Etude de la fréquence des blessures de football.
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Etude de la fréquence des blessures de football.
Etude de la fréquence des blessures de football * par te Dr Abdel Mohamed Halim, membre du CIO pour le Soudan et viceprésident de la commission médicale de la FIFA, le Dr K.Y. Mustafa, et le Dr Nasr Eldin A. Mahmoud Ce rapport examine la fréquence des blessures de football survenues sur un terrain, les facteurs qui favorisent ces blessures ainsi que les mesures préventives qui peuvent être prises. Introduction Toute activité sportive comporte des risques de blessures. Or, les personnes s’occupant du sport, cn particulier les médecins, s’efforcent de minimiser ces risques. Comme dans toute autre branche de la médecine, prévenir vaut mieux que guérir. Mais seule l’étude des blessures occasionnelles permettra de les éviter à l’avenir. Une telle étude examine: a) la fréquence des blessures — ce qui permet d’évaluer les dimensions du problème ; b) la localisation anatomique des blessures. Dans tout sport, certaines parties corporelles sont plus exposées que d’autres aux blessures. Une fois qu’elles sont connues, on peut envisager le moyen de protéger les parties les plus délicates dans la mesure du possible ; c) les tacles pouvant produire des blessures — ainsi les tacles, dangereux peuvent être éliminés par une modification des lois du jeu ; d) l’analyse de la variation de la fréquence au cours de la saison — ce qui peut donner des indications quant aux facteurs de l’environnement pouvant jouer un rôle ; e) les caractéristiques au point de vue physique et psychologique des joueurs blessés — certains aspects négatifs peuvent ensuite être corrigés en cours d’entraînement. * Article publié dans FIFA News NO 188. 440 Mais il y a un grand nombre de variables et d’interactions parmi ces facteurs qui interviennent dans la prédisposition des joueurs à se blesser. Comme il est difficile d’isoler un facteur pour l’étudier dans des conditions dirigées, une analyse n’est pas aisée. Nous avons utilisé le terme d’« étude de la fréquence des blessures de football » pour désigner l’étude touchant de tels facteurs. 1. Description des blessures Aspect anatomique Dans cette étude, il suffit de donner une description générale visant à souligner les points importants révélés par de récentes études. Des comptes rendus détaillés sur la question peuvent être trouves dans des manuels de chirurgie orthopédique1 touchant les sports — O’Donoghue D. H. et aussi l’étude sur la prévention des accidents de la FIFA par J. Vittori 2 qui se réfère à 1300 matches. II y eut 1400 accidents, 15% touchant la tête et les membres supérieurs, 10% la poitrine et l’abdomen et 75% les membres inférieurs. Les blessures concernaient avant tout les tissus mous. Cette étude a mentionné les blessures qu’on néglige habituellement : au visage, aux os nasaux, lésions aux yeux et blessures au crâne. Or, de telles blessures sont importantes, non seulement parce qu’elles se produisent fréquemment mais aussi en raison des graves répercussions possibles si elles sont négligées: Mauricio N. Wainer 3 a étudié 2860 blessures de football au Chili entre 1962 et 1966. 89% ont été des blessures graves, 44% des muscles déchirés, 34% des foulures aux articulations du genou et de la cheville, 7% des blessures du ménisque et 4% des fractures. Les blessures chroniques qui ont empêche toute participation aux matches pendant de longues périodes représentaient 11% des cas. Dans le cadre d’une étude préliminaire au Soudan 4, 50 joueurs de l’équipe nationale ont été suivis pendant 3 ans. 38% des joueurs ont subi des blessures graves et 8% des blessures chroniques. Les foulures aux articulations de la cheville et du genou constituent 70% des blessures et les déchirures de muscles 10% de celles-ci. II y a là un aspect différent de celui qu’avaient révélé d’autres études : en effet, on voit une plus grande fréquence des foulures de la cheville et du genou et une fréquence relativement moins importante des déchirures musculaires. Cela peut s’expliquer par le fait que les joueurs ont néglige de porter des protections et que leurs muscles n’étaient pas suffisamment développés. Les blessures aux muscles, tendons ou articulations se produisent suivant un système donné. Les blessures aux tendons et aux muscles sont produites par : a) un coup de l’extérieur ; b) à l’intérieur à la suite d’une contraction subite d’un muscle ; c) à la suite d’épuisement causant la foulure d’un muscle. Les blessures aux articulations sont aussi produites par des traumas directs ou des mouvements forcés soudains ou encore par des mouvements poussés à l’extrême. 