Performance des entreprises et qualité de vie au travail : 5 enjeux
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Performance des entreprises et qualité de vie au travail : 5 enjeux
Performance des entreprises et qualité de vie au travail : 5 enjeux de la nouvelle grande Région Émanation des partenaires sociaux régionaux et membre du réseau de l’Anact pour l’amélioration des conditions de travail, Aravis-Aract Auvergne Rhône-Alpes accompagne les PME dans la mise en place de démarches d’amélioration des conditions de travail afin d’en faire un levier de performance. Les enseignements des actions que nous menons depuis plus de 25 ans dans les PME et l’expérience du réseau auquel nous appartenons soulignent à quel point la prise en compte du facteur humain et des questions liées au travail contribue à l’efficience des entreprises, au bien-être des salariés et, par voie de conséquence, au développement économique. Mettant à profit notre regard et notre expertise de terrain, nous identifions dans ce document 5 défis à relever pour faire d’Auvergne Rhône-Alpes un territoire créateur d’emplois durables, favorable à la performance des entreprises et à la qualité de vie au travail des salariés. *Membres du réseau Anact-Aract, Aravis et l’Aract Auvergne s’unissent pour adapter leur action à la nouvelle Région. Cette signature est provisoire. 1 Relancer la création d’emplois en mettant l’accent sur la qualité de l’emploi Le soutien à la création d’emplois reste un enjeu majeur pour réduire le taux de chômage de 9 %. Mais pour obtenir des résultats dans la durée, l’effort accordé au soutien à la création d’emplois doit se doubler de mesures en faveur de la qualité de l’emploi1. 5 constats 1. Un paradoxe : le taux de chômage reste élevé alors que des entreprises de secteurs stratégiques de Rhône-Alpes peinent à recruter durablement. Zoom : services à la personne Horaires décalés et parcellisés, isolement des salariés, faible accès à la formation… les employeurs des services d’aide à la personnes sont confrontés à des problèmes de recrutement, un turn-over important et des taux d’inaptitude médicale élevés. Si la revalorisation de l’image du secteur est une piste d’action, elle n’est pas suffisante pour agir sur la qualité de l’emploi. Réunies dans un projet pilote, des structures d’Auvergne Rhône-Alpes élaborent actuellement des plans d’action pour améliorer leurs pratiques de gestion des RH, professionnaliser leur encadrement de proximité, réduire la pénibilité, mettre en place des organisations du travail capables de soutenir les salariés au quotidien, anticiper la révolution digitale… Industrie agroalimentaire, logistique, secteur médico-social, chimie, économie de proximité… : tandis que des salariés ont des difficultés à entrer et à se maintenir dans l’emploi, des secteurs stratégiques en matière d’emploi ou de création de valeur ajoutée rencontrent des difficultés à recruter et fidéliser leur personnel. 2. Une partie des emplois créés se révèlent « non durables ». Sur les 5 millions de déclarations préalables à l’embauche déposées en Auvergne Rhône-Alpes en 2014, seules 9 % concernaient des emplois de plus de 6 mois (source Pôle emploi). La création d’emplois non durables s’illustre ainsi par le recours à des contrats courts ou très courts par des entreprises qui répondent à des besoins en main d’œuvre ponctuels, ne parviennent pas à anticiper leurs besoins RH ou à gérer les variations de leur production. Elle s’illustre également par la création d’emplois dans lesquels les salariés ne restent pas (absentéisme, turn-over, cas d’inaptitudes…). Ces problèmes de fidélisation et de maintien dans l’emploi peuvent être liés à des difficultés d’intégration des salariés, de montées en compétences, des conditions de travail pénibles, un manque d’attractivité... Avec des conséquences sur la santé et l’emploi des salariés concernés et la performance des entreprises. Sur 21 entreprises de Savoie et Haute-Savoie issues de différents secteur d’activité, le poids de l’absentéisme et du turn-over (arrêts maladies, départs, absences…) représentait ainsi en 2015 entre 6 à 20% de la masse salariale annuelle (source Aravis). 3. Pour des raisons proches, le recours à l’apprentissage, se solde dans 28% des cas (taux national) par un échec à la fois pour l’entreprise et pour l’apprenti, un taux qui croît fortement quand il s’agit des apprentis aux qualifications les plus basses. 4. Les spécificités des formes d’emplois atypiques doivent désormais être être prises en compte. Deux caractéristiques du tissu économique de la Région Auvergne-Rhône-Alpes invitent à mieux en prendre en compte dans les politiques d’appui à la création d’emploi, les effets des emplois en formes atypiques2 : 1 Les emplois de qualité sont des emplois robustes (résistants à l’environnement), favorisant les parcours des salariés, proposant des rémunérations adaptées, respectueux de la qualité de vie au travail (d’après la Fondation de Dublin) Juillet 2016 2 • • le poids du secteur de l’hôtellerie-tourisme (9% de la valeur ajoutée régionale, 33 000 non salariés, 54 000 saisonniers selon le Fafih), le rôle de l’économie de proximité (54% des emplois en moyenne en Rhône-Alpes dont 80% sous forme d’emplois atypiques, – source INSEE / IMPL). De façon plus générale, plus de 75 % des embauches sont dorénavant effectués sous ces formes au niveau national (temps partiel, CDD, intérim, multisalariat…). Selon la façon dont elles sont mises en œuvre, ces modalités d’emploi peuvent créer de l’activité ou de la précarité, accompagner de nouvelles façons de travailler ou creuser les inégalités dans les équipes de travail. 