compte tenu que les AÉJ peuvent varier beaucoup d’une
juridiction à l’autre, et que les produits pourraient ne pas être exportables, un accent
particulier est mis sur les travaux réalisés au Canada.
Enfin, un lexique est proposé afin d’aider au développement d’un langage commun.
Les mesures de protection
Les mesures de protection, expérimentées jusqu’à présent, visent surtout des aspects
qui sont en périphérie du processus pathogène. En ce sens, elles ne peuvent qu’avoir
des impacts mitigés. Néanmoins, quelques mesures apparaissent souhaitables :
•
La désactivation du bouton d’arrêt (ceci est déjà en vigueur).
•
La réduction de la vitesse de jeu (indépendamment de la désactivation du bouton
d’arrêt).
•
La réduction des heures d’accès aux ALV. La fermeture des ALV à minuit a
démontré son efficacité.
•
L’utilisation d’une carte-client uniquement en vue de permettre aux joueurs de
définir eux-mêmes des périodes d’autoexclusion. Cette carte-client doit alors être
obligatoire pour tout le monde en tout temps.
D’autres mesures pourraient aussi être envisagées après avoir été testées.
•
Une suggestion de la commission Nijpels consiste à concevoir l’interface des
ALV en fonction de deux soldes. Le premier solde est celui des mises. En début
de session, le joueur y insère un montant d’argent à partir duquel il puisera ses
mises. Le second solde reçoit les lots. Il n’est alors pas possible de transférer le
montant de ce second solde dans le premier sans provoquer un encaissement
global, et donc un arrêt de jeu. Cette mesure peut réduire les occasions de
rejouer continuellement les gains sans prendre conscience de l’argent qu’on y
perd.
•
Au lieu de demander au joueur de fixer préalablement la durée souhaitée de la
dépense au jeu, il serait préférable qu’on lui demande le montant qu’il est prêt à
perdre.
•
Il manque deux odomètres à l’écran des ALV. Le premier doit indiquer au joueur
la vitesse de sa dépense au jeu. Le joueur pourrait ainsi évaluer combien lui
coûtent 10 minutes de jeu. Le second doit indiquer la vitesse des sets. Dès lors,
il serait plus facile au joueur de déceler quand il accélère sa cadence par rapport
à son comportement habituel.
Dans une vision à plus long terme, il est nécessaire d’envisager des mesures qui
s’attaquent plus directement au processus pathogène.
•
L’optimisme irréaliste à l’égard du danger de devenir malades des AÉJ doit être
contré d’une manière nettement plus ferme. Actuellement, la documentation
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 8
Présentation du document - 9
donnée au joueur tend plutôt à favoriser cet optimisme irréaliste. Avant même de
s’initier au jeu, et particulièrement au moment où ils le font, les joueurs doivent
être mis en garde contre :
o
o
Le risque de développer une dépendance pathologique à l’égard des AÉJ
en jouant sur les AÉJ. C’est beaucoup plus qu’une très petite minorité de
joueurs qui développent des problèmes sur les AÉJ.
ƒ
En l’occurrence, 15% des joueurs annuels sur ALV sont des
joueurs pathologiques.
ƒ
En raison de leur durée de jeu plus longue, à chaque instant, la
probabilité pour qu’un joueur assis en face d’un ALV soit un joueur
pathologique est de 35%.
ƒ
À travers le monde, environ 46% des revenus tirés des ALV
proviennent des joueurs pathologiques. En Alberta, il s’agit de
67%. En Nouvelle-Écosse, 53%.
L’intensité des dommages possibles.
ƒ
Lorsque les joueurs pathologiques se décident enfin à demander
de l’aide, ceux-ci ont d’importantes dettes de jeu.
ƒ
Leur vie familiale, sociale ou professionnelle est en danger de
rupture lorsque cela n’est pas déjà fait.
ƒ
Certains joueurs en viennent à commettre des crimes.
ƒ
Certains joueurs se suicident parce qu’ils ne voient plus comment
s’en sortir.
o
Les traitements du jeu pathologique ne permettent pas encore de
restaurer un état parfaitement sain à l’égard du jeu. Il n’est pas possible
de revenir complètement en arrière.
o
Les mises en garde doivent indiquer quels moyens existent pour se
prémunir des dangers et des dommages. Ces moyens doivent avoir été
évalués empiriquement.
•
Sans équivoque, il est nécessaire de réduire les occasions de gain significatif sur
les ALV. C’est le principal facteur pathogène. Cela peut être obtenu en réduisant
le taux de remise effectif, paradoxalement en augmentant la taille des lots les
plus importants, en imposant une mise minimale plutôt que maximale, en
réduisant les occasions de jeu mutliligne, en augmentant les occasions de jeu
multicrédit, ou en multipliant les lots de faibles valeur. Il existe de nombreuses
manières d’y parvenir. Une solution adaptée au marché peut être trouvée.
•
Les croyances erronées sont au jeu pathologique ce que l’oxygène est au feu.
En soi, elles ne sont pas dangereuses. Elles sont cependant ce qui permet au
jeu pathologique de s’enflammer. Des cédéroms d’information doivent être
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 9
Présentation du document - 10
élaborés sur lesquels des simulateurs des jeux disponibles permettraient aux
joueurs de tester à la maison les stratégies de contrôle que certains joueurs
croient possible. Ces simulateurs personnels n’impliqueraient pas d’argent. Ainsi,
après un gain significatif, le joueur en illusion pourrait faire ses tests sans
dilapider ses biens.
•
Un professionnel de la santé, en particulier en ce qui a trait aux pratiques de jeu
sécuritaire, doit être présent en tout temps lorsque le public a accès à un salon
de jeux. L’action de ce professionnel peut s’inspirer du protocole d’intervention
déjà utilisé par les employés de la firme Holland casino qui est déjà le principal
consultant de Loto-Québec en matière d’établissement de jeu.
L’ascendance du crime organisé sur le jeu
En terminant, dans la perspective de la production d’un avis de la Santé publique
concernant le projet des salons de jeux, Loto-Québec a requis que soit examiné la
menace du développement de marchés gris ou clandestin (appareils illégaux) si ce
projet n’était pas réalisé tel que proposé. L’existence de ces marchés, prétendument
contrôlés par des criminels, est la principale justification qui a motivé l’étatisation des
ALV en juin 1994. Depuis, ces marchés illégaux seraient pratiquement inexistants.
En examinant l’historique des AÉJ, nous n’avons retrouvé que des traces minimes du
contrôle des AÉJ par des criminels avant 1994. L’importance de la fuite fiscale est aussi
très incertaine. Peu avant l’étatisation, les revenus des appareils de poker vidéo (APV)
étaient divisés en part égales entre le distributeur et le détaillant. Des montants
importants, obtenus par les distributeurs, peuvent avoir échappé au fisc car une
infiltration des criminels parmi les distributeurs a été dénoncée. Toutefois, les détaillants
étaient vraisemblablement des petits commerçants qui peuvent avoir déclaré à l’impôt
leur part des revenus. En effet, les trois-quarts des appareils illégaux étaient détenteurs
d’un permis de la Régie des loteries du Québec. Parce que ces permis existaient, les
commerçants ont sans doute déclaré les revenus des APV, du moins au même titre que
les revenus de leurs autres activités commerciales. En ce sens, la fuite fiscale est
plausiblement nettement en deçà de ce qui était déplorée avant 1994.
Les utilisateurs des APV n’étaient pas en contact direct avec les criminels. Leur sécurité
n’était pas directement menacée. En fait, les criminels se sont vraisemblablement
rapprochés de la clientèle lorsque le gouvernement du Québec a annoncé son intention
d’étatiser les ALV. En effet, divers groupes rivaux ont alors entrepris d’acquérir le
contrôle des bars où les ALV pouvaient être implantés.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 10
Chapitre 1
La dépense au jeu de la population québécoise
La population québécoise dépense beaucoup dans les jeux de hasard et d’argent.
Depuis 1970, la dépense totale est d’au moins 45 milliards de dollars; ce qui inclut un
montant de 36 milliards de dollars dans les seules activités de Loto-Québec.
Lorsque la dépense au jeu est répartie parmi l’ensemble des adultes québécois, la
dépense per capita semble relativement peu élevée. Toutefois, la population participe
inégalement aux activités de jeu. Lorsque la dépense per capita est analysée
uniquement en fonction du nombre de joueurs, des montants importants surgissent en
ce qui a trait aux AÉJ et au pari mutuel. De tels montants moyens ne sont pas réalistes
sans qu’une portion appréciable des joueurs y éprouve des problèmes de jeu.
Tableau 1
Dépense per capita et dépense par joueur à différentes activités de jeu
Dépense per capita
Dans ce chapitre
Activité
Année
Population
(DPC)
Joueurs
(DPJ)
Section
Page
AÉJ (ALV + MAS + APVi)
1996
$ 84
$ 400
1.5.3
22
1996-1997
$ 84
$ 988
1.5.3
22
1999-2000
$ 163
$ 1 523
1.5.3
22
2002
$ 183
$ 2 346
1.5.3
22
2004-2005
$ 206
$ 2 146
1.5.3
22
1996-1997
$ 11,57
$ 76
1.6
27
2001-2002
$ 10,75
$ 119
1.6
27
1996
$ 101
$ 616
1.5.2
21
2002-2003
$ 127
$ 722
1.5.2
21
1993-1994
$ 25
---
Figure 3
16
2001-2002
$ 309
---
Figure 3
16
2002-2003
$ 310
---
Figure 3
16
2005-2006
$ 339
---
Figure 3
16
1989
$ 12,87
---
1.12
32
1991
$ 25,07
---
1.12
32
2002-2003
$ 150
$ 220
1.5.1
19
1996
$ 30,67
$ 807
1.7
28
2002
$ 31,24
$ 1 523
1.7
28
1992-1993
$ 183
---
Figure 3
16
1993-1994
$ 214
---
Figure 3
16
2001-2002
$ 507
---
Figure 3
16
ALV
Bingo charitable
Casinos québécois
Casinos québécois + ALV
Casinos étrangers
Loteries
Pari-mutuel
Toutes
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 12
Ce tableau n’est pas complet parce que l’information nécessaire n’est pas toujours
disponible. En l’occurrence, la dépense sur les MAS n’est plus publiée dans les rapports
annuels de Loto-Québec. La dépense au bingo et dans les tirages ne sont plus publiées
par la RACJ. Il est alors impossible de calculer la dépense per capita. De plus, pour
calculer la dépense par joueur, des taux de pénétration annuels doivent être disponibles
pour chaque activité.
1.1 Définitions
Dans cette annexe, la fréquence et la dépense annuelle au jeu sont inventoriées en
fonction des diverses activités de jeu auxquelles la population québécoise a accès. Afin
de comparer ces données au second critère du jeu sécuritaire9, des statistiques per
capita10 sont utilisées. Celles-ci représentent des moyennes pour l’ensemble de la
population, ce qui inclut les personnes qui ne jouent pas du tout.
Afin d’abréger le texte, le sigle DPC signifie la dépense per capita par rapport à
l’ensemble de la population adulte du Québec. Le calcul est simple. Il suffit de diviser la
dépense globale au jeu par le nombre de personnes adultes au Québec.
Le sigle DPJ signifie plutôt la dépense per capita des seuls joueurs annuels. Il suffit de
diviser la DPC par le taux de pénétration annuelle. Ce dernier est le pourcentage de la
population adulte qui s’est adonnée à une activité de jeu au moins une fois durant
l’année.
C’est la DPJ qu’il faut comparer au second critère du jeu sécuritaire. Dès lors, des
statistiques qui se situent en deçà, mais près de ce critère, reflètent déjà une situation
préoccupante. Des statistiques dépassant ce critère suggèrent qu’une majorité de
joueurs éprouvent des problèmes de jeu, car en général environ la moitié de la
population se situe au-dessus ou au-dessous de la moyenne.
1.2 La dépense au jeu globale de la population adulte du Québec
La dépense au jeu est l’argent perdu11 par les joueurs. Il s’agit des montants misés
moins l’argent remis aux joueurs sous forme de lots. Cette dépense se répartit dans :
9
Le second critère consiste à ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars
(ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). Voir dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C.,
Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the
general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101,
570-580.
10
Les estimés de la taille de la population adulte du Québec proviennent du fichier CANSIM 05100011.2.6 produit par Statistique Canada. Ces estimés permettent des comparaisons
interprovinciales.
11
À noter que la dépense au jeu n’englobe pas les jeux à espérance nulle de gain, par exemple
les parties de cartes entre amis. En effet, lorsqu’aucun établissement de jeu ne conserve une
cote sur les paris, le jeu ne fait que redistribuer l’argent parmi les joueurs. À long terme, le hasard
distribue les occasions de gain également. Dans les jeux à espérance nulle de gain, lorsqu’une
personne perd systématiquement, c’est en raison d’un manque d’habileté par rapport aux
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 12
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 13
•
•
•
•
•
•
•
•
•
•
l’offre de jeu de Loto-Québec (loteries, casinos, ALV, bingo en réseau),
le pari mutuel (hippodromes, salons de pari et Paritel),
le bingo des organismes à but non lucratif,
les tirages des organismes communautaires ou commerciaux,
les casinos charitables (avant 1993),
la spéculation boursière,
les activités de jeu des nations amérindiennes,
l’offre de jeu des juridictions étrangères,
le jeu sur Internet, et
les activités illégales de jeu.
La Régie des alcools, des jeux et des courses du Québec (RACJ) a le mandat de
surveiller les activités des cinq premiers secteurs de dépense12, tandis que les cinq
derniers secteurs ne rendent aucun compte public des montants obtenus des
Québécois.
La figure13 suivante illustre la dépense au jeu de l’ensemble de la population québécoise
dans les activités surveillées par la RACJ depuis la création de Loto-Québec. Il ne s’agit
pas d’une distribution cumulée. La dépense globale au jeu a dépassé le milliard de
dollars durant l’année fiscale 1989-1990, et elle a doublé à peine sept années plus tard.
Huit autres années plus tard, la dépense au jeu a dépassé les 3 milliards de dollars. En
fait, le montant cumulé de la dépense au jeu depuis 1970 est d’au moins 45 milliards de
dollars14.
partenaires de jeu, et non en raison de la structure de jeu. Dans les jeux à espérance négative de
gain, à coup sûr, les joueurs perdent d’autant plus qu’ils jouent beaucoup. C’est la structure de
jeu qui en est la cause.
12
Le contrôle de la RACJ sur les casinos est partiel.
13
Bien qu’il y ait eu des tirages et des bingos avant l’année 1983-1984, aucune donnée n’a été
répertoriée cette année-là. Parce la RACJ a cessé de les publier après l’année 2001-2002,
celles-ci sont ensuite manquantes. Après 2001-2002, les données du bingo se limitent à celles du
bingo en réseau de Loto-Québec. La donnée du pari mutuel de 1971-1972 est manquante.
14
Concernant les bingos et les tirages, les données de la RACJ antérieures à l’année 1983-1984
ne sont pas prises en compte. Depuis l’année 2002-2003, la RACJ ne rapporte plus ces
statistiques.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 13
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 14
Figure 1
Dépense au jeu
Milliards
Dépense annuelle des adultes québécois dans les activités de jeu
$3
$2
$1
$0
2005-06
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
1999-00
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
1993-94
1992-93
1991-92
1990-91
1989-90
1988-89
1987-88
1986-87
1985-86
1984-85
1983-84
1982-83
1981-82
1980-81
1979-80
1978-79
1977-78
1976-77
1975-76
1974-75
1973-74
1972-73
1971-72
1970-71
Loteries
Casinos
Loterie vidéo
Bingo
Pari mutuel
Tirages
1.3 Considération du revenu familial brut
Selon le troisième critère du jeu sécuritaire, la dépense annuelle au jeu ne doit pas
dépasser 1% du revenu familial brut. Pour illustrer l’importance de ce critère, nous avons
divisé la dépense au jeu sur les AÉJ15 (MAS + ALV) dans chaque province canadienne
en 2002-2003 par le revenu familial médian en 200216. Ces valeurs se trouvent en
abscisse de la Figure 2. Lorsque mise en relation avec le taux de prévalence du jeu
pathologique constaté lors de l’étude ESCC de Statistique Canada17 (en ordonnée), la
relation entre les problèmes de jeu et le pourcentage du revenu familial brut dépensé au
jeu semble raisonnablement établie.
15
Ces statistiques ont été compilées par la firme KPMG (2004). Canadian gaming highlights
2003.
16
Les revenus médians des familles proviennent du fichier CANSIM 111-0009 produit par
Statistique Canada.
17
Les taux provinciaux de prévalence du jeu pathologique proviennent du fichier CANSIM 82617-XIF produit par Statistique Canada.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 14
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 15
Figure 2
Relation entre le pourcentage du revenu familial dépensé au jeu
et les problèmes de jeu au Canada
ICJE (modéré ou plus) en 2002
4,0%
Manitoba
Saskatchew an
3,0%
Alberta
Ontario
Colombie-Britannique
2,0%
Nouvelle-Écosse
Québec
Île-du-Prince-Édouard
1,0%
Terre-Neuve-etLabrador
Nouveau-Brunsw ick
0,0%
0,0%
0,2%
0,4%
0,6%
0,8%
1,0%
1,2%
Dépense per capita (casinos + ALV) / Revenu familial médian en 2002
À noter que la dépense per capita est sousestimée au Manitoba, en Saskatchewan et en
Nouvelle-Écosse car les nations
amérindiennes, qui y opèrent des casinos, ne
sont pas tenues de dévoiler la dépense au jeu.
Ces points devraient conséquemment être
déplacés horizontalement plus à droite du
graphique. C’est le cas aussi pour la
Colombie-Britannique car la région de
Vancouver se situe très près de la frontière de
l’état de Washington qui dispose d’imposants
établissements de jeu.
Un taux de prévalence inférieur à la moyenne
canadienne, ou une dépense familiale
inférieure, ne révèlent pas nécessairement que
l’offre de jeu dans une province n’est pas
dangereuse.
Selon cette figure, les Québécois limitent leur
dépense au jeu à moins de 0,6% du revenu
familial brut. C’est en deçà du troisième critère
de jeu sécuritaire, bien que cela demeure très
élevé pour une moyenne.
Conséquemment, il ne peut pas être inféré que
la gestion de Loto-Québec est la cause d’un
taux de prévalence du jeu pathologique, ou
d’une dépense familiale, qui sont inférieurs à la
moyenne canadienne.
Malgré une offre dangereuse, la population
peut avoir la sagesse de ne pas s’exposer et
de répondre à cette offre de jeu. Dans un tel
cas, ce n’est pas l’organisme de jeu qui est
responsable d’un taux de prévalence inférieur
ou d’une faible dépense.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 15
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 16
1.4 Considération de la dépense per capita, tous jeux confondus
Dans son premier bilan de responsabilité sociale18, Loto-Québec indique que les
Québécois dépensent annuellement 540 dollars per capita. C’est moins que la moyenne
canadienne qui est de 642 dollars per capita. Il importe peu que le Québec ait une
dépense per capita moindre ou plus élevée. L’objectif n’est pas d’être le Canadien le
moins détruit par le jeu. La DPC doit plutôt être comparée au second critère du jeu
sécuritaire19.
Au Québec, la DPC, toutes activités de jeu réunies, a dépassé les 500 dollars
annuellement depuis l’année 2000-2001 (voir Figure 3)20.
Figure 3
$339
$331
$313
$310
$507
$309
$507
$304
$484
$282
$444
$248
$405
$215
$374
$185
$301
$122
$263
$77
$214
$25
$183
$195
$195
$192
$192
$175
$165
$155
$250
$144
$500
$140
Dépense per capita
Évolution de la dépense au jeu per capita
Total
2005-06
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
1999-00
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
1993-94
1992-93
1991-92
1990-91
1989-90
1988-89
1987-88
1986-87
1985-86
1984-85
1983-84
$0
Casinos + ALV
En comparaison, la dépense au jeu dans les AÉJ (casinos et ALV) a dépassé les 250
dollars depuis l’année 1999-2000. Il est probable que cette seule source de dépense
génère la plupart des problèmes de jeu. Antérieurement à l’avènement des casinos et
ALV, la DPC se maintenait en deçà de 250 dollars annuellement.
L’analyse de la dépense per capita révèle ainsi que la dépense au jeu de la population
québécoise est très élevée par rapport au second critère du jeu sécuritaire.
18
Voir à la page 30 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale 2004-2005 : Pour
une contribution responsable. Montréal, QC : auteur.
19
Le second critère consiste à ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars
(ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). Voir dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C.,
Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the
general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101,
570-580.
20
Depuis que la RACJ a cessé de publié les dépenses annuelles au bingo et aux tirages, il n’est
plus possible de calculer la dépense per capita du total des activités.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 16
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 17
1.5 L’offre de jeu de Loto-Québec
La dépense au jeu dans les produits de Loto-Québec est communiquée dans les
rapports annuels de cet organisme. Ces produits sont les loteries, les casinos, les
appareils de loterie vidéo, le bingo en réseau, ainsi que les loteries multimédia. Les
Québécois y ont dépensé depuis 1970 plus de 36 milliards de dollars.
Cette dépense au jeu représente une contribution appréciable au budget des dépenses
du gouvernement du Québec. Au cours de la dernière décennie, le bénéfice net de LotoQuébec a procuré environ 3% du budget des dépenses de l’ensemble du gouvernement
(voir Figure 4). Entre 1994-1995 et 2001-2002, la contribution de Loto-Québec a
surpassé celles d’Hydro-Québec et de la SAQ, contribuant dès lors davantage au
budget des dépenses.
Figure 4
5%
4%
3%
2%
1%
Loto-Québec
Hydro-Québec (année civile avant 1994-1995)
2005-2006
2004-2005
2003-2004
2002-2003
2001-2002
2000-2001
1999-2000
1998-1999
1997-1998
1996-1997
1995-1996
1994-1995
1993-1994
1992-1993
0%
1991-1992
% du budget de dépense
La contribution des bénéfices nets
de Loto-Québec, d'Hydro-Québec et de la SAQ
au budget des dépenses du Gouvernement du Québec
SAQ
Cette contribution coûte cependant cher aux joueurs. En effet, en 2005-2006, pour que
Loto-Québec puisse verser 1 dollar au Fonds consolidé de la province (voir Figure 5), un
joueur doit avoir perdu $1,51 aux loteries vidéo, $1,76 aux loteries conventionnelles,
$3,46 au casino21 ou 7,98$ au bingo en réseau (non-illustré).
Dans cette figure, il est possible de constater à quel point les casinos sont de plus en
plus cher à opérer. Dans la perspective d’une réduction des coûts d’opération, il est
attrayant de considérer l’implantation de tables de jeu automatisées dans les salons de
jeu. Si les TJA ne font que déplacer une clientèle déjà existante, et qu’elles n’incitent
pas à une dépense accrue chez les joueurs excessifs, cet objectif peut être atteint.
Toutefois, l’avènement d’une nouvelle clientèle, ou un accroissement de la dépense au
jeu, pourrait aggraver la situation. Il est souhaitable que les TJA soient l’objet d’une
étude d’impact précise quant à la provenance de la clientèle et des fluctuations de la
dépense au jeu.
21
Aux jeux du casino ou à ses services de restauration et d’hébergement.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 17
1971-1972
1972-1973
1973-1974
1974-1975
1975-1976
1976-1977
1977-1978
1978-1979
1979-1980
1980-1981
1981-1982
1982-1983
1983-1984
1984-1985
1985-1986
1986-1987
1987-1988
1988-1989
1989-1990
1990-1991
1991-1992
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
Millions
Bénéfice net
1970-1971
1971-1972
1972-1973
1973-1974
1974-1975
1975-1976
1976-1977
1977-1978
1978-1979
1979-1980
1980-1981
1981-1982
1982-1983
1983-1984
1984-1985
1985-1986
1986-1987
1987-1988
1988-1989
1989-1990
1990-1991
1991-1992
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
Dépense au jeu / Bénéfice net
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 18
Figure 5
Ce qu'il en coûte aux joueurs pour que Loto-Québec puisse
verser 1 dollar au Fonds consolidé du Québec
$4,00
$3,50
$3,00
$2,50
$2,00
$1,50
$1,00
$0,50
$0,00
Loterie
Loteries
Casinos
Loterie vidéo
Enfin, il est intéressant de constater que, depuis leur avènement, les ALV sont la source
principale, sinon l’unique source, de la croissance du bénéfice net de Loto-Québec.
Figure 6
Répartition du bénéfice net annuel de Loto-Québec
$1 800
$1 600
$1 400
$1 200
$1 000
$800
$600
$400
$200
$0
Casinos, restauration et hébergement
Loteries vidéo
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 18
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 19
1.5.1 La dépense dans les loteries
Depuis le premier tirage effectué le 14 mars 1970, les Québécois ont dépensé22 plus de
18 milliards de dollars dans diverses formes de loteries.
En 2002-2003, la DPC a été de $ 150. Toutefois, seulement 68,1% de la population
adulte a acheté un billet de loterie au moins une fois dans l’année (voir Tableau 2)23. Si
on divise la DPC par le taux de pénétration annuelle, on obtient une DPJ égale à $ 220.
Ce montant est très près de la dépense moyenne des joueurs rapportée à l’occasion de
l’étude de prévalence de 200224 ($ 244, voir Tableau 2).
Bien que la dépense dans les loteries continue de croître, celle-ci semble plafonner à un
montant représentant environ 150 dollars per capita.
Figure 7
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans les loteries
$1 000
$750
$500
$250
$0
2005-06
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
1999-00
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
1993-94
1992-93
1991-92
1990-91
1989-90
1988-89
1987-88
1986-87
1985-86
1984-85
1983-84
1982-83
1981-82
1980-81
1979-80
1978-79
1977-78
1976-77
1975-76
1974-75
1973-74
1972-73
1971-72
1970-71
La barre colorée en bleu indique l’avènement des appareils de poker vidéo (APVi)
illégaux auxquels la RACJ accordait néanmoins un permis. La barre colorée en rouge
marque l’avènement du casino de Montréal, et la barre en jaune celle des ALV. Puis, la
barre colorée en vert indique le début du bingo en réseau.
22
Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense dans les loteries équivaut au revenu de
Loto-Québec moins les lots retournés aux joueurs.
23
Les données de 1996 proviennent d’une actualisation de la seconde étude de prévalence du
jeu pathologique au Québec. Voir à la page 253 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la
dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06000017-015 de la Cour supérieure du Québec. L’étude originale a été publiée dans : Ladouceur,
R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication
study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804.
24
Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., Sévigny, S. (2004).
Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et
Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 19
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 20
Tableau 2
Participation de la population québécoise aux loteries
Fréquence de jeu
Dépense annuelle
Année
Activité
À vie
Annuelle
Mensuelle
Hebdomadaire
1996
Total
93,2%
88,0 %
67,0 %
47,1 %
2002
Total
2002
2002
2002
2002
Loterie
traditionnelle
Loterie
quotidienne
Loterie
instantanée
Loterie
sportive
Moyenne
Médiane
68,1 %
244 $
120 $
65,3 %
169 $
104 $
9,2 %
176 $
60 $
37,0 %
98 $
48 $
2,4 %
472 $
96 $
L’analyse du revenu annuel des catégories de loterie (voir Figure 8) indique que cette
dépense est surtout distribuée dans les loteries à accès direct (Lotto 6/49, Super 7) et à
un moindre degré dans les loteries instantanées25.
Figure 8
25
Millions
$1 200
$1 000
$800
$600
$400
$200
$0
1970-1971
1971-1972
1972-1973
1973-1974
1974-1975
1975-1976
1976-1977
1977-1978
1978-1979
1979-1980
1980-1981
1981-1982
1982-1983
1983-1984
1984-1985
1985-1986
1986-1987
1987-1988
1988-1989
1989-1990
1990-1991
1991-1992
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
Revenu annuel des loteries
Revenu annuel des loteries de Loto-Québec
Loteries à accès direct
Loteries instantanées
Loteries traditionnelles
Pari sportif
Appelées plus communément gratteux.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 20
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 21
1.5.2 La dépense au casino
Le casino de Montréal a ouvert le 9 octobre 199326. Depuis, la clientèle a dépensé27
dans les trois casinos du Québec près de 8 milliards de dollars. Déjà en 1996, la DPC
était de $ 101, ce qui représente une DCPJ de $ 616.
Figure 9
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans les casinos québécois
$1 000
$750
$500
$250
$0
1993-94 1994-95 1995-96 1996-97 1997-98 1998-99 1999-00 2000-01 2001-02 2002-03 2003-04 2004-05 2005-06
En 2002-2003, la DPC a été de $ 127 pour un taux de pénétration annuelle de 17,6%.
La DPJ est ainsi de $ 722. Ce montant est supérieur à la dépense moyenne de $ 581
rapportée par les répondants de l’étude de prévalence de 2002. L’auto-évaluation est
alors de 20% inférieure à l’estimé financier.
Ces estimations de la DCPJ vont au-delà du second critère du jeu sécuritaire. Selon ces
données financières, il y a lieu de considérer qu’un portion importante de la clientèle des
casinos est affectée depuis longtemps par des problèmes de jeu, même si ces gens ne
satisfont pas encore aux critères diagnostiques formels du jeu pathologique.
Tableau 3
Participation de la population québécoise aux activités des casinos
Fréquence de jeu
Dépense annuelle
Année
Activité
À vie
Annuelle
Mensuelle
Hebdomadaire
1996
Total
37,8%
16,4 %
1,0 %
0,2 %
2002
Total
2002
2002
26
Moyenne
Médiane
17,6 %
581 $
55 $
Jeux de
table
7,5 %
679 $
60 $
MAS
16,3 %
210 $
40 $
Voir à la page 10 du rapport annuel 1994-1995 de Loto-Québec.
27
Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense au casino équivaut au revenu de LotoQuébec. Les lots retournés aux joueurs ont été préalablement soustraits. Les montants totaux
misés au casino ne sont pas divulgués.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 21
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 22
En 1996-1997, 68% des revenus des casinos provenait des machines à sous28. En
2002-2003, 75% des revenus des casinos ont été tirés des machines à sous29. Tel
qu’illustré dans la Figure 10, les machines à sous contribuent à une part toujours
croissante des revenus des casinos. Ce sont ces appareils qui contribuent surtout à la
DPJ, et ils le font toujours davantage d’une année à l’autre.
Figure 10
Répartiton des revenus des casinos
selon le type d'activité
Portion du revenu annuel
100%
90%
80%
70%
60%
Tables de jeu
50%
Keno
40%
30%
Machines à sous
20%
10%
2002-2003
2001-2002
2000-2001
1999-2000
1998-1999
1997-1998
1996-1997
1995-1996
1994-1995
1993-1994
0%
1.5.3 La dépense dans les appareils de loterie vidéo
Le développement du parc d’ALV de Loto-Québec a commencé le 28 juin 199430.
Depuis leur implantation, les Québécois ont dépensé31 presque 10 milliards de dollars
dans les ALV. En 1996, la DPC était de $ 84 pour une DPJ de $ 400. Les données de
l’étude de prévalence de 1996 ne distinguent cependant pas entre les MAS, les ALV et
éventuellement les APVi.
Des taux de pénétration annuels plus précis ont cependant été publiés dans les rapports
annuels de Loto-Québec (voir Figure 11). Ceux-ci étaient de 8,5% en 1996-199732, de
28
Voir à la page 11 du rapport annuel de 1996-1997 de Loto-Québec.
29
Selon KPMG (2004). Canadian Gaming Highlights 2003.
30
Voir à la page 12 du rapport annuel 1994-1995 de Loto-Québec.
31
Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense sur les ALV équivaut au revenu de
Loto-Québec. Les lots retournés aux joueurs ont été préalablement soustraits. Les montants
totaux misés sur les ALV ne sont pas divulgués.
32
Voir à la page 53 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 22
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 23
10,7% en 1999-200033 et de 9,6% en 2004-200534. Les DPJ correspondantes sont alors
de $ 988, $ 1 523 et $ 2 146. Cette croissance fulgurante, nettement au-delà du second
critère du jeu sécuritaire35, suggère des problèmes de jeu fréquents ou sévères parmi la
clientèle régulière des ALV. Pour ces années, les DPC sont de $ 84, $ 163 et $ 206.
Figure 11
Croissance de la dépense au jeu sur ALV en fonction
de leur utilisation par la population adulte du Québec
14
12
10
8
6
4
2
0
10,7
9,6
8,5
7,8
4,7
9,3
1996-1997
1999-2000
10,8
2002
12,4
2004-2005
% de la population adulte qui joue sur les ALV
Dépense annuelle au jeu (en centaines de millions)
En 2002, selon l’étude de prévalence, la DPC était de $ 183 pour une DPJ de $ 2 346.
L’auto-estimation des joueurs étant de $884 (voir Tableau 4), celle-ci ne reflète que 38%
de l’estimation financière.
33
Voir à la page 53 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec.
34
Voir à la page 26 du rapport annuel 2004-2005 de Loto-Québec.
35
Le second critère consiste à ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars
(ou 500 à 1000 dollars si on inclut les billets de loterie). Voir dans : Currie, S. R., Hodgins, D. C.,
Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in the
general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101,
570-580.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 23
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 24
Tableau 4
Participation de la population québécoise aux AÉJ (MAS + ALV)
Fréquence de jeu
Dépense annuelle
Année
Activité
À vie
Annuelle
Mensuelle
Hebdomadaire
Moyenne
Médiane
1996
AÉJ
40,2%
21,0 %
4,4 %
1,6 %
2002
AÉJ
21,3 %
471 $
50 $
2002
ALV
7,8 %
884 $
100 $
Entre 1994-1995 et 2000-2001, la croissance des revenus des ALV a été très forte.
Pendant quatre années, les revenus se sont presque stabilisés avant d’entreprendre ce
qui semble être une seconde période de croissance plus accentuée depuis 2004-2005.
Toutefois, la loi sur l’interdiction du tabac va interrompre, au moins transitoirement, cette
reprise de croissance.
Figure 12
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans les loteries vidéo
$1 250
$1 000
$750
$500
$250
$0
1994-95
1995-96
1996-97
1997-98
1998-99
1999-00
2000-01
2001-02
2002-03 2003-04
2004-05 2005-06
Lorsque la dépense au jeu sur ALV dans les provinces canadiennes est analysée en
fonction du nombre d’années écoulées depuis leur implantation (voir Figure 13), il
semble que l’évolution de la dépense globale sur ALV suit à peu près la même courbe
de développement peu importe le lieu d’implantation36. En ce sens, l’attrait des ALV s’est
développé à peu près au même rythme au Québec que dans les autres provinces
canadiennes. Ce constat est alors indépendant du nombre d’ALV ou de sites de jeu. Les
montants dépensés au jeu sont toutefois supérieurs dans les prairies. À noter que, pour
cinq provinces, les baisses constatées à la dernière année reflètent les conséquences
des lois anti-tabac déjà adoptées dans ces provinces.
36
La cassure de la courbe à l’an 8 pour l’Île-du-Prince-Édouard et à l’an 10 pour le NouveauBrunswick reflète le retrait des ALV distribués dans des commerces qui ne détenaient pas de
permis d’alcool.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 24
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 25
Figure 13
Variation de la dépense annuelle moyenne per capita sur ALV
en fonction du temps écoulé depuis leur implantation
dans chaque province canadienne
Revenu net annuel des ALV
/ population adulte
$400
Manitoba (1991-92)
$350
Saskatchew an
(1993-94)
Alberta (1991-92)
$300
$250
Terre-Neuve-etLabrador (1990-91)
Nouvelle-Écosse
Québec (1994-95) (1991-92)
$200
$150
Île-du-PrinceÉdouard (1991-92)
$100
NouveauBrunsw ick (199091)
$50
An 16
An 15
An 14
An 13
An 12
An 11
An 10
An 9
An 8
An 7
An 6
An 5
An 4
An 3
An 2
An 1
$0
Années depuis l'implantation des ALV
Enfin, il est opportun de noter (voir Figure 14)37 que des données de la firme KPMG
permettent de comparer la dépense au jeu sur les ALV situés dans les hippodromes du
Québec à celle des ALV disséminés dans les bars du Québec.
En 2002-2003, les ALV des hippodromes ont rapporté en moyenne $102 093, tandis
que les ALV dans les bars ont rapporté en moyenne $74 475. Si la tendance est
maintenue, chaque ALV déplacé d’un bar vers un salon de jeu pourrait augmenter la
dépense au jeu de $27 618 annuellement, soit une augmentation de 37% du bénéfice
brut.
Ces données financières illustrent la complexité du concept d’accessibilité car le
déplacement d’appareils peut susciter un changement dans l’attrait que ceux-ci exercent
auprès de la population locale. Dès lors, en déplaçant des ALV dans les hippodromes,
une augmentation du bénéfice pourrait annuler les conséquences anticipées de la
37
Données calculées à partir du document : KPMG. (2004). Current and potential racinos in
Canada.
http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf
À titre de comparaison, les données de 2004 pour l’hippodrome de Trois-Rivières proviennent
d’un rapport qui a été présenté au député André Gabias : Caron, C. et al. (2004). La survie des
courses à Trois-Rivières. Trois-Rivières, QC : Groupe de travail Hippodrome de Trois-Rivières
2004.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 25
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 26
réduction annoncée du nombre d’ALV aux alentours des hippodromes de Québec et de
Trois-Rivières.
Figure 14
Revenu annuel net moyen
par ALV
Dépense au jeu sur les ALV selon leur emplacement
$120 000
$100 000
$80 000
$60 000
$40 000
$20 000
$0
Aylmer
Montréal
Québec
Trois-Rivières
ALV hors
hippodromes
Hippodrome où les ALV sont situés
2002-2003
2004
1.5.4 La dépense dans le bingo en réseau
Le bingo en réseau est une activité que Loto-Québec a inséré dans les soirées de bingo
des organismes à but non lucratif. Le bingo en réseau existe depuis le 2 décembre
199738. Depuis le début, les Québécois y ont dépensé39 environ 180 millions de dollars.
Il n’existe pas de données permettant de calculer la DPJ.
Figure 15
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans le bingo en réseau
$30
$20
$10
$0
1997-98
38
1998-99
1999-00
2000-01
2001-02
2002-03
2003-04
2004-05
2005-06
Voir à la page 19 du rapport annuel 1997-1998 de Loto-Québec.
39
Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense au bingo équivaut au revenu de LotoQuébec moins les lots retournés aux joueurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 26
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 27
1.5.5 La dépense dans les loteries multimédia
Les jeux multimédias génèrent des revenus depuis février 200040, mais la dépense au
jeu ne peut pas être inférée des royautés41. Quoiqu’il en soit, en 2005-2006, ces jeux
n’ont procuré que 0,03% des revenus de Loto-Québec.
1.6 Le bingo des organismes charitables
Tous les bingos des organismes à but non lucratif (OBNL)42 sont supervisés par la
Régie des alcools, des courses et des jeux du Québec. Les rapports annuels de cet
organisme public indiquent les revenus nets de l’ensemble des bingos licenciés entre
1983-1984 et 2001-2002. Depuis l’année 2002-2003, la RACJ ne divulgue plus la
dépense au jeu dans les bingos des organismes charitables.
Figure 16
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans le bingo charitable
$80
$60
$40
$20
$0
La barre colorée en rouge marque l’avènement du casino de Montréal, et la barre en
jaune celle des ALV. Puis, la barre colorée en vert indique le début du bingo en réseau.
En 1996-1997, la DPC a été de $ 11,57 et la DPJ de $ 76. En 2001-2002, la DPC a été
de $ 10,75 pour une DPJ d’environ43 $ 119. Bien que des personnes y dépensent
quotidiennement, le bingo des organismes charitables ne motive pas de requête d’aide
auprès des organismes communautaires ou des services cliniques.
40
Voir à la page 57 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec.
41
En page 67 du rapport annuel 1999-2000 de Loto-Québec, il est indiqué : « Les revenus
représentent les redevances basées sur un certain pourcentage du total du prix de vente au
consommateur de la loterie cédérom. »
42
Loto-Québec utilise plutôt l’expression « organisation sans but lucratif » (OSBL).
43
Il aurait préférable d’utiliser la DPC de 2002-2003 pour ce calcul. Malheureusement, cette
donnée ne figure plus parmi les rapports annuels de la RACJ.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 27
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 28
Tableau 5
Participation de la population québécoise au bingo
Fréquence de jeu
Dépense annuelle
Année
Activité
À vie
Annuelle
Mensuelle
Hebdomadaire
1996
Bingo
40,5%
15,1 %
5,1 %
3,0 %
2002
Bingo
9,0 %
Moyenne
Médiane
423 $
55 $
1.7 Les hippodromes, les salons de jeu et partiel
Il existe au Québec quatre hippodromes à Aylmer, Montréal, Québec et Trois-Rivières,
18 salons de pari répartis dans plusieurs régions de la province, ainsi qu’un système de
pari, par téléphone ou Internet, appelé Paritel. Quel que soit l’endroit où les paris sont
faits, ces montants sont cumulés dans les revenus généraux du pari mutuel.
La dépense au pari mutuel (voir Figure 17) est compilée à partir de trois sources. Avant
1980-1981, les données ont été inférées à partir des Comptes publics du Québec44.
Entre 1980-1981 et 1991-1992, les données proviennent des rapports annuels de la
Commission des courses de chevaux du Québec. Par la suite et depuis, les données
sont publiées par l’Agence canadienne du pari mutuel45. À noter que les montants
rapportés comme étant les montants misés sont en fait la dépense au jeu46. Au cours
des 50 dernières années, les Québécois ont ainsi parié plus de 9 milliards de dollars
dans les courses de chevaux.
44
Les données antérieures à 1980-1981 sont une estimation calculée à partir de la taxe sur le
pari mutuel publiée dans les comptes publics du Québec. Cette taxe est présumée refléter 10,3%
des revenus des courses. Nous n’avons pas déterminé si cette taxe a été constante jusqu’en
1980. Quoiqu’il en soit, cette méthode sous-estime la dépense au jeu puisqu’un bond de 76
millions de dollars apparaît exagéré entre 1979-1980 et 1980-1981.
45
http://www.cpma-acpm.gc.ca/francais/acpm.htm. Il s’agit cependant de données recueillies du
1 janvier au 31 décembre.
46
La division des hippodromes d’Agriculture Canada rapporte, à la page 14 de la Revue annuelle
1990, un total des paris égal à $ 315 340 728 au Québec. Il s’agit en fait des revenus bruts, soit
les montants misés moins les lots remis aux joueurs. Les montants pariés ont été rapportés par
ailleurs dans un graphique de la Commission des courses de chevaux du Québec :
Pour les années 1981 à 1990, les montants misés au pari mutuel sont
indiqués dans un graphique à la page 28 du rapport annuel 1989-1990 de la
Commission des courses de chevaux du Québec. Ainsi, pour des revenus
rapportés de $ 317 140 789 en 1989-1990, des mises totales d’environ 1,150
milliards de dollars sont indiquées dans le graphique. Ce graphique permet
d’estimer le taux de remise, entre 1983 et 1990, à 63,7%, 64,9%, 66,6%,
70,1%, 73,3%, 72,9%, 71,3% et 72,5% respectivement.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 28
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 29
Figure 17
$400
$300
$200
$100
$0
1955-1956
1956-1957
1957-1958
1958-1959
1959-1960
1960-1961
1961-1962
1962-1963
1963-1964
1964-1965
1965-1966
1966-1967
1967-1968
1968-1969
1969-1970
1970-1971
1971-1972
1972-1973
1973-1974
1974-1975
1975-1976
1976-1977
1977-1978
1978-1979
1979-1980
1980-1981
1981-1982
1982-1983
1983-1984
1984-1985
1985-1986
1986-1987
1987-1988
1988-1989
1989-1990
1990-1991
1991-1992
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans le pari mutuel
La courbe de la dépense au jeu peut être divisée en sept intervalles :
1. Sans compétition jusqu’en 1970, les revenus du pari mutuel ont été en constante
progression.
2. L’avènement des loteries de Loto-Québec en 1970 (barre colorée en noir) pourrait avoir
temporairement stoppé la progression des revenus jusqu’en 1974-1975.
3. Par la suite, la progression reprend son cours jusqu’en 1980-1981. À noter que le saut de 76
millions entre 1979-1980 et 1980-1981 est un artéfact dû à un changement dans la méthode
d’estimation de la dépense au jeu.
4. Entre 1980-1981 et 1987-1988, un premier déclin est constaté. Il pourrait s’agir d’une
conséquence de l’arrivée des appareils de poker vidéo (APV) survenue à partir de juin 1976
(barre colorée en bleu) mais qui ont surtout connu une forte progression en 1982.
5. Entre 1988-1989 et 1991-1992, il y a une recrudescence de la dépense au pari mutuel. Il
pourrait s’agir d’une réponse des parieurs au fait que le taux de remise du pari mutuel est
passé de 64% en 1983 à 73% en 1987 (barre colorée en rose). Selon les appareils saisis,
les APV avaient alors un taux de remise maximal de 72%.
6. Entre 1992-1993 et 1995-1996, se produit un second déclin encore plus accentué. Le casino
de Montréal a ouvert ses portes en 1993 (barre colorée en rouge) et les ALV ont été
implantés en 1994 (barre colorée en jaune).
7. Enfin depuis l’année 1996-1997, la dépense au jeu a ré-augmenté pour se stabiliser depuis.
À cette occasion, le gouvernement du Québec a choisi d’implanter un grand nombre
d’appareils dans des salons de jeu attenant aux hippodromes du Québec (barre colorée en
orange).
L’avènement du bingo en réseau (barre colorée en vert) ne semble pas avoir eu d’impact.
Il existe des données manquantes pour les années 1963-1964 et 1971-1972.
Cette figure est intéressante parce que l’implantation des ALV dans les hippodromes a
vraisemblablement stimulé et stabilisé la dépense au pari mutuel. Il ne s’agit pas ici de
revenus supplémentaires provenant des ALV, mais bien d’une dépense additionnelle au
pari mutuel. Pourtant, entre-temps, la clientèle annuelle des hippodromes est passée de
3,8% de la population adulte en 1996 à 1,9% en 2002 (voir Tableau 6).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 29
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 30
Tableau 6
Participation de la population québécoise aux courses de chevaux
Fréquence de jeu
Dépense annuelle
Année
Activité
À vie
Annuelle
Mensuelle
Hebdomadaire
1996
Courses
24,7%
3,8 %
0,7 %
0,4 %
2002
Courses
Moyenne
Médiane
826 $
25 $
1,9 %
En 1996, la DPC a été de $ 30,67 pour une DPJ de $ 807. En 2002, la DPC a été de
$ 31,24, et DPJ a été de $ 1 523. Sans équivoque, la clientèle diminue plus rapidement
que les revenus des hippodromes ce qui masque plausiblement une aggravation des
problèmes des joueurs restants.
1.8 Les tirages des organismes communautaires ou commerciaux
Tous les tirages47 des organismes communautaires ou commerciaux sont supervisés
par la RACJ. Les rapports annuels de cet organisme public indiquent les revenus nets
de l’ensemble de ces tirages entre 1996-1997 et 2001-2002. Il n’est cependant pas
possible d’analyser la DPJ. Néanmoins, la masse de la dépense globale au jeu n’y est
pas très élevée compte tenu de la popularité des tirages au Québec. En principe, les
tirages commerciaux ne coûtent rien aux participants.
Figure 18
M illion s
Dépense annuelle des adultes québécois dans les activités de tirage
$30
$20
$10
$0
La barre colorée en rouge marque l’avènement du casino de Montréal, et la barre en
jaune celle des ALV. Puis, la barre colorée en vert indique le début du bingo en réseau.
1.9 Les casinos des organismes charitables
Les casinos des organismes charitables ne posent aucun risque pour la population.
Dans la figure suivante, nous comparons la dépense au jeu dans ces casinos, les seuls
47
Les tirages dont il est ici mention impliquent l’achat d’un billet, par exemple le tirage d’une
maison pour venir en aide à un organisme charitable.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 30
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 31
disponibles au Québec avant 1993 (en vert), à celle réalisées dans les casinos de LotoQuébec depuis 1993 (en rouge).
Figure 19
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans les casinos charitables
$800
$700
$600
$500
$400
$300
$200
$100
$0
2005-2006
2004-2005
2003-2004
2002-2003
2001-2002
2000-2001
1999-2000
1998-1999
1997-1998
1996-1997
1995-1996
1994-1995
1993-1994
1992-1993
1991-1992
1990-1991
1989-1990
1988-1989
Les barres colorées en vert indiquent la dépense annuelle dans les casinos charitables.
Celles-ci contrastent avec les barres colorées en rouge indiquant la dépense dans les
casinos de Loto-Québec.
1.10 La spéculation boursière
Dans la mesure où l’économie croît à long terme, l’activité boursière est à espérance
positive de gain. Toutefois, certaines personnes spéculent à la bourse autrement que
par une analyse découlant de connaissances approfondies sur les entreprises inscrites.
Lorsque les personnes ne font que de l’analyse technique limitée aux fluctuations
passées des titres, avec des transactions fréquentes à court terme, il semble qu’il
s’agisse d’un jeu à espérance négative de gain. L’ampleur de ce phénomène n’a jamais
été mesurée. Néanmoins, il peut être considéré que les Québécois participent à ce type
de spéculation, et interprètent parfois cette activité comme un jeu. La comparaison entre
les études de prévalence de 1996 et 2002 suggèrent une diminution de l’intérêt dans la
spéculation boursière (voir Tableau suivant).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 31
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 32
Tableau 7
Participation de la population québécoise à la spéculation boursière
Fréquence de jeu
Dépense annuelle
Année
Activité
À vie
Annuelle
Mensuelle
Hebdomadaire
1996
Bourse
11,3%
7,1 %
3,3 %
2,2 %
2002
Bourse
Moyenne
Médiane
2,2%
1.11 Les activités des nations amérindiennes
Depuis le 10 juin 1996, il existe au Québec un organisme amérindien appelé la
« Kahnawake gaming commission48 » qui supervise des activités de jeu sur le territoire
Mohawk ou celles diffusées à partir de cette réserve. La plupart des licences émises
concernent des casinos virtuels sur Internet. Les nations amérindiennes organisent
aussi des bingos qui suivent des règles différentes de celles édictées par le
gouvernement du Québec. Il n’existe pas de statistiques valides concernant la dépense
annelle des Québécois dans ces activités.
1.12 L’offre de jeu des juridictions étrangères
Avant 1970, les Québécois auraient beaucoup dépensé dans les loteries étrangères49,
notamment en achetant des billets du Sweepstake irlandais. Toutefois, l’avènement des
loteries publiques de Loto-Québec semble avoir complètement endigué cette fuite
économique.
L’ouverture des casinos québécois a été motivée par l’attrait qu’exerçait les casinos
américains sur la population du Québec. Selon Loto-Québec50, celle-ci y aurait dépensé
68 millions de dollars en 1989 et 135 millions de dollars en 1991. Il s’agit d’une DPC de
$ 12,87 et $ 25,07. Avec les casinos établis au Québec, cette dépense a quintuplé
depuis.
Enfin, les croisières en mer commencent à être populaires auprès des Québécois. Ces
paquebots constituent de véritables casinos flottants. Aucune estimation n’est disponible
à leur sujet.
48
http://www.kahnawake.com/gamingcommission
49
Voir l’ensemble du dossier dans : Loto-Québec. (1984). Dossier Québec 1901-1970.
Quatrième dossier des périodiques de Loto-Québec. Montréal, QC : auteurs.
50
Voir aux pages 66-68 dans : Bizier, H.-A. (1996). Loto-Québec: un succès collectif. Montréal,
QC: Forces
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 32
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 33
1.13 Le jeu sur Internet
En raison des lois canadiennes, le gouvernement du Québec a le pouvoir exclusif de
réglementer le jeu dans l’ensemble de son territoire. À cet égard, il n’a émis aucune
licence concernant le jeu sur Internet qui est, de ce fait, a priori51 illégal. Les résultats de
l’étude de prévalence du jeu pathologique au Québec, réalisée en 2002, indiquent
néanmoins que 0,3% de la population adulte52 du Québec a joué sur Internet cette
année-là. Cela représente environ 14 000 joueurs53 qui ont parié en moyenne 1 495
dollars. Au total, les adultes québécois auraient ainsi investi environ 20,9 millions de
dollars en 2002 dans l’ensemble des activités de jeu disponibles sur Internet.
1.14 Les activités illégales de jeu
Entre 1979 et 1991, la Régie des loteries du Québec émettait des licences pour des
appareils de poker vidéo que l’on retrouvait dans différents commerces54. Ceux-ci
constituent ce qui est désigné comme le marché gris puisque, sans être légaux, ils
étaient tolérés par les autorités. Il y en avait 978 en 1981-1982, et un sommet a été
atteint en 1990-1991 avec 18 581 licences. Avec l’implantation des ALV de Loto-Québec
en juin 1994, ce marché a été complètement résorbé en 199655. La dépense au jeu dans
ces appareils n’est pas connue précisément. Elle aurait pu atteindre 352 millions de
dollars en 199156.
Le marché clandestin, ou marché noir, du jeu est constitué de tout dispositif de jeu ne
détenant pas de licence. Aucune estimation de la dépense au jeu n’est possible sur ce
marché, à toutes fins pratiques, invisible.
51
Les nations amérindiennes du Canada affirment ne pas être contraintes par les lois
provinciales comme les nations amérindiennes des États-Unis ne sont pas contraintes par les lois
des états en matière de jeu. La volonté ou le pouvoir des gouvernements provinciaux à
subordonner les nations amérindiennes aux lois provinciales sont actuellement accompagnés de
tolérance. Par ailleurs, les casinos virtuels licenciés légalement à l’étranger pourraient ne pas
être tenus responsables des infractions commises par les citoyens canadiens qui les utilisent.
52
Voir à la page 10 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., &
Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en
2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval.
53
Voir à la page 41 dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., &
Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en
2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval.
54
Voir à la page 13 dans le rapport annuel 1993-1994 de la Régie des alcools, des courses et
des jeux du Québec.
55
Voir à la page 8 du Plan d’action 2003-2006 de Loto-Québec.
56
Voir la section 3.2.2.3 - La rentabilité des APV à la page 69 du présent document au Chapitre 3
- La dangerosité des appareils électroniques de jeu.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 33
Chapitre 1 - La dépense au jeu de la population québécoise - 34
Loto-Québec57 rapporte que les marchés gris et clandestin auraient englobé 25 000
appareils de jeu durant les années 80, et que ceux-ci auraient généré (annuellement)
des revenus de 600 millions de dollars, soit un revenu annuel d’environ 24 000 dollars
par appareil. Une telle estimation équivaut à la dépense au jeu, en 1997-1998, sur les
ALV de Loto-Québec, à celle des trois casinos la même année, ou à trois fois et demie
les montants misés au pari mutuel. Il est douteux qu’une activité clandestine ait pu
égaler celle de casinos, d’ALV ou d’hippodromes accessibles sans entrave.
1.15 En conclusion
La dépense au jeu de la population québécoise a subi une croissance continuelle entre
1970 et 1993 avant de connaître une augmentation spectaculaire entre 1993 et 2001.
L’avènement des casinos et des ALV, en 1993 et 1994, ne semble pas avoir amoindri la
croissance des loteries, pas plus que le bingo en réseau ne l’a fait plus tard en 1997. De
même, l’accroissement de la dépense au jeu dans les activités de Loto-Québec est telle
qu’elle dépasse de beaucoup l’ensemble des montants misés dans le pari mutuel.
Sans équivoque, il n’y a pas eu de substitution importante entre les marchés. Les dollars
consacrés à une activité de jeu ne semblent pas provenir d’une autre activité de jeu,
précédemment plus populaire, mais d’autres secteurs du budget des Québécois.
Enfin, l’analyse de la dépense au jeu indique que les DPJ sont très élevées pour les
ALV, les casinos et le pari mutuel. Eu égard au second critère du jeu sécuritaire, il est
probable qu’une bonne partie de ces clientèles éprouvent des problèmes de jeu.
57
Voir à la page 8 du Plan d’action 2003-2006 de Loto-Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 34
Chapitre 2
La loterie vidéo : état de la situation au Canada
En 1988 aux États-Unis, pour la première fois, le gouvernement fédéral a autorisé les
nations amérindiennes à exploiter des établissements de jeu offrant les activités de jeu
légales dans l’état où elles sont établies58. Les revenus des nations amérindiennes
n’étant pas taxables par les états59, ces derniers pouvaient subir d’importantes pertes
fiscales. Les états ont alors tenté de retenir l’argent du jeu soit en négociant un partage
de revenus ou en opposant des casinos d’état60. Certains états, moins fortunés,
n’étaient pas en mesure de rivaliser d’imposants casinos amérindiens, ou ceux d’état
voisins plus fortunés. Un moyen moins dispendieux pour tenter de retenir l’argent du jeu
a été d’implanter des parcs d’ALV dans l’environnement immédiat des populations.
Ainsi, les premiers ALV ont été implantés en 1989, dans l’état du Dakota du Sud. Pour la
première fois61 depuis 195162, les appareils de jeu sortaient des casinos.
Au Canada, les AÉJ sont légaux depuis le 31 décembre 1985, mais uniquement s’ils
sont exploités par les gouvernementaux provinciaux63. Les nations amérindiennes ne
peuvent pas exploiter des dispositifs de jeu sans l’aval des provinces. Le premier casino
canadien a ouvert ses portes à Fort Garry, au Manitoba, en décembre 1989. Bien loin de
là, le 1 décembre 1990, le gouvernement du Nouveau-Brunswick a développé un
premier parc d’ALV. Second casinotier, le Québec n’a ouvert les portes du casino de
Montréal qu’en octobre 1993 alors que sept provinces avaient déjà déployé leur parc
d’ALV (voir Tableau 8). Ainsi, le déploiement des ALV au Canada n’a pas été motivé par
la menace d’une fuite économique vers l’économie amérindienne ou vers des juridictions
voisines. En fait, les provinces canadiennes ont surtout mis leurs ALV en compétition
avec leurs propres casinos. En particulier, le Québec n’était pas menacé par une offre
de jeu massive à ses frontières, ni même par un marché clandestin.
58
(a) McCulloch, A. M. (1994). The politics of indian gaming : tribe/state relations and american
federalism. Publius, 24(3), 99-112. (b) Greene, B. M. (1996). The reservation gambling fury :
modern Indian uprising or unfair restraint on tribal sovereignty? BYU journal of public law, 10, 93116. (c) Barker, T., & Britz, M. (2000). Jokers wild. Legalized gambling in the twenty-first century.
Westport, Connecticut : Praeger.
59
Voir à la page 14 dans : Johnson, R. N. (2004, October). Indian casinos : another tragedy of
the commons? Draft paper of a chapter to appear in T. L. Anderson, B. Benson, & T. Flanagan
(Eds), Self-determination: the other path for Native Americans.
60
Voir aux pages 15 à 28 dans : Johnson, R. N. (2004, October). Indian casinos : another
tragedy of the commons? Draft paper of a chapter to appear in T. L. Anderson, B. Benson, & T.
Flanagan (Eds), Self-determination: the other path for Native Americans.
61
À l’exception de deux expériences pilotes au Montana et en Caroline du Sud.
62
En raison du Johnson Act : 15 USC Section 1172, Chapter 24 – Transportation of Gambling
Devices.
63
Voir notamment aux pages 17 à 20 dans : Campbell, C. S., Hartnagel, T. F., & Smith, G. J.
(2005, July 6). The legalization of gambling in Canada. Prepared for : The Law commission
Canada : « What is a crime? ».
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 36
Tableau 8
Codes des couleurs des provinces et date d’implantation des ALV
Province
Nouveau-Brunswick
Terre-Neuve-et-Labrador
Île-du-Prince-Édouard
Nouvelle-Écosse
Manitoba
Alberta
Saskatchewan
Québec
Ontario
Colombie-Britannique
Date d'implantation
Décembre 1990
Décembre 1990
Août 1991
Mai 1991
Novembre 1991
Mars 1992
Juillet 1993
Juin 1994
Seuls l’Ontario et la Colombie-Britannique n’ont pas de parc d’ALV car ces provinces ont
davantage investi dans le développement de casinos bien pourvus en MAS. L’Ontario a
aussi développé des racinos64, soit des salons de jeu situés dans des hippodromes. La
Colombie-Britannique commence aussi à en développer. Au Québec, les racinos
existent depuis 1996 aux hippodromes de Montréal, Québec, Trois-Rivières et Aylmer.
2.1 Le nombre d’ALV au Canada
Le nombre d’ALV a connu une croissance rapide jusqu’en 1996 alors que le marché
s’est stabilisé à un peu moins de 40 000 ALV (voir Figure 20).
Figure 20
Évolution du nombre d'ALV au Canada
40000
35000
30000
25000
20000
15000
10000
5000
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
1999-00
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
1993-94
1992-93
1991-92
1990-91
0
64
Il s’agit d’un néologisme contractant les expressions anglaises racing et casino. On y trouve un
grand nombre d’appareils électroniques de jeu similaires aux MAS et aux ALV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 36
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 37
Depuis 1995-1996, le Québec constitue la province où il existe le plus d’ALV au Canada.
En contrepartie, avec l’Alberta, le Québec est la province où il existe le moins d’ALV par
groupe de 10 000 personnes adultes (voir Figure 21).
Figure 21
70
60
50
40
30
20
10
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
1999-00
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
1993-94
1992-93
1991-92
0
1990-91
Nombre d'ALV par 10 000 adultes
Nombre d'ALV par 10 000 adultes au Canada
Ceci ne signifie pas que l’offre de jeu y est moindre car, parmi les provinces qui offrent
des ALV, l’Alberta et le Québec possèdent les populations les plus urbanisées65 (voir
Figure 22). Dans un tel contexte, les zones plus densément peuplées peuvent être
davantage exposées malgré un nombre moindre d’appareils.
Figure 22
81%
85%
ColombieBritannique
64%
Alberta
Manitoba
Saskatchewan
72%
85%
Ontario
Québec
50%
NouveauBrunswick
56%
NouvelleÉcosse
44%
Île-du-PrinceÉdouard
58%
Terre-Neuveet-Labrador
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
80%
Proportion de la population habitant en milieu urbain
Au Québec, après avoir rapidement atteint un sommet de 4 370 en 1996-1997, le
nombre de sites où se trouvent des ALV est en constante régression (Voir Figure 23).
65
Voir Statistique Canada, tableau numéro 01090200
http://dissemination.statcan.ca/english/freepub/82-221-XIE/00503/tables/html/44_01.htm.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 37
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 38
En 2005-2006, le nombre de sites n’était plus que de 3 122, soit une réduction de 29%
depuis son maximum. De plus, le nombre d’ALV a atteint un maximum de 15 314 en
1998-1999 pour diminuer ensuite à 13 516 en 2005-2006, soit une diminution de 12%
(Voir Figure 24). À noter que malgré cette réduction continuelle, depuis déjà plusieurs
années, la dépense au jeu des Québécois a toujours été en progression (voir à la page
22 dans ce document).
Figure 23
Figure 24
Nombre de sites
Nombre d'ALV
16000
5000
4000
3000
2000
1000
0
12000
8000
4000
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
0
2.2 Les paramètres de jeu sur ALV
Les ALV sont à peu près tous semblables au Canada. Le taux de remise moyen est de
92% au Québec et en Alberta. Il est de 92,5% en Saskatchewan. Les provinces de
l’Atlantique offrent plutôt des jeux dont le taux de remise varie entre 93% et 95%. Le
Manitoba ne publie à peu près aucune information concernant ses ALV. Les jeux offerts
sont des clones les uns des autres. Ceux-ci sont partout un mélange de jeux de lignes et
de jeux de cartes avec, à l’occasion, des jeux de keno ou de bingo.
Bien qu’ils soient d’apparence semblables, ces petites variations dans les taux de
remise pourraient faire varier considérablement la dangerosité des appareils.
2.3 Les revenus des ALV
Malgré que le Québec et l’Alberta aient un ratio d’ALV per capita moindre, les appareils
rapportent davantage que ceux des autres provinces (voir Figure 26 par rapport à la
Figure 25). En 2004-2005, parmi l’ensemble des provinces qui offrent des ALV, la
population du Québec équivalait à 51% de la population. À cet égard, son parc d’ALV ne
représente que 36% de tous les ALV au Canada.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 38
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 39
Figure 25
Répartition des ALV au Canada en 2004-2005
NouveauBrunsw ick
7%
NouvelleÉcosse
10%
Québec
36%
Manitoba
14%
Île-du-PrinceÉdouard
1% Terre-Neuve-
Saskatchew an
10%
Alberta
15%
et-Labrador
7%
En contrepartie, le Québec retire 41% des profits. Seuls le Québec et l’Alberta ont
obtenu une plus grande part des profits compte tenu de la proportion des ALV qu’ils
possèdent.
Figure 26
Répartition des profits tirés des ALV au Canada
en 2004-2005
NouveauBrunsw ick
Nouvelle5%
Écosse
7%
Île-du-PrinceÉdouard
1%
Terre-Neuveet-Labrador
5%
Québec
41%
Manitoba
10%
Saskatchew an
9%
Alberta
22%
2.4 La dépense par joueur
La dépense per capita est un indice trop général de l’impact des ALV, car seulement
une minorité de la population s’intéresse aux jeux qui y sont offerts.
Huit provinces ont publié les taux de pénétration annuels des ALV dans leur population
(voir Figure 27). Ainsi, entre 1992 et 2005, 15% de la population adulte a joué au moins
une fois sur les ALV. Il est à noter que le Québec est la province où la population
s’intéresse le moins aux ALV. En ce sens, la dépense per capita moindre au Québec
cache une dépense moyenne supérieure par joueur (voir Figure 28). En ce qui concerne
ces deux figures, le détail du calcul, pour les données du Québec, est indiqué dans le
Tableau 9. Non explicité ici, le même calcul a été fait pour les autres provinces.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 39
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 40
Figure 27
Taux de pénétration annuelle des ALV au Canada
30%
25%
20%
15%
10%
5%
Terre-Neuve-et-Labrador
Nouvelle-Écosse
Nouveau-Brunsw ick
Île-du-Prince-Édouard
Québec
Manitoba
Saskatchew an
Alberta
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
0%
Figure 28
Bénéfice des ALV par joueur annuel
$3 000
$2 500
$2 000
$1 500
$1 000
$500
Terre-Neuve-et-Labrador
Nouvelle-Écosse
Nouveau-Brunsw ick
Île-du-Prince-Édouard
Québec
Manitoba
Saskatchew an
Alberta
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
$0
Tableau 9
Comparaison de la dépense per capita et de la dépense par joueur sur les ALV de Loto-Québec
Année
Revenu net des
1
ALV
Population
2
adulte
Dépense
3
per capita
Taux de
4
pénétration
Nombre de
5
joueurs
Dépense par
6
joueur
1997
$466 286 000
5 609 967
$ 83,12
8,5%
476 847
$ 977,85
1999
$767 969 000
5 706 445
$134,58
10,7%
610 590
$1 257,75
2002
$1 067 506 000
5 878 550
$ 181,59
7,8%
458 527
$2 328,12
2004
$1 128 847 000
6 002 655
$ 188,06
9,6%
576 255
$1 958,94
1
Bénéfice brut des ALV au 31 mars selon les rapports annuels de Loto-Québec.
Population le 1 juillet selon Statistique Canada, tableau CANSIM 051-00011,2,6.
3
Revenu net des ALV divisé par la taille de la population adulte.
4
Selon les rapports annuels de Loto-Québec ainsi que l’étude de prévalence de 2002.
5
Nombre de joueurs annuels = population adulte multipliée par le taux de pénétration annuel.
6
Revenu net des ALV divisé par le nombre de joueurs annuels.
2
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 40
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 41
Ce tableau témoigne à quel point la dépense per capita renseigne mal sur la réalité des
joueurs. Ce qui apparaît une dépense annuelle per capita de moins de 200 dollars est
en fait une dépense d’environ 2 000 dollars par joueur annuel. Et, encore, les joueurs
annuels englobent beaucoup de personnes qui ne jouent que sporadiquement. Si les
données étaient disponibles pour les joueurs mensuels, cette dépense par joueur serait
beaucoup plus élevée; et encore davantage pour les joueurs qui jouent régulièrement à
chaque semaine.
2.5 Le comportement des joueurs
Douze études provinciales de prévalence du jeu, deux rapports annuels de LotoQuébec, ainsi qu’une étude pancanadienne, ont publié récemment des informations
décrivant spécifiquement les comportements des joueurs sur les MAS ou sur les ALV.
Parfois, ces études publient des informations comparant la situation actuelle aux années
antérieures. Les informations présentées ci-après proviennent donc de ces études
auxquelles nous nous référons en ayant recours aux sigles suivants (voir Tableau 10).
Tableau 10
Études de prévalence disponibles pour évaluer
les comportements de jeu sur les MAS et les ALV
Sigles
Références
MAS
ALV
TN2005
Terre-Neuve-et-Labrador,
2005
Marketquest research group, Inc. (2005, November).
Newfoundland and Labrador gambling prevalence study.
St John's, NL: Government of Newfoundland and
Labrador, Department of health and community services.
Non
Oui
IPE1999
IPE2005
Île-du-Prince-Édouard, 2005
Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem
gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, PEI:
Prince Edward Island Department of Health.
Non
Oui
NÉ1996
NÉ1997
NÉ2003
Nouvelle-Écosse, 2003a
Schrans, T., & Schellinck, T. (2004, June). 2003 Nova
Scotia gambling prevalence study. Final report. Halifax,
NS: Nova Scotia office of health promotion.
Oui
Oui
NB1992
NB1996
Nouveau-Brunswick, 1996
Baseline market research. (1996) Appendix E : Final
report, prevalence study, problem gambling, wave 2. Dans
Video lottery program review.
Non
Oui
NB2001
Nouveau-Brunswick, 2001
Focal research (2001). 2001 Survey of gambling and
problem gambling in New Brunswick. Moncton, NB: New
Brunswick department of health and wellness.
Non
Oui
QC1997
QC1999
Québec, 1999
Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1999-2000.
Montréal, QC : auteur.
Oui
Oui
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 41
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 42
Tableau 10
Études de prévalence disponibles pour évaluer
les comportements de jeu sur les MAS et les ALV
QC2002
Québec, 2002
Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S.,
Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes
de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec
et Montréal, QC : Université Laval et Institut national de
santé publique du Québec.
Oui
Oui
Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C.,
Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et
jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002.
Montréal et Québec, QC : Institut national de santé
publique du Québec et Université Laval.
QC2004
Québec, 2004
Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une
gestion responsable. Montréal, QC : auteur.
Oui
Oui
ON2001
Ontario, 2001
Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001,
December 04). Measuring gambling and problem gambling
in Ontario. Toronto, ON: Canadian centre on substance
abuse. Responsible gambling council (Ontario).
Oui
Non
ON2005
Ontario, 2005
Wiebe, J., Mun, P., & Kauffman, N. (2006, May). Gambling
and problem gambling in Ontario 2005. Submitted to the
Ontario problem gambling research centre.
Oui
Non
MA2001
Manitoba, 2001
Patton, D., Brown, D., Dhaliwal, J., Pankratz, C., &
Broszeit, B. (2002 april). Gambling involvement and
problem gambling in Manitoba. Winnipeg, Manitoba:
Addictions foundation of Manitoba.
Oui
Oui
SA1993
SA2001
Saskatchewan, 2001
Wynne, H. J. (2002, January). Gambling and problem
gambling in Saskatchewan. Final report. Ottawa, ON:
Canadian centre on substance abuse.
Oui
Oui
AL1993
AL1997
AL2001
Alberta, 2001
Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling
and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton,
AB: Alberta Gaming Research Institute.
Oui
Oui
CB2002
Colombie-Britannique, 2002
Britsh Columbia Ministry of Public Safety and Solicitor
General (2003). British Columbia problem gambling
prevalence study. Final report. Victoria, BC: auteurs.
Oui
Non
CAN2002
Canada, 2002
Marshall, K., & Wynne, H. (2003, December). Fighting the
odds. L’emploi et le revenu en perspective, 4(12), Ottawa,
ON : Statistique Canada, 75-001-XIE.
Oui
Oui
2.5.1 Les taux de pénétration et d’adoption des ALV
Le taux de pénétration indique le pourcentage de la population adulte qui a utilisé les
ALV. La proportion de la population qui a misé sur un ALV au moins une fois au cours
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 42
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 43
de sa vie participe au taux de pénétration à vie. Ceux qui ont joué au cours des 12
derniers mois composent le taux de pénétration annuelle, et ainsi de suite.
Le Tableau 11 indique les taux moyens de pénétration des études provinciales réalisées
au Canada entre 1992 et 2005. Ces taux sont affichées dans la Figure 29. On constate
ainsi que, là où il y a des ALV, seulement une personne adulte sur cinq (20,6%) a eu la
curiosité d’y jouer. Les trois quarts d’entre elles (15,1% de la population adulte) y ont
joué au cours de la dernière année. Le taux d’adoption annuel est alors de 73% (voir
Figure 30). Parmi les joueurs annuels, 42% adoptent une fréquence de jeu mensuelle.
Les joueurs mensuels représentent alors 6,4% de la population adulte. Enfin, 41% des
joueurs mensuels misent sur les ALV à chaque semaine. À noter que 2,6% de la
population adulte joue sur les ALV à chaque semaine. Ce pourcentage est très près du
taux de prévalence du jeu pathologique en général dans la population.
21%
18%
10% 28% 16% 18% 13% 18% 13%
13%
2% 2%
2%
Moyenne
Figure 29
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Taux de pénétration des ALV
20,6%
15,1%
6,4%
À vie
Annuel
Mensuel
2,6%
Hebdomadaire
Figure 30
Taux d'adoption des ALV
Moyenne
80%
73,7%
60%
42,4%
40,9%
Mensuel
Hebdomadaire
40%
20%
0%
Annuel
AL2001
AL1997
AL1993
8%
SA2001
11%
SA1993
QC2002
9%
MA2001
QC1999
8%
4%
2%
QC2004
QC1997
À vie
20% 23%
Annuel 11% 21% 23% 19% 15% 19% 15% 13%
Mensuel
6% 5%
4%
Hebdomadaire
3%
5% 4% 2% 2%
IPE2005
IPE1999
NB2001
NB1996
NB1992
NÉ2003
NÉ1997
NÉ1996
TN2005
Tableau 11
Taux de pénétration des ALV
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 43
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 44
2.5.2 Le profil sociodémographique des joueurs sur ALV
En raison de la grande taille des échantillons, les études de prévalence rapportent
fréquemment des différences significatives entre diverses catégories
sociodémographiques. Typiquement, le joueur excessif sur ALV est présenté comme un
jeune homme, célibataire sans enfant, et ayant relativement peu de revenu. En fait, ce
profil ne décrit qu’une légère tendance qui ne doit pas conduire à un stéréotype. Plus
justement, à l’exception des aînées, à peu près tous les segments de la population
s’intéressent à peu près également aux ALV, et ceux qui s’y adonnent développent à
peu près également des problèmes de jeu.
L’étude réalisée à Terre-neuve en 2005 permet de comparer les profils (a) de
l’échantillon global, c’est-à-dire de la population, (b) des joueurs en général [84% de la
population], (c) des joueurs annuels sur ALV [11%], et (d) des joueurs excessifs [3,4%],
soit ceux qui manifestent un risque modéré ou plus à l’ICJE. Comme l’indique la Figure
31, les profils de la population (en jaune) et des joueurs en général (en bleu) sont quasi
identiques. Cela n’est pas étonnant puisque 84% de la population joue. Par contre, le
profil des joueurs annuels sur ALV (en rouge) se distingue par le fait qu’il y existe un peu
plus d’hommes, célibataires ou conjoints de fait, de moins de 25 ans. Ce profil ne se
démarque cependant pas particulièrement. Le profil des joueurs excessifs (en bleu pâle)
est un peu plus prononcé, mais varie souvent dans le même sens que celui des joueurs
annuels sur ALV.
Figure 31
Joueurs annuels sur ALV
Joueurs excessifs
> $100 000
$60 001 à $80 000
$40 001 à $60 000
$20 001 à $40 000
< $20 000
Université
DES
< DES
Divorcé ou séparé
Veuf
Célibataire
Conjoint de fait
Marié
65 ans et +
55-64 ans
45-54 ans
35-44 ans
24-34 ans
Joueurs
$80 001 à $100 000
Population
19-24 ans
Femmes
Hommes
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Post DES
Terre-Neuve-et-Labrador, 2005 : Comparaison des profils
sociodémographiques en fonction de la pratique de jeu
Les résultats de l’étude de Terre-Neuve sont corroborés par l’étude de prévalence
réalisée en 2003 en Nouvelle-Écosse (voir Figure 32). Cette fois, il est possible de
comparer en plus le profil des joueurs mensuels sur ALV. Ce ne sont pas des
caractéristiques sociodémographiques qui expliquent l’adoption d’une fréquence de jeu
mensuelle sur ALV. Par rapport à la population, les principales différences résident dans
les faits qu’on est moins susceptible d’être un joueur sur ALV lorsqu’on est une femme,
ou lorsqu’on a 65 ans ou plus. Ces tendances sont cependant peu marquées.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 44
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 45
Figure 32
Nouvelle-Écosse, 2003 : Comparaison des profils
sociodémographiques en fonction de la pratique de jeu
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
Population
Joueurs annuels sur ALV
Joueurs mensuels sur ALV
$60 000 ou
plus
$30 000 à
$59 999
Moins de
$30 000
65 ans ou
plus
55-64 ans
45-54 ans
35-44 ans
25-34 ans
19-24 ans
Femmes
Hommes
0%
Joueurs excessifs
Une étude antérieure66, réalisée en 1997-1998 en Nouvelle-Écosse et consacrée
exclusivement aux joueurs sur ALV, permet de comparer, de manière plus détaillée, les
profils (a) de la population, (b) des non joueurs, (c) des joueurs occasionnels qui utilisent
rarement des ALV , (d) des joueurs qui misent peu souvent sur les ALV, mais qui le font
régulièrement, (e) des joueurs réguliers qui jouent à chaque mois, et (f) des joueurs
réguliers, fréquents, qui éprouvent des problèmes de jeu sur ALV (voir Figure 33 et
Figure 34).
Ces profils sont très similaires. Ils ne présentent que des différences mineures.
Davantage d’hommes jouent sur les ALV, davantage y jouent régulièrement, et
davantage y développent au moins un problème de jeu. Un peu plus de personnes de
19 à 24 ans utilisent des ALV, alors que les personnes de 60 ans ou plus y sont
particulièrement absentes. Les différences les plus associées à une pratique régulière
fréquente de jeu sur ALV, et aux problèmes de jeu sur ALV, sont le fait d’être célibataire,
de n’avoir aucun enfant à la maison, de ne pas être universitaire et de ne pas avoir de
revenu supérieur. Ces différences sociodémographiques restent néanmoins des
tendances peu marquées qui ne permettent pas de dépister des joueurs à risque ou
avec problème de jeu.
66
(a) Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia:
Department of health. (b) Schrans, T., Schellinck, T., & Walsh, G. (2001). The 2000 regular VLT
players follow-up survey. Halifax, Nava Scotia : Nova Scotia Department of Health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 45
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 46
Figure 33
Nouvelle-Écosse 1997-1998: Profils sociodémographiques des joueurs - partie A
Population
Non-joueur
Occasionnels
Régulier peu fréquent
Régulier fréquent
1 enfant ou +
Aucun enfant à la
maison
Divorcé, séparé ou
veuf
Marié ou conjoint de
fait
Célibataire
60 ans ou +
50-59 ans
45-49 ans
40-44 ans
35-39 ans
30-34 ans
25-29 ans
19-24 ans
Hommes
Femmes
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Avec problème
Figure 34
Nouvelle-Écosse 1997-1998: Profils sociodémographiques des joueurs - partie B
80%
70%
60%
50%
Population
Non-joueur
Occasionnels
Régulier peu fréquent
Régulier fréquent
> 45 000
25 000 à
45 000
< 25 000 $
Université
Université
incomplète
DES ou -
Handicapé
Retraité
Ménagère
Étudiant
Sans
emploi
Temps
partiel
Temps
complet
10%
0%
DEC
40%
30%
20%
Avec problème
2.5.3 Les profils d’adoption de la fréquence de jeu sur ALV
Tony Schellinck et Tracy Schrans, les auteurs de l’étude de la Nouvelle-Écosse67, ont
fait un lien entre le profil sociodémographique des joueurs sur ALV et la clientèle des
67
Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia:
Department of health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 46
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 47
bars où se situent les ALV68. Par exemple, si les femmes participent moins souvent aux
jeux sur ALV, cela peut être simplement en raison du fait qu’elles sont moins
nombreuses à fréquenter les bars, et lorsqu’elles le font, celles-ci sont des clientes
moins assidues que les hommes69. S’il y a moins de femmes qui utilisent régulièrement
des ALV, ou qui y développent des problèmes, cela n’est pas nécessairement parce
qu’elles sont moins enclines à le faire. Cela peut être simplement parce qu’elles ont un
accès moins favorables aux ALV; ce qui peut changer radicalement si des ALV sont
déplacés des bars vers des salons de jeu qui sont conçus pour un public plus général.
En ce sens, l’attrait des ALV peut varier considérablement selon que les comportements
de jeu sur ALV sont étudiés en fonction de la population entière, des seuls joueurs en
général, des joueurs annuels sur ALV, des joueurs réguliers sur ALV, des joueurs
fréquents sur ALV ou des joueurs excessifs sur ALV.
Pour illustrer ces différences, les auteurs ont étudié les taux d’adoption. Une fois rendu
dans un bar, combien de personnes entreprennent de jouer occasionnellement sur les
ALV? Si on ne considère que les joueurs occasionnels, combien adoptent ensuite une
fréquence régulière de jeu sur ALV? Lorsque des personnes jouent régulièrement sur
les ALV, combien entreprennent ensuite d’y jouer fréquemment au moins une fois par
mois? Enfin, parmi les joueurs réguliers fréquents, combien développent des problèmes
de jeu? La Figure 35 illustre les résultats de cette analyse en fonction du sexe du joueur.
Figure 35
29%
Hommes
Femmes
Développe un
problème sur
les ALV
Joue
fréquemment
16%
Joue
régulièrement
14%
30%
49%
57%
47%
31%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Joue
occasionnellement
Taux d'adoption par rapport au
comportement précédent
Nouvelle-Écosse 1997-1998
Sexe - analyse des taux d'adoption
Les résultats indiquent que 47%
des hommes adultes en
Nouvelle-Écosse jouent au moins
occasionnellement sur les ALV.
Parmi ceux-ci, 16% en viennent à
jouer régulièrement. Parmi les
joueurs réguliers, 57% décident
de jouer fréquemment. Enfin,
chez les joueurs fréquents, 29%
développent un problème de jeu
sur les ALV.
Par rapport aux hommes, les
femmes ont un intérêt initial
moindre à l’égard des ALV (31%
c. 47%) et elles adoptent moins
souvent une grande fréquence de
jeu (49% c. 57%).
Par contre, une fois qu’elle ont commencé à jouer occasionnellement, elles sont autant
68
Voir aux pages VI, VIII, 2-25 et 3-11 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery
players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health.
69
Voir à la page 2-41 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 47
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 48
sollicitées que les hommes à y adopter un jeu régulier (14% c. 16%). De plus, une fois
qu’une femme a adopté une grande fréquence de jeu régulier sur ALV, elle se trouve
aussi vulnérable à l’égard des problèmes de jeu (30% c. 29%). En ce sens, sur les ALV,
il existe des différences entre les hommes et les femmes, mais seulement à certaines
étapes du cheminement vers les problèmes de jeu.
Dans la Figure 36, une analyse identique est faite en fonction des groupes d’âge. La
décroissance de la pratique de jeu en fonction de l’âge est manifeste uniquement chez
les personnes qui jouent occasionnellement. En contrepartie, l’âge semble beaucoup
moins déterminant dans la décision de commencer à jouer régulièrement. Peut-être,
mais à l’inverse, est-il impliqué dans le choix de commencer à jouer fréquemment?
Mais, en bout de cheminement, l’âge ne semble pas du tout associé à la probabilité de
développer un problème de jeu.
Dès lors, l’identification du joueur excessif sur ALV à une jeune personne est
circonstancielle. Dans la mesure où les ALV peuvent être déplacés à des endroits où se
trouvent d’autres segments de la population, les joueurs excessifs sur ALV présenteront
des caractéristiques sociodémographiques différentes.
L’analyse du cheminement des joueurs vers les problèmes de jeu en fonction du revenu
des joueurs est aussi intéressante (voir Figure 37). Plus on est fortuné, plus il est
probable que l’on va jouer occasionnellement sur un ALV lorsqu’on est dans un bar. Ce
sont cependant les moins fortunés qui risquent d’y adopter une fréquence régulière de
jeu. Le revenu ne semble pas impliqué dans l’adoption d’une fréquence élevée de jeu.
Par contre, le fait d’être plus fortuné semble protéger les joueurs contre le
développement des problèmes de jeu. Évidemment, plus on est fortuné, plus les pertes
sont faciles à absorber.
Figure 36
Taux d'adoption par rapport au
comportement précédent
Nouvelle-Écosse 1997-1998
Âge - analyse des taux d'adoption
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Joue occasionnellement
Joue régulièrement
Joue fréquemment
19-24 ans
25-29 ans
30-34 ans
45-49 ans
50-59 ans
60 ans ou +
35-39 ans
Développe un
problème sur les
ALV
40-44 ans
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 48
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 49
Figure 37
Taux d'adoption par rapport au
comportement précédent
Nouvelle-Écosse 1997-1998
Revenu - analyse des taux d'adoption
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Joue occasionnellement
Joue régulièrement Joue fréquemment
<10 000 $
10 000 à 25 000
25 001 à 35 000
45 001 à 60 000
60 001 à 75 000
> 75 000
Développe un
problème sur les
ALV
35 001 à 45 000
Dans la Figure 38, il apparaît que le fait d’être célibataire incite davantage à jouer
occasionnellement, et que le fait d’être divorcé, séparé ou veuf, produit l’effet contraire.
Ceci reflète sans doute uniquement le plus jeune âge des célibataires, et
conséquemment l’âge nécessairement plus avancé des divorcés, des séparées et des
veufs. Sinon, l’état civil ne semble pas jouer un rôle cohérent dans la suite des
événements.
Les universitaires faisant exception, plus on est instruit, moins il semble probable que
l’on adopte une pratique régulière fréquente de jeu sur ALV et, le cas échéant, que l’on
développe des problèmes de jeu. Cette relation est cependant ici incertaine.
Par ailleurs, l’analyse du nombre de personnes qui contribuent au revenu familial (voir
Figure 40) présente un intérêt appréciable. Plus il y a de personnes dans un foyer qui
contribuent au revenu familial, plus les joueurs sont incités à jouer occasionnellement
sur les ALV, et même à y jouer régulièrement. Par contre, dès qu’on y joue
régulièrement, ce facteur ne semble plus jouer dans la suite des événements.
Enfin, dans la Figure 41, il est possible de constater qu’il est possible que les appareils
en milieu urbain incitent un peu plus de joueurs à adopter l’étape suivante conduisant à
des problèmes de jeu. Cet aspect devrait être mieux étudié.
En résumé, l’endroit où se situent les ALV a un impact sur la composition
sociodémographique de la clientèle des joueurs. Par contre, dès que les joueurs
entreprennent de jouer fréquemment sur les ALV, cet impact disparaît. Incidemment, le
passage du jeu fréquent aux problèmes de jeu ne semble pas pouvoir être expliqué par
des caractéristiques sociodémographiques des joueurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 49
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 50
Nouvelle-Écosse 1997-1998
État civil - analyse des taux d'adoption
Nouvelle-Écosse 1997-1998
Scolarité - analyse des taux d'adoption
60%
50%
40%
30%
20%
Mariés ou conjoints de fait
Secondaire ou moins
Collégial
Divorcé, séparé ou veuf
Université incomplète
Université
Nouvelle-Écosse 1997-1998
N. personnes qui contribuent au revenu
familial - analyse des taux d'adoption
Nouvelle-Écosse 1997-1998
Résidence - analyse des taux
d'adoption
Une
Deux
Trois ou plus
Urbaine
Développe un
problème sur
les ALV
Joue
fréquemment
Joue
régulièrement
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Joue
occasionnellement
Développe un
problème sur
les ALV
Joue
fréquemment
Joue
régulièrement
Joue
occasionnellement
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Taux d'adoption par rapport au
com portem ent précédent
Figure 41
Taux d'adoption par rapport au
comportement précédent
Figure 40
Développe un
problème sur
les ALV
Joue
fréquemment
Célibataire
Joue
régulièrement
10%
0%
Joue
occasionnellement
Développe un
problème sur
les ALV
Joue
fréquemment
Joue
régulièrement
Joue
occasionnellement
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Taux d'adoption par rapport au
comportement précédent
Figure 39
Taux d'adoption par rapport au
comportement précédent
Figure 38
Rurale
Dès lors, il n’existe aucun fondement à l’idée que les personnes qui développent des
problèmes de jeu sur ALV sont typiquement des jeunes hommes célibataires qui, sans
responsabilité familiale, flambent de l’argent qu’ils auraient de toute manière flambé
ailleurs. Dans la mesure où les salons de jeu vont attirer une clientèle plus féminine,
plus âgée, la clientèle régulière des ALV va s’adapter en conséquence. Dès que ces
personnes adopteront une grande fréquence de jeu, elles seront tout aussi susceptibles
de développer des problèmes de jeu. En ce sens, le déplacement des ALV des bars
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 50
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 51
vers les salons de jeu pose un risque majeur d’une infiltration des problèmes de jeu
dans des segments de la population jusque-là épargnés.
2.6 La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu
Une des statistiques les plus intéressantes de l’étude des joueurs sur ALV réalisée en
Nouvelle-Écosse est celle qui concerne ce que les auteurs désignent sous le nom de
« churn »70. Il s’agit de la comparaison, pour une année donnée, entre le nombre de
joueurs qui commencent à jouer sur les ALV et le nombre de joueurs qui cessent. Les
données indiquent qu’à chaque année, environ le quart des joueurs ont entrepris de
commencer à jouer cette année-là, et que le quart des joueurs ont quitté le jeu sur ALV
pendant la même période. Dit autrement, lorsqu’un joueur cesse de jouer, il est
immédiatement remplacé par un nouveau joueur. Dès lors, le volume des joueurs
annuels est constant, d’une année à l’autre, bien que ce ne sont pas les mêmes
personnes qui y perdent.
Ce constat est très important car il révèle à quel point le taux de prévalence actuelle71 du
jeu pathologique peut être trompeur. Le jeu pathologique est un phénomène épisodique.
Les joueurs pathologiques peuvent parfois demeurer longtemps en retrait des activités
de jeu avant de connaître une rechute. Parfois, le retrait est forcé en raison de
l’épuisement des ressources financières pour jouer. Parfois, des parents ou amis
peuvent inciter et appuyer des joueurs pathologiques à rester loin des occasions de jeu.
Entre deux mesures de la prévalence actuelle, bon nombre de joueurs pathologiques
peuvent avoir commencé à subir des dommages, épuisé leur capacité financière et
abandonné temporairement le jeu. Dans ce contexte de nombreux joueurs
pathologiques peuvent être omis par les statistiques de prévalence actuelle si un délai
trop long72 sépare deux études.
