La transition énergétique: connaître et partager
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La transition énergétique: connaître et partager
POINTS DE REPÈRE La transition énergétique Connaître et partager pour agir 25 Comité de rédaction et comité éditorial Direction de la publication Jean-Pierre Ndoutoum, Directeur de l’IFDD Direction de la rédaction Stéphane Pouffary, Président d’honneur et fondateur ENERGIES 2050 Auteurs Stéphane Pouffary, Président d’honneur et fondateur ENERGIES 2050 Guillaume Delaboulaye, chargé de Programmes, Climat, Énergie, Bâtiments et Territoires durables, ENERGIES 2050 Contributions Stéphane Quéfelec, chargé de Programmes, Economie, Développement et Changement climatique, ENERGIES 2050 Gino Baudry, spécialiste biocarburant, ENERGIES 2050 Comité éditorial de l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD) Mamadou Koné, spécialiste de programme Énergie durable Louis-Noël Jail, chargé de communication, responsable du service Information et Documentation Romaric Segla, assistant de programme Énergie Marilyne Laurendeau, assistante de communication Mise en page et révision linguistique Marquis Interscript Illustrations ENERGIES 2050 Photos de couverture ENERGIES 2050 (Songhai, Benin) Ce document a été préparé par ENERGIES 2050 pour le compte de l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD). Il ne représente pas nécessairement le point de vue de l’une ou l’autre de ces organisations. ISBN version imprimée : 978-2-89481-221-1 ISBN version électronique : 978-2-89481-222-8 Vous pouvez consulter ce guide en ligne à : http://www.ifdd.francophonie.org/ressources/ressources-pub.php?id=8 © Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD) 2016 56, rue Saint-Pierre, 3e étage, Québec, Canada G1K 4A1 Téléphone : 418 692-5727 Télécopie : 418 692-5644 [email protected] – www.ifdd.francophonie.org Cette publication a été imprimée sur du papier contenant 100 % de fibres postconsommation, procédé sans chlore à partir d’énergie biogaz.recyclé. IMPRIMÉ AU CANADA – octobre 2016 La transition énergétique Connaître et partager pour agir Mot du directeur d e P o i n t s année 2015 a vu l’aboutissement de trois processus de négociations internationales notamment : (i) le Plan d’action d’Addis-Abeba sur le financement du développement adopté en juillet 2015, (ii) le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et les objectifs de développement durable adoptés en septembre 2015 et (iii) l’Accord de Paris sur le Climat de décembre 2015. La Francophonie a pris une part active dans l’aboutissement de ces importants accords, aussi bien dans leur préparation qu’au moment de leur adoption. L’Organisation s’est particulièrement mobilisée pour l’Accord de Paris sur le Climat en accompagnant les pays dans les processus de négociations. Cet accompagnement a pris la forme de sessions de formations pour les négociateurs, de mise à disposition d’outils, comme le Guide des négociations et la Note de décryptage, ou l’appui à la formulation par les pays de leurs contributions prévues déterminées au niveau national (CPDN). Mais bien avant la mise en place de ces processus, la Francophonie a créé en 1988, lors du Sommet de Québec, l’Institut de l’Énergie des pays ayant en commun l’usage du Français (IEPF), avec pour mission d’aider les pays membres en développement dans la conception, la formulation et la mise en œuvre de leurs politiques énergétiques, avec un accent particulier sur l’accès à l’énergie, les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique. L’IEPF, qui deviendra plus tard (2013) l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD), sera donc un des précurseurs des programmes « énergie durable », comme celui des Nations-Unies intitulé SE4ALL (Sustainable Energy for all) En effet, avec une participation des énergies fossiles de près de 60 % aux émissions de gaz à effet de serre, le secteur énergétique constitue également l’une des réponses à cette problématique mondiale. L’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique mondial, l’effort de sobriété énergétique (moins de gaspillages), l’utilisation de technologies moins consommatrices d’énergie (efficacité énergétique), alliés à une certaine équité énergétique permettant de favoriser l’accès à des formes d’énergie modernes, devraient conduire l’humanité à migrer progressivement vers des formes d’énergie de moins en moins carbonées. r e p è r e L’ v P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir vi Cette transition énergétique serait un des vecteurs de la nécessaire transition é cologique, voire de la transition économique qui nous amènerait collectivement vers des modes de production et de consommation plus propres et plus respectueux de l’équilibre intra et intergénérationnel. Ce guide de la transition énergétique, qui approfondit autant cette problématique dans notre langue en partage, est un outil pour tous les francophones, qu’ils soient au sein d’organismes internationaux ou régionaux, d’institutions nationales et locales, d’entreprises privées ou encore au sein de structures de la société civile. Nous sommes donc heureux de vous en proposer la lecture et espérons que vous y trouverez des réponses conceptuelles et pratiques aux problématiques auxquelles vous êtes confrontés face à la transition énergétique. Au lendemain de la 21ème session de la Conférence des Parties à la Convention- cadre des Nations Unies sur les changements climatiques à Paris et à la veille de sa 22ème session prévue à Marrakech en novembre 2016, cet ouvrage vous apportera, chère lectrice et cher lecteur, des connaissances spécifiques sur : • le rôle des instances internationales et des États dans la transition énergétique ; • l’implication du secteur privé et des citoyens dans la transition ; • les innovations en cours et à venir au cœur des villes et territoires pour accompagner cette transition ; • les risques et opportunités dans des secteurs clés comme : – le bâtiment et la construction ; – les transports ; – l’industrie ; –l’agriculture. Nous sommes à l’aube d’un nouveau monde plus vivable, dont la réalisation nécessitera un sursaut de la part de tous et de chacun. Dans cette optique, le XVIe Sommet de la Francophonie qui se tiendra à Antananarivo (Madagascar) les 26 et 27 novembre 2016 autour du thème « Croissance partagée et développement responsable : les conditions de la stabilité du monde et de l’espace francophone » lancera un appel fort pour l’action en faveur d’une transition énergétique équitable et durable. Où que vous soyez, aujourd’hui ou demain, je souhaite que ce guide éveille ou ravive en vous la flamme afin d’agir à votre niveau pour une meilleure transition énergétique. C’est cette flamme qui anime toutes les collaboratrices et tous les collaborateurs qui ont participé à l’élaboration de cet ouvrage. Je les remercie très chaleureusement pour leur implication et leur dévouement à cette cause commune. Bonne lecture ! Jean-Pierre NDOUTOUM Remerciements des auteurs d e P o i n t s C’est avec un immense plaisir que nous partageons avec les lecteurs, que nous espérons nombreux, ce Guide la Transition énergétique : connaître et partager pour agir. L’urgence à agir a rendu indispensable une publication avant la 22e session de la Conférence des Parties de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CdP22) qui se tiendra à Marrakech du 7 au 18 novembre 2016. Loin des débats pour ou contre telle énergie, nous avons voulu dresser un panorama aussi détaillé et factuel que possible pour que chacun puisse se réapproprier la question énergétique et comprendre les réalités auxquelles nos sociétés sont confrontées mais aussi les différents chemins qui s’ouvrent à nous individuellement et collectivement. Nous avons également résolument décidé d’éviter ce qui aurait pu être un catalogue technologique et technique. La réalité des atteintes à l’environnement et les conséquences catastrophiques des changements climatiques engendrées par notre ébriété énergétique sont une réalité que personne ne peut plus contester. Ici et ailleurs, jour après jour, les conséquences se multiplient, toujours plus préoccupantes et parfois irréversibles. Nos modes de production et de consommation énergivores et basés massivement sur l’utilisation des énergies fossiles sont de véritables armes de destruction massive. On rappellera simplement les études du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) qui nous alertent d’année en année et qui plaident pour une prudence et une sagesse inédites dans notre histoire collective. Pour éviter des conséquences climatiques catastrophiques, nous allons devoir laisser plus des 2/3 des réserves d’énergies fossiles disponibles à ce jour dans notre sous-sol. Chacun comprendra combien l’enjeu est important quand nous savons que nos sociétés, que nous soyons dans un pays développés ou en développement, continuent à subventionner massivement directement ou indirectement ces énergies malgré des engagements répétés d’année en année pour changer de modèle. r e p è r e Une contribution pour inviter à l’action et transformer les défis en opportunités d’action vii La transition énergétique : connaître et partager pour agir L’heure du choix … une sagesse collective à réinventer La transition énergétique est, par nature, transversale et systémique et la réalité de sa mise en œuvre témoignera, ni plus ni moins, de notre capacité à imaginer et à mettre en œuvre le monde dans lequel nous voulons vivre. Exercice de sagesse et de responsabilité collective, nos choix d’aujourd’hui transforment et transformeront radicalement la planète et la capacité de nos sociétés à apporter à chacun un mieux vivre dans le respect des ressources naturelles disponibles. La transition énergétique est sans aucun doute un des plus grands défis de notre temps et nous ne pourrons l’atteindre que collectivement. Que nous soyons un représentant du secteur public ou du secteur privé ou encore un acteur de la société civile, quel que soit notre pays d’origine ou celui dans lequel nous vivons, chacun d’entre nous a un rôle à jouer et il s’agit, sans plus attendre, que chacun s’engage à modifier ses pratiques personnelles et professionnelles et à regarder l’énergie comme un bien précieux de l’humanité et non plus comme une simple ressource inépuisable. P o i n t s d e r e p è r e Connaître, partager et démultiplier les opportunités d’actions viii L’Organisation Internationale de la Francophonie et son organe subsidiaire l’Institut de la Francophonie pour le Développement Durable sont des acteurs engagés depuis longtemps sur la question de la transition énergétique. ENERGIES 2050 travaille sur la Grande Transition, qu’il s’agisse de la transition énergétique ou de la mise en mouvement d’une société plus humaine, plurielle et solidaire, porteuse de paix et respectueuse des biens communs de l’humanité. L’association désire notamment replacer une approche énergétique en accord avec les principes de l’écodéveloppement au cœur de l’action citoyenne en promouvant la maîtrise de la demande en énergie et les énergies renouvelables. Partenaires depuis de nombreuses années, l’envie de partager et d’inviter à l’action sur le sujet de la Transition énergétique était évidente et c’est avec un immense plaisir que nous nous sommes mobilisés. Ce Guide s’inscrit résolument dans cette envie de partager et d’inviter à l’action. Il s’agit également de rappeler que chacun peut être le porte-parole de cette transition et que nous disposons tous d’un trésor d’opportunités pour agir. Le temps n’est plus au plaidoyer mais à l’action Nous espérons que ce Guide donnera à chacun une meilleure compréhension du trésor d’opportunités que représente la transition énergétique et lui donnera envie d’agir dès aujourd’hui pour préparer ensemble un futur énergétique soutenable et solidaire. Remerciements des auteurs P o i n t s d e r e p è r e Chacun d’entre nous peut devenir ou redevenir un magicien porteur d’inno vation… L’équipe d’ENERGIES 2050 espère que chacun terminera la lecture de ce Guide avec un immense appétit à agir selon ses réalités. La mutualisation, le partage et le collectif sont des préambules indispensables à toute possible construction d’un monde meilleur et plus résilient. La perspective d’une nouvelle donne mondiale plus juste est l’affaire de chacun d’entre nous… et chacun d’entre nous a un rôle central et indispensable à jouer. Nous ne pouvons ici terminer ces quelques mots sans remercier chaleureusement l’IFDD pour sa confiance renouvelée et pour nous avoir offert cette nouvelle opportunité de partage. Un merci également à tous ceux, anonymes ou acteurs connus, citoyens, petite ou grande entreprise ou acteurs publics qui nous ont inspirés et qui, jour après jour, travaillent inlassablement à la transformation de nos modes de consommation et de production. ix Table des matières Mot du directeur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . v Remerciements des auteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . vii Acronymes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xix Résumé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xxiii 1 d e Chapitre 1 : Énergie, climat et développement, ou de la nécessité de revoir notre système énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 1.1 Un système énergétique obsolète . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 1.1.1 L’ébriété énergétique ou le constat d’une demande en énergie toujours plus grande . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1.1.1.1 L’Homme et l’énergie : une histoire ancienne, un amour devenu schizophrène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 1.1.1.2 Une énergie présente dans tous les secteurs d’usage . . . . . . . . . . . 9 1.1.1.3 Une demande énergétique qui ne cesse de croître . . . . . . . . . . . . 10 1.1.2 De la diversité du paysage énergétique aux tensions géopolitiques . . . . . . . 11 1.1.2.1 Une consommation inégale pour des modèles énergétiques différents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12 1.1.2.2 La demande énergétique mondiale en pleine reconfiguration . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 1.1.2.3 Une répartition inégale des ressources et des zones de production . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 1.1.2.4 La dépendance énergétique des pays consommateurs . . . . . . . . . 16 r e p è r e 1 1 2 3 3 P o i n t s Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un modèle de développement énergivore et un accès inégal aux services énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Une prise de conscience déjà ancienne sur les limites du modèle actuel . . . . . . . . . . . . . Une prise de conscience qui reste insuffisante face aux crises récurrentes . . . . . . . . . . . . . L’énergie au cœur des défis d’aujourd’hui et de demain… . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un guide sur la transition énergétique : connaître et partager pour agir . . . . . . . . . . . . . . xi La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e 1.1.3 Les limites du système énergétique actuel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.3.1 Une offre majoritairement carbonée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.3.2 Une raréfaction programmée des ressources . . . . . . . . . . . . . . . . 1.1.3.3 Un système énergétique très centralisé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2 L’énergie au cœur de la problématique du changement climatique . . . . . . . . . . . . 1.2.1 Une responsabilité sans équivoque dans le réchauffement climatique . . . . . 1.2.1.1 Du principe de l’effet de serre au réchauffement climatique . . . . 1.2.1.2 Des teneurs en CO2 inédites depuis des millénaires . . . . . . . . . . 1.2.1.3 L’origine anthropique du réchauffement climatique et le rôle majeur des combustibles fossiles . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2.2 Les conséquences des changements climatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.2.2.1 Hausse des températures et bouleversements associés . . . . . . . . . 1.2.2.2 Des impacts en cascade sur l’Homme, les écosystèmes et les sociétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3 L’énergie au service du développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.1 Des situations énergétiques révélatrices de différences de développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.1.1 Un déficit d’accès dans les pays en développement : la pauvreté énergétique, un fardeau lourd à gérer . . . . . . . . . . . . 1.3.1.2 La précarité énergétique : une réalité grandissante dans les pays développés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2 L’énergie au cœur du développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2.1 Énergie, pauvreté et développement économique . . . . . . . . . . . . 1.3.2.2 Énergie, éducation et santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2.3 Énergie et égalité des sexes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1.3.2.4 Énergie, eau et forêts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Conclusion du chapitre 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xii Chapitre 2 : La transition énergétique : sobriété, efficacité et énergies renouvelables, ou la recette d’un triplé gagnant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1 Agir sur la demande en énergie : sobriété et efficacité énergétique . . . . . . . . . . . . . 2.1.1 La chaîne énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.2 La sobriété énergétique : un préambule indispensable . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.2.1 Changer notre rapport à l’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.2.2 Des possibilités d’action à de multiples niveaux . . . . . . . . . . . . . 2.1.2.3 Connaître et comprendre pour adopter des comportements sobres en énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.3 L’efficacité énergétique : un trésor de possibilités . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.3.1 Optimiser le réseau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.3.2 Améliorer le rendement des équipements . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.1.3.3 Mettre en place des politiques d’efficacité énergétique . . . . . . . . 18 18 20 21 22 22 22 24 25 27 27 30 32 32 32 34 35 35 37 37 40 41 43 44 44 45 45 46 47 48 49 49 50 La transition énergétique 51 52 52 52 53 54 54 55 56 57 57 58 59 60 62 63 63 63 75 76 78 d e 70 73 75 r e p è r e 64 65 68 P o i n t s 2.2 Les énergies renouvelables : une incontournable évidence pour la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.1 Les énergies renouvelables : une réponse à de multiples défis . . . . . . . . . . . 2.2.1.1 Des trésors d’opportunités pour lutter contre le changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.1.2 Croissance économique et création d’emplois . . . . . . . . . . . . . . 2.2.1.3 La sécurité énergétique : accès, indépendance et contrôle des prix . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2 Énergies renouvelables et innovation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2.1 Les différentes sources d’énergies renouvelables . . . . . . . . . . . . . 2.2.2.2 La biomasse moderne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2.3 La géothermie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.2.4 Les énergies marines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3 Perspectives de développement des énergies renouvelables . . . . . . . . . . . . . 2.2.3.1 Une croissance soutenue, mais une part qui reste insuffisante dans le bouquet énergétique mondial . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3.2 De la nécessité d’un soutien politique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3.3 Des investissements et un marché international qui se confirment . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.2.3.4 Des freins encore trop nombreux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3 L’innovation, un catalyseur indispensable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1 Repenser les réseaux électriques pour optimiser le système énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1.1 Un système énergétique réparti pour conjuguer les visions sur un territoire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1.2 Les mini-réseaux pour soutenir le développement énergétique des territoires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1.3 Les réseaux intelligents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.1.4 Des réseaux pour raccorder des États : les super-réseaux . . . . . . . 2.3.2 Le stockage de l’énergie : un maillon stratégique pour améliorer toute la chaîne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.3.3 La cogénération pour optimiser le processus . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.4 Les énergies fossiles : gérer la transition pour accompagner le changement . . . . . . 2.4.1 Une utilisation maîtrisée des ressources fossiles indispensables à court et moyen terme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2.4.2 La fausse question épineuse des subventions aux énergies fossiles . . . . . . . . Conclusion du chapitre 2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xiii P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir xiv Chapitre 3 : Les acteurs de la transition énergétique : de la gouvernance à la mise en œuvre, une indispensable implication de tous . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 81 3.1 Une gouvernance internationale pour des enjeux mondiaux : le rôle des instances internationales dans la transition énergétique . . . . . . . . . . . . 81 3.1.1 La prise en compte croissante des enjeux du développement durable, du climat et de l’énergie depuis une quarantaine d’années . . . . . . . . . . . . . 82 3.1.1.1 Une prise de conscience progressive des enjeux environnementaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82 3.1.1.2 L’enjeu désormais fondamental de la question énergétique dans le système des Nations Unies . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 88 3.1.2 Le Programme de développement pour l’après-2015 : un tournant à ne pas manquer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 91 3.1.2.1 Des OMD aux ODD, la définition d’une nouvelle vision commune . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92 3.1.2.2 La CdP 21 : un accord historique sur le climat . . . . . . . . . . . . . . 94 3.2 Les États et la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 96 3.2.1 Des dispositifs accessibles, variés et multidimensionnels . . . . . . . . . . . . . . . 97 3.2.1.1 Repenser les politiques énergétiques nationales . . . . . . . . . . . . . 97 3.2.1.2 Développer une fiscalité écologique pour orienter le changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 3.2.1.3 Calibrer la réglementation : les normes, un outil puissant . . . . . 101 3.2.1.4 L’investissement public comme outil essentiel à la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 3.2.2 La nécessaire articulation des mesures dans une perspective élargie . . . . . 103 3.3 Les gouvernements locaux au cœur des enjeux énergétiques et climatiques . . . . . 104 3.3.1 Le rôle crucial joué par l’échelon local . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 3.3.1.1 Les collectivités territoriales, un acteur clé pour la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 105 3.3.1.2 Une multitude d’opportunités d’actions concrètes pour agir sur la demande énergétique au niveau local . . . . . . . . 106 3.3.2 Vers une gouvernance locale de l’énergie : des obstacles à surmonter, mais une étape indispensable à la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . 108 3.3.2.1 Dépasser le fonctionnement sectoriel et cloisonné des gouvernements locaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 3.3.2.2 Une gouvernance locale énergétique partagée . . . . . . . . . . . . . . 110 3.3.2.3 La question du financement de la transition énergétique à l’échelle locale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 3.3.2 La coopération décentralisée pour mutualiser et démultiplier les moyens d’action . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 3.3.2.1 Surmonter les obstacles inhérents aux représentations pour favoriser un codéveloppement soutenable . . . . . . . . . . . . 113 3.3.2.2 Quels outils de codéveloppement pour faciliter l’échange des connaissances pour la transition énergétique ? . . . . . . . . . . 114 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 115 115 116 118 119 119 121 122 122 123 125 129 132 132 132 142 146 147 147 148 149 r e p è r e 136 137 138 138 d e Chapitre 4 : Des opportunités d’actions dans tous les secteurs . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1 Les villes et territoires : des laboratoires de la transition énergétique . . . . . . . . . . 4.1.1 Les villes au cœur de notre avenir énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.1.1 Les villes et l’énergie : une histoire et un avenir communs . . . . 4.1.1.2 Des villes confrontées à des défis grandissants exacerbés par la croissance démographique et le changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.1.3 Une situation contrastée entre villes du Nord et du Sud . . . . . . 4.1.2 Concevoir la ville sobre en énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.2.1 Coordonner l’urbanisme et les transports . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.2.2 Rafraîchir les villes : entre recherche de densité et intégration d’aménités environnementales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 115 150 151 154 154 156 P o i n t s 3.4 L’indispensable implication du secteur privé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.1 L’importance croissante des démarches de responsabilité sociale des entreprises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.1.1 Une démarche volontaire avec des niveaux d’implication variés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.1.2 L’encadrement progressif de la RSE : une étape indispensable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.1.3 Les critiques de la RSE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.2 Les opportunités de financements privés de la transition énergétique . . . . 3.4.2.1 Les obligations vertes : moyens de financement de la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.2.2 Le renouveau prometteur des sociétés de services énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.2.3 Le choix des partenariats public-privé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.3 Les nouveaux modèles d’économie durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.3.1 L’émergence controversée de l’économie verte . . . . . . . . . . . . . 3.4.3.2 L’importance majeure mais souterraine de l’économie sociale et solidaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.4.3.3 Les promesses de l’économie circulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5 L’implication citoyenne dans la transition . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.1 La transition citoyenne : comprendre pour agir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.1.1 De la nécessité d’une gouvernance énergétique citoyenne . . . . . 3.5.1.2 Favoriser la diffusion de l’information et la compréhension des enjeux de la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.2 L’importance des projets citoyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.2.1 Les avantages des projets citoyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.2.2 Le financement des projets citoyens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3.5.2.3 La progression de l’implication citoyenne : quelques exemples européens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Conclusion du chapitre 3 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xv P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir xvi 4.1.3 Des leviers d’action pour une transition énergétique urbaine inscrite dans la durée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.3.1 La prise en compte des enjeux de la transition énergétique dans les documents cadres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.3.2 L’avènement de la ville intelligente . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.3.3 Les principes de l’économie verte appliqués à la ville . . . . . . . . 4.1.3.4 Quelles possibilités de financement pour atteindre la transition énergétique ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.1.3.5 La nécessaire coopération entre les villes pour démultiplier les moyens d’agir . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2 Le secteur du bâtiment et de la construction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.1 Un secteur majeur pour une transition énergétique réussie . . . . . . . . . . . . 4.2.1.1 Les enjeux de la performance énergétique des bâtiments . . . . . 4.2.1.2 Une situation contrastée à l’échelle mondiale . . . . . . . . . . . . . . 4.2.2 Surmonter les barrières pour exploiter les possibilités d’action . . . . . . . . . 4.2.2.1 Du bâtiment basse consommation au bâtiment à énergie positive : des solutions passives et actives pour la généralisation des bâtiments durables . . . . . . . . . . . . . . 4.2.2.2 Dépasser la question du financement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.3 La réglementation, un levier incontournable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.3.1 Une réglementation plus ou moins ambitieuse, selon le pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.3.2 À secteur complexe, réponse systémique . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.3.3 Une multitude d’outils réglementaires à mobiliser . . . . . . . . . . 4.2.4 L’humain au cœur du bâtiment : sensibilisation, éducation et formation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.4.1 Le rôle majeur de l’usager dans la transition énergétique du secteur du bâtiment . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.2.4.2 Former les professionnels du secteur du bâtiment et de la construction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3 Les transports . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1 L’évolution du secteur des transports . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1.1 Une croissance exponentielle de la mobilité au profit du secteur routier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1.2 L’incidence des émissions du transport sur le climat et la santé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1.3 La dépendance pétrolière du transport . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1.4 Un accès inégal à l’énergie et au transport . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.1.5 De nombreuses externalités négatives aux coûts importants . . . 159 159 160 163 164 166 172 172 172 174 176 176 178 181 181 183 184 186 186 188 190 191 191 194 195 197 198 198 199 201 202 204 206 207 208 209 211 211 212 213 214 216 216 224 226 227 229 230 232 d e 222 222 r e p è r e 217 219 220 221 P o i n t s 4.3.2 Des possibilités d’action à mettre en œuvre par une approche systémique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.2.1 Les énergies de substitution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.2.2 Agir sur l’organisation économique et spatiale pour limiter les émissions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.2.3 Le rôle indispensable de l’usager dans le changement de paradigme . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.2.4 Financer la transition énergétique dans le secteur des transports . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.3 La controverse des biocarburants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.3.1 Proposer une source d’énergie propre sans porter atteinte à la sécurité alimentaire : l’enjeu central des biocarburants . . . . 4.3.3.2 Une projection sur les coûts et les volumes de production des biocarburants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.3.3.3 Les effets des biocarburants sur le changement climatique . . . . 4.4L’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.4.1 Les enjeux et les défis de la transition énergétique dans l’industrie . . . . . . 4.4.1.1 L’enjeu central de l’amélioration de l’efficacité énergétique . . . 4.4.1.2 Les obstacles à surmonter pour atteindre la transition énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.4.1.3 Les transferts de technologie Nord-Sud . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.4.2 Des possibilités d’action à exploiter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.4.2.1 Une grande diversité de technologiques et d’axes de développement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.4.2.2 Refondre l’organisation des entreprises pour encourager les solutions durables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.4.2.3 Le rôle des consommateurs pour orienter le changement . . . . . 4.4.2.4 Les sources de financement potentielles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5L’agriculture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.1 Les enjeux d’une agriculture durable : entre sécurité alimentaire, dépendance aux énergies fossiles et réchauffement climatique . . . . . . . . . 4.5.1.1 Les défis actuels de l’agriculture . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.1.2 L’agriculture et l’énergie fossile : des thématiques étroitement liées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.1.3 L’agriculture en tant que producteur d’énergie renouvelable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.1.4 L’agriculture, l’énergie et le climat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.2 Des possibilités d’action à exploiter . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.2.1 Efficacité énergétique et développement des énergies renouvelables dans les activités agricoles . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4.5.2.2 La transition énergétique intégrée au sein d’une approche systémique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . xvii La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.5.2.3 La transition énergétique intégrée au sein de politiques d’atténuation du changement climatique . . . . . . . . . . . . . . . . . 233 4.5.2.4 L’importance des ressources financières nouvelles et innovantes pour l’investissement dans la transition énergétique et l’agriculture durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234 Conclusion du chapitre 4 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 237 Une conclusion en forme de commencement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La transition énergétique : une exigence de sagesse collective . . . . . . . . . . . . . . . . . . . La solidarité comme partie intégrante de la solution . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . L’après-2015 : le tournant qu’il ne faut pas manquer . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Un guide pour inspirer le changement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 241 241 242 242 243 Table des figures . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245 Table des encadrés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 249 Annexe : Historique des négociations climat . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 251 P o i n t s d e r e p è r e Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 255 xviii BMD BRICS CCNUCC CdP CEA CEDEAO CPDN CPE EAMAU EDF EJ ENERGIES 2050 EPEE ESS FAO FLAME FMI GEF Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie Agence internationale de l’énergie Accord de libre-échange nord-américain Autorité des marchés financiers Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie Banques multilatérales de développement Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques Conférence des Parties Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest Contributions prévues déterminées au niveau national contrat de performance énergétique École africaine des métiers de l’architecture et de l’urbanisme Électricité de France exajoule (1018 joules) Association ENERGIES 2050 Étude de la précarité énergétique en Europe économie sociale et solidaire United Nations Food and Agriculture Organization / Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture Fédération des agences locales de maîtrise de l’énergie et du climat Fonds monétaire international Global Environment Facility d e ADEME AIE ALENA AMF ANCRE P o i n t s r e p è r e Acronymes xix La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e xx GES GIEC gaz à effet de serre Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat GNV gaz naturel véhicule GPL gaz de pétrole liquéfié GWgigawatt ICLEI Conseil international pour les initiatives écologiques locales ICU îlot de chaleur urbain IDH indice de développement humain IEPF Institut de l’énergie et de l’environnement de la Francophonie IFDD Institut de la Francophonie pour le développement durable IFVD Initiative de la Francophonie pour des villes durables INRA Institut national de la recherche agronomique InVS Institut de veille sanitaire IRENA International Renewable Energy Agency ISR investisseurs socialement responsables MAAN mesures d’atténuation adaptées au niveau national MDP Mécanisme pour un développement propre MNV mesure, notification et vérification MOC mise en œuvre conjointe MTD meilleure technique disponible Mtep million de tonnes équivalent pétrole NEPAD New Partnership for Africa’s Development NTIC nouvelles technologies de l’information et de la communication OCDE Organisation de coopération et de développement économiques ODD Objectifs de développement durable OIF Organisation internationale de la Francophonie OMD Objectifs du millénaire pour le développement OMM Organisation météorologique mondiale ONG organisation non gouvernementale ONU Organisation des Nations Unies ONERC Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique OPEP Organisation des pays exportateurs de pétrole SACO SAU SE4All SEAC SME SRB SSE STEP tep TIC TICPE UE UNESCO d e offre au public de titres financiers petites centrales hydrauliques Plan Climat Énergie territorial Plan Climat territorial intégré produit intérieur brut Programme de développement des infrastructures en Afrique petites et moyennes entreprises Programme des Nations Unies pour le développement Programme des Nations Unies pour l’environnement partie par million partenariat public-privé responsabilité sociale des entreprises Société africaine des biocarburants et des énergies renouvelables substances appauvrissant la couche d’ozone surface agricole utile Sustainable Energy for All stockage d’énergie par air comprimé système de management de l’énergie service rapide par bus société de services énergétiques station de transfert d’énergie par pompage tonne équivalent pétrole technologies de l’information et de la communication taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques Union européenne Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture P o i n t s OPTF PCH PCET PCTI PIB PIDA PME PNUD PNUE ppm PPP RSE SABER-ABREC r e p è r e Acronymes xxi Résumé d e P o i n t s a refonte de nos modèles énergétiques est un enjeu majeur au cœur des problématiques actuelles de nos sociétés. Nos modes de production et de consommation, trop énergivores et dépendants des énergies fossiles, engendrent des déséquilibres économiques et sociaux ainsi que des impacts environnementaux qui s’accentuent avec la croissance de la demande : accès inégal à l’énergie, volatilité des prix, incertitudes quant aux réserves disponibles, tensions géopolitiques, pollution atmosphérique, terrestre et hydrique, dégradation des écosystèmes, etc. Ces déséquilibres ne peuvent être soutenus sur le long terme. L’exploitation des ressources fossiles à des fins énergétiques est également l’une des principales sources d’émissions de gaz à effet de serre, à l’origine du changement climatique. Les perturbations engendrées par ce phénomène (réchauffement des températures, montée des eaux, évènements climatiques extrêmes, etc.) ont des répercussions croissantes sur les populations les plus vulnérables et mettent en péril un certain nombre de secteurs d’activité. En dépit des négociations intergouvernementales menées dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) depuis plus de vingt ans, et de l’Accord de Paris adopté lors de la 21e Conférence des Parties de la CCNUCC, force est de constater que jusqu’ici, les avancées n’ont pas été à la hauteur des défis à relever. Plus qu’une simple réponse à ces problématiques, la transition énergétique s’inscrit comme une exigence de sagesse collective qui doit être perçue non seulement comme un coût, mais également comme un ensemble d’opportunités aux avantages multiples : atténuation des changements climatiques, adaptation à l’évolution du climat, maîtrise de la pollution, accès aux services énergétiques modernes, règlement des conflits, soutien à l’éradication de la pauvreté dans les pays du Sud comme du Nord, etc. Elle doit pour cela s’appuyer sur une réorganisation totale de l’offre, mais également et en premier lieu sur une meilleure gestion de la demande, autour d’une stratégie axée sur trois volets globaux et complémentaires : • Sobriété énergétique : réduire la demande en modifiant le rapport de nos sociétés à l’énergie et à la consommation et en limitant les usages excessifs et le gaspillage. Le changement de comportement des différents acteurs sera, dans ce cadre, au cœur des problématiques. r e p è r e L xxiii P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir xxiv • Efficacité énergétique : réduire la quantité d’énergie nécessaire pour fournir un même niveau de service énergétique au consommateur, notamment par l’optimisation des systèmes et réseaux et l’amélioration de la performance des équipements. • Énergies renouvelables : développer l’utilisation des énergies renouvelables (solaire, éolien, géothermie, hydraulique) pour répondre à la demande « incompressible » en énergie. Si les technologies disponibles s’améliorent et sont de plus en plus économiques, ce changement de paradigme passera nécessairement par la levée de certaines barrières, aux premiers rangs desquelles figurent les subventions publiques aux énergies fossiles et la centralisation des marchés de l’énergie. L’innovation technologique, managériale et organisationnelle, ainsi que la gestion raisonnée de l’énergie, doivent également être au cœur de la transition. Par ailleurs, cette transition ne pourra se faire qu’avec l’engagement de tous les acteurs, un engagement qui nécessitera des politiques de formation, de renforcement des capacités, de sensibilisation et d’information, mais également l’utilisation d’outils incitatifs et réglementaires. L’innovation et la recherche ainsi que la mobilisation des mécanismes innovants de financement joueront des rôles critiques. Les transferts technologique et financier dans le cadre de la coopération Nord-Sud et Sud-Sud devront être favorisés et jouer son rôle de levier pour susciter un développement sobre en carbone des pays du Sud. Cela dit, de nombreuses initiatives existent déjà dans l’ensemble des secteurs d’activité, avec des expériences innovantes à tous les échelons (global, étatique, collectivité locale, entreprise et citoyens) qu’il convient d’étendre et de dupliquer. Des projets concrets ont ainsi été mis en œuvre dans les principaux domaines de consommation énergétique, notamment dans l’environnement construit (villes, bâtiments, etc.), les transports, l’industrie et l’agriculture. Pour autant, il reste nécessaire d’intégrer ces différentes actions au sein d’une stratégie globale, qui coordonne les acteurs, crée des complémentarités et des synergies, et permet d’éviter la duplication des efforts. Une telle stratégie représente à la fois la clé du succès et le défi le plus important de la transition : les logiques sectorielles doivent être intégrées dans des stratégies transversales ; les réflexions, décloisonnées ; les efforts de coordination, démultipliés ; l’information, adaptée et communiquée de façon pertinente. La mise en œuvre des solutions reposera en grande partie sur le bon sens. Elle répondra aux multiples enjeux économiques, environnementaux et sociétaux auxquels nos sociétés sont aujourd’hui confrontées. La transition énergétique doit se fonder sur une approche globale et systémique impliquant l’ensemble des acteurs et des secteurs d’usage de l’énergie. Aux regards des défis sans précédent auxquels nous devons faire face, elle nécessite la redéfinition des paradigmes de consommation et de production actuels pour passer rapidement de la prise de conscience aux actes concrets, sans oublier d’intégrer l’indispensable solidarité à mettre en place en tant que partie intégrante de la solution. Introduction Le modèle économique prédominant a longtemps reposé sur un cycle linéaire en quatre phases : extraction des matières premières ; production et transformation ; consommation ; gestion des déchets. Cela dit, les effets environnementaux et climatiques sont devenus, jour après jour, crise après crise, de plus en plus visibles. Désormais, personne ne peut ignorer la réalité des conséquences présentes et futures de l’utilisation des énergies fossiles. Cela fait déjà plus de quarante ans que les premières alertes sur les conséquences prévisibles de notre modèle énergétique ont été lancées. Dès 1972, le d e Une prise de conscience déjà ancienne sur les limites du modèle actuel P o i n t s L’humanité a connu, dans son histoire contemporaine, deux transitions énergétiques majeures. La première est liée à l’exploitation à grande échelle des énergies fossiles, qui a débuté au 18e siècle avec la révolution industrielle. En se substituant progressivement aux combustibles traditionnels (bois et charbon de bois), le charbon, le pétrole et le gaz naturel ont permis des progrès sans précédent dans des secteurs clés tels que l’industrie et les transports. La deuxième transition a été liée à l’utilisation de l’électricité qui s’est accompagnée d’avancées technologiques majeures, notamment dans les domaines de l’informatique et des technologies de l’information et de la communication. Si ces évolutions ont permis des progrès importants en ce qui concerne la santé, l’éducation, l’alimentation, la mobilité et le confort, il convient de garder à l’esprit qu’une part significative de la population mondiale n’a toujours pas accès aux services énergétiques dits « modernes » et qu’elle est restée ou s’est enfoncée dans des situations de précarité ou de pauvreté énergétique. Les avancées technologiques et les progrès réalisés ont par ailleurs plongé les sociétés modernes dans une illusion d’abondance. L’énergie s’est progressivement dématérialisée et le consommateur, détaché du processus de production énergétique, n’est aujourd’hui bien souvent réactif qu’au signal-prix, au-delà de toute autre considération. Pendant ce temps, le coût de l’énergie (aussi bien en temps qu’en argent) a diminué significativement, et c’est sur cette énergie abondante, accessible et bon marché que se sont développées les sociétés modernes. r e p è r e Un modèle de développement énergivore et un accès inégal aux services énergétiques 1 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 2 rapport intitulé Halte à la croissance (traduction imparfaite du titre anglais The Limits to Growth) mettait en évidence les limites d’une croissance économique soutenue face à des ressources finies. La même année était organisé le premier Sommet de la Terre à Stockholm. Pour autant, il faudra attendre vingt ans et le troisième Sommet de la Terre, à Rio en 1992, pour que l’avenir de la planète soit replacé au cœur des enjeux de notre histoire collective. La notion de développement durable est alors introduite, et un plan d’action pour le 21e siècle – appelé Action 21 – est élaboré. Ce Sommet de Rio marque également l’adoption par la communauté internationale de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Depuis, les instances et les plans d’action se sont multipliés et les rencontres se sont succédé : Sommets de la terre, Conférences Climat1, Sommet des Nations-Unies, etc. Malgré cette mobilisation de la communauté internationale, force est de constater que notre modèle de développement a montré ses limites et que nos modes de consommation et de production sont la source d’impacts importants sur les ressources naturelles, l’Homme et la planète, et que notre capacité même de survie est remise en question. Dans ce contexte, l’année 2015 a constitué une année charnière marquée par l’organisation de trois évènements majeurs du développement et de la lutte contre les changements climatiques : • la conférence sur le financement du développement d’Addis-Abeba (Éthiopie), en juillet ; • l’adoption des Objectifs du développement durable (ODD), lors du sommet spécial des Nations Unies à New York en septembre, qui a permis de fixer une nouvelle feuille de route (prenant la suite des Objectifs du millénaire pour le développement) pour la période 2015-2030 ; • l’organisation de la 21e Conférence des Parties signataires de la CCNUCC (CdP 21), qui a abouti à un accord international historique sur le climat. Au-delà des effets d’annonce et des engagements pris, l’ère post-2015 va être une période critique durant laquelle les États devront revoir leurs politiques en fonction des objectifs définis lors de ces évènements et des Contributions prévues déterminées au niveau national (CPDN) présentées à la CdP 21. Une prise de conscience qui reste insuffisante face aux crises récurrentes Si la prise de conscience est réelle, les réalisations concrètes restent, pour le moment, trop limitées comparées aux défis rencontrés. La mauvaise gestion et l’appauvrissement des ressources naturelles ont conduit à des situations souvent dramatiques, particulièrement pour les populations déjà vulnérables des pays en développement et des pays dits « les moins avancés ». Dans ces régions, près d’une personne sur cinq disposait 1. Conférences des Parties sous couvert de la CCNUCC. Introduction en 2014 de moins de 1,25 dollar par jour2 pour subvenir à ses besoins, et les tensions et conflits pour s’accaparer des ressources devenues de plus en plus rares se sont renforcés au cours des dernières années. Ces situations sont par ailleurs exacerbées par les conséquences du changement climatique, qui devraient s’accentuer encore dans les décennies à venir, selon le cinquième rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié en 2014. Selon les tendances actuelles, le réchauffement des températures moyennes, comparativement à l’ère préindustrielle, pourrait ainsi atteindre de 3,5 °C à 4,5 °C d’ici la fin du siècle, alors que les États se sont engagés à ne pas dépasser une augmentation de 2 °C pour éviter toute perturbation potentiellement « catastrophique et irréversible ». En tant que préalable à des interventions efficaces et appropriées, la connaissance et la compréhension des enjeux, mais aussi des possibilités d’action, sont indispensables. C’est avec cet objectif que l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD), organe subsidiaire de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), 2. ONU (2014a) d e Un guide sur la transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s L’énergie est au cœur de tous les enjeux. Seule une profonde transformation des modèles énergétiques dominants permettra de relever les multiples défis auxquels nous sommes tous collectivement confrontés. Cela ne peut se faire qu’en s’engageant sur des trajectoires qui répondent à la fois aux enjeux de durabilité et à ceux d’une accessibilité universelle et équitable. Il ne s’agit ni plus ni moins que de la plus grande révolution à laquelle nos sociétés aient été confrontées, qui relève à la fois d’une responsabilité inter- et intragénérationnelle. Le défi est d’autant plus important que beaucoup de pays émergents ou en développement sont confrontés à des besoins en forte augmentation, sous l’effet d’une importante croissance démographique associée à un développement économique rapide. Si la transition énergétique peut sembler être une obligation au regard du contexte actuel, il convient de souligner qu’elle représente également un trésor d’opportunités pour des sociétés qui vivent actuellement à crédit aux dépens de la planète. Alors que les défis sont multiples et que les conséquences désastreuses du modèle présent sont de plus en plus visibles, rien ne serait pire que de céder à l’apparente fatalité. L’histoire de l’humanité se réécrit tous les jours et les occasions d’agir existent. Si la communauté internationale se mobilise largement sur ces sujets, des actions pourront être entreprises à tous les niveaux, dans tous les secteurs et par chacun des acteurs. r e p è r e L’énergie au cœur des défis d’aujourd’hui et de demain… 3 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4 avec l’appui de l’association ENERGIES 2050, a décidé de publier ce guide sur la transition énergétique. Le présent guide s’adresse volontairement à un public pluriel et composite qui comprend les décideurs politiques, mais aussi, plus globalement, l’ensemble des acteurs, qu’ils soient publics, privés ou simples citoyens. Il s’efforce de présenter un exposé factuel, pédagogique et pratique de la situation, tout en insistant sur un certain nombre de concepts nécessaires à la compréhension de l’indispensable transition à mettre en œuvre. Il se divise en quatre chapitres complémentaires, qui peuvent toutefois être lus indépendamment, suivant les intérêts et priorités de chacun. • Le premier chapitre présente la problématique énergétique dans une perspective globale, en décrivant le système énergétique actuel et en mettant en évidence ses limites au regard des évolutions à venir (partie 1.1). La responsabilité de ce système dans le phénomène du réchauffement climatique et ses conséquences prévisibles sont soulignées (partie 1.2). Ce chapitre s’attarde enfin sur la nécessité de revoir nos modèles de fonctionnement au regard des défis collectifs auxquels nos sociétés sont confrontées (partie 1.3). • Le deuxième chapitre présente les grands principes et objectifs de la transition énergétique. Le lecteur découvrira, dans un premier temps, les moyens d’agir sur la demande en énergie, à travers les notions de sobriété et d’efficacité énergétique (partie 2.1). En tant que pilier incontournable de la transition, les énergies renouvelables sont ensuite présentées, avec leurs avantages comparatifs et leurs perspectives d’évolution (partie 2.2). Il s’agira ensuite d’étudier l’indispensable innovation à mettre en œuvre comme moyen d’accélérer la transition énergétique (partie 2.3). Certaines des mesures à prendre quant à la gestion des énergies fossiles seront enfin exposées (partie 2.4). • Le troisième chapitre s’intéresse aux acteurs de la transition énergétique et à leurs rôles respectifs dans cette transition. La question de la gouvernance internationale et du rôle des Nations Unies est tout d’abord analysée (partie 3.1), suivie de la place des États et de la coopération (partie 3.2). Dans ce chapitre, le rôle primordial des gouvernements locaux face aux défis énergétiques et du changement climatique est ensuite souligné (partie 3.3). L’implication du secteur privé est développée dans la partie 3.4, qui précède une analyse du rôle et de la place du citoyen dans ce processus global et universel (partie 3.5). • Les enjeux et les possibilités d’action propres à chaque domaine de consommation énergétique sont décrits en détail dans le quatrième et dernier chapitre. La question des villes et de l’urbanisme (partie 4.1) est primordiale, tout comme les thématiques interdépendantes du bâtiment et de la construction (partie 4.2) et des transports (partie 4.3). Enfin, les possibilités existantes au sein des secteurs industriel (partie 4.4) et agricole (partie 4.5) sont analysées. Le présent guide est inévitablement incomplet, car il paraît impossible de synthétiser en quelques pages les siècles d’histoire qui ont été conditionnés par notre rapport à l’énergie. Celle-ci a été et reste omniprésente dans notre quotidien, et la raconter revient à relater notre propre histoire passée et présente, mais aussi nos futurs possibles. Introduction P o i n t s d e r e p è r e Aujourd’hui, plus que jamais, il est essentiel que chacun se réapproprie ce patrimoine commun et qu’une véritable réflexion collective se fasse au plus vite pour nous engager résolument, une bonne fois pour toutes, sur des trajectoires de développement sobres en carbone, respectueuses des ressources naturelles et d’une indispensable solidarité inter- et intragénérationnelle. Le temps n’est plus au plaidoyer, mais à l’action. Chacun d’entre nous peut concourir à cette réalité dans son quotidien. L’histoire reste à écrire… connaître pour agir, voilà l’indispensable premier pas. Telle est l’invitation à l’action que se propose de partager ce guide, ici et ailleurs, pour que chacun se réapproprie la question énergétique et se fasse le porte-parole de la nécessaire transition à mettre en place. 5 Chapitre 1 Énergie, climat et développement, ou de la nécessité de revoir notre système énergétique L’énergie a joué un rôle majeur dans la construction de notre histoire moderne. Elle est à l’origine, en grande partie, des rapports de forces entre les pays. Malgré une inégale répartition des réserves de combustibles, notre histoire énergétique reposait, jusqu’à ces dernières années, sur une énergie accessible et abondante, favorisant une surconsommation que nous pouvons qualifier d’ébriété énergétique. Cependant, ce système trouve aujourd’hui ses limites face aux besoins d’une population toujours plus importante, qui ont des conséquences indéniables sur l’environnement et le climat. Les ressources se raréfient et sont de plus en plus difficiles à mobiliser ; l’accès à l’énergie est très inégal dans le monde ; l’évolution et la volatilité des prix sont des vecteurs de difficultés d e 1.1 Un système énergétique obsolète P o i n t s énergie a été un facteur déterminant à l’origine du développement des pays industrialisés, dont les modes de production et de consommation dépendent largement de l’accès à une énergie abondante et bon marché. Les pays en développement, pour leur part, restent confrontés à un déficit d’accès à une énergie moderne, propre et durable. Cela constitue un frein considérable à leur croissance économique et à l’amélioration des conditions de vie des populations. Actuellement, le système énergétique mondial dépend majoritairement des énergies fossiles, par essence limitées, alors que la demande énergétique ne fait qu’augmenter, notamment en raison d’une croissance démographique mondiale soutenue. Au-delà de cette pression croissante, le caractère majoritairement carboné de l’offre énergétique n’est pas sans conséquence sur l’environnement. Les émissions de gaz à effet de serre générées par la combustion de ces ressources constituent l’une des principales causes du réchauffement climatique. Ce modèle n’est pas soutenable, et la transition énergétique apparaît comme une exigence. Pour autant, il importe de bien comprendre ces différents enjeux et les limites du système énergétique actuel afin de mieux appréhender les solutions et perspectives d’action à mettre en œuvre. Ce premier chapitre s’attachera à présenter les grandes caractéristiques du système énergétique actuel et ses limites (partie 1.1), puis abordera la problématique du réchauffement climatique et la responsabilité des combustibles fossiles dans ce phénomène (partie 1.2). Il traitera enfin du rôle de l’énergie dans les processus de développement, faisant du service énergétique un préalable indispensable pour répondre aux défis des pays en développement (partie 1.3). r e p è r e L’ 7 La transition énergétique : connaître et partager pour agir économiques dans de nombreux pays. Face à ces constats, chacun s’accorde à dire qu’un tel système ne peut que conduire vers une impasse en termes de sécurité, de climat et d’équité sociale. Un changement radical de paradigme paraît dès lors indispensable. 1.1.1 L’ébriété énergétique ou le constat d’une demande en énergie toujours plus grande Depuis l’invention de la machine à vapeur au 18e siècle, la consommation mondiale d’énergie n’a cessé de croître. Les prévisions pour les décennies à venir indiquent que la courbe de croissance n’est pas près de s’inverser. Principalement soutenue par le développement des pays industrialisés, la croissance de la demande mondiale en énergie est aujourd’hui surtout le fait des économies en transition. Sachant que les pays en développement tendent à suivre les mêmes trajectoires, il est certain que seule une transformation du modèle actuel et de notre rapport à l’énergie pourra freiner cette consommation et cette soif d’énergie apparemment illimitée. Figure 1. Évolution de la consommation en énergie primaire selon la source énergétique, 1850-2008 P o i n t s d e r e p è r e 1.1.1.1 L’Homme et l’énergie : une histoire ancienne, un amour devenu schizophrène Au fil de l’histoire, la progressive maîtrise de l’accès à l’énergie a des liens étroits avec les grandes étapes de l’évolution des sociétés humaines. De la découverte du feu, il y a environ 250 000 ans, à la maîtrise récente de l’énergie nucléaire, en passant par l’invention de la machine à vapeur puis de l’électricité, les révolutions énergétiques ont contribué significativement au développement et à la sophistication des civilisations humaines. C’est d’ailleurs l’arrivée de la machine à vapeur, inventée par James Watt en 1769 et permettant pour la première fois de convertir une énergie thermique en énergie mécanique, qui marque le début de l’ère industrielle. La figure 1 met en évidence la corrélation entre les différentes avancées technologiques et la croissance de la demande énergétique depuis 1850. 8 Source : ENERGIES 2050, d’après GEA (2012) Énergie, climat et développement Jusqu’au milieu du 19e siècle, la biomasse traditionnelle constitue la principale source d’énergie, mais elle se voit progressivement remplacée par le charbon, marquant ainsi l’entrée des énergies fossiles dans le bouquet énergétique mondial. Avec l’avènement des transports (maritime, terrestre et aérien), la consommation de pétrole se développe exponentiellement. L’avènement de l’électricité au 20e siècle révolutionne le secteur énergétique. Grâce à ses nombreux avantages (transport, distribution et utilisation possible dans de nombreux secteurs), cette forme d’énergie s’impose progressivement dans tous les usages : éclairage, production de chaleur et de froid, transport, industrie, communications… Avec l’électricité apparaissent également de nouveaux moyens de production d’énergie, tels que les barrages hydroélectriques ou, plus récemment, l’énergie nucléaire, sans oublier le développement des différentes technologies utilisant des sources d’énergie renouvelables. L’électricité est également à l’origine de la révolution numérique, avec le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC). 1.1.1.2 Une énergie présente dans tous les secteurs d’usage L’usage de l’énergie a connu différents stades d’évolution au fil du temps. Employée depuis des millions d’années à des fins domestiques (se chauffer, cuisiner…), l’énergie a ensuite joué un rôle prépondérant en se mettant au service du développement de l’industrie. Elle occupe maintenant une place croissante dans le secteur des transports et, plus généralement, dans l’ensemble des secteurs d’usage (agriculture, industrie, bâtiment et environnement construit). La figure 2 illustre la répartition de la demande énergétique entre les grands secteurs de consommation, qui sont, par ordre d’importance : l’industrie, le transport, le secteur résidentiel et le secteur commercial. Source : ENERGIES 2050, d’après la base de données disponible sur le site Internet de la US Energy Information Administration (EIA), consulté en décembre 2014. d e Au niveau des prospectives, selon le rapport Energy Outlook 2035 de pétrolier BP, l’industrie conservera sa première place parmi les secteurs les plus consommateurs et sera responsable de plus de la moitié de la croissance de la demande énergétique jusqu’en 2035. Ces estimations reposent notamment sur le rythme sans précédent de P o i n t s r e p è r e Figure 2. Répartition de la consommation énergétique selon le secteur d’usage, 2014 (%) 9 La transition énergétique : connaître et partager pour agir l’industrialisation actuelle du continent asiatique. Le secteur du transport connaîtra quant à lui une croissance stable et représentera 13 % de l’augmentation de la consommation d’énergie. L’agriculture, le secteur résidentiel et les services (représentés dans la section « Autre » de la figure 3) auront une croissance soutenue, plus particulièrement au cours de la décennie 2025-20351. Figure 3. Prévisions de la consommation énergétique, par secteur, jusqu’en 2035 (milliards de tep) P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après BP (2014b). 10 1.1.1.3 Une demande énergétique qui ne cesse de croître La consommation mondiale d’énergie finale2 a presque doublé au cours des quatre dernières décennies, passant de 4 667 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) en 1973 à 9 301 Mtep quatre décennies plus tard, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE)3. Cette croissance ininterrompue s’explique par plusieurs facteurs. Il s’agit tout d’abord de la prépondérance accrue de la consommation d’énergie dans tous les secteurs économiques et plus particulièrement dans l’industrie, qui accompagne le dévelop pement des sociétés industrialisées depuis le milieu du 19e siècle. Il s’agit également de l’amélioration globale du niveau de vie, illustrée notamment par l’usage croissant d’appareils électroménagers, par la démocratisation des transports individuels, par des dépenses de plus en plus importantes dans les services de confort (chauffage, 1.BP (2014b). 2.La consommation d’énergie dite « primaire » est l’énergie totale mesurée au niveau des ressources brutes, c’est-à-dire les ressources telles qu’on les trouve dans la nature (pétrole, charbon, gaz naturel, soleil, etc.). Cette énergie est ensuite transformée pour être utilisable directement par les consommateurs. On parle alors de l’énergie « finale ». Les pertes entre l’énergie « finale » et l’énergie « primaire » sont liées aux systèmes de production, de conversion, de transport et de consommation. 3.AIE (2015a). Énergie, climat et développement Figure 4. Évolution de la consommation mondiale d’énergie finale, selon le type d’énergie (Mtep) Source : AIE (2015a). 4.UN (2013). 5.AIE (2015). Chiffres de 2013. 6.négaWatt (2012). d e Alors que, globalement la demande énergétique connaît une croissance continue depuis le milieu du 19e siècle, tous les pays ne jouissent pas d’un accès égal à une énergie abondante et bon marché. Si, d’un point de vue historique, les pays industrialisés ont été les plus gourmands en énergie, depuis la fin du 20e siècle, les pays émergents contribuent de plus en plus à la hausse continue de la consommation. Ces disparités qui s’observent à l’échelle planétaire concernent également l’offre énergétique, avec une P o i n t s 1.1.2 De la diversité du paysage énergétique aux tensions géopolitiques r e p è r e climatisation…) et, plus récemment, par l’explosion des technologies de l’information et des moyens de communication. Enfin, cela s’explique par la croissance démographique : selon les prévisions des Nations Unies, la population mondiale atteindra les 9 milliards d’habitants d’ici 20404, soit environ 28 % de plus qu’en 2012. Sur cette base, l’AIE prévoit une augmentation de la consommation mondiale en énergie de 16 % par an actuellement à 34 % en 2040, suivant les politiques qui seront mises en place5. Dans un manifeste, l’association négaWatt parle d’« ébriété énergétique6 » pour caractériser l’ivresse dans laquelle nos sociétés, notamment celles des pays développés, se sont engouffrées. Face à une énergie peu onéreuse et considérée comme abondante, voire illimitée, la consommation superflue et le gaspillage se sont démultipliés. Cela dit, derrière ce constat général, la situation énergétique mondiale se compose en réalité de modèles énergétiques très variées et se caractérise par des tensions géopolitiques extrêmement fortes. 11 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e répartition inégale des ressources et l’accaparement de la majorité de la production par une minorité de pays. Ce paysage énergétique mondial est à l’origine d’une diversité de modèles, mais surtout de rapports de force et de situations d’interdépendance très contrastées entre les pays. 12 1.1.2.1 Une consommation inégale pour des modèles énergétiques différents La croissance de la demande énergétique depuis la révolution industrielle a été globalement très importante, mais marquée par une répartition très inégale entre les différentes régions du globe et à l’intérieur de chaque région. Si l’énergie permet de répondre à des besoins très variés (besoins domestiques, production industrielle, transports…), il est clair que ceux-ci varient d’un pays à l’autre, notamment en fonction du contexte historique, social, économique, géographique et culturel de chaque société. Par exemple, un habitant des États-Unis consomme environ 7 tonnes équivalent pétrole (tep) par an7, alors qu’un Bengali ne consomme qu’environ 0,2 tep/an. Dans son ouvrage L’énergie à découvert 8, Patrick Criqui distingue ainsi plusieurs modèles énergétiques : • Le modèle énergétique américain se retrouve notamment en Australie ou au Canada. Ces pays industrialisés présentent une faible densité de population et un accès à des ressources énergétiques abondantes. La consommation d’énergie est très importante et se caractérise par une forte demande dans le secteur des transports et des équipements (automobiles, équipements ménagers ou industriels). Pour ces pays, la consommation oscille entre 6 et 8 tep/an par habitant. • Le modèle partagé par l’Europe ou le Japon se caractérise par des ressources relativement peu abondantes, mais une densité de population plutôt élevée. La consommation énergétique y est deux fois moindre que dans le modèle américain. À titre d’exemple, en Allemagne, en France et au Japon, la consommation par habitant était légèrement inférieure à 4 tep/an9. • Le modèle des pays émergents (notamment les BRICS – Brésil, Chine, Inde, Russie et Afrique du Sud), qui ont entamé leur développement énergétique plus tardivement, mais rattrapent et même dépassent parfois les niveaux de consommation des pays les plus développés, laisse subsister de fortes disparités du fait de leur rythme de croissance plus ou moins rapide et du poids de leur passé. En 2011, un Chinois et un Brésilien consommaient respectivement 2 tep/an et 1,4 tep/an. Bien que relativement peu élevés, ces chiffres témoignent d’une évolution rapide, compte-tenu que leur consommation avoisinait 1 tep/an par habitant au début de ce siècle10. 7.Chiffres de 2011. 8.Criqui (2013). 9.Criqui (2013). Chiffres de 2011. 10.Site Internet de la Banque mondiale, consulté en décembre 2014. Chiffres de 2011. Énergie, climat et développement Les pays en développement, quant à eux, pèsent encore très peu dans la demande énergétique mondiale. Néanmoins, à l’image des pays émergents, ils aspirent à un niveau de confort équivalent à celui des pays industrialisés, et la trajectoire qu’ils emprunteront sera déterminante pour l’avenir du système énergétique mondial. 1.1.2.2 La demande énergétique mondiale en pleine reconfiguration Depuis quelques années, les pays développés connaissent une stabilisation (voire une diminution) de leur consommation en énergie, liée d’une part à la mise en place de politiques respectueuses de l’environnement et, d’autre part, aux impacts de la crise économique. Ainsi, la croissance de la demande énergétique mondiale est principalement liée aux pays émergents : à titre d’illustration, la Chine représentait en 1973 7,9 % de la consommation mondiale d’énergie, contre 21 % quarante ans plus tard, devenant ainsi le plus important consommateur mondial d’énergie11. Globalement, le graphique ci-dessous illustre le poids croissant des pays non membres de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE)12, qui représentaient seulement 39,7 % de la demande en énergie en 1973 et dont la part dépasse désormais les 60 %. 11.AIE (2015a) 12. Les pays de l’OCDE : Allemagne ; Australie ; Autriche ; Belgique ; Canada ; Chili ; Corée ; Danemark ; Espagne ; Estonie ; États-Unis ; Finlande ; France ; Grèce ; H ongrie ; Irlande ; Islande ; Israël ; Italie ; Japon ; Luxembourg ; Mexique ; Norvège ; Nouvelle-Zélande ; Pays-Bas ; Pologne ; Portugal ; République slovaque ; République tchèque ; Royaume-Uni ; Slovénie ; Suède ; Suisse ; Turquie. P o i n t s d e Source : AIE (2015a). r e p è r e Figure 5. Consommation mondiale d’énergie primaire, selon la région du monde, 1973 et 2013 (Mtep) 13 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Par ailleurs, selon les prévisions du BP Energy Outlook 2035, la consommation globale d’énergie augmentera de 41 % d’ici 2035, et 95 % de cette hausse proviendra des pays émergents13. En termes de projections, la figure 6, tirée du rapport Internatio nal Energy Outlook de l’AIE, met en évidence le rôle prépondérant pris par les pays non membres de l’OCDE dans la demande énergétique globale. L’année 2013 confirme le changement de répartition qui, depuis, ne s’est pas démenti. Figure 6. Consommation énergétique mondiale, pays membres et non membres de l’OCDE (« OECD »), 1990-2010 (données réelles) et 2010-2040 (prévisions) (1015 Btu) P o i n t s d e r e p è r e Source : AIE (2013b). 14 1.1.2.3 Une répartition inégale des ressources et des zones de production La diversité du paysage énergétique mondial ne s’observe pas uniquement au niveau de la consommation, car il existe également des contrastes importants en termes de ressources et de production. La figure 7 fait ressortir une production d’énergie qui se concentre principalement au niveau de quelques pays. Les sources d’énergie primaires sont inégalement réparties sur la planète. Ce fait s’observe tout particulièrement dans le cas des énergies fossiles, à savoir le pétrole, le charbon et le gaz naturel : • Pour ce qui est du pétrole, près de trois quarts des réserves mondiales sont détenues par les pays de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP)14, selon la pétrolière BP. Par ailleurs, fin 2012, le Moyen-Orient détenait 48,4 % des réserves mondiales de pétrole, l’Amérique du Sud et centrale 19,7 %, l’Amérique du Nord 13,2 %, l’Europe 8,4 %, l’Afrique 7,8 % et l’Asie-Pacifique 2,5 %15. 13.BP (2014b). 14.BP (2013a). 15.BP (2013a). Énergie, climat et développement Figure 7. Répartition de la production mondiale d’énergie, 2013 (ktep) Source : Site Internet de la Banque mondiale, consulté en décembre 2014. Source : ENERGIES 2050, d’après les données de BP (2013a). P o i n t s d e r e p è r e Figure 8. Une répartition inégale des réserves de combustibles fossiles 15 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e • En ce qui concerne le gaz naturel, près de la moitié des réserves mondiales sont détenues par seulement trois pays : l’Iran (18 %), la Russie (17,6 %) et le Qatar (13,4 %)16. • Enfin, les réserves de charbon se trouvent principalement aux États-Unis (26,7 %), en Russie (18,2 %) et en Chine (13,3 %)17. Cette répartition inégale des réserves et des zones de production influence de manière significative le bouquet énergétique de chaque pays, c’est-à-dire la répartition entre les différentes sources d’énergies consommées (charbon, pétrole, gaz naturel, nucléaire, biomasse, hydraulique ou autres sources d’énergies renouvelables). À titre d’illustration, la Chine, qui détient l’une des plus grosses parts des réserves de charbon, en est également le plus important consommateur et représente plus de la moitié de la consommation globale de charbon18. 16 1.1.2.4 La dépendance énergétique des pays consommateurs La diversité du paysage énergétique mondial et l’inégale répartition des ressources énergétiques sont déterminantes dans les rapports de force entre les pays. La détention des réserves par une minorité d’États pose la question de la sécurité d’approvisionnement des pays importateurs nets d’énergie. Les politiques énergétiques des pays européens sont particulièrement dépendantes des importations, notamment en provenance de la Russie pour le gaz et de l’OPEP pour l’approvisionnement en pétrole. D’après l’office de statistique de l’Union européenne (Eurostat), la dépendance énergétique – c’est-à-dire le rapport entre les importations nettes et la consommation brute d’énergie primaire – des 27 pays de l’Union européenne est de 53,2 %19. L’ensemble des pays de l’Union avait, cette même année, un taux de dépendance énergétique positif, y compris le Danemark, jusqu’alors seul exportateur net de la zone. Aux États-Unis, environ 14 % de la fourniture nette d’énergie primaire est liée aux importations. Le pays était également le principal importateur net de pétrole au monde la même année, devant la Chine et l’Inde20. Sa dépendance aux importations, qui tend néanmoins à diminuer avec l’exploitation de nouveaux gisements pétroliers et des gaz de schiste, pourrait totalement disparaître sur le long terme. Selon les prévisions 16.BP (2013a). 17.BP (2013a). 18.ENERGIES 2050, d’après les données de BP (2013a). Chiffres de 2012. 19.Eurostat, http://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/File:Energy_ dependency_rate,_EU-28,_2003%E2%80%9313_(%25_of_net_imports_in_ gross_inland_consumption_and_bunkers,_based_on_tonnes_of_oil_equivalent)_ YB15-fr.png. Chiffres de 2013. 20.AIE (2015a). P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après GEA (2012). Figure 9. Principaux flux du commerce mondial de l’énergie Énergie, climat et développement 17 La transition énergétique : connaître et partager pour agir de l’AIE, les États-Unis deviendront ainsi le plus gros producteur de pétrole et atteindront une situation d’exportation nette en 203021. La dépendance énergétique rend vulnérables les économies des pays consommateurs, du fait d’une capacité de contrôle très restreinte de ces pays sur les prix de l’énergie. Cela est d’autant plus vrai que la volatilité des prix risque de se faire ressentir encore davantage dans les années à venir, du fait des contraintes d’épuisement pesant sur les ressources fossiles même si les nouvelles découvertes vont probablement changer un peu la donne à court et moyen terme. Les questions d’indépendance et de sécurité d’approvisionnement, d’accès à l’énergie, de compétitivité ou encore de facture énergétique sont, plus que jamais, au cœur des préoccupations des pays importateurs et de la communauté internationale. 