5. Au-delà du secteur du tourisme, les solutions permettant de sécuriser les embauches de personnel et de conserver les savoir-faire dans une entreprise ou sur un territoire restent mal connues des entreprises. Le prêt de personnel, les parcours inter-entreprises, le groupement d’employeurs… sont encore méconnus ou considérés comme trop complexes à mettre en œuvre sans accompagnement. Quelques enseignements de nos actions po Pour soutenir la création d’emplois, l’appui aux entreprises s’est, ces dernières années, essentiellement centré sur la phase de recrutement. L’accompagnement a ainsi porté en priorité sur l’aide à la définition des profils de poste, au déroulement de la phase de recrutement proprement dite ou encore à l’accueil du nouvel embauché. Nécessaire, l’outillage sur ces questions demande cependant à être complété. Les expériences montrent en effet que la capacité à créer des emplois de qualité se joue en complément via l'intégration dans la durée des salariés dans l’entreprise, la formation au poste de travail, les coopérations dans les équipes, l'amélioration des conditions de travail, la gestion de parcours professionnels… L’appui à la structuration d’une politique de gestion des ressources humaines intégrant ces différents aspects constitue un facteur clé de création d’emplois durables dans les PME. Une telle structuration implique des évolutions des pratiques de management, notamment pour les plus petites entreprises dans lesquelles les compétences des employeurs relèvent souvent davantage de l’expertise ou du savoir-faire technique que des compétences de gestion du capital humain. Les problèmes récurrents de l’insertion, des difficultés de l’apprentissage et du maintien en emploi reposent, par ailleurs la question des modalités de formation professionnelle (plus innovantes, adaptées aux nouveaux besoins et usages…). A condition d’être conçue avec les acteurs internes et de s’appuyer sur une organisation du travail adaptée, la formation au poste de travail peut constituer un levier d’amélioration de la qualité de l’emploi. Les situations de travail concrètes ont en effet des dimensions formatrices et les coopérations au travail peuvent contribuer à la montée en compétences individuelle. Une meilleure connaissance des effets des formes d'emploi atypiques (contrats courts, intérim, temps partiel, multisalariat, temps partagé…) ainsi que l'amélioration des pratiques de GRH des entreprises qui y ont recours, notamment dans la sous-traitance ou des secteurs clés comme la logistique et le tourisme sont enfin, d’autres pistes d’amélioration à travailler avec les acteurs de l’emploi et de l’appui RH pour créer des parcours professionnels et des emplois durables. Cas de territoire En Ardèche méridionale, des acteurs locaux (élus, consulaires, Maison de l’emploi et de la formation, entreprises, chargés de mission économie-emploiformation, Direccte…) souhaitent soutenir le développement de l’économie de proximité pour favoriser le développement d’emplois non délocalisables. Ils souhaitent cependant prévenir les problèmes de qualité de l’emploi et de qualité de vie qui peuvent y être associés (turn-over, précarité, problèmes d’accès à la formation, de transitions professionnelles…). Parmi les pistes d’action mises en oeuvre pour y remédier : permettre la reconversion des saisonniers, attirer les cadres, développer la pluriactivité sur le territoire, mettre en place un CDI emploi-formation pour les saisonniers de la branche hôtellerie... L’expression « formes d’emplois atypique »s désigne les modalités d’emploi autres que le CDI à plein temps pour un employeur 2 Juillet 2016 3 Nombre d’emplois créés au global, par type de population, proportion d’activités nouvelles… Les critères quantitatifs sont souvent privilégiés pour évaluer les actions locales d’appui à la création d’emploi et au développement économique. Pour obtenir des résultats durables, il semble utile de les compléter chaque fois que possible par un regard sur la qualité des emplois créés. Juillet 2016 4 2 Accompagner les mutations… par des approches centrées sur la montée en compétences des salariés… mais pas seulement ! Modernisation de l’appareil productif, transformations numériques, paliers de croissance… les entreprises d’Auvergne Rhône-Alpes doivent gérer à un rythme soutenu des projets de changement stratégiques pour leur développement et celui du territoire. L’accompagnement du changement dans les PME-TPE revêt, dans ce