2. Caractéristiques physiques des joueurs L’analyse du rôle joué par l’âge sur la fréquence des blessures est problématique et fort difficile à effectuer. Cela provient du fait que l’âge est une mesure du ‘temps pendant lequel le joueur et les facteurs de l’environnement ont eu une influence réciproque, ce qui est associé de façon inséparable à la croissance biologique et à l’expérience. Les joueurs ayant le même âge montrent des caractéristiques qui diffèrent notablement quant à la force, la capacité motrice et la capacité de travail. En général, les joueurs plutôt jeunes peuvent être sous-développés physiquement et manquer d’expérience ; ils sont donc plus exposés aux blessures, tandis que les joueurs âgés ont des réflexes ralentis et sont, eux aussi, exposés aux blessures. II faudra attendre un plus grand nombre d’études pour procéder à une analyse complète. On n’a pas analysé quelle influence le poids du corps pouvait avoir quant à la fréquence des blessures parmi les joueurs de football. En ce qui concerne le football américain, McCoy E.B. 5 a montré que les joueurs assez lourds sont moins exposés aux blessures. Mais cela est certainement dû à une augmentation de la masse musculaire plutôt qu’a la présence de tissu adipeux. On sait, en effet, que les personnes obèses sont plus exposées aux accidents, en général, du fait qu’elles doivent déplacer leur poids excessif et produire donc davantage d’efforts. D’autre part, l’hypertrophie des muscles augmente la puissance et le tonus musculaire, ce qui est le facteur le plus positif quant à la sécurité et à la protection. Cela permet des réactions plus rapides. Bender A. 6 a montré que le renforcement des muscles par des programmes visant à augmenter la force réduisait les blessures. Une position correcte du corps protège contre les foulures soudaines et inattendues. Une position inactive et affaissée avec un tonus musculaire bas prédispose aux blessures. En revanche, une position alerte avec un tonus musculaire accru protège les ligaments. 3. Facteurs psychologiques Une attention croissante est accordée aux aspects psychologiques en relation avec le probléme des blessures dans le sport en général. Brody L. 7 croit que le centre du problème de la fréquence des accidents doit être cherché dans le domaine de la personnalité. II parle de caractéristiques de la personnalité qui font qu’on trouve des « personnes prédisposées aux accidents » ou encore des « joueurs provoquant des accidents ». De tels traits comprennent : la nécessité d’assurer sa virilité, le sentiment de son insuffisance, le sentiment d’hostilité, le manque du sens de ses propres responsabilités, les soucis d’ordre physique, l’impuissance à faire face à l’agressivité, la timidité, le sentiment de son invulnérabilité, l’émotion manifestée par certains joueurs, surexcités par les railleries des spectateurs et la réaction excessive à l’effort qui provoque 441 l’anxiété. L’agilité des joueurs qui dépend des réflexes et de la perception est un facteur important. Un joueur agile qui a une bonne condition physique est capable de changer de position rapidement pour échapper au danger. 