1.1.3 Les limites du système énergétique actuel P o i n t s d e r e p è r e Dans un contexte de demande énergétique en perpétuelle croissance, il paraît indispensable de disposer d’un système mondial qui puisse répondre à des besoins grandissants, de manière équitable et durable, c’est-à-dire sans compromettre la capacité des géné rations futures à subvenir à leurs propres besoins dans des conditions décentes et sans hypothéquer notre système climatique. Quelle que puisse être la lecture que chacun fera des chiffres, l’unanimité règne à savoir que le modèle énergétique actuel ne permettra pas de répondre à ces différents enjeux sans une profonde transformation quant au fond et à la forme. 18 1.1.3.1 Une offre majoritairement carbonée L’offre énergétique mondiale se caractérise par une forte dépendance aux combustibles fossiles. Selon des chiffres récents, ceux-ci représentent 87 % de la demande mondiale en énergie (figure 10). Les subventions accordées aux énergies fossiles sont plus de quatre fois supérieures à celles qui sont dédiées aux énergies renouvelables : elles représentaient 490 milliards de dollars en 2014, contre 112 milliards de dollars la même année pour les énergies renouvelables22. En raison notamment de sa facilité de stockage et de transport, le pétrole est la première forme d’énergie consommée dans le monde. Cependant, le charbon pourrait reprendre la place qu’il occupait pendant la première moitié du 20e siècle et redevenir la source d’énergie la plus utilisée du 21e siècle. Entre 2000 et 2012, la consommation de charbon a en effet connu une augmentation de 60 %, d’après les données de l’AIE23. Cette tendance provient des politiques énergétiques des pays émergents, qui contribuent majoritairement à l’accroissement actuel de la demande et qui recourent massivement au charbon. La Chine, par exemple, aujourd’hui devenue le plus gros 21.AIE (2012b). 22.AIE (2015b). 23.Site Internet de l’Agence internationale de l’énergie, consulté en décembre 2014. Énergie, climat et développement Figure 10. Consommation mondiale d’énergie selon la source d’énergie, 2013 (%) Source : ENERGIES 2050, d’après les données de BP (2014a). consommateur d’énergie au monde, fait appel au charbon pour couvrir près de 70 % de ses besoins énergétiques totaux24. Comme le montre la figure 11, le gaz connaîtra cependant la croissance la plus importante dans les années à venir au niveau de la demande. Selon l’AIE, la moitié de cette augmentation (jusqu’en 2035) sera couverte par la production de gaz non conventionnels, venant en majeure partie de la Chine, des États-Unis et de l’Australie. La part relative du pétrole dans la production mondiale d’énergie déclinera dans le même temps. Au final, les parts du gaz, du charbon et du pétrole seront équivalentes pour la première fois depuis la révolution industrielle et avoisineront chacune les 27 %. Source : ENERGIES 2050, d’après BP (2014b). 24.BP (2013a). P o i n t s d e r e p è r e Figure 11. Part des différentes sources d’énergie dans la production mondiale d’énergie primaire, 1965-2035 (prévisions) 19 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Les énergies fossiles resteront donc largement majoritaires en 2035 et produiront à elles seules 81 % de l’énergie mondiale. La part des énergies renouvelables (dont les bio carburants, hors hydraulique) augmentera rapidement, passant de 2 % en 2014 à 7 % en 2035, tandis que l’énergie hydraulique et nucléaire restera stable. La part des énergies renouvelables supplantera la production d’énergie nucléaire en 2025 et coïncidera avec la part de l’énergie hydraulique en 203525. 20 1.1.3.2 Une raréfaction programmée des ressources Alors que la demande énergétique, qui ne cesse de croître, est couverte à 80 % par des ressources fossiles, la question de la disponibilité des ressources sur le long terme reste posée. Celle-ci dépend principalement de deux facteurs : d’une part, l’évolution de la consommation énergétique mondiale dans les prochaines décennies ainsi que la conjonction de conditions économiques ; d’autre part, d’éventuels progrès techniques pouvant permettre d’accéder à de nouvelles ressources inexploitables jusqu’alors. Selon les prévisions de BP, les réserves prouvées de pétrole permettraient de couvrir environ 50 ans de production mondiale et celles de gaz naturel, aux alentours de 55 ans. Quant aux réserves de charbon, elles se situeraient aux alentours de 110 ans26. Cependant, les énergies fossiles non conventionnelles telles que les sables bitumineux ou les gaz de schiste repoussent les échéances auxquelles le monde est confronté. Selon l’AIE, en comptant les réserves de gaz non conventionnel estimées, la disponibilité du gaz naturel pourrait couvrir 220 ans de consommation, si on se base sur les chiffres actuels de la demande énergétique. À ce stade, il est essentiel de rappeler que les chiffres et les stocks disponibles de ces formes d’énergie sont mentionnés ici au-delà de toute considération environnementale, sanitaire ou climatique. Ces différents points seront abordés ultérieurement. Quoi qu’il en soit, la raréfaction des ressources à court et moyen termes est inévitable et le système énergétique actuel risque de conduire à des situations de plus en plus délicates. Alors que le monde fait l’expérience d’une compétition sans précédent pour accéder à des ressources devenues rares, il est indéniable que la contrainte de disponibilité des ressources fossiles mènera à de fortes tensions géopolitiques, sauf si les énergies renouvelables prennent enfin l’envol que chacun d’entre nous attend. De plus, les problèmes d’approvisionnement énergétique auront d’importantes conséquences sur la situation économique des pays importateurs. Malgré ce constat inquiétant, les préoccupations actuelles des gouvernements semblent davantage porter sur les questions d’approvisionnement et d’exploitation de ressources fossiles que sur la problématique du développement des énergies de substitution, qui constituent pourtant la véritable réponse aux défis énergétiques futurs. 25.BP (2014b). 26.BP (2014a). 27.Labrousse (2006). d e P o i n t s 1.1.3.3 Un système énergétique très centralisé Le système énergétique dominant est caractérisé par un éloignement entre les centres de production et de transformation de l’énergie et les zones de consommation. Cette architecture centralisée s’observe aussi bien à l’échelle planétaire, avec la mondialisation des grandes filières énergétiques et l’appropriation de l’offre énergétique par une minorité de pays, qu’à l’échelle nationale, à l’intérieur des pays. D’une manière générale, une production importante d’énergie est localisée au niveau de centrales électriques, et l’électricité est acheminée par un réseau de lignes de transport de différents voltages permettant la distribution jusqu’au point de consommation. La généralisation de l’électricité, l’urbanisation et l’intérêt des économies d’échelle ont contribué à l’apogée de ce système vers la fin du 20e siècle, freinant le développement des systèmes locaux de production et reléguant le client au bout de la chaîne de consommation, sans aucune emprise sur l’offre énergétique. Malgré une augmentation des systèmes de production décentralisés et le développement continu des énergies renouvelables, le caractère centralisé de l’approvisionnement énergétique reste dominant au niveau mondial. Pourtant, il présente de nombreux défauts, qu’il s’agisse des coûts élevés nécessaires à la maintenance de grosses infrastructures, des importantes pertes énergétiques liées à l’acheminement de l’électricité sur de grandes distances ou encore des risques liés à l’instabilité et à la vulnérabilité des centrales en cas d’évènements imprévus (météo, terrorisme, approvisionnement). Par ailleurs, le développement des réseaux de transport et de distribution de l’électricité se heurte à des obstacles, tant dans les pays développés que dans les émergents : « Au Nord, les investissements très importants, les contraintes climatiques, l’épui sement des ressources fossiles, l’opposition des populations à l’implantation d’infra structures de production et de transport d’énergie, rendent de plus en plus difficile l’extension des systèmes centralisés, par ailleurs mal adaptés à la valorisation des énergies renouvelables. Au Sud, tout particulièrement en Afrique subsaharienne, mais aussi dans cer taines régions d’Asie et d’Amérique latine, la conjugaison d’un grand retard dans le développement économique et technologique et une très forte croissance démo graphique rendent illusoire la couverture énergétique “conventionnelle” du territoire national (électricité et gaz en réseaux, carburants) dans un délai raisonnable 27. » Ceci étant, bien que le déploiement de systèmes énergétiques décentralisés apparaisse comme une nécessité, les centrales électriques de grosse capacité restent pertinentes dans certains contextes, notamment au regard des économies d’échelle qu’elles permettent et de l’urbanisation qui continue de progresser dans le monde. Il faudra cependant tendre vers une meilleure intégration entre systèmes décentralisés et centralisés afin de répondre à la diversité des besoins énergétiques d’un territoire donné, dans une logique de développement soutenable. r e p è r e Énergie, climat et développement 21 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 1.2 L’énergie au cœur de la problématique du changement climatique Outre les enjeux d’une population grandissante et d’une répartition inégale des ressources, nos sociétés doivent également faire face à la nécessité de limiter l’utilisation des combustibles fossiles au regard des conséquences pour notre système climatique. En effet, l’influence de l’Homme sur le climat est clairement établie28. Elle est liée, en grande partie, aux émissions de gaz à effet de serre générées par notre modèle énergétique. 1.2.1 Une responsabilité sans équivoque dans le réchauffement climatique P o i n t s d e r e p è r e Cela fait désormais plus de 40 ans que la communauté internationale se mobilise autour du phénomène du réchauffement climatique avec notamment la mise en place, en 1992, de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). Les avancées n’ont cependant pas été à la hauteur des enjeux. Selon le dernier rapport du GIEC, la hausse des températures moyennes entre la période 1850-1900 et la période 2003-2012 a été de 0,85 °C29, une hausse dont l’origine anthropique est « extrêmement probable » (probabilité supérieure à 95 %), toujours selon le même rapport. 22 1.2.1.1 Du principe de l’effet de serre au réchauffement climatique L’effet de serre est un phénomène physique naturel qui est nécessaire au développement de la vie sur Terre, faute de quoi les températures sur notre planète seraient constamment et fortement négatives (aux alentours de –19 °C en moyenne). L’effet de serre se produit à travers une couche de gaz naturellement présents dans l’atmosphère terrestre, les gaz à effet de serre (GES), dont les principaux sont la vapeur d’eau, le dioxyde de carbone, le méthane et le protoxyde d’azote. Cette couche retient une partie de l’énergie solaire qui atteint notre planète en permanence sous la forme de rayonnement ultraviolet (UV) et qui en repart sous la forme de rayonnement infrarouge (IR) (figure 12). Lorsque le rayonnement solaire atteint l’atmosphère terrestre, une partie (environ 28 %) est directement réfléchie vers l’espace. Les rayons incidents qui n’ont pas été réfléchis sont absorbés par l’atmosphère (21 %) ou par la surface terrestre (51 %). La partie du rayonnement absorbée par la surface lui apporte de la chaleur, autrement dit de l’énergie thermique, qu’elle restitue à son tour en direction de l’atmosphère sous forme de rayons infrarouges. Une partie de ces rayons infrarouges traverse l’atmosphère, mais l’essentiel est absorbé et réémis par les molécules de GES. Ceci a pour effet de réchauffer l’atmosphère ainsi que la surface de la Terre. 28.GIEC (2013a). 29.GIEC (2013a). Énergie, climat et développement Figure 12. Principe de l’effet de serre Source : Portail CEA, droits CFA/DCOM, disponible sur http://portail.cea.fr/comprendre/Pages/climat-environnement/ questions-sur-l-effet-de-serre.aspx?Type=Chapitre&numero=1. Si ce phénomène se produit donc naturellement, on relève néanmoins depuis plus d’un siècle des anomalies et un réchauffement accéléré des températures moyennes à la surface terrestre, qui ne peut que s’expliquer que par l’augmentation de la concentration des GES dans l’atmosphère (figure 13). Source : GIEC (2013a). P o i n t s d e r e p è r e Figure 13. Anomalies observées de températures moyennes en surface, combinant les terres émergées et les océans, 1850-2012 23 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 1.2.1.2 Des teneurs en CO2 inédites depuis des millénaires La Terre a toujours connu des variations climatiques importantes, caractérisées par des cycles de périodes glaciaires (périodes de glaciation) et interglaciaires (périodes de réchauffement) d’environ 100 000 ans. L’analyse des glaces polaires a permis de relever une étroite corrélation entre températures et les teneurs en CO2 au cours de ces différents cycles (figure 14). Figure 14. Variations du deutérium (δD) – qui est un indicateur pour la température – et des concentrations atmosphériques en dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4) et protoxyde d’azote (N2O) depuis 650 000 ans P o i n t s d e r e p è r e Source : GIEC (2007). 24 Cela dit, même si les variations climatiques naturelles existent depuis des millénaires, les observations témoignent d’une évolution récente anormale au regard de son intensité et de sa rapidité. Dans son dernier rapport, le Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC, voir l’encadré 1) souligne que « depuis les années 1950, beaucoup de changements observés sont sans précédent depuis des décennies voire des millénaires30 ». Selon le GIEC, afin de pouvoir maintenir la hausse des températures en deçà de 2 °C d’ici 2100 (objectif fixé dans le cadre de la CCNUCC), les émissions cumulatives de carbone émises depuis 1870 ne devraient pas dépasser 2 900 Gt CO2. Sachant qu’environ 1 900 Gt CO2 ont déjà été émises, il nous resterait donc autour de 1 000 Gt CO2 de budget carbone. Or, selon les rapports du GIEC, les réserves prouvées d’énergies fossiles actuelles représenteraient potentiellement des émissions estimées à 3 670 à 7 100 Gt de CO2. Cela signifie qu’au minimum, les deux tiers des énergies fossiles disponibles doivent rester inexploités dans le sol afin d’éviter des dérèglements irréversibles. 30.GIEC (2013a). Énergie, climat et développement En pratique, les observations actuelles montrent que les concentrations atmosphériques de CO2 se situent largement en dehors de l’intervalle de fluctuation observé jusqu’alors. Alors que pendant près de 8 000 ans avant l’ère industrielle, les variations de concentrations atmosphériques de CO2 ne dépassaient pas les 10 parties par million (ppm), celles-ci sont passées d’une valeur préindustrielle de 280 ppm à 379 ppm en 200531 et à plus de 400 ppm aujourd’hui32. Ces anomalies s’observent également pour d’autres gaz à effet de serre, comme le méthane et le protoxyde d’azote (figure 15). Figure 15. Évolution des teneurs en dioxyde de carbone (CO2), en méthane (CH4) et en protoxyde d’azote (N2O) depuis 2 000 ans 31.GIEC (2007). 32.GIEC (2013a). 33.GIEC (2013a). d e P o i n t s 1.2.1.3 L’origine anthropique du réchauffement climatique et le rôle majeur des combustibles fossiles Depuis la publication du premier rapport d’évaluation sur le climat par le GIEC en 1990, les sources et les données scientifiques se sont multipliées et les dispositifs d’analyses ont gagné en performance. L’origine anthropique des changements climatiques observés est devenue de plus en plus évidente, comme l’indique le GIEC dans son dernier rapport : « On détecte l’influence des activités humaines dans le réchauffement de l’atmosphère et de l’océan, dans les changements du cycle global de l’eau, dans le recul des neiges et des glaces, dans l’élévation du niveau moyen mondial des mers et dans la modifica tion de certains extrêmes climatiques. On a gagné en certitude à ce sujet depuis le quatrième Rapport d’évaluation. Il est extrêmement probable que l’influence de l’homme est la cause principale du réchauffement observé depuis le milieu du XXe siècle33. » r e p è r e Source : GIEC (2007). 25 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 1. Le Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC) P o i n t s d e r e p è r e Fondé en 1988 par l’Organisation météorologique mondiale (OMM) et le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), le GIEC est un organisme intergouvernemental qui vise à évaluer objectivement les différents travaux scientifiques réalisés à travers le monde sur le climat. Organisé en trois groupes de travail, le GIEC a les objectifs suivants : • Faire l’état des lieux des recherches scientifiques (Groupe de travail I). • Évaluer les conséquences sur les sociétés et proposer des solutions d’adaptation (Groupe de travail II). • Apprécier les techniques et mesures possibles d’atténuation des effets du changement climatique (Groupe de travail III). Les groupes de travail produisent tous les six à huit ans des rapports reconnus synthétisant les travaux et analyses des scientifiques sur les effets du changement climatique, afin d’informer et d’aider à la prise de décision politique. Des rapports techniques sur des sujets spécifiques (bâtiment, énergies renouvelables, par exemple) sont également produits et viennent, d’année en année, enrichir les connaissances scientifiques mondiales. 26 Il est aujourd’hui devenu évident que Figure 16. Émissions de gaz à effet de serre, nos modes de production et de consomma- selon le secteur économique tion, basés depuis la révolution industrielle sur l’exploitation d’énergies fossiles abondantes et bon marché, ont joué un rôle significatif dans ces bouleversements. Avec un indice de confiance supérieur à 95 %, le dernier rapport du GIEC réaffirme ainsi l’origine anthropique du réchauffement climatique, provoqué en grande partie par nos systèmes énergétiques. Les secteurs les plus gourmands en énergie – l’industrie, le transport et les bâtiments – figurent parmi les plus importants émetteurs en gaz à effet Source : ENERGIES 2050, d’après GIEC (2014). de serre, aux côtés de la production d’électricité et de chaleur (figure 16). Le secteur « Utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie » (UTCATF ; en anglais : agriculture, forestry and other land use ou AFOLU), deuxième émetteur global (notamment à travers la dégradation des puits de carbone), est lui aussi lié de façon directe et indirecte à la question énergétique (par exemple avec le bois énergie). Énergie, climat et développement 1.2.2 Les conséquences des changements climatiques L’« écosystème » terrestre repose sur des équilibres fragiles qui ont évolué durant des millénaires pour atteindre leur état actuel. Ces équilibres peuvent être fortement perturbés par une faible variation de leur environnement ; une élévation de la température moyenne à la surface terrestre, même modeste, peut donc avoir des conséquences irréversibles. Les conséquences pour l’Homme et son environnement sont nombreuses et sont déjà ressenties à travers la planète : disparition d’écosystèmes, diminution des ressources naturelles disponibles, crises alimentaires associées à l’appauvrissement des sols et à la baisse des rendements agricoles, tensions et conflits géopolitiques, déplacements de populations (réfugiés climatiques), augmentation de la pauvreté, coûts liés aux inondations et autres évènements climatiques extrêmes, etc. 1.2.2.1 Hausse des températures et bouleversements associés Le GIEC a élaboré différents scénarios en fonction des niveaux présents et futurs d’émissions de GES. Dans le scénario correspondant à une stabilisation rapide des concentrations atmo sphériques de gaz à effet de serre (scénario Representative Concentration Pathways 2.6 ou RCP2.6), l’augmentation de la température moyenne à la surface du globe est comprise entre 0,3 °C et 0,7 °C entre 2016 et 2035 par rapport à la période 1986-2005. Sur la période 2081-2100, le changement de température oscille entre 0,3 °C et 1,7 °C. Sur la base de nos trajectoires actuelles, le scénario RCP8.5, plus pessimiste mais malheureusement plus réaliste (figure 17), annonce une augmentation comprise entre 2,6 °C et 4,8 °C34. Source : GIEC (2013b). 34.GIEC (2013a). P o i n t s d e r e p è r e Figure 17. Évolution de la température moyenne à la surface du globe, selon le scénario envisagé 27 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Pour que chacun puisse apprécier l’importance du « grand écart », on rappellera que, dans le cadre de l’accord établi lors de la Conférence de Paris sur le climat (CdP 21), qui s’est déroulée du 30 novembre au 12 décembre 2015, les États-Parties de la CCNUCC ont réaffirmé la nécessité de contenir le réchauffement « nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » tout en « poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels » (article 2). En préparation de cet accord, les Parties avaient communiqué tout au long de l’année 2015 leurs Contributions prévues déterminées au niveau national (CPDN). Celles-ci présentent les efforts que chacune est prête à fournir individuellement et volontairement pour atteindre collectivement les objectifs de la CCNUCC, notamment en termes de réduction ou de limitation des émissions de GES. Cependant et en l’état, les CPDN, sous réserve que les engagements pris soient respectés, ne permettraient que de limiter le réchauffement à environ 2,7 °C35. Il faut noter que, entre 1971 et 2010, plus de 60 % de l’augmentation nette d’énergie absorbée par le système climatique a été emmagasinée par les couches superficielles des océans et des mers (jusqu’à 700 m de profondeur)36. Le réchauffement des eaux a notamment entraîné leur acidification, leur dilatation thermique ainsi qu’une diminution nette de l’étendue de la banquise dans l’hémisphère Nord. Cumulée à la fonte accélérée des glaciers, notamment ceux du Groenland et de l’Antarctique, cette action a amené une hausse du niveau des mers de 19 cm en moyenne (17 à 21 cm) entre 1901 et 2010, qui s’est accélérée au cours des dernières décennies à un rythme sans précédent sur les derniers millénaires37. Selon les projections, la hausse du niveau des mers pourrait atteindre de 26 cm (RCP2.6) à 85 cm (RCP8.5) d’ici la fin du siècle. P o i n t s d e r e p è r e Figure 18. Évolution du niveau moyen des mers 28 Source : GIEC (2013b). 35.Climate Action Tracker, State of Play 7 December 2015. [En ligne] http://climateactiontracker.org/indcs.html. 36.GIEC (2013b). 37.GIEC (2013b). Énergie, climat et développement Ces constats sont d’autant plus alarmants qu’une réduction drastique et immédiate de nos émissions de CO2 ne permettrait pas d’endiguer les bouleversements observés, qui persisteront probablement pendant plusieurs siècles. En effet, la durée de vie des molécules de GES dans l’atmosphère est relativement longue, et l’inertie du système climatique est importante. Pour finir, en plus du réchauffement global et de la montée des eaux, ce phénomène se traduira également par une instabilité accrue dans le régime P o i n t s Source : GIEC (2013b). d e r e p è r e Figure 19. Cartes des principales évolutions climatiques, selon deux scénarios extrêmes d’émissions de GES 29 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e des précipitations, des vagues de chaleur plus fréquentes et plus fortes dans certaines parties du monde, l’acidification des océans (baisse du pH de 0,06 à 0,32 d’ici 2100) et une perturbation du cycle océanique en raison de la chaleur absorbée. 30 1.2.2.2 Des impacts en cascade sur l’Homme, les écosystèmes et les sociétés Selon les scientifiques, les impacts anticipés des changements climatiques varieront en fonction de nos futures émissions de gaz à effet de serre. Il faut noter ici que les effets du changement climatique viennent souvent accélérer et amplifier des pressions anthropiques déjà existantes sur l’environnement. En fonction des réponses et de l’ampleur des phénomènes, les répercussions peuvent être plus ou moins dramatiques. Elles pourraient conduire à des pénuries alimentaires, des catastrophes naturelles, des déplacements massifs de populations, etc., créant des tensions tant à l’intérieur des pays qu’à l’international et pouvant mener à une augmentation des risques de conflit. Ces répercussions découlent notamment d’une redistribution des cartes en termes de pluviométrie et de températures moyennes et, selon les régions, des sécheresses, des inondations, des tempêtes, des cyclones ou d’autres types d’évènements extrêmes plus fréquents et plus intenses. La montée du niveau de la mer a déjà des effets destructeurs directs, appelés à s’amplifier, sur les infrastructures côtières et urbaines et sur la salinisation des sols. D’une manière générale, les impacts sur les écosystèmes et les ressources naturelles (et les services qu’ils peuvent rendre aux Hommes) vont se renforcer. La question de l’eau occupe une place centrale. En raison d’une modification et d’une instabilité accrue du régime des précipitations (figure 20), certaines régions souffriront de sécheresses prolongées alors que d’autres, situées à basse altitude ou le long des côtes, devront faire face à des inondations répétées. Ces phénomènes auront notamment un impact sur la disponibilité de la ressource et affecteront fortement l’agriculture, avec un risque de diminution importante des rendements agricoles. Les contraintes qui pèseront sur les ressources alimentaires et en eau potable auront de graves conséquences sur la santé des populations, notamment les plus pauvres, qui seront également davantage exposées aux maladies transmises par la prolifération d’insectes (par exemple le paludisme pour les régions tropicales). Au-delà de ces impacts désastreux, des populations entières seront de plus en plus affectées et menacées par des catastrophes naturelles répétées et dévastatrices. Les conséquences seront d’autant plus lourdes dans les zones qui ne disposent pas d’infrastructures adéquates ou de services nécessaires pour anticiper les effets du changement climatique et s’y adapter. Alors que le nombre de réfugiés climatique augmente de jour en jour, l’aggravation des conditions climatiques dans certaines régions amplifiera inévitablement les phénomènes de migration. Le monde pourrait faire face à une aggravation des risques de conflit pour l’accès à des ressources devenues rares, telles l’eau ou les ressources naturelles. La diminution des rendements agricoles et l’insécurité alimentaire auront une forte incidence à la hausse sur le prix des denrées alimentaires (et sa volatilité), sur le problème de la malnutrition et sur la formation de nouvelles vagues de pauvreté. Énergie, climat et développement Figure 20. Changements observés concernant les précipitations annuelles sur les terres émergées 38.Stern N. (2006). d e P o i n t s Il va sans dire que les répercussions du changement climatique sur les écosystèmes et la biodiversité inquiètent également les scientifiques, en raison du risque accru d’extinction pour un grand nombre d’espèces. Certaines réussiront à migrer ou à s’adapter rapidement à un nouvel environnement, mais d’autres n’y parviendront pas. Cette situation prend d’autant plus d’ampleur du fait que le réchauffement climatique inter agit avec d’autres facteurs de pression tels que la modification des habitats, la surexploitation des sols, la pollution et la prolifération des espèces envahissantes. Les écosystèmes marins seront particulièrement bouleversés par l’acidification des océans. Déjà en 2006, l’économiste Nicolas Stern chiffrait à plus de 5 500 milliards d’euros l’impact du changement climatique en l’absence de mesures efficaces38. Il prenait en compte les facteurs suivants : • la baisse de la productivité agricole ; • le coût associé à la perte de biodiversité ; • les dégâts causés par la fréquence accrue des phénomènes naturels extrêmes ; • les conséquences de la crue des eaux ; • les coûts engendrés par les migrations climatiques ; • les coûts en termes de santé publique (maladies, canicules, pollution). Les risques d’impacts du changement climatique dépendent aussi de la vulnérabilité (sur le plan de la capacité d’adaptation) et de l’exposition des systèmes naturels et des sociétés humaines. Ce sont les pays en développement, déjà fragilisés et confrontés à des réalités difficiles, qui pâtiront le plus des bouleversements à venir, alors même que leur responsabilité historique dans le phénomène climatique est quasi nulle, comparativement à celle des pays industrialisés. Cela dit, au cours des prochaines décennies, les pays en développement seront amenés à jouer un rôle prépondérant dans la croissance de la demande énergétique mondiale (et donc dans les émissions de GES). Les tra jectoires énergétiques qu’ils emprunteront seront donc déterminantes pour l’avenir climatique de la planète. r e p è r e Source : GIEC (2013b). 31 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 1.3 L’énergie au service du développement 1.3.1 Des situations énergétiques révélatrices de différences de développement P o i n t s d e r e p è r e Comme cela a été souligné précédemment (voir la partie 1.1.2), il existe de véritables disparités au niveau de la demande énergétique mondiale. À titre d’illustration, rappelons ici que les pays de l’OCDE, qui représentent environ 15 % de la population mondiale, consomment près de 45 % de l’énergie primaire dans le monde, contre seulement 3,2 % pour le continent africain, qui a le même poids démographique de 15 %39. Cette réalité fait ressortir la corrélation entre demande énergétique et niveau de développement, qui se traduit concrètement par des problématiques énergétiques très différentes entre les pays développés et les pays en développement. 32 1.3.1.1 Un déficit d’accès dans les pays en développement : la pauvreté énergétique, un fardeau lourd à gérer Malgré la croissance ininterrompue de la consommation énergétique mondiale depuis la révolution industrielle, pas moins de 2,6 milliards de personnes ne bénéficient toujours pas de services énergétiques modernes et 1,3 milliard d’habitants n’ont pas accès à l’électricité. La majorité d’entre eux est localisée dans les pays en voie de développement et, selon l’AIE, plus de 85 % vivent en milieu rural40. Pour subvenir à leurs besoins énergétiques, ceux-ci font majoritairement appel à la biomasse traditionnelle et s’exposent également à des risques importants de maladies pulmonaires liées à l’inhalation de fumées toxiques. De plus, au-delà de ces enjeux sanitaires, ces pratiques posent également des problèmes environnementaux, par exemple la coupe sauvage d’arbres ou l’érosion des sols associée à la déforestation. Si l’on s’intéresse plus précisément aux situations régionales, l’Afrique subsaharienne est la plus mal desservie. En 2010, elle représentait à elle seule près de la moitié de la population mondiale n’ayant pas accès à l’électricité. En Asie, la situation est très contrastée : la Chine a atteint un taux d’accès à l’électricité avoisinant les 100 %, contre moins de 50 % au Bangladesh. De manière générale, les pays asiatiques sont fortement visés par la question de l’accès à des systèmes propres de cuisson, car ils représentent près de 70 % de la population mondiale. Les pays d’Amérique latine et des Caraïbes sont en revanche moins concernés41. La figure 21 souligne le problème du déficit d’accès à l’électricité dans les pays en développement et indique les prévisions pour l’année 2030. 39.BP (2014a). 40.AIE (2012b). 41.ENEA-Consulting (2014). Énergie, climat et développement Figure 21. Population n’ayant pas accès à l’électricité en 2010 et 2030 (millions de personnes) Source : ENEA-Consulting (2014). La situation de l’Afrique subsaharienne est d’autant plus préoccupante que les progrès en termes de taux d’électrification y ont été parmi les plus faibles du monde (figure 22). Selon les chiffres de la figure 21, l’Afrique subsaharienne pourrait être la seule région au monde à enregistrer une hausse du nombre de personnes sans accès à l’électricité entre 2010 et 2030. Cette problématique du déficit d’accès à une énergie moderne et propre dans les pays en développement concourt à l’aggravation des conditions de pauvreté, d’éducation, de santé et de préservation de l’environnement, et constitue un obstacle de taille à l’amélioration des conditions de vie des populations concernées. On parle alors de « pauvreté énergétique ». Source : ENERGIES 2050, d’après SE4All (2013). P o i n t s d e r e p è r e Figure 22. Progression du taux d’électrification, selon la région, 1990-2010 (millions de personnes) 33 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 34 1.3.1.2 La précarité énergétique : une réalité grandissante dans les pays développés Si les enjeux liés à l’accès aux ressources énergétiques dans les pays les moins développés sont aujourd’hui bien connus, le problème de la précarité énergétique dans les pays développés reste encore peu considéré, même s’il s’agit d’une problématique qui touche de plus en plus de personnes. La notion de précarité énergétique est délicate à définir, du fait de la diversité des climats, des modes de chauffage et de l’hétérogénéité des revenus perçus dans les différents pays développés. Globalement, un ménage est considéré comme étant en situation de précarité énergétique lorsqu’il lui est financièrement difficile, voire impossible, de payer ses factures énergétiques et, partant, de satisfaire à ses besoins essentiels. Il s’agit d’une notion très relative et dont l’appréciation subjective doit être replacée dans le contexte énergétique, économique et social du pays concerné. Deux « méthodes » permettent de reconnaître les situations de précarité énergétique : • la méthode dite « objective », issue du Royaume-Uni, selon laquelle un foyer est considéré en situation de précarité énergétique s’il est contraint de dépenser plus de 10 % de son revenu afin d’atteindre un niveau de confort standard ; • la méthode dite « subjective », venue d’Irlande, qui se base sur un système déclaratif. Les ménages déclarent s’ils sont en capacité ou non d’accéder à une consommation d’énergie suffisante ou s’ils arrivent à chauffer leur logement de manière « décente ». Là encore, la notion de décence reste floue et peut différer d’une région à l’autre du globe. Il est cependant d’usage de considérer que la température des lieux de séjour principaux doit être maintenue autour de 21 °C et celle des pièces secondaires, à 18 °C (en climat tempéré). La difficulté d’adopter une définition commune et universelle complique l’éva luation du nombre de ménages considérés comme étant en précarité énergétique. En Europe, selon l’Étude de la précarité énergétique en Europe (EPEE), entre 50 et 125 millions de personnes seraient touchées par cette problématique42. Figure 23. Facteurs de la précarité énergétique Les causes de cette précarité sont multiples : le faible revenu des ménages, la piètre qualité thermique des logements et le coût élevé de l’énergie sont les principales. La crise économique actuelle, qui se traduit notamment par un chômage croissant et par l’augmentation du coût de l’énergie, contribue à accentuer ces vecteurs de précarité énergétique aux Source : Réseau régional Énergie et précarité (2012). 42.EPEE (2009). Énergie, climat et développement conséquences variées (d’ordre sanitaire, par la dégradation de l’état de santé des personnes concernées ; d’ordre économique et social, par la croissance de l’endettement et du mal-être). Les foyers les plus susceptibles d’être touchés sont les ménages à faible revenu comme les personnes âgées ou handicapées, les familles monoparentales, les travailleurs à temps partiel… autant de catégories de personnes déjà aux prises avec de sérieuses difficultés. 1.3.2 L’énergie au cœur du développement Si l’enjeu énergétique ne figure pas parmi les critères de l’indice de développement humain (IDH) développé par le Programme des Nations Unies pour le dévelop pement (PNUD), il est indéniable que l’énergie est étroitement liée aux différentes composantes d’une société et qu’elle joue un rôle significatif dans l’amélioration des conditions de vie des populations. La figure 24 met en évidence la corrélation entre l’IDH et l’accès à une source d’énergie moderne. d e 1.3.2.1 Énergie, pauvreté et développement économique Que l’on se situe dans un pays développé, en développement ou émergent, la question énergétique se retrouve au cœur de toutes les problématiques économiques : pauvreté, emploi, équilibres macroéconomiques et création d’activités. La partie 1.2.1, plus haut, a mis en avant le fait que les pays les plus pauvres souffrent d’un déficit d’accès à une énergie moderne et propre et qu’au sein des pays à haut revenu, ce sont les ménages les plus modestes qui souffrent de précarité P o i n t s Source : ENERGIES 2050, d’après GEA (2012). r e p è r e Figure 24. Corrélation entre IDH et consommation d’électricité par habitant 35 La transition énergétique : connaître et partager pour agir énergétique. Les pauvres se retrouvent d’ailleurs très souvent enfermés dans un cercle vicieux qui contribue à maintenir les situations de précarité. À titre d’illustration, dans les pays développés, les logements auxquels peuvent prétendre les foyers modestes sont généralement anciens ou mal isolés et donc très énergivores, ce qui ne fait qu’accroître le poste de chauffage et donc la situation de précarité énergétique. Dans les pays en développement, les personnes démunies qui n’ont pas accès à l’électricité doivent très souvent se rabattre sur des solutions énergétiques chères, peu fiables et présentant des risques pour leur santé (lampes à kérosène, bougies, charbon, etc.). La figure 25 souligne le lien étroit entre l’accès à l’électricité et le niveau de pauvreté. La figure 25 ne signifie pas que l’accès à l’électricité sur un territoire donné permettra d’éradiquer automatiquement la pauvreté. Néanmoins, améliorer l’accès à une énergie moderne, propre et à prix abordable contribue à augmenter les chances d’échapper à une situation de précarité. Dans tous les cas, l’énergie joue un rôle important dans le développement économique d’un pays ou d’un territoire. Elle peut, par exemple, contribuer au développement de l’industrie, améliorer la productivité grâce à l’utilisation de machines, faciliter l’implantation d’entreprises et d’activités économiques diverses et, ainsi, créer des emplois. Dans les zones rurales, l’énergie favorise l’augmentation des rendements agricoles en facilitant le pompage de l’eau pour l’irrigation, ou encore en faisant tourner les moulins et les engins agricoles. Il s’agit également d’améliorer les possibilités de conserver ou de transformer les aliments dans la perspective de leur commercialisation. Par P o i n t s d e r e p è r e Figure 25. Relation entre accès à l’électricité et niveau de pauvreté 36 Source : ENERGIES 2050, d’après GEA (2012). Énergie, climat et développement 43.Site Internet de l’Initiative des Nations Unies « Sustainable Energy For All », consulté en décembre 2014. 44.UNIDO (2013). d e 1.3.2.3 Énergie et égalité des sexes La question de l’énergie est une problématique qui touche également aux questions de genre. Que ce soit au niveau du processus décisionnel ou de la mise en œuvre, le domaine de l’énergie est majoritairement « une affaire d’hommes ». Alors que 19 % des postes ministériels dans le monde sont occupés par des femmes, seulement 7 % d’entre eux ont trait à l’environnement, aux ressources naturelles ou à l’énergie44. Les politiques P o i n t s 1.3.2.2 Énergie, éducation et santé Au-delà de la réduction de la pauvreté, l’accès à une énergie propre et abordable contribue significativement à améliorer la qualité des services de base. Ce constat est parti culièrement notable dans les pays en développement, où l’électrification joue un rôle majeur, notamment pour la santé et l’éducation. En ce qui concerne la santé, rappelons ici que dans la majorité des cas, les populations n’ayant pas accès à l’électricité utilisent le charbon, les déjections animales ou le bois afin de subvenir à leurs besoins en matière de chauffage et de cuisson. Ces pratiques, qui provoquent la pollution de l’air intérieur des habitats, seraient la cause d’environ 2 millions de morts par an, principalement des femmes et des enfants43. Améliorer l’accès à une énergie propre constitue un enjeu sanitaire majeur, d’autant que cette amélioration réduirait également le nombre de blessures liées à la collecte du bois. Par ailleurs, un accès énergétique amélioré présente de multiples avantages pour les services de santé : la conservation de médicaments et de vaccins dans des enceintes réfrigérées, l’utilisation d’équipements médicaux perfectionnés, la possibilité de fournir un service la nuit ou encore le maintien de conditions sanitaires minimales dans les établissements de santé. L’électricité facilite également la diffusion de messages de sensibilisation, d’information et d’éducation sur les questions de santé. Au niveau de l’éducation, l’accès à une source d’énergie moderne contribue à améliorer la qualité et l’accessibilité aux personnes sur l’ensemble d’un territoire. Il s’agit notamment de fournir de meilleures conditions d’accueil pour les élèves (chauffage et climatisation, éclairage, conditions sanitaires), de mettre à disposition du matériel pédagogique moderne ou encore de mettre à profit les TIC pour l’apprentissage à distance. Grâce à l’éclairage, les élèves peuvent continuer à étudier après la tombée de la nuit. L’électrification contribue également à réduire la durée des corvées (souvent confiées aux filles), ce qui leur donne du temps pour étudier. r e p è r e ailleurs, afin d’acheminer ces produits vers les centres de consommation, le transport est également à prendre en compte. En raison de la hausse des prix du pétrole, les transports motorisés deviennent de moins en moins accessibles aux plus modestes, réduisant ainsi leurs options, notamment sur le plan de l’emploi. 37 La transition énergétique : connaître et partager pour agir énergétiques mises en place ne sont donc pas toujours représentatives de l’ensemble des consommateurs, d’autant plus qu’au sein des ménages l’usage domestique de l’énergie est essentiellement réalisé par les femmes. La faible représentation des femmes se retrouve aussi bien au stade de l’élaboration des politiques énergétiques et de la prise de décision que de la production. Dans les pays développés, les femmes sont plus particulièrement touchées par le manque d’accès à l’énergie. À titre d’illustration, en France en 2006, la part des ménages dits en précarité énergétique était de 14,1 % tandis qu’elle était de 20,9 % pour les foyers constitués d’une femme avec un enfant et qu’elle allait jusqu’à 26,3 % pour les femmes vivant seules45. Dans les pays en développement, les inégalités sont encore plus marquées, notamment sur le plan de la consommation domestique d’énergie et des nombreux enjeux qui en découlent. Comme nous l’avons vu précédemment, un grand nombre de personnes dépendent de la biomasse traditionnelle pour la cuisson, selon des méthodes qui génèrent des effets négatifs sur la santé. Or, traditionnellement, la cuisine est le domaine des femmes ; ce sont donc elles qui subissent le plus ces conséquences pour la santé. La collecte des combustibles est également une activité très chronophage, et elle principalement assurée par les femmes (figure 26). Cette activité les empêche d’entreprendre un travail complémentaire et de contribuer aux revenus du foyer, ce qui améliorerait leur statut et faciliterait leur émancipation. P o i n t s d e r e p è r e Figure 26. Temps passé par les femmes pour la collecte des combustibles, divers pays d’Afrique, 1990-2003 (h/j) 38 Source : ENERGIES 2050, d’après GEA (2012). 45.INSEE (2006). Énergie, climat et développement Encadré 2. Des initiatives en faveur des femmes et d’une énergie durable Au regard de ce qui précède, il est indéniable que l’accès à une énergie moderne, propre et à prix abordable présente de nombreux avantages pour les femmes, qu’il s’agisse des impacts sur la santé liés à la combustion de la biomasse traditionnelle, du temps gagné pour étudier ou pour entreprendre des activités rémunératrices, ou encore d e P o i n t s L’initiative Barefoot College http://www.barefootcollege.org/ L’initiative Barefoot College, fondée en Inde en 1972, va également dans le sens d’une autonomisation des femmes et de l’utilisation d’énergies durables dans les secteurs ruraux isolés. L’objectif du fondateur, Bunker Roy, était de trouver des solutions simples et durables aux problèmes fondamentaux de la qualité de vie en milieu rural (eau, santé, éducation, énergie). Sur la base du constat que les hommes formés partent en ville pour trouver du travail, l’initiative vise désormais à former les femmes et plus particulièrement les grands-mères, plus attachées à leur commu nauté, pour en faire des ingénieures spécialisées en énergie solaire. Les étudiantes viennent toutes de collectivités isolées qui n’ont jamais eu d’accès au réseau électrique et où le taux d’alphabétisation est bas. En six mois, elles apprennent mois à installer, entretenir et réparer des groupes solaires. Depuis 2005, pas moins de 250 femmes venues de 29 pays ont apporté l’électrification solaire à près de 10 000 maisons dans des régions isolées. L’adoption de l’énergie solaire a ainsi réduit la pollution environnementale (dans des milieux qui consomment habituellement du bois, du diesel et du kérosène pour l’éclairage et la cuisson), en plus de rehausser le niveau de considération des femmes dans leur communauté, du fait de la valeur de leur contribution. r e p è r e Le réseau international ENERGIA http://energia.org/ ENERGIA est un réseau international qui œuvre dans le domaine du genre et de l’énergie durable. Son objectif est de contribuer à l’autonomisation des femmes – aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain – en se focalisant spécifiquement sur l’énergie. ENERGIA entend promouvoir l’intégration du genre dans les politiques et programmes énergétiques. Cette approche permettrait d’améliorer les résultats en termes de durabilité des services énergétiques et les perspectives de développement humain pour les femmes et les hommes. 39 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e de la sécurité que procure l’éclairage nocturne… De plus, une meilleure représentation des femmes dans les processus décisionnels du domaine de l’énergie favoriserait la prise en compte des besoins de l’ensemble des consommateurs et, en particulier, celle des usages domestiques (qui font partie des usages « substantiels » et « non compressibles » de l’énergie) dans les politiques énergétiques. 40 1.3.2.4 Énergie, eau et forêts Nous avons vu précédemment que la part importante de combustibles fossiles dans le bouquet énergétique mondial constitue l’un des principaux facteurs d’émission de polluants atmosphériques et que les conséquences sont autant locales (qualité de l’air dans les villes et effets sur la santé) que globales (changement climatique et conséquences environnementales). Au-delà de ce constat alarmant, le système énergétique actuel est aussi à l’origine d’importantes pressions sur d’autres ressources naturelles, notamment les forêts et l’eau. Alors que 40 % de la population mondiale dépend de la biomasse (notamment le bois et le charbon de bois) pour subvenir à ses besoins énergétiques essentiels, l’abattage d’arbres non contrôlé est également un important facteur de déforestation. Cela dit, la cause principale reste le changement d’affectation des sols (lié notamment à l’intensification de l’agriculture et à l’urbanisation). Les forêts constituent de précieux puits de carbone ; elles abritent de nombreuses espèces animales, elles régulant le climat local et elles évitent la fragilisation des sols par l’érosion. Il s’agit là d’un enjeu environnemental majeur. L’énergie présente également des enjeux importants au niveau de la ressource en eau. Il s’agit en effet d’un facteur important pour favoriser l’accès à une eau propre et pour préserver cette ressource par la mise en place de systèmes de captage, de traitement, de transport, de distribution et d’assainissement. En outre, dans les pays arides, des facteurs tels que le dessalement de l’eau de mer deviennent des réalités, suscitant une croissance significative de la demande en électricité46. Par ailleurs, les besoins en eau pour l’énergie sont en forte hausse et, selon l’AIE, « sont appelés à croître deux fois plus rapidement que la demande énergétique 47 ». Cette hausse spectaculaire serait majoritairement due à la progression des biocarburants dans le bouquet énergétique mondial. L’eau constitue également un facteur essentiel pour l’extraction des gaz de schiste par fracturation hydraulique, ce qui amplifie les répercussions environnementales de cette source d’énergie très contestée. Plus traditionnellement, l’eau est aussi indispensable à l’extraction du pétrole, au refroidissement des centrales nucléaires et, bien entendu, à la production d’hydroélectricité. Étant donné les contraintes sur les ressources hydriques qui accompagnent le réchauffement climatique, le maintien du système énergétique actuel laisse présager des liens de plus en plus tendus entre les défis touchant aux questions de l’eau et de l’énergie. 46.Quéfélec et Allal (2014). 47.AIE (2012b). Énergie, climat et développement Dans tous les cas, l’accès à l’énergie est un facteur central qui a des liens directs ou indirects avec toutes les dimensions du développement durable. On pense notamment à l’augmentation des rendements agricoles, qui contribue à améliorer les conditions de santé, ou à la mise à disposition d’une eau plus saine. Pour finir, les femmes à qui l’éclairage nocturne permet d’entreprendre des activités génératrices de revenus complémentaires contribuent au développement économique et à la création d’emplois dans leur collectivité. Du fait de ces multiples liens de causalité, une approche globale et systémique de la question énergétique est donc indispensable. 48.INSEE (2014). P o i n t s d e Le système énergétique sur lequel repose le fonctionnement de nos sociétés depuis plus d’un siècle a montré ses limites. Essentiellement basé sur l’utilisation des énergies fossiles, il n’est pas en mesure d’apporter à l’humanité les réponses adaptées à un développement soutenable respectueux des ressources naturelles, porteur d’une solidarité intra- et intergénérationnelle. Il doit être reconsidéré en profondeur pour répondre de manière durable aux impératifs environnementaux, économiques et sociétaux auxquels le monde est actuellement confronté. La transition énergétique doit contribuer à répondre simultanément à plusieurs problématiques majeures : • la hausse de la demande liée à la croissance démographique, sachant que la population mondiale devrait atteindre plus de 9 milliards d’individus en 205048, ce qui aura d’importantes conséquences sur la demande en énergie et les besoins en approvisionnement ; • les incertitudes qui pèsent sur la disponibilité et les prix des énergies fossiles, dominées par les enjeux liés à l’indépendance, à la sécurité énergétique et aux tensions géopolitiques ; • les conséquences immédiates sur la santé de milliards d’individus, liées aux pollutions atmosphériques locales, en particulier dans les villes, mais aussi à l’intérieur des habitations ; • les inquiétudes que suscitent les conséquences globales des émissions massives de GES, en grande partie à l’origine des changements climatiques ; • les répercussions éventuelles des choix énergétiques dans le processus de développement d’un pays, notamment l’accès à l’énergie et la pauvreté énergétique dans les pays en développement, ainsi que l’éradication de la précarité énergétique dans les pays développés. r e p è r e Conclusion du chapitre 1 41 Chapitre 2 La transition énergétique : sobriété, efficacité et énergies renouvelables, ou la recette d’un triplé gagnant d e P o i n t s ans le chapitre précédent, nous avons mis en évidence les limites du système énergétique actuel. L’hypercentralisation de la production, la prédominance d’énergies polluantes et carbonées, la forte augmentation de la demande en énergie, les tensions géopolitiques, le manque d’accès à l’énergie dans certaines régions du monde, etc. plaident sans équivoque pour un changement complet de paradigme. La transition énergétique ne peut ni ne doit être vue comme une possible contrainte, mais bien comme une formidable occasion de remettre en question nos modèles de développement. Il s’agit, dans un premier temps, de modifier nos modes de production et de consommation afin qu’ils puissent répondre de façon durable aux grands enjeux environnementaux, climatiques et économiques d’un développement durable solidaire inscrit dans la durée. Chacun aura compris la nécessité de réduire la part carbonée du bouquet énergétique mondial en développant de manière significative les différentes formes d’énergies renouvelables. On parle alors de diminuer le contenu carbone de l’offre énergétique. Parallèlement à cela, il est essentiel d’agir sur la demande en énergie en réduisant à la source les besoins en énergie. La transition énergétique s’appuie sur trois piliers à mettre en œuvre de manière simultanée et complémentaire. Il s’agit, dans l’ordre : • d’encourager la sobriété énergétique c’est-à-dire de ne consommer de l’énergie que lorsque le service rendu est indispensable ; • de développer massivement l’efficacité énergétique, c’est-à-dire d’utiliser l’énergie de manière optimale pour produire un bien ou un service ; • d’avoir recours en priorité aux sources d’énergies renouvelables, qui répondent mieux aux objectifs de la décentralisation par leur nature même. Alors que les démarches de sobriété et d’efficacité visent une réduction de la demande d’énergie, le recours aux énergies renouvelables permet de répondre à la demande dite « incompressible » en énergie. La mise en œuvre conjointe de ces trois mesures est indispensable pour assurer une transition réussie. r e p è r e D 43 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 2.1 Agir sur la demande en énergie : sobriété et efficacité énergétique 2.1.1 La chaîne énergétique Toute activité (ou tout travail à réaliser) nécessite une certaine quantité d’énergie, qui peut recouvrir plusieurs formes : chimique, mécanique, thermique ou encore électrique. En pratique, l’énergie que nous mobilisons se présente rarement sous la même forme que celle qui est disponible dans la nature ; elle passe par une ou plusieurs conversions avant d’être utilisable. Il y a donc différentes façons de nommer l’énergie, selon le stade de la chaîne énergétique auquel on se trouve : • L’énergie primaire fait référence aux sources énergétiques telles qu’on les trouve dans la nature : le gaz naturel, le pétrole brut, la biomasse, l’uranium, le rayonnement solaire, le vent, l’eau, l’énergie du sous-sol terrestre. • L’énergie secondaire correspond à l’énergie obtenue suite à la conversion d’une énergie primaire en énergie utilisable. Celle-ci doit ensuite être acheminée vers le lieu de consommation. • L’énergie finale est celle dont dispose le consommateur. Il s’agit, par exemple, de l’essence qui alimente un moteur de voiture, de l’électricité ou du gaz que l’on achète auprès d’un fournisseur. L’énergie utile est la quantité d’énergie réelle qui permet de fournir le service attendu. La différence entre énergie finale et énergie utile dépend du rendement de l’appareil utilisé. Des pertes plus ou moins importantes ont lieu lors de la conversion, du transport et de l’utilisation (figure 27). P o i n t s d e r e p è r e Figure 27. Pertes énergétiques entre énergie primaire et énergie utile 44 Source : ENERGIES 2050. La transition énergétique Lorsque l’on parle de maîtriser la demande énergétique, il s’agit in fine de réduire la consommation d’énergie primaire. Pour ce faire, deux possibilités s’offrent à nous : • soit réduire la consommation en bout de chaîne, c’est-à-dire limiter la demande en énergie utile. C’est ce qu’on appelle la sobriété énergétique ; • soit diminuer au maximum les pertes subies tout au long du processus, qu’elles soient liées à la transformation, à la production, au transport ou à l’usage de l’énergie. Il s’agit de l’efficacité énergétique. 2.1.2 La sobriété énergétique : un préambule indispensable 1.GIEC (2014). d e P o i n t s 2.1.2.1 Changer notre rapport à l’énergie Depuis le début de l’ère industrielle, nos modes de production et de consommation se fondent sur une énergie abondante et bon marché. Cette vision d’une énergie considérée comme illimitée a favorisé l’émergence d’une véritable ébriété énergétique, caractérisée par des comportements et usages très énergivores. Aujourd’hui, alors que le prix de l’énergie augmente et que la précarité énergétique prend de l’ampleur au sein même des pays ayant le plus bénéficié de cette manne énergétique, réduire la consommation d’énergie apparaît déjà comme une solution économique et sensée. Cependant, même si la demande en énergie s’est plus ou moins stabilisée dans certains pays, au niveau mondial, elle ne cesse d’augmenter. Les pays émergents, qui représentent aujourd’hui la majeure partie de cette augmentation, suivent une trajectoire aussi gourmande en énergie que celle, historique, des pays développés. Bien que l’énergie soit au cœur des processus de développement (voir la partie 1.3.2), une demande énergétique élevée n’est pas nécessairement synonyme d’un accroissement du bien-être. Il est impératif de remettre en cause cette vision un peu simpliste d’une corrélation entre le niveau de vie et la consommation d’énergie, afin d’établir un modèle de développement qui soit en accord avec les enjeux présents et à venir à l’échelle mondiale. Si l’objectif est de réduire la demande énergétique, il ne s’agit pas pour autant d’instaurer un modèle d’austérité. L’idée consiste plutôt à remettre en question nos modes de vie actuels, à les confronter aux besoins essentiels et à voir les moyens de rendre nos comportements plus sobres en énergie. Par exemple, la cuisson et le r e p è r e Selon le plus récent rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC), un changement de comportement et de modes de vie dans les pays développés permettrait de réduire la demande énergétique de 20 % sur le court terme et, éventuellement, de 50 % des niveaux actuels d’ici la moitié du siècle1. Une remise en cause de notre rapport à l’énergie et l’adoption de comportements plus responsables et plus sobres en énergie apparaît ainsi comme une solution simple, efficace et à moindre coût qui permettrait de limiter significativement les émissions de gaz à effet de serre (GES). 45 La transition énergétique : connaître et partager pour agir chauffage constituent des usages domestiques que l’on pourrait qualifier d’incompressibles, que l’on se trouve dans un pays développé ou dans un pays émergent ou en développement. Néanmoins, on peut limiter la consommation d’énergie liée au chauffage (ou à la climatisation) en s’attachant à ne pas aller au-delà (ou en deçà) de températures que l’on pourrait qualifier de confortables. Il est ainsi généralement admis que, pour ce qui concerne le chauffage de locaux, une température de 21 °C est suffisante pour les principaux espaces de vie et que la température ambiante peut même s’abaisser jusqu’à 18 °C pour les pièces secondaires (ces chiffres sont à adapter en fonction du contexte climatique local). En ce qui concerne la cuisson, des comportements adaptés – qui relèvent eux aussi du bon sens – permettent également de restreindre la demande énergétique. Il peut s’agir de gestes aussi simples que de mettre un couvercle sur la casserole lorsque l’on fait bouillir de l’eau. La distinction entre besoins essentiels et besoins superflus est subjective ; elle dépend fortement du contexte économique, social et culturel dans lequel on se trouve. Un habitant urbain ayant facilement accès à des transports en commun ne place pas forcément la voiture en haut de sa pyramide de besoins, alors que cela peut être le cas pour un habitant en zone rurale ou dans une zone urbaine faible en offres de transport collectif. De même, une personne vivant dans un pays froid a des besoins en chauffage plus prononcés qu’une personne qui habite un pays au climat plus tempéré. Cela dit, dans tous les cas, le questionnement reste essentiel, et il semble indispensable d’effectuer une transition radicale pour tout ce qui touche au superflu et au non-vital. Dans son manifeste, l’association négaWatt propose d’ailleurs d’adapter la régulation en fonction de cette classification des besoins énergétiques (figure 28). P o i n t s d e r e p è r e Figure 28. Les besoins en énergie et leur régulation 46 Source : négaWatt (2012). 2.1.2.2 Des possibilités d’action à de multiples niveaux Contrairement au développement des énergies renouvelables, qui fait appel à d’importants changements structurels et à des investissements financiers parfois importants, selon la filière retenue, la sobriété énergétique peut se mettre en œuvre rapidement et sans coûts majeurs. Pour donner une idée de la marche à suivre, l’association négaWatt 2.négaWatt (2012). d e 2.1.2.3 Connaître et comprendre pour adopter des comportements sobres en énergie Compte tenu de ce qui précède, la sobriété énergétique passe principalement par des changements d’ordre comportemental. Bien que le changement climatique soit une problématique aujourd’hui connue de tous, cette prise de conscience ne semble pas suffire pour que chacun mette en place spontanément l’indispensable transition P o i n t s fait état, dans son manifeste2, de différents niveaux d’application de la sobriété énergétique qu’il est possible de mettre en œuvre en complémentarité : • Le « principe de sobriété » consiste, tout d’abord, à limiter notre consommation d’énergie en essayant de réduire nos besoins énergétiques. Il s’agit, par exemple, de diminuer notre recours aux transports en choisissant un domicile proche de son lieu de travail ou de privilégier les modes de transport alternatifs (vélo, marche et transports en commun). • La « sobriété dimensionnelle » renvoie aux comportements d’achat et d’investissement. Par exemple, le fait de choisir un équipement électrique efficace en énergie ou d’opter pour un appareil adapté à sa consommation aide à limiter les pertes énergétiques inutiles (on citera, par exemple, la taille du réservoir d’eau chaude sanitaire, qui n’a pas besoin d’être surdimensionné). • Un troisième niveau, appelé « sobriété coopérative », met à profit les gains énergétiques liés à l’organisation collective ou à la mise en commun de services énergétiques. Il est par exemple admis que les logements collectifs consomment moins d’énergie en chauffage que les résidences individuelles. Ce type d’approche peut se décliner à de très nombreux niveaux, qu’il s’agisse d’acheter un bien en partage ou de mutualiser un service utile. • Enfin, la « sobriété d’usage » consiste à restreindre l’intensité ou la durée d’utilisation au strict nécessaire. Il s’agit par exemple de limiter le chauffage à un niveau minimal permettant d’atteindre une température convenable, d’éteindre les lumières quand on sort des pièces ou de réduire sa vitesse de conduite. En outre, nous pouvons également adapter notre consommation selon les crêtes journalières de production et de demande en électricité. Cette adaptation dépend aussi de la manière dont l’énergie utile est produite. Dans le cas d’une alimentation en électricité par un réseau électrique conventionnel, il est préférable de faire tourner les équipements énergivores tels que le lave-vaisselle ou le lave-linge la nuit, lorsque la demande sur le réseau national est la plus basse. En effet, une surcharge de consommation sur un réseau électrique peut rendre nécessaire la production additionnelle d’électricité avec des installations thermiques (utilisant des énergies fossiles) fortement génératrices de GES. En revanche si l’électricité est fournie par un système photovoltaïque, il vaut mieux utiliser les appareils en milieu de journée, lorsque l’ensoleillement – et donc l’énergie produite – est le plus intense. r e p è r e La transition énergétique 47 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 48 énergétique. Il s’agit là d’un véritable paradoxe, car, alors que l’énergie est omniprésente dans nos modes de vie, qu’elle touche à tous les domaines et que les citoyens constituent une part importante des consommateurs, la gestion du secteur est accaparée par un petit nombre d’acteurs. Cette situation se retrouve dans les processus décisionnels, la question énergétique étant essentiellement abordée au sein de cercles restreints d’experts techniques et de scientifiques. On observe également ce quasi-monopole au niveau de la production et de la distribution, dans la très forte centralisation des réseaux électriques. Il en résulte un certain désintéressement de la part des citoyens, qui sont relégués au simple rôle de consommateur. Ainsi lorsque l’on évoque la transition énergétique, le citoyen ne se sent que trop rarement concerné, pensant même parfois que tout cela n’est qu’une fatalité et que nous n’avons pas vraiment d’autre choix. Cela est d’autant plus surprenant que le citoyen détient un rôle majeur et qu’il peut contribuer à transformer le marché par ses choix et ses comportements, tout en bénéficiant d’un retour économique presque immédiat. Face à ce constat, l’information, la sensibilisation et l’éducation des citoyens sur les enjeux de la transition énergétique et, surtout, sur les possibilités d’action sont indispensables. Il ne s’agit pas de se sentir coupable au regard de nos modes passés de consommation qui ont conduit à la situation actuelle, mais bien d’adopter un comportement responsable et de cesser de reproduire les erreurs du passé. Pour cela, il convient d’apporter les clés et les moyens d’action nécessaires à l’adoption de modes de vie plus responsables et plus sobres en énergie. L’objectif est de passer du stade de la prise de conscience au stade de l’action. Pour ce faire, il importe, tout d’abord, d’éclairer les citoyens sur les grands enjeux et les limites du système énergétique actuel. L’énergie est une problématique globale ; il est important de connaître et de comprendre toutes ses implications afin d’adopter un comportement inscrit dans la durée. Il est ensuite primordial de mettre à la disposition du citoyen les informations essentielles pour qu’il puisse effectuer son choix en toute connaissance de cause. L’étiquetage des équipements électriques permet, par exemple, de privilégier l’achat des appareils les plus efficaces et les moins énergivores. De même, l’indication de la provenance géographique des produits alimentaires peut inciter le consommateur à acheter des produits locaux, contribuer à réduire les besoins en transport et favoriser les circuits courts. 2.1.3 L’efficacité énergétique : un trésor de possibilités Si l’efficacité énergétique vise le même objectif que la sobriété énergétique, c’est-à-dire la réduction de la demande, ces deux principes, bien que complémentaires, n’agissent pas au même niveau. Alors que la sobriété consiste à réduire les besoins énergétiques, l’efficacité cherche à diminuer la quantité d’énergie nécessaire pour un niveau de service équivalent. Il s’agit, plus précisément, de limiter au maximum les pertes subies tout au long de la chaîne énergétique, de l’énergie primaire à l’énergie utile consommée. La transition énergétique 3.World Energy Council (2014). 4.Mosseri et Jeandel (2013). d e P o i n t s 2.1.3.2 Améliorer le rendement des équipements Après avoir limité le gaspillage lié à la production et au transport de l’énergie, il convient de réduire celui qui est associé à l’usage des appareils et des équipements. L’optimisation de l’efficacité énergétique des équipements est une mesure réalisable dans les principaux secteurs de la consommation énergétique et qui relève principalement d’améliorations technologiques. Par exemple, dans le secteur des transports, il peut s’agir d’accroître la performance environnementale et la sobriété des véhicules, notamment en améliorant le rendement des moteurs thermiques. Pour le secteur résidentiel, cette optimisation englobe aussi bien la conception même d’un bâtiment (bioclimatisme) que la performance des matériaux (qualité thermique des murs, du sol et de la toiture) ou l’efficacité des équipements et appareils électriques, notamment l’éclairage, avec des rendements énergétiques qui peuvent passer de 2 ou 3 % pour une ampoule à incandescence à 30 % pour une diode électroluminescente4. Il convient de rappeler ici que l’efficacité énergétique est une mesure véritablement complémentaire de la sobriété énergétique et des changements de comportement. Ainsi, r e p è r e 2.1.3.1 Optimiser le réseau Afin de réduire les pertes énergétiques, d’importants progrès s’imposent souvent quant à la configuration même du réseau. Par exemple, dans le cas du réseau électrique, celui-ci est généralement concentré autour de grandes centrales de production ; la distribution se fait alors sur de grandes distances, par des lignes de transport. En pratique, ce transport génère d’importantes pertes énergétiques qui atteignent, en moyenne, jusqu’à 12 % de l’électricité produite3. Ces pertes pourraient être évitées, notamment avec un réseau décentralisé favorisant un rapprochement géographique entre le centre de production et le lieu de consommation. On parle également d’« énergie répartie ». Une telle approche est d’ailleurs tout à fait complémentaire avec le développement des énergies renouvelables et présente de nombreux avantages quant au fond et à la forme. On peut également réduire les pertes énergétiques associées au transport de l’électricité en utilisant des matériaux performants au rendement supérieur. Si certaines pertes énergétiques sont inévitables, elles peuvent toutefois être valorisées. Par exemple, lors de la production d’électricité, les centrales énergétiques subissent d’importantes pertes pouvant s’élever jusqu’à 60 % dans le cas d’une centrale thermique classique. Ces pertes se présentent généralement sous forme de chaleur ; or, celle-ci pourrait être récupérée pour subvenir à des besoins en chauffage, par exemple. Il s’agit du principe de cogénération (voir la partie 2.3.5). Ce recyclage des pertes énergétiques peut aussi s’appliquer dans le secteur de l’industrie, où les procédés et systèmes de production génèrent également des pertes importantes. L’objectif est donc de récupérer autant que possible l’énergie dissipée et de la réutiliser pour répondre à d’autres besoins. On parle alors d’« intégration énergétique des procédés industriels ». 49 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e la construction de bâtiments à haut rendement énergétique ne sera véritablement profitable que si les usagers adoptent une conduite responsable. De même, le développement d’appareils et d’équipements performants n’aura pas l’effet escompté si, en parallèle, les décisions d’achat ne s’orientent pas vers les solutions les moins énergivores. Là encore, la sensibilisation, l’éducation des citoyens et la mise à disposition d’une information claire permettant d’assister leur choix sont primordiales. 50 2.1.3.3 Mettre en place des politiques d’efficacité énergétique Il existe une multitude de mesures politiques qui peuvent être appliquées afin d’encourager l’efficacité énergétique. La liste suivante s’inspire en grande partie du rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) sur l’amélioration de l’accès à l’efficacité énergétique dans la perspective d’une énergie durable pour tous5. • Les règlements et normes. Il s’agit, par exemple, d’établir des normes relatives aux appareils électriques, aux véhicules ou aux bâtiments en exigeant un rendement énergétique minimal. Il peut également être question de mettre en vigueur une réglemen tation obligeant les industriels et les grands groupes à effectuer des audits énergétiques et à mettre en œuvre des mesures d’efficacité énergétique. Les marchés de certificats d’économies d’énergie accompagnés d’une charte sur la consommation d’énergie peuvent également contribuer à développer des solutions auprès des plus gros consommateurs. • Les accords volontaires. De tels accords peuvent être passés avec les plus importants consommateurs ou avec les associations d’entreprises, afin de réduire leur consommation d’énergie ; d’autres accords avec les fabricants peuvent viser l’amélioration de l’efficacité énergétique de leurs produits. Ces engagements peuvent être associés à des mesures incitatives ou réglementaires. • Les incitations fiscales et financières. Les incitations fiscales consistent à diminuer le coût d’un investissement grâce à une réduction d’impôt. Elles peuvent prendre la forme de subventions, de prêts à taux réduit ou de garanties de prêt visant à aider ou à faciliter l’investissement dans des mesures ou des technologies d’efficacité énergétique. • Les instruments d’information. Il peut s’agir de mesures visant la diffusion de bonnes pratiques en matière d’efficacité énergétique ainsi que la formation des acteurs clés. La stimulation de la création de réseaux, par exemple, favorise l’échange d’information. Il est également question de développer l’étiquetage des produits et des équipe ments selon leur efficacité énergétique, pour accompagner les consommateurs vers des choix durables. Dans le même esprit, la concertation et les débats publics sur l’efficacité énergétique contribuent à sensibiliser les citoyens. • Les autres mesures. Sans viser l’exhaustivité, on peut citer l’urbanisme et la gestion des infrastructures publiques, qui ont une influence importante sur l’efficacité énergétique dans de multiples domaines (bâtiment, transports, éclairage…). Le soutien 5.UNEP (2012b). La transition énergétique à la recherche-développement peut également contribuer à l’émergence de nouvelles technologies et méthodologies visant l’efficacité énergétique. Même si la demande énergétique mondiale vient principalement des pays développés et, de plus en plus, des pays émergents, il ne faut surtout pas penser que la sobriété et l’efficacité énergétique ne concernent pas les pays en développement. Les règles de bon sens présentées ci-dessus sont universelles, et chaque occasion manquée aujourd’hui est un « verrou énergétique » pour demain et, parfois, pour des décennies. Dans beaucoup de pays en développement, l’ébriété énergétique est une réalité alors même que l’accès à l’électricité est rare ou intermittent. Nous connaissons tous des exemples tels qu’un climatiseur fonctionnant à plein régime alors que les fenêtres sont ouvertes et qu’il fait près de 40 °C à l’extérieur, ou encore des espaces commerciaux où il est indispensable de se couvrir tant il fait froid. Par ailleurs, les économies générées grâce à ces mesures permettraient de soutenir d’autres secteurs plus complexes afin de rendre les services énergétiques modernes accessibles au plus grand nombre. d e P o i n t s Pour mettre en place une véritable transition énergétique, il est indispensable de modifier les modes de production de notre bouquet énergétique. Les énergies fossiles, encore abondantes pour le moment, ne pourront durer éternellement en tant que principale source d’énergie. De plus, il ne faut pas oublier qu’elles sont à l’origine d’une part significative de nos émissions de GES, qui auront des conséquences en cascade significatives et des effets potentiellement irréversibles si nous ne diminuons pas dès à présent nos émissions mondiales. Autrement dit, nous n’avons pas d’autre choix que de diversifier notre bouquet énergétique, qui doit devenir sobre en carbone, résilient et à même de fournir à tous l’accès à un service énergétique moderne. Les énergies renouvelables représentent un large éventail de ressources énergétiques propres. Que ce soit par la captation de l’énergie solaire, éolienne, géothermique, hydro électrique et marine ou par l’utilisation de la biomasse, l’exploitation de ces ressources présente des avantages indéniables et une immense opportunité pour nos sociétés. Ne pas en profiter reviendrait à renoncer à la possibilité de créer des emplois, de sécuriser la situation énergétique de nombreux pays et, surtout, de s’orienter sur un nouveau modèle énergétique respectueux de l’environnement. Même s’il reste de nombreux efforts à faire pour accroître la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique mondial, les initiatives se multiplient à travers le monde. Les Nations Unies, conscientes de cette « urgence énergétique », avaient proclamé l’année 2012 comme l’« Année internationale de l’énergie durable pour tous ». C’est la même année qu’a été lancée l’initiative mondiale Sustainable Energy for All (SE4All), qui vise, entre autres, à doubler la part des énergies renouvelables dans le r e p è r e 2.2 Les énergies renouvelables : une incontournable évidence pour la transition énergétique 51 La transition énergétique : connaître et partager pour agir monde d’ici 2030. Par ailleurs, au début de l’année 2015, 145 pays, dont une majorité de pays émergents ou en voie de développement, se sont fixé des objectifs précis en termes de production d’énergie renouvelable et ont mis en place des politiques de soutien6. 2.2.1 Les énergies renouvelables : une réponse à de multiples défis P o i n t s d e r e p è r e Le développement des sources d’énergie renouvelable n’est pas un miracle qui résoudra à lui seul les crises énergétique, climatique et économique mondiales. Cela dit, peu de filières peuvent se présenter avec un tel éventail d’avantages et de solutions à même d’apporter autant de réponses aux crises auxquelles nos sociétés sont confrontées. Cela reste vrai, qu’il s’agisse de lutter contre le réchauffement climatique, de créer des acti vités économiques et des emplois verts associés, de fournir l’accès à des services énergétiques modernes ou de renforcer la sécurité et l’indépendance énergétique. 