Het Hamiltoncomplex
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Het Hamiltoncomplex
FICHE SPECTACLE Het hamiltoncomplex ©Fred Debrock THÉÂTRE, Danse - DÈS 13 ANS- Durée 1h40 CONCEPTION ET Mise en scène Chorégraphie Lies Pauwels LisiEstaras Avec Création lumières Anne Coopman, Luna De Boos, Bruce Eelen, Zita Fransen, Lies Genné, Robine Goedheid, Liesbeth Houtain, Julia Krekels, Aline Moponami, Ans Schoepen, Emma Van Broeckhoven, Mona Van den Bossche, Lisa Van den Houte et Stefan Gota Frank Haesevoets Décor Sontag vzw (Gand) HetPaleis (Anvers) ChloéLamford Dramaturgie HannekeReiziger Production Costumes Dans le cadre du Next FESTIVAL Johanna Trudzinski En collaboration avec la Rose des Vents, scène nationale Lille métropole Grand Bleu, spectacle vivant pour les nouvelles générations 36 avenue Marx Dormoy – 59000 LILLE / 03.20.09.88.44 - www.legrandbleu.com - [email protected] 1 Sommaire (Qu’est-ce qu’il y a dans cette fiche spectacle… ?) Le spectacle Texte de présentation du spectacle p3 La metteuse en scène Son parcours et sa démarche de travail, ce qu’elle défend p4 Prolongements autour de Het Hamiltoncomplex 1/ Les représentations de l’adolescence p5 a) Général La période de l’adolescence Les tableaux La réinterprétation des contes : l’exemple du chaperon rouge p5 b) La figure de l’adolescence La publicité La photographie Au cinéma p7 2/ Le rapport au corps : la démarche de Lies Pauwels a) La question de l’identité et du genre L’interprétation des tableaux Le rapport aux autres 3/ Le temps qui passep 12 a) Le regard de l’adulte sur son adolescence Dans la photographie Dans la littérature p 10 p 10 p 12 On récapitule ! Pour ceux qui ont peu de temps … quelques pistes pour travailler le spectacle rapidement avant ou après votre venue… p 14 Annexes Annexe 1 Extrait du « Blé en herbe » Colette, 1923 Annexe 2 Extrait de « La Promesse de l’aube », Romain Gary, 1960 p 15 p 17 2 Le SPECTACLE Concentré de testostérone vs. treize jeunes filles en fleur. Sur scène, treize jeunes filles de treize ans, avec leur insouciance, leur capacité à changer d’apparence, d’humeur, d’idées. Elles jouent avec la vérité, avec les certitudes. De l’autre côté, un bodybuilder, symbole du pouvoir, de la force, d’une emprise concrète et bien ancrée dans le sol. À priori, tout les oppose. Mais peut-être pas tant que ça… Lies Pauwels, artiste belge de renommée internationale, crée des performances totales, des œuvres risquées, en travaillant à partir d’improvisations. Avec cette création, elle a souhaité jouer avec les idées reçues, provoquer des caricatures, bousculer nos manières de penser, confronter des stéréotypes à des situations absurdes, surréalistes, pour mieux retourner les codes. 3 LIES PAuWELS Lies Pauwels est actrice et metteur en scène flamande. Elle a collaboré avec Alain Platel et Arne Sierens, notamment pour leur trilogie Moeder en Kind, Bernadetjeet AllemaalIndiaan. Elle a joué dans de nombreuses productions Victoria ainsi qu'avec Tg STAN, Stella Den Haag, Het Toneelhuis et DoodPaard. Au cinéma, elle a joué pour Josse de Pauw, Dominique Deruddere et Félix Van Groeningen. Comme metteur en scène, elle a connu un grand succès avec Club Astrid en 2001 et White Star en 2004. For All the WrongReasons (2007) a tourné dans toute l'Europe et à Singapour. La saison passée, elle a créé le monologue White Lies, écrit pour elle par Rob De Graaf. Pour ce spectacle, elle a reçu le ColombinaAward aux Pays-Bas. Depuis longtemps,l'artiste flamande Lies Pauwels, était habitée par un drôle de projet qui réunirait un casting singulier : treize adolescentes et un bodybuilder. Treize êtres féminins en pleine construction, à mi-chemin entre la petite fille et la femme, face à un homme adulte dégageant une force tangible au travers de ses muscles saillants. D'un côté, le symbole de la fragilité; de l'autre, celui de la puissance et de l'assurance. Mais cet individu est-il si fort qu'il y paraît ? N'est-il pas une simple caricature ostentatoire qui dit ce que l'on craint le plus : un manque de puissance ? L'excès de muscles est en effet suspect... L'opposition va prendre une configuration inattendue : les jeunes filles vont révéler une réelle force face au bodybuilder dont la fragilité ne va pas tarder à apparaître. Lies Pauwels s'amuse à déjouer les apparences trompeuses et les clichés éculés dans une mise en scène drôle et déjantée. 