contexte, une importance majeure pour sécuriser les effets des investissements réalisés. Zoom : filière bois 2 nde transformation Secteur en forte évolution, la filière bois fait face à des enjeux de compétitivité forts (le prix du bois construit au m2 est deux fois supérieur au prix allemand). Pour améliorer la performance des entreprises, les acteurs du branche bois dans le Massif central se sont réunis pour anticiper et accompagner les évolutions stratégiques : modernisation des équipements, rationalisation de la production (en atelier plutôt que sur chantier), accompagnement du passage de paliers de croissance de 19 à 20 salariés… L’implication de telles transformations sur l’organisation du travail, la mise en place d’un encadrement intermédiaire et les ressources humaines sont dans ce cadre prises en compte. • • • 5 constats Plusieurs caractéristiques du tissu économique d’Auvergne-Rhône-Alpes contribuent à faire de l’appui à la conduite des changements dans les PME un enjeu pour les années à venir : 1. 2ème région industrielle de France, Auvergne Rhône-Alpes se veut pionnière dans le soutien à la réindustrialisation du territoire et la modernisation des appareils productifs. Elle prépare à ce titre le déploiement du plan « Industrie du futur » qui doit permettre aux industries de mettre en œuvre de nouvelles technologies, d’adopter des organisations du travail agiles et centrées sur l’humain, de s’adapter aux évolutions de l’offre et des modèles de production… 2. Dans un contexte de recherche de compétitivité, des secteurs d’activité stratégiques sont confrontés à des évolutions profondes des métiers. La chimie verte, le textile, les circuits courts dans l’agro-alimentaire pour ne citer que ces exemples doivent dans le même temps piloter des évolutions majeures de leur organisation productive et réorienter leurs emplois et les compétences. 3. Dans la 1er région française de sous-traitance industrielle, les TPE-PME sont particulièrement concernées par les évolutions organisationnelles et techniques impulsées (ou imposées) par les donneurs d’ordres. C’est le cas des évolutions concernant l’adoption de normes de qualité, de démarches de performance ou encore de nouveaux process de production susceptibles de transformer en profondeur les organisations de travail. 4. Dans une région où la moyenne des entreprises compte 14 salariés, l’accompagnement des changements s’inscrit, plus largement, comme une composante centrale de l’appui aux PME-TPE pour les raisons suivantes : Les petites entreprises disposent très rarement de compétences internes en conduite de projet de changement. Elles sont encore nombreuses à devoir adapter leur organisation aux transformations numériques. Le franchissement de paliers de croissance et les processus de cession et reprises se révèlent souvent des facteurs de fragilisation. Juillet 2016 5 5. Les successions de réorganisation ou de transformations d’entreprises insuffisamment accompagnées sont à l’origine de phénomènes de mal-être et de désengagement des salariés. L’accélération des changements peut dans certains cas se traduire par des risques psychosociaux, une dégradation des relations sociales voire des difficultés de maintien dans l’emploi pour les salariés dont les compétences n'évoluent pas au rythme des changements. Elle affecte alors la performance de l’entreprise. Quelques enseignements de nos actions po La conduite de projet est souvent en cause dans les échecs des projets de transformation. On relève parmi les facteurs d’échec : • des conduites de projet descendantes qui n’associent pas - ou peu les équipes concernées, • des conduites de projet dictées par les fournisseurs ou les donneurs d’ordre sans prendre en compte les spécificités de l’entreprise, • une anticipation insuffisante des modifications du travail et des évolutions des compétences que vont induire les projets concernés, • l’absence de phases d’ajustement dans le déploiement du projet autres qu’en cas de crise, • un volet d’accompagnement RH souvent réduit à des actions de communication en direction des salariés. A côté d’un écosystème régional d’appui aux changements en entreprises robuste sur les volets techniques et organisationnels, le volet RH se concentre sur la communication et sur les enjeux de compétences (formation, évolution, mobilités des salariés concernés par les changements). Cette dernière dimension est essentielle pour anticiper les évolutions des savoir-faire, des pratiques, voire des métiers liés à des projets de changement. Elle demande cependant à être complétée. Zoom : transformations numériques Si elle constitue un enjeu incontournable de modernisation et recèle un fort potentiel d’innovation, de productivité et de performance, la transformation numérique peut aussi générer de l’intensification du travail, des contraintes excessives de réactivité, des phénomènes d’individualisation du travail ou de désincarnation du management. Pour pérenniser les transformations numériques, l’appui aux PME a tout intérêt à promouvoir l’accompagnement des processus