52 2.2.1.1 Des trésors d’opportunités pour lutter contre le changement climatique Il sera impossible de limiter le réchauffement global à +2 °C sans les énergies renou velables. Ce constat est unanime, que ce soit dans les rapports du GIEC, dans ceux des institutions onusiennes ou internationales, dans les négociations et conférences internationales, ou dans les politiques nationales. Dans tous les cas, l’importance du renforcement et du développement des filières renouvelables afin de lutter contre le changement climatique est une évidence sur laquelle tout le monde s’accorde. Le remplacement des énergies fossiles par des sources d’énergies renouvelables réduit considérablement les émissions de GES à l’origine du réchauffement climatique. Par exemple, l’exploitation de l’énergie solaire ou éolienne ne libère aucune émission de CO2 dans l’atmosphère pendant le fonctionnement de l’installation. Seule la fabrication des équipements permettant l’exploitation en produit et, même s’il reste des progrès à faire pour certaines filières au niveau du recyclage en fin de vie, les comparaisons sont sans équivoque en faveur des énergies renouvelables. De même, l’utilisation raisonnée de la biomasse peut présenter un bilan carbone neutre, car le CO2 émis lors de la combustion est capté dans l’atmosphère par les végétaux pendant leur croissance. 2.2.1.2 Croissance économique et création d’emplois Au-delà de leur importance pour limiter les émissions de GES, il est important de souligner que les technologies renouvelables sont matures et viables économiquement et qu’elles présentent même de nombreuses externalités positives. Loin de la vision d’une technologie coûteuse, peu performante et nécessitant de fortes subventions, les énergies renouvelables peuvent avoir une incidence significative sur l’économie des pays qui s’engagent résolument dans ce secteur. 6.REN 21 (2015). La transition énergétique 7.IRENA (2014b). d e P o i n t s 2.2.1.3 La sécurité énergétique : accès, indépendance et contrôle des prix À mesure que les sources d’énergie fossile se tarissent, les sources renouvelables paraissent de plus en plus attrayantes, particulièrement pour les pays qui dépendent des importations pour répondre à leurs besoins énergétiques. D’une manière générale, par un effet mécanique d’ajustement de l’offre et de la demande, les prix des énergies fossiles sont en constante augmentation, et ce phénomène va s’accentuer au cours des prochaines années. Même si l’on découvre régulièrement de nouveaux gisements et que les cours internationaux du pétrole sont parfois à la baisse, l’épuisement des ressources fossiles est inévitable à moyen et long terme. Dans tous les cas, cette tendance finira par pénaliser fortement les économies qui auront omis d’anticiper la transition énergétique et de développer leur propre parc de production renouvelable. Le fait de disposer d’un parc de production utilisant des sources d’énergies renouvelables réduit la vulnérabilité à la volatilité des prix due aux crises géopolitiques et assure ainsi une certaine indépendance énergétique vis-à-vis des pays exportateurs de ressources fossiles. r e p è r e Cela dit, l’expérience montre que des mesures incitatives et des financements publics sont souvent nécessaires pour favoriser la mise en place et les premiers développements d’une filière nationale. Pour autant, dans presque tous les cas, les avantages tirés de ces premiers efforts contrebalancent les efforts consentis. Tout d’abord, le développement d’une filière renouvelable entraîne la création de multiples emplois. Les nombreux profils des emplois créés ne se limitent pas à un seul secteur : ingénieurs, techniciens, ouvriers, employés des secteurs de services… En effet, le secteur des énergies renouvelables est très diversifié et va de la recherche- développement à l’exploitation, en passant par la fabrication et les sociétés de services énergétiques. En 2013, à l’échelle mondiale, 6,5 millions de personnes travaillaient directement ou indirectement dans les industries de ce secteur7. De plus, ces emplois ont une forte implantation locale et sont souvent répartis sur de vastes territoires. Le coût de développement d’une telle filière est aussi beaucoup plus faible que dans le cas du nucléaire, par exemple. Le développement et la généralisation des technologies ont également un effet direct sur les finances publiques, grâce à la réduction du déficit commercial lié aux importations d’énergie. Par ailleurs, dans le cas d’une industrie nationale performante, les technologies peuvent être exportées et soutenir le commerce extérieur. Enfin, il faut noter qu’à mesure que la filière se développe, les technologies progressent en performance et deviennent de moins en moins chères (comme toute technologie, elles suivent une courbe d’apprentissage et bénéficient d’économies d’échelle), ce qui rend les sources d’énergie renouvelables de plus en plus concurrentielles et, dans certains cas, déjà plus rentables que les énergies fossiles. 53 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Pour finir, les technologies renouvelables sont, par nature, destinées à des usages décentralisés et permettent de développer des réseaux moins coûteux que les réseaux centralisés. Les énergies renouvelables sont également parfaitement adaptées à l’alimentation de sites isolés et à la mise en place de mini-réseaux, notamment en milieu rural. Cette possibilité est essentielle dans les pays en développement qui ont un énorme déficit en termes d’accès à l’électricité, en particulier dans les espaces ruraux. Les technologies solaires et éoliennes se prêtent très bien à cette problématique. Pour donner un ordre de grandeur de l’enjeu, rappelons que 1,2 milliard de personnes n’ont pas accès à l’électricité dans le monde8. 2.2.2 Énergies renouvelables et innovation P o i n t s d e r e p è r e À la différence des énergies fossiles – dont les réserves se sont formées sur des millions d’années –, les énergies renouvelables sont basées sur des ressources dites de flux et sont donc considérées comme inépuisables à l’échelle du temps humaine. Bien que cette notion soit relativement récente, son emploi par l’Homme remonte à la découverte du feu. 54 2.2.2.1 Les différentes sources d’énergies renouvelables Jusqu’au début de l’ère industrielle, la « biomasse traditionnelle » (un terme qui englobe le bois de chauffe et les déchets organiques) constituait la principale source d’énergie renouvelable. Encore aujourd’hui, près de 40 % de la population mondiale continue de dépendre de cette forme d’énergie, majoritairement dans les zones rurales des pays en développement. Son classement en tant qu’« énergie renouvelable » soulève toutefois quelques questions, étant donné que l’exploitation ne se fait pas toujours de manière durable. Par exemple, sans une gestion raisonnée de la ressource en bois, le taux de régénération de cette ressource n’est pas suffisant pour répondre à des sollicitations trop importantes, de sorte que son caractère renouvelable n’est plus une réalité. On sépare généralement les énergies renouvelables en deux grands ensembles : la biomasse traditionnelle (9 %)9 et les énergies renouvelables dites « modernes », qui représentaient environ 10 % de la consommation énergétique finale au niveau mondial en 2013. Les énergies renouvelables modernes peuvent s’organiser en six grandes catégories : • Le solaire. Il s’agit aussi bien de la production d’électricité (panneaux photovoltaïques, technologie à concentration) que de la production de chaleur (chauffe-eau solaire). Cette filière, technologiquement mature, a un fort potentiel de production à grande échelle. De plus, il s’agit d’une ressource disponible sur l’ensemble de la planète et particulièrement dans les pays en développement. 8.SE4All (2013). 9.REN 21 (2015). La transition énergétique • L’éolien. Comme l’énergie solaire, le potentiel de déploiement est important, avec une source disponible sur de nombreux territoires et une technologie arrivée à maturité. L’énergie éolienne est utilisée pour produire de l’électricité. Elle peut-être terrestre (on shore) ou en mer (off shore). • L’hydraulique. En 2013, l’hydroélectricité représentait 3,9 % de la consommation mondiale d’énergie10. Il faut distinguer les grands barrages, qui ont un potentiel de développement limité et qui présentent de nombreux effets environnementaux et sociaux et la petite hydroélectricité qui gagnerait à être exploitée davantage. • La biomasse moderne (voir la partie 2.2.2.2). • La géothermie (voir la partie 2.2.2.3). • Les énergies marines (voir la partie 2.2.2.4). 2.2.2.2 La biomasse moderne Contrairement à la biomasse traditionnelle, qui est principalement employée pour des besoins de chauffage et de cuisson et qui a un très mauvais rendement énergétique, la « biomasse moderne » fait référence à des techniques efficaces, propres et, pour certaines, très innovantes. Ces techniques produisent de l’énergie à partir de combustibles organiques solides (bois, paille), liquides (biocarburants) ou gazeux (biogaz). Par ailleurs, lorsque l’on parle de biomasse moderne, il est entendu qu’il s’agit d’une énergie produite à partir de ressources gérées durablement. La biomasse moderne est utilisée pour fournir des services énergétiques dans les secteurs du bâtiment, de l’industrie ou des transports (figure 29). Source : ENERGIES 2050, d’après REN 21 (2013). 10.REN 21 (2015). P o i n t s d e r e p è r e Figure 29. Demande mondiale en biomasse et différences entre biomasse moderne et traditionnelle 55 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 2.2.2.3 La géothermie La géothermie présente un potentiel très important de production énergétique, que ce soit sous forme de chaleur ou d’électricité. Il s’agit, dans les deux cas, d’exploiter la chaleur naturelle du sous-sol, dont l’importance varie selon l’endroit. On distingue la géothermie de surface, qui vise à exploiter le sous-sol proche (jusqu’à 300 m de profondeur environ) et qui peut se mettre en place quasiment partout, et la géothermie à haute température, beaucoup plus profonde et localisée dans des endroits spécifiques (zones volcaniques ou points chauds du globe terrestre où des aquifères sont présents). Malgré un certain regain d’intérêt pour cette filière depuis quelques années, notamment pour les usages dits de « basse température », il s’agit d’une technique encore insuffisamment exploitée. Elle représente actuellement moins de 0,5 % de la production mondiale, une part qui pourrait atteindre entre 3,5 et 8,3 % en 205011 si des efforts de développement supplémentaires étaient mis en place. Pour ce qui est de la géothermie à haute température, tout comme dans la production à partir de ressources fossiles, les installations sont assez lourdes et les investissements nécessaires, importants. Le développement d’équipements de plus petite taille pour exploiter des gisements plus diversifiés paraît une étape importante. Figure 30. Installation géothermique P o i n t s d e r e p è r e Les filières énergétiques de la biomasse moderne sont multiples et plus ou moins abouties. Il peut s’agir de techniques classiques, telles les chaudières à bois, ou de filières telles que celle des biocarburants, qui s’améliorent à chaque génération (voir la partie 4.3.4). La valorisation des déchets organiques, domestiques ou industriels ouvre également des perspectives qui mériteraient d’être mieux valorisées, qu’il s’agisse du traitement ou de la production d’énergie. La biomasse moderne représente un potentiel considérable pour réduire le déficit énergétique dans les pays en développement. L’enjeu est de passer d’usages traditionnels (faible efficacité, potentiels risques pour la santé et impacts non négligeables sur la ressource en bois) à des techniques modernes (foyers améliorés), sur la base d’une gestion raisonnée de la ressource. 56 Source : Sciences et avenir (2013). 11.Mosseri et Jeandel (2013). La transition énergétique Les applications à basse température du type des pompes à chaleur peuvent s’intégrer dans des bâtiments. Les progrès technologiques à réaliser consistent également à mettre à profit la capacité de stockage énergétique du sous-sol. 2.2.2.4 Les énergies marines La filière des énergies marines comprend de multiples technologies mettant à profit l’énergie des marées et des vagues, l’énergie thermique (différence de température entre les eaux de surface et les eaux profondes), l’exploitation des courants marins, l’éolien en mer ou l’énergie osmotique (différence de salinité entre eaux douces et eaux salées). Selon l’AIE, les technologies marines ont un potentiel de production d’électricité significatif compris entre 20 000 TWh et 80 000 TWh, sachant que la demande mondiale est actuellement aux alentours de 17 500 TWh12. Des démonstrateurs scientifiques, des projets de recherche et des projets industriels concrets sont développés, notamment aux États-Unis, au Royaume-Uni, au Portugal et en France. De nombreuses recherches sont menées partout dans le monde et de multiples gouvernements soutiennent cette filière à fort potentiel d’innovation. De même, les gros industriels historiques du secteur de l’énergie s’intéressent de plus en plus aux énergies marines. Cependant, la plupart des technologies sont encore au stade du développement. Les coûts restent élevés comparativement à la capacité de production. À terme, la technologie est néanmoins prometteuse, les rendements s’améliorent chaque année, et les pays ayant une large ouverture sur la mer disposeraient ainsi d’une source d’énergie abondante. Un dernier avantage est la relative discrétion des systèmes qui, à la différence des éoliennes en mer, sont souvent invisibles depuis la côte. En raison du contexte énergétique mondial, caractérisé par une hausse continue des prix de l’énergie et une prise de conscience de l’impact climatique de l’usage des énergies fossiles, les énergies renouvelables connaissent un regain d’intérêt depuis la fin du 20e siècle. Il en résulte une croissance soutenue, appuyée notamment par des politiques de soutien et des investissements importants. 12.AIE (2013a). d e 2.2.3 Perspectives de développement des énergies renouvelables P o i n t s Source : Site Internet d’EMEC, consulté en décembre 2014. r e p è r e Figure 31. Système houlomoteur Pelamis 57 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 2.2.3.1 Une croissance soutenue, mais une part qui reste insuffisante dans le bouquet énergétique mondial Depuis le début du 21e siècle, les énergies renouvelables connaissent un développement qui se renforce d’année en année. La croissance annuelle est ainsi passée de 3 % entre 2000 et 2006 à 5,5 % entre 2006 et 2013, et les estimations de la croissance s’élèvent à 40 % pour la période 2013-201813. L’augmentation de la part des énergies renou velables dans le bouquet énergétique mondial, autrefois principalement soutenue par l’Europe, est de plus en plus le fait des pays émergents, en particulier la Chine, l’Inde et le Brésil. En 2013, 54 % de la production d’énergie à partir de sources renouvelables a été réalisée par les pays non membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)14. Rien qu’au niveau des nouvelles installations en photovoltaïque, l’Asie représente plus de la moitié de la capacité additionnelle à l’échelle mondiale. Figure 32. Croissance de la capacité de production énergétique à partir de sources renouvelables, selon la région, et confrontation des projections avec le scénario +2 °C P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2014b). 58 Les projections jusqu’en 2040 montrent que la croissance de la production énergétique à partir de sources renouvelables proviendra majoritairement de l’hydroélectricité et de l’éolien. Alors que les sites d’exploitation hydroélectriques sont pour la plupart déjà occupés dans les pays de l’OCDE, cette filière connaîtra une croissance importante surtout dans les pays hors OCDE, notamment au Brésil, en Chine et en Inde. Le développement de l’éolien sera particulièrement important en Chine, où cette filière couvrira 26 % du bouquet énergétique en 2040, alors qu’elle n’en représentait que 6 % en 201015. Cela dit, même si la croissance des énergies renouvelables est en constante progression et est soutenue depuis le début du 21e siècle, leur part dans le bouquet énergétique 13.AIE (2014b). 14.AIE (2014b). 15.AIE (2013c). La transition énergétique Figure 33. Production d’électricité nette, selon la ressource énergétique, 2010-2040 (1012 kWh) Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2013c). 16.REN 21 (2015). d e P o i n t s 2.2.3.2 De la nécessité d’un soutien politique Au début de l’année 2015, 145 pays, dont une majorité de pays émergents ou en voie de développement, s’étaient fixé des objectifs précis en termes de production d’énergie renouvelable et avaient mis en place des politiques de soutien16. Les politiques de soutien se caractérisent, par exemple, par des tarifs préférentiels pour l’achat d’électricité produite à partir de sources renouvelables, par des exonérations fiscales ou par des appels d’offres spécifiques. Si le nombre de pays engagés a considérablement augmenté depuis 2005 (figure 34), le rythme d’adoption de nouvelles mesures est resté faible comparativement au début des années 2000. Le secteur étant plus mature, plusieurs pays ont revu leurs systèmes d’aide à la baisse, notamment suite à la mise en place de politiques d’austérité. En compléments des Etats, il faut souligner la forte implication et les possibilités d’actions des gouvernements locaux, des villes et des territoires. Des milliers de villes et de gouvernements locaux du monde entier ont adopté des politiques très pro actives avec des plans ou des objectifs spécifiques qu’il s’agisse de contributions nettes ou de pourcentages allant, pour certaines villes, jusqu’à 100 % de la fourniture d’électricité d’origine renouvelable à l’horizon 2020 (par exemple, rien qu’en Allemagne, r e p è r e mondial évolue très lentement. En effet, les énergies fossiles et l’énergie nucléaire connaissent également une croissance continue, qui ne devrait pas s’arrêter dans les prochaines décennies, malgré les nombreuses répercussions et les coûts de ces filières. 59 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 34. Pays ayant adopté des politiques de soutien aux énergies renouvelables, 2005 et 2013 P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après REN 21 (2013). 60 140 municipalités ont pris des engagements en faveur des énergies renouvelables). Dans certains cas, des objectifs chiffrés d’atténuation y sont également adossés. En Europe, la Convention des maires comprenait 6 149 signataires fin 2014 et, début 2015, 71 groupes de petites municipalités avaient adopté un plan d’action pour l’énergie durable sous couvert de cette convention, dans le but d’agréger leurs ressources et de bénéficier d’économies d’échelle17. Un ensemble de 5 039 plans d’action pour l’énergie durable a été communiqué fin 201518. 2.2.3.3 Des investissements et un marché international qui se confirment À l’échelle mondiale, les nouveaux investissements dans les énergies renouvelables ont atteint 270 milliards de dollars en 2014 (plus de 300 milliards si on inclut les barrages hydrauliques de plus de 50 MW), ce qui représente une hausse de 17 % par rapport à 201319. Cette croissance a été particulièrement portée par les économies émergentes, notamment la Chine. 17.REN 21 (2015). 18.Site de la Convention des maires. 19.REN 21 (2015). La transition énergétique Figure 35. Investissement dans les énergies renouvelables, 2001-2013 20.PNUE (2014). d e P o i n t s L’énergie solaire a représenté près de la moitié du total des investissements (principalement pour le solaire photovoltaïque), suivi de l’éolien et de l’hydroélectricité. Avec la baisse du prix des technologies et des équipements connexes, la hausse du volume des investissements, y compris dans les pays en développement, et le développement de filières industrielles dans de nombreux pays, on observe, depuis une dizaine d’années, une hausse très rapide du commerce international dans ce secteur. Globalement, selon une étude du PNUE20 portant sur la période 2004-2011, les échanges de produits manufacturés ont augmenté de 9,7 %, contre 26,7 % pour ceux qui concernent uniquement les équipements de production d’énergie renouvelable. Autre fait remarquable, sur la même période, le commerce Sud-Sud d’équipements de production d’énergie renouvelable a progressé plus vite (+29,4 %) qu’à l’international, ce qui met en évidence à la fois le dynamisme des investissements et le développement industriel du secteur dans les pays en développement. Comme pour de nombreux autres produits manufacturés, le commerce Sud-Sud d’équipements de production d’énergie renouvelable est dominé par les exportations issues des pays d’Asie du Sud-Est et de la Chine (en particulier dans le solaire). À noter que ces mêmes pays détiennent également une part significative des marchés dans les pays de l’OCDE. La réalité de ces développements très dynamiques ne doit cependant pas masquer le fait qu’il existe encore de très nombreux freins au développement des énergies renouvelables. r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2014b). 61 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 62 2.2.3.4 Des freins encore trop nombreux Si tout le monde s’accorde sur le fait que les énergies renouvelables constituent une réponse incontournable aux grands défis énergétiques auxquels nos sociétés sont confrontées, le développement de cette filière rencontre toutefois certaines barrières : • L’intermittence. Que ce soit l’énergie solaire, éolienne ou même parfois l’énergie hydraulique, les énergies renouvelables sont pour la plupart intermittentes. Cela pose un problème, car la demande ne suit pas forcément les cycles de production. À titre d’illustration, les besoins électriques pour l’éclairage se manifestent principalement la nuit, lorsqu’il n’y a pas de soleil et que la production photovoltaïque est nulle. La multiplication des systèmes énergétiques intermittents entraîne certaines difficultés de gestion des réseaux nationaux, les productions pouvant paraître difficilement prévisibles. De nombreux progrès ont été réalisés dans la prédiction de la production, mais certains débats techniques et idéologiques sont encore d’actualité. Une des solutions est de développer des réseaux intelligents et interconnectés, aptes à gérer ce type de production. • La compétitivité économique. Dans de nombreux pays, les solutions renouvelables nécessitent encore des subventions, même si elles sont de plus en plus concurrentielles. C’est particulièrement le cas des installations de faible puissance. Ce besoin de financement tient au fait que toutes les technologies ne sont pas encore arrivées à maturité et que les énergies fossiles sont aussi largement subventionnées dans de nombreux pays, ce qui crée une surprenante distorsion de concurrence en faveur des énergies fossiles. • L’acceptation. L’acceptation des différentes technologies par les populations et par les décideurs politiques est un enjeu majeur pour le développement des énergies renouvelables. Que ce soit par manque d’information ou de sensibilisation, les énergies renouvelables sont régulièrement contestées par une partie de la population et des notions très subjectives d’esthétique ou de « j’aime/j’aime pas » se retrouvent au cœur des débats. Ce fait est d’autant plus surprenant que bien des gens qui ne trouvent rien à redire au foisonnement d’antennes paraboliques ou d’objets posés en désordre sur les balcons sont quand même prêts à se mobiliser contre la pose d’un panneau solaire. Les éoliennes font souvent l’objet d’une crispation particulière au regard de l’esthétisme ou de prétendus troubles sanitaires, malgré l’existence de normes d’aménagement très strictes dans la plupart des pays. • L’accès à la technologie et aux compétences. Certains pays ou territoires souffrant d’un fort déficit de développement économique et d’accès aux services énergétiques modernes pourraient bénéficier grandement des sources d’énergie renouvelables. Pour autant, nombre d’entre eux n’ont pas accès aux technologies nécessaires, faute de capacité de financement et même de disponibilité locale. De plus, des capacités spécifiques sont requises pour l’installation et la maintenance des équipements. Des programmes de formation doivent donc être mis en place pour former des spécialistes capables de gérer ces projets. La coopération en matière de financement et de compétence doit être encouragée pour aider les pays en développement ou les territoires ayant de la difficulté à accéder aux technologies renouvelables à mettre en place des projets locaux. La transition énergétique 2.3 L’innovation, un catalyseur indispensable L’innovation technologique et organisationnelle est un des piliers essentiels de la transi tion énergétique. Il s’agit de trouver de nouveaux moyens technologiques pour produire de l’énergie propre et de nouveaux modes d’organisation pour optimiser son acheminement au plus près des utilisateurs. L’innovation doit dès lors porter sur le volet production, mais également se décliner dans l’amélioration des moyens de stockage et des réseaux de distribution. 2.3.1 Repenser les réseaux électriques pour optimiser le système énergétique d e P o i n t s 2.3.1.1 Un système énergétique réparti pour conjuguer les visions sur un territoire Un système énergétique réparti se caractérise par l’intégration de facteurs techniques et d’un bouquet de technologies et par l’implication des acteurs et des usagers, l’objectif étant d’optimiser la réponse aux besoins des usagers en services énergétiques. Autrement dit, il s’agit de tirer le meilleur parti possible des ressources énergétiques locales dans un contexte donné. Ce type de système, généralement fondé sur une production décentralisée de l’énergie, s’intègre parfaitement dans le contexte des zones rurales et des territoires isolés. La production décentralisée d’énergie peut jouer un rôle essentiel dans l’accès à des services de base tels que le traitement de l’eau (dessalement), l’approvisionnement en eau (pompage), la chaleur (séchage des produits alimentaires) et le refroidissement (réfrigération de biens et produits agricoles et médicinaux). Dans le cas d’un système énergétique réparti, le rôle de l’opérateur ne se limite pas à fournir un service énergétique. Il s’agit également d’optimiser l’usage des ressources énergétiques disponibles. Cela se fait notamment par la mise en place d’un ensemble de modes de production d’énergie cohérent, diversifié, fiable et optimisé, tout en réduisant au mieux les émissions de GES. Un tel système fait généralement appel à des sources d’énergie renouvelables telles que le solaire, l’éolien, la géothermie ou la petite hydraulique, qui se prêtent remarquablement bien à une production d’énergie locale. r e p è r e Les problématiques auxquelles notre système énergétique est confronté sont très importantes et complexes, qu’il s’agisse du déficit d’accès et de la pauvreté énergétique qui affligent une part significative de la population mondiale, de l’insécurité énergétique, des émissions de GES ou de la vétusté des réseaux électriques dans les pays en développement. Afin de relever ces défis, le changement de paradigme prend une importance vitale. Il convient donc de remettre en question l’ensemble de la chaîne, de la production à la consommation, avec des acteurs de plus en plus informés, qui peuvent et doivent jouer un rôle dans cette nouvelle organisation à mettre en œuvre. De nombreuses tentatives se mettent en place de par le monde ; il importe de les considérer avec attention afin de voir comment en tirer les bonnes leçons, les renforcer et les démultiplier. 63 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 2.3.1.2 Les mini-réseaux pour soutenir le développement énergétique des territoires Face à la fragilité et à la vétusté des réseaux électriques traditionnels dans les pays en développement, le mini-réseau (microgrid) se distingue par le fait qu’il peut fonctionner de manière isolée et qu’il est alimenté par une production locale d’électricité. S’il est raccordé au réseau électrique, en cas de coupure de ce dernier, il peut fonctionner de façon autonome. Le mini-réseau peut se situer à plusieurs échelles, allant de l’ensemble d’habitations productrices d’énergie au quartier ou à la zone commerciale22. Auparavant cantonnés à des cas particuliers (notamment la constitution de réseaux sécurisés pour des installations industrielles), les mini-réseaux se démocratisent de plus en plus. Selon un rapport de Navigant Research, leur marché devrait croître significativement au cours des prochaines années, passant de près de 10 milliards de dollars de revenus en 2013 à 40 milliards d’ici 202023. Du point de vue technique, le mini-réseau améliore la fiabilité, surtout en période de pointe, car la gestion locale est plus aisée. Le problème du coût de construction des lignes ne se pose pas et, d’un point de vue économique, les coûts de transport et de distribution sont très réduits. En outre, le mini-réseau améliore l’efficacité énergétique globale, car son installation accroît la précision des bilans et optimise le lissage des prix. Du point de vue environnemental, la mise en place de mini-réseaux favorise le développement des énergies renouvelables et la réduction des pertes liées au transport de l’énergie24. Dans certains cas, lorsque la densité démographique est trop faible et ou que la région est isolée, le raccordement au réseau national ou régional à un coût raisonnable n’est pas possible au prorata du service rendu. Dans ces situations, le mini-réseau représente souvent l’option la moins onéreuse lorsque les sources d’énergie renouvelables sont à proximité et qu’il existe tout de même un certain niveau de concentration de la demande. Dans ce cas, ce type de mini-réseau peut fournir aux ménages et aux entreprises la même qualité de service électrique que le réseau national, mais à moindre coût. P o i n t s d e r e p è r e En effet, les ressources sont très souvent réparties sur de larges territoires (soleil, vent) et la taille des installations est adaptée à une échelle locale. De plus, le coût d’investissement n’est pas trop élevé et les besoins en maintenance sont faibles. Bien que l’un des objectifs de ce type de système soit de disposer d’une autonomie accrue, il ne s’agit pas forcément de systèmes isolés ; ils peuvent également constituer un nœud dans un réseau construit à l’échelle nationale ou régionale21. 64 21.Laponche (2002). 22.AGRION (2010). 23.Smartplanet (2013). 24.AGRION (2010). La transition énergétique Les réseaux intelligents ne sont pas l’apanage des pays développés. Dans les pays en développement, même si le réseau électrique y est très souvent fragile, voire vétuste, des applications intermédiaires restent pertinentes. C’est notamment le cas en Afrique : un réseau de type européen n’aurait probablement guère de chances d’y être mis en place 25.ADEME (2013). 26.Commission de régulation de l’énergie (s.d. a). d e Encadré 3. Des réseaux intelligents en Afrique P o i n t s 2.3.1.3 Les réseaux intelligents Pour faire face aux mutations du paysage énergétique, il est nécessaire de moderniser le système de production et de distribution électrique. Le déploiement des réseaux intelligents (smart grids) plutôt que le remplacement ou le renforcement massif des réseaux doit être privilégié autant que possible. Selon la définition qu’en donne l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), les systèmes électriques intelligents « sont des réseaux d’électricité capables d’intégrer, de prévoir et d’inciter efficacement et de manière intelligente les actions et comportements des différents utilisateurs, consommateurs, et/ou producteurs (industriels, tertiaires, résidentiels) qui y sont raccordés, et ce afin de maintenir une fourniture d’électricité efficace, durable, économique et sécurisée 25 ». Le réseau électrique est donc voué à devenir résolument plus complexe, mais aussi plus flexible. Il conjuguera production locale à partir de sources d’énergies renouvelables, stockage et distribution optimisée, en interaction avec les usagers et au plus près des besoins de consommation et de la disponibilité de la ressource électrique. Grâce à cette nouvelle technologie, la gestion des réseaux électriques, qui était jusqu’à présent centralisée et unidirectionnelle, allant de la production à la consommation, sera répartie et bidirectionnelle. Afin d’adapter le réseau à ces changements, de nouvelles technologies de l’information et de la communication y sont intégrées26. r e p è r e Vu la rareté des statistiques détaillées sur le développement des solutions hors réseaux ou mini-réseaux dans les pays en développement, le taux de déploiement de ces solutions n’est pas connu. Cela dit, même dans les pays industrialisés, la production d’énergie décentralisée peine encore à se développer. L’intégration des mini-réseaux au réseau global, la gestion de multiples sources de production, dont certaines peuvent être intermittentes, et le problème du stockage de l’énergie freinent le déploiement de ce mode d’organisation. Pour contrer ces difficultés, il faut encourager l’innovation et multiplier les projets de démonstration pour renforcer l’attractivité économique, technique et sociale de ces installations. 65 La transition énergétique : connaître et partager pour agir à moyen terme, mais l’implantation de réseaux intelligents favoriserait l’installation directe de technologies innovantes dès lors que des interventions seraient programmées. Il serait ainsi possible d’améliorer l’appro visionnement et de réduire l’occurrence et la durée des coupures, sachant qu’en parallèle, l’Afrique dispose d’un important gisement de ressources renouvelables. Le Cameroun et la République de Djibouti ont déjà mis en place les premières étapes d’une nouvelle manière de gérer l’électricité. Des compteurs communicants (ou évolués) permettent aux utilisateurs de surveiller leur consommation. L’objectif est de faciliter, en cas de besoin, l’effacement de certaines consommations en priorisant les équipements essentiels et les services les plus utiles. Des mini-réseaux adaptés aux énergies renouvelables intermittentes pourraient faire de l’Afrique un immense laboratoire de l’efficience énergétique, si les moyens financiers nécessaires sont mis à disposition et les bons réflexes, adoptés dès maintenant. P o i n t s d e r e p è r e Figure 36. Schéma d’un réseau intelligent 66 Source : Commission de régulation de l’énergie (s.d. a). Selon l’AIE, le déploiement des compteurs électriques intelligents a augmenté de 500 % entre 2008 et 2012, passant de 46 millions à 285 millions de compteurs installés. Les projections tablent sur près de 1 milliard de compteurs d’ici la fin 2018. La transition énergétique Figure 37. Comparaison entre les réseaux conventionnels et les réseaux intelligents Source : Commission de régulation de l’énergie (s.d. a). Figure 38. Nombre total de compteurs électriques intelligents installés, 2008-2018 27.Global Smart Grid Federation (2012). d e P o i n t s Un certain nombre de projets pilotes ont récemment vu le jour. On peut notamment citer le réseau de la Global Smart Grid Federation, une association de réseaux intelligents nationaux ou régionaux, qui, dans un rapport de 201227, a recensé un certain nombre de bonnes pratiques mises en œuvre en Australie, en Europe, en Corée, au Japon et aux États-Unis. Ce rapport met également en lumière le rôle essentiel des gouvernements dans le déploiement des réseaux, par l’élaboration de stratégies et de règlements adaptés, ainsi que par l’éducation des consommateurs. Les investissements dans le secteur des réseaux intelligents sont en constante progression ; ils avaient atteint 13,9 milliards de dollars en 2012. Ils demeurent toutefois insuffisants au regard des enjeux et des objectifs de réduction des émissions de GES. r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2013d). 67 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 39. Évolution de l’investissement dans les réseaux intelligents P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2013d). 68 2.3.1.4 Des réseaux pour raccorder des États : les super-réseaux Le recours de plus en plus intensif aux énergies renouvelables va entraîner de nouvelles contraintes pour les réseaux. C’est pourquoi, en plus des mini-réseaux et des réseaux intelligents, il apparaît nécessaire d’organiser le système énergétique à une échelle macro grâce aux super-réseaux (supergrids). Cette notion recouvre les initiatives visant à développer des réseaux de transport d’électricité à l’échelle continentale. La définition des super-réseaux part ainsi de la même base que celle des réseaux intelligents. Selon le Ministère français du Développement durable, il s’agit de « réseaux de transport de l’énergie électrique, utilisant du courant continu et du courant alternatif à fortes tensions (de l’ordre d’un million de volts), conçus pour acheminer à grande échelle de l’énergie pro duite par des sources renouvelables éloignées des centres de consommation, dont une partie significative se trouve en mer […] et qui permettront, en lien avec des moyens de stockage flexibles, de gérer le caractère intermittent des énergies renouvelables et d’assurer la stabilité et la sécurité du réseau28 ». Dans le but d’atteindre des objectifs ambitieux en termes d’apport des énergies renouvelables dans leur bouquet énergétique, les pays doivent s’appuyer sur des ressources renouvelables situées parfois hors de leur territoire national. Une telle démarche s’inscrit également dans la logique d’intégration des réseaux énergétiques. En Europe, par exemple, les pays du Nord ont un fort potentiel éolien tandis que la région méditerranéenne possède une immense capacité de production solaire. De même, l’Afrique de l’Est et la région du Grand Rift bénéficient d’un fort potentiel géothermique alors que les possibilités en énergie solaire sont élevées en région saharienne. Cette diversité de ressources peut s’inscrire dans une logique de complémentarité au service d’une énergie distribuée et partagée d’une manière optimale sur plusieurs pays. 28.Ministère du Développement durable (s.d.). La transition énergétique Figure 40. Ressources énergétiques de l’Union européenne en 2050 d e 29.Ministère du Développement durable (s.d.). r e p è r e Pour mener à bien de tels projets, il est indispensable de mettre en place des réseaux d’échange et de transport d’énergie à l’échelle de plusieurs pays, voire de continents entiers, afin d’optimiser l’exploitation des ressources renouvelables qui ne sont pas toujours réparties équitablement sur les territoires. De plus, les meilleures zones pour la production d’électricité de sources renouvelables sont souvent situées à des endroits où la densité du réseau électrique est faible. Chacun comprendra alors la nécessité de mutualiser les investissements pour en partager les bénéfices. Selon les prévisions du Ministère français du Développement durable, la croissance du marché mondial du super-réseau est estimée à plus de 15 milliards d’euros par an à l’horizon 202029. Cela dit, il ne suffit pas de créer de nouvelles lignes d’interconnexion électrique entre les pays et les connecter aux réseaux de transport d’électricité nationaux pour disposer d’un super-réseau. En fait, c’est l’ensemble du réseau qui doit être repensé et adapté techniquement. En pratique, certains verrous technologiques s’opposent encore aux réseaux qui permettent le transport de l’électricité sur de longues distances tout en réduisant les pertes au minimum. La technologie la mieux placée est celle des lignes haute tension à courant continu. Cependant, les disjoncteurs et les convertisseurs sont encore en phase de développement. P o i n t s Source : ENERGIES 2050, d’après le site Internet de Roadmap 2050, consulté en décembre 2014. 69 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 41. Exemple de développement d’un super-réseau européen Source : ENERGIES 2050, d’après le site Internet de Roadmap 2050, consulté en décembre 2014. P o i n t s d e r e p è r e 2.3.2 Le stockage de l’énergie : un maillon stratégique pour améliorer toute la chaîne 70 Au-delà de la production et du transport de l’énergie, le stockage est au cœur des enjeux et des recherches sur la transition énergétique. Le stockage a pour objet de bonifier la flexibilité et la fiabilité des systèmes énergétiques. Il s’agit d’équilibrer l’offre et la demande en énergie dans le temps, que ce soit pour la fourniture d’électricité, de chaleur ou de froid. Dans l’avenir, tant pour l’électricité que pour l’énergie thermique, le stockage stationnaire de l’énergie devra être de plus en plus associé au développement des énergies renouvelables, afin de garantir en permanence la disponibilité d’une énergie de qualité. Contrairement aux énergies fossiles (dites de stock), l’électricité ou la chaleur produite par les sources renouvelables (dites de flux) ne se stocke pas. Le caractère imprévisible et intermittent des énergies renouvelables rend leur intégration au réseau difficile, et le développement des réseaux intelligents ne pourra parvenir seul à gérer cet afflux désordonné d’énergie. La transition énergétique Il est cependant possible de convertir l’énergie électrique en d’autres formes d’énergies (potentielle, cinétique, chimique ou thermique) intermédiaires et stockables. Mais la transformation en retour sous forme d’électricité subit pour l’instant de fortes pertes qui pénalisent ces solutions. Le recours à des solutions de stockage performantes semble essentiel au développement à grande échelle des énergies renouvelables. Leurs répercussions seront à la fois d’ordre environnemental (réduction des émissions de GES), économique (développement de nouvelles filières et stabilité des prix de l’énergie) et politique (indépendance et sécurité énergétiques). De nombreuses solutions sont déjà disponibles. Les plus répandues sont les stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), le stockage d’énergie sous forme d’air comprimé (SEAC ou CAES, pour Compressed Air Energy Storage), les batteries ou la production d’hydrogène. Le marché mondial du stockage était évalué en 2010 entre 1,5 et 4,5 milliards de dollars, le pompage hydraulique assurant 99 % du stockage mondial30 et les batteries de super-capacité représentant un marché de 400 à 600 millions de dollars. Pour 2020, les projections sont comprises entre 16 et 35 milliards de dollars pour de nouvelles capacités installées au rythme de 7 à 14 GW par an. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) prévoit un fort développement de la capacité de stockage mondiale, qui passerait de 100 GW à l’heure actuelle à 200 GW en 2050 si le taux de pénétration de l’éolien est de 15 %. La capacité de stockage pourrait atteindre 300 GW avec un taux de pénétration de l’éolien à 30 %31. 30.Laperche (2012). 31.Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (2012). d e P o i n t s La station de transfert d’énergie par pompage (STEP) Deux réservoirs d’eau sont situés à des altitudes différentes. En période de faible consommation, l’eau est pompée vers le réservoir du haut. En période de forte demande en énergie, l’eau est relâchée ; elle circule dans l’autre sens et rejoint, par gravitation, le réservoir le plus bas. Son passage fait tourner une turbine qui alimente un alternateur et produit de l’électricité. Cette solution de stockage à grande échelle est la plus répandue, car les coûts d’investissement sont relativement bas. Les sites appropriés pour mettre en place ce type d’infrastructure se font cependant de plus en plus rares. C’est pourquoi de nouveaux types de STEP en bord de mer sont envisagés. r e p è r e Encadré 4. Le fonctionnement d’une STEP et du SEAC 71 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 42. Station de transfert d’énergie par pompage Illustration : Corinne Beurtey Le stockage d’énergie par air comprimé (SEAC) Le compresseur est alimenté pendant les heures creuses de demande en électricité. De l’air comprimé est produit puis stocké dans une cavité souterraine. En période de pointe, l’air comprimé est d’abord réchauffé dans une chambre de combustion, grâce à l’apport de gaz naturel, avant d’être détendu dans une turbine (ce qui évite de l’endommager). Cette dernière est reliée à un alternateur qui produit de l’électricité. P o i n t s d e r e p è r e Figure 43. Stockage d’énergie par air comprimé 72 La transition énergétique De nombreuses autres formes de stockage innovantes, moins coûteuses et plus efficaces, sont actuellement au stade de l’expérimentation ou de l’étude. En France, le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) travaille notamment sur des projets d’accumulateurs lithium-ion et de thermoélectricité (transformation de la chaleur en énergie électrique)32. En Chine, l’entreprise BYD et la société d’État de distribution d’électricité, la State Grid Corporation of China, ont construit la plus grande station de stockage d’énergie au monde. Cette infrastructure, le State Grid Project, a été mise en place à Zhangbei, dans la province de Hebei. Elle combine la production d’énergie solaire et éolienne à hauteur de 140 MWh et la possibilité de stocker sur place 36 MWh d’électricité produite. La technologie employée consiste en des batteries fer-phosphate, un matériau réputé pour sa longévité (près de 20 ans). L’investissement total pour l’ensemble du site s’élève à 500 millions de dollars33. On notera également une solution innovante qui consiste à utiliser les véhicules électriques comme station de stockage électrique. En effet, compte tenu qu’une voiture est inutilisée 95 % de son temps de vie et que l’utilisation moyenne d’un véhicule électrique nécessite moins de 80 % de la capacité de la batterie pour les trajets quotidiens34, on peut imaginer que les voitures en charge puissent absorber le surplus d’électricité produite, la stocker et la restituer au réseau au moment opportun. Ce concept porte le nom de vehicle-to-grid ou V2G. Le projet est encore au stade des essais, mais les résultats annoncés sont assez prometteurs. d e 32.Site du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, consulté en décembre 2014. 33.Smartgrid – cre. (s.d. a). 34.Smartgrid – cre. (s.d. b). 35.AIE (2013d). 36.IBGE (2009). P o i n t s À l’échelle mondiale, les besoins en chauffage et en réfrigération représentent 46 % de la consommation finale d’énergie. La part de la chaleur est produite à partir des énergies fossiles est de 67 % ; elle atteint 85 % dans les pays de l’OCDE35. D’un autre côté, les pertes énergétiques sous forme de chaleur représentent un des principaux défis de la production d’énergie. On estime généralement à 60 % les pertes énergétiques des centrales électriques thermiques. Cela signifie qu’il existe un fort potentiel d’optimisation du processus de production d’électricité par la récupération de la chaleur dégagée pour l’utiliser à des fins de chauffage domestique ou de production d’eau chaude, ou encore dans des processus industriels. C’est dans ce contexte que les techniques de cogénération, ou production d’énergie combinée, prennent tout leur sens. La cogénération est une technique de production simultanée d’énergie électrique et de chaleur par un moteur, une turbine à gaz ou une turbine à vapeur36. r e p è r e 2.3.3 La cogénération pour optimiser le processus 73 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 44. Schéma du procédé de cogénération Source : IBGE (2009). La cogénération accroît le rendement énergétique des centrales électriques en récupérant et en valorisant la chaleur dégagée lors de la combustion des matières premières. Les rendements énergétiques obtenus sont supérieurs à ceux d’une production séparée équivalente d’électricité et de chaleur (économies de 15 à 20 % d’énergie primaire)37. Le transport de cette énergie thermique doit ensuite être assuré par un réseau approprié qui relie les centres de production et de consommation, qui sont souvent séparés. Cette solution évite de consommer de l’énergie pour subvenir aux besoins de chauffage. La rentabilité est donc augmentée à la fois du point de vue énergétique et économique. En outre, les émissions de CO2 dans l’atmosphère sont réduites. P o i n t s d e r e p è r e Figure 45. Part de la cogénération dans la production nationale d’énergie 74 Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2013d). Les technologies de cogénération sont déjà très bien maîtrisées et les rendements atteints sont élevés. Cependant, la mise en application de ces technologies dépend fortement des pouvoirs publics et des politiques de soutien mises en place. La principale difficulté réside dans le raccordement par réseau des sources d’énergie thermique aux consommateurs. Cela nécessite généralement de nouvelles infrastructures et donc 37.IBGE (2009). La transition énergétique un certain investissement. Cela dit, au regard de l’augmentation constante du prix des énergies fossiles, des enjeux environnementaux et de l’optimisation économique du processus, cette technologie pourrait rapidement devenir rentable. 2.4 Les énergies fossiles : gérer la transition pour accompagner le changement L’objectif de la transition énergétique est de se libérer progressivement de la dépendance aux énergies fossiles, mais cela ne se fera pas instantanément. Afin d’accompagner le processus de transition dans la production d’énergie, il est nécessaire de réfléchir à la manière optimale de gérer l’utilisation des énergies fossiles en réduisant au maximum leur incidence environnementale. d e P o i n t s Tout en gardant à l’esprit le fait que les énergies fossiles sont limitées par nature et qu’elles s’épuiseront un jour, il n’en reste pas moins que leur stock est important. Or, nous avons vu qu’une utilisation sans restriction aurait des conséquences catastrophiques et irréversibles pour le climat. Des règles de bon sens doivent donc s’appliquer dès à présent afin de laisser dans le sous-sol les deux tiers des stocks d’énergie prouvés. L’objectif prioritaire reste de diminuer au plus tôt l’exploitation de ces sources d’énergie pour limiter les émissions de GES en mettant également en place la sur veillance environnementale la plus stricte. Ceci est particulièrement vrai pour le charbon, qui est la source d’énergie la plus intensive en carbone et dont les réserves sont les plus importantes. Le but est donc de réduire autant que possible l’utilisation des ressources fossiles sans attendre leur épuisement naturel. Cela dit, malgré cet impératif et les alertes répétées de la communauté scientifique, les projections annoncent pourtant une part quasi constante des énergies fossiles dans le bouquet énergétique mondial pour les décennies à venir. Au regard de cette réalité, il convient donc de développer également des solutions permettant de limiter les répercussions climatiques de ces combustibles. Des progrès dans la neutralité environnementale des énergies fossiles permettraient ainsi de réaliser d’importantes réductions des émissions de GES, même si cela ne réglerait pas l’intégralité des conséquences nuisibles. Parallèlement à la limitation la plus forte possible de l’utilisation des ressources fossiles et au développement des énergies renouvelables, deux solutions se présentent : • Améliorer les technologies ou utiliser des ressources moins polluantes pour augmenter l’efficacité des énergies fossiles : actuellement, par exemple, la combustion du charbon pour la production d’électricité libère entre 800 et 1 700 g de CO2 par kilowattheure (gCO2/kWh), selon la technologie employée. Le pétrole dégage quant à lui entre 500 et 1 200 gCO2/kWh et le gaz naturel permet de diminuer encore les émissions (entre 400 et 1 000 gCO2/kWh) avec les techniques de combustion les r e p è r e 2.4.1 Une utilisation maîtrisée des ressources fossiles indispensables à court et moyen terme 75 La transition énergétique : connaître et partager pour agir plus avancées. Par comparaison, les énergies renouvelables libèrent respectivement entre 10 et 20 gCO2/kWh pour l’éolien, de 4 à 40 gCO2/kWh pour l’hydraulique et de 40 à 150 gCO2/kWh pour le solaire38. • Développer les techniques de capture et de stockage du CO2 : la technique de stockage dans des formations rocheuses limite les rejets dans l’atmosphère. Elle n’est cependant pas encore mature et pose également des questions de pertinence, de faisabilité et de sécurité. Sur ce point, il convient de souligner les inquiétudes légitimes d’une partie de la population qui s’interroge sur la durabilité de cette solution et le risque d’émissions massives en cas de fuite des réservoirs de stockage. La solution la plus sensée demeure de diminuer à la source nos émissions de GES ; la capture ne devrait être envisagée que pour un certain temps, dans une perspective de transition. Autrement dit, elle ne doit pas devenir une opportunité pour continuer à émettre des GES, sous prétexte que les gaz ne sont pas « réellement » émis dans l’atmosphère. P o i n t s d e r e p è r e Encadré 5. Capter et stocker le CO2 76 L’objectif est de capter le CO2 dès sa production dans les installations industrielles utilisant des combustibles fossiles, responsables de 40 % des émissions de GES à l’échelle mondiale. Dans un second temps, il s’agit de le transporter par pipelines ou par bateau, puis de le piéger dans le soussol, dans des couches géologiques où il sera confiné pendant des siècles. Bien que ces technologies, dérivées de celles qui sont mises en œuvre dans l’industrie pétrolière, soient disponibles, elles demeurent chères et peu attractives pour le moment. Actuellement, la tonne de CO2 évitée est évaluée à 60 euros (85 % relevant du captage et de la compression, qui sont des processus très énergivores). L’objectif est d’atteindre un plancher de 20 à 30 euros la tonne, un coût qui serait compatible avec le cours espéré de la tonne de CO2 sur le marché européen d’échange de quotas d’émissions. Afin de rendre cette méthode attractive, les coûts doivent être partagés entre l’industrie, les pouvoirs publics et les grands bailleurs. Selon les projections, le captage pourrait porter sur 6 à 7 milliards de tonnes par an en 2050. 2.4.2 La fausse question épineuse des subventions aux énergies fossiles À l’heure où le besoin de changer de modèle énergétique se fait criant et où les États ne cessent de souligner leur manque de ressources, le fait de continuer à subventionner largement les énergies fossiles, comme cela est malheureusement le cas, paraît être un 38.Office fédéral de l’environnement suisse (s.d.). La transition énergétique 39.AIE (2015b). d e En Inde, les prix intérieurs de l’énergie n’ont pas suivi la hausse des cours internationaux, rendant nécessaire la mise en place d’importantes subventions. Au cours de l’année 2008-2009, les subventions ont atteint un sommet de plus de 2 % du produit intérieur brut (PIB). L’effondrement des prix internationaux lors de la seconde moitié de l’année 2008 a favorisé une baisse des subventions, qui ont atteint un peu moins de 0,9 % du PIB pour l’année 2009-2010. L’augmentation des prix internationaux P o i n t s Encadré 6. Conséquences des variations des cours internationaux de l’énergie sur l’État indien r e p è r e véritable non-sens, tant du point de vue économique qu’environnemental ou moral, au regard des conséquences des changements climatiques pour les générations à venir. Les prix internationaux de l’énergie ont beaucoup augmenté ces dernières années, même si, début 2016, une inversion des tendances s’est produite pour des raisons autres qu’énergétiques. Cela dit, de nombreux pays en développement n’ont pas rajusté les prix de l’énergie, car l’énergie est aussi un facteur économique et social qui contribue à la stabilité des États. Une énergie trop chère ayant des répercussions sur le développement économique et sur les foyers les plus modestes, de nombreux États ont puisé dans leur budget national pour amortir la variabilité du prix des énergies fossiles et maintenir ce prix à un niveau bas. Ces décisions ont pesé lourd sur les budgets publics, une situation appelée à perdurer si les prix internationaux maintiennent une courbe à la hausse. Dans les pays développés, la répercussion sur les consommateurs est réelle, mais les coûts restent inférieurs aux niveaux où ils se situeraient si les externalités négatives, c’està-dire les répercussions sur l’environnement et sur la santé, étaient prises en compte. Au niveau international, il existe un consensus à savoir que si l’on veut arriver à diminuer progressivement la part des énergies fossiles dans le bouquet énergétique mondial, il faut tout d’abord surmonter l’obstacle des subventions massives qui leur sont attribuées. D’une part, ces subventions maintiennent des prix artificiellement bas qui encouragent le gaspillage énergétique ; d’autre part, elles compromettent la compétitivité des énergies renouvelables et des technologies propres. Selon l’AIE39, les subventions aux énergies fossiles ont atteint 490 milliards de dollars américains (G $ US) en 2014, soit plus de quatre fois le montant attribué aux énergies renouvelables la même année (112 G $ US). Les politiques mises en place depuis quelques années ont cependant permis de réduire ces subventions (qui, sans cela, seraient estimées à plus de 600 G $ US). Les subventions attribuées aux énergies renouvelables pourraient s’accroître de 50 % d’ici 2040 pour atteindre 170 G $ US ; même à ce niveau, cependant, les subventions aux énergies fossiles maintiennent une forte avance. 77 La transition énergétique : connaître et partager pour agir de ces dernières années a fait augmenter de nouveau les subventions, qui ont dépassé les 2 % du PIB pour l’année 2011-2012. Ainsi, les consommateurs n’ont pas directement remarqué les variations brutales des cours, mais le budget public a subi de grosses pressions (indirectement supportées par les contribuables) ainsi qu’un manque de visibilité. Il faut noter que ces subventions sont très mal réparties et qu’elles bénéficient souvent aux plus aisés, à savoir ceux qui utilisent le plus d’énergies fossiles. Selon le Fonds monétaire international (FMI), les avantages des subventions à l’ensemble des produits pétroliers (43 %) sont six fois plus importants pour les 20 % des ménages les plus riches que pour les 20 % des ménages les plus pauvres40. La suppression progressive des subventions représente un véritable levier d’action dans la lutte contre le changement climatique et une étape essentielle dans le processus de transition énergétique. Selon le FMI, l’élimination des subventions réduirait les émissions de CO2 de 4,5 milliards de tonnes, soit une baisse de 13 % des émissions globales de CO2 liées à l’énergie41. La fin des subventions aux énergies fossiles doit cependant s’accompagner de mesures spécifiques en faveur des populations fragiles. En effet, bien que la plupart des avantages des subventions reviennent aux ménages les plus aisés, les augmentations des prix de l’énergie auront forcément un impact sur les revenus réels des plus pauvres (coûts de l’énergie pour la cuisine, le chauffage, l’éclairage, le transport et les besoins alimentaires)42. La mise en place de systèmes de subventions sociales ciblant les groupes d’individus qui en ont besoin fait partie des éléments d’accompagnement nécessaires. Il s’agit d’un chantier complexe et d’envergure pour beaucoup de pays, mais ne pas s’y attaquer aujourd’hui est un véritable crime climatique et environnemental aux conséquences sociales importantes. P o i n t s d e r e p è r e Conclusion du chapitre 2 78 Face aux limites du système énergétique actuel et aux risques environnementaux, géopolitiques, sociaux et économiques, il paraît indispensable d’engager une profonde transformation de nos modes de production et de consommation. La question éner gétique se retrouve au cœur de l’ensemble des défis à relever pour assurer un avenir durable partagé. Cela dit, la transition énergétique doit être appréhendée de manière systémique et globale. Il s’agit de modifier, d’une part, notre offre énergétique, en s’appuyant sur des énergies sobres en carbone, respectueuses de l’environnement et sans effets secondaires, telles les énergies renouvelables, et, d’autre part, notre manière de consommer l’énergie, 40.Fonds monétaire international (2013). 41.Fonds monétaire international (2013). 42.Fonds monétaire international (2013). d e P o i n t s en développant des réflexes de sobriété et d’efficacité dès lors que le service énergétique est indispensable. Pour atteindre un modèle énergétique plus soutenable et plus respectueux de l’équilibre écologique de la planète et de l’équité entre les différentes régions du monde et entre les générations, il convient d’adopter une approche intégrée s’appuyant sur les cinq piliers suivants : • La sobriété énergétique. Les actions à mettre en place relèvent pour la plupart du bon sens. Il est question d’adopter une gestion raisonnée de l’énergie, en limitant, par exemple, les usages excessifs et inutiles. La sensibilisation et l’éducation de l’ensemble des acteurs, et plus particulièrement des citoyens, sont des piliers essentiels. • L’efficacité énergétique. Il s’agit de réduire, pour un niveau de service équivalent, la consommation énergétique. Cela passe notamment par une optimisation des systèmes et des réseaux ainsi que par une amélioration de la performance des équipements et des appareils. • Le développement des énergies renouvelables. Au-delà de l’avantage d’être propres et disponibles en quantités quasi illimitées, les sources d’énergies renouvelables répondent également aux défis d’une production décentralisée, au plus proche de la demande. Si certaines barrières doivent encore être surmontées, les énergies renouvelables gagnent progressivement en performance et en compétitivité. • L’innovation. Afin d’accélérer la transition vers un modèle énergétique durable, l’innovation dans chaque maillon de la chaîne énergétique est indispensable. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication, par exemple, présentent des possibilités d’améliorer la coordination entre production et consommation, notamment par l’entremise des réseaux intelligents. • La gestion raisonnée des énergies fossiles. Le passage d’un système énergétique majoritairement carboné à un modèle basé sur les énergies renouvelables ne pourra pas se faire du jour au lendemain. La gestion raisonnée et orientée vers une consommation progressivement réduite des énergies fossiles doit permettre d’atténuer au maximum l’impact nocif de ces combustibles sur l’environnement. À terme et idéalement, ces énergies devraient même céder la place aux sources d’énergies renouvelables. Une première étape évidente et indispensable reste la diminution progressive, rapide et, à terme, définitive des subventions aux énergies fossiles, doublée de la mise en place d’un processus d’accompagnement pour les populations les plus fragiles. r e p è r e La transition énergétique 79 Chapitre 3 Les acteurs de la transition énergétique : de la gouvernance à la mise en œuvre, une indispensable implication de tous D d e La nécessité d’une gouvernance mondiale s’est imposée réellement en 1945, au terme de la Seconde Guerre mondiale : 51 pays déterminés à maintenir la paix et la sécurité internationale ont décidé de créer l’Organisation des Nations Unies (ONU). Depuis, au fil de la prise de conscience concernant les défis auxquels l’humanité doit faire face, la nécessité d’une gouvernance mondiale s’est étendue à d’autres domaines : les droits de l’homme, le développement, le droit international… P o i n t s 3.1 Une gouvernance internationale pour des enjeux mondiaux : le rôle des instances internationales dans la transition énergétique r e p è r e ans un modèle énergétique intégrant les options décrites au chapitre 2 (sobriété énergétique, efficacité énergétique et énergie renouvelable), les acteurs deviennent beaucoup plus nombreux que dans un modèle centralisé, régi uniquement par les planificateurs de l’énergie sur la base d’une hausse de l’offre d’énergie carbonée. Les acteurs de la transition énergétique se retrouvent à tous les niveaux de décision. Les enjeux étant globaux, les actions et la coopération à l’échelle internationale jouent également un rôle crucial. Les États géographiquement proches les uns des autres peuvent ainsi avoir intérêt à coordonner leurs politiques énergétiques. La mise en œuvre se fera néanmoins au niveau de chaque État, par la définition de stratégies et de politiques propres à orienter les actions à effectuer au sein des territoires locaux. Ceux-ci, pour leur part, sont les mieux à même de définir l’option la plus adaptée à l’échelon local. L’équation ne s’arrête pas là, car elle ne saurait être résolue sans l’implication et la participation massives des acteurs économiques privés (entreprises, financiers, investisseurs, etc.). Enfin, le citoyen lui-même devient acteur essentiel de la transition énergétique, de par ses choix individuels et les actions qu’il peut mener en se groupant avec ses concitoyens. L’implication de multiples protagonistes à tous les niveaux nécessite la mise en place de cadres, de législations et de nouveaux modèles de financement, qui favorisent également la coordination entre ces acteurs. 81 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 3.1.1 La prise en compte croissante des enjeux du développement durable, du climat et de l’énergie depuis une quarantaine d’années P o i n t s d e r e p è r e La réflexion sur la relation entre activités humaines et écosystèmes n’est pas récente. Ses origines remontent à l’Antiquité, notamment avec la philosophie grecque et ses considérations sur l’éthique et le but de l’existence humaine. Cependant, ce n’est que dans la deuxième partie du 20e siècle, face aux pressions grandissantes des activités humaines sur l’environnement, que ces enjeux prennent réellement de l’ampleur au sein de la communauté internationale. Se succèdent alors des conférences mondiales, menant pour certaines à des plans d’action et à des réalisations concrètes à l’échelle planétaire. Pour autant, les mêmes préoccupations demeurent aujourd’hui ; au regard des nombreux constats et conclusions des rapports publiés sur le sujet, il est désormais plus qu’urgent d’agir. Les étapes de cette prise de conscience sont retracées ci-dessous, afin de montrer comment la question de l’énergie est devenue centrale dans la gouvernance mondiale et de tenter de comprendre pourquoi la situation reste inchangée ou presque depuis près d’un demi-siècle. 82 3.1.1.1 Une prise de conscience progressive des enjeux environnementaux En 1971, le Club de Rome publie le rapport The Limits to Growth1 (littéralement « Les limites à la croissance »), traduit en français sous le titre Halte à la croissance ?, pour alerter le monde aux conséquences écologiques d’un modèle de développement économique à la fois très vorace en ressources naturelles et très polluant. Les auteurs mettent en doute la possibilité d’une croissance infinie dans un système fermé. La Terre ayant des possibilités restreintes, l’expansion démographique et la croissance économique finiront par atteindre des limites au-delà desquelles l’effondrement du modèle se produira. Il s’agit alors de choisir délibérément les contraintes qui permettraient au système d’atteindre un rythme de croisière sans risque d’effondrement brutal et de satisfaire les besoins matériels fondamentaux de tous les humains. Les propositions du rapport, jugées trop percutantes, voire extrémistes, ont été vivement critiquées. Il n’en demeure pas moins qu’un examen du problème soulevé s’imposait. Comme suite à ce rapport, afin de trouver des réponses au problème souligné, la Conférence des Nations Unies sur l’environnement humain a lieu du 5 au 16 juin 1972 à Stockholm. Les questions écologiques sont posées pour la première fois à l’échelle internationale. L’objectif de cette rencontre est de trouver des moyens de stimuler un autre modèle de développement. Est alors adoptée une déclaration de 26 principes accompagnée d’un plan d’action pour « guider les peuples du monde dans la préservation et l’amélioration de l’environnement humain2 ». 1.Meadows et al. (1972). 2.UNEP (1972). Les acteurs de la transition énergétique La Conférence de Stockholm débouche notamment sur la création du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE). Aujourd’hui, trois missions sont attribuées au PNUE : • Évaluer les conditions et les tendances environnementales au niveau mondial, régional et national. • Développer des instruments environnementaux nationaux et internationaux. • Renforcer les institutions pour une gestion raisonnée de l’environnement3. La Conférence de Stockholm a eu le mérite d’amorcer la prise de conscience par la communauté internationale de la possibilité et de l’urgence de mettre en place une solidarité planétaire pour relever les grands défis environnementaux. Cette prise de conscience se renforce et s’élargit dans les années 1980, alors que le grand public est témoin d’une succession de catastrophes écologiques d’envergure : les pluies acides, le trou dans la couche d’ozone, le dérèglement du climat, la déforestation massive, les accidents industriels aux conséquences environnementales et humaines d’une ampleur inédite, notamment à Tchernobyl (1986) et à Bhopal (1984)4. 3.Site Internet du United Nations Environment Programme (Programme des Nations Unies pour l’Environnement), consulté en décembre 2014. 4.Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (2010). d e P o i n t s En 1987, Notre avenir à tous (dit « rapport Brundtland »), élaboré pour l’ONU, définit le développement durable comme « un développement qui répond aux besoins présents sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs ». Le développement durable prend en compte trois dimensions indissociables : • L’économie. Il s’agit de développer la croissance et l’efficacité économique pour favoriser la création de richesse pour tous par des modes de production et de consommation durables. Le pilier économique repose notamment sur l’utilisation raisonnée des ressources et des milieux naturels, une évolution des relations économiques internationales et l’intégration des coûts environnementaux et sociaux dans le prix des biens et des services. • Le social. Il s’agit de satisfaire les besoins humains (en matière de santé, de logement, de consommation, d’éducation…) et de répondre à un objectif d’équité sociale. Cette dimension repose sur la satisfaction des besoins essentiels des populations, la lutte contre l’exclusion et la pauvreté, la réduction des inégalités et le respect des cultures. r e p è r e Encadré 7. La notion de développement durable 83 La transition énergétique : connaître et partager pour agir • L’environnement. Il s’agit de préserver, d’améliorer et de valoriser l’environnement et les ressources naturelles à long terme. Cette dimension se fonde sur la gestion durable des ressources naturelles, sur le maintien des grands équilibres écologiques (climat, biodiversité, océans, forêts), ainsi que sur la réduction des risques et la prévention des impacts sur l’environnement. Figure 46. Représentation schématique du développement durable P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050. 84 Le développement durable s’appuie aussi sur un certain nombre de principes : • la solidarité, qui doit être encouragée, que ce soit entre les générations, les nations, les peuples, les territoires ou les individus ; • la participation et la bonne gouvernance, afin d’impliquer tous les acteurs dans des projets d’intérêt général pour en assurer la réussite ; • la précaution, en faisant preuve de prudence dans l’action, en privilégiant une démarche raisonnée ou en recherchant des solutions de remplacement. Le développement durable repose ainsi sur le principe qui consiste à concilier les intérêts de chacun dans une vision commune équitable. Mais même si le développement durable se doit d’être une préoccupation globale, les modalités de son application doivent être propres à chaque région et tenir compte de ses particularités et de ses propres objectifs de développement. d e 5.Rapport Brundtland (1987). 6. http://ozone.unep.org/node/5710/. 7.Actu-environnement (s.d.). 8.Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement, Rio de Janeiro, Brésil, 3-14 juin 1992. 9.Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement, Rio de Janeiro, Brésil, 3-14 juin 1992. P o i n t s En 1987, Gro Harlem Brundtland, à l’époque Première Ministre de Norvège et présidente de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement, publie un rapport intitulé Notre avenir à tous5. Elle y décrit notamment le concept de développement durable, qui fait alors son apparition à l’échelle planétaire, ainsi que les liens qui existent entre les questions environnementales et les enjeux sociaux, économiques et culturels. La même année, en septembre, les efforts déployés par le PNUE aboutissent à la signature du Protocole de Montréal relatif aux substances appauvrissant la couche d’ozone (SACO), qui se rattache à la Convention de Vienne pour la protection de la couche d’ozone, adoptée deux ans plus tôt. Il s’agit des premiers – et seuls – accords internationaux ayant obtenu une ratification universelle. Le Protocole de Montréal vise, au moment de sa signature, à réduire de moitié les SACO. D’abord signé par 24 pays ainsi que par la Communauté économique européenne, il impose la suppression de l’utilisation de chlorofluorocarbones, d’halons et d’autres SACO synthétiques. En 2014, 197 pays sont signataires du protocole de Montréal6. Pour assurer le suivi des mesures mises en place par chacun d’eux, les pays signataires soumettent tous les ans au Secrétariat du Protocole un rapport statistique communiquant leur production, leur consommation, mais aussi leurs importations et exportations de substances réglementées7. L’année suivante (1988), face aux questionnements sur le réchauffement climatique, le PNUE et l’Organisation météorologique mondiale (OMM) créent le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), qui a pour mission d’évaluer et de synthétiser l’ensemble des documents scientifiques publiés sur la thé matique du réchauffement climatique. En 1992, les représentants de 172 États se réunissent à Rio afin de trouver des solutions aux problèmes liés aux questions environnementales et de développement. Ce Sommet de la Terre basé sur les fondements du rapport Bruntland aboutit à la Déclaration de Rio sur l’environnement et le développement8 ainsi qu’à la mise en place d’un programme d’action appelé Action 21. Celui-ci énonce des recommandations dans différents domaines (santé ; logement ; gestion de l’eau, des déchets, des mers et des forêts, etc.), pour la mise en œuvre concrète des principes de la déclaration. Le texte annonce également les prémisses d’une approche systémique en matière environne mentale en expliquant que la protection de l’environnement ne peut pas être considérée isolément des autres variables du développement humain9. En outre, le Sommet r e p è r e Les acteurs de la transition énergétique 85 La transition énergétique : connaître et partager pour agir de Rio met en place un plan de réunions internationales annuelles sur le climat, sous le régime de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC). P o i n t s d e r e p è r e Encadré 8. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques 86 Les négociations intergouvernementales sur le climat prennent réellement forme dans la CCNUCC, adoptée en 1992 à l’occasion du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro. Dans cette convention, la communauté internationale reconnaît l’importance des changements climatiques liés aux activités humaines. L’objectif annoncé de la CCNUCC est de stabiliser les concentrations de GES à un niveau qui ne présente pas de danger pour l’être humain et les écosystèmes. Plus précisément, la Convention fixe à +2 °C la limite à ne pas dépasser en termes d’élévation des températures moyennes à la surface de la Terre. La CCNUCC repose sur le principe fondateur des « responsabilités communes mais différenciées », commun aux grands accords sur l’environnement, le développement durable ou les changements climatiques et inscrit dès 1992 dans la déclaration de Rio : « Étant donné la diversité des rôles joués dans la dégradation de l’envi ronnement mondial, les États ont des responsabilités communes mais différenciées. Les pays développés admettent la responsabilité qui leur incombe dans l’effort international en faveur du développement durable, compte tenu des pressions que leurs sociétés exercent sur l’environ nement mondial et des techniques et des ressources financières dont ils disposent. » Dès lors, les États ou groupes d’États – appelés Parties – sont regroupés dans différentes catégories selon leur niveau historique de contribution aux processus du dérèglement climatique. Chacune de ces catégories se voit imposer des engagements et des contraintes différents. Les pays industrialisés, regroupés dans l’annexe I de la CCNUCC, prennent l’enga gement de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) et de soutenir financièrement (pour les plus riches d’entre eux, regroupés dans l’annexe II) les pays dits en développement, pour qu’ils puissent se développer selon des trajectoires sobres en carbone. La Convention est entrée en vigueur le 21 mars 1994. À ce jour, elle a été ratifiée par 195 Parties. Comme le prévoit l’article 7 de la Convention : « La première session de la Conférence des Parties […] se tiendra un an au plus tard après l’entrée en vigueur de la Convention. Par la suite, la Conférence des Parties, à moins qu’elle n’en décide autrement, tient des sessions ordinaires une fois par an. » Conformément à cet article et suite à l’entrée en vigueur Les acteurs de la transition énergétique d e 10.Les pays visés à l’annexe I de la CCNUCC désignent les pays développés tandis que les pays non visés à l’annexe I désignent les pays en développement. 11.UNFCCC (2014). 12.Site Internet de l’UNFCCC, consulté en février 2016. r e p è r e Les émissions de CO2 issues de la combustion de ressources fossiles étant l’une des principales causes du réchauffement climatique, la question de l’énergie prend de plus en plus d’importance, surtout depuis l’adoption du protocole de Kyoto en 1997, à l’occasion de la 3e CdP. Ce traité international, entré en vigueur en 2005, a pour objectif de réduire les émissions mondiales de GES afin de limiter le réchauffement climatique, dans un esprit de solidarité. Selon le principe de responsabilité commune, mais différenciée, par rapport aux émissions à l’origine des changements climatiques, tous les pays ne se soumettent pas aux mêmes objectifs de réduction. Les Parties de l’annexe 1 de la CCNUCC10 se sont engagées dans le cadre de ce protocole à réduire, pour la période 2008-2012, leurs émissions de GES d’au moins 5 % par rapport à leur niveau d’émissions de 1990 (année dite de référence)11. À ce jour, 192 Parties ont ratifié le Protocole de Kyoto12. Dès son adoption, le Protocole de Kyoto prévoit que d’autres périodes suivront la première phase de 2008-2012, avec des objectifs progressivement plus ambitieux. La réalité est cependant tout autre, et la progression est loin d’être au rendez-vous. Une deuxième période d’engagement au titre du Protocole de Kyoto a certes été décidée avec l’adoption de l’amendement de Doha (Qatar) en 2012, mais seules 60 parties l’ont ratifié à ce jour, ce qui est insuffisant pour son entrée en vigueur. Les Conférences se poursuivent dans les années 2000, avec de nouvelles déclarations et plans d’action. La plus marquante est l’Assemblée du millénaire des Nations Unies à New York en 2000, qui aboutit à l’adoption des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD). Cette initiative, fixant pour 2015 huit objectifs (réduire P o i n t s de la CCNUCC, les Parties contractantes à la Convention se sont réunies pour la première fois en 1995, à Berlin. Depuis lors, l’ensemble des parties se réunit une fois par an lors de la Conférence des Parties (CdP) afin de faire le point sur la situation climatique et sur les stratégies de lutte contre le réchauffement planétaire. Les CdP représentent des évènements majeurs et déterminants pour l’avenir de notre planète. Un historique des différentes CdP qui ont pris place depuis 1995 est disponible en annexe en fin de guide. Par ailleurs, l’Institut de la Francophonie pour le développement durable, organe subsidiaire de l’Organisation internationale de la Francophonie, publie tous les ans un Guide des négociations à l’attention des décideurs et participants, afin de les aider à mieux comprendre les principaux enjeux qui feront l’objet des discussions. 