4 Autour d'Het Hamiltoncomplex Les pistes et prolongements évoqués dans cette fiche sont loin d’être exhaustifs. Ces pistes peuvent vous aider à avoir une meilleure appréhension du spectacle en amont de votre venue et vous donner des idées pour préparer au mieux votre groupe à la réception du spectacle. Certaines d’entre elles peuvent aussi être travaillées comme un prolongement. Pour des raisons de droits d’auteurs, nous ne sommes pas en mesure d’afficher l’ensemble des images et des références iconographiques souhaitées. Néanmoins, vous pouvez y accéder sur les liens indiqués. 1/Les représentations de l'adolescence Het Hamiltoncomplex met en opposition apparente deux « êtres au monde » : d’une part treize jeunes filles au corps en pleine métamorphose ; de l’autre, un corps d’adulte construit, bloc imposant du bodybuilder. a) Général La période de l’adolescence L’adolescence est une phase du développement humain physique et mental qui survient généralement entre la puberté et l'âge adulte et suit la phase de l'enfance.Adolescence vientdu latin adolescere : « grandir ». C'est une phase de transition, de recherche de soi, de construction. L’adolescence, c’est aussi la difficulté de se situer (ni enfant, ni adulte), ce qui met l’adolescent dans une sorte d’entre deux. Proposition : Questionner les élèves sur la période de l’adolescence : Qu'est-ce qui change à l'adolescence ?Du point de vue du corps, du rapport aux adultes, des centres de préoccupation (loisirs, avenir, sexualité). Cette notion du passage, de cette difficulté à grandir sont développées dans le spectacle. Les jeunes filles aux morphologies et aux origines différentes posent la question« qu’est-ce que grandir » par le biais de différents tableaux. Proposition Débattre avec les élèves autour de la notion de grandir : - Quand vous êtes-vous sentis quitter l'enfance ? Y’a-t-il eu un moment précis ou était-ce plutôt une impression ? En grandissant, on souhaite devenir autonome, il y a 5 - des choses que l’on ne veut plus faire (lesquelles?) et d’autres que l’on veut faire seul(e) dorénavant... (lesquelles?) A quel âge devient-on adolescent ? Et adulte ?Est-ce que c’est une question d'âge, une question de maturité ? Les élèves peuvent s’interroger sur les clichés associés à l’adolescence. Proposition Répéter les paroles des parents, des médias sur l’adolescence : Paresse/ amusement/ jeux vidéo/ sexualité/ désintérêt pour l'école/ manque de motivation/ conflit avec les adultes/ dépendance aux portables/ mal-bouffe/ look extravagant/ drogue/ langage... Ces images sont-elles proches de la réalité ? Êtes-vous d'accord avec ces images toutes faites des adolescents ? Faire réagir des élèves sur ces clichés. Les tableaux Les scènes sont présentées sous forme de séquences avec toujours de l’animation au plateau, les tableauxs’enchainentnaturellement. Ils représentent des figures féminines telles que les hôtesses de l'air, les « Paris Hilton », les écolières, les femmes enceintes... Dans le script du spectacle, les tableaux portent des titres spécifiques tels que « Des hôtesses », « des filles scolaires », « des lolitas », « les filles de Hamilton »,« zombies », « les filles guitare ». Proposition A partir des titres, imaginer les différents contenus et actions de ces tableaux. Puis, les différentes manières de les mettre en scène. Lister ces tableaux, faire remarquer qu’ils jouent sur certains « clichés » de la « fillefemme ». Photographies des tableaux visibles sur le site de Sontag et sur le site du Grand Bleu : http://www.sontag.be/ http://legrandbleu.com/ Vous pouvez consulter le teaser des tableaux du spectacle sur le lien suivant: http://www.1erang.nl/voorstelling/het-hamiltoncomplex#.Vk9CfCuK7ct Les surnoms des jeunes filles sont des adjectifs tels que : « Prudence », « Precious », « Charity », « Destiny », « Faith », « Eternity », « Melody », « Marvelous », « Lovely », « Memory », « Patience ». Proposition Réfléchir à quels modèles ces adjectifs font références. Travailler sur une des photos du spectacle (photo1). Décrire la posture des jeunes filles. Sont-elles différentes les unes des autres ? Que peuvent représenter leurs attitudes ? 