de changement centrés sur les usages, le dialogue et les dynamiques collaboratives autour du projet. Levier d’efficience et de sécurisation des investissements, la prise en compte du facteur humain dans l’accompagnement des changements nécessite en complément : • d’associer réellement les salariés (en amont, pendant leur déploiement d’un projet et après), • de rendre possible le dialogue autour du projet (dialogue dans les équipes, au niveau du management, dialogue social)… • de favoriser les coopérations autour du projet, • de favoriser le renouvellement des pratiques managériales à l’occasion du projet (formation des manageurs à l’accompagnement du changement, échanges de pratiques …), De telles démarches présentent le double intérêt de pérenniser les résultats des projets d’investissement et de les transformer en opportunités d’amélioration des conditions de travail et des relations sociales. Elles méritent aujourd’hui d’être renforcées en Auvergne-Rhône Alpes pour répondre à l’ampleur des transformations attendues dans les années qui viennent. Juillet 2016 6 3 Soutenir la performance et l’innovation des entreprises en adoptant une vision globale (performance financière, économique, sociale, innovation technique, organisationnelle, sociale…) Soutenues par les pouvoirs publics et les branches, diffusées via les donneurs d’ordre, les démarches de performance, d’excellence opérationnelle ou encore d’amélioration continue se généralisent dans les entreprises et les services. Parce qu’elle accueille déjà des actions visant à mieux articuler qualité de vie au travail et performance ainsi que des actions de soutien à toutes les formes d’innovation, la région Auvergne Rhône-Alpes est en mesure de soutenir sur son territoire des pratiques favorables à la performance globale des entreprises. 5 constats 1. L’offre d’appui aux PME : entre promesse de gains rapides et mise en place de démarches progressives Cas d’entreprise Cette entreprise industrielle fait le constat que les problèmes récurrents de flux auxquels sont confrontées ses équipes ne sont pas réglés malgré la mise en place d’une démarche d’amélioration continue. La raison ? La démarche est dans les faits centrée exclusivement sur la relation l’amélioration de client. Les salariés ne trouvant pas la place d’exposer dans ce cadre leurs difficultés quotidiennes. Pour y remédier, les contours de la démarche sont modifiés avec les équipes pour mieux prendre en compte es questions liées à la qualité du travail. Juillet 2016 Deux visions principales émergent de l’offre d’accompagnement proposée aux PME en matière de performance : la promotion de procédures standardisées, susceptibles de produire des gains économiques rapides d’une part, la recherche des solutions progressives, adaptées aux spécificités des entreprises (via notamment la présence de l’encadrement sur le terrain, la participation des salariés…) de l’autre. Quand les entreprises font le choix d’une recherche de gains rapides et d’une lecture rigide des principes de performance, nous observons une réduction de l’autonomie des équipes et des marges de manoeuvre de l’encadrement, avec à la clé des problèmes de mal-être et de santé, des difficultés dans les relations sociales en entreprises. 2. Des difficultés à pérenniser les résultats des démarches de performance Les acteurs du conseil et des entreprises soulignent les difficultés récurrentes auxquels ils font face pour installer les démarches de performance dans la durée. Les gains économiques obtenus à court terme se révèlent ainsi difficiles à maintenir dans le temps du fait de phénomènes de résistance au changement tant de la part du management (notamment intermédiaire) que des opérateurs. 3. Des conceptions de l’innovation plus larges et plus ouvertes Si les conceptions de l’innovation s’élargissent (comme en atteste le nouveau référentiel de BPI France sur le sujet), l’innovation reste encore vue, dans la pratique, comme étant majoritairement technique, parfois organisationnelle - mais rarement sociale. Les évolutions des modèles de production, le développement de la conception orientée par les usages, l’ouverture à de nouvelles parties prenantes, la prise en compte des attentes des salariés incitent cependant les entreprises à enrichir progressivement leurs visions et pratiques de l’innovation. 7 4. Une demande croissante de modèles enrichis de la performance et de l’innovation Ces dernières années, la compétition économique couplée aux incidences de la financiarisation a conduit les entreprises à adopter des organisations laissant peu de place à l'initiative et à l'expression des salariés. Conscientes des difficultés qui en découlent (phénomènes de résistance au changement, désengagement des salariés, perte de créativité…), un nombre croissant d’entreprises cherchent désormais à déployer des démarches de performance globale intégrant davantage le facteur humain. Nous sommes ainsi de plus en plus souvent sollicités par des PME qui veulent améliorer leur compétitivité et leur capacité d’innovation en adoptant des organisations du travail moins rigides laissant plus d’autonomie aux salariés. 