Aspects culturels et symboliques de la cerise et de la courgette
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Aspects culturels et symboliques de la cerise et de la courgette
Tous à vélo !!! Isabelle Weber – Cordes-sur-Ciel (81) Ce n’est pas pour plagier « cerise et potiron », enseigne de fruits et légumes bien connue dans le sud-est de la France, que l’AGRACO a choisi cette année d’associer les cerises et les courgettes mais tout simplement parce qu’un de ses objectifs étant de favoriser la consommation de produits de saison et de proximité, ce sont les cerises et les courgettes qui, à la mi juin, se trouvent normalement désignées. Les mauvaises conditions atmosphériques de cette année (basses températures, fortes intempéries) ont fait que, malheureusement, celles-ci ne sont pas encore arrivées à maturité et que les producteurs locaux n’ont pu nous approvisionner comme prévu. Rue de la Croix-Rousse - Lyon 1 Les Cerises Symbolique. Les cerises bénéficient d’une image très positive. On aime à se parer des ces fruits annonciateurs des beaux jours en s’en faisant des pendants d’oreilles. Le cerisier est l’arbre familial par excellence, souvent le premier que l’on plante dans son jardin. Deux de ces arbres ont été encore plantés symboliquement par les élèves au cœur du groupe scolaire du quartier Saint-Marceau à Orléans le 25 novembre dernier. La chanson « Le temps des cerises » de Jean-Baptiste Clément, indissociable de la Commune de Paris est devenue le symbole de l’espoir révolutionnaire et de la résistance à l’oppression. « Les enfants et les rebelles toujours chériront le cerisier » dit Jean Lefèvre. Cette appellation est visiblement porteuse puisque reprise actuellement par une marque de prêt-à-porter tandis qu’une autre, consacrée au linge de maison, s’intitule « La cerise sur le gâteau » ! Ce sont des cerises à l’eau de vie que l’on déguste au nouvel an, un fruit qui frais ou en conserve peut être présent sur la table toute l’année. Spécificité orléanaise. En 1924, M. Gitton, professeur d’arboriculture de la Ville d’Orléans écrit : « La culture du cerisier est séculaire dans la région orléanaise. Les cerises sont, presque toutes récoltées dans le canton Sud d’Orléans, dans les communes d’Olivet, Saint-Pryvé-Saint-Mesmin, Saint-Cyr-en-Val. Les 8/10 sont récoltées sur Olivet. ». Il ajoute « les variétés cultivées sont l’Anglaise hâtive, l’Early rivers, le Bigarreau Napoléon et la cerise d’Olivet ». La ville d’olivet était tellement associée à la culture de la cerises que ses habitants avaient été surnommés « pet’néyaux », quant à ses armoiries elles sont toujours ornées de cerises. Aujourd’hui du fait de l’urbanisation, la culture des cerisiers s’est concentrée sur la commune de Saint-HilaireSaint-Mesmin où l’on compte 5 producteurs dont 2 avec des superficies de 10 et 12 hectares, mais il y en a également une quinzaine d’autres en Orléanais. Les variétés cultivées maintenant sont essentiellement des bigarreaux. Armoiries de la ville d’Olivet Gastronomie. Il y a beaucoup de produits dérivés à base de cerises. Au début de l’été, s’il est un dessert incontournable, c’est bien le clafoutis. A la fin du XIXème siècle, on confectionnait, à Orléans, du ratafia de cerises à l’aide de cerises aigres et de noyaux de cerises cassés que l’on laissait macérer dans de l’eau de vie. Les infusions de queues de cerises étaient recommandées par nos grand-mères pour leur pouvoir diurétique et drainant. La « Confrérie des mangeux de cerises des bords du Loiret » a récemment créé « l’Arlicot » composé d’un vin cabernet rouge de l’Orléanais auquel est ajouté du sirop et de l’alcool de cerise, ainsi que « l’Arlicotine » petit chocolat à base d’Arlicot fabriqué par la Chocolaterie Royale à Orléans. Tout le monde, enfin, connait le kirsch. Carte postale, éd. M. Barré & J. Dayez - 1946 2 Source d’inspiration. Dans la tradition orale, les cerises sont liées à la Saint-Georges (23 avril) dont on redoute les effets : « S’il pleut à la SaintGeorges, sur 100 cerises il en reste 14 », « Pluie de Saint-Georges, coupe aux cerises la gorge ». Il n’est pas bon « d’avoir la guigne » et quand on est content d’une personne, on lui dit ironiquement « je te paierai des guignes à Pâques ». Des « Queues de cerises » représentent peu de chose, mais on aime avoir un petit supplément : « La cerise sur le gâteau ». En littérature jeunesse la cerise, souvent sous l’apparence d’une petite fille, a inspiré nombre d’auteurs : « Rouge cerise » (F. David & J Saraiva), « Mme Cerise et le trésor des pies voleuses » (S. Poirot-Chérif), « Le temps des cerises » (P. Dumas), « Cerise et Garou » (M. Cantin & P. Le Sourd), « Cerise et ses amis au rythme des