6 La réinterprétation des contes : l’exemple du chaperon rouge Tout au long du spectacle, les jeunes s’amusent sur les clichés féminins mais également sur les contes familiers à leur âge tels que le Petit Chaperon rouge. Ce conte a notamment été raconté de multiples fois, et chaque fois les adaptations (sous forme de texte écrit, de texte lu, de spectacle de danse, de théâtre, d’œuvre plastique, de film etc.) sont différentes. Proposition : A partir de photos de mise en scène du Petit chaperon rouge, décrire les différences de postures, d’attitude des comédiens et danseurs. Puis les interpréter. Comment est représenté le personnage du chaperon rouge ?Comment est-il vêtu ? Quelle posture est choisie ? Photo 1 Photo 2 Photo 3 Photo 1 :Photo du spectacle Het Hamiltoncomplex de Lies Pauwels, ©Fred Debrock Photo 2 : Photo du spectacle Le petit chaperon rouge chorégraphié par Sylvain Huc, présenté au Grand Bleu lors de la saison 2012/2013 (dossier pédagogique sur le site du Grand Bleu)© Erik Damanio Photo 3 : Photo du spectacle Chair de papillon de Damien Bouvet (voir dossier pédagogique sur Damien Bouvet sur le site du Grand Bleu)© Philippe Cibille B) La figure de l’adolescence La publicité De nombreuses publicités utilisent des clichés de l’adolescence. Lister les publicités présentes dans cette vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=5xgbgcdqCog Puis, vous pouvez demander aux élèves de lister les clichés utilisés dans celle-ci. Proposition - Travailler le langage publicitaire (langage argumentatif) et ses codes à partir d'une publicité papier ou vidéo (slogan, cible visée, langage utilisé, émotion suscitée...), sensibiliser les élèves au fait que l'adolescent est pour les publicitaires une cible (nécessité de vendre, manipulation publicitaire). 7 - Jouer le jeu inverse : demander aux élèves de caractériser les adultes, puis de lister les « clichés » sur les adultes (« ils sont tous... ? ») : obsédés par les études, l'ordre, donnent des ordres qu'ils ne respectent pas etc. Faire réaliser une fausse publicité qui joue sur les clichés liés à l'âge adulte (travailler l'ironie du message, la pertinence du produit choisi...) La photographie RinekeDijkstra est une artiste néerlandaise principalement connue pour ses séries de portraits photographiques, grands formats en couleur, dénués d’effets de mise en scène. Son travail photographique se caractérise par des portraits frontaux, qui cherchent à montrer la fragilité de l'être humain.RinekeDijkstra travaille par séries, les photos suivantes sont tirées de : « Adolescents sur la plage » (2002). Photographies visibles sur le site de l’artiste sur le site du jeu de paume : http://www.jeudepaume.org/index.php?page=document&idArt=34&idDoc=21 Proposition A partir de ces photographies, décrire la série de portraits : - Quels sont les points communs entre les ados, les paysages, la lumière : Ados à la plage, maillot de bain, mal à l'aise... - Les caractériser, faire rédiger leurs pensées, leur histoire... - Les interpréter : que nous disent ces portraits. On peut penser à la fragilité de l'être humain (face à la mer), de l'adolescence, la solitude, la présence gênante du corps, le corps qui se transforme (puberté, l’entre deux âges). - Comparer ces portraits à ceux d’adolescents sportifs photographiés par l’artiste Laure Ledoux. Cette photographe a aussi travaillé avec des collégiens et des lycéens dans le cadre des Rencontres