5. Auvergne Rhône-Alpes pionnière dans l’articulation performance et qualité de vie au travail ? Dans le cadre de projets partenariaux régionaux associant des acteurs de la performance et de la santé au travail, ou de dispositifs expérimentaux sur l’innovation sociale, les pouvoirs publics d’Auvergne Rhône-Alpes accompagnent d’ores et déjà des projets pilotes visant à mettre en œuvre dans les entreprise des conceptions enrichies de la performance et de l’innovation qui prennent en compte le facteur humain. Quelques enseignements de nos actions Un diagnostic réalisé en 2016 auprès de 1 500 employeurs dans le cadre de Plan PME montre une corrélation entre la performance des entreprises et leur maturité en matière de gestion des ressources humaines. Les expériences montrent, plus largement, que la prise en compte du facteur humain est un facteur Prendre en compte le facteur humain passe notamment par une meilleure association des salariés et des manageurs à la définition des enjeux de performance et par une évolution du modèle managérial visant à favoriser les coopérations dans les équipes de travail. La volonté de mieux articuler performance et qualité de vie au travail et de stimuler l’innovation sous toute ses formes implique également de travailler à l’amélioration du dialogue dans l’entreprise (au niveau de l’équipe, du management, du dialogue social) afin de traiter des questions concrètes du travail, de prendre en compte les propositions de tous les acteurs, et de s’assurer régulièrement de la faisabilité des projets. Elle invite également à faciliter l’élaboration au quotidien des compromis en prenant en compte les différents enjeux de l’entreprise. Juillet 2016 8 4 Préserver le capital humain : des salariés en bonne santé, compétents et motivés, tout au long de leur carrière… Allongement de la vie professionnelle, difficultés de maintien dans l’emploi, cohabitation de trois générations au travail, nouvelles aspirations des individus… Les évolutions sociétales et les évolutions du travail s’impactent mutuellement. Les entreprises ont encore du mal à prendre en compte les effets de ces changements. 5 constats Cas d’entreprise Confronté à un taux d’absentéisme important et à une hausse des cas d’inaptitudes médicales, ce directeur d’abattoir est fataliste : dans son entreprise, les métiers sont durs, le turn-over, il doit « faire avec ». En participant à une action collective de branche, il prend conscience que d’autres entreprises parviennent, dans des situations comparables, à réduire l’absentéisme et les maladies professionnelles en adoptant, par exemple, des mesures portant sur l’organisation des tutorats, la construction de parcours professionnels, des actions de réduction de la pénibilité… Avec son responsable RH et le délégué du personnel, le directeur démarre une démarche en ce sens associant les salariés. 1. Les effets de l’allongement de la vie professionnelle sont encore peu pris en compte. Les effets des différentes réformes des retraites sont désormais perceptibles : jamais le taux d’activité des séniors n’a ainsi été aussi fort. Cette progression s’accompagne cependant d’un taux de chômage qui reste élevé pour les plus de 50 ans et, dans certaines entreprises, de taux d’absentéisme importants. Est-on conscient pour autant qu’un salarié âgé de 50 ans a désormais encore 30% de son parcours professionnel devant lui ? Une action collective accompagnant de 2013 à 2015 des entreprises de l’agroalimentaire a montré à quel point les modifications qui découlent de l’allongement de la vie professionnelle restent difficiles à appréhender - voire taboues - pour les entreprises comme pour les salariés. 2. Les entreprises prennent généralement conscience des effets du vieillissement au travail « dans l’urgence ». Départs en retraite des salariés détenant les savoir-faire, absentéisme lié à des problèmes de santé, désengagement, rupture d’activité pour inaptitudes… C’est souvent « au pied du mur » qu’entreprises et salariés prennent conscience des effets du vieillissement au travail quand ils sont couplés avec des organisations du travail rigides et/ou des conditions de travail difficiles. 3. Les mesures mises en oeuvre sont généralement centrées sur l’aspect individuel. Amélioration du poste de travail, mesures de reclassement, aménagement des temps de travail… face à l’allongement de la vie professionnelle, les entreprises adoptent le plus souvent des actions individuelles. Nécessaires les investissements réalisés dans ce cadre ne permettent cependant pas d’agir de manière préventive pour tous les salariés. 