CLAUSE DE REPARATION « Enjeu économique et social
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CLAUSE DE REPARATION « Enjeu économique et social
CLAUSE DE REPARATION « Enjeu économique et social » Proposition de modification de la Directive 98/71/CE relative aux Dessins et modèles QU'EST-CE QUE LA « CLAUSE DE REPARATION » ? Appliquée à l'automobile, c’est la liberté de fabriquer et commercialiser les pièces dites «visibles» des véhicules, principalement les pièces de carrosserie, le vitrage, les rétroviseurs, les phares et les feux, dans la mesure où elles sont destinées à la réparation des véhicules. Cette proposition ne remet aucunement en cause les droits des constructeurs automobiles sur la forme et le dessin de leurs véhicules neufs et sur les pièces détachées des véhicules neufs. Cette protection est parfaitement légitime dans le cadre de la création d’un véhicule, mais ne l’est plus lorsqu'il s'agit de produits destinés à la rechange et la réparation automobile. En étant protégés pour la réalisation de leurs véhicules neufs, les constructeurs automobiles peuvent en effet se défendre contre la copie des constructeurs concurrents et bénéficient ainsi d'une totale protection juridique pour ce qui représente la majeure partie de leurs activités, la vente de véhicules neufs. Leur investissement de départ dans le design est ainsi protégé et l’innovation est récompensée par la vente de leurs véhicules. Les différents modèles des constructeurs étant concurrents entre eux au moment où le consommateur doit faire son choix, la protection de la forme du modèle de véhicule ne s'oppose donc en rien à l'exercice d'une libre concurrence qu'au contraire elle stimule. À l'inverse, la protection des dessins et modèles des pièces de rechange d'un véhicule destinées au marché secondaire de la réparation, aboutit à la création d'un monopole du constructeur sur la vente de toutes les pièces visibles de ce véhicule puisqu’il n’existe aucun produit alternatif pour remettre le véhicule endommagé dans son état d’origine. Les réparateurs indépendants sont ainsi obligés de s'approvisionner en pièces visibles au sein des réseaux des constructeurs, qui sont leurs concurrents, à des conditions tarifaires très pénalisantes voir même prohibitives. En outre, les distributeurs indépendants ne peuvent offrir un choix complet de pièces à leurs clients réparateurs et ne peuvent lutter commercialement contre les pratiques de certains constructeurs qui consistent à coupler les offres de pièces captives et des pièces concurrencées. Enfin, il n’est pas admissible qu’en raison de l’absence de concurrence sur les pièces captives, on observe des niveaux de remises qui sont descendus ces dernières années à 5% seulement pour certaines d’entre elles alors que l’on sait qu’à un tel niveau, le distributeur perd de l’argent sur chaque pièce vendue. Il n’est pas davantage acceptable que les prix de certaines pièces ait augmenté de plus de 100% en un an, tout simplement parce qu’il n’y avait aucune offre alternative possible à proposer aux consommateurs. Face à ce monopole et à ses effets néfastes pour les professionnels et les utilisateurs, plusieurs états ont mis fin à la protection des pièces de rechange destinées au marché secondaire et une dizaine de pays européens représentant près de 75% du parc européen de véhicules ont d’ores et déjà adopté la Clause de Réparation dans leur législation nationale. Les consommateurs français sont pénalisés alors que les consommateurs espagnols, belges, italiens etc…et même de fait les allemands depuis 2003, sont libres de faire jouer la concurrence. Ces pays étant frontaliers, on imagine fort bien les conséquences économiques pour les réparateurs et distributeurs français dans les régions françaises concernées : La valeur ajoutée de ces produits par chez nos voisins libéralisés. LA CLAUSE DE REPARATION VOTÉE PAR LE PARLEMENT EUROPEÉEN… Le Parlement Européen a adopté le 12 décembre 2007 à une écrasante majorité la proposition de la Commission Européenne du 14 septembre 2004 dite « Eurodesign » ou « Clause de Réparation » visant à supprimer le monopole des constructeurs sur les pièces détachées visibles des véhicules destinées à la réparation en l’assortissant d’une période de transition maximum de cinq ans. En application de la règle de la co-décision pour l’adoption des directives communautaires,le Conseil des Ministres de l’Union Européenne aurait dû se prononcer sur cette réforme 6 mois après le vote du Parlement. Or cette question est volontairement laissée hors de l’agenda du Conseil des Ministres, le statu quo continuant de bénéficier aux constructeurs titulaires du monopole. Depuis 2007, la Feda et ses alliés européens et français n'ont cessé d'agir auprès des décideurs publics européens et français pour voir adopter la clause de réparation. … EVOQUEE A DE NOMBREUSES REPRISE AU PARLEMENT FRANÇAIS. Dès 2008, la Feda tentait de faire adopter la clause de réparation dans la loi française à l'occasion des débats sur la loi de modernisation de l'économie. (Loi LME) En septembre 2011, les organisations 40 Millions d’Automobilistes, ANEA, FEDA, FNAA, FFC