(JNRDM) 2001
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Conception d’un Amplificateur Optique à Semi-conducteurs de Puissance Agnès Verdier, Sophie Barbet, Romain Brenot III-V Lab 1, Avenue A. Fresnel 91767 Palaiseau Cedex, France E-mail : [email protected] Résumé Porté par le succès des réseaux sociaux, de la vidéo à la demande, et par la multiplication des plateformes mobiles de contenus multimédias, le trafic de données sur Internet continue de croitre chaque année. Afin de répondre à ce besoin d’augmentation du trafic de données, nos travaux visent à augmenter la capacité des systèmes de transmission actuels en développant et en industrialisant un nouvel amplificateur optique à semi-conducteur de large bande passante. Cet amplificateur optique doit répondre à des contraintes industrielles (compacité, consommation, fiabilité, coût…) avec des performances de gain (>15dB, >100nm), de puissance de sortie et de saturation (~20dBm). L’optimisation de ces paramètres dépend principalement des matériaux de la couche active, tout d’abord étudiés par simulation puis validés lors de mesures expérimentales. L'augmentation de la puissance de saturation implique par exemple une réduction du confinement optique dans le guide tout en conservant des pertes de propagation suffisamment faibles, puis en augmentant la longueur du SOA afin d'y injecter des courants importants. Cette optimisation est similaire à ce qui est nécessaire pour obtenir des lasers de forte puissance mais doit tenir compte des contraintes spécifiques à un amplificateur optique dues à l’injection d’un signal dans le composant. traitement antireflet afin d’éviter l’effet laser dans la cavité. Un signal lumineux se propageant dans le SOA est alors amplifié lors d’un unique passage [1]. En fonctionnement, le composant est polarisé de manière à injecter des porteurs électriques dans la cavité. Les photons incidents du signal se propageant dans le SOA forcent la recombinaison des porteurs électriques présents dans le composant, ce qui aboutit à l’émission de photons cohérents, identiques aux photons incidents. Ces composants sont utilisés pour des transmissions ou des opérations logiques de signaux optiques et opèrent pour des longueurs d’onde comprises entre 850 et 1650 nm. Ils présentent l’avantage d’une petite taille et d’une faible consommation électrique, ainsi que d’une large bande-passante en comparaison avec d’autres techniques d’amplification optique comme les EDFA. Ils sont cependant pénalisés par une puissance de sortie plus faible, un bruit plus important et des non-linéarités qui peuvent provoquer une déformation du signal transmis. De nombreux efforts ont été portés pour améliorer les performances des SOA afin d’étendre leur utilisation. Nous présentons dans cet article l’optimisation pour la puissance d’une nouvelle génération d’amplificateurs optiques à semi-conducteurs (SOA) de bande passante supérieure à 100 nm. 2.Description du composant et de sa 1. Introduction Les amplificateurs optiques à semi-conducteurs (SOA) sont des composants optoélectroniques constitués d’une cavité optique amplificatrice, généralement composée de matériaux semi-conducteurs III-V. La structure est voisine de celle d’un laser Fabry-Pérot mais les deux facettes du guide d’onde bénéficient d’un fabrication 2.1. Ruban Un amplificateur optique à semi-conducteurs équivaut à une diode PiN polarisée en direct. Afin de favoriser l’injection du courant dans le composant, le guide d’onde est enterré et le ruban est recouvert de phosphure d’indium dopé p (InP - p) comme illustré sur la Figure 1. La zone active, où se produit l’amplification n’est pas intentionnellement dopée (nid), mais en dessous de celleci le substrat est dopé n (InP - n). La circulation du courant le long des flancs du ruban est bloquée par l’ajout de matériau isolant pour minimiser les pertes sur les côtés du composant. Les composants présentés ici ont un ruban de 4.5µm de large et 4mm de long. Ils sont tiltés à 7° et pourvus de traitement antireflet des deux côtés, ce qui porte la réflectivité sur les facettes à -60dB et empêche l’effet laser dans la cavité. déjà utilisées pour les lasers de puissance [4] [5] et développées par Juodawlkis et Morito pour les SOA [6] [7]. La même démarche nous a conduits à adopter des composants de grande taille : 4.5 µm x 4 mm de surface pour la zone active, ce qui représente une taille importante. On cherche à présent à utiliser un deuxième levier en diminuant le confinement. Il a de plus été montré qu’un confinement faible permet de diminuer le facteur de bruit d’un SOA [8], cette démarche présente donc un double avantage. La présence d’une semelle sous la zone