4. L’allongement de la vie professionnelle se traduit également par la cohabitation de plusieurs générations au travail. Les entreprises accueillent désormais des représentants de 3 générations au travail avec des attentes différenciées en termes d’évolution, de modes de travail, d’articulation des temps. Elles doivent favoriser l’intégration des plus jeunes tout en veillant au transfert de connaissances des plus âgés. Juillet 2016 9 5. Une prise de consciente progressive De 2010 à 2013, une succession d’obligations réglementaires a incité les entreprises à mieux prendre en compte les « populations au travail » (plan seniors, pénibilité, égalité professionnelle femmes-hommes…). Beaucoup d’entreprises ont cependant, dans ce cadre, fait le choix du formalisme réglementaire : plans d’action construits par les directions, sans ancrage « terrain », peu de liens entre les différents plans d’action. Il en ressort que les membres du management de l’entreprise perçoivent encore mal les enjeux de parcours des salariés, de mixité des âges et des sexes. Quelques enseignements de nos actions Mettre en place dans l’entreprise des mesures isolées pour favoriser l’accueil des jeunes, le maintien en emploi des seniors, la réduction de la pénibilité pour les saisonniers, la construction de parcours professionnels pour les femmes... sans convergence fait difficilement sens pour la politique et la stratégie globale de l’entreprise. L’allongement de la vie professionnelle invite désormais les entreprises à adopter une vision RH plus large : quelle politique globale de qualité de vie au travail mettre en œuvre pour que les salariés travaillent en bonne santé, en restant compétents et motivés tout au long de leur vie professionnelle ? La prévention des risques professionnels et la gestion des RH constituent les deux leviers déterminants pour agir en ce sens. Renforcer ces deux volets dans l’appui proposé aux PME est nécessaire pour les aider à prévenir les phénomènes de vieillissement précoce, de désengagement, de turn over et les aider à progresser vers des mesures favorisant l’amélioration des conditions de travail et la construction de parcours professionnels pour tous les salariés. Un axe de travail important consiste, dans ce cadre, à professionnaliser la fonction management en PME et TPE pour faciliter l’acquisition de compétences par les salariés à toutes les étapes de leurs parcours. Le maintien dans l’emploi devient, par ailleurs, un enjeu régional. 9 500 licenciements pour cause d’inaptitudes médicales (troubles musculo-squelettiques, problèmes de santé mentale…) sont déclarés chaque année en région Auvergne Rhône-Alpes. Avec une réelle difficulté pour les entreprises à trouver des solutions une fois l’inaptitude prononcée. Pour faire face aux enjeux humains et financiers qui en découlent, les mesures d’accompagnement des PME doivent permettre aux entreprises d’agir le plus tôt possible, avant l’avis d’inaptitude. Le rapprochement des acteurs de la santé au travail et du maintien dans l’emploi est à soutenir dans cet objectif. Juillet 2016 10 5 Favoriser le développement territorial en accompagnant les dynamiques d’acteurs Dans un contexte de concurrence internationale, les territoires sont dorénavant porteurs de facteurs de compétitivité pour les entreprises : infrastructures, centres de recherche et de formation, qualité des services, proximité des sous-traitants et des fournisseurs… mais aussi de facteurs de qualité de vie au travail : mode de transport, accès à la formation, crèches… 5 constats 1. Des difficultés à améliorer durablement l’attractivité des territoires Des écarts croissants apparaissent entre des territoires (plutôt ruraux) souffrant de problèmes d'attractivité et les territoires urbains plus favorisés, accueillant une population plus jeune et plus qualifiée. La fracture numérique peut accroître ces inégalités. Quand elles prennent place, les actions de revitalisation et de marketing territorial produisent des effets qui s’avèrent difficiles à maintenir dans la durée. 2. Les politiques publiques d'appui à l’insertion (volet accès aux entreprises) et à la création de l'emploi en entreprise se centrent, le plus souvent, sur : • • • le soutien à la phase de recrutement, l'appui aux publics en difficulté, et l'amélioration de l'accès et de la qualité des formations. 3. Les préoccupations d’insertion ou de retour à l’emploi se doublent d’une volonté, plus forte, de renforcement du rôle des acteurs locaux dans l’accompagnement à la structuration de la GRH dans les entreprises. L’enjeu est ainsi dorénavant de répondre à la fois : • • • aux démarches d’entreprises, de pôles de compétitivité, de branches, de filières… aux besoins de salariés dans une recherche de pertinence de parcours professionnels (promotion de la VAE, déploiement des outils d’accès à la formation…), aux démarches de territoires qui veulent anticiper les mutations incontournables et mieux maîtriser leur devenir. Cas de territoire Le bassin sigolénois, dans l’Yssingelais, est marqué par une présence très forte des entreprises de la plasturgie. Le plateau génère 40% de la production française de film plastique et emploie près de 3 000 salariés. Ce secteur est confronté depuis plusieurs années à des difficultés de recrutement, et de maintien/développement des compétences d’une population généralement peu qualifiée. Trois enjeux sont mis en avant pour la branche et pour le territoire : • l’amélioration des conditions de travail, • le recrutement et la formation • la création d’un espace de dialogue territorial, En octobre 2015, un groupe de travail paritaire s’est mis en place pour construire des actions sur les thèmes suivants : • GPEC et attractivité des métiers, • formation initiale et continue, • réflexion sur la stratégie industrielle des entreprises. 