De plus, parce que les joueurs excessifs consacrent presque tout leur temps libre au
jeu, et qu’ils doivent souvent couper des dépenses73 pour financer leur jeu, il est
concevable qu’il soit très difficile de les contacter par téléphone durant cette période74.
70
Voir aux pages V et 2.5 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
71
Généralement évaluée en fonction d’une période limitée aux douze derniers mois. Les
expressions prévalence annuelle, prévalence actuelle et prévalence courante sont alors
synonymes.
72
Idéalement, une étude de prévalence annuelle devrait être faite à chaque année. Compte tenu
du concept de « churn », un délai de plus de quatre années n’est pas acceptable en ce qui
concerne les ALV. De plus, si plus d’une année séparent deux études, les comportements durant
l’ensemble de cet intervalle devraient aussi être investigués.
73
Par exemple, l’abonnement au service téléphonique.
74
Voir aux pages 329 et 330 dans : Lesieur, H. R. (2002). Epidemiological surveys of
pathological gambling : critique and suggestions for modification. In J. J. Marotta, J. A. Cornelius,
& W. R. Eadington (editors), The downside : problem & pathological gambling (pp. 325-338).
University of Nevada, Reno, NV: Institute for the study of gambling and commercial gaming
institute.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 51
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 52
En ce sens, une baisse d’un taux de prévalence, établi sur une courte période, peut tout
aussi bien refléter une intensification de la pratique de jeu chez des personnes malades
du jeu. Un taux de prévalence à vie permet mieux de rejoindre des personnes qui ont
déjà vécu ce phénomène et qui en sont en rémission.
Une condition sine qua none des taux de prévalence est donc d’éviter que de longs
intervalles de temps ne soient pas investigués. Entre les études québécoises de
prévalence du jeu pathologique de 1989 75 et 1996 76, la taux de prévalence à vie est
passée de 1,2% à 2,1%; ce qui représente une augmentation de 75% 77. En raison de
difficultés techniques78 survenues lors de l’étude de prévalence de 2002, aucune
mesure de la prévalence vie ne peut être inférée. Une sérieuse incertitude quant à la
qualité du dépistage empêche aussi d’apprécier raisonnablement les taux de prévalence
actuelle.
Outre le problème de la validité des diagnostics, il doit être mentionné que, suite à une
campagne médiatique du MSSS pour sensibiliser la population aux problèmes de jeu
(voir la section 6.4.9.1 à la page 283), l’année 2002 a été marquée par une inflexion de
la courbe de croissance des revenus de Loto-Québec (voir Figure 3 à la page 16 et,
pour les ALV, Figure 12 à la page24). Cette année-là, plusieurs joueurs excessifs
pourraient s’être retirés temporairement du jeu. En conformité avec la méthodologie de
l’étude, ces personnes ont paradoxalement été classifiées parmi les non joueurs.
75
L’année de l’étude précédente. Voir : Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of
pathological gambling in Quebec. Canadian Journal of Psychiatry, 36(10), 732-734.
76
Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling:
A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804.
77
Cette augmentation n’est pas statistiquement significative, quoiqu’elle est à l’orée de l’être.
L’échantillon de 1996 était toutefois composé d’une trop grande proportion d’universitaires et de
diplômés du collégial, soient des personnes moins souvent aux prises avec une dépendance
pathologique à l’égard du jeu. En corrigeant ce problème par une actualisation du calcul de la
pondération des participants, le taux actualisé de la prévalence vie s’avère plutôt être 2,8%, soit
une augmentation statistiquement significative de 131%. Voir : Voir à la page 247 dans l’annexe
G du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo.
Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
78
Ces difficultés ont été posées par la perte des informations concernant la prévalence à vie,
ainsi que des pourcentages inacceptables de faux positifs (82%) et de faux négatifs (4 sur 7
joueurs pathologiques réévalués lors d’une entrevue clinique). Sans équivoque, la firme de
sondage, mandatée lors de cette étude, n’a pas réussi à poser des diagnostics valides. Le
dépistage téléphonique des problèmes de jeu exige une excellente formation d’intervenant
comme celle, par exemple, de la ligne « Jeu : aide et référence ».
En conséquence, dans l’étude de prévalence de 2002, tous les estimés faisant référence à une
évaluation psychodiagnostique sont invalides. Voir : (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier,
S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu
pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de
santé publique du Québec. (b) Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., &
Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en
2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 52
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 53
Compte tenu de ces difficultés, impossibles à corriger, rien n’appuie l’opinion que la
prévalence du jeu pathologique est actuellement stable au Québec.
Le même problème s’est récemment posé en Ontario79 alors que le taux de prévalence
actuel entre 2001 et 2005 est apparu comme étant stable. Les auteurs admettent
cependant qu’il n’y a pas moyen de savoir si les personnes qui subissent des
dommages sont les mêmes en 2005 qu’en 2001 :
“Whereas prevalence rates were consistent at the aggregate level and remained
unchanged over time, results showed that individual level problem gambling rates were
transitory and episodic. It should be noted that the stable problem gambling rates from
2001 to 2005 do not distinguish between continuity in the same individuals, or a new
grouping of individuals with gambling problems. Applying the findings from the
longitudinal study conducted by Slutske et al. (2003) would suggest that the lifetime
prevalence of problem gambling in Ontario has increased.” (Wiebe, Mun et Kauffman,
2006, page 52)
2.7 Les problèmes de jeu
L’analyse des problèmes de jeu sur les ALV conduit à un constat particulièrement utile
pour la planification des interventions sociosanitaires. En effet, plus on est joueur
pathologique, plus il est probable que l’on soit souvent présent à jouer sur un ALV. Les
trois-quarts des joueurs pathologiques de la population vont miser sur un ALV au moins
une fois dans l’année. Durant leur session de jeu, ceux-ci y dépensent beaucoup et
demeurent longtemps sur le site.
En comparaison, il est peu probable de trouver un joueur sain dans l’environnement d’un
ALV. Lorsqu’il le fait, il y dépense peu et ne s’y attarde pas longtemps.
En conséquence, l’ALV, et le site de jeu, constituent un environnement privilégié pour
faire une mise en garde, de la prévention ou du dépistage intensifs car on y retrouve une
clientèle particulièrement ciblée, parmi les gens qui ont besoin d’aide, sans importuner
outrancièrement les joueurs sains car, selon toute probabilité, ceux-ci sont généralement
ailleurs.
2.7.1 Les problèmes de jeu en fonction du taux de pénétration des ALV
Une étude de la Nouvelle-Écosse (voir la Figure 42 et le Tableau 12) permet d’examiner
la distribution de la population dans les catégories de l’ICJE par rapport aux distributions
des joueurs annuels ou des joueurs mensuels. Il apparaît que les joueurs mensuels sur
ALV (20,0%) sont davantage présents parmi les catégories de risque modéré ou de
problème de jeu que les joueurs annuels (8,6%), et que ces derniers y sont davantage
présents que la population en général (2,1%).
79
Wiebe, J., Mun, P., & Kauffman, N. (2006, May). Gambling and problem gambling in Ontario
2005. Final report submitted to the Ontario problem gambling research centre.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 53
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 54
Figure 42
Nouvelle-Écosse, 2003 -Répartition des joueurs dans
les catégories de l'ICJE
Sans problème
Faible risque
Risque modéré
Avec problème
Risque modéré ou plus
0% 10
%
Joueurs mensuels
20 30 40 50
% % % %
Joueurs annuels
60 70 80
% % %
Population
90
%
Tableau 12
Répartition des joueurs dans les catégories de l'ICJE en fonction du taux de pénétration des ALV
Catégories de l'ICJE
Sans problème Faible risque Risque modéré Avec problème
Risque modéré ou +
Saskatchewan, 2001
Population
71,4%
9,3%
4,7%
1,2%
5,9%
Joueurs annuels
59,9%
20,2%
14,4%
5,5%
19,9%
Joueurs hebdomadaires
26,7%
22,2%
26,7%
24,4%
51,1%
Alberta, 2001
Population
67,0%
9,8%
3,9%
1,3%
5,2%
Joueurs annuels
58,3%
22,7%
13,2%
5,8%
19,0%
Joueurs hebdomadaires
20,0%
16,7%
36,7%
26,7%
63,3%
Nouvelle-Écosse, 2003
Population
82,6%
4,8%
1,3%
0,8%
2,1%
Joueurs annuels
78,0%
13,3%
8,6%
Joueurs mensuels
57,0%
23,0%
20,0%
Cette démarcation est encore plus accentuée lorsqu’on compare les joueurs
hebdomadaires sur ALV aux joueurs annuels ou à la population en général. Des études
de la Saskatchewan (voir la Figure 43 et le Tableau 12) et de l’Alberta (voir la Figure 44
et le Tableau 12) permettent de comparer ces distributions. En Saskatchewan, en 2001,
24% des adultes qui jouent à chaque semaine éprouvent des problèmes de jeu, et 51%
sont au moins à risque modéré d’éprouver des problèmes de jeu.
En Alberta, en 2001, la situation était encore plus accentuée avec 27% des joueurs
hebdomadaires qui éprouvaient des problèmes de jeu, et 63% qui étaient au moins à
risque modéré.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 54
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 55
Figure 43
Saskatchewan, 2001 -Répartition des joueurs dans les
catégories de l'ICJE
Sans problème
Faible risque
Risque modéré
Avec problème
Risque modéré ou plus
0% 10 20 30 40 50 60 70 80 90
% % % % % % % % %
Joueurs hebdomadaires
Joueurs annuels Population
Figure 44
Alberta, 2001 -Répartition des joueurs dans les
catégories de l'ICJE
Sans problème
Faible risque
Risque modéré
Avec problème
Risque modéré ou plus
0% 10 20 30 40 50 60 70 80 90
% % % % % % % % %
Joueurs hebdomadaires
Joueurs annuels
Population
Sans équivoque, plus on joue souvent sur les ALV, plus il est probable que l’on soit un
joueur pathologique. Ces données ne permettent cependant pas de distinguer les
joueurs déjà pathologiques, qui ont changé leurs comportements de jeu pour adopter les
ALV, des joueurs antérieurement sains qui sont devenus joueurs pathologiques lors de
leur expérience de jeu sur les ALV.
2.7.2 L’attrait des ALV auprès des diverses catégories de joueurs
Cinq études provinciales permettent de déterminer à quel point les ALV vont chercher
l’intérêt des diverses catégories de joueurs identifiées par l’ICJE. En moyenne, à peine
12% des joueurs sans problème de jeu vont miser sur un ALV au moins une fois dans
l’année. Cette proportion grimpe à 44% pour les joueurs à faible risque, et à 50% pour
les joueurs à risque modéré. Par contre, 73% des joueurs qui éprouvent des problèmes
de jeu vont miser sur un ALV au moins une fois dans l’année. L’ALV, et son
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 55
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 56
environnement, constituent alors une occasion exceptionnelle pour atteindre, de
manière ciblée, les personnes qui ont besoin d’aide. Ainsi, les trois-quarts des
bénéficiaires potentiels peuvent être aidés directement sans nuire au plaisir des joueurs
sains puisque ceux-ci sont beaucoup moins présents sur les ALV. À peine un joueur
sains sur huit ira jouer sur les ALV au moins une fois par année.
Figure 45
Participation annuelle
Attrait des ALV auprès des diverses catégories de joueurs
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
Sans problème Faible risque
Risque
modéré
Avec problème
Risque
modéré ou +
Catégories de l'ICJE
Terre-Neuve, 2005
Saskatchewan, 2001
Nouvelle-Écosse, 2003
IPE, 2005
Alberta, 2001
2.7.3 Le risque de développer une dépendance lorsque l’ALV est la première
activité de jeu explorée par un nouveau joueur
En général, les statistiques décrivant les problèmes de jeu sur ALV ne permettent pas
de distinguer ceux associés à des joueurs déjà excessifs, en raison de leur expérience
de jeu antérieure à d’autres activités de jeu, et ceux découlant de nouveaux joueurs
excessifs qui ont développé leur dépendance sur les seuls ALV. Des données de l’étude
de prévalence réalisée en 2005 à Terre-Neuve-et-Labrador, permettent de combler cette
lacune.
Tous les participants ont été interrogés quant à leur première activité en carrière de jeu,
même s’ils n’avaient pas joué au cours des 12 derniers mois. Dans la Figure 46, on peut
constater que les gens qui ont commencé à jouer sur les ALV, comparativement aux
autres activités, sont plus à risque, et de beaucoup, d’éprouver des problèmes de jeu.
En fait, seulement 58% des joueurs qui ont commencé leur carrière sur les ALV sont
sans risque de problème de jeu, alors que cette proportion atteint 86% pour les loteries
traditionnelles.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 56
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 57
Figure 46
Terre-neuve, 2005: Répartition des joueurs en fonction de
l'activité initiale de jeu
Loterie traditionnelles
Bingo
90,0%
Cartes - Poker
80,0%
70,0%
Loterie instantanée
60,0%
ALV
50,0%
40,0%
30,0%
Loterie traditionnelles
20,0%
Bingo
10,0%
Cartes - Poker
0,0%
e
Av ec prob lèm
é
Risque m odér
Faibl e ris que
e
Sans problèm
ICJE
Non joueur
Loterie instantanée
ALV
Il est clair que la probabilité de développer des problèmes de jeu est beaucoup plus
élevée lorsque les joueurs débutent leur carrière directement sur les ALV. Ces données
supportent peu l’interprétation suggérant que la plupart des dommages sur les ALV ne
sont qu’un déplacement des dommages que des personnes subiraient déjà dans
d’autres activités.
2.7.4 Le risque de mortalité
Le risque de mortalité chez les joueurs d’ALV est essentiellement celui du suicide. Les
données actuelles, fournies par les coroners du Québec, permettent d’apprécier
raisonnablement si un suicide est lié au jeu pathologique. Toutefois, ces données ne
permettent pas encore de lier sans équivoque les ALV à ces suicides.
Quoi qu’il en soit, il est plausible que les ALV soient un facteur critique dans la grande
majorité des cas parce que la grande majorité des demandeurs d’aide clinique
témoignent d’une perte de contrôle de leurs comportements de jeu sur ALV. En fait, les
ALV sont au cœur des problèmes de jeu de presque tous les joueurs pathologiques qui
ont réclamé une aide clinique.
Si on reprend une partie du Tableau 9, et qu’on y ajoute les données sur les suicides qui
ont été reliés au jeu par les coroners du Québec, il y a lieu d’estimer qu’un joueur annuel
sur ALV, parmi 16 569, se suicidera durant l’année. Il est cependant plus probable que
les joueurs qui se suicident se trouvent davantage parmi la clientèle des joueurs
réguliers qui dépensent sur les ALV au moins une fois par mois. Dans un tel cas,
puisque le taux d’adoption d’une fréquence mensuelle de jeu est de 42%, le risque serait
d’environ un suicide durant l’année pour environ 7 000 joueurs mensuels sur ALV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 57
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 58
Tableau 13
Estimation de la prévalence du suicide lié au jeu en fonction de la pénétration annuelle des ALV
Année
Population adulte1
Taux de
pénétration2
Nombre de
joueurs3
Nombre de
suicides-jeu4
1997
5 609 967
8,5%
476 847
?
1999
5 706 445
10,7%
610 590
36
1 / 16 961
2002
5 878 550
7,8%
458 527
30
1 / 15 284
2004
6 002 655
9,6%
576 255
33
1 / 17 462
Un suicide /
N. joueurs annuels sur ALV
1
Population le 1 juillet selon Statistique Canada, tableau CANSIM 051-00011,2,6.
Selon les rapports annuels de Loto-Québec ainsi que l’étude de prévalence de 2002.
3
Nombre de joueurs annuels = population adulte multipliée par le taux de pénétration annuel.
4
Nombre de suicides liés au jeu selon les coroners du Québec.
2
Il est, par ailleurs, plausible que la fréquence des suicides soit supérieure car les joueurs
ne se suicident pas nécessairement durant l’année où ils ont joué. À cet égard, entre
1999 et 2004, il y a eu 186 suicides liés au jeu. Déjà 23 suicides ont été identifiés pour
l’année 2005.
2.8 Description du comportement des joueurs sur ALV
Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a entrepris en 1997 une étude exhaustive des
joueurs réguliers80 sur les ALV. Ce groupe est constitué par 5,7% des adultes de cette
province. Aux fins d’analyse, ceux-ci ont été divisés en trois sous-groupes81 : (a) les
joueurs peu fréquents qui utilisent les ALV moins de 4 fois par mois, (b) les joueurs
fréquents, sans problème de jeu, qui utilisent les ALV quatre fois ou plus à chaque mois,
et (c) les joueurs qui éprouvent des problèmes en raison de leur comportement de jeu
sur les ALV.
Bien que les joueurs avec problèmes ne représentent que 16% des joueurs réguliers,
soit 0,96% de la population adulte, ceux-ci contribuent à 55% du revenu obtenu des
joueurs réguliers, ou à 53% du revenu total des ALV82 (voir aux lignes 1 et 2 dans le
Tableau 14).
80
Les joueurs réguliers sont ceux qui misent au moins une fois par mois sur les ALV. Ceux-ci
représentent 5,7% de la population adulte de la Nouvelle-Écosse et environ 25% des joueurs
annuels sur ALV. En contrepartie, ils contribuent pour 96% du revenu annuel tiré des ALV. Voir à
la page IV dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova
Scotia: Department of health.
81
Voir à la page 3-3 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
82
Voir à la page 3-43 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 58
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 59
Les jeux sur ALV ne sont pas majoritairement appréciés par les joueurs (ligne 7), malgré
que les joueurs avec problèmes soient incapables de s’en détacher (lignes 53 à 62).
Ces jeux ne sont pas perçus par l’ensemble de joueurs comme une bonne activité de
socialisation (voir à la ligne 8).
Typiquement, le joueur avec problème de jeu initie sa session de jeu en insérant $12,34
dans l’appareil (ligne 11). Il prévoit y dépenser $73,93 (ligne 9), mais se retrouve
finalement à dépenser $82,29 (ligne 12). Au bout du mois, il a perdu $808,88 dans les
ALV (ligne 13). Pour la moitié des joueurs avec problèmes (ligne 33), cela inclut des
montants d’argent prévus à d’autres budgets.
La plupart (90%) continuent de jouer tant qu’il reste de l’argent dans le solde (ligne 27),
et même le quart empruntent de l’argent afin de continuer à jouer (ligne 32). La moitié
(56%) obtiennent aussi des montants additionnels en utilisant leur carte bancaire (ligne
34). Il est alors peu important que le guichet soit ou non près de l’aire de jeu. Pourtant,
la moitié d’entre eux se fixent une limite au début de la session de jeu (ligne 23). Il y est
difficile de gagner car 88% indiquent ne pas être capables de cesser de jouer tant que le
solde est supérieur au montant d’argent inséré dans l’ALV (ligne 26). Le montant du
solde incitant à l’encaissement est d’environ $ 80 (ligne 16), mais 54% d’entre eux
continuent de jouer après un encaissement (ligne 17). Les trois-quarts réinvestissent
immédiatement au jeu un gain de $ 20 (ligne 28), et la moitié réinvestissent des gains
allant jusqu’à $ 100 (lignes 29 et 30).
La différence entre les joueurs fréquents et les joueurs avec problèmes de jeu semble
surtout consister en une opinion un peu plus favorable des jeux par ces premiers (ligne
7), et une plus grande dépense au jeu par ces derniers (lignes 9 à 13). Compte tenu que
la moitié des joueurs avec problèmes dépensent de l’argent prévu à d’autres fins (ligne
33), et que 85% éprouvent de la culpabilité à l’égard de leur dépense au jeu (ligne 31),
ceci appuie l’interprétation selon laquelle la différence entre les joueurs fréquents sans
problème et les joueurs fréquents avec problèmes réside surtout dans le fait que ces
derniers dépensent des montants qu’ils n’ont pas les moyens de perdre contrairement
aux premiers.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 59
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 60
Tableau 14
Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de
la Nouvelle-Écosse en 1997-1998
Catégories de joueurs réguliers
Variable (page des résultats)
Peu fréquents
Fréquents
Avec problèmes
1 - Répartition des joueurs réguliers (3-43, D-6)
46%
38%
16%
2 - Contribution au revenu tiré des joueurs réguliers
sur ALV (3-43)
10%
35%
55%
Types de jeu utilisés sur les ALV
3 - Jeu de lignes le plus populaire (D-36)
89%
84%
75%
4 - Jeu de poker le plus populaire (D-37)
13%
18%
24%
5 - Jeu de blackjack (D-37)
1%
< 1%
---
< 1%
< 1%
2%
6 - Jeu de keno (D-37)
Appréciation du jeu sur ALV
7 - Les jeux sur ALV sont amusants et divertissants
(D-23)
39%
52%
43%
8 - Le jeu sur ALV est bonne activité pour passer
du temps avec des amis (D-23)
24%
30%
24%
Dépense au jeu sur les ALV
9 - Montant d’argent prévu, par session de jeu,
pour jouer sur les ALV (D-38)
$ 16,48
$ 23,34
$ 73,93
10 - Proportion des joueurs qui dépensent tout
l’argent prévu à chaque session de jeu (D-38)
33%
33%
48%
11 - Montant d’argent initialement inséré dans
l’ALV avant de commencer à jouer (D-38)
$ 5,49
$ 5,88
$ 12,34
12 - Montant total d’argent finalement sorti des
poches à chaque session de jeu (D-33)
$16,33
$29,44
$82,29
13 - Estimation de la dépense mensuelle au jeu sur
ALV (D-33)
$ 53,49
$ 228,50
$ 808,88
14 - Plus gros montant gagné sur les ALV
$ 211,95
$ 358,41
$ 650,63
15 - Plus gros montant perdu sur les ALV
$ 39,11
$ 79,20
$ 410,59
16 - Montant d’argent qui incite à l’encaissement du
solde (D-51)
$ 24,13
$ 37,56
$ 80,50
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 60
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 61
Tableau 14
Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de
la Nouvelle-Écosse en 1997-1998
Catégories de joueurs réguliers
Variable (page des résultats)
Peu fréquents
Fréquents
Avec problèmes
17 - Proportion des joueurs qui continuent de jouer
sur les ALV au moins la moitié des fois après un
encaissement
12%
28%
54%
18 - Nombre de crédits par mise (D-38)
11,0
12,0
18,5
19 - Montant total de la mise par set (D-38)
$ 0,66
$ 0,71
$ 1,12
20 - Budget mensuel moyen consacré au
divertissement (D-21)
$ 102
$ 141
$ 105
21 - Je joue parfois sur les ALV dans l’espoir de
payer des factures (D-23)
3%
4%
45%
22 - Je joue parce que j’ai des chances de gagner
de l’argent (D-25)
29%
26%
21%
Contrôle sur la dépense au jeu sur les ALV
23 - Proportion des joueurs qui fixent une limite à
leur dépense au jeu (D-67)
68%
67%
54%
24 - Proportion des joueurs qui cessent de jouer au
moins 50% des fois lorsque la dépense au jeu
prévue est atteinte (D-47)
73%
74%
63%
25 - Proportion des joueurs qui limitent leur
dépense au jeu en n’apportant que le montant
d’argent qu’ils acceptent de perdre (D-68)
8%
13%
29%
26 - Proportion des joueurs à qui il arrive de ne pas
pouvoir quitter la session de jeu lorsque leur solde
est supérieur au montant inséré dans l’ALV (D-45)
33%
47%
88%
27 - Proportion des joueurs à qui il arrive de ne pas
pouvoir quitter la session de jeu tant qu’il reste de
l’argent dans le solde (D-46)
34%
48%
90%
28 - Proportion des joueurs qui continueraient de
jouer un gain de $20 (D-41)
26%
34%
74%
29 - Proportion des joueurs qui continueraient de
jouer un gain de $50 (D-41)
17%
29%
58%
30 - Proportion des joueurs qui continueraient de
jouer un gain de $100 (D-41)
13%
21%
48%
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 61
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 62
Tableau 14
Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de
la Nouvelle-Écosse en 1997-1998
Catégories de joueurs réguliers
Variable (page des résultats)
31 - Proportion des joueurs qui se sentent
coupables des montants qu’ils dépensent sur les
ALV (D-61)
Peu fréquents
Fréquents
Avec problèmes
9%
13%
85%
Financement du dépassement du budget de jeu
32 - Proportion des joueurs qui empruntent de
l’argent pour continuer à jouer (D-39)
4%
9%
27%
33 - Proportion des joueurs qui dépensent parfois
sur les ALV des montants prévus à d’autres
budgets (D-61)
3%
3%
49%
34 - J’utilise parfois une carte bancaire pour obtenir
plus d’argent pour jouer durant la journée (D-27)
6%
16%
56%
35 - J’utilise ma carte bancaire sur le site de jeu (D27)
3%
9%
32%
36 - Je quitte le site de jeu pour utiliser ma carte
bancaire (D-27)
4%
10%
32%
37 - Utilisation des services de crédit offerts par les
sites de jeu (D-28)
<1%
2%
6%
38 - Encaissement d’un chèque sur le site de jeu
(D-28)
<1%
3%
12%
Contrôle sur la durée de jeu sur les ALV
39 - Proportion des joueurs qui peuvent perdre la
notion du temps en jouant sur les ALV (D-45)
17%
30%
75%
40 - Proportion des joueurs qui cessent de jouer au
moins 50% des fois lorsque la durée de jeu prévue
est atteinte (D-47)
28%
37%
31%
Comportement de jeu sur les ALV
41 - Nombre de sessions de jeu au cours des trois
derniers mois (D-33)
1,6
7,2
8,0
42 - Durée moyenne (en minutes) de la session de
jeu (D-33)
43,3
66,8
150,1
43 - Proportion des joueurs qui utilisent plus d’un
ALV à la fois (D-41)
4%
15%
36%
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 62
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 63
Tableau 14
Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de
la Nouvelle-Écosse en 1997-1998
Catégories de joueurs réguliers
Variable (page des résultats)
Peu fréquents
Fréquents
Avec problèmes
44 - Proportion des joueurs qui ont besoin de miser
sur toutes les lignes offertes (D-38)
57%
63%
84%
45 - Proportion des joueurs qui modifient la valeur
de leurs mises afin d’augmenter leurs chances de
gagner (D-42)
4%
6%
12%
46 - Proportion des joueurs qui utilisent le bouton
d’arrêt afin d’augmenter leurs chances de gagner
(D-42)
2%
5%
10%
47 - Proportion des joueurs qui bloquent le bouton
jouer afin que l’appareil joue automatiquement (D41)
9%
21%
39%
48 - Proportion des joueurs qui peuvent se sentir
inconfortables si d’autres personnes les regardent
jouer (D-45)
20%
27%
57%
49 - Proportion des joueurs qui jouent sur les ALV
après 22:00 heures (D-36) sur semaine
10%
16%
16%
50 - Proportion des joueurs qui jouent sur les ALV
après 22:00 heures (D-36) les fins de semaine
21%
16%
20%
51 - Consommation d’alcool au moins la moitié des
fois durant le jeu sur ALV (D-55)
41%
37%
35%
52 - Consommation habituelle de cigarettes en
jouant sur les ALV (D-55)
59%
63%
70%
Capacité d’auto-contrôle
53 - Dépendance psychologique envers les ALV
(D-25)
2%
1%
38%
54 - Depuis combien de mois, cette dépendance
existe-elle? (D-65)
---
---
29,5
55 - Proportion des joueurs qui ont fait des
tentatives pour contrôler la fréquence ou leur
dépense au jeu (D-65)
---
---
54%
56 - Nombre d’essais faits pour reprendre le
contrôle sur leur comportement de jeu sur ALV.
57 - La plupart du temps que je suis en un lieu où il
y a des appareils, j’ai envie de jouer (D-24)
6,0
11%
26%
65%
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 63
Chapitre 2 - La loterie vidéo : état de la situation au Canada - 64
Tableau 14
Résumé des résultats de l’étude du comportement des joueurs réguliers sur les ALV de
la Nouvelle-Écosse en 1997-1998
Catégories de joueurs réguliers
Variable (page des résultats)
Peu fréquents
Fréquents
Avec problèmes
58 - Je peux cesser de jouer sur les ALV aussitôt
que j’en ai envie (D-24)
91%
79%
34%
59 - J’ai parfois de la difficulté à cesser de jouer
alors que je sais que je devrais arrêter (D-23)
4%
9%
75%
60 - Je préférerais qu’il n’y ait que 3 ou 4 sites de
jeu dans toute la Nouvelle-Écosse (D-23)
39%
32%
78%
61 - Proportion des joueurs qui indiquent
qu’aucune stratégie de contrôle ne parvient à
réduire leur dépense au jeu (D-69)
4%
11%
40%
62 - Proportion des joueurs qui croient à l’utilité
éventuelle de brochures ou de dépliants quant aux
moyens de contrôler la dépense au jeu sur les ALV
(D-81)
11%
9%
40%
Autres activités de jeu [ fréquentation ; dépense mensuelle ] (page D-32)
63 - Tables de jeu au casino
23% ; $4,11
33% ; $8,83
18% ; $4,74
64 - Machines à sous au casino
55% ; $5,87
57% ; $9,55
60% ; $29,70
65 - Courses de chevaux
5% ; $0,55
9% ; $6,16
11% ; $0,21
Les données en caractères gras et italiques indiquent que la différence est statistiquement significative.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 64
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 65
Chapitre 3
La dangerosité des appareils électroniques de jeu
Dans cette annexe, nous faisons un inventaire des constats de la dangerosité des
appareils électroniques de jeu (AÉJ), et nous explicitons un modèle explicatif des
causes de la dépendance pathologique à leur égard. Ce modèle est présenté afin de
préciser ultérieurement comment des mesures d’atténuation du danger, ou de
protection, peuvent être développées, de manière mieux ciblée, en intervenant
directement dans le processus pathogène.
3.1 Bref historique des appareils de jeu au Québec
Il existe, ou a existé, quatre types d’appareils de jeu au Québec :
•
les gobe-sous (GS) entre 1930 et 1955,
•
les appareils de poker vidéo (APV) du marché gris entre 1976 et 1991,
•
les machines à sous (MAS) au casino depuis octobre 1993, et
•
les appareils de loterie vidéo (ALV) dans les bars depuis juin 1994.
Le premier type correspond à des appareils mécaniques; les trois autres à des appareils
électroniques, c’est-à-dire des AÉJ.
Parallèlement, il subsisterait un marché clandestin d’environ 5 000 appareils quoique
cette information n’a jamais été confirmée publiquement par une étude scientifique. Du
moins, sa validité n’a jamais été examinée par des scientifiques spécialistes du jeu
pathologique.
3.2 Les constats de la dangerosité des AÉJ
3.2.1 La dangerosité des gobe-sous
On sait très peu de chose au sujet des gobe-sous. Bizier et al83 rapportent qu’il y en
aurait84 eu 200 000 au Québec depuis les années 1930 jusqu’en 1955 alors que le
gouvernement canadien les a formellement interdits. Associés au folklore criminel de
Montréal, ces appareils étaient réputés alimenter grassement la pègre. Rien cependant
83
Voir à la page 115 dans : Bizier, H. A., Darveau-Cardinal, J., Fleury, J.-L., Lamarre, L., &
Mozarain, J. (1996). Loto-Québec, un succès collectif. Montréal, QC : Forces.
84
De nos jours, il y a des ALV partout, et pourtant ils ne sont qu’environ 14 000. S’il y avait eu
200 000 GS, cela représenterait une densité d’appareils 14 fois supérieure. Cela est peu
vraisemblable.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 65
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 66
dans les documents historiques, ne permet de confirmer un lien précis entre les GS et
des organisations criminelles.
3.2.1.1 La distribution des GS
Selon le témoignage de Pacifique Plante85, les premiers appareils de jeu sont apparus
au Québec peu après la dépression économique des années 30. À Montréal, des gobesous (GS) avaient été installés par de nombreux petits commerçants, notamment les
restaurateurs, à la vue évidente des clients. À cette époque, parce que les GS étaient
illégaux mais tolérés, les petits commerçants étaient surtout victimes de policiers
corrompus qui faisaient payer un service de protection86.
3.2.1.2 La rentabilité des GS
D’après les interventions policières réalisées par Pacifique Plante, les GS généraient
typiquement, durant les années 40, un profit minimum de 100 dollars par mois87, soit au
moins 1 200 dollars par année.
3.2.1.3 Les problèmes de jeu durant les années 40
Pour la population, ce ne sont pas les GS qui ont causé le plus de ravages. C’est plutôt
le jeu de barbotte88 qui a créé d’importants problèmes de santé publique. Certains
joueurs en devenaient rapidement dépendants comme certains joueurs deviennent
aujourd’hui dépendants des ALV. De plus, étant de collusion avec des joueurs
rabatteurs, les tenanciers des tripots utilisaient parfois des dés truqués pour arnaquer
des clients naïfs.
Par ailleurs, un service téléphonique89 clandestin de paris sur les courses permettait aux
joueurs de miser à crédit en accumulant des comptes mensuels qu’ils ne pouvaient pas
payer. Les tentatives violentes de recouvrer ces comptes ont créé suffisamment de
désordre pour susciter une croisade anti pègre.
85
Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action
nationale.
86
Comme ce sera le cas avec les APV, c’est la relation tenancier-fournisseur, plutôt que la
relation tenancier-client, qui a posé davantage de problèmes.
87
Voir à la page 40 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC:
Éditions de l'Action nationale.
88
Il s’agit d’un jeu de dés à fréquence rapide de tirage dont le taux de remise est élevé à 95% ou
97%. Le jeu de barbotte se pratiquait dans des salons de paris clandestins. Voir aux pages 33 et
34 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de
l'Action nationale.
89
Voir aux pages 10 et 11 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal,
QC: Éditions de l'Action nationale.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 66
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 67
De nos jours, il subsiste de cette époque la certitude que l’intégrité des jeux est
rapidement menacée en l’absence de réglementation et d’organismes de surveillance. Il
y a aussi la certitude que le fait de faire crédit aux joueurs conduit nécessairement à un
désastre social. En revanche, la leçon du jeu de barbotte semble avoir été oubliée90.
C’est ce jeu de dés à taux de remise élevé, et non les GS, qui a créé le plus de méfaits
et qui a, avec les paris sur les courses, vraisemblablement financé des organisations
criminelles. Les GS finançaient surtout des petits commerçants, en marge de la loi, mais
pas particulièrement asociaux. La seule criminalité documentée, associée aux GS, était
l’œuvre d’une police du jeu.
3.2.2 La dangerosité des appareils de poker vidéo
L’expansion des APV a suivi la même voie que celle des GS. Introduits comme des
dispositifs d’amusement, les APV ont fait leur apparition au Québec en juin 197691, tôt
après leur conception92 aux États-Unis en 1975. En principe, les APV ne pouvaient que
faire gagner des parties gratuites. Aucun lot en argent ou en biens ne pouvait être remis
aux joueurs. Ces appareils, qui n’offraient que des jeux de cartes, étaient exploités sans
réglementation par des petits commerçants indépendants qui, le plus souvent, les
louaient93 de distributeurs qui encaissaient la moitié des profits94.
Afin d’éviter la situation anarchique des années 1950, entre 1979 et 1991, les
commerçants ont dû acheter de la Régie des loteries du Québec95 un permis
d’exploitation pour les APV. Pour cette raison, ces APV sont désignés sous le nom de
marché gris, tandis que le marché clandestin, ou marché noir, englobe les appareils
sans permis.
90
Les taux de remise au-delà de 90% et une fréquence rapide des tirages sont deux puissants
facteurs dans le processus pathogène.
91
Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la
Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Page CI-1825,
Gouvernement du Québec.
92
Sion, M. (2002, june 13th). Video poker has special allure. Reno Gazette Journal.
93
La concurrence obligeait les commerçants à renouveler continuellement les appareils afin de
les adapter à l’évolution de ce que la clientèle désirait. Devenant rapidement obsolètes, il aurait
été trop onéreux de les acheter. De plus, lorsqu’un modèle était saisi, un modèle un peu différent
pouvait être rapidement installé.
94
(a) Voir à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la
division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin
1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b) Voir à la page CI-1986 dans la
déclaration de monsieur Alain Bouchard, membre du conseil d’administration de l’Association des
détaillants en alimentation du Québec, à la Commission permanente des institutions (15 juin
1993), Journal des débats, 48, Gouvernement du Québec.
95
Voir à la page 13 dans : Régie des alcools, des courses et des jeux. (1994). Rapport annuel
1993-1994. Québec, QC : Les publications du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 67
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 68
3.2.2.1 La distribution des APV
Les APV du marché gris étaient distribués au grand jour dans les arcades, les
dépanneurs, les foires et autres commerces publics. Incidemment, la distribution des
APV du marché gris les rendaient omniprésents dans les lieux où se trouvaient des
personnes de moins de 18 ans, et ceux-ci pouvaient y jouer.
3.2.2.2 Le nombre d’APV
Comme en témoignent les statistiques de la Régie des loteries du Québec, le nombre
des APV avec permis a graduellement augmenté jusqu’à atteindre 18 581 en 1990-1991
(voir Figure 47) avant de connaître une éradication rapide. Selon le président de la
Régie des loteries du Québec96, en 1991, les enquêteurs de la régie ont évalué que 75%
des APV étaient dotés d’une vignette. Ainsi, il y aurait eu environ 6 194 APV sans
permis97, pour un total approximatif de 24 775 APV.
Figure 47
Milliers
Nombre d'AÉJ
Nombre d'appareils de poker vidéo détenant une
licence de la Régie des loteries du Québec
20
15
10
5
1991-1992
1990-1991
1989-1990
1988-1989
1987-1988
1986-1987
1985-1986
1984-1985
1983-1984
1982-1983
1981-1982
1980-1981
1979-1980
0
Poker vidéo
Le nombre d’APV, utilisés pour parier, est difficile à préciser car ces appareils étaient
programmés pour ne donner que des parties gratuites. Il n’y avait aucun dispositif pour
payer des lots automatiquement. Les commerçants versaient les lots lorsqu’un
utilisateur le réclamait. On ne peut pas assumer que tous les commerçants ont offert de
payer en argent les parties gratuites obtenues par les joueurs.
96
Voir à la page CBA-201 dans les déclarations de monsieur Marcel Savard, président de la
Régie des loteries du Québec, à la Commission permanente du budget et de l’administration (15
avril 1992), Journal des débats, 6, Gouvernement du Québec.
97
Advenant qu’il y ait eu davantage d’appareils clandestins, la population n’y a pas eu plus accès
que les inspecteurs de la Régie des loteries du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 68
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 69
En 1993, lors de l’étude de la loi 8498, des représentants de la Sûreté du Québec ont
avancé une estimation de plus de 45 000 appareils illégaux99, voire 50 000100. Une
estimation de 40 000 appareils illégaux en 1989 a aussi été proposée par des
chercheurs101. S’il en était ainsi, le marché clandestin aurait été plus de deux fois102 plus
étendu que le marché gris qui œuvrait pourtant publiquement.
3.2.2.3 La rentabilité des APV
Lors d’une audition concernant la loi 84103, un distributeur d’APV104 a communiqué les
résultats d’une étude de la firme Samson, Bélair, Deloitte & Touche selon laquelle le
montant moyen misé à chaque semaine sur les APV était de 630 dollars par unité105, et
98
Il s’agit de la loi qui a autorisé la création du parc d’ALV de Loto-Québec.
99
Voir à la page 118 dans : Bizier, H. A., Darveau-Cardinal, J., Fleury, J.-L., Lamarre, L., &
Mozarain, J. (1996). Loto-Québec, un succès collectif. Montréal, QC : Forces. Assez
étonnamment, ce nombre diminue à 25 000 à la page 8 du document : Loto-Québec. (2002).
Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal,
QC : auteurs.
100
Citation faisant référence à des propos de monsieur Gilles Lacaille, vice-président de la
Corporation du loisir automatique du Québec, lors de la Commission permanente des institutions
(3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec.
101
Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling :
A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. Ultérieurement,
cette estimation a été gonflée à 50 000. Voir à la page 34 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de
responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs.
102
En 1988-1989, la RACJ a autorisé 13 714 APV. En soustrayant ces appareils du nombre
40 000, il aurait resté 26 286 appareils clandestins. Cela aurait été le double (192%) du marché
gris.
103
La loi 84, adoptée en juin 1993, a légalisé les casinos et les ALV au Québec.
104
Voir aux pages CI-1864 et CI-1870 dans la déclaration de monsieur Henley Song, président
de l’Association de l’amusement du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin
1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec.
105
(a) Selon le directeur général de la Sûreté du Québec : « C’est un chiffre lancé en l’air, comme
ça; on n’a pas fait d’étude précise là-dessus, mais on dit que ça rapporte à peu près 600 $ par
machine, par semaine. » Voir à la page CI-1834 dans la déclaration de monsieur Robert Lavigne
à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45,
Gouvernement du Québec. (b) Les 2300 APV saisis par le SPCUM entre 1984 et 1993
contenaient au total 200 000 dollars, soit environ 86 dollars par unité. Il s’agissait sans doute
d’une partie de la recette quotidienne. Voir à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur
Richard McGinnis, directeur de la division du crime organisé du SPCUM, à la Commission
permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (c)
Une estimation de 2 000 $ par semaine par unité a été proposée pour des APV au centre-ville de
Montréal. Voir à la page CI-1879 dans la déclaration de monsieur Jean Legros, commandant de
la section Moralité et jeu du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993),
Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 69
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 70
le bénéfice net annuel par unité était de 14 064 dollars (voir Tableau 15). Dans ce
tableau, les frais incluent les montants remis aux joueurs sous forme de lots ainsi que
les frais d’opération. Ce tableau transpose aussi ces données en fonction des scénarii
suggérant qu’il y aurait eu 25 000 ou 45 000 APV.
Tableau 15
Données de l’étude des APV par la firme comptable Samson, Bélair, Deloitte et Touche*
Par unité
Projection annuelle
Annuel
Hebdomadaire
25 000 APV
45 000 APV
Montants misés
32 760 $
630 $ (100%)
819 000 000 $
1 474 200 000 $
Frais
18 696 $
360 $ (57%)
467 400 000 $
842 400 000 $
Bénéfice net
14 064 $
270 $ (43%)
351 600 000 $
632 880 000 $
* Voir aux pages CI-1864 et CI-1870 dans la déclaration de monsieur Henley Song, président de
l’Association de l’amusement du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993),
Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (en bleu : les données communiquées)
Lors du débat concernant l’adoption du principe de la loi 84, le Ministre de la sécurité
publique106 a indiqué que les 25 000 APV auraient rapporté un bénéfice net
hebdomadaire entre 300 et 500 dollars par unité; ce qui équivaut à un total de 520
millions de dollars annuellement.
D’après Loto-Québec, un minimum de 25 000 appareils illégaux auraient généré
annuellement des revenus de 600 millions de dollars107. Pour 25 000 APV, cela
représente un revenu annuel de $ 24 000 par unité.
Compte tenu que les distributeurs encaissaient la moitié du bénéfice net108, les
détaillants auraient retiré environ sept mille dollars par unité. Après que le gouvernement
du Québec ait étatisé les APV pour les remplacer par des ALV, Loto-Québec a versé
aux détaillants une commission annuelle moyenne qui est passée de $ 2 308 en 19941995 à $ 20 714 en 2000-2001 (voir Figure 48). Depuis le 1 mai 2001, la commission
106
Déclaration de monsieur Claude Ryan, Ministre de la sécurité publique, lors des débats de
l’Assemblée nationale (11 mai 1993), Journal des débats, 32(94), Gouvernement du Québec.
107
Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au
Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs.
108
(a) Voir à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la
division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin
1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b) Voir à la page CI-1986 dans la
déclaration de monsieur Alain Bouchard, membre du conseil d’administration de l’Association des
détaillants en alimentation du Québec, à la Commission permanente des institutions (15 juin
1993), Journal des débats, 48, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 70
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 71
aux détaillants a été conservée stable, à environ vingt mille dollars, en raison de deux
diminutions109 de la commission versée aux détaillants.
Figure 48
Commission annuelle
moyenne
Commission versée au détaillant
pour chaque ALV du parc de Loto-Québec
$25 000
$20 000
$15 000
$10 000
$5 000
$0
1994- 1995- 1996- 1997- 1998- 1999- 2000- 2001- 2002- 2003- 2004- 20051995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
3.2.2.4 L’intégrité des APV
En principe, les joueurs ne payaient que pour le plaisir de jouer, et de gagner des crédits
ou des parties gratuites110. À leur initiative, certains commerçants attribuaient toutefois
des lots en argent, ou en biens, lorsque les joueurs obtenaient des combinaisons
gagnantes. Le paiement des lots était au gré des commerçants qui pouvaient choisir,
pour un même lot, de payer davantage certains clients que d’autres111. Lorsqu’ils en
avaient le pouvoir, les commerçants pouvaient choisir de ne pas payer du tout sans que
les joueurs n’aient de recours.
En manipulant des interrupteurs internes, il était possible de régler le taux de remise.
Selon des statistiques produites par le gouvernement de l’Alberta112, les propriétaires
pouvaient, à leur gré, varier le taux de remise entre 54% et 78%. Pour les APV du
Québec, les données du Tableau 15 indiquent que les frais, incluant les montants remis
aux joueurs sous forme de lots, totalisaient 57% des montants misés. Si tous les APV
109
Le 1 mai 2001, la commission aux détaillants est passée de 30% à 26% du revenu net (voir à
la page 45 du rapport annuel de 2001-2002 de Loto-Québec). Le 16 novembre 2003, la
commission est passée de 26% à 22% (voir à la page 16 du rapport annuel de 2003-2004).
110
Voir à la page 115 dans : Bizier, H. A., Darveau-Cardinal, J., Fleury, J.-L., Lamarre, L., &
Mozarain, J. (1996). Loto-Québec, un succès collectif. Montréal, QC : Forces.
111
Voir le témoignage de monsieur Simon Brodeur (10:50). Dans : Assemblé Nationale du
Québec. (1995-03-15). Examen des orientations, des activités et de la gestion de la Société des
loteries du Québec. Journal des débats, 15 mars 1995, Commission permanente du budget et de
l’administration.
112
Voir à la page 14-28 dans : Alberta Gaming and Liquor Commission. (2001). Achieving a
balance: gaming licensing policy review, volume one. St-Albert, Alberta : Alberta Gaming and
Liquor Commission.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 71
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 72
étaient utilisés illégalement, le taux de remise aurait nécessairement été inférieur113 à
57%. Toutefois, certains APV ont plausiblement été utilisés légalement. Ceux-ci ne
gratifiant les joueurs qu’avec des parties gratuites, aucune somme n’était retournée à
ces joueurs. En ce sens, il est plausible que le taux de remise ait été supérieur à 57%.
Cependant, avec de telles données financières, il est certain que le taux de remise des
APV était de beaucoup inférieur à ceux des ALV actuels qui se situe à 92%.
Par ailleurs, aucune vérification n’était faite quant à la composition des jeux de cartes ou
à la probabilité d’occurrence de chacune des cartes. Des combinaisons gagnantes
pouvaient survenir beaucoup moins souvent que les joueurs ne l’anticipaient.
3.2.2.5 Les APV comme source de financement du crime organisé
Il persiste une croyance répandue selon laquelle le principal motif de l’étatisation des
AÉJ a été le besoin de briser la mainmise du crime organisé sur les APV, et
conséquemment de le priver des revenus qu’ils généraient. La réapparition massive des
appareils de jeu a certainement rappelé l’époque de Pacifique Plante. Quoi qu’Il en soit,
nulle part dans sa documentation officielle, Loto-Québec n’a exprimé agir autrement que
pour endiguer une simple fuite économique114.
L’exploitation des APV a été déclarée illégale parce que les exploitants remettaient aux
joueurs des lots en argent ou des biens en échange des parties gratuites. Cela signifie
que des revenus échappaient au fisc. Toutefois, les profiteurs n’étaient pas
nécessairement des personnes socialement nuisibles autrement que par un manque de
solidarité économique115. Il existe des témoignages policiers116 qui suggèrent que les
distributeurs se sont querellés violemment pour le contrôle des établissements, surtout
lorsque le gouvernement a annoncé son intention d’installer les ALV dans des bars.
Toutefois, règle générale, en contact uniquement avec les tenanciers117, les joueurs
113
Puisqu’il faut prélever les frais d’opération.
114
Une exception a été constatée dans un article du Devoir en date du 4 novembre 2006.
115
Voir à la page CI-1833 dans les déclarations de messieurs Robert Lavigne et Claude Quinn,
de la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des
débats, 45, Gouvernement du Québec.
116
(a) Des querelles violentes ont été rapportées par la Sûreté du Québec en ce qui concerne
une compétition entre des fournisseurs d’APV qui fonctionnaient par location. Voir la déclaration
de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la Commission
permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec. (b)
Voir aussi à la page CI-1875 dans la déclaration de monsieur Richard McGinnis, directeur de la
division du crime organisé du SPCUM, à la Commission permanente des institutions (3 juin
1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec.
117
Lorsque les AÉJ ont été étatisés, le président de Loto-Québec a indiqué ne pas vouloir écarter
les propriétaires des sites où sont situés les APV, dans la mesure où ceux-ci opèrent des sites
qui seront conformes à la réglementation. Ce sont les distributeurs que Loto-Québec a voulu
éliminer du marché des AÉJ. Voir à la page CI-1845 dans la déclaration de monsieur Michel
Crête, président de Loto-Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993),
Journal des débats, 45, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 72
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 73
n’étaient pas sous la mainmise du crime organisé. Au pire, des prêts sur carte de crédit,
jusqu’à 300 dollars, ont été occasionnellement consentis à des joueurs pour les inciter à
jouer118. Mais, compte tenu de l’illégalité évidente, cette pratique devait obligatoirement
être cachée et nécessairement marginale119.
Quel intérêt le crime organisé aurait-il trouvé, durant les années 1976 à 1991, à exercer
une mainmise sur la clientèle des dépanneurs du Québec? Cette mainmise du crime
organisé apparaît plus probable dans le cas de la portion des APV distribuée dans les
bars120, comme le sont aujourd’hui tous les ALV. Dans cette perspective, les joueurs
québécois sont aujourd’hui plus exposés à l’emprise du crime organisé qu’à l’époque
des APV.
Après l’adoption de la loi 84 en juin 1993, la saisie subséquente des APV n’a pas
révélée qu’il a existé beaucoup d’autres APV que ceux détenant un permis de la Régie
des loteries du Québec. En 1990-1991, il y a eu 18 581 permis accordés par la régie.
Entre 1994-1995 et 1997-1998, il n’y a eu que 13 871 APV qui ont été saisis121.
Pourtant, la résistance du marché gris a été, à toutes fins pratiques, complètement
résorbée en 1996122. Dans ce cas, on ne trouve aucune trace des dizaines de milliers
d’APV qui auraient constitué un marché clandestin. On ne constate pas dans les
juridictions voisines des plaintes concernant une arrivée massive d’APV provenant du
Québec. Néanmoins, les données de la Régie des loteries indiquent que 4 710 appareils
avec permis sont disparus.
3.2.2.6 La prévalence du jeu pathologique sur APV
À l’époque du marché gris, les problèmes de jeu concernaient davantage les courses de
chevaux et les jeux de cartes. Les APV n’étaient toutefois pas inoffensifs car il existe
118
Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la
Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Gouvernement du
Québec.
119
Voir à la page 9 dans : Sécurité publique – Québec. (2006, février). Avis du ministère de la
Sécurité publique : relocalisation du casino de Montréal : implications en matière de sécurité
publique. Montréal, QC : auteurs.
120
La violence exercée auprès des propriétaires de bars est une préoccupation majeure du
ministère de la Sécurité publique. En l’occurrence, ce ministère a collaboré à la conception de
trois éditions du magazine Infobars destinées à renseigner les propriétaires de bars quant aux
moyens de lutter contre une mainmise du crime organisé sur leurs établissements. (a)
Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2001, février). Numéro
spécial : non à l’intimidation. Infobars, 3(8). (b) Corporation des propriétaires de bars, brasseries
et tavernes du Québec. (2002, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 3(12). (c)
Sécurité publique – Québec. (2005, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 4(2).
121
Voir à la page 23 dans : Ministère des finances. (1998). Budget 1998-1999 : Favoriser
l’intégrité du régime fiscal. Québec, QC : Gouvernement du Québec.
122
Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au
Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 73
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 74
quelques historiques de joueurs pathologiques qui ont subi des dommages ou
développé une pathologie en jouant sur les APV123.
Il n’y a pas eu d’étude de prévalence du jeu pathologique concernant l’utilisation des
APV. Il y a cependant eu quatre études scientifiques124 qui ont recrutés des joueurs
réguliers sur APV sans qu’un diagnostic ne fasse partie des critères de sélection. Au
total, ces études ont regroupé 51 joueurs. Aucun de ces joueurs réguliers n’a été
diagnostiqué joueur pathologique. Par ailleurs, la ligne Jeu : aide et référence n’a pas
débuté par un grand nombre d’appels concernant les appareils de jeu hors casino. Le
nombre de ces appels a surtout augmenté après que les ALV aient été bien implantés
(voir Figure 49).
123
(a) Sylvain, C., & Ladouceur, R. (1992). Correction cognitive et habitudes de jeu chez les
joueurs de poker vidéo. Revue canadienne des sciences du comportement, 24(4), 479-489. (b)
Bujold, A., Ladouceur, R., Sylvain, C., & Boisvert, J.-M. (1994). Treatment of pathological
gamblers : an experimental study. Journal of behavior therapy and experimental psychiatry,
25(4), 275-282. (c) Sylvain, C., Ladouceur, R., & Boisvert, J.-M. (1997). Cognitive and
behavioural treatment of pathological gambling : A controlled study. Journal of Consulting and
Clinical Psychology, 65(5), 727-732.
124
(a) Ladouceur, R., Sylvain, C., Duval, C., Gaboury, A., & Dumont, M. (1989). Correction des
verbalisations irrationnelles chez des joueurs de poker-vidéo. International journal of psychology,
24, 43-56. (b) Dumont, M., & Ladouceur, R. (1990). Evaluation of motivation among video-poker
players. Psychological reports, 66, 95-98. (c) Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance,
N., & Tremblay, S. (1991). Ecological validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal
of gambling studies, 7(2), 109-116. (d) Coulombe, A., Ladouceur, R., Desharnais, R., & Jobin, J.
(1992). Erroneous perceptions and arousal among regular and occasional video poker players.
Journal of gambling studies, 8(3), 235-244.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 74
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 75
Figure 49
N om bre d'appels
Appels à la ligne Jeu, aide et référence
concernant les appareils de jeu hors casino
7 000
6 000
5 000
4 000
3 000
2 000
1 000
0
19951996
19961997
19971998
19981999
19992000
20002001
20012002
20022003
20032004
3.2.2.7 La légalité des APV
En 1985, une modification au Code criminel du Canada a accordé aux provinces le
pouvoir exclusif d’exploiter les dispositifs de jeu, notamment les AÉJ125.
Conséquemment, la police de Montréal a effectué une saisie des APV chez un
commerçant. Deux ans plus tard, la Cour municipale de Montréal a déclaré les APV
illégaux126, et ce jugement a été confirmé définitivement le 31 octobre 1991 lorsque la
Cour suprême du Canada a refusé d’autoriser l’audition d’un appel127. À partir de cette
date, les APV ont été systématiquement saisis, et leur éradication128 aurait été achevée
avant 1996.
Les APV n’ont apparemment pas causé de crise sociale en raison des gestes morbides
de joueurs y ayant perdu le contrôle. Incidemment, les taux de remise inférieurs à 80%,
surtout quand les exploitants les modifiaient à la baisse129, rendaient rares les
événements pouvant constituer un gain significatif, d’où une faible probabilité d’illusion
de contrôle et du développement conséquent d’une dépendance pathologique.
Les APV du marché gris ont surtout posé des problèmes légaux, fiscaux, économiques
ou de protection des consommateurs. Ceux-ci aurait pu simplement disparaître sans
être remplacés. Prétextant vouloir éviter le développement d’un important marché
125
Voir à la page ix dans : Campbell, C. S. (1994). Gambling in Canada : the bottom line.
Burnaby, BC: Simon Fraser University, Criminology research centre.
126
R. c. Laniel Canada Inc., Cour municipale de Montréal, no 15-13022, 17 juin 1987.
127
Demande d’autorisation d’appel à la Cour suprême du Canada rejetée, no 22441, 31 octobre
1991.
128
Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au
Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs.
129
Un taux de remise de 54% équivaut à celui des loteries traditionnelles.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 75
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 76
clandestin, le gouvernement du Québec a décidé d’étatiser les APV. Mais, au lieu de
simplement standardiser les APV en fonction des paramètres qui satisfaisaient déjà leur
clientèle, le gouvernement a proposé d’autres types d’appareils dont les paramètres de
jeu sont agencés de manière très différente, potentiellement plus pathogène.
3.2.3 La dangerosité des machines à sous au casino
Les machines à sous sont exclusivement installées dans les casinos québécois depuis
octobre 1993. À comparer aux ALV (voir plus loin), il existe peu de données permettant
d’évaluer leur dangerosité. Néanmoins, la dangerosité des MAS peut être estimée sous
quatre perspectives.
La première consiste à établir le taux de prévalence du jeu excessif parmi les joueurs
que l’on rencontre sur les MAS. Il est alors intéressant de comparer la prévalence du jeu
excessif parmi les joueurs sur les MAS par rapport à celle de la population en général.
Ce rapport est un estimateur valable de l’attrait des MAS auprès des joueurs excessifs,
peu importe que ceux-ci aient été excessifs avant leur initiation aux MAS ou
conséquemment à leur expérience de jeu sur les MAS.
La seconde consiste à déterminer l’attrait des MAS auprès des joueurs excessifs130 par
rapport aux joueurs sans problème de jeu. Si le taux de pénétration des MAS parmi les
joueurs excessifs est très élevé, et qu’il est très bas pour les joueurs sans problème de
jeu, ces appareils constituent alors un médium ou un environnement privilégiés pour
faire des interventions préventives ou curatives ciblées.
La contribution des joueurs excessifs aux revenus du jeu, toutes activités confondues, a
été analysée dans plusieurs juridictions. En moyenne, alors que les joueurs excessifs
représentent 4% de la population, ceux-ci contribuent pour 23% des revenus totaux du
jeu131. Cette disproportion s’accentue lorsque le diagnostic se précise. En l’occurrence,
130
C’est-à-dire les joueurs à risque plus les joueurs pathologiques.
131
(a) Alberta, 1993 = 24,4% des revenus provenant de 5,4% de joueurs excessifs : Australian
Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra,
Australia: Ausinfo. (b) Nouvelle-Écosse, 1996 = 7,3% provenant de 3,9% : Williams, R. J., &
Wood, R. T. (2004). The proportion of gaming revenue derived from problem gamblers:
examining the issues in a canadian context. Analyses of social issues and public policy, 4(1), 3345. (c) Alberta, 1997 = 17% provenant de 4,8% : Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission.
(1998, juin). Adult gambling and problem gambling in Alberta. Summary report. Edmonton,
Alberta: auteurs. (d) Île-du-Prince-Édouard, 1999 = 6,3% provenant de 3,1% : Voir Williams &
Wood (2004). (e) États-Unis, 1999 = 15% provenant de 2,5% : Gerstein, D., Murphy, S., Toce,
M., Hoffmann, J., Palmer, A., Johnson, R., Larison, C., Chuchro, L., Bard, A., Engelman, L., Hill,
M. A., Buie, T., Volberg, R., Harwood, H., Tucker, A., Christiansen, E., Cummings, W., & Sinclair,
S. (1999). Gambling impact and behavior study: report to the national gambling impact study
commission. Chicago: National opinion research center. (f) Nouvelle-Zélande, 1999 = 19%
provenant de 1,3% : Abbott, M. W., & Volberg, R. A. (2000). Taking the pulse on gambling and
problem gambling in New Zealand: a report on phase one of the 1999 national prevalence
survey. New Zealand: Department of internal affairs, Government of New Zealand. (g) NouveauBrunswick, 2001 = 32,6% provenant de 3,2% : Voir Williams & Wood (2004). (h) Ontario, 2001 =
37,5% provenant de 3,8% : Voir Williams & Wood (2004). (i) Manitoba, 2001 = 18,9% provenant
de 3,4% : Voir Williams & Wood (2004). (j) Saskatchewan, 2001 = 25,2% provenant de 5,9% :
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 76
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 77
en ne considérant que les joueurs pathologiques, une importante commission
australienne est parvenue à la conclusion que ceux-ci représentent 2,1% des joueurs et
contribuent pour 33% des revenus du jeu. Conséquemment, la troisième perspective
consiste à calculer le pourcentage des revenus des MAS qui provient exclusivement des
joueurs pathologiques lorsque ceux-ci utilisent des MAS.
Enfin, une quatrième perspective consiste à évaluer la dépense mensuelle individuelle
au jeu sur les MAS. En effet, si la proportion de la contribution globale des joueurs
excessifs au revenu des MAS peut être élevée, cela ne signifie pas nécessairement que
la contribution des joueurs représente un montant qui leur est individuellement
dommageable. Dans ce cas, il faut établir que la contribution individuelle représente une
dépense qui outrepasse la capacité financière des joueurs. Pour les joueurs excessifs,
une dépense au jeu importante signifie nécessairement des dommages importants.
3.2.3.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur MAS
Cinq provinces canadiennes132 ont diagnostiqué, en fonction de l’ICJE133, les problèmes
de jeu parmi les joueurs qui ont parié sur des MAS au cours des 12 derniers mois134
(voir Figure 50). Globalement, environ un joueur sur neuf (11%) a été diagnostiqué
joueur excessif.
Voir Williams & Wood (2004). (k) Alberta, 2001 = 31% provenant de 5,2% : Voir Williams & Wood
(2004). (l) Colombie-Britannique, 2002 = 26,2% provenant de 4,6% : Voir Williams & Wood
(2004). (m) Ontario, 2003 = 35% provenant de 4,8% : Williams, R., & Wood, R. (2004, june 23).
The demographic sources of Ontario gaming revenue. Final report. Ontario problem gambling
research centre. (n) Terre-Neuve, 2005 = 30% provenant de 3,4% : Marketquest research group,
Inc. (2005, november). Newfoundland and Labrador gambling prevalence study. St John's, NL:
Government of Newfoundland and Labrador, Department of health and community services.
132
(a) Voir à la page 50 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001, december 04).
Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Toronto, ON: Canadian centre on
substance abuse. Responsible gambling council (Ontario). (b) Voir à la page 46 dans : Wynne, H.
J. (2002, January). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Final report. Ottawa, ON:
Canadian centre on substance abuse. (c) Voir à la page 35 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J.
(2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB:
Alberta Gaming Research Instiutute. (d) Voir à la page 3-18 dans : Schrans, T., & Schellinck, T.
(2004, june). 2003 Nova Scotia gambling prevalence study. Final report. Halifax, NS: Nova Scotia
office of health promotion.
133
L’Indice canadien du jeu excessif (ICJE) est un outil psychométrique construit pour évaluer les
risques et les problèmes de jeu dans une population. (a) Ferris, J., Wynne, H., & Single, E. (1999,
22 avril). Measuring problem gambling in Canada: final report – phase I. Ottawa, ON: Canadian
centre on substance abuse. (b) Ferris, J., & Wynne, H. (2001 19 février). The Canadian problem
gambling index: Final report. Ottawa, ON: Canadian centre on substance abuse. (c) Smith, G. J.,
& Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report.
Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute.
134
Les données de la Nouvelle-Écosse concernent en fait des joueurs mensuels.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 77
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 78
Figure 50
80%
76%
69%
65%
69%
89%
Prévalence chez les joueurs sur MAS selon les études de prévalence
0%
Sans problème
Faible risque
Risque modéré
Pathologiques
7%
14%
15%
11%
7%
20%
1%
3%
3%
15%
18%
20%
20%
5%
40%
6%
11%
12%
60%
Excessifs
Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE)
Selon les comportements de jeu au cours des 12 derniers mois
Ontario, 2001
Saskatchewan, 2001
Nouvelle-Écosse, 2003
Île-du-Prince-Édouard, 2005
Alberta, 2002
Le taux de prévalence du jeu excessif spécifique aux MAS135 est alors 3,1 fois celui de la
population en général.
3.2.3.2 Les MAS sont une activité de jeu attrayante pour les joueurs excessifs136
Ces cinq provinces canadiennes ont aussi évalué la popularité des MAS parmi les
diverses catégories de joueurs de l’ICJE (voir Figure 51). Ainsi, ces appareils captent,
en moyenne, l’attrait de 51% des joueurs pathologiques à comparer à 19% des joueurs
sans problèmes de jeu.
En Ontario, où les casinos sont peu en compétition avec les ALV, on retrouve 63% des
joueurs pathologiques sur les MAS. En Alberta, en Saskatchewan, en Nouvelle-Écosse
et à l’Île-du-Prince-Édouard, où il existe d’importants parc d’ALV, les joueurs
pathologiques se retrouvent en moins grande proportion sur les MAS, soit environ 45%.
Ces données sont conformes au constat que les ALV exercent un attrait plus puissant
auprès des joueurs pathologiques. Selon les données de la Figure 51, lorsque les ALV
et les MAS sont mis en compétition, les ALV captent plus facilement les joueurs
excessifs que les MAS.
135
Par province, les rapports sont pour l’Ontario (1,9), la Saskatchewan (2,3), l’Alberta (2,9), la
Nouvelle-Écosse (5,2) et l’Île-du-Prince-Édouard (3,4).
136
Lorsqu’évalués par le SOGS, les joueurs excessifs englobent les joueurs à risque et les
joueurs pathologiques. Lorsqu’évalués par l’ICJE, ce sont les joueurs à risque modéré plus les
joueurs avec problème (pathologiques).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 78
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 79
Figure 51
Sans
problème
Faible risque
63%
48%
43%
43%
25%
57%
47%
46%
50%
39%
33%
46%
25%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
32%
20%
15%
23%
7%
Taux de pénétration
annuel
Utilisation des MAS par les diverses catégories de joueurs
Risque
modéré
Risque
Pathologiques
modéré ou +
Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE)
Ontario, 2001
Saskatchewan, 2001
Nouvelle-Écosse, 2003
Île-du-Prince-Édouard, 2005
Alberta, 2002
3.2.3.3 La proportion des revenus tirés des MAS provenant des joueurs excessifs
La proportion des revenus varie aussi en fonction de l’activité de jeu. Dans le cas des
MAS, huit études nord-américaines ont constaté que les joueurs pathologiques
contribuent en moyenne à 26% des revenus137. Dans la mesure où les joueurs
pathologiques constituent 11% de la clientèle, ceux-ci contribuent pour deux fois leur
part et même davantage.
3.2.3.4 La dépense au jeu mensuelle sur les MAS
Au Canada, trois études canadiennes rapportent des dépenses mensuelles médianes.
137
(a) Alberta, 1993 = 10,1% : Australian Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling
Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Iowa, 1995 = 15,3% : Voir Australian
Productivity Commission (1999). (c) Mississippi, 1996 = 18,5% : Voir Australian Productivity
Commission (1999). (d) New York, 1996 = 37,2% : Volberg, R.A., Gerstein, D.R., Christiansen,
E.M., & Baldridge, J. (2001). Assessing selfreported expenditures on gambling. Managerial and
Decision Economics, 22, 77-96. (e) Louisiane, 1999 = 30,6% : Voir Volberg, Gerstein,
Christiansen & Baldridge (2001). (f) Île-du-Prince-Édouard, 1999 =16% : Doiron, J., & Nicki, R.
(1999, octobre). The prevalence of problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown,
IPE: Prince Edward Island Department of Health and Social Services. (g) Alberta, 2002 = 20,5% :
Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final
report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. (h) Ontario, 2003 = 60% : Williams,
R., & Wood, R. (2004, june 23). The demographic sources of Ontario gaming revenue. Final
report. Ontario problem gambling research centre.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 79
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 80
Tableau 16
Dépense mensuelle médiane au jeu sur les MAS selon la catégorie de joueurs telle
qu’évaluée par l’Indice canadien de jeu excessif
Juridiction
Saskatchewan en 2001138
Alberta en 2001139
Île-du-Prince-Édouard, 2005140
Sans
problème
$ 10
$ 11
$ 35
Catégories de l’ICJE
Faible risque
Risque
Avec
modéré
problème
$ 20
$ 40
$ 200
$ 20
$ 50
$ 125
$ 50
$ 110
Au niveau individuel, la contribution des joueurs pathologiques au revenu des MAS
pourrait être appréciable sur les finances des personnes les plus pauvres, quoique celleci n’apparaît pas critique pour la plupart des gens.
3.2.4 La dangerosité des appareils de loterie vidéo
Il existe davantage de données empiriques permettant d’évaluer la dangerosité des
ALV. Il est d’abord possible de l’évaluer en fonction des quatre perspectives sous
lesquelles les MAS ont été analysées.
Par ailleurs, compte tenu du grand nombre de joueurs sur ALV demandant une aide
clinique, la dangerosité se constate dans la nature des appels faits aux lignes
téléphoniques de référence vers les services cliniques, ainsi que par l’analyse des
problèmes de jeu des personnes évaluées par ces services.
La dangerosité des ALV s’évalue aussi par le constat d’une importante sous-estimation,
par les joueurs, de la dépense qu’ils font sur les ALV.
Enfin, la dangerosité des ALV se constate particulièrement en répertoriant les
dommages exceptionnellement intenses qui découlent d’une perte de contrôle sur la
dépense au jeu.
138
Voir à la page 53 dans : Wynne, H. J. (2002, January). Gambling and problem gambling in
Saskatchewan. Ottawa, Ontario: Canadian centre on substance abuse.
139
Voir à la page 43 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002 February). Using the Canadian
problem gambling index (C.P.G.I.). Alberta gaming research institute.
140
Voir à la page 54 dans : Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in
Prince Edward Island. Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 80
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 81
3.2.4.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur ALV
Sept provinces canadiennes141, ainsi qu’une étude pan-canadienne, ont diagnostiqué les
problèmes de jeu parmi les joueurs qui ont parié sur des ALV au cours des 12 derniers
mois142 (voir Figure 52). Globalement, environ un joueur sur cinq (19%) a été
diagnostiqué comme étant un joueur excessif. Huit pour cent (8%) rencontrent les
critères du jeu pathologique143. Ainsi, le taux de prévalence du jeu pathologique parmi
les joueurs annuels sur ALV est en moyenne 6,2 fois le taux de la population en général,
toutes activités confondues144. Ce rapport décrivant l’attrait des ALV est le double de
celui des MAS, ce qui suggère une dangerosité aussi doublée.
Figure 52
Sans problème
Faible risque
Risque modéré
Pathologiques
27%
20%
20%
19%
20%
18%
15%
12%
8,6%
3%
0%
19%
6%
6%
6%
9%
9,7%
20%
8%
15%
14%
13%
17%
21%
20%
23%
23%
40%
8%
13%
60%
76%
74%
80%
56%
58%
60%
58%
57%
Prévalence chez les joueurs sur ALV selon les études de prévalence
Excessifs
Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE)
Selon les comportements de jeu au cours des 12 derniers mois
Nouveau-Brunswick, 2001
Ontario, 2001
Saskatchewan, 2001
Alberta, 2002
Nouvelle-Écosse, 2003
Terre-Neuve, 2005
Île-du-Prince-Édouard, 2005
Canada, 2002
La prévalence du jeu pathologique augmente toutefois lorsqu’elle est mesurée chez des
personnes qui jouent plus fréquemment qu’au moins une fois par année. Ainsi, au
141
Voir les études répertoriées à la note 148 ainsi que (e) Focal research (2001). 2001 Survey of
gambling and problem gambling in New Brunswick. Moncton, NB: New Brunswick department of
health and wellness. (f) Marshall, K., & Wynne, H. (2003, December). Fighting the odds. L’emploi
et le revenu en perspective, 4(12), Ottawa, ON : Statistique Canada, 75-001-XIE.
142
Les données de la Nouvelle-Écosse concernent en fait des joueurs mensuels.
143
Les taux de prévalence des problèmes de jeu sur ALV sont moindres pour l’ensemble du
Canada puisque l’Ontario et la Colombie-Britannique ne possèdent pas de parc d’ALV sauf les
appareils installés aux hippodromes.
144
Par province, les rapports sont pour le Nouveau-Brunswick (8,4), l’Ontario (5,4), la
Saskatchewan (3,4), l’Alberta (3,7), la Nouvelle-Écosse (9,5), Terre-Neuve (5,4) et l’Île-du-PrinceÉdouard (7,9).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 81
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 82
Nouveau-Brunswick145 en 1996, 7% des joueurs à vie sur ALV sont pathologiques. On
en retrouve seulement 2% chez les joueurs annuels, mais 35% chez les joueurs
hebdomadaires. Au Québec en 1996146, 7% des joueurs annuels sur ALV sont
diagnostiqués joueurs pathologiques à comparer à 20% des joueurs mensuels. En
Australie147 en 1999, 4,7% des joueurs annuels sur AÉJ sont pathologiques. Cette
proportion augmente à 22,6% chez les joueurs hebdomadaires. Plus on joue
fréquemment sur les ALV, plus il est probable que l’on soit un joueur pathologique.
3.2.4.2 Les ALV sont une activité de jeu particulièrement attrayante pour les
joueurs excessifs
Six provinces canadiennes148 ont évalué la popularité des ALV parmi les diverses
catégories de joueurs de l’ICJE (voir Figure 53). Sans équivoque, les ALV intéressent
peu les joueurs sans problème de jeu. En contrepartie, plus le risque de problème de jeu
augmente, plus les ALV sont une activité de jeu populaire. Là où les ALV sont largement
distribués dans les bars, entre 60% et 80% des joueurs pathologiques y jouent. On y
retrouve aussi environ la moitié des joueurs à risque modéré.
Ces données confirment des estimations plus anciennes obtenues avec le SOGS149.
145
Voir aux pages 84 et 85 dans : Baseline Market Research. (1996). Appendix E - Final report,
prevalence study, problem gambling, wave 2. Dans Video lottery program review. Moncton, NB:
Gouvernement du Nouveau-Brunswick.
146
Ces données non publiées du CQEPTJ ont été rapportées (voir à la page 265) dans l’annexe
G (Actualisation de l’étude québécoise de prévalence réalisée en 1996) du document : Leblond,
J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au
dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
147
Voir au tableau 6.15 à la page 6.54 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s
Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo.
148
(a) Voir à la page 50 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2001, december 04).
Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Toronto, ON: Canadian centre on
substance abuse. Responsible gambling council (Ontario). (b) Voir à la page 46 dans : Wynne, H.
J. (2002, January). Gambling and problem gambling in Saskatchewan. Final report. Ottawa, ON:
Canadian centre on substance abuse. (c) Voir à la page 35 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J.
(2002). Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB:
Alberta Gaming Research Instiutute. (d) Voir à la page 3-18 dans : Schrans, T., & Schellinck, T.
(2004, june). 2003 Nova Scotia gambling prevalence study. Final report. Halifax, NS: Nova Scotia
office of health promotion. (e) Voir à la page 55 dans : Marketquest research group, Inc. (2005,
november). Newfoundland and Labrador gambling prevalence study. St John's, NL: Government
of Newfoundland and Labrador, Department of health and community services. (f) Voir à la page
53 dans : Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in Prince Edward Island.
Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health.
149
Les données du SOGS ont comparé les joueurs sans problèmes de jeu aux joueurs excessifs.
(a) 18% c. 61% dans : Alberta Alcohol and Drug Abuse Commission. (1998, juin). Adult gambling
and problem gambling in Alberta. Summary report. Edmonton, Alberta: auteurs. (b) 14% c. 57%
dans : Doiron, J., & Nicki, R. (1999, octobre). The prevalence of problem gambling in Prince
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 82
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 83
Les données de l’Ontario indiquent un intérêt moindre des joueurs à l’égard des ALV.
Cela est dû vraisemblablement au fait que ces appareils ne sont pas disponibles dans
les bars, et que l’offre de jeu y est surtout constitué de MAS dans des casinos.
La capacité des ALV à attirer les joueurs pathologiques, ou à les créer, est illustrée
autrement par une étude150 du comportement des joueurs sur ALV en Alberta selon
laquelle les joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu ont commencé à jouer plus tôt
sur les ALV que ceux qui n’ont pas de problème de jeu (voir Figure 54). Dit autrement,
plus on joue sur les ALV depuis longtemps, plus il est probable que l’on soit un joueur
pathologique. Dans cette province, les ALV sont disponibles depuis mars 1992.
Edward Isalnd. Charlottetown, IPE: Prince Edward Island Department of Health and Social
Services.
150
Voir aux pages 87 et 88 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2004, january). VLT gambling in
Alberta: a preliminary analysis. Final report. Edmonton, AB: Alberta gaming research institute.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 83
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 84
Figure 53
20%
0%
Sans
problème
Faible risque
81%
78%
61%
81%
50%
18%
40%
5%
60%
10%
39%
31%
53%
37%
58%
80%
55%
45%
82%
100%
2%
15%
12%
18%
9%
8%
Taux de pénétration
annuel
Utilisation des ALV par les diverses catégories de joueurs
Risque
modéré
Risque
Pathologiques
modéré ou +
Catégories de l'indice canadien de jeu excessif (ICJE)
Ontario, 2001
Saskatchewan, 2001
Alberta, 2002
Nouvelle-Écosse, 2003
Terre-Neuve, 2005
Île-du-Prince-Édouard, 2005
Figure 54
100%
80%
60%
40%
20%
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1995
1996
1994
1993
1992
1991
1990
1988
1989
1987
1986
1985
1984
1983
0%
1982
Distribution cumulée
Alberta (2004) : Année du début du jeu sur ALV en fonction
de la catégore de joueurs
Année du début du jeu sur AÉJ
Non-problem
Low-risk
Moderate-risk
Problem gamblers
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 84
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 85
3.2.4.3 La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs
pathologiques
Huit études ont constaté que les joueurs pathologiques contribuent en moyenne à 46%
des revenus des ALV151. Les proportions varient entre 27% et 67%. Comparativement,
dans le cas des MAS, la contribution moyenne était de 26% des revenus.
Les joueurs sont toutefois de mauvais estimateurs de leur dépense au jeu152, en
particulier sur AÉJ153. À cet égard, les études de prévalence n’offrent pas les meilleures
données pour estimer cette contribution. Typiquement, les répondants sont appelés au
téléphone, interrompus sans avertissement dans leurs activités quotidiennes, et on leur
demande de faire une estimation rétrospective de leur dépense au jeu au cours des 12
derniers mois. Cette tâche implique trop d’incertitude. Il est néanmoins possible de
procéder autrement en effectuant des mesures plus objectives, moins rétrospectives.
151
(a) Alberta, 1993 = 45,9% : Australian Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling
Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Alberta, 1997 = 67% : Azmier, J., &
Smith, G. (1998). The state of gambling in Canada: an interprovincial roadmap of gambling and
its impact. Calgary, AB: Canada west foundation. (c) Nouvelle-Écosse, 1997-1998 = 53% : Nova
Scotia Department of Health. (1998a). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax,
NS : auteur. (d) Australie, 1997-1998 = 42,3% : Australian Productivity Commission. (1999).
Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (e) Montana, 1998 =
36,2% : Volberg, R.A., Gerstein, D.R., Christiansen, E.M., & Baldridge, J. (2001). Assessing
selfreported expenditures on gambling. Managerial and Decision Economics, 22, 77-96. (f)
Louisiane, 1999 = 27,1% : Voir Volberg, Gerstein, Christiansen & Baldridge (2001). (g) Île-duPrince-Édouard, 1999 = 36,2% : Doiron, J., & Nicki, R. (1999, octobre). The prevalence of
problem gambling in Prince Edward Island. Charlottetown, IPE: Prince Edward Island Department
of Health and Social Services. (h) Alberta, 2002 = 63,2% : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002).
Measuring gambling and problem gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta
Gaming Research Instiutute.
152
(a) Blaszczynski, A., Dumlao, V., & Lange, M. (1997). "How much do you spend gambling?"
Ambiguities in survey questionnaire items. Journal of gambling studies, 13(3), 237-252. (b) Voir
aux pages 16.25 et 16.26 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling
Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (c) Blaszczynski, A., Ladouceur, R.,
Goulet, A., & Savard, C. (2006). ‘How much do you spend gambling?’ : Ambiguities in
questionnaires items assessing expenditure. International gambling studies, 6(2), 123-128.
153
Voir aussi à la Figure 55 à la page 90 de la présente annexe.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 85
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 86
Seize études scientifiques154 ont cherché à recruter des joueurs réguliers sur AÉJ sans
que la condition clinique ne soit un critère de sélection des participants. En moyenne, les
auteurs de ces études ont diagnostiqué 35% de joueurs pathologiques parmi les joueurs
réguliers sur AÉJ. Dans ces seize études, les proportions de joueurs pathologiques
varient entre 13% et 64%. Si en moyenne à chaque instant, il y a toujours 35% de
joueurs pathologiques parmi la clientèle, il est vraisemblable que leur contribution
financière soit au moins égale à cette proportion.
Considérant que, dans l’étude de la Nouvelle-Écosse155, à chaque fois qu’une personne
a pressé le bouton Jouer , la mise des joueurs pathologiques a été de 57,7% fois plus
grande que celle des joueurs sans problème de jeu, 35% de joueurs pathologiques
contribueraient alors pour 46% des revenus bruts des ALV. Ceci est sans compter que,
pour certains joueurs pathologiques, l’intervalle de temps pourrait être plus court156 entre
154
(a) 18,0% : Griffiths, M. (1991). Psychobiology of the near-miss in fruit machine gambling. The
journal of psychology, 125(3), 347-357. (b) 29,4% ; Dickerson , M. (1996). Problem gambling in
Australia. Australian Institute of Gambling Research, 1st National gambling conference papers.
(c) 38,5% : Breen, R. (1997). Clinical interviews with frequent slot machines players. In W.
Mateja, R. Wilson, & B. Ableman, A survey of gambling in Delaware. Newark, DE: Health
Services Policy Research Group, University of Delaware School of Urban Affairs and Public
Policy. (d) 20,0% : Pike, C., & Quinn, F. L. (1997). Preliminary report of the Quinn-Pike video
gaming study. South Carolina: auteurs. (e) 41,3% : Othtsuka, K., Bruton, E., Deluca, L., & Borg,
V. (1997). Sex differences in pathological gambling using gaming machines. Psychological
Reports, 80, 1051-1057. (f) 64% : Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., &
Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling Journal of gambling behavior, 13(3),
253-266. (g) 30,5% : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax,
Nova Scotia: Department of health. (h) 39,5% : Trevorrow, K., & Moore, S. (1998). The
association between loneliness, social isolation and women's electronic gaming machine
gambling. Journal of gambling behavior, 14(3), 263-284. (i) 22,6% : Productivity Commission.
(1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (j) 48,3% :
Loba, P., Stewart, S. H., Klein, R. M., & Blackburn, J. R. (2001). Manipulations of the features of
standard video lottery terminal (VLT) games: effects in pathological and non-pathological
gamblers. Journal of gambling studies, 17(4), 297-320. (k) 58,1% : Oliveira, M. P. M. T., & Silva,
M. T. A. (2001). A comparison of horse-race, bingo, and video poker gamblers in Brazilian
gambling settings. Journal of gambling studies, 17(2), 137-149. (l) 22,5% : Tremayne, K.,
Masterman-Smith,H., & McMillen, J. (2001). Survey of the nature and extent of gambling and
problem gambling in the ACT (Australian Capital Territory). Sydney, Australia : Australian Institute
for Gambling Research. (m) 12,7% : Hing, N., & Breen, H. (2002). A profile of gaming machine
players in clubs in Sydney, Australia. Journal of gambling behavior, 18(2), 185-205. (n) 35,8% :
Rodda, S., Brown, S. L., & Phillips, J. G. (2004). The relationship between anxiety, smoking, and
gambling in electronic gaming machine players. Journal of gambling studies, 20(1), 71-81. (o)
37,2% : Omnifacts Bristol research. (2005, september 21st). Nova Scotia player card research
project : stage 1 research report, final. Halifax, NS: Nova Scotia gaming corporation. (p) 46,5% :
Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format,
arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on gambling.
International gambling studies, 5(2), 139-154.
155
Voir à la page 3-51 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
156
Voir aux pages 3-51 et 3-58 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’
study. Halifax, Nova Scotia: Department of health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 86
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 87
deux pressions du bouton Jouer . La contribution des joueurs pathologiques serait alors
encore plus élevée.
En Australie, d’autres chercheurs ont constaté que la mise moyenne des joueurs
pathologiques a été 2,06 fois celle des joueurs récréatifs157. Dans un tel cas, la
proportion des revenus des AÉJ tirés de 35% de joueurs pathologiques serait de 53%.
En contrepartie, les deux groupes de joueurs ont joué à une vitesse égale de 7,5
secondes entres les pressions du bouton Jouer .
Comme tenu de ces estimations, il est raisonnable d’envisager qu’environ la moitié des
revenus des ALV provient des joueurs pathologiques. En Alberta, où les ALV sont très
similaires à ceux du Québec, cette estimation a été évaluée par deux fois à 67% et 63%
des revenus158. Par surcroît, dans la mesure où l’on considère que les joueurs
excessifs159 composent nécessairement plus que 35% de la clientèle présente à jouer
sur les ALV, il y a lieu de considérer que beaucoup plus que la moitié des revenus
proviennent de personnes qui éprouvent de sérieuses difficultés de contrôle à l’égard
des ALV.
3.2.4.4 La dépense au jeu mensuelle sur les ALV
Au niveau individuel, la contribution des joueurs pathologiques au revenu des ALV pèse
lourd sur les finances personnelles, et certainement sur le budget familial. Au Canada,
l’étude160 la plus précise indique que, parmi les joueurs réguliers161 sur ALV, les joueurs
peu fréquents y dépensent en moyenne $ 54 par mois. Les joueurs fréquents, sans
problème de jeu, y consacrent $ 229. Les joueurs qui éprouvent des problèmes sur ALV
y perdent $ 809 par mois. Ces données sont corroborées par trois autres études
canadiennes qui rapportent toutefois des dépenses médianes.
157
Voir à la page 58 dans : Blaszczynski, A., Sharpe, L., & Walker, M. (2001, November). The
assessment of the impact of the reconfiguration on electronic gaming machines as harm
minimisation strategies for problem gambling. Final report. A report for the gaming industry
operators group. Sidney, Australia: The University of Sydney gambling research unit.
158
(a) Alberta, 1997 = 67% : Azmier, J., & Smith, G. (1998). The state of gambling in Canada: an
interprovincial roadmap of gambling and its impact. Calgary, AB: Canada west foundation. (b)
Alberta, 2002 = 63,2% : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem
gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute.
159
Les joueurs excessifs (en anglais, problem gamblers), sont constitués des joueurs
pathologiques ainsi que des joueurs à risque. Compte tenu que les outils de dépistage ou de
diagnostique se fondent sur le constat de dommages, les dommages, consécutifs d’une
dépendance pathologique à l’égard du jeu, surviennent avant qu’un diagnostic de jeu
pathologique puisse être formellement établi.
160
Voir à la page D-23 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
161
Ceux qui jouent au moins une fois par mois.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 87
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 88
Tableau 17
Dépense mensuelle médiane au jeu selon la catégorie de joueurs telle qu’évaluée par
l’Indice canadien de jeu excessif
Juridiction
Saskatchewan en 2001162
Alberta en 2001163
Île-du-Prince-Édouard, 2005164
Sans
problème
$ 10
$ 10
$ 20
Catégories de l’ICJE
Faible risque
Risque
Avec
modéré
problème
$ 20
$ 40
$ 200
$ 20
$ 100
$ 700
$ 100
$ 900
Sans équivoque, les joueurs pathologiques misent davantage que les autres catégories
de joueurs. Dans la mesure où ceux-ci représentent 35% de la clientèle observable à
n’importe quel moment, et qu’ils jouent plus rapidement avec des mises plus onéreuses,
il est raisonnable de considérer que la contribution réelle des joueurs pathologiques aux
revenus tirés des ALV va nettement au-delà de 35%, plausiblement aussi au-delà des
46% précédemment rapportés. En ce sens, une estimation de 60%, encore à être
démontrée exactement, n’est pas aberrante.
3.2.4.5 La capacité des ALV de créer une dépendance pathologique chez les
joueurs novices ou jusque-là sains
Entre 1996 et 1999165, dans le cadre des recherches sur le traitement cognitif du jeu
pathologique, 336 joueurs pathologiques exclusifs166 ont eu la possibilité de réclamer
une aide clinique au CQEPTJ de l’Université Laval167. Parmi ceux-ci, 333 ont été en
mesure de faire l’historique de leurs pratiques et problèmes de jeu. Cent quarante-huit
(44%) ont commencé à éprouver des problèmes de jeu avant 1994, et 136 (41%) n’ont
commencé à avoir des problèmes qu’après 1994, soit après l’implantation des ALV de
Loto-Québec168.
162
Voir à la page 53 dans : Wynne, H. J. (2002 january). Gambling and problem gambling in
Saskatchewan. Ottawa, Ontario: Canadian centre on substance abuse.
163
Voir à la page 43 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002 February). Using the Canadian
problem gambling index (C.P.G.I.). Alberta gaming research institute.
164
Voir à la page 54 dans : Doiron, J. (2006, February). Gambling and problem gambling in
Prince Edward Island. Charlottetown, PEI: Prince Edward Island Department of Health.
165
C’est-à-dire entre 2 et 5 ans après l’implantation du parc d’ALV de Loto-Québec en juin 1994.
166
Sans autre pathologie.
167
Ces données non publiées du CQEPTJ ont été rapportées (voir à la page 286) dans l’annexe
H (Profil des joueurs pathologiques sur ALV ayant demandé une aide clinique) du document :
Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise
déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
168
Pour 49 joueurs, il n’a pas été possible de déterminer si leur problème de jeu s’était développé
avant ou après l’implantation des ALV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 88
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 89
Parmi ceux dont les problèmes sont plus anciens, 64% n’éprouvaient des problèmes
qu’avec les ALV; tandis que c’était le cas de 84% des joueurs dont les problèmes sont
plus récents169. Deux interprétations sont possibles : (a) en comparaison des APV, les
ALV captent davantage l’attention des joueurs pathologiques; ou bien, (b) les ALV ont
créé des joueurs pathologiques que les APV n’auraient pas pu créer. Incidemment,
parmi les 333 joueurs étudiés, 114 n’ont joué à aucune autre activité de jeu que les AÉJ,
et n’avaient jamais développé de problèmes de jeu avant d’être mis en contact avec les
ALV de Loto-Québec. Il ne s’agit pas de jeunes joueurs puisque l’âge moyen de
l’initiation aux ALV de ce groupe est d’environ 37 ans170. Pour la plupart, il s’agissait de
personnes qui ne s’étaient pas intéressées au jeu, pendant plusieurs années de leur vie
adulte, avant d’être mis en contact avec les ALV.
Une autre indication probante de la capacité des ALV à créer de nouveaux joueurs
pathologiques est l’absence de cannibalisation des revenus entres les diverses activités
de Loto-Québec171. Les ALV ne semblent nullement avoir affecté négativement les
revenus des loteries ou des casinos. Il est certain que les ALV n’ont pas nui au pari
mutuel dans la proportion des revenus qu’ils ont générés. Ainsi, les ALV ont causé une
nouvelle dépense au jeu, et cette dépense est considérable. L’ampleur de cette dépense
additionnelle est telle qu’elle peut difficilement être expliquée autrement que par la
création de nouveaux joueurs pathologiques spécifiquement dépendants des ALV.