active permet de diminuer le confinement du mode optique dans la zone active et dans les couches supérieures d’InP-p [9]. Cela permet de diminuer les pertes dans le composant qui à 1.55µm sont principalement dues à la propagation dans les couches dopées p. Cependant la diminution du confinement dans la zone active correspond à une baisse de l’interaction entre le mode optique et le matériau à gain et donc à une baisse du gain. Il faut donc trouver un compromis entre la puissance de saturation et le gain du SOA. a) Figure 1. Schéma de la structure PiN enterrée 2.2. Zone active . Les performances du SOA sont atteintes grâce à une structure de 6 puits quantiques en alliage quaternaire GaInAsP réalisée en épitaxie par jets moléculaires en sources gazeuses (EJM-SG). D’autres types de structures sont possibles pour réaliser l’amplification dans un SOA. On trouve ainsi des SOA massifs, dans lesquels l’amplification a lieu dans la couche épaisse d’un seul matériau à gain, et des SOA à boîtes quantiques, qui piègent les porteurs de charge à des emplacements précis régulièrement répartis dans la cavité optique [2]. Les SOA à puits quantiques sont à mi-chemin entre ces deux structures : les porteurs sont confinés par les puits quantiques dans une direction seulement, et libres dans le plan perpendiculaire aux facettes. Cela permet d’obtenir un gain important à des courants assez faibles et d’atteindre des puissances intéressantes. 2.3. Semelle La puissance de saturation d’un SOA dépend du confinement du mode optique dans la zone active Γ, d’après la formule [3] : Dans l’équation (1), d et w représentent l’épaisseur et la largeur de la zone active, quand a et τ sont respectivement le gain différentiel et le temps de vie des porteurs dans le SOA. La puissance de saturation est définie pour le composant comme la puissance de sortie pour laquelle le gain a diminué de 3 dB à forte puissance optique injectée, et ce à un courant donné. Pour augmenter la puissance de saturation du composant il convient donc d’augmenter la taille de la zone active ou de diminuer le confinement, approches b) Figure 2. a) Semelle massive b) Semelle diluée La présence d’une semelle modifie de plus la géométrie du mode optique, il faut veiller à conserver un mode optique aussi circulaire que possible pour faciliter le couplage dans la fibre optique [10]. Deux approches sont étudiées : une semelle massive, représentée sur la Figure 2. a) et une semelle diluée, représentée sur la Figure 2. b). Pour la première il s’agit d’une couche épaisse d’alliage quaternaire GaInAsP d’indice de réfraction entre celui du substrat et celui des puits quantiques. La deuxième est une alternance de couches InP et d’alliage quaternaire GaInAsP afin d’ajuster plus finement l’indice de réfraction moyen de la semelle et de jouer sur la géométrie du mode optique. En effet en jouant sur l’épaisseur des couches de la semelle on peut obtenir n’importe quel indice de réfraction moyen compris entre celui de l’InP et de l’alliage GaInAsP. Dans les deux cas de figure les couches d’InP sous la zone active sont fortement dopées n afin de favoriser le passage du courant. 3.Simulations Une étude de simulations optiques est menée afin d’optimiser le design de la semelle. Deux paramètres sont étudiés, le confinement du mode optique dans la zone active et sa divergence. D’après l’équation (1) on sait que le confinement Γ doit être faible pour obtenir une puissance de saturation élevée. Cependant le gain du composant est proportionnel à Γ, il y a donc un compromis à réaliser sur la valeur du confinement. La valeur cible de l’étude est fixée à Γ = 4%, une valeur faible qui ne permet pas d’atteindre un gain matériau élevé. L’effet sur le gain total du composant est compensé par la longueur du SOA. La divergence intervient quant à elle pour le couplage du SOA en entrée et en sortie. Elle correspond à l’angle entre le centre du mode et la limite à l’infini du faisceau lumineux, donné par : Avec λ la longueur d’onde et ω0 le rayon du mode optique circulaire à la sortie du guide d’onde. Ainsi plus le mode est petit plus le faisceau lumineux s’élargit en espace libre. Le couplage doit se faire ici avec des fibres lentillées dont la taille de mode est de 2.5 µm, ce qui correspond à une divergence d’au moins 12°x12°. Il faut cependant veiller à ce que la divergence ne soit pas trop élevée car plus le mode est petit, moins le couplage est tolérant. Les simulations sont réalisées avec le logiciel Fimmwave qui permet d’obtenir la géométrie du mode optique pour un modèle de guide d’onde donné. a) de 2.9 % pour une divergence 14°x15°. Les structures sont élaborées en veillant à conserver un guide