4. Les appuis proposés aux entreprises sont globalement segmentés. Appui au recrutement, à l’élaboration d’un plan de formation, financement d’un équipement… les entreprises se voient souvent proposer dans leur écosystèmes des accompagnements adaptés à leurs besoins mais segmentés et ne permettant pas suffisamment d’établir des liens entre les dimensions du développement économique, de Juillet 2016 11 l’emploi, de la formation, des RH. Transverse, la prise en compte du facteur humain n’est pas toujours développée. 5. Il reste difficile pour les acteurs territoriaux d’intégrer les dimensions GRH et qualité de vie au travail à leurs actions. Les initiatives conduites dans de nombreux secteurs (services à la personne, logistique, industrie agroalimentaire etc.) le montrent : gérer efficacement l’emploi, les difficultés de recrutement, l’apprentissage… implique dorénavant de prendre en compte la qualité de vie au travail et les pratiques de management associées. Il reste cependant nécessaire d’appuyer les acteurs territoriaux pour qu’ils parviennent à travailler ces dimensions dans leurs actions locales en associant les entreprises. Quelques enseignements de nos actions Progresser sur un territoire sur les questions de recrutement, de fidélisation, de montée en compétences, de parcours et de mobilités des individus implique d’articuler les projets de développement économique des entreprises avec la prise en compte des conditions de travail et d’emploi. La recherche de flexibilité des entreprises appelle dorénavant une plus grande adaptabilité des territoires. Accompagner et gérer des transitions professionnelles suppose ainsi des dispositifs fins, proches des opportunités locales et coordonnant plusieurs acteurs. Cette nouvelle donne pose directement la question de l'organisation des acteurs territoriaux et les liens entre thématiques concernées : développement économique, aménagement du territoire, ressources humaines disponibles, infrastructures de formation, mobilisation de la population active… Elle passe par des acteurs qui cherchent à se coordonner et une animation centrée sur la prise en compte des besoins des entreprises. L’anticipation nécessaire aux territoires pour se développer se nourrit de compréhension des évolutions en cours, dont la lecture statistique n’est qu’un des aspects. La confrontation de points de vue (acteurs des entreprises locales, de l’emploi, du développement, partenaires sociaux…), la détection de signaux faibles permettent de nourrir une fonction locale de prospective qui doit être prolongée par un travail collectif pour proposer des actions adaptées. Cette capacité d’anticipation et d’adaptation permanente aux évolutions des activités économiques, de leurs technologies support mérite d’être soutenue et outillée. Juillet 2016 12 Recommandations Assurer le développement économique et le développement de l’emploi, c’est aider les entreprises tout à la fois à améliorer leur compétitivité, à répondre à leurs difficultés de recrutement et à enrichir leur politique d’innovation. Pour cela, il nous paraît utile d’agir à trois niveaux : • dans les entreprises, en accompagnant les évolutions nécessaires des pratiques managériales et des politiques de gestion des RH, • dans l’environnement régional, en favorisant la création d’un éco-système capable de prendre en compte et d’articuler l’ensemble des dimensions du développement (économie, emploi, facteur humain en entreprise) et de mobiliser de façon concertée et efficace les ressources nécessaires, • dans l’éco-système régional par des politiques publiques favorisant le dialogue, la concertation et l’apprentissage de tous les acteurs, de façon à trouver de réels effets leviers au-delà des aides ponctuelles aux entreprises, territoires ou secteurs (nouvelles alliance privé/public, …) 1. Au niveau des entreprises 1. Difficultés de recrutement et qualité des emplois • Enjeu : favoriser une gestion plus qualitative des emplois et des compétences, des pratiques d’intégration et de fidélisation soucieuses des conditions de travail et des actions de formation au plus près des postes de travail. 2. Pratiques de performance et facteur humain • Enjeu : faire de la qualité de vie au travail un facteur de performance pour renforcer la compétitivité, répondre à l’évolution des attentes des salariés et aux contraintes de pénibilité face à l’allongement de la vie professionnelle. Le projet Space visant à déployer des démarches Lean auprès des sous-traitants de l’aéronautique a intégré un volet d’appui sur les RH en Rhône-Alpes. Les entreprises qui en ont bénéficié ont apprécié les apports de type formation répondant à certaines de leurs difficultés mais regretté qu’ils ne soient pas intégrés en amont des accompagnements proposés. 