saisons » (G. Callac & DurackBown), « Les carnets de Cerise » (S. Carquian & C. Davenier) ; « Le secret de Cerise » (S. Carquain & C. Davenier), etc. Dans la « grande littérature » on ne peut ignorer « la Cerisaie » d’Anton Tchekhov, qui est également le nom d’un château de Chécy et d’une école publique d’Olivet. Pour ce qui est du théâtre citons simplement « Bertille ou la cerise sur le gâteau » spectacle créé, en 2008, par Céline Larrigaldie, auteur et comédienne de Sandillon. Fêtes et traditions. Le marché aux cerises ainsi que la Fête de la cerise qui se déroulait le 3ème dimanche de juin à Olivet, ont largement contribué, au début du XXe siècle, à faire connaître la cité. Tombée en désuétude, cette fête a été relancée, de 1988 à 1999, par l’association « À la recherche du passé d’Olivet ». Depuis 2000 c’est le Comité des fêtes de Saint-Hilaire-Saint-Mesmin qui a repris le flambeau en organisant, au Pâtis, un important Marché aux cerises le dernier dimanche de juin. Parallèlement une « Confrérie de la cerise et des pet’noyaux des bords du Loiret » regroupant tous les arboriculteurs du secteur est née en 2003. Depuis 2012, elle s’appelle « Confrérie des mangeux de cerises des bords du Loiret » et continue de porter haut et fort le rouge de ce beau fruit au-delà des frontières de l’Orléanais. De nombreuses « Fêtes de la cerise » ont lieu en France, en général en juin, principalement dans le sud-est, mais aussi dans l’est, notamment à Fougerolles (Haute-Saône) où se trouve l’Écomusée du pays de la cerise. Femme d’olivet, vers 1900, revenant du marché « La coulouère » sur la tête Marché aux cerises - 1934 -Olivet Les Courgettes Serge Schall dans son ouvrage De mémoire de potagers (2009) écrit : « Lancez le mot Courge sur un ton aimable pour ne pas faire croire à une injure, et laissez venir à vous les évocations. Les noms de Citrouille, Potiron, Calebasse viendront les premiers en vrac, Coucourde si vous vous prêtez à ce petit jeu au sud-est du 45° degré de latitude. Potimarron, Pâtisson peut-être, Coloquinte, sans doute, arriveront dans une seconde série, beaucoup plus rarement Courgette.». Les cucurbitacées constituent une famille si vaste que l’on a effectivement du mal à y intégrer la courgette. C’est à Charles Naudin que l’on doit la classification moderne des courges, établie en 1860, toujours en vigueur. Le genre Cucurbita compte une quinzaine d’espèces, dont cinq seulement ont été domestiquées et quatre sont cultivées dans nos jardins. Originaire du Mexique, la courgette est une variété de 3 courge de forme allongée à peau brillante, qui se consomme jeune. d’un beau jaune lumineux qui se mange en salade ou se porte au revers de la boutonnière. La courgette, c’est vrai, est un fruit hésitant, délicat, dit encore Jean-Luc Hennig, « qui ne sait pas très bien s’il tient réellement à grandir comme toutes les autres Cucurbita, ou à s’ouvrir en deux et à laisser prélever sa chair avec une cuiller pour enrichir une merveilleuse farce ». La littérature enfantine, elle, ne dédaigne pas la courgette. Nous en avons la preuve avec « Anaëlle la courgette » de Kara ou encore avec les ouvrages de Caro & Krassinsky où « Courgette » est une petite grenouille. Lili Scratchy qui proposent des recettes aux bout’choux a publié, quant-à elle, « La courgette c’est chouette ». Du côté des adultes rappelons « Autobiographie d’une courgette » de Gilles Paris, célèbre roman qui dresse un tableau réaliste de la vie des orphelins en France ; lequel fut adapté par Luc Béraud pour la télévision, en 2007, sous le titre « C’est mieux la vie quand on est grand ». Symbolique. Les représentions liées à la Courge ne sont guère flatteuses. Une courge désigne bien souvent une personne peu dégourdie. On dit aussi des courgettes que ce sont des coureuses, mais toutes ne le sont pas, telle la « Courcouzelle » ou Verte non coureuse d’Italie, et la « Verte des Zénettas » dite aussi Verte non coureuse des maraîchers. D’après Le trésor des félibriges de Frédéric Mistral, « courcoudo » en occitan peut effectivement signifier fille de joie mais surtout personne niaise ou stupide. Dans le Midi on dit d’un fruit qui n’a pas de goût : c’est une « coucourde » ! Avoir la tête comme une « cougourde » c’est en avoir plein la tête. Dans les jeux dansés Catalans se retrouver avec la Carbassa c’est être le perdant. Quelques variétés de courges, une fois séchées, permettent toutefois de faire de véritables « gourdes » fort appréciées des bergers et agriculteurs méridionaux. Par chance, enfin, la courgette a une grande fleur Texte : Christian CHENAULT, Vice-président de l’A.G.R.A.C.O Mise en page : Christelle LECOCQ (Journal consultable sur agraco.free.fr ) 4