Dès lors, il existe un lien observable entre la pratique de jeu sur ALV et les problèmes
de jeu. D’une part, l’expérience de jeu vécue sur les ALV a le potentiel de créer une
dépendance pathologique chez des joueurs novices ou ceux jusque-là sains. D’autre
part, les AÉJ sont très attrayants pour les joueurs qui ont déjà développé une
dépendance envers d’autres activités de jeu. Dans ce cas, ils captent une dépense au
jeu déjà dommageable, et ils en accentuent l’intensité en raison, notamment, d’une
fréquence accélérée des mises et des tirages.
3.2.4.6 La capacité des joueurs à estimer leur dépense au jeu
Dans les études de prévalence précédemment analysées, la dépense au jeu est
souvent estimée par les joueurs eux-mêmes. Il est alors intéressant de comparer la
dépense rapportée par la population aux revenus réellement obtenus du jeu par les
établissements de jeu. Au Québec, une étude de prévalence, réalisée en 2002, a
interrogé les Québécois quant à leur dépense dans 20 activités de jeu. Pour neuf d’entre
elles, il est possible de vérifier la justesse de ces auto-évaluations (voir Figure 55). Ainsi,
les Québécois font une évaluation remarquablement juste de leur dépense dans les
loteries, sauf les loteries instantanées. La dépense au bingo est nettement surestimée,
vraisemblablement parce que les joueurs rapportent surtout l’argent qu’ils ont dépensé
pour acheter les cartes sans tenir compte des gains obtenus. En contrepartie, les
169
Cette différence est statistiquement significative.
170
Voir aux pages 292 à 294 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des
appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour
supérieure du Québec.
171
Voir à l’annexe 1 : La dépense au jeu de la population québécoise.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 89
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 90
personnes interrogées n’ont rapporté une dépense sur ALV ou aux MAS qui n’est que le
tiers de la dépense réelle. La dépense estimée aux courses de chevaux n’est que la
moitié de la réalité.
Figure 55
Justesse de l'auto-évaluation de la dépense au jeu
AÉJ (ALV + MAS)
34%
Course de chevaux
48%
Bingo
245%
ALV
35%
Casino - machines à sous
35%
Casino - jeux de table
Casino - total
Loterie sportive
140%
76%
306%
Loterie instantanée
74%
Loterie quotidienne
117%
Loterie ordinaire
118%
Loterie - total
104%
Jeux étatisés
73%
0%
20%
40%
60%
80%
100%
120%
140%
Portion de la dépense réelle qui a été rapportée lors de l'étude de prévalence de 2002
(Une valeur inférieure à 100% indique que les personnes sous-évaluent leur dépense)
Le fait de sous-estimer ainsi la dépense réelle contribue à la dangerosité de ces
activités. De plus, il y a lieu de considérer que l’estimation des proportions de revenus
provenant des joueurs pathologiques a été réalisée avec des auto-évaluations de la
dépense au jeu. S’il en est ainsi, et si ce sont les joueurs pathologiques qui font les pires
estimations172, la contribution des joueurs pathologiques aux revenus des ALV pourrait
être nettement au-delà des 46% ici mesurés.
3.2.5 La nature des demandes d’aide
Aux États-Unis, jusqu’au début des années 90 lorsque les ALV hors casinos ont
commencé à être disponibles, les courses de chevaux ou de chiens173 ont été l’activité
172
Incidemment, en Nouvelle-Écosse, Schellinck et Schrans ont constaté que 53% des joueurs
avec problèmes de jeu perdaient la notion du temps écoulé au moins 25% des fois qu’ils ont joué
sur ALV. Cela n’arrive qu’à 13% des joueurs fréquents sans problème de jeu et à 5% des joueurs
peu fréquents. (a) Voir à la page 3-61 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery
players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health.
173
Voir à la page 646 dans : Petry, N. M. (2003). A comparison of treatment-seeking pathological
gamblers based on preferred gambling activity. Addiction, 98, 645-655.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 90
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 91
de jeu la plus étroitement associée au jeu pathologique. Au Québec, bien que la
situation n’a pas été investiguée scientifiquement avant 1993, les courses de chevaux
étaient l’activité de jeu causant le plus de problèmes. La situation a beaucoup changé
depuis.
En Australie du Sud, Paul Delfabbro174 a constaté que 25% de la variance dans les
inscriptions à un service d’aide pour les joueurs excessifs, entre 1996 et 2002, est
simplement expliquée par le nombre d’AÉJ disponibles dans le bassin de population de
ces services d’aide.
En milieu clinique, les données, recueillies au CQEPTJ175 entre 1996 et 1999, révèlent
que 93% des joueurs pathologique, qui ont requis une aide clinique, éprouvent des
difficultés de contrôle sur les ALV. Il en est de même de 94% des joueurs inscrits à la
Maison Claude-Bilodeau176. Parmi les joueurs pathologiques qui ont demandé une aide
clinique au MSSS depuis 2001, 71% des personnes jouaient sur les ALV plus d’une fois
par semaine177.
Un constat longitudinal illustre à quel point les ALV ont rapidement créé ou capté l’intérêt
des joueurs pathologiques. Depuis l’ouverture du casino de Montréal en 1993, le Centre
de référence du Grand-Montréal, un OBNL, traite tous les appels de la ligne
téléphonique Jeu : aide et référence, (527-0140 / 1-800-461-0140) ainsi que tous les
appels de la ligne 1-866-SOS-JEUX de la fondation Mise sur toi. Environ 90% des
appels sont logés par des personnes directement préoccupées par des comportements
de jeu, plus du trois-quarts des appels sont faits par les joueurs eux-mêmes. (voir Figure
56). Environ 90% des appels révèlent des préoccupations concernant les AÉJ. Plus de
80% des appels concernent les ALV plus spécifiquement (voir Figure 57).
La prédominance actuelle des appels par les ALV ne signifie pas que d’autres modalités
de jeu ne sont pas dangereuses. Elle signifie surtout que, dans les conditions actuelles,
les ALV exercent un attrait plus puissant auprès des joueurs qui éprouvent des
problèmes de jeu, et que les dommages subis sont plus rapides. La juxtaposition d’une
importante concentration d’ALV aux hippodromes pourrait changer cette situation.
174
Voir à la page 127 dans : Delfabbro, P. (2002, November). Appendix E : The distribution of
electronic gaming machines (EGMs) and gambling-related harm in Metropolitan Adelaide. Dans
Independent gambling authority. (2003). Inquiry into management of gaming machine numbers.
Adelaide, South Australia: author.
175
Voir à la page 285 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de
loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du
Québec.
176
Communication de Robert Ladouceur rapportée à la page 10 dans : Régie des alcools, des
courses et des jeux. (2000). Les appareils de loterie vidéo et le jeu pathologique. Québec, Qc:
Régie des alcools, des courses et des jeux, Gouvernement du Québec.
177
Voir à la page 36 dans : Audet, C., St-Laurent, D., Chevalier, S., Allard, D., Hamel, D., &
Crépin, M. (2003). Évaluation du programme expérimental sur le jeu pathologique. Rapport 7.
Monitorage évaluatif – indicateurs d’implantation – données rétrospectives. Montréal, QC : Institut
national de santé publique du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 91
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 92
Figure 56
Personnes préoccupées par leurs
comportements de jeu
Figure 57
Activité de jeu associée aux
préoccupations
Joueurs
Proches
ALV
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
99-2000
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
99-2000
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
1993-94
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
MAS
3.2.6 Les désastres causés par des joueurs laissés sans aide
Durant les années 1990, l’entrée des joueurs excessifs dans les services d’aide se
faisait typiquement par l’intermédiaire d’un autre problème de santé. Par manque de
fonds personnels, d’accessibilité, de disponibilité ou par ignorance de l’existence des
services spécialisés, une majorité de joueurs a été laissée sans soin178. Leur condition
clinique s’est fréquemment détériorée jusqu’à l’alcoolisme, la toxicomanie, la
dépression, ou la criminalité. En conséquence, des proportions anormalement élevées
de joueurs pathologiques ont été constatées dans les cliniques ou groupes d’entraide
pour alcooliques ou toxicomanes179 ainsi que dans les services correctionnels en milieu
carcéral180. Il en a été de même pour les refuges destinés aux sans-abris181.
178
Au Québec, en 1989, seulement 11,4% des joueurs excessifs en crise avaient reçu une aide
professionnelle. En 1996, cette proportion était de 6,2%. (a) Voir à la page 382 dans : Ladouceur,
R. (1993). Prevalence estimates of pathological gamblers in Québec, Canada. Dans W. R.
Eadington, & J. A., Cornelius (éditeurs), Gambling behavior and problem gambling (pp. 379-384),
Reno, NV: Institute for the study of gambling and commercial gaming. University of Nevada. (b)
Donnée communiquée par Jean Leblond à partir de la banque de données de la version
actualisée de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique réalisée au Québec en 1996.
179
(a) Ciarrocchi, J. W. (1993). Rates of pathological gambling in publicly funded outpatient
substance abuse treatment. Journal of gambling behavior, 9(3), 289-293. (b) Spunt, B., Lesieur,
H., Liberty, H. J., & Hunt, D. (1996). Pathological gamblers in methadone treatment: a
comparison between men and women. Journal of gambling behavior, 12(4), 431-449. (c)
Zimmerman, M., Chelminski, I., & Young, D. (2006). Prevalence and diagnostic correlates of
DSM-IV pathological gambling in psychiatric outpatients. Journal of gambling studies, 22(2), 255262.
180
(a) Templer, D.I., Keisser, G., & Scicode, K. (1993). Correlates of pathological gambling
propensity in prison inmates. Comprehensive Psychiatry, 34, 347–351. (b) Meyer, G., & Fabian,
T. (1996). Pathological gambling and criminal culpability: an analysis of forensic evaluations
presented to German penal courts. Journal of gambling studies, 12(1), 33-47. (c) Walters, G. D.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 92
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 93
Partout dans le monde, des cliniques, spécialisées dans la solution des problèmes de
jeu, ont rapidement alerté les autorités, et la communauté scientifique, d’une affluence
subite, et hors de proportion, de personnes éprouvant de sérieux problèmes avec les
AÉJ182. Par rapport aux activités de jeu plus traditionnelles, les dommages s’y
concrétisaient plus rapidement183 avec une intensité démesurée. À cette époque, et
(1997). Problem gambling in a federal prison population: results from the South Oaks gambling
screen. Journal of gambling studies, 13(1), 7-24. (d) Walters, G. D., & Contri, D. (1998). Outcome
expectancies for gambling: empirical modeling of a memory network in federal prison inmates.
Journal of gambling studies, 14(2), 173-191. (e) Meyer, G., & Stadler, M. A. (1999). Criminal
behavior associated with pathological gambling. Journal of gambling studies, 15(1), 29-43.
181
Bon nombre de joueurs ayant perdu le contrôle sur leur dépense de jeu ont conduit leur
famille ou leurs entreprises à la ruine. Ces personnes se sont ajoutées à la clientèle traditionnelle
des organismes qui se consacrent à lutter contre la pauvreté. Voir (a) Lepage, C., Ladouceur, R.,
& Jacques, C. (2000). Prevalence of problem gambling among community service users.
Community Mental Health Journal, 36, 587-601.
182
(a) Allemagne, 1992 : Bühringer, G., & Konstanty, R. (1992). Intensive gamblers on germanstyle slot-machines. Journal of gambling studies, 8(1), 21-38. (b) Autriche, 1992 : Horodecki, I.
(1992). The treatment model of the guidance center for gamblers and their relatives in
Vienna/Austria. Journal of gambling studies, 8(2), 115-129. (c) Espagne, 1992: Legarda, J. J.,
Babio, R. & Abreu, J. M. (1992). Prevalence estimates of pathological gambling in Seville (Spain).
British journal of addiction, 87, 767-770. (d) Montana, 1992 et 1998 : Montana Gambling Study
Commission (1998). The 1998 Montana gambling study : Montana’s problem gamblers. Montana
Legislative Services Division. A report to the governor and the 56th legislature. Helena, MT:
Auteurs. (e) Pays-Bas, 1993 : Kingsma (1993) rapporté dans Griffiths & Wood (1999). (f)
Espagne, 1993 : Becoña, E. (1993). The prevalence of pathological gambling in Galicia (Spain).
Journal of gambling studies, 9(4), 353-369. (g) Belgique, Allemagne, Pays-Bas et Espagne,
1994: Griffiths, M. D., & Wood, R. T. A. (1999). Lottery gambling and addiction: an overview of
European research. European Lotteries. (h) Finlande, 1994: Murto & Niemela (1996) rapporté
dans Griffiths & Wood (1999). (i) South Dakota, 1996: Carr, R. D., Buchkoski, J. E., Kofoed, L., &
Morgan, T. J. (1996). “Video lottery” and treatment for pathological gambling. The South Dakota
Journal of Medicine, 49, 30-32. + Morgan, T., Kofoed, L., Buchkoski, J., & Carr, R. D. (1996).
Video lottery gambling : effects on pathological gamblers seeking treatment in South Dakota.
Journal of Gambling Studies, 12(4), 451-460. (j) Oregon, 1997 : Volberg, R. A. (1997b). Gambling
and problem gambling in Oregon : report to the Oregon gambling addiction treatment foundation.
Northampton, MA: Gemini research. (k) Alberta, 1998-1999, voir à la page A3-6 dans : Alberta
Gaming and Liquor Commission. (2001). Achieving a balance : gaming licensing policy review,
volume two. St-Albert, Alberta : Alberta Gaming and Liquor Commission. (l) Manitoba, 1999:
Beaudouin, C. M., Cox, B. J. (1999). Characteristics of problem gambling in a Canadian context:
a preliminary study using a DSM-IV-based questionnaire. Canadian journal of psychiatry, 44(5),
483-487. (m) Australie, 1999: Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries,
Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (n) Norvège, 2000: Fekjaer, H. O. (2000). Gambling
and gambling problems in Norway. Paper presented at the 4th conference of the European
Association for the study of gambling. Warsaw, Poland. September 23, 2000.
183
(a) Breen, R. B., & Zimmerman, M. (2002). Rapid onset of pathological gambling in machine
gamblers. Journal of Gambling Studies, 18(1), 31-43. (b) Breen, R. B. (2004). Rapid Onset of
Pathological Gambling in Machine Gamblers: A Replication, International journal of mental health
and addiction, 12(april), 44-49. (c) Voir à la page 293 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la
dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 93
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 94
parfois encore aujourd’hui, les services cliniques n’étaient pas préparés à l’arrivée d’une
clientèle ayant des besoins différents découlant d’une nouvelle technologie de jeu. Sans
équivoque, l’attrait des AÉJ auprès des joueurs déjà pathologiques, et le potentiel des
appareils à générer de nouveaux joueurs pathologiques, a dépassé les capacités
d’orientation et d’accueil des services cliniques ou communautaires.
3.3 L’urgence pour des changements majeurs dans la manière d’exploiter les AÉJ
Les dommages subis par les joueurs appartiennent à deux catégories. L’argent perdue
au jeu est une première catégorie de dommages. L’argent que le joueur ne peut pas
perdre est une seconde catégorie particulièrement génératrice de comorbidité. À cet
égard, l’analyse des données financières concernant les MAS et les ALV suggère une
intensité de dommages considérables dans la population québécoise. Dès lors, il est
impératif de mieux délimiter les problèmes de jeu en faisant appel à des critères
financiers, car le facteur central des méfaits demeure l’argent perdu au jeu.
3.3.1 Les critères du jeu sécuritaire
Une étude pancanadienne récente vient de spécifier trois critères délimitant le jeu
sécuritaire184. Les critères du jeu sécuritaire définissent concrètement les limites dans
lesquelles les joueurs peuvent s’amuser sans craindre le risque de dommages
importants. Dès que la personne outrepasse un seul de ces critères, elle doit être
consciente qu’elle s’engage dans une zone à risque d’autant plus que l’écart est grand.
Lorsque les écarts vont en s’accroissant continuellement, il y a lieu de considérer qu’il y
a perte de contrôle sur la dépense au jeu. Dans ce contexte, la dépense au jeu est un
indicateur valable des problèmes de jeu vécus par la population. Ces critères sont :
•
Ne pas jouer plus de 2 ou 3 fois par mois.
•
Ne pas dépenser annuellement au jeu plus de 250 à 500 dollars (ou 500 à
1000 dollars si on inclut les billets de loterie).
•
Ne pas dépenser au jeu plus de 1% du revenu familial brut.
3.3.2 La dépense au jeu par unité et par site
Les AÉJ de Loto-Québec génèrent des revenus considérables par rapport aux appareils
qu’ils ont remplacés. En 1949, les vieux gobe-sous ne produisaient qu’un revenu annuel
brut de $ 10 908 par unité, en dollars actualisés de 2006 (voir Tableau 18). Quarantedeux ans plus tard en 1991, les APV du marché gris ont suscité une dépense au jeu
trois fois plus grande, atteignant $ 32 050. Toutefois, à peine trois ans plus tard, après
leur première année complète d’opération, les MAS du casino de Montréal ont
immédiatement suscité une dépense au jeu cinq fois plus grande que celle des APV. En
2002-2003, la multiplication subséquente du nombre de MAS a toutefois réduit cette
184
Currie, S. R., Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of
harm among gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling
activities. Addiction, 101, 570-580.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 94
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 95
dépense par unité à $ 105 640. Par la suite, les données financières des MAS n’ont plus
été publiées.
À leur première année complète d’opération, les ALV ont connu un début plus modeste
avec une dépense au jeu par unité de $ 26 751. En contrepartie, la progression de la
dépense au jeu par unité est continuelle depuis leur implantation. En 2005-2006, chaque
ALV a suscité une dépense au jeu moyenne de $ 98 874. Pourtant, le volume de la
clientèle annuelle ne progresse pas185. Plus les années passent, plus les joueurs
perdent individuellement plus d’argent sur les ALV. À noter que, d’une année à l’autre,
ce ne sont pas nécessairement les mêmes personnes qui perdent au jeu186.
Le nombre d’ALV a culminé en 1998-1999. Entre 1998-1999 et 2002-2003, le parc
d’ALV a continuellement rétréci. Le nombre d’ALV a diminué de 7%, et le nombre de
sites de 12%. Pourtant, le revenu brut global des ALV a augmenté de 29%.
L’année 2002-2003 a marqué le début du remplacement des ALV par les nouveaux
modèles187 dotés des mesures s’inscrivant dans une stratégie commerciale centrée sur
la notion de jeu responsable. La réponse des joueurs n’a pas été immédiate car la
dépense par unité est restée sensiblement la même en 2003-2004. Par contre, en 20052006188 par rapport à 2002-2003, le nombre d’ALV avait diminué d’un autre 6% et le
nombre de sites d’un 15% de plus. Malgré cette réduction, le revenu brut a continué à
augmenter de 17%.
185
La clientèle des ALV était composée de 8,5% de la population adulte du Québec en 1997, de
10,7% en 1999, de 7,8% en 2002 et de 9,6% en 2004. (a) Voir à la page 53 dans : Loto-Québec.
(2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Voir le tableau A.12 à la page 53
dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004).
Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et
Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (c) Voir à la page
26 dans : Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal,
QC : auteur.
186
En Nouvelle-Écosse, où les ALV sont à peu près similaires à ceux du Québec, il a été estimé
que le volume de la clientèle régulière sur ALV se maintient constante d’une année à l’autre avec
environ 25% de nouveaux joueurs et environ 25% de joueurs qui quittent le jeu, notamment en
raison de l’épuisement de leur capacité financière ou de problèmes de jeu. En ce sens, la stabilité
du volume de la clientèle annuelle n’indique pas que ce sont toujours les mêmes joueurs qui
éprouvent des problèmes, et que l’incidence de nouveaux joueurs pathologiques est rare. Voir
aux pages V et 2-5 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study.
Halifax, Nova Scotia: Department of health.
187
Voir à la page 16 dans : Loto-Québec. (2004). Rapport annuel 2003-2004 : un équilibre à
maintenir. Montréal, QC : auteurs.
188
En comparaison de l’année 2002-2003.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 95
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 96
Tableau 18
Revenu brut annuel par appareil
Appareil
Année
N. appareils
Revenu annuel
Revenu actualisé en 2006
$1 200
$ 10 908
Gobe-sous (GS)189
1949
Poker vidéo (APV)190
1991
25 000
$ 24 000
$ 32 050
Machine à sous (MAS)191
1994-1995
1 835
$ 118 069
$ 151 530
Machine à sous (MAS)
192
1997-1998
3 158
$ 91 472
$ 112 049
Machine à sous (MAS)
193
2002-2003
5 730
$ 96 499
$ 105 640
1995-1996
14 644
$ 21 209
$ 26 751
Loterie vidéo (ALV)
194
Loterie vidéo (ALV)
195
1998-1999
15 314
$ 38 349
$ 46 501
Loterie vidéo (ALV)
196
2002-2003
14 301
$ 75 305
$ 82 439
Loterie vidéo (ALV)197
2003-2004
14 293
$ 78 979
$ 84 771
198
2005-2006
13 516
$ 96 094
$ 98 874
Loterie vidéo (ALV)
189
Voir à la page 40 dans : Plante, P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC:
Éditions de l'Action nationale.
190
Voir à la page 8 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au
Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteur.
191
Revenu par unité des MAS au casino de Montréal. Voir aux pages 10 et 11 dans : LotoQuébec. (1995). Rapport annuel 1994-1995. Montréal, QC : auteur.
192
Revenu par unité des MAS au casino de Montréal. Voir à la page 15 dans : Loto-Québec.
(1998). Rapport annuel 1997-1998. Montréal, QC : auteur.
193
Revenu par unité des MAS des trois casinos. Voir KPMG. (2004). Canadian gaming industry
highlights : updated – 2003 results.
http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf
194
Voir à la page 14 dans : Loto-Québec. (1996). Rapport annuel 1995-1996. Montréal, QC :
auteurs.
195
Il s’agit de l’année où le nombre d’ALV a culminé. Voir à la page 24 dans : Loto-Québec.
(1999). Rapport annuel 1998-1999. Montréal, QC : auteurs.
196
Voir à la page 16 dans : Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une
réussite. Montréal, QC : auteurs.
197
Voir aux pages 16 et 57 dans : Loto-Québec. (2004). Rapport annuel 2003-2004 : un équilibre
à maintenir. Montréal, QC : auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 96
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 97
La moyenne de la dépense au jeu dans chaque site a aussi augmenté continuellement
(voir Tableau 19). La transition entre les années 2002-2003 et 2003-2004 est
intéressante puisque le nombre d’ALV et la dépense par unité sont restés les mêmes,
alors que la dépense par site a considérablement augmenté. Les joueurs ont
simplement suivis les ALV là où ils ont été déplacés.
Tableau 19
Revenu brut annuel par site
Appareil
Année
N. de sites
Revenu annuel
Revenu actualisé en 2006
Loterie vidéo (ALV)
1995-1996
4 242
$ 73 215
$ 92 346
Loterie vidéo (ALV)
1998-1999
4 175
$ 183 945
$ 223 045
Loterie vidéo (ALV)
2002-2003
3 663
$ 294 006
$ 321 857
Loterie vidéo (ALV)
2003-2004
3 362
$ 335 767
$ 360 391
Loterie vidéo (ALV)
2005-2006
3 122
$ 416 017
$ 428 051
3.3.3 La dépense au jeu par joueur
Il est possible d’estimer en quelques occasions la dépense moyenne par joueur annuel
(voir Tableau 20). En 2002, la dépense sur les MAS dépassait le second critère du jeu
sécuritaire. À noter ici qu’il s’agit d’une estimation représentant la moyenne des joueurs.
En ce sens, plus de la moitié des joueurs sur ALV dépasseraient ce critère.
En 1997, à peine trois ans après l’avènement des ALV, la dépense moyenne par joueur
annuel était de trois supérieure au second critère du jeu sécuritaire. C’est énorme
surtout si on considère que cette dépense est plus élevée pour les seuls joueurs
mensuels, et encore plus élevée pour les joueurs hebdomadaires. Sans que le volume
de la clientèle ne soit plus grand, la dépense par joueur annuel a continuellement
progressé jusqu’en 2002, et cette dépense est encore beaucoup plus élevée en 2004.
D’une année à l’autre, les joueurs, individuellement, perdent plus d’argent sur les ALV. À
la lumière des données financières, l’ampleur des dommages que subissent les joueurs
sur ALV n’est certainement pas stabilisée au Québec.
198
Voir aux pages 29 et 78 dans : Loto-Québec. (2006). Rapport annuel 2005-2006 : divertir au
profir de la collectivité. Montréal, QC : auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 97
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 98
Tableau 20
Revenu brut annuel par joueur
Année
Joueurs
annuels
Revenu brut
total
Dépense /
joueurs
Dépense actualisée
en 2006
Machines à sous
199
(MAS)
2002
16,3%
$ 552 938 000
$ 577
$ 632
Loterie vidéo (ALV)200
1997
8,5%
$585 431 000
$ 1 228
$ 1 504
Loterie vidéo (ALV)201
1999
10,7%
$928 412 000
$ 1 521
$ 1 797
202
2002
7,8%
$1 076 943 000
$ 2 349
$ 2 571
Loterie vidéo (ALV)203
2004
9,6%
$1 236 884 000
$ 2 146
$ 2 256
Appareil
Loterie vidéo (ALV)
199
(a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir le tableau A.10 à la page 51 dans :
Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004).
Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et
Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (b) Les MAS ont
généré un revenu brut de $ 552 938 000 en 2002-2003. Voir KPMG. (2004). Canadian gaming
industry highlights : updated – 2003 results. (c) Selon le tableau 051-00011,2,6 de CANSIM
(Statistique Canada), il y avait 5 878 550 personnes adultes au Québec en 2002. (d) Ainsi, les
958 204 joueurs ont dépensé en moyenne $ 577,06.
200
(a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir à la page 53 dans : Loto-Québec. (2000).
Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Pour le revenu brut des ALV, voir à la
page 45 dans : Loto-Québec. (2000). Rapport annuel 1997-1998. Montréal, QC : auteur. (c)
Selon le tableau 050-00011,2,6 de CANSIM, il y avait 5 609 967 personnes adultes au Québec
en 1997.
201
(a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir à la page 53 dans : Loto-Québec. (2000).
Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Pour le revenu brut des ALV, voir à la
page 51 dans le même rapport annuel. (c) Selon le tableau 050-00011,2,6 de CANSIM, il y avait
5 706 445 personnes adultes au Québec en 1999.
202
(a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir le tableau A.12 à la page 53 dans :
Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004).
Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et
Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (b) Pour le
revenu brut des ALV, voir à la page 53 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 :
une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteur. (c) Selon le tableau 051-00011,2,6 de CANSIM
(Statistique Canada), il y avait 5 878 550 personnes adultes au Québec en 2002.
203
(a) Pour le pourcentage des joueurs annuels, voir à la page 26 dans : Loto-Québec. (2005).
Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal, QC : auteur. (b) Pour le revenu
brut des ALV, voir à la page 65 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2004-2005 : une
gestion responsable. Montréal, QC : auteur. (c) Selon le tableau 051-00011,2,6 de CANSIM
(Statistique Canada), il y avait 6 002 655 personnes adultes au Québec en 2004.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 98
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 99
3.3.4 Les dommages ne dépendent pas prioritairement du nombre de sites ou du
nombre d’ALV
Comme le signale Paul Delfabbro204, une limitation du nombre maximal d’AÉJ est
efficace à contrôler l’accessibilité bien qu’elle n’empêche pas la croissance annuelle du
revenu par site. Dans le cas du Québec, malgré que le nombre de sites a chuté de 40%
depuis 1996-1997, le revenu brut moyen des ALV par site a augmenté de 290% (voir
Figure 58).
Figure 58
Revenu brut moyen par site en fonction du nombre de sites
$450 000
2005-2006
Revenu brut par site
$400 000
2004-2005
$350 000
2003-2004
$300 000
2002-2003
2001-2002
2000-2001
1999-2000
$250 000
$200 000
1998-1999
$150 000
1997-1998
1996-1997
$100 000
1995-1996
$50 000
$0
2500
1994-1995
3000
3500
4000
4500
5000
Nombre de sites au Québec
Dans le cas des ALV, peu importe si le nombre augmente ou diminue, le revenu brut
moyen par ALV augmente continuellement. Malgré une chute du nombre d’ALV de 13%
depuis 1998-1999, le revenu brut moyen par appareil a augmenté de 92% (voir Figure
59).
204
Voir à la page 130 dans : Delfabbro, P. (2002, november). Appendix E : The distribution of
electronic gaming machines (EGMs) and gambling-related harm in Metropolitan Adelaide. Dans
Independent gambling authority. (2003). Inquiry into management of gaming machine numbers.
Adelaide, South Australia: author.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 99
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 100
Figure 59
Revenu brut moyen par ALV en fonction du nombre d'ALV
$100 000
2005-2006
Revenu brut par ALV
$90 000
2004-2005
$80 000
2002-2003
$70 000
2003-2004
2001-2002
2000-2001
1999-2000
$60 000
$50 000
1998-1999
$40 000
1997-1998
1996-1997
$30 000
1995-1996
$20 000
$10 000
1994-1995
$0
6000
8000
10000
12000
14000
16000
18000
Nombre d'ALV au Québec
Compte tenu que le volume de la clientèle annuelle des ALV de Loto-Québec n’a pas
augmenté depuis 1996205, que le revenu par joueur sur ALV dépasse les $ 2 000 depuis
au moins 2002-2003206, qu’une telle dépense est associée à un risque élevé de
développer des problèmes de jeu207, et que 46% des revenus des ALV proviennent
généralement des seuls joueurs pathologiques208, l’augmentation fulgurante des revenus
205
La clientèle des ALV était composée de 8,5% de la population adulte du Québec en 1997, de
10,7% en 1999, de 7,8% en 2002 et de 9,6% en 2004. (a) Voir à la page 53 dans : Loto-Québec.
(2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC : auteur. (b) Voir le tableau A.12 à la page 53
dans : Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004).
Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et
Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval. (c) Voir à la page
26 dans : Loto-Québec. (2005). Rapport annuel 2004-2005 : une gestion responsable. Montréal,
QC : auteur.
206
En 2002-2003, 7,8% de la population adulte du Québec (463 310 personnes) a dépensé sur
les ALV un montant global de 1,077 milliards de dollars. La dépense moyenne par joueur est
alors de $ 2 324. En 2004-2005, 9,6% de la population adulte du Québec (581 766 personnes) a
dépensé sur les ALV un montant global de 1,237 milliards de dollars. La dépense moyenne par
joueur est alors de $ 2 126.
207
Il s’agit de 4 fois la limite proposée par le second critère à la page 577 dans : Currie, S. R.,
Hodgins, D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among
gamblers in the general population as a function of level of participation in gambling activities.
Addiction, 101, 570-580.
208
Voir à la page 85, la section 3.2.4.3 : La proportion des revenus tirés des ALV provenant des
joueurs pathologiques.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 100
Chapitre 3 - La dangerosité des appareils électroniques de jeu - 101
des ALV par unité, en particulier dans le contexte d’une diminution du nombre d’ALV, n’a
guère d’autre explication raisonnable qu’une capture toujours croissante de l’argent des
joueurs pathologiques par les ALV. Il en découle nécessairement une aggravation
continuelle des dommages et des méfaits.
3.3.4.1 L’importance de limites établies en fonction du budget familial
En 2001, Statistique Canada209 a répertorié la proportion des ménages, dans chaque
province canadienne, qui a parié de l’argent sur les ALV ou dans les casinos210 au cours
de l’année. Par ailleurs, Statistique Canada211 a mesuré, en 2002, la prévalence du jeu
excessif dans les provinces canadiennes. Lorsque ces données sont mises en relation,
la corrélation de rang est de 0,9 (p = ,0004; voir Figure 60). Encore une fois, plus on
joue sur les AÉJ, plus les problèmes de jeu sont probables.
Figure 60
ICJE - Rrisque modéré ou plus
en 2002
Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la participation au jeu
3,5%
Manitoba
Saskatchewan
3,0%
ColombieBritannique
2,5%
2,0%
1,5%
Terre-Neuve-etLabrador
Île-du-Prince-
Alberta
Ontario
Nouvelle-Écosse
Québec
Édouard
1,0%
Nouveau-Brunswick
0,5%
0,0%
5%
10%
15%
20%
25%
30%
Pourcentage des ménages qui ont joué aux casinos, MAS ou ALV en 2001
209
Marshall, K. (2003, avril). Fiche : jeux de hasard, L’emploi et le revenu en perspective, 4(4),
Ottawa, ON : Statistique Canada, 75-001-XIF.
210
Malheureusement, il n’est pas possible de départager la participation aux MAS et aux tables
de jeu. Quoi qu’il en soit, plus des trois-quarts des revenus des casinos proviennent des MAS.
211
Statistique Canada. (2002). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes : santé
mentale et bien-être. Risque de problème de dépendance au jeu, selon le sexe, population à
domicile de 15 ans et plus, Canada et provinces, 2002. Ottawa, ON: auteurs.
http://www.statcan.ca/francais/freepub/82-617-XIF/htm/5110076_f.htm
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 101
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 102
Chapitre 4
La dangerosité croisée des activités de jeu
Au Canada, les courses de chevaux n’ont pas été longtemps interdites par la loi. Au
moment de l’adoption du Code criminel en 1892, elles ont été rendues illégales dans un
mouvement de prohibition générale du jeu. Dès 1910, un amendement les a autorisées.
Elle ont été interdites à nouveau au temps de la Première guerre mondiale, puis
définitivement autorisées212 en 1919. Jusqu’en 1980, les courses ont connu une
progression constante de leur revenu, puis un déclin rapide; au point que cette industrie
risque de disparaître.
Actuellement, au Québec et ailleurs en Amérique du Nord, malgré que des personnes
continuent d’y subir des dommages, les courses de chevaux ne figurent pas parmi les
plus importants problèmes de santé publique. Il n’en a pas toujours été ainsi213. Les
courses de chevaux, alors qu’elles étaient populaires, ont longtemps été identifiées à
des déchéances de joueurs qui ont conduit leur famille à vivre misérablement214.
La quasi éradication des problèmes de jeu, associés aux courses de chevaux, n’est pas
attribuée à des changements dans la structure de jeu. Celle-ci n’a pas beaucoup
changé. De plus, les systèmes de paris à distance se sont considérablement
développés. L’éradication est plutôt attribuable au fait que la clientèle a de plus en plus
déserté les hippodromes au profit d’une activité concurrente plus attrayante215 pour les
joueurs216.
Parce que rien n’a fondamentalement changé dans la dangerosité de cette activité,
l’idée d’une relance des courses de chevaux fait ressurgir les craintes d’une réapparition
des courses parmi les principaux problèmes de santé publique découlant du jeu. Dans
cette perspective, en 1999, la National gambling impact study commission (NGISC)
212
Campbell, C. S. (1994). Introduction. Dans C. S. Campbell (Éd.), Gambling in Canada : the
bottom line (pp. v-x). Burnaby, CB: Simon Fraser University.
213
Voir à la page 646 dans : Petry, N. M. (2003). A comparison of treatment-seeking pathological
gamblers based on preferred gambling activity. Addiction, 98, 645-655.
214
Des anecdotes, dont on ne peut pas estimer la représentativité, sont rapportées dans : Plante,
P. (1950). Montréal sous le règne de la pègre. Montréal, QC: Éditions de l'Action nationale.
215
Il ne s’agit pas d’une situation particulière au Québec. En 1978, l’avènement des casinos à
Atlantic City a initié un vaste mouvement de légalisation des casinos près des grands centres
urbains. Les courses se sont trouvées en concurrence directe avec une offre de jeu diversifiée et
populaire. Ce déclin des courses de chevaux a été observé en de nombreux pays où l’opération
de casinos a été autorisée.
216
(a) Loren C. Scott & Associates, Inc. (2003, June 15). The economic impact of a new
racetrack on horse racing in Louisiana. Baton Rouge, LA: auteur.
http://www.lorenscottassociates.com/Reports/PolicyRaceTrack.pdf
(b) Okada, S. S. (2007). New York racinos : casinos of convenience. San Francisco, CA : HVS
gaming services.
http://www.hotelnewsresource.com/pdf/hvs2091.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 102
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 103
avait recommandé217 de ne pas tenter d’utiliser des AÉJ afin de relancer une industrie
que le marché éliminait naturellement :
“3.12 The Commission recommends that states should refuse to allow the introduction of
casinostyle gambling into pari-mutuel facilities for the primary purpose of saving a parimutuel facility that the market has determined no longer serves the community or for the
purpose of competing with other forms of gambling.” (National gambling impact study
commission, 1999, page 3-18)
Actuellement, les ALV sont l’activité qui capte le plus l’attention des joueurs excessifs.
Les salons de jeux vont ramener cette clientèle dans les hippodromes où ils auront
davantage d’occasions de subir des dommages.
4.1 Le déclin des courses de chevaux au Québec
Le déclin des courses est uniformément constaté dans (1) les données financières, (2)
les taux de participation révélés par les études de prévalence du jeu, ainsi que dans (3)
l’assistance rapportée annuellement.
4.1.1 Les données financières
Bénéficiant d’un monopole sur les paris jusqu’à l’avènement des loteries en 1970, les
courses de chevaux ont connu une croissance régulière de leur revenu jusqu’en 1980
(voir Figure 61). Le premier déclin est survenu lorsque les APV illégaux ont commencé à
être largement implantés218. Un second déclin, encore plus accentué, est associé à
l’avènement des casinos et à l’étatisation des AÉJ (MAS + ALV).
Figure 61
$400
$300
$200
$100
$0
1955-1956
1956-1957
1957-1958
1958-1959
1959-1960
1960-1961
1961-1962
1962-1963
1963-1964
1964-1965
1965-1966
1966-1967
1967-1968
1968-1969
1969-1970
1970-1971
1971-1972
1972-1973
1973-1974
1974-1975
1975-1976
1976-1977
1977-1978
1978-1979
1979-1980
1980-1981
1981-1982
1982-1983
1983-1984
1984-1985
1985-1986
1986-1987
1987-1988
1988-1989
1989-1990
1990-1991
1991-1992
1992-1993
1993-1994
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
Millions
Dépense annuelle des adultes québécois dans le pari mutuel
En raison de comptes publics égarés dans les rayons de la bibliothèque, il existe des données
manquantes pour les années 1963-1964 et 1971-1972.
217
National Gambling Impact Study Commission. (1999, juin). National Gambling Impact Study
Commission, Final report. Washington, DC: auteurs.
218
D’autres facteurs peuvent aussi avoir participé à ce déclin, notamment une perte de confiance
dans l’intégrité de certaines composantes de l’industrie. Cet aspect n’a pas été analysé ici.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 103
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 104
La courbe de la dépense au jeu peut être divisée en sept intervalles :
•
Sans compétition jusqu’en 1970, les revenus du pari mutuel ont été en constante
progression.
•
L’avènement des loteries de Loto-Québec en 1970 (barre colorée en noir)
pourrait avoir temporairement stoppé la progression des revenus jusqu’en 19741975.
•
Par la suite, la progression reprend son cours jusqu’en 1980-1981. À noter que
le saut de 76 millions entre 1979-1980 et 1980-1981 est un artéfact dû à un
changement dans la méthode d’estimation de la dépense au jeu.
•
Entre 1980-1981 et 1987-1988, un premier déclin est constaté. Il pourrait s’agir
d’une conséquence de l’arrivée des appareils de poker vidéo (APV) survenue à
partir de juin 1976 (barre colorée en bleu) mais qui ont surtout connu une forte
progression en 1982.
•
Entre 1988-1989 et 1991-1992, il y a une recrudescence de la dépense au pari
mutuel. Il pourrait s’agir d’une réponse des parieurs au fait que le taux de remise
du pari mutuel est passé de 64% en 1983 à 73% en 1987 (barre colorée en
rose). Selon les appareils saisis, les APV illégaux avaient alors un taux de
remise entre 54% et 72%.
•
Entre 1992-1993 et 1995-1996, se produit un second déclin. Le casino de
Montréal a ouvert ses portes en octobre 1993 (barre colorée en rouge) et les
ALV ont été implantés en juin 1994 (barre colorée en jaune).
•
Enfin depuis l’année 1996-1997, la dépense au jeu a ré-augmenté pour se
stabiliser depuis. En 1996, le gouvernement du Québec a choisi d’implanter un
grand nombre d’appareils dans des salons de jeu attenant aux hippodromes du
Québec (barre colorée en orange).
À noter que l’avènement du bingo en réseau (barre colorée en vert) ne semble pas
avoir eu d’impact sur le pari mutuel. Jusqu’à présent, ces clientèles ont été
manifestement séparées.
4.1.2 Les taux de participation révélés par les études de prévalence du jeu
Malheureusement, la première étude québécoise de la prévalence du jeu pathologique,
réalisée en 1989, n’a pas détaillé les comportements de jeu219. Les données de la
seconde, réalisée en 1996, sont illustrées dans Figure 63. Un dernier estimé a été
produit lors de l’étude de prévalence du jeu réalisée en 2002 (voir Figure 64).
219
L’étude de prévalence de 1989 a été une des premières réalisées au monde, et ce détail ne
faisait pas alors partie des procédures standards. Voir : Ladouceur, R. (1991). Prevalence
estimates of pathological gambling in Quebec. Canadian Journal of Psychiatry, 36(10), 732-734.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 104
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 105
Déjà en 1996, la participation annuelle s’avérait très faible par rapport aux personnes qui
avaient déjà parié aux courses de chevaux. Seulement 15% des amateurs220 se
rendaient encore à l’hippodrome au moins une fois par année. À peine 3% des amateurs
y allaient régulièrement221. En 2002, la clientèle avait chuté de moitié depuis 1996.
4.1.3 Assistance dans les hippodromes québécois
Les données de la Commission des courses de chevaux du Québec, puis de la RACJ,
témoignent de la baisse d’assistance aux courses de chevaux. Une désertion
particulièrement marquée s’est produite à l’avènement des casinos, en octobre 1993, et
à l’implantation des ALV, en juin 1994. L’ajout d’ALV dans les hippodromes a peut-être
entraîné un regain, quoique ce phénomène ne semble pas avoir persisté. Le nombre
d’ALV aux hippodromes a peut-être été insuffisant pour soutenir cette relance.
Figure 62
220
C’est-à-dire les personnes qui y ont parié au moins une fois dans leur vie.
221
C’est-à-dire au moins une fois par mois.
1997-1998
1996-1997
1995-1996
1994-1995
1993-1994
1992-1993
1991-1992
1990-1991
1989-1990
1988-1989
2 500 000
2 000 000
1 500 000
1 000 000
500 000
0
1987-1988
N. d'entrées
Assistance dans les hippodromes du Québec
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 105
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 106
Figure 63
Mensuelle
Hebdomadaire
13,4%
8,6%
4,2%
2,3%
0,1%
11,3%
7,1%
3,3%
2,2%
1,2%
4,8%
1,1%
0,1%
0,1%
0,0%
Jeux
d'adresse
Spéculation
boursière
Jeux de dés
Événements
sportifs
19,8%
12,2%
4,4%
1,6%
0,2%
24,7%
Courses
d'animaux
Casino
Annuelle
3,8%
0,7%
0,4%
0,0%
37,8%
Participation à vie
16,4%
1,0%
0,2%
0,0%
4,4%
1,6%
0,2%
21,0%
AÉJ
Bingo
Cartes
15,1%
5,1%
3,0%
0,2%
40,5%
40,9%
18,1%
5,3%
2,6%
0,1%
2,1%
40,2%
67,0%
47,1%
Loteries
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
93,2%
88,0%
Taux de participation à différentes activités de jeu au Québec en 1996
Quotidienne
En 1996, la population adulte québécoise participait peu aux courses de chevaux. Bien que le quart de la population y avaient déjà
parié, seulement 3,8% y sont retournés cette année-là. À peine, 0,7% de la population fréquentait les hippodromes mensuellement;
0,4% y pariait à chaque semaine222.
222
Ces données n’étant pas publiées dans le rapport de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique au Québec, elles proviennent de
l’actuation qui a été faite de cette étude. (a) Voir l’annexe G dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo.
Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec. (b) Le rapport initial : Ladouceur, R., Jacques, C.,
Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 106
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 107
Figure 64
70%
65,3%
68,1%
80%
73,1%
Taux de participation à différentes activités de jeu au Québec en 2002
Annuelle
21,3%
1,3%
AÉJ (ALV +
MAS)
1,1%
7,8%
ALV
0,2%
16,3%
Casino machines à
sous
0,0%
3,1%
Keno
2,7%
0,1%
Poker
2,9%
0,1%
Blackjack
0,1%
2,4%
Roulette
0,2%
7,5%
Casino jeux de
table
17,6%
0,4%
Casino total
1,9%
0,2%
Course de
chevaux
9,0%
0,5%
2,4%
1,8%
Bingo
Loterie
instantanée
Loterie
quotidienne
Loterie
ordinaire
0%
Loterie
sportive
10%
8,2%
37,0%
9,2%
20%
3,3%
30%
29,9%
32,6%
Loterie total
40%
33,7%
50%
Jeux
étatisés
60%
Hebdomadaire
En 2002, la fréquentation annuelle des hippodromes avait diminué de moitié depuis 1996 223. Malheureusement, la trop faible
proportion empêche de conclure rasionnablement quant à la fréquentation hebdomadaire. Néanoins, celle-ci apparaît aussi diminuée
de moitié.
223
Les taux de pénétration de cette étude sont valides bien que l’échantillon est surreprésenté par des personnes de scolarité collégiale ou
universitaire. Voir : (a) Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et
du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. (b) Chevalier, S.,
Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au
Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national de santé publique du Québec et Université Laval.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 107
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 108
4.2 Un rapprochement anticipé
Contrairement à la recommandation de la NGISC, le projet des salons de jeu va
rapprocher les ALV des hippodromes québécois. En très peu de temps, le nombre
d’appareils qu’on y trouve va quadrupler (voir Tableau 21). L’interaction entre les
activités de jeu est un facteur du concept d’accessibilité. Dans cette perspective, ce
projet constitue une augmentation de 342% de l’accessibilité croisée.
Tableau 21
Présence des ALV dans les hippodromes du Québec
Hippodrome
Situation actuelle
Situation prévue
Augmentation
Montréal
200
1300
550%
Québec
100
335
235%
Trois-Rivières
65
200
208%
Aylmer
65
65
0%
Total
430
1900
342%
Le croisement de deux activités de jeu potentiellement pathogènes peut multiplier la
dangerosité.
•
La plus grande densité de l’offre de jeu peut inciter plus de gens à jouer, ou à
jouer davantage, d’où un risque accru de développer une dépendance envers
l’une ou l’autre des activités.
•
Un joueur excessif à une activité moins dommageable peut en venir à participer
plus fréquemment à l’activité la plus dommageable, et cela sans nécessairement
délaisser la première activité.
4.3 Le revenu plus élevé des ALV situés dans les hippodromes du Québec
Au Québec, les ALV dans les hippodromes produisent un revenu moyen de 102 093
dollars comparativement à 74 475 dollars pour les autres sites. Il s’agit d’un avantage de
37%; ce qui représente 27 618 dollars en moyenne 224. Dans un tel cas, selon les
données de 2002, la commission au détaillant225 sera de 22 460 dollars par unité. Pour
224
Données calculées à partir du document : KPMG. (2004). Current and potential racinos in
Canada.
http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf
À titre de comparaison, les données de 2004 pour l’hippodrome de Trois-Rivières proviennent
d’un rapport qui a été présenté au député André Gabias : Caron, C. et al. (2004). La survie des
courses à Trois-Rivières. Trois-Rivières, QC : Groupe de travail Hippodrome de Trois-Rivières
2004.
225
Cette commission est actuellement de 22% du revenu.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 108
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 109
1900 ALV, le revenu annuel du gestionnaire des hippodromes pourrait atteindre 43
millions de dollars. Cette hypothèse est vrai dans la mesure où le rendement plus élevé
est la conséquence d’un environnement qui stimule la dépense sur ALV. Les présentes
données ne permettent cependant pas de vérifier ou d’infirmer cette hypothèse.
Figure 65
Revenu annuel net moyen
par ALV
Dépense au jeu sur les ALV selon leur emplacement
$120 000
$100 000
$80 000
$60 000
$40 000
$20 000
$0
Aylmer
Montréal
Québec
Trois-Rivières
ALV hors
hippodromes
Hippodrome où les ALV sont situés
2002-2003
2004
4.4 Les juridictions qui combinent l’exploitation des AÉJ et des courses de
chevaux
Le mot racino226 désigne un champ de courses qui héberge des AÉJ. Les hippodromes
sont des champs de courses où des chevaux courent. Sinon, il s’agit de courses de
chiens. L’objectif habituel est de sauver ces établissements de la faillite en espérant que
les ALV, en rapatriant une clientèle perdue, vont entraîner une relance du pari mutuel. À
défaut d’une relance, une partie des profits des ALV peut servir à compenser le manque
à gagner du pari mutuel.
La compagnie Casino City a dressé une liste des racinos à travers le monde. Il n’est pas
certain à quel point cette liste est exhaustive227. Elle donne néanmoins une bonne idée
de la répartition de ce marché (voir Tableau 22). Ainsi, 59% des racinos sont situés aux
États-Unis et 34% au Canada. Il s’agit d’un phénomène principalement nord-américain.
En Amérique du Nord, 21 juridictions ont implanté des parcs d’AÉJ directement sur les
sites des champs de course. Les dates d’implantation ont été retracées pour 17 d’entre
elles (voir Tableau 23).
226
Dans le jargon des spécialistes du jeu, un champ de courses, qui héberge un grand nombre
d’AÉJ, est appelé « racino ». Il s’agit de la contraction du mot anglais, racing, et du mot casino.
227
En l’occurrence, il manque des informations sur l’état de Maine qui vient d’approuver les
racinos sur son territoire.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 109
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 110
Tableau 22
Liste des racinos à travers le monde
Nombre de racinos
Total Marché
Chevaux
Chiens
États-Unis
32
19
51
59%
Canada
29
0
29
34%
Australie
1
0
1
1%
Royaume-Uni
0
1
1
1%
France
1
0
1
1%
Autriche
1
0
1
1%
Colombie
1
0
1
1%
0
Argentine
1
1
1%
Total
66
20
86
100%
Selon le site http://www.casinocity.com/casinos.html
Consulté le 18 février 2007
Au Canada, sept provinces exploitent des ALV dans les hippodromes. Au Québec des
ALV sont situés dans quatre hippodromes depuis 1996 (voir Tableau 21).
Tableau 23
Les juridictions nord-américaines qui exploitent des racinos
Date
Juridiction
Selon www.casinocity.com/casinos.html
1990-06-09
Virginie Occidentale
Test pilote; implantation réelle en 1994228
1992
Louisiane
Seulement 221 ALV dans 3 hippodromes229
1992-09
Rhode Island
1 courses de chiens
1992-09
Manitoba
1 hippodrome
1994
Virginie Occidentale
2 hippodromes + 2 courses de chiens
1995
Iowa
1 hippodrome + 2 courses de chiens
1995-12
Delaware
3 hippodromes
1996
Québec
4 hippodromes
1996-10
Alberta
3 hippodromes
1998-12
Ontario
17 hippodromes
1999
Nouveau-Mexique
5 hippodromes
228
Voir à la page 532 dans : Thalheimer, R. (1998). Parimutuel wagering and video gaming: a
racetrack portfolio. Applied economics, 30(4), 531-544.
229
Voir à la page 11 dans Mulier, M., & Pulli, J. (2004, December). 2004 Update of U.S. racino
legislation. University of Arizona : Race track industry program. For Harness tracks of America
and thoroughbred racing associations.
http://cals.arizona.edu/rtip/STUDENT/Research/Student/PDF/Racino%20legislation%202004%20
update%20mulier%20and%20pulli.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 110
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 111
Tableau 23
Les juridictions nord-américaines qui exploitent des racinos
Date
Juridiction
Selon www.casinocity.com/casinos.html
2002-02
Louisiane
Implantation massive d’ALV
2004
New York
8 hippodromes
2004
Colombie-Britannique
1 hippodrome
2005
Île-du-Prince-Édouard
2 hippodromes
2005-11
Maine
Non répertorié
2005-10-17
Oklahoma
3 hippodromes
2006
Pennsylvanie
2 hippodromes
2006-07-23
Saskatchewan
1 hippodrome
?
Arkansas
1 courses de chiens
?
Floride
3 hippodromes + 11 courses de chiens
?
Minnesota
1 hippodrome
?
New Hampshire
1 hippodrome + 2 courses de chiens
4.5 Impact des AÉJ sur le pari mutuel
Les AÉJ ne font pas qu’apporter des revenus supplémentaires aux hippodromes.
Vraisemblablement, ils peuvent autant stimuler la dépense au pari mutuel qu’une
dépense additionnelle dans les ALV. Si ces revenus additionnels proviennent surtout
des joueurs excessifs, ceux-ci signifient nécessairement une hausse des dommages
subis.
4.5.1 La situation aux États-Unis
Aux États-Unis, à l’exception de la Louisiane, les AÉJ ont tendance à être installés dans
les hippodromes des états qui ont choisi de ne pas beaucoup investir dans les casinos.
En maintenant le principe de la concentration des AÉJ dans de grandes surface de jeu,
les hippodromes offrent un environnement qui constitue la meilleure option de
remplacement.
Au Delaware, en Pennsylvanie et au Rhode Island, les états doivent concurrencer
d’immenses casinos installés au New Jersey et au Connecticut. L’Iowa est confronté au
phénomène des casinos flottants du Mississippi. Bien qu’il y soit associé, le NouveauMexique réagit à l’émergence de nombreux casinos amérindiens. L’état de New York a
vu des casinos canadiens venir s’installer à sa frontière.
Dans ces états américains, contrairement aux provinces canadiennes, les AÉJ ne sont
pas tant utilisés pour sauver des hippodromes que pour contrer l’offre de jeu de
juridictions voisines. Ce sont les hippodromes qui mettent leur équipement au profit des
AÉJ.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 111
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 112
4.5.1.1 La Virginie Occidentale
En Amérique du Nord, l’état de la Virginie Occidentale a initié le mouvement des
racinos. Les données, publiées par ce gouvernement, illustrent une croissance régulière
du pari mutuel jusqu’en 1986, avec une décroissance subséquente jusqu’en 1997. Ce
déclin est associé à l’incapacité des hippodromes à rivaliser seuls des casinos qui
exercent une attraction plus puissante sur les joueurs.
L’implantation subséquente. des ALV dans les hippodromes en 1994 coïncide, quatre
ans plus tard230, avec un renversement de cette tendance. Pendant cinq ans, les
montants misés au pari mutuel ont connu une croissance qui a été proportionnelle231 à
celle de la dépense au jeu sur les ALV (Voir Figure 66). Ainsi, pour les gestionnaires des
hippodromes, l’intérêt d’offrir des ALV est double puisque ces appareils produisent des
profits tout en stimulant celui du pari mutuel.
Figure 66
Millions
Montants
Montants misés au pari mutuel en Virginie Occidentale
et montants dépensés sur les AÉJ situés aux hippodromes
$1 200
$1 000
$800
$600
$400
$200
1970
1971
1972
1973
1974
1975
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
$0
Pari mutuel
ALV (Montants divisés par 10)
4.5.1.2 L’Iowa
Une situation similaire est constatée en Iowa. L’avènement des AÉJ aux hippodromes a
coïncidé avec une hausse de la dépense au pari mutuel. Dans le cas présent, les
données financières permettent de constater que l’impact des AÉJ est essentiellement
observable dans le pari hors piste, et que les AÉJ ne sont pas parvenu à freiner
230
Ce délai a créé un doute initial quant à l’efficacité des racinos à sauver les hippodromes de la
faillites. Voir dans : Garrett, T. A., & Sobel, R. S. (1999). Betting on the future: policy issues and
implications for the West Virginia lottery. The West Virginia public affairs reporter, 16(2), 2-5.
http://www.polsci.wvu.edu/ipa/par/report_16_2.pdf
231
Pour mieux illustrer cette relation, l’échelle des montants misés sur les ALV a été divisée par
10.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 112
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 113
l’important déclin de l’industrie locale des courses. De plus, la stimulation du pari mutuel
semble s’estomper après quelques années.
Figure 67
Millions
Montants
Montants misés au pari mutuel en Iowa
et montants dépensés sur les AÉJ situés aux hippodromes
$400
$350
$300
$250
$200
$150
$100
Courses
Pari en ligne
Pari mutuel (total)
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
1991
1990
1989
1988
1987
1986
1985
$50
$0
AÉJ à l'hippodrome
4.5.1.3 L’état de New York
Dans l’état de New York, l’arrivée des ALV en 2004 a coïncidé avec une augmentation
de la clientèle des hippodromes, et conséquemment un arrêt de la chute du revenu du
pari mutuel, voire un retour à la croissance. Bien que les nouveaux clients seraient
surtout attirés par les ALV, ceux-ci profiteraient néanmoins de l’occasion pour dépenser
aussi au pari mutuel.
À noter que les visiteurs additionnels proviennent de la population locale car les racinos
newyorkais ne parviennent pas à drainer des joueurs sur une longue distance232. Ces
racinos ne sont pas une menace concrète qui pourrait justifier le développement des
salons de jeux au Québec.
4.5.1.4 La Louisiane
Après le Nevada, la Louisiane est l’état américain qui a distribué des AÉJ le plus
largement sur son territoire. On les retrouve depuis longtemps dans des casinos flottants
(octobre 1993), charitables ou amérindiens ainsi que, depuis 1994, dans des salons de
paris hors piste, bars, restaurants, hôtels et haltes-routières.
En octobre 1999, des casinos d’État, sur terre ferme, ont commencé à offrir des AÉJ qui
semblent s’être accaparés, sans autre impact, d’une partie du marché des appareils de
232
Voir aux pages 8 et 2 dans : Okada, S. S. (2007). New York racinos : casinos of convenience.
San Francisco, CA : HVS gaming services.
http://www.hotelnewsresource.com/pdf/hvs2091.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 113
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 114
poker vidéo distribués dans les bars, restaurants, hôtels et haltes-routières (voir Figure
68). Une fois le partage effectué, les deux groupes d’appareils ont continué à progresser
au rythme des AÉJ de l’offre proximale auparavant.
Figure 68
Millions
Montants misés au pari mutuel en Louisiane
et montants dépensés à d'autres activités de jeu
$1 600
Casinos flottants
$1 400
$1 200
$1 000
$800
$600
$400
$200
Poker vidéo
Pari m utuel
Casinos d'État
Casinos
am érindiens
AÉJ (racino)
Casinos
charitables
$0
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005
En février 2002, les AÉJ ont commencé à être disponibles directement sur le terrain des
hippodromes, alors qu’ils l’étaient depuis 1994 dans les salons de paris hors piste. Cet
ajout ne semble pas avoir encore bénéficié au pari-mutuel. Par contre, comme en
témoigne la similarité des pentes, les casions flottants ont enregistré en même temps
une diminution de leurs revenus.
En bref, le marché de la Louisiane s’est surtout développé en fonction des casinos
flottants et, à un moindre degré, des AÉJ distribués dans les bars, restaurants, hôtels et
haltes-routières. Sans nuire au pari mutuel, ni aux casinos charitables ou amérindiens,
les casinos d’État ont entraîné un déplacement plausible de la clientèle des AÉJ de
l’offre proximale. Les AÉJ aux hippodromes ont déplacé plausiblement une clientèle plus
habituée aux casinos flottants.
La Louisiane est ainsi l’exemple d’un déplacement de clientèle sans impact sur le parimutuel. Sinon, les AÉJ ne sont pas encore à l’hippodrome depuis assez longtemps pour
avoir eu un impact.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 114
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 115
4.5.1.5 Le Delaware
Au Delaware, les AÉJ dans les hippodromes n’ont pas davantage eu d’impact sur un
pari mutuel qui a continué son déclin. La contribution des ALV, servant à bonifier les
bourses offertes aux coureurs, permet alors une survie financière artificielle puisqu’elle
ne relance pas l’industrie des courses.
Figure 69
Millions
Montants misés au pari mutuel au Delaware
et montants dépensés sur les AÉJ situés aux hippodromes
$700
$600
$500
$400
$300
$200
$100
$0
1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Courses
Pari hors piste
Pari mutuel (total)
ALV
4.5.2 La situation au Canada
Au Canada, les provinces ne sont pas confrontées à une importante rivalité de la part de
l’offre de jeu de juridictions voisines. Les ALV sont essentiellement utilisés pour sauver
l’industrie des courses de chevaux.
Tableau 24
Développement de l’offre de jeu sur AÉJ au Canada
Date d'implantation
Terre-Neuve-et-Labrador
Île-du-Prince-Édouard
Nouvelle-Écosse
Nouveau-Brunswick
Québec
Ontario
Manitoba
Saskatchewan
Alberta
Colombie-Britannique
ALV
Racino
Casino d'état
1991
1991
1991
1990
1994
--1991
1993
1992
---
--2005
----1996
1998
1994
2006
1996
2004
----1995
--1993
1994
1993
1996
1996
1986
Casinos
amérindiens
------Oui
--1994
2002
1996
-----
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 115
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 116
Plusieurs provinces canadiennes, qui ont investi dans des racinos, ont aussi constaté
une stimulation du pari mutuel. Les revenus du pari-mutuel des dix provinces
canadiennes sont affichés dans les figures suivantes, selon l’échelle du revenu annuel.
Figure 70
Millions
Revenus du pari-mutuel
$1 350
$1 300
$1 250
$1 200
$1 150
$1 100
$1 050
Ontario
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
1991
1990
$1 000
Les triangles représentent l’année d’implantation des casinos, et les carrés indiquent
quand des AÉJ ont été installés dans les hippodromes (colonne Racino du Tableau 24).
Figure 71
Millions
Revenus du pari-mutuel
$350
Québec
$300
Colom bieBritannique
$250
$200
$150
Alberta
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
1991
1990
$100
Au Québec (bleu pâle), en Ontario (jaune), et en Alberta (vert), il est clair que l’arrivée
des AÉJ a relancé une dépense décroissante au pari-mutuel.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 116
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 117
Figure 72
Millions
Revenus du pari-mutuel
$60
$50
Manitoba
$40
$30
Saskat-chew an
$20
Nouvelle-Écosse
$10
2005
2004
2003
2002
2001
2000
1999
1998
1997
1996
1995
1994
1993
1992
1991
1990
$0
Au Manitoba (olive), cet impact semble avoir un peu tardé. Par ailleurs, les racinos sont
encore trop récents en Colombie-Britannique (rose), à l’Île-du-Prince-Édouard (mauve)
et en Saskatchewan (en bleu) pour que leur impact puisse être évalué.
Nulle part, les AÉJ dans les hippodromes ont rivalisé le pari-mutuel. Il n’y a pas eu de
déplacement de la dépense au jeu. Au contraire, ceux-ci ont renversé une chute des
revenus. En rappel : la hausse des revenus n’est pas attribuable aux montants insérés
dans les appareils. Il s’agit bien d’une hausse des sommes pariées sur les courses de
chevaux.
Les données canadiennes indiquent toutefois qu’il n’y a pas que les AÉJ aux
hippodromes qui pourraient stimuler le pari mutuel. Sans apport d’AÉJ, l’ouverture de
casinos en Ontario (jaune) a coïncidé avec une importante augmentation de la dépense
aux courses de chevaux. Celle-ci n’a cependant duré que deux ans. En Saskatchewan
(bleu), une réponse identique a été constatée pendant six ans. En contrepartie,
l’ouverture de casino en Nouvelle-Écosse (rouge) pourrait avoir eu un effet contraire de
très courte durée.
Sinon, au Nouveau-Brunswick et à Terre-neuve, où rien n’a changé, le pari mutuel n’a
pas connu une très grande fluctuation.
4.6 La dangerosité des activités de jeu
Sans étude expérimentale, il n’est pas possible de séparer deux composantes de la
dangerosité des activités de jeu. En effet, une activité peut être dangereuse parce
qu’elle a le potentiel de créer une dépendance pathologique à son égard. En
contrepartie, elle peut aussi être dangereuse parce qu’elle attire vers elle des personnes
qui éprouvent déjà des problèmes de jeu et qu’elle leur cause des dommages plus
intenses.
Il existe très peu de données permettant d’examiner la dangerosité croisée des AÉJ et
des hippodromes. Au Québec, elles se situent dans (1) les données de l’étude de
prévalence du jeu pathologique réalisée en 1996, (2) les appels à la ligne téléphonique
« Jeu : aide et référence », et (3) les données de l’ESCC, et (4) le profil des demandeurs
d’aide clinique au CQEPTJ entre 1996 et 1999.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 117
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 118
4.6.1 Les données de l’étude de prévalence du jeu pathologique de 1996
Les taux de prévalence témoignent globalement de cette double dangerosité sans qu’il
ne soit possible de déterminer comment une dépendance s’est instaurée. Ceux-ci
décrivent néanmoins l’ampleur démographique des dommages.
Dans la Figure 73, les taux de prévalence à vie du jeu pathologique ont été calculés en
ne considérant que les joueurs à chaque activité. Lorsque le taux est très faible,
l’estimation implique un très petit nombre d’observations au numérateur. Ces taux
doivent donc être examinés prudemment. Parmi les joueurs annuels, les courses de
chevaux et les jeux d’adresse sont les plus associés aux dommages. En 1996, les AÉJ
(MAS + ALV) n’étaient implantées que depuis environ deux années. Il était peut-être
encore un peu tôt pour en mesurer l’impact. Néanmoins, parmi les joueurs mensuels sur
AÉJ, un joueur sur cinq éprouvait ou avait déjà éprouvé des problèmes de jeu.
Figure 73
Prévalence à vie (SOGS 5+) du jeu pathologique en fonction du degré de
participation à différentes activités de jeu
25%
20%
15%
10%
5%
0%
Courses Événemen
Jeux
Spéculatio Jeux de
d'animaux ts sportifs d'adresse
n
dés
Loteries
Cartes
Bingo
AÉJ
Casino
Participation à vie
2,8%
5,8%
3,7%
5,5%
2,2%
4,7%
9,6%
13,9%
2,3%
Annuelle
2,8%
9,6%
5,6%
7,1%
3,7%
14,9%
7,8%
14,3%
2,7%
Mensuelle
3,3%
8,6%
8,0%
20,2%
3,7%
18,3%
3,6%
4,5%
Les données précédentes ne reflètent pas nécessairement la situation actuelle en 1996.
Dans la Figure 74, les taux de la prévalence actuelle, établie sur 12 mois, sont
présentés. Parmi les personnes qui ont déjà pariées au courses, seulement 1,6%
d’entre elles ont été dépistées comme étant des joueurs pathologiques. Par contre, si on
ne considère que ceux qui ont été parier récemment, au moins une fois dans l’année,
cette proportion était de 7,6%. Sans équivoque, des joueurs pathologiques se retrouvent
aux champs de courses dans une proportion nettement plus grande que celle que l’on
retrouve dans la population adulte en générale. Dans un tel cas, les hippodromes
exercent une attraction sur les joueurs pathologiques.
Lors de l’étude de 1996, malgré leur récence, les AÉJ ont aussi témoigné de leur
pouvoir d’attirer ou de créer des joueurs pathologiques. La revue de littérature présentée
dans le Chapitre 3 a établi plus clairement la dangerosité des AÉJ dans des marchés
plus matures.
Malheureusement, la taille de l’échantillon n’a pas permis d’examiner l’interaction entre
la dangerosité des AÉJ et celle des hippodromes. En raison de difficultés techniques, les
données de l’étude de 2002 ne permettent pas une comparaison similaire.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 118
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 119
Figure 74
Prévalence actuelle (SOGS 5+) du jeu pathologique en fonction du degré
de participation à différentes activités de jeu
10%
8%
6%
4%
2%
0%
Courses Événemen
Jeux
Spéculatio Jeux de
d'animaux ts sportifs d'adresse
n
dés
Loteries
Cartes
Bingo
AÉJ
Casino
Participation à vie
1,2%
2,6%
1,6%
2,5%
1,4%
1,6%
3,7%
3,9%
1,9%
Annuelle
1,3%
5,2%
2,8%
3,7%
3,4%
7,6%
3,4%
6,2%
2,2%
Mensuelle
1,6%
8,4%
7,6%
8,6%
0,4%
4,6%
3,6%
0,2%
4.6.2 Les appels à la ligne téléphonique Jeu : aide et référence
Dès l’implantation du casino de Montréal, en octobre 1993, le Centre de référence du
Grand Montréal a obtenu le mandat de recevoir les appels des personnes désirant en
savoir plus sur le jeu. Depuis l’année 1995-1996, tout en préservant l’anonymat des
appelants, cet organisme a maintenu un registre de la nature des appels. La majeure
partie des appels a été faite par des joueurs préoccupés par leurs habitudes de jeu. En
examinant ces seuls appels, il est possible de constater que les préoccupations des
joueurs ont surtout concerné les ALV, et à un degré moindre les MAS (voir Figure 75).
Figure 75
Activités de jeu motivant les joueurs à appeler
la ligne Jeu: aide et référence
Nombre d'appels
6 000
5 000
ALV
4 000
Machines à sous
Loteries
3 000
Casino - jeux de table
2 000
Courses de chevaux
1 000
0
1994
1995 1996
1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006
Année se term inant le 31 m ars
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 119
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 120
Ces données témoignent des sources des problèmes dans la mesure où ces activités de
jeu ont été populaires. La quasi absence233 de préoccupation à l’égard des courses de
chevaux ne signifie pas que cette activité soit moins dangereuse. Elle est la
conséquence crédible du fait que les joueurs sont ailleurs.
4.6.3 Les données de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes – santé
mentale et bien-être
Entre mai et décembre 2002, Statistique Canada234 a procédé à la seconde phase d’une
vaste enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes. À cette occasion, des
données ont été recueillies en ce qui concerne la pratique et les problèmes de jeu. Dans
cette section, nous présentons des analyses réalisées avec un fichier de microdonnées
à grande diffusion qui garantit l’anonymat des participants. Réalisées indépendamment
de Statistique Canada, ces analyses sont les nôtres.
Durant cette enquête, 36 984 citoyens canadiens de 15 ans ou plus ont été interrogés
lors d’une entrevue réalisée à domicile235.
L’inclusion de personne de moins de 18 ans entraîne nécessairement des taux
de prévalence légèrement moins élevés que ceux publiés dans des études
provinciales réalisées à la même époque. En effet, ces personnes n’ont pas un
accès libre au jeu.
Parmi les participants, 5 332 étaient des résidents du Québec. Il est possible d’analyser
ce sous-échantillon séparément. C’est le cas des résultats rapportés dans les figures où
le titre indique « Québec uniquement ». Sinon, les données des citoyens canadiens sont
réparties en deux groupes selon que ces personnes résident dans une province où les
ALV sont distribués comme au Québec, c’est-à-dire surtout dans les bars et un peu
dans les hippodromes, ou dans une province où les ALV sont distribués uniquement
dans les hippodromes. Au Canada, seules l’Ontario et la Colombie-Britannique ont
limité les ALV aux hippodromes. Les huit autres provinces les ont largement distribués
dans les bars et les hippodromes.
4.6.3.1 Nos définitions
Dans cette enquête, le jeu pathologique a été évalué en fonction d’une version
modifiée236 de l’Indice canadien du jeu excessif (ICJE). Les personnes sont
conséquemment classifiées parmi l’une des cinq catégories possibles (voir Tableau 25).
233
Entre 7 et 34 appels par année.
234
Statistique Canada. (2004). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes : cycle 1.2
– Santé mentale et bien-être. Guide du fichier de microdonnées à grande diffusion. Ottawa,
Canada : auteur.
235
En raison de l’éloignement ou de difficultés particulières, 14% des entrevues ont cependant
été réalisées au téléphone.
236
Approuvée par les concepteurs de l’outil psychométrique.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 120
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 121
Si le joueur s’identifie comme une personne qui ne joue pas, elle est classifiée ainsi
quels que soient ses comportements. Les catégories peuvent être désignées
différemment selon le risque ou le dommage associés au jeu.
Dans ces annexes, lorsque mesurée par l’ICJE, un joueur excessif est une personne
dont le score est supérieur à trois. Ce groupe englobe ainsi les joueurs à risque modéré
et les joueurs avec problème de jeu. Dans les figures suivantes, l’expression « risque
modéré ou plus » désigne les joueurs excessifs.
Tableau 25
Catégories de l’Indice canadien du jeu excessif
Score
Échelle
Auto-évalué
0
1-2
3-7
8 ou +
Risque
Non joueur
Aucun risque
Faible risque
Risque modéré
Risque sévère
Dommage
Non joueur
Sans problème
Faible risque
Risque modéré
Avec problème
Les réponses se réfèrent uniquement aux événements survenus au cours des 12
derniers mois. Les données décrivent conséquemment les problèmes actuels de jeu, et
non les problèmes antérieurement vécus.
En conformité avec la formulation des questions de cette enquête, un joueur régulier
est une personne qui a parié à une activité au moins une fois par mois. Un joueur
occasionnel a parié au moins une fois dans l’année, mais moins d’une fois par mois.
Un non joueur est la personne qui n’a pas parié au cours des 12 derniers mois; ce qui
n’implique pas qu’elle n’a jamais participé à cette activité au cours de sa vie. Les
dommages ici constatés ne concernent que les dommages qui se concrétisent
actuellement et ne révèlent en rien les dommages passés subis par la population si
ceux-ci sont survenus plus d’un an avant l’enquête.
4.6.3.2 Qualité de nos estimations
Prenant en considération le coefficient de variation des estimations, Statistique Canada
demande que les résultats compilés soient accompagnés d’un suffixe (les lettres E ou F)
pour indiquer quand la taille des échantillons rend ces estimations incertaines. La
présente analyse s’étant limité à l’examen du fichier de microdonnées à grande
diffusion, et les tableaux de CV n’étant pas disponibles pour les variables étudiées, nous
avons adopté d’autres critères en remplacement. Pour cette raison, les estimations, ici
présentées, sont utiles à des fins de recherche, mais elles ne peuvent pas remplacer les
études ciblées nécessaires pour concevoir les services à rendre à la population.
Des pourcentages sont présentés seulement si la banque de données contient au moins
30 observations pour le dénominateur237 et au moins 10 observations pour le
237
Une observation est une personne interviewée. Tel que recommandé par Statistique Canada,
la validité des pourcentages a d’abord été vérifiée en fonction des effectifs non pondérés.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 121
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 122
numérateur238. Lorsque l’aire d’un histogramme est affichée en pointillée, cela signifie
que le numérateur a été estimé avec au moins 10 observations239. Sinon, lorsque l’aire
est de couleur unie, il y a au moins 30 observations au numérateur.
4.6.3.3 Les taux de prévalence de base
Les taux de prévalence du jeu pathologique, pour la population en général, sont
indiqués dans le Tableau 26. Ces taux constituent une référence de base.
Les taux canadiens sont présentées séparément selon le mode de distribution des ALV.
Pour l’ensemble de la population, il n’existe pas de différence au Canada entre les
provinces lorsqu’elles sont partitionnées en fonction de leur mode de distribution des
ALV.
Tableau 26
Prévalence des problèmes de jeu parmi la population de 15 ans ou plus
Canada
48,8%
48,3%
48,5%
Sans
problème
46,6%
46,8%
46,7%
Faible
risque
2,7%
2,9%
2,8%
Risque
modéré
1,4%
1,5%
1,5%
Avec
problème
0,5%
0,5%
0,5%
Risque modéré
ou plus
1,9%
2,0%
2,0%
49,4%
46,6%
2,0%
1,3%
0,3%
1,6%
Non joueur
Surtout dans les bars
Uniquement dans les hippodromes
Total
Québec
Surtout dans les bars
Par rapport à l’ensemble des provinces canadiennes qui distribuent surtout leurs ALV
dans les bars, le Québec a un taux de prévalence du jeu excessif240 qui est moindre,
quoique la différence n’est pas statistiquement significative241. Cette hypothèse reste
incertaine.
Les modes de distribution des AÉJ au Canada
238
Le critère d’un numérateur au moins égal à 10 garantit qu’aucune pourcentage n’est
artificiellement gonflé en raison d’une ou deux observations qui auraient un poids
disproportionné. Ce risque est considérablement contrôlé avec l’exigence d’au moins dix
observations au numérateur.
239
Lorsqu’il y a au moins 30 observations au numérateur, l’estimation du pourcentage est
excellente. Entre 29 et 10 observations au numérateur, l’estimation est raisonnable pour
comparer des groupes bien qu’il reste imprudent d’utiliser ces proportions lorsqu’un calcul exige
une grande précision, par exemple si la dangerosité d’un dosage peut être influencée par de
petites variations de la quantité. Dans un tel cas, des enquêtes additionnelles, mieux ciblées,
sont nécessaires.
240
Pour le Québec, la catégorie « Avec problème de jeu » a été estimée avec 21 observations au
numérateur. Statistique Canada a accolé le suffixe E à la catégorie des joueurs à risque modéré
et celle des joueurs avec problème de jeu.
241
Logiciel R (2.2.0), prop.test, p = ,1008.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 122
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 123
L’Ontario et la Colombie-Britannique ont choisi de n’implanter des AÉJ que dans les
hippodromes ou les casinos. Les huit autres provinces canadiennes ont distribué la
majorité de leurs AÉJ dans les bars, et une minorité dans des hippodromes ou des
casinos. Les données de l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes,
réalisée par Statistique Canada en 2002, permet alors de comparer ces deux modes de
distribution des AÉJ.
4.6.3.4 La prévalence des problèmes de jeu sur ALV
L’examen de l’échantillon canadien témoigne d’une dangerosité nettement plus grande
des ALV lorsqu’ils sont distribués dans les bars et les hippodromes. Tandis que la
proportion de joueurs excessifs est plus élevée chez les joueurs réguliers (31%), cette
proportion est moindre chez les joueurs occasionnels (5%) ou chez ceux qui ne jouent
pas sur les ALV (1%) (voir Figure 76)242. Ces données sont conformes avec le constat
selon lequel les ALV captent puissamment l’intérêt des joueurs excessifs. Chez les
joueurs réguliers, il y a 16% de joueurs excessifs sur les ALV lorsque ceux-ci ne sont
distribués que dans les hippodromes, et pas ailleurs. Lorsque les ALV sont distribués
dans les bars et hippodromes, on retrouve 31% de joueurs excessifs parmi les joueurs
réguliers sur ALV. C’est presque le double. Ce constat n’est pas favorable au maintien
d’un grand nombre d’ALV dans les bars, là où des salons de jeux seront implantés.
Figure 76
Prévalence des problèmes de jeu en fonction
de la fréquence de jeu sur ALV, et du type de distribution des ALV
( Statistique Canada, 2002, ESCC )
Catégories de l'ICJE
Hippodromes uniquement
1,8%
Ne joue pas
8,5%
Jeu occasionnel
15,7%
Risque
modéré ou +
Jeu régulier
Surtout dans les bars
0,7%
Ne joue pas
Jeu occasionnel
4,6%
30,9%
Jeu régulier
Parmi les provinces qui distribuent leurs ALV surtout dans les bars, en ce qui concerne
le jeu excessif sur ALV, le Québec ne se distingue pas parmi les autres provinces (voir
Figure 77)243. On y observe un profil des taux de prévalence statistiquement identique.
242
Logiciel R, prop.test (deux groupes séparés), comparaison « surtout dans les bars » c.
« hippodromes uniquement » : joueurs réguliers (p = ,0154), joueurs occasionnels (p = ,0070),
non joueurs sur ALV (p = ,0000).
243
Logiciel R, prop.test (un groupe dans une population), comparaison « Québec » c. « Canada –
surtout dans les bars » : joueurs réguliers (p = ,6640), joueurs occasionnels (p = ,4611), non
joueurs sur ALV (p = ,8592).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 123
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 124
Dans cette figure et dans les suivantes, les statistiques concernant le Québec
présentent aussi des données pour la catégorie des joueurs à faible risque.
Figure 77
Catégories de l'ICJE
Prévalence des problèmes de jeu
en fonction de la fréquence de jeu sur ALV
( Statistique Canada, 2002, ESCC, Québec uniquement )
33,4%
Risque modéré ou +
5,8%
0,7%
21,6%
Faible risque
7,0%
1,3%
Ne joue pas
Joueur occasionnel
Joueur régulier sur ALV
4.6.3.5 La prévalence des problèmes de jeu aux courses de chevaux
L’analyse ne permet pas de constater de différence de jeu excessif chez les parieurs
réguliers aux courses de chevaux, quoique cette prévalence soit supérieure chez les
joueurs occasionnels (13,1%) dans les hippodromes là où des ALV sont aussi distribués
largement dans les bars (voir Figure 78). En ce sens, la présence des ALV dans les
bars pourrait inciter les joueurs pathologiques qui y sont accrochés à parier aussi
occasionnellement sur les courses de chevaux. Dans le même sens, une plus grande
prévalence du jeu excessif parmi les personnes qui ne fréquentent pas les hippodromes
(1,7%), là où les ALV ne se trouvent pas dans les bars, témoigne sans doute que les
joueurs excessifs vont plus probablement ailleurs que dans les hippodromes.
Figure 78
Prévalence des problèmes de jeu en fonction de la fréquence de
jeu aux courses, et du type de distribution des ALV
( Statistique Canada, 2002, ESCC )
Catégories de l'ICJE
Hippodromes uniquement
1,7%
Ne joue pas
9,3%
Jeu occasionnel
17,4%
Risque
modéré ou +
Jeu régulier
Surtout dans les bars
0,6%
Ne joue pas
Jeu occasionnel
13,1%
22,6%
Jeu régulier
Ces données sont conformes avec l’interprétation selon laquelle la présence simultanée
d’ALV dans les bars et dans les hippodromes favorise le déplacement des joueurs des
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 124
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 125
bars vers les courses de chevaux, quoique ce déplacement semble encore uniquement
occasionnel. Il est à noter que, actuellement, les ALV dans les hippodromes proposent
un environnement quasiment identique à celui des bars. Cela ne sera plus le cas avec
les salons de jeux qui offriront un environnement de jeu beaucoup plus diversifié.
Figure 79
Catégories de l'ICJE
Prévalence des problèmes de jeu
en fonction de la fréquence de jeu aux courses de chevaux
( Statistique Canada, 2002, ESCC, Québec uniquement )
Risque modéré ou +
14,7%
0,6%
Faible risque
11,7%
1,3%
Ne joue pas
Jeu occasionnel
4.6.3.6 Où se retrouvent les joueurs excessifs?
Là où les ALV sont situés uniquement dans les hippodromes, 22% des joueurs excessifs
parient à l’hippodrome au moins une fois par année, alors que seulement 14% des
joueurs excessifs des autres provinces s’y rendent. Cette exclusivité des ALV contribue
alors à une présence accrue de 57% des joueurs excessifs aux hippodromes (Voir
Figure 80).
4.6.4 Les données du CQEPTJ
Entre 1996 et 1999, les adultes québécois, qui éprouvaient des problèmes de jeu,
pouvaient appeler au Centre québécois d’excellence pour la prévention et le traitement
du jeu (CQEPTJ) afin d’obtenir une aide clinique à peu de frais. Parmi les dossiers de ce
centre, il existe 255 joueurs qui ont participé à une évaluation détaillée de leurs
habitudes de jeu qui peut servir à la présente évaluation de la dangerosité croisée244.
Tous les joueurs de ce groupe ont été diagnostiqués joueurs pathologiques par un
spécialiste du jeu pathologique.
La Figure 81 illustre le lien entre le nombre d’activités de jeu auxquelles les joueurs ont
participé et le nombre d’activités auxquelles ils ont perdu le contrôle. Typiquement, ces
demandeurs d’aide clinique ne participaient qu’à deux ou trois activités, et ils
n’éprouvaient des problèmes qu’à une ou deux activités. Le profil du joueur pathologique
244
Un profil détaillé des demandeurs d’aide clinique au CQEPTJ a été rendu public dans l’annexe
H du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo.
Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 125
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 126
accroché à de nombreuses activités est une image hollywoodienne qui est
exceptionnellement observée dans les banques de données objectives.
Parmi les demandeurs d’aide clinique au CQEPTJ, 56,1% d’entre eux n’éprouvaient de
difficultés qu’avec une seule activité de jeu (voir Tableau 28). Parmi eux, 84% n’avaient
de problème qu’avec les ALV. Toujours parmi les demandeurs d’aide clinique au
CQEPTJ, 31,8% éprouvaient des problèmes avec deux activités. Pour 69% d’entre eux,
il s’agissait des seuls ALV et MAS. Sans équivoque, au cours des dernières années, les
joueurs pathologiques québécois ont surtout subi des dommages sur les AÉJ.
Dans l’ensemble, 94,1% des joueurs éprouvaient des difficultés avec les ALV, les MAS
ou les courses de chevaux. La répartition de ces joueurs est affichée dans la Figure 82.
Figure 80
ALV surtout situés dans les bars
ALV dans les hippodromes
Répartition des joueurs à risque modéré ou
plus selon la participation aux courses,
au jeu sur MAS ou au jeu sur ALV
( Statistique Canada, 2002, ESCC )
Répartition des joueurs à risque modéré ou
plus selon la participation aux courses,
au jeu sur MAS ou au jeu sur ALV
( Statistique Canada, 2002, ESCC )
Les trois
3,7%
Les trois
5,0%
MAS &
Courses
4,7%
Aucune
17,8%
Aucune
35,5%
MAS & ALV
7,3%
MAS & ALV
35,0%
ALV
24,8%
MAS
8,2%
N = 343
MAS &
Courses
14,1%
ALV
0,5%
Courses
2,0%
MAS
34,2%
Courses &
ALV
2,6%
Courses &
ALV
0,5%
Courses
4,2%
N = 383
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 126
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 127
Figure 81
Nombre d'activités de jeu qui génèrent des
problèmes
Association entre la pratique d ejeu et les problèmes de jeu
8
7
6
5
4
3
2
1
0
0
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
Nombre d'activités de jeu pratiquées
(CQEPTJ, 1996-1999, N = 255)
Figure 82
Répartition des problèmes de jeu parmi la clientèle de CQEPTJ entre 1996 et 199
Entre 1996 et 1999, il y a eu peu d’interaction entre le jeu sur les AÉJ et les courses de
chevaux. Ce profil n’a sans doute pas encore beaucoup changé. Les joueurs
pathologiques du Québec se tiennent loin des hippodromes. Ils sont davantage près des
ALV. Pour cette raison, il peut être très nocif de déplacer les ALV dans les hippodromes.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 127
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 128
Enfin, la banque de données du CQEPTJ recèle un constat inquiétant. Si on divise ces
joueurs en deux groupes, soient ceux qui ont des problèmes uniquement avec les ALV
et ceux qui ont aussi des problèmes avec au moins une autre activité, il n’existe pas de
différence significative dans leur bilan des pertes financières au jeu.
Figure 83
Distributions cumulées de la perte financière au jeu
100%
90%
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
$10 000
$20 000
$30 000
$40 000
$50 000
$60 000
$70 000
$80 000
$90 000 $100 000
Plus
Perte financière en carrière
ALV + autre activité (N = 102)
ALV seulement ( N = 117)
Cela signifie vraisemblablement qu’un joueur pathologique ne demande pas d’aide
avant d’avoir épuisé ses capacités financières et que le poids de la dette l’ait obligé à
consulter. Pour les joueurs plus pauvres, cela survient plus rapidement. Pour les joueurs
plus riches, cela survient plus tardivement.
En effet, en général, les joueurs qui en viennent à demander une aide clinique, pour
résoudre une dépendance envers le jeu, attendent d’en être rendus à une situation
financière intenable appelée la phase du désespoir245. Lorsque les AÉJ ont commencé à
être implantés partout dans certaines juridictions, les spécialistes du jeu et les
responsables des centres d’aide pour les joueurs ont souligné la très grande vitesse
avec laquelle les AÉJ précipitaient les joueurs vers les services d’aide246. Il en a été ainsi
parce que les activités de jeu jusqu’alors existantes ne créaient pas des dommages
aussi rapidement :
“In the past, a gambler might experience 15 to 25 years of disordered gambling at the
track before reaching the so-called “desperation” phase. Today, it is not uncommon for a
245
Voir aux pages 112 à 119 dans : Custer, R., & Milt, H. (1985). When luck runs out. New York,
NY : Facts on file publications.
246
(a) Breen, R. B., & Zimmerman, M. (2002). Rapid onset of pathological gambling in machine
gamblers. Journal of gambling behavior, 18(1), 31-43. (b) Voir notamment la figure 1 à la page 46
: Breen, R. B. (2004). Rapid Onset of Pathological Gambling in Machine Gamblers: A Replication,
International journal of mental health and addiction, 12(April), 44-49.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 128
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 129
gambler addicted to slot or video poker machines to progress into the desperation phase
in a matter of months.” (Addiction messenger, 2006, page 2)247
Si, en juxtaposant les AÉJ et les courses de chevaux, les joueurs précipitent leur
dépense au jeu, ceux-ci arriveront plus rapidement au point où ils accepteront de
demander de l’aide. Les centres d’aide risquent alors d’avoir à absorber rapidement un
surplus de clientèle. Une révision des ressources disponibles devra être faite.
4.6.5 Un rappel de données anciennes
En terminant, si les demandeurs d’aide n’éprouvent pas actuellement beaucoup de
problèmes avec les courses de chevaux, il est utile de rappeler des données publiées en
1984 par Henry Lesieur248. Il y a longtemps, avant l’envahissement des AÉJ, près de la
moitié des demandeurs d’aide consultaient en raison de problèmes avec les courses.
On ne doit pas oublier la passé difficile de cette industrie qui n’a pas fondamentalement
changé.
Tableau 27
Répartition des demandeurs d’aide rapportée par Henry Lesieur en 1984
Courses
Courses et autres
Sports
Sports et autres
Cartes
Cartes et autres
N
5
18
6
15
1
5
Total
50
%
10%
36%
12%
30%
2%
10%
46%
42%
12%
247
Northwest frontier addiction technology transfer center. (2006, January). Problem gambling –
part 1 – Gambling: the hidden addiction. Addiction messenger, 9(1), 1-3.
http://www.oregon.gov/DHS/addiction/gambling/hidden-add.pdf
248
Voir à la page 24 dans : Lesieur, H. R. (1984). The chase. Rochester, VT : Schenkman books,
Inc.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 129
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 130
Tableau 28
Combinaisons des activités de jeu auxquelles les joueurs ont éprouvé des difficultés de contrôle
Activités causant des problèmes
ALV
ALV + 1 activité
ALV + 2 activités
ALV + 3 activités
ALV + MAS
ALV + MAS + 1 activité
ALV + MAS + 2 activités
ALV + MAS + 3 activités
ALV + MAS + 4 activités
ALV + Courses
ALV + Courses + 1 activité
ALV + Courses + 5 activités
ALV + MAS + Courses
ALV + MAS + Courses + 1 activité
ALV + MAS + Courses + 5 activités
MAS
MAS + 1 activité
Courses
1 activité
2 activités
3 activités
Total
N
%
119
19
5
1
56
9
3
2
1
2
1
1
2
1
1
13
2
2
9
2
4
255
46,7%
7,5%
2,0%
0,4%
22,0%
3,5%
1,2%
0,8%
0,4%
0,8%
0,4%
0,4%
0,8%
0,4%
0,4%
5,1%
0,8%
0,8%
3,5%
0,8%
1,6%
ALV
MAS
AÉJ
73,7%
AÉJ + 1
activité
AÉJ
AÉJ +
Courses
86,3%
87,5%
93,3%
94,1%
5,9%
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 130
Chapitre 4 - La dangerosité croisée des activités de jeu - 131
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 131
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 132
Chapitre 5
Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages
Une approche du jeu, axé sur la promotion de la santé, n’est possible que si
l’environnement de jeu est sécuritaire. Cela peut être atteint par une mise en garde des
joueurs, par une accessibilité bien dosée, et par des AÉJ dont les paramètres sont
agencées pour ne pas solliciter les facteurs qui participent au processus pathologique
menant à la dépendance à l’égard du jeu sur AÉJ.