d’onde monomode. Parmi les deux structures la semelle massive est finalement privilégiée car elle présage d’un gain plus important et sa fabrication est plus aisée. Figure 4. Mesure de champ lointain du SOA 4. Caractérisation 4.1. Mesure de champ lointain On évalue la validité des simulations présentées au paragraphe précédent par la mesure de composants fabriqués avec la structure à semelle massive. On positionne en sortie du composant une caméra avec une ouverture en fente munie d’un système de rotation afin de réaliser une mesure de la répartition de puissance du mode en champ lointain. La mesure est réalisée en régime d’émission spontanée pour un courant de 500 mA. La Figure 4. montre l’image obtenue avec une rotation complète de la fente. Le champ lointain est faiblement elliptique ce qui correspond aux simulations. a) b) Figure 3. Simulation du mode optique a) pour une semelle massive b) pour une semelle diluée Pour une structure avec une semelle massive de 4 µm en quaternaire GaInAsP dont le pic d’émission est à 1030 nm, on obtient un confinement Γ dans la zone active de 3.9 %. La répartition de puissance du mode dans le guide est présentée Figure 3. a) et correspond à une divergence de 15°x19°. La structure avec semelle diluée comprend 19 couches de GaInAsP dont le pic d’émission est à 1170 nm. Leur épaisseur moyenne est de 80 nm, elle monte à 100 nm pour les six couches encadrant la couche épaisse d’InP où doit s’arrêter la gravure du ruban, et descend à 60 nm pour les trois couches les plus basses. Les couches d’InP qui alternent avec le quaternaire ont quant à elles toutes une épaisseur de 200 nm, exception faite de la couche où s’arrête la gravure qui mesure 250 nm. Pour cette structure, le confinement Γ dans la zone active est b) Figure 5. Mesure et simulation de champ lointain a) sur l’axe horizontal b) sur l’axe vertical La mesure sur les axes horizontaux et verticaux permet notamment d’obtenir la divergence du mode, qui est de 13°x17.5°. La Figure 5. montre la bonne corrélation des mesures de champ lointain et des simulations, l’écart avec la simulation est notamment le même sur les axes horizontaux et verticaux. quant à eux que ce type de structure est adapté pour des applications de puissance. Pour continuer dans cette voie d’autres types de structures doivent être envisagés : des SOA possédant des géométries MMI (Multi-Mode Interferometer) sont actuellement à l’étude afin d’augmenter encore la puissance de saturation en augmentant fortement la taille de la zone active. 4.2. Gain et puissance Les caractéristiques de puissance du SOA sont déterminées en régime d’émission stimulée. Un signal laser est envoyé dans le composant polarisé en courant où il est amplifié. Le signal lumineux en sortie du composant est collecté dans une fibre optique reliée à un analyseur de spectre optique. L’analyseur de spectre optique permet de lire la puissance émise par le composant en fonction de la longueur d’onde. La source en injection est un laser accordable, et le signal est polarisé en TE. La caractérisation des SOA est réalisée sur des composants montés sur des embases munies de thermistances, ce qui permet de réguler les composants en température avec un Peltier lors des différentes mesures. Ce système de refroidissement ne permet cependant pas une régulation efficace pour des courants élevés. Etant donnée la longueur des composants (4mm) l’injection de courant est faites avec deux pointes pour diminuer la résistance série. Figure 6. Courbe de gain puce du SOA à 1550 nm La Figure 6. montre le gain du SOA à 1550 nm pour un courant allant jusqu’à 3A et pour une puissance injectée de -25 dBm. La courbe de gain dépasse les 15 dB à partir de 1.5 A mais la pente demeure faible à cause d’effets thermiques. La mesure de la puissance de saturation à 1500 mA pour une régulation en température à 20°C donne quant à elle une valeur supérieure à 25 dBm. 5.Conclusions Nous avons validé l’ajout d’une semelle sous la zone active à des fins d’optimisation des performances de composants de puissance. Une étude en simulation de deux types de semelle a permis la conception d’une structure de faible confinement dans la zone active et dans le matériau à perte au-dessus de celle-ci. La divergence a elle aussi été calculée pour optimiser le couplage. Les résultats obtenus avec les composants réalisés à partir de cette structure valident les prévisions établies pour la divergence du mode. La puissance de saturation élevée ainsi que le gain à 15 dB confirment Références [1] M. J. Connelly, “Semiconductor Optical Amplifiers”, NewYork: Springer (2002). [2] T. Akiyama, M. Ekawa, M. 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