3. Innovation et Innovation sociale • Enjeu : aider les entreprises à développer des produits et services répondant aux attentes sociales et fiabiliser les projets d’innovation par une meilleure prise en compte de la qualité de vie au travail. Préconisations : Aider les entreprises à mieux prendre en compte le facteur humain et la qualité de vie au travail dans leurs pratiques de management et de gestion des parcours, les démarches performance, les projets de changement, les politiques d’innovation... Cet appui aux PME peut être proposé : • de façon intégrée dans le cadre des programmes d’aide au développement économique et à la modernisation des PME, • en couplant l’obtention d’aides directes à un appui-conseil pour accompagner les entreprises. Juillet 2016 13 2. Au niveau de l’écosystème 1. Développement économique et approche globale de l’entreprise • Enjeu : s’organiser entre acteurs pour permettre aux entreprises de se tourner vers un écosystème capable d’apporter une offre intégrée d’accompagnement prenant en compte l’ensemble de leurs besoins. 2. Aides aux entreprises et effets de levier • Enjeu : améliorer l’efficacité des aides aux entreprises en privilégiant des approches globales et collectives (dans les PME, les secteurs et filières, localement). Préconisations : • Renforcer l’appui aux ressources humaines sur des secteurs à forte valeur-ajoutée et/ou porteurs d’emplois : logistique, SAP, aérospatial, automobile, électronique et Informatique… • Favoriser le rapprochement entre acteurs de l’appui aux PME pour proposer aux entreprises des accompagnements articulant volets économique, emploi-formation et prise en compte du facteur humain / ressources humaines. • Mieux intégrer les questions de qualité de l’emploi dans les démarches de développement économique. Par exemple, favoriser les approches qualitatives de l’emploi dans les initiatives de soutien à l’économie de proximité. • Rechercher les articulations entre les différents dispositifs : par exemple articuler les programmes d’aide au développement économique avec l’action des COEF (Contrats objectifs emploi formation) pour mieux prendre en compte le lien avec l’emploi et le facteur humain, favoriser le développement de la GPEC-Territoriale via les COEF. 3. Au niveau des politiques publiques Les politiques publiques ont un rôle à jouer dans la définition des orientations favorables à la performance globale des entreprises, la construction des dispositifs, les mesures d’accompagnement mais aussi dans le rapprochement des acteurs. Politique publique et animation d’acteurs Enjeu : fiabiliser les politiques de développement économique, de l’emploi et de l’innovation par des initiatives susceptibles de favoriser voire d’animer le rapprochement entre : • Les acteurs de l’économie, de l’emploi, de la formation, de l’innovation, ressources humaines, du dialogue social • Les acteurs des filières stratégiques • Les acteurs de la recherche et de l’entreprise • … La plaine de l’Ain peine à capter et fidéliser les salariés (plutôt attirés par les bassins lyonnais et grenoblois). Afin d’aider ses entreprises à recruter et fidéliser leurs salariés, le Parc Industriel de la Plaine de l’Ain a engagé plusieurs initiatives (crèches, espaces de formation). Ces actions ont pu naître grâce à la qualité du dialogue social entre représentants de salariés et des employeurs locaux. Ces actions ont été étroitement encouragées et suivies par l’Etat et la Région. Préconisations : • Favoriser l’émergence d’espaces de concertation entre acteurs de l’économie, de l’emploi, des RH et de l’innovation pour construire des réponses adaptés aux défis régionaux. • Soutenir dans ce cadre les initiatives de dialogue social à différents niveaux • Appuyer l’action de la Région sur des structures relais capable de construire et d’animer les échanges entre acteurs locaux et régionaux Juillet 2016 14 Juillet 2016 15 Qui sommes-nous ? Emanation des partenaires sociaux régionaux et représentante régionale du réseau de l’Anact, Aravis-Aract Auvergne Rhône-Alpes 3 accompagne les entreprises pour améliorer, par des démarches innovantes, les conditions de travail et en faire un levier de performance. L’association porte l’idée que la prise en compte des conditions de travail et des ressources humaines ainsi que le dialogue à tous les niveaux de l’entreprise sont des conditions... • de la performance des entreprises dans un contexte de concurrence exacerbée, • de la création d’emplois durables, • et du développement économique des territoires. Elle poursuit une triple mission • d’accompagnement des PME-TPE, • d’appui et conseil aux pouvoirs publics, • de diffusion de connaissances, d’outils et de méthodes. Aravis-Aract Auvergne Rhône-Alpes 14 rue Passet, 69007 Lyon – 04 37 65 49 70 2 avenue Léonard de Vinci - 63000 Clermont-Ferrand –04 73 44 35 35 www.aravis.aract.fr www.auvergne.aract.fr 3 Signature provisoire. Aravis et l’Aract Auvergne ont fusionné au 1er janvier 2016 Juillet 2016 16 Juillet 2016 17