Dans le but d’examiner les mesures de protection en fonction d’un objectif de jeu
sécuritaire, un modèle du jeu pathologique sur AÉJ est explicité dans ce chapitre.
5.1 Les processus psychologiques conduisant à une dépendance pathologique
envers les AÉJ
D’emblée, il importe de spécifier que les personnes qui s’initient aux jeux sur les AÉJ ont
des historiques cliniques très différents. Bon nombre des gens249, qui vont y perdre le
contrôle, n’avaient jamais éprouvé antérieurement de problèmes de jeu. D’autres sont
des joueurs pathologiques sévères ayant déjà perdu le contrôle à une autre activité de
jeu, sinon plusieurs. Certains sont intelligents, d’autres le sont moins. Certains sont
dépressifs, narcissiques ou boiteux. On retrouve, parmi les joueurs excessifs sur AÉJ,
tout ce qui se trouve dans une population.
Lors du traitement des dépendances envers les AÉJ, les cliniciens n’établissent pas de
plans d’intervention différents en fonction de la condition clinique antérieure à
l’expérience de jeu sur AÉJ250. Peu importe l’historique, les processus psychologiques
sollicités par l’expérience de jeu sur AÉJ sont les mêmes pour tous251.
Résoudre une dépendance envers les AÉJ ne résout pas nécessairement les problèmes
antérieurs de la personne. Ces appareils ajoutent un problème supplémentaire qui, par
sa préséance, devient central dans la dynamique psychologique, et par sa dangerosité,
249
Parmi les joueurs pathologiques québécois, qui ont requis une aide clinique au CQEPTJ entre
1996 et 1999, 74% ont indiqué avoir des problèmes de jeu uniquement avec les AÉJ, alors que
19% ont indiqué éprouver des problèmes sur les AÉJ et à au moins une autre activité de jeu.
Seulement 7% des joueurs n’ont pas rapporté de problème avec les AÉJ. Ces données sont
rapportées à la page 285 dans Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de
loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du
Québec : recours collectif des joueurs pathologiques contre Loto-Québec.
250
(a) Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., Lachance, S., Doucet, C., Leblond, J., & Jacques,
C. (2001). Cognitive treatment of pathological gambling. Journal of Nervous and Mental Disease,
189, 766-773. (b) Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., Lachance, S., Doucet, C., & Leblond, J.
(2003). Group Therapy for Pathological Gamblers : A Cognitive Approach. Behaviour Research
and Therapy, 41, 587-596.
251
Leblond, J. (2004). Comparaison des résultats du programme expérimental sur le jeu
pathologique du MSSS aux résultats des études scientifiques menées à l'Université Laval.
L'intervenant, 20(3), 4-6.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 132
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 133
accélère et complexifie les dommages subis. Il ne s’agit pas d’un simple déplacement de
problème.
Pour éviter de proposer un ensemble hétéroclite de mesures mal ciblées, il importe de
préciser un modèle des processus psychologiques sur lesquels des modifications
structurales apportées aux AÉJ doivent exercer une influence. L’état actuel des
connaissances dans le domaine du jeu pathologique permet dorénavant cette
modélisation.
5.1.1 La modélisation des processus psychologiques impliqués dans la
dépendance au jeu sur AÉJ
Le modèle comportemental252 du jeu pathologique suggère que la perte de contrôle sur
la dépense au jeu pourrait être la conséquence d’un apprentissage résistant au
processus d’extinction. Il suffit d’observer des joueurs sur AÉJ pour être convaincu que
les mécanismes du conditionnement, classique ou opérant, sont impliqués dans la
genèse du jeu pathologique sur les AÉJ. Ce modèle explique bien la persistance au jeu
en dépit du fait que la situation est généralement perdante à moyen terme. Par contre, il
est insuffisant pour expliquer la persistance à long terme, et même l’accroissement de la
dépense au jeu lorsque la pathologie est instaurée. En ce sens, le modèle
comportemental est utile pour comprendre le comportement des joueurs jusqu’à la
dernière étape précédant la perte de contrôle sur la dépense au jeu.
252
(a) Skinner, B. F. (1953). Science and human behaviour. New York, NY : Free Press. (b)
Ferster, C. B., & Skinner, B. F. (1957). Schedules of reinforcement. New York, NY: AppletonCentury Crofts. (c) Knapp, T. J. (1976). A functional analysis of gambling behavior. Dans W. R.
Eadington (Éditeur), Gambling and society: Interdisciplinary studies on the subject of gambling.
Springfield, IL: Charles C Thomas. (d) Frank, M. L. (1979). Why people gamble: a behavioral
perspective. Dans D. Lester (éditeur), Gambling today. Springfield, IL: Charles C. Thomas. (e)
Dickerson, M. G., Hinchy, J., Legg-England, S., Fabre, J., & Cunningham, R. (1992). On the
determinants of persistent gambling behaviour. I. High-frequency poker machine players. British
journal of psychology, 83, 237-248. (f) Delfabbro, P. H., & Winefield, A. H. (1999a). Pokermachine gambling : an analysis of within session characteristics. British journal of psychology, 90,
425-439. (g) Haw, J. E. (2000). An operant analysis of gaming machine play. Doctoral
dissertation, University of Western Sydney, Australia
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 133
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 134
Il existe plusieurs modèles cognitifs253 qui ont été proposés en remplacement du modèle
comportemental. Le modèle fondé sur l’illusion de contrôle254 apporte une explication
crédible du passage de l’état sain à celui du jeu pathologique. Une intervention
clinique255 destinée à briser cette illusion est très efficace à atténuer ou à faire cesser le
désir obsessionnel de jouer. Les cliniciens rapportent cependant éprouver des difficultés
considérables lorsque la dépendance est installée depuis trop longtemps, ou lorsqu’il y a
une comorbidité sévère, comme si le comportement de jeu était devenu automatisé,
robotisé256.
Le modèle cognitif fondé sur l’analyse des croyances erronées ne permet pas de prédire
qui perdra le contrôle sur sa dépense au jeu, mais il explique de manière satisfaisante
comment le terrain a été préparé pour qu’une illusion de contrôle puisse s’installer257. Ce
modèle décrit l’action de processus heuristiques qui génèrent une interprétation erronée
de la situation de jeu. En cela, il rejoint une autre catégorie de modèle fondé sur
l’analyse de la conscience de la situation258 alors que des personnes compétentes en
viennent à commettre des erreurs très graves qu’elles ne détectent qu’à la dernière
minute alors qu’il est pratiquement trop tard pour redresser la situation.
253
(a) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence
Erlbaum Associates. (b) Griffiths, M. D. (1990). The cognitive psychology of gambling. Journal of
gambling behavior, 6(1), 31-42. (c) Walker, M. B. (1992). The psychology of gambling. New York,
NY: Pergamon Press. (d) Griffiths, M. D. (1994). The role of cognitive bias and skill in fruit
machine gambling. British journal of psychology, 85, 351-369. (e) Ladouceur, R., & Walker, M.
(1996). A cognitive perspective on gambling. Dans P. M. Salkovskis (éditeur), Trends in cognitive
and behavioral therapies (pp. 89-120). New York, NY: John Wiley & sons. (f) Toneatto, T., BlitzMiller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy
gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (g) Baboushkin, H. R., Hardoon, K. K.,
Derevensky, J. L., & Gupta, R. (2001). Underlying cognitions in gambling behavior among
university students. Journal of applied social psychology, 31(7), 1409-1430. (h) Sharpe, L.
(2002). A reformulated cognitive-behavioral model of problem gambling: a biopsychosocial
perspective. Clinical psychology review, 22, 1-25.
254
(a) Langer, E. J. (1975). The illusion of control. Journal of personality and social psychology,
32(2), 311-328. (b) Presson, P. K., & Benassi, V. A. (1996). Illusion of control: a meta-analytic
review. Journal of social behavior and personality, 11(3), 493-510.(c) Ladouceur, R., Sylvain, C.,
Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal,
Québec : Les Éditions de l’Homme.
255
Voir la note numéro 250.
256
Un modèle physiologique, suggérant des dommages neurochimiques ou une réorganisation
corticale, constitue alors une explication intéressante, là où les modèles cognitifs échouent.
257
(a) Walker, M. B. (1992). The psychology of gambling. New York, NY: Pergamon Press. (b)
Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et
vaincre le gambling. Montréal, Québec : Les Éditions de l’Homme. (c) Leblond, J. (2004).
Comparaison des résultats du programme expérimental sur le jeu pathologique du MSSS aux
résultats des études scientifiques menées à l'Université Laval. L'intervenant, 20(3), 4-6.
258
Endsley, M. R. (1999). Situation awareness and human error: designing to support human
performance. Proceedings of the high consequence systems surety conference. Albuquerque,
NM.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 134
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 135
Parallèlement, le concept d’optimisme irréaliste259 est un modèle particulièrement
prometteur pour expliquer un autre aspect fondamental de la manière dont la structure
est préparée pour permettre l’ancrage d’une illusion de contrôle. En plus, une attitude
d’optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une pathologie retarde
l’admission des problèmes et surtout la décision de consulter une aide externe.
Aucun de ces modèles ne permet à lui seul d’expliquer l’ensemble des processus qui
s’articulent pour mener une personne jusqu’au jeu pathologique et à l’y maintenir.
Toutefois, en segmentant cette démarche, il est possible de percevoir un enchaînement
de processus qui tantôt relèvent d’un modèle puis ultérieurement d’un autre modèle. Le
développement du jeu pathologique sur les AÉJ apparaît ainsi être une succession de
stades au cours de laquelle la dynamique à un stade est dominée par des processus
spécifiques qui sont indépendants des processus qui sont actifs lors des stades
antérieurs ou postérieurs.
Dans la mesure où il est possible de décrire la liste et l’interaction des caractéristiques
des AÉJ influençant le comportement des joueurs à chaque stade, il est possible de
sélectionner et d’adopter des stratégies qui interviennent au bon moment dans la
dynamique des joueurs.
5.1.2 Une modélisation par stades du jeu pathologique
L’expérience de jeu sur les ALV est relativement simple.
Stade 1 : Avant même de s’initier aux ALV, la plupart des joueurs entretiennent des
croyances naturelles erronées260, parfois étonnamment utiles dans un environnement
concret261, mais qui s’avèreront systématiquement dommageables dans l’environnement
artificiel des jeux de hasard. Les croyances erronées appartiennent à deux catégories :
(a) la certitude qu’il puisse exister un lien de cause à effet entre des événements
259
(a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of
personality and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic
optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample.
Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (c) Taylor, S. E., & Brown, J. D. (1988). Illusion
and well-being: a social psychological perspective on mental health. Psychological bulletin,
103(2), 193-210.
260
(a) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence
Erlbaum Associates. (b) Gaboury, A., & Ladouceur, R. (1989). Erroneous perceptions and
gambling. Journal of social behavior and personality, 4(4), 411-420. (c) Ladouceur, R., Sylvain,
C., Duval, C., Gaboury, A., & Dumont, M. (1989). Correction des verbalisations irrationnelles chez
des joueurs de poker-vidéo. International journal of psychology, 24, 43-56. (d) Toneatto, T., BlitzMiller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy
gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (e) Caron, A., & Ladouceur, R. (2003).
Erroneous verbalizations and risk taking at video lotteries. British Journal of Psychology, 94, 189194. (f) Ladouceur, R. (2004). Perceptions among pathological and non pathological gamblers.
Addictive behaviors, 29, 555-565.
261
Gigerenzer, G. (2000). Ecological intelligence (pp. 59-76). Dans Adaptive thinking : rationality
in the real world. New York, NY : Oxford university press.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 135
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 136
pourtant aléatoires, et (b) un optimisme irréaliste à l’égard de développer une maladie
en jouant262.
Stade 2 : La première expérience de jeu est habituellement suscité par la simple
curiosité.
Stade 3 : Durant une session de jeu, la fréquence des récompenses est irrégulière. Par
simple jeu du hasard, les récompenses sont parfois massées. Parfois elles sont plus
rares qu’en moyenne. Durant ces derniers événements, la persistance à jouer doit être
renforcée afin d’éviter l’extinction de l’intérêt à jouer. Or, le simple fait d’attribuer des
récompenses irrégulièrement instaurent immédiatement, par une technique de
renforcement partiel, une résistance à l’extinction. Dans un tel cas, le comportement de
jeu persiste pendant plusieurs sessions de jeu malgré qu’il s’agisse d’une situation
invariablement perdante à long terme.
Stade 4 : Durant la période de jeu soutenue essentiellement par une résistance à
l’extinction, l’absence263 d’une analyse normative264 de la situation de jeu favorise une
dérive de la conscience de la situation en raison d’une prédominance des processus
heuristiques265 ou automatiques. Il s’agit d’une réponse naturelle des processus
cognitifs. Le comportement n’est pas encore pathologique.
Stade 5 : L’élément central du développement de la pathologie survient lorsque la
personne obtient un gain significatif266, c’est-à-dire lorsqu’elle vit une séquence de
262
(a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality
and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1987). Unrealistic optimism about
susceptibility to health problem: conclusions from a community-wide sample. Journal of
behavioral medicine, 10(5), 481-500. (c) Voir aux pages 206 à 217 dans : Leblond, J. (2004).
Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier
numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
263
Les gens vont jouer pour se détendre. Ils abordent alors les ALV avec plus ou moins
d’attention. Quoi qu’il en soit, si un joueur tentait de faire une analyse normative, il n’y
parviendrait pas car l’information nécessaire n’est pas disponible. Cela lui serait impossible à
moins d’avoir accès aux résultats de millions de parties. Voir à la page 16 dans Loto-Québec.
(2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une réussite. Montréal, QC : auteurs.
264
Une analyse normative consiste à faire une analyse parfaitement logique qui tienne compte de
tous les aspects du problème à résoudre. Ceci implique que la personne a accès à toutes les
données utiles pour juger, qu’elle possède la formation nécessaire pour appliquer les règles
logiques requises, et qu’elle possède le temps qu’il faut pour compléter son jugement.
265
Les processus heuristiques sont des processus de la pensée qui utilisent les croyances
erronées quant au hasard.
266
Il n’est pas nécessaire que la personne ait obtenu l’argent du gain. Il suffit qu’elle ait observé
que ce gain aurait pu être obtenu si la mise avait été disposée autrement.
Voir (a) Custer, R. L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans P. A. Carone et al.
(éditeurs), Addictive disorders update. New York, NY : Human sciences press. (b) Greene, J.
(1982). The gambling trap. Psychology today, 16(9), 50-55. (c) Custer, R. L. & Milt, H. (1985).
When lucks runs out. New York, NY : Facts on public file. (d) Voir aux pages 150 et 152 dans :
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 136
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 137
succès si étonnante qu’il devient difficile de la considérer comme étant uniquement
causée par le hasard. Les processus attentionnels sont conséquemment sollicités afin
d’aborder la situation de jeu en fonction d’une analyse normative. La conscience de la
situation étant faussé, cela semble possible. Cela est illusoire.
Stade 6 : Durant la phase dominée par une illusion de contrôle, les joueurs investissent
leur argent. Ils n’attendent pas un gain immédiat. Ceux-ci s’estiment en apprentissage,
en période d’exploration afin de découvrir le truc. Ces investissements n’aboutissent
jamais de sorte que les personnes ont souvent dépensé beaucoup plus que leurs
revenus. Des biens ont été sacrifiés. Les options de crédit ont été utilisées. Des
emprunts ont été faits auprès de la famille, des amis ou à de multiples autres sources.
Lorsque l’espoir de trouver le truc s’estompe, les joueurs prennent conscience qu’il faut
maintenant récupérer de l’argent, surtout si des montants ont été subtilisés à l’insu de
personnes qui y ont droit.
Stade 7 : Le besoin de se refaire instaure une dynamique psychologique particulière267.
À chaque partie, le joueur est confronté au choix de garder dans ses poches une pièce
de monnaie qui ne résoudra certainement pas ses problèmes, ou de la miser avec la
possibilité d’obtenir un gain appréciable. L’enfoncement n’implique jamais autre chose
qu’une dépense insignifiante. Partie après partie, le risque supplémentaire apparaît
toujours négligeable face à l’espoir d’un gros gain. L’enfoncement est graduel, lent mais
certain.
Stade 8 : Puis, vient un temps où la catastrophe semble quasi inévitable. La faillite, la
dénonciation, ou la rupture familiale ne peuvent plus être évitées par une meilleure
gestion des revenus, un étalement de la dette ou des biens additionnels à vendre. Le
gros gain est requis urgemment. C’est la seule solution, et elle doit survenir vite. La
dépense au jeu sera massive. Tout ce qui reste est appelé à être dépensé car ces biens
risquent d’être perdus de toutes manières en raison du désastre financier. En moyenne,
les joueurs qui en viennent à demander une aide clinique dévoilent une perte d’environ
12 000 dollars par année sur les seuls ALV268.
Lesieur, H. R., & Custer, R. L. (1984). Pathological gambling: roots, phases, and treatment.
Annals of the American academy of political and social science, 474, 146-156. (e) Dickerson, M.
G., Hinchy, J., Legg-England, S., Fabre, J., & Cunningham, R. (1992). On the determinants of
persistent gambling behaviour. I. High-frequency poker machine players. British journal of
psychology, 83, 237-248. (f) Voir aux pages 33 à 36 dans : Schrans, T., Schellinck, T., & Walsh,
G. (2001). The 2000 regular VL players follow-up. Technical report. A comparative analysis of
problem development & resolution. Halifax, Nava Scotia : Nova Scotia Department of Health. (g)
Voir aux pages 20 et 21 dans : Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu
excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, QC : Les éditions de l’homme. (h) Voir
aux pages 294, 295 et 301 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils
de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure
du Québec.
267
Lesieur, H. R. (1984). The chase. Rochester, VT : Schenkman books, Inc.
268
Voir à la page 296 dans Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de
loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du
Québec : recours collectif des joueurs pathologiques contre Loto-Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 137
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 138
5.2 Les paramètres des AÉJ ayant une incidence sur les processus impliqués
dans la dépendance pathologique
Le Tableau 29 présente un répertoire des paramètres critiques, pour le jeu pathologique,
de la situation de jeu sur les AÉJ de Loto-Québec. En agissant sur ces paramètres, il est
possible d’intervenir directement dans les processus pathogènes. L’état actuel des
connaissances scientifiques ne permettent pas de quantifier exactement comment ces
paramètres doivent être agencés. Notamment, les spécialistes de la santé publique
n’ont pratiquement pas accès aux informations nécessaires pour le faire. Quoi qu’il en
soit, dans la mesure où le gouvernement du Québec a une plus grande marge de
manœuvre pour protéger sa population contre les dommages causés par le jeu excessif,
des modifications apportées à ces paramètres offrent une perspective plus réaliste, de
bénéfices tangibles, qu’une approche centrée sur le concept de jeu responsable. Ceci
implique une collaboration plus étroite entre Loto-Québec et les organismes de santé.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 138
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 139
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 139
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 141
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
1
Taux de remise
(ou taux de retour)
(ou taux de retour
théorique)
Situation au Québec
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Par la loi, la réglementation oblige
un taux de remise moyen de 92%
pour les jeux sur ALV.
Le taux de remise est le paramètre qui a le
plus d’impacts sur le jeu pathologique. Plus
il est élevé, plus l’agencement des
paramètres de jeu a le potentiel d’être
pathogène.
Pour réduire l’incidence du jeu
pathologique, le taux de remise doit être
conservé le plus bas possible.
Le taux des MAS doit être au
moins égal à 83%. Dans les faits,
il est beaucoup plus élevé.
Avant 1994, les appareils illégaux,
qui ont motivé l’instauration des
MAS et ALV, avaient des taux de
54% à 78%.
Ce taux délimite les possibilités
d’ajustement du taux de récompense ainsi
que de la valeur des lots.
Le seul motif pour hausser un taux de
remise est l’existence d’une offre de jeu
concurrente plus attrayante.
Actuellement, en l’absence d’une offre
de jeu concurrente tangible, les taux de
remise au Québec sont beaucoup trop
élevés, donc pathogènes et
dommageables.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 141
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 142
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
2
Taux de remise effectif
Situation au Québec
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Concrètement, le taux de remise
théorique n’est obtenu qu’après
des millions de parties. Le taux de
remise effectif correspond à ce
que le joueur peut, réalistement,
espérer obtenir dans une session
normale de jeu, c’est-à-dire en
quelques centaines ou quelques
milliers de parties. Ayant alors
peu de chance d’encaisser le gros
lot, le taux de remise effectif est
toujours inférieur au taux de
remise théorique.
Lorsque la différence est trop grande, les
joueurs, qui calculent leurs résultats,
développent l’impression fausse que
l’exploitant a altéré les appareils pour
produire moins que prévu. C’est démotivant.
Cela semble paradoxal, mais quand une
offre de jeu concurrente doit être
neutralisée, augmenter la valeur des lots
importants est le meilleur moyen de
réduire l’incidence des problèmes de jeu
tout en conservant sa clientèle.
L’augmentation des lots importants attire
la clientèle parce que les lots sont plus
payants. Par contre, la probabilité d’un
gain significatif s’en trouve diminuée.
L’écart est déterminé par la taille
et la probabilité des lots les plus
importants. Sur les ALV, le lot
maximal est de $500. Pourtant, la
réglementation permet un gros lot
de $1000.
En réduisant les montants accordés pour
les lots les plus rares, il est possible de
maintenir un taux de remise effectif qui
demeure près du taux de remise théorique.
En contrepartie, en proposant des montants
plus élevés, il est possible de réduire le taux
de remise effectif sans modifier le taux de
remise théorique.
Les salons de jeu sont un environnement
privilégié pour offrir des lots plus
importants que $500. Toutefois, cela
devra obligatoirement être fait sans une
augmentation du taux de remise
théorique ni branchement des appareils
en ilots.
Pour pallier au fait que des lots plus
importants risquent d’attirer une nouvelle
clientèle, des mises en garde et des
ressources d’aide doivent être présentes
sur le site.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 142
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 143
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
3
Taux d’encaissement
Situation au Québec
Le taux d’encaissement sur les
ALV est aux environs de 75%.
Attention, ce taux est différent du
taux de remise théorique ainsi
que du taux de remise effectif.
Cette confusion est fréquente.
Impacts
Si une personne insère $ 50 dans un
appareil et qu’elle joue jusqu’à ce qu’il ne
reste plus à son solde que $ 30, le taux
d’encaissement sera de 60%.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Les montants insérés pour chacun des
jeux sur les AÉJ ainsi que les taux
d’encaissement doivent être mieux
communiqués aux spécialistes de la
santé publique.
L’argent inséré est une mesure de l’attrait
que l’AÉJ exerce sur la personne, le taux
d’encaissement indique à quel point
l’expérience de jeu a satisfait cet attrait. Ces
informations influencent surtout les
gestionnaires.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 143
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 144
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
3
Affichage des résultats
par set plutôt que par
partie
Situation au Québec
Une partie équivaut à miser un
crédit. Un set équivaut à une
pression du bouton Jouer.
Avant de presser le bouton Jouer,
la personne peut miser plus d’un
crédit par ligne (jeu multicrédits)
ou miser sur plus d’une ligne (jeu
multilignes). Elle réalise alors
plusieurs parties simultanément.
4
Annonce du gain
indépendamment de la
valeur de la mise
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Ce mode d’affichage augmente
artificiellement l’impression de récompense.
L’annonce des résultats du set peut être
globale. Elle doit cependant être assez
détaillée pour que la personne puisse
faire un bilan complet et détaillé des
parties du set.
Plus le joueur a l’impression d’être
récompensé fréquemment, plus il
développe une résistance à l’extinction,
c’est-à-dire une plus grande persistance à
continuer à jouer en dépit du fait qu’à
l’occasion les récompenses deviennent plus
rares.
À l’écran, le joueur n’est informé
que du résultat global du set. Si
une personne a misé 1 crédit sur
chacune de 5 lignes, sa mise
globale pour le set est de 5
crédits. Si un lot de 8 crédits est
obtenu pour une seule des lignes,
l’appareil annonce un gain et ne
fait aucune mention des pertes.
En fait, le joueur a gagné pour
une partie et perdu pour les 4
autres.
La résistance à l’extinction est un concept
classique en psychologie de
l’apprentissage. Cet effet est
particulièrement facile à induire ou
supprimer par l’ajustement du renforcement
partiel.
Si une mise de 5 crédits entraîne
un lot global de 3 crédits, l’ALV
annonce un gain de 3 crédits
plutôt qu’une perte de 2 crédits.
Cette définition du gain stimule une
impression artificiellement accrue de
récompense.
En continu, aux côtés du solde,
l’affichage doit mentionner, en
pourcentage, la fréquence réelle des
récompenses par partie.
Une option d’affichage doit permettre au
joueur de faire une rétrospective réaliste
des récompenses obtenues.
Sans résistance à l’extinction, il serait
rarissime qu’une personne persiste à perdre
pendant plusieurs dizaines de milliers de
parties. Les joueurs délaisseraient les AÉJ
bien avant l’expérience d’un gain significatif.
L’affichage doit permettre un bilan
complet du résultat des parties.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 144
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 145
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
5
Taux de récompense
(ou taux de renforcement
partiel)
Situation au Québec
Impacts
Le taux de récompense des
parties est habituellement
inférieur à 20%.
Les dommages importants ne surviennent
pas lorsque le jeu est uniquement motivé
par une résistance à l’extinction.
Cependant, lorsque la personne
mise sur plus d’une ligne à la fois,
l’appareil peut annoncer des
gains beaucoup plus
fréquemment car les résultats ne
sont pas annoncés partie par
partie, mais à chaque set
(pression du bouton Jouer ). Ce
taux peut alors atteindre plus de
80%.
Les dommages surviennent surtout lorsqu’il
se produit un gain significatif et que la
personne développe conséquemment une
illusion de contrôle.
Toutefois, la probabilité d’expérimenter un
gain significatif augmente en fonction de la
résistance à l’extinction.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
En augmentant le nombre des
combinaisons donnant droit à des lots de
peu de valeur, il est possible
d’augmenter le plaisir de jouer car les
récompenses deviennent plus
fréquentes.
Si le taux de remise n’est pas augmenté,
et que les montants accordés pour les
lots importants ne sont pas diminués, ce
changement diminuerait les problèmes
de jeu en rendant plus rares les
occasions d’obtenir un gain significatif.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 145
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 146
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
6
Juxtaposition de jeux de
pur hasard à des jeux de
hasard et d’adresse
Situation au Québec
Impacts
Les jeux de lignes et de keno sont
des jeux de purs hasard.
En jouant aux jeux de cartes, les joueurs
peuvent développer, avec raison,
l’impression de pouvoir s’améliorer. Lorsque
ceux-ci transfèrent cette impression aux
jeux de ligne, cette impression devient une
illusion de contrôle.
Aux jeux de cartes (poker et
blackjack), les choix ont une
incidence sur les résultats, donc
sur les pertes ou les gains.
Sur les appareils, ou dans les
environnements de jeu, aucun
signe ne démarque ces types de
jeu.
L’amélioration aux jeux de cartes laisse
entrevoir qu’elle pourrait augmenter jusqu’à
une situation gagnante. En fait,
l’amélioration ne peut que diminuer la
vitesse des pertes à long terme.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Pour chaque appareil, une mise en
garde doit informer les joueurs que les
possibilités d’influencer les résultats ne
sont pas les mêmes d’un jeu à l’autre.
Pour chaque jeu, une mise en garde doit
informer les joueurs des possibilités
réelles d’influencer les résultats des
parties.
Advenant le cas, la mise en garde doit
indiquer qu’il n’est jamais possible de
s’améliorer jusqu’à obtenir une
espérance positive de gain. Quoi qu’il
arrive, la situation de jeu sera toujours
perdante à long terme.
L’efficacité des mises en garde doit être
vérifiée empiriquement.
7
Jeu continu
Avec les loteries, les tirages sont
hebdomadaires ou quotidiens. Au
bingo ou aux courses, plusieurs
minutes s’écoulent avant que les
résultats ne soient connus. Avec
les AÉJ, une partie ne dure que
quelques secondes.
Lorsque l’intervalle entre les tirages est
moins de quelques minutes, les joueurs
n’ont pas l’occasion de vaquer à d’autres
activités entre deux tirages. En
conséquence, le contenu de la mémoire de
travail (working memory) n’est pas altéré
entre deux tirages.
Les nouveaux ALV proposent de casser
le rythme de la session de jeu par des
pauses programmées selon les
spécifications initiales des joueurs quant
à la durée souhaitée de la session de
jeu, ou l’obtention d’un gros gain.
Le processus est encore mal connu.
Néanmoins, le jeu continu est la modalité la
plus étroitement associée aux dommages
subis par les joueurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 146
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 147
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
8
Jeu rapide
Situation au Québec
Une partie se déroule en à peine
quelques secondes. En moyenne,
les joueurs semblent préférer un
intervalle d’environ 7,5 secondes.
Dans les jeux continus, une
nouvelle partie peut être débutée
avant que le souvenir de la partie
précédente ne se soit estompée
de la mémoire à court terme.
L’impression de récompense
s’étend alors au-delà des parties
subséquentes plausiblement
perdantes. Il peut s’ensuivre une
impression erronée du taux de
récompense.
Impacts
Plus les tirages sont fréquents, plus les
joueurs perdent leur argent rapidement. Si
les joueurs misent des sommes qu’ils ne
peuvent se permettre de perdre, les
dommages sont alors proportionnels.
En l’absence de compteurs à l’écran,
l’information normative n’a pas le temps
d’être intégrée à la structure décisionnelle.
Ce sont des processus heuristiques,
associatifs ou automatiques qui agissent en
remplacement. Ces processus sont
favorables au développement des illusions
de contrôle.
Une vitesse rapide de jeu favorise aussi le
développement d’automatismes qui
pourraient être responsables d’importantes
difficultés à se défaire d’une dépendance
malgré que l’illusion de contrôle ait été
complètement brisée par le traitement
cognitif préconisé par le MSSS.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
La seule manière de déterminer la
vitesse idéale de jeu est d’offrir en
laboratoire des appareils dont la vitesse
de jeu peut être ajustée par les joueurs.
En comparant les ajustements réalisés
par les joueurs sans problème de jeu,
par rapport à ceux qui éprouvent des
problèmes de jeu, il serait possible de
déterminer la vitesse la plus sécuritaire.
Cette vitesse ne peut pas être ajustée a
priori. La désactivation du bouton jouer
n’est pas un moyen réaliste de réduire la
vitesse de jeu.
Les options d’affichage doivent aussi
permettre au joueur de consulter des
graphiques lui permettant de faire une
rétrospective des variations du solde de
la banque, et de visualiser l’évolution de
sa vitesse de dépense.
Afin d’éviter le développement
d’automatismes, la vitesse de jeu doit
être irrégulière, imprédictible, d’une
partie à l’autre.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 147
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 148
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
9
Informations non
pertinentes
Situation au Québec
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
L’interface des AÉJ regorge
d’éléments inutiles, tels que des
sons, des clignotants, l’impression
donnée de mouvements
mécaniques, et la vue de pièces
de tirage sur lesquelles aucune
mise n’est faite.
Même si le joueur ne mise pas sur toutes
les lignes, il en voit le résultat. L’observation
d’une combinaison payante sur une ligne
non misée a une valeur cognitive identique
à celle d’un gain encaissé. Cette
observation contribue à l’impression d’avoir
vécu un gain significatif.
L’interface devrait être dépouillée de tout
élément non pertinent à la mise. Ainsi,
un joueur ne misant que sur une seule
ligne, ne devrait pas devoir constater les
résultats obtenus sur les autres lignes.
Plus l’interface est inutilement complexe,
plus il existe subséquemment des éléments
d’ancrage pour les illusions de contrôle.
10
Limitation du lot maximal
(ou limitation du gros lot)
Par réglementation, le lot maximal
pour une mise de 1 crédit est de
$ 500 dollars. Pourtant, la
réglementation permet $ 1000.
Plus le lot maximal est élevé, plus il existe
un grand écart entre le taux de remise
théorique et le taux de remise effectif.
Lorsque perçu, cela génère de
l’insatisfaction chez les joueurs.
Par ailleurs, l’abaissement du lot maximal a
comme conséquence de rendre plus
fréquente l’obtention des petits lots, d’où
une résistance accrue à l’extinction. Cela
prolonge le temps pendant lequel la
personne accepte de jouer sans obtenir de
récompense. La probabilité du gain
significatif est augmentée.
Des gros lots de faible valeur permettent un
agencement pathogène des paramètres de
jeu.
À tout le moins, après qu’il ait été mis en
garde des dangers, le joueur devrait
avoir le choix entre un affichage minimal
ou des affichages plus complexes.
La loterie vidéo doit être une véritable
loterie. Il faut revenir au concept
fondamental de la loterie, c’est-à-dire
acheter à un coût non dommageable la
possibilité rarissime de gagner un lot
exorbitant. C’est ce que le joueur
récréatif désire.
Le joueur pathologique cherche plutôt à
répéter fréquemment un gain plus
modeste. Pour lutter contre le jeu
pathologique, il faut réduire l’espérance
d’obtenir des gains appréciables dont la
portée apparaît réaliste en quelques
milliers de parties.
Ceci doit être réalisé sans brancher les
appareils en îlots.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 148
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 149
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
11
Dénomination
Situation au Québec
Une partie équivaut à miser un
crédit.
(ou valeur du crédit)
Actuellement, les crédits sur ALV
valent 5¢ ou 25¢. Ailleurs dans le
monde, des appareils à 1¢ ou 2¢
sont aussi très populaires.
Au casino, le crédit des MAS peut
atteindre $ 500.
Impacts
En moyenne, le gain significatif ne survient
qu’après quelques dizaines de milliers de
parties. Plus on joue, plus ce gain devient
probable.
Pour un budget donné, moins le crédit vaut
cher, plus les personnes peuvent jouer un
grand nombre de parties. Une faible valeur
du crédit rend alors plus probable
l’avènement de cet important facteur du jeu
pathologique.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
L’offre de jeu à faible dénomination n’est
surtout pas un moyen d’être respectueux
envers les personnes pauvres.
Lorsque le budget de jeu est faible, les
faibles dénominations augmentent la
dangerosité des AÉJ. Dans la mesure où
des gens peu fortunés ont accès aux
AÉJ, les jeux à faible dénomination
devraient disparaître.
Le gain significatif a comme conséquence
possible la concrétisation d’une illusion de
contrôle. Lorsque c’est le cas, en attendant
de « découvrir le truc », les jeux à faible
dénomination augmentent l’espoir de
diminuer le coût de la période d’exploration
du mécanisme de tirage.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 149
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 150
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
12
Jeu multicrédits
Situation au Québec
Impacts
Il est possible de miser plus qu’un
crédit par ligne. On joue alors
plusieurs parties simultanément
quoi qu’il n’y a qu’un résultat
commun pour toutes ces parties.
Le jeu multicrédits augmente la taille perçue
des lots, et delà la motivation à jouer.
Le lot maximal de $ 500 est défini
en fonction d’une mise de 1
crédit. Si trois crédits ont été
misés, le lot obtenu sera de
$ 1500.
En contrepartie, parce que le budget de jeu
s’épuise en observant moins de résultats
différents, le jeu multicrédits réduit la
probabilité d’observer une séquence de
gains constituant un gain significatif.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Permettre, à chaque jeu, de miser plus
d’un crédit par ligne sans être obligé de
miser préalablement sur toutes les
autres lignes.
Certains jeux obligent les joueurs
à miser sur toutes les lignes avant
de pouvoir miser un crédit
additionnel sur la même ligne.
13
Jeu multilignes
Une partie équivaut à miser 1
crédit sur une ligne. Avant de
presser le bouton Jouer, le joueur
peut miser sur plusieurs lignes,
jouant alors plusieurs parties
simultanément.
Contrairement au jeu multicrédits, le jeu
multilignes diversifie les résultats observés
par le joueur. Ceci augmente la probabilité
d’observation d’un gain significatif.
Le jeu multilignes accélère la vitesse au jeu
sans réduire le nombre de parties jouées.
Cela maintient la probabilité d’observer un
gain significatif tout en accélérant son
avènement dans le temps.
Réduire les options de jeu multilignes est
un moyen efficace pour retarder
l’avènement du gain significatif. De plus,
cela permet de diminuer la vitesse des
dépenses.
Entre-temps, la personne a davantage
de temps pour mieux interpréter son
expérience de jeu.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 150
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 151
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
14
Mise maximale
Situation au Québec
Impacts
Sur les ALV, quelle que soient les
possibilités multilignes et
multicrédits, la mise maximale ne
peut pas excéder 2,50 dollars.
La mise maximale a comme conséquence
d’étirer le budget de jeu dans un nombre
plus ou moins grand de parties. S’il n’y avait
pas de mise maximale, le joueur pourrait
tout perdre en un seul coup. Avec une mise
maximale basse, le joueur doit
nécessairement jouer plus de parties pour
épuiser son budget. Il se développe une
plus grande résistance à l’extinction et il y a
une plus grande probabilité que le joueur ait
un budget suffisant pour se rendre au gain
significatif.
La limitation de la mise maximale a comme
conséquence de minimiser le jeu
multicrédits au profit du jeu multilignes.
Cette situation diversifie davantage le
répertoire des résultats observés, d’où une
probabilité accrue de croire en un gain
significatif possible.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Au casino, où les mises peuvent
atteindre $ 500 le crédit, les MAS
causent moins de dommages que les
ALV.
Sur les ALV, au lieu de limiter la mise
maximale, il serait plus opportun
d’imposer une mise minimale. Il importe
de briser le cycle qui consiste à estimer
répétitivement qu’il y a un coût
insignifiant à faire une nouvelle tentative
de régler miraculeusement une dette de
jeu déjà énorme. Ceci n’inciterait pas
davantage le joueur désespéré à miser
des montants énormes puisqu’il a déjà
cette possibilité sur les MAS au casino.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 151
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 152
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
15
Absence d’information sur
les probabilités
d’obtention des lots
Situation au Québec
Les tables de lots indiquent la
nature des combinaisons
gagnantes ainsi que la taille des
lots qui sont payés. Il n’y a
cependant jamais mention de la
probabilité d’obtenir chacun des
lots.
Impacts
Cette information manquante empêche
d’évaluer préalablement l’espérance de
gain. Pour le savoir, il faut jouer des
dizaines de milliers de parties, et en faire
ensuite une estimation empirique. Cette
tâche cognitive prolonge le délai avant que
la résistance à l’extinction ne soit
nécessaire pour maintenir le joueur en jeu.
Sans cette information, l’expérience de jeu
ne peut pas être évaluée en fonction de la
pensée normative. Le joueur est contraint à
utiliser des processus heuristiques.
L’activation de ces derniers est le niveau de
pensée le plus favorable aux illusions de
contrôle.
16
Absence d’information sur
la composition des
rouleaux ou des jeux de
cartes
Aux jeux de ligne, on voit
différents symboles dont on
ignore la fréquence réelle. On
ignore aussi si tous les rouleaux
sont identiques. Il faut jouer pour
l’estimer.
Au poker ou au blackjack, on ne
sait pas si ce sont des jeux de 52
ou 104 cartes ou plus, ni si ces
jeux contiennent toutes les cartes.
Le temps que le joueur met à se construire
une représentation des rouleaux ou des
jeux de cartes retarde le moment où la
résistance à l’extinction est le seul facteur
qui maintien le joueur en jeu.
Des erreurs d’estimation peuvent générer
une espérance de gain artificiellement
accrue.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Il doit être obligatoire d’afficher les
probabilité d’occurrence de tous les lots
dans tous les jeux.
Aux jeux de lignes, s’il existe des
combinaisons pour lesquelles il est
impossible de calculer la probabilité, les
tables de lots doivent être modifiées pour
les éliminer.
Aux jeux de carte, la probabilité doit être
spécifiée en fonction du jeu optimal, et il
doit être mentionné que peu de joueurs y
parviennent vraiment.
Avant la partie, la composition des
rouleaux ainsi que des jeux de cartes
doit pouvoir être examinée par les
joueurs. Avec les interfaces
électroniques, cela est facile à réaliser. Il
n’est pas nécessaire d’ouvrir le boîtier. Il
n’y a aucune possibilité de fraude.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 152
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 153
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
17
Absence d’information sur
le mécanisme de tirage
Situation au Québec
Des événements se déroulent à
l’écran comme si leur interaction
déterminait le résultat. En fait,
celui-ci est déterminé
indépendamment par une puce
électronique.
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Dans tout ce qui bouge à l’écran, il n’y a
rien qui détermine le résultat des parties.
Ces informations superflues constituent des
éléments d’ancrage des illusions de
contrôle.
Les routines des générateurs de
nombres pseudo-aléatoires (GNPA) sont
protégées par des brevets. Toutefois, il
serait bénéfique d’expliquer aux joueurs
comment ces GNPA opèrent pour
déterminer les résultats.
En aucun temps, ces opérations ne sont
influencées par ce que le joueur voit à
l’écran ou par les gestes antérieurement
commis par le joueur, notamment une
variation des configuration ou montant
des mises. Ceci doit être compris.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 153
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 154
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
18
19
Occurrence des quasisuccès
Banque maximale du
joueur
(ou budget maximal de
jeu)
(ou capacité du solde)
Situation au Québec
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Le quasi-succès est un résultat
dont la combinaison est, à un
détail près, celle d’un donnant
droit à un lot. Ceux-ci sont
inévitables quoique la
composition des rouleaux peut
multiplier artificiellement leur
fréquence, ou bien la diminuer.
Des quasi-succès fréquents conduisent à
une exagération de l’impression du taux de
récompense. Il s’agit d’un mécanisme
supplémentaire qui vient en appui aux
processus générant une résistance à
l’extinction.
Pour atténuer les effets des quasisuccès, il est préférable d’utiliser des
jeux à cinq rouleaux par ligne, plutôt que
trois.
Actuellement, le joueur ne peut
pas insérer plus de $60 avant de
commencer à jouer. Avant 20022003, c’était $100.
Plusieurs joueurs pathologiques rapportent
qu’une fois l’argent inséré dans l’appareil,
celui-ci est oublié. Comme il faut sortir plus
fréquemment de l’argent de sa poche, la
diminution du budget maximal favorise la
prise de conscience de la dépense au jeu.
269
Selon une étude du comportement
des joueurs sur ALV en NouvelleÉcosse, les joueurs occasionnels
dépensent en moyenne $24 par session
de jeu, et les joueurs réguliers sans
problèmes de jeu dépensent $35. La
dépense des joueurs excessifs atteint
$97 par session. La banque maximale
pourrait sans doute être encore baissée.
Anciennement, sur les MAS, il
fallait insérer des pièces à chaque
partie.
Le taux d’encaissement habituel
est d’environ 75%. Cela signifie
que les joueurs terminent en
moyenne leur session de jeu
après avoir perdu le quart de la
banque initiale.
269
Impacts
Un maximum élevé contribue à faire oublier
la perte financière jusqu’à l’encaissement
du solde quand il y en a un.
Il est aussi préférable d’utiliser des
rouleaux qui sont tous identiques.
Les spécialistes de la santé publique ne
peuvent pas préciser la limite optimale
sans avoir accès aux enregistrements
des sessions de jeu; ce qu’ils n’ont pas
actuellement.
Voir à la page D-23 dans : Focal research. (1998). Nova Scotia video lottery players’ study. Halifax, Nova Scotia: Department of health.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 154
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 155
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
20
Maximum de la banque
de crédit en cours de jeu
Situation au Québec
En situation de jeu, un
encaissement automatique se
produit lorsque la personne
obtient un lot égal ou supérieur à
$500.
Impacts
Avec les MAS au casino, les lots tombent
en pièces sonnantes dans les mains des
joueurs dès qu’ils sont acquis. Sur les ALV,
les lots intermédiaires sont conservés dans
l’appareil. Il est alors plus probable que cet
argent soit rejoué et perdu que si cet argent
retournait dans la poche du joueur.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Il n’est pas clair si l’encaissement
automatique se produit lorsque la
banque dépasse $500 malgré que le lot
obtenu soit inférieur à $500.
L’encaissement automatique pourrait se
faire à des valeurs inférieures.
Les spécialistes de la santé publique ne
peuvent pas préciser la limite optimale
sans avoir accès aux enregistrements
des sessions de jeu; ce qu’ils n’ont pas
actuellement.
21
Paiement par coupon
Les ALV ne retournent jamais
d’argent aux joueurs. Les MAS au
casino adoptent aussi ce mode de
paiement.
Tout aspect qui retarde le moment où le lot
se retrouve en argent dans la poche des
joueurs augmente la probabilité que ce
montant soit rejoué et perdu.
Pour obtenir le paiement d’un
solde, le joueur doit demander
l’impression d’un coupon de
remboursement et se présenter à
une caisse.
Lorsqu’il ne reste que quelques crédits,
c’est plus compliqué ou gênant de réclamer
le solde à un cassier. Ces miettes sont alors
rejouées jusqu’à la perte. Cela ajoute à
l’expérience de jeu jusqu’au gain significatif.
Pour pallier au fait que l’argent devient
virtuel, en tout temps, l’affiche doit
indiquer le total des montants insérés et
celui des montants misés. Cet affichage
devrait aussi indiquer la vitesse des
dépenses, notamment le montant horaire
dépensé au jeu.
Un indicateur doit pouvoir signaler au
joueur quand sa vitesse de dépense
augmente et quand elle diminue.
Le remboursement des soldes inférieurs
à $5 devrait pouvoir être fait directement
à partir de l’appareil.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 155
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 156
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
22
Message de modération
Situation au Québec
Entre 1994 et 2002, les ALV
affichaient le message « Jouez
avec modération pour que le jeu
demeure un jeu ».
Impacts
Toute incitation proposant la modération
comme un moyen de prévenir, contrôler,
atténuer ou combattre une perte de contrôle
est plausiblement iatrogène. Des
dommages majeurs peuvent survenir.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Éviter à tout prix de proposer aux
joueurs qu’il est possible de gérer une
dépendance pathologique au jeu
simplement en faisant des efforts
personnels de modération.
Les effets iatrogènes des messages
doivent impérativement être vérifiés
empiriquement.
23
Références à une ligne
téléphonique
Depuis 2002, les messages sont
du type « Avant qu’il ne soit trop
tard … » et informent de
l’existence d’un numéro de
téléphone 1-866-SOS-JEUX.
Les textes des nouveaux messages sont
imprécis : avant qu’il ne soit trop tard pour
quoi? De plus, le numéro de téléphone de la
Fondation Mise sur toi sert à quoi? À faire
un don d’organe? S’agit-il d’une publicité,
d’un service pour faire des mises au
téléphone ou d’une offre d’aide pour les
joueurs en difficulté? Cela n’est pas évident.
L’offre d’aide est trop peu invitante. Le
joueur en difficulté ne sait pas qui va
répondre, quelle est sa formation, quels
sont les solutions disponibles, ni pour quels
motifs peut-on appeler.
Les messages ne doivent pas
uniquement survenir lorsqu’il n’y a
personne pour jouer.
Les AÉJ sont des outils de jeu
potentiellement très dangereux. Les
messages doivent constituer des mises
en garde non iatrogènes qui sollicitent
l’attention, qui informent des dangers
ainsi que des moyens concrets pour s’en
prémunir, qui permettent d’évaluer
l’ampleur des dommages possibles et
qui orientent les personnes en difficulté
vers des ressources externes pouvant
les aider.
Les mises en garde doivent
impérativement contrer un optimisme
irréaliste à l’égard du danger de
développer une dépendance
pathologique à l’égard du jeu sur ALV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 156
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 157
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
24
Bouton d’arrêt
Situation au Québec
Impacts
Un mécanisme permettant
d’arrêter prématurément le
déroulement de la partie afin que
le résultat s’affiche
immédiatement. Ce mécanisme
est actuellement désactivé sur les
ALV.
L’utilisation du bouton d’arrêt permettait
d’augmenter la vitesse de jeu, et
conséquemment la vitesse de la dépense
au jeu.
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
Il n’est pas souhaitable de restaurer
cette fonction.
De plus, la possibilité de presser le bouton à
différents moments était une occasion de
concrétiser une illusion de contrôle.
25
Les sons d’appel
Les ALV émettent des sons
d’appel. Ce sont essentiellement
des tonalités. Les ALV ne parlent
pas.
Les sons d’appel visent à attirer l’attention
en ce qui concerne la présence d’ALV.
Les sons ne doivent pas pouvoir être
entendus en dehors de l’aire de jeu.
26
Les sons de récompense
L’obtention des lots est signalé
par des sons assimilables aux
sons d’appel.
S’il y a conditionnement classique, ces sons
rappellent à la mémoire des événements de
jeu antérieurs. Les sons d’appel agissent
alors en sons de rappel de récompense.
Les joueurs doivent avoir la possibilité de
rendre l’AÉJ muet.
Quand un bruit de fond est composé de
sons extrêmement réguliers, ceux-ci
sollicitent l’activation des automatismes en
particulier la pression du bouton Jouer . Il
faut conserver à l’esprit qu’une session de
jeu est souvent composée de milliers de
parties.
Les sons devraient être variés et non
associés à des événements en
particulier. Sinon, il faut éviter que les
sons d’appel et de récompense soient
assimilables.
Pour éviter de cadencer des
automatismes, les intervalles entre les
sons doivent être irréguliers.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 157
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 158
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
Situation au Québec
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
27
Les sons de mécanisme
Dans les AÉJ, ce qui est perçu à
l’écran est complètement virtuel. Il
n’y a pas de pièces mécaniques
sous-jacentes. Les sons
suggèrent néanmoins l’existence
d’une telle mécanique.
L’impression d’une mécanique sous-jacente
est un puissant facteur d’ancrage des
illusions de contrôle.
L’interface doit éviter toute incitation à
une croyance en un procédé de tirage
impliquant l’activation de pièces
mécaniques.
28
Horloge à l’écran
Depuis 2002-2003, les écrans des
ALV affichent une horloge.
Cette horloge peut aider les joueurs à ne
pas perdre la notion du temps.
Un signal visuel est en concurrence avec
les éléments du jeu. Un signal sonore
est plutôt traité en parallèle aux stimuli
visuels.
Les salons de jeu devraient offrir de
belles horloges grand-père qui sonnent
aux heures et aux demi-heures.
29
Dispositif requérant la
durée de jeu souhaitée
Depuis 2002, avant de
commencer à jouer, le joueur doit
préalablement préciser la durée
de jeu qu’il désire.
Ce dispositif est utile à empêcher la perte
de la notion du temps.
Au choix initial du joueur, un dispositif
empêchant de remettre de l’argent dans
l’appareil sans un encaissement
obligatoire du solde serait utile.
Un dispositif requérant la limite
souhaitée de la vitesse de la dépense au
jeu serait encore plus utile.
30
Écran lumineux et coloré
La forte luminosité des écrans
des ALV contraste beaucoup
avec la luminosité atténuée des
sites.
Ce contraste fait sortir le joueur de son
monde et le capte complètement dans
l’expérience de jeu. Cela favorise l’évasion,
la dissociation ainsi qu’une sous-estimation
de la durée de jeu. Ces facteurs constituent
des problèmes pour les joueurs
pathologiques.
Dans les salons de jeu, les joueurs
devront avoir la possibilité de jouer dans
des environnements variés, soit à
luminosité réduite ou près de fenêtres
donnant un large accès à l’extérieur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 158
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 159
Tableau 29
Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu pathologique
Paramètre
Situation au Québec
Impacts
Commentaires et recommandations pour
réduire les problèmes de jeu
31
Couleur de la console
La console des anciens ALV
n’était pas obligatoirement noire.
Maintenant, c’est le cas.
Aucun clinicien n’a jamais rapporté que
cette couleur ait pu jouer un rôle
quelconque dans la genèse d’une
dépendance pathologique à l’égard du jeu.
La couleur du boîtier est sans intérêt.
32
Absence de croupier
L’ALV est complètement
automatisé. Il n’y a qu’un joueur
en face d’une machine. Au plus, il
y a à un comptoir pouvant être
éloigné un cassier occupé à servir
d’autres clients.
Le rôle du croupier n’est pas de prévenir le
jeu pathologique. Il peut néanmoins rendre
témoignage aux dirigeants ou à la sécurité
des problèmes des joueurs.
La présence d’un personnel mieux formé
et d’un service de sécurité peut aider les
salons de jeu à proposer un
environnement de jeu plus sécuritaire
que les bars. Tout dépend des
possibilités d’intervention de ces
personnes.
Sur un ALV, à moins d’un effort exprès pour
le faire, il n’y a personne pour documenter
les problèmes de jeu.
33
Absence d’adversaires
humains
Un facteur important d’atténuation
de la dépense au jeu est la
crainte de ne pas être aussi
habile que ses partenaires de jeu.
Il y a aussi la crainte d’apparaître
peu compétent.
Avec les ALV, il n’y a pas de compétition ni
de témoin. Ce facteur de protection est
éliminé.
Idéalement, les établissements de jeu
devraient offrir uniquement des jeux à
espérance nulle de gain impliquant des
partenaires humains. Le profit devrait
découler d’un droit d’entrée ou de
services plutôt qu’une cote sur les paris.
34
Vitesse de jeu adaptée au
désir du joueur
En présence de croupier ou
partenaires de jeu, la vitesse est
aussi déterminée par le désir des
autres joueurs. Ceci peut
constituer un irritant qui diminue
le plaisir de jouer.
Avec un appareil automatisé, tout se passe
exactement à la vitesse désirée. Des
pauses peuvent être prises au besoin. Des
périodes de jeu intense peuvent être
commandées à volonté. Cette
caractéristique permet d’éliminer un irritant
au plaisir.
La vitesse de jeu doit être limitée.
Les spécialistes de la santé publique ne
peuvent pas préciser la limite optimale
sans avoir accès aux enregistrements
des sessions de jeu; ce qu’ils n’ont pas
actuellement.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 159
Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages - 160
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 160
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 161
Chapitre 6
Les mesures destinées à protéger les utilisateurs
contre les dangers du jeu sur AÉJ
L’analyse scientifique de la validité des mesures de protection270, découlant du jeu sur
les AÉJ, est une tâche particulièrement complexe et décevante en raison de l’état
lamentable de la documentation à cet égard.
Partout au monde, le constat qui se dégage des études au sujet des nouveaux modèles
d’AÉJ, et de l’environnement de jeu responsable dans lequel on les insère, suggère une
inaptitude globale de ces changements à avoir un impact autre que négligeable.
Lorsque des résultats statistiquement significatifs sont présentés, la taille des effets n’est
pratiquement jamais quantifiée. Dans ces cas, l’analyse des graphiques ou des
commentaires des chercheurs ne permet jamais d’entrevoir des retombées importantes
pour la protection des joueurs ou la santé publique. Raisonnablement, aucune étude
empirique ne permet de prévoir que le regroupement des AÉJ dans des salons de jeux
puisse avoir un impact bénéfique important sur la protection des joueurs.
Cet état de chose ne signifie toutefois pas qu’aucune modification ne pourrait diminuer
la dangerosité des AÉJ, car de nombreux paramètres de leur fonctionnement, qui ont un
impact plus direct sur les causes de la dépendance à l’égard des AÉJ271, sont rarement
l’objet des études272.
Dans l’état actuel des choses, incluant celui des futurs salons de jeux, les AÉJ doivent
être considérés comme des produits dangereux qui risquent de causer des problèmes
de santé majeurs chez les utilisateurs. L’inefficacité actuelle à empêcher les dommages,
associée à une capacité encore trop limitée des traitements à restaurer une condition
270
C’est-à-dire l’ensemble des mesures destinées à prévenir, empêcher, atténuer, ou réparer les
méfaits du jeu qui sont conséquents à l’expérience de jeu sur AÉJ.
271
Par exemple, la probabilité d’un gain significatif, principal élément déclencheur de la
pathologie, varie en fonction du taux de remise, du taux de récompense, de la valeur des lots
importants, des possibilités de jeu multilignes et multicrédits, de la mise maximale ainsi que de la
vitesse de jeu. Parmi les études gouvernementales, ces aspects ne sont jamais l’objet d’études
crédibles. L’industrie du jeu publie exceptionnellement de tels résultats. Par ailleurs, l’information
donnée aux joueurs manque de spécificité. On y discute du jeu en général, plutôt que des
problèmes de jeu associés directement aux AÉJ. Cette information renseigne mal au sujet de
l’optimisme irréaliste à l’égard du danger de développer une dépendance pathologique à l’égard
des jeux sur AÉJ. On n’y trouve aucun renseignement direct concernant la dynamique
psychologique associée au gain significatif et à l’illusion de contrôle subséquente. À lire cette
documentation, on perçoit mal comment le besoin de se refaire conduit à une spirale de
l’endettement, alors que les spécialistes du jeu comprennent parfaitement bien ce piège. Il
n’existe pas assez d’emphase pour contrer l’espoir, chez le joueur excessif, que le jeu,
continuellement générateur de perte, ne peut pas être un moyen de rembourser de l’argent.
272
Du moins, parmi les études qui ont été publiées. Des modifications pouvant avoir des impacts
plus directs sur les processus pathogènes sont proposées à la section 1.5 – « Les paramètres
des AÉJ ayant une incidence sur les processus impliqués dans la dépendance pathologique »,
dans l’Annexe 3 – La dangerosité des appareils électroniques de jeu.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 161
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 162
saine chez de nombreux joueurs, obligent les établissements de jeu à prévenir les
utilisateurs contre les dangers et dommages découlant de l’utilisation des AÉJ, à exercer
un dépistage proactif des joueurs qui jouent excessivement, à renseigner les joueurs
quant aux moyens de se prémunir contre les dommages inhérents au jeu sur AÉJ, et
particulièrement dans le cas des gouvernements, à offrir gratuitement un accès
raisonnable à des ressources cliniques, communautaires ou juridiques aptes à régler les
problèmes de jeu.
En priorité, les mesures doivent assurer que les paramètres de fonctionnement des AÉJ,
et leur environnement, sont sécuritaires en ce qui concerne la santé mentale des
joueurs. La promotion de la santé doit être proactive. Les joueurs doivent être avisés
quant aux pratiques de jeu qui les maintiennent en santé au lieu de les inciter, trop
discrètement ou trop tardivement, à un auto-dépistage des problèmes de jeu.
6.1 L’irréalisme du concept de Jeu responsable
En répertoriant les études récentes provenant de plusieurs pays, on constate que cellesci ont davantage eu comme conséquences d’alléger le fardeau des organismes en ce
qui concerne la protection de leur clientèle, ou de légitimer une augmentation de l’offre
de jeu, plutôt que d’offrir un environnement de jeu sécuritaire.
En particulier depuis l’an 2000, les études ont principalement été consacrées à la
promotion du concept de jeu responsable, c’est-à-dire un encadrement surtout défini et
financé par les établissements de jeu. Concrètement, par ce concept, les établissements
réduisent leur admission de responsabilité à l’égard des problèmes de jeu en transférant
aux joueurs l’impression qu’il leur appartient d’assumer la plupart des responsabilités.
Ceci est irréaliste puisque des responsabilités exigeantes doivent alors être assumées,
à titre individuel, nonobstant le fait qu’elles impliquent des aptitudes et des
connaissances pouvant être hors de portée pour des personnes qui ne sont pas des
expertes du jeu, à l’occasion des personnes trop peu scolarisées ou démunies
intellectuellement. Ces responsabilités sont :
•
Par-delà la confiance que les citoyens éprouvent à l’égard de leurs
gouvernements, la personne doit avoir compris que l’étatisation, la création
d’organismes de contrôle, ou l’adoption de code d’éthique ou de
commercialisation, ne sont pas des garanties selon quoi les établissements ont
pris, ou sont capables de prendre, toutes les précautions essentielles pour
s’assurer que les environnements de jeu sont sécuritaires.
•
Un optimisme irréaliste, quant au risque de développer une pathologie, est une
prédisposition naturelle de l’esprit humain273. N’étant pas mis en garde, et n’étant
273
(a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality
and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1982a). Unrealistic optimism about
susceptibility to health problem. Journal of behavioral medicine, 5(4), 441-460. (c) Weinstein, N.
D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a
community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (d) Nezlek, J. B., &
Zebrowski, B. D. (2001). Implications of the dimensionality of unrealistic optimism for the study of
perceived health risks. Journal of social and clinical psychology, 20(4), 521-537.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 162
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 163
pas un expert de la psychologie, le joueur a la responsabilité personnelle de
découvrir l’influence insidieuse que peut exercer un optimisme irréaliste à l’égard
du danger de développer une dépendance pathologie en tant que conséquence
de l’utilisation des AÉJ.
274
•
Sans être explicitement mise en garde des dangers spécifiques à la situation de
jeu sur AÉJ, la personne doit avoir la préscience que ces dangers existent.
L’élément déclencheur274 du jeu pathologique survient plus souvent durant la
phase gagnante275, bien avant que la personne ne puisse réaliser qu’elle s’est
engagée dans des croyances et comportements dommageables. Compte tenu
que les dommages se concrétisent rarement avant que le joueur n’en soit rendu
à dépenser de l’argent qu’il ne peut pas perdre276, le développement insidieux de
la pathologie s’incruste d’autant plus que les ressources financières initiales, ou
le gain significatif, sont élevés.
•
Analyser la situation de jeu sans connaître précisément les valeurs et
probabilités d’obtention de chacun des lots ne permet pas de prendre une
décision rationnelle quant aux risques financiers qu’implique le jeu sur AÉJ277.
Les établissements de jeu refusant catégoriquement de dévoiler les probabilités
des combinaisons payantes, il revient au joueur de les trouver, à défaut de quoi il
est contraint à ne pas jouer ou à limiter dangereusement278 son raisonnement à
des processus cognitifs qui sont inefficaces à le protéger contre le
développement d’une dépendance pathologique à l’égard du jeu sur AÉJ. S’il
n’est pas un expert de la psychologie du jeu, le joueur ne peut pas comprendre
la portée réelle du danger de se confronter au hasard en limitant son
raisonnement aux processus heuristiques279.
Il s’agit en particulier de l’obtention d’un gain significatif tôt durant l’expérience de jeu sur AÉJ.
275
Cette observation n’est pas une découverte récente. (a) Voir à la page 115 dans : Custer, R.
L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans P. A. Carone et al. (éditeurs), Addictive
disorders update. New York, NY : Human sciences press. (b) Voir aux pages 99 à 105 dans :
Custer, R., & Milt, H. (1985). When luck runs out. New York, NY : Facts on file publications. (c)
Voir la figure 1 dans : Dickerson, M. G. (1984). Compulsive gamblers. London, UK: Longman. (d)
Lesieur, H. R. (1984). The chase. Rochester, VT : Schenkman books, Inc.
276
La personne est alors particulièrement démunie financièrement pour entreprendre des
mesures correctrices.
277
Compte tenu que personne ne peut pas jouer des millions de parties avant de subir des
dommages majeurs, la publication du seul taux de remise est insuffisante car la décision doit
plutôt être fondée sur le taux de remise effectif qu’il est raisonnable d’anticiper lors d’une session
normale de jeu.
278
Un environnement de jeu sécuritaire consiste, d’abord et avant tout, à ne pas exiger du joueur
qu’il limite déraisonnablement sa capacité d’analyse. Il n’est pas raisonnable d’attribuer au joueur
la responsabilité de comprendre qu’aborder un jeu de hasard en ayant surtout recours à des
processus heuristiques conduit à une dérive de la conscience de la situation.
279
(a) Wagenaar, W.A. (1988). Paradoxes of gambling behaviour. London, UK: Lawrence
Erlbaum Associates. (b) Ladouceur, R., & Walker, M. (1996). A cognitive perspective on
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 163
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 164
•
Pour évaluer à quel point elle doit se sentir interpelée par l’information que
l’établissement de jeu lui communique, la personne doit réaliser que la
documentation au sujet des problèmes de jeu concerne le jeu en général, et non
le jeu sur AÉJ en particulier. Elle doit faire le tri entre les informations utiles et
celles qui pourraient fausser280 son interprétation de la situation.
•
N’étant pas informée par les établissements, si la personne réalise la plausibilité
de dangers inhérents au jeu sur AÉJ, elle a la responsabilité de trouver
l’information définissant ces dangers. Elle doit aussi identifier personnellement
les moyens de s’en prémunir.
•
Antérieurement à l’acquisition d’une expérience de jeu suffisante pour le faire, le
joueur a la responsabilité de définir les limites raisonnables de la fréquence, de
la durée et de la dépense au jeu. Sur les AÉJ, l’élément déclencheur281 de la
pathologie peut survenir bien avant que cette expérience ne soit acquise.
•
Bien qu’on l’invite à jouer pour se détendre et relaxer, le joueur a la
responsabilité d’être attentif aux événements282, survenant en situation de jeu,
qui sont associés aux processus pathogènes spécifiques à la situation de jeu sur
AÉJ. À moins d’être informé par l’établissement, ou être un expert du jeu, le
joueur ne peut pas raisonnablement faire un lien entre ces événements et les
processus pathogènes.
•
Ayant en main une brochure283 minimalement explicative, le joueur a la
responsabilité d’auto-dépister quand son comportement révèle des indices d’une
dépendance pathologique à l’égard du jeu sur AÉJ. Or, l’auto-dépistage peut être
gambling. In P. M. Salkovskis (Ed.), Trends in cognitive therapy (pp. 89-120). Oxford : Wiley. (c)
Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive
distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (d) Sunstein, C. R.
(2002, November). Hazardous heuristics. Chicago, IL: Chicago public law and legal theory
working paper, 33. (e) Delfabbro, P. (2004). The stubborn logic of regular gamblers: obstacles
and dilemmas in cognitive gambling research. Journal of gambling studies, 20(1), 1-21.
280
En particulier, en raison du risque d’instaurer un optimisme irréaliste, il est dangereux
d’affirmer aux joueurs que seulement 2% de la population éprouvent des problèmes de jeu, alors
qu’il y a 19% des joueurs annuels sur ALV qui éprouvent des problèmes de jeu. Voir à la section
1.2.4.1 – « La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur ALV », dans l’annexe 3 – La
dangerosité des appareils électroniques de jeu.
281
Il s’agit en particulier de l’obtention d’un gain significatif durant l’expérience de jeu sur AÉJ.
282
Outre le gain significatif, ce sont les quasi-succès, la vitesse des événements, l’intensité
accentuée des stimuli, les coïncidences associant des gains à des stimuli non pertinents tels que
les sons, une distorsion fortuite dans la fréquence d’occurrence de certains symboles, ainsi que
l’impression naturelle de l’existence d’un rythme dans la séquence des événements.
283
Il existe autant de brochures qu’il y a d’établissements de jeu qui les utilisent. Elles sont
cependant toutes similaires quant à leur stratégie d’intervention, c’est-à-dire la promotion du
concept de jeu responsable. En ce sens, elles négligent fondamentalement le concept
d’optimisme irréaliste à l’égard des risques de développer une pathologie.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 164
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 165
considérablement entravé, ou retardé de manière critique, par un optimisme
irréaliste à l’égard du danger de développer cette dépendance. La brochure
devrait d’abord surmonter cette difficulté; ce que, typiquement, elle ne fait pas.
De plus, l’auto-dépistage ne décèle les problèmes qu’une fois que ceux-ci sont
manifestes, que les dommages sont déjà débutés sinon avancés. À cette étape,
la personne a généralement perdu de l’argent qu’elle ne pouvait pas perdre. Il lui
est ainsi difficile de financer284 les services qui pourraient lui venir en aide.
•
Le joueur a la responsabilité d’identifier les moyens susceptibles de restaurer
son contrôle sur son comportement de jeu. Sans l’indication explicite qu’il s’agit
d’un service d’aide, le joueur a la responsabilité de comprendre que le numéro
de téléphone qu’on lui propose, 1-866-SOS-JEUX, n’est pas l’hameçon d’un
service de vente par téléphone285 pour qu’il achète des produits additionnels.
•
Le joueur a la responsabilité de mettre en application tous les moyens qu’il a
identifiés, à moins que des services ne soient une obligation légale de
l’établissement de jeu286.
•
Sans être explicitement informé d’une quelconque obligation légale des
établissements de jeu à fournir des services, le joueur a la responsabilité
d’exiger, voire de forcer, leur application par les établissements de jeu. À cette
étape, le joueur excessif n’a pas de moyens financiers disponibles pour le faire.
En contrepartie, les responsabilités des établissements de jeu à l’égard de leur clientèle
sont comparativement peu nombreuses. Actuellement, outre les responsabilités qui
incombent à n’importe commerce public, au Québec :
•
En raison d’une exception au Code criminel, le gouvernement doit être le maître
d’œuvre des activités de jeu.
•
L’établissement de jeu a la responsabilité d’interdire l’accès aux personnes de
moins de 18 ans.
284
L’aide gratuite offerte par l’état-croupier est un apport indéniable à la santé publique.
Toutefois, le double rôle de l’État peut inciter une personne à ne pas faire confiance, pour la
soigner, à un commerçant qui l’a exposé à un produit qui lui a causé des dommages importants.
Il est compréhensible que des personnes puissent exiger une aide indépendante. En ce sens,
l’offre d’un service public gratuit ne répond pas automatiquement à tous les besoins en
ressources cliniques.
285
Même l’expression « Jeu : aide et référence » peut être interprétée comme un service
téléphonique où on explique comment jouer sur les ALV, comment insérer de l’argent et choisir
un jeu. L’expression « Mise sur toi » est encore plus ambiguë.
286
Dans une gestion axée sur le concept de jeu responsable, les établissements de jeu
proposent que ce soit la responsabilité du joueur de s’auto-dépister et de réclamer le service
d’auto-exclusion. Les établissements offrent, par courtoisie et sans obligation légale de leur part,
des dépliants d’auto-dépistage et le service d’auto-exclusion.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 165
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 166
•
L’intégrité d’un jeu doit avoir été approuvée par la RACJ en fonction d’une
réglementation précisée par le gouvernement.
•
L’établissement de jeu doit interdire à tous de fumer à l’intérieur du bâtiment ou
aux environs.
Sans admission de responsabilité supplémentaire, il n’existe aucune obligation précise
pour les établissements d’appliquer et de faire le monitorage des autres mesures si le
mandataire, c’est-à-dire le gouvernement, n’impose pas ce devoir. Dès lors, les
gouvernements de plusieurs juridictions ont commencé à définir des codes de
commercialisation. Au Québec, ce code oblige, par exemple, certains établissements à
refuser de faire crédit aux joueurs, à consommer de l’alcool dans l’aire de jeu,
d’enfreindre un code vestimentaire. Il s’agit de responsabilités que les établissements
ont envers le maître d’œuvre des jeux, et non envers les joueurs.
À l’exception de ce transfert de responsabilité vers le joueur, le concept de jeu
responsable ne change pas grand-chose à la problématique de santé publique qui
existe déjà en ce qui concerne les AÉJ.
6.2 Les obstacles
L’incapacité de diminuer la dangerosité des AÉJ est causée par des obstacles qui
seraient surmontables si les scientifiques obtenaient les ressources et les conditions
dont ils ont besoin pour faire un travail crédible. Ces obstacles sont d’abord et avant tout
révélateurs de l’absence d’une politique globale de santé publique sur le jeu287. Il n’est
pas réaliste de croire qu’il est possible de créer des environnements de jeu sécuritaire
lorsqu’il faut continuellement réagir a posteriori à des projets devenus quasi immuables
parce que des dépenses importantes sont déjà engagées.
Ces obstacles sont :
•
L’absence quasi-totale de données empiriques valides concernant l’efficacité des
mesures
•
L’accès interdit aux paramètres des AÉJ ainsi qu’aux données enregistrées
•
L’absence d’analyse cognitive détaillée des conditions de vie des joueurs
•
L’adoption de mesures copiées du savoir-faire de d’autres organisations
•
L’absence de suivi des mesures implantées
287
Conscients que le concept de jeu responsable implique des engagements qui peuvent
contrevenir aux fondements des politiques sociales, qui sont différents dans chaque juridiction,
trois des principaux promoteurs du concept ont souligné l’importance, avant d’implanter quoi que
ce soit, d’entreprendre une vaste consultation publique, en vue d’énoncer une politique globale
sur le jeu, au cours de laquelle ces engagements auraient été pleinement compris et endossés.
Voir : Blaszczynski, A., Ladouceur, R., & Shaffer. H. J. (2004). A science-based framework for
responsible gambling: the Reno model. Journal of gambling studies, 20(3), 301-317.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 166
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 167
•
L’exigence de ne considérer que des mesures qui n’ont aucune incidence sur le
comportement des joueurs sans problème de jeu
•
La restriction à des mesures qui n’interviennent pas directement dans le
processus pathogène qui conduit aux dommages
6.2.1 L’absence quasi-totale de données empiriques valides concernant l’efficacité
des mesures
Malgré que cela ait été demandé, Loto-Québec n’a communiqué aux directions de santé
publique aucune étude susceptible d’appuyer les affirmations selon lesquelles les salons
de jeux contribueraient à une meilleure protection des joueurs ou de la population. Dans
la documentation promotionnelle, il n’y a qu’une mention concernant trois études288 qui
seraient à l’appui des changements proposés. En fait, il s’agit plutôt d’une seule étude,
en trois étapes, composée d’une revue de littérature, d’un groupe de discussion et d’une
session de jeu réalisée en laboratoire. Cette étude a été commandée par la RACJ et ne
semble pas en lien direct avec le projet de Loto-Québec.
En examinant ce qui a été fait ailleurs dans le monde, il n’a pas été davantage possible
de répertorier des études dont l’efficacité est démontrée de manière probante. Les
évaluations faites en situation réelle de jeu sont rares. Le plus souvent, des conclusions
sont tirées de sessions de jeu qui n’ont duré que quelques minutes en laboratoire. Il est
vraisemblable qu’aucun des participants n’a développé une dépendance pathologique
durant ces expérimentations.
6.2.1.1 Les études spéculent sur des effets dont on ne connaît pas la taille
Bien que plusieurs rapports de recherche rapportent des résultats statistiquement
significatifs, il est rare que les auteurs précisent la taille des effets. Malgré des valeurs p
infinitésimales, les effets pourraient être limités à des impacts négligeables sur le jeu
pathologique. Aucune mesure n’est crédible si elle se limite à réduire de seulement
quelques pour cent le score à un test de dépistage sans qu’il ne soit établi que cela se
répercute en un changement de la condition clinique.
De plus, la mise en commun de plusieurs mesures ne signifie pas automatiquement un
élargissement de la portée des mesures289. Mettre en commun 10 mesures influençant
2% de la variance n’équivaut pas à influencer 20% de la variance. Des mesures peuvent
avoir des effets non additifs ou, pire, antagonistes. De plus, il est réaliste de considérer
que plusieurs mesures pourraient agir sur les mêmes processus psychologiques, et delà
288
(a) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2003). Rapport d’étude sur le
format, la disposition et le mode de disponibilité des appareils de loterie vidéo. Québec,
Université Laval. (b) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of
the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on
gambling. International gambling studies, 5(2), 139-154.
289
Voir à la page 304 dans : Blaszczynski, A., Ladouceur, R., & Shaffer. H. J. (2004). A sciencebased framework for responsible gambling: the Reno model. Journal of gambling studies, 20(3),
301-317.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 167
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 168
elles bénéficieraient toujours aux mêmes personnes. Pour ces raisons, chaque mesure
doit d’abord être évaluée isolément. Ensuite, il est nécessaire d’étudier l’ensemble
complet des mesures.
6.2.1.2 La représentativité des échantillons est trop incertaine
Souvent, il n’est pas possible de vérifier si les personnes évaluées sont réellement des
joueurs réguliers, ou même des personnes qui s’intéressent vraiment au jeu. En
particulier, les études réalisées en laboratoire avec des étudiants universitaires ne
renseignent pas beaucoup sur ce qui pourrait bénéficier à une population. Les besoins
financiers des étudiants les motivent à rechercher les compensations financières
attribuées lors des recherches. Malgré qu’ils l’affirment, ces participants s’intéressent-ils
vraiment aux AÉJ? De plus, les universitaires sont des personnes mieux formées pour
résister aux pièges cognitifs du jeu. Ceux-ci manifestent moins fréquemment des
problèmes de jeu.
6.2.1.3 Les problèmes de validité écologique des études réalisées en laboratoire
Les études, réalisées en laboratoire, souffrent d’importantes lacunes écologiques290. En
effet, les joueurs y risquent rarement leur propre argent291.
Le moment de la session de jeu est surtout déterminé en fonction de la disponibilité du
laboratoire plutôt que par une impulsion ou un besoin de jouer. En particulier, les
participants ne se rendent pas au laboratoire parce qu’ils ont subitement un besoin
pressant de financer un achat ou de payer une dette.
Les résultats des parties étant habituellement contrôlés, ceux-ci n’offrent qu’une
expérience de jeu artificielle, limitée aux événements déjà connus par les chercheurs.
En effet, ces séquences préprogrammées ne contiennent pas nécessairement tous les
éléments pathogènes du jeu. Aussi compétent soit-il, un concepteur de recherche ne
peut pas inscrire dans une séquence préprogrammée des facteurs pathogènes dont il
ignore l’existence. Or, ces facteurs pathogènes, connus et inconnus, surviennent
nécessairement durant la longue carrière des joueurs pathologiques.
290
Ce problème n’a jamais été investigué à fond. Dans un laboratoire, des joueurs réguliers de
blackjack ont manifesté des comportements différents de ceux qu’ils ont au casino (Anderson et
Brown, 1984). Les auteurs de l’étude, ont observé d’importantes modifications de comportement
que Ladouceur et al. (1991) n’ont pas observé chez des joueurs utilisant des appareils de poker
vidéo situés dans des dépanneurs.
Anderson, G., & Brown, R. I. F. (1984). Real and laboratory gambling, sensation-seeking
and arousal. British journal of psychology, 75, 401-410.
Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance, N., & Tremblay, S. (1991). Ecological
validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal of gambling studies, 7(2),
109-116.
291
Sauf celui qu’ils obtiennent en compensation de leur participation à la recherche.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 168
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 169
De plus, les protocoles de recherche ne permettent jamais d’obtenir un gain significatif
durant la session de jeu. Si cela arrivait, il n’aurait pas l’impact habituel parce que le
joueur, n’ayant plus ensuite accès au laboratoire, celui-ci n’a pas l’occasion de chercher
à reproduire ce gain sur cet appareil en particulier. En ce sens, le principal facteur
pathogène associé à l’expérience de jeu n’est pas étudié.
6.2.1.4 Il faut pouvoir être capable d’observer le phénomène à prévenir ou à
contrer
La seule vérification crédible des impacts bénéfiques des modifications apportées aux
AÉJ exige une acquisition in situ de données issues de joueurs qui exercent leurs
activités de jeu exactement dans leurs conditions habituelles, sinon dans des conditions
qui leur deviennent habituelles. La durée d’observation doit être assez longue pour que
des joueurs novices aient eu raisonnablement l’occasion d’avoir vécu l’essentiel des
conditions qui conduisent au jeu excessif et le temps d’y avoir développé les dommages
conséquents. En moyenne, la perte de contrôle sur les ALV du Québec commence entre
1,5 et 1,7 années après l’initiation au jeu sur ALV, et celle-ci dure 1,9 années avant que
la personne ne se convainque d’appeler pour obtenir de l’aide292. Pour être certain, une
étude longitudinale d’au moins quatre années est nécessaire.
Une évaluation clinique initiale doit permettre de classifier les joueurs, avant qu’ils ne
s’initient aux appareils modifiés, et il doit y avoir une évaluation comparable au moins à
la fin de la recherche. Les dommages étant surtout causés par une perte financière qui
dépasse la capacité des joueurs à l’absorber, les ressources et dépenses financières
doivent être évaluées dès le début de la recherche, et réévaluées, au moins une fois, à
la fin de la recherche. Aucune recherche n’a jamais rencontré ces critères minimaux.
Pour démontrer l’efficacité d’une mesure, il est nécessaire d’évaluer longuement, de
manière longitudinale, le statut diagnostique de joueurs réguliers représentatifs dont
l’historique de jeu est raisonnablement documenté.
6.2.1.5 L’utilisation inappropriée des groupes de discussion (focus groups)
Témoin vraisemblable d’une grande influence des impératifs de marketing lors de la
conception des études, le recours à des groupes de discussion est une technique de
plus en plus utilisée pour évaluer les impacts des mesures. Il s’agit certainement d’une
bonne manière pour anticiper l’acceptabilité sociale initiale d’une innovation. Par contre,
la qualité du matériel obtenu ne dépasse guère celui des opinions.
En matière de prévention du jeu pathologique, il n’y a aucune utilité à faire spéculer des
joueurs sans problème de jeu quant à des situations hypothétiques dont ils n’ont pas
l’expérience. L’opinion des gestionnaires de jeu est loin d’être objective car une
meilleure protection des joueurs implique nécessairement un amoindrissement
considérable de la performance financière de leur établissement.
292
Voir aux pages 292 à 294 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des
appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour
supérieure du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 169
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 170
L’inclusion de joueurs pathologiques pose aussi des difficultés. Lorsqu’ils commence un
traitement, les joueurs pathologiques doivent faire un travail considérable afin de
comprendre comment s’est installé en eux une dépendance pathologique envers les
AÉJ. Ces personnes expriment avec conviction des croyances erronées quant au
hasard. Leur impression de contrôle sur les événements est illusoire. Souvent, ces
joueurs sont encore en plein déni de leurs comportements réels de jeu. L’interprétation
de leur expérience de jeu est alors faussée par ces filtres cognitifs.
6.2.1.6 La communication occulte des résultats de recherche dans des
publications inaccessibles
En dernier lieu, il importe de souligner une situation, certes exceptionnelle, mais qui n’a
pas de raison de se reproduire. Pour déterminer la validité des mesures proposées par
Loto-Québec, nous avons tenté de réunir tous les documents pouvant concerner plus
particulièrement les travaux réalisés au Québec. Il s’avère que Loto-Québec a financé
deux études293 directement pertinentes aux mesures de protection. Les résultats de ces
études ont été publiés dans une revue scientifique australienne qui n’est pas répertoriée
par les principales banques de données, qui est introuvable au Québec, qui n’est pas
accessible par les services de prêts interbibliothèques, et qui ne peut être obtenue que
d’un éditeur qui n’a pas répondu au courriel. Par surcroît, lorsque des tirés à part ont été
demandés aux auteurs. Ceux-ci n’ont pas plus répondu au courriel.
À l’égard de la population québécoise, il y a un problème à communiquer aux seuls
Australiens des travaux financés par des fonds québécois, et destinés à améliorer la
protection des joueurs québécois. De tels documents doivent être largement accessibles
à tous les citoyens désireux d’évaluer les risques auxquels ils se confrontent lorsqu’ils
acceptent de participer à des activités de jeu de Loto-Québec.
6.2.2 L’accès interdit aux paramètres des AÉJ ainsi qu’aux données enregistrées
Compte tenu des dommages considérables auxquels la population est exposée, il n’est
pas raisonnable de spéculer sur des amalgames disparates de mesures qui sont
implantées sur des AÉJ dont on connaît très peu les paramètres de fonctionnement.
Les appareils des autres juridictions ne sont pas tous agencés d’une manière qui
correspond au niveau de dangerosité des appareils implantés au Québec.
6.2.2.1 Les paramètres des jeux sur AÉJ
Sous prétexte de protéger des secrets commerciaux, les exploitants refusent
systématiquement de communiquer aux scientifiques les caractéristiques précises des
jeux qu’on leur demande d’évaluer.
293
(a) Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2003). Video Lottery Terminal Warning Messages and the
Persistence to Gamble. Gambling Research, 15(1), 45-50. (b) Sani, A., Carlevaro, T., &
Ladouceur, R. (2005). Impact of a Counselling Session on at-risk Casino patrons : A Pilot Study.
Gambling Research, 17, 47-52.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 170
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 171
Lorsqu’une organisation achète un jeu, le fabricant propose diverses tables de lots
correspondant à des taux de remise, des taux de récompense et des valeurs de lot
différents. D’une juridiction à l’autre, d’un établissement à l’autre, ou même à l’intérieur
d’un même établissement, les chercheurs sont incapables d’évaluer si des expériences
de jeu sont réellement comparables.
Plus le taux de remise d’un AÉJ est élevé, plus cet appareil peut générer une
expérience de jeu susceptible d’instaurer une dépendance pathologique. Il existe alors
un danger considérable à extrapoler des résultats, cueillis sur des AÉJ dont le taux de
remise est aux environs de 90%, à des AÉJ dont le taux de remise avoisine plutôt 95%.
Ce problème se pose particulièrement lorsque des jeux australiens sont présentés
comme peu dangereux. En Australie, les taux de remise ont une moyenne de 89%. Au
Québec, cette moyenne est d’environ 92%.
Lorsque des études de la Nouvelle-Écosse suggèrent une mesure de protection, il faut
savoir qu’elle a été étudiée dans un environnement autrement pathogène où les taux de
remise varient entre 93% et 95%. Cette mesure peut réagir à des événements dont
l’avènement est probable lorsque le taux de remise est de 95%, mais qui ne se
produisent que rarement lorsque le taux de remise est de 92%. Dès lors, cette mesure
n’est pas transférable.
A priori, ces différences de taux de remise semblent peu importantes; à peine un, deux
ou trois pour cent. Il n’en est rien. Les données présentées dans la Figure 84 illustrent
les conséquences de variations infimes du taux de remise. En effet, le Colorado publie
mensuellement des données financières concernant les AÉJ qu’il exploite dans des
casinos. La somme des montants insérés dans les appareils et le bénéfice brut sont
publiés en fonction de la dénomination (valeur du crédit). Pour chaque mois, ceci permet
de calculer le nombre de parties jouées294 ainsi que le taux de retour effectif295 des
appareils. Il est alors évident que les joueurs complètent beaucoup plus de parties avec
un taux de retour élevé. Ceci augmente la probabilité d’avènement d’un gain significatif,
soit une cause directe des problèmes de jeu.
Tel que le confirme cette figure, avec un montant de 2000 dollars, à un jeu à 25 cents le
crédit, il est possible de jouer environ 100 000 parties lorsque le taux de remise est de
92%. Selon le même calcul, en haussant ce taux à 95%, statistiquement, le nombre de
parties est supposé grimper à 160 000. Dans le cas du Colorado, le nombre de parties
jouées avec des AÉJ à 95% est plutôt d’environ 250 000. L’impact de l’augmentation du
taux de remise est alors de beaucoup supérieur au simple fait qu’il est possible de jouer
pendant plus longtemps avec un même capital. Cette persistance accrue à miser
294
Le nombre de parties est égal à : (montant dépensé) / [(valeur du crédit) x (1 – taux de
remise)]. Pour être exact, ce nombre devrait ensuite être diminué de 11,5 parties. Voir à la page
395 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo.
Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
295
Le taux de retour effectif est égal au montant des lots remis aux joueurs divisé par le montant
des sommes pariées. Par rapport au taux de remise théorique, il s’agit d’une valeur concrète. À
l’échelle d’une population, le taux de remise effectif est quasiment égal au taux de remise
théorique.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 171
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 172
témoigne au moins d’une augmentation de la résistance à l’extinction, soit une autre
cause directe des problèmes de jeu.
Figure 84
Appareils de jeu au Colorado - Jeux à 25 cents le crédit
Nombre mensuel moyen de parties jouées par appareil
en fonction du taux de remise
N. de parties jouées par appareil
300 000
250 000
200 000
150 000
100 000
50 000
0
90%
91%
92%
93%
94%
95%
96%
Taux de remise effectif
Il existe d’autres paramètres critiques que les chercheurs ignorent lorsqu’ils font leurs
études. Quelle est la probabilité d’événements importants, tels que l’acquisition d’un lot
de grande valeur, l’avènement d’un quasi-succès? Quelle est la capacité du générateur
de nombre aléatoire de créer des événements réellement indépendants? Les
chercheurs concluent sans connaître ces détails critiques.
Par ailleurs, d’autres informations peuvent être connues parce qu’elles sont observables
directement en jouant sur les AÉJ. Il s’agit en l’occurrence du taux de récompense qui
est aussi lié directement aux causes des problèmes de jeu. Il faut toutefois jouer des
millions de parties pour être certain que les estimations soient justes. Les budgets et les
impératifs de production des chercheurs ne permettent pas un tel travail.
6.2.2.2 Les statistiques compilées automatiquement par les AÉJ
Toujours en raison du secret commercial, les scientifiques n’ont pas accès aux
statistiques qui décrivent le comportement réel des joueurs, c’est-à-dire in situ, en
situation réelle de jeu. Or, parce que l’organisme de jeu doit vérifier régulièrement
l’intégrité des appareils, les AÉJ enregistrent des informations particulièrement
importantes en ce qui concerne l’évaluation de la dangerosité des jeux. Ce sont
principalement le choix des jeux, les montants insérés dans les AÉJ, les soldes
encaissés, la durée de jeu avant l’encaissement, les dénominations utilisées, les
montants des mises, les caractéristiques multilignes et multicrédits des mises, et le
nombre de parties jouées entre les additions de montants supplémentaires et
l’encaissement. Pour véritablement développer un environnement de jeu sécuritaire, ces
informations doivent être mises à la disposition des chercheurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 172
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 173
6.2.3 L’absence d’analyse cognitive détaillée des conditions de vie des joueurs
Bien que les outils psychométriques soient indispensables pour l’objectivité des études,
on ne doit pas se limiter à ceux-ci. Il est nécessaire de décrire en profondeur les
structures cognitives des joueurs, notamment les objectifs de vie, les croyances
déterminantes, les chaînes de comportements296, les motifs de jeu, les responsabilités
interpersonnelles, en fait tout ce qui est déterminant. Actuellement, ces informations
sont surtout tirées des joueurs que des cliniciens accueillent en consultation. Le plus
souvent, ce sont des informations trop rétrospectives. Il faut les obtenir plus près des
événements, avant et pendant que les joueurs ne deviennent pathologiques.
De plus, sans une évaluation précise de la valeur de l’argent pour les joueurs, il est
difficile de considérer réaliste de transférer une mesure évaluée dans une autre
juridiction, ou à l’intérieur d’une juridiction où la richesse est très inégalement répartie.
Les montants pouvant constituer des gains significatifs varient d’une personne à l’autre
selon sa richesse personnelle, ses projets de dépense ou de remboursement. De plus,
les problèmes de jeu se concrétisent surtout lorsque des personnes en viennent à
perdre des sommes qu’elles n’ont pas les moyens de perdre. Si une mesure est
développée dans un environnement financièrement aisé, où des revenus additionnels
peuvent être acquis facilement, elle pourrait être particulièrement iatrogène dans un
milieu plus pauvre où ces options n’existent pas.