87 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 88 l’extrême pauvreté et la faim ; assurer l’éducation primaire pour tous ; promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes ; réduire la mortalité infantile ; améliorer la santé maternelle ; combattre le VIH/sida, le paludisme et d’autres maladies ; préserver l’environnement durable ; mettre en place un partenariat mondial pour le développement) assortis d’indicateurs, témoigne d’une volonté de replacer l’être humain au cœur des programmes. Dans le même temps, les conférences sur le climat voient également certaines avancées importantes et la mise en place d’outils inédits, en particulier les mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto. En 2009, dans l’Accord de Copenhague, les pays développés s’engagent à mobiliser 100 milliards de dollars par an à partir de 2020. La CdP suivante, qui a eu lieu à Cancun, au Mexique, est marquée par la création du Fonds Vert, supposé rassembler une grande partie de ce financement. La conférence de 2010 permet également la mise en place d’outils opérationnels tels que les mesures d’atténuation adaptées au niveau national (MAAN) et le processus de mesure, notification et vérification (MNV – en anglais, Measurement, Reporting and Verification ou MRV). Ce dernier élément met en évidence la volonté des États, y compris dans les pays en développement, d’accélérer les démarches d’atténuation du réchauffement climatique, de mieux les encadrer et de les rendre plus transparentes. La question de la lisibilité et de l’évaluation des efforts est d’ailleurs au cœur du dernier Sommet de la Terre de 2012, qui prend place pour la deuxième fois à Rio de Janeiro. Vingt ans après la rencontre qui a permis l’avènement du concept de développement durable, ce sommet surnommé « Rio+20 » présente des enjeux colossaux. Il s’agit notamment de dresser le bilan des vingt dernières années et d’écrire collectivement une « feuille de route de l’après-2015 ». Rio+20 vise également à établir un cadre solide pour la mise en œuvre de l’économie verte et du développement durable. Cela dit, le document final, L’avenir que nous voulons, consiste en 283 articles s’apparentant davantage à de « bonnes intentions » qu’à des engagements précis et concrets13. Il s’avère ainsi que, malgré une prise de conscience croissante depuis le début des années 1970 des enjeux environnementaux et climatiques, et malgré une mobilisation importante de la communauté internationale – notamment par l’entremise des multiples instances et des conférences internationales –, les engagements concrets restent bien en deçà de ce que nécessiterait l’urgence de la situation. Néanmoins, les différentes initiatives internationales, en particulier la CCNUCC et le Protocole de Kyoto, ont fait progressivement ressortir la question énergétique au sens large comme un thème central au sein des Nations Unies. 3.1.1.2 L’enjeu désormais fondamental de la question énergétique dans le système des Nations Unies La nécessité d’une approche globale énergie-climat-développement n’a pas toujours été prise en compte dans le système des Nations Unies, même si la thématique de l’énergie 13.Pouffary (2012). 14.UNESCO (1993). 15.Site Internet de l’ONU-Énergie (UN-Energy), consulté en février 2016. 16.UNESCO (2014). 17.Krolik (2011). P o i n t s d e a toujours plus ou moins été intégrée dans ses objectifs. L’accès à l’énergie étant un préalable au développement tant humain qu’économique, il s’impose naturellement comme un sujet majeur, notamment pour répondre aux 17 Objectifs de développement durable (ODD) adoptés en 2015, qui font suite aux OMD et tracent la feuille de route mondiale jusqu’en 2030. Depuis déjà des décennies, avec la fin du pétrole bon marché et la montée en puissance des préoccupations liées au climat et à l’environnement, la question de l’énergie durable gagne en importance en se couplant progressivement avec celle des mesures destinées à faire face aux enjeux climatiques. Ainsi, dès 1981 – à la suite du second choc pétrolier (1978-1981) qui est à l’origine d’une importante crise monétaire –, la Conférence des Nations Unies sur les sources d’énergie nouvelles et renouvelables, à Nairobi, jette les bases d’une politique des Nations Unies en matière d’énergie. L’enjeu est alors (hormis l’enjeu environnemental) d’apporter une solution aux pays qui manquent de réserves d’énergie fossile afin de les amener à réduire leurs importations de pétrole et, ainsi, leur dépendance envers les fluctuations des cours internationaux14. En 2004, suite aux engagements pris relativement à l’énergie lors du Sommet mondial sur le développement durable de Johannesburg (2002), on assiste à la création du mécanisme interinstitution ONU-Énergie, destiné à mieux coordonner les activités relatives à l’énergie au sein du système des Nations Unies et promouvoir la coopération avec les acteurs tiers15. Ce mécanisme prévoit notamment l’échange de renseignements, d’expériences et de bonnes pratiques, la promotion d’une programmation commune et le développement de partenariats dans le domaine de l’énergie. L’organisme fonctionne par groupes : • La Division des affaires économiques et sociales, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et la Banque mondiale promeuvent l’accès à l’énergie. • L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le PNUE gèrent la thématique des énergies renouvelables, avec le soutien de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO). • L’Agence internationale de l’énergie atomique et l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel s’occupent de l’efficacité énergétique16. Même si l’énergie propre s’impose progressivement comme une condition essentielle du développement durable dans de multiples instruments internationaux, les avancées concrètes sont peu nombreuses et les réformes s’enlisent pour cause d’inactivité, à l’image de l’inefficacité d’ONU-Énergie17. r e p è r e Les acteurs de la transition énergétique 89 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 90 C’est pourquoi, depuis le début des années 2010, trente ans après la Conférence de Nairobi, la question de l’énergie durable vient réellement se placer au cœur des préoccupations. Le renforcement du cadre opérationnel s’installe sous l’égide de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (International Renewable Energy Agency – IRENA). Cette organisation intergouvernementale créée le 26 janvier 2009 à Bonn par 75 signataires immédiats sous l’impulsion de l’Allemagne, appuyée par le Danemark et l’Espagne, regroupe aujourd’hui 145 membres (144 pays et l’UE). Elle cherche à promouvoir une utilisation durable des énergies renouvelables dans le cadre des missions suivantes : accompagner ses membres dans leurs politiques de développement des énergies de substitution ; assurer une interaction avec d’autres organisations internationales telles que l’Agence internationale de l’énergie (AIE) ; encourager la recherche en favorisant les réseaux et le transfert de technologies ; fournir des renseignements sur les normes techniques nationales et internationales ; sensibiliser le public au potentiel des énergies de substitution. Pour mener ces missions à bien, l’IRENA dispose d’un budget prévisionnel de 32,1 millions de dollars en 2015. En 2011, le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-Moon, lance l’initiative Énergie durable pour tous (Sustainable Energy for All – SE4All), qui vise à atteindre trois objectifs à l’horizon 2030 : • Garantir l’accès universel aux services énergétiques modernes : fournir des services énergétiques modernes aux 2,7 milliards de personnes qui n’ont pas accès à des solutions de cuisson propres et aux 1,3 milliard de personnes qui n’ont pas accès à l’électricité. • Doubler le rythme d’amélioration de l’efficacité énergétique mondiale : atteindre un taux de 2,6 % par an comparé au taux de 1,3 % en 2009. • Doubler la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique mondial : atteindre 30 % d’énergie de source renouvelable comparés aux 15 % de 200918. Cette initiative a été adoptée par des centaines de parties prenantes : gouvernements, institutions nationales, régionales et internationales, mais aussi acteurs de la société civile, banques de développement et industriels. Plus de soixante-dix pays d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine et des Caraïbes sont concernés par l’initiative SE4All. L’aide est fournie sous forme non pas d’aide financière, mais d’appui à la mise en œuvre de mesures et de politiques nationales. Des comités nationaux ont pour mission d’établir des programmes fondés sur des actions concrètes répondant aux objectifs de SE4All. Par exemple, l’initiative a permis la mise en place des actions suivantes : • « Promotion des programmes d’utilisation de fourneaux et de combustibles propres pour la cuisson des aliments en Afrique, en Asie du Sud, en Asie de l’Est et en Amérique centrale ; • Atténuation des risques liés aux investissements dans les énergies propres ; 18.UNEP (2012a). Les acteurs de la transition énergétique • Aide au développement de l’électricité géothermique ; • Assistance aux municipalités pour améliorer la maîtrise de l’énergie ; • Aide aux pays pour cartographier leurs sources d’énergie renouvelables ; • Aide aux petits États insulaires en développement pour investir dans les énergies propres ; • Élargissement du Partenariat mondial pour la réduction des gaz torchés, qui vise à capter les gaz pour en faire bon usage au lieu de les brûler à la torchère ; • Élargissement des programmes d’amélioration de l’accès à l’électricité, qui développe les possibilités d’éclairage hors réseau19 ». Globalement, 36,6 milliards d’euros par an d’investissements seraient nécessaires pour assurer un accès universel à l’énergie à l’horizon 203020. Suite à cette initiative et reconnaissant l’importance de l’énergie pour le développement durable, l’Assemblée générale des Nations Unies a proclamé, dans sa résolution 65/151, l’année 2012 Année internationale de l’énergie durable pour tous. Cette déclaration vise à sensibiliser l’opinion mondiale sur le fait que l’accès à l’énergie (en particulier durable) est primordial pour le développement et que pourtant, 1,4 milliard de personnes n’y ont toujours pas accès, tandis que trois milliards de personnes dépendent de la « biomasse traditionnelle » et du charbon comme source principale de combustible21. L’énergie pour le développement durable devient donc aujourd’hui centrale parmi les préoccupations des Nations Unies. 19.Ministère des Affaires étrangères et du Développement international (s.d.). 20.Ministère des Affaires étrangères et du Développement international (s.d.). 21.ONU, 2012 Année internationale de l’énergie durable pour tous, http://www.un.org/fr/ events/sustainableenergyforall/. 22.ONU SLNG (s.d.). P o i n t s d e Le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a déclaré, début 2012 : « L’éner gie est fondamentale pour tout ce que nous faisons – pour stimuler notre économie afin d’atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement [...] pour combattre le chan gement climatique tout en préservant la sécurité mondiale. » Il définit l’énergie comme le « fil d’or » (« the golden thread ») entre la croissance économique, l’équité sociale et la préservation de l’environnement22. Dans ce contexte, l’année 2015 fut une année charnière dans le devenir de notre planète, marquée par trois évènements majeurs : • la Conférence sur le financement du développement, qui s’est déroulée à Addis-Abeba en juillet 2015 ; r e p è r e 3.1.2 Le Programme de développement pour l’après-2015 : un tournant à ne pas manquer 91 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Ban Ki-Moon à la CdP 20, Lima, décembre 2014. Photo : ENERGIES 2050. P o i n t s d e r e p è r e • l’échéance des OMD et l’adoption des ODD, nouvelle feuille de route des Nations Unies pour la période 2015-2030 ; • la Conférence de Paris sur le climat (CdP 21), qui a abouti à l’adoption d’un accord international historique sur le régime climatique pour l’après-2020. La question énergétique était au centre des enjeux qui ont été débattus lors de ces trois évènements. 92 3.1.2.1 Des OMD aux ODD, la définition d’une nouvelle vision commune Huit Objectifs du millénaire pour le développement avaient été adoptés en 2000 par les Nations Unies. Ils visaient principalement, sur la période 2000-2015, à réduire la pauvreté et à l’amélioration des conditions de vie des populations les plus démunies. À l’approche de la date butoir de 2015, la communauté internationale avait engagé les réflexions sur l’après-OMD et le processus de l’après-2015. Lors de la conférence de Rio+20, en juin 2012, il avait été décidé de définir d’ici à 2015 des objectifs de développement durable applicables à tous les pays, sans distinction. Ces objectifs devaient s’inscrire dans un cadre de partenariat et de coopération globale pour le développement. Ceux-ci se voulaient à caractère universel, mesurables et réalisables, et déclinés en cibles puis en indicateurs23. L’article 247 du texte L’avenir que nous voulons de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable de Rio+20 énonce ainsi que « les objec tifs de développement durable doivent être concrets, concis et faciles à comprendre, en nombre limité, ambitieux, d’envergure mondiale et susceptibles d’être appliqués dans tous les pays compte tenu des réalités, des ressources et du niveau de développement respectifs de ceux-ci ainsi que des politiques et des priorités nationales »24. 23.UNEP (s.d.). 24.ONU (2012). Les acteurs de la transition énergétique Dans cette perspective, l’ONU met en place en septembre 2012 un groupe de haut niveau présidé par le PNUD pour établir le premier document de principe. Cinquante consultations nationales et neuf consultations thématiques sont menées. Le 30 mai 2013, ce groupe de travail dépose son rapport final. L’année 2014 est davantage axée sur les enjeux de mise en œuvre du cadre des ODD. Les 17 Objectifs de développement durable sont enfin adoptés lors de l’Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2015, deux mois avant la CdP 21 de Paris. Encadré 9. Contribution de la Francophonie au processus des Nations Unies sur les ODD : la question énergétique et les ODD d e P o i n t s Figure 47. ODD propre à l’énergie durable proposé par la Francophonie r e p è r e L’initiative de contribution de la Francophonie au processus des ODD a été lancée par l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) en novembre 2012 pour répondre à la Déclaration des chefs d’État et de gouvernement des pays ayant le français en partage, produite au Sommet de Kinshasa d’octobre 2012, qui stipule en son point 4 : « Nous affirmons notre engagement à participer activement à la formulation et à la réalisation des objectifs du développement durable inscrits dans cette décla ration. » Dans cette optique, l’OIF avait mis en place un comité de pilotage qui a tenu sa première réunion le 26 novembre 2012, puis publié quatre rapports d’expertise et un rapport de synthèse sous forme d’argumentaires d’aide à la formulation d’objectifs de développement durable relatifs aux enjeux prioritaires retenus par la Francophonie. Sous le titre La Francophonie et les Objectifs de développement durable : argu mentaire d’aide à la formulation d’objectifs de développement durable relatifs à la transition énergétique et l’énergie durable, le rapport développe les éléments nécessaires à la formulation d’un ODD spécifique à l’énergie durable. Le tableau ci-dessous en est extrait. 93 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Au final, et alors que la problématique énergétique ne faisait pas explicitement partie des OMD, le septième des 17 ODD adoptés à New York en septembre 2015 s’énonce comme suit : « Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables, modernes et abordables. » L’énergie durable est plus largement l’un des enjeux majeurs des ODD, étant notamment une thématique transversale et centrale aux ODD 11 (Villes et communautés durables), 12 (Consommation et production respon sables) et 13 (Mesures relatives à la lutte contre le changement climatique), entre autres. Il est en effet aujourd’hui largement prouvé que la progression de l’accès à l’énergie a contribué et contribue toujours au développement durable global. Figure 48. Les ODD P o i n t s d e r e p è r e Source : PNUD (2015). 94 3.1.2.2 La CdP 21 : un accord historique sur le climat La 21e Conférence des Parties (CdP 21) s’est déroulée à Paris du 30 novembre au 12 décembre 2015. Les attentes étaient fortes ; il s’agissait notamment d’adopter « un protocole, un autre instrument juridique ou un résultat convenu ayant force juridique, applicable à toutes les Parties ». Un tel texte ayant valeur juridique et applicable à l’ensemble des pays, qu’ils soient développés ou en développement, devait constituer une étape majeure dans l’histoire des négociations sur le climat. L’accord devait entrer en vigueur en 2020 et assurer un développement sobre en carbone, à même d’augmenter la résilience des populations, et un développement soutenable des économies. En parallèle, de nouveaux engagements devaient être pris pour la période 2016-2020. En préparation de cet accord, les Parties avaient communiqué tout au long de l’année 2015 leurs Contributions prévues déterminées au niveau national (CPDN). Celles-ci présentent les efforts que chaque Partie est prête à fournir individuellement et r e p è r e 25.L’UE (qui est elle-même une Partie) l’a fait au nom de ses 28 pays membres. 26.State of Play, 15 décembre 2015. [En ligne] http://climateactiontracker.org/indcs. html. Consulté en février 2016. 27.Climate Action Tracker, 8 décembre 2015. Climate pledges will bring 2.7°C of warm ing, potential for more action. [En ligne] http://climateactiontracker.org/news/253/ Climate-pledges-will-bring-2.7C-of-warming-potential-for-more-action.html, consulté en février 2016. d e volontairement pour atteindre collectivement les objectifs de la Convention, notamment en termes de réduction ou de limitation des émissions de GES. Les 187 Parties (sur les 196 que comptent la CCNUCC)25 ayant présenté leurs CPDNs au 15 décembre 2015 représentent plus de 98 % de la population mondiale et plus de 95 % des émissions mondiales de GES26. Toutefois, ces engagements sont encore loin d’être suffisants pour atteindre l’objec tif de la Convention, qui est de limiter le réchauffement climatique moyen d’ici 2100 à un niveau « nettement en dessous de 2 °C » (tel qu’énoncé dans l’Accord de Paris – voir ci-dessous), par rapport aux niveaux préindustriels. En effet, en l’état, les CPDN, sous réserve que les engagements pris soient respectés, ne permettraient de limiter le réchauffement qu’à environ 2,7 °C, soit 0,9 °C de moins qu’en poursuivant la trajectoire actuelle sans modification27. À noter que si les pays développés ont en général fait part d’engagements pour des réductions nettes de leurs émissions, les pays en développement ont, pour la plupart, privilégié des réductions relatives à un scénario de développement. Dans ce cas, il s’agit donc, non pas de réduire leurs émissions de GES, mais de les augmenter moins que si aucun effort n’était fait. En outre, leurs CPDN incluent des engagements « inconditionnels » et des engagements « conditionnels », ces derniers étant liés à la mise à disposition de financement de la part des pays développés. L’Accord de Paris a été adopté à 19 h 30 le samedi 12 décembre par les 195 États Parties membres de la CCNUCC (l’Union européenne [UE], qui est la 196e Partie, n’ayant pas de droit de vote propre). Au-delà de toutes les réserves possibles, il convient de souligner qu’il constitue le premier accord universel sur le climat ; à ce titre, il est donc déjà historique. Malgré toutes les déclarations préalables et autres expressions de bonne volonté, le consensus était loin d’être acquis. L’Accord de Paris a permis de faire des progrès notables, qu’il s’agisse du niveau d’ambition (contenir le réchauffement « nettement en dessous de 2 °C par rapport aux niveaux préindustriels » tout en « poursuivant l’action menée pour limiter l’élévation des températures à 1,5 °C par rapport aux niveaux préindustriels »), de la place accrue de l’adaptation ou de la confirmation du mécanisme de pertes et de dommages ainsi que du financement, autant d’enjeux majeurs ayant connu des avancées significatives. On regrettera cependant l’absence de mécanisme permettant d’exercer une contrainte réelle sur les Parties ainsi que le manque de mesures concrètes pour s’assurer de la réalité des moyens de mise en œuvre qui seront mis à la disposition des pays en développement. P o i n t s Les acteurs de la transition énergétique 95 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Il convient également de souligner que l’accord a été presque unanimement salué, tant par la présidente du G77 et par le Groupe des pays les moins avancés que par la Chine et les États-Unis. Bien sûr, plusieurs Parties ont reconnu que l’accord ne prenait pas en compte l’intégralité de leurs préoccupations, mais chacun s’est accordé à mettre en avant le fait que l’accord ne ferme aucune porte ni option. Cela dit, le plus important reste à venir : la CdP 22, qui se déroulera en 2016 à Marrakech, devra apporter son lot d’engagements pour confirmer les décisions et les transformer en réalité. Au regard de ce qui précède, il est indéniable que la définition des ODD et les négociations sur le climat présentent des enjeux qui sont fortement liés. En effet, la réalisation des futurs ODD sera étroitement liée à l’atténuation et à l’adaptation aux changements climatiques. Les conséquences d’un réchauffement global de la planète, telles que le renforcement des phénomènes climatiques extrêmes, les déplacements forcés de populations et la concurrence sur les ressources, sont autant d’obstacles et de complications à un processus de développement durable et équitable. Il semble également difficile de résoudre l’équation des négociations climatiques sans prendre en compte les attentes des régions les plus pauvres, notamment les pays les moins avancés en termes de développement. Afin de conserver leur souveraineté, les États ont cependant constamment refusé jusqu’à présent de donner les pouvoirs nécessaires aux institutions internationales. Malheureusement, sans ce transfert d’une partie du pouvoir des États à des acteurs œuvrant pour une cause supranationale, la gouvernance mondiale restera très ardue. Qu’il s’agisse de la lutte contre la pauvreté, de la mise en place d’une transition énergétique mondiale ou de la préservation de l’environnement, seul un acteur à la fois supranational et légitime aux yeux de tous peut entreprendre de véritables actions en dépassant les intérêts particuliers et souvent contradictoires des différentes parties prenantes. Néanmoins, au-delà de l’ambition affichée dans l’Accord de Paris et dans les ODD, c’est à l’ensemble des parties prenantes qu’il revient maintenant d’agir, des États qui déclinent les stratégies et définissent les politiques à mettre en œuvre spécifiques jusqu’aux citoyens. 96 3.2 Les États et la transition énergétique La mise en œuvre des solutions décidées à l’échelle mondiale est limitée par le manque de légitimité des institutions internationales pour les appliquer concrètement. Les États doivent donc s’approprier réellement la transition énergétique et mettre en œuvre des dispositifs concrets s’inspirant des accords internationaux. De nombreuses mesures sont à leur portée, par exemple la modification des politiques budgétaires, la réduction des subventions préjudiciables à l’environnement, le recours à de nouveaux instruments économiques, le ciblage des investissements publics sur des secteurs clés écologiques, la prise en compte de l’environnement dans les marchés publics ou encore l’amélioration de la réglementation environnementale et le renforcement de son application. Les acteurs de la transition énergétique 3.2.1 Des dispositifs accessibles, variés et multidimensionnels Même si la poursuite des objectifs de la transition énergétique va généralement de pair avec des besoins de décentralisation des compétences, les États doivent jouer un rôle de stratège afin de garantir la cohérence de la politique énergétique, le respect des normes, l’approvisionnement et l’équilibre global. Ils doivent donc établir des plans d’action concrets composés d’axes prioritaires traitant de la gouvernance de l’énergie, de la fiscalité, de la réglementation et de l’investissement. C’est sur ces axes au caractère fortement centralisé que la mise en œuvre d’une transition énergétique cohérente et systémique à l’échelle nationale sera rendue possible. 3.2.1.1 Repenser les politiques énergétiques nationales Au regard des grands défis sociaux, environnementaux et climatiques auxquels nos sociétés sont confrontées, il est primordial que les politiques énergétiques s’inscrivent dans une vision à long terme qui tienne compte des enjeux mondiaux d’ordre écologique et social. Dans cette perspective, la définition de scénarios de référence est un préalable indispensable. Il s’agit de partir d’une analyse des déterminants de la demande et de l’offre énergétiques ainsi que des émissions de CO2 (globales et sectorielles) pour estimer la marge de manœuvre quant à la consommation d’énergie, en tenant compte de l’évolution qui accompagne les nouvelles technologies. Ces scénarios doivent avoir en commun la prise en compte des trois éléments de la transition énergétique : la sobriété, l’efficacité, les énergies renouvelables. d e P o i n t s Dans un contexte de réflexion sur la transition énergétique, l’État peut et doit orienter les choix d’avenir du pays en matière de bouquet énergétique et d’approvisionnement. En France, l’Alliance nationale de coordination de la recherche pour l’énergie a élaboré des scénarios de référence susceptibles de générer des économies d’énergie et d’améliorer l’efficacité des équipements. Ces scénarios s’appliquent à la France, mais ils peuvent aussi servir de source d’inspiration pour d’autres pays, en fonction des sources d’énergie dont ils disposent. Le scénario « décarbonisation par l’électricité » repose à la fois sur l’efficacité énergétique et sur l’utilisation accrue de l’électricité dans tous les usages. L’électricité d’origine renouvelable ou nucléaire remplace les énergies fossiles dans le secteur des transports et du bâtiment. Pour rendre ce scénario réalisable, il est indispensable de développer des technologies de stockage massif d’électricité pour répondre aux fluctuations de la demande en fonction des saisons. Les technologies clés de ce scénario sont donc les véhicules électriques, les outils de gestion r e p è r e Encadré 10. Les scénarios de référence en France 97 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 98 dynamique et intelligente des réseaux, les équipements électriques (notamment les pompes à chaleur) et le stockage de l’énergie. Ce scénario s’inspire fortement du scénario Négatep lancé par l’association française Sauvons le climat, qui, dans une optique de baisse des émissions de CO2, propose un usage renforcé de l’électricité décarbonée dans tous les domaines. Le scénario « vecteurs diversifiés » repose également sur l’efficacité énergétique, mais il met particulièrement l’accent sur la diversification des sources et vecteurs d’énergie. Il s’agit notamment de la récupération de chaleur et de la mise en place de systèmes énergétiques intelligents multivectoriels, développés localement. Cette mesure comprend notamment le développement de technologies de récupération de la chaleur dissipée par les centrales nucléaires. Le scénario « sobriété renfor- Figure 49. La démarche négaWatt cée » s’intéresse à l’évolution des comportements et des modes de vie en matière de consommation d’énergie. Sans être un scénario de décroissance, il fait néanmoins appel au triptyque sobriété, efficacité énergétique et développement des énergies renouvelables. Ce scénario fait évoluer la société vers une forte préoccupation pour les questions énergétiques et climatiques. Il s’agit par exemple d’accroître la proportion de logements collectifs, de modérer la croissance de la mobilité, etc. La sobriété renforcée s’inspire fortement de la démarche négaWatt portée par l’association du même nom. Pour réaliser ce scénario, il s’agit notamment de développer des technologies de stockage et de capture de CO2, d’économie circulaire et de super-isolants pour la rénovation thermique des bâtiments. 3.2.1.2 Développer une fiscalité écologique pour orienter le changement La fiscalité écologique (écofiscalité ou fiscalité de l’environnement) constitue un levier essentiel de la transition énergétique. En se fondant sur le fait que les comportements des entreprises, des ménages et du secteur public n’intègrent spontanément ni le coût des dommages qu’ils causent à l’environnement ni la rareté future des énergies et des matières premières, la fiscalité écologique, mise en œuvre par l’État, a pour but de corriger ces déséquilibres. Elle peut, au moyen d’un signal-prix, rechercher des effets directs ou indirects sur les modes de production, notamment en influençant les choix d e 28. Ministère de l’Écologie et du Développement durable, Consultation nationale pour la Charte de l’environnement, 2005. Cité par Laurent et Le Cacheux (2009) [En ligne] http://www.institutdelors.eu/media/etud74-laurent-lecacheux-fr.pdf?pdf=ok, consulté en février 2016. 29.Lorello Ecodata (2014). 30.Douane.gouv.fr (2013). 31.Terra Nova (2013). P o i n t s de consommation. L’écofiscalité peut donc être une mesure positive (baisse des prix de certains produits, donc hausse du pouvoir d’achat des ménages) ou négative (hausse du prix de certains produits et services). La fiscalité environnementale peut être schématiquement définie selon trois approches distinctes28 : • L’intention déclarée. Il s’agit des mesures fiscales dont l’intention du législateur est l’amélioration de l’environnement. Ce but est clairement inscrit dans la loi. • Le comportement. Il s’agit des mesures fiscales qui se traduisent par une incitation économique en faveur de l’amélioration de l’environnement (ex. : crédit d’impôt pour investissement dans l’efficacité énergétique). • Le produit ou le polluant visé. Il s’agit des mesures fiscales dont l’objet porte sur un bien physique pouvant avoir un impact négatif sur l’environnement (ex. : taxe sur les produits pétroliers). Au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la définition adoptée notamment pour l’élaboration d’un cadre statistique sur les taxes liées à l’environnement est la suivante : « une taxe environnementale est une taxe dont l’assiette est une unité physique (ou une approximation d’unité physique) de quelque chose qui a un impact négatif spécifique et avéré sur l’environnement 29 ». Outre la mise en place de ces taxes, le rôle de la fiscalité écologique est également de réformer les avantages fiscaux préjudiciables à l’environnement, notamment en réduisant progressivement le soutien aux combustibles fossiles. Afin d’agir sur la demande en énergie carbonée, il peut être intéressant de mettre en place des taxes sur les énergies fossiles telles que le pétrole et le gaz naturel. Au-delà de l’intérêt environnemental, cette mesure peut également représenter une source de recette significative pour l’État. En France, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) rapporte en moyenne 25 milliards d’euros par an30. Certaines mesures peuvent également favoriser l’usage de technologies plus propres. Dans le secteur des transports par exemple, des systèmes de malus peuvent être utilisés sur l’achat et la détention des véhicules les plus émetteurs de CO2. En Irlande, une taxe carbone a été introduite en 2010 à 15 € la tonne, puis augmentée à 22 € la tonne en 201231. Son objectif principal est de fournir une source de recettes supplémentaires dans un contexte de crise des finances publiques. r e p è r e Les acteurs de la transition énergétique 99 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Figure 50. Taux d’imposition effectif moyen sur l’énergie – tous usages 100 Parallèlement à ces mesures, des dispositifs (exonération, réductions partielles des taxes…) doivent favoriser l’utilisation d’énergies moins polluantes que le diesel, notamment le gaz de pétrole liquéfié (GPL) ou l’énergie électrique – en tenant compte de son origine (charbon, nucléaire, renouvelable, etc.). Dans le secteur de la construction et le secteur industriel, par exemple, des crédits d’impôts ou des amortisseurs exceptionnels peuvent être mis en place pour les acteurs utilisant des technologies destinées à économiser l’énergie ou des équipements de production d’énergie renouvelable. Les pays du nord de l’Europe ont été parmi les premiers à mettre en place une fiscalité écologique. En Suède, la taxe sur l’électricité, la taxe carbone, les taxes sur les énergies fossiles, les déchets, les pesticides, les produits soufrés, les péages urbains et les vignettes auto ont permis au pays de prélever plus de 10 milliards d’euros en 2010, soit 10 % des impôts perçus32. La fiscalité écologique présente l’avantage de conduire chaque acteur à décider librement soit de payer la taxe et de polluer, soit de réduire sa pollution pour payer moins. Théoriquement, comme tous les acteurs consentent le même coût de réduction de la pollution puisqu’ils payent tous la même taxe, l’effort de réduction est identique pour tous. En ce sens, la fiscalité permet d’atteindre un objectif environnemental de façon équitable33. 32.Humanité et biodiversité (2012). 33.Projet LexALP (s.d.). Les acteurs de la transition énergétique 34.Lorello Ecodata (2014). 35.Projet LexALP (s.d.). 36.Outre les taxes et les normes, les marchés du carbone sont également un outil réglementaire à exploiter. Pour plus de détails, voir la partie 4.4.2.4. 37.Fondation Nicolas Hulot (2012). P o i n t s d e 3.2.1.3 Calibrer la réglementation : les normes, un outil puissant La réglementation intègre l’ensemble des pratiques politiques visant à décourager (taxes) ou interdire (normes) des comportements néfastes en incitant, en imposant ou en prohibant certaines actions et en faisant parfois peser la menace d’une sanction en cas de non-respect des règles36. Ces mesures rendent possible la définition d’un cadre cohérent au sein duquel les comportements tendent progressivement vers des pratiques pro-environnementales. Dans la pratique, la réglementation se décline notamment au fil de la définition et de l’adoption de normes. Ces dernières peuvent prendre différentes formes : normes sur les procédés (définissant les technologies utilisables), normes sur les produits nuisibles à l’environnement (critères auxquels ils doivent se plier), normes de qualité des milieux (seuils de concentration de polluants, par exemple), normes d’émissions maximales de polluants (seuils au-delà desquels on considère que les émissions d’un polluant ne sont plus acceptables). Dans le cadre de la transition énergétique, les normes sont généralement simples à mettre en œuvre (norme sur les émissions des véhicules, par exemple). Elles doivent cependant être cohérentes entre elles et utilisées à bon escient afin de changer certaines pratiques tout en contribuant au développement des filières industrielles et artisanales positives pour l’environnement (performance thermique des logements, efficacité énergétique des équipements et véhicules, etc.)37. Les nouvelles normes techniques sont enfin motrices d’innovation et d’emploi (voir l’encadré 11) et peuvent s’accompagner d’investissements publics dans la recherche et le développement. r e p è r e Les limites de la fiscalité écologique doivent cependant être soulignées et sur montées. Au niveau de l’équité sociale par exemple, les foyers les plus modestes sont, de manière générale, les plus dépendants des sources énergétiques polluantes. Par conséquent, toute taxation accrue ou impliquant une source de substitution plus coûteuse ampute leur pouvoir d’achat de façon disproportionnée34. Une autre restriction est liée au fait que « le niveau de protection environnementale induit par une taxe ne se mesure qu’a posteriori. Il dépend de la sensibilité des agents aux prix (taxation ou subvention), ce qui peut en limiter la pertinence pour des pollutions dont les effets peuvent générer des dommages irréversibles au-delà d’un certain seuil »35. Dans ce cas, l’option des normes peut s’avérer plus appropriée, car, contrairement à la taxe, elle ne laisse pas de degré de liberté aux agents et permet donc une certitude dans l’atteinte des objectifs. 101 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 11. L’émergence de la cogénération sur l’île Maurice P o i n t s d e r e p è r e Le gouvernement mauricien a permis, au moyen d’une réglementation particulière et d’aides fiscales, le développement de la cogénération à l’aide de bagasse (résidu fibreux de la canne à sucre) sur l’île. L’adoption de la loi de 1985 dite Sugar Sector Package Deal Act et de la loi de 1988 sur l’efficacité énergétique dans l’industrie sucrière (Sugar Industry Efficiency Act) a amélioré l’environnement commercial de l’indus trie sucrière grâce à des normes d’efficacité énergétique et mis en place des avantages fiscaux pour les investissements dans la production d’électricité. En 1991, un programme de fabrication d’énergie à partir de bagasse a donc été mis en œuvre pour optimiser l’usage des sous-produits issus de la production sucrière, en particulier la cogénération. La chaleur et l’électricité produites sont d’abord utilisées pour l’industrie sucrière, puis les excédents sont vendus au réseau. Ainsi, en 2009, la cogénération de bagasse représentait 20 % de la consommation totale d’électricité sur l’île, ce qui a réduit significativement l’importation d’énergie. La mise en service de turbines plus efficaces devrait encore augmenter cette part. L’objectif global est d’atteindre 35 % de la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables en 2025. 102 3.2.1.4 L’investissement public comme outil essentiel à la transition énergétique Comme nous l’avons vu précédemment, l’investissement public est un levier indispensable qu’il convient de mobiliser. Si seules la fiscalité et la réglementation étaient utilisées pour modifier les comportements des acteurs, les changements seraient socialement inacceptables, car majoritairement contraints, d’autant plus que la transition énergétique dépend fortement des secteurs tels que l’aménagement urbain, le logement et l’offre de transports alternatifs, qui nécessitent tous d’importants investissements. En outre, l’investissement public doit favoriser la création d’emplois, d’activité et, finalement, de recettes publiques. Il doit ainsi contribuer à un nouveau cycle d’industrialisation et au renforcement de la recherche dans les secteurs d’avenir. Pour les pays importateurs d’énergie, l’objectif est notamment d’obtenir un effet positif sur la balance commerciale nationale en réduisant les importations. Les acteurs de la transition énergétique Encadré 12. Investissements dans un programme de production de biogaz au Rwanda Au Rwanda, plus de 80 % de l’énergie provient de la biomasse solide qui est soit brûlée, soit transformée en charbon. Cependant, ce type d’utilisation n’étant pas efficace, le Rwanda fait désormais la promotion du biogaz pour la cuisson et l’éclairage. Dès 1998, l’autorité rwandaise chargée de l’énergie, de l’eau et de l’assainissement a commencé à augmenter la production de biogaz dans les écoles et les prisons (services publics) pour subvenir aux besoins de cuisson et d’assainissement. Puis, en 2009, elle a lancé un autre programme pour la cuisson et l’éclairage domestique dans les zones du pays n’ayant pas accès à l’électricité. Ce programme initialement pris en charge par les Pays-Bas est cependant financé intégralement par le Rwanda depuis 2012. Aujourd’hui, tous les Rwandais possédant au moins deux vaches sont encouragés à construire des unités domestiques de biogaz. 38.SciencesPo (2014). 39.Fondation Nicolas Hulot (2012). d e P o i n t s Afin de faciliter la transition énergétique, il semble indispensable, dans de nombreux cas, de promouvoir la coopération régionale interétatique bilatérale ou au sein de communautés et d’associations d’États existantes, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), les parties à l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et l’UE, partageant des normes et valeurs communes. Cette échelle intermédiaire est tout à fait pertinente, car elle permet aux États de surmonter les obstacles liés à la peur de perdre leurs prérogatives nationales (lorsque les mesures sont prises à l’ONU, par exemple) tout en dépassant le cadre national qui n’est pas forcément adapté au traitement des grands défis énergétiques (efficacité de production, infrastructures de réseaux de distribution et de stockage, connaissances techniques, etc.). L’exemple de l’Europe est intéressant : sa dépendance énergétique approche les 60 % et, selon les prévisions, elle devra importer 85 % de son gaz et 93 % de son pétrole en 203038. Malgré plusieurs directives en faveur de la transition énergétique (directives sur l’efficacité énergétique, sur l’écoconception, sur la performance énergétique des bâtiments, etc.), l’Europe n’a pas de politique commune de l’énergie39, notamment du fait des craintes liées à la perte de la souveraineté nationale. Les choix politiques nationaux en matière énergétique se font de manière autonome ; ils ignorent généralement l’interdépendance effective entre États européens en matière énergétique et sont souvent contradictoires avec ceux des pays voisins, ce qui entraîne parfois des investissements superflus et coûteux dans la production d’énergie. Une politique commune de r e p è r e 3.2.2 La nécessaire articulation des mesures dans une perspective élargie 103 La transition énergétique : connaître et partager pour agir l’énergie – sans appeler à la création d’une autorité supranationale européenne qui déciderait de tout (notamment du bouquet énergétique européen et d’une centralisation monopolistique de l’achat du gaz) – doit favoriser en particulier l’amélioration de l’efficacité énergétique des économies européennes et le développement des énergies renouvelables, qui pourraient impliquer une réduction de la dépendance aux énergies fossiles. Alors que les besoins de financement des investissements pour la stratégie énergétique européenne sont estimés à près de 70 milliards d’euros par an pour atteindre l’objectif en matière d’énergie renouvelable d’ici 202040, une mise en œuvre coordonnée paraît indispensable. Encadré 13. Une connexion électrique bilatérale entre l’Éthiopie et Djibouti P o i n t s d e r e p è r e Le réseau électrique éthiopien repose principalement sur l’hydro électricité (aux faibles coûts de production), alors que Djibouti, qui dépend fortement du pétrole, est exposé à l’évolution des cours mondiaux. Djibouti a donc décidé de trouver des solutions de remplacement en se tournant vers son voisin éthiopien. En 2002, les deux pays ont décidé de relier leurs réseaux pour transporter 35 MW de l’Éthiopie vers Djibouti sur une ligne de transmission de 230 kV. La Banque africaine de développement a financé ce projet en 2004. En 2012, l’achèvement de la ligne de transmission à double circuit marquait la première connexion électrique transfrontalière en Afrique de l’Est. Cette ligne approvisionne 33 000 Djiboutiens, six centres de santé et 9 000 habitants de villes frontalières, en plus d’offrir un accès à l’électricité aux communes rurales éthiopiennes des zones frontalières. Djibouti a donc réduit à la fois sa facture électrique et son empreinte carbone en remplaçant 65 % de l’énergie provenant de combustibles fossiles par de l’électricité issue d’une source renouvelable. 104 3.3 Les gouvernements locaux au cœur des enjeux énergétiques et climatiques Même si les impulsions et les directions politiques pour la transition énergétique proviennent principalement des échelons international et national, c’est à l’échelle locale que les actions prennent tout leur sens. En adoptant une approche systémique de la gestion des territoires (urbanisme, transport, énergie, résilience des bâtiments), l’action des administrations locales pourrait être un levier crucial pour la mise en œuvre de la transition. 40.Fondation Nicolas Hulot (2012). Les acteurs de la transition énergétique 41.IFDD et ENERGIES 2050 (2014). 42.Magnin (2012). P o i n t s d e 3.3.1.1 Les collectivités territoriales, un acteur clé pour la transition énergétique Les collectivités territoriales sont les dépositaires d’importantes responsabilités et voient s’ouvrir de nombreuses perspectives d’amélioration de leur performance énergétique dans les domaines qui relèvent de leurs compétences (voir la partie 4.1). Sans viser l’exhaustivité, on peut citer : la planification urbaine (organisation spatiale, rénovation urbaine, politique de l’habitat, densification de l’habitat, valorisation des friches industrielles) ; les changements dans l’occupation des sols (protection des espaces verts, gestion des terres, conservation et restauration des habitats, développement de l’agriculture urbaine) ; l’amélioration de l’efficacité énergétique, notamment dans les secteurs du bâtiment et de l’éclairage public ; la mise en place de transports communs ou publics novateurs dans leur organisation et dans les technologies sobres en carbone utilisées ; la gestion des déchets (réduction à la source, optimisation des processus de collecte ou de valorisation) ; le renforcement et l’optimisation de la gestion des différents réseaux (eau, information, énergie), en augmentant notamment le recours aux énergies renouvelables et en encourageant la sobriété et l’efficacité énergétiques41. Il est désormais acquis que l’échelon local est incontournable dans la mise en œuvre de la plupart des politiques de développement durable, mais aussi de lutte contre le changement climatique. Les collectivités locales peuvent ainsi démontrer concrètement que d’autres voies sont possibles en devenant des laboratoires d’expériences innovantes qui pourront ensuite être généralisées à l’échelle nationale42. Les autorités locales deviennent ainsi un intermédiaire essentiel entre les pouvoirs centraux et les citoyens et jouent un rôle d’exemplarité. Leur proximité et la connaissance des enjeux locaux leur donnent une efficacité accrue dans la prise de décisions. Enfin, l’exemplarité et le lancement de projets innovants – en démontrant leur faisabilité aux habitants et aux acteurs privés – sont essentiels. À l’échelle mondiale, une dynamique d’autonomisation des autorités locales face aux pouvoirs centraux peut être observée. Cependant, alors que les responsabilités de ces acteurs incontournables s’accroissent, le renforcement de leurs moyens d’action et de leurs compétences est très souvent insuffisant. En effet, il n’est pas rare de voir les gouvernements centraux déléguer de nombreuses responsabilités aux territoires locaux, sans toutefois bonifier leur budget. Les problèmes s’accumulent et certains projets sont alors délaissés faute de moyens d’action. r e p è r e 3.3.1 Le rôle crucial joué par l’échelon local 105 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 14. Le label Cit’ergie P o i n t s d e r e p è r e Le label Cit’ergie, porté par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), est une déclinaison française du label européen European Energy Award, outil partagé par de nombreuses collectivités européennes. Il propose, sous la forme d’un guide méthodologique, un processus d’amélioration continue en vue d’élaborer une politique énergétique et climatique efficace. La labellisation prend en compte tous les leviers possibles dans six secteurs d’intervention : le développement territorial, le patrimoine de la collectivité, l’approvisionnement éner gétique, l’eau et l’assainissement, la mobilité, l’organisation interne et la communication. En France, le processus Cit’ergie se conduit en quatre temps : état des lieux de la situation initiale établi à partir d’un catalogue standardisé de 87 actions ; définition d’un programme pluriannuel de politique sur l’énergie et le climat ; labellisation avec l’intervention d’un auditeur ; mise en œuvre et suivi continu des résultats. Le label Cit’ergie est valable quatre ans, à l’issue desquels il doit être révisé. Il procure à la collectivité une marque de bonne conduite qui lui permet d’obtenir un outil de cadrage et d’optimisation de ses actions. C’est aussi une démarche sur le long terme qui favorise une gestion transversale de la politique énergétique et climatique. 106 3.3.1.2 Une multitude d’opportunités d’actions concrètes pour agir sur la demande énergétique au niveau local La transition énergétique gérée à l’échelle locale permet de mettre en œuvre des actions innovantes ayant un effet bénéfique sur la qualité de vie des citoyens, le développement économique local et l’attractivité des territoires. En effet, l’analyse fine de la demande énergétique, ainsi que des moyens de la faire évoluer et de la satisfaire, ne peut se mettre en place qu’au plus près des personnes concernées. Ces actions concernent notamment les transports. Les autorités locales peuvent alors mettre en œuvre des solutions de déplacement plus sobres et plus respectueuses de l’environnement : transports en commun, déploiement de bornes pour véhicules électriques, vélos en libre-service, systèmes de covoiturage, organisation réfléchie des espaces urbains pour minimiser les déplacements des populations. L’urbanisme est en effet une composante importante des pouvoirs des administrations locales. L’aména gement du territoire permet d’optimiser les flux de personnes, de limiter la pollution et de faciliter l’intégration des différents réseaux (chaleur, électricité, eau, déchets). Le secteur résidentiel est un autre secteur primordial sur lequel les autorités locales ont une influence. La promotion de logements efficaces en énergie et la rénovation des bâtiments publics contribuent à juguler la demande d’énergie (voir la partie 4.1). r e p è r e 43.Magnin (2012). 44.Magnin (2012). d e Les administrations locales jouent aussi un rôle crucial en matière d’efficacité énergétique. Elles ont la possibilité de contribuer à améliorer celle de leur territoire en développant des mécanismes d’aide aux projets des acteurs locaux (isolation des bâtiments, équipements domestiques, éclairage). Mais elles doivent aussi se montrer exemplaires dans leurs propres pratiques, à l’interne. Il est possible d’optimiser d’ambitieux programmes de rénovations menés dans les bâtiments publics et l’éclairage public. Les actions de communication locales peuvent aussi avoir une forte incidence sur les pratiques, tant au niveau de la sobriété que de l’efficacité. Ces projets sont essentiels pour insuffler une dynamique à l’espace local. Enfin, des programmes locaux d’aides aux personnes en situation de précarité ou de pauvreté énergétique peuvent être mis en place. Souvent, une action locale ciblée constitue la réponse la plus efficace aux problématiques sociales qui varient d’une région à l’autre. Les systèmes énergétiques se construisant sur des décennies, toutes ces actions cohabiteront pendant un certain temps avec les modèles actuels, mais l’importance des actions durables doit augmenter progressivement tout en évitant les erreurs stratégiques du passé. Par exemple, les villes françaises des années 1950 ont détruit leurs infrastructures de tramways, car elles considéraient alors qu’elles faisaient obstacle à la circulation automobile43. Aujourd’hui, la plupart ont déjà réhabilité ce moyen de transport ou veulent le faire, à des coûts importants. Autre exemple : les villes continuent de construire des logements peu écoénergétiques alors qu’elles disposent la plupart du temps des connaissances et des technologies nécessaires pour mieux faire44. Ceci s’explique par des raisons d’économie immédiate, qui prennent le pas sur le fait qu’à moyen ou long terme, les coûts collectifs seront bien plus importants que celui de la construction de logements efficaces sur le plan énergétique. La transition énergétique est une question de long terme qui nécessite de se projeter vers l’avenir, par exemple à l’horizon 2050, pour évaluer sa rentabilité collective. Cet exercice de projection est d’autant plus important qu’il peut renforcer la position d’une autorité locale qui s’engage dans la transition énergétique, par rapport à celle d’une autre qui se contente d’une politique de limitation ou de réparation des dégâts. Cependant, il paraît évident que des actions locales isolées ne suffiront pas à nous diriger vers une véritable transition énergétique s’il n’y a pas un réel travail en réseau ou si les gouvernements n’impulsent pas de politiques énergétiques durables au niveau national. C’est ainsi que s’est créée en Europe la Convention des maires, qui associe les autorités locales et régionales dans un engagement volontaire pour l’amélioration de la transition énergétique et l’utilisation accrue des énergies renouvelables. P o i n t s Les acteurs de la transition énergétique 107 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 15. La Convention des maires : une mise en réseau pour une transition énergétique facilitée P o i n t s d e r e p è r e Suite à l’adoption par l’Union européenne, en 2008, du premier Paquet Énergie-Climat (qui définit les objectifs des 3×20 : réduction de 20 % des émissions de CO2, accroissement de 20 % de l’efficacité énergétique, 20 % d’énergies renouvelables en Europe à l’horizon 2020), plus de 4 000 villes se sont engagées à dépasser ces objectifs sur leurs territoires en signant la Convention des maires. Cette démarche n’est pas seulement limitée à l’Union européenne : plus d’une centaine de villes signataires se situent hors de l’UE. Cette initiative collective sans précédent va dans le sens d’une implication forte des autorités locales en faveur d’une efficacité énergétique accrue. Les villes participantes s’engageaient à présenter dans un délai d’une année – à compter de l’apposition de leur signature – un plan d’action pour l’énergie durable contenant notamment un état des consom mations énergétiques et des émissions de gaz à effet de serre et une description des moyens humains et financiers affectés à la réalisation du Plan. Les décideurs espéraient aussi, par ce moyen, stimuler la création d’emploi et l’apparition de nouvelles activités. Pour aller au-delà de l’horizon 2020, la nouvelle Convention des maires pour le climat et l’énergie a été créée en 2015. Elle a adopté les objectifs 2030 de l’UE (40 % de réduction des émissions de GES par rapport aux niveaux de 1990, 27 % d’énergies renouvelables, une amélioration de l’efficacité énergétique d’au moins 27 %). Les nouveaux signataires s’engagent aussi à adopter une approche intégrée visant à atténuer le changement climatique et à s’y adapter. 108 3.3.2 Vers une gouvernance locale de l’énergie : des obstacles à surmonter, mais une étape indispensable à la transition énergétique Dans le cadre d’une gouvernance multiniveaux, l’action locale sur l’énergie prend progressivement une importance majeure, car elle est davantage compatible avec les objectifs de promotion de sociétés résilientes et sobres. Pour autant, même si une gouvernance locale de l’énergie accompagnée d’une production décentralisée est essentielle à la transition énergétique, de nombreux obstacles s’opposent encore à ce processus. Les acteurs de la transition énergétique 3.3.2.1 Dépasser le fonctionnement sectoriel et cloisonné des gouvernements locaux Le premier obstacle est d’ordre organisationnel. Nous l’avons évoqué précédemment : le dépassement du cloisonnement traditionnel entre les différents secteurs d’activité est un préalable indispensable à une transition énergétique cohérente et durable. Pour autant, au sein des collectivités, les politiques liées notamment à l’urbanisme, aux déplacements, au logement et au développement économique sont élaborées par des services différents qui ne dialoguent guère entre eux, ce qui freine la poursuite d’objectifs climatiques et énergétiques transversaux et risque de produire des effets contradictoires. En outre, dans la majorité des cas, ce cloisonnement horizontal s’ajoute à un cloisonnement vertical. L’éparpillement des compétences entre les différents échelons locaux (communes, structures intercommunales, départements, gouvernorats, régions, etc.) complexifie grandement la définition et la mise en œuvre d’une politique climatique et énergétique cohérente. Pour autant, la mise en œuvre coordonnée d’une politique énergétique multiniveaux peut représenter des avantages multiples, chacun pouvant apporter ses compétences propres tout en ayant une vision globale du territoire. Dans cette perspective, la répartition des rôles parmi les différents niveaux d’autorité et la définition d’un cadre précis sont des préalables indispensables. Enfin, les autorités locales doivent être accompagnées et guidées par des organismes nationaux ou internationaux afin de pouvoir mener une politique ambitieuse, sans se cantonner aux expérimentations locales ou aux actions ponctuelles. d e P o i n t s Depuis 1996, les Länder ont la responsabilité d’organiser la planification et l’aménagement des transports en commun et du réseau ferroviaire sur leur territoire. Dans l’État de Rhénanie-du-Nord–Westphalie, tous les trains de banlieue et les lignes de bus régionaux circulent dans un réseau entièrement cadencé. Les villes-arrondissements conservent leurs prérogatives pour les transports urbains. Dans les grandes villes de la région, les réseaux de métro et de tramway se modernisent, et de nombreuses villes moyennes et petites ont un réseau de bus performant. L’ensemble des transports en commun fonctionne sur le principe d’une tarification intégrée ; il est désormais possible de voyager dans tout le territoire avec un seul billet. L’objectif régional vise à promouvoir l’autonomie des organisations locales en charge des transports par des financements forfaitaires. Les moyens restants financent des projets de développement visant l’intérêt général au sein du territoire. Tous les niveaux de gouvernance territoriale (État, régions, communes) sont donc impliqués et collaborent afin de proposer aux usagers un réseau cohérent et efficace. r e p è r e Encadré 16. L’organisation collective des transports en Rhénanie-du-Nord–Westphalie 109 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 3.3.2.2 Une gouvernance locale énergétique partagée Les gouvernements locaux peuvent revêtir différentes formes (municipalités, gouvernorats, départements, régions, etc.), auxquelles viennent s’ajouter les acteurs économiques et sociaux – notamment la société civile – des territoires. Devant cette pluralité et cette diversité des parties et des intérêts de chacun, il apparaît essentiel d’effectuer un regroupement de ces multiples acteurs autour d’une alliance commune, afin que les efforts puissent se coordonner. Ceci peut, par exemple, prendre la forme d’agences locales de l’énergie (voir l’encadré 17). Il s’agit d’un type d’organisation qui existe déjà dans de nombreux pays – notamment européens – mais qui est globalement peu développé. Un autre objectif est de renforcer l’ingénierie territoriale afin que les collectivités puissent disposer des compétences pour intégrer les enjeux de la grande transition dans leurs politiques. En guise d’exemple, les communes des pays scandinaves sont tenues, selon l’association Energy Cities, de gérer l’approvisionnement énergétique de leur territoire. Elles se sont donc dotées de sociétés locales de production d’énergie. Cela favorise leur responsabilisation tout en leur procurant une source de revenus. Par ailleurs, il est intéressant de souligner que l’innovation, la mobilisation de ressources locales, le développement de la cogénération sont nettement facilités dans les pays où les villes disposent d’un important pouvoir dans ce domaine45. P o i n t s d e r e p è r e Encadré 17. Le réseau FLAME en France 110 Sur l’impulsion des grands événements internationaux pour le climat tel que le sommet de la Terre à Rio en 1992, la Commission européenne a lancé en 1994 un dispositif de soutien à la création d’agences locales et régionales de maîtrise de l’énergie. L’Europe soutient ainsi plus de 350 collectivités engagées dans cette démarche. En France, on dénombre aujourd’hui une cinquantaine d’agences locales de maîtrise de l’énergie et du climat (créées ou en cours de création) rassemblées sous la dénomination FLAME (Fédération des agences locales de maîtrise de l’énergie et du climat). La fédération fournit des informations, des conseils et une assistance technique aux utilisateurs d’énergie, qu’ils soient citoyens, publics ou privés. Ses champs d’actions sont : • La stratégie territoriale. Dans le cadre de missions de veille, d’innovation et de prospective, elle appuie des collectivités locales dans leurs relations avec des bureaux d’études ou participe à l’élaboration de documents de planification territoriale. 45.Réseau Action Climat (2013). Les acteurs de la transition énergétique • L’information. Elle diffuse des connaissances et sensibilise les acteurs sur la transition énergétique. • Les réseaux. Elle cherche à créer de l’émulation par des groupes de travail et des accompagnements • La réalisation. Elle est aussi un outil d’aide à la décision et de soutien technique. Elle fournit notamment un accompagnement préopérationnel à des entreprises ou des bailleurs sociaux afin de les encourager à se soumettre à des audits énergétiques. 3.3.2.3 La question du financement de la transition énergétique à l’échelle locale Outre la création de nouvelles agences de gestion locale, qui peut se faire grâce à des transferts de financement, c’est surtout le coût des nouvelles infrastructures qui est à prendre en compte. Afin d’intégrer une production décentralisée, les réseaux doivent être renforcés et leur gestion améliorée. Ce coût ne pourra pas être assumé par les territoires seuls ; des aides nationales devront les accompagner. L’épargne locale peut être mise à contribution pour financer des projets énergétiques durables et encourager les initiatives des différents acteurs du territoire. Afin que ces initiatives se généralisent et que les ressources locales soient valorisées au mieux, les territoires locaux ne doivent pas seulement avoir la compétence juridique pertinente, mais aussi être politiquement responsables de l’équilibre énergétique de l’espace local. Ce transfert de pouvoir doit être effectué en parallèle d’un transfert de moyens. d e P o i n t s Ce fonds de protection climatique a été mis en place collectivement en 1998 par la ville de Hanovre, cinq communes environnantes et le distributeur d’électricité local Enercity, dont la ville de Hanovre est l’actionnaire majoritaire. Chaque année, cinq millions d’euros (fournis principalement à la fois par la ville de Hanovre et Enercity) servent à financer des projets contribuant au développement durable. Cette constance donne au fonds une visibilité certaine et favorise la planifi cation et la fidélisation des partenaires locaux du fonds durable. Les auteurs d’une étude des actions mises en œuvre ont constaté qu’un million d’euros de subventions générait en moyenne 12,7 millions d’euros d’investissements (effets directs et indirects), en majorité sur le territoire d’influence de Hanovre. r e p è r e Encadré 18. Le fonds proKlima de Hanovre 111 La transition énergétique : connaître et partager pour agir D’autres outils de financement innovants tels que les obligations vertes, qui ont pour objet de financer des investissements qui comportent un bénéfice environnemental (voir la partie 3.4), peuvent être mis en œuvre par les collectivités locales pour diversifier leurs sources de financement et attirer des investisseurs dits « socialement responsables ». Les collectivités peuvent également faciliter le développement de sociétés de services énergétiques afin de promouvoir des programmes liés à la transition énergétique (voir la partie 3.4). Ces sociétés peuvent en effet préfinancer des opérations de rénovation énergétique lourdes et coûteuses. Alors qu’il devient de plus en plus urgent de modifier en profondeur l’organisation énergétique, il est nécessaire que les territoires locaux se mettent à assumer de manière croissante la responsabilité de l’approvisionnement de leur territoire en énergie. Cette solution permettrait d’accroître l’acceptabilité des infrastructures par les populations, de libérer l’innovation et de stimuler les activités locales. De petites et moyennes entreprises (PME) pourraient profiter de cette situation pour se développer ; le maillage économique en serait renforcé. Enfin, il faut remarquer qu’il n’existe ni solution préétablie ni modèle idéal. Chaque territoire possède une situation et des moyens qui lui sont propres. La problématique reste la même, mais le contexte est très différent, surtout selon qu’on se place dans un cadre rural ou urbain. De surcroît, pour une même catégorie de territoire, les priorités et les moyens d’un pays en développement et d’un pays développé sont totalement différents. Chaque contexte appelle donc à des solutions innovantes sur mesure. De ce point de vue, les échanges d’expériences entre collectivités locales sont toujours des sources d’inspiration à ne pas négliger, que ce soit au niveau des technologies, des pratiques ou des financements, de l’entraide ou de l’échange de connaissances. P o i n t s d e r e p è r e 3.3.2 La coopération décentralisée pour mutualiser et démultiplier les moyens d’action 112 La notion de coopération décentralisée désigne les processus d’échange entre les collectivités territoriales (dont les villes) dans un objectif de solidarité et d’entraide46. Même si chaque ville est différente, toutes sont généralement confrontées à des barrières similaires, notamment en matière de transition énergétique. Dans cette perspective, l’échange de techniques, d’outils et de bonnes pratiques présente des avantages évidents, notamment dans l’objectif d’accompagner les villes du Sud, confrontées à des défis plus marqués. C’est ainsi que depuis les années 1970, les politiques d’aide aux pays en voie de développement ne sont plus l’apanage des États. De nouveaux acteurs tels que les organisations non gouvernementales (ONG) et l’ONU, mais aussi les collectivités locales, jouent un rôle de plus en plus important dans la coopération au développement. Dans le contexte actuel, la coopération décentralisée constitue un outil incontournable, du fait de sa souplesse et de son efficacité, pour favoriser la mise en place d’initiatives locales, notamment en matière énergétique. En se concentrant sur une échelle 46.Abouhani (s.d.). Les acteurs de la transition énergétique 47.Abouhani (s.d.). 48.Houzir (2007). 49.Houzir (2007). 50.Houzir (2007). 51.Houzir (2007). d e P o i n t s 3.3.2.1 Surmonter les obstacles inhérents aux représentations pour favoriser un codéveloppement soutenable Différents éléments peuvent être à l’origine des relations de coopération entre collectivités : liens historiques, choix de responsables politiques, actions des associations de migrants. Cependant, le déficit de dialogue est un problème courant. Accentué par des différences notables de fonctionnement, il provoque des insuffisances quant à la réflexion en amont sur le sens et les objectifs de la coopération, à la connaissance de l’autre et de ses besoins et attentes ainsi qu’à l’implication des acteurs territoriaux concernés. À ce déficit de dialogue s’ajoutent des motivations différentes entre collectivités du Nord et collectivités du Sud, du fait de leurs contextes socioéconomiques différents48. Les motivations des premières sont d’ordre essentiellement politique. Bien que le but originel soit d’apporter une aide à leur partenaire et de contribuer à son développement, elles ont également des attentes en termes de retombées culturelles, sociales ou économiques sur leur propre territoire, afin de satisfaire le contribuable et les donateurs. Les collectivités du Sud sont plus pragmatiques. Elles attendent essentiellement de leur partenaire un appui institutionnel (renforcement des capacités et des compétences), une ouverture sur l’extérieur (élargissement du réseau de connaissances) ou un apport de ressources complémentaires pour mettre en œuvre des projets49. Dans le contexte actuel, cette relation du Nord vers le Sud (ou du « riche » vers le « pauvre ») est totalement obsolète et doit être remise en cause, car elle ne permet pas de répondre correctement aux exigences de la transition énergétique et, par extension, écologique50. Il convient dès lors d’introduire et d’appliquer réellement la notion de codéveloppement durable, qui favorise le croisement d’expériences dans une optique de concrétisation de projets durables et donc d’échange, de réciprocité et de dialogue réel51. La vision du codéveloppement durable se fonde sur le principe de responsabi lisation de chacun des partenaires, qui doit assurer son propre développement en s’impliquant sur les plans social et financier, puis en faisant appel, le cas échéant, à r e p è r e locale, la coopération décentralisée permet de toucher des zones et des populations spécifiques, plus difficilement atteignables dans le cadre de la coopération entre États. En outre, comparativement aux initiatives étatiques, la coopération décentralisée touche plus efficacement les populations locales, qui se voient directement concernées par des projets locaux. Leur adhésion, leur soutien, voire leur participation sont ainsi bien plus probants que pour de grands projets. En somme, la coopération décentralisée élargit le champ de la coopération à de nouveaux acteurs en mettant en œuvre des actions ciblées sur des secteurs dans le besoin47. 113 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e des collectivités extérieures. Le codéveloppement durable nécessite l’implication des décideurs, de la société civile et la mobilisation sur le long terme d’instruments économiques et financiers sur la formation professionnelle. Pour toutes ces raisons, la coopération décentralisée ne peut simplement s’appuyer sur des théories et des modèles de développement classiques. Elle doit s’élaborer en prenant en compte les particularités d’un territoire et en utilisant des outils appropriés à l’objectif recherché. 114 3.3.2.2 Quels outils de codéveloppement pour faciliter l’échange des connaissances pour la transition énergétique ? Plusieurs leviers peuvent être actionnés pour favoriser un échange de connaissances et essayer de mettre en synergie les différentes visions de la transition énergétique. Il peut tout d’abord s’agir de soutenir des associations locales ou de mettre en place un jumelage. Par ailleurs, deux types d’outils sont privilégiés pour faciliter ces démarches d’échange de bonnes pratiques : • Les outils méthodologiques. En France, la Charte de la coopération décentralisée pour le développement durable, lancée en 2004 par l’Association française du Conseil des communes et des régions d’Europe, Cités Unies France et le Comité 21, a été signée par plus de 150 collectivités. Elle a pour but d’articuler la coopération décentralisée avec les problématiques du développement durable. Basée sur des principes d’égalité, de solidarité, de réciprocité et de subsidiarité, la Charte met l’accent sur les notions de participation et de partenariat52. • Les outils financiers. Le programme de la FAO, parmi d’autres organismes internationaux, offre des soutiens financiers aux collectivités dans le cadre de programmes dédiés à la coopération décentralisée. Des financements peuvent également être débloqués localement. Par exemple, grâce à la prise en charge par la ville de Dunkerque d’un projet scientifique de recherche, des experts cubains ont mis au point un procédé de réhabilitation des toitures à partir de matériaux locaux, puis ont transmis ce procédé d’autoconstruction à la ville dans le but de l’appliquer sur son territoire53. Afin d’assurer une coopération efficace, l’accès aux technologies innovantes et aux pratiques les plus performantes doit être facilité. Dans ce cadre, les transferts de technologie doivent faire partie intégrante des processus de coopération décentralisée et être favorisés par les décideurs. Ces transferts peuvent recouvrir diverses formes en gardant l’objectif de transmettre des compétences nouvelles à une entité pour aider à son développement par les moyens suivants : • le transfert de matériel d’une collectivité à une autre, accompagné d’une certaine expertise ; 52.La Charte de la coopération décentralisée pour le développement durable, Cités Unies France, http://www.cites-unies-france.org/spip.php?article216. 53.Commissariat général au développement durable (2012b). Les acteurs de la transition énergétique • les investissements d’entreprises étrangères dans le territoire d’accueil, avec l’implantation de modes de production plus modernes ; • les achats de brevets ou de licences correspondant à des technologies particulières. Ces derniers éléments mettent en évidence le rôle déterminant joué par le secteur privé dans la transition énergétique. 3.4 L’indispensable implication du secteur privé La question de la transition énergétique se pose à chacun des acteurs de nos sociétés. Le secteur privé, incarné par les entreprises, ne fait pas exception. Les entreprises sont d’ailleurs souvent présentées comme étant à l’origine du problème écologique, par leur recherche du profit financier à court terme, sans souci des répercussions à long terme. Or, s’il appartient au secteur public de définir le cadre réglementaire et l’orientation de la transition énergétique, le secteur privé est situé au cœur du processus. Il doit porter la majorité des mesures de maîtrise de la demande en énergie, tant dans les financements que dans la recherche technologique et ses applications. L’adhésion du secteur privé est ainsi la condition sine qua non d’une transition réussie. Quels sont les moyens de surmonter la frilosité des investisseurs privés ? Comment rendre plus attractifs les investissements en rapport avec la transition énergétique ? Dans cette partie, nous présenterons quelques dispositifs existants pouvant apporter des débuts de réponse, avant d’analyser les possibilités offertes par les nouveaux modèles économiques. 3.4.1.1 Une démarche volontaire avec des niveaux d’implication variés La notion de responsabilité sociale des entreprises (RSE) peut faire partie des solutions à mettre en œuvre par le secteur privé afin de répondre au défi de la transition éner gétique. L’idée de la RSE est notamment consacrée par la norme internationale d e P o i n t s Les grandes entreprises ont un poids immense dans le processus ressource-production- consommation. Possédant une force d’action et d’influence considérable, elles doivent éviter de cristalliser les critiques par un manque d’engagement. Même si elles sont par essence les dépositaires d’intérêts privés, les entreprises doivent intégrer le fait que les objectifs d’une transition énergétique peuvent aller dans le sens de la recherche de la performance et de la rentabilité et, par conséquent, qu’elles peuvent devenir une force de proposition dans les débats sociétaux et faire preuve d’initiative. Nombre d’entreprises reconnaissent aujourd’hui que leur croissance n’est pas séparable du respect de l’environnement et de la société en général. Elles se dirigent donc vers une démarche dite de responsabilité sociale des entreprises. r e p è r e 3.4.1 L’importance croissante des démarches de responsabilité sociale des entreprises 115 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e ISO 26000. qui lui donne la définition suivante : « La responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement éthique et transparent qui : contribue au développement durable, y com pris à la santé et au bien-être de la société ; prend en compte les attentes de parties prenantes ; respecte les lois en vigueur tout en étant en cohérence avec les normes internationales de comportement ; est intégrée dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses rela tions54. » La mise en place de cette norme traduit la prise de conscience du fait que les objectifs climatiques et de développement durable ne peuvent pas être atteints sans la participation active des entreprises. La RSE reste cependant une démarche volontaire qui suppose deux choses : la volonté de l’entreprise de dépasser les exigences réglementaires minimales et la liberté de définir son propre champ d’action, en dehors des contraintes venant notamment de l’État. Concrètement, la démarche de RSE se traduit généralement par la mise en œuvre d’une charte volontaire définissant le comportement éthique de l’entreprise sur les enjeux environnementaux et sociaux, accompagnée d’un plan d’action décrivant l’ensemble des opérations menées par l’entreprise, puis d’un rapport-bilan annuel. Parfois, des indicateurs ont pour objet de préciser les objectifs et d’assurer un suivi précis de la démarche. Les sociétés de taille importante sont généralement plus sensibles à la RSE. En France, par exemple, 84 % des entreprises employant 500 salariés ou plus mènent des actions de protection de l’environnement, contre 47 % des entreprises employant de 50 à 249 salariés55. L’engagement moindre va souvent de pair avec une information réduite et des moyens limités. Beaucoup de petites entreprises n’ont en effet jamais entendu parler de RSE. Les différences sont également visibles en fonction des activités : le commerce et l’industrie manufacturière sont les secteurs les moins engagés, alors que l’implication est forte dans les secteurs de l’énergie, de l’environnement et de l’agro alimentaire. L’action de RSE la plus répandue en France aujourd’hui, notamment grâce à des campagnes d’information, est le recyclage des déchets. 