4. Conditionnement des joueurs II s’agit des mesures prises pour s’assurer que l’athlète est le mieux préparé possible pour les matches. Cela comprend : a) un programme bien équilibré d’entraînement, un régime alimentaire, du repos et des massages ; b) des exercices de résistance visant à accroître la puissance musculaire, I’endurance et à assurer une bonne condition physique ; c) le fait de tirer des leçons d’une course bien organisée, l’exercice de la promptitude visant à assurer la protection, des réactions rapides et de la souplesse du corps. Les blessures se produisent plus fréquemment au début de la saison, par l’absence d’une bonne condition physique. Bien que l’entraînement soit la pierre de touche du conditionnement, il faut y procéder au mieux mais ne pas l’exagérer. II y a surentraînement quand l’entraînement va au-delà de la capacité d’adaptation. Les symptômes et signes de surentraînement comprennent : diminution de la performance, perte de poids, accélération du pouls, irritabilité et tendance plus élevée à la fatigue, Wolf W. 8. II faudrait surveiller les joueurs à cet égard : en effet, de tels signes et symptômes de surentraînement prédisposent aux blessures. Cela explique peut-être le plus grand nombre de blessures qu’on constate au cours de la deuxième mi-temps, alors que la fatigue commence à se manifester. 5. Facteurs relatifs à l’environnement Plusieurs facteurs sont importants : I’agressivité des autres joueurs, la possibilité pour les dirigeants d’établir des lois visant à interdire les tacles dangereux et le pouvoir des arbitres à faire respecter ces lois. Les facteurs climatiques défavorables affectent tout particulièrement les joueurs qui ne s’y sont pas adaptés. En climat tropical, les joueurs perdent beaucoup de liquide et d’électrolytes au cours des matches, Halim et al. 9. Cela les prédispose à la déshydrata442 tion, aux crampes musculaires, à un manque de concentration, donc à des blessures plus fréquentes au cours de la deuxième mitemps. De même, les joueurs qui ne se sont pas adaptés aux altitudes élevées risquent I’hypoxie et par là un manque de concentration. Les joueurs qui s’abstiennent de porter des vêtements protecteurs s’exposent aux blessures. Les tibias doivent être protégés, de même que les pieds, au moyen de bandages et de chaussures de bonne qualité. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour concevoir de meilleurs moyens de protection pour le football ainsi que, le cas échéant, des lois rendant le port de tels vêtements obligatoire. Les terrains de jeu qui ne sont pas de la meilleure qualité prédisposent aux blessures. On a soulevé récemment la question du gazon artificiel en tant que mesure préventive. D’autre part, si les poteaux de but ne sont pas arrondis, ils peuvent être dangereux. De nombreux matches sont joués actuellement en nocturne ; il est important que les conditions d’éclairages soient excellentes. II faudra davantage d’études et d’analyses des blessures du football pour établir clairement les facteurs favorisant les blessures. A. H. M. Références : 1 O’Donoghue D.H. : Traitement des blessures causées aux athlètes - Saunders Company, Philadelphia 1970. 2 Vittori J. : Etude sur la prévention des blessures de football de la FIFA - Conférence sur la médecine sportive de la FIFA et de la CAF, Addis Abeba. février 1976. 3 Mauricio W. Wainer : Blessures plus ou moins graves du football, dans « Encyclopaedia of Sports Sciences and Medicine » - The American College of Sports Medicine, the Macmillan Company. New York 1971. 4 Mustafa K.Y., Kalam Sakit R.H., Cadir A.M. : 1976 « Etude de la fréquence des blessures de football auprès des joueurs soudanais (en préparation). 5 McCoy E.B. : Un système consistant peut être trouve quant à la fréquence des blessures de football. - « Medical Tribune », 10 octobre 1965. 6 Bender J.A. : Renforcement des muscles et prévention des blessures au moyen d’un programme bien dirige d’exercices isométriques, 1964. 7 Brody L. : Aspects psychologiques des causes d’accidents. - Annual Safety Education Review, 2. 98, 1963. 8 Wolf W. : Contribution à la question de surentraînement. - Sports Medicine 2, 35, 1957. 9 Halim A.M., Mustafa K.Y.. Mahmoud N.A. : Equilibre du liquide et des électrolytes chez les joueurs de football ayant à jouer dans un climat tropical. - Conférence de Médecine Sportive de la FIFA et de la CAF, Addis Abeba, février 1976.