6.2.4 L’adoption de mesures copiées du savoir-faire de d’autres organisations
Actuellement à la mode dans bon nombre de juridictions, les établissements de jeu
achètent ou copient le savoir-faire d’autres organisations297, associations
commerciales298 299 ou centre de recherche financés par l’industrie du jeu300. Les
296
La méthode GOMS est particulièrement appropriée au contexte des AÉJ qui sont
fondamentalement une interface humain-ordinateur. Une explication de la méthode GOMS
(Goals, Operations, Methods, and Selection rules) est disponible dans les sites suivants :
http://pages.cpsc.ucalgary.ca/~ericp/projects/681/GOMS/CPSC_681_Topic_GOMS.pdf
www.it.bton.ac.uk/staff/rng/teaching/notes/GOMS.html
www.info.fundp.ac.be/~jml/CD_IHM/Chap7/goms.html
297
Parmi lesquels, il y a, au premier plan, les casinotiers Harrah’s (www.harrahs.com) et Holland
Casino (www.hollandcasino.nl) ainsi que le fabricant d’AÉJ International Gaming Ternology (IGT)
(www.igt.com).
298
Des établissements de jeu sont regroupés en association nationale telles que l’American
Gaming Association (1995) (www.americangaming.org), la Canadian Gaming Association (2005)
(www.canadiangaming.ca), l’Australian Gaming Council (www.austgamingcouncil.org.au).
299
Les organisations gouvernementales de jeu ont leur propres associations telles que la World
Lotteries Association (dont Loto-Québec est ****), l’International Association of Gaming
Regulators (www.iagr.org).
300
Aux États-Unis, le National Centre for Responsible Gaming (www.ncrg.org) a reçu des dons
de plus de 100 000 dollars uniquement par des grands casinotiers et manufacturiers tels que
Caesars, Harrah’s, IGT, Mandalay Resort Group, MGM Mirage, Argosy Gaming, Boyd Gaming,
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 173
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 174
produits, qui en résultent, apparaissent être davantage l’œuvre de spécialistes en
marketing que celle d’experts en santé publique.
Lorsque des gestionnaires de jeu agissent ainsi, ceux-ci importent des protocoles tous
prêts, qui exigent d’être appliqués intégralement, et surtout aveuglément puisque
l’organisme vendeur ne dévoile pas ses secrets commerciaux. Les scientifiques, qui
doivent appuyer les organismes de santé publique, sont alors confrontés insidieusement
à un renversement du fardeau de la preuve car il faut des arguments irréfragables pour
convaincre les gestionnaires qu’il est nécessaire d’adapter ces protocoles. Compte tenu
que ces produits commerciaux ne conviennent pas nécessairement aux risques et
méfaits du jeu spécifiques à chaque juridiction, ce renversement pose un danger pour
les populations car l’efficacité de ces produits n’est pas préalablement démontrée.
Ayant besoin de données empiriques récoltées in situ et de conclusions objectives, les
scientifiques ne trouvent pas, dans la documentation de ces produits, l’information
minimale dont ils ont besoin pour s’assurer des bénéfices que ces produits sont
supposés apporter aux populations301. D’ailleurs, les organisations qui vendent leur
savoir-faire exportent des produits finis élaborées en fonction de documents en langue
étrangère. Dans le cas des salons de jeux, il n’est pas possible de faire une évaluation
pertinente sans avoir à se démêler avec des documents écrits en néerlandais302.
Enfin, la problématique de la gestion du jeu n’est pas nécessairement généralisable au
Québec. En l’occurrence, les difficultés des gouvernements aux États-Unis ou en
Australie à contraindre l’entreprise privée aux impératifs de la santé publique n’existent
pas ici car l’État est à la fois le régulateur et l’opérateur. Contrairement aux
établissements européens qui font un enregistrement systématique des visiteurs, les
clients des établissements de jeu, incluant les bars où les ALV sont situés, n’ont pas à
Isle of Capri Casinos, Aztar Corporation, Station Casinos, WMS (www.wms.com). Plusieurs ont
contribué pour un million de dollars ou plus. En raison de petites contributions plus nombreuses,
le National Council on Problem Gambling (http://www.ncpgambling.org) a un financement plus
varié mais celui-ci englobe aussi des grands casinotiers et manufacturiers parmi lesquels on
retrouve en plus Isleta Casino & Resort, GTech (www.gtech.com), et l’immense casino
amérindien Mohegan Sun.
301
Voir aux pages 5 et 7 dans : Blaszczynski, A. (2001). Harm minimization strategies in
gambling: An overview of international initiatives and interventions. Melbourne: Australian
Gambling Council.
302
Par exemple: (a) De Bruin, D.E., F.R.J. Leenders, M. Fris, H.T. Verbraeck, R.V. Braam, G.F.
van de Wijngaart (2001). Gasten van Holland Casino. Effectiviteit van het preventiebeleid
kansspelverslaving. Utrecht: Centrum voor Verslavingsonderzoek. ISBN: 90-71772-31-4
http://www.drugresearch.nl/en/GastenVanHollandCasino.EffectiviteitVanHetPreventiebeleidKanss
pelverslaving (b) de Bruin, D., Benschop, A., Braam, R., & Korf., D.J. (2006). Meerspelers:
Meerjarige monitor en follow-uponderzoek naar amusementscentra en bezoekers. Utrecht,
Amsterdam: CVO, Universiteit van Amsterdam. http://www.drugresearch.nl/en/AFiveyearMonitoringAndFollowupStudyOnTheEffectsOfProductDifferentiationAndStricterAdmissionControlsInAmusementCentre
s (c) KPMG Business advisory services B. V. (2005, December). Onderzoek kengetallen
speelautomatenbranche. Periode 2002-2004. Rapportage. (d) VAN Speelautomaten
Amusementscentra. http://www.vaninfo.nl/assets_VAN/pdf/VAN%20brochure.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 174
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 175
s’identifier avant d’entrer. En particulier, l’expérience des Pays-Bas ne vaut que dans la
mesure où les établissements néerlandais détectent les joueurs fréquents et les invitent
à discuter des risques à jouer trop régulièrement. Ceci ne se fait pas au Québec.
6.2.5 L’absence de suivi des mesures implantées
En raison des disparités très grandes entre les types d’AÉJ qui y sont exploités, la
simple généralisation des mesures de protection d’une juridiction à l’autre ne donne
aucune garantie que les effets observés en un endroit vont nécessairement se
reproduire ailleurs. Lorsque des mesures sont importées d’une autre organisation de
jeu, cette grande incertitude oblige à faire un suivi d’implantation.
Dans la documentation de Loto-Québec ou de la RACJ, nous n’avons trouvé aucune
étude ayant vérifié l’efficacité des mesures et modifications structurales apportées aux
ALV depuis 2002. La grande importance de ces modifications avait pourtant été affirmée
lors d’un Forum sur le jeu pathologique organisé en novembre 2001303 ainsi qu’une
Table de concertation interministérielle304.
Ce manque de suivi des implantations n’est pas particulier au Québec. Il s’agit d’une
situation courante parmi les établissements de jeu. En 1999, la firme Wynne Resources
a expédié, au Canada et aux États-Unis, un questionnaire à 31 agences
gouvernementales, 22 compagnies privées et 65 organisations non gouvernementales
concernant les programmes de prévention que ces 118 organismes ont développé.
Quarante-deux (36%) ont accepté de répondre305. Seulement 21 organismes ont indiqué
avoir un processus général306 d’évaluation de leur programme de prévention. Aucun
n’avait entrepris de vérifier directement les impacts prévus des plans de prévention307.
303
(a) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). Jeu pathologique : connaître,
comprendre, agir. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca (b)
Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique :
document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca
304
Ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. (2002). Agir ensemble : plan
d’action gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005. Québec, QC : Gouvernement du
Québec, Table de concertation interministérielle sur le jeu pathologique.
305
Les auteurs indiquent que, malgré un taux de réponse de 36%, les participants étaient
suffisamment diversifiés pour représenter adéquatement l’ensemble des organismes visés. Voir à
la page 18 dans : Wynne Resources. (1999, October). Problem gambling public awareness
campaigns in North America. A report submitted to: Ontario substance abuse bureau. Edmonton,
Alberta: auteurs.
306
Typiquement, un seul indicateur général, par exemple la variation du nombre d’appels à une
ligne d’aide ou des demandes pour des pamphlets, sert à évaluer l’efficacité des programme de
prévention. Voir à la page 32 dans : Wynne Resources. (1999, October). Problem gambling
public awareness campaigns in North America. A report submitted to: Ontario substance abuse
bureau. Edmonton, Alberta: auteurs.
307
Voir à la page 53 dans : Wynne Resources. (1999, October). Problem gambling public
awareness campaigns in North America. A report submitted to: Ontario substance abuse bureau.
Edmonton, Alberta: auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 175
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 176
Seulement récemment, la World lottery association a annoncé un plan prévoyant
l’évaluation des mesures associées au concept de jeu responsable308. Les détails de
cette évaluation ne sont pas encore précisés publiquement.
6.2.6 L’exigence de ne considérer que des mesures qui n’ont aucune incidence
sur le comportement des joueurs sans problème de jeu
Mandatés par des organisations qui obtiennent d’importants bénéfices du jeu, les
équipes de recherche, qui ont développé des modifications, ont pris en considération le
besoin pour des mesures qui n’ont que peu d’impacts sur les joueurs occasionnels, ceux
qui n’ont pas de problème de jeu309. Limitées par cet objectif, les mesures possibles ne
peuvent guère faire plus qu’aider les joueurs excessifs à conserver leur dépense au jeu
dans des limites raisonnables, sinon d’attirer leur attention sur un numéro de téléphone.
Il s’agit alors d’intervenir après le développement de la dépendance, surtout lorsque les
dommages commencent à dépasser la limite que les joueurs peuvent assumer
financièrement.
Dans la mesure où près de la moitié des revenus des AÉJ proviennent des joueurs
excessifs, il est illusoire de croire pouvoir réduire appréciablement les méfaits des AÉJ
sans que cela n’entraîne une diminution tout aussi appréciable des revenus.
De plus, la plupart des mesures proposées sont issues de l’observation des
comportements des joueurs réguliers qui conservent le contrôle sur leur dépense au jeu
par opposition aux joueurs excessifs. On propose alors aux joueurs excessifs d’imiter le
comportement des joueurs réguliers sans problème de jeu. Or, il n’est pas établi que les
joueurs excessifs ont les moyens ou les capacités de le faire. Il n’a pas été vérifié si les
joueurs réguliers, présentés comme modèles, ne seraient pas en voie de développer
des problèmes de jeu. Personne ne sait si ces joueurs réguliers auraient été capables
de maintenir leur contrôle s’ils avaient vécu les mêmes événements qu’ont expérimentés
les joueurs qui sont devenus dépendants des AÉJ. Ce modèle n’est pas un contrôle
valide.
Sauf à titre d’anecdote individuelle, aucune étude n’a démontré l’existence de joueurs
réguliers de longue date qui n’ont jamais éprouvé de problème de jeu. Si des
comportements doivent être proposés comme modèles, ceux-ci doivent avoir été
longuement examinés lors d’études longitudinales.
308
Communiqué de presse du 21 novembre 2006 de la World lottery association :
http://www.world-lotteries.org/news/wla_news_1.php?news_id=2592
309
(a) Voir à la page 2 dans : Dickerson, M. (1998). EGM players and responsible gambling.
NAGS Practitioners Conference Proceedings (2000), Melbourne: National Association of
Gambling Studies (pp. 33-42). (b) Voir aux pages 4 et 8 dans : Blaszczynski, A. (2001). Harm
minimisatation strategies in gamblbling: An overview of international initiatives and interventions.
Melbourne: Australian Gambling Council.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 176
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 177
6.2.7 La restriction à des mesures qui n’interviennent pas directement dans le
processus pathogène qui conduit aux dommages
Les mesures qui empêchent le joueur de se suicider ou de perdre son pouvoir de
dépenser, sans régler fondamentalement le problème de jeu, pourrait n’avoir d’autre
conséquence que de maintenir les joueurs dans un cycle continuel de dommages.
C’est particulièrement le cas des contrats d’auto-exclusion dont la durée ne dépasse pas
une année ou deux. Généralement, le joueur excessif ne demande pas d’aide avant
d’avoir perdu des montants d’argent qu’il en pouvait pas perdre. Durant la durée de
l’auto-exclusion, un contrôle plus efficace de la dépense au jeu peut aider le joueur à
restaurer sa capacité financière. Toutefois, parce que le problème de dépendance n’est
pas réglé, une nouvelle perte de contrôle se produira plausiblement dès que le
comportement de jeu reprendra. En aidant ainsi le joueur à se maintenir continuellement
à la surface entre la santé et l’insanité, mais sans le sortir de la dépendance, la mesure
de prévention pourrait être iatrogène en maintenant le joueur dans un cycle continuel de
rechutes. Encore une fois, ce sont des études longitudinales sur des joueurs réguliers
représentatifs qui peuvent renseigner les chercheurs sur ce danger.
6.3 Aperçu des mesures implantées dans d’autres juridictions
S’il est si difficile de discerner les fondements des mesures de protection proposées
pour les salons de jeux, c’est parce que le Québec n’est pas un leader en matière de
développement des mesures de protection. À peu près toutes les mesures sont copiées
ou importées de l’historique et du savoir faire d’organisations étrangères. Les
concepteurs ne sont pas au Québec, et ceux-ci n’ont pas travaillé à partir du contexte
qu’on y trouve.
La firme Holland Casino a été le principal consultant qui a guidé la conception des
casinos québécois310. Pour approfondir les fondements des mesures que cette firme a
conseillées, il faut retracer des documents écrits en néerlandais302. Cela ne laisse guère
de chance aux spécialistes de la santé publique pour apprécier la justesse des mesures
de protection.
En contrepartie, les ALV ayant été achetés de compagnies américaines, on y décèle
davantage des influences que l’on retrouve regroupées dans l’American Gaming
Association. Cet organisme travaille, au profit de l’entreprise privé, à minimaliser les
contraintes d’exploitation imposées par les gouvernements. Les mesures, dont
l’American Gaming Association fait la promotion, sont des réponses à des questions qui
ne se posent pas nécessairement au Québec. En effet, le gouvernement du Québec est
l’actionnaire unique de Loto-Québec. À titre de régulateur, il n’a pas à adopter des
mesures pour se forcer à adopter des mesures à titre d’opérateur.
310
(a) Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission
permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1837, CI-1838, CI1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec. (b) Déclaration de monsieur Claude Quinn,
directeur général adjoint aux enquêtes criminelles et aux supports techniques de la Sûreté du
Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45,
pages CI-1837, CI-1838, CI-1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 177
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 178
6.3.1 Les mesures développées aux États-Unis
La situation actuelle des AÉJ aux États-Unis est l’aboutissement d’un long historique qui
incite les gouvernements à contenir les AÉJ uniquement dans des grandes surfaces
situées dans des casinos ou, à défaut, dans des hippodromes. Typiquement, les AÉJ ne
sont pas disponibles ailleurs, par exemple dans les bars. Seuls quelques petits états ont
recours à cette stratégie.
Une concentration géographique des casinos, hébergeant une forte densité d’AÉJ, est
ainsi la mesure de contrôle traditionnelle. Les joueurs qui se rendent dans des villes ou
quartiers, où il y a des casinos, s’y rendent expressément pour jouer. Il s’agit d’une
clientèle dite de destination. Le touriste qui s’y rend est fondamentalement un joueur.
6.3.1.1 L’échec initial de la distribution proximale
Les premiers appareils de jeu sont apparus à la fin du 19ième siècle311. À la faveur d’une
politique très libérale, des gobe-sous de toutes sortes étaient distribués partout dans des
petits commerces. Avec leur expansion, des objections, surtout morales, ont obligé le
gouvernement fédéral à légiférer. Les problèmes soulevés par la distribution
proximale312 des appareils de jeu ont laissé des traces qui perdurent encore aujourd’hui.
Finalement, en 1951, le Johnson Act a obligé le retrait des appareils dans les seuls
casinos du Nevada ainsi que dans quelques établissements du Maryland et de
l’Idaho313. À toutes fins pratiques repoussés en plein désert, les AÉJ ne deviennent
accessibles qu’à l’occasion d’un voyage qui nécessite un déplacement de plus d’une
journée.
6.3.1.2 Les mesures développées au Nevada
Dès leur création en 1931, la principale crainte des autorités, ou des populations, à
l’égard des casinos du Nevada a été leur emprise par les milieux interlopes. Le
fonctionnement des casinos a été encadré par des mesures destinées à (1) éliminer la
présence des criminels, (2) assurer l’intégrité des opérations, (3) forcer une reddition
311
Fey, M. (1997). Slot machines: a pictorial history of the first 100 years. Fifth edition. Reno,
Nevada: Liberty Belle Books.
312
La distribution proximale des AÉJ consiste à en placer partout près des domiciles, des lieux
de travail et des centres communautaires. À chaque site, il y a peu d’AÉJ. Il n’est jamais
nécessaire de franchir une longue distance pour avoir accès à un AÉJ. Ce mode de distribution
est à l’opposé de celui qui consiste à regrouper un très grand nombre d’AÉJ dans des grandes
surfaces rapprochées géographiquement.
313
Voir aux pages 141 à 148 dans : Fey, M. (1997). Slot machines: a pictorial history of the first
100 years. Fifth edition. Reno, Nevada: Liberty Belle Books.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 178
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 179
réelle des comptes, et (4) garantir l’honnêteté des jeux314. Les premières mesures
répondaient ainsi à des objectifs de sécurité et d’intégrité.
Avec le Johnson Act en 1951, les casinos du Nevada ont dû héberger les gobe-sous
qu’ils ont transformé en MAS315. Dès lors, les appareils de jeu ne devenaient
accessibles que pour ceux qui étaient capables de voyager. Les plus pauvres n’avaient
pas les moyens de payer pour le transport et l’hébergement. De plus, quels que soient
les débordements ou les crimes causés par le jeu, ceux-ci survenaient loin de
populations. En complément à la concentration géographique, l’isolement géographique
a alors constitué une mesure additionnelle, répondant toujours à l’objectif de sécurité.
Jusqu’en 1975, les intérêts de la clientèle ont été relativement stables. Les deux tiers de
la dépense au jeu se faisaient aux tables de jeu. Puis, les MAS ont commencé à devenir
de plus en plus populaires. En 1982, la dépense au jeu dans les MAS a surpassé celle
aux tables de jeu (voir Figure 85).
Figure 85
80%
70%
60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
1963
1964
1965
1966
1967
1968
1969
1970
1971
1972
1973
1974
1975
1976
1977
1978
1979
1980
1981
1982
1983
1984
1985
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
Proportion
Proportion du revenu des casinos du Nevada attribuée aux MAS
Jeux de tables
MAS
Données tirées de : DePolo, R., & Pingle, M. (1997). Nevada gaming: revenues and taxes (1945-95). Journal of
gambling behavior, 13(1), 49-67.
Ce changement est surtout attribuable à un changement de clientèle plutôt qu’à un
changement de comportement. En effet, en raison d’un transport et d’un hébergement
moins onéreux, la clientèle était davantage composée par la classe moyenne. Malgré ce
changement considérable en ce qui concerne la santé publique, les objectifs des
mesures de protection se semblent pas avoir été immédiatement adaptés.
314
Nichols, M. W. (1998). The impact of deregulation on casino win in Atlantic City. Review of
industrial organization, 13, 713-726.
315
Situé près de la caisse dans les commerces au détail ou lieux de divertissement, le gobe-sous
a été exploité afin de recueillir la menue monnaie que des commerçants remettaient aux clients.
À leur arrivée dans les casinos, les gobe-sous ont été transformés en machines à sous, c’est-àdire en appareils où l’on joue avec des sous plutôt que pour des sous.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 179
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 180
6.3.1.3 Les mesures développées au New Jersey
Le quasi monopole du Nevada a perduré jusqu’en 1978. À cette époque, le New Jersey
a entrepris de sauver Atlantic City de la banqueroute en y ouvrant un second site de
destination pour la clientèle des casinos316. Atlantic City est toutefois à seulement
quelques heures d’autoroute d’importants centres urbains, notamment New York.
Dans le but d’atténuer les craintes concernant l’ordre public dans l’est américain, la
Casino control commission du New Jersey a initialement exercé un contrôle sévère sur
les casinotiers. Mark Nichols317 rapporte des règles limitant les heures d’ouverture, le
taux de remise minimal, la surface allouée aux MAS, la largeur des allées entre les
MAS, et la taille des sièges. Les premières règles visaient à diminuer les problèmes de
jeu, mais, compte tenu d’un intérêt démesurée des gestionnaires envers les MAS, les
dernières devaient surtout assurer la tranquillité des joueurs aux tables de jeu, une plus
grande diversité des activités de jeu ainsi que le confort des joueurs.
Sortis de l’isolement, rapprochés des grands centres urbains, outre les objectifs de
sécurité et d’intégrité, les impératifs d’ordre public ont incité les casinotiers à se
préoccuper de leur image publique. Pour y parvenir, l’industrie du jeu a entrepris de
développer des mesures d’autoréglementation318. L’objectif a été d’éviter d’être
contrainte par trop de réglementations gouvernementales. En effet, ces réglementations
pouvant être aussi diversifiées que ne le sont les états américains. Dès lors, l’attitude
proactive des casinotiers a été efficace (1) à entretenir une collaboration harmonieuse
avec les commissions de jeu, et (2) à obtenir une réglementation relativement uniforme
d’un état à l’autre.
6.3.1.4 L’éclatement du principe de concentration
La situation a changé radicalement en 1988. L’adoption de l’Indian Gaming Regulatory
Act, par le gouvernement fédéral américain, autorise les nations amérindiennes à ouvrir
des établissements de jeu là où des gouvernements exploitent déjà des activités de
jeu319. Les nations amérindiennes utilisent ce privilège pour ouvrir des casinos qui ne
316
(a) New Jersey Statutes, L. 1977, c110, s. 1; amended L. 1995, c.18, s. 1. (b) Braunlich, C. G.
(1996). Lessons from the Atlantic City casino experience. Journal of travel research, 3, 46-56. (c)
New Jersey Casino Control Commission (1998, janvier). Casino gambling in New Jersey: a report
to the National gambling impact study commission. Atlantic City , NJ : auteurs. (d) Nelson, M. K.
(1999). Casino gambling in Atlantic City: a sure bet for whom? Proceedings for 1999 National
planning conference: approaching the millennium.
http://www.asu.edu/caed/HCDE/onlineplanner/proceedings/index.html (e) New Jersey Casino
Control Commission (2002). Annual report 2002. Atlantic City , NJ : auteurs.
317
Nichols, M. W. (1998). The impact of deregulation on casino win in Atlantic City. Review of
industrial organization, 13, 713-726.
318
Nichols, M. W. (1998). The impact of deregulation on casino win in Atlantic City. Review of
industrial organization, 13, 713-726.
319
(a) Barker, T., & Britz, M. (2000). Jokers wild. Legalized gambling in the twenty-first century.
Westport, Connecticut : Praeger. (b) McCulloch, A. M. (1994). The politics of indian gaming :
tribe/state relations and american federalism. Publius, 24(3), 99-112.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 180
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 181
respectent plus les règles d’isolement et de concentration géographique. De plus,
l’activité économique ainsi générée échappe au pouvoir de taxation et à la
réglementation des états.
L’IGRA a provoqué une surenchère des établissements de jeu. Certains états
américains ont choisi de collaborer avec les nations amérindiennes et de partager les
revenus des casinos amérindiens. D’autres états ont choisi de les rivaliser par des
casinos d’état ou des casinos commerciaux taxables. Là où il n’y a pas de casino, des
AÉJ on été distribués dans des hippodromes. Là où cela n’est pas possible, des états
moins fortunés tentent d’endiguer l’évasion de la dépense au jeu en ayant plutôt recours
à des AÉJ distribués en mode proximal, c’est-à-dire partout près des domiciles, des
lieux de travail et des centres communautaires320. Cette dernière réponse a exigé la
création d’un nouveau type d’AÉJ : l’ALV321.
Contrairement au Canada, il y a cependant peu d’endroits où les gouvernements ont
autorisé un accès à des AÉJ dans des bars322, c’est-à-dire ailleurs que dans des
grandes surfaces dédiées spécifiquement au jeu. En 2005323, dix états exploitaient des
AÉJ dans des salons de jeux situés dans des hippodromes : le Delaware (1995), l’Iowa
(1995), la Louisiane (1992), le Maine (2005), New York (2004), le Nouveau-Mexique
(1999), l’Oklahoma (2005), la Pennsylvanie (2006), le Rhode Island (1992), et la Virginie
Occidentale (1994). Quatre autres états s’y ajoutent324. Ce sont la Floride, l’Arkansas, le
Minnesota et le New Hampshire. Six325 326états exploitent des ALV distribués en mode
320
Voir aux pages 30 à 35 dans : Leblond, J. (2004). Évaluation de la dangerosité des appareils
de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure
du Québec.
321
Parmi les AÉJ, les MAS se distinguent des ALV surtout par leur lieu d’exploitation.
Les MAS sont situées
dans les casinos. Des
centaines, sinon des
milliers, sont
regroupées dans des
grandes surface de
jeu. Elles n’offrent
qu’un seul jeu.
Les ALV sont conçus pour être exploités, isolément, en dehors
des établissements de jeu, notamment dans des commerces dont
le jeu n’est pas la raison d’être … en principe! Ce sont de
véritables micro-casinos autonomes qui offrent plusieurs types de
jeu (jeux de lignes, jeux de cartes, keno). Requérant peu
d’entretien, les ALV deviennent de plus en plus le type d’appareil
sélectionné par les gestionnaires de racinos, c’est-à-dire les
salons de jeux situés dans les hippodromes.
322
Outre le Nevada, ce sont les états moins populeux du Montana, du Dakota du Sud, de
l’Oregon, de la Louisiane et de la Virginie Occidentale. Limités aux hippodromes ou casinos, des
ALV existent aussi en Iowa, au Rhode Island, au Delaware, au Nouveau-Mexique et dans l’état
de New York. En l’an 2000, la Caroline du Sud a éradiqué les ALV qu’elle avait antérieurement
autorisés. Aux prises avec un marché gris, l’état de Géorgie a suivi en 2002.
323
American gaming association. (2006). State of the states.
http://www.americangaming.org/assets/files/2006_Survey_for_Web.pdf
324
Selon le site http://www.casinocity.com/casinos.html (consulté le 18 février 2007).
325
La Caroline du Sud a autorisé des ALV entre 1986 et l’an 2000.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 181
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 182
proximal : la Louisiane (1991), le Montana (1986), le Nevada (1931), l’Oregon (1992), le
Dakota du Sud (1989) et la Virginie Occidentale (1994).
6.3.1.5 Les mesures initiales des premiers états américains qui ont implantés des
ALV
Avant l’IGRA, le Montana et la Caroline du Sud avaient déjà entrepris des tests pilotes
en autorisant l’exploitation des APV à partir de 1986. L’intérêt des joueurs envers ces
appareils démontrait le potentiel des AÉJ à capter rapidement une dépense au jeu
considérable.
En 1988, lorsque l’IGRA a entraîné l’émergence de nombreux casinos amérindiens, des
états peu populeux n’ont pas été en mesure de rivaliser des établissements de jeu aussi
gigantesques que ceux de leurs concurrents. Il n’y avait pas que le concurrent
amérindien. Certains états dépourvus de nations amérindiennes sur leur territoire ont
aussi dû développer des moyens de contrecarrer l’offre de jeu d’états voisins qui sont en
compétition avec les nations amérindiennes.
S’inspirant du Montana, le Dakota du Sud a entrepris en 1989 d’endiguer cette fuite
économique en opposant aux casinos des AÉJ conçus pour être distribués partout sur le
territoire, c’est-à-dire des ALV. Ainsi, si l’attrait de l’ALV auprès des joueurs excessif est
plus grand que celui des casinos, la dépense au jeu de la population pouvait être
endiguée dans une activité taxable.
La stratégie du Dakota du Sud a immédiatement été imitée par l’Oregon en 1990. Cet
état n’a pas doté les ALV de caractéristiques destinées à protéger les joueurs. En
revanche, l’Oregon a initié des démarches convaincantes pour dépister les joueurs
excessifs et les orienter327 vers des ressources cliniques aptes328 à résoudre la
326
Depuis mai 2003, en plus des ALV dans les hippodromes, l’Iowa a distribué dans les bars un
AÉJ, appelé TouchPlay, qui n’a pas le statut légal d’un ALV en raison d’une restriction imposée
au caractère aléatoire de l’attribution des lots. Il s’agit néanmoins d’un appareil très similaire qui
pourrait être classifié dans les AÉJ. Voir dans : Iowa department of management. (2006, March
8). TouchPlay task force report. http://www.dom.state.ia.us
327
Trois études de prévalences ont été réalisées afin de déterminer la quantité des ressources
cliniques qui devaient être rendues disponibles : (a) Volberg, R. A. (1997). Gambling and problem
gambling in Oregon : report to the Oregon gambling addiction treatment foundation.
Northampton, MA: Gemini research. (b) Volberg, R. A. (2001). Changes in gambling and problem
gambling in Oregon: results from a replication study, 1997 to 2000. Northampton, MA: Gemini
research. (c) Moore, T. (2006). The prevalence of disordered gambling among adults in Oregon :
a replication study. Portland, OR : Oregon gambling addiction treatment foundation.
Voir : http://www.gamblingaddiction.org/
328
Le monitorage de l’efficacité des programmes cliniques a ensuite été l’objet d’un suivi
constant : (a) Moore, T. (2001). Gambling treatment programs evaluation update 2000-2001.
Salem, OR: Department of Human Services, Office of Mental Health and Addictions Services. (b)
Moore, T. (2003). Oregon gambling treatment programs evaluation update 2002. Salem, OR:
Department of Human Services, Office of Mental Health and Addictions Services. (c) Moore, T.
L., & Marotta, J. J. (2004). Gambling treatment programs evaluation update – 2003. Salem, OR:
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 182
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 183
dépendance au jeu. Dès lors, la population de l’Oregon pouvait devenir moins
vulnérable à l’égard de l’offre de jeu des juridictions concurrentes. Les risques de fuite
économique étaient colmatés non pas en rivalisant la concurrence, mais solvant la
dynamique psychologique qui aurait pu inciter des citoyens de l’Oregon à dépenser
excessivement dans des activités de jeu non taxables. Les ressources d’aide et
cliniques ont été financées à même les revenus des ALV.
En 1994, l’Iowa a utilisé les AÉJ de la même manière, sauf que la distribution n’a pas
été aussi proximale. Les AÉJ ont surtout été installés dans des grandes surfaces situées
dans les hippodromes. Des AÉJ étaient aussi disponibles dans des casinos répartis
partout en Iowa. Les appareils n’étaient pas dotés de mesures de prévention, mais un
programme de dépistage329 et de traitement330 a été immédiatement mis en place.
Similairement, en 1992, le Rhode Island eu recours à des ALV distribués dans les
hippodromes afin de contrer une fuite économique vers les casinos amérindiens
gigantesques du Connecticut. Toutefois, la disponibilité des ressources cliniques331 a un
peu tardé, n’étant véritablement disponible qu’en 1999. En 1996, afin de contrer l’attrait
des casinos d’Atlantic City, le Delaware a aussi utilisé des ALV dans les hippodromes
afin de dépister et de traiter les joueurs excessifs332.
On constate, dans ces états américains, que l’implantation des ALV n’a pas été
accompagnée de mesures destinées à prévenir le jeu excessif. Cela aurait été contraire
à l’objectif d’endiguement de la dépense excessive qui requiert un repérage des joueurs
excessifs. Il faut donc les voir concrètement. À la place, des programmes de dépistage
et de traitement ont été immédiatement implantés afin de résoudre la dépendance au
jeu. Au départ, du moins, ces états ne semblent pas avoir cherché à obtenir un revenu
maximal des AÉJ. L’objectif prioritaire a été de conserver l’argent des joueurs dans
l’économie de ces états. À noter, cependant, qu’il n’est pas encore établi que le
dépistage des joueurs excessifs a été suffisant. Sans un dépistage quasiment parfait, il
existe de sérieux problèmes d’éthique à ne pas mettre les joueurs en garde contre les
dangers des ALV.
Department of human services, Office of mental health and addictions services.
Voir : http://www.gamblingaddiction.org/
329
Volberg, R. A. (1995). Gambling and problem gambling in Iowa: a replication survey. Roaring
Spring, PA: Gemini research.
330
(a) Iowa department of public health. (1998, décembre). Iowa gambling treatment program.
Des Moines, IA: auteurs. (b) Shaffer, H. J., LaBrie, R. A., LaPlante, D. A., & Kidman, R. C. (2002,
October 25). The Iowa department of public health gambling treatment services : four years of
evidence. Boston, MA : Harvard medical school. Division on addictions. Technical report
#101102-200.
331
Voir le site du Rhode Island Hospital où ce traitement est décrit et analysé:
http://www.lifespan.org/rih/services/mentalhealth/gambling/
332
(a) Mateja, W., Wilson, R., & Ableman, B. (1998). A Survey of gambling in Delaware.
http://www.udel.edu/healthserpolresgrp/Publications.htm (b) Wilson, R., Collins, J., & Powell, P.
(1998). Focus groups with treatment personnel problem gamblers and families of gamblers.
http://www.udel.edu/healthserpolresgrp/Publications.htm
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 183
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 184
Dans la mesure où la stratégie est de retenir l’argent du jeu dans la juridiction, il était
important d’implanter des ALV capables d’exercer sur les joueurs un attrait plus puissant
que celui des casinos des autres juridictions. Les paramètres de jeu sont réglés en
conséquence. Lorsque les états en profitent pour détecter rapidement les joueurs
excessifs et les orienter vers des services cliniques, cette puissance des ALV peut être
utilisée positivement. Par contre, lorsque les joueurs sont laissés sans ressources, les
ALV constituent des appareils potentiellement extrêmement dommageables. Dans cette
situation, des joueurs sans aide en viennent à commettre les gestes morbides que
dénoncent les médias, dont le suicide.
Dans cette stratégie d’endiguement, les mesures de prévention du jeu excessif ne sont
donc pas souhaitées parce qu’elles retarderaient le dépistage et le traitement des
joueurs. D’un point de vue éthique, cette stratégie exige que le dépistage se fasse très
rapidement, que l’accessibilité au traitement soit facile, et que celui-ci parvienne à
résoudre la dépendance au jeu.
6.3.1.6 Les mesures des appareils TouchPlay en Iowa
À partir de 2003, l’Iowa a quelque peu changé sa stratégie en implantant, en mode
proximal, des AÉJ dotés de caractéristiques visant à prévenir les problèmes de jeu. Ceci
répondait à un besoin d’augmenter les revenus de l’état en n’obtenant que des revenus
provenant des joueurs occasionnels.
L’Iowa333 disposait déjà de 10 casinos commerciaux, de 4 casinos amérindiens, et de 3
salons de jeux dans des hippodromes. Ces marchés étaient apparemment saturés.
Ainsi, l’état a investi dans un système d’AÉJ, appelés TouchPlay334, distribués selon un
mode proximal.
Afin d’écarter les joueurs excessifs des appareils TouchPlay et des autres
établissements de jeu, il existe en Iowa une banque de données centrale informatisée
qui maintient à jour une liste de personnes inscrites au programme d’auto-exclusion.
Pour pouvoir jouer sur un AÉJ de type TouchPlay, il faut d’abord répondre à des
questions qui impliquent un engagement selon quoi la personne affirme avoir 21 ans ou
plus et ne pas être inscrite au registre d’auto-exclusion. L’argent ne peut être inséré qu’à
cette condition. Pour encaisser un coupon de remboursement, il est nécessaire
d’inscrire son numéro de permis de conduire. Dès lors, en communiquant avec la
banque de données centrale, il est possible de vérifier avant paiement si la personne
avait moins de 21 ans ou était sur la liste d’auto-exclusion. Dans ce cas, le solde ne peut
pas être encaissé.
Un autre intérêt des appareils TouchPlay réside dans le mécanisme de tirage des lots. Il
s’agit d’un tirage sans remise. Lorsque l’appareil débute un cycle, tous les lots sont
333
American gaming association. (2006). State of the states.
http://www.americangaming.org/assets/files/2006_Survey_for_Web.pdf
334
Les appareils de type TouchPlay sont similaires aux ALV quoique les lots ne sont pas
attribués selon une formule complètement aléatoire. Voir dans : Iowa department of
management. (2006, March 8). TouchPlay task force report. http://www.dom.state.ia.us
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 184
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 185
disponibles. Au fur et à mesure que les lots sont gagnés, ils ne sont plus disponibles
avant le début d’un nouveau cycle. Cet événement reste inconnu du joueur. Il en résulte
une situation où le gagnant du lot maximal n’a pas du tout intérêt à continuer à jouer sur
l’appareil puisqu’il lui est impossible335 d’en obtenir un second avant longtemps.
Évidemment, pour que cette mesure de protection puisse agir, il ne faut pas qu’il y ait un
autre appareil dans le voisinage immédiat.
Malheureusement, la popularité des AÉJ de type TouchPlay a rapidement instauré une
grande rivalité entre les casinos et les détaillants qui a conduit à l’arrêt de ce projet336.
La légalité d’un système de tirage sans remise est aussi incertaine337.
6.3.1.7 Les mesures associées au savoir-faire des compagnies privés
Bien que les revenus des AÉJ proviennent en majeure partie des joueurs pathologiques
(voir les sections 3.2.3.3 et 3.2.4.3 aux pages 79 et 85), celui, qui en vient à commettre
des gestes morbides, risque de causer une importante diminution des profits en raison
des pressions populaires qui pourraient forcer les organismes de contrôle à imposer des
règles plus sévères. Pour se protéger, les établissements ont développé des mesures
qui sont issues d’un savoir-faire qui s’est développé graduellement. De nos jours, ces
mesures sont rassemblées dans des codes de commercialisation338 qui tendent à être
335
Dans le système habituel avec remise des lots, le lot maximal peut être obtenu, en principe,
dès la partie suivante. Il n’y a aucun incitatif à ne pas rejouer son gain.
336
(a) Arthur, T. (2006, February 17). TouchPlay machines bring profits, controversy to Iowa.
Iowa state daily.
www.iowastatedaily.com/news/2006/02/17/News/Touchplay.Machines.Bring.Profits.Controversy.
To.Iowa-1618157.shtml
(b) Henderson, O. K. (2006, February, 23). TouchPlay task force: gambling machines should only
be certain businesses. Radio Iowa. www.radioiowa.com/gestalt/go.cfm?objectid=2AADA31F2814-4B55-A3A683DA0EB9944C
(c) Eby, C. (2006, March 14). House goes along with TouchPlay ban. Quad City Times.
www.qctimes.com/articles/2006/03/14/news/local/doc44177d2825178139650079.txt
(d) Henderson, O. K. (2006, October 21). Nussle accuses Culver of making « secret deal » with
TouchPlay industry. Radio Iowa. www.radioiowa.com/gestalt/go.cfm?objectid=E42535A9-D05D4681-B9D3FE61BF7DC759&dbtranslator=local.cfm
337
Dans les salles de bingo du Québec, un système de tirage sans remise est exploité avec des
loteries instantanées de type pulltab. Une boîte ne contient qu’un nombre limité de billets
gagnants. Lorsque les ventes tardent, et que le lot maximal n’est pas sorti, des organisateurs
annoncent publiquement un changement à la probabilité de gain. Il n’existe plus d’égalité entre
les premiers acheteurs et les derniers.
338
Loto-Québec. (2006). Le code de commercialisation responsable. Montréal, QC.
http://www.loto-quebec.com/pdf/code_commercialisation.pdf
Parmi les autres pays:
(a) American gaming association. (2003). Code of conduct for responsible gaming.
http://www.americangaming.org/programs/responsiblegaming/code_of_conduct.cfm
(b) Harrah’s entertainment. (2000). Code of commitment.
http://www.harrahs.com/harrahs-corporate/about-us-code-of-commitment.html
(c) World lottery association. (2006). WLA responsible gaming principles.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 185
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 186
de plus en plus uniformes, souvent en adoptant intégralement de code de l’American
gaming association ou celui de la World lottery association.
Ces mesures de savoir-faire sont quelque peu équivoques parce qu’elles tentent à la
fois de protéger les établissements tout en protégeant les joueurs. Il n’est pas certain
que les intérêts des joueurs subsistent lorsqu’ils viennent en conflit avec ceux des
établissements. L’absence d’études publiques, quant à leurs fondements, ne permet pas
d’en faire une évaluation scientifique.
6.3.1.8 Les initiatives pionnières du casinotier Harrah’s entertainment
Les dénonciations médiatiques des dommages subis par les joueurs dans les
établissements de jeu constituent une situation que l’industrie du jeu dénonce depuis
longtemps comme n’étant pas représentative du bonheur vécu au jeu par la majorité des
joueurs339.
La notion de jeu responsable est une initiative attribuée au casinotier américain Harrah’s
entertainment qui l’a développé dès le début des années 80. Confrontée à l’éventualité
de réglementations gouvernementales plus contraignantes, cette organisation a été
proactive en assumant le leadership d’une stratégie d’autoréglementation de l’industrie
du jeu.
Le succès subséquent de la compagnie Harrah’s entertainment a démontré l’efficacité
de cette stratégie pour éviter un resserrement de la réglementation gouvernementale, et
pour conduire à une atténuation de la dénonciation médiatique. Depuis, cette compagnie
a multiplié des initiatives qui ont été copiées ou adoptées par de nombreuses autres
organisations de jeu.
Compte tenu de l’origine du concept de jeu responsable, il importe de ne pas oublier
qu’il a davantage été développé à des fins de marketing plutôt qu’à des fins de santé
http://www.world-lotteries.org/documents/WLAgamingprinciples_0206.pdf
(d) Australian gaming council. (2001). Responsible gaming code: a framework for responsible
gaming. Melbourne, Victoria, Australia.
http://www.austgamingcouncil.org.au/index.php
(e) Games of chance project office. (2005). Code of conduct for promotional games of chance.
The Hague, The Netherlands: Ministry of justice.
http://english.justitie.nl/images/Code%20of%20conduct%20for%20promotional%20games%20of
%20chance_tcm75-123707_tcm35-14273.pdf
(f) VAN. (2004). VAN Ondernemerscode. Pays-Bas.
http://www.vaninfo.nl/assets_VAN/pdf/20041104%20Ondernemerscode%20versie%201.4.pdf
(g) Queensland office of gaming regulation. (2005). Queensland responsible gaming code of
practice. Brisbane, Queensland, Australia.
http://www.responsiblegambling.qld.gov.au/knowledge/industry-resources/code-ofpractice/CoP.pdf
(h) Charity gaming association. (2006). CGA code of practice. Wellington, New Zealand.
http://www.cga.org.nz/uploaded/060404_Final_CoP.pdf
339
Shaffer, H. J. (2003, February 25). A public health perspective on gambling : the four
principles. AGA responsible gaming lecture series, 2(1), 1-27.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 186
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 187
publique. En effet, les mesures conséquentes n’ont pas été évaluées par des
chercheurs indépendants. Elles ne sont pas davantage l’objet d’un examen publique.
Depuis l’an 2000, un code de commercialisation énonce clairement les engagements
que la compagnie exprime à l’égard de sa clientèle, de ses employés et des collectivités
où elle est implantée340. La compagnie Harrah’s entertainment insiste pour rappeler que
ses employés ne sont pas des travailleurs sociaux. Néanmoins, cette compagnie a initié
des programmes de formation de ses employés afin de les guider dans la réponse que
l’organisation souhaite apporter aux joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu.
6.3.1.9 Les recommandations de la National gambling impact study commission
(NGISC) aux États-Unis en 1999
Créée par le Congrès américain en 1996, la NGISC341 a fait une vaste enquête nationale
afin de répertorier l’ensemble de la situation du jeu aux États-Unis. En 1999, la
commission a émis plusieurs recommandations, dont plusieurs ont été analysées lors du
Forum sur le jeu pathologique qui s’est tenu à Montréal en novembre 2001342.
En ce qui concerne le projet des salons de jeux, la commission a fait quelques
recommandations qui méritent d’être rappelées.
340
Harrah’s entertainment, Inc. (2000). Code of commitment.
341
National Gambling Impact Study Commission. (1999, juin). National Gambling Impact Study
Commission, Final report. Washington, DC: auteurs.
342
Voir à la section 3.1.3.1 aux pages 73-74 (ou pages 77-78 dans le document imprimé) dans :
Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique :
document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 187
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 188
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
3.4
3-17
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
The Commission recommends that warnings regarding the dangers and risks of
gambling, as well as the odds where feasible, should be posted in prominent
locations in all gambling facilities.
(a) L’installation de mises en garde au sujet des
dangers et risques du jeu sur ALV convient à
l’environnement proposé par les salons de jeux.
À chaque instant, au moins le tiers de la
clientèle des ALV éprouve des problèmes de
jeu. C’est l’endroit le mieux ciblé pour aider les
joueurs excessifs.
Lorsqu’ils débutent, les dommages associés au
jeu sur les ALV atteignent rapidement une
grande sévérité.
Le traitement d’une dépendance au jeu à
l’égard des ALV n’est pas parfaitement efficace
à restaurer un état sain.
(b) Afin de permettre aux joueurs de prendre
une décision de jouer ou non véritablement
rationnelle, les probabilités de gain doivent
impérativement être affichées. Le taux de
remise n’est pas une indication suffisante, ni
réaliste, de la probabilité de gain.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 188
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 189
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
3.6
3-18
The Commission received testimony that convenience gambling, such as
electronic devices in neighborhood outlets, provides fewer economic benefits
and creates potentially greater social costs by making gambling more available
and accessible. Therefore, the Commission recommends that states should not
authorize any further convenience gambling operations and should cease and
roll back existing operations.
Les ALV, distribués en dehors des
établissements de jeu de l’état, devraient être
complètement retirés dans les agglomérations
où il existe déjà suffisamment d’ALV pour
financer un salon de jeux.
3.12
3-18
The Commission recommends that states should refuse to allow the
introduction of casinostyle gambling into pari-mutuel facilities for the primary
purpose of saving a pari-mutuel facility that the market has determined no
longer serves the community or for the purpose of competing with other forms
of gambling.
Il ne faut pas tenter d’utiliser des AÉJ afin de
relancer l’industrie des courses de chevaux.
Les AÉJ relancent davantage le pari hors piste
que les courses locales.
3.18
3-19
The Commission recommends that jurisdictions considering the introduction of
new forms of gambling or the significant expansion of existing gambling
operations should sponsor comprehensive gambling impact statements. Such
analyses should be conducted by qualified independent research organizations
and should encompass, in so far as possible, the economic, social, and regional
effects of the proposed action.
C’est le cas particulier du projet des salons de
jeux qui n’a pas été l’objet d’études sérieuses
en ce qui concerne les problèmes de jeu et la
protection de la population.
3.19
3-19
The Commission recommends that states with lotteries reduce their sales
dependence on low-income neighborhoods and heavy players in a variety of
ways, including limiting advertising and number of sales outlets in low-income
areas.
Des efforts vont être faits en ce sens. Un
monitorage devra en établir l’efficacité.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 189
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 190
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
3.20
3-19
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
The Commission recommends that states with lotteries create a private citizen
oversight board. The board would make data-based policy decisions on types of
games to offer, marketing strategies to follow, etc.
Le gouvernement, désirant diminuer le nombre
d’organismes de contrôle, vient d’écarter la
création du Conseil québécois sur le jeu
responsable.
En matière de jeu, en raison de la mixité des
subventions, de la non obligation de répondre
aux questions des citoyens et de l’absence d’un
protocole crédible d’audition des plaintes, les
centres universitaires de recherche ne peuvent
pas assumer le rôle de protection des joueurs.
3.22
4.1
b)
3-19
4-19
Heavy governmental promotion of lotteries, largely located in neighborhoods,
may contribute disproportionately to the culture of casual gambling in the United
States. The Commission therefore recommends that states curtail the growth of
new lottery games, reduce lottery advertising, and limit locations for lottery
machines.
Au-delà du nombre d’appareils, les salons de
jeux constituent un développement majeur de
l’offre de jeu au Québec.
La notoriété des sites, la densité des appareils,
la diversité des jeux, la dangerosité croisée,
l’accessibilité, la banalisation du jeu seront
toutes augmentées.
The Commission respectfully recommends that all relevant governmental
gambling regulatory agencies require - as a condition of any gambling facility’s
license to operate - that each applicant adhere to the following:
Appoint an executive of high rank to execute and provide ongoing oversight of
the corporate mission statement on problem and pathological gambling.
Loto-Québec doit préciser à qui appartient cette
tâche.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 190
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 191
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
d)
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
Under a state “hold harmless” statute, refuse service to any customer whose
gambling behavior convincingly exhibits indications of problem or pathological
gambling.
Il s’agit d’une pratique déjà implantée, aux
Pays-Bas, par le principal consultant de LotoQuébec en matière de casino : Holland casino
(voir section 6.3.3.1.1 à la page 219). Non
seulement, l’établissement a le pouvoir de
refuser de servir un client, dès que celui-ci
donne l’indication d’éprouver un problème de
contrôle au jeu, un gestionnaire doit établir un
contact personnel avec cette personne et
vérifier son besoin d’aide.
Aux Pays-Bas, cette expertise existe. Ce
programme fonctionne.
Cette mesure doit impérativement être intégrée
aux salons de jeu.
e)
4.2
Under a state “hold harmless” statute, respectfully and confidentially provide the
customer (as described above) with written information that includes a stateapproved list of professional gambling treatment programs and staterecognized self-help groups.
4-19
La liste des resources disponibles est surtout
accessible par un appel à la ligne 1-866-SOSJEUX.
The Commission recommends that each state and tribal government enact, if it
has not already done so, a Gambling Privilege Tax, assessment, or other
contribution on all gambling operations within its boundaries, based upon the
gambling revenues of each operation. A sufficient portion of such monies shall
be used to create a dedicated fund for the development and ongoing support of
problem gambling-specific research, prevention, education, and treatment
programs. The funding dedicated for these purposes shall be sufficient to
implement the following goals:
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 191
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 192
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
a)
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
Undertake biennial research by a non-partisan firm, experienced in problem
gambling research, to estimate the prevalence of problem and pathological
gambling among the general adult population. Specific focus on major subpopulations including youth, woman, elderly and minority group gamblers
should also be included. An estimate of prevalence among patrons at gambling
facilities or outlets in each form of gambling should also be included.
Au Québec, les études de prévalence du jeu ont
eu lieu en 1989, 1996 et 2002. Les échantillons
sont trop petits pour former des sous-groupes
de plus de deux ou trois catégories. Les
estimations des taux de prévalence pour
chaque activité sont déficientes.
4.6
4-20
The Commission recommends that each staterun or approved gambling
operation be required to conspicuously post and disseminate the telephone
numbers of at least two state-approved providers of problem-gambling
information, treatment, and referral support services.
Tous les joueurs sont orientés vers un numéro
unique aboutissant au Centre de référence du
Grand Montréal.
7.1
7-30
Because of the easy availability of automated teller machines (ATM’s) and
credit machines encourages some gamblers to wager more than they intended,
the Commission recommends that states, tribal governments, and pari-mutuel
facilities ban credit card cash advance machines and other devices activated by
debit or credit cards from the immediate area where gambling takes place.
La définition de la proximité de l’aire de jeu pose
une difficulté. De préférence, les guichets
devraient être situés à l’extérieur des salons de
jeux (bâtiments) sinon dans le hall près de la
sortie. Ce sont surtout les joueurs excessifs qui
les utilisent.
7.3
et
7.4
7-30
7.3 The Commission recommends to state, local and tribal governments that
(when considering the legalization of gambling or the repeal of gambling that is
already legal) they should recognize that, especially in economically depressed
communities, casino gambling has demonstrated the ability to generate
economic development through the creation of quality jobs.
Sans étude crédible, le projet des salons de
jeux ne permet pas d’inférer aucune conclusion
à cet égard.
7.4 The Commission recommends to state, local and tribal governments that
(when considering the legalization of gambling or the repeal of gambling that is
already legal) they should recognize that lotteries, Internet gambling, and noncasino electronic gambling devices do not create a concentration of good
quality jobs and do not generate significant economic development.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 192
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 193
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
7.5
7-30
The Commission recommends to state, local and tribal governments that (when
they are considering the legalization of casino gambling) casino development
should be targeted for locations where the attendant jobs and economic
development will benefit communities with high levels of unemployment and
underemployment and a scarcity of jobs for which the residents of such
communities are qualified.
Les salons de jeux doivent être écartés des
quartiers pauvres.
7.6
7-30
The Commission recommends to state, local and tribal governments that
studies of gambling’s economic impact and studies contemplating the
legalization of gambling or the repeal of gambling that is already legal should
include an analysis of gambling industry job quality, specifically income, medical
benefits, and retirement benefits, relative to the quality of other jobs available in
comparable industries within the labor market.
Ces études n’ont pas été réalisées.
7.7
7-30
The Commission recommends to state, local and tribal governments that when
planning for gambling-related economic development, communities with legal
gambling or that are considering the legalization of gambling should recognize
that destination resorts create more and better quality jobs than casinos
catering to a local clientele.
Les casinos étant plus éloignés, les salons de
jeux consistent à rapprocher les grandes
surfaces de jeu des quartiers densément
peuplés. Leur clientèle sera essentiellement
locale.
8.3
8-2
The Commission recommends that Congress direct all federal agencies
conducting or supporting longitudinal research panels to consider the feasibility
of adding a gambling component to such surveys and, where appropriate,
entertain applications to add such components that are determined to be of high
scientific merit through scientific peer review. In addition to addressing gambling
behavior, these components should include questions about treatment-seeking
behavior, in order to begin to address the issue of the unmet need for
treatment, which is currently unknown.
Un premier pas devrait plutôt être de rendre
accessibles à la communauté les rapports de
recherche qui existent déjà et qui, parfois, sont
introuvables.
Un second pas devrait être la production de
rapports techniques qui procurent suffisamment
d’informations pour chacun puisse juger de la
méthodologie et de la validité de l’étude.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 193
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 194
Tableau 30
Quelques recommandations de la NGISC pertinentes au projet des salons de jeux
8.17
8-5
Recommandations
Commentaires concernant les salons de jeux
The Commission respectfully recommends to state and tribal governments that
they should authorize and fund every 2 years an objective study of the
prevalence of problem and pathological gamblers among their state’s residents
by a nonpartisan research firm, whose work meets peer review standards.
Specific focus on major sub-populations including youth, women, elderly and
minority group gamblers should also be included. An estimate of prevalence
among patrons at gambling facilities or outlets in each form of gambling should
also be included.
Au Québec, les études de prévalence du jeu ont
eu lieu en 1989, 1996 et 2002. Les échantillons
sont trop petits pour former des sous-groupes
de plus de deux ou trois catégories. Les
estimations des taux de prévalence pour
chaque activité sont déficientes.
À l’égard des salons de jeux, dans l’éventualité d’une conformité avec les recommandations listées dans le Tableau 30, le
gouvernement du Québec, et Loto-Québec, satisfont, au moins en partie343, aux recommandations 3.1, 3.2 344, 3.9, 3.11, 3.14, 3.15,
3.16, 3.21, 4.1a, 4.1c, 4.1f, 4.2c, 4.2d, 4.2e, 4.3, 4.4, 4.5, 7.2, 7.9. Les articles 3.10, 3.17, 4.2b, 7.8 ne concernent pas le projet des
salons de jeux. Sauf les recommandations 8.3 et 8.17, la section 8 traite de recommandations qui devraient faire l’examen lors de
discussions publiques en vue de produire une politique générale du jeu au Québec.
Les autres recommandations ne s’appliquent pas.
343
Des initiatives sont entreprises sans qu’elles ne soient nécessairement suffisantes. Pour le savoir, il faut vérifier leur efficacité empiriquement.
344
En tenant compte que l’âge de la majorité est 18 ans au lieu de 21 ans.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 194
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 195
6.3.2 Les mesures développées au Canada
Au Canada, avant 2001, il n’y a aucune publication concernant une étude destinée à
rendre les ALV moins dangereux ou moins dommageables.
L’intérêt subit des Canadiens survient après les travaux de la National gambling impact
study commission (NGISC)341 et de la Productivity commission378 en Australie; dont les
rapports ont été publiés en 1999.
Essentiellement, trois provinces y travaillent : la Nouvelle-Écosse, l’Alberta et le Québec
par l’intermédiaire des initiatives du CQEPTJ.
L’objectif est typiquement de trouver des moyens de réduire les dommages chez les
joueurs excessifs sans que les joueurs récréatifs ne soient affectés par les mesures de
protection. Ces mesures visent surtout à renforcer le contrôle des joueurs sur leur
dépense au jeu, du moins à éviter que le joueur ne perde le contrôle parce qu’il est trop
stimulé ou qu’il a perdu la notion du temps.
Quelques mesures commencent à prouver leur utilité quoique celles-ci demeurent
toujours en périphérie du processus pathogène.
6.3.2.1 Une étude pionnière
Une première étude345 a comparé les conséquences d’appareils offrant (1) des vitesses
de jeu réduire, (2) l’absence de sons, (3) l’affichage du solde en argent plutôt qu’en
crédit, ainsi que (4) la désactivation du bouton d’arrêt. Malheureusement, le faible
nombre de participants n’a pas permis de tester chacune de ces modifications
isolément, puis en interaction. Il en résulte une situation où les effets de plusieurs
modifications structurales se confondent.
Les résultats indiquent que les joueurs pathologiques n’apprécient pas une réduction de
la vitesse de jeu ou la disparition des sons produits par l’appareil. Toutefois, à comparer
aux joueurs sans problème de jeu, ces modifications leur ont donné le même sentiment
de pouvoir s’arrêter, alors qu’ils s’en sentent moins capables avec les paramètres usuels
de jeu.
De plus, la consultation d’un compteur de la dépense au jeu a aidé les joueurs
pathologiques à cesser de jouer plus tôt. Bien que statistiquement significatif, cet effet
semble néanmoins sans grand impact.
Réalisée en laboratoire, cette étude ne permet pas de constater si ces mesures
pourraient diminuer l’incidence de jeu pathologique. On connaît surtout leur impact
global sur les attitudes des joueurs. Ces attitudes n’influencent pas nécessairement les
comportements nocifs.
345
Loba, P., Stewart, S. H., Klein, R. M., & Blackburn, J. R. (2001). Manipulations of the features
of standard video lottery terminal (VLT) games: effects in pathological and non-pathological
gamblers. Journal of gambling studies, 17(4), 297-320.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 195
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 196
6.3.2.2 Les mesures de jeu responsable implantées en Nouvelle-Écosse
La Nouvelle-Écosse a été la première juridiction en Amérique du Nord à publier des
études consacrées à l’évaluation des modifications structurales des ALV.
À trop vouloir en faire d’un seul coup, les résultats des premières études sont confus. Il
est difficile de discerner quelle modification a causé quoi. Quoi qu’il en soit, ces études
ne laissent pas entrevoir des bénéfices importants des modifications structurales qui ont
été apportées aux ALV. Typiquement, ces études visaient à appuyer le joueur afin qu’il
maintienne une perception adéquate du temps lorsqu’il joue sur les ALV. En contrôlant
le temps, on estimait que le joueur pourrait mieux contrôler sa dépense au jeu. Cela n’a
pas bien fonctionné. Les résultats ont été très maigres. Au lieu de demander
préalablement au joueur combien de temps il a l’intention de jouer, il aurait été sans
doute plus simple et plus efficace de lui demander combien d’argent est-il prêt à perdre.
Les résultats des deux derniers rapports de recherche présentent néanmoins des
mesures qui apparaissent comme réellement efficaces. Ce sont la fermeture des ALV à
minuit, la réduction de 25% du nombre d’ALV, la désactivation du bouton d’arrêt et la
réduction de 30% de la vitesse de jeu.
L’analyse des résultats est très complexe, très détaillée. Il n’est pas facile de la suite.
C’est déjà une raison pour les aborder avec prudence. Comme en témoigne le texte
suivant, la complexité rend difficile de conclure. Afin de ne pas surcharger le présent
document d’analyse, nous estimons qu’un résumé détaillé de la première étude suffit à
faire apprécier ces travaux.
Contexte
Les ALV sont apparus pour la première fois en Nouvelle-Écosse en mai 1991. Dix ans
après leur implantation, les vieux modèles (ALV-vx) ont été remplacés par un modèle
technologiquement plus avancé (ALV-1) qui incorporait quatre modifications
structurales; cela dans le but d’inciter les joueurs à adopter des comportements
conformes au concept de jeu responsable. Deux ans plus tard, des modifications
additionnelles ont été apportées afin de poursuivre le remplacement des ALV-vx avec un
modèle révisé (ALV-2). En janvier 2006, une troisième série de modification a donné
naissance aux ALV-3.
Plusieurs études ont conséquemment été publiées (voir Tableau 31). La liste des
modifications structurales est présentée brièvement dans le Tableau 32. L’explication de
ces modifications est détaillée ultérieurement dans ce texte.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 196
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 197
Tableau 31
Liste des études
Étude
Sigle
Référence346
A
NS-VL-RGF-2002
Schellinck, T., & Schrans, T. (2002, October). Video lottery
responsible gaming feature research - final report. Halifax, NS:
Atlantic lottery corporation & Focal research.
B
NS-VL-RGF-2003
Schrans, T., Grace, J., & Schellinck, T. (2004, October). 2003
NS VL responsible gaming features evaluation – final report.
Halifax, NS: Atlantic lottery corporation & Focal research.
C
NS-VL-RGF-2004
Schrans, T., Schellinck, T., & Grace, J. (2004, December). 2004
NS VL self exclusion program process test. Final report. Halifax,
NS: Focal research consultants, Ltd.
D
NS-VL-RGF-2005a
Omnifacts Bristol research. (2005, September 21). Nova Scotia
palyer card research project. Halifax, NS: Nova Scotia gaming
corporation.
E
NS-VL-RGF-2005b
Corporate research associates Inc. (2005, November). VLT time
change – Findings report. Halifax, NS : Nova Scotia gaming
corporation.
F
NS-VL-RGF-2006
Corporate research associates Inc. (2006, July). Video lottery
program changes – impact analysis. Halifax, NS: auteurs,
346
Dans cette section, les références sont indiquées en fonction de la lettre correspondante à
l’étude citée dans ce tableau, suivie du numéro de page. Par exemple, ( A 3-2 ) réfère à la page
3-2 du rapport : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002, October). Video lottery responsible gaming
feature research - final report. Halifax, NS: Atlantic lottery corporation & Focal research.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 197
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 198
Tableau 32
Modifications apportées aux ALV en Nouvelle-Écosse
Étude
ALV
A
ALV-1
Modifications
•
•
•
•
•
•
•
•
•
B
ALV-2
•
•
•
•
•
•
E
ALV-3
•
•
Nouveaux jeux.
Interface graphique améliorée.
Ajout d’un accepteur de billets.
Vitesse de jeu plus rapide.
Affichage en dollars du montant de la mise, de la remise et du
solde.
Horloge visible à l’écran.
Messages en mode fenêtre après 60, 90 et 120 minutes de jeu
continu indiquant le temps écoulé.
Après 145 minutes de jeu continu, un message en mode fenêtre
indiquant un encaissement forcé dans cinq minutes.
Après 150 minutes de jeu continu, un encaissement forcé se
produit. Un coupon de remboursement est émis, le solde est mis à
zéro et le chronomètre est réinitialisé.
Avant de commencer à jouer, le joueur a la possibilité d’indiquer la
durée souhaitée de la session de jeu.
Un message en mode fenêtre apparaît après 30 minutes de jeu
continu.
Le message en mode fenêtre ne permet pas de jouer à moins que
le joueur n’ait indiqué, oui ou non, s’il désire continuer.
Augmentation de la visibilité de l’horloge.
Élimination de l’affichage en crédits et augmentation de la visibilité
des montants de la mise et du solde.
Avertissement de 10 minutes, au lieu de 5, avant l’encaissement
forcé après 150 minutes de jeu continu.
Désactivation du bouton d’arrêt
Réduction de la vitesse de jeu de 30%.
La stratégie initiale de prévention de la Nouvelle-Écosse a consisté essentiellement à
appuyer les joueurs, uniquement durant la session de jeu, en les aidant à maintenir une
représentation correcte du temps écoulé et de la dépense au jeu ( A 1-3 ).
6.3.2.2.1 Étude A – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-1)
Le remplacement des ALV-vx s’est fait en plusieurs étapes. La première a consisté à
implanter des ALV-1 à partir de mai 2001 ( A 2-11 ). En janvier 2002, lorsque cette étape
a été complétée, les ALV-1 remplaçaient environ 38% des ALV-vx ( A 1-1 ). L’étude A a
été consacrée à mesurer les impacts de ces nouveaux appareils.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 198
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 199
Tableau 33
Répartition des joueurs selon le modèle d’ALV
à chaque étape de la recherche NS-VL-RGF-2002
Pré-test
Post-test 1
Post-test 2
Post-test 3
T1
T2
T3
T4
5 au 25
juin 2001
20 août au 13
septembre
2001
5 au 22
novembre
2001
23 janvier
au 4 février
2002
179
139
108
71
34
83
87
93
213
222
195
164
Temps de mesure
Date
A
N. de joueurs sur les ALV-vx B
N. de joueurs sur les ALV-1
B
N. total de joueurs
N. joueurs qui ont cessé de jouer
C
58
Taux d’adoption des ALV-1
16%
37%
44%
57%
Utilisation occasionnelle des ALV-1 au
cours du dernier mois D
37%
66%
61%
71%
A
Voir A 1-18
Voir A 3-9
C
Voir A 1-13 et 1-14
D
Voir A 2-51
B
Malheureusement, les auteurs n’ont pas pu réaliser une évaluation du comportement
des joueurs avant le début de l’implantation des ALV-1 ( A 1-4 et 1-10 ). Lorsque les
chercheurs ont commencé à recruter des participants, bien que l’implantation ne faisait
que commencer, 16% des joueurs au pré-test jouaient déjà régulièrement sur les
nouveaux modèles (voir Tableau 33). La première étape du remplacement partiel des
ALV-vx ne s’est terminée qu’en janvier 2002, c’est-à-dire à peine quelques jours avant la
mesure à T4. En ce sens, les expressions pré-test et post-test sont ici inappropriées. Il
est préférable d’utiliser les expressions associées aux temps de mesure.
6.3.2.2.1.1 Plan de recherche de l’étude A
Les joueurs ont été recrutés in situ dans 81 sites de jeu. Pour être sélectionné ( A 1-13 ),
il fallait être un joueur régulier347 sur ALV de 19 ans ou plus et être résident de la
Nouvelle-Écosse.
Les résultats de l’étude A ont été analysés par les auteurs selon trois répartitions des
joueurs.
•
347
Dans la section 2 du rapport, les données sont analysées selon que les joueurs
aient adopté, ou non, à T4 les ALV-1 au moins 75% des fois qu’ils ont joué.
Parce que la plupart des joueurs à T4 ont été exposés à l’existence des ALV-1
Il fallait donc jouer régulièrement au moins une fois par mois.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 199
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 200
depuis six à huit mois, cette division n’est pas sensible à un effet de nouveauté
( A 4-5 ). Les adoptants à long terme sont alors comparés aux non-adoptants.
•
L’adoption des ALV-1 n’était pas nécessairement permanente. Certains joueurs
sont revenus aux ALV-vx. Dans la section 3, l’analyse porte sur les sessions de
jeu plutôt que sur les individus. Peu importe le temps de mesure, toutes les
sessions de jeu réalisées sur les ALV-1 sont comparées aux sessions de jeu sur
les ALV-vx. Les temps de mesure étant réunis348, certains participants
contribuent aux données des sessions sur ALV-1 (ou sur ALV-vx) une, deux,
trois ou quatre fois selon la constance de leur adoption des ALV-1 (ou des ALVvx).
•
Dans la section 4 du rapport A, les joueurs qui utilisaient surtout les ALV-vx à T1,
et qui ont changé pour adopter surtout les ALV-1 à T4, constituent un groupe de
55 joueurs changeants. Ceux-ci ont été comparés à un groupe de joueurs
stables composé des participants dont la préférence a été la même à T1 et à T4.
Parmi les joueurs stables, 20 avaient déjà adopté les ALV-1 à T1, et 89 ont
résisté à l’attrait des nouveaux modèles tant à T1 qu’à T4. Il aurait été préférable
de ne pas inclure les 20 premiers joueurs, car le groupe des joueurs stables
semble alors trop hybride pour vraiment agir à titre de groupe contrôle des
joueurs changeants. Les conclusions de la section 4 sont à interpréter en
conséquence, c’est-à-dire avec prudence.
Enfin, lorsque les joueurs sont comparés en fonction de leur catégorie clinique, il s’agit
de la seule évaluation qui a été faite à T1. Il n’a pas été vérifié si des joueurs ont
développé une dépendance pathologique au jeu durant les neuf mois écoulés
entretemps. Cela aurait été utile349 pour établir sans équivoque que les changements de
comportement sont suffisamment importants pour conduire à une amélioration de la
condition clinique des joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu.
6.3.2.2.1.2 Caractéristiques des nouveaux ALV
Les ALV ont été modifiés dans le but d’offrir de nouveaux jeux, une interface graphique
améliorée, un accepteur de billets ainsi que 5 caractéristiques destinées à favoriser le
jeu responsable (page 1-1 et 5-1)350:
348
•
Une horloge continuellement visible à l’écran
•
L’affichage du montant de la mise, de la remise et du solde en dollars plutôt
qu’en crédits
En anglais, l’expression pooled décrit mieux cette procédure.
349
Il aurait néanmoins fallu que les évaluations subséquentes se fassent après un ou deux ans
de jeu régulier sur les ALV-1.
350
De plus, la vitesse de jeu s’avère plus rapide sur les nouveaux ALV ( A 2-41).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 200
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 201
•
Des messages en mode fenêtre351 signalant qu’il s’écoulé 60, 90 ou 120 minutes
depuis le début de la session de jeu. Le joueur peut alors indiquer qu’il désire ou
non terminer la session de jeu. Par contre, la réponse du joueur n’est pas
obligatoire. Si le joueur n’a pas répondu après 60 secondes, la fenêtre se ferme
automatiquement et permet la poursuite de la session de jeu.
•
Un avertissement survenant, après 145 minutes de jeu continu, signalant qu’il ne
reste plus que 5 minutes avant un encaissement forcé du solde.
•
Un encaissement forcé après 150 minutes de jeu continu.
L’impact de ces caractéristiques est ainsi confondu avec l’avènement de nouveaux jeux,
d’une interface graphique plus attrayante, une vitesse de jeu plus rapide ainsi que de la
présence d’un accepteur de billets (A 1-5 ). Ceci limite considérablement la certitude des
conclusions car il a pu y avoir des effets antagonistes.
Les modifications structurales apportées aux ALV-1 visent ( A 1-3 ) surtout à appuyer les
joueurs, durant la session de jeu, afin qu’ils ne perdent pas la notion du temps écoulé.
L’horloge est une fonction passive qui requiert que le joueur décide expressément d’y
porter attention. Les fenêtres en mode écran sont des fonctions actives qui s’exécutent
automatiquement, indépendamment de la pensée du joueur. En contrepartie, il n’y a
qu’une fonction passive, l’affichage de la mise et du solde en dollars, pour appuyer les
joueur à ne pas perdre la notion de l’argent dépensé. Il n’y a alors aucune interruption
du jeu qui a été faite en fonction de la dépense au jeu352.
Les objectifs de jeu responsable doivent être atteints sans affecter les joueurs sans
problème de jeu ou ceux à faible risque ( A 1-3, 1-24 et 2-24 ). Compte tenu de cette
dernière exigence, il est difficile de prétendre qu’il s’agit de mesures préventives car leur
impact n’est observable que chez les personnes qui éprouvent déjà des problèmes de
jeu.
6.3.2.2.1.3 Attrait des ALV-1
Les ALV-1 ont suscité la curiosité des utilisateurs réguliers car 84% des participants les
ont essayé au moins une fois ( A 2-51 et 5-4). Le taux d’adoption a continuellement
augmenté de 16% à T1 jusqu’à 57% à T4 (voir Tableau 33). Donc, au moins 27% des
participants ont préféré revenir aux anciens modèles après avoir fait au moins une
tentative avec les nouveaux.
Parmi les joueurs réguliers qui ont complété toutes les étapes de l’étude, 46% ont
adopté ALV-1 à T4 au moins 75% des fois qu’ils ont joué ( A 2-15 et 2-16 ). À T1, ces
joueurs manifestaient déjà une plus grande implication dans le jeu que ceux qui sont
restés fidèles aux anciens modèles. Ainsi, les ALV-1 ont attiré des joueurs qui utilisaient
les ALV plus souvent (+29%) à chaque mois, qui jouaient plus longtemps (+45%) à
chaque session de jeu et qui dépensaient davantage (+114%) ( A 2-23 et 5-4).
351
En anglais, pop up messages.
352
Ceci est pourtant facile à réaliser techniquement.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 201
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 202
Plus le risque était
élevé à T1 de
développer une
dépendance au jeu,
plus les joueurs ont
Catégories de l’Indice canadien de jeu excessif
été attirés par les
ALV-1 (voir Tableau
Sans problème
Faible risque Risque modéré
Avec problème
34). En effet,
25%
50%
49%
66%
l’adoption des ALV-1
à T4 a surtout
caractérisé les joueurs avec problème tandis que peu de joueurs sans problème s’y sont
intéressés. Cela peut être parce que les nouveaux jeux ont davantage sollicité les
illusions de contrôle ou parce que les caractéristiques ajoutées donnaient l’impression
de pouvoir atténuer la perte de contrôle sur le comportement de jeu.
Tableau 34
Adoption du jeu régulier sur les nouveaux ALV en fonction des
catégories cliniques de l’ICJE ( A 2-16 et 5-4 )
6.3.2.2.1.4 La fréquence mensuelle de jeu
Entre T1 et T4, les joueurs ont diminué de 33% le nombre mensuel des sessions de jeu.
Il n’y a pas eu de différence entre les adoptants et les non adoptants malgré qu’au
départ les adoptants jouaient 29% plus souvent à chaque mois. Le déclin de la
fréquence mensuelle de jeu semble surtout attribuable au fait que, nonobstant l’appareil,
les joueurs avec problème de jeu ont diminué leur fréquence mensuelle de jeu de 43%.
En ce sens, les ALV-1 n’ont eu aucun impact particulier sur la fréquence mensuelle de
jeu ( A 2-25 à 2-27 ).
6.3.2.2.1.5 La durée des sessions de jeu
Entre T1 et T4, les adoptants ont diminué de la durée de leurs sessions de jeu de 14%,
passant de 135 minutes à 116 minutes. En comparaison, cette durée est demeurée
stable à environ 90 minutes chez les non adoptants ( A 2-28 à 2-30, 4-7 et 5-4).
À noter toutefois que contrairement aux autres catégories de joueurs, les joueurs à
faible risque de développer un problème sur les ALV-vx ont augmenté leur durée de jeu
sur les ALV-1 ( A 3-27 à 3-28). En s’exposant davantage aux événements survenant en
situation de jeu, ces personnes ont plausiblement augmenté leur risque de développer
une dépendance pathologique.
6.3.2.2.1.6 Aucun impact sur la dépense au jeu
Bien que des changements de comportement se soient produits sur les ALV-1, ceux-ci
n’ont eu aucun impact sur les montants dépensés au jeu, et ce quelle que soit la
catégorie clinique des joueurs ( A 2-30 à 2-32, 3-32, 4-8 et 5-5). Considérant que le
risque de développer des problèmes augmente surtout en fonction de la dépense
globale au jeu ( A 2-32 ), il ne semble pas que les ALV-1 puissent aider à diminuer les
dommages causés par le jeu excessif.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 202
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 203
6.3.2.2.1.7 La vitesse de la dépense au jeu
La durée écourtée des sessions de jeu et la stabilité de la dépense révèle que les
joueurs ont simplement perdu leur argent plus rapidement sur les ALV-1. Les auteurs
ont alors considéré que la rentabilité par appareil pouvait augmenter avec les ALV-1 car,
en période d’affluence, les joueurs peuvent être remplacés plus rapidement par d’autres
joueurs ( A 5-5 ). Les données financières récentes sont cohérentes avec cette idée
quoiqu’une croissance des revenus par appareil avait déjà commencé avant
l’implantation des ALV-1.
Figure 86
2004-05
2003-04
2002-03
2001-02
2000-01
1999-00
1998-99
1997-98
1996-97
1995-96
1994-95
1993-94
1992-93
$60 000
$50 000
$40 000
$30 000
$20 000
$10 000
$0
1991-92
Revenu annuel net
Revenu par ALV en Nouvelle-Écosse
6.3.2.2.1.8 Perte de la notion du temps écoulé
À T1, les adoptants (46%) perdaient la notion du temps écoulé plus souvent que les non
adoptants (31%). À T4, il n’existait plus de différence significative. Seulement 15% des
joueurs perdaient alors la notion du temps écoulé ( A 2-36 ). De plus, dans l’ensemble,
28% des joueurs ont indiqué qu’il leur arrive moins souvent de jouer plus longtemps que
prévu.
Ces données n’appuient pas l’hypothèse d’un rôle causal des ALV-1 dans l’amélioration
de la performance. D’une part, les non adoptants manifestent une amélioration
considérable qui doit alors été attribuée à d’autres facteurs. Ces facteurs ont aussi agi
sur les adoptants. D’autre part, si l’amélioration semble plus importante pour les
adoptants, il importe de signaler que les joueurs qui ont choisi les ALV-1 sont au départ
des personnes qui sont davantage impliquées dans le jeu. Le potentiel d’amélioration
était alors initialement plus grand sans que l’ALV-1 n’y contribue.
6.3.2.2.1.9 Perte de la notion de la dépense au jeu
À T1, les adoptants (26%) perdaient la notion de la dépense au jeu plus souvent que les
non adoptants (17%). À T4, il n’existait plus de différence significative. Seulement 10%
des joueurs perdaient alors la notion de la dépense au jeu ( A 2-37 ). Sur les ALV-1,
environ 1 joueur sur 5, qui dépensait plus que prévu, a amélioré la fréquence de cette
perte de contrôle, alors qu’aucune amélioration n’a été notée chez les non adoptants.
Néanmoins, il faut le rappeler, les ALV-1 n’ont pas modifié la dépense globale au jeu de
l’ensemble des joueurs ( A 2-30 à 2-32, 3-32, 4-8 et 5-5). L’affichage de l’argent a
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 203
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 204
vraisemblablement augmenté l’impression de contrôle, mais sans affecter aucunement
la dépense excessive.
6.3.2.2.1.10 Impact du accepteur de billets
Le gobeur de billet est une caractéristique nouvelle sur les ALV-1. Ainsi, les ALV-1 ont
incité les joueurs à insérer deux fois plus d’argent avant de commencer à jouer. Au lieu
de commencer avec un billet de 10 dollars, les joueurs à risque ou avec problème ont
commencé avec un billet de 20 dollars ( A 3-13 à 3-14 ). De plus, les joueurs qui
éprouvent des problèmes de jeu ont utilisé davantage le accepteur de billets ( A 3-21).
6.3.2.2.1.11 Utilité des messages en mode fenêtre
Les messages en mode fenêtre survenaient automatiquement après 60, 90 ou 120
minutes de jeu continu. Ils provoquaient alors une interruption de jeu parce que, pour
s’en débarrasser, le joueur devait indiquer s’il désirait continuer à jouer ou non. De plus,
un message à 145 minutes indiquait qu’il ne restait plus que 5 minutes avant un
encaissement forcé qui était signalé par un autre message à 150 minutes.
Il existe une différence appréciable entre l’exposition aux messages en mode fenêtre
chez les adoptants par rapport aux non adoptants (voir Figure 87). Cela n’est pas
étonnant puisque les non adoptants n’utilisaient pas beaucoup les nouveaux ALV
( A 2-57 ).
Dans l’ensemble, les joueurs ont surtout été exposés au message survenant après 60
minutes, mais guère aux messages subséquents ( A 3-20 à 3-22, 4-18). À cet égard, les
auteurs signalent avec justesse que les messages subséquents tendent à survenir
surtout durant les sessions de jeu gagnantes ( A 3-22 ), sinon les joueurs perdent la
totalité de leur budget de jeu bien avant. En ce sens, il est douteux que ces messages
puissent contribuer à diminuer les pertes. Ceux-ci pourraient surtout être efficaces à
préserver les gains, et en cela, il existe ici un effet iatrogène possible qui doit être
évalué.
Figure 87
Proportion des joueurs qui ont vu les différents
messages en mode fenêtre
80%
60%
Non adoptants
40%
Adoptants
20%
0%
60
90
120
145
150
Temps de jeu continu (en minutes)
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 204
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 205
Plus spécifiquement, les joueurs avec problème ont été plus souvent exposés au
message de 60 minutes ainsi qu’à l’encaissement forcé ( A 2-58 ). En désaccord avec
ce que suggèrent les auteurs ( A 2-58 et 2-59 ), il n’existe ici aucun appui empirique
pour proposer une relation causale entre les messages en mode fenêtre et un meilleur
contrôle sur la dépense au jeu. Si les joueurs avec problème ont été exposés plus
souvent aux messages en mode fenêtre, c’est plausiblement parce qu’ils sont plus
enclins à choisir les ALV-1, et aussi parce qu’ils ont inséré davantage d’argent au début
de la session de jeu. En l’occurrence, les ALV-1 n’ont pas diminué la perte au jeu chez
les joueurs avec problème ( A 2-30 à 2-32, 3-32, 4-8 et 5-5).
6.3.2.2.1.12 Encaissement et réinsertion d’argent
Les ALV-1 n’ont eu aucun impact sur la fréquence des comportements suivants : (a)
recommencer à jouer après avoir encaissé, (b) insérer davantage d’argent après que le
solde ait atteint zéro, et (c) tenter de se refaire afin de récupérer de l’argent perdu
(A 2-38 ).
6.3.2.2.1.13 Interruption de la session de jeu
Durant l’utilisation des ALV-1, les joueurs excessifs ont interrompu moins souvent leur
jeu en raison d’un encaissement volontaire, du désir de prendre une pause ou du choix
de changer d’appareil ( A 3-17 ). Par contre, les joueurs excessifs ont plus souvent
laissé leur solde diminuer jusqu’à zéro ( A 3-17 ) et ont expérimenté des périodes
ininterrompues de jeu plus longues ( A 3-19 ). À chaque fois que les joueurs excessifs
ont laissé le solde atteindre zéro avant d’insérer d’autre argent, le compteur de temps
s’est remis à zéro. Dès lors, l’utilité des messages en mode fenêtre s’en trouve tout
autant diminué.
À l’évidence, les messages en mode fenêtre auraient avantage à apparaître en fonction
de la dépense au jeu plutôt qu’en fonction du temps écoulé.
6.3.2.2.1.14 Le jeu impulsif et le jeu planifié
Si la personne joue sans que cela n’était spécifiquement son intention lorsqu’elle a
décidé de se rendre au bar où les ALV sont situés, il s’agit d’un comportement dit
impulsif, sinon il s’agit d’un comportement dit planifié. Les ALV-1 n’ont eu aucun impact
sur les comportements de jeu impulsif ou planifié ( A 3-11 à 3-12 ), et cela quelle que
soit la catégorie clinique des joueurs.
6.3.2.2.1.15 Le jeu social
Les ALV-1 n’ont eu aucun impact sur le fait de jouer seul ou en groupe ( A 3-12 à 3-13 ).
6.3.2.2.1.16 Les motifs pour terminer la session de jeu
Les ALV-1 n’ont eu aucun impact en ce qui concerne les motifs pour terminer la session
de jeu ( A 3-24 à 3-26 ).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 205
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 206
6.3.2.2.1.17 Conclusions pour l’étude A
À chaque site, il y avait des anciens et des nouveaux ALV. Les joueurs étaient libres
d’utiliser les modèles de leur choix ( A 1-4 et 1-5 ). Les conclusions de cette étude se
limitent ainsi aux joueurs qui choisissent délibérément les ALV-1. On ne sait rien des
impacts de ces nouveaux modèles sur une clientèle qui se verrait contrainte à leur
usage, par exemple, si le remplacement avait été total.
Malheureusement, malgré qu’il s’agissait d’une étude longitudinale, il n’y a pas eu de
réévaluation clinique à la fin de l’étude. Le court délai entre T1 et T4 n’aurait sans doute
pas permis de constater une variation statistiquement significative du nombre de joueurs
avec problème de jeu. Par contre, il aurait permis de déterminer si les joueurs excessifs
à T1 avaient tout simplement quitté l’étude à T4, de sorte que toute amélioration
constatée aurait été attribuable à la mortalité expérimentale des joueurs qui ont des
problèmes de jeu plutôt qu’aux nouvelles caractéristiques. En l’occurrence, 31% des
participants à T1 ne faisaient plus partie de l’étude à T4 ( A 5-3 ).
En comparant les ALV-1 aux ALV-vx, là où il existe des différences statistiquement
significatives, celles-ci sont minimes ( A 4-17 et 4-28) de sorte qu’il n’est pas réaliste
d’anticiper des impacts cliniques notables au niveau individuel. En particulier, les
changements minimes de comportement observés ne se sont répercutés en aucune
modification de la dépense au jeu ( A 2-30 à 2-32) ce qui aurait été une conséquence
attendue si les ALV-1 avaient été profitables aux joueurs excessifs.
Les ALV-1 ont néanmoins permis aux joueurs, surtout aux joueurs excessifs, de
conserver une meilleure représentation du temps écoulé ( A 3-29), en raison de l’horloge
affichée à l’écran et peut-être aussi du message en mode fenêtre apparaissant après 60
minutes de jeu. Par contre, l’affichage du solde en dollars plutôt qu’en crédits n’a pas
concrètement aidé les joueurs avec problème à conserver une meilleure représentation
de la dépense au jeu ( A 3-33). Il apparaît clair que l’apparition des messages en mode
fenêtre devraient plutôt être déterminés par la dépense au jeu plutôt que par la durée de
jeu.
Dans cette étude, les caractéristiques destinées à inciter des comportements conformes
au concept de jeu responsable ne sont pas obligatoirement responsables de l’échec à
influencer appréciablement la perte au jeu. Les caractéristiques semblent avoir atteint
leur but d’appuyer une représentation plus adéquate du temps écoulé. C’est peut-être
simplement la nature du concept de jeu responsable qui a empêché une concrétisation
des gains en une diminution de la perte financière au jeu.
Certes, cet échec peut avoir été causé par l’ajout concomitant de nouveaux jeux, d’une
interface graphique améliorée et d’un accepteur de billets. La méthodologie de cette
étude ne permet pas de distinguer entre des effets qui aurait pu être antagonistes.
Enfin, cette étude longitudinale ayant été réalisée en moins d’un an, les variations
saisonnières dans la pratique de jeu n’ont pas été prises en compte. Lorsque les
groupes comparés expriment tous des changements à peu près identiques, dans la
même direction, il peut simplement s’agir d’une variation saisonnière qui n’a rien à voir
avec les modifications apportées aux ALV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 206
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 207
6.3.2.2.2 L’étude B – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-2)
6.3.2.2.2.1 Plan de recherche de l’étude B
Cette seconde étude a été réalisée selon une méthodologie plus conforme aux usages
scientifiques. Les joueurs réguliers sur ALV de deux régions, englobant 17 ou 18 sites,
ont été évalués avant l’implantation d’un second nouveau modèle d’ALV. Ces appareils
ont ensuite été implantés dans une seule région, l’autre servant de région témoin.
Environ 4 mois plus tard, les mêmes joueurs ont été évalués à nouveau.
Le temps de mesure 1 (T1) a été réalisé entre le 27 octobre et le 19 novembre 2003.
Les ALV modifiés ont été implantés en novembre 2003. Le temps de mesure 2 (T2) a
été complété entre le 12 mars et le 13 avril 2004.
6.3.2.2.2.2 Caractéristiques du second modèle des nouveaux ALV
Le second modèle est une modification du premier modèle (voir Tableau 32). En plus
des caractéristiques de l’ALV-1, le joueur a dorénavant la possibilité de préciser
initialement la durée qu’il entend consacrer à sa session de jeu. L’horloge est plus
visible. L’affichage des crédits se fait uniquement en argent, et il est plus gros. Un
message en mode fenêtre a été ajouté à 30 minutes, et il n’est pas possible de continuer
à jouer sans presser un bouton spécifique pour fermer cette fenêtre. L’avertissement
final du temps écoulé se produit cinq minutes plus tôt.
6.3.2.2.2.3 Résultats de l’étude B
Bien qu’une majorité des joueurs ont essayé les options proposées, la plupart ne les ont
pas adoptées sur une base régulière. Celles-ci ont eu très peu d’impact sur les
comportements.
6.3.2.2.3 Conclusion des deux premières études
Bref, ni les ALV-1, ni les ALV-2, ne satisfont au besoin de protéger les joueurs. Dès lors,
le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a moins insisté sur l’appui au joueur en ce qui
concerne la perception de la durée de jeu.
Une première solution de rechange a été cherchée dans le concept d’autoexclusion. Les
études C et D y sont consacrées.
6.3.2.2.4 L’étude C – Le programme d’autoexclusion pour les joueurs sur ALV
L’efficacité d’un programme d’auto-exclusion a été vérifiée dans 45 bars sur une période
de 3 mois. Trente d’entre eux ont fourni des rapports de détection.
Les détaillants devaient fournir un rapport à chaque fois qu’ils croyaient avoir détecté un
joueur sur la liste d’autoexclusion. Ceux-ci ne sont parvenus à identifier un inscrit qu’une
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 207
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 208
fois sur quatre. Pour chaque cinq signalements, ils se sont trompés trois fois. L’accès
aux photographies des inscrits n’a pas aidé à la détection des auto-exclus.
Les conclusions des auteurs de l’étude sont claires. Le programme ne satisfait pas aux
exigences. D’autres solutions doivent être recherchées.
“In the Video Lottery Self-Exclusion Process Test the retail monitoring component of the
Program proposed for multi-site Video Lottery was not sufficient to support program
objectives or expectations. The results indicate that reliance on the ability of retail staff to
subjectively detect and accurately report on the gaming activity of an “excluded” player is
neither reasonable nor appropriate.” (page xx)
“The Video Lottery Self-Exclusion Pilot Working Committee is advised to explore other
options for player monitoring, such as player card technology or “restricted access”
gaming areas, in order to meet “duty of care” program standards. ” (page xx)
6.3.2.2.5 L’étude D – La carte-client
L’échec de la détection, avec le programme d’autoexclusion dans les bars, a conduit à la
suggestion d’utiliser une carte magnétique afin que le joueur gère lui-même son
programme d’autoexclusion. Un test pilote a été réalisé dans dix sites hébergeant 70
ALV. L’utilisation de la carte n’était pas obligatoire.
La carte-client expérimentale était dotée de quatre caractéristiques rendant possible : (a)
l’affichage d’un bilan la dépense au jeu, (b) un arrêt de jeu forcé lorsque la dépense au
jeu atteint une limite préalablement fixée par le joueur, (c) dans une perspective d’autoexclusion, l’impossibilité de jouer certains jours spécifiés par le joueur, et (d) dans le but
d’empêcher le désir de se refaire, une abstinence forcée de 48 heures après une
session de jeu.