116 3.4.1.2 L’encadrement progressif de la RSE : une étape indispensable Depuis quelques années, la démarche de RSE évolue progressivement vers l’encadrement, avec la rédaction de plusieurs textes plus ou moins contraignants à différentes échelles. Certains États élaborent des textes juridiques permettant d’encadrer la RSE. Cependant, malgré quelques initiatives telles que la Global Reporting Initiative ou le Pacte mondial, il n’existe pas de réglementation internationale précise en la matière. 54.AFNOR (s.d.). 55.INSEE (2012). r e p è r e 56.Site Internet de la Global Reporting Initiative, consulté en décembre 2014. 57.Site Internet du Pacte mondial, consulté en décembre 2014. 58.OCDE (2011). d e Lancée par les Nations Unies en 1997, la Global Reporting Initiative vise à fixer des lignes directrices pour la rédaction des rapports environnementaux et sociaux des entreprises. Elle propose pour cela un référentiel d’indicateurs permettant de mesurer l’avancement des programmes de développement durable des entreprises56. Le Pacte mondial, instauré en 2000 par les Nations Unies, vise – à l’échelle mondiale – à inciter les entreprises à adopter une attitude socialement responsable en s’engageant à intégrer et à promouvoir plusieurs principes relatifs aux droits de l’homme, aux normes internationales du travail, à la lutte contre la corruption et à l’environnement. C’est une démarche volontaire dans laquelle les entreprises adhérentes s’engagent annuellement à progresser dans les quatre thèmes du Pacte mondial. Comptant désormais plus de 12 000 participants dans 145 pays, le Pacte mondial a permis la prise de conscience globale par le secteur privé (essentiellement des multinationales) des problématiques liées au développement durable57. Les principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises sont des recommandations que les gouvernements membres adressent aux entreprises opérant depuis leur territoire. Ils énoncent des principes et des normes volontaires pour un comportement responsable des entreprises dans plusieurs domaines (environnement, droits de l’homme, fiscalité, technologies, etc.), et visent à garantir la conformité des activités des multinationales avec les politiques nationales, à renforcer la confiance entre les entreprises et le pays d’accueil, à améliorer les conditions pour les investisseurs étrangers et à renforcer la contribution des multinationales à la protection de l’environnement. Une mise à jour des principes destinés à promouvoir un comportement responsable de la part des entreprises multinationales dans les transactions internationales a été effectuée en 201158. On peut aussi noter que les grandes entreprises s’impliquent davantage dans les négociations et les conférences internationales ce qui s’est notamment traduit par la mise en avant du concept d’« économie verte » lors du dernier sommet de Rio, en juin 2012 (voir la section 3.4.3.1). À l’échelle strictement étatique, différentes lois permettant d’encadrer la RSE sont définies. En France par exemple, la loi NRE de 2001, qui impose aux entreprises cotées de communiquer sur leurs performances sociales et environnementales, la loi sur la responsabilité environnementale de 2008, instaurant le principe du pollueur-payeur, et la loi Grenelle 2 de 2010 vont dans le sens d’une meilleure prise en compte de la responsabilité sociale des entreprises. P o i n t s Les acteurs de la transition énergétique 117 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 19. La responsabilité sociale des entreprises sur l’île Maurice P o i n t s d e r e p è r e En mai 2009, le gouvernement mauricien a rendu obligatoire la RSE dans ses textes législatifs. C’est alors une nouveauté mondiale, la RSE étant, dans toutes les définitions acceptées par des institutions, un acte volontaire. Les sociétés étrangères ou locales opérant sur le territoire doivent consacrer 2 % de leur bénéfice annuel au développement communautaire. Suite à de longues négociations public-privé (du fait notamment des réticences du secteur privé), trois modalités de contribution sociale des entreprises ont été définies : 1. le financement des programmes de développement communautaire propres aux entreprises, 2. le financement de projets d’ONG approuvés, 3. le versement de la somme due à un des programmes sociaux étatiques déjà existants (le Programme d’éradication de la pauvreté absolue, par exemple). La RSE obligatoire représente un potentiel significatif de contribution des entreprises au développement social et environnemental, selon le conseiller au Ministère des Finances. Ainsi, 2,5 millions d’euros pourraient être versés annuellement par 6 000 entreprises – ce qui est non négligeable dans un petit pays comme l’île Maurice. 118 3.4.1.3 Les critiques de la RSE Si la RSE est présentée par certains comme une amélioration réelle, d’autres sont beaucoup plus critiques à son égard. Les entreprises doivent-elles se préoccuper des questions de durabilité ? La RSE serait-elle largement un exercice cosmétique pour faire apparaître les entreprises plus responsables qu’elles le sont vraiment ? Ces questions sont fréquemment posées. Le nombre croissant de démarches de RSE et la présence de plus en plus fréquente de cette notion dans les discours sont parfois interprétés comme le reflet des difficultés des États à contraindre les grandes entreprises de prendre effectivement leurs responsabilités. Sous couvert de démarches de RSE, les grandes entreprises éviteraient en réalité l’imposition de règlements internationaux et nationaux. Pour d’autres, la question de la durabilité est d’abord la responsabilité de l’État, et les entreprises n’auraient pas de légitimité à s’en préoccuper, les gestionnaires devant avant tout satisfaire les actionnaires. Il est aussi fréquemment avancé que la généralisation des démarches RSE, alimentant des stratégies de marketing, est plutôt une affaire de « verdissement de l’image » ou d’écoblanchiment (greenwashing, opération consistant à se donner artificiellement une image « verte » par la communication) que d’engagements et d’actes réels. Ainsi, la RSE Les acteurs de la transition énergétique est accusée d’aider principalement les multinationales à surmonter les critiques en faisant ressortir des actions exemplaires mais superficielles, qui ne remettraient aucunement en cause les fondements du fonctionnement de leurs activités59. Néanmoins, si la sincérité des engagements des entreprises et les actes réels sont parfois effectivement limités, il n’est probablement pas juste de considérer que toutes les démarches de RSE reflètent un comportement purement cynique. Chaque cas doit en fait être évalué isolément. Le problème clé réside donc peut-être dans l’amélioration et l’établissement d’un cadre standard et harmonisé, qui donnera plus de sens aux évaluations et facilitera la comparaison des performances. Les initiatives et la recherche dans ce domaine n’en sont qu’à leurs débuts et sont appelées à évoluer considérablement. Enfin, il faut aussi noter que les entreprises sont de plus en plus suivies par des institutions indépendantes telles que les ONG et les agences de notation éthique, et que les investisseurs sont, comme les consommateurs, de plus en plus regardants sur le comportement et les activités des entreprises qu’ils financent. De nouveaux outils spécifiques, telles les obligations vertes (green bonds), leur sont dédiés. 3.4.2 Les opportunités de financements privés de la transition énergétique 59.Communauté urbaine de Lyon (2010). 60.CDC Climat et Caisse des dépôts (2012a). d e P o i n t s 3.4.2.1 Les obligations vertes : moyens de financement de la transition énergétique Les obligations vertes visent à financer des investissements comportant un bénéfice environnemental ou réduisant la vulnérabilité à des changements environnementaux. Créées pour élargir l’assiette des prêteurs potentiels, elles se caractérisent également par un engagement de transparence. Ainsi, contrairement aux obligations classiques, elles sont soumises à un système de suivi démontrant que l’argent réuni a bien permis de financer les actions attendues60. Le système de suivi en question est d’une importance majeure, car il est censé lever les soupçons d’écoblanchiment qui pourraient freiner l’engagement des investisseurs. Les obligations vertes intéressent les investisseurs socialement responsables (ISR) qui intègrent des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance dans leurs choix d’investissement. Elles ont été émises initialement par des investisseurs institutionnels tels que la Banque mondiale et la Banque européenne d’investissement pour financer r e p è r e Le financement des projets des entreprises en faveur de la transition énergétique est un sujet d’étude en soi. Le secteur privé dispose de nombreux outils variés, aujourd’hui en cours d’adaptation ou d’adoption, pour financer la transition énergétique, par exemple les obligations et les partenariats public-privé. Des innovations marquantes se mettent également en place ; on pense notamment aux sociétés de service énergétique (d’autres outils sont décrits au chapitre 4). 119 La transition énergétique : connaître et partager pour agir des projets d’énergie renouvelable ou de lutte contre le changement climatique. Récemment, les entreprises et les collectivités locales se sont lancées aussi dans ce type d’émissions, accélérant l’essor du marché : 4,5 milliards d’euros en 2012, 20 milliards d’euros attendus en 2014 et plus de 100 milliards en 2016, selon les spécialistes61. Cette demande croissante est cependant assujettie à la fois aux demandes traditionnelles des investisseurs et à leurs exigences grandissantes en matière de garantie quant à la destination finale de leurs capitaux. Autrement dit, la question est de s’assurer que ceux-ci seront bien investis dans des projets répondant aux exigences de la transition énergétique. Traditionnellement, bien que les entreprises puissent émettre des obligations pour financer leurs projets, ces instruments sont souvent moins bien notés que ceux des organismes publics et ont des volumes d’émissions plus restreints, ce qui limite leur liquidité. Ces contraintes se retrouvent sur le marché des obligations vertes, avec le risque supplémentaire de voir une entreprise déclarer des investissements verts sans vérification extérieure. Des solutions peuvent être mises en œuvre pour contourner ces problèmes : soit l’entreprise bénéficie d’une garantie publique pour son émission obligataire, soit les obligations émises se voient attribuer un label « vert » vérifié par des auditeurs indépendants62. Néanmoins, la transparence et l’information sur les répercussions environnementales des projets financés sont encore jugées insuffisantes pour répondre aux exigences des investisseurs et favoriser un développement à très grande échelle de ce mode de financement. Les travaux sont en cours. Il s’agit, pour les fonds d’investissement, de développer des cadres d’évaluation appropriés ou de faire évoluer les méthodes de l’ISR, adaptées aux investissements boursiers (évaluation des entreprises), vers les besoins des évaluations de projets. Il est question également pour les émetteurs de développer des outils de déclaration sur les impacts des projets. P o i n t s d e r e p è r e Encadré 20. Les obligations vertes d’EDF 120 En 2013, Électricité de France (EDF) a levé 1,4 milliard d’euros, principa lement auprès d’investisseurs (60 %) intégrant des critères environnemen taux, sociaux et de gouvernance. Ce budget servira à financer des projets d’énergies renouvelables (75 % d’éolien et 25 % de solaire) mis en place par sa filiale EDF Énergies nouvelles. Ces projets devront cependant être conformes à une grille, définie par l’agence de notation extrafinancière Vigeo, qui couvrira leurs dimensions environnementales, sociales et sociétales. En outre, le cabinet Deloitte certifiera chaque année le respect des engagements environnementaux d’EDF. Enfin, le groupe mettra en place une traçabilité spécifique pour chaque projet, afin que les investisseurs puissent suivre la destination de leur investissement. 61.Le Monde (2014). 62.CDC Climat et Caisse des dépôts (2012a). 63.FEDENE (2011). 64.Le Guen et Briard (2012). d e P o i n t s 3.4.2.2 Le renouveau prometteur des sociétés de services énergétiques En règle générale, le montant des investissements initiaux nécessaires pour aller dans le sens de la transition énergétique (par exemple la rénovation énergétique des bâtiments, la production d’énergie renouvelable ou la cogénération) est très important. La rentabilité de ces investissements est réelle, mais la barrière à l’entrée est élevée, et le rendement du capital investi s’étale souvent sur un temps assez long. En termes financiers, cela signifie des risques faibles, mais un taux de rendement modéré. Or le système financier a majoritairement orienté son activité vers des produits de court terme, risqués et à forte rentabilité, souvent présentés comme étant plus attrayants, mais incapables de subvenir au financement de projets répondant à des objectifs de développement durable. C’est en quelque sorte en réaction à ce contexte que l’on assiste à l’émergence de sociétés de services énergétiques (SSE) proposant des solutions de financement sous forme de contrats de performance énergétique. En Europe, le contrat de performance énergétique (CPE) est défini comme suit dans la directive européenne 2006/32/CE du 5 avril 2006 relative aux services énergétiques : « Un accord contractuel entre le bénéficiaire et le fournisseur (normalement une société de services énergétiques) d’une mesure visant à améliorer l’efficacité énergétique, selon lequel des investissements dans cette mesure sont consentis afin de parvenir à un niveau d’amélioration de l’efficacité énergétique qui est contractuellement défini » Les CPE constituent un mécanisme dans lequel une SSE investit dans la rénovation énergétique (isolation et amélioration du système de chauffage), garantit la performance énergétique après rénovation et se rémunère par les économies d’énergie générées63. Ce type de contrat a l’avantage de garantir des résultats de performance et d’éviter à l’utilisateur final de supporter le coût de l’investissement initial. Ce marché, bien qu’encore embryonnaire, est en plein développement dans les pays émergents comme la Chine, l’Inde ou le Brésil. La Banque mondiale a mis en avant le potentiel très important de réduction des consommations réalisée par ces SSE, notamment en Chine. Afin d’asseoir ces pratiques, il convient de mutualiser les sources de financement de l’efficacité énergétique dans un fonds de type « super-SSE » pour mettre à la disposition de l’ensemble des opérateurs économiques, à l’échelle régionale, nationale ou internationale, un accès au financement équitable et facilité, pour que la concurrence repose sur les gains énergétiques réels et vérifiables. La mise en place d’un tel organe de financement permettrait donc de transférer les risques associés à la mise en œuvre des services énergétiques et ainsi de supprimer les barrières au développement du marché des SSE. En Belgique, par exemple, la société anonyme de droit public Fedesco a permis de réaliser plus de 150 millions d’euros d’économies nettes entre 2008 et 2012, soit 22 % d’économies d’énergies sur l’ensemble traité64. r e p è r e Les acteurs de la transition énergétique 121 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 3.4.2.3 Le choix des partenariats public-privé Le partenariat public-privé (PPP) est un mode de financement par lequel une autorité publique fait appel à des prestataires privés pour financer et gérer un équipement assurant un service public ou contribuant à sa mise en œuvre. Le partenaire privé reçoit en contrepartie une rémunération du partenaire public ou une redevance des usagers du service qu’il gère. Dans le cadre de la transition énergétique, l’intérêt du PPP est qu’il mobilise de larges ressources financières vers le financement de projets d’efficacité énergétique, la demande de financement privé générant un effet de levier sur les investissements publics. Un certain nombre d’avantages généraux pertinents face aux projets d’efficacité énergétique sont reconnus. Le PPP permet le partage des risques entre acteurs publics et privés, chacun prenant à sa charge ceux qu’il peut soit maîtriser le plus efficacement, soit absorber ou diversifier à moindre coût. Le partenaire public est ainsi en mesure de se couvrir contre les risques de dérive des prix et des délais, qui constituent deux des principaux coûts cachés de l’acquisition publique traditionnelle. De plus, la globalité du contrat, qui couvre généralement l’ensemble de la vie économique de l’actif, conduit à passer d’une logique de minimisation du coût d’acquisition à une maîtrise du coût global de possession de l’actif. Ainsi, le contractant privé n’est plus incité à réduire la qualité de la construction pour augmenter ses marges, dans la mesure où cela pourrait se traduire par un dérapage de ses coûts d’exploitation. Bien que des critiques se manifestent autour du montant, de l’opacité et de la rigidité de ces contrats, les PPP réunissent tout de même les avantages de l’investissement public et de l’investissement privé65. Des partenariats public-privé locaux bien « ficelés » peuvent ainsi émerger et jouer un rôle décisif dans la transition énergétique des territoires urbains, qui nécessite des investissements massifs en infrastructures collectives. Dans le secteur privé, la transition énergétique ne pourra s’effectuer avec succès que parallèlement au développement de nouveaux modèles économiques, dans lesquels les acteurs devront considérer dans leurs décisions les questions environnementales et sociales à long terme et non plus uniquement la rentabilité financière à court terme. Les concepts d’« économie verte », d’« économie sociale et solidaire » et d’« économie c irculaire » intègrent ces questions et font partie des réflexions en cours. P o i n t s d e r e p è r e 3.4.3 Les nouveaux modèles d’économie durable 122 65.Bensaïd et Marty (2013). 66.PNUE (2011). 67.Pouffary (2013a). 68.Quéfélec et Allal (2013). 69.Pouffary (2013a). P o i n t s d e 3.4.3.1 L’émergence controversée de l’économie verte Le concept d’économie verte fut lancé en 2008 par le PNUE, dans le cadre de la Green Economy Initiative. Il y est présenté comme une nouvelle approche revisitant les modèles économiques traditionnels et entraînant « une amélioration du bien-être humain et de l’équité sociale tout en réduisant de manière significative les risques environnementaux et la pénurie de ressources66 ». Les trois éléments clés du concept sont le faible taux d’émissions de carbone, l’utilisation rationnelle des ressources et l’inclusion sociale. Dans cette vision, l’innovation est vue comme une réponse à fort potentiel face aux transitions par lesquelles nos sociétés doivent passer pour acquérir un caractère plus durable. En tant que porteurs de cette innovation, les entreprises sont les moteurs naturels de l’économie verte. Cette dernière suit la même logique que celle de la RSE, abordée précédemment, tout en allant plus loin sur le lien entre la mise en œuvre des objectifs du développement durable, la performance des entreprises et le développement des sociétés67. L’économie verte ne s’oppose donc pas au concept du développement durable et ne le remplace pas ; elle le renforce. En effet, de nombreux experts reconnaissent que la réalisation du développement durable dépend en grande partie d’une bonne approche économique. L’économie verte répond ainsi à l’enjeu central de conciliation entre le court terme et le long terme, et de correction des politiques économiques engagées depuis les années 1980. En effet, celles-ci s’inscrivent majoritairement à court et moyen terme, alors que la crise écologique et du modèle de développement s’inscrit dans le long terme68. Au-delà de ses objectifs courants bien compris, le concept est d’autant plus séduisant qu’il promeut la création d’emplois, la croissance et l’investissement tout en préservant les ressources naturelles et la planète. Ainsi, la croissance verte est aussi vue comme une option pour la relance économique. Comme tout nouveau paradigme, les visions et les modes organisationnels à mettre en œuvre sont pluriels, et il n’y a aucune certitude sur le « bon modèle » à privilégier69. Le concept se heurte en particulier à une appropriation fragmentée et contradictoire (reflétant notamment des remises en cause différenciées du système économique mondial), car il fait référence à des perceptions, à des définitions et à des attentes différentes quant aux modalités de sa mise en œuvre, selon que l’on se place dans un pays en développement, un pays industrialisé ou une économie en transition. r e p è r e Les acteurs de la transition énergétique 123 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Selon la vision du PNUE par exemple, l’économie verte doit tout d’abord reconnaître la valeur du capital naturel et l’intérêt pour le secteur privé d’y investir70. L’invisibilité économique des « services environnementaux » rendus, par exemple, par les forêts ou les lacs a entraîné jusqu’ici leur sous-évaluation et donc leur mauvaise gestion. Selon le PNUE, l’élargissement des biens et services économiques de valeur favorisera donc la mise en place d’un développement durable. Par exemple, il s’avère que le ralentissement de la déforestation et l’augmentation du reboisement se justifient d’un point de vue économique, car le bien-être de l’humanité dépend des forêts. En outre, l’économie verte doit contribuer à faire comprendre aux acteurs économiques que la lutte contre la pauvreté est également nécessaire pour la préservation de l’environnement et qu’elle ouvre des perspectives de débouchés économiques. Enfin, elle facilite la création d’emplois par la relance de l’industrie verte : mise en œuvre des nouvelles technologies vertes, installation d’équipements utilisant de l’énergie renouvelable et des matériaux efficaces énergétiquement. La gestion plus écologique de l’ensemble des secteurs économiques clés tirerait avantage des synergies et favoriserait la croissance à long terme en atténuant les risques de pénuries71. Outre la littérature considérable sur le sujet diffusée par les grands organismes internationaux (PNUE, OCDE, UE, etc.), de nombreuses organisations élaborent des stratégies en matière d’économie et de croissance vertes. Malgré cela, du fait de son absence de structure et de cadre explicite, des doutes subsistent quant au bien-fondé du concept et de sa mise en œuvre. De nombreux observateurs craignent notamment qu’il ne serve que les besoins d’une nouvelle phase de croissance économique déconnectée des crises environnementales, climatiques, financières, économiques et sociales, et qui resterait inaccessible aux populations et aux États les plus pauvres72. Par ailleurs, l’absence de propositions concrètes sur un mode de vie plus sobre pour les populations aisées et sur l’accès aux services élémentaires pour les populations défavorisées renforce l’incompréhension de l’économie verte et ne contribue pas à asseoir sa légitimité. Ainsi, au-delà de la définition du concept, la question cruciale reste de savoir comment passer de la croissance (tout court) à la croissance verte, et quel contenu donner à cette dernière73. 124 70.PNUE (2011). 71.PNUE (2011). 72.Pouffary (2013a). 73.Quéfélec et Allal (2013). 74.AFD et ARENE (2013). P o i n t s d e 3.4.3.2 L’importance majeure mais souterraine de l’économie sociale et solidaire L’économie sociale et solidaire (ESS) associe au développement économique une finalité sociale et sociétale. Portée par un large champ d’acteurs tels que les associations, les coopératives, les fondations et les mutuelles, elle se décline dans de nombreux domaines : microfinance, commerce équitable, tourisme solidaire, etc. Toutes ces initiatives se basent sur l’innovation sociale, les logiques participatives de fonctionnement et un fort ancrage au territoire, tout en acceptant des rentabilités économiques inférieures. L’ESS regroupe donc les concepts d’économie sociale – qui se donne pour objectif de faire vivre des initiatives économiques et sociales fondées sur des principes autres que la rentabilité et la rémunération du capital – et d’économie solidaire – qui, dans un contexte de crise économique, cherche à répondre aux besoins élémentaires des individus aux limites des politiques traditionnelles, en proposant de nouveaux moyens de production et de distribution74. En défendant des valeurs de solidarité et en englobant des initiatives aussi variées que les circuits courts d’approvisionnement, la mobilité alternative, le traitement des déchets, la lutte contre la précarité énergétique, etc., les acteurs de l’économie sociale et solidaire innovent et dupliquent les pratiques responsables auprès des populations ; ils se retrouvent naturellement dans les filières liées à la protection de l’environnement et à la transition énergétique. De nombreuses collectivités territoriales coopèrent aujourd’hui avec des acteurs de l’ESS pour mettre en place des politiques de développement adaptées à leur environnement. L’influence de l’ESS sur le social et l’économique est donc énorme, bien qu’elle soit dissimulée par la diversité et le foisonnement peu clair de ses actions. La RSE, abordée plus haut, s’appuie sur la dynamique de l’ESS. Des traits caractéristiques de l’ESS peuvent ainsi être identifiés dans les exigences de la RSE. Le fait que cette dernière soit actuellement sous les projecteurs politico-médiatiques tend à effacer les réalisations de l’ESS, tout en stimulant sa régénération (par le transfert de méthodes et d’outils). Et bien qu’ESS et RSE ne soient ni de même nature, ni de même échelle – la RSE est un ensemble de démarches que mènent certaines entreprises (particulièrement les grandes firmes à caractère transnational) et l’ESS est un ensemble d’organisations ancrées à l’échelon local dont la taille correspond plus souvent à celle d’une PME –, certaines similitudes peuvent être observées : comportement éthique et transparent, attachement au développement durable, bien-être des employés, etc. r e p è r e Les acteurs de la transition énergétique 125 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 21. L’initiative ethiCarbon Afrique®, pour une Afrique en transition énergétique, résiliente et solidaire P o i n t s d e r e p è r e Logo de l’initiative ethiCarbon Afrique® 126 L’Afrique possède un véritable trésor de ressources naturelles et humaines, notamment dans le domaine de l’énergie. Pour autant, le continent reste confronté à une pauvreté énergétique caractérisée notamment par un accès inégal, des coupures fréquentes de courant ou d’approvisionnement et un prix de l’énergie beaucoup trop cher (parfois le plus cher au monde !) au regard du niveau de vie des populations. Face à ce constat, les fondateurs de l’association ENERGIES 2050 et de la Société africaine des biocarburants et des énergies renouvelables (SABER-ABREC), actifs dans les domaines des énergies renouvelables et de la transition énergétique depuis des décennies, ont créé ethiCarbon Afrique®. Alors que les conséquences des changements climatiques s’annoncent potentiellement catastrophiques, notamment dans les pays africains, qui y sont très vulnérables, cette initiative a pour mission de contribuer à une véritable révolution énergétique africaine, basée sur les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique et l’accès de tous à l’énergie. Comparativement aux initiatives existantes « de compensation carbone », ethiCarbon Afrique® a pour particularité de ne pas viser uniquement la réduction des émissions de GES, mais de donner autant d’importance aux actions d’adaptation et de solidarité, tout en s’intéressant à l’implication sociétale de l’ensemble des acteurs à long terme. Le fonctionnement d’ethiCarbon Afrique® Le point d’entrée de l’initiative est un outil qui se présente sous la forme d’un calculateur. L’utilisateur choisit tout d’abord le type d’activité pour laquelle il veut calculer les émissions correspondantes. Le citoyen peut, par exemple, s’intéresser aux GES émis par sa maison ou son appartement, ou aux émissions produites par ses dernières vacances à l’étranger. Un Les acteurs de la transition énergétique Figure 51. Visuel du calculateur ethiCarbon Afrique® Source : ENERGIES 2050. d e Des projets d’adaptation et d’atténuation financés en Afrique L’initiative fonctionne en deux temps. Pour proposer aux utilisateurs des tonnes de carbone certifiées selon des méthodologies reconnues, les partenaires-fondateurs d’ethiCarbon Afrique® collaborent avec Ecosur Afrique (Aera Group), qui dispose du record de projets crédits carbone enregistrés sur le continent africain. Parmi ceux-ci, les premiers P o i n t s Le public cible et le mode d’action Les tonnes de carbone mises en vente par l’entremise d’ethiCarbon Afrique® sont certifiées et peuvent être utilisées aussi bien par des citoyens et entreprises ordinaires, dans le cadre d’une démarche éthique, que par des organisations ayant des obligations légales de réduction de leurs émissions de GES. L’approche d’ethiCarbon® s’appuie sur la notion d’« unité carbone dématérialisée », qui donne une valeur modulable au carbone au regard de sa performance économique, sociale, environnementale et éthique. Elle propose à chacun d’avoir une démarche solidaire basée sur une mesure de l’empreinte carbone d’une activité au plus près de la réalité du quotidien de chaque utilisateur. Le prix fixé est un prix « éthique et solidaire » (actuellement de 50 €/t), qui est volontairement différent des prix observés sur les marchés carbone réglementés pour permettre de financer des projets concrets d’adaptation et d’atténuation. r e p è r e professionnel peut calculer les émissions associées à un événement qu’il a organisé ou à un déplacement d’affaires ; un hôtelier, la quantité des émissions de son établissement par an ou par nuitée. Après avoir évalué ses émissions grâce au calculateur, qui lui propose un calcul détaillé ou simplifié, l’utilisateur est invité à réduire ses émissions de GES et à faire un don correspondant à ses émissions (ou d’un montant de son choix) pour soutenir la mise en place de projets concrets en Afrique. 127 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e projets choisis pour l’initiative ethiCarbon Afrique®, qui l’alimentent en tonnes de CO2 certifiées, sont : • une petite installation d’hydroélectricité « au fil de l’eau », à Madagascar ; • une centrale solaire photovoltaïque, à l’île Maurice ; • un système de traitement des effluents d’une distillerie de canne à sucre, en Ouganda. L’argent collecté par l’entremise de l’initiative est ensuite utilisé à parts égales pour la mise en œuvre de projets d’atténuation et d’adaptation. Il s’agit notamment de projets d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique, d’adaptation et d’action sociale à l’attention des populations vulnérables et en particulier des femmes, mis en œuvre sur le continent africain et sélectionnés par le conseil d’administration de l’initiative ethiCarbon Afrique®. 128 Une transparence et une garantie en matière d’utilisation des dons L’ensemble du dispositif s’appuie sur les principales méthodologies carbones des marchés des obligés, méthodologies sous couvert de la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC) et du marché volontaire (VCS Verified Carbon Standard, Gold Standard). Il s’agit de méthodologies qui, sur le fonds et sur la forme, sont transparentes, reconnues au niveau international et indépendantes de la SABER-ABREC ou d’ENERGIES 2050. Cette transparence a pour vocation d’éviter tout possible double comptage et toute possible suspicion. La chaîne est vertueuse et respecte les règles les plus strictes d’audit. Au-delà des frais de fonctionnement de l’initiative, les fonds seront intégralement utilisés à parts égales pour la mise en œuvre de projets concrets et mesurables d’atténuation et d’adaptation, dans un esprit permanent de solidarité. L’initiative ethiCarbon Afrique® dispose d’un conseil de gouvernance qui est le garant des objectifs de l’initiative, de la transparence des méthodologies utilisées et de la réalité des projets d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique et de solidarité carbone réalisés. Les membres sont des personnalités africaines et internationales connues et reconnues notamment pour leurs messages éthiques. L’initiative a été officiellement lancée à l’occasion de la Conférence de Paris sur le climat (CdP 21). Pour plus de détails, on pourra consulter le site http://ethicarbon-afrique. org/projets/. d e 75.ADEME, novembre 2014. L’économie circulaire dans votre région ? Comprendre pour décider. [En ligne] http://www.ademe.fr/sites/default/files/assets/documents/ economie-circulaire-dans-votre-region-comprendre-pour-decider-8359.pdf, consulté en février 2016. r e p è r e 3.4.3.3 Les promesses de l’économie circulaire L’économie circulaire s’oppose au modèle linéaire hérité de la révolution industrielle en mettant en avant le fait que ce modèle basé sur l’exploitation de ressources fossiles limitées ne convient plus au monde actuel. L’économie circulaire propose ainsi de passer d’une économie linéaire à un modèle en boucle s’inspirant des fonctionnements écosystémiques, en s’appuyant sur un ensemble coordonné d’outils anciens et innovants. Sa mise en pratique repose sur des interactions entre un grand nombre d’acteurs (voir la partie 4.4). En France, le projet de loi no 2014-344 du 17 mars 2014 relatif à la consommation propose, dans son article 20, une définition de l’économie circulaire : « Le développement de l’économie circulaire s’inscrit dans une vision de long terme, fondée sur une convergence entre les enjeux environnementaux, sociaux et écono miques. Il se base sur une logique de proximité, et donne toute leur place aux initiatives des territoires. Il contribue à changer les modes de production et de consommation, et à réorienter la politique industrielle, en favorisant les activités et emplois locaux et pérennes. Il est fondé sur l’information et la participation du public et de l’ensemble des parties prenantes. » L’économie circulaire s’appuie sur des outils développés au cours de la décennie 1990 : écoconception, écologie industrielle, économie de fonctionnalité, consommation responsable. Elle s’appuie également sur le recyclage, le réemploi, la réparation et la réutilisation et les actualise en proposant la mise en place de boucles courtes avec implication d’un acteur industriel dans le secteur du déchet. Ces éléments forment les sept piliers de l’économie circulaire tels que les définit l’ADEME75. L’aspect relativement récent du concept implique qu’il n’est pas réellement structuré et déployé à grande échelle. Les démarches restent donc assez isolées pour le moment. Dans tous les cas, les entreprises constituent l’un des maillons indispensables de l’évolution de l’économie vers la circularité. Il est donc nécessaire de s’interroger sur la dimension opérationnelle de l’économie circulaire et de présenter des outils et des mesures qu’elle pourrait mettre en place pour œuvrer dans ce sens. Même si le basculement de la linéarité vers la circularité constitue un défi de taille pour les entreprises du fait des nombreux changements organisationnels et de tous les types d’investissement que cela implique, nombre d’entre elles, sensibilisées aux questions environnementales, mettent en place des pratiques circulaires en actionnant trois leviers majeurs : • la mise en œuvre d’un processus organisationnel transversal favorisant la coordination des acteurs concernés, afin de dépasser la linéarité héritée de l’organisation ; P o i n t s Les acteurs de la transition énergétique 129 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 52. Schéma de l’économie circulaire • la montée en compétence des acteurs, du fait de la transformation des métiers induite par des pratiques d’économie circulaire ; • la dotation d’outils spécifiques en amont (analyses du cycle de vie) et en aval (mesures d’efficacité des dispositifs) des démarches entreprises. Même si ces mesures restent isolées et prennent essentiellement la forme d’initiatives volontaires, la Commission européenne estime que des améliorations sur l’efficacité des ressources tout au long de la chaîne de valeur pourraient réduire la demande en ressources de 17 à 24 % pour 2030 et que le PIB pourrait croître de 3,9 % grâce aux nouveaux marchés et aux nouveaux produits créés. De son côté, le rapport de la Fondation Ellen MacArthur chiffre l’économie nette annuelle de dépenses de matériaux associée à l’économie circulaire entre 340 et 380 milliards de dollars au niveau européen pour un scénario de transition, et de 520 à 630 milliards par an pour un scénario avancé ; la Commission européenne chiffre également à 580 000 le nombre d’emplois créés grâce à la réalisation des nouveaux objectifs relatifs aux déchets76. P o i n t s d e r e p è r e Source : Institut de l’économie circulaire (2013). 130 76.Institut de l’économie circulaire (2014). Les acteurs de la transition énergétique d e P o i n t s Les quelques initiatives ci-dessous illustrent la diversité des actions et approches possibles en matière d’économie circulaire. Cette dernière n’est pas structurée, mais elle s’organise autour de l’idée centrale de la préservation et de la réutilisation de la ressource. EDF améliore sa performance en termes de valorisation des déchets industriels avec un taux de valorisation de près de 90 %. Cette démarche est en partie motivée par des raisons financières, sachant que la valorisation économique permet de dégager environ 20 millions d’euros de revenus et justifie donc la mise en place de processus de collecte, de tri et de recherche de filières de valorisation. Le groupe Casino promeut l’écoconception auprès de ses fournisseurs et le tri des déchets auprès de ses consommateurs. Le groupe participe donc à la réduction des déchets des ménages et à l’augmentation du recyclage matière. L’optimisation matière pour l’emballage (écoconception) et la manutention s’est traduite par des économies de 30 % en consommation de matière et en CO2 transport. Le promoteur immobilier Nacarat a mis en place un dispositif de formation continue à l’écoconstruction pour ses salariés et une formation spécialisée à destination des acheteurs, afin d’adapter leurs compétences à l’apparition des biomatériaux et de l’écoconstruction. L’impératif de formation est aussi intégré dans les cahiers des charges des compétences requises des fournisseurs, afin de participer à l’orientation du secteur vers l’écoconstruction. Eurovia est l’un des leaders français du secteur du bâtiment et des travaux publics dans le domaine du recyclage des déchets inertes. Ainsi, il conçoit et met en œuvre des solutions techniques pour transformer ces déchets en granulats recyclés et les insérer dans un nouveau cycle de production. Lafarge Ciment a lancé dans les années 1970 une démarche d’écologie industrielle afin de substituer aux combustibles fossiles des ressources renouvelables ou issues de déchets. r e p è r e Encadré 22. Quelques initiatives isolées de circularité en France 131 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 3.5 L’implication citoyenne dans la transition Dans nos sociétés contemporaines et en particulier occidentales, le fait de pouvoir consommer toujours plus est souvent considéré comme un objectif à part entière. Dans un contexte de changement climatique, de précarité énergétique et d’inégalité d’accès à l’énergie, les comportements énergétiques, très peu encadrés, deviennent souvent irrationnels. Cela dit, les réponses à apporter sont complexes, car les acteurs ciblés, leurs objectifs et leurs leviers d’action sont différents (écarts sociaux, politiques et économiques entre populations du Nord et du Sud, par exemple). Pour ajouter encore à cette complexité, les compétences à mobiliser font également appel à des acteurs différents, agissant sur des secteurs et des territoires toujours plus spécifiques, mais interdépendants. Les réponses sont bien souvent parcellaires, voire parfois contradictoires avec l’objectif général recherché. Les systèmes politiques et économiques se heurtant à des difficultés majeures dans leurs objectifs de réduction de la consommation énergétique, il devient nécessaire de se tourner vers le citoyen, le consommateur final. En mettant en avant la notion d’éco citoyen, il s’agit de faire émerger son pouvoir réel en lui donnant la possibilité de se réapproprier la question énergétique et de se sentir acteur à la fois dans l’élaboration en amont des grands choix structurants et dans la mise en œuvre des décisions qui s’ensuivent. La transition énergétique ne pourra se faire que si les citoyens sont informés et impliqués et s’ils en bénéficient. Il s’agit alors d’aborder la question énergétique en prenant en compte le citoyen-consommateur, dans sa diversité et sa complexité, et en s’appuyant aussi sur les pratiques et les modes d’organisation individuels et collectifs, les représentations sociales et les logiques comportementales qui sous-tendent l’usage de technologies ou de modes d’organisations énergivores. P o i n t s d e r e p è r e 3.5.1 La transition citoyenne : comprendre pour agir 132 À tous les échelons – international, national et local –, les modalités d’implication du citoyen répondent de la même logique. Par conséquent, l’avènement d’une réelle transition énergétique nécessitera de remettre collectivement en question des postulats établis et de proposer des solutions transparentes, adaptables et efficaces. La situation actuelle étant sans précédent dans l’histoire de l’humanité, les réponses ne sont pas à chercher dans les cercles restreints d’experts et de politiques habituels – tant le risque est grand de voir les options traditionnelles à court terme privilégiées – mais plutôt dans les cercles plus larges d’une société civile impliquée dont les composantes sont bien souvent des experts de leur territoire de vie77. 3.5.1.1 De la nécessité d’une gouvernance énergétique citoyenne La nouvelle gouvernance énergétique à mettre en œuvre doit permettre au citoyen de se réapproprier la question de l’énergie et de devenir acteur de la transition énergétique. 77.Pouffary (2013a). Les acteurs de la transition énergétique Cette démarche menant vers un dialogue social novateur autour d’un projet durable collectif (par exemple le Plan Climat Énergie territorial – PCET) se révèle dès lors une nécessité. Cette gouvernance doit bien entendu se replacer dans son contexte (le développement économique et social, l’emploi, la question des ressources naturelles, la protection de l’environnement, l’agriculture et nos modes alimentaires, les impacts sur la santé, le bâtiment, les modes de transports, l’urbanisation, les modes de consommation) afin d’être en mesure de dégager des pistes pertinentes. De même, la nouvelle gouvernance énergétique ne peut avoir de sens que si elle prend en compte la diversité des cultures, des identités et des manières de vivre et de concevoir les espaces de vie. Ce n’est qu’en ayant conscience de cette diversité, donc de la pluralité des solutions à mettre en œuvre, que l’on pourra parvenir à relever les défis de nos sociétés. Par exemple, un débat sur l’énergie organisé dans différents lieux du monde et à plusieurs échelons (local, régional, national) pourrait être l’occasion d’échanges concrets sur les solutions possibles. Ce débat serait le pendant des grandes conférences internationales plus complexes, débattant d’enjeux mondiaux et menant à des résultats globaux. Ces deux types de réunions complémentaires se nourriraient l’un de l’autre afin de faire émerger des solutions pertinentes provenant notamment d’une société civile renforcée et impliquée. Pour répondre à cette idée, quelques initiatives émergentes sont porteuses d’espoir. Parmi celles-ci, on peut citer l’initiative Agite Ta Terre d’ENERGIES 2050 (encadré 23). d e P o i n t s L’objectif de cette initiative est de comprendre et partager l’état des connaissances et de la mobilisation des citoyens du monde sur une thématique similaire. En effet, même si les problématiques restent les mêmes quel que soit le pays dans lequel nous vivons, les réponses s’inscrivent dans nos expériences locales ; selon que l’on vit dans un pays industrialisé, en développement ou en transition, les leviers d’actions sont sensiblement différents. Agite Ta Terre entend contribuer à témoigner de cette diversité tout en invitant chaque citoyen, dans son territoire de vie, à se mobiliser en fonction de ses moyens. Il s’agit aussi de lui donner l’envie d’agir en tant que préalable indispensable à toute construction collective. r e p è r e Encadré 23. L’exemple de l’initiative Agite Ta Terre d’ENERGIES 2050 133 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 134 Lancée par l’association ENERGIES 2050 en 2012, l’initiative Agite Ta Terre – Shake Your Earth est une journée annuelle mondiale d’information et d’échanges sur les enjeux du développement durable, du changement climatique et de la protection de l’environnement, à l’intention du grand public, des professionnels, des décideurs politiques et de l’ensemble des personnes concernées par ces thématiques. La première édition, qui s’est déroulée le 8 juin 2012, a rassemblé des ONG dans sept pays (le Bénin, le Burkina Faso, le Cameroun, la France, Madagascar, le Niger, la République démocratique du Congo et le Togo) autour du thème « Le développement durable : Pourquoi ? Comment ? Mon métier et moi dans 20 ans ». Il s’agissait alors d’inviter chaque participant à se projeter dans les 20 prochaines années dans son développement personnel et professionnel, tout en prenant en compte les enjeux et les défis auxquels sont confrontées nos sociétés et notre planète. Cet exercice étant résolument inscrit dans l’échelon local, chacun a été invité à prendre en compte les possibilités d’action, qu’il s’agisse des nouveaux métiers, de la gestion efficace des ressources naturelles ou de la mise en œuvre d’une société durable, juste et solidaire, porteuse de prospérité pour tous. Les différentes associations partenaires ont pu bénéficier de la visibilité apportée par la dynamique internationale pour inviter chaque participant à déborder le cadre de ses simples préoccupations. Des échanges se sont mis en place entre des personnes qui ne se seraient probablement jamais parlé sans l’initiative Agite Ta Terre – Shake Your Earth. Depuis cette première manifestation en 2012, trois autres éditions ont eu lieu. La deuxième édition a eu lieu le 28 juin 2013 sur le thème « Transition énergétique : Pour qui ? Pourquoi ? Comment ? Et moi ? » La troisième édition, tenue le vendredi 20 juin 2014, avait pour thème « Le changement climatique, la solidarité et moi ». Ces journées de mobilisation rassemblent un nombre de partenaires de plus en plus important chaque année. Pour la quatrième édition, un concours citoyen international (vidéos, poèmes, dessins, égoportraits, photos) a été organisé sur le thème : « Mon climat aujourd’hui, mon climat dans 20 ans, et moi ? » Les meilleurs résultats ont été exposés dans les différents espaces de la CdP 21 à Paris. L’initiative a obtenu le label « COP21 ». Les acteurs de la transition énergétique Figure 53. Affiches des éditions 2012, 2013 et 2014 d’Agite Ta Terre Source : ENERGIES 2050. Source : ENERGIES 2050. P o i n t s d e r e p è r e Figure 54. Affiche du concours international Agite Ta Terre 2015 135 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 136 3.5.1.2 Favoriser la diffusion de l’information et la compréhension des enjeux de la transition énergétique L’engagement du citoyen n’est cependant pas encore acquis. Trop de facteurs viennent encore parasiter la transparence et la fiabilité de l’information ainsi que l’envie d’agir. En outre, au-delà de la diffusion de l’information, l’individu doit tout d’abord effectuer un travail sur lui-même pour changer sa propre vision des choses : il doit passer du consommateur (non) responsable au consommateur acteur-responsable ayant une multitude de rôles à combiner : usager, expert, profane, autoproducteur d’énergie, investisseur solidaire, etc. Parallèlement à un changement d’état d’esprit du citoyen, l’information doit illustrer des voies possibles sans pour autant chercher et viser des coupables qui devraient alors porter entièrement la responsabilité de l’état du monde et qui auraient finalement pour effet de court-circuiter la recherche collective de solutions : c’est le principe de la responsabilité commune, mais différenciée78. Le renforcement des capacités et le débat doivent être décentralisés, s’adapter aux territoires où ils prennent place et, finalement, mener à des réponses locales. Dans le contexte particulier de la transition énergétique et du changement climatique, les solutions locales bénéficient au global (ex. : un parc éolien implanté dans un village togolais fournit de l’énergie aux habitants de ce village, mais contribue également à réduire les émissions de GES mondiales et donc à lutter contre le réchauffement climatique). Les associations locales et les ONG (mais aussi les fondations et tout le secteur de l’économie sociale et solidaire) sont des acteurs appropriés pour relayer l’information, car ils travaillent avec les populations locales et au plus près de leurs problématiques quotidiennes. Les citoyens informés et impliqués sont ensuite mieux à même de valoriser leurs arguments et d’échanger avec leurs politiques sur des pistes d’actions éventuelles à mettre en œuvre. En outre, d’autres associations ont les compétences nécessaires pour produire (collectivement avec des membres, qu’ils soient citoyens avertis, scientifiques, experts ou techniciens) et diffuser de l’information, notamment sur des scénarios énergétiques de substitution et des documents pertinents et opérationnels. Il faut souligner que même si leur légitimité est parfois contestable (car elles n’incluent pas forcément tous les citoyens de la région qu’elles prétendent représenter), ces démarches sont nécessaires au sens où elles sont en mesure d’agir au plus près des problématiques locales79. La compréhension des enjeux liés à la transition énergétique et des réponses à y apporter passe aussi par l’élaboration d’un langage et d’une feuille de route énergétique communs (en gardant à l’esprit que les objectifs ne seront évidemment pas les mêmes pour tous). Ce n’est pas chose simple que d’arriver à cette réalité, mais cette voie facilite nécessairement la mise en place de mesures adaptées. Le changement de paradigme doit partir d’un débat transparent et factuel sur l’énergie, organisé de façon participative avec 78.Kenfack (2013). 79.Pouffary (2013a). Les acteurs de la transition énergétique des décisions lisibles et compréhensibles par tous. Le respect de cette condition sine qua non est le premier pas pour arriver à un consensus sur la question énergétique (consensus qui, bien entendu, va de pair avec une décision non pas uniformisée, mais plutôt adaptée aux réalités de chaque territoire). Il s’agit en fait de « créer les conditions de passage d’une situation caractérisée par une divergence d’intérêts vers une situation de convergence d’intérêts80 ». Dans un second temps, il s’agit de réaffirmer l’importance de la concertation afin que le citoyen redonne sa confiance aux instances de pouvoir. Aujourd’hui, la notion de concertation est en effet largement galvaudée : les décisions se prennent rarement de manière collective, à l’issue d’un processus de concertation ; même alors, elles ne sont pas toujours mises en application. Par ailleurs, on observe bien souvent que chaque nouveau débat n’apporte que peu d’informations supplémentaires ; à la longue, cette stagnation risque de lasser le citoyen. Or, pour s’appuyer sur les précédentes avancées, il faudrait que les conditions d’un débat progressif, transparent, factuel, historique, économique, social et environnemental soient mises en place. La confiance est un préalable indispensable à l’action, mais il faut pour cela, au minimum, une vision commune de l’objectif à atteindre. Le citoyen n’est pas irresponsable ; sans être un expert, il peut comprendre intuitivement – à plus forte raison s’il est informé efficacement – les choix à faire et les changements à apporter dans ses modes de consommation. Pour conclure, la transition énergétique nécessite une rupture dans nos modes de consommation actuels : elle ne peut s’opérer sans un profond changement de comportement des citoyens. La citoyenneté énergétique est et sera le moteur de cette transition. Si elle s’organise, elle a la capacité de développer des projets en mesure d’œuvrer dans le sens de la transition énergétique. 80.Kenfack (2013). 81.Énergie partagée (s.d. a). d e P o i n t s Le projet citoyen est porté par un collectif d’acteurs (citoyens, collectivités locales, acteurs de l’économie sociale et solidaire) servant l’intérêt général. Ce collectif se rassemble et définit collégialement les principes et règles qui régiront le projet pour tendre vers le meilleur bilan énergétique possible, dans un souci de respect de l’environnement et des populations, tout en portant un intérêt aux retombées économiques locales. Tout citoyen peut s’impliquer dans cette société et participer à sa gouvernance ou, simplement, au financement du projet. Selon l’initiative française Énergie partagée, qui vise la réappropriation et la gestion citoyennes des modes de production et de consommation de l’énergie, plusieurs raisons conduisent à démarrer un projet citoyen81 : • « Produire localement et consommer sa propre énergie. r e p è r e 3.5.2 L’importance des projets citoyens 137 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e • Impliquer chacun dans la transition et faciliter la compréhension des enjeux. • Mobiliser l’épargne locale pour un développement local et des intermédiaires financiers. • Partager collectivement les bénéfices d’une ressource commune appartenant à tous. • Maîtriser localement et de façon démocratique les décisions en faveur de l’intérêt collectif local. » 138 3.5.2.1 Les avantages des projets citoyens Dans le secteur de l’énergie, les projets citoyens peuvent recouvrir des réalités très variées : production, maîtrise de la demande, distribution et fourniture. Ensuite, les caractéristiques du projet sont liées au degré d’implication des citoyens dans sa gouvernance, son portage et son financement. Par exemple, tel projet implique-t-il seulement un transfert de l’épargne citoyenne vers des éléments spécifiques portés par des professionnels, ou favorise-t-il au contraire la gouvernance et l’initiative citoyenne pour un portage de sa mise en œuvre en coopérative ? Les projets citoyens proposent, face aux énormes besoins de financement de la transition énergétique, une solution de remplacement pour mobiliser l’épargne privée. Ces mécanismes participatifs ont un potentiel considérable (même s’ils ne couvrent pas tous les besoins) ; surtout, ils encouragent l’implication du citoyen. Ainsi, à l’échelle locale et dans le détail, ces mécanismes ont plusieurs avantages concrets : • À partir du moment où le citoyen participe au financement d’un projet et est associé au partage des bénéfices, son acceptabilité, sa mise en œuvre et son suivi sont assurés, car les participants ont un intérêt financier à la bonne marche des opérations. Cette répartition des bénéfices participe en outre au développement local du territoire, et les retombées économiques se répercutent sur l’économie locale. • La participation citoyenne dans le projet réduit les risques de recours, ce qui diminue les délais et les coûts liés à sa mise en place et, le cas échéant, à sa duplication. • De même, la participation responsabilise le citoyen vis-à-vis des enjeux énergétiques, ce qui peut induire un changement progressif de comportement. • Il faut enfin souligner que l’implication des citoyens dans la gestion du projet entraîne une montée en compétence locale, qui peut ensuite se traduire par une contribution affirmée à l’élaboration de documents de planification locaux (ex. : le PCET). Bien que les projets citoyens soient encore largement sous-exploités à l’échelle mondiale, quelques pays – notamment européens – en ont déjà une solide expérience et expérimentent des outils de financement particuliers. 3.5.2.2 Le financement des projets citoyens Le financement participatif et coopératif (crowdfunding) apparaît comme un mode de gouvernance ancien, ayant émergé au 19e siècle au sein des coopératives ouvrières. Les acteurs de la transition énergétique Transposé dans le contexte actuel, ce type de financement, du fait de son potentiel de réappropriation locale et citoyenne des enjeux énergétiques, est parfaitement adapté aux enjeux de la transition énergétique. Cependant, la problématique du financement des projets citoyens nécessite tout d’abord de répondre à deux questions complémentaires : Quelle est la part du financement propre ? Et s’il n’est pas suffisant, quelles sont les conditions d’accès à des financements externes ? Il est primordial de répondre à ces questions, du fait que les conditions et le coût de financement sont des éléments essentiels pour la viabilité économique des projets d’énergies renouvelables qui se caractérisent par un investissement initial très important et un délai de rentabilisation relativement long (de 10 à 20 ans). Figure 55. Exemple de montage financier d’un projet citoyen 82.Poize et Rüdinger (2014). d e P o i n t s Le financement participatif La participation financière des citoyens peut se faire de différentes façons82 : • l’actionnariat (achat d’une part du capital donnant accès à un droit de vote proportionnel) ; • l’achat d’obligations (financement de la dette) ; • l’achat de titres participatifs, par exemple dans les sociétés coopératives d’intérêt collectif : ce type de société permet une gouvernance démocratique (1 personne = 1 voix) ; • l’apport en compte courant d’associés pour les personnes déjà actionnaires (créance de l’associé faite à son entreprise, remboursable sur une durée et à un taux déterminés). r e p è r e Source : Énergie partagée (s.d. b). 139 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 24. Le financement citoyen en France P o i n t s d e r e p è r e En France, l’acquisition de titres financiers par le citoyen est encadrée par l’Autorité des marchés financiers (AMF). Seules certaines sociétés sont autorisées à recourir à l’offre au public de titres financiers (OPTF) ; elles doivent dans ce cas obtenir un visa de l’AMF. Cette procédure, longue et coûteuse, ne favorise pas l’implication des citoyens dans des projets participatifs. Face aux difficultés réglementaires, certains projets recherchent alors d’autres solutions. • La constitution de clubs d’investisseurs pour une gestion alternative et locale de l’épargne solidaire (Cigales), limités à 20 personnes physiques, permet de mobiliser du capital risque solidaire au service du développement de petites entreprises locales. Le club investit généralement sur une durée de cinq ans (renouvelable une fois) pour un montant plafonné. Étant donné que ce n’est pas sa vocation première, ce type de structure est cependant mal adapté au projet citoyen (court terme, nombre de personnes limité, etc.). • Pour collecter l’épargne citoyenne, Énergie partagée a créé un outil de financement (Énergie partagée Investissement) qui a obtenu l’auto risation de l’AMF et permet d’investir dans des projets d’économie d’énergie et de production d’énergie renouvelable. Cet outil innovant se base sur des études selon lesquelles l’épargne déposée sur un livret pollue davantage que son propriétaire, car elle est souvent investie dans des projets à haut rendement économique et à forte incidence sur l’environnement. 140 Le financement externe Dans la plupart des cas, l’accès au financement externe et notamment bancaire joue un rôle fondamental pour les projets d’énergies renouvelables, très intenses en capital. Ainsi, pour la plupart d’entre eux, le financement externe représente généralement entre 60 % et 80 % du financement total83. Or, dans la plupart des cas (sauf dans certains pays européens), les projets citoyens de production d’énergie renouvelable ne bénéficient d’aucune facilité particulière en termes d’accès aux prêts, du fait notamment du caractère nouveau de ce type de montage collectif et de la faible rentabilité des projets. Idéalement, les banques préféreront que le prêt soit garanti (par une collectivité par exemple), ce qui est rare sur ce type de projets. 83.Poize et Rüdinger (2014). Les acteurs de la transition énergétique d e 84.Poize et Rüdinger (2014). 85.Poize et Rüdinger (2014). 86.Poize et Rüdinger (2014). r e p è r e Le financement pour amorcer des projets Le développement d’un projet nécessite une phase préliminaire d’amorçage visant à définir s’il sera viable. Cette phase appelle certaines dépenses que peuvent se permettre des développeurs privés, contrairement aux participants d’un projet citoyen. Ensuite, lorsque la viabilité du projet est prouvée, il faut, lors des premières phases opérationnelles, être en mesure de faire face à des dépenses alors qu’aucune recette n’est encore perçue et que le capital de la société citoyenne n’est pas encore véritablement constitué. Afin de surmonter ces problématiques, il faut : • financer la phase de développement pour étudier la faisabilité d’un projet, car cette phase dite « à risque » fait obstacle à la mobilisation de l’épargne citoyenne ; • avancer en amont des dépenses dans la trésorerie, sous forme d’acomptes pour les différents intervenants85. Ces deux points doivent être couverts par les pouvoirs publics (essentiellement les collectivités locales) afin de renforcer la crédibilité du projet. Les avances remboursables peuvent être des prêts à taux faible (ou nul), au motif que les projets citoyens visent un intérêt général (la transition énergétique) et répondent aux engagements de réduction des émissions de GES. Pour le financement de la phase d’amorçage, un cadre pour le financement en capital de risque citoyen pourrait être conçu, sous réserve qu’il soit clairement défini pour les investisseurs. Pour les projets citoyens sous forme de coopérative, cela pourrait consister à se regrouper en « coopérative de coopératives » afin d’avoir une structure mutualisée intervenant sur la phase de développement86. P o i n t s Afin de surmonter ces difficultés, il apparaît nécessaire de travailler sur plusieurs points visant à faciliter l’octroi bancaire à des projets citoyens : • La sensibilisation et la formation des acteurs bancaires aux montages citoyens induiraient le développement de quelques projets citoyens facilitant un retour d’expérience suffisant pour provoquer un effet boule de neige. • La simplification et la clarification des cadres réglementaires s’appliquant aux projets citoyens sont essentielles pour faciliter les relations avec les banques et autres organismes de financement84. Ces deux éléments favoriseraient, à moyen terme, la création d’un circuit de financement consacré aux projets citoyens d’énergie renouvelable et, plus globalement, à la transition énergétique. Ce circuit constitue un levier indispensable, pour un faible coût public, dans l’objectif d’amélioration de la viabilité économique des projets, tout en réduisant structurellement leur surcoût. 141 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 3.5.2.3 La progression de l’implication citoyenne : quelques exemples européens En 1998, l’Allemagne a amorcé son tournant énergétique en mettant en œuvre un ensemble de lois et de mesures basées sur la réduction des émissions de GES et une plus grande efficacité énergétique. Ces dernières années, le pays a mis en place une réelle stratégie énergétique : l’Energiekonzept. Cette politique a permis non seulement d’augmenter la part des énergies renouvelables dans la consommation d’électricité, mais aussi de répartir autrement la production d’électricité : « 50 % des capacités renouvelables électriques installées entre 2000 et 2010 (53 GW au total) sont en possession de personnes privées (40 %) et d’agriculteurs (11 %), tandis que les quatre grands électriciens allemands ne possèdent que 7 % des capacités renouvelables développées87. » En outre, on distingue, à l’intérieur de cette part de 50 %, une quantité importante de projets citoyens collectifs, en particulier dans l’éolien et la biomasse. Cette tendance devrait se généraliser et transformer radicalement le marché allemand aujourd’hui centralisé. Actuellement, la Fédération allemande des coopératives (DGRV) compte 800 coopératives.88 P o i n t s d e r e p è r e Encadré 25. Le parc éolien de Béganne en France 142 En France, Béganne, commune du Morbihan, a inauguré en juin 2014 le plus grand parc d’éoliennes françaises à financement citoyen. Quatre installations d’une puissance de 2 mégawatts couvriront les besoins en électricité de 8 000 foyers (hors chauffage). La production estimée est de 20 millions de kilowattheures par an. Les 1 000 citoyens, qui ont investi en moyenne 1 700 euros chacun, détiennent 87 % du capital de l’entreprise Bégawatts, fondée en 2010 pour gérer le parc éolien. Celle-ci fonctionne sur un principe coopératif, avec une gouvernance répartie en plusieurs collèges regroupant des citoyens, des acteurs de l’économie sociale et solidaire, et une société d’investissement dans les énergies renouvelables mise en place par la région Bretagne. Plusieurs banques, la Caisse des dépôts et un fonds régional se partagent le reste du capital. Sur un budget global de 12 millions d’euros, les différents investisseurs ont apporté 2,7 millions d’euros en fonds propres, les citoyens ayant contribué à hauteur de 2,3 millions d’euros. Le reste de l’investissement est apporté par les partenaires bancaires : Triodos, le Crédit coopératif, OSÉO et La Nef. 87.Poize et Rüdinger (2014). 88.Stam (2013). Les acteurs de la transition énergétique d e P o i n t s Bien que ce type de démarche soit largement répandu dans plusieurs pays européens, il reste marginal en France. La coopérative a donc dû surmonter des obstacles juridiques considérables. Dans le code monétaire et financier, associer plus de 149 personnes à une société relève d’une OPTF. Il fut alors nécessaire d’obtenir un visa de l’AMF pour rendre l’opération légale. L’obtention de ce visa est une démarche juridique lourde, complexe et coûteuse. Il a donc fallu créer un outil financier dédié avec l’aide de plusieurs partenaires, dont l’ADEME. Au-delà de ces premières actions juridiques, le développement du projet se fit sur une durée importante, notamment du fait du contexte réglementaire français peu favorable. Le projet éolien citoyen de Béganne est donc une des réponses à la crise énergétique actuelle. Il promeut un autre modèle énergétique, en rupture avec le modèle traditionnel basé sur les énergies fossiles. Il s’inscrit donc dans une démarche de transition énergétique en favorisant l’impli cation citoyenne (financière et sociale) dans les projets de territoire. r e p è r e Figure 56. SAS Bégawatt 143 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Figure 57. Durée du projet éolien de Béganne 144 Au Danemark, l’essor du mouvement coopératif a connu et connaît toujours une ampleur très forte. Ainsi, tout nouveau projet éolien doit affecter 20 % de son capital aux habitants locaux dans un rayon de cinq kilomètres89. Aujourd’hui, plus de 100 000 familles danoises sont actionnaires d’un parc éolien (l’éolien couvre aujourd’hui 28 % des besoins en électricité du pays)90. En Wallonie, face à la part considérable d’énergie importée (plus de 90 %) et au regard du fait que plus de 90 % des installations de production d’énergie sont détenues par des sociétés étrangères, il a été décidé de mettre en œuvre un modèle de dévelop pement ou de renforcement énergétique local essentiellement basé sur l’éolien. Ces « coopératives éoliennes » utilisent l’idée des circuits courts (l’énergie est produite et consommée localement)91. Pour appuyer ce mouvement, le nouveau cadre de référence approuvé par le gouvernement en 2013 encadre l’implantation d’éoliennes d’une puissance supérieure à 100 kW. Outre les mesures réglementaires, l’implication des citoyens dans tout nouveau projet éolien est grandement encouragée. Ainsi, ce dernier sera soumis à une obligation d’ouverture à hauteur de 24,99 % pour les citoyens et 24,99 % pour les communes si la demande en est faite aux développeurs92. Cette disposition, encore trop rare dans le monde, est une opportunité pour les citoyens de s’impliquer réellement dans leur avenir énergétique. Il a été observé dans le nord du pays que cette 89.Terraeco.net (2013a). 90.Planète éolienne, Fédération des énergies du vent (s.d.). 91.Site Internet Portail de l’énergie en Wallonie, L’éolien participatif, consulté en décembre 2014. 92.Site Internet de L’énergie éolienne en Wallonie, Cadre de référence, APERe, consulté en décembre 2014. Les acteurs de la transition énergétique Figure 58. Initiatives citoyennes dans les projets éoliens d e 93.Site Internet du Portail de l’énergie en Wallonie, L’éolien participatif, consulté en décembre 2014. 94.Abhervé (2012). r e p è r e implication entraîne une réelle responsabilisation du consommateur : 95 % des coopérateurs d’Ecopower (comptant plus de 30 000 coopérateurs) réduisent leur consommation d’année en année. Il y a actuellement une vingtaine de coopératives éoliennes formées ou en formation en Wallonie. Parmi celles-ci, trois acteurs disposent actuellement d’une licence de fourniture d’électricité (même si d’autres sont en cours d’obtention de la licence) : Énergie 2030, Ecopower (Flandre) et Comptoir citoyens des énergies (COCITER). Ces coopératives se sont regroupées dans la fédération REScoop (RES signifiant Renewable Energy Source) afin de renforcer mutuellement leurs pratiques93. Les coopératives citoyennes prennent de l’essor en Europe et représentent un vrai levier pour la transition énergétique. L’esprit de coopérative est de transmettre des savoirs, d’échanger sur les bonnes pratiques afin d’inciter les citoyens et les autorités locales à s’approprier les sujets énergétiques. Les citoyens possèdent donc l’outil de production et agissent directement sur leur environnement proche. La Fédération européenne des groupes et coopératives de citoyens pour une énergie alternative a lancé le projet « REScoop 20-20-20 » dans le but d’« établir un inventaire des coopératives existantes et de leurs projets, de mettre au point et tester des méthodologies basées sur les meilleures pratiques et de disséminer les approches coopératives en matière d’énergies renouvelables94 ». P o i n t s Source : Site Internet du Portail de l’énergie en Wallonie, consulté en décembre 2014. 145 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 59. Tableau comparatif des éoliennes en fonction en Wallonie-Belgique Source : Wikipower (s.d.). L’exemple des initiatives citoyennes portées en Europe doit devenir une source d’inspiration pour favoriser le développement de modèles similaires dans les pays en développement. P o i n t s d e r e p è r e Conclusion du chapitre 3 146 Dans ce chapitre, nous avons souligné la nécessaire implication de tous les acteurs et les nouvelles perspectives offertes par la transition énergétique. Alors qu’au niveau global, 2015 était une année cruciale dans l’agenda des négociations internationales, les États doivent revoir leurs politiques énergétiques pour les rendre cohérentes avec les engagements internationaux et l’urgence de la situation climatique. Pour chaque acteur (collectivités locale, entreprise, citoyen), un cadre légal complet doit être défini et de nouveaux outils de financement doivent voir le jour pour impulser la mise en œuvre de la transition. Les réflexions, les réformes et les expériences innovantes en cours à chaque niveau d’action (global, État, collectivité locale, entreprise et citoyen) ont été rappelées. Le chantier de la transition énergétique est en cours bien, qu’à des rythmes et selon des modalités différentes en fonction des niveaux d’action. La coordination des acteurs impliqués dans la mise en œuvre de la transition énergétique est critique, et concerne l’ensemble des domaines d’activités utilisant de l’énergie. Le citoyen est au cœur des enjeux ; il aura un rôle particulièrement important à jouer : ses modes de production et de consommation et ses choix peuvent être repensés pour intégrer les contraintes d’une planète chaque jour de plus en plus fragile. Chapitre 4 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs La forte croissance démographique des zones urbaines est aujourd’hui une tendance lourde. En 2006, la population urbaine a atteint le seuil de 50 % de la population d e 4.1 Les villes et territoires : des laboratoires de la transition énergétique P o i n t s a problématique de l’énergie est très souvent réduite aux seules questions de production et d’approvisionnement énergétique, et les débats qui la concernent se font généralement au sein de cercles restreints d’experts et d’initiés. Pour autant, l’énergie nous entoure au quotidien et répond à des besoins de la vie courante, qu’il s’agisse de se chauffer, de s’éclairer, de se nourrir, de se déplacer, de travailler ou de communiquer. Dans cette perspective, et sachant que la transition énergétique fait appel à une approche intégrée agissant aussi bien sur la demande que sur l’offre, il paraît indis pensable d’aborder l’énergie selon une approche systémique déclinée dans chacun des différents secteurs d’usage. La transition énergétique peut et doit être une source de croissance durable, de création ou de maintien d’emplois locaux, notamment grâce aux nouvelles filières et aux dispositifs particuliers qui se mettent en place. Pour concrétiser leurs apports, les plus gros secteurs consommateurs d’énergie finale, soit l’administration municipale, le bâtiment et la construction, le transport, l’industrie et l’agriculture feront tour à tour l’objet d’une analyse visant à montrer leurs particularités, leurs trajectoires, leur contribution au changement climatique et leur potentiel de développement durable. En outre, les obstacles institutionnels, organisationnels ou techniques à surmonter et les possibilités de financement pour mettre en place les actions présentées seront décrits en détail, pour offrir une vue d’ensemble des problématiques liées à la transition énergétique et contribuer à l’avancée de la réflexion sur le sujet. Ce chapitre vise à donner aux décideurs, mais également aux usagers, des pistes d’action concrètes et opérationnelles – ayant déjà donné des résultats là où elles sont appliquées – afin d’élargir le champ des possibles sur leur territoire. Ces références, bien que non exhaustives, contribuent toutes, chacune à son échelle, à répondre aux objectifs nécessaires de la grande transition, non seulement énergétique, mais également sociétale, économique et environnementale. r e p è r e L 147 La transition énergétique : connaître et partager pour agir mondiale ; en 2050, sa part se situera, selon la source, entre 66 %1 et 75 %2, ce qui pourrait représenter environ 6 milliards de citadins. Dans ce contexte, le rôle des villes s’avère primordial si l’on veut répondre efficacement aux défis de la transition énergétique et de la lutte contre le changement climatique. Le renforcement des capacités des élus et des professionnels de l’environnement construit (bâtiments, infrastructures, etc.), pour la prise en compte des enjeux énergétiques dans les questions liées au transport, à l’urbanisation ou à l’inclusion sociale, constitue ainsi une priorité. Malgré l’importance de la tâche, les avantages d’une transition énergétique réussie sont indubitables. Les solutions systémiques et décentralisées existent ; elles doivent être mises en œuvre pour faire face aux enjeux actuels. 4.1.1 Les villes au cœur de notre avenir énergétique P o i n t s d e r e p è r e Depuis la révolution industrielle, les villes ont connu une croissance exponentielle à l’échelle mondiale. Le développement urbain s’est notamment fondé sur une forte consommation d’énergies fossiles, en donnant une place prépondérante aux transports motorisés. Ces modèles très consommateurs d’énergie et d’espace se perpétuent encore aujourd’hui. 148 Amman, en Jordanie. Photo : ENERGIES 2050. 1.UN-DESA (2014). 2.Dantec (2013). 