Adolescentes organisées par le Grand Bleu. Photographies visibles sur le site de Laure Ledoux : http://www.laureledoux.com/ Vous pouvez également comparer les photos de RinekeDijkstraau travail de Marion Poussiersous forme d’une série de photos d'adolescents prises lors de vacances, intitulée « Un été ». Mettre en évidence les différences de cadrage, de décor (où est-il ? adolescent dans son « milieu »), de situation (surpris dans une action, pas de « mise en scène » du corps, improvisation de la photographie), de position, d'expression (regard, sentiment...), la posture de l’adolescent comme être social (groupes), le rapport au corps, le rapport à la nudité, complexé ou non. Toutes les photographies de Un été sont visibles sur le site internet de l’artiste Marion Poussier http://www.marionpoussier.fr/?lng=fr Etsur le site de Filigranes éditions : http://www.filigranes.com/livre/un-ete/ 8 “Cette série est née du souvenir des quelques étés que j’ai passés en colonie de vacances étant adolescente. J’ai toujours eu pendant ces vacances le sentiment de vivre des moments forts, rares et précieux. La colonie était une sorte de parenthèse dans le reste de ma vie. Personne ne me connaissait, je pouvais alors « jouer le rôle » que je voulais. J’avais le sentiment d’être coupée du reste du monde pendant deux ou trois semaines. Le temps, suspendu, et l’espace, clos, prenaient une autre dimension. Chaque jour comptait…” Marion Poussier Proposition - - A partir d'une image de la série «Un été» : faire raconter un souvenir de vacances illustré par une ou plusieurs photos dans le but de créer un « faux » récit autobiographique. Faire réaliser une série de photos d'adolescents « in situ » au collège/lycée : choisir des lieux dans lesquels les adolescents se sentent bien, lieux de rencontre : CDI, foyer, cour, cantine...) et assortir ces photos de paroles d'ados (récoltées sur les lieux) Mettre en regard le texte de Colette extrait du « Blé en herbe » (voir extrait en annexe 1): établir des liens avec les photos de Marion Poussier (thème des vacances, rapprochement des adolescents, passage de l'enfance à l'adolescence, importance donnée à la description des corps en mouvement (sensualité)...) Au cinéma De nombreux films traitent de l’adolescence et de la manière dont les jeunes la vivent. Les images des affiches sont disponibles sur le site d’Allociné : www.allocine.fr « Elephant » de Gus Van Sant (2003) pour mettre en évidence la fragilité psychologique des personnages. Résumé (Télérama) : Dans un quartier résidentiel des Etats-Unis, une voiture zigzague. Le père de John, qui mène son fils au lycée, est ivre au volant. Il s'arrête et cède la place à son fils. En arrivant, John, se rendant chez le proviseur, croise ses amis qui vaquent à leurs occupations quotidiennes. Mais derrière ce calme apparent se noue un drame, deux élèves se préparant à commettre un massacre au sein de l'établissement. « Virgin Suicides » de Sofia Coppola (2000). Résumé (Allo ciné) : Dans une ville américaine tranquille et puritaine des années soixante-dix, Cecilia Lisbon, treize ans, tente de se suicider. Elle a quatre sœurs, de jolies adolescentes. Cet incident éclaire d'un jour nouveau le mode de vie de toute la famille. L'histoire, relatée par l'intermédiaire de la vision des garçons du voisinage, obsédés par ces sœurs mystérieuses, dépeint avec cynisme la vie adolescente. Petit a petit, la famille se referme et les filles reçoivent rapidement l'interdiction de sortir. Alors que la situation s'enlise, les garçons envisagent de secourir les filles. 