Sans équivoque, pour être efficace, l’utilisation de la carte client doit être obligatoire. En
effet, durant le test pilote, seulement 44% des joueurs l’ont utilisé à chaque session de
jeu, et cette proportion diminue à 28% pour les joueurs pathologiques. Lorsqu’ils ont
atteint la dépense limite, 44% des joueurs ont simplement retiré la carte et continué à
jouer sans elle. Le bilan de la dépense au jeu a été une caractéristique très appréciée.
Toutefois, les options d’auto-exclusion ont été plus rarement utilisées. En l’occurrence,
seulement 15% des joueurs, pathologiques ou pas, ont utilisé l’option d’abstinence
forcée. L’impossibilité de jouer certains jours a néanmoins été explorée par environ la
moitié des joueurs.
La carte client a été jugée utile bien que cette opinion ne garantit pas qu’elle soit
réellement efficace à diminuer les dommages des joueurs excessifs. Cet aspect n’a pas
été mesuré lors de l’étude pilote.
Par ailleurs, la lecture des données de la carte client doit être immédiate sinon, s’il faut
la réintroduire plusieurs fois, celle-ci se trouve surtout rejetée par les joueurs à risque
élevé de problème de jeu.
Enfin, la satisfaction à l’égard de la carte n’a pas déterminé si le joueur allait l’utiliser ou
pas. Une difficulté de ce système sera d’obtenir l’acception qu’elle soit obligatoire et qu’il
ne doit y avoir qu’une carte par personne, et une seule personne par carte.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 208
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 209
En contrepartie, la possibilité de dépenser sur les ALV en ayant recours à une carte
client est une idée qui intéresse beaucoup les gestionnaires, les spécialistes du
marketing et les chercheurs, qui auraient ainsi de meilleurs données pour comprendre et
anticiper les habitudes des joueurs. Dans cette perspective, Mark Dickerson propose
d’utiliser aussi cette carte afin d’obliger les joueurs à acheter leur budget de jeu bien
avant d’être dans l’aire de jeu353. Ainsi, les joueurs, surtout ceux qui éprouvent des
problèmes de contrôle, détermineraient leurs pertes acceptables pendant qu’ils sont à
froid.
6.3.2.2.6 Conclusion des études C et D
Il est certain que le programme d’autoexclusion, appliqué par les détaillants, est un
échec. Cette solution est à éviter.
L’idée de laisser le joueur déterminer lui-même ses périodes d’autoexclusion, à l’aide
d’une carte-client, est intéressante quoi qu’il subsiste d’importantes difficultés. Il faut
d’abord qu’elle soit obligatoire pour tout le monde. Le joueur ne doit pas avoir la
possibilité de contourner ses limitations en ayant accès à d’autres cartes-clients. Mais,
surtout, le joueur devrait avoir la possibilité d’inscrire ses périodes d’autoexclusion sans
avoir à insérer sa carte dans un ALV. Cela devrait pouvoir être fait dans des terminaux
situés ailleurs que sur les sites de jeu. Les kiosques de billets de loterie sont une
solution de remplacement à considérer.
6.3.2.2.7 L’étude E – Fermeture des ALV à minuit
Le 1 juillet 2005, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse a forcé la fermeture des ALV à
minuit. Avant cette mesure, 48% des joueurs avec problème jouaient dépassé minuit
alors que seulement 4% des joueurs sans problème le faisaient.
Cette mesure a eu comme conséquence de diminuer les revenus des ALV de 5,1% à
8,7%. En ce sens, l’argent qui, autrefois, était dépensé après minuit n’a pas été dépensé
à d’autres heures. En fait, seulement 2% des joueurs ont déplacé leur horaire de jeu.
Plus les joueurs sont à risque d’éprouver des problèmes de jeu, plus ils ont choisi de ne
pas jouer à d’autres heures. Dix-huit pour cent des joueurs avec problèmes de jeu ont
simplement choisi de faire autre chose après minuit. Ils ne se sont pas réinvesti dans le
jeu à une autre période de la journée.
Il s’agit de la première mesure efficace, démontrée à ce jour, qui est parvenu à réduire la
dépense au jeu plutôt que de la déplacer. Cette mesure a surtout eu un impact sur les
joueurs excessifs sans trop affecter les joueurs récréatifs. Il s’agit d’une mesure crédible
à considérer pour les salons de jeu.
353
Dickerson, M. (2003). Exploring the limits of ‘responsible gambling’: Harm minimization or
consumer protection? Proceedings of the 12th Annual Conference of the National Association for
Gambling Studies. Melbourne, Australia.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 209
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 210
6.3.2.2.8 L’étude F – Désactivation du bouton d’arrêt et ralentissement du jeu
(ALV-3)
Lors d’une dernière étude, l’impact conjoint d’une série de mesures a été évalué : (1) la
fermeture des ALV à minuit, (2) la réduction de 25% du nombre d’ALV, (3) la
désactivation du bouton d’arrêt, et (4) la réduction de 30% de la vitesse de jeu.
Ces changements ont eu un impact positif sur les joueurs excessifs. Notamment, ce
sont surtout eux qui ont diminué leur perte financière (voir Tableau 35).
Tableau 35
Diminution de la dépense au jeu (en dollars) en fonction des mesures prises
Catégories de l’ICJE
Sans
problème
Faible
risque
Risque
modéré
Avec
problème
Global
Fermeture des ALV à minuit
25
70
140
75
86
Diminution du nombre d’ALV
37
46
62
146
67
Réduction de la vitesse de jeu et
désactivation du bouton d’arrêt
21
30
71
219
114
Dans ce rapport de recherche, il n’est cependant pas clair à quel point la vitesse de jeu
a été réduite. La désactivation entraîne automatiquement une réduction de la vitesse
moyenne de jeu. Il n’est pas précisé si tous les joueurs ont vécu une diminution de la
vitesse à chaque partie jouée. Quoiqu’il en soit, cette mesure a été trois plus profitable
que la fermeture des ALV à minuit.
6.3.2.2.9 Conclusion des études E et F
Il s’agit de solutions à considérer. Parmi celles-ci, la réduction de la vitesse de jeu est à
considérer en autant qu’il s’agit d’une réduction réelle, et non une conséquence de la
seule désactivation du bouton d’arrêt. La réduction des heures d’opération des ALV est
aussi une mesure raisonnablement établie.
Nonobstant ces mesures, celles-ci agissent néanmoins en périphérie du processus
pathogène. Il demeure préférable d’envisager des mesures plus directes telle que des
mises en garde efficaces, l’affichage de la probabilité d’obtention des lots, la réduction
de la probabilité de vivre un gain significatif, de l’optimisme irréaliste, des croyances
erronées, ainsi que du taux de remise effectif.
6.3.2.3 Les mesures de jeu responsable implantées en Alberta
La province de l’Alberta a remplacé son parc d’ALV en 2003-2004 en implantant des
appareils auxquels quatre mesures de jeu responsable ont été ajoutées : (a) une
horloge, (b) l’affichage du solde en dollars, (c) des messages du temps écoulé par
tranches de 30 minutes, et (d) le numéro de téléphone d’une ligne d’aide. Par surcroît,
des affiches et des pamphlets, faisant la promotion du concept de jeu responsable, ont
été placés dans l’environnement de jeu. Un programme de formation, en vue d’assister
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 210
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 211
les personnes éprouvant des problèmes de jeu, a aussi été donné aux employés des
bars.
Avant et après l’implantation, l’impact des nouveaux ALV a été examiné354 auprès de
124 joueurs rencontrés in situ. Un groupe de 41 joueurs, persistant à jouer
exclusivement sur les anciens modèles, a servi de groupe contrôle. Huit mois après
l’implantation, la plupart des joueurs étaient conscients de l’existence de ces nouvelles
caractéristiques. Tandis que 69% des joueurs ont déclaré se fixer un objectif de
dépense, à peine 14% ont mentionné avoir eu un objectif de durée de jeu. Globalement,
quelle que soit la catégorie diagnostique, à l’exception de l’affichage du solde en dollars,
les nouvelles caractéristiques n’ont pas influencé les comportements des joueurs.
L’horloge et les messages du temps écoulé n’ont aucun impact notable.
6.3.2.4 Les mesures évaluées au Québec
Le Québec n’a pas de programme de recherche visant à développer des ALV plus
sécuritaires. Toutefois, à l’Université Laval, des études ont été entreprises par le Centre
québécois d’excellence pour la prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) afin
d’évaluer l’impact de quelques modifications.
Les recherches répertoriées dans le Tableau 36 sont intéressantes parce qu’elles
confirment qu’il est possible de modifier les ALV, ou leur environnement, afin
d’influencer positivement les croyances que les joueurs développent lors de leur
expérience de jeu ainsi que la persistance à jouer. Ces recherches se sont cependant
limitées à des périodes d’observation très brèves réalisées avec des joueurs non
pathologiques. Quoiqu’il en soit, même limité, ce matériel est plus profitable que
l’approche trop confuse de la Nouvelle-Écosse.
Il aurait été intéressant que le CQEPTJ s’intéresse au taux de retour effectif, à la
fréquence des récompenses, à la conscience de la situation355, à l’avènement des gains
significatifs, à la surcharge mentale356, au développement des automatismes357, ainsi
354
Wynne, H. J., & Stinchfield, R. (2004, April). Evaluating VLT responsible gaming features and
interventions in Alberta. Phase I, final report. Prepared for : Alberta gaming and liquor
commission.
355
(a) Endsley, M. R. (1999). Situation awareness and human error: designing to support human
performance. Proceedings of the high consequence systems surety conference. Albuquerque,
NM. (b) Endsley, M. R. (2000a). Theoretical underspinnings of situation awareness: a critical
review. In M. R. Endsley et D. J. Garland (editors), Situation awareness analysis and
measurement (pp. 3-32). Mahwah, NJ: Lawrence Erlbaum associates.
356
Gopher, D., & Donchin, E. (1986). Workload – an examination of the concept. In K. R. Boff, L.
Kaufman, & J. P. Thomas (editors), Handbook of perception and human performance. (Volume II:
Cognitive process and performance) (pp. 41-1 à 41-49). New York, NY: John Wiley and Sons.
357
(a) Schneider, W., & Shiffrin, R. M. (1977). Controlled and automatic human information
processing : I. detection, search, and attention. Psychological review, 84(1), 1-66. (b) Shiffrin, R.
M., & Schneider, W. (1977). Controlled and automatic human information processing: II.
Perceptual learning, automatic attending, and a general theory. Psychological review, 84(2),
127-190.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 211
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 212
qu’à des mises en garde agissant d’abord sur l’optimisme irréaliste358. À l’exception de
l’examen du bouton d’arrêt, les modifications étudiées jusqu’ici semblent encore trop en
périphérie des aspects centraux du processus pathogène.
Il serait aussi approprié que davantage d’études longitudinales in situ puissent être
réalisées.
Tableau 36
Études réalisées au CQEPTJ en vue d’atténuer la dangerosité des ALV
Étude
Référence
A
Ladouceur, R., Vézina, L., Jacques, C., & Ferland, F. (2000). Does a brochure about
pathological gambling provide new information? Journal of Gambling Studies, 16, 103108.
B
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Casino’s self-exclusion program. Journal of Gambling Studies, 16, 453-460.
C
Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2002) Symbols presentation modality as a determinant of
gambling behavior. Journal of Psychology, 136(4), 443-448.
D
Ladouceur, R., Sévigny, S., Blaszczynski, A., O’Connor, K., & Lavoie, M. E. (2003).
Video lottery: Winning expectancies and arousal. Addictions, 98, 733-738.
E
Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2003). Video Lottery Terminal Warning Messages and
the Persistence to Gamble. Gambling Research, 15(1), 45-50.
F
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prolong gambling on a video lottery terminal. Journal of Gambling Studies, 19, 433-438.
G
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Lottery retailers. Journal of Gambling Studies, 20, 181-185.
H
Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2005). Structural characteristics of video lotteries: Effects
of a stopping device on illusion of control and gambling persistence. Journal of
Gambling Studies, 21(2), 117-131.
I
Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of the format,
arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on
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J
Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2006). The impact of video lottery game speed on
gamblers. Journal of gambling issues, 17.
358
(a) Weinstein, N. D. (1980).Unrealistic optimism about future life events. Journal of personality
and social psychology, 39(5), 806-820. (b) Weinstein, N. D. (1982a). Unrealistic optimism about
susceptibility to health problem. Journal of behavioral medicine, 5(4), 441-460. (c) Weinstein, N.
D. (1987). Unrealistic optimism about susceptibility to health problem: conclusions from a
community-wide sample. Journal of behavioral medicine, 10(5), 481-500. (d) Weinstein, N. D.
(1989). Optimist biases ablout personal risks. Science, 246, 1232-1233.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 212
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 213
Tableau 36
Études réalisées au CQEPTJ en vue d’atténuer la dangerosité des ALV
Étude
Référence
Cloutier, M., Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2006). Responsible gambling tools : pop-up
messages and pauses on video lottery terminals. Journal of psychology, 140(5), 434438.
K
6.3.2.4.1 Étude A – Brochure d’information
La première étude ne concerne pas les ALV directement. Il s’agissait de tester l’impact
d’une brochure d’information sur le jeu excessif. La caricature frontispice représente
toutefois un ALV en train de dévorer un joueur. Recrutés dans les lieux publics, les
participants n’étaient pas nécessairement des joueurs.
Bien que la brochure a significativement augmenté la quantité des connaissances des
personnes, une minorité des personnes ont retenu plusieurs informations importantes,
dont la disponibilité des ressources d’aide et la possibilité de développer une
dépendance au jeu.
Tableau 37
Résultats de l’étude A concernant l’information procurée par une brochure
Lecture de la brochure
Non
( N = 56 )
Oui
( N = 59 )
Connaissance du fait que 96% de la population a déjà joué
0%
27%
Rétention du taux de prévalence du jeu excessif
4%
41%
Capacité de nommer 2 à 4 comportements à risque
43%
74%
Nombre de comportements à risque connus
1,42
2,50
Connaissance qu’il est possible de développer une dépendance
au jeu
13%
39%
Connaissance de l’existence de jeu pathologique chez les jeunes
11%
34%
Connaissance du fait que les joueurs excessifs dépensent au jeu
plus que prévu
4%
12%
Connaissance de la disponibilité des services d’aide
9%
Half
Variable
Il est à noter que 41% des personnes ont retenu le taux de prévalence du jeu excessif
qui était indiqué dans la brochure. Cette information est extrêmement importante car si
la donnée présentée est irréaliste, la brochure est susceptible d’instaurer un optimisme
irréaliste à l’égard du danger de développer une dépendance sur les AÉJ.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 213
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 214
6.3.2.4.2 Étude B – Le programme d’autoexclusion du casino de Montréal
L’analyse du programme d’autoexclusion du casino de Montréal a indiqué que 95% des
joueurs qui demandent à s’y inscrire sont des joueurs pathologiques. Les autres étaient
des joueurs à risque. Trente pour cent n’ont jamais obtenu un gros gain, alors que 10%
ont gagné une fois $ 10 000 ou plus. Le plus gros gain médian est de $ 1 200, et la plus
grande perte médiane est de $ 2 000. La plupart des inscrits (87%) ont indiqué avoir
perdu de fortes sommes au casino. La dette de jeu moyenne était de $ 11 962. La
plupart des inscrits (83%) ont rapporté vouloir cesser de jouer mais qu’ils étaient
incapables.
La plupart des joueurs (76%) s’inscrivaient pour la première fois au programme
d’autoexclusion, tandis que 17% s’y inscrivaient pour une seconde fois, et 7% l’ont fait
plusieurs fois. Les deux tiers ont requis une autoexclusion de 12 mois ou moins, alors
que le quart ont exigé la durée maximale de 5 ans.
Parmi les joueurs qui n’en étaient pas à leur première inscription, 80% étaient satisfaits
du service. Ceux-ci ont néanmoins témoigné qu’il leur était facile de retourner au casino.
En l’occurrence, 36% des joueurs sont retournés au casino environ 6 fois durant leur
période d’autoexclusion. La moitié ont simplement choisi d’aller plutôt jouer sur les ALV.
Quoiqu’il en soit, 30% des réinscrits ont indiqué que leur première période
d’autoexclusion a été efficace à les maintenir loin du casino.
En contrepartie, les joueurs ont indiqué que ce programme pouvait être inutile s’il n’y a
pas un suivi réalisé par un professionnel. Seulement 10% des joueurs ont pris l’initiative
d’aller consulter par soi-même.
En résumé, l’autoexclusion ne semble pas capter l’intérêt des joueurs à risque. Elle ne
capte pas non plus la majorité des joueurs pathologiques. Moins de 2% des joueurs
excessifs y font appel359. En ce sens, elle n’est pas une mesure préventive. Néanmoins,
c’est un programme qui peut aider des joueurs pathologiques à rester abstinents
pendant quelques mois. Toutefois, si aucun suivi clinique n’est apporté, les joueurs ne
confirment pas la viabilité de ce moyen à long terme. En ce sens, il peut s’agir d’une
mesure transitoire le temps que la personne chemine vers l’acceptation de son
problème de jeu. Dans ce cas, un suivi s’avère essentiel.
Ces données ne sont pas favorables à des stratégies de prévention ou de minimisation
des méfaits pour lesquelles l’autoexclusion serait la mesure centrale.
6.3.2.4.3 Étude C – Le mode d’arrêt des rouleaux
Un ALV, similaire à ceux disponibles dans les bars du Québec, a été modifié afin de
produire un arrêt simultané des rouleaux à comparer à un arrêt séquentiel. Les joueurs
exposés à l’arrêt séquentiel ont joué 48% plus de parties que ceux exposés à l’arrêt
simultané. Ces joueurs n’étaient pas pathologiques.
359
Voir à la page 11 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion
programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 214
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 215
Les auteurs ont proposé que le délai lors de l’arrêt séquentiel des rouleaux génère
davantage d’espoir de gagner et qu’il en résulte un optimisme accentué.
6.3.2.4.4 Étude D – La récompense monétaire
Outre une compensation financière de base de 10$, des joueurs sur ALV ont été invités
à jouer pour le plaisir, alors que d’autres joueurs ont eu la possibilité de gagner 40$
additionnels. Les résultats indiquent clairement que l’excitation à jouer ne dérive pas du
plaisir à jouer, mais de la possibilité de gagner de l’argent.
6.3.2.4.5 Étude E – Des messages d’information
La revue Gambling Research est inaccessible. Le contenu de cette étude n’est connu
que par ce qui en a été rapporté ailleurs360.
Des messages apparaissant en mode fenêtre, ou des pauses forcées dans le rythme de
jeu, ont comme conséquence de réduire le nombre de parties jouées.
En ce qui a trait aux messages, il y a lieu de citer quelques travaux similaires réalisés
aux États-Unis. Les messages étudiés visent généralement à corriger des croyances
erronées quant au hasard. À cet égard, des travaux initiaux361 se sont avérés efficaces à
les corriger partiellement, mais sans modifier les comportements de jeu. Toutefois, une
expérimentation récente362, ayant eu recours à des messages courts et précis, précédés
du préfixe « CAUTION », est parvenu non seulement à modifier les croyances erronées,
mais aussi à réduire les montants risqués au jeu sans diminuer le plaisir de jouer.
Il est aussi possible que les messages en mode fenêtre agissent sur le comportement
simplement parce qu’elles forcent un temps d’arrêt dans le jeu. Un tel effet a été
justement rapporté par Ladouceur et Sévigny363 dans l’article dont il est ici question.
6.3.2.4.6 Étude F – Le quasi-succès
360
Voir à la page 140 dans : Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005).
Impact of the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos
on gambling, International Gambling Studies, 5, 139–154.
361
Steenbergh, T. A., Whelan, J. P., Meyers, A. W., May, R. K., & Floyd, K. (2004). Impact of
warning messages and self-regulatory information on gambling knowledge and behavior.
International gambling studies, 4, 3-16.
362
Cette étude a été réalisée en laboratoire avec des étudiants universitaires qui n’éprouvaient
pas nécessairement des problèmes de jeu. Voir : Floyd, K., Whelan, J. P., & Meyers, A. W.
(2006). Use of warning messages to modify gambling beliefs and behavior in a laboratory
investigation. Psychology of addictive behaviors, 20(1), 69-74.
363
Le magazine Gambling research n’est pas répertorié par les banques de données. Il n’est pas
accessible par le prêt inter-bibliothèque. Il n’a pas été possible d’obtenir un tiré à part des auteurs
ni de l’éditeur. Ladouceur, R., & Sévigny, S. (2003). Interactive messages on video lottery
terminals and persistence in gambling. Gambling research, 15(1), 45-50.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 215
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 216
Le quasi-succès consiste à présenter à l’écran une succession de symboles, qui donne
l’impression qu’un lot pourrait être gagné, mais qui échoue au dernier moment.
Des joueurs récréatifs ont participé à une session de jeu qui a commencé avec 48
parties régulières, et une possibilité de 240 parties subséquentes qui étaient toutes
perdantes. Durant les parties systématiquement perdantes, le groupe contrôle n’a été
exposé à aucun quasi-succès. Le groupe expérimental a été exposé à des quasi-succès
lors de 25% des parties. L’observation des quasi-succès a incité les joueurs à jouer 33%
plus de parties.
6.3.2.4.7 Étude G – La sensibilisation des détaillants
Loto-Québec soumets ses détaillants à une session obligatoire de sensibilisation au jeu
excessif. Lors de cette étude, l’impact d’un vidéo a été évalué. À la fin du visionnement,
les détaillants ont indiqué mieux percevoir l’importance de recevoir de l’information sur le
jeu excessif, et mieux le comprendre. Ils estimaient mieux comprendre le meilleur
moyen pour entrer en contact avec un joueur excessif, et mieux saisir quand il était
approprié pour le faire. Ceux-ci ont aussi indiqué qu’il était important que leurs employés
soient aussi sensibilisés car ils sont les personnes les mieux placées pour aborder les
joueurs excessifs.
Lors d’un suivi, réalisé six mois plus tard, les détaillants ont indiqué avoir abordé plus
souvent un joueur apparemment excessif, discuté plus souvent des services d’aide et
suggéré moins souvent de jouer sur un autre ALV. Bien que ces résultats sont
statistiquement significatifs, les auteurs ne précisent pas la taille des effets. Combien de
fois les détaillants ont-ils plus souvent abordé un joueur? Les auteurs n’ont pas jugé bon
de le préciser.
Ce manque de précision est étonnant, et ne laisse pas vraiment présager une très
grande utilité à ce visionnement. Il est certain que la plupart des détaillants, forcés par
Loto-Québec à participer à un visionnement, vont y percevoir des mérites formidables.
6.3.2.4.8 Étude H – Le bouton d’arrêt
Lors d’une première expérimentation, des joueurs non pathologiques ont joué 30 parties
sans la possibilité de presser le bouton d’arrêt, puis 30 parties en ayant la possibilité de
le faire. Après les 30 premières parties, aucun joueur n’a développé une croyance
illusoire. Après les 30 parties suivantes, 87% des joueurs ont indiqué croire que l’usage
du bouton pouvait modifier les résultats, 57% qu’il était ainsi possible de contrôler les
résultats, 41% que l’habilité était profitable lors de ce jeux de ligne, et 26% y ont acquis
une illusion de contrôle.
Lors d’une seconde expérimentation, la moitié seulement des participants a été
autorisée à utiliser le bouton d’arrêt après 40 parties initiales où il n’était pas possible de
le faire. Par la suite, les deux groupes pouvaient jouer autant qu’ils le désiraient. Dans
un tel cas, les joueurs qui avaient la possibilité d’utiliser le bouton d’arrêt ont persisté à
jouer deux fois plus longtemps que ceux qui étaient privés de ce bouton. Ceux-ci
exprimaient alors les mêmes croyances illusoires que lors de la première
expérimentation.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 216
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 217
Ces données indiquent le l’utilisation du bouton d’arrêt a un impact sur le
développement des croyances illusoires, et que ces croyances se concrétisent en une
persistance accrue à jouer.
Par ailleurs, le bouton d’arrêt n’est pas fréquemment utilisé par les joueurs pour tenter
d’influencer le résultat des parties. Seulement 5% des joueurs réguliers y ont recours,
10% parmi les joueurs excessifs364.
6.3.2.4.9 Étude I – la disposition des ALV dans l’environnement de jeu
Commandée par la RACJ, cette étude visait à évaluer différents formats, disposition et
accessibilité des ALV dans les sites hors casinos. L’étude comprend une revue de
littérature, une discussion en groupe focus et une brève session de jeu en laboratoire. Il
ne ressort pas grand-chose de cette étude autres que des opinions qui pourraient
n’avoir aucun impact sur les comportements.
Les auteurs recommandent d’enlever les isoloirs, sauf là où des mineurs pourraient être
exposés à la vue des ALV. Là où ce retrait élimine un obstacle libérant l’accès à un
comptoir de bar proche, il est recommandé de vérifier si cette proximité a un impact.
Enfin, les participants ont exprimé l’opinion qu’il serait préférable de réduire le nombre
de sites où sont installés les ALV.
6.3.2.4.10 Étude J – Le ralentissement de la vitesse de jeu
La vitesse de jeu habituelle au Québec est d’environ 5 secondes par set365. Le
ralentissement des ALV à 15 secondes par set a réduit le nombre de parties jouées,
mais pas la durée de la session de jeu. Tandis que le rythme rapide des parties a
grandement fait sous-estimer le nombre de parties jouées, cette sous-estimation a été
considérablement réduite avec le rythme moins rapide. Par ailleurs, ce changement n’a
pas diminué le plaisir à jouer ni augmenté la concentration des joueurs à l’égard d’un
stimulus366 causant une distraction.
Les auteurs concluent que le ralentissement de la vitesse de jeu pourrait atténuer les
dommages simplement parce que les joueurs dépensent moins rapidement leur argent.
C’est logique quoiqu’il serait préférable, avant de conclure, de vérifier si le
ralentissement n’incite pas à une augmentation de la valeur des mises dans le but de
jouer simultanément sur plus de lignes.
364
Voir à la page D-42 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research
Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova
Scotia Department of Health. Problem gambling services.
365
Un set équivaut à presser une fois sur le bouton Jouer . Si un seul crédit est misé, le set
correspond à une seule partie. Si des crédits sont misés sur plusieurs lignes, le set englobe
l’exécution de plusieurs parties réalisées simultanément.
366
Une sonnerie de téléphone.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 217
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 218
Dans cette recherche, il y a une amorce pour étudier les conséquences de la pression
temporelle sur la charge mentale en situation de jeu. Malheureusement, la détection
d’une sonnerie de téléphone n’est pas la meilleure variable pour mesurer ce
phénomène. La production d’intervalles temporels aurait été une mesure mieux
standardisée et plus détaillée.
6.3.2.4.11 Étude K – L’imposition de pauses en situation de jeu
L’avènement aléatoire de pauses de 7 secondes, ou de messages répétant des
croyances exactes quant au caractère incontrôlable de la situation de jeu, a la capacité
de diminuer le nombre de croyances erronées, sans les éliminer complètement, mais
elle a surtout comme conséquence appréciable de diminuer la certitude à l’égard des
croyances erronées.
Ce rapport de recherche a le grand mérite de préciser la taille des effets observés. Dès
lors, les auteurs appuient raisonnablement leur conclusion quant à l’utilité réelle
d’insérer des pauses ou des messages. La diminution de la certitude envers les
croyances erronées crée une condition propice pour de nombreuses autres interventions
directes visant à contrecarrer les facteurs pathogènes de l’expérience de jeu sur ALV.
Sans autre modification structurale, l’impact des pauses ou des messages risque
cependant de ne pas se concrétiser en une meilleure protection des joueurs.
6.3.3 Les mesures développées en Europe
À l’exception des Pays-Bas, les mesures développées en Europe sont peu connues.
Traditionnellement, les établissements de jeu se limitent à des petits casinos situés dans
des endroits de villégiature. Les problèmes de jeu pathologique y sont moins dénoncés.
La pression pour développer des mesures de protection y est moindre.
6.3.3.1 Les mesures développées aux Pays-Bas
Aux Pays-Bas, la gestion des casinos est un monopole accordé à la firme Holland
Casino367. À l’occasion du projet du casino de Montréal, Loto-Québec a consulté cette
firme qui a considérablement influencé l’ensemble de la gestion subséquente des
casinos québécois368.
Il existe aussi aux Pays-Bas des Amusements Centra qui ressemblent aux salons de
jeux que Loto-Québec entend développer. À l’exception d’y installer des appareils de
type Nijpels, il ne semble pas y avoir de mesures de protection particulières.
367
www.hollandcasino.nl
368
(a) Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission
permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1837, CI-1838, CI1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec. (b) Déclaration de monsieur Claude Quinn,
directeur général adjoint aux enquêtes criminelles et aux supports techniques de la Sûreté du
Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45,
pages CI-1837, CI-1838, CI-1842 et CI-1848, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 218
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 219
6.3.3.1.1 Les mesures adoptées par la compagnie Holland casino.
L’opération des 14 casinos néerlandais est un monopole accordé à la compagnie
Holland Casino369. Comme ailleurs en Europe, les visiteurs doivent obligatoirement
s’identifier à l’entrée. Il existe un registre central informatisé qui conserve l’historique de
fréquentation de chaque visiteur.
Sur place, une brochure370 est offerte aux joueurs dans laquelle ceux-ci sont invités à
s’adresser immédiatement au personnel du casino si le jeu devient un problème. La
brochure englobe un formulaire permettant de requérir une autoexclusion. Si les joueurs
estiment ce service insuffisant, la brochure indique qu’il est possible de s’adresser aux
Joueurs anonymes. Les coordonnées sont alors indiquées. Il n’y a pas de référence à
une ligne téléphonique de type « Jeu : aide et référence ».
Le personnel a été formé à dépister les joueurs qui éprouvent des problèmes de jeu et à
initier une discussion avec ces personnes. Holland casino favorise ce type de contact
bien qu’elle ne l’impose pas systématiquement. Lors de cette discussion, le personnel
tente d’aborder les signes révélant l’existence d’un problème de jeu et mentionne les
services offerts par le casino, essentiellement un programme d’autoexclusion.
Le programme d’autoexclusion offre deux options371. Les joueurs ont la possibilité,
pendant 6 mois ou un an, de faire limiter leur nombre de visites mensuelles à 8
présences ou moins. Autrement, les joueurs peuvent exiger une exclusion complète
pendant 6 mois, un an, ou une durée indéfinie de plus d’un an. À la fin de la durée de
l’autoexclusion, une rencontre est prévue avec un membre du personnel afin de
déterminer s’il est approprié de mettre fin à cette mesure ou à quelles conditions celle-ci
pourrait être ne pas renouvelée.
En raison du registre des visiteurs, l’autoexclusion s’applique efficacement à l’ensemble
des casinos quoiqu’il subsiste de nombreux autres accès aux AÉJ dans les centres
d’amusement ou dans les hôtels.
369
Cette compagnie est le principal consultant de Loto-Québec en matière de gestion des
casinos et d’exploitation des AÉJ.
370
Laat spelen een spel blijven. (Les jeux doivent demeurer un jeu).
http://www.hollandcasino.nl/NR/rdonlyres/6E13DAF0-52B4-4053-9DD64EB6F11DE160/0/laatspeleneenspelblijven.pdf Consulté le 5 janvier 2007.
371
Remmers, P. (2001, October). Responsible service of gambling in Europe and South-Africa.
RCG conference – Practical applications for the gambling industry. Conférence tenue le 27
novembre 2001 au Stamford Grand Hotel, North Ryde.
http://www.betsafe.com.au/conferences/nov01/premmers.ppt Consulté le 5 janvier 2007.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 219
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 220
Selon une étude de la clientèle des casinos372, le contact direct des employés avec les
joueurs a rejoint 16% des joueurs pathologiques. Pour y parvenir, 1,5% de la clientèle
totale a été abordée pour un total de plus de 7 000 entrevues. C’est relativement peu
compte tenu que 5,1% des visiteurs présents au casino, à n’importe quel moment,
étaient des joueurs pathologiques (2,2% de la clientèle totale). Néanmoins, la majorité
(63%) de ceux qui ont été contactés ont apprécié cette expérience, tandis que 19% l’ont
considérée comme négative.
Par ailleurs, 24% des joueurs pathologiques ont eu recours au programme
d’autoexclusion, et 18% ont requis une limitation de la fréquence de leurs visites au
casino. C’est plus qu’ailleurs dans le monde.
6.3.3.1.2 Les AÉJ de type Nijpels
Aux Pays-Bas, une commission parlementaire373 au sujet des AÉJ, tenu entre 1994 et le
1 avril 1995, a proposé quatre stratégies pour modifier les appareils afin de les rendre
moins dommageables :
•
Briser l’automatisme du jeu
•
Réduire la durée de jeu,
•
Limiter l’excitation au jeu,
•
Réduire le caractère sollicitant de l’appareil de jeu.
En juin 2000, une loi adoptée par le gouvernement néerlandais a forcé les opérateurs à
intégrer, au plus tard le 1 janvier 2002, 14 des modifications proposées afin de
concrétiser ces stratégies. Ce sont :
1. Une nouvelle partie ne peut être commencée que par un geste conscient
de la part du joueur. Un bouton démarreur doit obligatoirement être
enfoncé et relâché.
2. Tous les lots gagnés doivent être déposés dans un solde de gain. Les
mises ne peuvent pas être payées à partir de ce solde.
3. Encaissement automatique
372
(a) De Bruin, D.E., F.R.J. Leenders, M. Fris, H.T. Verbraeck, R.V. Braam, G.F. van de
Wijngaart (2001). Gasten van Holland Casino. Effectiviteit van het preventiebeleid
kansspelverslaving. Utrecht: Centrum voor Verslavingsonderzoek. ISBN: 90-71772-31-4
http://www.drugresearch.nl/en/GastenVanHollandCasino.EffectiviteitVanHetPreventiebeleidKanss
pelverslaving Consulté le 2 décembre 2006. (b) Centrum voor Verslavingsonderzoek. (2001).
Visitors of Holland Casino : effectiveness of the policy for the prevention of compulsive gambling
(Synopsis). www.toezichtkansspelen.nl_information.html Consulté le 20 décembre 2006.
373
La Commissie Kansspelautomaten est connue sous le nom de Commission Nijpels, du nom
du parlementaire qui l’a dirigé.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 220
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 221
ƒ
Dès que le solde de gain atteint la valeur de 40 Euros.
ƒ
Lors de l’obtention du lot maximal de 200 crédits (40 Euros).
4. Après un encaissement automatique, l’appareil n’accepte aucune
nouvelle commande pendant 15 secondes.
5. Obligation d’une limite maximale de 40 Euros – en combinaison avec un
module d’information sur le jeu. Ce module doit être activé :
ƒ
À la demande du joueur;
ƒ
Lors de l’obtention de la limite;
ƒ
Lors de l’encaissement d’un prix;
ƒ
Lorsque le joueur met un terme à la session de jeu.
6. Les machines à sous doivent être conçues de manière à ce qu’elle ne
permettent pas de passer d’un jeu à l’autre avec plus de 200 crédits.
Sinon, un encaissement automatique doit être provoqué.
7. Quoi qu’il fasse, un joueur ne peut pas perdre plus de 40 Euros à chacun
de ses gestes.
8. La moyenne de la durée des parties doit être augmentée à 4 secondes,
et la durée d’une partie doit être d’au moins 3,5 secondes.
9. Impossibilité de répéter rapidement les mises en bloquant le bouton
Jouer .
10. Éclairage inerte des appareils lorsqu’ils ne sont pas en fonctionnement.
11. Limitation des sons des appareils lors de l’encaissement.
12. Aucun dispositif de change (accepteur de billets) directement sur
l’appareil.
13. Message sur l’appareil indiquant qu’il s’agit de jeux de hasard.
14. Implantation rapide de cette réglementation.
6.3.3.1.3 Les mesures adoptées dans les centres d’amusements
Les centres d’amusement (Amusements Centra) sont essentiellement des salons de jeu
où on retrouve des AÉJ et des TJI (Meerspeelers). Ils ressemblent aux salons de jeux
proposés par Loto-Québec, mais sans autres activités de divertissement plus générales.
Exploités par l’entreprise privée, on n’en sait que très peu de chose. À tout le moins, les
centres d’amusements qui ont implanté des programmes de prévention du jeu excessif
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 221
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 222
plus intensifs ont constaté une plus grande diminution de leur clientèle374. Pour apprécier
cette expérience, la documentation écrite en néerlandais devrait être traduite.
Depuis le 1 janvier 2002, les centres d’amusement doivent offrir des appareils de type
Nijpels. Il serait important d’obtenir une évaluation de cette expérimentation avant
d’implanter des ALV dans les salons de jeux.
6.3.3.2 Les mesures expérimentées dans un casino suisse
Le casino de Locarno, en Suisse, a formé ses employés à détecter les personnes qui
pourraient éprouver des problèmes de jeu. En présence d’un tel joueur, les employés
signalent sa présence à un superviseur qui entreprend de répertorier les comportements
du joueur : (1) le temps passé à jouer, (2) le nombre de visites, (3) les montants d’argent
misés, et (4) les montants perdus. Si les comportements du joueur confirment des
habitudes de jeu excessives, le psychologue de l’établissement invite le joueur à une
rencontre au cours de laquelle une période de monitorage est proposée. Si le joueur
accepte, une entrevue explicative sur le jeu excessif est accordée et ses comportements
ultérieurs de jeu sont comptabilisés durant la période de monitorage. Durant cette
période, le superviseur fournit au joueur un compte-rendu des observations qui ont été
faites de son comportement. Au terme de cette période, une mesure d’auto-exclusion
est proposée s’il s’avère que le monitorage n’est pas suffisant.
Une étude pilote375 a permis de constater des résultats intéressants, bien que la taille de
l’échantillon n’a pas permis de démontrer un apport statistiquement significatif. Comparé
à un groupe contrôle (N = 6), le groupe expérimental (N=6) a, durant la période de
monitorage, passé moins de temps au casino, a fait moins de visites, a misé moins
d’argent et il en a perdu moins. Ces résultats préliminaires méritent d’être approfondis.
Toutefois, il serait utile de pouvoir séparer les impacts de l’entrevue explicative et ceux
attribuables à l’information donnée quant aux comportements observés.
6.3.4 Les mesures développées en Océanie
6.3.4.1 Les mesures implantées en Australie
L’Australie est le pays le plus expérimenté au monde avec les AÉJ. Dans l’état de la
Nouvelle Galles du Sud, ils y sont implantés depuis 1956. Les AÉJ sont cependant plus
récents dans les autres états.
374
de Bruin, D., Benschop, A., Braam, R., & D.J. Korf. (2006). A five-year monitoring and followup study on the effects of product differentiation and stricter admission controls in amusement
centres. Utrecht, Amsterdam: CVO, Universiteit van Amsterdam.
375
Sani, A., Carlevaro, T., & Ladouceur, R. (2005). Impact of a Counselling Session on at-risk
Casino patrons : A Pilot Study. Gambling Research, 17, 47-52. N’ayant pas pu obtenir un
exemplaire de cette publication, le manuscrit a pu être consulté à l’adresse suivante :
http://www.jeu-excessif.ch/pdf/congres/2005/ressources/Sani_Carlevaro_Ladouceur.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 222
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 223
Tandis que le taux de pénétration annuel des ALV est d’environ 10% au Québec, le taux
de pénétration mensuel des AÉJ en Australie est de 38% 376. En contrepartie, le taux de
remise moyen y est d’environ 88%-89% 377 alors qu’il est de 92% au Québec. C’est un
monde de différence. Pour cette raison, nous ne ferons qu’un survol sommaire des
travaux réalisés en Australie. Leur applicabilité au Québec est incertaine.
La politique très libérale de l’Australie en matière de jeu laisse peu de marge de
manœuvre aux états pour imposer des restrictions aux entreprises privées qui gèrent le
jeu. Il en résulte un surinvestissement dans des programmes d’autoexclusion. Les états
essaient beaucoup de légiférer et réglementer afin d’imposer des responsabilités civiles
aux entreprises privées en ce qui a trait à l’efficacité de leur programme d’autoexclusion.
Par des dépliants d’auto-dépistage, on souhaite que les joueurs prennent conscience le
plus rapidement possible de leur problème, et qu’ils exigent des établissements que
ceux-ci appliquent sévèrement le programme. Placer ainsi l’auto-dépistage et
l’autoexclusion au centre des mesures de protection semble voué à l’échec.
6.3.4.1.1 Les mesures proposées en Australie par la Productivity Commission
L’Australie est un Commonwealth, dirigé par un gouvernement fédéral, qui regroupe six
états provinciaux et deux territoires. Les états et territoires ont la responsabilité de gérer
le jeu à l’intérieur de leur juridiction, mais le gouvernement fédéral a conservé des
pouvoirs afin de s’assurer que les réglementations provinciales demeurent fidèles à la
politique très libérale des Australiens à l’égard du jeu. Dans cette perspective, le
gouvernement australien a mandaté un organisme, la Productivity Commission, afin
d’entreprendre une évaluation exhaustive des besoins de jeu, de l’offre conséquente, du
comportement des joueurs, des problèmes de jeu ainsi que des mesures qui pourraient
appuyer une politique plus globale concernant le jeu. Entre août 1998 et juillet 1999,
cette commission a réuni des représentants des organismes publics et de l’industrie du
jeu. De nombreuses audiences ont été tenues au cours desquelles 290 mémoires ont
été examinés publiquement. La Commission a aussi reçu 39 mémoires confidentiels. À
terme, la Commission a publié un imposant rapport378 qui constitue un impressionnant
modèle à suivre … un modèle, pas nécessairement un contenu.
Traditionnellement, les MAS et APV sont distribués dans des clubs qui ont une vocation
récréative afin de générer un revenu complémentaire. Ces clubs sont toutefois souvent
en compétition avec un hôtel-casino379 qui dispose aussi d’un très grand nombre d’AÉJ,
et quelques hôtels qui sont cependant limités à 30 AÉJ chacun.
376
Voir à la page 10 dans : Productivity Commission (1999). Australia’s Gambling Industries,
Report No. 10. AusInfo: Canberra, Australia.
377
Voir à la page 33 dans : Banks, G. (2002). The Productivity commission’s gambling inquiry : 3
years on. Keynote address to the 12th annual conference of the National association for gambling
studies (NAGS), 21 November 2002, Melbourne, Australia.
378
Productivity Commission (1999). Australia’s Gambling Industries, Report No. 10. AusInfo:
Canberra, Australia.
379
Typiquement, il n’y a qu’un seul casino par ville.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 223
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 224
Les états et territoires sont confrontés à une industrie qui exerce de fortes pressions
pour une déréglementation la plus large possible du jeu (pages 12.14, 12.15 et 12.20).
L’industrie avance que trop de contraintes ne peut qu’inciter les Australiens à se diriger
vers des sites illégaux qui leur offrirait un environnement de jeu libre d’une
réglementation qui ne serait pas appréciée. Il existe en Australie un concept populaire,
celui de la souveraineté du consommateur, selon lequel l’individu est mieux placé pour
évaluer quand les coûts dépassent les bénéfices. Les efforts de réglementation sont
aisément qualifiés de paternalisme et de contrôle social excessif. De l’avis de la
commission, il s’ensuit que les juridictions ont adopté des politiques qui reposent sur des
objectifs qui sont mal définis (pages 12.14 et 12.15).
6.3.4.1.1.1 La modification structurale des AÉJ
Considérant une modification structurale à apporter aux appareils ou aux sites, la
commission a conclu qu’il n’est probablement pas possible de diminuer véritablement
les dommages causés aux joueurs excessifs sans imposer des inconvénients pour les
joueurs sans problème de jeu :
“For example, one strand of harm minimisation aims to reduce problem gambling
by changing the designs of gambling technology and venues. For this to be
worthwhile, the benefits from reducing problem gambling have to be greater than
the costs for recreational gamblers. Some design changes will not pass this test.”
(Productivity commission, 1999, page 12.15)
Conséquemment, la commission s’est clairement prononcée en faveur d’une politique
de minimisation des méfaits plutôt qu’une de prévention des méfaits en ce sens que la
minimisation implique que les mesures ne doivent pas affecter les bénéfices tirés de
l’exploitation du jeu (page 12.21)380.
Six catégories de mesures ont été identifiées comme étant envisageables (pages 16.2
et 16.3) :
Tableau 38
Catégories des mesures possibles selon la Productivity commission (voir pages 16.2 et 16.3)
Catégorie
Commentaire
1 - Interdire les activités de jeu qui sont
dommageables.
Sur les AÉJ, elles ont toutes le potentiel d’être
dommageables.
2 - Augmenter les connaissances des joueurs
afin de les prémunir contre le risque de
développer une dépendance pathologique à
l’égard du jeu.
Les mesures existantes prennent la forme de
brochures, de bornes interactives ou de
modules explicatifs.
380
À l’appui de sa position, la commission cite l’automobile, en exemple, qui est un produit
dangereux qui ne saurait être interdit en raison des nombreux bénéfices qu’elle apporte à la
quasi-totalité de la population. Comparer les bénéfices de l’automobile aux bénéfices des
activités de jeu semble toutefois extraordinairement disproportionné.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 224
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 225
Tableau 38
Catégories des mesures possibles selon la Productivity commission (voir pages 16.2 et 16.3)
Catégorie
Commentaire
3 - Contrôler l’environnement de jeu afin de
prévenir la perte de contrôle chez les joueurs
excessifs.
La principale mesure consiste à instaurer un
programme d’autoexclusion. Sur les AÉJ, il
serait possible de limiter la durée de jeu ou les
montants dépensés.
4 - Préciser dans la loi les responsabilités
(duty of care) des exploitants à l’égard de leurs
clients.
La stratégie australienne mise beaucoup sur
l’auto-dépistage des problèmes de jeu, par les
joueurs excessifs, afin de les inciter à réclamer
des exploitants des mesures pour minimiser
leurs dommages. Si la loi définit clairement les
obligations, la crainte des poursuites
judiciaires forcerait les exploitants à multiplier
les mesures d’atténuation des dommages.
5 - Vérifier continuellement l’intégrité des jeux.
6 - Dispenser une aide directe aux joueurs qui
subissent des dommages en raison du jeu
excessif.
De plus, la commission a estimé qu’il n’y a aucun motif clair pour lier les permis
d’exploiter des AÉJ aux permis d’alcool.
La commission n’a pas évalué que la réduction du nombre d’appareils ou du nombre de
sites pourraient être des mesures efficaces pour diminuer les méfaits du jeu excessif,
sauf là où le nombre d’appareils ou de sites est préalablement peu élevé (chapitre 15).
En ce qui concerne la réglementation des AÉJ, il n’a pas jugé bon de proposer un taux
de remise maximal obligatoire ou un abaissement du taux de remise minimal (page
16.21 et 16.22).
Bref, on ne touche pas au processus pathogène.
6.3.4.1.1.2 La liberté de choix des utilisateurs
La liberté de choix des utilisateurs doit être appuyée par la divulgation, pour chaque jeu
et chaque appareil, des montants qui peuvent être perdus à chaque heure381 ainsi que
de la probabilité d’obtention de chacun des lots importants figurant dans la table de lots
(page 16.21). La nature des jeux doit être mieux expliquée (pages 16.22 à 16.25).
Lorsque des établissements de jeu ont recours à des cartes électroniques qui font le
monitorage de la dépense individuelle au jeu, un relevé des dépenses devrait être posté
régulièrement aux joueurs (page 16.27).
381
En tenant compte d’une vitesse moyenne de jeu.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 225
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 226
6.3.4.1.1.3 Le notion de « duty of care »
Selon la commission (pages 16.44 à 16.51), le meilleur incitatif pour que les exploitants
construisent des environnements de jeu sécuritaire consiste en une définition juridique
plus précise du « duty of care ». Une définition efficace de ce concept aurait comme
conséquences d’obliger les exploitants à :
•
sensibiliser leurs employés au jeu excessif et à les inciter à détecter les joueurs
qui éprouvent conséquemment des problèmes de jeu;
•
développer des messages et mises en garde au sujet des risques découlant du
jeu excessif;
•
référer les personnes qui éprouvent des problèmes de jeu à des services qui
viennent en aide aux joueurs excessifs;
•
éviter que les joueurs soient incités ou en arrivent à consommer trop d’alcool;
•
adopter des mesures cohérentes avec le concept de jeu responsable (en ce qui
concerne les lieux des guichets automatiques, l’achat d’AÉJ sécuritaires une
publicité équitable).
La crainte des poursuites judiciaires, intentées par des joueurs qui auraient perdu des
sommes importantes en raison d’une faute de l’exploitant, motive certainement tous les
efforts pour définir des codes de commercialisation plus éthiques. Ayant sans doute
l’aval de nombreux conseillers juridiques, ces codes ne sont toutefois jamais évalués par
des spécialistes des problèmes de jeu. On ne connaît pas leur efficacité au-delà des
salles d’audience.
6.3.4.1.1.4 Le concept d’accessibilité
En Australie, la Productivity commission a proposé d’évaluer l’accessibilité en fonction
de neuf dimensions. Voici comment ces dimensions s’appliqueront à l’offre de jeu
lorsque les salons de jeux ouvriront.
Tableau 39
Évaluation de l’accessibilité en fonction des neuf dimensions
proposées par la Productivity commission en Australie
Dimension
Casinos
ALV dans les bars
Salons de jeu
Nombre d’AÉJ
5 900
13 870
Réduit à 11 370 (-18%)
1 770
Mais 13 140 (-5%) si on
considère les 1 770 ALV
déplacés dans les salons de
jeux
Distribution
spatiale
Casinos situés en retrait
des quartiers
densément peuplés.
Bars situés partout
au Québec, près des domiciles
et des lieux de travail
Montréal (+650%)
Québec (+335%)
Trois-Rivières (+308%)
Mont-Tremblant
Trois hippodromes et
une station touristique
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 226
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 227
Tableau 39
Évaluation de l’accessibilité en fonction des neuf dimensions
proposées par la Productivity commission en Australie
Dimension
Casinos
ALV dans les bars
Salons de jeu
Nombre de sites
3
3 663
Réduit à 2 521 (-31%)
4
Nombre d’ALV
par site
Montréal (3 172)
Charlevoix (825)
Lac Leamy (1 903)
3,8 en moyenne
Augmenté à 4,5 (+19%)
Minimum = 1
Maximum = 55
Montréal (1 300)
Québec (335)
Trois-Rivières (200)
Mont-Tremblant (300)
Heures
d’ouverture
7 jours sur 7
Montréal (24h)
Charlevoix (10h – 3h)
Lac Leamy (9h – 4h)
7 jours sur 7
8h – 3:30h
7 jours sur 7
Moins d’heures que
dans les bars (?)
Critères
d’admission
18 ans ou plus
Critère peu sévère
d’habillement
18 ans ou plus
18 ans ou plus
Habillement
Facilité
d’utilisation des
AÉJ
Facile
Facile
Facile
Budget de jeu
Dépense par visiteur =
environ $ 50
Convivialité du
site
Gérés directement par
l’état, les Québécois y
sont chez eux.
Inconnue
Accessibilité réduite aux
personnes qui aiment fréquenter
des bars gérés par des
propriétaires privés.
Gérés directement par
l’état, les Québécois y
sont chez eux.
6.3.4.1.1.5 Le bilan trois ans plus tard
Trois ans plus tard, le président de la commission a dressé un bilan382 des impacts de la
publication du rapport. Les gouvernements et l’industrie du jeu ont entrepris plusieurs
initiatives (pages 2, 3 et 8). Ainsi, le gouvernement fédéral australien a instauré un
Conseil ministériel sur le jeu et interdit le jeu interactif. La plupart des états et territoires
ont développé des politiques de jeu responsable. L’industrie du jeu a créé une
association (Australian Gaming Council), et a commencé à considérer une modification
des appareils. Plusieurs exploitants ont adopté un code de commercialisation axé sur le
jeu responsable. À l’époque de la commission, il y avait déjà une expansion des
services d’aide et une plus grande sensibilisation de la population aux problèmes de jeu.
Toutefois, bien que ces initiatives apparaissent utiles, celles-ci n’ont pas empêché une
progression additionnelle de la dépense au jeu, quoiqu’à un rythme moins rapide que
382
Banks, G. (2002). The Productivity commission’s gambling inquiry : 3 years on. Keynote
address to the 12th annual conference of the National association for gambling studies (NAGS),
21 November 2002, Melbourne, Australia.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 227
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 228
par les années précédentes (pages 8 et 9). Or, il s’agit d’une des principales variables
par laquelle une amélioration de la situation aurait pu être constatée :
“Before looking at these initiatives more closely, it may be instructive to see what has
happened to expenditure on gambling in the period since the Commission’s inquiry.
Problem gamblers account for a sizeable proportion of total gambling expenditure, or
industry revenue. If measures to address the problem are working, this could be
expected to become apparent in the data.” (Banks, 2002, page 8)
L’analyse détaillée de la croissance des revenus (pages 8 à 11) suggère que le
ralentissement serait davantage attribuable à une maturation des marchés ainsi qu’à
une diminution du taux de remise dans deux des trois juridictions où il y a le plus d’AÉJ.
Toujours en 2002, comparant états et territoires, Hing et Dickerson383 ont réalisé une
revue détaillée des réglementations gouvernementales et des mesures volontaires,
notamment en ce qui concerne la promotion du concept de jeu responsable. La
conclusion se résume brièvement : les auteurs n’ont trouvé aucune étude scientifique
justifiant les programmes de prévention mis en place, et aucune organisation n’a réalisé
d’étude d’impact.
6.3.4.2 Une étude australienne particulière
Il existe en Australie un grand nombre d’études qui ont tenté de modifier des aspects
des AÉJ ou de leur environnement. Compte tenu qu’il en ressort peu d’avantages, il vaut
mieux ne pas les détailler ici. Un étude384 mérite néanmoins qu’on s’y attarde.
Réalisée in situ, Blaszczynski, Sharpe et Walker ont analysé trois modifications
structurales des AÉJ : (1) une réduction de la mise maximale de 10 dollars australiens à
un seul dollar, (2) une réduction de la vitesse de jeu de 3,5 secondes à 5 secondes par
set, et (3) une limitation de l’accepteur de billets à seulement 20 dollars au total.
La seule mesure qui a porté fruit a été la limitation de l’accepteur de billets. Pourtant, les
auteurs ont rejeté cette solution parce qu’elle a diminué les revenus des AÉJ de 42%.
6.3.4.3 Les mesures adoptées dans les casinos néo-zélandais
Lorsque le gouvernement néo-zélandais a autorisé la création de casinos en 1990, le
gestionnaire du premier casino a porté une attention particulière à éviter que les médias
n’en viennent à continuellement blâmer l’établissement de jeu pour les cas
sensationnels de joueurs qui ont perdu le contrôle sur leur dépense au jeu. Il était estimé
que les problèmes de jeu ne sont pas causés par le casino, et que l’établissement était
383
Hing, N., & Dickerson, M. (2002). Responsible Gambling, Australian Voluntary and Mandatory
Approaches. Australian Gaming Council: http://www.austgamingcouncil.org.au
384
Blaszczynski, A., Sharpe, L. & Walker, M. (2001). The Assessment of the Impact of the
Configuration on Electronic Gaming Machines as Harm Minimisation Strategies for Problem
Gambling. University of Sydney Gambling Research Unit, Sydney, Australia.
http://www.agmma.com.au/pdf/reports/Sydney_Uni_Research_Report.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 228
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 229
plutôt victime d’une minorité de joueurs malfaisants. L’objectif n’était pas de réduire les
méfaits du jeu, mais de protéger l’établissement contre la dénonciation médiatique. Cinq
mesures ont été adoptées385 :
•
Un code vestimentaire et comportemental stricte afin de promouvoir le site
comme un lieu de divertissement.
•
Le financement d’un centre de traitement dans lequel l’Armée du salut était
impliquée.
•
La création d’un programme d’auto-exclusion.
•
Un plan de marketing, à grande visibilité, pour impliquer le casino dans une
multitude d’événements associés à la charité.
•
Un plan de communications pour rappeler continuellement aux
consommateurs et aux médias locaux à quel point l’établissement entreprend
des actions positives socialement responsables.
Un aspect important du plan de marketing du casino est de parvenir à obtenir des
rapports positifs provenant d’organismes indépendants. Il s’agit alors d’une mesure du
succès du plan de marketing.
6.4 La situation au Québec
Traditionnellement limitée aux loteries, l’avènement des casinos, et celui du parc des
ALV, ont été deux changements radicaux dans l’offre de jeu au Québec. La gestion de
ces changements radicaux s’est faite au jour le jour sans la planification d’études
d’impact386 ni un monitorage satisfaisant387 de la fluctuation des problèmes de jeu. Un
385
Voir à la page 152 dans : Pitcher, A. (1999). Responsible promotion of gaming and dealing
with problem gamblers. Journal of gambling behavior, 15(2), 149-159.
386
Quelques études ont surtout été l’initiative du Centre québécois d’excellence pour la
prévention et le traitement du jeu (CQEPTJ) de l’université Laval : (a) Ladouceur, R., Jacques,
C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling: A replication study 7 years
later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. (b) Jacques, C., Ladouceur, R., & Ferland, F.
(2000). Impact of availability on gambling: A longitudinal study. Canadian Journal of Psychiatry,
45, 810-815. (c) Ladouceur, R., Jacques, C., Giroux, I., Ferland, F., & Leblond, J. (2000).
Analysis of a Casino’s self-exclusion program. Journal of Gambling Studies, 16, 453-460. (d)
Jacques, C., & Ladouceur, R. (2006). A prospective study of the impact of opening a casino on
gambling behaviours : 2- and 4-year follow-ups. Canadian journal of psychiatry, 51(12), 764-773.
387
Avant l’étatisation des AÉJ, il y a eu une étude nationale (québécoise) de prévalence réalisée
en 1989. Deux ans après l’étatisation, une seconde étude nationale a été réalisée. Formellement
mandatée par le MSSS, une troisième étude nationale a été réalisée seulement en 2002. Par leur
méthodologie, les études de 1989 et 1996 sont comparables pour la prévalence à vie, et les
études de 1996 et 2002 sont comparables seulement pour la prévalence actuelle établie sur 12
mois. Des difficultés techniques, notamment dans l’étude de 2002, empêchent cependant de faire
des comparaisons qui constitueraient un suivi satisfaisant. Outre des problèmes de pondération
de l’échantillon ou de dépistage des joueurs pathologiques, l’absence de données concernant la
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 229
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 230
effort particulier a néanmoins été manifeste pour contrôler l’intégrité et la sécurité aux
casinos, ainsi que l’intégrité des ALV.
Plus de sept ans après l’implantation, en 2001 et 2002, des appréhension à l’égard de la
santé publique ont finalement conduit à un Forum sur le jeu pathologique388 et à une
Table de concertation interministérielle389. Ces initiatives ont mené à la proposition de
recentrer l’exploitation des AÉJ, et du reste des activités de jeu, en fonction d’un concept
de jeu responsable. Les changements apportés depuis n’ont pas été l’objet d’études
d’impact.
Un troisième changement radical se produira en 2007. Le projet des salons de jeux
n’implique pas qu’un déplacement de l’offre de jeu déjà existante sans impact sur la
situation actuelle. Il s’agit d’une modification radicale dans la configuration de l’offre de
jeu dont on peut anticiper qu’elle augmentera considérablement l’attrait390 des sites, la
proximité des grandes surfaces de jeu consacrées aux AÉJ, l’accessibilité, la diversité
des types de jeux et d’appareils, ainsi que des occasions croisées391 de dépenser au
jeu. De plus, en rapprochant les activités de jeu des autres activités de divertissement, il
y aura un transfert probable du budget de loisir vers le budget de jeu392.
prévalence à vie ignore les dommages subis par de nombreux joueurs excessifs qui ont
commencé à jouer après 1996 et qui ne jouaient plus en 2002. (a) Ladouceur, R. (1991).
Prevalence estimates of pathological gamblers in Québec. Canadian Journal of Psychiatry, 36,
732-734. (b) Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem
gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804. (c)
Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., & Allard, D. (2004).
Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002. Québec et
Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec. (d) Chevalier, S.,
Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004). Comportements de jeu
et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et Québec, Institut national
de santé publique du Québec et Université Laval.
388
(a) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). Jeu pathologique : connaître,
comprendre, agir. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca (b)
Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique :
document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca
389
Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu
pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
390
En plus des jeux d’argent, plusieurs autres activités de divertissement seront concentrées
dans l’environnement des salons de jeux. Comme les casinos, les salons de jeux vont présenter
une façade plus prestigieuse que le bar du coin. La densité et la diversité de l’offre de jeu sera
plus attrayante pour les amateurs des jeux.
391
En l’occurrence, les parieurs à l’hippodrome auront accès à des ALV plus souvent libres parce
que plus nombreux. Dans la mesure où les salons de jeux capteront la clientèle des bars ou des
casinos, celle-ci sera davantage exposée aux hippodromes.
392
(a) Voir aux pages 9, 30, 5.32-5.34 et 7.55-7.57 dans : Productivity Commission. (1999).
Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo. (b) Voir à la page
XIII dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants Ltd. (1998).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 230
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 231
Les salons de jeux auront aussi comme conséquence plausible d’augmenter les revenus
tirés des ALV. Au Québec, en 2002-2003, le revenu net annuel des ALV dans les
hippodromes a été de 102 093 dollars, tandis qu’il n’a été que de 74 475 dollars dans les
bars (voir la Figure 14 à la page26)393. Les appareils déplacés pourraient alors
augmenter leur rendement de 37%; ce qui compenserait largement la réduction
anticipée de 5% du nombre total d’ALV. Il est ici utile de rappeler que, parce qu’ils
perdent déjà de l’argent qu’ils ne peuvent pas perdre, une augmentation de la dépense
au jeu des joueurs excessifs se traduit nécessairement par une augmentation des
dommages.
Localement, à Montréal, une bonne partie de la clientèle des machines à sous va
plausiblement se diriger vers le salon de jeux. Ceci libérera de l’espace au casino afin
d’aménager des services qui semblent ne pas pouvoir l’être actuellement en raison de
l’exiguïté des lieux. Dès lors, les salons de jeux peuvent avoir un impact indirect sur les
casinos qui se concrétisera par une augmentation de l’offre de jeu en ce qui a trait
globalement aux AÉJ et aux jeux de table.
6.4.1 Les objectifs de l’étatisation des AÉJ
Il est clair que le projet des salons de jeux va favoriser un objectif de financement. Par
rapport aux autres objectifs, qui ont motivé l’étatisation des AÉJ, la contribution des
salons de jeux est cependant moins claire.
En 1993, Loto-Québec a entrepris d’étatiser les AÉJ afin de répondre à cinq objectifs.
Un sixième objectif a été ajouté en 2002 (voir Tableau 40).
Tableau 40
Objectifs motivant l’exploitation des AÉJ par le gouvernement du Québec
Objectif
Commentaire
Objectifs initiaux
Financement
L’état a besoin de générer des revenus pour financer les services publics,
sinon pour rembourser sa dette. Ces revenus sont versés au Fonds
consolidé du Québec.
Protectionnisme
Les offres de jeu des juridictions concurrentes, ou des marchés
clandestins, peuvent entraîner une fuite économique vers des
établissements qui n’ont pas à assumer les coûts sociaux du jeu excessif.
1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia Department of
Health. Problem gambling services.
393
Données calculées à partir du document : KPMG. (2004). Current and potential racinos in
Canada.
http://www.kpmg.ca/en/industries/ice/hospitality/documents/CanadasRacinoIndustry2004.pdf
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 231
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 232
Tableau 40
Objectifs motivant l’exploitation des AÉJ par le gouvernement du Québec
Objectif
Commentaire
Service
La population du Québec s’intéresse aux jeux de hasard et d’argent, et elle
a le droit à tous les services qu’elle désire dans la mesure où ceux-ci
proposent des activités qui n’exploitent pas indûment des personnes
vulnérables.
Sécurité
La gestion de l’offre de jeu par l’état permet aux citoyens de jouer en
confiance, en toute légalité, sans risque d’être la victime de criminels.
Intégrité
Sans surveillance, les opérateurs peuvent modifier les dispositifs de jeu au
détriment des joueurs.
Objectif additionnel depuis 2002
Jeu responsable
Loto-Québec a entrepris de modifier les ALV, et leur environnement, afin de
promouvoir des comportements conformes au concept de jeu responsable.
6.4.1.1 Financement
Depuis la création de Loto-Québec en 1969, le gouvernement a récolté un bénéfice
net394 de plus de 20 milliards de dollars, dont 11 proviennent des loteries, 6 des ALV et 3
des casinos.
Au cours des cinq dernières années, le service de la dette du gouvernement du Québec
a coûté environ sept milliards de dollars annuellement. À ce titre, le bénéfice net annuel
de Loto-Québec représente un peu plus que 20% de ce fardeau fiscal. Dorénavant,
cette contribution provient majoritairement des profits des AÉJ395. Pour le gouvernement,
Loto-Québec est un contributeur aussi important que l’est Hydro-Québec, et elle est trois
fois plus rentable que la SAQ396.
À cet égard, l’objectif de financement est sans fin. Annuellement, le service de la dette
annule complètement les contributions d’Hydro-Québec, de Loto-Québec et de la SAQ
qui, à elles trois, ne comblent que les deux tiers du montant à rembourser. Dès lors, il
existe un risque important que l’état-croupier devienne dépendant des revenus du jeu397.
394
La dépense au jeu de la population québécoise, et de quelques touristes, dans les activités de
Loto-Québec s’élève à environ 36 milliards de dollars (voir à la page 17 du présent document).
C’est ce qui en a coûté aux Québécois pour générer ces 20 milliards de profit pour le
gouvernement. Le bénéfice net est la dépense au jeu moins les frais d’opération. Voir aussi la
Figure 5 à la page 18 du présent document.
395
Voir la Figure 6 à la page 18 du présent document.
396
Voir la Figure 4 à la page 17 du présent document.
397
Blaszczynski, A. (2000). Are governments addicted to gambling? Addiction, 95(10), 15831584.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 232
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 233
Cette situation pose un problème d’éthique publique puisque les revenus des AÉJ sont
une taxe régressive398 dont le fardeau incombe davantage aux jeunes, aux démunis et
aux personnes moins scolarisées. Par surcroît, une portion importante, sinon majoritaire,
des revenus des AÉJ provient des joueurs excessifs, souvent des gens malades du
jeu399.
Considérant la difficulté éthique de l’objectif de financement, le projet des salons de jeux
ne convainc pas encore de sa capacité à générer des revenus, qui ne seraient pas
obtenus autrement, sans générer un important problème de santé publique additionnel.
6.4.1.2 Protectionnisme
Le Québec n’a jamais connu de difficulté posée par des établissements de jeu étrangers
situés à ses frontières. Les nations amérindiennes ont des pouvoirs très limités pour
organiser des activités de jeu. Le jeu clandestin n’est pas un objet particulier de
préoccupation. Les seules occasions de fuite économique sont les voyages à l’étranger
et le jeu sur Internet.
À l’occasion de l’étude de prévalence du jeu400, réalisée en 2002, les Québécois ont été
interrogés sur leur dépense annuelle dans 20 activités de jeu. La répartition de cette
dépense est présentée dans la Figure 88. Toutes les activités étiquetées dans la partie
gauche de la figure sont gérées par Loto-Québec. Dans la partie droite, en haut, il y a le
pari mutuel, le bingo et les tirages qui sont étroitement supervisées par la RACJ. Les
jeux de cartes entre amis et les jeux d’habileté sont essentiellement à espérance nulle
de gain401. Les occasions de fuite économique se situent alors dans les activités liées à
Internet, celles gérées illégalement par les preneurs au livre, et, lorsqu’organisées par
des fraudeurs, les pools sportifs, les autres paris sportifs et les jeux de cartes d’arrièreboutique entre inconnus.
Considérant les données ici présentées, en 2002, les occasions de fuite économique
constituaient moins de 4% de la dépense estimée. Compte tenu que 96% de la dépense
au jeu est déjà endiguée dans des activités contrôlées, ou à espérance nulle de gain, et
qu’il est peu réaliste de croire pouvoir faire mieux, l’objectif de protection ne peut pas
justifier le projet des salons de jeux.
398
Voir aux pages 30 et 54 ainsi qu’à la section 10.5 aux pages 10.38-10.56 dans : Productivity
Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no. 10. Canberra, Australia:
Ausinfo.
399
Voir la section 3.2.4.3 - La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs
pathologiques à la page 85 du présent document.
400
Chevalier, S., Hamel, D., Ladouceur, R., Jacques, C., Allard, D., & Sévigny, S. (2004).
Comportements de jeu et jeu pathologique selon le type de jeu au Québec en 2002. Montréal et
Québec, QC : Institut national de santé publique du Québec et Université Laval.
401
Pour cette raison, ils ne posent aucun risque de fuite économique.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 233
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 234
Figure 88
Répartition de la dépense au jeu estimée en 2002
Casino - roulette
2%
Casino - keno
1%
MAS ALV
7% 14%
Pari mutuel
3%
Bingo
8%
Casino - blackjack
5%
Tirages
4%
Cartes (familles,
amis)
2%
Casino - poker
4%
Jeux d'habileté
8%
oterie instantanée
8%
Loterie sportive
2%
Loterie quotidienne
3%
Pools sportifs
1%
Loterie ordinaire
23%
Autres paris sportifs
1%
Cartes hors amis
1%
Internet
1%
Preneur au livre
0%
6.4.1.3 Service
Il n’existe pas d’étude publique permettant d’identifier comment la population
québécoise juge équitable de développer l’offre de jeu. À cet égard, il ne s’agit pas
d’identifier à quelles activités les personnes accepteraient de dépenser leur argent si
celles-ci devenaient disponibles, ou si on parvenait à leur faire connaître. Ce ne sont pas
des études de marketing, ou de simples études de marché, qui peuvent répondre à ce
besoin.
Un large débat public est nécessaire pour atteindre cet objectif. Plutôt que d’être sondés
au téléphone sans avertissement ni préparation, les citoyens doivent pouvoir se
prononcer après avoir entendu l’ensemble des points de vue de leurs concitoyens.
6.4.1.4 Sécurité
En 1978, après avoir étudié les impacts des casinos au Nevada et au Colorado, une
étude de la Sûreté du Québec a produit un rapport très réfractaire à l’implantation des
casinos au Québec402. En 1982, le gouvernement du Québec n’avait pas jugé bon
d’implanter des casinos sur le modèle américain car la principale faille de ce modèle
était son incapacité à empêcher le crime organisé d’infiltrer les établissements de jeu.
Toutefois, en 1990, un comité interministériel a visité plusieurs casinos européens. Il y a
constaté des établissements de jeu où les problèmes de criminalité étaient mineurs.
402
Pour un historique des démarches entreprises par la Sûreté du Québec entre 1978 et 1992,
voir un mémoire présenté par monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du
Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45,
Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 234
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 235
Ainsi, en 1992, dans un objectif de sécurité, le gouvernement du Québec a privilégié le
développement de casinos dont l’organisation était largement inspirée du modèle
européen403. À cette occasion, la Sûreté du Québec404 a émis un avis favorable aux
casinos de type européen, mais un avis franchement réfractaire à la distribution d’AÉJ
dans les bars et autres commerces, comme l’étaient les APV. Au mieux, la Sûreté du
Québec a proposé de créer des « salons de vidéopkers » qui seraient entièrement
exploités par l’État.
La concrétisation de cette réflexion a été un compromis vaguement fidèle à la
recommandation de privilégier le modèle européen. En effet, la comparaison des
modèles permet de constater que les casinos québécois sont nord-américains dans
l’offre de jeu, sur le plancher, mais européens dans leur gestion financière, dans leur
marketing, et, dans une mesure moins exigeante, dans leur gestion des problèmes
posés par la clientèle (voir Tableau 41).
Comme les casinos européens, les casinos québécois sont entièrement une propriété
publique, et les revenus profitent principalement au gouvernement. Ils font peu de
publicité, et ils ne permettent pas de faire crédit aux joueurs, d’accorder des gratuités
fréquentes, ni de consommer de l’alcool dans l’aire de jeu.
Par rapport aux casinos européens, les casinos québécois se démarquent toutefois en
étant situés plus près des grands centres urbains où ils attirent une clientèle moins
touristique. Contrairement aux casinos européens, il n’est pas nécessaire de s’identifier
et aucun frais d’entrée n’est imposé. Le code vestimentaire et le programme d’autoexclusion sont beaucoup moins contraignants.
En contrepartie, comme dans les casinos nord-américains, bien qu’il y existe une
certaine clientèle internationale de joueurs très riches, la clientèle des casinos
québécois est principalement locale. L’accès est libre, instantané et gratuit. Les
visiteurs, nombreux, jouent principalement sur des MAS. L’environnement est bruyant.
À Montréal, la clientèle étrangère provient surtout du tourisme d’affaires. À Gatineau, les
touristes proviennent beaucoup de la « banlieue » ontarienne. On n’y décèle pas l’idée
européenne que le casino est surtout un lieu de rencontre où une clientèle touristique de
villégiature peut se divertir en soirée.
403
(a) Voir à la page CET-194 la déclaration de monsieur André Vallerand, ministre du Tourisme,
à la Commission permanente de l’économie et du travail (30 avril 1992), Journal des débats, 3,
Gouvernement du Québec. (b) Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec,
à la Commission permanente du budget et de l’administration (28 avril 1993), Journal des débats,
54, Gouvernement du Québec. (c) Déclaration de monsieur Ghyslain K.-Laflamme, président de
la Régie des alcools du Québec, à la Commission permanente des institutions lors des auditions
et étude détaillée du projet de loi 84 – loi sur la Régie des alcools, des courses et des jeux et
modifiant diverses dispositions législatives (16 juin 1993), Journal des débats, 49, Gouvernement
du Québec.
404
Voir à la page CI-387 dans la déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la
Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (6 mai 1992), Journal des
débats, 12, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 235
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 236
Par ailleurs, il existe en Europe des salons de jeux semblables à ceux qui seront
implantés au Québec, notamment les Amusements centra aux Pays-Bas. En Amérique
du Nord, les salons de jeux sont rares car l’offre de jeu est surtout concentrée dans les
casinos. Les AÉJ situés dans les hippodromes n’impliquent aucune autre occasion de
dépense à part le pari mutuel. Néanmoins, le projet des salons de jeux marque un
rapprochement vers le modèle nord-américain. En raison de l’interdépendance avec les
hippodromes, les intérêts d’un partenaire privé pourraient amoindrir l’importance des
impératifs de santé publique dans les préoccupations gouvernementales. L’offre de jeu
consistera uniquement en des AÉJ distribués très près de quartiers populeux à revenu
modeste. Il en résultera vraisemblablement une compétition importante de la part des
propriétaires des bars voisins.
Il est ainsi difficile de prédire si l’objectif de sécurité sera moins bien atteint en raison des
salons de jeux. En principe, avec ce projet, le gouvernement s’éloigne de sa politique
initiale. Bien qu’il existe un équivalent européen, le modèle des Amusements centra n’a
jamais été évalué comme offrant les mêmes garanties de sécurité que les casinos
européens. Une révision de cet objectif serait appropriée.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 236
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 237
Tableau 41
Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec
aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405
Casino nord-américain
1. Objectifs financiers
Casino européen
Casino québécois
Salon de jeu de LotoQuébec
Profits pour l’entreprise
privée.
Équipement de loisir
communautaire.
Revenus pour financer les
services publics.
Revenus pour financer les
services publics.
Création d’emplois.
Occasion de socialisation
entre la population et les
touristes.
Création d’emplois.
Sauvetage des
hippodromes.
Stimulation de l’économie
touristique.
Stimulation de l’économie
touristique.
Espace libéré au casino
disponible pour des
services destinés à la
clientèle touristique.
Faible création d’emplois.
2. Propriété
Privée.
Mixte, mais typiquement
contrôlée par le
gouvernement.
Gouvernement du
Québec.
Gouvernement du Québec
en tenant compte des
intérêts du gestionnaire
des hippodromes.
405
Thompson, W.N. (1998). Casinos de juegos del mundo: A survey of world gambling. Annals of the American Academy of Political and Social
Science, 556, 11–21.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 237
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 238
Tableau 41
Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec
aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405
Casino nord-américain
Casino européen
Casino québécois
Salon de jeu de LotoQuébec
3. Sites
Les casinos sont
concentrés dans un
espace limité. Dans une
ville, ils sont situés très
près les uns des autres.
Généralement situés dans
des petites villes éloignées
les unes des autres. Il n’y
a guère plus d’un casino
par ville.
Sauf l’exception historique
de Charlevoix, les casinos
sont situés près des
marchés les plus lucratifs
(Montréal et l’Ontario),
mais un peu éloignés du
centre urbain.
Sauf pour le Mont
Tremblant, les salons de
jeux, attenant aux
hippodromes, seront situés
dans des quartiers
populeux défavorisés ou à
revenu moyen.
4. Taxation
Minimale, adaptée aux
besoins de l’entreprise
privée, c’est-à-dire entre 6
et 8 pour cent.
Très élevée, entre 50 et 90
pour cent.
Tous les bénéfices vont au
gouvernement.
22% des revenus de 1900
ALV vont être distribués au
gestionnaire des
hippodromes.
Les autres revenus iront
au gouvernement.
5a. Accès
Libre et gratuit.
Frais d’entrée.
Libre et gratuit
Libre et gratuit
5b. Identification
Sans obligation de
s’identifier.
Enregistrement de
l’identité des visiteurs. Les
résidents peuvent être
empêchés.
Sans obligation de
s’identifier.
Sans obligation de
s’identifier.
5c. Code vestimentaire
Minimal ou inexistant.
Tenue de soirée.
Minimal
Minimal
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 238
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 239
Tableau 41
Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec
aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405
Casino nord-américain
5d. Auto-exclusion
Liste minimale
Casino européen
Casino québécois
Un liste d’exclusion
comprend les noms de
joueurs volontaires, ou de
ceux forcés par leur famille
ou l’établissement en
raison du jeu excessif.
Seuls les joueurs
volontaires sont inscrits
sur la liste.
Salon de jeu de LotoQuébec
Programme semblable à
celui des casinos
québécois.
Le casino exclut des
joueurs en raison de
pratiques indésirables.
6. Heures d’ouverture
Sept jours sur 7. Vingtquatre heures sur 24.
Heures limitées, surtout en
soirée. Fermés les jours
de congé.
Ouverts tôt le matin et
fermés tard dans la nuit
lorsqu’ils le sont.
Heures d’ouverture
moindres que dans les
casinos québécois.
7. Clientèle
Volume important.
Nationale et internationale.
Volume peu important.
Locale ou régionale.
Volume important. Locale,
provinciale, et un peu
internationale.
Volume plausiblement
important surtout composé
d’une clientèle très locale.
8a. Promotions et publicité
Abondantes avec
beaucoup de publicité.
Peu de promotions. Pas
de publicité.
Pas de publicité.
Pas de publicité.
8b. Gratuités
Voyages ou hébergements
subventionnés.
Peu de gratuités.
Gratuités accordées aux
membres d’un club
privilège.
Non précisé.
Nombreuses gratuités.
Cadeaux dispendieux
distribués aux plus gros
clients.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 239
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 240
Tableau 41
Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec
aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405
Casino nord-américain
Casino européen
Casino québécois
Salon de jeu de LotoQuébec
9. Crédit
Crédit accordé aux
joueurs. Encaissement de
chèque.
Pas de crédit fait aux
joueurs. Opportunités
limitées d’encaissement de
chèques.
Pas de crédit fait aux
joueurs. Aucun
encaissement de chèque.
Pas de crédit fait aux
joueurs. Aucun
encaissement de chèque.
10. Implication de la
collectivité
Mixte.
Essentielle.
Minimale.
Minimale.
11. Environnement de jeu
Bruyant, vaste, scintillant,
lumineux, rouge et fermé
(sans fenêtre).
Tranquille, petit, élégant,
bleu et ouvert (avec
fenêtre)
Mixte : bruyant autour des
MAS et plus calme aux
tables de jeu, surtout dans
les sections à hautes
mises.
Plausiblement à
l’américaine.
12. Alcool
Gratuit. Distribution libre.
Limité en dehors des aires
de jeu.
Limité en dehors des aires
de jeu.
Limité en dehors des aires
de jeu.
13. Jeux
Surtout des MAS. MAS et
tables de jeu entremêlées.
Surtout des tables de jeu.
Il y a peu de MAS, et elles
sont situés à part.
Surtout des MAS avec des
tables de jeu en retrait.
Des ALV auxquels des
tables de jeu automatisées
pourraient être ajoutées.
14. Personnel
Remplacement rapide d’un
personnel non syndiqué
qui est formé autrement
que par les casinos.
Les casinos forment leur
personnel qu’ils
conservent en
permanence. Ceux-ci sont
syndiqués.
Les casinos forment leur
personnel qui semble
relativement stable. Ceuxci sont syndiqués.
Peu de formation requise.
Il y aura peu d’employés.
Syndicalisation attendue.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 240
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 241
Tableau 41
Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec
aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)405
15. Joueurs excessifs
Casino nord-américain
Casino européen
Les entreprises craignent
l’image négative des
joueurs excessifs. Sinon,
ils ne sont pas l’objet d’une
grande attention des
gestionnaires.
Les joueurs excessifs ne
sont pas encouragés à
dépenser outrancièrement,
ou ils sont invités à s’autoexclure.
Casino québécois
Quelques efforts pour
inciter les joueurs
excessifs à prendre
conscience de leur
problème de jeu, mais en
autant que cela soit sans
impact démotivant sur les
autres joueurs.
Salon de jeu de LotoQuébec
Programme d’autoexclusion volontaire.
Programme d’autoexclusion volontaire.
Un psychologue peut être
appelé au casino si un
client en éprouve le
besoin.
16. Crime
On le sent un peu partout.
Problème au niveau du
contrôle des casinos.
Ne pose pas de problème
particulier.
Prêt usuraire mal contrôlé.
Incertitude quant au
blanchiment d’argent.
Suicides.
Indéterminable.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 241
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 242
6.4.1.5 Intégrité
L’intégrité des jeux au Québec a bonne réputation. Le projet des salons de jeux ne peut
donc pas se justifier par un besoin d’augmenter cette intégrité.
6.4.1.6 Jeu responsable
Depuis 2002, une gestion du jeu centrée sur le concept de jeu responsable transfert aux
joueurs un fardeau de responsabilités qui est irréaliste406.
Aucune étude n’a été réalisée afin de déterminer si les joueurs ont ajusté leur
comportement en conséquence. Aucune étude n’a été réalisée pour établir l’impact de la
promotion de ce concept sur les problèmes de jeu.
Indice troublant, la dépense au jeu sur les AÉJ continue de progresser d’année en
année407 sans que le volume de la clientèle ne progresse. En effet, bon an mal an, le
taux de pénétration annuel des ALV demeure légèrement en deçà de 10% de la
population adulte408. Or, si le volume n’augmente pas et que les revenus augmentent, il
est évident que les joueurs sur ALV ne modèrent pas leur dépense au jeu, loin de là.
Entre 1996-1997 et 2004-2005, la dépense moyenne par joueur sur ALV409, sans égard
à la fréquence de jeu410, est passée de $ 988 à $ 2 146, soit une augmentation de
117%. En raison d’un remplacement continuel des joueurs411, le volume stable de la
clientèle annuelle cache une augmentation des personnes qui subissent des dommages
sur les ALV.
Ce phénomène a aussi été documenté en Australie. Plus les ALV existent depuis
longtemps dans un environnement, plus les joueurs y dépensent beaucoup d’argent
individuellement412. Plus un marché atteint sa maturité, plus les AÉJ peuvent entraîner
des dommages importants pour les joueurs qui décident d’y jouer régulièrement.
406
Voir à la section 6.1 - L’irréalisme du concept de Jeu responsable à la page 162 au début de
ce chapitre.
407
Voir la Figure 12 à la page 24 du présent document.
408
Voir la Figure 11 à la page 23 du présent document.
409
Voir la section ALV dans le Tableau 1 - Dépense per capita et dépense par joueur à
différentes activités de jeu à la page 11 du présent document.
410
Pour être considéré parmi les joueurs, il suffit d’avoir joué sur un ALV au moins une fois dans
l’année. Ces montants seraient plus élevés si, au lieu de considérer les joueurs annuels, seule la
dépense des joueurs mensuels était comptabilisée.
411
Voir la section 2.6 - La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu à la
page 51 du présent document.
412
Voir aux pages 113, 118 et 130 dans : Delfabbro, P. (2002, November). Appendix E : The
distribution of electronic gaming machines (EGMs) and gambling-related harm in Metropolitan
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 242
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 243
6.4.2 Les étapes de l’étatisation des AÉJ
Au Québec, en juin 1976413, un marché non réglementé d’appareils de poker vidéo414
s’est développé à titre de dispositifs de jeu donnant droit uniquement à des parties
gratuites. Parce que les exploitants payaient en argent les crédits obtenus par les
joueurs, ces appareils étaient illégaux. Peu avant l’étatisation, le parc des APV aurait
généré des profits d’environ 350 millions de dollars. Prenant prétexte qu’une partie
importante de ces revenus aurait pu échapper au fisc415, le gouvernement du Québec a
entrepris d’étatiser les AÉJ. Le gouvernement a alors surtout cherché à se débarrasser
des distributeurs sans nécessairement priver les détaillants de revenus416. Les APV ont
alors été remplacés par des ALV. Dorénavant, les détaillants devaient cependant
posséder un permis d’alcool.
Le processus d’étatisation et d’implantation a été marqué par plusieurs étapes, chacune
introduisant de nouvelles mesures pour contrer des problèmes417 associés au jeu :
•
En juin 1993, par la loi 84, la Régie des alcools, des courses et des jeux (RACJ)
a été créée, et le gouvernement du Québec a enclenché le processus
d’étatisation des AÉJ.
•
La Société des casinos du Québec a été créée. Ses activités ont immédiatement
été encadrées par une loi ainsi qu’un règlement418. Avec l’inauguration du casino
de Montréal en octobre 1993, la population a eu un premier accès légal à 1 200
MAS419, en plus d’un jeu de keno, et de 65 tables de jeu. Par la suite, le casino
Adelaide. Dans Independent gambling authority. (2003). Inquiry into management of gaming
machine numbers. Adelaide, South Australia: author.
413
Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la
Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, Page CI-1825,
Gouvernement du Québec.
414
L’historique des APV est résumé, dans le présent document, à la section 3.2.2 - La
dangerosité des appareils de poker vidéo.
415
On ne sait pas quelle proportion des revenus a été déclarée à l’impôt par les distributeurs et
les détaillants. Compte tenu que les trois-quarts des APV étaient détenteurs d’une licence de la
Régie de loteries du Québec, il est vraisemblable qu’une partie des 350 millions ait quand même
été déclarée à l’impôt par les détaillants.
416
Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission
permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, page CI-1845, Gouvernement
du Québec.
417
Il peut s’agir des problèmes des joueurs (jeu excessif), ou ceux des établissements (sécurité,
image publique).
418
Les MAS sont réglementées par les articles 87 à 95 du Règlement sur les jeux de casino de la
Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r1.01).
419
Les MAS n’offrent qu’un jeu par appareil. Il s’agit typiquement d’un jeu de ligne. Certaines
MAS offrent néanmoins un jeu de carte, poker ou blackjack, qui techniquement en font des APV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 243
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 244
de Charlevoix a ouvert ses portes en juin 1994, et le casino du Lac Leamy a suivi
en mars 1996.
•
La Société des loteries vidéo du Québec a été créée, et ses activités ont aussi
été encadrées par une loi ainsi qu’un règlement420 qui sont propres à cette filiale.
Le 28 juin 1994, Loto-Québec a commencé le déploiement d’un important parc
d’ALV exclusivement distribués dans les bars du Québec. Un maximum de 5
ALV est accordé par permis d’alcool, et non par établissement.
•
En 1996, le gouvernement du Québec accepte de soutenir l’industrie du pari
mutuel en accordant aux quatre principaux hippodromes du Québec des super
licences leur permettant d’exploiter un grand nombre d’ALV. Sans en avoir le
titre, il en résulte des salons de jeux équivalant à des mini-casinos sans table de
jeu.
•
En 1996, une étude de prévalence du jeu pathologique, publiée en 1999, révèle
une augmentation de 75% de la prévalence du jeu pathologique au Québec
depuis 1989. Cette augmentation est à l’orée du seuil pour être statistiquement
significative.
•
En 1997, Loto-Québec entreprend de financer des centres universitaires de
recherche dédiés exclusivement au jeu. Dans les faits, ces centres se font
confier le mandat d’exercer indépendamment des responsabilités que ne peut
pas assumer un état-croupier.
•
En 1998, Loto-Québec a diffusé sur TVA et CFCF une émission de
sensibilisation intitulée « Savez-vous jouer … sans perdre la tête? ».
•
En 2001, le gouvernement du Québec investit le MSSS pour assumer les
responsabilités relatives à la prévention du jeu pathologique. Un programme
expérimental de traitement du jeu pathologique est l’objet d’un test pilote. Un
Forum sur le jeu pathologique421 a été organisé les 8 et 9 novembre 2001.
•
Suite à une Table de concertation interministérielle422, tenue en 2002
consécutivement au Forum sur le jeu pathologique, le gouvernement du Québec
impose une gestion du jeu orientée vers le concept de jeu responsable. Des
premières modifications sont apportées aux ALV.
420
L’exploitation des ALV est délimitée par le Règlement sur le système de loterie vidéo de la Loi
sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r.6).
421
(a) Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). Jeu pathologique : connaître,
comprendre, agir. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca (b)
Ministère de la Santé et des Services sociaux. (2001). La prévention du jeu pathologique :
document de référence. Forum tenu à Montréal les 8 et 9 novembre 2001. www.msss.gouv.qc.ca
422
Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu
pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 244
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 245
•
Le 15 mars 2002, la RACJ a décrété un moratoire concernant l’attribution de
nouvelles licences pour les ALV.
•
À partir de janvier 2003, le remplacement du parc d’ALV par des appareils
technologiquement plus avancés permet de compléter l’adaptation du parc d’ALV
à une approche commerciale axée sur le jeu responsable.
•
Une étude de prévalence du jeu a été réalisée en 2002, mais publiée seulement
en mai 2004. Celle-ci révèle que 96% de la dépense au jeu des Québécois est
déjà captée par l’offre de jeu de Loto-Québec, par le pari mutuel ou les activités
de jeu des organismes charitables.
•
En 2005, Loto-Québec propose de modifier la distribution des ALV, jusque-là
distribués à 96,8% dans les bars et à 3,2% dans les hippodromes. En déplaçant
1770 ALV des bars vers quatre salons de jeux, 16,2% des ALV se retrouveront
ailleurs que dans les bars, c’est-à-dire dans trois salons de jeux attenant à des
hippodromes (13,5%), dans le salon de jeu du Mont Tremblant (2,2%) et à
l’hippodrome d’Aylmer (0,5%); tandis que 83,8% des ALV resteront dans les bars
du Québec.
6.4.3 Les mesures instaurées lors de l’installation des MAS dans les casinos en
1993
En 1992, le gouvernement a créé La société des casinos du Québec (SCQ), et le
premier casino a ouvert ses portes à Montréal en octobre 1993. À cette occasion,
l’opération des casinos, des jeux de tables et des MAS a été encadrée par une loi, un
règlement423 ainsi que diverses mesures additionnelles décidées par la SCQ.