3.UNEP (2011). d e P o i n t s 4.1.1.1 Les villes et l’énergie : une histoire et un avenir communs Les villes se caractérisent par une concentration de population et d’activités et par le fait qu’elles sont fortement consommatrices de ressources, et notamment d’énergie. Ainsi, bien qu’elles ne représentent que 4 % de la surface terrestre, les villes consomment 75 % des ressources naturelles et entre 60 et 80 % de l’énergie mondiale3. Elles sont le lieu de multiples fonctionnalités et services – se loger, se nourrir, travailler, se divertir, se soigner, s’éduquer, se déplacer – qui sont liés à autant de besoins énergétiques tels que le chauffage, la cuisson, l’éclairage, le transport (de marchandises et de personnes), les appareils électriques, etc. Ces nombreuses fonctionnalités font appel à des systèmes très intégrés, organisés selon des schémas complexes et de nature très variée, selon que l’on considère les infrastructures, les réseaux, les équipements ou les activités génératrices de biens ou de services. Ainsi, pour appréhender la question énergétique en milieu urbain, il faut adopter une approche systémique, tant dans l’analyse des défis que des réponses à apporter, d’autant plus que tous ces systèmes urbains sont interdépendants : une intervention sur l’un d’entre eux peut avoir une incidence plus ou moins directe sur l’ensemble de la ville. À titre d’illustration, il serait inconcevable de développer un programme de construction de logements sans tenir compte des réseaux urbains (énergie, eau, déchets, transports) ni prévoir des services de proximité adéquats. Les villes disposent ainsi de nombreuses compétences et peuvent actionner différents leviers afin d’œuvrer pour une transition énergétique réussie, grâce à la sobriété et l’efficacité énergétiques et au déploiement des énergies renouvelables. Que ce soit dans la conception spatiale de la ville ou dans l’aménagement des services et fonctionnalités, les choix d’organisation et la gestion urbaine influent considérablement sur les usages, la demande énergétique et l’intégration de technologies vertes. Pour autant, les villes n’ont pas la maîtrise de tous ces leviers d’action. Globalement, bien que les villes soient de fortes consommatrices de ressources, elles contribuent très rarement à leur production ou à leur approvisionnement. Il en résulte une forte dépendance à l’extérieur et un approvisionnement qui est, par ailleurs, généralement surdimensionné (l’objectif étant d’éviter les pénuries face à des besoins qui fluctuent au fil de la journée, de la semaine ou de l’année). Cette dichotomie entre offre et demande s’observe tout particulièrement en matière d’approvisionnement énergétique. Depuis quelques décennies, les acteurs urbains interviennent de moins en moins dans la production, l’organisation et la gestion des flux énergétiques. Pour les responsables des systèmes énergétiques, la ville est le plus souvent considérée comme le bout de la chaîne d’approvisionnement. r e p è r e Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 149 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.1.1.2 Des villes confrontées à des défis grandissants exacerbés par la croissance démographique et le changement climatique Partout dans le monde, les villes doivent relever de multiples défis afin de répondre aux besoins de leurs habitants et d’organiser et gérer les nombreuses fonctionnalités urbaines. Ces défis sont d’autant plus importants que la population urbaine est en perpétuelle croissance, à des taux particulièrement rapides dans certaines régions, notamment dans les pays en développement. En 2014, 54 % de la population mondiale habitait en ville, contre 30 % en 1950. Il est prévu que la part de la population urbaine dépassera 66 % en 20504 (selon les plus estimations les plus prudentes), sachant que la population totale devrait alors atteindre les 9,5 milliards d’habitants5. Figure 60. Population urbaine et rurale dans le monde, 1950-2050 Les villes devront donc accueillir 2,5 milliards d’habitants supplémentaires d’ici 20506, ce qui équivaut à la construction de sept nouvelles villes de 10 millions d’habitants chaque année, soit environ sept fois Shanghai ou une dizaine de fois Londres. Partout dans le monde, cette croissance d’une rapidité sans précédent devrait perdurer. Elle est en effet alimentée par les migrations de populations depuis les zones rurales vers les zones urbaines, une tendance qui demeurera élevée selon les prévisions. Il aura fallu 130 ans à Londres pour passer de 1 à 8 millions d’habitants, mais seulement 45 ans à Bangkok et 25 à Séoul7. P o i n t s d e r e p è r e Source : UN-DESA (2014). 150 4.UN-DESA (2014). 5.INSEE (2014). 6.UN-DESA (2014). 7. Revue médicale suisse (2012). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs d e 8.INVS (2003). 9.Howard (1918-1920). 10.Laros et al. (2014). r e p è r e 4.1.1.3 Une situation contrastée entre villes du Nord et du Sud Dans les pays en développement, où le phénomène de croissance urbaine est particuliè rement rapide (on y prévoit de 2 à 4 milliards de citadins supplémentaires d’ici 2030), les défis de la transition énergétique sont particulièrement importants, et les villes du Sud souffrent souvent d’un manque d’infrastructures et de moyens d’investissement pour répondre à cette croissance. En Afrique notamment, le nombre d’habitations domestiques urbaines devrait tripler entre 2014 et 2050 pour atteindre 1,26 milliard10, alors même que la plupart des villes du continent accusent déjà des retards en matière d’électrification et des déficiences d’approvisionnement en eau. P o i n t s Au-delà de l’augmentation de la population urbaine, les conséquences du changement climatique contribueront également à exacerber les défis intrinsèques aux villes. Si ces dernières sont à l’origine d’une pression non négligeable sur les ressources naturelles, l’environnement et le climat (rappelons que les villes représentent 75 % des émissions de CO2) elles sont également très vulnérables aux bouleversements qui accompagneront le réchauffement climatique. Cette vulnérabilité dépend de plusieurs facteurs tels le type d’urbanisme, la nature des infrastructures, le type d’habitat, les activités économiques locales et le mode de vie. Historiquement, beaucoup de villes se sont développées sur des sites accessibles et à proximité de ressources naturelles (bord de mer, rive d’une voie navigable, etc.). Elles se retrouvent ainsi particulièrement exposées aux catastrophes naturelles telles que les inondations et les cyclones, des évènements dont la fréquence et la violence devraient être exacerbées par l’évolution du climat, selon les travaux scientifiques de la communauté internationale. Les mégalopoles qui, au Nord comme au Sud, se situent sur les deltas des grands fleuves ou dans les zones côtières de faible élévation, sont et seront particulièrement vulnérables face à ces aléas climatiques. Par ailleurs, l’élévation des températures aura également une incidence non négligeable sur les espaces urbains, étant donné leur forte vulnérabilité aux vagues de chaleur. Lors de la canicule qui a frappé la France en 2003, une étude réalisée par l’Institut de veille sanitaire (InVS) a par exemple révélé des taux de mortalité plus élevés en ville qu’à la campagne8. L’étude montre également que c’est dans les agglomérations françaises les plus minéralisées que l’impact a été le plus important. En effet, en raison de leur faible couvert végétal, les espaces urbains présentent généralement des températures plus élevées que les territoires ruraux. Ce phénomène appelé « îlot de chaleur urbain » a été mis en évidence dès le début du 19e siècle par Luke Howard. Dans son ouvrage, ce pharmacien londonien témoignait alors d’un écart des températures nocturnes de l’ordre de 3,7 °C entre le centre de Londres et sa campagne9. 151 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 61. Proportion des populations urbaine et rurale dans la population totale, selon l’aire géographique, 1950-2050 11.Pouffary (2011). 12.Lucon et al. (2014). r e p è r e d e L’accès de l’ensemble des habitants à des conditions de vie dites « décentes » est ainsi un des plus grands défis de ce processus d’urbanisation. L’afflux massif de migrants dans les villes, en particulier dans les quartiers informels (plus de 500 000 « nouveaux urbains » par semaine vont vivre dans les bidonvilles11) renforce les situations de précarité, de misère et d’exclusion, en plus d’avoir des conséquences néfastes pour l’environnement. Le tiers de la population des pays en développement n’aurait pas accès à une habitation décente12. Dans ce contexte, il peut sembler inapproprié de parler de transition énergétique au regard de l’objectif prioritaire des pays en développement, qui est souvent de « rattra per le modèle occidental, ce qui se traduit par une surconsommation, soit l’inverse de ce que P o i n t s Source : ONU (2014b). 152 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Figure 62. Émissions de carbone et revenu, divers pays et villes 13.Terraeco.net (2013b). 14.Di Maio et al. (s.d.). d e P o i n t s prône la ville durable13 ». Pour autant, la prise en compte en amont des enjeux de la transition énergétique dans les pratiques de développement urbain au Sud est indispensable, d’autant plus que les politiques mises en œuvre aujourd’hui détermineront la qualité de notre environnement construit pour les décennies à venir, produisant des effets de verrou potentiellement désastreux. Ces constats ne doivent cependant pas occulter le fait que beaucoup d’efforts en matière de transition énergétique sont à fournir dans les pays industrialisés. Même si les enjeux diffèrent (on parle de précarité énergétique au Nord alors qu’il s’agit d’un manque d’accès à l’énergie au Sud ; la croissance urbaine dans les pays développés stagne depuis quelques années et décroît même dans certaines villes), les villes du Nord restent parmi les plus polluantes et les plus gourmandes en énergie. En moyenne, un citadin d’un pays du Nord consomme de 30 à 50 fois plus d’énergie qu’un citadin africain14. L’enjeu est donc de développer des pratiques innovantes allant dans le sens d’une transition énergétique et partageables dans le cadre de partenariats. r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après UNEP (2011). 153 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 63. Consommation d’énergie finale par pays Source : Baker et al. (2005). 4.1.2 Concevoir la ville sobre en énergie P o i n t s d e r e p è r e Les modes d’organisation des villes, tant du point de vue spatial que fonctionnel, ont une influence considérable sur la consommation de ressources, la production de déchets et l’émission de pollutions diverses. En planifiant l’agencement des villes, en le gérant et en agissant sur lui, on peut ainsi contribuer de manière très significative à la transition énergétique. 154 4.1.2.1 Coordonner l’urbanisme et les transports Afin de mettre en œuvre les principes de la ville durable, il convient en premier lieu de transformer radicalement notre vision du territoire. Au fur et mesure des progrès techniques, celle-ci est passée d’une organisation binaire ville-campagne à une organisation plus floue, sous l’effet de la pression urbaine. Il faut rappeler que la part de la population habitant en ville est passée de 30 % en 1950 à 54 % en 201415. Avec le développement de transports performants et la démocratisation de la voiture individuelle, on a assisté au cours des dernières décennies à un véritable étalement urbain et à l’avènement de villes diffuses. Des facteurs tels que le prix du foncier dans les centres urbains, l’émergence de nouveaux loisirs et l’aspiration à un logement individuel ont également contribué à une accélération du développement des banlieues et des couronnes périurbaines. Depuis deux siècles, la densité urbaine moyenne (le nombre d’habitants par kilomètre carré d’espace bâti, abstraction faite des zones vertes) diminue (de 2,2 % par an dans les villes des pays développés et de 1,7 % par an dans les pays du Sud, entre 1990 et 200016). Si les tendances actuelles se confirment, d’ici vingt ans, l’espace bâti des villes de plus de 100 000 habitants devrait être multiplié par trois dans les pays en développement et par 2,5 dans les autres pays. 15.UN-DESA (2014). 16.OCDE (2008). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Source : Site Internet URBATOD, consulté en décembre 2014. 17.De Perthuis (2009). P o i n t s d e Figure 64. Aménagement axé sur le transport en commun r e p è r e Cette nouvelle forme de la ville a cependant des conséquences négatives sur la cohésion des territoires, qui se manifestent notamment par des effets sur la qualité de l’environnement (pollution locale, régionale et planétaire), sur l’accroissement des coûts et de la consommation d’énergie et sur la ségrégation sociale dans l’espace urbain. L’étalement urbain accroît les distances de déplacements des habitants (souvent en transports individuels) et contribue à l’artificialisation des sols (manque de perméabilité amenant inondations, disparition d’espèces animales et végétales) et à l’éloignement des terres arables par rapport aux lieux de consommation, ce qui augmente indirectement la contribution des villes au réchauffement climatique. La comparaison entre Barcelone et Atlanta, deux villes de taille similaire en termes démographiques, est éloquente : Atlanta est vingt-quatre fois plus étendue et émet sept fois plus de gaz à effet de serre que Barcelone17. Face à ces constats, la plupart des experts et politiques s’accordent aujourd’hui sur la nécessité de repenser la structure même des territoires, en limitant l’étalement urbain et en l’organisant strictement pour l’incorporer dans une perspective d’aménagement global. La Charte européenne de Leipzig sur la ville durable, signée en 2007 par les 27 États membres de l’UE, souligne ainsi l’importance de dépasser les visions sectorielles, qui ont mené à des politiques urbaines basées sur la séparation des fonctions (vie, travail, loisirs), afin d’appréhender la ville comme un système. Dans cette perspective, la coordination urbanisme-transport se révèle une dimension essentielle, et aujourd’hui répandue, de la ville durable. Il s’agit notamment de privilégier un développement urbain qui soit conjugué à la mise en place de transports collectifs structurants. C’est cette vision que promeut le concept nord-américain d’aménagement axé sur le transport en commun (transit-oriented development ou TOD), qui vise à favoriser l’intensification urbaine autour des transports collectifs et propose l’établissement de noyaux de vie comprenant des services, des commerces et de l’habitat résidentiel autour d’axes de transports collectifs afin de réduire l’utilisation de la voiture individuelle. Cette idée de mixité fonctionnelle est importante et permettrait de concentrer l’urbanisation autour de pôles de vie afin de limiter l’étalement en périphérie. Ce concept d’aménagement est notamment opérationnalisé en France sous la forme du contrat d’axe (encadré 26). 155 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 26. Le contrat d’axe P o i n t s d e r e p è r e Le contrat d’axe est un outil très abouti illustrant la volonté politique de mettre en cohérence la ville et les transports. C’est à la fois un document, un processus et une démarche de mise en cohérence opérationnelle d’acteurs politiques et techniques multiples pour favoriser une meilleure articulation entre les politiques publiques d’urbanisme et de déplacement. Plus précisément, il s’agit de conditionner tout développement urbain à une réflexion préalable sur les conditions de desserte en transport en commun et de promouvoir l’intensification urbaine le long de l’axe de transport collectif. Le contrat d’axe est un document qui engage les autorités en charge de l’organisation des transports et les collectivités territoriales ou acteurs en charge de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire pour favoriser la densification urbaine autour de l’axe de transport, promouvoir cette offre et inciter à son usage. Les autorités en charge de l’organisation des transports pourront ainsi rentabiliser facilement leurs investissements, et les résidents de ces nouveaux quartiers bénéficieront d’une offre de transport collectif adaptée. Ce type d’initiative est notamment mis en œuvre dans des agglomé rations européennes sous des terminologies différentes : contrat d’axe (Grenoble et Toulouse), disque de valorisation des axes de transport collectif (Lille), périmètres d’aménagement coordonné d’agglomération (Genève). Le concept de cet outil, en particulier l’idée de lier diverses compétences pour faciliter la mise en œuvre d’un projet urbain, est cependant adaptable à d’autres contextes territoriaux. 156 4.1.2.2 Rafraîchir les villes : entre recherche de densité et intégration d’aménités environnementales Afin de limiter l’étalement urbain et d’optimiser la gestion des transports, les avantages d’une densité élevée sont souvent mis en avant. Or, il apparaît selon certains experts que les « arguments énergétiques pour et contre la densification des villes sont équilibrés et dépendent des infrastructures (par exemple les opportunités pour les bâtiments de partager les réseaux d’eau et d’énergie)18 ». Les débats sur cette question restent donc complexes, car de multiples facteurs, notamment morphologiques, entrent en ligne de compte. Cela dit, de manière générale, la densité peut avoir une incidence directe sur le microclimat urbain. En effet, plus la ville est dense, plus elle est susceptible de surchauffer du fait de la mauvaise circulation de l’air et du piégeage du rayonnement solaire19. 18.ASPECT-2050 (2012). 19.Colombert (2008). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs La question des températures en ville est majeure et influe notamment sur la qualité de vie, la santé ou encore la consommation d’électricité. La notion d’îlot de chaleur urbain (ICU) sert à conceptualiser ce problème. L’ICU désigne les écarts de température observables entre les zones urbaines et les zones rurales. Ce phénomène est dû en grande partie à l’inertie thermique des matériaux utilisés en milieu urbain (ex. : le béton) : le bâti ainsi que les autres espaces minéralisés (routes, parcs de stationnement) emmagasinent la chaleur tout au long de la journée pour la restituer la nuit, ce qui peut causer des écarts de température importants entre ville et campagne. L’albédo, qui est la capacité de réflexion du matériau, est un autre paramètre qui agit sur l’ICU (figure 59). Celui-ci peut créer des problèmes de santé (notamment cardiovasculaires) pour les habitants, du fait du stress thermique qu’ils subissent, mais également accroître les émissions de gaz à effet de serre, en raison de la consommation accrue d’électricité pour la climatisation, par exemple. Figure 65. Îlot de chaleur urbain Source : Descartes (2009). 20.Colombert (2008). d e Des solutions peuvent alors être mises en place pour atténuer l’ICU : • Végétaliser les toits ou planter des arbres, et fournir un apport en eau dans la mesure du possible. Ces deux commodités « constituent des facteurs de rafraîchissement puisqu’elles emmagasinent peu d’énergie et, par évaporation ou évapotranspiration, elles rafraîchissent l’air dans la journée 20 ». Les végétaux contribuent également à capter le dioxyde de carbone pour le transformer en oxygène. Par ailleurs, l’intégration de végétaux ou surfaces végétalisées en ville contribue à limiter l’imperméabilisation des sols et donc à réduire les risques d’inondation ; P o i n t s Source : Energy Cities (s.d.). r e p è r e Figure 66. Albédo et rayonnement réfléchi 157 La transition énergétique : connaître et partager pour agir • Favoriser les surfaces d’albédo élevé (qui réfléchissent une grande partie du rayonnement solaire au lieu de l’absorber) dans la construction des bâtiments et des infrastructures. Les divers moyens de rafraîchir les villes sont notamment mis en œuvre dans le cadre des projets d’écoquartiers qui voient le jour depuis quelques années. Ceux-ci visent en effet à « générer une sobriété énergétique en créant des métabolismes urbains plus circulaires qui reposent sur l’utilisation des ressources locales et le recyclage constant des déchets 21 ». L’écoquartier le plus célèbre de par son ampleur est sans doute le quartier Vauban de Fribourg (Allemagne), construit sur une ancienne caserne française. Deux mille logements sont alimentés par l’énergie solaire ; grâce à l’utilisation de matériaux fortement isolants, ils produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment. Les toitures végétalisées, l’absence de voitures et les cheminements piétonniers larges assurent une circulation d’air et contribuent à atténuer l’ICUa. D’autres démarches sont également à souligner ailleurs dans le monde, notamment à Kelibia, dans le Cap-Bon (Tunisie), démarche soutenue par le Fonds pour l’environnemental mondial. Bien que le projet soit relativement modeste – il n’y a pas eu de nouvelles constructions –, il y a cependant eu un réel travail d’éducation citoyenne aux économies d’eau et d’énergie. Les habitants utilisent désormais des lampes à basse consommation, trient et compostent leurs déchets, utilisent des chauffeeau solaires et plantent des végétaux pour développer la biodiversitéb. Tous ces projets contribuent, à des degrés divers, à l’avènement d’une transition énergétique réussie. Même si ces démarches sont localisées et restent des « vitrines » ou des laboratoires du développement durable, elles ont néanmoins le mérite d’interroger de nouvelles façons d’habiter et de tester d’autres outils et matériaux de construction qui pourront ensuite être généralisés. a. Energy Cities (s.d.). b. Barthel (2012). P o i n t s d e r e p è r e Encadré 27. Les écoquartiers 158 21.Mosseri et Jeandel (2013). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 4.1.3 Des leviers d’action pour une transition énergétique urbaine inscrite dans la durée Afin de mettre en œuvre les grands principes de la ville sobre en énergie, différents leviers d’action peuvent être mobilisés pour atteindre une utilisation efficace des ressources et de l’énergie. Un certain nombre d’outils, de concepts et d’initiatives se sont développés pour aller dans ce sens. 4.1.3.1 La prise en compte des enjeux de la transition énergétique dans les documents cadres Pour prendre en compte les enjeux de la transition énergétique, les villes disposent de différents outils, notamment de documents de planification divers. En France, par exemple, peuvent être notamment cités le Plan local d’urbanisme, le Plan de déplacement urbain et le Programme local de l’habitat. Parmi ceux-ci, le Plan Climat Énergie territorial (PCET), dont l’objectif est la lutte contre le changement climatique, constitue un outil particulièrement intéressant, au regard de son approche transversale et de sa volonté de cohésion avec les autres documents de planification plus sectoriels. Bien que son périmètre varie en fonction des collectivités qui le mettent en œuvre, ses objectifs sont clairs : il s’agit de diviser les émissions de gaz à effet de serre par quatre d’ici 2050 (sur la base des niveaux de 1990). Le PCET se veut transversal ; il s’attache à générer des impacts territoriaux à long terme. La mise en place du plan passe donc par une indispensable articulation avec les autres projets conduits sur le territoire cible. Bien que cet outil ait été développé en France, il peut aisément s’adapter à d’autres contextes, comme cela a été le cas pour la ville de Dakar, au Sénégal (voir l’encadré 28). d e P o i n t s Dans le cadre de la coopération décentralisée avec la région Île-deFrance, la ville de Dakar a mis en place son Plan Climat territorial intégré (PCTI), basé sur le modèle des PCET. « L’objectif est de recenser, renforcer, donner du sens et mettre en synergie des initiatives éparses et sectorielles sur le territoire local pour élaborer un projet et une stratégie de développement partagée au travers d’un large processus de consultation et de concertation.a » La première phase du projet a permis d’identifier les acteurs, de sensibiliser l’opinion, de réunir un comité de validation, d’élaborer une feuille de route et de recenser les actions et documents existants. La phase de diagnostic est désormais en cours. Elle cherche à mobiliser les citoyens par des ateliers et autres temps de partage, pour élaborer collectivement le « profil climat » de la région de Dakar. Parallèlement, des études r e p è r e Encadré 28. Le PCTI de la Ville de Dakar 159 La transition énergétique : connaître et partager pour agir seront lancées (quantification des émissions de gaz à effet de serre et étude de la vulnérabilité du territoire). La troisième phase verra la construction du PCTI, l’élaboration d’un portefeuille d’actions avec l’étude du plan de financementb. Le site du PCTI de Dakar propose de la documentation, relate les plus récentes actions et explicite la démarche entreprisec. a. Pouffary et Ricci (2013b). b. Pouffary et Ricci (2013b). c. Site Internet du Plan climat intégré de la Région de Dakar, consulté en décembre 2014. 4.1.3.2 L’avènement de la ville intelligente Dans le contexte actuel, le concept de ville intelligente émerge pour proposer des solutions face au changement climatique et à l’augmentation des émissions de gaz à effet de serre (GES). C’est en appréhendant la ville par une approche systémique alliant gouvernance participative et gestion intelligente des ressources naturelles pour concilier les piliers sociaux, environnementaux et culturels que la ville intelligente cherche à répondre aux besoins de ses habitants22. Rudolf Giffinger, spécialiste du développement urbain à l’université de Vienne, montre que les villes intelligentes peuvent être classées selon six critères principaux : les théories de la compétitivité régionale, l’économie des transports et des technologies de l’information et de la communication, les ressources naturelles, le capital humain et social, la qualité de vie et la participation des citoyens à la vie démocratique de la ville23. d e Source : Commission de régulation de l’énergie (s.d. b). P o i n t s r e p è r e Figure 67. Éléments composant la ville intelligente, selon Rudolf Giffinger 22.Commission de régulation de l’énergie (s.d. b). 23.Commission de régulation de l’énergie (s.d. b). 160 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Pour être « intelligente », la ville contemporaine devra donc développer des services performants dans tous les domaines : • La mobilité. Dans ce domaine, le défi majeur consiste à intégrer plusieurs modes de transports (bus, rail, cycle, automobile, marche à pied) dans un système fonctionnel, durable et aisément compréhensible. Les plus récentes technologies de transports et de mobilité écologique doivent en outre être mises en œuvre. • L’environnement. Les villes devront gérer efficacement leurs déchets, en mettant en place des systèmes de récupération et de valorisation (procédé par lequel on transforme un déchet en un nouveau produit utile), et leur énergie, en mettant en place un éclairage public basse consommation et des systèmes de production locale d’énergie comme des panneaux solaires. • L’aménagement. Il s’agit ici de proposer des formes urbaines économes en énergie, garantissant un ensoleillement suffisant et favorisant le vivre-ensemble. Les bâtiments devront également inclure des matériaux et autres éléments impliquant une meilleure gestion de l’énergie. d e P o i n t s Curitiba, grande ville du Brésil et capitale de l’État du Parana, a été sacrée « ville la plus innovante du monde » en 1996 à l’occasion du Sommet international des maires tenu à Istanbul, grâce à une planifi cation urbaine efficace et novatrice. Cette planification rigoureuse poussée par la nécessité de gérer la hausse massive de population, passée de 360 000 habitants en 1960 à 1,9 million en 2013, a été mise en place en 1965 par le maire Jaime Lerner, qui voulait déjà concilier environnement et développement économique et social. Deux volets de cette action sont particulièrement intéressants et méritent d’être développés : la gestion des déchets et le système de transports en commun. Afin de gérer efficacement les déchets, les habitants des bidonvilles sont invités à collecter les déchets recyclables, pour les échanger contre des titres de transport ou de la nourriture provenant de surplus agricoles. Mais c’est par son système de transport atypique que la ville a fait parler d’elle à l’échelle internationale. Curitiba s’est développée avec un système de transports en commun organisé autour des cinq axes principaux de la ville. Afin de faciliter les déplacements des usagers, le réseau en étoile est interconnecté avec des routes circulaires. Il est organisé en lignes express, lignes principales et lignes interquartiersa. Face au coût prohibitif de l’aménagement d’un métro, les pouvoirs publics ont eu l’idée de développer un « métro de surface » r e p è r e Encadré 29. Curitiba, la figure de proue 161 La transition énergétique : connaître et partager pour agir reprenant ses caractéristiques : sites propres sur les artères principales, temps d’attente limité à deux minutes, tarif unique, bus extralongs biarticulés (270 passagers) pilotés par un seul employé, accès facilité pour les moins valides, etc. Deux millions de personnes empruntent chaque jour le réseau, ce qui a réduit le trafic routier et donc les émissions de gaz à effet de serreb. Figure 68. Plan des transports à Curitiba Source : Colab Radio (2011). P o i n t s d e r e p è r e a. AFD et Codatu (2009). b. PNUE (s.d. a). 162 Afin de répondre aux défis actuels des villes, les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC : domotique, capteurs et compteurs intelligents, supports numériques, dispositifs d’information, etc.) constituent un élément essentiel du concept de ville intelligente. La multiplicité des informations en temps réel facilite la prise de décision, notamment pour la mise en place de nouveaux services « intelligents » (stationnement, gestion des déchets, éclairage public, etc.), et accélère la réponse aux besoins. Il faut cependant garder à l’esprit que la mise en place des NTIC n’est qu’un élément parmi d’autres dans l’émergence d’une ville intelligente. Les NTIC doivent s’intégrer à une stratégie globale répondant aux défis sociaux et environnementaux auxquels la ville est confrontée. Une nouvelle gouvernance reposant sur la transparence et l’ouverture au citoyen-acteur est ici primordiale, la démocratisation des moyens de Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 24.Commission de régulation de l’énergie (s.d. b). 25.Collège des directeurs du développement durable (C3D) (2011). d e P o i n t s 4.1.3.3 Les principes de l’économie verte appliqués à la ville Selon la définition qu’en donne le Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), l’économie verte vise à « entraîner une amélioration du bien-être humain et de l’équité sociale tout en réduisant de manière significative les risques environnementaux et la pénurie de ressources ». Sur cette base, le Conseil international pour les initiatives écologiques locales (ICLEI) a proposé le concept d’« économie verte urbaine », qui accentue le rôle des villes dans ces changements sociétaux. Les villes concentrent non seulement les populations, mais également les moyens techniques et financiers. Les pouvoirs locaux sont donc attendus sur des questions liées à la croissance de l’emploi, à l’inclusion économique mais également à l’attention portée à l’environnement dans l’aménagement du territoire. Le défi reste cependant le même : comment trouver des solutions adaptées au contexte local ? Toutes ces questions ne sont pas nouvelles, mais le concept d’économie verte urbaine encourage cependant une mobilisation plus large des acteurs du secteur privé et plus généralement des partenariats, pour démultiplier les moyens disponibles. En somme, les pouvoirs publics sont incités à « faire mieux avec moins » pour redéployer les économies générées sur d’autres secteurs à forte demande. Concrètement, l’économie verte urbaine peut se déployer sur chacun des grands usages de la ville : • L’habitat. Dans les grandes villes, il est de plus en plus difficile de trouver un logement. En outre, la raréfaction des ressources et l’augmentation du coût de l’énergie sont des facteurs économiques aggravants. Il est donc urgent de favoriser l’innovation technique et financière dans l’agencement urbain et dans le bâtiment (voir la partie 4.2). En France, il est désormais obligatoire de concevoir des bâtiments basse consommation. Pour surmonter l’obstacle économique, de nouvelles façons de construire émergent telles que la filière sèche industrialisée (15 % de moins en coûts de construction comparativement à un bâtiment basse consommation classique)25. • La mobilité (voir la partie 4.1.2.1). La cohérence entre urbanisme et transports étant un enjeu majeur, de nombreuses solutions d’optimisation sont aujourd’hui opérationnelles. Par exemple, le développement de l’intermodalité des systèmes de transport en commun (qui implique une offre variée de transports autour d’un même espace), mais aussi le traitement de la continuité des cheminements piétons et cyclables dans l’aménagement urbain, contribuent à fluidifier les déplacements et donc à réduire la congestion et les émissions de gaz à effet de serre. Des programmes de recherches r e p è r e communication devant favoriser la participation citoyenne24. Une ville intelligente est donc une ville qui améliore ses services en s’appuyant notamment sur les ressources numériques, mais plus particulièrement sur le fonctionnement en réseau (décideurs, citoyens, entreprises, etc.). 163 La transition énergétique : connaître et partager pour agir partenariales enrichissent les possibilités et favorisent les transferts de connaissances. En France, l’Agence nationale de la recherche soutient le projet ASPECT 2050, qui aide les collectivités à articuler leurs actions sur le système « transport, bâtiment, occupation des sols », lequel est à l’origine de près de 60 % des émissions de GES26. • Le travail. Face aux problèmes liés aux déplacements domicile-travail (congestion, santé, stress, etc.), les NTIC peuvent proposer des solutions pour améliorer l’orga nisation du travail dans l’espace et dans le temps. Les écocentres, espaces hautement numérisés, sont des lieux de travail partagé, proches des bassins d’habitation et offrant une grappe de services et d’équipements mutualisés. Ce compromis entre le télétravail à domicile et le travail au bureau offre un lieu flexible, calme et propice au travail et annonce peut-être une nouvelle organisation du monde du travail27. Encadré 30. PassiveHaus, le bâtiment écophile PassiveHaus est un label allemand de performance énergétique dans le bâtiment mis au point en 1980. Il est associé à la construction de bâtiments très bien isolés, qui n’ont besoin ni de climatisation ni de chauffage. Cette norme se caractérise par des techniques solaires passives (fenêtres orientées vers le soleil, murs absorbant la chaleur et débords de toit conçus pour protéger les fenêtres de la chaleur). Les bâtiments, isothermes, sont équipés de double ou triple vitrage. Un système de ventilation capture la chaleur interne et l’utilise pour réchauffer l’air frais entrant. Les constructions conformes à la norme PassiveHaus consomment jusqu’à 90 fois moins d’énergie que de nouvelles constructions classiques pour rafraîchir, chauffer et éclairer leurs occupantsa. P o i n t s d e r e p è r e a. PNUE (2012). 164 4.1.3.4 Quelles possibilités de financement pour atteindre la transition énergétique ? Afin de financer des actions visant à réduire l’empreinte écologique et les émissions de gaz à effet de serre, les villes disposent généralement de sources de financement classiques, à savoir les subventions des gouvernements centraux ou les impôts locaux. Cela dit, le contexte économique actuel ne permet pas d’appuyer efficacement sur ces leviers. Par ailleurs, en ce qui concerne les pays en développement, bien que le processus de décentralisation ait été engagé dans beaucoup d’entre eux, la passation de compétences aux collectivités locales ne s’accompagne pas toujours du transfert de moyens suffisants. La question du financement de la transition énergétique en ville, même si 26.Site Internet du projet ASPECT-2050, consulté en décembre 2014. 27.Collège des directeurs du développement durable (C3D) (2011). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs celle-ci s’accompagne d’avantages multiples et notamment économiques, est une réelle problématique qu’il faut prendre en considération. Pour autant, un certain nombre de mécanismes peuvent être mobilisés. Dans le cas des pays en développement, le Fonds Vert mis en place par l’ONU vise à transférer des fonds provenant des pays avancés à destination des pays les plus vulnérables. L’objectif est de mettre en place des projets pour lutter contre les effets du changement climatique, notamment par des mesures d’atténuation adaptées au niveau national (MAAN) (voir l’encadré 31). Ce fonds serait approvisionné de plusieurs dizaines de milliards de dollars par an. Il s’agit donc, pour les villes des pays en développement qui seront les premières bénéficiaires de cette aide28, d’une véritable opportunité à exploiter pour financer leur stratégie urbaine d’adaptation au changement climatique. Par ailleurs, des travaux récents évoquent la possibilité pour les villes d’accéder aux marchés du carbone29, qui concernent, pour l’heure, les pays et les grandes entreprises des secteurs de l’industrie et de l’énergie (par exemple le marché européen des droits 28.Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (2014). 29.Voir notamment Clapp et al. (2011). d e a. IFDD et ENERGIES 2050 (2014). b. http://unfccc.int/focus/mitigation/items/7172.php. c. CDC Climat et Caisse des dépôts (2012b). P o i n t s Les MAAN sont un nouvel instrument qui donne aux pays en développement la possibilité d’accéder au soutien international (financier, technologique et renforcement des capacités) pour l’élaboration et la mise en place de stratégies, politiques et programmes favorisant le développement durable et la réduction des émissions de GESa. À ce jour, 57 pays ainsi que le Groupe Afrique ont soumis des MAAN à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC)b. Il existe quelques projets pilotes dans les pays en développement, notamment au Mexique, qui a élaboré plusieurs MAAN : le plus avancé de ceux-ci vise l’amélioration de l’efficacité énergétique dans les bâtiments résidentiels. Des moyens financiers seront accordés aux propriétaires pour mettre en place des constructions plus efficientes et les normes seront renforcées. De 5,5 à 27 millions de tonnes équivalent CO2 pourraient être évitées grâce à ces mesures d’ici 2020, pour des besoins de financement allant de 2 à 7,4 milliards de dollarsc. r e p è r e Encadré 31. Les mesures d’atténuation appropriées au niveau national 165 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.1.3.5 La nécessaire coopération entre les villes pour démultiplier les moyens d’agir Malgré des différences certaines entre les villes (ordre des priorités en matière d’aménagement, environnement climatique, niveau de vie des habitants, budget municipal, etc.), la majorité d’entre elles sont confrontées à des obstacles similaires dès lors qu’il s’agit de mettre en place des stratégies de développement durable. Aujourd’hui, de nombreuses villes innovent et développent des outils efficaces dans le but de répondre à un problème spécifique et territorialisé et afin de s’orienter vers un développement plus solidaire et respectueux de l’environnement (voir l’encadré 29). La plupart de ces expérimentations sont néanmoins réalisées de manière sectorielle et localisée. Il convient donc d’encourager les occasions de coopération existantes sur des questions techniques, financières, sociales ou politiques afin de surmonter les barrières inhérentes à la segmentation (information, finance, technique, normes). Dans cette perspective, on voit émerger depuis quelques années une forme de coopération nouvelle, qui tend à se renforcer et à prendre de l’ampleur : il s’agit de la P o i n t s d e r e p è r e d’émissions). Les marchés du carbone sont le lieu (physique ou virtuel) où se vendent et s’achètent des droits d’émission de carbone. Afin de promouvoir un développement urbain bas carbone, les villes pourraient-elles organiser de tels marchés sur leur territoire ? Pour l’heure, ce type de marché est très complexe et les villes ne disposent pas des connaissances techniques nécessaires pour s’engager dans cette voie. On note toutefois quelques initiatives isolées, telle la bourse d’échange carbone mise en place par la ville de Tokyo sur son parc immobilier. Cette bourse fonctionne selon les règles des marchés du carbone, mais elle est appliquée dans l’espace urbain30. Pour généraliser ces pratiques, plusieurs dispositifs, tels que des partenariats avec le secteur privé ou le gouvernement central, doivent être mis en œuvre dans un premier temps. Afin de favoriser la mobilisation du marché du carbone par les villes, le PNUE a récemment publié un manuel31 à l’intention des administrations locales sur la finance climat pour les villes et les bâtiments. Ce manuel a pour objectif de contribuer à sensibiliser les acteurs locaux au financement climatique ainsi qu’aux défis et perspectives de l’atténuation des émissions de GES dans l’environnement construit. Il donne un aperçu des principaux mécanismes de financement climatique et souligne leur pertinence dans le contexte urbain. Il traite également des considérations clés pour la mesure, la notification et la vérification (MNV), ce qui est essentiel pour assurer la qualité et le suivi des activités d’atténuation du changement climatique32. 166 30.IFDD et ENERGIES 2050 (2014). 31.PNUE et ENERGIES 2050 (2014). 32.PNUE et ENERGIES 2050 (2014). d e 33.Voir aussi la partie 3.3.2. 34.Définition du Ministère des Affaires étrangères et européennes : www.diplomatie.gouv. 35.ARRICOD (2012). r e p è r e coopération décentralisée33 appliquée aux villes. En France, le Ministère des Affaires étrangères et européennes l’a définie comme suit : La coopération décentralisée regroupe l’ensemble des actions de coopération inter nationale menées par convention dans un but d’intérêt commun par une ou plusieurs collectivités territoriales françaises (régions, départements, communes et groupements de collectivités territoriales) d’une part, et une ou plusieurs autorités territoriales étrangères, d’autre part, dans le cadre de leurs compétences mutuelles. Ces actions peuvent prendre des formes diverses (jumelages, « jumelages-coopération », programmes ou projets de développement, échanges techniques). Elles peuvent intervenir, dans le respect des engagements internationaux de la France, entre collectivités ou autorités territoriales de toutes zones géographiques et de tous pro fils économiques ou sociaux. La coopération décentralisée s’insère dans le cadre plus large de l’action extérieure des collectivités territoriales34. Cette forme de coopération directe entre villes de pays différents tire son origine des jumelages mis en place en Europe après la Seconde Guerre mondiale, dans un objectif de paix. Progressivement, ces échanges entre villes se sont renforcés et diversifiés, s’ouvrant notamment sur les nombreuses compétences acquises avec les processus de décentralisation. Au fil du temps, les services dédiés à sa gestion se sont complexifiés ; aujourd’hui, même si la coopération décentralisée reste peu connue et souvent hâtivement associée au jumelage – quant à lui plutôt mal perçu35 –, elle reste un modèle de coopération particulièrement pertinent. La coopération décentralisée est en effet un outil, généralement effectif sur le long terme (grâce aux programmes de coopération pluriannuels, par exemple), permettant de mettre en place des projets décidés conjointement avec les autorités locales partenaires ou de renforcer leurs capacités par des appuis institutionnels. La longévité du partenariat permet d’adopter une approche itérative et une réelle appropriation des actions à l’échelle locale. En outre, comme les moyens financiers alloués à la coopération décentralisée sont souvent inférieurs à ceux des grands bailleurs de fonds, les actions mises en place s’orientent plus volontiers sur l’humain et contribuent, de fait, au renforcement des capacités des populations locales et à la pérennisation des projets. Ces initiatives, partenariales ou non, sont aujourd’hui très nombreuses et beaucoup d’acteurs sont impliqués dans leur développement à diverses échelles. Parmi eux, les agences onusiennes telles que ONU-Habitat et le PNUE, mais aussi les réseaux de villes ou de gouvernements locaux comprenant l’ICLEI, les Cités et Gouvernements locaux unis, le C40 Cities Climate Leadership Group, Cities Alliance ou encore les bailleurs ou organismes de financement comme la Banque mondiale, la Commission européenne, les agences de coopération, les banques régionales, etc. P o i n t s Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 167 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Encadré 32. Présentation de quelques projets de coopération décentralisée P o i n t s d e r e p è r e • Lancée en 2010 dans la foulée du Sommet de Copenhague, la Mesure commune du carbone est un protocole de mesure de la consommation d’énergie et des émissions de gaz à effet de serre associées aux villes, applicable au niveau mondial. Cette initiative vise à aider les décideurs, à tous les échelons, à adopter des politiques et des pratiques de construction durablesa. • L’ICLEI a pour but de collaborer avec un ensemble de collectivités locales à l’échelle mondiale, par des actions conjointes et cumulées pour améliorer leurs rapports à l’environnement. Il a notamment développé une palette d’outils nommés DEEPb, visant à aider les collectivités à réaliser des bénéfices sociaux, économiques et environnementaux en développant une politique efficace d’achat d’énergie. Cet objectif est atteint via divers outils : un guide de l’achat énergétiquement efficace, un outil pour l’analyse des coûts du cycle de vie et un autobilan de la consommation énergétique (SASEATOc)d. • Le PNUE développe une initiative nommée « Politiques durables pour les bâtiments dans les pays en voie de développement » (SPODe), qui utilise l’outil Quick-Scan, afin d’aider les pays africains à élaborer et adopter une réglementation améliorant l’efficacité énergétique et visant à réduire l’empreinte carbone des bâtimentsf. 168 a. PNUE-SBCI (s.d.). b. Dissemination of Energy Efficiency Measures in Public Buildings. c. Self-AssesSment Energy Audit Tool. d. Site Internet d’ICLEI – Dissemination of Energy Efficiency Measures in the Public Buildings Sector, consulté en décembre 2014. e. Sustainable Policies in Developing Countries. f. PNUE (s.d. b). On constate cependant l’absence d’une réelle méthodologie unifiée fondée sur une approche systémique qui permettrait de mutualiser et diffuser ces projets au sein de villes de tailles différentes et évoluant dans des contextes variés. C’est pourquoi, afin de fédérer les initiatives internationales en lien avec la ville durable, l’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD), organe subsidiaire de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), et l’association ENERGIES 2050 ont cofondé une initiative qui vise à encourager la mise en place de stratégies urbaines durables au moyen d’une approche systémique de l’espace urbain (voir l’encadré 33). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Encadré 33. L’Initiative de la Francophonie pour des villes durablesa L’Initiative de la Francophonie pour des villes durables (IFVD) soutient la mise en œuvre de stratégies urbaines durables en apportant des réponses concrètes et adaptées aux réalités de chaque ville, quelle que soit sa taille, tout en promouvant une approche holistique qui prenne en compte la complexité urbaine et les interrelations entre les différentssystèmes qui les composent. En pratique, il s’agit de construire un puzzle PROPOSITION 3bis.a dans lequel chaque pièce, tout en étant indépendante et indispensable, n’a d’utilité que lorsqu’elle se trouve connectée aux autres selon une organisation planifiée, optimisée et cohérente. INSTITUT DE LA FRANCOPHONIE POUR LE DÉVELOPPEMENT DURABLE Initiative de la Francophonie pour des villes durables d e P o i n t s Genèse de l’initiative L’IFVD s’inscrit dans la continuité du programme Ville, Énergie et Environnement mis en place par l’Institut de l’énergie et de l’environ nement de la Francophonie (IEPF) entre 2002 et 2011. L’originalité de ce programme tenait en grande partie à sa capacité à prendre en compte la diversité d’une ville tout en ciblant des stratégies d’action sur les deux volets « facilement » identifiables que sont l’énergie et l’environnement. En 2011, l’IFDD, nouvelle appellation de l’IEPF, et l’association ENERGIES 2050 ont décidé de poursuivre l’aventure et ont cofondé l’IFVD pour accompagner les villes et compléter les dynamiques existantes, en s’inscrivant résolument dans une approche systémique. r e p è r e Logo de l’IFVD 169 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Une initiative pour mutualiser et démultiplier les moyens d’agir L’IFVD s’appuie sur les nombreux programmes, projets et initiatives dédiés aux villes et aux différents acteurs impliqués, afin de tirer les enseignements de chacun d’eux et de prendre en compte la diversité des contraintes et des réalités que chacun rencontre dès lors qu’il intervient sur l’environnement construit. Chaque acteur est confronté aux limites de son territoire de compétence, tout en étant interdépendant des dynamiques que l’ensemble des autres acteurs va mettre en place. Dès lors, l’environnement construit doit s’appréhender comme une partition dans laquelle chaque musicien révèle ses talents de soliste autour d’un objectif commun. De nombreux partenaires ont déjà rejoint l’IFDD et ENERGIES 2050 dans cette initiative, entre autres l’École africaine des métiers de l’archi tecture et de l’urbanisme (EAMAU), basée à Lomé ; ONU-Habitat ; le PNUE ; le Réseau Habitat et Francophonie ; l’Ordre des architectes de Côte-d’Ivoire. D’autres acteurs essentiels ont manifesté un intérêt pour s’associer aux dynamiques portées par l’IFVD, notamment l’Association internationale des maires francophones et Cités et Gouvernements locaux unis. 170 Une organisation matricielle pour une initiative au plus proche de la mise en œuvre L’IFVD a pour ambition de parvenir à des résultats concrets et mesurables. Elle s’articule sur cinq piliers complémentaires : • fédérer et mutualiser, • comprendre et partager pour des villes inspirées en devenir, • mettre en œuvre des programmes d’action à la carte, • financer la ville inspirée, • renforcer la capacité d’agir pour des villes participatives et inclusives. Des premiers résultats concrets Depuis le lancement de l’IFVD en 2011, plusieurs actions concrètes ont été mises en œuvre : • Une formation africaine pour les professionnels du secteur de la construction et du bâtiment, de l’aménagement et de la gestion urbaine, en partenariat avec l’EAMAU. La quatrième session régionale a débuté en octobre 2015 pour se terminer en mars 2016. Plus de 75 professionnels, venant de 14 États, ont déjà été formés pendant quatre mois aux enjeux de la transition énergétique, et chacun a mis en œuvre un projet concret dans son pays. • Trois sessions nationales ont déjà été organisées en partenariat avec l’Ordre des architectes et les acteurs nationaux (Burundi, Togo, Côte-d’Ivoire). • Un module de formation à la construction durable dans les filières urbanisme, gestion urbaine et architecture de l’EAMAU a déjà été donné à plus de 300 étudiants. • Une Université d’été francophone sur les villes et les bâtiments face aux enjeux des changements climatiques : une semaine de formation organisée à Nice (France) au mois de juin 2015 et intégrée à un cycle de conférences internationales ; 17 participants (Ministères de l’Habitat et de l’Urbanisme ; Ministères de l’Environnement ; Ordre des Architectes ; etc.). • Des manuels de référence élaborés en vue d’une publication au premier trimestre 2016 : Guide du bâtiment durable en régions tropicales (publication de l’IFDD) ; État de l’art sur le bâtiment durable et les logements sociaux en Afrique francophone (publication du PNUE). • De nombreux articles ont été présentés dans des rencontres internationales : Africités (Dakar, 2012) ; Ecocity (Nantes, 2013) ; Forum urbain mondial (Medellin, 2014) ; Atelier régional « Efficacité énergétique dans le bâtiment en zone tropicale et ville durable » (Dakar, 2014) ; Forum global pour l’habitat durable/Rio+20+2 (Bogota, 2014) ; Sommet des solutions (New York, 2014) ; Congrès mondial d’ICLEI – gouvernements locaux pour le développement durable (Séoul, 2015). • Des contributions ont été apportées à plusieurs initiatives inter nationales : Initiative Bâtiments durables et climat (PNUE-SBCI) ; Initiative globale pour des Villes économes en Ressources (GI-REC) ; Programme Bâtiment et construction durables des Nations Unies (10YFP-SBC) ; etc. • Un programme de projets pilotes a été mis en œuvre : Maison à énergie positive à Dakar, Programmes de rénovation de zones urbaines, etc. • Un portail d’information dédiée a été mis en ligne sur la plateforme francophone Médiaterre (www.mediaterre.org/villes/). r e p è r e Des opportunités d’actions dans tous les secteurs P o i n t s d e a. IFDD et ENERGIES 2050 (2014). 171 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.2 Le secteur du bâtiment et de la construction Compte tenu de la forte croissance démographique et de la part toujours plus grande de la population habitant en ville, il est indéniable que le secteur du bâtiment et de la construction sera un secteur clé pour les décennies à venir. En tant que partie intégrante d’un système plus large et plus complexe – associant aussi bien l’urbanisme, les transports et la production d’énergie –, le secteur du bâtiment et de la construction présente des enjeux majeurs en termes de développement économique, social et environnemental. Au regard de la durée de vie des infrastructures, les choix qui sont faits aujourd’hui dans le domaine de l’environnement construit auront une incidence déterminante sur les besoins énergétiques pour des décennies. 4.2.1 Un secteur majeur pour une transition énergétique réussie P o i n t s d e r e p è r e Entre 1971 et 2010, la consommation d’énergie finale liée au secteur du bâtiment a doublé pour atteindre 2 794 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep). Cette hausse de la consommation est une conséquence directe de la croissance démographique et économique (qui se manifeste notamment par une recherche plus poussée du confort et le développement des technologies de l’information)36. Si la tendance se confirme, la demande globale d’énergie de ce secteur devrait encore augmenter de 30 % entre 2010 et 2035, soit une hausse équivalente à la demande énergétique du secteur des bâtiments de la Chine et des États-Unis réunis37. Afin de limiter la demande mondiale en énergie et d’engager la transition vers un système énergétique propre et durable, il paraît indispensable d’engager une véritable transition dans le secteur du bâtiment et de la construction. 172 4.2.1.1 Les enjeux de la performance énergétique des bâtiments Le secteur du bâtiment et de la construction est l’un des plus gros consommateurs d’énergie au niveau mondial, représentant 32 % de la demande énergétique, dont 24 % pour le seul secteur domestique, et 51 % de la demande en électricité38. Ce secteur a également des effets considérables sur la consommation des ressources et la production de déchets. Dans son ensemble, il consommerait annuellement 12 % de l’eau potable et plus de 3 milliards de tonnes de matières premières, alors que dans les pays développés, les activités de construction, rénovation et démolition généreraient plus de 40 % des déchets solides39. 36.Schneider Electric (2011). 37.AIE-UNDP (2013). 38.Lucon et al. (2014). Chiffres de 2013. 39.PNUE-SBCI (2012). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Les émissions de GES liées au bâtiment étaient par ailleurs estimées à environ un cinquième des émissions globales en 2010 (9,18 Gt éq CO2). En raison d’une croissance démographique et urbaine continue, ces émissions pourraient doubler, voire tripler d’ici 2050. Le secteur du bâtiment et de la construction présente néanmoins un immense potentiel d’atténuation. Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), des réductions de 25 à 30 % de la demande énergétique, comparativement à un scénario de statu quo, seraient réalisables à coût réduit, voire négatif. Les économies totales générées pourraient atteindre 90 % dans les nouveaux bâtiments (au regard des normes classiques) et 75 % pour les infrastructures existantes40. Outre les émissions de gaz à effet de serre, la transition énergétique du secteur du bâtiment peut contribuer à atténuer de nombreux autres risques. Du point de vue Figure 69. Consommation finale d’énergie, selon le secteur (millions de tep) Source : ENERGIES 2050, d’après AIE-UNDP (2013). Source : ENERGIES 2050, d’après AIE-UNDP (2013). 40.Lucon et al. (2014). Chiffres de 2013. P o i n t s d e r e p è r e Figure 70. Émissions de CO2 du secteur résidentiel, régions choisies, 2010 173 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 41.Laros et al. (2014). 42.AIE-UNDP (2013). r e p è r e d e 4.2.1.2 Une situation contrastée à l’échelle mondiale Si, globalement, le secteur du bâtiment et de la construction représente une part importante de la consommation d’énergie, les situations et les enjeux diffèrent selon le niveau de développement de chaque pays. Dans les pays en développement, on constate une forte croissance de la consommation d’énergie du secteur du bâtiment, poussée par le développement économique, la croissance démographique et l’accès aux services énergétiques de base. Par ailleurs, les taux de croissance urbaine dans ces pays sont très élevés (voir la partie 4.1), et un nombre important de bâtiments devront être construits dans les années à venir. Rien qu’en Afrique, le nombre de citadins pourrait tripler, passant de 400 millions à 1,26 milliard, d’ici 205041. Dans ce contexte, un enjeu majeur réside dans la qualité des nouvelles constructions : en raison de la longue durée de vie des bâtiments, les constructions d’aujourd’hui produisent des effets de verrou qui conditionnent la consommation énergétique sur des décennies. Un bâtiment bien pensé dès sa conception sera toujours plus performant et moins coûteux qu’un bâtiment rénové a posteriori. L’impact sur la santé de populations qui utilisent majoritairement la biomasse traditionnelle comme combustible pour le chauffage et la cuisson des aliments doit également être considéré. À titre d’illustration, au sein des économies pourtant émergentes du Brésil, de la Russie, de l’Inde, de la Chine et de l’Afrique du Sud (BRICS), la biomasse représente 44 % de la consommation énergétique des bâtiments42. Pour ce qui est des pays développés, la croissance urbaine stagne depuis déjà plusieurs années, et la part des nouvelles constructions est minime par rapport au stock de bâtiment existant : moins de 1 % de renouvellement du stock de bâtiment pour les pays P o i n t s économique, elle joue notamment dans la réduction de la dépendance énergétique des pays importateurs et dans l’allégement du coût de l’énergie dans les finances des États et des ménages. La performance énergétique des bâtiments peut également avoir d’importants effets positifs sur la santé publique. Les caractéristiques d’un bâtiment influent en effet sur le confort de l’occupant ; une mauvaise configuration, si elle n’est pas compensée par une surconsommation énergétique, contribue par exemple à amoindrir la qualité de vie ou à réduire la productivité des travailleurs. Par ailleurs, dans le contexte des changements climatiques actuels, il convient de se préoccuper des nouvelles conditions climatiques et de leurs répercussions sur le confort et la santé des populations. Ainsi les bâtiments doivent-ils assurer une protection efficace face aux dangers que représentent par exemple les canicules, les hivers particulièrement rigoureux et les inondations provoquées par la montée des eaux. 174 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs membres de l’Agence internationale de l’énergie (AIE)43. L’enjeu réside donc dans la rénovation des bâtiments actuels pour améliorer leur performance et réduire ainsi leur consommation énergétique. Si la rénovation d’un bâtiment existant peut difficilement atteindre des niveaux de performance énergétique équivalents à celui d’un bâtiment neuf bien conçu, elle peut néanmoins produire des économies d’énergie de 20 à 50 %44. Encadré 34. La rénovation énergétique dans le secteur hôtelier en Europe : le projet neZEHa Cofinancé par la Commission européenne dans le cadre du programme Énergie intelligente pour l’Europe, le projet européen neZEH (Hôtels à consommation d’énergie proche de zéro ou near-Zero Energy Hotels), vise à accélérer le taux de rénovation des hôtels existants en bâtiments à consommation presque zéro énergie. neZEH accompagne les hôteliers dans la mise en place de mesures favorisant l’excellence énergétique en fournissant des conseils techniques, en démontrant la faisabilité et la durabilité des investissements visant à atteindre le niveau « presque zéro énergie » [sic], en organisant des formations et des activités de renforcement de capacités et en promouvant les 16 hôtels pilotes sélectionnés aux échelons national, régional et européen afin d’accroître leur visibilité sur le marché. Logo du projet neZEH d e 43.Les 28 pays membres de l’AIE sont : l’Allemagne, l’Australie, l’Autriche, la Belgique, le Canada, la Corée du Sud, le Danemark, l’Espagne, les États-Unis, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l’Irlande, l’Italie, le Japon, le Luxembourg, la Nouvelle- Zélande, les Pays-Bas, la Pologne, le Portugal, la République tchèque, le Royaume-Uni, la Slovaquie, la Suède, la Suisse, la Turquie ; http://www.connaissancedesenergies.org/ fiche-pedagogique/agence-internationale-de-l-energie-aie. 44.Projet européen neZEH. P o i n t s a. Site Internet du projet neZEH. r e p è r e On trouvera d’autres détails sur ce projet dans le site www.nezeh.eu. 175 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Si des améliorations ont déjà été effectuées dans de nombreux pays développés, notamment grâce aux réglementations thermiques déployées depuis le début du siècle45, les taux de consommation énergétique des bâtiments restent globalement très élevés et les réformes nécessaires se heurtent encore à de nombreux obstacles. Figure 71. Consommation annuelle d’énergie primaire par ménage, corrigée en fonction du climat, 1990 et 2009 (kWh) Source : ENERGIES 2050, d’après AIE-UNDP (2013). 4.2.2 Surmonter les barrières pour exploiter les possibilités d’action P o i n t s d e r e p è r e Pour exploiter son potentiel d’amélioration et devenir une pièce maîtresse de la transition énergétique, le secteur du bâtiment doit dépasser les barrières qui freinent encore la généralisation de la rénovation et de la réalisation de bâtiments performants éner gétiquement. Les techniques et les technologies sont connues, mais la question du financement de leur mise en œuvre reste souvent un frein. 176 4.2.2.1 Du bâtiment basse consommation au bâtiment à énergie positive : des solutions passives et actives pour la généralisation des bâtiments durables Il existe un certain nombre de solutions technologiques nécessaires à une amélioration rapide de l’efficacité énergétique des bâtiments. Que ce soit pour l’isolation, pour les équipements tels que les pompes à chaleur et les chauffe-eau solaires ou pour l’éclairage, les techniques disponibles sont très souvent à la hauteur des enjeux de la transition énergétique. Correctement mises en œuvre, ces solutions réduisent suffisamment les dépenses énergétiques et sont rentables à court ou moyen terme. Néanmoins, leur intégration nécessite une approche globale du bâtiment qui a encore du mal à s’installer 45.AIE-UNDP (2013). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs dans certaines régions, notamment dans les pays où le secteur de la construction manque de structuration et où certaines compétences sont absentes46. La conception bioclimatique des bâtiments est un exemple d’approche innovante et systémique. Cette approche axée sur le confort des occupants considère l’environnement comme un élément primordial dans le processus de conception et de construction, et le place donc au cœur des décisions architecturales. Concrètement, l’architecture bioclimatique vise à optimiser la conception afin d’exploiter le potentiel naturel de l’environnement immédiat et de produire ainsi un bâtiment combinant sobriété en énergie et niveau de confort élevé. 46. Cantin et Michel (2010). d e P o i n t s L’architecture bioclimatique nécessite une bonne analyse des paramètres climatiques locaux. Quelques principes généraux sont cités ici à titre d’exemple : • Orientation et ouvertures. Dans les climats tempérés de l’hémi sphère Nord, les fenêtres des bâtiments sont généralement orientées au sud pour récupérer au maximum les apports solaires en hiver, alors qu’elles sont limitées au nord pour éviter les déperditions thermiques (et inversement dans les climats tempérés de l’hémisphère Sud). Dans les climats tropicaux humides, on favorise plutôt une orientation nord-sud avec peu d’ouvertures à l’est et à l’ouest, pour limiter les apports thermiques et les risques d’inconfort visuel et d’éblouissement des occupants. • Type de structure. Une structure légère et ouverte en fonction des vents favorise la ventilation naturelle du bâtiment et contrôle l’humidité (climat tropical humide). En revanche, dans les pays tropicaux secs où la présence des vents favorise la ventilation naturelle du bâtiment (par exemple au Sahel), on privilégie une structure plutôt fermée à forte inertie thermique, afin de maintenir naturellement des températures de confort à l’intérieur du bâtiment. • Forme du bâtiment. Une compacité accrue limite les déperditions thermiques, mais peut également être une contrainte pour la mise en place d’une stratégie d’éclairage naturel. Une structure plus étendue favorise également la ventilation naturelle du bâtiment. r e p è r e Encadré 35. Les principes de l’architecture bioclimatique 177 La transition énergétique : connaître et partager pour agir • Isolation. Une bonne isolation contribue à tempérer les variations de températures extérieures et à limiter la déperdition thermique pour maintenir les températures intérieures à un niveau de confort. En revanche, dans les climats humides, une trop grande isolation empêche l’évacuation naturelle de l’humidité et amène de la condensation et un usage accru de l’air conditionné, généralement très énergivorea. Figure 72. Exemple de principes de l’architecture bioclimatique dans un climat tempéré de l’hémisphère Nord Source : Hespul (s.d.). P o i n t s d e r e p è r e a. Cantin et Michel (2010). 178 Au-delà de la simple performance énergétique, il est possible de réaliser des bâtiments à énergie positive, c’est-à-dire qui produisent plus d’énergie qu’ils n’en consomment, grâce à l’installation d’équipements de production d’énergies renouvelables : photovoltaïque, éolienne, géothermique, etc. Il est néanmoins important de considérer la sobriété énergétique du bâtiment avant d’installer ce type d’équipements47. 4.2.2.2 Dépasser la question du financement Si les bâtiments sobres en énergie – voire producteurs d’énergie – génèrent des économies à long terme (d’autant plus si on considère la hausse attendue du prix de l’énergie sur les années à venir), un frein potentiel à leur généralisation réside dans l’investissement nécessaire pour atteindre ces niveaux de performance. Néanmoins, si ces coûts peuvent en effet être significatifs lorsqu’il s’agit de rénover un bâtiment existant, ce n’est généralement pas le cas pour la construction d’un bâtiment neuf. Une étude menée en 2010 montre que l’investissement pour la construction d’un bâtiment « vert » ne 47.Connaissance des énergies (2014). 48.PNUE-SBCI (2012). 49.Sidler (2012). 50.Voir aussi la partie 3.4.2.2. d e P o i n t s coûterait que 1,5 % de plus que pour un bâtiment conventionnel48, un supplément rapidement amorti grâce aux économies d’énergie réalisées. Pour ce qui est de la rénovation, plusieurs solutions peuvent être mobilisées pour aider les propriétaires à réaliser les investissements nécessaires à l’amélioration de la performance énergétique de leur bâtiment. Il peut s’agir tout d’abord de dispositifs d’aide publique tels que le prêt à taux préférentiel, l’exonération d’impôt ou la subvention. Dans ce cas, il est important d’éviter le saupoudrage et de favoriser l’aide à une rénovation globale plutôt que pour des mesures isolées49. Cela dit, des programmes publics ambitieux de soutien à la mise en place à grande échelle de technologies spécifiques peuvent également contribuer à la transition énergétique dans le secteur du bâtiment, lorsque ces technologies sont pertinentes au regard du contexte du pays. À titre d’illustration, le programme PROSOL mis en place en Tunisie en 2005 (encadré 36) est une initiative réussie qui pourrait être dupliquée dans d’autres contextes. Une autre solution de financement est celle du tiers-investissement, généralement proposé par les sociétés de services énergétiques (SSE)50. Ces sociétés combinent un service financier à un service technique, simplifiant ainsi les économies d’énergie pour les utilisateurs : • en choisissant des mesures d’efficacité énergétique adaptées aux besoins des utilisateurs ; • en finançant les aménagements et améliorations ; • en mesurant les économies d’énergie réalisées ; • en permettant aux consommateurs de bénéficier d’une partie de ces économies. L’avantage est double : les consommateurs n’ont pas à avancer d’argent, et le profit de la SSE est conditionné à la performance de ses actions. Généralement, l’accord entre le propriétaire du bâtiment et la SSE se concrétise sous la forme d’un contrat de performance énergétique (CPE). Si ce type de mécanisme a longtemps été réservé aux grands bâtiments (édifices publics, bureaux, bâtiments industriels, etc.), des initiatives sont en cours afin de faciliter l’accès au CPE pour des exploitations de plus petite taille. Ces différentes solutions pour le financement de la performance énergétique des bâtiments sont pertinentes et rentables, notamment grâce aux économies générées sur les factures d’énergie. En outre, si les tendances à la suppression des subventions aux énergies fossiles se concrétisaient à grande échelle, les investissements dans la transition énergétique du bâtiment deviendraient de plus en plus intéressants économiquement et donc de plus en plus attractifs. r e p è r e Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 179 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Encadré 36. Le programme PROSOL en Tunisiea 180 Le Plan solaire tunisien est une stratégie intégrée à financement partagé de développement des énergies renouvelables et de renforcement de l’efficacité énergétique en Tunisie. Il s’inscrit dans un plan d’action global et multilatéral, le Plan solaire méditerranéen, qui vise la construction d’ici 2020 de 20 GW de capacité additionnelle en production d’élec tricité à faible impact carbone (solaire, éolien) au sud et à l’est de la Méditerranée. Une interconnexion doit également permettre l’exportation d’une partie de la production vers l’Europe. Le Plan solaire tunisien s’intègre également dans la stratégie tunisienne de développement des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique, du respect de l’environnement et du développement durable. Ses objectifs sont notamment une production électrique solaire et éolienne confondues de 1 000 MW d’ici 2016, de 4 700 MW d’ici 2030 et une économie d’énergie équivalente à 100 Mtep d’ici 2030. Le PROSOL thermique est une partie intégrante du PROSOL. Il a été mis en place en 2005 (cadre résidentiel) et vise à dynamiser le marché des chauffe-eau solaires, avec des incitations financières incluant des subventions à l’achat par le Fonds national de maîtrise de l’énergie (de 200 à 400 dinars par chauffe-eau) et des crédits (jusqu’à concurrence de 1 150 dinars) contractés auprès d’une banque partenaire – Attijari – et remboursables sur cinq ans sur les factures d’électricité de la Société tunisienne de l’électricité et du gaz, à taux préférentiel (autour de 5 %). Fin 2012, le PROSOL résidentiel avait permis l’installation cumulée de 487 853 m² de systèmes à thermosiphon. Il a permis aux clients de dépasser deux obstacles majeurs : • le prix d’installation relativement élevé par rapport au niveau du revenu moyen en Tunisie ; • la faible rentabilité de l’investissement au regard des prix de l’énergie, qui est subventionnée en Tunisie. a. Benalouache (2013) ; voir également le site de l’Agence nationale tunisienne de maîtrise de l’énergie (ANME), http://www.anme.nat.tn/index.php?id=101. Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Encadré 37. Le projet Éco’Énergies de la Chambre de commerce et d’industrie de Nice La Chambre de commerce et d’industrie Nice Côte d’Azur a lancé en septembre 2014 le projet « Éco’Énergies », qui vise à favoriser le tiers- investissement dans les solutions d’efficacité énergétique. Il s’agit plus précisément de faciliter le lien entre les entreprises désireuses d’améliorer leur performance énergétique et les sociétés de services d’efficacité énergétique (SSEE). Dans le cadre de ce projet, une application permettant de réaliser rapidement le prédiagnostic énergétique d’un bâtiment a notamment été développée. Les entreprises intéressées peuvent ainsi bénéficier gratuitement d’un audit simplifié, dont les résultats sont ensuite mis à disposition des SSEE partenaires du projet. Ces dernières peuvent, sur la base du prédiagnostic réalisé, décider ou non d’aller plus loin dans la démarche en réalisant un audit plus approfondi et en proposant un contrat de performance énergétique à l’entreprise concernéea. a. CCI Nice Côte d’Azur (2014). 51.AIE (2011a). d e 4.2.3.1 Une réglementation plus ou moins ambitieuse, selon le pays Il existe de très importants écarts entre les pays en matière de réglementation sur l’efficacité énergétique des bâtiments. Certains pays ont une réglementation depuis longtemps, tandis que d’autres n’ont toujours pas amorcé de processus de réflexion. Parmi les pays ayant une réglementation, là encore, de fortes disparités existent tant en ce qui concerne l’étendue que le niveau d’application (figure 73). Ces disparités sont dues, d’une part, aux différences de niveau de développement des pays et, de l’autre, à leur situation géographique. En effet, les pays soumis à des hivers rigoureux, qui font face à P o i n t s Au regard des nombreux avantages qui peuvent résulter de la mise en place d’une législation sur l’efficacité énergétique dans le secteur des bâtiments, l’AIE recommande, dans son 25e rapport Energy Efficiency Policy Recommendations, que les gouvernements « imposent à tous les bâtiments neufs, ainsi qu’aux bâtiments en cours de rénovation, d’être régis par une réglementation énergétique et de satisfaire à des normes minimales de perfor mance énergétique qui visent à minimiser les coûts du cycle de vie. La réglementation éner gétique et les normes minimales doivent être appliquées, régulièrement renforcées et avoir une approche holistique qui inclut l’enveloppe du bâtiment et ses équipements 51 ». r e p è r e 4.2.3 La réglementation, un levier incontournable 181 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 73. Progrès dans l’application de la réglementation thermique, pays membres de l’AIE, BRICS et Tunisie Source : ENERGIES 2050, d’après AIE-UNDP (2013). Figure 74. Statut de l’application d’une réglementation thermique pour les nouveaux bâtiments résidentiels P o i n t s d e r e p è r e des besoins en chauffage élevés, se sont naturellement penchés depuis longtemps sur la problématique de l’efficacité énergétique des bâtiments. Sur les cartes suivantes (figures 74 et 75), on peut apprécier les différents niveaux d’engagement des États en faveur de l’efficacité énergétique des bâtiments, du point de vue réglementaire. Certains pays (en vert) ont une réglementation contraignante ; d’autres (en rouge) fonctionnent sur une base volontaire ; d’autres encore (en jaune) ont une réglementation mixte. On peut aussi constater que la réglementation sur les nouveaux bâtiments est plus généralisée que celle qui a trait aux bâtiments existants, car elle est généralement plus facile à mettre en œuvre. La très grande majorité des pays en développement ne possède pas de réglementation thermique. Pourtant, la situation est critique au vu des besoins croissants en énergie de ces régions et de la quantité de nouveaux logements qu’il faudra construire d’ici quelques décennies. Si l’importance de l’action à mettre en œuvre est souvent bien comprise, son exécution n’est pas simple. Source : AIE-UNDP (2013). 182 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Figure 75. Statut de l’application d’une réglementation thermique pour les bâtiments résidentiels existants 52.Cloâtre (2010). d e P o i n t s 4.2.3.2 À secteur complexe, réponse systémique Par essence, le secteur du bâtiment touche à des domaines de compétence très variés et mobilise une multitude d’acteurs. Il est donc primordial d’éviter toute contradiction entre la réglementation concernant le bâti et la réglementation énergétique à mettre en place. On peut notamment penser aux plans locaux d’urbanisme ou aux normes de sécurité. En France, par exemple, l’installation de panneaux solaires peut être refusée dans certaines zones urbaines, pour des motifs liés à la préservation du patrimoine52. Il est alors crucial d’engager des démarches au niveau étatique afin d’harmoniser les pratiques sur le territoire national. Dans les pays où la réglementation de ce secteur est encore faible, l’efficacité énergétique des bâtiments pourra être prise en compte plus facilement. Dans tous les cas, une approche systémique est requise afin de cerner correctement les tenants et aboutissants de ces démarches. La mise en place d’une politique d’efficacité énergétique pour le bâtiment requiert un processus dédié de décision, de planification, de coordination, de mise en œuvre et de contrôle. Les groupes de travail dédiés créés par les pouvoirs publics doivent s’assurer de la visibilité du secteur du bâtiment dans le plan d’action national pour l’énergie. De plus, les politiques régionales et locales doivent faciliter la coopération entre les différents organismes, notamment entre ceux qui sont responsables de l’énergie et du logement. La planification énergétique et les systèmes de gouvernance doivent pouvoir compter sur des données fiables pour évaluer correctement la situation présente et les effets des mesures prises. r e p è r e Source : AIE-UNDP (2013). 183 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 76. Approche systémique de la réglementation dans le secteur du bâtiment Source : AIE-UNDP (2013). P o i n t s d e r e p è r e La réglementation peut s’adresser aux différents acteurs de la filière du bâtiment : les collectivités locales, les constructeurs, les propriétaires, les utilisateurs. La forme et le fond de la réglementation doivent être mûrement réfléchis pour favoriser l’atteinte des objectifs fixés, mais aussi pour être cohérents avec la capacité du public visé à respecter les normes. En particulier, il est important d’éviter que la réglementation adoptée ne pénalise les populations à faible revenu. 