9 « Les Beaux Gosses » de Riad Sattouf (2009). Résumé : Hervé, 14 ans, est un adolescent débordé par ses pulsions, ingrat physiquement et moyennement malin, qui vit seul avec sa mère. Au collège, il se débrouille, entouré par ses bons copains. Sortir avec une fille, voilà qui mobilise toute sa pensée. Hélas, dans ce domaine, il accumule défaite sur défaite, sans toutefois se renoncer. Un jour, sans très bien comprendre comment, il se retrouve dans la situation de plaire à Aurore, l'une des plus jolies filles de sa classe... « L'Esquive » d’AbdellatifKechiche (2003) pour analyser le parcours initiatique des personnages (initiation sexuelle et premiers émois amoureux). Résumé (Allociné) : Abdelkrim, dit Krimo, quinze ans, vit dans une cité HLM de la banlieue parisienne. Il partage avec sa mère, employée dans un supermarché, et son père, en prison, un grand rêve fragile : partir sur un voilier au bout du monde. En attendant, il traîne son ennui dans sa cité, en compagnie de son meilleur ami, Eric, et de leur bande de copains. C'est le printemps et Krimo tombe sous le charme de sa copine de classe Lydia, une jeune fille vive et malicieuse. « La fureur de vivre » de Nicholas Ray (1955), Jim Stark est le petit nouveau au lycée. Un jeune homme accablé de problèmes familiaux et brimé par ses camarades mais qui n'aspire qu'à se faire une place parmi ses camarades. Entraîné malgré lui dans un défi de vitesse face à Buzz, chef d'un groupe un peu rebelle, ce dernier y perdra la vie. Suite à ce drame, Jim est entraîné dans une spirale de violence. « La Boum », de Claude Pinoteau (1980). Résumé (Allo ciné) : Vic vit tranquillement entre le lycée, ses parents et Poupette, son arrière-grand-mère. Lorsque sa mère apprend l'existence d'une ancienne maîtresse de son mari, elle décide de "faire un break" mais du haut de ses 13 ans Vic, ne pense qu'à sa première boum... Proposition Travailler autour de films sur l'adolescence : description et interprétation des affiches - Comment sont représentés les jeunes sur les affiches ? Décrire leur posture, attitude, émotions Imaginer la personnalité de ces jeunes De quelle manière pourrait être traitée leur histoire ? Avec quel regard ? Au vu du résumé des films, quelle vision est donnée sur la figure de l’adolescence ? 2/ Le rapport au corps : la démarche de Lies Pauwels a) La question de l’identité et du genre Dans Het Hamiltoncomplex, le travail de Lies Pauwels joue autour des questions de genre et d’identité : « Je voulais trouver dans ce spectacle quelque chose de très profond sur l’identité, presque philosophique ».(Source interview Lies Pauwels, Les Inrockuptibles – next festival, oct/nov 2015) 10 Le spectacle réunit sur scène treize adolescentes âgées de 12 à 14 ans. Lies Pauwels a souhaité travailler avec ces jeunes fillesdont les corps sont multiples, enfantins, féminins, énergiques, sages. Car pour elle, les filles de 13 ans sont la métaphore d’un monde qui change, d’un monde en transition : « Leur corps se modifie, leur vie privée ne pourra jamais plus être comme avant. Elles sont encore dans l’enfance, pas tout à fait des adultes, c’est un moment flou, de perte de repères, de quête d’identité, avant que tout s’ordonne. Elles sont le monde d’aujourd’hui. » Le rapport homme/ femme et celui enfant/ adulte est très présent dans le spectacle par la présence du Bodybuilder. Lies Pauwels a imaginé ce personnage car elle souhaitait une figure incarnant la certitude et la solitude ; « L’acteur que j’ai choisi a une très grande fragilité, ce qui apporte encore plus de trouble dans le contexte… ». L’interprétation des tableaux Revenir sur les tableaux des danseuses dans le spectacle. Proposition A la manière du spectacle, prendre en photo les élèves individuellement (ou en groupe) dans un même costume, avec un accessoire ou dans une posture qui met en scène un « cliché » lié au genre (clichés précédemment listés avec les élèves) : les garçons en footballeurs, avec une console vidéo...., les filles maquillées à outrance, pendues à leur téléphone, etc. Mais les photographier aussi individuellement dans toute leur complexité : portant leurs vêtements fétiches, avec un ou des accessoires qui les représentent, exprimant un sentiment choisi, etc. Puis exposer ces clichés sur des cadres réversibles : d'un côté, les photos avec le même costume (les « clichés ») visibles du 1er coup d’œil, et de l'autre, la « vraie face » de