La conception du casino a été beaucoup influencée par les discussions que LotoQuébec424 a réalisé avec des consultants provenant d’établissements de jeu
néerlandais, américains ou canadiens, ainsi que quelques visiteurs français ou
espagnols. Des études ont eu pour conclusion425 de privilégier le modèle européen de
casino plutôt que le modèle américain426.
423
Les MAS sont réglementées par les articles 87 à 95 du Règlement sur les jeux de casino de la
Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r1.01).
424
Déclaration de monsieur Michel Crête, président de Loto-Québec, à la Commission
permanente du budget et de l’administration (28 avril 1993), Journal des débats, 54,
Gouvernement du Québec.
425
Voir à la page CET-194 la déclaration de monsieur André Vallerand, ministre du Tourisme, à
la Commission permanente de l’économie et du travail (30 avril 1992), Journal des débats, 3,
Gouvernement du Québec.
426
Voir le Tableau 41 - Comparaison des casinos et des salons de jeux du Québec
aux modèles de casino nord-américain et européen selon les critères de Thompson (1998)
à la page 237 du présent document.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 245
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 246
6.4.3.1 Les mesures inscrites dans la réglementation
Les MAS sont réglementées par les articles 87 à 95 du Règlement sur les jeux de
casino de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r1.01). Les
mesures associées à la réglementation sont présentées dans le tableau suivant.
Tableau 42
Articles du règlement sur les jeux de casino constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
2
La Société des
Casinos du
Québec doit mettre
les règles pour
chaque jeu offert à
la disposition du
public qui
fréquente les lieux
où les jeux de
casino sont
exploités.
Cette mesure oblige la SCQ à mettre à la disposition du public les
règles des jeux. Selon les articles 89 à 91, l’interface des machines
à sous doit indiquer « le nom du jeu, le coût unitaire d’une mise, les
lots à gagner ainsi que leur mode d’attribution » en plus de la
description du lot qui est offert, soit de l’argent ou un bien, et,
lorsque des appareils sont branchés en îlots, la valeur du lot
progressif. Ainsi, sur chaque appareil, les combinaisons payantes et
les lots payés sont affichés. Chaque joueur, qui qu’il soit, obtient les
montants qui lui reviennent. L’état garantit ces paiements.
Pour autant que l’intégrité est concernée, il s’agit d’un progrès
indéniable pour les joueurs. Toutefois, cette sécurité a plausiblement
créé beaucoup de nouveaux joueurs qui, à défaut d’une protection
gouvernementale, auraient été trop craintifs des conditions de jeu
incertaines ou arbitraires. Dans la mesure où les problèmes de jeu
se développent en fonction de la pratique du jeu, le gain d’intégrité
obtenu pour une minorité de joueurs est anéanti par une prévalence
augmentée des problèmes de jeu dans un segment plus large de la
population. À cet égard, entre 1989427 et 1996428, la prévalence à vie
du jeu pathologique au Québec est passée de 1,2% à 2,1%. Cette
augmentation de 75% est à l’orée429 d’être statistiquement
significative.
427
Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gambling in Quebec. Canadian
Journal of Psychiatry, 36(10), 732-734.
428
Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of problem gambling :
A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804.
429
L’échantillon de l’étude de prévalence de 1996 présente une distorsion importante par rapport
à la population, notamment en ce qui concerne la scolarité des sondés. Cette situation a créé une
sous-estimation du taux de prévalence en 1996. Leblond a proposé une pondération plus
complète des données qui a révélé un taux de prévalence à vie plutôt égal à 2,8%; ce qui
représente une augmentation significative de 131%. Voir aux pages 247 et 250 dans Leblond, J.
(2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier
numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 246
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 247
Tableau 42
Articles du règlement sur les jeux de casino constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
5
Aucun crédit, sous
quelle que forme
que ce soit, ne
peut être accordé
par la Société.
Cette mesure est typique des casinos européens. Il s’agit aussi
d’une leçon qui a été tirée de l’époque de Pacifique Plante à
Montréal430. Les joueurs qui ont besoin de crédit sont les joueurs
excessifs, et les joueurs excessifs misent des montants qu’ils n’ont
pas les moyens de perdre.
88
Le résultat d’un jeu
sur une machine à
sous doit reposer
sur le hasard
même lorsque le
joueur peut faire
des choix.
Dans le cas des jeux de poker ou de blackjack offerts sur les MAS,
les joueurs ont la capacité d’influencer les résultats. Par rapport au
taux de remise, les choix peuvent uniquement influencer à la baisse
les montants remis au joueur. En fait, l’application faite de cet article
est que le résultat repose surtout sur le hasard, et non uniquement
sur le hasard. Dans un tel cas, les jeux de cartes sont davantage
préjudiciables aux joueurs moins méthodiques, moins intelligents.
De plus, les jeux de cartes sont surtout utilisés par les joueurs
réguliers ou ceux qui éprouvent des problèmes de jeu431.
89
Le nom du jeu, le
coût unitaire d’une
mise, les lots à
gagner ainsi que
leur mode
d’attribution
doivent être
inscrits sur la
machine à sous ou
être accessibles
au joueur sur
l’écran avant le
début du jeu.
Avec ces informations, le joueur ne peut pas décider rationnellement
de son intérêt à jouer ou pas car, pour ce faire, il manque la
probabilité d’acquisition de chacun des lots.
L’absence d’une information complète entrave l’activation des
processus de raisonnement normatifs432. Si le désir de jouer
subsiste, le joueur doit alors se limiter à des raisonnements fondés
sur des processus heuristiques. Ces processus ne sont pas adaptés
pour les jeux de hasard. Leur activation conduit nécessairement à
une interprétation erronée de la situation, d’où une grande
vulnérabilité à l’illusion de contrôle.
Cette mesure est iatrogène.
430
Voir la section 3.2.1.3 - Les problèmes de jeu durant les années 40 à la page 66 dans le
présent document.
431
Voir aux pages 3-49 et 3-50 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research
Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova
Scotia Department of Health. Problem gambling services.
432
Une décision normative implique que la personne est informée de toutes les données
nécessaires à sa décision, qu’elle maîtrise les règles logiques devant s’appliquer, qu’elle a le
temps de compléter son raisonnement, et que son jugement n’est pas affaibli par des
interférences diminuant ses capacités attentionnelles.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 247
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 248
Tableau 42
Articles du règlement sur les jeux de casino constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
90
Lorsque le lot
offert est un bien
autre que de
l’argent, une
description du bien
offert ou le bien luimême doit être
affiché près de la
machine à sous
concernée.
Commentaire
Ceci est une mesure d’intégrité qui est indiscutable.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 248
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 249
Tableau 42
Articles du règlement sur les jeux de casino constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
91
Un panneau
d’affichage
indiquant de façon
continue le
montant du lot
progressif doit être
placé au-dessus
des machines à
sous qui
alimentent ce type
de lot.
Typiquement, les joueurs excessifs perdent de l’argent qu’ils ne
peuvent pas perdre. Lorsqu’ils le font, ceux-ci essaient de se refaire
en pourchassant leurs pertes. Il en résulte un déficit continuellement
croissant. Les AÉJ avec lots progressifs laissent miroiter l’espoir de
se refaire d’un seul coup malgré que le déficit soit devenu énorme.
Cette possibilité nuit au constat salutaire qu’il est irréaliste de
pouvoir régler providentiellement ses problèmes de jeu avec le
montant d’une seule mise.
Lorsqu’ils sont offerts à une population strictement locale, les AÉJ ne
devraient pas offrir de lots progressifs, car ces lots sont surtout utiles
à attirer des touristes ou retenir une fuite vers une offre de jeu
concurrente qui en proposerait. Ceci n’est pas le cas au Québec.
Compte tenu que les salons de jeux situés dans les hippodromes
n’ont pas pour objectif de développer une clientèle touristique,
l’option de proposer des lots progressifs est contraire à la santé
publique.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 249
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 250
Tableau 42
Articles du règlement sur les jeux de casino constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
93
Le taux de retour
de chaque jeu
offert par une
machine à sous ne
peut être inférieur
à 83%.
Commentaire
Cette mesure oblige que le taux de remise433 ne soit pas inférieur à
83%. Il s’agit d’un seuil plus élevé que les taux de 54% à 78% qui
ont été constatés dans les APV illégaux434. Aucun maximum n’a été
imposé.
Dans les faits, les taux de remise des MAS sont plus élevés aux
environs de 92%, soit celui imposé aux ALV.
Il n’existe pas d’étude publique qui a fait un lien direct entre le taux
de remise et la prévalence du jeu pathologique parmi la clientèle des
joueurs. Il doit cependant être précisé que le taux de remise est le
principal paramètre de jeu qui a un impact sur les caractéristiques
susceptibles d’instaurer une dépendance pathologique à l’égard des
AÉJ435. Plus le taux de remise est élevé, plus le taux de
récompense peut être élevé, plus le gros lot ou les lots
intermédiaires peuvent être importants, plus le gain significatif peut
survenir tôt et fréquemment durant l’expérience de jeu436.
La compréhension des processus psychologiques conduisant à une
dépendance pathologique à l’égard des jeux sur AÉJ concorde pour
affirmer qu’une augmentation du taux de remise favorise la perte
d’argent au jeu. L’obligation d’augmenter les taux de remise des
MAS par rapport aux APV illégaux n’est pas de nature à réduire les
méfaits causés par les AÉJ.
Une diminution du taux de remise diminuerait l’incidence des
problèmes de jeu.
433
Le texte du règlement utilise l’expression « taux de retour » au lieu de « taux de remise ». Il
s’agit alors d’une traduction littérale de l’expression anglaise « return rate ».
434
Voir à la page 14-28 dans : Alberta Gaming and Liquor Commission. (2001). Achieving a
balance : gaming licensing policy review, volume one. St-Albert, Alberta : Alberta Gaming and
Liquor Commission.
435
Voir le Chapitre 5 - Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages, à la
page 132 du présent document.
436
Voir le Tableau 29 - Les paramètres de la situation de jeu qui ont des impacts sur le jeu
pathologique, à la page 141 dans le présent document.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 250
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 251
6.4.3.2 Les mesures associées au savoir-faire des consultants
À l’époque de l’implantation des casinos, des chercheurs québécois437 avaient déjà
commencé à faire un lien entre l’expérience de jeu sur les AÉJ438 et un processus
psychologique pouvant conduire au jeu pathologique. Malgré cela, il ne semble pas y
avoir eu d’étude préliminaire afin de déterminer des mesures de protection fondées sur
des travaux scientifiques plutôt que le savoir-faire des établissements de jeu entendus
en consultation.
On ne connaît pas toujours les fondements des mesures associées au savoir-faire des
organisations qui agissent comme consultants. On comprend que leur mandat est
d’assurer la profitabilité tout en favorisant la bonne réputation des établissements de jeu.
Il est plausible que les consultants investissent des efforts considérables pour trouver
des solutions à chacun des problèmes. Toutefois, afin de préserver leur position
concurrentielle, ces organisations dévoilent peu les données et démarches qui motivent
le choix d’une mesure plutôt qu’une autre. De plus, elles ne font pas d’admission
publique concernant les problèmes qui restent non résolus ou ceux qui peuvent être des
effets secondaires des mesures proposées.
En particulier, on ne trouve aucun document qui explique les fondements des codes
d’éthique, de conduite, de pratique ou de commercialisation qui abondent dans la
documentation promotionnelle des établissements de jeu. Ces documents apparaissent
rassurants. Mais à quel point rassemblent-ils des mesures véritablement efficaces à
protéger les joueurs?
6.4.3.2.1 Pas d’alcool dans les aires de jeu
Les joueurs ne peuvent pas consommer d’alcool dans les aires de jeu. Cette interdiction
est inscrite à l’article 8 dans les Règles sur les normes relatives à l’admission du public,
au maintien de l’ordre public et à la sécurité des personnes dans les casinos d’État de la
Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L6, r.6.1).
Cette mesure se justifie amplement. Plusieurs études ont établi la corrélation entre la
consommation d’alcool et les problèmes de jeu439.
437
(a) Ladouceur, R., Sylvain, C., Duval, C., Gaboury, A., & Dumont, M. (1989). Correction des
verbalisations irrationnelles chez des joueurs de poker-vidéo. International journal of psychology,
24, 43-56. (b) Dumont, M., & Ladouceur, R. (1990). Evaluation of motivation among video-poker
players. Psychological reports, 66, 95-98. (c) Ladouceur, R., Gaboury, A., Bujold, A., Lachance,
N., & Tremblay, S. (1991). Ecological validity of laboratory studies of videopoker gaming. Journal
of gambling studies, 7(2), 109-116. (d) Coulombe, A., Ladouceur, R., Desharnais, R., & Jobin, J.
(1992). Erroneous perceptions and arousal among regular and occasional video poker players.
Journal of gambling studies, 8(3), 235-244.
438
Dans le cas présent, les APV du marché gris.
439
(a) Ellery, M., Stewart, S. H., & Loba, P. (2005). Alcohol's effects on video lottery terminal
(VLT) play among probable pathological and non-pathological gamblers. Journal of gambling
studies, 21(3), 299-324. (b) Zack, M., Stewart, S. H., Klein, R. M., Loba, P., & Fragopoulos, F.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 251
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 252
Des bars sont cependant disponibles à l’intérieur des casinos, comme ils le seront dans
les salons de jeux. Bien encadrés440, ces services peuvent convenir raisonnablement à
la norme sociale de la population québécoise. Le principal problème à corriger est
certainement la trop grande disponibilité de l’alcool autour des ALV situés dans les bars.
6.4.3.2.2 Interdiction d’entrée pour les personnes de moins de 18 ans.
Cette interdiction est inscrite à l’article 2 dans les Règles sur les normes relatives à
l’admission du public, au maintien de l’ordre public et à la sécurité des personnes dans
les casinos d’État de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils
d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.6.1).
Au Royaume-Uni, le Gaming Act de 1968 a permis aux personnes mineures de parier
sur les MAS. Dès lors, les jeunes ont eu un accès pratiquement sans entrave aux Fruit
machines, c’est-à-dire à des appareils offrant essentiellement des jeux de ligne. Bien
que des études, réalisées entre 1985 et 1990, ne soient pas unanimes, la plupart ont
constaté un lien probant entre l’utilisation des Fruit machines et des conséquences non
désirables chez les adolescents441. Ces conséquences sont typiques des
comportements des personnes qui éprouvent des problèmes de jeu, notamment une
fréquence ou une dépense au jeu excessives, des emprunts pour jouer ainsi que des
actes de délinquance442. En 1992, une évaluation psychométrique a finalement établi
que 9% des adolescents jouant sur les Fruit machines étaient des joueurs
pathologiques443. L’existence de joueurs pathologiques adolescents sur les Fruit
machines a été ultérieurement confirmée444.
(2005). Contingent gambling-drinking patterns and problem drinking severity moderate implicit
gambling-alcohol associations in problem gamblers. Journal of gambling studies, 21(3), 325-354.
(c) Baron, E., & Dickerson, M. (1999). Alcohol consumption and self-control of gambling behavior.
Journal of gambling studies, 15(1), 3-15. (d) Stewart, S. H., & Kushner, M. G. (2005). Introduction
to the special issue on "relations between gambling and alcohol use". Journal of gambling
studies, 21(3), 223-231.
440
C’est-à-dire sans incitation à la consommation d’alcool, sans gratuité offerte aux joueurs, et en
refusant de servir un client en état d’ébriété.
441
(a) Fisher, S. (1991). Governmental response to juvenile fruit machine gambling in the U. K.:
where do we go from here? Journal of gambling behavior, 7(3), 217-247. (b) Griffiths, M. (1993).
Fruit machine addiction in adolescence: a case study. Journal of gambling behavior, 9(4), 387399.
442
En plus de Fisher (1991), voir aussi : Huxley, J., & Carroll, D. (1992). A survey of fruit machine
gambling in adolescents. Journal of gambling behavior, 8(2), 167-179.
443
Fisher, S. (1992). Measuring pathological gambling in children: the case of fruit machines in
the U. K. Journal of gambling behavior, 8(3), 263-285.
444
(a) Griffiths, M. (1993). Factors in problem adolescent fruit machine gambling: results of a
small postal survey. Journal of gambling behavior, 9(1), 31-45. (b) Fisher, S. (1993). Gambling
and pathological gambling in adolescents. Journal of gambling behavior, 9(3), 277-288. (c)
Fisher, S., & Griffiths, M. (1995). Current trends in slot machine gambling: research and policy
issues. Journal of gambling behavior, 11(3), 239-247.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 252
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 253
Au Québec, un sondage réalisé auprès de 1320 enfants, entre 8 et 13 ans, a constaté
que 29% d’entre eux avaient déjà joué sur les APV445, soit seuls ou en compagnie de
leurs parents, et 3,4% y avaient joué au moins une fois par semaine. Dans un tel
contexte, il était impératif de ne pas distribuer les AÉJ aux mêmes endroits où les APV
étaient antérieurement installés.
Depuis 1994, les ALV ont été expressément distribués dans les bars afin de les rendre
inaccessibles aux personnes de moins de 18 ans. Toutefois, les bars ne sont parfois
qu’un comptoir à peine isolé dans les restaurants ou les centres de loisirs (salles de
quilles, billards). Dans la mesure où les appareils étaient parfois dissimulés derrière des
isoloirs, le personnel pouvait difficilement être en mesure d’assurer une surveillance
constante. Seule l’encaissement du coupon de remboursement est un obstacle quoique
facilement contournable si le mineur est accompagné d’un adulte complaisant446.
L’interdiction des mineurs dans l’aire de jeu des salons de jeux sera appliquée dans
l’espoir de réaliser un meilleur « filtrage » de la clientèle447. C’est réaliste. Toutefois, il
restera, dans les bars du Québec, 11 370 ALV répartis dans 2 521 sites448.
6.4.3.2.3 Le programme d’auto-exclusion
L’auto-exclusion est une mesure qui devient de plus en plus centrale dans les politiques
de prévention des problèmes de jeu.
Cette disposition est autorisée par la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les
appareils d’amusement (L.R.Q., c. L-6, a. 20.2, 1 er al., par. g), et appliquée selon
l’article 3 dans les Règles sur les normes relatives à l’admission du public, au maintien
de l’ordre public et à la sécurité des personnes dans les casinos d’État de la Loi sur les
loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.6.1).
6.4.3.2.3.1 Les données de Loto-Québec
Dans quelques rapports annuels449, Loto-Québec révèle qu’un nombre appréciable de
joueurs ont eu recours à ce service, bien que ceux-ci représentent une très faible
445
(a) Ladouceur, R., Dubé, D., & Bujold, A. (1994). Gambling among primary school students.
Journal of gambling behavior, 10(4), 363-370. (b) Aussi 28% des adolescents en Ontario, voir
Govoni, R., Rupcich, N., & Frisch, G. R. (1996). Gambling behavior of adolescent gamblers.
Journal of gambling behavior, 12(3), 305-317.
446
Cela est interdit par l’article 46 des Règles sur les appareils de loterie vidéo (c. L-6, r.2.01) de
la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a.
20.1, 1er al., par. a à m et 2e al.).
447
Voir à la page 24 dans : Loto-Québec. (2004). Plan de développement 2004-2007. Montréal,
QC : auteur.
448
Voir à la page 35 dans : Loto-Québec. (2004). Plan de développement 2004-2007. Montréal,
QC : auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 253
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 254
proportion des joueurs pathologiques. Depuis l’an 2000, ce service s’est stabilité à
environ 1 500 contrats signés à chaque année, pour un total d’environ 3 000 contrats
actifs et environ 11 000 repérages annuellement450.
Répartition de la
clientèle
Figure 89
Nombre de contrats d'autoexclusion actifs
dans les casinos québécois
4000
3000
2000
1000
0
19961997
19971998
19981999
19992000
20002001
20012002
Rappelons que, selon l’enquête de Statistique Canada451 réalisée en 2002, il y aurait, au
Québec, environ 20 000 joueurs avec problèmes de jeu et 75 000 joueurs à risque
modéré452. Toutes ces personnes pourraient bénéficier du programme d’autoexclusion.
Ce programme bénéficierait donc à environ 3% des joueurs excessifs.
449
Loto-Québec a cessé de produire des statistiques détaillées sur l’autoexclusion des casinos
en l’an 2000.
450
Voir à la page 33 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale 2004-2005 :
Pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteur.
451
Statistique Canada. (2002). Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes: santé
mentale et bien-être. Document 82-617-XIF. Ottawa, ON : auteur.
452
Les taux provinciaux de prévalence du jeu pathologique proviennent du fichier CANSIM 82617-XIF produit par Statistique Canada.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 254
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 255
Répartition de la clientèle
Figure 90
60%
Durée des contrats d'autoexclusion
dans les casinos québécois
50%
40%
30%
1998-1999
20%
1999-2000
10%
0%
Moins
de 6
mois
6 mois à 1 an à 2 2 ans à 3 ans à 4 ans à Plus de
1 an
ans
3 ans
4 ans
5 ans
5 ans
Environ la moitié des contrats d’auto-exclusion ont une durée de 4 à 5 ans. Très peu
requièrent une durée plus longue. La plupart des autres autoexclus demandent plutôt
des périodes d’exclusion de 6 mois à 3 ans; ce qui est bref compte tenu du problème à
régler.
À l’automne 2005, le programme a été bonifié en accordant aux autoexclus le soutien
d’un conseiller durant la durée de l’auto-exclusion453.
6.4.3.2.3.2 L’évaluation des chercheurs
D’après une étude réalisée dans les casinos québécois454, la principale utilité du
programme d’auto-exclusion est de proposer une solution intermédiaire entre les
tentatives d’autocontrôle et l’inscription formelle dans un programme de traitement. Il
s’agit d’une solution efficace pour 30% des personnes inscrites. En contrepartie, 36%
des inscrits contournent le système de détection environ 6 fois durant la durée du
contrat455. Malgré les rechutes, le taux de satisfaction demeure très élevé à 80%.
Le programme d’auto-exclusion n’a cependant pas une portée suffisante : 50% des
personnes auto-exclues ont indiqué s’être rabattues sur les ALV dans les bars durant la
durée de leur contrat. Il importe aussi de noter que 71% des inscrits ont déclaré avoir
une dette de jeu moyenne de 11 962 dollars canadiens, et que les deux-tiers doivent
453
Voir à la page 54 dans : Loto-Québec. (2006). Rapport annuel 2005-2006 : Divertir au profit de
la collectivité. Montréal, QC : auteur.
454
Ladouceur, R., Jacques, C., Giroux, I., Ferland, F., & Leblond, J. (2000). Analysis of a casino'’
self-exclusion program. Journal of gambling studies, 16(4), 453-460.
455
Dans la province de Victoria en Australie, 15% des personnes auto-exclues sont parvenues à
contourner l’interdiction d’entrée en moyenne 3,2 fois. Voir à la page vi dans : South Australian
centre for economic studies. (2003, February). Evaluation of self-exclusion programs and harm
minimisation measures. Report A. Adelaide, South Australia : Adelaide & Flinders Universities.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 255
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 256
emprunter de l’argent pour jouer. Dans une étude américaine456, la dette moyenne des
inscrits s’est élevée à 19 608 dollars américains. En ce sens, l’auto-exclusion est une
mesure à laquelle le joueur fait appel tardivement, après avoir subi des dommages
considérables.
Lorsqu’il est véritablement endossé par l’établissement de jeu, le concept d’autoexclusion est une mesure utile aux joueurs qui en font la demande. Par contre, il n’y a
pas plus que 0,4% à 1,5% des joueurs excessifs canadiens qui font cette demande457. Il
n’y a qu’aux Pays-Bas où l’auto-exclusion a été utilisé massivement par les joueurs
pathologiques458. Incidemment, dans les établissements de la compagnie Holland
Casino, le personnel suit une politique active de dépistage et d’intervention auprès des
joueurs excessifs.
On ne connaît pas encore assez bien les motifs réels conduisant à l’auto-exclusion. Il
est certain que les personnes qui demandent à être auto-exclues sont celles qui ne
parviennent plus à financer leur pratique de jeu. Il est possible que l’auto-exclusion soit
un moyen de contrôler la perte financière le temps qu’une dette soit remboursée ou
qu’un capital puisse être réacquis. Mais qu’advient-il lorsque la capacité financière de
dépenser est restaurée? Les difficultés financières des auto-exclus n’ont jamais été
investiguées. Il est alors possible que l’auto-exclusion ait un effet inverse à celui prévu,
c’est-à-dire que ce programme puisse maintenir le joueur dans un cycle viable de pertes
répétées simplement parce qu’on lui procure un moyen efficace d’éviter la faillite ou le
suicide. À cet égard, il est impératif de considérer la suggestion d’imposer une durée
minimale et irrévocable de cinq années459.
Habituellement, les joueurs peuvent revenir au casino au terme de leur contrat d’autoexclusion. Des exceptions existent460. Au Manitoba, les personnes sont auto-exclues
pour un minimum de deux années au cours desquelles elles sont invitées à participer à
un programme d’information sur le jeu excessif. Au terme du contrat, les joueurs doivent
s’adresser par écrit afin de réacquérir le droit de fréquenter le casino.
456
Steinberg, M., & Velardo, W. (2002). Preliminary evaluation of a casino selfexclusion program.
Responsible Gambling Council’s Discover 2002 Conference, Niagara Falls: Canada.
457
Voir à la page 11 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion
programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25.
458
Voir à la page 128 dans : De Bruin, D.E., F.R.J. Leenders, M. Fris, H.T. Verbraeck, R.V.
Braam, G.F. van de Wijngaart (2001). Gasten van Holland Casino. Effectiviteit van het
preventiebeleid kansspelverslaving. Utrecht: Centrum voor Verslavingsonderzoek. ISBN: 9071772-31-4
http://www.drugresearch.nl/en/GastenVanHollandCasino.EffectiviteitVanHetPreventiebeleidKanss
pelverslaving
459
Voir aux pages 13 et 14 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion
programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25.
460
Voir aux pages 7 et 8 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion
programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 256
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 257
Actuellement, les casinos ne sont pas tenus légalement responsables des joueurs qui
parviennent néanmoins à fréquenter leurs établissements. Ils sont protégés légalement
lorsqu’ils excluent une personne inscrite au programme, et ils n’ont pas à payer les
éventuels gains des joueurs auto-exclus461. Que ces programmes soient efficaces ou
pas, les casinos n’assument pratiquement aucun risque462. Cette situation a été
désapprouvée par la Productivity commission en Australie. De l’avis de cette
commission, l’imputabilité des établissements de jeu est une condition sine qua none de
l’utilité des programmes d’auto-exclusion.
6.4.3.2.4 Code vestimentaire.
Dans l’avis du ministère de la Sécurité publique concernant l’hypothèse d’un
déménagement du Casino de Montréal dans des quartiers populeux463, les auteurs ont
fait un lien entre l’exigence d’un décorum et une limitation des occasions de criminalité.
Le ministère propose de réduire les occasions d’incivilité car celles-ci peuvent constituer
« un signal de déclin de l’ordre public pouvant agir comme catalyseur de dégradation
d’un quartier »464.
L’imposition d’un code vestimentaire est une suggestion courante465 pour contrer la
dénonciation médiatique des joueurs qui deviennent des épaves après avoir tout
dépensé au jeu.
6.4.3.2.5 Borne interactive
Depuis 1999466, les casinos disposent de bornes interactives où les joueurs peuvent
obtenir de la documentation concernant la nature du hasard, la nature du jeu.
À présent, les chercheurs n’ont pas encore trouvé comment renforcer les connaissances
en statistiques d’une manière qui réduise le jeu excessif. Des étudiants universitaires,
461
Voir à la page 4 dans : Nowatzki, N. R., & Williams, R. J. (2002). Casino self-exclusion
programmes : a review of the issues. International gambling studies, 2, 3-25.
462
Napolitano, F. (2003). The self-exclusion program: legal and clinical considerations. Journal of
gambling studies, 19(3), 303-315.
463
Voir aux pages 4 et 30 dans : Sécurité publique – Québec. (2006, février). Avis du ministère
de la Sécurité publique : relocalisation du casino de Montréal : implications en matière de sécurité
publique. Montréal, QC : auteurs.
464
Voir à la page 28 dans : Sécurité publique – Québec. (2006, février). Avis du ministère de la
Sécurité publique : relocalisation du casino de Montréal : implications en matière de sécurité
publique. Montréal, QC : auteurs.
465
Pitcher, A. (1999). Responsible promotion of gaming and dealing with problem gamblers.
Journal of gambling behavior, 15(2), 149-159.
466
Voir à la page 35 dans : Loto-Québec (2000). Rapport annuel 1999-2000. Montréal, QC :
auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 257
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 258
dont la formation implique des cours en statistiques, témoignent des mêmes croyances
erronées quant au hasard que d’autres étudiants universitaires dont la formation
n’implique pas ces cours467. Toutefois, sur les ALV468, les connaissances en calcul des
probabilités sont inutiles car les joueurs n’ont pas les moyens de connaître les
probabilités réelles des événements. De plus, ce qui ne fonctionne pas avec les
universitaires469, pourrait fonctionner avec d’autres personnes. Cette vérification reste à
faire.
En contrepartie, il est certain que l’expression de croyances erronées quant au hasard
peut être considérablement réduite470 par une lecture préalable concernant le concept
d’indépendance entre les événements aléatoires471. Malheureusement, cette étude n’a
pas établi à quel point les deux groupes étaient préalablement égaux quant à leur
méconnaissance initiale de ce concept. Il est alors difficile de distinguer si la lecture du
texte a enseigné une information nouvelle, ou si elle a placé en mémoire de travail472
des connaissances déjà existantes473.
Dès lors, il est envisageable que le gain d’un enseignement quant au calcul des
probabilités exige préalablement que le concept d’indépendance entre les événements
soit préalablement compris ou mis en mémoire de travail. À cet égard, comme le
signalent Karim Benhsain et Robert Ladouceur474, il est sage de ne pas se contenter
d’informer les joueurs des seuls calculs statistiques, car des étudiants plus compétents
en calcul des probabilités semblent s’investir davantage dans des croyances erronées
s’ils croient pouvoir découvrir des liens entre les événements.
467
Dans cette recherche, les étudiants mieux formés en statistiques ont autant tenté de
manipuler l’ALV que les autres étudiants. Il n’est cependant pas certain que ce comportement
aurait perduré longtemps après que les étudiants soient devenus pleinement familier avec l’ALV.
Une période d’observation nettement plus longue aurait été requise pour pleinement supporter la
conclusion. Voir : CQEPTJ. (2005, mai). Connaissances en mathématiques et jeux de hasard et
d’argent. A tout hasard, 7(1), http://gambling.psy.ulaval.ca
468
Il est vrai que des résultats identiques ont été constatés avec un jeu de dés où il est facile de
déduire les probabilités.
469
Les universitaires éprouvent moins fréquemment des problèmes de jeu excessif.
470
Benhsain, K., Taillefer, A., & Ladouceur, R. (2004). Awareness of independence of events and
erroneous perceptions while gambling. Addictive Behaviors, 29, 399-404.
471
Typiquement, les joueurs excessifs croient qu’il est possible de découvrir des liens entre les
tirages. Pourtant, ces tirages surviennent aléatoirement; ce qui rend cet espoir complètement
illusoire. Voir : Ladouceur, R., & Walker, M. (1996). A cognitive perspective on gambling. In P. M.
Salkovskis (Editors), Trends in cognitive therapy (pages 89-120). Oxford : Wiley.
472
En anglais, working memory.
473
Dans un tel cas, la répétition de cette information, plusieurs fois en situation de jeu, serait
requise.
474
Benhsain, K., & Ladouceur, R. (2004). Is knowledge in statistics a protective factor for
excessive gambling? Gambling Research, 16, 25-31.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 258
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 259
6.4.3.2.6 Explication du fonctionnement des appareils
Au casino, les personnes qui le désirent peuvent se rendre à un local où un employé est
à leur disposition pour expliquer le fonctionnement des machines à sous. L’efficacité de
cette mesure a été évaluée par Paul Delfabbro475 qui a conclu qu’il peut s’agir d’un bon
moyen pour aider les joueurs sans problème à maintenir leur comportement de jeu dans
les limites du jeu sécuritaire, mais que cela n’apporte pas d’aide au joueur qui éprouve
déjà des problèmes de jeu.
Un effet iatrogène a été rapporté par Delfabbro. À l’explication du concept de taux de
remise, bon nombre de personnes développent la croyance qu’il existe un mécanisme
de correction de sorte que si l’appareil produit peu pendant un certain temps, ce
mécanisme rendra cet appareil plus payant dans un avenir proche. Afin d’éviter les
effets iatrogènes, Delfabbro recommande de ne pas insister sur le fonctionnement des
processus aléatoires. En fait, les données de Delfabbro suggèrent plutôt de ne pas se
contenter d’indiquer de retour théorique des jeux si les joueurs ne sont pas, en même
temps, mis en garde contre les dangers de conclure erronément en l’existence de liens
entre les tirages.
6.4.3.3 Services spécifiques à la communauté chinoise de Montréal
En 1995, en collaboration avec le Service à la famille chinoise du Grand Montréal, LotoQuébec a créé un programme de prévention.
Il n’est pas clair si les personnes de culture chinoise ont vraiment plus de problèmes de
jeu476. La traduction des tests de dépistage pourrait causer un artéfact477. Quoi qu’il en
soit, les personnes de culture chinoise pourraient bénéficier d’une meilleure protection
par des services culturellement adaptés en raison d’une manière différente de concevoir
le hasard478.
475
Voir aux pages 96 à 99 dans : Delfabbro, P., & LeCouteur, A. (2003, novembre). A decade of
gambling research in Australia and New Zealand (1992-2002) : implications for policy, regulation
and harm minimisation. A report prepared for the Independent gambling authority of South
Australia.
476
Blaszczynski, A., Huynh, S., Dumlao, V. J., & Farrell, E. (1998). Problem gambling within a
Chinese speaking community. Journal of gambling studies, 14(4), 359-380.
477
Lai, D. W. L. (2006). Gambling and the older Chinese in Canada. Journal of gambling studies,
22(1), 121-141.
478
Papineau, E. (2005). Pathological gambling in Montreal's Chinese community: an
anthropological perspective. Journal of gambling studies, 21(2), 157-178.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 259
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 260
Cette initiative intéressante mériterait encore plus d’être développée pour les
communautés amérindiennes du Québec car des taux de prévalence de jeu
pathologique et à risque très élevés ont été rapportés au Canada479.
6.4.4 Les mesures instaurées en 1994 lors de l’implantation des ALV dans les bars
Les casinos constituent des environnements de jeu très contrôlés parce que le territoire
du casino est clairement délimité, et qu’il est surveillé par un imposant service de
sécurité. Dans les bars, cela n’est pas possible. En ce sens, les mesures de protection
encadrant l’exploitation des ALV demandaient à être mieux encadrées.
6.4.4.1 Les mesures recommandées par la Sûreté du Québec en 1993
Le 3 juin 1993, lors de l’étude détaillée du projet de loi qui a créé la RACJ, le directeur
général480 de la Sûreté du Québec a déclaré que le Québec n’avait que deux options :
l’éradication complète des AÉJ ou la création d’un parc d’ALV contrôlé par l’état. La
Sûreté du Québec a alors énoncé cinq prérequis (voir tableau suivant).
Tableau 43
Les mesures constituant un prérequis de la Sûreté du Québec
Citation
Commentaire
1
que les appareils soient inaccessibles
aux mineurs;
Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252 du présent
document.
2
que les appareils soient situés dans
une aire exclusive à leur exploitation
La recommandation de la Sûreté du Québec était
très défavorable à l’installation des ALV dans les
bars. S’il fallait absolument étatiser les AÉJ, la
Sûreté du Québec a proposé que les ALV soient
uniquement situés dans des salons de jeux481.
3
et que la consommation de boissons
alcooliques soit prohibée dans cette
section;
Voir la section 6.4.3.2.1 à la page 251 du présent
document.
479
Wardman, D., el-Guebaly, N., & Hodgins, D. (2001). Problem and pathological gambling in
North american aboriginal populations: a review of the empirical literature. Journal of gambling
studies, 17(2), 81-100.
480
Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la
Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des débats, 45, pages CI-1826 et
CI-1827, Gouvernement du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 260
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 261
Tableau 43
Les mesures constituant un prérequis de la Sûreté du Québec
Citation
Commentaire
4
que des mécanismes de détection des
joueurs compulsifs soient mis sur pied
pour venir en aide à ces derniers;
Dans les casinos, il y a un service d’autoexclusion sans dépistage actif des besoins. Dans
les bars, il n’y a eu absolument aucun effort de
dépistage jusqu’en 2002. À cette occasion, des
dépliants d’auto-dépistage ont été apposés aux
côtés des ALV, et une formation sur le jeu
pathologique a été donnée aux exploitants des
ALV. À toutes fins pratiques, à peu rien d’utile n’a
été fait.
5
qu’un système central de contrôle et
de gestion soit instauré afin
d’empêcher l’infiltration du crime
organisé.
La gestion du parc d’ALV est raisonnablement à
l’abri d’une infiltration du crime organisé. C’est le
contrôle des bars qui est plus problématique.
En l’occurrence, dès mai 1992, la Sûreté du Québec avait insisté en faveur de la
création de salons de jeux481, contrôlés exclusivement par l’État, plutôt qu’une
distribution des ALV dans les bars. Une concentration des ALV dans quelques lieux
contrôlés était acceptable, mais non la distribution proximale de seulement quelques
ALV par site sur un grand territoire.
Le directeur général a aussi fait un commentaire important482, similaire au constat
principal de la Commission Prévost qui était défavorable à l’émission de permis à des
détaillants privés :
« Le milieu interlope va tenter de prendre en main les endroits lucratifs d’exploitation; des
membres du crime organisé pourront, par exemple, offrir à un exploitant les fonds
nécessaires qui lui permettront d’atteindre les quotas fixés par la réglementation,
moyennant que ce dernier, en échange, accepte de leur servir de prête-nom. » (Lavigne,
1993)
En effet, en 1967, peu avant la création de Loto-Québec, la Commission Prévost483 a
recommandé de socialiser le jeu au Québec en autant que le gouvernement assume
directement la gestion du jeu sans intermédiaire, sans émission de permis :
481
Déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de la Sûreté du Québec, à la
Commission permanente des institutions (6 mai 1992), Journal des débats, 12, page CI-387,
Gouvernement du Québec.
482
Voir à la page CI-1827 dans la déclaration de monsieur Robert Lavigne, directeur général de
la Sûreté du Québec, à la Commission permanente des institutions (3 juin 1993), Journal des
débats, 45, Gouvernement du Québec.
483
Voir aux pages 80 à 108 dans : Commission d’enquête sur l’administration de la justice en
matière criminelle et pénale au Québec. (1967). La société face au crime. Volume III, tome 3 : Le
crime au Québec : Le crime organisé.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 261
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 262
«
Ils [ les corps policiers ] affirment, quant à eux, que le fait de légaliser le jeu ne le
tire pas du tout des griffes du crime organisé. Ils affirment, en se basant sur certains
exemples réels et spectaculaires, que le crime organisé fait rapidement main basse sur
tous les permis que peut émettre un État tolérant en matière de jeu. [ … ] De cette
manière, la légalisation du jeu ne servirait, d’après les policiers, qu’à remettre
officiellement au crime organisé ce qu’il possédait précédemment de façon officieuse et
clandestine. » (Commission Prévost, 1967, page 90)
«
Notre proposition se résume donc de façon fort simple : il faut socialiser le jeu.
Entendons par là que l’État autorise le jeu, mais l’organise lui-même à son bénéfice et
sans intermédiaire. Il n’y a donc aucune émission de permis ou de licence en faveur de
l’entreprise privée.
Ceci nous apparaît la seule attitude réaliste. » (Commission Prévost, 1967, page
95)
La non-considération de cette recommandation est une erreur que pourrait rectifier le
projet des salons de jeux484 dans la mesure où, dans toutes les villes où le nombre
d’ALV pourrait rentabiliser un salon de jeux, tous les ALV, situés dans un même
environnement urbain, soient déplacés dans ce salon opéré par Loto-Québec.
Cela fait maintenant plus de 12 ans que les ALV sont opérés dans les bars. Les
problèmes qui persistent ne sont plus transitoires. Les bars sont des endroits où il est
dangereux d’installer des ALV, notamment en raison de la grande disponibilité de
l’alcool485, de l’intérêt financier du tenancier486 à stimuler une dépense au jeu maximale,
de l’isolement des joueurs487, de l’absence quasi totale de contrôle quant à la présence
de profiteurs ou de criminels488 qui trouvent, dans les joueurs excessifs, des personnes
484
À la condition que la création des salons de jeux soit estimée nécessaire au terme de débats
publics concernant une politique générale sur le jeu au Québec.
485
Il existe un lien étroit entre les dommages causés par le jeu pathologique et la consommation
d’alcool. Voir : (a) Ellery, M., Stewart, S. H., & Loba, P. (2005). Alcohol's effects on video lottery
terminal (VLT) play among probable pathological and non-pathological gamblers. Journal of
gambling studies, 21(3), 299-324. (b) Zack, M., Stewart, S. H., Klein, R. M., Loba, P., &
Fragopoulos, F. (2005). Contingent gambling-drinking patterns and problem drinking severity
moderate implicit gambling-alcohol associations in problem gamblers. Journal of gambling
studies, 21(3), 325-354. (c) Baron, E., & Dickerson, M. (1999). Alcohol consumption and selfcontrol of gambling behavior. Journal of gambling studies, 15(1), 3-15. (d) Stewart, S. H., &
Kushner, M. G. (2005). Introduction to the special issue on "relations between gambling and
alcohol use". Journal of gambling studies, 21(3), 223-231.
486
Sans chercher à accoler une image négative aux tenanciers, force est d’admettre que ces
personnes sont en affaires pour réaliser des profits et qu’elles n’ont pas nécessairement la
formation professionnelle, malgré les tournées d’information du CQEPTJ, pour saisir toute la
portée, la dynamique et la signification des difficultés d’une personne aux prises avec une
dépendance pathologique.
487
Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2003). Rapport d’étude sur le
format, la disposition et le mode de disponibilité des appareils de loterie vidéo. Québec,
Université Laval.
488
La violence exercée auprès des propriétaires de bars est une préoccupation majeure du
ministère de la Sécurité publique. En l’occurrence, ce ministère a collaboré à la conception de
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 262
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 263
extrêmement vulnérables à leurs pièges. À cet égard, le projet actuel des salons de jeux
laisse encore beaucoup trop d’ALV dans des bars qui, souvent, seront situés à
seulement quelques rues des salons de jeux.
6.4.4.2 Les mesures associées aux règlements et règles.
Nonobstant les réticences de la Sûreté du Québec, les ALV ont été distribués en mode
proximal dans des milliers de bars du Québec. À cette occasion, la gestion du parc
d’ALV a été encadrée par plusieurs obligations imposées par la loi, dont notamment :
•
Le Règlement sur le système de loterie vidéo de la Loi sur la Société des loteries
du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r.6).
•
Les Règles sur les appareils de loterie vidéo (c. L-6, r.2.01) de la Loi sur les
loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a.
20.1, 1er al., par. a à m et 2e al.).
•
Le Règlement sur le taux de retour des loteries vidéo de la Loi sur les loteries,
les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.10).
•
L’article 36.3 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils
d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 36.3).
•
L’article 52.2 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils
d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 52.2).
•
L’article 52.15 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils
d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 52.15).
Ultérieurement, en 1995, une disposition supplémentaire a permis la création de super
licences pour les hippodromes.
•
L’article 20.1.1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les
appareils d'amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1.1).
6.4.4.2.1 La réglementation sur le système de loterie vidéo
L’exploitation des ALV a été délimitée par le Règlement sur le système de loterie vidéo
de la Loi sur la Société des loteries du Québec (L.R.Q. c. S-13.1, r.6). Loto-Québec doit
veiller à son application.
trois éditions du magazine Infobars destinées à renseigner les propriétaires de bars quant aux
moyens de lutter contre une mainmise du crime organisé sur leurs établissements. (a)
Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2001, février). Numéro
spécial : non à l’intimidation. Infobars, 3(8). (b) Corporation des propriétaires de bars, brasseries
et tavernes du Québec. (2002, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 3(12). (c)
Sécurité publique – Québec. (2005, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 4(2).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 263
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 264
Cette réglementation ne protège pas les joueurs. En effet, l’article 5 est favorable au
transfert des illusions de contrôle. Les articles 6 et 7 sont plausiblement iatrogènes
parce qu’ils prolongent l’expérience de jeu. Dans ce cas, la probabilité d’obtenir un gain
significatif489 est augmentée. Pour jouer, l’article 8 oblige la personne à limiter la portée
de son raisonnement à des processus mentaux qui ne peuvent pas la protéger contre le
jeu pathologique490.
Les mesures associées à cette réglementation sont présentées dans le tableau suivant.
489
Le gain significatif est le principal facteur pathogène du jeu sur AÉJ. Voir à la page 136 le
Stade 5 du modèle du jeu pathologique. Voir aussi (a) Custer, R. L. (1982). An overview of
compulsive gambling. Dans P. A. Carone et al. (éditeurs), Addictive disorders update. New York,
NY : Human sciences press. (b) Greene, J. (1982). The gambling trap. Psychology today, 16(9),
50-55. (c) Custer, R. L. & Milt, H. (1985). When lucks runs out. New York, NY : Facts on public
file. (d) Voir aux pages 150 et 152 dans : Lesieur, H. R., & Custer, R. L. (1984). Pathological
gambling: roots, phases, and treatment. Annals of the American academy of political and social
science, 474, 146-156. (e) Dickerson, M. G., Hinchy, J., Legg-England, S., Fabre, J., &
Cunningham, R. (1992). On the determinants of persistent gambling behaviour. I. High-frequency
poker machine players. British journal of psychology, 83, 237-248. (f) Voir aux pages 33 à 36
dans : Schrans, T., Schellinck, T., & Walsh, G. (2001). The 2000 regular VL players follow-up.
Technical report. A comparative analysis of problem development & resolution. Halifax, Nava
Scotia : Nova Scotia Department of Health. (g) Voir aux pages 20 et 21 dans : Ladouceur, R.,
Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C. (2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling.
Montréal, QC : Les éditions de l’homme. (h) Voir aux pages 294, 295 et 301 dans : Leblond, J.
(2004). Évaluation de la dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier
numéro 200-06-000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
490
Sans la probabilité d’obtention des lots, la personne ne peut pas faire une analyse normative
de la situation de jeu. Dans ce cas, elle est limitée aux processus heuristiques, associatifs et
automatiques. En particulier, les processus heuristiques génèrent les croyances erronées à partir
desquelles s’élaborent les illusions de contrôle. Voir : (a) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of
gambling behavior. London, UK: Lawrence Erlbaum Associates. (b) Toneatto, T., Blitz-Miller, T.,
Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos, A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling.
Journal of gambling studies, 13(3), 253-266. (c) Baboushkin, H. R., Hardoon, K. K., Derevensky,
J. L., & Gupta, R. (2001). Underlying cognitions in gambling behavior among university students.
Journal of applied social psychology, 31(7), 1409-1430.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 264
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 265
Tableau 44
Articles du règlement sur le système de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
5
Le résultat d’un jeu de
loterie vidéo doit reposer
sur le hasard même
lorsque le joueur peut
faire des choix.
Les jeux de cartes (poker et blackjack) permettent au joueur
d’influencer le résultat des parties. Le hasard détermine le
choix des cartes, mais son influence sur le résultat n’est que
partielle. En pratiquant et en analysant les règles de jeu, le
joueur peut améliorer sa performance. L’impression d’un
contrôle réel, quoique partiel, peut se développer.
Malgré que les joueurs puissent s’améliorer aux jeux de
cartes, ils ne peuvent cependant jamais devenir gagnants à
long terme. L’amélioration consiste à perdre moins.
Au contraire, les jeux de lignes ou de keno sont des jeux de
parfait hasard … dans la limite où le matériel informatique
parvient à simuler le hasard. Quels que soient les efforts et
la pratique des joueurs, ceux-ci ne peuvent jamais
s’améliorer. Toute impression de contrôle est illusoire.
Dès lors, la juxtaposition de jeux de cartes aux jeux de ligne
ou de keno crée un environnement où il existe le danger
qu’une impression de contrôle réel soit transférée à des jeux
où le contrôle est illusoire491.
Ce transfert a le potentiel d’aggraver sérieusement les
dommages, car les jeux de cartes sont surtout utilisés par
les joueurs réguliers et ceux qui éprouvent des problèmes
de jeu492. Dans ce cas, le joueur excessif peut conclure
erronément à une validation de son illusion.
6a
Aucune mise ne peut être
supérieure à 2,50 $ et le
lot offert par un jeu de
loterie vidéo pour une
mise ne peut excéder la
valeur de 1 000 $.
Pour un budget donné, en limitant la valeur de la mise, l’ALV
incite le joueur à réaliser un plus grand nombre de parties.
Son expérience de jeu est alors plus diversifiée, d’où une
probabilité plus grande de vivre un gain significatif.
En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est
potentiellement iatrogène.
491
Done, C., & Coventry, K. R. (2000). Transfer of the illusion of control between two gambling
tasks. Current psychology letters, 2, 37-46.
492
Voir aux pages 3-49 et 3-50 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research
Consultants Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova
Scotia Department of Health. Problem gambling services.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 265
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 266
Tableau 44
Articles du règlement sur le système de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
6b
Aucune mise ne peut être
supérieure à 2,50 $ et le
lot offert par un jeu de
loterie vidéo pour une
mise ne peut excéder la
valeur de 1 000 $.
Loto-Québec a pris l’initiative de limiter le lot maximal à 500
dollars au lieu de 1 000.
À un taux de remise donné, la diminution de la valeur du lot
maximal permet de redistribuer l’espérance de gain dans un
plus grand nombre de lots intermédiaires. Le joueur obtient
alors des récompenses plus fréquemment. L’augmentation
du taux de récompense instaure une plus grande résistance
à l’extinction, d’où une probabilité plus grande de vivre un
gain significatif.
En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est
potentiellement iatrogène. Paradoxalement, une
augmentation de la valeur du gros lot, sans connexion des
ALV en îlots, aurait été préférable.
7
Le coût d’un crédit est
d’au plus 0,25 $.
Pour un budget de jeu donné, la limitation des mises oblige
le joueur à réaliser un plus grand nombre de parties. Son
expérience de jeu est alors plus diversifiée, d’où une
probabilité plus grande de vivre un gain significatif.
En illusion de contrôle, le joueur pathologique peut se
rabattre sur les jeux à faible dénomination (à 5¢ le crédit)
afin de minimiser les coûts des hypothèses illusoires qu’il
cherche à tester.
En raison d’une exposition accrue au jeu, cette mesure est
potentiellement iatrogène. Il aurait été préférable d’imposer
cette valeur comme un minimum.
8
Avant le début d’une
partie, le joueur doit avoir
accès, sur l’écran de
l’appareil de loterie vidéo
ou sur l’appareil, aux
informations suivantes :
1° le nom du jeu;
2° le coût d’un crédit;
3° les lots à gagner;
4° le mode d’attribution
des lots à gagner.
Avec ces informations, le joueur ne peut pas décider
rationnellement de son intérêt à jouer ou pas car, pour ce
faire, il manque la probabilité d’acquisition de chacun des
lots.
L’absence d’une information complète entrave l’activation
des processus normatifs. Si le désir de jouer subsiste, le
joueur doit alors se limiter à des raisonnements fondés sur
des processus heuristiques. Ces processus ne sont pas
adaptés pour les jeux de hasard. Leur activation conduit
nécessairement à une interprétation erronée de la situation,
d’où une grande vulnérabilité à l’illusion de contrôle.
Parce qu’il force le joueur à abandonner des processus
mentaux cruciaux pour sa protection, ce manque
d’information est potentiellement iatrogène.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 266
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 267
Tableau 44
Articles du règlement sur le système de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
9
Tout coupon de
remboursement doit
reproduire les
renseignements
suivants :
1° le nom du système de
loterie;
2° une donnée
permettant d’identifier le
titulaire de la licence;
3° le numéro de série de
l’appareil qui a émis le
coupon de
remboursement;
4° la date et l’heure de
l’impression du coupon
de remboursement;
5° la valeur en devises
canadiennes des crédits
remboursables;
6° un numéro de contrôle.
Il s’agit davantage d’une mesure protégeant Loto-Québec
contre ses détaillants.
Le paiement d’un coupon
de remboursement peut
uniquement être effectué
en argent ou par un
chèque émis au nom du
détenteur du coupon.
Certains établissements de jeu imposent le paiement par
chèque dès que la valeur du coupon dépasse un seuil. Un
objectif de cette mesure est de limiter le blanchiment
d’argent.
15
Commentaire
Il n’a jamais été vérifié si les personnes, manifestant des
problèmes cognitifs, des déficiences intellectuelles, un
analphabétisme fonctionnel ou ne parlant pas français ou
anglais, sont capables de comprendre la valeur du solde à
laquelle elles ont droit. Compte tenu que le tenancier est
l’exécuteur et le seul témoin de la transaction, cette mesure
dépend de l’intégrité personnelle du tenancier ou de son
employé.
En raison de l’article 14 du règlement, le joueur est forcé
d’encaisser le coupon de remboursement là où il a été
obtenu. Une mesure adéquate aurait été de permettre
d’encaisser ces coupons à n’importe quel point de vente des
produits de Loto-Québec dans les limites qui existent pour
les loteries.
À l’avenir, le paiement des lots devrait pouvoir se faire par
un dépôt sur une carte magnétique dont le solde pourrait
être déposé dans un compte bancaire à n’importe quel
guichet automatique, sans qu’une transaction inverse ne
puisse être réalisée.
Pour les joueurs excessifs, cette mesure pourrait néanmoins
différer les occasions de dilapider rapidement un gain.
Compte tenu qu’elle entrave le droit de chacun à disposer
librement de ses biens, il devrait être préalablement établi
que les joueurs excessifs en retirent une protection
suffisamment grande pour justifier que chacun doive y
concéder un droit.
6.4.4.2.2 Les règles sur les appareils de loterie vidéo
L’exploitation des ALV a aussi été délimitée par des Règles sur les appareils de loterie
vidéo (c. L-6, r.2.01) de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils
d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1, 1er al., par. a à m et 2e al.). Cette fois, la RACJ doit
veiller l’application de ces règles. Plus spécifiquement, la conformité des ALV aux règles
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 267
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 268
doit être vérifiée par le Laboratoire des sciences judiciaires et de médecine légale493. Cet
organisme relève du ministère de la Sécurité publique. Les objectifs et les moyens de
vérification ne sont pas publics.
Les mesures associées aux règles sont présentées dans le tableau suivant.
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
3
Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner
de façon à ce que le joueur puisse jouer en
pressant des boutons mécaniques ou des
touches digitales ou une combinaisons des
deux. Une partie ne peut être initiée par l’action
d’un levier mécanique ou électrique.
La pression d’un bouton est un geste
très simple qui laisse moins facilement
croire qu’il serait possible de contrôler
le résultat par diverses manipulations
qui étaient auparavant possibles avec
le levier (force ou saccades dans le
mouvement).
4a
Tout appareil de loterie vidéo doit être fabriqué
et doit fonctionner de manière à rejeter toute
mise excédant 2,50 $ et de manière à offrir un
lot n’excédant pas une valeur de 1 000 $.
Voir l’article 6a dans le Tableau 44 à la
page 265.
Tout appareil de loterie vidéo doit être fabriqué
et doit fonctionner de manière à rejeter toute
mise excédant 2,50 $ et de manière à offrir un
lot n’excédant pas une valeur de 1 000 $.
Voir l’article 6b dans le Tableau 44 à la
page 266.
Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner
de manière à indiquer au joueur, pour chaque
nombre de crédits misés, chaque possibilité de
combinaisons gagnantes et le nombre de
crédits qu’elles rapportent.
Avec ces informations, le joueur ne
peut pas décider rationnellement de
son intérêt à jouer ou pas car, pour ce
faire, il manque la probabilité
d’acquisition de chacun des lots.
4b
5
En raison d’une exposition accrue au
jeu, cette mesure est potentiellement
iatrogène.
En raison d’une exposition accrue au
jeu, cette mesure est potentiellement
iatrogène.
Parce qu’il force le joueur à
abandonner des processus mentaux
cruciaux pour sa protection, ce
manque d’information est
potentiellement iatrogène.
Voir aussi l’article 8 dans le Tableau
44 à la page 266.
493
Voir à la page 24 dans Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une
contribution responsable. Montréal, QC : auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 268
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 269
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
6
Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner
de manière à ce qu’il émette automatiquement
un coupon de remboursement lorsque le
nombre de crédits accumulés atteint ou
dépasse une valeur de 1 000 $.
Cette mesure oblige le joueur à faire
un temps d’arrêt après l’obtention d’un
lot important. Il peut s’agir du gros lot,
ou d’un lot intermédiaire multiplié par
le nombre de crédits de la mise.
Pour l’application des présentes règles, on
entend par « coupon de remboursement » : un
relevé écrit émis par un appareil de loterie
vidéo pour confirmer au moins le nombre de
crédits remboursables ainsi que leur valeur en
devises canadiennes.
En raison le l’article 40 des présentes
règles (voir à la page 274), le joueur
doit s’identifier à la caisse pour
encaisser son coupon.
Le lien électronique de l’appareil de loterie
vidéo doit permettre à l’ordinateur central
d’avoir accès au moins aux données
suivantes :
Si ces données devenaient
accessibles aux spécialistes de la
santé publique, de critères plus précis
du jeu sécuritaire pourraient être
élaborés.
10
1° le montant inséré dans l’appareil, soit en
crédit, soit en devises canadiennes;
Par contre, en insérant de l’argent
supplémentaire dans l’ALV, le joueur
peut continuer à jouer sans avoir à
encaisser son coupon immédiatement.
En ce sens, le temps d’arrêt peut être
bref.
À ces informations, il faut aussi ajouter
le nom du jeu auquel le joueur a joué.
2° le montant gagné, soit en crédit, soit en
devises canadiennes;
3° le montant payé, soit en crédit, soit en
devises canadiennes;
4° le montant misé, soit en crédit, soit en
devises canadiennes;
5° les ouvertures de la porte qui protège le
circuit logique;
6° les ouvertures de la porte centrale du
cabinet.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 269
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 270
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
12
Texte
Tout appareil de loterie vidéo doit contenir un
dispositif lui permettant de conserver en
mémoire toutes les données opérationnelles
de celui-ci durant une période d’au moins 90
jours en cas de panne.
Commentaire
Si ces données devenaient
accessibles aux spécialistes de la
santé publique, de critères plus précis
du jeu sécuritaire pourraient être
élaborés.
Un rapport trimestriel devrait être
produit.
17
L’appareil de loterie vidéo doit contenir une
imprimante dont le fonctionnement permet, en
une seule impression, d’émettre un coupon de
remboursement et d’en conserver une copie
conforme à l’intérieur de l’appareil.
Si ces données devenaient
accessibles aux spécialistes de la
santé publique, de critères plus précis
du jeu sécuritaire pourraient être
élaborés.
19
Tout appareil de loterie vidéo doit fonctionner
de manière à ce qu’il permette au joueur, en
tout temps, d’obtenir un coupon de
remboursement pour les crédits qu’il a
accumulés ou qu’il n’a pas utilisés.
Cette mesure est favorable pour
maintenir les joueurs en santé ou pour
atténuer les dommages.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 270
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 271
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
26
Texte
Les catégories d’établissements où peuvent
être exploités les appareils de loterie vidéo
sont les suivantes :
Commentaire
1° un bar pour lequel un permis de bar délivré
par la Régie est en vigueur et non suspendu;
Cet article témoigne d’un effort
appréciable pour éloigner les ALV des
personnes de moins de 18 ans. En
l’occurrence, la définition des sites
oblige à ce qu’un commerce soit
raisonnablement un lieu d’adultes.
2° une brasserie pour laquelle un permis de
brasserie délivré par la Régie est en vigueur et
non suspendu;
En contrepartie, la juxtaposition du jeu
et de l’alcool pose un sérieux problème
439 179
.
3° une taverne pour laquelle un permis de
taverne délivré par la Régie est en vigueur et
non suspendu;
Malgré le premier alinéa, le titulaire d’un
permis de bar, de brasserie ou de taverne ne
peut mettre à la disposition du public des
appareils de loterie vidéo lorsque la capacité
inscrite sur le permis est inférieur à 15 ou
lorsque l’une des mentions suivantes est
inscrite à la section intitulée « particularité
d’exploitation » ou à la section intitulée
« localisation » sur le permis :
1° théâtre;
2° amphithéâtre;
3° centre sportif;
4° terrasse;
5° pavillon de chasse ou de pêche;
6° transporteur public;
7° aire commune de restauration ou
d’exposition.
De même, ce titulaire de permis ne peut mettre
à la disposition du public des appareils de
loterie vidéo lorsque le permis est exploité
dans un lieu de fabrication artisanale de
boissons alcooliques ou lorsque la Régie n’a
pas déterminé de capacité sur le permis tels
les mini-bars ou les distributrices de boissons
alcooliques exploités dans un établissement.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 271
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 272
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
27
Texte
Commentaire
À l’intérieur d’un établissement, les appareils
de loterie vidéo ne doivent pas être installés
dans les endroits suivants :
Le premier point se justifie pleinement
par la remarque faite à l’article
précédent.
1° les aires de préparation des boissons
alcooliques;
Le second point a été l’objet d’une
révision récente qui n’a pas validé
l’option de changer cette règle494.
2° sur les comptoirs de service de celles-ci;
3° dans les salles de toilettes;
4° les vestiaires;
Le cinquième point est
particulièrement important en raison
des problèmes que les employés des
établissements de jeu éprouvent à
force d’être en contact avec le jeu495.
5° les aires réservées aux employés de
l’établissement.
28
Le titulaire d’une licence d’exploitant de site
doit tenir affichée à la vue du public et à
proximité des appareils de loterie vidéo, en tout
temps, dans son établissement, un avis
indiquant qu’il est interdit à une personne âgée
de moins de 18 ans de jouer avec un appareil
de loterie vidéo.
Cette affichage est essentiel.
Voir aussi la section 6.4.3.2.2 à la
page 252.
494
(a) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2003). Rapport d’étude sur le
format, la disposition et le mode de disponibilité des appareils de loterie vidéo. Québec,
Université Laval. (b) Ladouceur, R., Jacques, C., Sévigny, S., & Cantinotti, M. (2005). Impact of
the format, arrangement and availability of electronic gaming machines outside casinos on
gambling. International gambling studies, 5(2), 139-154.
495
(a) Shaffer, H. J., Vander Bilt, J., & Hall, M. N. (1999). Gambling, drinking, smoking and other
health risk activities among casino employees. American journal of industrial medicine, 36, 365378. (b) Shaffer, H. J., & Hall, M. N. (2002). The natural history of gambling and drinking
problems among casino employees. The journal of social psychology, 142(4), 405-424.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 272
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 273
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
29
Au plus cinq appareils de loterie vidéo peuvent
être autorisés dans un établissement où est
exploitée une licence d’exploitant de site.
En 2002, en raison de la multiplication
des permis d’alcool par établissement,
13% des sites possédaient plus que 5
ALV.
Dans la région de Laval-LaurentidesLanaudière, deux sites offraient 50
ALV ou plus. À noter que les
hippodromes de Aylmer et de TroisRivières ne possèdent que 65 ALV.
31
Pour obtenir une licence d'exploitant de site,
tout titulaire d'un permis de bar, de brasserie
ou de taverne doit respecter les conditions
suivantes:
Cette mesure est unanimement
appuyée par tous les organismes
oeuvrant à la protection de la
population.
1° au cours des 5 années qui précèdent la
date de sa demande de licence, ne pas s'être
reconnue coupable ou avoir été reconnue
coupable d'un acte criminel ou d'une infraction
punissable sur déclaration sommaire de
culpabilité et pour laquelle elle n'a pas obtenu
de pardon ou de réhabilitation relativement à
l'une des dispositions des articles 201 à 209 du
Code criminel;
Elle reste néanmoins vulnérable au
recours à des prête-noms, en
particulier dans le milieu des bars qui
éprouve de nombreuses difficultés à
contrer une infiltration par des intérêts
criminels496.
2° supprimé;
3° ne pas avoir vu son permis d'alcool
révoqué, à l'exception d'une révocation de
plein droit, depuis 5 ans à compter de la date
de sa demande de licence;
4° ne pas avoir vu son permis d'alcool
suspendu pour une période cumulative de 6
mois et plus au cours des 3 années précédant
sa demande de licence;
5° ne pas avoir vu une autre de ses licences
d'exploitant de site suspendue au cours des 5
dernières années précédant la date de sa
demande.
496
La violence exercée auprès des propriétaires de bars est une préoccupation majeure du
ministère de la Sécurité publique. En l’occurrence, ce ministère a collaboré à la conception de
trois éditions du magazine Infobars destinées à renseigner les propriétaires de bars quant aux
moyens de lutter contre une mainmise du crime organisé sur leurs établissements. (a)
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 273
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 274
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
40
Le titulaire d'une licence d'exploitant de site
doit tenir un registre dans lequel sont inscrits
les nom et adresse de chaque personne à qui
il paie un coupon de remboursement de 500 $
ou plus ainsi que la date de ce paiement et le
montant de celui-ci.
Cette mesure vise essentiellement à
contrer le blanchiment d’argent.
41
Le titulaire d'une licence doit conserver, dans
l'établissement où il exploite sa licence, les
registres qu'il doit tenir en vertu de la présente
section pendant une période de 3 ans, à
compter de la date de la dernière inscription.
Cette mesure vise essentiellement à
contrer le blanchiment d’argent.
42
Le titulaire d'une licence d'exploitant de site
doit assister aux séances de formation et
d'information organisées par la Régie ou par la
Société.
Il s’agit d’abord et avant tout de
séances d’information sur la manière
d’opérer des ALV.
À partir de l’an 2000497, s’est ajoutée
l’obligation de participer à une session
de formation sur le jeu pathologique.
Certains détaillants peuvent utiliser
cette formation pour aider les joueurs
excessifs; tandis que d’autres peuvent
l’utiliser pour repérer une clientèle très
payante. Cette mesure doit être très
précisément évaluée.
43
Le titulaire d'une licence d'exploitant de site
doit donner une formation d'au moins une
heure à son personnel relative aux droits et
obligations liés à l'exploitation de sa licence.
Voir le commentaire de l’article
précédent.
45
Le titulaire d'une licence d'exploitant de site
doit mettre à la disposition du public les règles
de jeux, les tables de paiement et les
instructions relatives au fonctionnement des
appareils de son établissement.
Voir l’article 2 dans le Tableau 44 à la
page 246.
Corporation des propriétaires de bars, brasseries et tavernes du Québec. (2001, février). Numéro
spécial : non à l’intimidation. Infobars, 3(8). (b) Corporation des propriétaires de bars, brasseries
et tavernes du Québec. (2002, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 3(12). (c)
Sécurité publique – Québec. (2005, avril). Cahier spécial : sécurité dans les bars. Infobars, 4(2).
497
Voir à la page 17 dans : Loto-Québec. (2001). Rapport annuel 2000-2001. Montréal, QC :
auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 274
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 275
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
46
Le titulaire d'une licence d'exploitant de site, la
personne responsable visée au paragraphe 4º
de l'article 33 ou un membre du personnel de
l'établissement ne peut effectuer le paiement
d'un coupon de remboursement sans avoir
préalablement vérifié au moyen d'un
passeport, d'une copie d'un acte de naissance,
d'un permis de conduire d'un véhicule
automobile ou d'une carte d'identité, que la
personne qui réclame le paiement d'un coupon
de remboursement est majeure ou si elle l'est,
qu'elle ne réclame pas ce paiement pour le
compte d'une personne mineure.
Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252
du présent document.
47
Le paiement d'un coupon de remboursement
ne peut être effectué qu'en argent ou par
chèque.
49
Nul ne peut, dans un établissement, accorder
un prêt, un crédit ou autrement avancer de
l'argent, sous quelque forme que ce soit, à une
personne pour lui permettre de jouer avec un
appareil de loterie vidéo.
Voir l’article 5 à la page 247.
50
Il est interdit au titulaire de licence d'exploitant
de site, à la personne responsable visée au
paragraphe 4º de l'article 33, ainsi qu'à tout
membre du personnel de l'établissement de
permettre ou de tolérer qu'une personne,
manifestement en état d'ivresse ou sous
l'influence d'une drogue, d'un médicament ou
d'une autre substance, joue avec un appareil
de loterie vidéo.
L’interdiction de jouer sur plus d’un
appareil est une excellente mesure.
De même, il est interdit à ces personnes de
permettre ou de tolérer qu’une personne joue
avec plus d’un appareil de loterie vidéo à la
fois.
51
Il est interdit au titulaire d'une licence
d'exploitant de site, à la personne responsable
visée au paragraphe 4º de l'article 33, ainsi
qu'à tout membre du personnel de
l'établissement d'inciter une personne à jouer
avec un appareil de loterie vidéo.
Mesure parfaitement appropriée
55
Il est interdit à une personne mineure de jouer
avec un appareil de loterie vidéo.
Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252
du présent document.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 275
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 276
Tableau 45
Articles des règles sur les appareils de loterie vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
Texte
Commentaire
56
Il est interdit au titulaire d'une licence
d'exploitant de site ou à la personne
responsable visée au paragraphe 4º de l'article
33 ainsi qu'à tout membre du personnel de
l'établissement de tolérer ou de permettre à
une personne mineure de jouer, directement
ou par l'entremise d'une personne majeure,
avec un appareil de loterie vidéo.
Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252
du présent document.
57
Il est interdit au titulaire de licence d'exploitant
de site de tolérer ou de permettre que des
appareils de loterie vidéo soient reliés entre
eux afin d'alimenter un lot progressif.
Mesure appropriée.
Pour l'application de la présente règle, on
entend par: «lot progressif»: un gros lot,
remporté par un seul joueur, dont le montant
correspond à un pourcentage déterminé de
chacune des mises placées sur chacun des
appareils participants.
59
Il est interdit au titulaire de licence d'exploitant
de site de faire crédit, d'échanger des
chèques, de recevoir, directement ou
indirectement, par échange ou autrement, des
biens ou des services en échange de parties
jouées avec un appareil de loterie vidéo dans
son établissement.
62
Une publicité peut s'adresser à une personne
mineure ou utiliser une personne mineure
uniquement lorsqu'elle vise à promouvoir
l'abstinence ou la modération au jeu avec un
appareil de loterie vidéo ou à donner de
l'information sur les effets ou les
conséquences d'une participation excessive au
jeu.
Voir la section 6.4.3.2.2 à la page 252
du présent document.
6.4.4.2.3 Le règlement sur le taux de remise
Le pouvoir de réglementer le taux de remise des ALV est assumé directement par le
gouvernement, plutôt que la RACJ ou Loto-Québec, en raison de la Loi sur les loteries,
les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, a. 119, par. g).
Celui-ci est fixé par le Règlement sur le taux de retour des loteries vidéo de la Loi sur les
loteries, les concours publicitaires et les appareils d’amusement (L.R.Q. c. L-6, r.10).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 276
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 277
Tableau 46
Article du règlement sur le taux de retour des loteries vidéo constituant
une mesure de prévention ou d’atténuation des méfaits
No.
1
Texte
Commentaire
Pour tous les jeux offerts par les appareils de loterie
vidéo faisant partie d'un système de loterie vidéo au
sens du paragraphe l de l'article 1 de la Loi sur les
loteries, les concours publicitaires et les appareils
d'amusement (L.R.Q., c. L-6), le taux de retour ne
doit pas être inférieur à 83 %.
En fait, le taux de remise se situe
à 92%.
6.4.4.2.4 Autres articles de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les
appareils d'amusement
Il existe d’autres dispositions qui s’appliquent plus généralement.
Tableau 47
Article 36.3 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement
No.
Texte
36.3
Malgré tout règlement municipal adopté
en vertu d'une loi générale ou spéciale,
l'exploitation d'un appareil de loterie
vidéo est permise sous réserve que
celle-ci ait lieu dans les conditions
prévues par la présente loi ou ses
textes d'application.
52.2
Commentaire
Ainsi, le gouvernement du Québec force
toutes les collectivités sur son territoire à
accepter la présence des ALV dès qu’un
propriétaire de bar obtient un permis, et cela
quelle que soit la volonté de la collectivité.
Dans certaines juridictions, par exemple en
Alberta et en Louisiane, les citoyens peuvent
tenir un référendum pour empêcher le
déploiement des ALV dans leur municipalité.
Nul ne peut exploiter un appareil de
loterie vidéo s'il n'est pas la propriété
de la Société des loteries du Québec
ou de l'une de ses filiales et s'il n'est
pas relié à l'ordinateur central de
contrôle d'un système de loterie vidéo
mis sur pied et exploité par la Société.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 277
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 278
Tableau 47
Article 36.3 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement
No.
Texte
52.15
La Société des loteries du Québec doit,
avant leur acquisition, ensuite selon la
fréquence déterminée par les règles de
la Régie ou sur demande de celle-ci,
faire vérifier et certifier par un
laboratoire relevant de la responsabilité
du ministre les appareils de jeu et le
matériel électronique directement liés
aux systèmes de loterie de casino
qu'elle exploite dans un casino d'État,
pour s'assurer que leur fonctionnement
repose uniquement sur le hasard et
que les appareils sont adéquats.
Commentaire
Restriction.
La même obligation s'impose, selon le
cas, à la Société ou aux titulaires de
licences pour les appareils de loterie
vidéo exploités ailleurs que dans un
casino d'État, avant que ceux-ci ne
soient immatriculés, ensuite selon la
fréquence déterminée par les règles de
la Régie ou sur demande de celle-ci.
6.4.4.3 Message incitant à la modération
Entre juin 1994 et juin 2002, tous les ALV ont été doté d’un message incitant à la
modération498 : « Jouez avec modération pour que le jeu demeure un jeu ». Le caractère
iatrogène de ce message est présentement l’objet d’un litige devant la cour supérieure. Il
n’est pas possible de le commenter ici. D’ailleurs, ce message n’est pas pertinent pour
évaluer le projet des salons de jeux.
6.4.4.4 Dépliant
Entre 1996 et 2001, un dépliant intitulé « Jouez avec modération pour que le jeu
demeure un jeu » était placé aux côtés des ALV. Le caractère iatrogène de ce dépliant
est présentement l’objet d’un litige devant la cour supérieure. Il n’est pas possible de le
commenter ici. D’ailleurs, ce dépliant n’est pas pertinent pour évaluer le projet des
salons de jeux.
498
Voir à la page 14 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action
gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 278
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 279
6.4.4.5 Pas de connexion en îlots entre les ALV
Dans les casinos, certaines MAS sont connectées en îlots afin de pouvoir offrir un gros
lot de très grande valeur. Cela n’est pas permis pour les ALV dans les bars, et il semble
que les salons de jeux ne le permettront pas non plus. C’est une décision sage.
6.4.4.6 Banques de données sur les comportements de jeu
En juin 1994, le parc de la SLVQ était composé d’ALV provenant de trois fabricants,
offrant des jeux similaires. À des fins de surveillance, chaque appareil était connecté à
un réseau centralisé. Ainsi, d’importantes banques de données ont été accumulées sur
les habitudes de jeu des Québécois. Ces banques englobent le choix des jeux, le
nombre de parties jouées, le montant des mises, les dénominations utilisées, la durée
de jeu avant l’encaissement, les montants insérés dans les appareils durant une session
de jeu, le taux de remise effectif, le taux d’encaissement, et les changements de jeux
avant encaissement.
Malgré des demandes en ce sens, ces données n’ont jamais été mises à la disposition
des chercheurs et spécialistes de la santé publique. Elles seraient très utiles.
6.4.5 L’implantation des ALV dans quatre hippodromes du Québec
En 1995, la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement
a été modifiée afin de créer des super licences pour l’exploitation d’ALV dans les
hippodromes (L.R.Q. c. L-6, a. 20.1.1). Des dispositions spéciales ont été adoptées.
Tableau 48
Article 20.1.1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement
Texte
Malgré le nombre maximum d'appareils de loterie
vidéo déterminé par la Régie en vertu de ses règles,
les titulaires d'une licence d'exploitant de site qui sont
également titulaires d'une licence de courses ou de
piste de courses de chevaux de catégorie A ou B
délivrées en vertu de la Loi sur les courses ( chapitre
C-72.1) peuvent être autorisés à détenir le nombre
maximum suivant d'appareils de loterie vidéo;
Commentaire
La situation actuelle est 200 à
Montréal, 100 à Québec, 65 à TroisRivières et 65 à Aylmer.
— 125 appareils à la piste de courses de Montréal;
— 100 appareils à la piste de courses de Québec;
— 50 appareils à la piste de courses de Trois-Rivières.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 279
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 280
Tableau 48
Article 20.1.1 de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et les appareils d'amusement
Texte
Nombre d'appareils
Commentaire
Ceci explique le commentaire
précédent.
Le gouvernement peut, sur la recommandation
conjointe du ministre du Développement économique,
de l'Innovation et de l'Exportation, du ministre des
Finances et du ministre de la Sécurité publique,
modifier le nombre maximum d'appareils de loterie
vidéo pour chacune des pistes de courses désignée au
premier alinéa.
Pistes de courses
Cette disposition n’a pas été
appliquée.
La Régie peut désigner d'autres pistes de courses de
chevaux de catégorie A ou B et déterminer pour
chacune d'elles, le nombre maximum d'appareils de
loterie vidéo qui peut y être autorisé.
Approbation
L'exercice par la Régie des pouvoirs visés au troisième
alinéa est soumis à l'approbation du gouvernement.
Celui-ci en est saisi sur recommandation conjointe du
ministre du Développement économique, de
l'Innovation et de l'Exportation, du ministre des
Finances et du ministre de la Sécurité publique.
Local approprié
Les appareils doivent être placés dans un local pour
lequel le titulaire de la licence de courses ou de piste
de courses est titulaire d'un permis de bar. Ils peuvent
être répartis dans plusieurs locaux. Toutefois, un seul
local peut regrouper un nombre d'appareils supérieur
au maximum déterminé par la Régie en vertu de ses
règles.
Ceci implique vraisemblablement
qu’outre l’aire principale des salons de
jeux, des îlots de cinq ALV pourrait
être disséminés à l’intérieur de
bâtiment.
Pour contrôler le jeu excessif, cela
n’apparaît pas souhaitable.
Licence d'exploitant
Une licence d'exploitant de site pour la piste de
courses de Montréal, de Québec ou de Trois-Rivières,
ou pour toute autre piste de courses désignée en vertu
du présent article, ne peut être délivrée qu'à un titulaire
d'une licence de courses ou de piste de courses.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 280
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 281
6.4.6 L’étude de prévalence du jeu pathologique réalisée en 1996
Les efforts pour effectuer un monitorage des impacts de l’accroissement de l’offre de jeu
au Québec sont surtout l’initiative du chercheur Robert Ladouceur de l’Université Laval
(voir Tableau 49).
Une première étude québécoise de prévalence a eu lieu en 1989, avant l’étatisation des
AÉJ. Les APV illégaux étaient déjà présents depuis 1976. Parmi la population, l’auteur a
estimé qu’il y avait 1,2% de joueurs pathologiques probables, et 2,6% de joueurs à
risque, pour un total de 3,6% de la population adulte qui jouait excessivement. Cette
étude n’a fourni que des taux de prévalence à vie.
En 1996, trois ans après l’avènement des casinos et deux ans après l’implantation des
ALV, les auteurs de la seconde étude québécoise de prévalence ont estimé que la
proportion des joueurs pathologiques probables avait augmenté à 2,1%, soit une hausse
de 75%. Cette augmentation était à l’orée du seuil de signification statistique, mais non
significative.
Parce que l’échantillon de 1996 contenait trop d’universitaires, et d’adultes d’âge moyen,
une révision du calcul de la pondération des participants s’avère nécessaire501. Lorsque
les taux de prévalence sont ainsi actualisés, la proportion le pourcentage de joueurs
pathologiques probables grimpe à 2,8%; ce qui représente alors une augmentation
statistiquement significative de 131%.
Bien que cette seconde étude témoigne d’une croissance plausible des problèmes de
jeu dans la population québécoise, et qu’entre-temps l’offre de jeu s’était surtout
développée par un important déploiement d’AÉJ, il n’y a pas eu d’étude supplémentaire
pour préciser cette constatation.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 281
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 282
Tableau 49
Résultats des études de prévalence du jeu pathologique réalisées au Québec
Catégories de joueurs
Année
N
Outil
Pathologiques probables
À risque
Excessifs
Première étude de prévalence du jeu pathologique499
1989
1002
SOGS-vie
1,2%
2,6%
3,8%
Seconde étude de prévalence du jeu pathologique500
1996
1257
SOGS-vie
2,1%
2,4%
1996
1257
SOGS-12 mois
1,4%
1,0%
4,5%
2,4%
501
Actualisation de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique
1996
1263
SOGS-vie
2,8%
2,3%
5,1%
1996
1263
SOGS-12 mois
1,3%
1,3%
2,6%
6.4.7 La création des centres de recherche universitaires
En 1997, Loto-Québec a entrepris de financer des centres de recherche universitaires
présentés comme des organismes indépendants. Dans les faits, ces équipes de
recherche dépendent d’une manière critique de leur principale source de financement
qui est soit Loto-Québec directement, ou d’autres agences gouvernementales
indirectement. Lorsque le financement ne provient pas de la dépense au jeu de la
population québécoise, il provient d’organisations de jeu américains ou australiens. Ces
centres ne peuvent pas assumer une délégation de la responsabilité gouvernementale
de prémunir les citoyens contre les méfaits du jeu. Ils ne sont pas davantage des
organismes indépendants.
De plus, les centres universitaires ne sont pas tenus de répondre aux questions ou
appréhensions de citoyens. Les contrats ne contiennent aucun engagement à recevoir
les plaintes de citoyens avec les mêmes garanties d’audition que procurent les services
gouvernementaux.
499
Ladouceur, R. (1991). Prevalence estimates of pathological gamblers in Québec. Canadian
Journal of Psychiatry, 36, 732-734.
500
(a) Prévalence vie : Ladouceur, R., Jacques, C., Ferland, F., & Giroux, I. (1999). Prevalence of
problem gambling: A replication study 7 years later. Canadian Journal of Psychiatry, 44, 802-804.
(b) Prévalence annuelle : Ladouceur, R., Jacques, C., Chevalier, S., Sévigny, S., Hamel, D., &
Allard, D. (2004). Prévalence des habitudes de jeu et du jeu pathologique au Québec en 2002.
Québec et Montréal, Université Laval et Institut national de santé publique du Québec.
501
Voir à la page 247 dans l’annexe G du document : Leblond, J. (2004). Évaluation de la
dangerosité des appareils de loterie vidéo. Expertise déposée au dossier numéro 200-06000017-015 de la Cour supérieure du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 282
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 283
6.4.8 L’émission « Savez-vous jouer … sans perdre la tête?
Les 10 et 11 décembre 1998, par l’intermédiaire des réseaux TVA et CFCF,
Loto-Québec a diffusé une émission de sensibilisation au jeu qui a été accompagnée
d’une brochure du même titre502. Aucune documentation n’est accessible quant aux
objectifs de cette émission. Il n’y a eu aucune évaluation des impacts.
6.4.9 Le transfert de la responsabilité du jeu pathologique au MSSS
En 2001, le gouvernement a transféré la responsabilité du jeu pathologique de LotoQuébec vers le ministère de la Santé et des services sociaux. À cette occasion, le
MSSS a entrepris immédiatement une campagne médiatique pour sensibiliser la
population aux indices ou conséquences du jeu pathologique.
6.4.9.1 Campagnes nationales de sensibilisation
Il existe peu de données sur l’efficacité des campagnes médiatiques auprès des joueurs
pathologiques. Le principal doute qui existe quant à cette mesure est soulevé par le fait
que les joueurs en pleine crise passent davantage des heures devant un écran d’ALV
plutôt qu’à l’écoute des médias.
Dans l’état de l’Australie-du-sud, il a été constaté que seulement 31% de la population
pouvait décrire au moins une des annonces faites dans les médias503. Cette proportion
grimpe à 40% pour les joueurs pathologiques, bien que la différence ne soit pas
significative. Il est possible que les annonces dans les médias marquent davantage
l’attention des joueurs pathologiques. Dans ce cas, l’impact serait toutefois peu
important compte tenu des coûts de telles campagnes.
6.4.9.2 Le forum sur le jeu pathologique
Le 8 et 9 novembre 2001, un forum sur le jeu pathologique a réuni à Montréal plusieurs
intervenants dans le domaine du jeu. Ce forum a été une première activité de
rassemblement qui a surtout fourni la base pour la création d’une table de concertation
interministérielle (voir la section 6.4.10 à la page 284).
502
Voir à la page 41 dans : Loto-Québec. (1999). Rapport annuel 1998-1999. Montréal, QC :
auteur.
503
Voir aux pages 111 et 112 dans : Taylor, A. et al (2001 may). Gambling patterns of South
Australians and associated health indicators. South Australia: South Australian department of
human services, Centre for population studies in epidemiology.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 283
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 284
6.4.9.3 Le programme expérimental sur le traitement du jeu pathologique
L’évaluation du programme expérimental du jeu pathologique a déjà été l’objet d’une
évaluation de la part de l’Institut national de santé publique504 puis d’une publication
indépendante qui l’a comparé aux travaux antérieurs du CQEPTJ505.
Dans l’ensemble, le traitement cognitif du jeu pathologique adopté par le MSSS
fonctionne bien, quoique l’implantation à grande échelle a posé quelques difficultés
d’acceptation. Une plus grande souplesse d’application serait souhaitable.
6.4.10 La table de concertation interministérielle
En décembre 2000, une table de concertation interministérielle a réuni le MSSS, le
ministère des Finances, la RACJ, la Sécurité publique ainsi que Loto-Québec. Cette
réflexion a conduit à la rédaction du document « Plan d’action gouvernemental 20022005 : agir ensemble » 506.
À cette occasion, la table de concertation a axé la priorité sur le concept de jeu
responsable507. Par ailleurs, encore en vigueur aujourd’hui, la RACJ a décrété un
moratoire sur l’octroi de nouvelles licences.
En ce qui concerne les ALV, six mesures de dissuasion ont été adoptées508 : (a) des
boîtiers de couleur noire, (b) réduction de 23 à 10 jeux, dont un maximum de 5 par
appareil, (c) réduction de la vitesse de jeu par la désactivation du bouton d’arrêt, (d)
réduction de la banque maximale par session de $ 100 à $ 60, (e) affichage à l’écran
d’une horloge visible en tout temps, et (f) désactivation des ALV en dehors des heures
autorisées par le permis d’alcool. De plus, trois mesures ont été adoptées afin
d’augmenter le fardeau de responsabilité des joueurs509 : (a) la nécessité de fixer la
504
(a) Audet, C., St-Laurent, D., Chevalier, S., Allard, D., Hamel, D., & Crépin, M. (2003).
Évaluation du programme expérimental sur le jeu pathologique. Rapport 7. Monitorage évaluatif –
indicateurs d’implantation – données rétrospectives. Institut national de santé publique du
Québec.
505
Leblond, J. (2004). Comparaison des résultats du programme expérimental sur le jeu
pathologique du MSSS aux résultats des études scientifiques menées à l'Université Laval.
L'intervenant, 20(3), 4-6.
506
Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action gouvernemental sur le jeu
pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
507
Voir à la page 18 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action
gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
508
Voir à la page 24 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action
gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
509
Voir à la page 24 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action
gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 284
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 285
durée de jeu souhaitée, (b) l’activation d’une fenêtre de type pop-up à la fin de la durée
spécifiée, et (c) l’affichage préférentiel des crédits en dollars.
Malheureusement, aucune de ces modifications n’a fait l’objet d’un suivi qui a été publié.
Il est difficile de les apprécier avec certitude.
Voici les mesures qui sont la conséquences des travaux de la Table de concertation
interministérielle.
6.4.10.1 Les boîtiers des ALV seront dorénavant de couleur noire
Il s’agit certainement de la mesure la moins intéressante de toute la littérature sur les
mesures de protection!
6.4.10.2 La réduction du nombre de jeux de 23 à 10, dont un maximum de cinq par
appareil.
Il suffit d’un seul jeu pour rendre un AÉJ dangereux. Un jeu de cartes et un jeu de lignes
sont déjà une combinaison interactive dangereuse.
En général, incluant les joueurs québécois510, les joueurs n’utilisent qu’un ou deux jeux
par session de jeu511. À peine un joueur sur cinq, quelle que soit sa catégorie, utilise
plus d’un jeu par session512. Deux fois sur trois, les joueurs préfèrent les jeux de
ligne513.
À noter que la réduction du nombre de jeu a été rendue facile par le retrait des appareils
de la compagnie Williams en 2003.
6.4.10.3 La réduction de la vitesse de jeu par la désactivation du bouton d’arrêt
Cette mesure peut être profitable (voir section 6.3.2.2.8 à la page 210). Elle devra
cependant être évaluée empiriquement.
510
En moyenne, 1,8 jeux par session sur ALV en 1997 et 1,7 jeux en 1999. Voir à la page 7
dans : Multi-Reso. (1999). SLVQ sondage-population 1999. Synthèse des résultats. Montréal,
QC : auteurs.
511
Voir à la page 3-23 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation
video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game
outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd.
512
Voir à la page 3-49 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants
Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia
Department of Health. Problem gambling services.
513
Voir à la page 3-24 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation
video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game
outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 285
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 286
De plus, la réduction de la vitesse de jeu s’applique surtout aux jeux de lignes. Or, bien
que les jeux de lignes demeurent les préférés des toutes les catégories de joueurs, les
joueurs pathologiques participent davantage aux jeux de cartes514.
6.4.10.4 La réduction de la banque maximale par session de $ 100 à $ 60
Alors que cette limite était fixée auparavant à 100 dollars, les joueurs ne peuvent plus
insérer des billets dans l’appareil dès que leur banque dépasse 60 dollars515.
Cette mesure va dans la bonne direction (voir section 6.3.4.2 à la page 228) quoique le
seuil maximal est peut être encore trop élevé. Pour en juger, les chercheurs doivent
avoir accès aux données enregistrées par les ALV.
De plus, l’émission automatique d’un coupon de remboursement provoque un
encaissement forcé dès que la banque du joueur atteint 500 dollars, soit le montant du
gros lot maximal pour une mise de 1 crédit516.
6.4.10.5 L’affichage à l’écran d’une horloge visible en tout temps
Les études de la Nouvelle-Écosse n’ont pas trouvé une grande utilité à cette mesure
(voir sections 6.3.2.2.1 à la page 198 et 6.3.2.2.2 à la page207).
Il a été constaté que les joueurs pathologiques expriment un horizon temporel plus court
que les joueurs sans problème de jeu517. Les joueurs pathologiques semblent ainsi plus
enclins à se concentrer sur les aspects hédonistes du présent ainsi que sur des
événements passés. Par contre, ceux-ci n’expriment pas de difficulté à se référer à des
événements futurs. Les différences de moyennes observées, quoique statistiquement
significatives, sont minces. De plus, les auteurs signalent que les effets observés
pourraient être causés par le stress généré par le problème de jeu, et non par une
caractéristique de la personnalité des joueurs pathologiques.
514
Voir à la page 3-50 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants
Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia
Department of Health. Problem gambling services.