184 4.2.3.3 Une multitude d’outils réglementaires à mobiliser La mise en place d’une réglementation par l’adoption de normes est indispensable, car il est établi que les seuls outils incitatifs ne suffisent pas pour atteindre des objectifs ambitieux. De plus, les normes sont un moyen économique d’améliorer la performance énergétique, car les seuls frais engagés par l’État sont ceux de leur mise en place et de leur contrôle. La réglementation thermique est la pierre angulaire de cette démarche. Elle consiste en un groupe de performances énergétiques minimales requises pour réguler la consommation d’énergie dans un bâtiment. Elle couvre à la fois les nouveaux bâtiments et les bâtiments existants. Les architectes et les ingénieurs appliquent ensuite ces normes à la construction de bâtiments répondant aux attentes énergétiques. La réglementation thermique doit inclure les exigences suivantes : • la sobriété énergétique, grâce à l’application des principes de l’architecture bioclimatique ; Des opportunités d’actions dans tous les secteurs • la performance énergétique, par l’implantation de normes sur le bâtiment lui-même, ses composants et ses équipements ; • le recours aux énergies renouvelables53. Cette réglementation se doit d’être ambitieuse et d’englober toutes les technologies de sobriété énergétique pour ne pas tuer le gisement d’économie d’énergie. La combinaison de plusieurs technologies contribue aussi à la viabilité économique du projet. En effet, certaines mesures qui ont un délai de rentabilité très long ne pourraient pas être mises en œuvre seules. Elles doivent donc être alliées à des solutions qui ont un délai de rentabilité plus court. Pour ce qui est de la performance énergétique, deux approches sont possibles54 : • l’approche prescriptive, qui définit des objectifs de performance pour chaque partie du bâtiment (généralement pour les surfaces vitrées les murs, le toit, etc.) ; • l’approche en performance, qui définit un niveau global de performance énergétique pour tout le bâtiment. Cette approche est plus efficace, car elle prend en compte les interactions entre les différents constituants. De plus, elle laisse davantage de marge de manœuvre aux architectes et ingénieurs. La mise en place d’une telle réglementation est un processus long et complexe qui doit être mené de manière consciencieuse, sans brûler d’étapes (figure 77). Figure 77. Liste des actions pour la mise en place d’un code d’efficacité énergétique du bâtiment 1. Définir et adopter les objectifs, la portée et les normes. Planifier 2. Définir les modalités de soutien à la mise en œuvre et l’application. 3. Mettre en place un contexte politique favorable. 4. Organiser des campagnes de sensibilisation. Mettre en œuvre 5. Développer du matériel de formation et proposer des formations. 6. Développer les outils nécessaires pour le contrôle de conformité et le suivi. 9. Générer différentes mesures et évaluer les différences de mise en œuvre à l’échelle nationale. 10. Mettre à jour les codes énergétiques du bâtiment de manière régulière, en tenant compte des leçons tirées de l’évaluation. Source : AIE-UNDP (2013). 53.ADEME (2008). 54.AIE-UNDP (2013). r e p è r e 8. Communiquer ouvertement les résultats de conformité et des actions d’applications. d e Évaluer 7. Analyser les tendances en matière de conformité à l’échelon local. P o i n t s Conduire 185 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Une étape importante qui peut s’insérer dans ce tableau consiste à appuyer les exigences sur des projets pilotes de démonstration. Cette stratégie présente notamment les avantages de démontrer la faisabilité du code, d’assurer un meilleur engagement des parties prenantes et de contribuer à la formation des professionnels. Enfin, dans le but d’encourager les investissements du secteur privé, il est nécessaire que la feuille de route de la réglementation soit clairement établie à long terme. Une législation stable rassure les investisseurs et les monteurs de projets, qui peuvent alors établir des plans à longue échéance. Encadré 38. La Directive relative à l’efficacité énergétique de l’Union européennea La Directive relative à l’efficacité énergétique a été adoptée le 25 octobre 2012 par la Commission Européenne. Elle oblige les États membres à développer une stratégie à long terme pour mobiliser l’investissement visant à soutenir la rénovation du stock de bâtiments existants. Un ratio de rénovation des bâtiments publics ou occupés par les administrations centrales est également introduit (3 % de la surface totale chauffée et climatisée chaque année). La directive exige aussi que les États membres veillent à l’installation de compteurs électriques individuels dans les bâtiments neufs pour le 31 décembre 2016. a. UE (2012). P o i n t s d e r e p è r e 4.2.4 L’humain au cœur du bâtiment : sensibilisation, éducation et formation 186 Si les technologies d’efficacité énergétique sont aujourd’hui largement répandues et accessibles, seuls les choix d’investissement des propriétaires et les comportements des usagers permettront d’engager véritablement la transition énergétique dans le secteur du bâtiment et de la construction. Dans cette perspective, des actions de sensibilisation, d’éducation et de formation – couplées à une réglementation ambitieuse et appropriée – doivent être mises en place. 4.2.4.1 Le rôle majeur de l’usager dans la transition énergétique du secteur du bâtiment Une part non négligeable des économies réalisables dans le secteur du bâtiment provient de changements comportementaux des utilisateurs. Selon le dernier rapport du GIEC, une modification des modes de vie et des comportements dans les pays développés Des opportunités d’actions dans tous les secteurs pourrait induire une réduction de la demande énergétique de 20 % à court terme et de 50 % à l’horizon 205055. De fait, même une maison extrêmement performante au niveau énergétique ne produira les économies escomptées que si ses occupants adoptent un mode de vie responsable. Des dizaines d’actions au quotidien ont le potentiel de réduire la facture énergétique d’un foyer. Ces gestes simples relèvent généralement du bon sens : éteindre les lumières, économiser l’eau chaude, chauffer sans excès, éteindre les appareils en veille56. Le fait d’habiter dans un logement performant énergétiquement ne dispense pas l’occupant de ces réflexes ; au contraire, il devrait encourager les comportements écoresponsables en relevant le niveau des exigences. Pour illustrer le rôle majeur des usagers dans la performance énergétique des bâtiments, la figure 78 montre que, même si des progrès ont été faits en matière d’efficacité des systèmes de chauffage, cet effort a été compromis par un usage accru des appareils électriques (illustrant ainsi l’effet rebond des mesures d’efficacité énergétique). L’engagement du citoyen est donc essentiel pour réussir la transition énergétique. Cet engagement passe par sa sensibilisation et son éducation aux problématiques et aux solutions envisageables. Un minimum de connaissances sur les normes et la réglementation en vigueur est essentiel pour lui permettre de dialoguer avec les agences immobilières, les architectes et les décideurs politiques. Par ailleurs, la sensibilisation des usagers peut influer positivement sur la demande en matière de solutions d’efficacité énergétique, contribuant ainsi à la diversité des offres disponibles sur le marché et à une émulation concurrentielle. La figure 79 illustre le cercle vicieux qui se met en place lorsque le grand public est peu sensibilisé aux technologies disponibles. 55.IPCC (2014). 56.Commission européenne (2005). P o i n t s Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2013d). d e r e p è r e Figure 78. Consommation d’énergie selon l’utilisation et évolution de la consommation entre 1990 et 2009 187 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 79. Schéma des obstacles à la circulation de l’innovation Source : PNUE/PAM – Centre d’activités régionales (2011). 57.Smith (2006). 58.Smith (2006). 59.Seghier (2007). r e p è r e d e 4.2.4.2 Former les professionnels du secteur du bâtiment et de la construction Si les technologies d’efficacité énergétique dans le secteur du bâtiment sont multiples et performantes, le problème réside souvent dans leur diffusion, leur acceptation et leur bonne utilisation. En effet, il s’avère que l’évolution continue des technologies de construction pose souvent problème aux professionnels du secteur. Il semblerait ainsi que beaucoup d’opérateurs (architectes, ingénieurs, techniciens) soient étrangers aux techniques de conception, de construction, de réhabilitation, d’exploitation et de maintenance de bâtiments économes en énergie59. P o i n t s En outre, les barrières culturelles n’ont rien de négligeable à l’échelle mondiale. Par exemple, dans de nombreux pays en développement, le bois de feu pour la cuisson des repas et le chauffage est très utilisé (les combustibles à base de bois représentent les deux tiers de l’utilisation domestique57), pour des raisons traditionnelles, voire spirituelles. Le bois est souvent brûlé dans des feux ouverts ou des fourneaux inefficaces. Outre la surconsommation de bois et les émissions de GES qui y sont associées, les particules dégagées sont nuisibles pour la santé humaine, car elles sont notamment responsables de nombreux cas de pneumonie et de bronchite chronique. Des programmes de diffusion de fourneaux améliorés consommant moins tout en étant plus efficaces éner gétiquement sont à mettre en place afin d’orienter des changements de pratique. Les obstacles (notamment financiers et culturels) demeurent toutefois nombreux58. 188 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs C’est pourquoi la formation des différents acteurs de la filière est une étape cruciale pour la mise en place d’un programme ambitieux d’efficacité énergétique. Deux aspects essentiels de la formation sont à développer : • la sensibilisation des acteurs à la nécessité de développer l’efficacité énergétique dans les bâtiments ; • le développement des capacités techniques, par la formation sur les techniques de l’efficacité énergétique. La formation peut être menée au niveau scolaire, de concert avec les universités et les écoles d’architecture, sans oublier les centres de formation professionnelle. Il serait recommandable d’inclure des modules diplômants sur l’efficacité énergétique dans toutes les formations en lien avec le domaine du bâtiment. En complément, la for mation continue des professionnels déjà en activité et celle des dirigeants et autres décideurs politiques est aussi à développer (encadré 39). d e P o i n t s Le module de Formation des professionnels du secteur de l’aménagement urbain, de la construction et du bâtiment aux défis de la transition énergétique s’inscrit dans le cadre des Initiatives francophones pour la promotion des villes durables en Afrique, portées par l’OIF (par l’entre mise de son organe subsidiaire, l’IFDD) et par ses partenaires. Ce module est réalisé à l’initiative de l’IFDD et de l’EAMAU, en partenariat avec ENERGIES 2050 et avec le soutien régulier de partenaires. Cette formation, unique en son genre par sa diversité et son ancrage dans les problématiques actuelles rencontrées par les administrations municipales africaines, a pour objectif de développer, chez les architectes, urbanistes et gestionnaires urbains ainsi que chez les différents professionnels publics ou privés en activité ou en formation concernés par ces thématiques, une bonne maîtrise des défis à relever ainsi que des stratégies et des actions à mettre en œuvre pour construire ou rénover des bâtiments, des infrastructures et aménagements urbains et, d’une manière générale, des villes répondant aux exigences d’aujourd’hui et de demain aux regards des défis de la transition énergétique. La formation s’articule, sur une période de quatre mois, autour de deux sessions présentielles d’une semaine chacune et de la réalisation d’un projet d’application par les participants entre les deux sessions. r e p è r e Encadré 39. La formation africaine des professionnels de l’architecture et de l’urbanisme aux enjeux de la transition énergétique 189 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Le déroulement pédagogique s’articule autour de deux axes complémentaires : des apports théoriques complétés et illustrés par des cas concrets ; un projet d’application réel réalisé par chacun des participants et supervisé par des membres de l’équipe pédagogique. Cette formation se décline en sessions régionales et en sessions nationales. La première session régionale, qui s’est déroulée entre novembre 2012 et mars 2013, a rassemblé 18 professionnels de huit pays francophones subsahariens. La quatrième session régionale a débuté en octobre 2015 pour se terminer en mars 2016. Au total, plus de 75 professionnels, venant de 14 États, ont déjà été formés pendant quatre mois aux enjeux de la transition énergétique et ont chacun mis en œuvre un projet concret dans leur pays respectif. Les premières sessions nationales ont été organisées au Togo et au Burundi en 2012 et en Côte-d’Ivoire en 2015. La formation africaine des professionnels du secteur de l’aménagement urbain, de la construction et du bâtiment est une des actions concrètes dans la mise en œuvre de l’IFVD (voir l’encadré 33), une initiative cofondée par l’IFDD et ENERGIES 2050. 190 Participants de la formation à l’EAMAU, 4e session régionale, Lomé (Togo), octobre 2015. Photo : ENERGIES 2050. 4.3 Les transports La mobilité des biens et des personnes est un formidable catalyseur de l’activité économique ; pour l’individu, elle est un vecteur d’intégration sociale et de libération (grâce à la motorisation individuelle). Notre modèle de développement tout entier est basé sur notre capacité à nous déplacer de plus en plus vite, à des coûts de plus en plus réduits. Pourtant, le secteur des transports est caractérisé par une forte vulnérabilité énergétique et d’importantes répercussions sociales (santé, nuisance sonore, mortalité routière, etc.) Des opportunités d’actions dans tous les secteurs et environnementales. C’est face à cette contradiction que le paradigme actuel pourrait être remis en cause. Cette partie vise à clarifier certains des termes du débat sur la transition énergétique devant être mise en œuvre dans les transports, et à proposer des pistes de réflexion sur les moyens de cette transition. 4.3.1 L’évolution du secteur des transports 60.Laponche (2010). 61.AIE (2012b). 62.Tchung-Ming et Vinot (2009). 63.ONU – Centre d’actualités (2013). d e P o i n t s 4.3.1.1 Une croissance exponentielle de la mobilité au profit du secteur routier Au cours des dernières décennies, les transports ont affiché une croissance soutenue de leur activité à l’échelle mondiale, résultant à la fois de la mondialisation des économies (commerce international), du nombre croissant des déplacements réalisés et de l’allongement des distances moyennes parcourues. À l’avenir, les tendances suivantes pourraient contribuer à renforcer l’activité dans le secteur des transports : • la croissance de la population mondiale, qui pourrait atteindre 9,6 milliards d’habitants en 2050 (contre 7,2 milliards d’habitants en 2013)63 ; • la hausse du pouvoir d’achat moyen dans les pays en développement ; • l’étalement urbain non maîtrisé et, plus globalement, l’accroissement quasi général des villes ; • au niveau industriel, la mondialisation des appareils productifs industriels et la multiplication des échanges commerciaux. r e p è r e Le secteur des transports comprend les déplacements de marchandises et d’individus. Il inclut tous les modes de transport disponibles permettant ces déplacements : routier, aérien, maritime, ferroviaire, etc. Il représente aujourd’hui un peu plus du quart de la consommation finale de l’énergie mondiale60 et plus de la moitié de la consommation mondiale de pétrole, une proportion qui ne cesse d’augmenter avec le doublement du parc de véhicules particuliers (1,7 milliard en Vélostation à Genève. Photo : ENERGIES 2050. 2035) et la hausse du fret routier61. En outre, si l’on prend en compte le fait que les transports dépendent à 98 % des produits pétroliers62, il convient de s’interroger sur les futurs possibles du secteur dans le contexte de la lutte contre le changement climatique et de la diversification des sources d’énergies. 191 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Faisant suite à une première révolution correspondant à l’avènement de la machine à vapeur et des chemins de fer, la seconde révolution industrielle impulsée par les moteurs à explosion et ses applications automobiles entre la fin du 19e et le début du 20e siècle stimule encore le développement de nos sociétés aujourd’hui, façonnant l’organisation sociospatiale des pays industrialisés. Par ailleurs, la hausse du niveau de vie moyen à l’échelle mondiale a démocratisé les transports individuels motorisés dans de nombreux pays émergents et en développement. Selon les projections émises par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE)64, la croissance de la demande mondiale de transports sera beaucoup plus forte à l’extérieur qu’à l’intérieur de la zone OCDE65. Ainsi, le nombre de voyageurs-kilomètres66 dans les pays de l’OCDE devrait augmenter de 30 à 40 % et le nombre de tonnes-kilomètres67, de 60 à 90 % entre 2000 et 2050. À l’extérieur de la zone OCDE, les données en voyageurs-kilomètres pourraient être multipliées par un facteur compris entre 5 et 6,5 et, en tonnes-kilomètres, par un facteur de 5 à 6 sur la même période68. P o i n t s d e r e p è r e Figure 80. Indice du transport mondial de voyageurs, 2000-2050 192 Source : OCDE et FIT (2011). 64.Depuis sa création en 1960, l’OCDE a pour objectif de promouvoir et de soutenir le développement économique à l’échelle internationale. 65.OCDE et FIT (2011). 66.Unité de mesure équivalant au transport d’un voyageur sur une distance d’un kilomètre. INSEE, http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/voyageurkilometre.htm. 67.Unité de mesure correspondant au transport d’une tonne sur une distance d’un kilomètre. INSEE, http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/ tonne-kilometre.htm. 68.OCDE et FIT (2011). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs L’évolution historique du transport de marchandises illustre la croissance effrénée du secteur : le volume de fret aérien (en tonnes-kilomètres transportés) a doublé entre 1980 et 1990, puis de nouveau entre 1990 et 2000, avant de croître encore de près de 50 % entre 2000 et 2010 malgré le ralentissement économique et la crise financière internationale. Quant au fret maritime, il a vu son volume croître de près de 50 % de 1990 à 2000 et de nouveau de plus de 40 % de 2000 à 201069. L’évolution et les projections du secteur de l’automobile donnent également un aperçu de l’accroissement extrêmement rapide de la demande de mobilité. Il est difficile de quantifier avec précision les taux de motorisation par habitant en 2050, mais il est probable, selon l’OCDE, que les pays en développement atteindront des taux proches de ceux des pays européens (550 véhicules pour 1 000 habitants en 2012), sans pour autant arriver au taux états-unien (810 véhicules pour 1 000 habitants en 201270). La Chine, qui est aujourd’hui à moins de 10 % de taux de motorisation, pourrait passer à plus de 50 % en 205071. D’ici 2015 à 2020 la consommation énergétique totale des pays hors OCDE dans le secteur des transports devrait dépasser celle des pays de l’OCDE. À l’avenir, les pays industrialisés connaîtront un tassement de la demande de transports individuels du fait de la saturation urbaine et de la congestion chronique qui s’ensuit, source de pollution et de pertes d’efficacité économique. Leur prise de conscience des contradictions du développement du transport et les moyens financiers dont ils disposent leur permettent de commencer à mettre en place des transports Source : ENERGIES 2050, d’après le site Internet d’Inonev, consulté en décembre 2014. 69.Boutueil (2013). 70.Site Internet d’Inonev, consulté en décembre 2014. 71.OCDE et FIT (2011). P o i n t s d e r e p è r e Figure 81. Taux de motorisation, pays choisis, 2012 193 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 82. Évolution de la répartition de la consommation énergétique du secteur des transports Source : BP (2013b). P o i n t s d e r e p è r e c ollectifs de substitution (métros, tramways, bus) ; en toute logique, un report modal devrait donc se faire progressivement. En revanche, dans de nombreuses régions en développement, la mise en place des chaînes de transport se fait extrêmement vite, sans être accompagnée d’instrument régulateurs environnementaux et sociaux. Or, les répercussions environnementales et sociales du modèle actuel sont déjà considérables. 194 4.3.1.2 L’incidence des émissions du transport sur le climat et la santé De nos jours, les émissions mondiales de CO2 relatives au secteur des transports s’élèvent à 8 Gt/an, soit 20 % des rejets de tous les secteurs confondus. Selon les estimations de l’AIE, le développement du secteur des transports pourrait représenter des émissions de 10 à 18 Gt de CO2 à l’horizon 2050, bien au-delà de la limite de 11 Gt d’émissions – tous secteurs confondus – recommandée pour limiter les effets du changement climatique. Cependant, selon l’OCDE, les émissions de CO2 augmenteront à un rythme moins important que la mobilité, du fait de l’amélioration de l’efficience de la consommation de carburant. Malgré tout, d’ici 2050, les émissions mondiales du secteur des transports pourraient être de 2,5 à 3 fois supérieures aux niveaux de l’année 2000 (figure 83). En réalité, pour que les émissions dues aux transports individuels restent aux niveaux de 2010, la consommation moyenne de carburant devrait passer d’un niveau de 8 L/100 km (consommation en 2008) à 5 L/100 km en 2030 et à moins de 4 L/100 km en 205072. 72.OCDE et FIT (2011). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Figure 83. Émissions mondiales de CO2 dues à l’utilisation des véhicules de transports (indice 2000 = 100) Source : OCDE et FIT (2011). 73.Académie des technologies (2013). 74.Tchung-Ming et Vinot (2009). 75.AIE (2015). d e P o i n t s 4.3.1.3 La dépendance pétrolière du transport Du bois au charbon, du charbon au pétrole, de la traction animale à la motorisation, les transitions énergétiques passées découlent d’une succession de progrès technologiques et de la découverte de sources d’énergie toujours plus performantes. En revanche, la transition énergétique qui devra se faire au 21e siècle sera une réponse aux impacts de l’exploitation intensive des énergies fossiles. Le pétrole fournit, de façon stable depuis près d’un siècle, près de 98 % de l’énergie finale consommée par les transports motorisés dans le monde74. En outre, les transports absorbent près de 64 % de la consommation finale de produits pétroliers en 201375. Ceci reflète le fait que, outre la forte hausse de la demande de transport, les secteurs routier, maritime et aérien dépendent tous totalement du pétrole pour leurs besoins de fonctionnement. Seul le secteur ferroviaire présente un bouquet énergétique plus varié, composé de charbon, de fioul et d’électricité. r e p è r e Sur le plan de la santé publique, les Nations Unies attribuent 1,1 % des décès survenus dans le monde aux effets de la pollution locale émanant des transports73. Il est aujourd’hui prouvé que les émissions de monoxyde de carbone, de particules fines, d’oxydes d’azote et de certains composés organiques volatils peuvent avoir des incidences graves sur les défenses immunitaires, les voies respiratoires, la vue, etc. L’Organisation mondiale de la santé a récemment classé les gaz d’échappement des moteurs diesel dans la catégorie des « cancérogènes certains ». Une des principales raisons des émissions polluantes issues du transport réside dans la dépendance quasi intégrale de ce secteur aux énergies fossiles. 195 La transition énergétique : connaître et partager pour agir La part de la consommation totale d’énergie allouée au transport est passée de 2 à 28 % en un siècle. Durant cette période, le pétrole s’est imposé face aux autres sources d’énergie. Du début du 20e siècle à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les produits pétroliers ne sont pas encore utilisés à grande échelle. La période est pourtant marquée par les débuts de l’industrie automobile ; les moteurs à combustion interne sont dès lors conçus pour fonctionner à l’éthanol, ou encore à l’huile végétale, dans le cas des moteurs diesel. Porté après la guerre par le développement massif du parc automobile, qui est passé de 50 millions à plus de 1 milliard d’unités en 65 ans, le pétrole a connu une très large diffusion. Bon marché et abondant, il a induit un désintérêt de l’industrie automobile pour les biocarburants, plus coûteux à produire. En 1950, un litre de pétrole coûtait près de cinq fois moins cher qu’un volume équivalent de lait et dix fois moins qu’un litre de vin (figure 84). P o i n t s d e r e p è r e Figure 84. Évolution des prix du litre de lait, de vin et de pétrole, France, 1930-2010 196 Source : INSEE (données, convertisseur franc-euros) ; Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (MEDDE) ; France-Inflation (données, taux de change). Pour mettre en évidence le caractère toujours bon marché du pétrole par rapport au service rendu, Jean Marc Jancovici76 propose de convertir notre consommation énergétique en « équivalent esclave ». Un homme en pleine santé et en excellente condition physique peut fournir une énergie mécanique maximale de 0,5 kWh en 8 heures de travail. L’essence obtenue par raffinage du pétrole contient environ 10 kWh par litre. Ainsi, chaque litre d’essence consommé dans un moteur thermique correspond à la consommation fournie par 2 « esclaves » travaillant toute une journée, pour un prix dérisoire de 60 centimes d’euro hors taxes. 76.Baudry (2014). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Ainsi, le pétrole est intrinsèquement lié au fonctionnement du transport, parce qu’en plus d’être bon marché au départ, il présente des caractéristiques favorables : il est facile à produire (le prix d’extraction est assez faible), à transporter sur de longues distances (car il est liquide) et à utiliser, et qu’il possède un contenu énergétique très élevé. Il a donc été privilégié historiquement dans la motorisation thermique, sur le marché de l’automobile et du transport en général. Le développement des infrastructures routières et des services connexe a suivi en parallèle. Outre les émissions de polluants atmosphériques et leurs répercussions sur le climat et la santé, les effets sociaux et économiques du tout pétrole et les incidences environnementales des infrastructures sont nombreux, et le système ne favorise pas l’accès généralisé à la mobilité dans le monde. France Revenu brut ($/h) Essence ($/L) Temps de travail (h) Consommation (kep31/pers) 12,29 1,91 8 106 États-Unis 7,25 0,97 7 1 106 Espagne 5,39 1,75 16 106 Roumanie 1,47 1,70 58 61 Bangladesh 0,19 1,15 302 ~ 23 jours 3 Source : Banque mondiale, Consommation d’essence du secteur routier par habitant, 2012 ; Banque mondiale, Prix à la pompe de l’essence ($ US par litre), 2012. d e Pays P o i n t s Figure 85. Temps de travail nécessaire pour accéder à 50 litres d’essence, pays choisis r e p è r e 4.3.1.4 Un accès inégal à l’énergie et au transport Si, de par sa compétitivité, le pétrole a été et demeure favorisé dans le secteur des transports, il est assez paradoxal de constater que pour certaines personnes obligées de se déplacer, il représente une ressource indispensable vendue à un prix prohibitif. La figure 85 propose une évaluation du coût de l’essence en termes de temps de travail. Le coût de production de l’essence est de l’ordre de 0,7 $/L ; quant au prix de revente, il dépend du système de taxation appliqué dans chaque État. Dans les pays à haut revenu, tels les États-Unis, de la France ou de l’Espagne présentés dans la figure 85, quelques heures de travail suffisent pour acquérir un plein d’essence. En revanche, l’accès à la même quantité d’énergie en Roumanie nécessiterait de travailler plus de 58 heures. Un ouvrier du secteur du textile au Bangladesh devrait quant à lui travailler près de 23 jours à raison de 13 heures par jour, illustrant ainsi l’accès très limité à l’énergie dans ce pays : la moyenne de consommation d’essence annuelle par personne au Bangladesh est 20 fois plus faible qu’en Roumanie et 370 fois moins importante qu’aux États-Unis. Ces moyennes par personne ne sont données qu’à titre illustratif, car elles ne tiennent pas compte des inégalités à l’intérieur de chaque pays. 197 La transition énergétique : connaître et partager pour agir En réalité, l’ouvrier du textile bangladais, avec un salaire mensuel de 68 $, n’a accès ni à l’essence ni aux véhicules motorisés77. La forte hausse de la mobilité individuelle moyenne masque ainsi de fortes inégalités en termes d’accès au transport et de pouvoir d’achat du carburant. 4.3.1.5 De nombreuses externalités négatives aux coûts importants Le transport tel qu’il s’est développé jusqu’ici, favorisant le routier et la consommation de pétrole, participe donc de façon très significative aux nombreux risques associés à un système énergétique basé sur les énergies fossiles78. À cela s’ajoutent les effets environnementaux liés aux infrastructures (elles-mêmes favorisées par la dispersion des services que permettent les transports individuels), les impacts sonores, les questions de sécurité routière, les questions sociales (dépenses en carburant dans le budget des ménages) et, au final, la congestion permanente de la circulation dans les grandes villes du monde, impliquant des pertes économiques significatives (coûts de congestion). L’action pour la transition énergétique dans le secteur du transport est aussi un moyen de répondre à l’ensemble de ces problèmes. Il convient cependant de l’aborder de manière globale. Dans le secteur des transports, la transition énergétique ne sera possible que dans la mesure où une approche systémique sera mise en œuvre. Ainsi, le déploiement d’une offre de mobilité alternative à la voiture individuelle (rééquilibrage de la répartition modale du transport), l’amélioration de l’efficacité énergétique des différents modes de transport et la diversification des sources d’énergie du secteur (amélioration de l’éco- efficience) doivent se faire en parallèle avec les actions menées dans les autres secteurs. En effet, la complexité des systèmes de transport (multitude d’acteurs : particuliers, entreprises, usagers, fournisseurs de matériel, de services, d’infrastructures, pouvoirs publics, opérateurs) et leurs modalités d’interaction avec le territoire (ville, zone rurale, région, État) rendent indispensable la réflexion et la mise en œuvre de solutions adaptées aux différentes caractéristiques des territoires. En outre, les différentes logiques techniques et organisationnelles à l’intérieur même du secteur, selon que l’on considère le transport de fret ou de passagers, et le riche éventail de solutions utilisées par ces systèmes pour surmonter leurs problématiques spécifiques accentuent la nécessité d’une approche systémique. P o i n t s d e r e p è r e 4.3.2 Des possibilités d’action à mettre en œuvre par une approche systémique 198 77.Le Monde (2013). 78.Voir la partie 1.1. Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 4.3.2.1 Les énergies de substitution Depuis plusieurs années maintenant, des filières de substitution aux carburants issus du pétrole se multiplient. La figure 86 met notamment en valeur le gaz de pétrole liquéfié (GPL), le gaz naturel véhicule (GNV), les biocarburants et l’électricité en tant que solutions de rechange offrant des performances environnementales bien meilleures que l’essence ou le diesel. Figure 86. Les filières énergétiques 79.Comité français du butane et du propane (2013). 80.Comité français du butane et du propane (2013). d e P o i n t s Le GPL est historiquement le premier véritable carburant de remplacement. Il s’agit d’un mélange de 50 % de butane et de 50 % de propane issu du raffinage du pétrole ou de gisements de gaz naturel. Reconnu pour sa contribution à la diversité énergétique et surtout aux objectifs environnementaux et de santé publique, le GPL est aujourd’hui l’un des carburants de substitution les plus utilisés au monde : plus de 21 millions de véhicules, dont 6,7 millions dans l’Union européenne (UE) en 201379. Les véhicules au GPL se caractérisent par des émissions polluantes relativement faibles. Selon une étude menée en 2004 par plusieurs laboratoires européens, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) et Energy Saving Trust, les véhicules à GPL consomment en moyenne 30 % de plus en volume, mais émettent environ 12 % de moins de CO2 par kilomètre parcouru que les véhicules à essence. En outre, la combustion du GPL étant complète, elle n’émet pas de particules fines80. Le GNV est un gaz naturel (méthane) identique à celui qui circule dans les réseaux de distribution, mais utilisé pour la consommation automobile. Il peut soit être issu des gisements fossiles de gaz naturel (ce qui est généralement le cas), soit être obtenu par épuration du biogaz – source d’énergie renouvelable dérivée de la collecte des ordures ménagères ou agricoles. Toutes les études montrent que les émissions d’un véhicule r e p è r e Source : Tchung-Ming et Vinot (2009). 199 La transition énergétique : connaître et partager pour agir consommant du GNV sont parmi les plus faibles de tous les carburants issus des énergies fossiles. Il semble même que le bilan écologique soit encore meilleur lorsque le GNV utilisé provient de biométhane issu des déchets (car il est capté et utilisé au lieu d’être relâché dans l’atmosphère). Le GNV est aujourd’hui essentiellement utilisé par les véhicules de flottes captives (bus, poids lourds, véhicules d’entreprise, bennes à ordures, etc.)81. Les biocarburants se déclinent en deux grands types : l’éthanol et les esters méthyliques d’huile végétale, voire animale ou biodiesel. L’éthanol utilisé dans les moteurs à essence provient de plantes sucrières comme la canne à sucre et la betterave, ou de plantes amylacées comme le blé ou le maïs. L’atout principal des biocarburants est la possibilité de les mélanger à l’essence et au gazole, profitant ainsi des réseaux de distribution classiques de carburants, combinée au fait qu’ils ne nécessitent pas de bouleversements technologiques majeurs au niveau des moteurs de véhicules. P o i n t s d e r e p è r e Figure 87. Filières de biocarburants de première génération 200 Source : Tchung-Ming et Vinot (2009). Cependant, si les effets liés aux émissions de CO2 à l’échelle globale sont intéressants, en revanche, les répercussions locales sur l’eau et l’utilisation des sols font débat. Nous reviendrons sur les enjeux et perspectives des biocarburants à la partie 4.3.4. L’électrification de la mobilité, en particulier sur la route, constitue désormais une voie intéressante pour répondre aux grands défis du transport. Les modèles hybrides se multiplient et sont aujourd’hui relativement répandus. Un véhicule hybride combine plusieurs types de motorisation. Les plus connus associent un moteur thermique à essence et une motorisation électrique. L’hybridation est cependant combinable avec tous les types de carburants (essence, gazole, biocarburants, gaz naturel ou GPL) afin 81.Isoard et Lamy (2013). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs de lier les avantages hybride-carburant pour atteindre des niveaux d’émissions de CO2 assez bas. Plusieurs systèmes sont aujourd’hui commercialisés ; les principaux sont les véhicules à hybridation légère (récupération d’énergie au freinage) et les véhicules à hybridation complète (modes de fonctionnement totalement électriques, donc à émissions nulles)82. 4.3.2.2 Agir sur l’organisation économique et spatiale pour limiter les émissions Bande cyclable à Genève. Photo : ENERGIES 2050. 82.Vinot (2012). P o i n t s d e L’optimisation des transports En outre, l’optimisation de la conduite des opérations de transport pourrait éventuellement impliquer des coûts énergétiques considérablement réduits, en améliorant le taux de chargement des camions ou le taux de remplissage des avions afin d’économiser r e p è r e Les aménagements urbains, les transports collectifs, le vélo, la marche Une politique d’urbanisme et une politique foncière contribuant à favoriser la mixité des fonctions (résidentielle, commerciale, de services) et imposant un seuil de densité minimum pourraient contribuer à limiter l’étalement urbain, à faciliter le déploiement de systèmes de transports collectifs performants, à favoriser les déplacements piétonniers ou à rentabiliser l’investissement dans des infrastructures de transport, telles les pistes et bandes cyclables, et des infrastructures intermodales, tels les parcs relais (voir la partie 4.1). On constate en effet une corrélation entre la répartition des modes de transport (marche, cycles, automobile, transport en commun) et l’étendue de l’offre de services, d’infrastructures et d’organisation urbaine. Bien que les actions nécessaires relèvent de la compétence publique, des parte nariats avec le secteur privé peuvent accélérer leur mise en œuvre et alléger l’investissement des pouvoirs publics. Ces actions visant à faciliter le report modal des usagers concourent à la lutte contre l’inertie des comportements centrés aujourd’hui majoritairement sur les modes de transports individuels. 201 La transition énergétique : connaître et partager pour agir des capitaux et de l’énergie. Par ailleurs, dans le secteur de la livraison urbaine expresse, la fiabilité des horaires de livraison ou le recours à des relais de proximité devraient être favorisés pour éviter les déplacements inutiles. Les pouvoirs publics seraient en mesure d’agir sur ces propositions en imposant des standards et en instaurant des incitations pour favoriser leur mise en place83. 4.3.2.3 Le rôle indispensable de l’usager dans le changement de paradigme Les usagers ont un rôle non négligeable à jouer dans le secteur des transports. La sensibilisation, l’information et la communication sont des moyens qui peuvent influencer, à un coût limité, les comportements des individus. P o i n t s d e r e p è r e Les progrès technologiques Les leviers technologiques, enfin, sont majoritairement liés aux constructeurs qui peuvent choisir de développer ou non des moteurs thermiques offrant de meilleures performances énergétiques ou des véhicules utilisant des carburants de substitution. Des progrès sont également possibles en améliorant l’aérodynamique des véhicules, en allégeant les structures et équipements, etc. Cependant, bien que l’offre commerciale soit en cours de diversification et de démocratisation, ces mesures ne seront réellement mises en œuvre que si les pouvoirs publics jouent le rôle d’incitateurs en instaurant des normes de consommation énergétique ou en rééquilibrant les subventions : ainsi, il peut s’avérer pertinent de réduire les subventions allouées aux énergies fossiles pour les investir, par exemple, dans la recherche pour le développement d’énergies de substitution. De même, l’imposition de fortes taxes sur l’essence entraîne des changements structurels à long terme. Sachant que le prix élevé de l’énergie devrait demeurer une réalité à l’avenir (la récente chute des cours du pétrole n’a pas suffi pour ramener les énergies fossiles à un prix « bas » ; en outre, la question de la durabilité de cette baisse se pose), les usagers vont devoir apprendre à modifier leur mobilité plus durablement, par exemple en habitant plus près de leur lieu de travail, et l’industrie de l’automobile développera des véhicules plus sobres en énergie pour s’adapter au prix élevé des carburants. Une telle densité d’actions à entreprendre peut sembler un obstacle à la conduite d’une stratégie de transition énergétique intégrée dans le secteur des transports. Pourtant, celui-ci garantit à chaque collectivité de pouvoir trouver une combinaison de mesures adaptées et susceptibles d’améliorer grandement la performance énergétique globale de son système de transport. 202 83.Boutueil (2013). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs L’information sur la performance L’étiquetage des voitures et des pneumatiques en fonction de leur performance éner gétique, accompagné d’une sensibilisation à la notion de coût total de possession (prix d’achat, coûts d’usage, carburant, assurance, réparations, etc.), peut favoriser l’appropriation de la transition énergétique par les citoyens. L’écoconduite et les autres mesures « douces » De nouvelles manières de se déplacer, liées aux modes de vie contemporains, amènent de nouvelles solutions répondant aux enjeux de la transition énergétique. Ainsi, des formations à l’écoconduite, ou conduite économique (qui se caractérise par la pratique d’une conduite souple et modérée pour réduire sa consommation de carburant), impliqueraient des gains de consommation de carburant de l’ordre de 5 à 15 %, avec un délai de rentabilisation de 6 à 18 mois84. Dans le même état d’esprit, certains pays anglosaxons travaillent par exemple à la mise en place de plans de déplacement à l’échelle d’une entreprise ou d’un bassin d’activité, ou encore à des mesures « coup de pouce », consistant par exemple à marquer la signalisation au sol pour réduire la vitesse moyenne de la circulation dans certaines zones. Les nouvelles technologies de l’information peuvent aussi être mises à profit pour fluidifier la circulation et réduire la congestion, un phénomène très polluant et énergivore. 84.Boutueil (2013). 85.Boutueil (2013). P o i n t s d e La fiscalité La fiscalité contribue aussi à orienter les comportements. Par exemple, la taxe annuelle sur la possession d’un véhicule ou l’instauration d’un système de bonus-malus à l’achat indexé sur la consommation énergétique sont des outils susceptibles d’avoir de puissants effets sur la motorisation des ménages. r e p è r e Le covoiturage De même, les solutions de covoiturage (plusieurs personnes faisant ensemble le même trajet ou une portion d’un trajet), d’autopartage (plusieurs personnes se partageant l’usage d’une voiture ou d’un parc automobile) et d’autres types de transport à la demande (taxis collectifs, etc.) sont également amenées à jouer un rôle de plus en plus important dans la mobilité urbaine et rurale quotidienne, dans la mesure où un support approprié – plateforme numérique, réglementation des assurances, etc. – permet de les rendre efficaces85. 203 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 204 4.3.2.4 Financer la transition énergétique dans le secteur des transports La crise économique internationale actuelle limite les possibilités de financement public dans tous les secteurs majeurs. Il s’agit donc, par une forte volonté politique, de saisir les occasions les plus accessibles. L’une des moins coûteuses consiste à agir sur des éléments précis des systèmes de transports collectifs existants. Par exemple, l’augmentation de la maintenance préventive (pour limiter les pannes graves) de la fréquence de desserte ou de la vitesse commerciale permet de réaliser des économies. Même si ces actions sont moins populaires – car moins visibles – que la construction de nouvelles infrastructures, elles contribuent à renforcer l’attractivité générale des transports collectifs86. Si des projets d’infrastructures sont nécessaires, il s’agit, dans un contexte de crise globale, d’instaurer une justice en matière de prix en associant l’ensemble des bénéficiaires des services dans les dépenses afin de couvrir le coût réel de leur déploiement et de leur exploitation. Il peut s’agir des entreprises industrielles et commerciales, qui bénéficient alors d’une accessibilité améliorée, ou des propriétaires fonciers, qui profitent de la plus-value foncière réalisée sur les biens immobiliers. Plus globalement, il est nécessaire de déterminer et de valoriser les avantages collatéraux d’un projet lié au secteur des transports à court, moyen et long terme, en particulier si ce projet contribue à désenclaver une région industrielle ou agricole qui en bénéficiera pour la commercialisation de sa production87. Enfin, de nouveaux montages financiers sont à souligner. Dans les pays en développement, le Mécanisme pour un développement propre (MDP), un mécanisme économique de la finance du carbone élaboré dans le cadre du protocole de Kyoto88, n’a pas contribué jusqu’ici au financement d’un grand nombre de projets dans le secteur des transports, du fait de méthodologies de mesure d’émissions inadaptées au secteur. Ainsi, sur plus de 11 000 projets enregistrés fin 2011 au titre du MDP, seuls 55 relevaient du secteur des transports89. Cependant, ces mécanismes ont tendance à se renforcer dans les pays en développement suite au projet phare du service rapide par bus (SRB) de Bogota en 1999 (lui-même inspiré des expériences menées à Curitiba, au Brésil ; voir l’encadré 29)90. D’autres villes de pays en développement se sont ensuite inspirées de ce modèle pour développer leur propre SRB : Séoul, Mexico, Zhengzhou, Quito, Delhi, etc. Par ailleurs, des projets d’électrification de flottes privées sont financés en Inde via ces mécanismes. Le MDP a également servi à financer des projets de développement des biocarburants en Inde, en Chine et au Brésil. 86.Boutueil (2013). 87.Boutueil (2013). 88.Le MDP est un mécanisme proposé par le Protocole de Kyoto permettant aux pays industrialisés d’atteindre leur cible de réduction des GES en investissant dans des projets de réduction dans les pays en développement (Labriet, 2009). 89.Boutueil (2013). 90.Dancourt (s.d.). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs d e P o i n t s Le projet Transmilenio, mis en œuvre dans la plus grande ville de Colombie (7 millions d’habitants) a vu le jour en 1999 sous Enrique Peñalosa, alors maire de Bogota. Il s’agissait de mettre en place un réseau de transport en commun moderne, efficace, rapide et pratique afin d’encourager le report modal et d’accueillir de nombreux usagers. Le système de fonctionnement a en grande partie été inspiré de l’exemple de Curitiba (voies de bus réservées, stations facilitant l’embarquement, bus à grande capacité, billetterie avant la montée, etc.). Le plan de construction du projet Transmilenio comprend 25 lignes principales, pour une distance totale de 387 km. Le partenariat public-privé Transmilenio S.A. a été constitué pour réaliser ce projet. La mairie de Bogota était responsable du financement des infrastructures (voies de bus réservées, stations, terminaux, voies d’accès aux stations, dépôts d’autobus et centre de contrôle du réseau), alors que les sociétés privées se chargeaient des investissements dans la flotte de bus et les distributeurs de billets, ainsi que de l’exploitation des lignes. La composante MDP du projet a fait l’objet d’une initiative conjointe entre Transmilenio S.A. et Corporación Andina de Fomento (CAF), la banque multilatérale de développement des Andes. Cette dernière jouait le rôle de promoteur du projet et d’intermédiaire dans l’achat des crédits carbone au nom de l’État néerlandais. La CAF a également fait appel à des cabinets de conseil pour élaborer les méthodologies (SASA et Grütter Consulting). Selon les premières projections réalisées par le ministère national de la Planification, le coût de l’infrastructure du projet était estimé à 1 750 millions d’euros sur la période 2000-2016. Parmi les dépenses d’infrastructure, 66 % sont couvertes par des fonds publics d’État et 34 % par la mairie de Bogota (les fonds proviennent d’une surtaxe sur le carburant, de la privatisation d’une partie d’une entreprise publique d’électricité, du MDP, des retombées financières de la couverture médiatique du projet, etc.), le tout sous forme de subventions et non de prêts à rembourser. Le coût prévisionnel des bus et du matériel de vente de billets sur la même période s’élève à 859 millions d’euros. Ces dépenses sont financées par des investisseurs privés. Les recettes sur la vente de billets couvrent uniquement les frais de fonctionnement. r e p è r e Encadré 40. Le financement du projet de SRB Transmilenio, à Bogotaa 205 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 88. Schéma du financement du Transmilenio Source : Clapp et al. (2011). r e p è r e a.Clapp et al. (2011). Les pays développés, disposant – malgré la crise – de plus de capacités de financement que les pays en développement, utilisent de plus en plus le levier des partenariats public-privé (PPP), qui permettent de faire émerger de nouvelles offres dans le transport urbain de voyageurs : bus à haut niveau de services, tramways, véhicules électriques en libre-service, etc. (voir la partie 4.1). Les possibilités sont donc nombreuses et la créativité face au défi du financement est nécessaire si l’on veut soutenir la transition énergétique dans le secteur des transports. Dans un contexte de crise économique mondiale, les pouvoirs publics sont donc encouragés à mener une réflexion approfondie sur les systèmes de transport tout en y associant le secteur privé et la société civile. P o i n t s d e 4.3.3 La controverse des biocarburants 206 Au début du 20e siècle, les premiers moteurs à explosion étaient conçus pour être alimentés par un carburant issu de matières organiques et non fossiles. Malgré le manque d’intérêt des industriels pour les biocarburants au siècle dernier, les moteurs actuels sont restés compatibles91 : par exemple, le bioéthanol issu de la fermentation de cultures 91.Il s’agit ici de compatibilité à des taux de mélange variables en fonction de la motorisation. Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 92.Le terme agrocarburant est parfois préféré biocarburant, pour éviter toute confusion avec les filières d’agriculture biologique. 93.Procédé consistant à mélanger l’huile végétale à un alcool et un catalyseur pour obtenir, dans le cas présent, du biodiesel. 94.Il s’agit des parties non comestibles de la plante, la tige, par exemple. d e P o i n t s 4.3.3.1 Proposer une source d’énergie propre sans porter atteinte à la sécurité alimentaire : l’enjeu central des biocarburants Les générations de biocarburants sont principalement caractérisées par l’origine des matières premières dont ils sont issus. Les agrocarburants92 produits à partir de cultures alimentaires telles que le maïs, le colza ou la canne à sucre, sont dits de première génération. Le bioéthanol est obtenu par fermentation du sucre ou de l’amidon des cultures (blé, maïs) ; quant au biodiesel, il est obtenu par la transestérification93 des huiles végétales. Cette première génération de biocarburants représente de nos jours la seule énergie renouvelable permettant de se substituer aux produits pétroliers dans des volumes significatifs (près de 60 Mtep en 2012). À titre d’illustration, ce chiffre correspond à 12 jours de consommation d’énergie allouée aux transports à l’échelle mondiale. La production de ce volume nécessite la mobilisation de 610 000 km² de terres, soit l’équivalent de la superficie de la Péninsule ibérique. Cette situation a rapidement levé des questions d’ordre éthique : peut-on mettre en concurrence les productions alimentaire et énergétique ? En réponse à ce dilemme, une deuxième génération de biocarburant a vu le jour. Issus de la matière lignocellulosique des cultures94 telles que la paille ou le bois, ces biocarburants ne sont pas en concurrence directe avec l’alimentation. Le bioéthanol est produit par la fermentation du sucre extrait de la biomasse par voie biochimique. Le biodiesel est principalement issu du procédé de transformation de la biomasse en liquide, évolution de la conversion de charbon en liquide utilisée à l’origine pendant la Seconde Guerre mondiale pour produire du pétrole de synthèse à partir du charbon. La biomasse est tout d’abord gazéifiée avant d’être transformée en hydrocarbure par réaction chimique catalysée (procédé de Fischer-Tropsch). La production à grande échelle de ces biocarburants est prévue à l’horizon 2020, mais la question d’une concurrence indirecte avec l’alimentation se pose d’ores et déjà. Les volumes de déchets r e p è r e sucrières (céréales, betterave, maïs, etc.) peut alimenter les moteurs à essence, tandis que les huiles végétales (colza, palme, soja, etc.) sont utilisées dans les moteurs diesel. À l’heure actuelle, les biocarburants sont en majorité valorisés en tant qu’additifs aux carburants conventionnels, notamment l’E10 (10 % de bioéthanol), l’E85 (85 % de bioéthanol) et du B5 (5 % de biodiesel). Comme les dérivés du pétrole, ils sont liquides, caractérisés par un contenu énergétique élevé, et faciles à stocker et à transporter. Les biocarburants constituent donc une source énergétique complémentaire de choix pour les transports. La question est maintenant de savoir comment surmonter les obstacles inhérents à leurs caractéristiques pour favoriser leur développement. 207 La transition énergétique : connaître et partager pour agir a gricoles ou forestiers réellement inutilisés sont insuffisants : la paille est aussi utilisée pour la fertilisation des sols, l’alimentation du bétail, etc. Ainsi, le développement de cultures dédiées, bien que non alimentaires, engendrerait une concurrence indirecte par le changement d’affectation des sols. Dans une même dynamique, une troisième génération est née pour faire face aux limites des deux précédentes. Produit à partir de microalgues, ce biocarburant dispose de propriétés qui lui donnent un rendement nettement supérieur à celui des plantes terrestres. La culture des microalgues ne réquisitionne pas de terres arables et peut même valoriser des sites impropres à l’exploitation agricole. Le bioéthanol et le biodiesel seront respectivement issus de l’accumulation et de la valorisation de sucres ou de lipides par les microalgues. Plusieurs obstacles restent cependant à franchir pour arriver à produire un biocarburant algal à grande échelle, notamment l’amélioration du rendement énergétique et une nette réduction des coûts de production. L’utilisation potentielle d’algues génétiquement modifiées pour accumuler davantage de lipides ou de sucre et augmenter d’autant les rendements de production pose également des questions d’ordre éthique, en ce qui concerne le principe de précaution, quant à la difficulté d’évaluer ses effets potentiels sur les écosystèmes. 4.3.3.2 Une projection sur les coûts et les volumes de production des biocarburants La figure 89 présente le coût de production estimatif des biocarburants à l’horizon 2030. Selon l’AIE, la parité entre les coûts de production des biocarburants de seconde génération (en bleu et violet) et des carburants conventionnels (en noir) sera atteinte en 2030, sous réserve d’un cours du baril supérieur à 120 $. Dans le cas contraire, seuls les biocarburants de première génération (en vert), plus matures, pourraient concurrencer les carburants classiques. Les biocarburants issus des algues ne devraient pas être concurrentiels à l’horizon 2030, en raison de coûts de deux à trois fois plus élevés que pour leurs concurrents. P o i n t s d e r e p è r e Figure 89. Estimation des coûts de production des biocarburants à l’horizon 2030 208 Source : AIE (2011e). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Cependant, les rendements des cultures destinées à la production des biocarburants peuvent être évalués selon plusieurs approches. Dans la figure 90, ils sont convertis en surface agricole utile (SAU) mobilisable pour répondre à la demande annuelle de carburant en France. Selon cette approche, les biocarburants les plus performants sont ceux qui l’étaient le moins en termes de compétitivité économique. En France, pour produire assez de biocarburant de première génération pour assurer la mobilité des nationaux, il faudrait mobiliser entre 55 et 66 % de la surface agricole utile. En conséquence, les deux tiers de la production du cinquième producteur agricole mondial seraient monopolisés par l’énergie en lieu et place de l’alimentaire. Les biocarburants produits à partir d’algues ne nécessiteraient en revanche que de 5 à 6 % de la SAU, soit l’équivalent de la surface déjà allouée à l’heure actuelle aux premières générations. Figure 90. Rendement des productions de biocarburants Biocarburant Rendement (L/ha) Part de la SAU française Bioéthanol (maïs) 1 800 55 % Biodiesel (colza) 1 500 66 % Bioéthanol (résidus) 2 200 45 % Biodiesel (FT-bois) 3 100 32 % Biocarburants algaux De 15 000 à 20 000 De 5 à 6,5 % 95.IFPRI (2009). d e 4.3.3.3 Les effets des biocarburants sur le changement climatique La figure 91 présente, de gauche à droite, les émissions de GES évitées par l’utilisation de biocarburants de première (en vert), deuxième (en bleu) et troisième génération (en violet) en lieu et place des carburants conventionnels. Les biocarburants dits avancés, c’est-à-dire les deuxième et troisième générations, ont d’excellents bilans carbone allant de 50 à 120 % de réduction par rapport à leurs homologues fossiles. Selon les chiffres P o i n t s Le rendement de la production des biocarburants est cependant conditionné par celui des cultures de céréales, de biomasse ou d’algues. Les progrès technologiques à moyen et long terme devraient améliorer ces rendements, mais ces hauts niveaux de productivité reposent sur l’utilisation massive de produits pétroliers. À titre d’exemple, la production moyenne de céréales à Haïti s’élève à 750 kg/km2, contre près de 7 500 kg/km2 en France. En outre, le changement climatique pourrait également réduire les rendements agricoles en fonction de l’intensité des hausses de températures globales. Le rendement du blé pourrait par exemple décroître de 20 à 35 % dans les pays en développement, et de 0,1 à 5,7 % dans les pays industrialisés95, ce qui compromet d’autant la production des biocarburants associés. r e p è r e Source : AIE (2011e). 209 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 91. Émissions de GES évitées par rapport aux carburants conventionnels, selon le type de biocarburant P o i n t s d e r e p è r e Source : AIE (2011e). 210 de l’AIE, en fonction des méthodes de production utilisées, le bioéthanol issu du maïs peut émettre plus de GES qu’un carburant fossile. Pour illustrer simplement ce phénomène, prenons l’exemple d’un biodiesel issu de soja. Imaginons qu’une exploitation de soja occupe des terres qui pourraient être utilisées pour d’autres productions alimentaires ; ces dernières devront ainsi être relocalisées. Supposons maintenant que la tension sur les terres arables soit telle qu’il soit nécessaire de déboiser de la forêt primaire pour assurer la production alimentaire (première cause de déforestation dans le monde). La suppression du puits naturel de carbone que représentait cette forêt serait alors imputable à la production du biodiesel issu du soja. Le bilan carbone global serait pire que celui d’un carburant classique. Une solution aux tensions pour lutter contre la réquisition des terres serait d’acheter ou de louer des terres arables là où elles sont disponibles, généralement dans les zones géographiques les plus défavorisées. D’après les Nations Unies, ce phénomène représente cependant une menace pour le développement ainsi que pour la sécurité alimentaire. Depuis le début du siècle, plus de 200 Mha de terres ont d’ores et déjà été achetées ou louées96, soit l’équivalent de quatre fois la superficie du Kenya. En raison d’un manque de transparence sur les transactions, l’évaluation de la part des terres allouées à la production de biocarburant est assez vague : elle se situe quelque part entre 25 et 50 %. En tête des acheteurs se trouvent la Chine (4,5 Mha), les États-Unis (3,2 Mha) et la Grande-Bretagne (2,5 Mha). Du côté des vendeurs se retrouvent l’Afrique (62 % des contrats), l’Asie du Sud-Est et l’Amérique latine. Selon l’étude réalisée 96.Site Internet de Land Matrix, consulté en décembre 2014. Des opportunités d’actions dans tous les secteurs par Land Matrix97, sur 86 observations, seuls six contrats d’achat ont été mis en place à la suite d’un consentement libre de la population préalablement consultée et informée. L’usage de biocarburants accroît l’indépendance énergétique et réduit la dépendance aux produits pétroliers. Le développement des filières de production est également propice à la création de nouveaux emplois et assure de nouveaux revenus aux producteurs agricoles. Il est cependant évident qu’une nouvelle demande en terres arables engendrerait des tensions entre marchés alimentaire et énergétique, pouvant entraîner une accélération de la déforestation ou une atteinte à la souveraineté ali mentaire des pays les plus vulnérables. Les États ont alors un rôle déterminant à jouer dans la mise en place d’un cadre favorable au développement d’une filière de biocarburants qui soit réellement durable sur le plan environnemental, tout en prémunissant les populations locales contre l’insécurité alimentaire. 4.4L’industrie Le secteur industriel a des effets significatifs sur l’environnement, non seulement du point de vue de la consommation des ressources, mais aussi pour ce qui est de la pollution générée et des émissions de GES. Alors que la production industrielle à l’échelle mondiale devrait doubler, voire tripler d’ici 2050, il semble indispensable d’engager une transition profonde de ce secteur pour qu’il puisse répondre aux enjeux et défis actuels et à venir. Dans un contexte de crise énergétique et face à la prise de conscience des consommateurs quant aux limites des modes de production actuels, la transition énergétique représente une véritable opportunité pour l’industrie. Il s’agit de promouvoir l’innovation, de réaliser des économies sur les coûts de fonctionnement et d’optimiser l’usage des ressources, mais aussi de répondre aux attentes des individus, dont les choix s’orientent de plus en plus vers des produits éthiques et responsables. 97.Partenariat de cinq institutions internationales, représenté en France par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement. 98.AIE (2015). 99.Soit à près de 40 millions de gigawattheures. d e P o i n t s L’industrie représente 29 % de la consommation finale d’énergie au niveau mondial. Selon les projections de l’AIE, la consommation du secteur pourrait s’accroître de 40 % d’ici 2040, passant de 2 702 à 3 808 Mtep98. La plupart des industries – notamment par l’exploitation des minerais, du bois, de l’eau et des hydrocarbures – exercent une pression énorme sur les ressources naturelles de la planète. Malgré l’amélioration de l’efficacité énergétique et l’atténuation des émissions dans de nombreux secteurs industriels, la croissance de la production de l’industrie mondiale implique une empreinte écologique toujours plus importante. L’AIE estime ainsi que la consommation d’énergie a atteint 143 EJ99 dans ce secteur en 2011, soit une augmentation de 36 % depuis r e p è r e 4.4.1 Les enjeux et les défis de la transition énergétique dans l’industrie 211 La transition énergétique : connaître et partager pour agir l’année 2000, alimentée principalement par les pays hors OCDE, qui consomment 66 % de l’énergie industrielle100. Toutes les projections montrent que ces tendances devraient encore s’accentuer, car la production industrielle globale est appelée à doubler ou tripler dans la plupart des secteurs d’ici 2050. Si ces prévisions se confirment, les pays hors OCDE représenteront alors 80 % des émissions mondiales de CO2 en 2050101. Figure 92. Émissions industrielles de CO2, selon le secteur et la région P o i n t s d e r e p è r e Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2009). 212 4.4.1.1 L’enjeu central de l’amélioration de l’efficacité énergétique À l’échelle mondiale, les entreprises sont de plus en plus incitées à prendre en compte les enjeux d’une meilleure efficacité énergétique et d’une réduction des émissions de GES. D’une part, elles prennent progressivement conscience des risques que le changement climatique leur fait courir : 70 % des 2 400 sociétés interrogées par le cabinet Accenture en 2013 estiment qu’au cours des prochaines années, un risque lié au changement climatique altérera leur chaîne de production et l’intégrité de leur chaîne logistique (qu’il s’agisse d’usines inondées, de routes impraticables ou de pannes d’électricité qui bloquent la production)102. D’autre part, il est admis que l’industrie possède un colossal potentiel d’économie d’énergie et de réduction des émissions de GES. Selon l’AIE, ce potentiel représenterait environ 31 EJ par an (soit 26 % de la demande énergétique de l’industrie), ce qui équivaut à la consommation énergétique annuelle des États-Unis et de la Chine réunis103. Enfin, l’amélioration de l’efficacité énergétique peut se révéler une formidable opportunité pour les industries. Toutes sont concernées par ces problématiques, qu’il 100.AIE (2014b). 101.AIE (2009). 102.ACCENTURE (2012-2013). 103.AIE (2012a). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 104.AIE (2012a). 105.AIE (2012a). 106.AIE (2012a). 107.AIE (2012a). P o i n t s d e 4.4.1.2 Les obstacles à surmonter pour atteindre la transition énergétique Plusieurs barrières, qu’elles soient financières ou organisationnelles, entravent les progrès en matière d’efficacité énergétique et de sobriété au sein de l’industrie. Lorsque l’investissement financier nécessaire pour améliorer l’efficacité énergétique d’une entreprise est significatif, il est souvent vu (à tort ou à raison) comme un coût risquant de limiter la compétitivité de l’entreprise et, par conséquent, écarté104. Le fonctionnement même de l’entreprise défavorise généralement les investissements visant à améliorer l’efficacité énergétique, privilégiant les investissements rapidement rentables. Or, cette vision de court terme n’est pas forcément compatible, en l’état actuel des choses, avec une transition énergétique. En outre, le manque et la difficulté d’accès aux informations nécessaires à la démonstration de la rentabilité des investissements en efficacité énergétique sont un autre frein à leur mise en œuvre105. Ce problème informationnel s’ajoute à des risques perçus ou réels liés au manque d’expérience (et de retours d’expérience) dans la mise en œuvre des projets d’économie d’énergie innovants. L’incertitude causée par les nouvelles technologies, la réglemen tation connexe et même le manque d’expertise de certains fournisseurs de nouvelles technologies peut dissuader l’entreprise d’investir du temps et de l’argent dans la maximisation de son efficacité énergétique106. Le compartimentage des fonctions au sein de l’organisation interne de l’entreprise, par exemple entre le personnel chargé du règlement des factures, de l’achat ou de la commande des équipements et de l’entretien de ceux-ci, limite également la collaboration requise pour identifier et soutenir l’efficacité énergétique107. r e p è r e s’agisse des industries lourdes, productrices de matières premières ou de produits chimiques – qui sont extrêmement polluantes –, ou des nouvelles industries de l’informatique, qui utilisent des ressources considérables de matières premières tout en connaissant une croissance fulgurante. Chacune doit trouver des solutions adaptées à son secteur d’activité et aux problématiques qui lui sont propres. Ce processus est l’occasion de revoir ses procédés industriels, de gagner en productivité et en efficacité, de réaliser des économies en ressources et en énergie, de sécuriser l’approvisionnement en énergie, mais aussi de s’ouvrir sur de nouveaux produits et de nouveaux marchés. Cependant, de nombreux obstacles entravent encore ces progrès : le partage des technologies et des savoir-faire doit être encouragé, l’accès au financement facilité et la réglementation renforcée. 213 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Enfin, l’énergie du secteur industriel est subventionnée dans de nombreux pays : beaucoup d’entreprises ne paient donc pas le coût réel de leur consommation énergétique, ce qui ne les incite guère à la réduire. Dans les pays en développement, les problèmes de disponibilité des technologies sont aussi un obstacle à l’efficacité énergétique. En somme, l’investissement pour une meilleure efficacité énergétique est considéré aujourd’hui comme une dépense facultative disposant d’un budget restreint108. 4.4.1.3 Les transferts de technologie Nord-Sud L’industrie joue un rôle majeur dans l’organisation des territoires et les rapports de pouvoir entre pays. Entre 1990 et 2010, la montée en puissance de l’industrie de certains pays en développement a bouleversé la hiérarchie planétaire. Sur cette période, l’Europe est passée de 36 % à 24,5 % de la production mondiale ; en 2011, la Chine est devenue la première puissance industrielle du monde109. Globalement cependant, la hausse des volumes produits évoquée masque de réelles disparités sur le plan de la meilleure technique disponible (MTD ; voir l’encadré 41). L’arrêté ministériel du 25 octobre 2005 définit la MTD « comme le stade de développement le plus efficace et avancé des activités et de leurs modes d’exploitation, démontrant l’aptitude pratique de techniques particulières à constituer, en principe, la base des valeurs limites d’émission visant à éviter et, lorsque cela s’avère impossible, à réduire de manière générale les émissions et l’impact sur l’environnement dans son ensemblea ». La notion de MTD est élaborée en 1996, en application de la directive européenne 96/61/EC relative à la prévention et la réduction intégrées de la pollution, dite « directive IPPC » (pour Integrated Pollution Prevention and Control)b. Les MTD sont répertoriées dans des documents appelés BREFc, comme suite à un échange d’information entre les experts des États membres de l’UE, l’industrie et les organisations de protection de l’environnement. Leur élaboration est coordonnée par le bureau de Séville de la Commission européenne. Les BREF contiennent des méthodes et procédés techniques concernant notamment les systèmes P o i n t s d e r e p è r e Encadré 41. Qu’est-ce que la Meilleure Technique Disponible (MTD) ? 214 108.AIE (2012a). 109.Carroué (2012). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs d’épuration ou le traitement des rejets. Ils comportent des données sur le domaine d’activité, les techniques employées, les pollutions, les MTD choisies et leurs principes. Dans l’UE, environ 52 000 installations sont visées par la directive IPPCd. 110.Conseil mondial de l’énergie et ADEME (2013). 111.Conseil mondial de l’énergie et ADEME (2013). 112.Conseil mondial de l’énergie et ADEME (2013). d e P o i n t s Bien souvent, les industries des pays développés disposent des moyens nécessaires pour prendre en compte les aspects sociaux et environnementaux dans leurs décisions. Les technologies efficaces sont connues et accessibles ; il peut même exister des mécanismes d’aide facilitant leur adoption. Des normes d’efficacité énergétique et des campagnes de sensibilisation ont été mises en œuvre par les pouvoirs publics. C’est ainsi qu’au cours des trois dernières décennies, de nombreux pays développés ont réduit leur consommation totale d’énergie par unité de PIB. Cette diminution de l’intensité énergétique s’explique principalement par une augmentation de l’efficacité énergétique globale (véhicules, électroménagers, procédés industriels, etc.)110. Toutefois les plus petites entreprises ont parfois du mal à trouver les conseils et le financement nécessaires ; des efforts doivent encore être fournis dans ce sens. D’un autre côté, l’adoption généralisée de solutions efficaces et respectueuses de l’environnement est loin d’être acquise dans les pays en développement. En Chine, en Afrique et au Moyen-Orient, l’intensité énergétique est deux fois plus élevée qu’en Europe, tandis que l’Amérique latine se situe à environ 15 % au-dessus de la moyenne européenne111. Cet écart peut s’expliquer par la dominance des secteurs grands consommateurs d’énergie ou par la structure même de l’industrie112. En effet, les industriels ne disposent pas des technologies nécessaires à l’amélioration de l’efficacité énergétique, faute de connaissances ou de moyens. De plus, le soutien des États est encore minime dans beaucoup de régions et les efforts ne sont pas récompensés. Le transfert de MTD des pays développés vers les pays en développement fait ainsi partie des éléments clefs de la transition énergétique. Cela se fait notamment par l’inter médiaire des grandes industries, qui peuvent investir et implanter des filiales dans les pays en développement, transférant progressivement leur technologie (en échange d’une ouverture sur un nouveau marché par exemple) et formant les travailleurs r e p è r e a. République Française, arrêté du 25 octobre 2005, article 2, annexe IX. b. Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (2009). c. Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie/INERIS (s.d.). d. Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (2009). 215 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 93. Consommation énergétique de l’industrie, selon la région Source : ENERGIES 2050, d’après AIE (2013d). locaux à de meilleures pratiques. Des mécanismes financiers comme le MDP ou des initiatives spécifiques comme le Climate Technology Center visent spécifiquement à favoriser les transferts technologiques non seulement dans l’industrie, mais aussi dans les autres domaines. 4.4.2 Des possibilités d’action à exploiter P o i n t s d e r e p è r e Pour réussir la transition énergétique dans le secteur industriel, des idées concrètes et localisées sont mises en œuvre dans plusieurs parties du monde et pourraient être dupliquées. 216 4.4.2.1 Une grande diversité de technologiques et d’axes de développement D’un point de vue technologique et technique, on dispose aujourd’hui de tous les outils nécessaires à une transition énergétique réussie tout en maintenant une activité économique durable. Au fil du temps, les procédés industriels se sont améliorés. Dans un premier temps, au nom d’impératifs économiques comme la recherche de profit et la compétitivité, ils sont devenus plus sobres en énergie et plus efficaces. Par la suite, avec la sensibilisation à l’échelle mondiale, les législations contraignantes et les incitations, de plus en plus ouvertes aux problématiques environnementales, les industries des pays industrialisés ont développé des technologies plus respectueuses de l’environnement en améliorant encore l’efficacité de leurs procédés. Des technologies propres sont donc disponibles à des coûts de plus en plus bas. L’AIE estime à 20 % les capacités de réduction des émissions de GES dans l’industrie, rien qu’en utilisant les technologies déjà disponibles113. Par ailleurs, afin de maximiser l’efficacité énergétique du secteur industriel, il peut être intéressant de s’employer à moderniser le système électrique global. Dès lors, le 113.AIE (2009). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs déploiement de technologies de réseaux intelligents, recourant à l’utilisation intensive des technologies de l’information et de la communication (TIC), paraît plus pertinent que le remplacement massif des réseaux (voir la partie 2.3). 4.4.2.2 Refondre l’organisation des entreprises pour encourager les solutions durables Au regard des enjeux et des possibilités associés à l’efficacité énergétique, les industries doivent fournir des efforts de management afin d’amorcer leur virage vers des pratiques durables. L’AIE recommande un système spécifique pour la gestion de l’énergie dans l’industrie114. Ce système propose aux entreprises des pratiques et des procédures pour s’inscrire dans un processus d’amélioration continue et pour saisir de nouvelles occasions. Dans cette même perspective, l’ADEME a développé un outil appelé le système de management de l’énergie (SME ; voir l’encadré 42). ADEME (2014a). 114.AIE (2012a). d e P o i n t s Le SME est constitué d’un ensemble de procédures et de pratiques qui assurent le traçage, l’analyse et la planification systématiques de la consommation d’énergie. Cette méthode permet aux entreprises de maximiser les économies d’énergie et d’améliorer la performance énergétique à travers des changements technologiques et organisationnels. Selon l’ADEME, « l’intérêt de la mise en place d’un système de management de l’énergie (SME) pour l’entreprise est le maintien dans la durée de l’amé lioration de la performance énergétique. Il conforte la mise en œuvre des actions d’économies d’énergie révélées par le diagnostic énergétique. Pour une entreprise, outre le fait de renforcer sa compétitivité par la possibilité de la diminution des coûts énergétiques, le SME permet de : • montrer le degré d’implication de la direction par la mise en place d’une politique énergétique et les moyens appropriés ; • structurer et approfondir la démarche d’économies d’énergie de l’entreprise ; • identifier un responsable énergie (ou une équipe) et lui donner les moyens de son action ; • valoriser les efforts en termes d’économies d’énergie et communiquer sur la performance énergétique de l’entreprise ; • suivre l’évolution de la performance énergétique avec la mise en place d’un plan de comptagea ». r e p è r e Encadré 42. Le système de management de l’énergie 217 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Une seconde démarche organisationnelle intéressante est liée à l’économie circulaire115. L’écologie industrielle est une pratique de management environnemental visant à limiter les impacts de l’industrie sur l’environnement. L’écologie industrielle cherche à avoir une approche globale du système industriel en le représentant comme un écosystème et à le rendre compatible avec les écosystèmes naturels, en transformant les déchets d’une industrie en ressource pour une autre industrie116. Encadré 43. La symbiose industrielle de Kalundborg La plus célèbre – et la première – expérience au monde d’écologie industrielle se situe au Danemark, dans la ville portuaire de Kalundborg, qui compte 20 000 habitants. Cette expérimentation a pris le nom de « symbiose de Kalundborg » du fait de la participation de six organisations différentes : la mairie, une centrale énergétique, un fabricant de plâtre, une entreprise pharmaceutique, une entreprise de traitement des sols et une raffinerie. Aujourd’hui, la « symbiose » a mis en œuvre un réseau performant d’échange d’eau, d’énergie et de sous-produits issus des diverses activités industrielles et humaines menées sur le site, de sorte que l’essentiel des déchets des uns sert de matières premières aux autres : chaleur et vapeur, eau, gaz, issus de la raffinerie, gypse de synthèse, biomasse et engrais liquide, cendres volantes issues de la combustion du charbon dans la centrale, boue d’épurationa. Par exemple, la centrale énergétique produit de la chaleur pour la ville et de la vapeur pour la raffinerie et l’entreprise pharmaceutique. Cette cogénération utilise des combustibles avec une efficacité supérieure de 30 % à ce qui serait possible si les deux formes d’énergie étaient produites séparémentb. P o i n t s d e r e p è r e a. Laville (2009). b. Laville (2009). 218 Au-delà du fait que les symbioses industrielles réduisent le gaspillage de ressources et d’énergie et donc le volume de déchets et d’émissions de CO2, elles donnent aux entreprises la possibilité de faire de réelles économies et de renforcer ainsi leur compétitivité. Un autre avantage non négligeable de cette pratique est d’ordre social. En effet, elle favorise une réelle sensibilisation au développement durable et implique une communication et une coopération renforcées entre les parties prenantes117. 115.Voir aussi la partie 3.4.3.3. 116.Orée (s.d.). 117.Ellen MacArthur Foundation (s.d.). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs d e 118.Mosseri et Jeandel (2013). 