l'élève, dans toute sa complexité, à découvrir dans un second temps. Si la question du genre dans les spectacles vous intéresse particulièrement, n’hésitez pas à regarder la fiche thématique Stéréotypes du Grand Bleu : http://legrandbleu.com/wpcontent/uploads/2015/10/FICHE_SPECTACLE_Stereotypes.pdf Le rapport aux autres Le spectacle met en exergue une tension entre les jeunes filles et le bodybuilder : à la fois l’homme sain de corps et d’esprit, il est également le catalyseur d’une hystérie qui se développe petit à petit chez les jeunes filles. Le rapport au corps est surenchérit au vu de la relations entre ces deux entités. Il y a une confrontation explicite (lorsque le bodybuilder met en avant ses muscles)mais aussi implicite au vu de la figure de l’homme au milieu de jeunes filles qui met en avant la féminité des adolescentes mais aussi leurs fragilités. 11 Propositions Développer des exercices qui mettent en scène le corps : *Son propre corps : -mettre le plus de parties du corps en contact avec le sol -Travailler les types de déplacements : ramper, courir, sauter... - Sur de la musique, faire bouger une partie du corps (donné par l’animateur en amont) sur la musique proposée. Il est intéressant de varier les rythmes et styles de musique. * Le rapport aux autres : -mettre le plus de parties du corps en contact avec avec les parties du corps de son partenaire - les élèves marchent dans un espace donné. Le référent annonce une partie du corps que les élèves doivent coller par deux à un autre partenaire, le premier qu’il voit sur leur chemin. Ex : top partie « GENOU », top partie « bras », épaule, tête etc. 3/ Le temps qui passe a) Le regard de l’adulte sur son adolescence Dans la photographie Avec sa série « Imagine Finding Me », la photographe japonaise ChinoOtsuka a décidé de voyager dans le temps en s’insérant elle-même dans les photos de son enfance. Avec ce concept original, elle nous convie à réfléchir sur notre part d’enfant vue sous un regard adulte avec une réflexion sur le temps qui passe. Photos de l’artiste visibles sur son site internet : http://chino.co.uk/ Proposition : - Montrer les photos et demander aux élèves de les décrire et de donner des hypothèses : qui sont les deux personnages présents ? Quel lien les unit ? Que fontils ? Ilest possible que les élèves soient en difficulté de comprendre ce qui unit les personnages car il n’y a pas de regard l'un vers l'autre, ni de contact. On peut aussi imaginer avec les élèves que l'adulte est une présence désincarnée, un fantôme avec un décalage temporel (interprétation possible par rapport aux vêtements d'époques différentes) - Expliquer le « trucage » : artiste qui insère sa propre photo d'adulte dans ses photos d'enfance. Réflexion sur le temps qui passe/ rapprochement de 2 époques (âge enfant/ adulte)/ regard nostalgique sur les souvenirs - Faire « trafiquer » des photos par les élèves : insérer numériquement ou manuellement (découpage, collage) une photo d'eux actuelle dans un cliché de leur enfance. Travailler la mise en scène de la photo d'aujourd'hui pour qu'elle 12 corresponde à celle de l'enfance. Proposer une exposition des clichés « truqués » et faire trouver un titre à l'exposition (« Voyage dans le temps », « De l'enfance à l'adolescence » par exemple). Si ces démarches vous intéressent particulièrement, sachez qu’il y a d’autres artistes qui ont travaillé sur l'adolescence en photographie tels que : Hellen van Meene, Alessandra Sanguinetti, Marion Poussier, Lise Sarfati, Lauren Greenfield mais aussi Ryan McGinley, Charles Fréger. Dans la littérature Le regard de l'adulte sur son enfance est traité également dans la littérature. A titre d’exemple, la Promesse de l’aube de Romain Gary est un roman autobiographique écrit en 1960. Dans l’extrait mis en annexe 2, l’auteur parle de la première fois où il est tombé amoureux, dès sa plus tendre enfance. Nous sommes à Wilno, petite ville de Pologne dans laquelle la mère du narrateur a ouvert une maison de couture plutôt prospère. C’est là que Romain, encore enfant, va connaître son premier amour. Proposition : Proposer aux élèves de lire puis d’étudier cet extrait. Décrire et interpréter les décalages dans le ton employé entre le narrateur, maintenant adulte et son souvenir d’enfance. 