515
(a) Voir à la page 15 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une
réussite. Montréal, QC : auteurs. (b) Voir à la page 33 dans Loto-Québec. (2005). Bilan de
responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs.
516
(a) Voir à la page 15 dans Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une
réussite. Montréal, QC : auteurs. (b) Voir à la page 33 dans Loto-Québec. (2005). Bilan de
responsabilité sociale : pour une contribution responsable. Montréal, QC : auteurs.
517
Hodgins, D. C., & Engel, A. (2002). Future time perspective in pathological gamblers. Journal
of nervous and mental disease, 190(11), 775-780.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 286
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 287
6.4.10.6 Désactivation automatique des ALV en dehors des heures d’ouverture
autorisées par le permis d’alcool
Très peu de joueurs jouent la nuit. Une étude518 réalisée en Alberta indique que
seulement 3% des joueurs utilisent les ALV entre 1:00 et 7:00 du matin.
Cette mesure vise cependant à empêcher les propriétaires et les employés à utiliser les
ALV après la fermeture du bar. Le taux de prévalence du jeu pathologique parmi les
employés des établissements de jeu est plus élevé que celui de la population en
général519. Par leur fonction, ces employés sont constamment témoins des
performances des ALV durant la journée. Dès qu’un employé devient convaincu que
l’appareil est dû pour payer, notamment parce que personne n’y a gagné gros au cours
de la journée, il existe une forte pression pour cueillir un lot imminent qui autrement
semblerait perdu520.
De plus, il existe la possibilité que, durant le reste de la nuit, le bar licite, devienne un
bar clandestin pour une partie sélecte de la clientèle.
En terme de mesure de protection pour l’ensemble de la population, le seul paramètre
vérifié expérimentalement consiste à fermer les ALV à minuit (voir la section 6.3.2.2.7 à
la page 209).
6.4.10.7 Les nouveaux messages
Entre juin 2002 et octobre 2002, le seul message à l’écran a été de numéro de
téléphone 1-866-SOS-JEUX ainsi que le sigle de la fondation Mise sur toi.
Depuis octobre 2002, divers messages apparaissent du type « Avant qu’il ne soit trop
tard … Mise sur toi 1-866-SOS-JEUX.
« Avant qu’il ne soit trop tard … mise sur toi » … le caractère potentiellement iatrogène
de ce message saute aux yeux. On dit à des joueurs qui sont plausiblement en illusion
de contrôle, qui ont une confiance exagéré en eux-mêmes de miser sur leurs croyances
erronées. Au lieu d’inviter les gens à miser, il aurait été moins équivoque d’inscrire
« Avant qu’il ne soit trop tard, retourne chez toi, va consulter ».
Le rôle du numéro de téléphone doit aussi être beaucoup plus explicite. S’agit-il d’un
numéro auquel on peut s’adresser pour trouver de l’aide à savoir comment jouer? À ce
numéro, va-t-on essayer de nous vendre des produits de jeu additionnels? Un joueur
518
Voir à la page 70 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2004, january). VLT gambling in Alberta:
a preliminary analysis. Final report. Edmonton, AB: Alberta gaming research institute.
519
(a) Shaffer, H. J., Vander Bilt, J., & Hall, M. N. (1999). Gambling, drinking, smoking and other
health risk activities among casino employees. American journal of industrial medicine, 36, 365378. (b) Shaffer, H. J., & Hall, M. N. (2002). The natural history of gambling and drinking
problems among casino employees. Journal of social psychology, 142(4), 405-424.
520
Une telle attitude reflète une illusion de contrôle associée à une dépendance pathogène
envers les ALV.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 287
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 288
excessif en pleine détresse ne désire surtout pas se faire relancer. Il faut impérativement
indiquer au côté du numéro de téléphone qu’il s’agit d’un service d’aide gratuit et
confidentiel.
6.4.10.8 La nécessité de fixer préalablement des limites de temps ou de dépense
Les joueurs excessifs se déplacent spécifiquement pour jouer521. Il ne s’agit pas
d’occasions impulsives de jeu. Dans une perspective de jeu planifié, il a été proposé de
demander aux joueurs de préciser les limites dans lesquelles ils désirent demeurer522.
En général, les joueurs, toutes catégories confondues, préfèrent se donner un budget
limite plutôt que de limiter la durée de la session de jeu523. Incidemment, les joueurs
pathologiques ont une tendance plus marquée à dépasser leur budget plutôt à excéder
le temps de jeu souhaité.
6.4.10.9 Les messages en mode fenêtre indiquant le temps écoulé
Comme le font très pertinemment remarquer Schellinck et Shranks524, il est beaucoup
plus probable que le joueur soit exposé aux messages pop-up lorsqu’il est durant une
phase gagnante que lorsqu’il perd. En phase perdante, il est fréquent que le solde
atteigne fréquemment zéro, ce qui réinitialise le compteur temporel à chaque fois. Le
principal motif pour lequel un joueur réinvestirait de l’argent avant que le solde n’atteigne
zéro est l’impression que l’appareil est près de payer une forte somme. Dans un tel cas,
le joueur ne s’intéresse surtout pas à savoir depuis combien de temps il joue. Continuer
pendant encore quelques minutes est alors perçu comme étant impératif.
521
Dans plus de 70% des occasions. Voir à la page 3-11 dans : Schellinck, T., & Schrans, T.
(2002). Atlantic lottery corporation video lottery responsible gaming feature research – final
report: play behaviours & game outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research
Consultants Ltd.
522
Voir à la page 3-1 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation video
lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game outcomes on a
per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd.
523
Voir à la page 91 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2004, january). VLT gambling in Alberta:
a preliminary analysis. Final report. Edmonton, AB: Alberta gaming research institute.
524
Voir à la page 3-22 dans : Schellinck, T., & Schrans, T. (2002). Atlantic lottery corporation
video lottery responsible gaming feature research – final report: play behaviours & game
outcomes on a per session baisis. Halifax, NS: Focal Research Consultants Ltd.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 288
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 289
6.4.10.10 Module explicatif sur le hasard
Paul Delfabbro525 a étudié comment les joueurs réagissaient à des explications
fondamentales concernant le fonctionnement du hasard. Celui-ci a constaté que bon
nombre des joueurs ont beaucoup de difficultés à intégrer le concept de hasard. Bien
que les explications sont techniquement correctes, les joueurs tendent à conclure qu’il
existe un mécanisme correcteur qui égalisera les résultats. Si l’appareil n’a pas payé
récemment, ce mécanisme correcteur ferait en sorte que l’appareil deviendrait
ultérieurement plus payant. Or, cette croyance est précisément celle sur laquelle se
construisent les illusions de contrôle526.
6.4.10.11 Dépliant « Votre portrait de joueur en 8 questions »
À partir d’un répertoire de 35 questions jugées valables par un groupe d’experts, et
d’une vérification auprès de 1000 patients australiens de pratique générale, un
ensemble de 8 questions a été sélectionné comme étant le mieux apparié aux résultats
du SOGS527. La capacité discriminative des 8 questions n’a jamais été vérifiée en
fonction de joueurs diagnostiqués valablement par un clinicien. En ce sens, ces 8
questions ne peuvent pas faire mieux que le SOGS. Alors pourquoi ne pas utiliser le
SOGS directement puisqu’il s’agit déjà d’un test de dépistage? Certes, la réduction de
20 à 8 items à vérifier est un avantage. Toutefois, il y est beaucoup moins question des
problèmes d’argent, ce qui est le principal facteur des dommages.
Une seconde section du dépliant présente trois phases du développement des
problèmes de jeu. Il est particulièrement pertinent d’attirer l’attention sur le fait que le
processus pathogène commence à s’installer durant la phase gagnante528. L’impact du
525
Voir aux pages 96 à 99 dans : Delfabbro, P., & LeCouteur, A. (2003, novembre). A decade of
gambling research in Australia and New Zealand (1992-2002) : implications for policy, regulation
and harm minimisation. A report prepared for the Independent gambling authority of South
Australia.
526
(a) Voir aux pages 113 à 133 dans : Ladouceur, R., Sylvain, C., Boutin, C., & Doucet, C.
(2000). Le jeu excessif : comprendre et vaincre le gambling. Montréal, QC: Les Éditions de
l’Homme. (b) Wagenaar, W. A. (1988). Paradoxes of gambling behavior. London, UK: Lawrence
Erlbaum Associates. (c) Toneatto, T., Blitz-Miller, T., Calderwood, K., Dragonetti, R., & Tsanos,
A. (1997). Cognitive distortions in heavy gambling. Journal of gambling studies, 13(3), 253-266.
(d) Baboushkin, H. R., Hardoon, K. K., Derevensky, J. L., & Gupta, R. (2001). Underlying
cognitions in gambling behavior among university students. Journal of applied social psychology,
31(7), 1409-1430. (e) Joukhador, J., MacCallum, F., & Blaszczynski, A. (2003). Differences in
cognitive distortions between problem and social gamblers. Psychological reports, 92, 12301214.
527
Voir aux pages 47 et 48 dans : Delfabbro, P., & LeCouteur, A. (2003, novembre). A decade of
gambling research in Australia and New Zealand (1992-2002) : implications for policy, regulation
and harm minimisation. A report prepared for the Independent gambling authority of South
Australia.
528
(a) Custer, R. L. (1982). An overview of compulsive gambling. Dans Carone, P. A., Yolles, S.
F., Kieffer, S. N., & Krinsky, L. W. (éditeurs), Addictive disorders update (pp. 107-124). New York,
NY : Human sciences press. (b) Voir la figure 1 dans : Dickerson, M. G. (1984). Compulsive
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 289
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 290
gain est cependant expliqué de manière tendancieuse. La principale conséquence d’un
gain important est cognitive. C’est cet événement qui convainc du « réalisme » de l’idée
fausse qu’il serait possible de contrôler les événements. Ici, la suggestion du dépliant
est que l’impact serait plutôt émotionnel529. En dirigeant l’attention des joueurs vers des
effets plausiblement sans conséquence plutôt que vers les conséquences causales du
gain significatif, cette formulation peut retarder la prise de conscience du problème de
jeu. Cet effet iatrogène possible doit être impérativement vérifié par une évaluation
empirique de ce dépliant.
Dans une troisième section, les critères déterminant les zones verte, jaune et rouge530
sont arbitraires. La zone verte est proposée comme une zone de jeu sécuritaire.
Malheureusement, on n’aide en rien la personne à préciser concrètement ce qu’est un
comportement de jeu sécuritaire. Pourtant, des critères existent. Une étude
pancanadienne récente vient de spécifier trois critères délimitant le jeu sécuritaire531. Ce
sont : (1) ne pas jouer plus souvent que 2 ou 3 fois par mois, (2) à l’exception des
loteries, ne pas dépenser au jeu plus de 250 à 500 dollars annuellement, et (3) ne pas
dépenser au jeu plus de 1% du revenu familial brut. Actuellement, seuls ces critères
peuvent définir scientifiquement ce que peut être une zone verte. Le dépassement d’un
seul critère suggère l’entrée dans la zone jaune, et le dépassement de plus d’un critère,
surtout si l’écart s’agrandit continuellement, délimite la zone rouge. Dans un tel cas,
Loto-Québec a la responsabilité de spécifier au joueur la nécessité de consulter un
clinicien apte à évaluer si une dépendance pathologique est en développement. Cela
n’est pas fait dans ce dépliant. Incidemment, le numéro de téléphone indiqué conduit à
un service de référence qui n’est pas en mesure « … de fournir des renseignements
pertinents afin d’aider à briser la dépendance aux jeux de hasard et d’argent … »532.
Le dépliant englobe aussi, sous le titre « Signes avant-coureurs », les 10 items du DSMIV. Ce ne sont pas des signes avant-coureurs car les critères du DSM-IV ne sont pas
conçus pour évaluer un processus en développement. Ce sont des indices
gamblers. London, UK: Longman. (c) Voir Custer, R., & Milt, H. (1985). The phases in the life of
the compulsive gambler. Dans, When luck runs out (pp. 96-121). New York, NY: Facts on file
publications.
529
Il existe un impact émotif au gain significatif. Il n’est cependant pas démontré que cet impact
est une cause des problèmes de jeu plutôt qu’un effet non déterminant.
530
Une personne qui assistait à une conférence a déjà signalé qu’il manquait une couleur à ce
groupe : la couleur noire. Il existe des personnes qui sont décédées en raison de leur perte de
contrôle sur leurs comportements de jeu. Bien que rare, le jeu sur AÉJ est un risque néanmoins
mortel.
531
Les critères du jeu sécuritaire définissent concrètement les limites dans lesquelles les joueurs
peuvent s’amuser sans craindre le risque de dommages importants. Voir : Currie, S. R., Hodgins,
D. C., Wang, J., el-Guebaly, N., Wynne, H., & Chen, S. (2006). Risk of harm among gamblers in
the general population as a function of level of participation in gambling activities. Addiction, 101,
570-580.
532
Voir à la page 31 dans : Chevalier, S., Papineau, É., & Geoffrion, C. (2003). Évaluation du
programme expérimental sur le jeu pathologique. Rapport 9. Les lignes téléphoniques dédiées
aux jeux de hasard et d’argent. Institut national de santé publique du Québec.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 290
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 291
diagnostiques permettant d’évaluer si une pathologie est déjà installée533. Il y a ici une
distorsion qui pourrait inciter les joueurs à croire que leurs comportements de jeu sont
sécuritaires tant et aussi longtemps que la pathologie ne se soit déjà bien installée. Cet
effet iatrogène possible doit être impérativement vérifié par une évaluation empirique de
ce dépliant.
En bref, ce dépliant doit être jugé potentiellement dangereux jusqu’à ce qu’une
évaluation empirique n’en démontre l’utilité.
6.4.10.12 Brochure « Les loteries vidéo et le hasard »
Cette brochure explicite les éléments du dépliant « Votre portrait de joueur en 8
questions ». Les mêmes difficultés y sont constatées sauf qu’on y apporte des réponses
un peu plus précises aux questions et qu’on y indique la nature exacte des critères du
DSM-IV. En contrepartie, on y ajoute la mention :
« On estime qu’environ 2 % des joueurs adultes au Québec s’identifient aux
joueurs excessifs. Un autre 2 à 3 % de joueurs risquent de développer une
dépendance au jeu s’ils n’y prennent pas garde. »
Cela est faux. Il s’agit d’une sous-estimation trompeuse. Ces statistiques concernent
l’ensemble de la population, incluant les non joueurs. Le risque de développer une
dépendance pathologie envers le jeu doit être estimé en fonction des seuls joueurs. De
plus, ce risque varie considérablement selon l’activité de jeu pratiquée, et surtout selon
la fréquence des sessions de jeu. En fait, environ 35% des joueurs sur ALV recrutés in
situ s’avèrent être des joueurs pathologiques. L’information contenu dans la brochure
est alors susceptible de générer un optimisme irréaliste à l’égard de développer une
dépendance à l’égard des ALV. Cet optimisme irréaliste est un facteur du processus
pathogène.
6.4.10.13 Programme d’auto-exclusion volontaire
Dans les bars, un programme d’auto-exclusion volontaire est annoncé depuis les
travaux de la table de concertation interministérielle en 2002534.
Dans les casinos, les programmes d’auto-exclusion sont un contribution potentielle pour
aider les joueurs pathologiques à rester loin des occasions de jeu. Les casinos étant très
distants géographiquement, il n’est pas réaliste d’envisager pouvoir contourner
régulièrement l’auto-exclusion en se rendant à un autre casino. Avec un grand nombre
de bars dans tous les quartiers populeux, et même dans des villages, il est illusoire
d’imaginer qu’un joueur pathologique ne va pas simplement changer ses lieux de
533
(a) American Psychiatric Association (1994). Diagnostic and Statistical Manual of Mental
Disorders, fourth edition. Washington, DC: auteurs. (b) American Psychiatric Association (2000).
Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, fourth edition, text revision. Washington,
DC: auteurs.
534
Voir à la page 15 dans : Ministère de la santé et des services sociaux. (2002). Plan d’action
gouvernemental sur le jeu pathologique 2002-2005 : agir ensemble. Québec, QC : auteur.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 291
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 292
fréquentation. Quoi qu’il en soit, un test pilote est actuellement réalisé en Mauricie, et
cette vérification empirique devra être étudiée au mérite de sa méthodologie.
6.4.10.14 Installation de contrôleurs de sites
Les contrôleurs de sites sont des consoles informatisées qui font la liaison entre les
ordinateurs centraux de Loto-Québec et les ALV. Ces contrôleurs permettent une
gestion précise de nombreuses statistiques concernant les comportements de jeu535.
6.4.10.15 Programme de formation des employés de bars
L’article 42 des règles de la RACJ oblige les détaillants d’ALV à suivre une formation sur
le jeu pathologique prodiguée par le CQEPTJ536.
L’impact du visionnement d’un vidéo d’information sur le comportement des joueurs
pathologiques sur ALV a modifié la compréhension du jeu pathologique chez les
détaillants ainsi que les interventions subséquentes des détaillants auprès des
joueurs537. À partir des informations publiées, il est cependant impossible de déterminer
la taille des effets. On ne sait pas combien de détaillants comprennent mieux le
processus pathogène sur ALV, ni même s’il y en a qui comprennent moins. On ne sait
pas combien sont intervenus pour aider les joueurs pathologiques. On ne sait pas si
certains détaillants n’ont pas plutôt utilisé leurs nouvelles connaissances pour mieux
repérer les joueurs pathologiques et les inciter à accrocher encore plus au jeu sur ALV.
Pour apprécier les impact de ce vidéo, les données précises de cette étude devraient
être publiées en monographie.
6.4.11 Le moratoire sur l’octroi de nouvelles licences d’exploitant de site
d’appareils de loterie vidéo
Le 15 mars 2002, la RACJ a décrété un moratoire d’un an sur l’octroi de nouvelles
licences de sites où se trouvent des ALV ainsi que sur une augmentation du nombre
d’ALV dans ces sites. Encore en vigueur, celui-ci est renouvelé à chaque année.
Depuis son maximum en 1998-1999, le nombre d’ALV a diminué de 13%; incluant 9%
depuis le moratoire. Depuis son maximum en 1996-1997, le nombre de sites a diminué
de 40%; incluant 23% depuis le moratoire. Les nombres de sites et d’ALV avaient ainsi
déjà commencé à décliner lorsque le moratoire a été adopté (voir Figure 91). C’était
particulièrement le cas du nombre de sites qui a pratiquement toujours été en
décroissance.
535
Voir à la page 28 dans Loto-Québec. (2002). Rapport annuel 2001-2002 : au-delà du jeu.
Montréal, QC : auteurs.
536
Voir à la page 28 dans Loto-Québec. (2002). Rapport annuel 2001-2002 : au-delà du jeu.
Montréal, QC : auteurs.
537
Ladouceur, R., Boutin, C., Doucet, C., Dumont, M., Provencher, M., Giroux, I., & Boucher, C.
(2004). Awareness promotion about excessive gambling among video lottery retailers. Journal of
gambling studies, 20(2), 181-185.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 292
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 293
Figure 91
Nombre de sites
5000
4000
3000
2000
1000
0
Nombre d'ALV
16000
12000
8000
4000
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
1994-1995
1995-1996
1996-1997
1997-1998
1998-1999
1999-2000
2000-2001
2001-2002
2002-2003
2003-2004
2004-2005
2005-2006
0
6.4.12 Remplacement du parc d’ALV en 2003.
Bien que les ALV étaient auparavant connectés à un réseau, il n’était pas possible
d’intervenir à partir d’un ordinateur central afin de remplacer un jeu ou de modifier ses
paramètres. En l’an 2000, le gouvernement du Québec a autorisé le remplacement de
ces appareils désuets pour les remplacer par de nouveaux modèles technologiquement
plus avancés538. Après une période d’essai réalisée en 2002, les nouveaux ALV ont été
largement distribués dès janvier 2003539.
L’objectif premier du développement des casinos et de l’étatisation des AÉJ était
d’endiguer une dépense au jeu qui se serait dirigée vers une économie souterraine, à
notre avis le marché gris, à l’avis de Loto-Québec vers des milieux criminels. En 2003,
nonobstant que le besoin d’un endiguement n’a jamais été clairement démontré, l’offre
de jeu captait à peu près toute la dépense possible dans le domaine des jeux à
espérance négative540 de gain (voir la Figure 88 à la page 234). Les ALV, tels qu’ils
étaient, faisaient très bien le travail.
Initialement541, le remplacement des ALV a été justifié par l’abandon prochain du support
technique pouvant être apporté par les manufacturiers. De plus, l’ajout d’un contrôleur
pouvait augmenter le contrôle des appareils à partir d’un ordinateur central. Un objectif
de réduire l’incidence du jeu pathologique n’est mentionné que dans la lettre de
présentation faite par le président de Loto-Québec. L’année suivante, on ne fait que
mentionner que les nouveaux appareils sont dotés de différents mécanismes et
538
Voir aux pages 8 à 9 dans : Loto-Québec. (2002). Plan d’action 2003-2006 : l’offre de jeu au
Québec : un réaménagement nécessaire. Montréal, QC : auteurs.
539
Voir à la page 15 dans : Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une
réussite. Montréal, QC : auteurs.
540
Les jeux à espérance nulle de gain ne posent aucune menace de fuite économique, et ceux-ci
ne sont jamais associés au jeu pathologique.
541
Voir à la page 27 dans : Loto-Québec. (2002). Rapport annuel 2001-2002 : Au-delà du jeu.
Montréal, QC : auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 293
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 294
dispositifs favorisant le jeu responsable542. Puis, l’autre année après, les mêmes
dispositifs existent pour prévenir et contrer le jeu excessif543. Ce ne sont pas que des
expressions rhétoriques. En ce qui concerne le jeu pathologique, les objectifs ne sont
pas clairement exprimés.
Les nouveaux appareils n’étaient pas essentiels pour assumer le devoir de prémunir la
population contre les problèmes de jeu. En effet, des mesures destinées à « accentuer
l’effet dissuasif auprès des joueurs excessifs » avaient déjà commencé à être installées
sur les anciens modèles d’ALV. La désactivation du bouton d’arrêt était possible ainsi
que l’affichage d’une horloge et celui des crédits en dollars. La modification des
messages, tel que « Jouez avec modération pour que le jeu demeure un jeu », était
simple à réaliser, de même que la réduction de la vitesse de jeu. Il était aussi facile
d’activer de manière logicielle la requête d’encaisser le solde et les modules destinés à
requérir la durée de jeu désirée. Sous réserve de la quantité de mémoire disponible, il
était possible d’y installer le module explicatif du hasard. En limitant le nombre de jeux à
cinq, cette mémoire devenait disponible. Enfin, la capacité du accepteur de billets était
déjà limitée à 100 dollars. La réduction à 60 dollars n’était qu’un détail.
Vraisemblablement, les nouveaux ALV n’ont apporté que la capacité de désactiver les
appareils en dehors des heures permises.
6.4.13 La création de la fondation Mise sur toi
En 2001, le gouvernement a transféré au ministère de la Santé et des services sociaux
la responsabilité de prémunir les citoyens contre les méfaits du jeu. En mars 2002, LotoQuébec a dupliqué cette responsabilité en créant « … la Fondation Mise sur toi afin de
poursuivre ses efforts de prévention du jeu excessif et d’offrir à la population un
environnement de jeu à la fois divertissant et sécuritaire. »544
L’imposition d’une taxe aux établissements de jeu, afin de financer des programmes de
santé assumés par les gouvernements, n’a pas bonne réputation depuis le témoignage
d’un gestionnaire de casino en Nouvelle-Zélande545. En effet, l’argent qui devait être
consacrée en aide directe aux joueurs était plutôt dispersée dans des programmes de
santé plus généraux. En conséquence, les joueurs à problème n’étaient pas traités et
leurs frasques continuaient à ternir l’image du casino. La conclusion de ce témoignage
suggère que, pour maintenir une image publique positive, l’établissement de jeu doit
impérativement conserver son pouvoir d’intervenir directement auprès des joueurs qui
542
Voir à la page 15 dans : Loto-Québec. (2003). Rapport annuel 2002-2003 : une équipe, une
réussite. Montréal, QC : auteurs.
543
Voir à la page 16 dans : Loto-Québec. (2004). Rapport annuel 2003-2004 : un équilibre à
maintenir. Montréal, QC : auteurs.
544
Voir à la page 35 dans : Loto-Québec. (2005). Bilan de responsabilité sociale : pour une
contribution responsable. Montréal, QC : auteurs.
545
Pitcher, A. (1999). Responsible promotion of gaming and dealing with problem gamblers.
Journal of gambling behavior, 15(2), 149-159.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 294
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 295
pourraient nuire à l’image de l’établissement. Il s’agit d’abord et avant tout de ne pas
perdre le contrôle de l’image.
Certes, la duplication des initiatives de santé peut aider les joueurs. Toutefois, cet apport
additionnel n’est vraisemblablement motivé que par la volonté de contrôler dénonciation
médiatique. Les aspects des problèmes de santé publique non traités par les médias
pourraient ne pas bénéficier de cette mesure.
6.4.14 L’étude de prévalence du jeu de 2002
Voir à la section 2.6 - La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu à
la page 51.
6.5 Conséquences additionnelles posées par les salons de jeux
6.5.1 Inclusion des ALV dans des centres plus généraux de divertissement
L’insertion des ALV dans des centres plus généraux de divertissement pose le risque
considérable d’une augmentation des problèmes de jeu pathologique chez les femmes.
En effet, les femmes sont moins enclines que les hommes à fréquenter des bars. Les
salons de jeux leur offriront un environnement plus convivial. En établissant un profil des
femmes, joueuses pathologiques, Karen Trevorrow et Susan Moore546 ont constaté que
ces femmes ont un attrait particulier pour les AÉJ, qu’elles ont davantage, que les autres
femmes, de la famille ou des amis pour qui le jeu est une norme sociale, et que, sans
déficit d’habileté psychosociale, elles éprouvent un sentiment d’aliénation sociale, soit
qu’elles ne se sentent pas vraiment comprises par les autres. Les auteures anticipent
que les sites de jeu qui proposent un milieu où le jeu est présenté comme une activité
de divertissement entre amis peuvent inciter les femmes à risque de venir y jouer
socialement. Toutefois, lorsque les problèmes de jeu commenceront à survenir, ces
femmes ne seront pas disposées à échanger avec leurs amis des difficultés de contrôle
qu’elles commencent à éprouver. Dès lors, cette situation pourrait être plus pathogène
pour les femmes.
De plus, le jeu risque d’absorber les dépenses que les familles consacrent
habituellement à leur divertissement. L’étude des impacts des casinos flottants au
Missouri n’a permis d’observer qu’un seul effet de substitution547. En général, il n’y a pas
eu de déplacement d’argent des autres activités économiques vers les casinos flottants,
sauf pour une exception : l’argent consacré aux autres activités de loisir. Si un
phénomène semblable se produit pour les salons de jeux, il y a un risque que les autres
546
Voir aux pages 281-282 dans : Trevorrow, K., & Moore, S. (1998). The association between
loneliness, social isolation and women's electronic gaming machine gambling. Journal of
gambling behavior, 14(3), 263-284.
547
Siegel, D., & Anders, G. (1999). Public policy and the displacement effects of casinos: a case
study of riverboat gambling in Missouri. Journal of gambling behavior, 15(2), 105-121.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 295
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 296
activités de divertissement attirent aux salons de jeux des personnes qui ne sont pas
spontanément intéressées par le jeu, et que la proximité des ALV capte le budget de
loisir de ces personnes.
6.5.2 Retrait de 16% des ALV du contrôle de la RACJ
Les AÉJ de jeu exploités directement par Loto-Québec ne sont pas soumis au contrôle
de la RACJ. C’est le cas depuis 1993 pour les MAS dans les casinos. Lors de
l’inauguration des salons de jeux, 2 200 des 13 570 ALV passeront de la SLVQ à la
SSJQ. Cette dernière n’est pas contrainte par les lois et règlements contraignant la
SLVQ. Dès lors, 16% des ALV
6.5.3 Visibilité réduite des ALV
Bien que les jeunes ne puissent pas jouer sur les ALV, ceux-ci sont aisément témoins
d’adultes qui y jouent et qui affirment y réaliser parfois des gains importants. On peut
comprendre qu’il s’agit d’un puissant moyen d’incubation du désir de jouer. Dans la
mesure où les salons de jeux seront aussi d’importants centres de divertissement pour
la famille, la grande visibilité des ALV, ou autres occasions de jeu d’argent, à l’intérieur
des établissements risque d’entraîner une stimulation accrue de l’incubation du désir de
jouer. Les jeunes seront mieux protégés jusqu’à l’âge de 18 ans. Toutefois, cette
protection temporaire pourrait se transformer en une protection diminuée chez les
jeunes adultes. Il est impératif d’étudier comment les mesures de protection des
personnes mineures agissent lorsque l’interdiction est subitement levée chez les très
jeunes adultes.
6.5.4 Contrôle rigoureux de l’âge pour toute personne paraissant moins de 30 ans
Cette mesure est inspirée du programme « Project 21 » du casinotier Harrah’s. Ce
programme a été développé aux États-Unis au début des années 80.
6.6 Les mesures non considérées par Loto-Québec
Les mesures proposées par Loto-Québec s’inscrivent dans la perspective des
gouvernements possédant un pouvoir limité de contraindre des établissements de jeu
gérés par l’entreprise privée. Or, cette contrainte n’existe pas au Canada.
6.6.1 Abandon du concept de jeu responsable pour le concept de jeu sécuritaire
Le concept de jeu responsable mise essentiellement sur la capacité des joueurs à
reconnaître un problème de jeu à partir de critères indiquant qu’un processus pathogène
est déjà installé. À cet égard, il importe d’évaluer préalablement la capacité des joueurs
excessifs à admettre avoir un problème de jeu.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 296
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 297
6.6.1.1 Propension des joueurs excessifs à admettre un problème de jeu
Le Tableau 50 répertorie l’endossement de l’item du SOGS548 relatif à la question
« Pensez-vous avoir un problème de jeu? » par les catégories de joueurs, et le Tableau
51 procure une information équivalente pour les études, plus récentes, ayant utilisé
l’ICJE549. Les données du SOGS ne permettent pas d’entrevoir que cette stratégie
puisse intervenir tôt dans le problème de jeu. Les joueurs à risque estiment peu avoir
des problèmes de jeu. De plus, l’aveu d’un problème de jeu varie entre 32% et 71%
chez les joueurs pathologiques, pour une moyenne de 55%.
Tableau 50
Pourcentage des joueurs qui considèrent avoir un problème de jeu en fonction
des catégories de joueurs évaluées par le South Oaks gambling screen
Catégories du SOGS
Étude
Sans problème
À risque
Pathologique
Québec, 1996
0%
4%
57%
Québec, 1997
3%
12%
48%
Australie, 1999
3%
12%
68%
Australie - SA, 2001
32%
Australie - ACT, 2001
2%
12%
71%
548
(a) Québec, 1996 - Données communiquées par Jean Leblond à partir de la banque de
données de la version actualisée de la seconde étude de prévalence du jeu pathologique réalisée
au Québec en 1996. (b) Québec, 1997 - Voir à la page 74 dans : Ladouceur, R., Arsenault, C.,
Dubé, D., Freeston, M. H., & Jacques, C. (1997). Psychological characteristics of volunteers in
studies on gambling. Journal of gambling behavior, 13(1), 69-84. (c) Australie, 1999 - Voir à la
page 6.25 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries, Report no.
10. Canberra, Australia: Ausinfo. (d) Taylor, A. et al (2001 may). Gambling patterns of South
Australians and associated health indicators. South Australia: South Australian department of
human services, Centre for population studies in epidemiology. (e) Australie, 2001 - Voir à la
page 80 dans : Tremayne, K., Masterman-Smith,H., & McMillen, J. (2001). Survey of the nature
and extent of gambling and problem gambling in the ACT (Australian Capital Territory). Sydney,
Australia : Australian Institute for Gambling Research.
549
(a) Nouvelle-Écosse, 2003 - Voir à la page 3-5 dans : Focal research. (2004, june). 2003 Nova
Scotia gambling prevalence study: final report. Halifax, NS: Nova Scotia office of health
promotion. (b) Ontario, 2001 - Voir à la page 48 dans : Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A.
(2001). Measuring gambling and problem gambling in Ontario. Ottawa, ON: Canadian Centre on
Substance Abuse & Responsible Gambling Council. (c) Ontario, 2002 - Voir à la page 16 dans :
Wiebe, J., Single, E., & Falkowski-Ham, A. (2003, octobre). Psychological and social factors
associated with problem gambling in Ontario: a one-year follow-up study. Ottawa, ON: Canadian
Centre on Substance Abuse & Responsible Gambling Council. (d) Saskatchewan, 2001 - Voir à
la page 59 dans : Wynne, H. J. (2002 january). Gambling and problem gambling in
Saskatchewan. Ottawa, Ontario: Canadian centre on substance abuse. (e) Alberta, 2001 - Voir à
la page 48 dans : Smith, G. J., & Wynne, H. J. (2002). Measuring gambling and problem
gambling in Alberta. Final report. Edmonton, AB: Alberta Gaming Research Instiutute. (f)
Queensland, 2003-2004 - Voir à la page 39 dans : Queensland office of gaming regulation, &
Office of economic and statistical research. (2004). Queensland household gambling survey
2003-04. Brisbane, Australia: auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 297
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 298
Les résultats obtenus avec l’ICJE font entrevoir une efficacité médiocre chez les joueurs
qui présentent des risques modérés. Seuls les joueurs présentant des risques sévères
de dommages admettent spontanément avoir un problème de jeu.
Tableau 51
Pourcentage des joueurs qui considèrent avoir un problème de jeu en fonction des catégories de
joueurs évaluées par l’Indice canadien de jeu excessif
Étude
Nouvelle-Écosse, 2003
Ontario, 2001
Ontario, 2002
Saskatchewan, 2001
Alberta, 2001
Queensland, 2003-2004
Sans problème
0%
0%
0%
0%
0%
Catégories de l'ICJE
Faible risque
Risque modéré Risque sévère
3%
55%
6%
30%
85%
8%
34%
83%
4%
42%
91%
6%
34%
91%
5%
46%
95%
6.6.2 L’aire de jeu doit mettre les joueurs en garde contre les dommages
potentiels associés à l’utilisation des appareils de jeu
En Australie, l’industrie du jeu admet que des personnes subissent des dommages lors
de l’utilisation des AÉJ, et elle s’admet incapable de déceler, a priori, qui est un joueur
excessif ou qui est à risque de le devenir550. Un tel constat s’applique à l’ensemble de
l’industrie mondiale du jeu.
Dans un tel cas, l’aire de jeu, l’appareil en particulier, doit préalablement signaler aux
utilisateurs les dangers auxquels ces personnes s’exposent ainsi que la capacité
insuffisante de l’exploitant à les prévenir.
6.6.3 Assurer que les joueurs sont en mesure de décider rationnellement de jouer
ou pas
Les gouvernements, états-croupiers, investissent considérablement dans l’intégrité des
jeux afin de protéger les consommateurs. Pourtant, comme l’a signalé la Productivity
commission, l’objectif de protection des consommateurs exige en premier lieu que les
gouvernements s’assurent que les joueurs possèdent toutes les informations
nécessaires à la décision de jouer ou pas. Or, il s’agit d’un aspect particulièrement
négligé par les gouvernements551.
550
Voir à la page iv dans : South Australian centre for economic studies. (2003, February).
Evaluation of self-exclusion programs and harm minimisation measures. Report A. Adelaide,
South Australia : Adelaide & Flinders Universities.
551
Voir à la page 34 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries,
Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 298
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 299
Les joueurs doivent d’abord connaître préalablement la probabilité d’occurrence des
lots552, ainsi que leur valeur. Actuellement, ils n’en connaissent que leur valeur. Pour
connaître la probabilité des lots, il est nécessaire de jouer des millions de parties, et
donc de les payer. Ce n’est pas une connaissance préalable à la décision de jouer.
Les joueurs doivent aussi connaître les risques de développer une dépendance envers
les jeux offerts sur les AÉJ. Les statistiques de risque ne doivent pas être dilués parmi
l’ensemble de la population. Ces statistiques doivent faire directement référence aux
seuls joueurs sur AÉJ, en particulier aux joueurs qui adoptent une fréquence régulière
de jeu.
Les joueurs doivent connaître les processus par lesquels une dépendance pathologique
peut s’instaurer. La conscience d’un engagement vers un processus pathogène requiert
que les joueurs soient appuyés dans leur détection des événements qui sont des
déclencheurs de ces processus. La prise de conscience ne doit pas se limiter à la
constatation que le processus est déjà en place et qu’il produit des dommages.
Les joueurs doivent être informés de l’ampleur des dommages auxquels ils s’exposent.
6.6.4 Une zone d’exclusion des ALV
Dans la mesure où Loto-Québec propose de maintenir des ALV dans les bars afin de
contrer un marché gris ou un marché clandestin, un tel besoin ne se justifie plus aux
alentours des salons de jeux.
6.6.5 Accès maximalement limité aux guichets automatiques bancaires (GAB)
Ne pas placer de GAB dans les aires de jeu aura un impact négligeable si un GAB se
trouve à quelques mètres seulement des portes d’entrée ou de sortie des aires de jeu.
Dans une perspective de santé publique, aucun GAB ne devrait se situer sur le territoire
des salons de jeux.
Advenant que la présence des GAB ne puissent pas être évitée, ceux-ci devront être
modifiés et mieux encadrés car ces guichets ne devraient pouvoir servir qu’à un
dépannage occasionnel.
Comme pour le jeu sur Internet, les transactions avec cartes de crédit devraient être
interdites sur tout GAB installé sur le territoire des salons de jeux. Il n’est pas davantage
utile que ces GAB autorisent les virements.
Dans les lieux communs, les GAB ne devraient se situer qu’en un seul endroit bien
visible du service de sécurité. Sinon, ceux-ci pourraient être disposés à l’intérieur553 des
aires consacrées aux autres activités de divertissement.
552
Voir à la page 40 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling Industries,
Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo.
553
C’est-à-dire dans un secteur où on a accès qu’après avoir acquitté un droit d’entrée.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 299
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 300
Il doit être clairement pris en considération que les GAB constituent un danger fréquent
de dommages majeurs pour les joueurs pathologiques comparé aux inconvénients
bénins et peu fréquents qui pourraient être causés aux joueurs occasionnels s’il n’y a
pas de GAB sur le territoire des salons de jeux554.
6.6.6 La disparition complète des ALV dans les bars
Sans équivoque, les joueurs sont trop laissés sans ressources dans les bars. Il est
illusoire de croire que les employés, malgré la formation qui leur est prodiguée, puissent
réellement intervenir autrement qu’épisodiquement pour aider les personnes qui
éprouvent des problèmes de jeu.
Une portion importante des revenus tirés des ALV proviennent des joueurs excessifs.
Lutter contre le jeu pathologique entraîne une diminution importante des revenus pour
les détenteurs de licence. Dans la mesure où ces revenus deviennent essentiels pour la
survie de l’établissement, il est douteux que les intérêts des joueurs pathologiques
seront pris en considération avant ceux des employés et des propriétaires.
Parallèlement aux salons de jeux, Loto-Québec insiste sur le maintien d’un important
parc d’ALV dans les bars du Québec afin de contrer l’émergence d’appareils illégaux qui
alimenteraient le crime organisé. Ceci présume que les propriétaires de bars n’ont pas
déjà des liens avec le crime organisé. Ce postulat est peu crédible. En l’occurrence, la
commission Prévost555 qui a posé les fondements de la socialisation du jeu au Québec,
et donc de la création de Loto-Québec, a posé une seule limite à la légalisation du jeu :
l’état doit assumer complètement la gestion des jeux en évitant expressément
l’attribution de licences d’exploitation à des intérêts privés. Sinon, grâce aux revenus
illicites tirés par ailleurs, les membres de groupes organisés pourront plus facilement
organiser des commerces satisfaisant aux critères d’admissibilité.
6.6.7 La réduction du taux de remise
Le taux de remise est le paramètre le plus déterminant des caractéristiques
potentiellement pathogène des ALV. Sa diminution entraîne presque obligatoirement
une diminution de la possibilité de développer une résistance à l’extinction, ainsi qu’une
raréfaction des lots importants. Il s’ensuit une probabilité moins grande de vivre
l’expérience d’un gain significatif. Une telle intervention permet d’intervenir avant la
concrétisation des dommages.
554
Voir aux pages 44 et 45 dans : Productivity Commission. (1999). Australia’s Gambling
Industries, Report no. 10. Canberra, Australia: Ausinfo.
555
Voir aux pages 90 et 104 dans : Commission d’enquête sur l’administration de la justice en
matière criminelle et pénale au Québec. (1967). Les activités voulues par le public. Exemple : le
jeu, dans La société face au crime. Volume III, tome 3. (pages 80-108). Québec, QC : auteurs.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 300
Chapitre 6 - Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu sur AÉJ - 301
6.6.8 L’augmentation de la taille des lots importants
Cela semble paradoxal, mais l’augmentation du gros lot de 500 à 5000 dollars pourrait
être bénéfique aux joueurs si le taux de remise n’est pas augmenté. En effet, si
l’espérance de gain doit davantage être réservée pour la constitution d’un gros magot, il
reste peu de ressources pour offrir des lots intermédiaires. Il en résulte un taux de
récompense diminué, et conséquemment une probabilité moindre de vivre l’expérience
d’un gain significatif.
Dans la mesure où, pour ne pas favoriser l’offre de jeu concurrente, il n’est pas possible
de diminuer le taux de remise, l’augmentation de la taille du gros lot permet d’arriver aux
mêmes fins tout en motivant davantage les joueurs occasionnels.
6.6.9 La réduction du jeu multi-lignes
Les mises plus élevées des joueurs pathologiques sur ALV découlent surtout du besoin
plus grand de placer une mise sur chaque ligne avant d’initialiser le set556.
6.6.10 Des mises en garde efficaces, vérifiées expérimentalement
Il existe encore des questions non résolus concernant l’étiologie du jeu pathologique.
Les mesures préventives et les traitements sont encore imparfaits. Compte tenu que les
établissements de jeu sont encore loin de pouvoir offrir un environnement sécuritaire, où
les dangers sont contrôlés, il est nécessaire d’en informer les joueurs.
556
Voir à la page 3-51 dans : Nova Scotia Department of Health and Focal Research Consultants
Ltd. (1998). 1997/98 Nova Scotia video lottery players’ survey. Halifax, NS : Nova Scotia
Department of Health. Problem gambling services.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 301
Lexique - 302
Lexique
1. Aléatoire
Du latin alea signifiant hasard, chance, ou destin, un événement aléatoire est
simplement un événement déterminé par le hasard.
2. Appareil de jeu
Toute console de jeu, fonctionnant de manière automatique, pouvant accepter le
montant d’une mise, effectuer un tirage et, s’il y a lieu, remettre un lot.
Ces appareils peuvent être entièrement mécaniques, ou inclure des composantes
électriques, électroniques ou vidéo.
Au début du siècle, les appareils de jeu ne pouvaient pas remettre automatiquement les
lots.
3. Appareil électronique de jeu (AÉJ)
Appareil de jeu, dont le fonctionnement est essentiellement informatisé, et dont le tirage
s’effectue par un générateur de nombres pseudo-aléatoires (GNPA). L’interface de l’AÉJ
est composé d’un écran électronique, parfois tactile, et d’un clavier composé de
seulement quelques boutons.
En différents endroits, des expressions concernant des appareils particuliers ont été
généralisées, à tort, à l’ensemble des AÉJ. Il s’agit des expressions « slot machine »
aux États-Unis, « pokies » en Australie, et de « Fruit machines » au Royaume-Uni. Au
Québec, on entend encore parfois l’expression « vidéopoker » pour désigner les
appareils de loterie vidéo dans les bars ou les machines à sous au casino.
4. Appareil de poker vidéo (APV)
Appareil électronique de jeu n’offrant que des jeux de cartes, essentiellement le poker et
le blackjack.
Voir aussi Appareil électronique de jeu (AÉJ).
5. Appareil de loterie vidéo (ALV)
Appareil électronique de jeu offrant plusieurs types de jeu qui ne sont pas de même
nature, notamment des jeux de cartes et des jeux de lignes. On y retrouve aussi souvent
des jeux de keno ou de bingo. L’ALV est en soi un mini-casino.
Voir aussi Appareil électronique de jeu (AÉJ).
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 302
Lexique - 303
6. Budget de jeu
Montant d’argent inséré dans l’appareil avant de commencer à jouer plus les autres
sommes investies par la suite.
Le rapport entre le budget de jeu et le capital de jeu indique l’attrait qu’exerce l’appareil
de jeu. Un appareil maximalement attrayant persuade le joueur de tout insérer le capital
de jeu.
Le rapport entre l’encaisse et le budget de jeu indique la satisfaction du joueur. En
principe, le joueur sain investit un budget de jeu dans l’attente d’obtenir un plaisir à
jouer. Un jeu peu satisfaisant conduit à une encaisse rapide avant l’épuisement du
budget. Dans le cas de joueur excessif, ce rapport est plutôt une mesure de la force de
la dépendance.
7. Capital de jeu
Le capital de jeu correspond au montant d’argent que la personne a apporté pour jouer.
Elle ne le misera pas nécessairement au complet. Dans la mesure où la personne
partait avec l’intention de risquer tout ce montant, le capital de jeu procure une bonne
idée du potentiel de revenu d’une activité de jeu pour l’établissement de jeu.
8. Comorbidité
Il s’agit de la présence simultanée deux ou plusieurs pathologies. Il est possible qu’une
personne, déjà atteinte d’une pathologie comme la schizophrénie, s’expose au jeu et en
devienne dépendante. Il est aussi possible qu’une personne, qui a une importante dette
de jeu, comme à boire beaucoup d’alcool jusqu’à en devenir dépendante. La présence
de comorbidité ne révèle pas nécessairement que des pathologies ont des causes
communes.
9. Croyance erronée quant au hasard
Il en existe plusieurs. Elles ont cependant toutes la caractéristique commune de
présumer qu’il existe des liens de causalité entre des événements qui n’en n’ont pas.
Tirer 20 fois pile, au jeu de pile ou face, avec une pièce parfaitement équilibré n’est pas
un prétexte pour croire qu’il y a davantage de chances que, la prochaine fois, ce sera
pile (erreur de récence positive) ou que ce sera face (erreur de récence négative). Le
hasard n’a pas de mémoire. Il n’y a nulle part un accumulateur qui permettrait de rectifier
un historique déséquilibré des événements antérieurs. Jamais deux sans trois, la loi de
la moyenne sont autant d’expressions qui expriment des erreurs de récence fondées sur
une croyance erronée quant au hasard.
Une autre croyance erronée fréquemment observée est l’attribution d’une nature
cyclique au hasard. Après une longue série de perte, une vague de succès est
inévitable.
Les croyances erronées ne sont pas la cause du jeu pathologique. Elles en sont
toutefois la condition sine qua none. Pour brûler du carburant, un moteur a besoin d’un
comburant, dans ce cas de l’oxygène. C’est le carburant qui fait avancer le véhicule,
mais sans comburant le moteur s’arrête. L’illusion de contrôle est le carburant du jeu
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 303
Lexique - 304
pathologique. Les croyances erronées en sont le comburant. Quand le traitement
cognitif du jeu pathologique s’attarde à corriger les croyances erronées, il agit en privant
le feu d’oxygène.
Les croyances erronées quant au hasard sont communément répandues parmi la
population. Il ne s’agit pas d’une condition morbide. Ces croyances sont parfaitement
adaptées pour un mode réel. Le hasard étant une situation artificielle, l’esprit humain est
mal préparé à s’y confronter.
10. Dépendance pathologique à l’égard du jeu
Incapacité de cesser de jouer alors que le comportement de jeu conduit à des
dommages non désirés.
La dépendance pathologique est typiquement identifiée par des critères diagnostiques,
tels que ceux du DSM-IV, et dépistée par des outils psychométriques, tels que
notamment le SOGS et l’ICJE.
11. Dépense au jeu
La dépense réelle faite par les joueurs est la somme des mises moins l’argent des lots
obtenus à l’occasion de gains. Dans les rapports annuels de Loto-Québec, la dépense
au jeu, par l’ensemble de la population, au casino ou sur les loteries vidéo est indiquée
par le bénéfice brut. Pour les bingo et loteries conventionnelles, il faut soustraire du
bénéfice brut les lots attribués aux joueurs.
12. DSM-III
Critères diagnostiques du jeu pathologique proposés en 1980 par l’American psychiatric
association. Ces critères ont été remplacés en 1994 par ceux du DSM-IV.
13. DSM-IV
Critères diagnostiques du jeu pathologique. Quiconque endosse cinq items sur 10 est
considéré comme un joueur pathologique. Proposés par l’American psychiatric
association, ces critères ont été adoptés par l’ensemble des spécialistes du jeu
pathologique.
14. Espérance de gain
Proportion de l’argent misé remis au joueur.
Les jeux des établissements de jeux sont typiquement à espérance négative de gain car
ceux-ci remettent moins d’argent aux joueurs que ceux-ci n’en ont misé. L’établissement
conserve alors systématiquement une cote sur les paris. Les joueurs s’appauvrissent
d’autant plus qu’ils jouent.
Les jeux à espérance nulle de gain ne font que redistribuer tout l’argent misé entre les
joueurs. Les cartes entre amis en sont le meilleur exemple. À long terme, le hasard a
distribué également les chances de gain. Seul un manque d’habileté peut rendre un
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 304
Lexique - 305
joueur déficitaire. À compétence égale, les joueurs peuvent jouer éternellement sans
s’appauvrir.
Les jeux à espérance positive de gain, tel que le blackjack utilisant un seul sabot de 52
cartes, permettent à la personne jouant parfaitement de s’enrichir. Les établissements
n’offrent plus ces jeux.
Voir Taux de remise.
15. Gain significatif
Observation d’une séquence de combinaisons gagnantes qui convainc le joueur que le
seul hasard ne peut pas expliquer un tel succès. Il n’est pas nécessaire que le joueur ait
obtenu l’argent car les combinaisons observées peuvent survenir sur des lignes non
misées, ou même sur un appareil voisin. Le gain significatif n’est pas la conséquence
d’une récompense. Il s’agit d’un élément cognitif qui réorganise des croyances.
Lorsque le gain significatif conduit au développement d’une illusion de contrôle, et que la
personne continue à jouer, le joueur s’engage dans un processus qui le rend
pathologiquement dépendant du jeu.
Le gain significatif n’implique pas nécessairement l’observation de lots donnant droit à
des montants importants. Il peut s’agir de sommes inférieures à 100 dollars. Tout
dépend de la condition financière des joueurs.
Voir Gros gain.
16. Gros gain
Gain équivalant à un salaire de plusieurs mois. Cette définition découle des
témoignages de joueurs de casino, de loterie ou aux courses où les gros lots se
calculent généralement en plusieurs milliers de dollars.
Avant l’avènement des appareils électroniques de jeu, le gros gain était perçu comme
un facteur déclencheur probable du jeu pathologique. Le gros lot modeste des appareils
de loterie vidéo a forcé une redéfinition de ce gain. Dans la perspective des modèles
cognitifs, le gain significatif apparaît comme un concept mieux défini.
Voir Gain significatif.
17. Heuristique (Voir Processus heuristique)
18. Iatrogène
Littéralement, un effet iatrogène est un effet causé par un traitement. En science
clinique, ce terme désigne surtout une conséquence indésirable contraire à l’objectif du
traitement. Ce qui est supposé guérir, rend malade. L’effet de la thalidomide chez les
femmes enceintes est l’exemple le plus célèbre. La thalidomide était prescrite pour
soulager les nausées matinales des futures mères. Ce médicament était efficace à cet
égard. Il a cependant entraîné de nombreuses malformations d’embryons.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 305
Lexique - 306
19. ICJE (Indice canadien de jeu excessif)
Questionnaire de dépistage des risques de développer des problèmes de jeu.
Tableau 52
Catégories de l’Indice canadien de jeu excessif
Score
Ne joue pas
Version originale
Version 2
Non joueur
Non joueur
0
Joueur sans problème
Joueur sans problème
1 à 2,5
Joueur à faible risque
Joueur à faible risque
3 à 7,5
Joueur à risque modéré
Joueur à risque modéré
8 à 27
Joueur avec problème
Joueur à risque sévère
20. Illusion de contrôle
C’est la certitude sans fondement selon quoi un phénomène incontrôlable pourrait être
contrôlé. L’illusion de contrôle a deux volets : (a) la croyance qu’il est possible de prédire
un événement, et (b) la croyance qu’il est possible de provoquer un événement.
21. Îlotage
Branchement en réseau de plusieurs appareils électroniques de jeu dans le but de
proposer un gros lot progressif pouvant atteindre un montant extraordinaire de plusieurs
dizaines ou centaines de milliers de dollars, voire plus de 1 million. À chaque partie, une
portion infime du taux de remise est réservée pour un gros lot qui est commun à tous les
appareils de l’îlot. Lorsque la combinaison payante, rarissime, survient sur n’importe
quel appareil de l’îlot, le joueur gagne le gros lot progressif.
22. Incidence du jeu excessif
Nombre des personnes, dans une population, qui ont développé de nouveaux
problèmes de jeu au cours d’une période donnée. Typiquement, l’incidence se mesure
annuellement.
23. Incidence du jeu pathologique
Nombre des personnes, dans une population, qui ont développé une première
dépendance pathologique envers le jeu au cours d’une période donnée. Typiquement,
l’incidence se mesure annuellement.
24. Jeu
En français, cette expression englobe trois termes anglais : wagering, gambling, et
gaming. Le premier englobe tous les paris faits à des courses d’animaux ou des
événements sportifs. Le second regroupe tous les paris d’argent faits aux autres
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 306
Lexique - 307
activités de jeu. Le terme gaming signifie, en principe, l’action de s’amuser à des jeux
électroniques, de type Nintendo, où on doit faire preuve d’adresse pour vaincre un
adversaire. Par euphémisme, certaines organisations tentent de substituer le terme
gaming au terme gambling.
25. Jeu charitable
Tirage organisé par un organisme de charité.
26. Jeu de cartes
Jeu comprenant un sabot de 52 cartes, ou réunissant plusieurs sabots. Classiquement,
il s’agit du jeu de draw poker où l’on offre une main de cinq cartes, ainsi que la
possibilité au joueur d’en retirer aucune, quelques-unes ou toutes avant d’effectuer un
dernier tirage complémentaire. Le jeu de blackjack est aussi généralement offert. Dans
tous les cas, les joueurs jouent contre la machine. Il n’y a pas d’autres adversaires. Les
jeux sur Internet vont modifier cette règle.
27. Jeu de keno
Sans que cela ne soit apparent, le jeu de keno est une version complexe des loteries
numériques de type 6/49 ou super 7. Il s’agit de choisir une combinaison de nombres
devant faire partie des résultats d’un tirage de 20 nombres choisis parmi 80. Les lots
varient en importance en fonction de la taille de la combinaison initialement choisie par
le joueur.
28. Jeu de lignes
Traditionnellement, le jeu de lignes est typique des machines à sous. On le retrouve
aussi sur les appareils de loterie vidéo.
Le jeu de lignes est construit à partir de rouleaux. Il ne s’agit pas d’un jeu de carte. Sur
les machines à sous, l’arrangement ancien est de trois rouleaux formant une seule ligne.
Neuf rouleaux disposés sur trois lignes forment un jeu octoligne car on y offre
généralement de pouvoir miser sur trois lignes, trois colonnes ou deux diagonales.
Quinze rouleaux disposés sur trois lignes forment une autre configuration populaire. On
peut alors miser sur chacune des trois lignes ou sur une combinaison formant un V ou
un V inversé. On le considère alors comme un jeu à cinq lignes.
De nombreuses versions existent, incluant des lignes composées uniquement des
rouleaux situés aux quatre coins de l’écran. Le concept de ligne signifie dorénavant un
gabarit.
Le jeu de ligne est un jeu de pur hasard où le joueur n’a aucun choix à faire sauf celui de
choisir la configuration de ses mises parmi les lignes possibles.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 307
Lexique - 308
29. Jeu multicrédits
Action de jouer en misant plus d’un crédit par ligne.
Voir Partie.
Voir Set.
30. Jeu multilignes
Action de jouer en misant sur plus d’une ligne par set.
Voir Partie.
Voir Set.
31. Jeu responsable
Le jeu responsable consiste à éviter les occasions de perte de contrôle sur le
comportement de jeu. Il appartient au joueur excessif de prendre conscience de son
problème de jeu, et, à son initiative, de s’imposer des mesures aptes à régler ou
contenir ce problème. Les établissements de jeu peuvent offrir des services pour aider
les joueurs excessifs à atteindre cet objectif. Toutefois, les établissements ne permettent
pas que ces services entravent le moindrement les joueurs sans problèmes de jeu.
32. Jeu sécuritaire
Le jeu sécuritaire consiste à délimiter les comportements de jeu à l’intérieur desquels il
est constaté empiriquement que les joueurs ne vivent pas de problème de jeu.
L’organisme de jeu doit indiquer dans quelles limites les joueurs peuvent s’amuser sans
risque important de devenir dépendants du jeu.
Par des mises en garde, l’environnement de jeu doit garantir que la personne est
pleinement informée des risques, des moyens de s’en prémunir, des mesures curatives
ou palliatives disponibles, des difficultés éventuelles à résoudre ou contenir les
problèmes de jeu ainsi que de l’ampleur des dommages auxquelles elle s’expose
lorsque les limites sont dépassées.
Une stratégie de prévention axée sur le jeu sécuritaire propose des critères précis
notamment en ce qui concerne les dépense, fréquence ou durée de jeu.
33. Joueur à risque
Joueur qui manifeste des comportements habituellement associés à une dépendance
pathologique à l’égard du jeu, mais qui ne manifeste pas d’importants problèmes de jeu.
34. Joueur avec problème de jeu
Joueur qui dépense plus d’argent qu’il n’est capable d’en perdre.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 308
Lexique - 309
35. Joueur excessif
Joueur qui perd de l’argent qu’il n’a pas les moyens de perdre. Il en résulte des
problèmes de jeu. Le joueur excessif n’est pas obligatoirement un joueur pathologique.
Lorsque le test de dépistage est le SOGS, les joueurs excessifs regroupent les joueurs à
risque et les joueurs pathologiques.
Lorsque le test de dépistage est l’ICJE, les joueurs excessifs regroupent les joueurs à
risque modéré ou à risque sévère.
Les critères du DSM-IV ne permettent pas d’identifier les joueurs excessifs.
36. Joueur occasionnel (Voir Joueur sans problème de jeu)
37. Joueur pathologique
Joueur qui manifeste une dépendance pathologique à l’égard du jeu.
38. Joueur récréatif (Voir Joueur sans problème de jeu)
39. Joueur sans problème de jeu
Joueur sain qui n’éprouve aucune perte de contrôle sur son comportement de jeu et
dont la dépense au jeu ne cause aucun problème.
40. Lot (voir Remise)
41. Lot progressif (voir Îlotage)
42. Loterie
Historiquement, la loterie est un tirage parmi un très grand nombre de billets, qui coûtent
chacun un montant infime, et qui donnent la possibilité, rarissime, de gagner un gros lot
fabuleux. Tous les billets ont la même probabilité de gain. Il importe peu que l’acheteur
soit habile ou non. L’intervalle entre les tirages est habituellement de plusieurs jours.
43. Loterie vidéo
Jeu disponible sur les appareils de loterie vidéo, incluant les jeux de cartes. À comparer
à la véritable loterie, le gros lot y est de peu de valeur. Les tirages sont extrêmement
rapides en à peine quelques secondes.
44. Machine à sous (MAS)
Appareil de jeu offrant uniquement des jeux de lignes. Les vieux modèles étaient
mécaniques ou électriques. Les nouveaux modèles sont électroniques.
Loto-Québec utilise cette expression pour englober tous les appareils électroniques de
jeu situés au casino, ce qui inclut des appareils de poker vidéo.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 309
Lexique - 310
Voir aussi Appareil électronique de jeu (AÉJ).
45. Montant inséré
Total de l’argent qui est sorti de la poche du joueur pour être inséré dans l’appareil. Il
n’est pas certain que la personne a misé tout cet argent.
46. Montant misé
Total de l’argent misé, incluant les remises qui ont été rejouées.
47. Pari mutuel
Montant d’argent parié à l’hippodrome aux courses de chevaux.
48. Paritel
Système téléphonique permettant de parier à distance sur les courses de chevaux.
49. Partie
Sur un appareil électronique de jeu, une partie équivaut à miser un crédit.
Lorsque la personne mise sur plusieurs lignes, elle joue plusieurs parties simultanément.
Lorsque la personne mise plus d’un crédit par ligne, elle joue plusieurs parties
simultanément, mais toutes les parties de cette ligne ont le même résultat.
Voir Set.
50. Pokies
Expression populaire en Australie pour désigner l’ensemble des appareils de jeu. Cette
expression n’est donc pas limitée aux seuls appareils de poker vidéo. En fait, elle
désigne plus souvent des appareils offrant des jeux de lignes.
51. Prévalence du jeu
Fréquence des habitudes de jeu parmi une population.
52. Prévalence du jeu excessif
Fréquence des problèmes de jeu dans une population.
53. Prévalence du jeu pathologique
Fréquence de la dépendance pathologique au jeu dans une population.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 310
Lexique - 311
54. Processus associatif
Processus par lequel les organismes apprennent que des signaux sont associés à des
conséquences (conditionnement classique) ou que des comportements sont associés à
des récompenses (conditionnement opérant). Il n’est pas nécessaire que l’organisme ait
porté attention à ce qu’il a perçu ou fait.
55. Processus automatique
Processus par lequel les organismes établissent des liens entre des comportements et
des objectifs. Les automatismes se développent sans la participation de l’attention par la
simple répétition des gestes.
56. Processus heuristique
Lorsque toutes les informations nécessaires à une prise de décision rationnelle ne sont
pas disponibles, lorsque le temps manque pour compléter un raisonnement, ou lorsque
des interférences nuisent à la concentration, la pensée humaine utilise, en
remplacement, des informations ou des moyens de substitution qui sont imparfaits mais
néanmoins généralement adaptés. Ce sont les heuristiques.
Par exemple, en l’absence de données démographiques, il est relativement efficace
d’identifier la plus populeuse entre deux villes en sélectionnant la plus connue. Cette
règle est très imparfaite bien qu’elle réussisse mieux que le hasard.
57. Processus normatif
La pensée normative consiste à décider rationnellement en tenant compte de tous les
éléments pertinents, selon toutes les règles logiques appliquées avec compétence. Les
processus normatifs exigent alors du temps, de la compétence et des informations
exactes.
58. Remise
Montant d’argent remis au joueur lorsque cette personne obtient une combinaison
gagnante.
59. Salon de jeu
Établissement regroupant exclusivement des appareils électroniques de jeu. Il s’agit de
véritables casinos, mais sans table de jeu.
60. Salon de pari
Établissement retransmettant par vidéo les courses de chevaux des hippodromes.
61. Set
Ensemble des parties jouées lorsque la personne presse le bouton Jouer .
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 311
Lexique - 312
Voir Partie.
62. SOGS (South Oaks gambling screen)
Questionnaire de dépistage d’une dépendance pathologique envers le jeu.
Tableau 53
Catégories du South Oaks gambling screen
Score
Version originale
0
Version 2
Non joueur ou joueur récréatif
Joueur occasionnel
1 ou 2
Joueur récréatif
3 ou 4
Joueur à risque
Joueur à risque
5à9
Joueur
pathologique
probable
Joueur pathologique
10 à 20
Version 3
Joueur
occasionnel
Joueur excessif
Joueur pathologique extrême
63. Taux d’encaissement
Le rapport entre le solde encaissé à la fin de la session de jeu et l’argent inséré dans
l’appareil pour jouer constitue le taux d’encaissement.
Les joueurs confondent souvent le taux d’encaissement et le taux de remise. Ces deux
taux sont parfaitement indépendants. Un joueur qui insère 100 dollars, et qui perd deux
mises de 1 dollar avant d’encaisser le solde a un taux d’encaissement de 98% et un
taux de remise de 0%.
64. Taux d’incidence (voir Incidence du jeu excessif)
65. Taux de prévalence (voir Prévalence du jeu)
66. Taux de remise
Proportion de l’argent des mises qui est redonnée aux joueurs sous forme de lots de
différentes valeurs.
Pour un taux de remise de 92%, le concepteur du jeu doit prévoir remettre aux joueurs
92 cents pour chaque dollar misé. Évidemment, le joueur n’obtient pas une remise à
chaque partie. La remise peut s’accumuler pour former un gros lot, ou des lots
intermédiaires, distribués seulement occasionnellement, sinon rarement.
Parce que les lots importants ne sont pas souvent obtenus durant une session normale
de jeu, le taux de remise effectivement obtenu est habituellement inférieur au taux de
remise théorique. Cet écart est une source fréquente de plainte des joueurs qui
calculent leurs résultats et qui estiment obtenir une remise d’environ 75% plutôt que
92%. En fait le taux de remise théorique n’est atteint qu’après des millions de parties.
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 312
Lexique - 313
67. Taux de remise effectif
Argent des mises concrètement remis aux joueurs durant une session de jeu.
Voir Taux de remise.
68. Taux de retour (Voir Taux de remise)
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 313
Lexique - 314
Tableau 54
Dictionnaire anglais-français
Anglais
Français
No.
Big win
Gros gain
16
Card game
Jeu de cartes
26
CPGI
Canadian problem gambling index
17
Voir ICJE (Indice canadien de jeu excessif)
Electronic gaming machine (EGM)
Appareil électronique de jeu (AÉJ)
3
Expectancy
Espérance de gain
14
Expenditure
Dépense au jeu
11
Gaming
Jeu vidéo d’adresse, tel que les jeux sur
Nintendo.
24
(Voir aussi Jeu)
Gaming machine
Jeu
24
Gambling
Jeu
24
Gross profit
Gross revenue
Bénéfice brut
Handle
Budget de jeu
6
Keno
Jeu de keno
27
Line game
Jeu de ligne
28
Linked jackpots
Îlotage
21
Out-of-pocket money
Budget de jeu
6
Outlay
Montant misé
46
Pari-mutuel
Pari mutuel
47
Payout ratio
Taux de remise
66
PGSI
Problem gambling severity index
19
Voir ICJE (Indice canadien de jeu excessif)
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 314
Lexique - 315
Tableau 54
Dictionnaire anglais-français
Anglais
Français
No.
Poker video
Appareil de poker vidéo (APV)
4
Pokies
Pokies
50
Problem gambler
Problem gambling
Joueur excessif
35
Random
Aléatoire
1
Responsible gaming
Jeu responsable
31
Return rate
Taux de remise
66
Slot machine
Machine à sous (MAS)
44
Turnover
Montant misé
46
Video lottery terminal (VLT)
Appareil de loterie vidéo (ALV)
5
Wagering
Pari aux courses ou sur les événements sportifs
24
(Voir aussi Jeu)
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 315
Table des matières - 317
Table des matières
Dangerosité des appareils électroniques de jeu et mesures de protection....................... 1
Présentation du document ................................................................................................ 3
Chapitre 1 La dépense au jeu de la population québécoise ........................................... 11
1.1 Définitions.............................................................................................................. 12
1.2 La dépense au jeu globale de la population adulte du Québec............................. 12
1.3 Considération du revenu familial brut .................................................................... 14
1.4 Considération de la dépense per capita, tous jeux confondus .............................. 16
1.5 L’offre de jeu de Loto-Québec ............................................................................... 17
1.5.1 La dépense dans les loteries .......................................................................... 19
1.5.2 La dépense au casino..................................................................................... 21
1.5.3 La dépense dans les appareils de loterie vidéo.............................................. 22
1.5.4 La dépense dans le bingo en réseau.............................................................. 26
1.5.5 La dépense dans les loteries multimédia........................................................ 27
1.6 Le bingo des organismes charitables .................................................................... 27
1.7 Les hippodromes, les salons de jeu et partiel ....................................................... 28
1.8 Les tirages des organismes communautaires ou commerciaux............................ 30
1.9 Les casinos des organismes charitables............................................................... 30
1.10 La spéculation boursière ..................................................................................... 31
1.11 Les activités des nations amérindiennes............................................................. 32
1.12 L’offre de jeu des juridictions étrangères............................................................. 32
1.13 Le jeu sur Internet................................................................................................ 33
1.14 Les activités illégales de jeu ................................................................................ 33
1.15 En conclusion ...................................................................................................... 34
Chapitre 2 La loterie vidéo : état de la situation au Canada ........................................... 35
2.1 Le nombre d’ALV au Canada ................................................................................ 36
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 317
Table des matières - 318
2.2 Les paramètres de jeu sur ALV ............................................................................. 38
2.3 Les revenus des ALV ............................................................................................ 38
2.4 La dépense par joueur........................................................................................... 39
2.5 Le comportement des joueurs ............................................................................... 41
2.5.1 Les taux de pénétration et d’adoption des ALV .............................................. 42
2.5.2 Le profil sociodémographique des joueurs sur ALV ....................................... 44
2.5.3 Les profils d’adoption de la fréquence de jeu sur ALV.................................... 46
2.6 La question de la stabilité de la prévalence des problèmes de jeu ....................... 51
2.7 Les problèmes de jeu ............................................................................................ 53
2.7.1 Les problèmes de jeu en fonction du taux de pénétration des ALV................ 53
2.7.2 L’attrait des ALV auprès des diverses catégories de joueurs ......................... 55
2.7.3 Le risque de développer une dépendance lorsque l’ALV est la première
activité de jeu explorée par un nouveau joueur ....................................................... 56
2.7.4 Le risque de mortalité ..................................................................................... 57
2.8 Description du comportement des joueurs sur ALV .............................................. 58
Chapitre 3 La dangerosité des appareils électroniques de jeu ....................................... 65
3.1 Bref historique des appareils de jeu au Québec.................................................... 65
3.2 Les constats de la dangerosité des AÉJ ............................................................... 65
3.2.1 La dangerosité des gobe-sous........................................................................ 65
3.2.1.1 La distribution des GS .............................................................................. 66
3.2.1.2 La rentabilité des GS................................................................................ 66
3.2.1.3 Les problèmes de jeu durant les années 40 ............................................ 66
3.2.2 La dangerosité des appareils de poker vidéo ................................................. 67
3.2.2.1 La distribution des APV ............................................................................ 68
3.2.2.2 Le nombre d’APV ..................................................................................... 68
3.2.2.3 La rentabilité des APV.............................................................................. 69
3.2.2.4 L’intégrité des APV................................................................................... 71
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 318
Table des matières - 319
3.2.2.5 Les APV comme source de financement du crime organisé.................... 72
3.2.2.6 La prévalence du jeu pathologique sur APV ............................................ 73
3.2.2.7 La légalité des APV .................................................................................. 75
3.2.3 La dangerosité des machines à sous au casino ............................................. 76
3.2.3.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur MAS ........................ 77
3.2.3.2 Les MAS sont une activité de jeu attrayante pour les joueurs excessifs.. 78
3.2.3.3 La proportion des revenus tirés des MAS provenant des joueurs excessifs
............................................................................................................................. 79
3.2.3.4 La dépense au jeu mensuelle sur les MAS .............................................. 79
3.2.4 La dangerosité des appareils de loterie vidéo ................................................ 80
3.2.4.1 La prévalence du jeu excessif chez les joueurs sur ALV ......................... 81
3.2.4.2 Les ALV sont une activité de jeu particulièrement attrayante pour les
joueurs excessifs.................................................................................................. 82
3.2.4.3 La proportion des revenus tirés des ALV provenant des joueurs
pathologiques ....................................................................................................... 85
3.2.4.4 La dépense au jeu mensuelle sur les ALV ............................................... 87
3.2.4.5 La capacité des ALV de créer une dépendance pathologique chez les
joueurs novices ou jusque-là sains ...................................................................... 88
3.2.4.6 La capacité des joueurs à estimer leur dépense au jeu ........................... 89
3.2.5 La nature des demandes d’aide...................................................................... 90
3.2.6 Les désastres causés par des joueurs laissés sans aide ............................... 92
3.3 L’urgence pour des changements majeurs dans la manière d’exploiter les AÉJ .. 94
3.3.1 Les critères du jeu sécuritaire ......................................................................... 94
3.3.2 La dépense au jeu par unité et par site........................................................... 94
3.3.3 La dépense au jeu par joueur ......................................................................... 97
3.3.4 Les dommages ne dépendent pas prioritairement du nombre de sites ou du
nombre d’ALV .......................................................................................................... 99
3.3.4.1 L’importance de limites établies en fonction du budget familial ............. 101
Chapitre 4 La dangerosité croisée des activités de jeu................................................. 102
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 319
Table des matières - 320
4.1 Le déclin des courses de chevaux au Québec.................................................... 103
4.1.1 Les données financières ............................................................................... 103
4.1.2 Les taux de participation révélés par les études de prévalence du jeu ........ 104
4.1.3 Assistance dans les hippodromes québécois ............................................... 105
4.2 Un rapprochement anticipé ................................................................................. 108
4.3 Le revenu plus élevé des ALV situés dans les hippodromes du Québec............ 108
4.4 Les juridictions qui combinent l’exploitation des AÉJ et des courses de chevaux
................................................................................................................................... 109
4.5 Impact des AÉJ sur le pari mutuel....................................................................... 111
4.5.1 La situation aux États-Unis ........................................................................... 111
4.5.1.1 La Virginie Occidentale .......................................................................... 112
4.5.1.2 L’Iowa ..................................................................................................... 112
4.5.1.3 L’état de New York ................................................................................. 113
4.5.1.4 La Louisiane ........................................................................................... 113
4.5.1.5 Le Delaware ........................................................................................... 115
4.5.2 La situation au Canada ................................................................................. 115
4.6 La dangerosité des activités de jeu ..................................................................... 117
4.6.1 Les données de l’étude de prévalence du jeu pathologique de 1996........... 118
4.6.2 Les appels à la ligne téléphonique Jeu : aide et référence........................... 119
4.6.3 Les données de l’Enquête sur la santé des collectivités canadiennes – santé
mentale et bien-être ............................................................................................... 120
4.6.3.1 Nos définitions........................................................................................ 120
4.6.3.2 Qualité de nos estimations ..................................................................... 121
4.6.3.3 Les taux de prévalence de base ............................................................ 122
4.6.3.4 La prévalence des problèmes de jeu sur ALV........................................ 123
4.6.3.5 La prévalence des problèmes de jeu aux courses de chevaux.............. 124
4.6.3.6 Où se retrouvent les joueurs excessifs? ................................................ 125
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 320
Table des matières - 321
4.6.4 Les données du CQEPTJ ............................................................................. 125
4.6.5 Un rappel de données anciennes ................................................................. 129
Chapitre 5 Le processus pathogène du jeu sur AÉJ conduisant aux dommages......... 132
5.1 Les processus psychologiques conduisant à une dépendance pathologique envers
les AÉJ ...................................................................................................................... 132
5.1.1 La modélisation des processus psychologiques impliqués dans la dépendance
au jeu sur AÉJ........................................................................................................ 133
5.1.2 Une modélisation par stades du jeu pathologique ........................................ 135
5.2 Les paramètres des AÉJ ayant une incidence sur les processus impliqués dans la
dépendance pathologique ......................................................................................... 138
Chapitre 6 Les mesures destinées à protéger les utilisateurs contre les dangers du jeu
sur AÉJ.......................................................................................................................... 161
6.1 L’irréalisme du concept de Jeu responsable ....................................................... 162
6.2 Les obstacles....................................................................................................... 166
6.2.1 L’absence quasi-totale de données empiriques valides concernant l’efficacité
des mesures .......................................................................................................... 167
6.2.1.1 Les études spéculent sur des effets dont on ne connaît pas la taille ..... 167
6.2.1.2 La représentativité des échantillons est trop incertaine ......................... 168
6.2.1.3 Les problèmes de validité écologique des études réalisées en laboratoire
........................................................................................................................... 168
6.2.1.4 Il faut pouvoir être capable d’observer le phénomène à prévenir ou à
contrer ................................................................................................................ 169
6.2.1.5 L’utilisation inappropriée des groupes de discussion (focus groups) ..... 169
6.2.1.6 La communication occulte des résultats de recherche dans des
publications inaccessibles .................................................................................. 170
6.2.2 L’accès interdit aux paramètres des AÉJ ainsi qu’aux données enregistrées
...............................................................................................................................170
6.2.2.1 Les paramètres des jeux sur AÉJ .......................................................... 170
6.2.2.2 Les statistiques compilées automatiquement par les AÉJ ..................... 172
6.2.3 L’absence d’analyse cognitive détaillée des conditions de vie des joueurs.. 173
6.2.4 L’adoption de mesures copiées du savoir-faire de d’autres organisations ... 173
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 321
Table des matières - 322
6.2.5 L’absence de suivi des mesures implantées ................................................ 175
6.2.6 L’exigence de ne considérer que des mesures qui n’ont aucune incidence sur
le comportement des joueurs sans problème de jeu ............................................. 176
6.2.7 La restriction à des mesures qui n’interviennent pas directement dans le
processus pathogène qui conduit aux dommages................................................. 177
6.3 Aperçu des mesures implantées dans d’autres juridictions................................. 177
6.3.1 Les mesures développées aux États-Unis.................................................... 178
6.3.1.1 L’échec initial de la distribution proximale .............................................. 178
6.3.1.2 Les mesures développées au Nevada ................................................... 178
6.3.1.3 Les mesures développées au New Jersey............................................. 180
6.3.1.4 L’éclatement du principe de concentration............................................. 180
6.3.1.5 Les mesures initiales des premiers états américains qui ont implantés des
ALV..................................................................................................................... 182
6.3.1.6 Les mesures des appareils TouchPlay en Iowa..................................... 184
6.3.1.7 Les mesures associées au savoir-faire des compagnies privés ............ 185
6.3.1.8 Les initiatives pionnières du casinotier Harrah’s entertainment ............. 186
6.3.1.9 Les recommandations de la National gambling impact study commission
(NGISC) aux États-Unis en 1999 ....................................................................... 187
6.3.2 Les mesures développées au Canada ......................................................... 195
6.3.2.1 Une étude pionnière ............................................................................... 195
6.3.2.2 Les mesures de jeu responsable implantées en Nouvelle-Écosse ........ 196
6.3.2.2.1 Étude A – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-1).. 198
6.3.2.2.2 L’étude B – Caractéristiques favorisant le jeu responsable (ALV-2)207
6.3.2.2.3 Conclusion des deux premières études........................................... 207
6.3.2.2.4 L’étude C – Le programme d’autoexclusion pour les joueurs sur ALV
........................................................................................................................ 207
6.3.2.2.5 L’étude D – La carte-client............................................................... 208
6.3.2.2.6 Conclusion des études C et D ......................................................... 209
6.3.2.2.7 L’étude E – Fermeture des ALV à minuit......................................... 209
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 322
Table des matières - 323
6.3.2.2.8 L’étude F – Désactivation du bouton d’arrêt et ralentissement du jeu
(ALV-3) ........................................................................................................... 210
6.3.2.2.9 Conclusion des études E et F.......................................................... 210
6.3.2.3 Les mesures de jeu responsable implantées en Alberta........................ 210
6.3.2.4 Les mesures évaluées au Québec......................................................... 211
6.3.2.4.1 Étude A – Brochure d’information.................................................... 213
6.3.2.4.2 Étude B – Le programme d’autoexclusion du casino de Montréal .. 214
6.3.2.4.3 Étude C – Le mode d’arrêt des rouleaux ......................................... 214
6.3.2.4.4 Étude D – La récompense monétaire .............................................. 215
6.3.2.4.5 Étude E – Des messages d’information........................................... 215
6.3.2.4.6 Étude F – Le quasi-succès .............................................................. 215
6.3.2.4.7 Étude G – La sensibilisation des détaillants .................................... 216
6.3.2.4.8 Étude H – Le bouton d’arrêt............................................................. 216
6.3.2.4.9 Étude I – la disposition des ALV dans l’environnement de jeu ........ 217
6.3.2.4.10 Étude J – Le ralentissement de la vitesse de jeu .......................... 217
6.3.2.4.11 Étude K – L’imposition de pauses en situation de jeu ................... 218
6.3.3 Les mesures développées en Europe .......................................................... 218
6.3.3.1 Les mesures développées aux Pays-Bas .............................................. 218
6.3.3.1.1 Les mesures adoptées par la compagnie Holland casino. .............. 219
6.3.3.1.2 Les AÉJ de type Nijpels................................................................... 220
6.3.3.1.3 Les mesures adoptées dans les centres d’amusements................. 221
6.3.3.2 Les mesures expérimentées dans un casino suisse.............................. 222
6.3.4 Les mesures développées en Océanie......................................................... 222
6.3.4.1 Les mesures implantées en Australie .................................................... 222
6.3.4.1.1 Les mesures proposées en Australie par la Productivity Commission
........................................................................................................................ 223
6.3.4.2 Une étude australienne particulière........................................................ 228
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 323
Table des matières - 324
6.3.4.3 Les mesures adoptées dans les casinos néo-zélandais ........................ 228
6.4 La situation au Québec........................................................................................ 229
6.4.1 Les objectifs de l’étatisation des AÉJ............................................................ 231
6.4.1.1 Financement........................................................................................... 232
6.4.1.2 Protectionnisme...................................................................................... 233
6.4.1.3 Service ................................................................................................... 234
6.4.1.4 Sécurité .................................................................................................. 234
6.4.1.5 Intégrité .................................................................................................. 242
6.4.1.6 Jeu responsable ..................................................................................... 242
6.4.2 Les étapes de l’étatisation des AÉJ .............................................................. 243
6.4.3 Les mesures instaurées lors de l’installation des MAS dans les casinos en
1993 ....................................................................................................................... 245
6.4.3.1 Les mesures inscrites dans la réglementation ....................................... 246
6.4.3.2 Les mesures associées au savoir-faire des consultants ........................ 251
6.4.3.2.1 Pas d’alcool dans les aires de jeu ................................................... 251
6.4.3.2.2 Interdiction d’entrée pour les personnes de moins de 18 ans. ........ 252
6.4.3.2.3 Le programme d’auto-exclusion ...................................................... 253
6.4.3.2.4 Code vestimentaire.......................................................................... 257
6.4.3.2.5 Borne interactive.............................................................................. 257
6.4.3.2.6 Explication du fonctionnement des appareils .................................. 259
6.4.3.3 Services spécifiques à la communauté chinoise de Montréal................ 259
6.4.4 Les mesures instaurées en 1994 lors de l’implantation des ALV dans les bars
...............................................................................................................................260
6.4.4.1 Les mesures recommandées par la Sûreté du Québec en 1993........... 260
6.4.4.2 Les mesures associées aux règlements et règles. ................................ 263
6.4.4.2.1 La réglementation sur le système de loterie vidéo .......................... 263
6.4.4.2.2 Les règles sur les appareils de loterie vidéo.................................... 267
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 324
Table des matières - 325
6.4.4.2.3 Le règlement sur le taux de remise ................................................. 276
6.4.4.2.4 Autres articles de la Loi sur les loteries, les concours publicitaires et
les appareils d'amusement ............................................................................. 277
6.4.4.3 Message incitant à la modération........................................................... 278
6.4.4.4 Dépliant .................................................................................................. 278
6.4.4.5 Pas de connexion en îlots entre les ALV................................................ 279
6.4.4.6 Banques de données sur les comportements de jeu ............................. 279
6.4.5 L’implantation des ALV dans quatre hippodromes du Québec..................... 279
6.4.6 L’étude de prévalence du jeu pathologique réalisée en 1996....................... 281
6.4.7 La création des centres de recherche universitaires .................................... 282
6.4.8 L’émission « Savez-vous jouer … sans perdre la tête?................................ 283
6.4.9 Le transfert de la responsabilité du jeu pathologique au MSSS ................... 283
6.4.9.1 Campagnes nationales de sensibilisation .............................................. 283
6.4.9.2 Le forum sur le jeu pathologique ............................................................ 283
6.4.9.3 Le programme expérimental sur le traitement du jeu pathologique ....... 284
6.4.10 La table de concertation interministérielle................................................... 284
6.4.10.1 Les boîtiers des ALV seront dorénavant de couleur noire ................... 285
6.4.10.2 La réduction du nombre de jeux de 23 à 10, dont un maximum de cinq
par appareil. ....................................................................................................... 285
6.4.10.3 La réduction de la vitesse de jeu par la désactivation du bouton d’arrêt
........................................................................................................................... 285
6.4.10.4 La réduction de la banque maximale par session de $ 100 à $ 60 ...... 286
6.4.10.5 L’affichage à l’écran d’une horloge visible en tout temps..................... 286
6.4.10.6 Désactivation automatique des ALV en dehors des heures d’ouverture
autorisées par le permis d’alcool........................................................................ 287
6.4.10.7 Les nouveaux messages...................................................................... 287
6.4.10.8 La nécessité de fixer préalablement des limites de temps ou de dépense
........................................................................................................................... 288
6.4.10.9 Les messages en mode fenêtre indiquant le temps écoulé ................. 288
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 325
Table des matières - 326
6.4.10.10 Module explicatif sur le hasard........................................................... 289
6.4.10.11 Dépliant « Votre portrait de joueur en 8 questions » .......................... 289
6.4.10.12 Brochure « Les loteries vidéo et le hasard » ...................................... 291
6.4.10.13 Programme d’auto-exclusion volontaire ............................................. 291
6.4.10.14 Installation de contrôleurs de sites ..................................................... 292
6.4.10.15 Programme de formation des employés de bars ............................... 292
6.4.11 Le moratoire sur l’octroi de nouvelles licences d’exploitant de site d’appareils
de loterie vidéo....................................................................................................... 292
6.4.12 Remplacement du parc d’ALV en 2003. ..................................................... 293
6.4.13 La création de la fondation Mise sur toi ...................................................... 294
6.4.14 L’étude de prévalence du jeu de 2002........................................................ 295
6.5 Conséquences additionnelles posées par les salons de jeux ............................. 295
6.5.1 Inclusion des ALV dans des centres plus généraux de divertissement ........ 295
6.5.2 Retrait de 16% des ALV du contrôle de la RACJ.......................................... 296
6.5.3 Visibilité réduite des ALV .............................................................................. 296
6.5.4 Contrôle rigoureux de l’âge pour toute personne paraissant moins de 30 ans
...............................................................................................................................296
6.6 Les mesures non considérées par Loto-Québec................................................. 296
6.6.1 Abandon du concept de jeu responsable pour le concept de jeu sécuritaire 296
6.6.1.1 Propension des joueurs excessifs à admettre un problème de jeu........ 297
6.6.2 L’aire de jeu doit mettre les joueurs en garde contre les dommages potentiels
associés à l’utilisation des appareils de jeu ........................................................... 298
6.6.3 Assurer que les joueurs sont en mesure de décider rationnellement de jouer
ou pas .................................................................................................................... 298
6.6.4 Une zone d’exclusion des ALV ..................................................................... 299
6.6.5 Accès maximalement limité aux guichets automatiques bancaires (GAB) ... 299
6.6.6 La disparition complète des ALV dans les bars ............................................ 300
6.6.7 La réduction du taux de remise..................................................................... 300
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 326
Table des matières - 327
6.6.8 L’augmentation de la taille des lots importants ............................................. 301
6.6.9 La réduction du jeu multi-lignes .................................................................... 301
6.6.10 Des mises en garde efficaces, vérifiées expérimentalement...................... 301
Lexique.......................................................................................................................... 302
1.
Aléatoire ............................................................................................................. 302
2.
Appareil de jeu ................................................................................................... 302
3.
Appareil électronique de jeu (AÉJ)..................................................................... 302
4.
Appareil de poker vidéo (APV) ........................................................................... 302
5.
Appareil de loterie vidéo (ALV)........................................................................... 302
6.
Budget de jeu ..................................................................................................... 303
7.
Capital de jeu ..................................................................................................... 303
8.
Comorbidité ........................................................................................................ 303
9.
Croyance erronée quant au hasard.................................................................... 303
10.
Dépendance pathologique à l’égard du jeu .................................................... 304
11.
Dépense au jeu............................................................................................... 304
12.
DSM-III............................................................................................................ 304
13.
DSM-IV ........................................................................................................... 304
14.
Espérance de gain.......................................................................................... 304
15.
Gain significatif ............................................................................................... 305
16.
Gros gain ........................................................................................................ 305
17.
Heuristique (Voir Processus heuristique) ....................................................... 305
18.
Iatrogène......................................................................................................... 305
19.
ICJE (Indice canadien de jeu excessif)........................................................... 306
20.
Illusion de contrôle.......................................................................................... 306
21.
Îlotage ............................................................................................................. 306
22.
Incidence du jeu excessif................................................................................ 306
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 327
Table des matières - 328
23.
Incidence du jeu pathologique ........................................................................ 306
24.
Jeu .................................................................................................................. 306
25.
Jeu charitable ................................................................................................. 307
26.
Jeu de cartes .................................................................................................. 307
27.
Jeu de keno .................................................................................................... 307
28.
Jeu de lignes................................................................................................... 307
29.
Jeu multicrédits............................................................................................... 308
30.
Jeu multilignes ................................................................................................ 308
31.
Jeu responsable ............................................................................................. 308
32.
Jeu sécuritaire ................................................................................................ 308
33.
Joueur à risque ............................................................................................... 308
34.
Joueur avec problème de jeu ......................................................................... 308
35.
Joueur excessif............................................................................................... 309
36.
Joueur occasionnel (Voir Joueur sans problème de jeu)................................ 309
37.
Joueur pathologique ....................................................................................... 309
38.
Joueur récréatif (Voir Joueur sans problème de jeu)...................................... 309
39.
Joueur sans problème de jeu ......................................................................... 309
40.
Lot (voir Remise) ............................................................................................ 309
41.
Lot progressif (voir Îlotage) ............................................................................. 309
42.
Loterie............................................................................................................. 309
43.
Loterie vidéo ................................................................................................... 309
44.
Machine à sous (MAS) ................................................................................... 309
45.
Montant inséré ................................................................................................ 310
46.
Montant misé .................................................................................................. 310
47.
Pari mutuel...................................................................................................... 310
48.
Paritel.............................................................................................................. 310
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 328
Table des matières - 329
49.
Partie .............................................................................................................. 310
50.
Pokies ............................................................................................................. 310
51.
Prévalence du jeu ........................................................................................... 310
52.
Prévalence du jeu excessif ............................................................................. 310
53.
Prévalence du jeu pathologique ..................................................................... 310
54.
Processus associatif ....................................................................................... 311
55.
Processus automatique .................................................................................. 311
56.
Processus heuristique .................................................................................... 311
57.
Processus normatif ......................................................................................... 311
58.
Remise............................................................................................................ 311
59.
Salon de jeu.................................................................................................... 311
60.
Salon de pari................................................................................................... 311
61.
Set .................................................................................................................. 311
62.
SOGS (South Oaks gambling screen)............................................................ 312
63.
Taux d’encaissement...................................................................................... 312
64.
Taux d’incidence (voir Incidence du jeu excessif) .......................................... 312
65.
Taux de prévalence (voir Prévalence du jeu) ................................................. 312
66.
Taux de remise ............................................................................................... 312
67.
Taux de remise effectif ................................................................................... 313
68.
Taux de retour (Voir Taux de remise)............................................................. 313
Dangerosité des AÉJ et mesures de protection (Jean Leblond, 20 février 2007) - 329