Réparateurs et UFC-Que-Choisir ont lancé un appel commun aux Parlementaires français via la plate-forme «libere-mon-auto.org» afin d’introduire en droit français une clause de réparation par la modification du code de la propriété intellectuelle sur les dessins et modèles et sur le droit d’auteur. Un long débat d’une heure a eu lieu le 5 octobre 2011 en 1ere lecture de la loi sur la consommation (loi Lefebvre) à l’Assemblée Nationale au terme duquel les amendements proposés ont finalement été rejetés. Un débat très animé a ensuite eu lieu en 1ere lecture au Sénat le 22 décembre 2011 à l’issue duquel un article 6 quater a été adopté demandant un rapport à l’observatoire des prix et des marges sur les prix pratiqués par les constructeurs sur les pièces captives et sur les opportunités pour l’activité économique qu’apporterait une clause de réparation. Le sénat, certainement conscient que les délocalisations de production continueront dans les années à venir a demandé que ce rapport se projette sur le moyen terme. Dans l’intervalle, l’Autorité de la Concurrence (ADLC) s’est saisie de cette question dans le cadre d’une vaste enquête sur le thème « Comment dynamiser la concurrence dans le secteur de l’après-vente automobile ? » Son rapport très complet, de 206 pages, rendu le 8 octobre 2012, répond pleinement à la demande du Sénat et conclut au fait que le monopole sur les pièces visibles destinées à la réparation est l’un des freins puissants à la concurrence sur ce marché. Elle constate que ce monopole n’est bon ni pour le consommateur, ni pour les professionnels, ni pour l’emploi. L’ADLC préconise alors une ouverture progressive et maîtrisée de ce marché en distinguant par type de pièces et dans un ordre inversement proportionnel à leur degré de captivité ceci afin de laisser au marché le temps de s’organiser. Seraient ainsi « libérés » immédiatement les vitrages et les optiques puis la deuxième année les rétroviseurs et les pare-chocs et à un horizon de cinq ans les pièces de tôlerie. D’autres modalités sont également envisagées par l’Autorité en particulier une ouverture du marché dans un premier temps pour les équipementiers d’origine pour arriver à une ouverture totale à moyen terme. Cependant, les pouvoirs publics, qui continuent d’être influencés par un lobbying forcené des constructeurs, tardent à prendre position et de nombreuses sociétés notamment de plasturgie automobile, paient le prix de cet attentisme en déposant leur bilan. Le 29 Janvier 2014, au Sénat, en 2ème lecture du projet de loi sur la consommation (Loi Hamon), les débats ont mis en évidence les contradictions profondes entre la pertinence des arguments des sénateurs demandant la fin du monopole sur les pièces visibles, basés sur la réalité de la situation économique, industrielle et sociale de la France et les réponses dogmatiques des derniers opposants à cette ouverture. Ainsi, malgré le rejet des amendements déposés, l'un des rapporteurs a admis qu'il fallait améliorer le fonctionnement du marché et que le gouvernement préparait des mesures précises. … RETIREE PAR LA COMMISSION DE BRUXELLES En raison de l'absence d'évolution du dossier Eurodesign au plan européen, notamment et principalement, du fait de l'opposition de la France, la Commission Européenne a décidé de retirer sa proposition d'introduction d'une clause de réparation pour les pièces visibles. Cette décision publiée au Journal Officiel de l'Union Européenne le 21 mai 2014, clôt temporairement au plan européen le processus commencé en 2004, mais ouvre immédiatement un nouveau volet à cette affaire en instruisant une étude d'impact d'une éventuelle mesure de libéralisation. UNE NOUVELLE ETUDE D'IMPACT DEMANDEE PAR LA COMMISSION DE BRUXELLES. Consciente que la mosaïque de législations actuelles conjuguée aux délocalisations des fabrications automobiles est un véritable frein économique pour la filière des pièces visibles, la Commission Européenne a demandé deux études distinctes concernant la protection des dessins et modèles, l'une relatives aux aspects économiques, la seconde relative aux aspects légaux de cette question. La première étude, rendue publique en juin 2015 recommande l'introduction d'une clause de réparation dans toutes les législations européennes. Parallèlement, la Feda et ses partenaires poursuivent également leur travail d'explication auprès des pouvoirs publics français pour faire adopter une clause de réparation dans le droit français de la propriété intellectuelle. Ainsi, la Feda et la FIEV, par deux amendements distincts mais rédigés en des termes identiques, ont demandé lors des débats sur la loi sur la croissance (Loi Macron) l'adoption d'une clause de réparation pour les pièces fabriquées par les équipementiers. Le ministre Emmanuel MACRON, tout en reconnaissant le caractère légitime de la mesure d'un point de vue consummériste s'y est à nouveau opposé considérant que "le moment" n'est peut être pas opportun". Les débats ont cependant montré que le réalisme commence à faire son chemin puisque plusieurs parlementaires ont clairement exprimé des arguments en faveur de la fin du monopole.