13 On récapitule ! Des idées de choses à faire en classe avant la venue au spectacle 1/Questionner les élèves sur la période de l’adolescence et la notion de grandir : Qu'est-ce qui change à l'adolescence ?Du point de vue du corps, du rapport aux adultes, des centres de préoccupation (loisirs, avenir, sexualité). 2/Autour des clichés liés à l’adolescence : Proposer de répéter les paroles des parents, des médias sur l’adolescence : Paresse/ amusement/ jeux vidéo/ sexualité/ désintérêt pour l'école/ manque de motivation/ conflit avec adultes/ dépendance aux portables/ malbouffe/ look extravagant/ drogue/ langage... Ces images sont-elles proches de la réalité ? Êtes-vous d'accord avec ces images toutes faites sur les adolescents ? Faire réagir les élèves sur ces clichés. 3/Observer le travail de photographes tels que RinekeDijkstra ou ChinoOtsuka (liens dans ce dossier pédagogique) sur la figure de l’adolescence ou de la place de l’adulte par rapport à son parcours d’adolescent. Des idées de choses à faire en classe après la venue au spectacle 1/ Mettre des mots sur l’expérience de spectateur. Qu’avons-nous vu (couleurs, formes, objets) ? Qu’avons-nous entendu (sons, musiques, bruitages) ? Qu’avons-nous ressenti (émotions) ? 2/Mettre des mots sur les tableaux visuels du spectacle et analyser les images de la féminité qui ont été proposées. 3/ Décrire et interpréter les affichesde films sur l'adolescence (voir dans le dossier) et interroger les élèves : Comment sont représentés les jeunes sur les affiches ?Décrire leur posture, attitude, émotions.Imaginer la personnalité de ces jeunes.De quelle manière pourrait être traitée leur histoire ? Avec quel regard ?Au vu du résumé des films, quelle vision est donnée sur la figure de l’adolescence ? Note : si vous produisez des choses en classe (recueil de mots, dessins, etc.), l’équipe des relations avec le public du Grand Bleu serait très heureuse si vous pouviez nous les envoyer! Merci d’avance ! 14 Annexe 1 Extrait du « Blé en herbe », Colette, 1923. Phil et Vinca sont amis d’enfance et se retrouvent, chaque été, dans une maison de vacances en Bretagne. Mais cette année, ils ont changé. Avec l’adolescence, ils découvrent que les frontières entre l’amitié et l’amour, les jeux de l’enfance et l’âge adulte, peuvent se brouiller. - Attends-moi, Vinca ! Je vais à la pêche avec toi ! cria-t-il. Elle ralentit le pas sans se retourner. Il l’atteignit en quelques bonds et s’empara d’un des havenets. - Pourquoi en avais-tu pris deux ? J’ai pris la petite poche pour les trous étroits, et mon havenet à moi, comme d’habitude. Il plongea dans les yeux bleus son plus doux regard noir : - Alors ce n’était pas pour moi ? En même temps il lui offrait la main pour franchir le mauvais couloir de rochers, et le sang monta sous le hâle des joues de Vinca. Un geste nouveau, un regard nouveau suffisaient à la confondre. Hier, ils battaient les falaises, sondaient les trous côte à côte – à chacun son risque… Aussi leste que lui, elle ne se souvenait pas d’avoir requis l’aide de Phil… - Un peu de douceur, Vinca ! pria-t-il en souriant, parce qu’elle a retiré sa main d’un trop grand geste anguleux. Qu’est-ce que tu as donc contre moi ? Elle mordit ses lèvres, fendillées par les plongeons quotidiens, et chemina sur les rochers hérissés de balanes. Elle réfléchissait et se sentait pleine de doute. […] elle pêcha toute seule, impatiente, moins adroite que de coutume. Dix crevettes, vingt crevettes échappèrent à son coup de filet trop brusque, pour se tapir dans les fissures d’où leurs barbes fines tâtent l’eau et narguent l’engin… - Phil ! Viens, Phil ! C’en est rempli, de crevettes, et elles ne veulent pas se laisser prendre ![…] Phil enfonça le havenet dans l’eau et le tint immobile. […] Elle se pencha davantage, et ses cheveux battirent, comme une aile courte et prisonnière, la joue de son compagnon. Elle recula, puis revint d’un mouvement insensible, pour reculer 15 encore. Il ne parut pas s’en apercevoir, mais sa main libre attira le bras nu, hâlé et salé, de Vinca. - Regarde, Vinca… La plus belle, qui vient… Le bras de Vinca, qu’elle déroba, glissa jusqu’au poignet dans la main de Phil comme dans un bracelet, car il ne le serrait pas. - Tu ne l’auras pas, Phil, elle est repartie… Pour suivre mieux le jeu de la crevette, Vinca rendit son bras, jusqu’au coude, à la main demi-fermée. Dans l’eau verte, la longue crevette d’agate grise tâtait du bout des pattes, du bout des barbes, le bord du havenet. Un coup de poignet, et… Mais le pêcheur tardait, savourant peut-être l’immobilité du bras docile à sa main, le poids d’une tête voilée de cheveux qui s’appuya, un moment vaincue, à son épaule, puis s’écarta, farouche… - Vite, Phil, vite, relève le filet !… Oh ! elle est partie ! Pourquoi l’as-tu laissée partir? Phil respira, laissa tomber sur son amie un regard où l’orgueil, étonné, méprisait un peu sa victoire ; il délivra le bras mince, qui ne réclamait point de liberté, et brouillant, à coups de havenet, toute la flaque claire : - Oh ! elle reviendra… Il n’y a qu’à attendre… 16 Annexe2 : Extrait de « La Promesse de l’aube », Romain Gary, 1960 J’avais déjà près de neuf ans lorsque je tombai amoureux pour la première fois. Je fus tout entier aspiré par une passion violente, totale, qui m’empoisonna complètement l’existence et faillit même me coûter la vie. Elle avait huit ans et s’appelait Valentine. Je pourrais la décrire longuement et à perte de souffle, et si j’avais une voix, je ne cesserais de chanter sa beauté et sa douceur. C’était une brune aux yeux clairs, admirablement faite, vêtue d’une robe blanche et elle tenait une balle à la main. Je l’ai vue apparaître devant moi dans le dépôt de bois, à l’endroit où commençaient les orties, qui couvraient le sol jusqu’au mur du verger voisin. Je ne puis décrire l’émoi qui s’empara de moi : tout ce que je sais, c’est que mes jambes devinrent molles et que mon cœur se mit à sauter avec une telle violence que ma vue se troubla. Absolument résolu à la séduire immédiatement et pour toujours, de façon qu’il n’y eût plus jamais de place pour un autre homme dans sa vie, je fis comme ma mère me l’avait dit et, m’appuyant négligemment contre les bûches, je levai les yeux vers la lumière pour la subjuguer. Mais Valentine n’était pas femme à se laisser impressionner. Je restai là, les yeux levés vers le soleil, jusqu’à ce que mon visage ruisselât de larmes, mais la cruelle, pendant tout ce temps-là, continua à jouer avec sa balle, sans paraître le moins du monde intéressée. Les yeux me sortaient de la tête, tout devenait feu et flamme autour de moi, mais Valentine ne m’accordait même pas un regard. Complètement décontenancé par cette indifférence, alors que tant de belles dames, dans le salon de ma mère, s’étaient dûment extasiées devant mes yeux bleus, à demi aveugle et ayant ainsi, du premier coup, épuisé, pour ainsi dire, mes munitions, j’essuyai mes larmes et, capitulant sans conditions, je lui tendis trois pommes vertes que je venais de voler dans le verger. Elle les accepta et m’annonça, comme en passant : – Janek a mangé pour moi toute sa collection de timbres-poste. C’est ainsi que mon martyre commença. Au cours des jours qui suivirent, je mangeai pour Valentine plusieurs poignées de vers de terre, un grand nombre de papillons, un kilo de cerises avec les noyaux, une souris, et, pour finir, je peux dire qu’à neuf ans, c’est-à-dire bien plus jeune que Casanova, je pris place parmi les plus grands amants de tous les temps, en accomplissant une prouesse amoureuse que personne, à ma connaissance, n’est jamais venu égaler. Je mangeai pour ma bien-aimée un soulier en caoutchouc. Romain Gary, La Promesse de l’aube, 1960 17