119.PNUE (2013a). r e p è r e 4.4.2.3 Le rôle des consommateurs pour orienter le changement Si certains outils, comme la mise en place de normes par les autorités compétentes, introduisent une certaine obligation de résultats en matière d’efficacité ou de respect de l’environnement, d’autres changements peuvent s’effectuer à l’initiative des industriels. Dès lors, les consommateurs peuvent être des déclencheurs de ces initiatives de par leurs choix de consommation, qui prennent de plus en plus en compte les notions de respect de l’environnement ou d’empreinte carbone. Néanmoins, ces choix sont conditionnés par la disponibilité de l’information pour le consommateur. La responsabilité sociale des entreprises (RSE ; voir la partie 3.4), liée à la notion de développement durable, est ainsi de plus en plus mise en avant. L’entreprise s’engage à ne pas prendre en compte uniquement l’aspect économique dans ses décisions, mais aussi les effets sociaux et environnementaux, notamment lors de ses interactions avec les autres parties prenantes (salariés, consommateurs, actionnaires, syndicats). Les grands organismes internationaux sont parfaitement conscients de l’importance des choix des consommateurs dans la transition énergétique. Ainsi, « l’information des consommateurs » figure parmi les cinq programmes initiaux du Cadre décennal de programmation concernant les modes de consommation et de production durables (10YFP), adoptés en 2012 au cours de la Conférence des Nations Unies sur le développement durable (Rio+20). Le 10YFP est un cadre mondial d’action qui vise à renforcer la coopération internationale pour accélérer le passage à des modes de consommation et production durables dans les pays développés et en développement. Dans ce cadre, « l’information des consommateurs » est un ensemble d’outils mis en place pour permettre aux citoyens de faire des choix de consommation plus durables. Ces outils concernent notamment les informations et communications provenant des pouvoirs publics et des entreprises présentées par l’étiquetage ou la conception même des produits119. P o i n t s Autre exemple d’efficacité énergétique d’une zone industrielle, le projet de Système autonome de gestion électrique solaire et de stockage de l’énergie (SAGESSE), mis en place en France, dans le Lot, sur le site du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA-Gramat), vise à rendre autonome en énergie électrique un site d’activité de type industriel. Il s’agit, dans un premier temps, par une politique de maîtrise de l’énergie, d’optimiser les consommations électriques et de cerner les besoins en intégrant des technologies de réseaux intelligents. Dans un second temps, des moyens de stockage sont dimensionnés afin de satisfaire la consommation. Ces deux étapes permettent de définir les caractéristiques des sources d’énergie renouvelable nécessaires au fonctionnement de l’ensemble. Le projet SAGESSE vise donc à expérimenter les possibilités techniques, financières, juridiques et sociales118. 219 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.4.2.4 Les sources de financement potentielles Selon certaines études, des financements sont d’abord à trouver dans le secteur privé lui-même. Face aux perturbations liées au changement climatique, le secteur privé doit s’adapter en investissant dans des services plus vertueux écologiquement. Le rapport GEO-5 pour les entreprises du PNUE120 affirme ainsi que le secteur privé pourrait contribuer à plus de 80 % du capital nécessaire pour faire face aux conséquences du changement climatique. Les auteurs de ce rapport déclarent en outre que l’avenir du secteur privé dépend de sa capacité à s’appuyer sur la transition énergétique pour mener des investissements rentables. L’orientation des financements vers les projets d’efficacité énergétique peut être déclenchée par la mise en place des marchés du carbone. Bien que leur but premier soit d’encourager la réduction des émissions de GES, les marchés du carbone incitent à des investissements améliorant l’efficacité énergétique. Pour les entreprises qui sont soumises à des quotas d’émission, un investissement dans une technologie ou une mesure menant à une réduction des émissions les dispense d’acheter des quotas supplémentaires. En étant très performante, l’industrie peut aussi revendre ses quotas, qui deviennent ainsi une source de financement. Actuellement, le principal marché dédié aux industries est le marché européen, qui fixe un plafond pour les émissions de CO2 pour plus de 11 000 sites industriels appartenant aux secteurs les plus émetteurs : la production d’énergie (production d’électricité et de chaleur, raffinage), les industries minérales (ciment, chaux, verre, céramique), la métallurgie (acier, fer) et le papier121. D’autres marchés du carbone se mettent en place progressivement dans d’autres régions du monde. La Nouvelle-Zélande, le Japon et certains États nord-américains ont d’ores et déjà des systèmes opérationnels. D’autres, comme l’Australie, les États-Unis (à l’échelon fédéral) ou le Canada disposent de projets de loi avancés. P o i n t s d e r e p è r e Encadré 44. L’initiative européenne Factories of the Future 220 En Europe, l’industrie représente 16 % du produit intérieur brut (PIB)a. L’avenir de ce secteur est vital pour le maintien d’une croissance économique durable dans cette partie du monde. Le changement de paradigme entre l’approche centrée sur la compétitivité économique et celle qui repose sur la recherche d’une forte valeur ajoutée oblige l’industrie européenne à augmenter sa base technologique et à développer de nouvelles technologies, qui peuvent être multisectorielles. La demande de produits écologiques, personnalisables et de qualité supérieure augmente sans cesse. L’initiative Factories of the Future a pour but 120.PNUE (2013b). 121.Monier (2013). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs d’aider l’industrie européenne à opérer cette transformation, notamment en augmentant son efficacité énergétique et en réduisant sa production de déchets. Factories of the Futureb est un PPP qui consiste en un programme de recherche de 1,15 milliard d’euros (période 2014-2020) soutenant l’industrie pour le développement de technologies innovantes et durables. Le programme, qui a débuté en juillet 2009, est financé conjointement par la Commission européenne et l’industrie. Les activités de l’initiative sont définies sur la base des recherches et des besoins en innovation à court et moyen terme des industries, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME). Il est attendu que l’initiative produise, entre autres : • un nouveau système de production européen dépendant de différents critères tels que la performance, la personnalisation, la démarche environnementale, l’efficacité dans l’utilisation des ressources, le potentiel humain et la création de savoirs ; • des systèmes de production basés sur les TIC et des technologies de haute performance capables d’optimiser leur performance avec un fort degré d’autonomie et d’adaptabilité ; • des outils de production, des méthodologies et des procédés soutenables et durables. L’agriculture se situe au cœur de multiples enjeux sociaux, économiques et environnementaux (sécurité alimentaire, emploi et développement rural, préservation de l’environnement et de la qualité de l’eau et de l’air). Son rôle sera crucial dans le processus de transition énergétique, les liens entre production alimentaire et énergie étant également très étroits. d e 4.5L’agriculture P o i n t s Dans l’industrie comme dans les autres secteurs des pays où les prix de l’énergie fossile sont subventionnés, l’ajustement progressif des prix de l’énergie au coût réel de l’approvisionnement énergétique permet d’envoyer aux industriels un signal prix cohérent. Parallèlement à cette démarche, les subventions pour les énergies renouvelables pourraient être augmentées en basculant les moyens financiers alloués aux énergies fossiles vers les énergies propres, pour compenser le surcoût en tout ou en partie. r e p è r e a. Commission européenne (s.d.). b. Commission européenne (s.d.). 221 La transition énergétique : connaître et partager pour agir L’élaboration de stratégies de transition énergétique dans l’agriculture, visant à réduire la dépendance aux énergies fossiles par l’efficacité énergétique et le développement des énergies renouvelables, fait partie des leviers privilégiés pour répondre aux enjeux du secteur agricole. Figure 94. Enjeux du secteur agricole Source : ENERGIES 2050. P o i n t s d e r e p è r e 4.5.1 Les enjeux d’une agriculture durable : entre sécurité alimentaire, dépendance aux énergies fossiles et réchauffement climatique 222 4.5.1.1 Les défis actuels de l’agriculture Depuis plusieurs décennies, les efforts dans le secteur agricole se sont traduits globalement par des gains en termes de rendement très élevés. Grâce à l’utilisation massive d’intrants, à l’irrigation et à la mécanisation, la production agricole mondiale a en effet été multipliée par 2,5 ou 3 au cours du dernier demi-siècle, alors que la superficie cultivée n’a augmenté que de 12 %, selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO)122. Toutefois, les gains de productivité agricole enregistrés jusqu’ici n’ont pas résolu les problèmes de malnutrition et de pauvreté dans les pays en développement, qui ont généralement beaucoup moins profité de l’essor de la production123. Plus de 70 % des 1,4 milliard de personnes vivant dans une pauvreté extrême habitent dans les zones rurales des pays en développement. Si la situation s’améliore dans les pays d’Asie de l’Est et du Pacifique, elle se détériore en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne124. La conséquence principale de cette pauvreté est la 122.FAO (2011b). 123.Site Internet de Greenfact, consulté en décembre 2014. 124.Banque mondiale (2008). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Figure 95. La faim dans le monde 125.FAO (2014a). 126.FAO (2012). 127.Banque mondiale (2008). d e P o i n t s malnutrition pour 805 millions de personnes125. À l’opposé, dans les pays développés, les problèmes de santé et les maladies chroniques telles que l’obésité ou les maladies cardiovasculaires, en partie liées à une alimentation trop abondante, de piètre qualité et peu équilibrée deviennent un souci de santé publique d’envergure. En outre, d’après une étude de la FAO réalisée en 2011, la perte et le gaspillage représenteraient le tiers de la nourriture destinée à l’Homme dans le système alimentaire mondial126. Les conséquences environnementales du développement agricole observé jusqu’à aujourd’hui sont lourdes. L’agriculture a des liens étroits avec les préoccupations relatives à la qualité des sols, à la perte de biodiversité, à la pollution des nappes phréatiques, à la disponibilité en eau et au réchauffement climatique. Les enjeux économiques sont également considérables. L’agriculture représente en moyenne environ 29 % du PIB et emploie 65 % de la population active dans les pays en développement127. Ainsi, les effets des variations de la production agricole se r e p è r e Source : FAO (2014a). 223 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.5.1.2 L’agriculture et l’énergie fossile : des thématiques étroitement liées L’agriculture représente une source importante de consommation énergétique au niveau mondial. Cette consommation peut être directe (utilisation de fioul domestique dans les fermes, chauffage des bâtiments, consommation d’essence pour la machinerie, électricité et gaz utilisés dans le processus de production) ou indirecte. La consommation indirecte d’énergie dans l’agriculture est notamment liée au transport des marchandises P o i n t s d e r e p è r e répercutent sur l’ensemble de l’économie. Dans les pays développés et en transition, les industries (agroalimentaires notamment) et les services associés à l’agriculture comptent pour 30 % du PIB128. Les défis paraissent d’autant plus difficiles à relever que la production alimentaire devra subvenir aux besoins d’une population mondiale qui devrait s’accroître de 2 milliards et dépasser les 9 milliards d’individus d’ici 2050129, pour l’essentiel dans les pays en développement. La FAO estime ainsi qu’afin de satisfaire la demande supplémentaire en nourriture créée par la croissance démographique, une hausse de 70 % de la pro duction agricole sera nécessaire130. Or les gains de productivité s’épuisent : les terres agricoles se dégradent sous l’effet de la monoculture et de divers facteurs, parmi lesquels la salinisation des terres liée à la montée du niveau de la mer sous l’effet du changement climatique ; en outre, l’augmentation de la population à nourrir, l’étalement urbain, les cultures dédiées aux biocarburants et l’appétence des populations pour la viande mobilisent de vastes surfaces de pâturage et créent une concurrence pour l’appro priation des terres. Cette concurrence ne peut que s’exacerber avec la croissance démographique attendue. Il devient urgent de restaurer les terres dégradées et d’éviter d’épuiser les sols encore fertiles ; pour cela, la transition vers un mode de culture plus durable semble nécessaire. Le modèle agricole et alimentaire actuel est donc remis en cause ; les débats sur la place de l’agriculture dans l’économie, les systèmes de production et les modes de consommation sont nombreux, et aucun consensus n’est en vue131. Néanmoins, l’évolution vers un modèle agricole durable passera forcément par sa participation à la transition énergétique, tant par des gains d’efficacité énergétique que par la production et l’utilisation d’énergie renouvelable. Compte tenu des liens étroits entre énergie, alimentation, malnutrition et éradication de la pauvreté, la transition énergétique du secteur agricole et alimentaire est elle-même susceptible de relever un certain nombre des défis auxquels ces secteurs sont confrontés. 224 128.Banque mondiale (2008). 129.ONU – Centre d’actualités (2013). 130.FAO (2011b). 131.Apostolescu et al. (2014). d e 132.FAO (2011a). 133.Les autres facteurs généralement avancés sont la forte hausse de la demande alimentaire, les aléas climatiques, la faiblesse des investissements dans le secteur agricole ou des facteurs financiers et monétaires. 134.Voir la partie 4.3.3.3. 135.FAO (2014a). P o i n t s et à la production d’intrants tels que les engrais, qui eux-mêmes ont dû être transportés sur le lieu de production. Que ce soit pour une consommation directe ou indirecte, l’agriculture est très dépendante des énergies fossiles. Selon la FAO132, le secteur de l’alimentation – notamment la fabrication, la production, la transformation, le transport, la commercialisation et la consommation – représente environ 30 % de la consommation de l’énergie mondiale, et il produit plus de 20 % des émissions mondiales de GES, ce qui reflète une forte dépendance aux énergies fossiles. Ces données comprennent la consommation directe (pour l’agri culture) et la consommation indirecte, qui se répercute sur les transports, mais aussi sur le secteur industriel. La part de la consommation indirecte sur la consommation totale du secteur agricole n’a cessé de croître sous l’effet de la mécanisation, de la mondialisation des marchés (éloignement entre les lieux de production et de consommation) et de l’usage intensif d’intrants agricoles, augmentant ainsi le contenu en énergies fossiles des produits alimentaires. La hausse de l’intensité énergétique des produits agroalimentaires et la dépendance du secteur aux énergies fossiles se reflètent, notamment, dans les fortes corrélations constatées entre le prix du pétrole et celui des denrées depuis 2006, telles que mesurées par le Fonds monétaire international (FMI ; figure 96). Ainsi, l’un des facteurs responsables de la hausse des prix des produits agricoles et de la crise alimentaire de 2008 pourrait être la flambée du prix du pétrole, d’où les craintes qu’une forte dépendance du secteur de l’alimentation à l’égard des combustibles fossiles puisse limiter sa capacité à répondre aux besoins alimentaires mondiaux. Plusieurs autres facteurs sont cependant intervenus en conjonction dans la crise de 2008, notamment la hausse de production de biocarburants133, déclenchant ainsi un débat sur les risques en termes de sécurité alimentaire associés à leur développement134. Il est aujourd’hui établi que, pour éviter de tels risques tout en exploitant le potentiel de production de biocarburants, un certain nombre de bonnes pratiques doivent être respectées135. Mais il est aussi établi que le potentiel de « producteur d’énergie renouvelable » détenu par le secteur agricole dépasse largement le débat sur le marché international des biocarburants, et que des solutions locales de production et d’utilisation d’énergies renouvelables existent. Le secteur de l’agriculture est donc appelé à devenir un producteur d’énergie à part entière, tout en conservant son rôle initial. r e p è r e Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 225 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 96. Corrélation entre prix du pétrole et prix des denrées alimentaires 136.Voir la partie 4.3.3.3. 137.AIE (2014). r e p è r e d e 4.5.1.3 L’agriculture en tant que producteur d’énergie renouvelable La question de l’énergie dans l’agriculture est donc d’autant plus importante que le secteur, en plus de représenter un consommateur d’énergie, joue désormais un rôle important dans la production, qui plus est locale, favorisant l’accès à l’énergie dans des zones qui en sont dépourvues. Les agriculteurs sont par exemple en position privilégiée pour produire de l’énergie renouvelable, notamment : • En valorisant la biomasse et les déchets agricoles. La question des bio carburants a déjà été évoquée dans ce rapport136, mais l’utilisation de la biomasse peut également s’étendre, entre autres, à la méthanisation des déchets organiques tels que la paille, la bouse et la fiente. Avec le biogaz obtenu, on pourra produire et consommer localement de la chaleur, voire de l’électricité, au moyen d’un biodigesteur. • En utilisant la biomasse (par exemple bois ou bagasse) directement pour la production de chaleur selon des techniques efficientes. Ces pratiques sont particulièrement courantes dans les pays en développement, notamment en Afrique subsaharienne, où 730 millions d’habitants dépendent de la biomasse pour se chauffer ou cuisiner137. P o i n t s Source : Voituriez (2009). 226 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 138.INRA (2013). 139.ADEME (2014b). 140.Pye-Smith (2012). 141.Collet (2014). 142.IPCC (2007). P o i n t s d e 4.5.1.4 L’agriculture, l’énergie et le climat En matière de changement climatique, le secteur agricole est responsable de 30,9 % des émissions mondiales de GES, une grande partie étant liée aux changements dans l’utilisation des sols et notamment à la déforestation effectuée pour faire place aux cultures et aux pâturages. Ces émissions sont néanmoins réduites à 13,5 % si l’on ne prend en compte que la culture et l’élevage138. Outre le CO2, l’activité agricole est également responsable de l’émission de GES tels que le méthane et le protoxyde d’azote (N2O), qui ont un impact majeur sur le réchauffement climatique (le pouvoir de réchauffement global du N2O sur 100 ans étant de 310 fois supérieur à celui du CO2). La cause première des émissions de N2O dans l’activité agricole est liée à la gestion du cycle de l’azote contenu dans les engrais et les effluents d’élevage139. Quant aux émissions de méthane (CH4), le secteur agricole y contribue également de manière disproportionnée, là encore dans le contexte des activités d’élevage140. Au total, tous secteurs confondus, les émissions de GES ont augmenté de 2,2 % par an entre 2000 et 2010, alors que les émissions globales entre 1970 et 2000 n’augmentaient que de 1,3 % par an141. L’agriculture devrait générer un rejet supérieur de 10 à 15 % de GES d’ici 2020 à 2030 avec des parts d’augmentation pouvant aller jusqu’à 60 % pour les émissions de CH4 et de N2O d’ici 2030142. Alors que l’agriculture contribue de manière importante au changement climatique, ce secteur est dans le même temps fortement affecté par les dérèglements cli matiques, dont les conséquences sont parfois désastreuses : inondations, sécheresses plus r e p è r e • En profitant de l’exposition des bâtiments et des terres agricoles aux éléments climatiques pour produire de la chaleur ou de l’électricité renouvelable (photovoltaïque, éolien, solaire thermique et thermodynamique). Cette production d’énergie décentralisée peut être une solution efficace, notamment pour accroître l’accès à l’énergie dans les régions reculées ou pour diminuer la pauvreté énergétique de certains producteurs, avec des effets sur la productivité et le prix de vente de cette production. En outre, l’évolution des modes de production et des habitudes de consommation a également un grand rôle à jouer dans la maîtrise de la consommation d’énergie pour l’alimentation. Les régimes alimentaires très carnés impliquent, par exemple, l’expansion de l’élevage, qui a une incidence écologique et énergétique plus importante que les productions céréalières. Inversement, l’utilisation de circuits de distribution courts (production locale et consommation locale) contribue aux gains en efficacité énergétique et, par là même, à la réduction des émissions de GES. 227 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 97. Effet du changement climatique sur la production agricole dans le monde en 2080 143.Ministère de la Défense (2013). r e p è r e d e graves et plus fréquentes dans des régions déjà arides, risque de stress hydrique pour les cultures dû à une modification du régime des précipitations, salinisation des terres liée à l’élévation du niveau de la mer. Il est fort probable que les régions les plus durement touchées par les dérèglements climatiques seront celles où la sécurité alimentaire n’est pas acquise (Afrique centrale et subsaharienne, Asie orientale). Ainsi, d’après certaines études, le changement climatique pourrait provoquer un recul de 15 à 30 % de la production agricole en Afrique d’ici 2080-2100 si des politiques draconiennes d’adaptation et d’atténuation de l’agriculture ne sont pas mises en place143. Cela provoquerait alors une dépendance accrue du continent aux importations alimentaires. Il paraît donc indispensable de mettre en place les technologies et les mesures nécessaires en termes d’atténuation et d’adaptation au sein du secteur agricole. Les besoins en la matière sont multiples et particulièrement importants dans le domaine de l’agriculture et des forêts. La transition énergétique doit s’inscrire dans ce contexte en s’intégrant à une approche systémique et globale. Enfin, il est vital de redéfinir des paradigmes de développement agricole en tenant compte de l’importance de l’accès à l’énergie. Il convient en effet d’éviter de reproduire des modèles de production (éloignement des lieux de production, usage massif d’intrants) et de consommation (intensification de l’élevage) ayant produit des besoins énergétiques trop importants ainsi que des déséquilibres des modèles économiques. P o i n t s Source : CGIAR (2011). Illustration : Hugo Ahlenius, UNEP/GRID-Arendal 228 Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Figure 98. Technologies nécessaires dans les pays en voie de développement pour l’atténuation et l’adaptation dans le secteur agricole Source : Meridian Institute (2011). La transition énergétique dans le secteur agricole doit donc s’inscrire dans une stratégie plus générale ayant des objectifs ambitieux en termes de sécurité alimentaire, de lutte contre la pauvreté et d’atténuation du changement climatique. Dans cette partie, nous nous efforcerons de présenter des pistes concrètes qui pourraient contribuer à créer une agriculture plus efficace énergétiquement et moins dépendante des énergies fossiles, tout en étant résiliente et durable. d e 4.5.2 Des possibilités d’action à exploiter P o i n t s Source : Meridian Institute (2011). r e p è r e Figure 99. Besoins en technologie des pays en développement en termes de mesures d’atténuation et d’adaptation, selon le secteur 229 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 230 4.5.2.1 Efficacité énergétique et développement des énergies renouvelables dans les activités agricoles Il existe un certain nombre de solutions pour réduire l’intensité énergétique et la dépendance aux énergies fossiles des produits agricoles, notamment en améliorant l’efficacité énergétique des systèmes de production, en développant l’usage des énergies renouvelables, et en optimisant l’organisation des marchés pour limiter les émissions indirectes. Dans une étude sur la place des énergies renouvelables dans la promotion d’une agriculture durable, Chel et Kaushi144 ont, par exemple, mis en valeur les différentes technologies disponibles ainsi que leurs avantages dans le cadre du secteur agricole. Ces avantages sont en premier lieu liés aux effets négatifs de l’utilisation des énergies fossiles tels que la nécessité de transporter le pétrole pour l’utiliser dans la machinerie, la pollution pouvant perturber le bétail, le prix des ressources fossiles et les besoins de maintenance importants des appareils fonctionnant au pétrole ou au gaz. En axant spécifiquement leur étude sur l’Inde, ces auteurs proposent donc de développer l’utilisation locale des énergies renouvelables par les moyens suivants : • des panneaux photovoltaïques, pour la production d’électricité solaire, qui peut être utilisée localement, par exemple pour les barrières électriques, ou alimenter le réseau ; • du solaire thermique, pour le séchage de la production, mais également pour la fourniture d’eau chaude sanitaire ou pour la production et le bétail ; • de l’énergie éolienne, pour produire de l’électricité, pomper l’eau ou moudre et concasser les grains et les légumes dans des moulins à vent. L’utilisation de ces sources d’énergie comporte de nombreux avantages, notamment la réduction des coûts de production et de maintenance, susceptibles de se répercuter sur les prix de vente des produits, la réduction de la pollution et des émissions de GES, de même qu’une visibilité accrue sur les coûts de production grâce à l’utilisation réduite des énergies fossiles. Dans une étude de 2008, Omer145 s’était également penché sur la question des technologies d’énergie renouvelable disponibles dans le secteur agricole, élargissant notamment son étude à l’hydraulique et à la biomasse, comme le montre la figure 100. Ce développement des énergies renouvelables doit être couplé à la promotion de l’efficacité énergétique, non seulement dans les mécanismes de production (éclairage et chaudière efficients), mais également dans l’organisation des filières. La promotion des productions locales contribue à diminuer non seulement le besoin de transport, mais également l’utilisation de certains procédés, dont ceux qui sont nécessaires à la conservation de la fraîcheur des produits durant le transport. C’est ici un des objectifs de l’agriculture urbaine : pour accompagner le processus d’urbanisation massive et la demande grandissante des villes en nourriture, l’agriculture urbaine 144.Chel et Kaushik (2011). 145.Omer (2008). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Figure 100. Sources d’énergie renouvelable dans les fermes agricoles Source énergétique Technologie Taille du système Solaire Chauffe-eau domestique Chauffe-eau pour processus de production Panneaux photovoltaïques connectés au réseau pour produire de l’électricité Petit Moyen, grand Moyen, grand Éolien Éolienne pour produire de l’électricité Moyen, grand Hydraulique Centrale hydraulique dans les plans de dérivation Moyen, grand Centrale hydraulique dans les réseaux de distribution d’eau existants Moyen, grand Biomasse Chaudières à bois à haute efficacité énergétique Systèmes de cogénération fonctionnant avec des déchets agricoles ou culture énergétique Petit Moyen Fumier Centrale de cogénération au biogaz Petit vise à développer des systèmes de production agricole au sein même de ces villes. Les chaînes d’approvisionnement sont ainsi simplifiées, réduisant les émissions de GES directes et indirectes (associés au transport et au changement d’utilisation des sols) ainsi que la consommation d’énergies fossiles. En outre, le prix des produits est réduit et dissocié des cours du pétrole. Afin de développer ces pratiques, il est nécessaire de mettre en place des stratégies intégrées propres à lever les obstacles actuels, notamment par les mesures suivantes146 : • Mettre en place des programmes d’éducation et de sensibilisation des agri culteurs, mais également des citoyens dans leur ensemble. L’incitation à transformer les modèles de consommation, par exemple vers des habitudes nutritionnelles moins carnées, mais aussi vers les productions locales, sera un aspect crucial de la réussite de la transition énergétique du secteur agricole. • Intégrer l’utilisation des énergies renouvelables décentralisées aux stratégies énergétiques nationales. • Fournir aux communautés les moyens nécessaires au développement des énergies renouvelables et leur laisser assez de flexibilité pour choisir le ou les systèmes les plus appropriés. • Décourager l’utilisation massive des énergies fossiles, mais également du bois dans les pays en développement. 146.Chel et Kaushik (2011). r e p è r e Toutes tailles Toutes tailles Toutes tailles Petit, moyen Moyen, grand d e Éclairage efficient Électricité efficiente Appareils ménagers Chaudière efficiente Centrale couplée à un réfrigérateur à absorption Source : Adapté d’Omer (2008). P o i n t s Cogénération 231 La transition énergétique : connaître et partager pour agir 4.5.2.2 La transition énergétique intégrée au sein d’une approche systémique Lors de la conférence de La Haye sur l’agriculture, la sécurité alimentaire et le changement climatique en 2010, la FAO a proposé un concept d’agriculture intelligente axé sur trois piliers principaux : l’augmentation durable de la productivité et des revenus agricoles ; l’adaptation et le renforcement de la résilience au changement climatique ; la réduction des émissions de GES, leur absorption ou les deux147. La nécessité d’une transition énergétique du secteur a été mise en valeur dans cette stratégie, dont l’approche est conçue pour développer les conditions techniques, politiques et d’investissement nécessaires à la mise en place d’une agriculture durable. Les méthodes de réduction des émissions et d’atténuation des changements cli matiques ne manquent pas, mais il est nécessaire d’adapter la stratégie en fonction du contexte global de production à l’échelle du territoire, sans mettre en péril la sécurité alimentaire des populations. Ceci nécessite des compromis et des arbitrages entre sécurité alimentaire, adaptation au changement climatique et atténuation, prenant en compte la gestion des ressources en eau, en nutriments et en énergie, de même que la nécessité de créer des emplois et de la richesse. La figure 101 illustre les synergies existantes entre les trois objectifs simultanés de production alimentaire, d’adaptation et d’atténuation. P o i n t s d e r e p è r e Figure 101. Synergies et compromis entre production d’aliments, adaptation et atténuation 232 Source : Meridian Institute (2011). 147.FAO (2013). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Encadré 45. Les bienfaits de l’agriculture biologique En passant en revue plus de 200 études menées aux États-Unis et en Europe, un groupe de recherche a montré que le rendement de l’agriculture biologique équivaut à environ 80 % de celui de l’agriculture conventionnellea. Certaines études arrivent même à la conclusion que selon l’espèce cultivée, cette différence peut se réduire à quelques points de pourcentage et même favoriser l’agriculture biologique dans les pays les plus pauvres, où se concentrent les problèmes de famine. Mais les réelles plus-values de l’agriculture biologique résident dans les relations saines qu’elle entretient avec le climat et l’environnement. Un groupe d’experts internationaux du climat encadré par l’Institut de recherche de l’agriculture biologique a tiré les conclusions de 74 études comparatives réalisées dans le monde entier : l’agriculture biologique, grâce au travail réduit du sol et à l’apport d’engrais naturels, contribue à préserver le climat, notamment par l’augmentation de 17 % de la teneur en humus et de 37 % de la teneur en microorganismesb. Comme l’humus fixe le CO2 dans les sols, l’agriculture biologique contribue aussi à réduire les émissions de GES. Enfin, sur le plan énergétique, l’agriculture biologique réduit la consommation indirecte d’énergie liée à la production et au transport des produits chimiques utilisés dans l’agriculture traditionnelle. 148.INRA (2013). d e P o i n t s 4.5.2.3 La transition énergétique intégrée au sein de politiques d’atténuation du changement climatique En France, l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) a récemment réalisé une étude portant sur des moyens d’atténuer les émissions de GES dans le secteur agricole148. Bien que cette étude traite des spécificités culturales françaises, les mesures proposées (et les leviers) sont, dans une certaine mesure, adaptables dans d’autres régions du monde, par l’entremise des systèmes nationaux de recherche agricole. L’organisme est parti du constat que l’agriculture peut contribuer à la réduction des émissions de GES par trois leviers : la réduction des émissions de N2O et de CH4 ; le stockage de carbone dans les sols et dans la biomasse ; la production d’énergie à partir de biomasse (biocarburants, biogaz). L’INRA a ainsi défini, pour chacun de ces leviers, des actions concrètes propres à atténuer les émissions agricoles sans pour autant r e p è r e a. Intelligence Verte (s.d.) (d’après une étude de Per Pinstrup Andersen, professeur à Cornell et lauréat du World Food Prize). b. FiBL (2011). 233 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e nécessiter de changements majeurs dans les systèmes de production ni de réduction majeure des volumes produits (au-delà d’un seuil de 10 %). Par exemple, pour ce qui est de la diminution des apports de fertilisants minéraux azotés, l’INRA propose à la fois de réduire le recours aux engrais minéraux de synthèse en optimisant leur utilisation pour mieux valoriser les ressources organiques, tout en augmentant la part des légumineuses dans les cultures afin de réduire les émissions de N2O. Les légumineuses présentent non seulement des avantages agronomiques tels que de lutter contre les mauvaises herbes ou de maintenir la structure du sol, mais également la capacité d’enrichir le sol en azote et d’économiser ainsi les apports en engrais149. Les effets sur la consommation énergétique seront également importants, notamment par la réduction de l’utilisation des fertilisants et des engrais (consommation énergétique indirecte). L’INRA propose également de valoriser les effluents pour produire de l’énergie et réduire la consommation d’énergies fossiles. Pour cela, il est nécessaire de développer la méthanisation (processus naturel de dégradation biologique de la matière organique dans un milieu sans oxygène). L’objectif est de produire de l’énergie (biogaz) et de récupérer un produit riche en matières organiques fournissant de nombreux apports aux sols. Le biogaz sert ensuite à produire de l’électricité ou de la chaleur, ou est utilisé comme carburant après transformation150. En plus de ces mesures concrètes, la solution de l’agriculture biologique semble très pertinente. Elle est cependant aujourd’hui trop peu exploitée. Malgré une forte augmentation de l’ordre de 6 % par an, cette pratique ne concernait en 2011 que 0,86 % des terres agricoles du monde, d’après l’Institut de recherche de l’agriculture biologique et la Fédération internationale des mouvements d’agriculture biologique151. 234 4.5.2.4 L’importance des ressources financières nouvelles et innovantes pour l’investissement dans la transition énergétique et l’agriculture durable Le financement des actions visant la mise en place d’une nouvelle agriculture est un défi de taille. La demande agricole risque d’augmenter fortement sous le poids de la croissance démographique, de l’exploitation de la filière des biocarburants et de la hausse prévue des niveaux de nutrition dans le monde. La mise en place de nouveaux investissements en réponse à cet accroissement de la demande devient donc primordiale. La FAO chiffre à 9 200 milliards de dollars (soit 210 milliards par an) les investissements nécessaires d’ici 2050 dans ce domaine, dont 57 % pour l’Asie (40 % rien que pour la Chine et l’Inde), 20 % pour l’Amérique latine et 23 % pour l’Afrique et le Proche-Orient. Les investissements devront provenir du secteur public, mais aussi et surtout de fonds privés. Il est à prévoir qu’une part non négligeable sera d’origine publique, soit 149.Dequiedt (2012). 150.Ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie (2011). 151.FiBL et IFOAM (2013). 152.Meridian Institute (2011). 153.France Diplomatie (2012). d e P o i n t s environ 60 milliards de dollars par an sur les 210 prévus (environ 30 %), toujours d’après la FAO. Les investissements privés représenteraient alors 70 % du total152. Le problème majeur est que la situation actuelle et future dans les pays les moins développés et plus particulièrement en Afrique effraie la plupart des investisseurs potentiels. En effet, l’agriculture est soumise à de nombreuses incertitudes touchant les risques climatiques susceptibles de l’affecter, mais aussi les retombées financières générées par les investissements. Il s’agit donc de trouver d’autres moyens de financement pour subvenir aux besoins non comblés et de mettre en place des systèmes rassurants pour les investisseurs. D’après le Groupe pilote concernant les financements innovants pour l’agriculture, la sécurité alimentaire et la nutrition, les principaux mécanismes à envisager pour développer de nouvelles ressources sont153 : • des taxes nationales pouvant permettre le financement de nouvelles actions : taxes sur les produits sucrés et les matières grasses (aux États-Unis), ou encore sur les transactions financières (en Europe) et sur les engrais azotés. Ces taxes pourraient servir à financer la sécurité alimentaire dans les pays en voie de développement ; • des contributions volontaires ou des loteries dont une partie des bénéfices permet de financer des actions de développement dans les pays les plus démunis ; • des allocations provenant de fonds issus de la vente de droits d’émission de GES dans le cadre du Système communautaire d’échange de quotas d’émissions. Les États générant des revenus de cette manière pourraient financer les mesures d’atténuation et d’adaptation au changement climatique ; • des partenariats servant à canaliser les transferts de fonds de migrants pour les redistribuer vers des projets de nutrition dans les pays en développement. Ces transferts des pays développés vers les pays en voie de développement sont estimés à 400 milliards de dollars par an. La FAO a chiffré la part directement investie dans l’agriculture à 5 %. Des mécanismes innovants visant à encourager les investissements privés sont déjà à l’œuvre dans le cadre de projets pilotes, notamment en Afrique. Ces mécanismes ont été répertoriés par le Groupe pilote concernant les financements innovants pour l’agriculture, la sécurité alimentaire et la nutrition : • des outils de gestion des risques et des outils de crédit innovants. Les bailleurs de fonds prennent des risques liés aux récoltes, à la volatilité des cours, aux obstacles à la livraison des récoltes et aux impacts climatiques entraînant des pertes de récolte. Le domaine le plus prometteur reste celui de la gestion des risques climatiques, au moyen d’une assurance indemnisant le bénéficiaire en cas de faible production due aux intempéries. La mise en place de fonds de garantie de crédits bancaires pourrait inciter les banques à financer le secteur agricole en leur accordant une garantie couvrant r e p è r e Des opportunités d’actions dans tous les secteurs 235 La transition énergétique : connaître et partager pour agir partiellement les risques. La Banque européenne pour la reconstruction et le développement utilise avec succès ce moyen de financer l’agriculture dans les pays en déve loppement. La garantie des crédits au moyen de récépissés d’entrepôt, par exemple, en assurant un crédit au stockage et à la commercialisation des produits, serait une source de financement supplémentaire ; • des outils financiers innovants dans la chaîne de valeur (qui est, par définition, un partenariat stratégique entre des entreprises interdépendantes entretenant des liens de collaboration pour apporter progressivement une valeur ajoutée aux consommateurs finaux154). La mise en place de ces outils peut favoriser l’association entre les banques et les compagnies d’assurance dans le secteur agricole, en réduisant les risques auxquels sont exposés les différents acteurs privés (assurances, crédit) au moyen de crédits ayant fait leurs preuves (récépissés d’entreposage, agriculture sous contrat) ; P o i n t s d e r e p è r e Figure 102. Mécanisme de financement de la chaîne de valeur agricole 236 Source : France Diplomatie (2012). 154.Ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales (Ontario) (s.d.). Des opportunités d’actions dans tous les secteurs Encadré 46. Un mécanisme innovant de financement de la chaîne de valeur : le modèle ESOP26, au Togo, au Burkina Faso et au Bénina Mis en œuvre par deux organisations non gouvernementales (CIDR et ETD), ce programme vise à établir des liens entre des entreprises de transformation de riz et de fèves de soja et des organisations d’exploitants agricoles. Les entreprises agroalimentaires sont des entreprises mixtes associant des exploitants privés et des groupes d’agriculteurs (le capital dont ils disposent découle généralement d’un don accordé pour le projet). Elles fournissent aux agriculteurs des semences améliorées et d’autres intrants à crédit (financé par des banques locales). Les agriculteurs sont ensuite payés à la livraison du produit à l’entreprise, le prix de vente étant fixé à l’avance. Le remboursement du crédit a lieu à la livraison du produit à l’entreprise. Conclusion du chapitre 4 d e L’examen de l’ensemble des secteurs d’activité consommant de l’énergie fait ressortir la multitude d’actions possibles pour engager une transition énergétique globale. Si chacune de ces possibilités peut contribuer à la transition, seule une approche systémique et une mobilisation complémentaire et adaptée de l’ensemble de ces solutions permettront d’aboutir à un système énergétique mondial qui puisse répondre aux enjeux et défis – présents et futurs – de nos sociétés. P o i n t s • des PPP pour la construction de réseaux d’irrigation, d’infrastructures ou d’installation de stockage, ou la prestation de services aux petits agriculteurs (par des entreprises agroalimentaires, par exemple) dans le cadre de l’agriculture sous contrat ; • des subventions ciblées sur les intrants agricoles pour les petits producteurs. L’Afrique est actuellement le pays qui utilise le moins d’engrais (0,7 % de la production mondiale en Afrique subsaharienne), ce qui conduit à une extension des terres cultivées aux dépens d’une intensification des cultures, donc à l’épuisement et à l’appauvrissement des terres. Le groupe pilote envisage l’application d’un mécanisme de subvention des engrais en Afrique subsaharienne, cofinancé par des pays volontaires, et un mécanisme africain de financement des engrais (lui-même financé par une taxe sur la consommation d’engrais dans les pays du G20). Ceci permettrait, pour un coût d’environ 100 millions de dollars par an (selon la volonté des États à s’associer à ce projet), de développer l’utilisation d’intrants agricoles, nécessaires à l’augmentation du taux de croissance de ce secteur et à l’amorce d’une réponse au problème posé par l’insécurité alimentaire. r e p è r e a. France Diplomatie (2012). 237 La transition énergétique : connaître et partager pour agir Figure 103. Mécanisme de financement des engrais P o i n t s d e r e p è r e Source : France Diplomatie (2012). 238 Revoir nos modes d’organisation et de fonctionnement. Pour que ceux-ci puissent être compatibles aux défis de la transition énergétique, il faut notamment favoriser la sobriété et l’efficacité énergétique ainsi que le développement des énergies renouvelables. Il s’agit par exemple de tenir compte de ces enjeux lors de la conception et dans les outils de planification de nos villes ; de faciliter la coordination et les échanges entre la multitude d’acteurs qui intervient dans le bâtiment ; de favoriser la symbiose entre les industries pour optimiser la gestion des ressources. Favoriser la coopération et les échanges entre le Nord et le Sud. Si, actuellement, les pays en développement ne sont pas les plus gros consommateurs d’énergie, ils tendent à suivre les trajectoires empruntées par les pays industrialisés et seront alors amenés, dans les décennies à venir, à peser plus lourd dans la balance énergétique mondiale. Dans cette perspective, il est indispensable de favoriser la coopération, les échanges de bonnes pratiques et le transfert de technologies envers ces pays pour favoriser des trajectoires sobres en énergie et en carbone. Bien que le Nord et le Sud vivent les situations et des enjeux différents, les obstacles restent généralement similaires et les solutions doivent être partagées, puis appliquées de manière adaptée aux contextes locaux. Agir sur le comportement des usagers et des consommateurs. Le citoyen joue un rôle essentiel dans la transition énergétique, de par ses choix de comportement et de consommation. Les actions de sensibilisation, d’éducation et d’implication des citoyens sont un pilier essentiel de la transition énergétique ; elles doivent être mises en œuvre au sein de chacun des secteurs d’usages. Il peut s’agir notamment de diffuser les écogestes et d’informer sur les équipements efficaces afin de limiter la consommation énergétique dans les bâtiments ; d’agir sur la mobilité des individus en facilitant Des opportunités d’actions dans tous les secteurs P o i n t s d e r e p è r e les transports en commun ou les nouvelles pratiques telles que l’autopartage ; d’informer sur les produits issus de procédés responsables et durables pour influer les choix de consommation. Renforcer la capacité des acteurs clés. La connaissance et le savoir sont des préalables indispensables à une action réfléchie et adaptée en faveur de la transition énergétique. Il s’agit de diffuser de l’information non seulement sur les enjeux et les défis, mais surtout sur les possibilités d’action et leur mise en œuvre. Ces actions de formation doivent s’adresser aussi bien aux décideurs politiques et locaux, pour qu’ils puissent concevoir des stratégies et programmes adaptés, qu’aux professionnels intervenant au sein de ces secteurs, pour une application réelle et efficace des principes de la transition énergétique. Promouvoir l’innovation et la recherche. Bien que des progrès importants en matière d’efficacité et de sobriété énergétique aient été réalisés au cours des dernières années dans tous les secteurs d’usage, la marge de progression reste élevée. Il est crucial d’orienter les efforts de l’innovation et de la recherche-développement vers des solutions durables pour relever les multiples défis de la transition énergétique. Mobiliser des outils et mécanismes de financement innovants. Certaines solutions de la transition énergétique peuvent être mises en œuvre rapidement et à faible coût ; d’autres, en revanche, nécessitent des investissements conséquents. Cela dit, de nombreux mécanismes et outils de financement peuvent être mobilisés ; il faudra les généraliser pour amorcer les changements nécessaires. Sachant que la réduction de la consommation énergétique génère également une baisse des coûts d’exploitation, il est possible de rentabiliser les investissements – voire de les financer – grâce aux économies réalisées. Le même constat s’applique aux émissions de CO2 évitées, qui peuvent être valorisées sur les marchés d’échanges de droits d’émission, par exemple. 239 Une conclusion en forme de commencement 1. Le Monde (2015). d e P o i n t s Malgré les alertes répétées et de plus en plus pressantes de nombreux acteurs (scientifiques, représentants des secteurs public et privé et de la société civile), force est de constater que les crises auxquelles nos sociétés sont confrontées ne font que s’amplifier. Au cœur de ces crises figure notamment la question de l’énergie. Selon l’ONG Global Footprint Network, nous vivons chaque année davantage à crédit sur notre planète, c’est-à-dire que nous consommons non seulement ce qu’elle produit dans la même période, mais aussi le capital qu’elle avait accumulé au cours des millions d’années précédentes. Ainsi, pour l’année 2015, nous avons vécu à crédit de la planète dès le 13 août1. En d’autres termes, en un peu plus de sept mois, l’humanité a consommé l’équivalent des ressources que la Terre peut fournir de façon soutenable en un an. À ce rythme, nous aurons besoin de deux planètes avant le milieu du siècle pour assouvir nos besoins. En parallèle, les émissions de gaz à effet de serre induites pour les activités humaines ont placé le climat sur une trajectoire de réchauffement dont on anticipe qu’elle mène à des perturbations catastrophiques et irréversibles pour les hommes et les écosystèmes. Montée du niveau de la mer, salinisation des terres, exacerbation des sécheresses et des inondations, pollution de l’eau, augmentation de la force et de la fréquence des tempêtes et des cyclones, et leurs corollaires en termes de déplacements de population, de mortalité, de maladies et de faim sont autant de conséquences des pertur bations climatiques, dont on commence déjà à observer les effets. Face à l’urgence d’agir, la réponse politique apparaît insuffisante. Les engagements pris par les pays dans le cadre de la 21e Conférence des Parties (CdP 21) de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) ne nous permettent pas d’espérer contenir suffisamment le réchauffement climatique. Pour atteindre l’objectif des 2 °C, et a fortiori celui des 1,5 °C, évoqués dans l’Accord de Paris, il faudra laisser dans le sol plus des deux tiers des réserves énergétiques fossiles. Face à ce constat, un changement de paradigme et une transition vers des modèles énergétiques, mais également économiques et sociétaux, plus durables s’avèrent indispensables. r e p è r e La transition énergétique : une exigence de sagesse collective 241 La transition énergétique : connaître et partager pour agir La mise en œuvre de cette transition nécessitera d’engager l’ensemble des acteurs et des secteurs d’activité, que ce soit dans l’environnement construit, les services, l’agriculture ou l’industrie. Il faut décloisonner les approches et favoriser la synergie et la coopération entre les divers secteurs et acteurs. Cela nécessitera par ailleurs la remise en question et la réévaluation de nos modes de production et consommation ainsi que de nos modèles économiques, technologiques, politiques et sociaux. La solidarité comme partie intégrante de la solution Si les enjeux et les défis auxquels nos sociétés sont confrontées sont globaux, nous ne sommes pas tous égaux face à leurs conséquences. Les pays en développement, qui sont les plus vulnérables aux impacts générés par nos modèles de production et consom mation, se retrouvent souvent dans des situations critiques : pauvreté endémique, raréfaction des ressources naturelles, difficulté d’accès à l’énergie et donc aux services de base, impacts prononcés du changement climatique couplés à un manque de capacités d’adaptation, qui ne font qu’accentuer des conditions de vie déjà précaires. Dans ce contexte, la solidarité entre les pays industrialisés et en développement doit faire partie intégrante des stratégies et solutions mises en œuvre. Alors que les pays du Nord et certains pays émergents ont pu bénéficier d’une abondance énergétique pour asseoir leur développement, il relève aujourd’hui de leur responsabilité de venir en soutien aux pays les plus fragiles pour les accompagner vers des trajectoires sobres en énergie, en carbone et en ressources naturelles, tout en répondant aux objectifs de modernité et de qualité de vie auxquels chacun peut légitimement aspirer. P o i n t s d e r e p è r e L’après-2015 : le tournant qu’il ne faut pas manquer 242 L’année 2015 a constitué une année charnière pour le plan d’action international. Elle a témoigné de notre capacité collective à définir une nouvelle feuille de route, et les choix qui ont été effectués conditionneront ni plus ni moins que l’avenir de nos sociétés et de notre planète. Trois grandes étapes ont marqué cette année : • la conférence sur le financement du développement, qui s’est déroulée à Addis-Abeba (Éthiopie) en juillet 2015 ; • le Sommet spécial de l’ONU sur le développement durable, tenu à New York en septembre 2015, qui a été l’occasion de faire le bilan des Objectifs du millénaire pour le développement et de fixer une nouvelle feuille de route pour la période 2015-2030, avec l’adoption des 17 Objectifs de développement durable ; • la CdP 21, organisée à Paris en décembre 2015 sous couvert de la CCNUCC, qui a abouti à un accord international historique sur le climat. Une conclusion en forme de commencement Les engagements pris à l’occasion de ces rencontres donnent un aperçu de l’ambition internationale de définir de nouveaux modèles de développement et de mettre en œuvre la transition énergétique. Il faudra néanmoins augmenter le niveau de cette ambition pour apporter une réponse à la hauteur des multiples défis auxquels nous sommes confrontés. La mise en œuvre de ces engagements devra également se confronter à des enjeux politico-économiques majeurs, aux intérêts particuliers et parfois conflictuels de chaque acteur et à des moyens technico-financiers souvent limités. d e P o i n t s Au-delà de ces négociations internationales, il est essentiel que chacun d’entre nous s’implique dans la transition. En tant que citoyens ou acteurs de la société civile, nous sommes au cœur des enjeux, et nous avons tous un rôle particulièrement important à jouer : nos modes de production et de consommation et nos choix peuvent être repensés pour intégrer les contraintes d’une planète qui, chaque jour, révèle un peu plus sa fragilité face aux pressions que nous exerçons. Ce guide s’inscrit dans une volonté de partager avec le plus grand nombre des préoccupations universelles afin de rendre les grands enjeux de la transition énergétique moins opaques. Il s’agit également d’informer sur les moyens d’action dont chacun dispose pour devenir un véritable acteur de cette transition qu’il est indispensable de mettre en œuvre. Il s’agit aussi pour chacun d’entre nous de s’interroger sur son rapport à l’autre, car l’énergie, c’est aussi ce trait d’union entre les hommes qui apporte à chacun un droit au développement. Laisser l’autre dans la rareté ou dans la pénurie n’est ni plus ni moins qu’une décision lourde de conséquences qui le prive de l’accès à un développement légitime. La transition énergétique doit, au final, interroger chacun d’entre nous sur le modèle de société qu’il souhaite voir émerger et que nous transmettrons aux générations futures. Alors que les questions climatiques et énergétiques, mais aussi les questions de solidarité et de gouvernance sont de plus en plus au cœur des préoccupations de chacun, il nous faut désormais réussir à passer le cap entre la prise de conscience et les actes concrets. Le temps n’est plus au plaidoyer, mais à l’action. Espérons que ce guide donnera à chacun l’envie d’agir. La balle est dans notre camp… à nous de jouer ! r e p è r e Un guide pour inspirer le changement 243 Figure 3. Figure 4. Figure 5. Figure 6. Figure 7. Figure 8. Figure 9. Figure 10. Figure 11. Figure 12. Figure 13. Figure 14. Figure 15. Figure 16. Figure 17. d e Figure 2. Évolution de la consommation en énergie primaire selon la source énergétique, 1850-2008 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8 Répartition de la consommation énergétique selon le secteur d’usage, 2014 (%) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Prévisions de la consommation énergétique, par secteur, jusqu’en 2035 (milliards de tep) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 Évolution de la consommation mondiale d’énergie finale, selon le type d’énergie (Mtep) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Consommation mondiale d’énergie primaire, selon la région du monde, 1973 et 2013 (Mtep) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 Consommation énergétique mondiale, pays membres et non membres de l’OCDE (« OECD »), 1990-2010 (données réelles) et 2010-2040 (prévisions) (1015 Btu) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 Répartition de la production mondiale d’énergie, 2013 (ktep) . . . . . . . . . 15 Une répartition inégale des réserves de combustibles fossiles . . . . . . . . . . . 15 Principaux flux du commerce mondial de l’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 Consommation mondiale d’énergie selon la source d’énergie, 2013 (%) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Part des différentes sources d’énergie dans la production mondiale d’énergie primaire, 1965-2035 (prévisions) . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Principe de l’effet de serre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Anomalies observées de températures moyennes en surface, combinant les terres émergées et les océans, 1850-2012 . . . . . . . . . . . . . . 23 Variations du deutérium (δD) – qui est un indicateur pour la température – et des concentrations atmosphériques en dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4) et protoxyde d’azote (N2O) depuis 650 000 ans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Évolution des teneurs en dioxyde de carbone (CO2), en méthane (CH4) et en protoxyde d’azote (N2O) depuis 2 000 ans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 Émissions de gaz à effet de serre, selon le secteur économique . . . . . . . . . 26 Évolution de la température moyenne à la surface du globe, selon le scénario envisagé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 P o i n t s Figure 1. r e p è r e Table des figures 245 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 246 Figure 18. Évolution du niveau moyen des mers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 19. Cartes des principales évolutions climatiques, selon deux scénarios extrêmes d’émissions de GES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 20. Changements observés concernant les précipitations annuelles sur les terres émergées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 21. Population n’ayant pas accès à l’électricité en 2010 et 2030 (millions de personnes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 22. Progression du taux d’électrification, selon la région, 1990-2010 (millions de personnes) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 23. Facteurs de la précarité énergétique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 24. Corrélation entre IDH et consommation d’électricité par habitant . . . . . . Figure 25. Relation entre accès à l’électricité et niveau de pauvreté . . . . . . . . . . . . . . Figure 26. Temps passé par les femmes pour la collecte des combustibles, divers pays d’Afrique, 1990-2003 (h/j) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 27. Pertes énergétiques entre énergie primaire et énergie utile . . . . . . . . . . . . . Figure 28. Les besoins en énergie et leur régulation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 29. Demande mondiale en biomasse et différences entre biomasse moderne et traditionnelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 30. Installation géothermique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 31. Système houlomoteur Pelamis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 32. Croissance de la capacité de production énergétique à partir de sources renouvelables, selon la région, et confrontation des projections avec le scénario +2 °C . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 33. Production d’électricité nette, selon la ressource énergétique, 2010-2040 (1012 kWh) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 34. Pays ayant adopté des politiques de soutien aux énergies renouvelables, 2005 et 2013 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 35. Investissement dans les énergies renouvelables, 2001-2013 . . . . . . . . . . . . Figure 36. Schéma d’un réseau intelligent . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 37. Comparaison entre les réseaux conventionnels et les réseaux intelligents . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 38. Nombre total de compteurs électriques intelligents installés, 2008-2018 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 39. Évolution de l’investissement dans les réseaux intelligents . . . . . . . . . . . . . Figure 40. Ressources énergétiques de l’Union européenne en 2050 . . . . . . . . . . . . . Figure 41. Exemple de développement d’un super-réseau européen . . . . . . . . . . . . . . Figure 42. Station de transfert d’énergie par pompage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 43. Stockage d’énergie par air comprimé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 44. Schéma du procédé de cogénération . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 45. Part de la cogénération dans la production nationale d’énergie . . . . . . . . . 28 29 31 33 33 34 35 36 38 44 46 55 56 57 58 59 60 61 66 67 67 68 69 70 72 72 74 74 Figure 72. Figure 73. Figure 74. Figure 75. Figure 76. Figure 77. d e Figure 62. Figure 63. Figure 64. Figure 65. Figure 66. Figure 67. Figure 68. Figure 69. Figure 70. Figure 71. Représentation schématique du développement durable . . . . . . . . . . . . . . 84 ODD propre à l’énergie durable proposé par la Francophonie . . . . . . . . . 93 Les ODD . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 94 La démarche négaWatt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98 Taux d’imposition effectif moyen sur l’énergie – tous usages . . . . . . . . . . 100 Visuel du calculateur ethiCarbon Afrique® . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 127 Schéma de l’économie circulaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 130 Affiches des éditions 2012, 2013 et 2014 d’Agite Ta Terre . . . . . . . . . . . 135 Affiche du concours international Agite Ta Terre 2015 . . . . . . . . . . . . . . 135 Exemple de montage financier d’un projet citoyen . . . . . . . . . . . . . . . . . 139 SAS Bégawatt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 143 Durée du projet éolien de Béganne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 144 Initiatives citoyennes dans les projets éoliens . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 145 Tableau comparatif des éoliennes en fonction en Wallonie-Belgique . . . . 146 Population urbaine et rurale dans le monde, 1950-2050 . . . . . . . . . . . . 150 Proportion des populations urbaine et rurale dans la population totale, selon l’aire géographique, 1950-2050 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 152 Émissions de carbone et revenu, divers pays et villes . . . . . . . . . . . . . . . . 153 Consommation d’énergie finale par pays . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 154 Aménagement axé sur le transport en commun . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 Îlot de chaleur urbain . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 Albédo et rayonnement réfléchi . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 Éléments composant la ville intelligente, selon Rudolf Giffinger . . . . . . . 160 Plan des transports à Curitiba . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 Consommation finale d’énergie, selon le secteur (millions de tep) . . . . . 173 Émissions de CO2 du secteur résidentiel, régions choisies, 2010 . . . . . . . 173 Consommation annuelle d’énergie primaire par ménage, corrigée en fonction du climat, 1990 et 2009 (kWh) . . . . . . . . . . . . . . . 176 Exemple de principes de l’architecture bioclimatique dans un climat tempéré de l’hémisphère Nord . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178 Progrès dans l’application de la réglementation thermique, pays membres de l’AIE, BRICS et Tunisie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 Statut de l’application d’une réglementation thermique pour les nouveaux bâtiments résidentiels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 Statut de l’application d’une réglementation thermique pour les bâtiments résidentiels existants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 183 Approche systémique de la réglementation dans le secteur du bâtiment . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 184 Liste des actions pour la mise en place d’un code d’efficacité énergétique du bâtiment . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 185 P o i n t s Figure 46. Figure 47. Figure 48. Figure 49. Figure 50. Figure 51. Figure 52. Figure 53. Figure 54. Figure 55. Figure 56. Figure 57. Figure 58. Figure 59. Figure 60. Figure 61. r e p è r e 247 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 248 Figure 78. Consommation d’énergie selon l’utilisation et évolution de la consommation entre 1990 et 2009 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 79. Schéma des obstacles à la circulation de l’innovation . . . . . . . . . . . . . . . Figure 80. Indice du transport mondial de voyageurs, 2000-2050 . . . . . . . . . . . . . . Figure 81. Taux de motorisation, pays choisis, 2012 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 82. Évolution de la répartition de la consommation énergétique du secteur des transports . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 83. Émissions mondiales de CO2 dues à l’utilisation des véhicules de transports (indice 2000 = 100) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 84. Évolution des prix du litre de lait, de vin et de pétrole, France, 1930-2010 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 85. Temps de travail nécessaire pour accéder à 50 litres d’essence, pays choisis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 86. Les filières énergétiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 87. Filières de biocarburants de première génération . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 88. Schéma du financement du Transmilenio . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 89. Estimation des coûts de production des biocarburants à l’horizon 2030 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 90. Rendement des productions de biocarburants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 91. Émissions de GES évitées par rapport aux carburants conventionnels, selon le type de biocarburant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 92. Émissions industrielles de CO2, selon le secteur et la région . . . . . . . . . . Figure 93. Consommation énergétique de l’industrie, selon la région . . . . . . . . . . . Figure 94. Enjeux du secteur agricole . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 95. La faim dans le monde . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 96. Corrélation entre prix du pétrole et prix des denrées alimentaires . . . . . . Figure 97. Effet du changement climatique sur la production agricole dans le monde en 2080 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 98. Technologies nécessaires dans les pays en voie de développement pour l’atténuation et l’adaptation dans le secteur agricole . . . . . . . . . . . . Figure 99. Besoins en technologie des pays en développement en termes de mesures d’atténuation et d’adaptation, selon le secteur . . . . . . . . . . . . Figure 100. Sources d’énergie renouvelable dans les fermes agricoles . . . . . . . . . . . . . Figure 101. Synergies et compromis entre production d’aliments, adaptation et atténuation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Figure 102. Mécanisme de financement de la chaîne de valeur agricole . . . . . . . . . . . Figure 103. Mécanisme de financement des engrais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187 188 192 193 194 195 196 197 199 200 206 208 209 210 212 216 222 223 226 228 229 229 231 232 236 238 Table des encadrés d e P o i n t s Le Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC) . . . . . . . . 26 Des initiatives en faveur des femmes et d’une énergie durable . . . . . . . . . . 39 Des réseaux intelligents en Afrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 65 Le fonctionnement d’une STEP et du SEAC . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 71 Capter et stocker le CO2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 76 Conséquences des variations des cours internationaux de l’énergie sur l’État indien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77 Encadré 7. La notion de développement durable . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 83 Encadré 8. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 86 Encadré 9. Contribution de la Francophonie au processus des Nations Unies sur les ODD : la question énergétique et les ODD . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93 Encadré 10. Les scénarios de référence en France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 97 Encadré 11. L’émergence de la cogénération sur l’île Maurice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 102 Encadré 12. Investissements dans un programme de production de biogaz au Rwanda . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103 Encadré 13. Une connexion électrique bilatérale entre l’Éthiopie et Djibouti . . . . . . . 104 Encadré 14. Le label Cit’ergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106 Encadré 15. La Convention des maires : une mise en réseau pour une transition énergétique facilitée . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108 Encadré 16. L’organisation collective des transports en Rhénanie-du-Nord–Westphalie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 109 Encadré 17. Le réseau FLAME en France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 Encadré 18. Le fonds proKlima de Hanovre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 111 Encadré 19. La responsabilité sociale des entreprises sur l’île Maurice . . . . . . . . . . . . 118 Encadré 20. Les obligations vertes d’EDF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 120 Encadré 21. L’initiative ethiCarbon Afrique®, pour une Afrique en transition énergétique, résiliente et solidaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126 Encadré 22. Quelques initiatives isolées de circularité en France . . . . . . . . . . . . . . . . 131 Encadré 23. L’exemple de l’initiative Agite Ta Terre d’ENERGIES 2050 . . . . . . . . . . 133 Encadré 24. Le financement citoyen en France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 140 r e p è r e Encadré 1. Encadré 2. Encadré 3. Encadré 4. Encadré 5. Encadré 6. 249 La transition énergétique : connaître et partager pour agir P o i n t s d e r e p è r e Encadré 25. Le parc éolien de Béganne en France . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 26. Le contrat d’axe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 27. Les écoquartiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 28. Le PCTI de la Ville de Dakar . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 29. Curitiba, la figure de proue . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 30. PassiveHaus, le bâtiment écophile . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 31. Les mesures d’atténuation appropriées au niveau national . . . . . . . . . . . Encadré 32. Présentation de quelques projets de coopération décentralisée . . . . . . . . Encadré 33. L’Initiative de la Francophonie pour des villes durables . . . . . . . . . . . . . . Encadré 34. La rénovation énergétique dans le secteur hôtelier en Europe : le projet neZEH . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 35. Les principes de l’architecture bioclimatique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 36. Le programme PROSOL en Tunisie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 37. Le projet Éco’Énergies de la Chambre de commerce et d’industrie de Nice . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 38. La Directive relative à l’efficacité énergétique de l’Union européenne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 39. La formation africaine des professionnels de l’architecture et de l’urbanisme aux enjeux de la transition énergétique . . . . . . . . . . . . Encadré 40. Le financement du projet de SRB Transmilenio, à Bogota . . . . . . . . . . . Encadré 41. Qu’est-ce que la Meilleure Technique Disponible (MTD) ? . . . . . . . . . . Encadré 42. Le système de management de l’énergie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 43. La symbiose industrielle de Kalundborg . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 44. L’initiative européenne Factories of the Future . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 45. Les bienfaits de l’agriculture biologique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Encadré 46. Un mécanisme innovant de financement de la chaîne de valeur : le modèle ESOP26, au Togo, au Burkina Faso et au Bénin . . . . . . . . . . . 250 142 156 158 159 161 164 165 168 169 175 177 180 181 186 189 205 214 217 218 220 233 237 Annexe Historique des négociations climat Le tableau ci-dessous présente de manière synthétique l’ensemble des CdP tenues depuis 1995. CdP 1 Berlin (Allemagne) Mars 1995 Lors de cette première conférence, les Parties réfléchissent à la mise en application de la Convention. Les premières lignes du Protocole de Kyoto voient le jour. CdP 2 Genève (Suisse) Juillet 1996 Les Parties se réunissent afin de poursuivre la réflexion engagée sur le contenu de ce qui deviendra le Protocole de Kyoto. CdP 3 Kyoto (Japon) Décembre 1997 Adopté en 1997 lors de la CdP 3, le Protocole de Kyoto constitue une formidable avancée collective dans la mise en œuvre de la CCNUCC. Le Protocole traduit en pratique le principe des « responsabilités partagées, mais différenciées » et l’obligation qu’ont les pays développés de réduire leurs émissions de GES. CdP 4 Buenos Aires (Argentine) Du 2 au 13 novembre 1998 Suite à cette conférence, les Parties adoptent un plan d’action sur deux ans, qui prévoit notamment la mise en place de mécanismes financiers et de transfert de technologie, afin que le Protocole de Kyoto puisse entrer en vigueur au cours de l’année 2000. CdP 6 bis Bonn (Allemagne) Du 17 au 27 juillet 2001 George W. Bush, devenu le 43e président des États-Unis d’Amérique le 20 janvier 2001, retire les États-Unis du Protocole de Kyoto. La délégation américaine assiste néanmoins à la Conférence des Parties en tant qu’observateur. Au-delà de cet événement majeur, les Parties parviennent à des accords sur d’importantes décisions concernant notamment les crédits carbone, les mécanismes de développement propre et les puits de carbone. d e P o i n t s CdP 6 La Haye (Pays-Bas) Du 13 au 25 novembre 2000 La conférence de La Haye est marquée par l’échec des négociations entre les États-Unis d’Amérique et la plupart des pays de l’Union européenne sur les sujets suivants : l’assistance financière aux pays en voie de développement en vue de les aider à s’adapter au changement climatique et à mesurer leurs émissions de GES, voire à les réduire ; la proposition des États-Unis d’inclure dans le calcul des efforts à réaliser par les pays industrialisés les puits de carbone constitués par les forêts et les terres agricoles (ce qui aurait pour conséquence de réduire leur propre effort de réduction des émissions de GES). Les discussions ayant échoué à La Haye, les Parties décident de se retrouver de nouveau à Bonn en juillet 2001. Ainsi, l’entrée en vigueur du Protocole de Kyoto est reportée à une date ultérieure. r e p è r e CdP 5 Bonn (Allemagne) Du 25 octobre au 5 novembre 1999 La conférence de Bonn poursuit le travail prévu par le Plan d’action de Buenos Aires. Elle apporte des avancées techniques nécessaires à la bonne application du Protocole de Kyoto, essentiellement sur les inventaires nationaux de GES. 251 La transition énergétique : connaître et partager pour agir CdP 7 Marrakech (Maroc) Du 29 octobre au 10 novembre 2001 La CdP 7 débouche sur les accords dits de Marrakech. Les Parties prolongent les travaux engagés dans le cadre du Plan d’action de Buenos Aires. Elles apportent également des solutions techniques aux décisions prises lors de la CdP 6 bis et elles mettent en place des fonds pour lutter contre les changements climatiques. Les États-Unis assistent de nouveau à la conférence en tant qu’observateur. CdP 8 New Delhi (Inde) Du 23 octobre au 1er novembre 2002 Pour entrer en vigueur, le Protocole de Kyoto doit être ratifié par 55 pays (de l’Annexe I ou non) et la somme des émissions de GES des pays de l’Annexe I signataires doit atteindre 55 % des émissions de GES de l’année 1990. Les États-Unis et l’Australie refusent de ratifier le Protocole de Kyoto. La Russie se retrouve en position d’arbitre au regard de son niveau d’émission de GES, seul à même de permettre de passer la barre des 55 %. CdP 9 Milan (Italie) Les Parties acceptent le déblocage des fonds établi lors de la CdP 7. Du 1er au 12 décembre 2003 CdP 10 Buenos Aires (Argentine) Du 6 au 17 décembre 2004 Cette conférence est l’occasion de faire le point sur le travail accompli depuis 10 ans par les Parties et de débattre des enjeux à venir, notamment les questions de l’atténuation et de l’adaptation. Elles commencent à discuter de l’après-Kyoto et de ce qu’il adviendra en 2012, lorsque la première période arrivera à son terme. CdP 11 Montréal (Canada) Du 28 novembre au 9 décembre 2005 CRP 1 Le Protocole de Kyoto est entré en vigueur le 16 février 2005 lors de sa ratification par la Russie. La CdP 11 devient ainsi la première réunion des Parties du Protocole de Kyoto (on parle dès lors également de la CRP – Conférence des Parties servant de Rencontre des Parties au Protocole de Kyoto). De cette conférence ressort le Plan d’action de Montréal, qui prévoit la prolongation du Protocole de Kyoto après son échéance en 2012 et des efforts de réductions des GES plus importants (principe de l’action inscrite dans la durée). Les Parties amorcent des discussions visant à établir une nouvelle période d’engagements dite de l’« après-Kyoto ». P o i n t s d e r e p è r e CdP 12 Nairobi (Kenya) Du 6 au 17 novembre 2006 CRP 2 Lors de cette conférence, les travaux entamés à Montréal se poursuivent. Pour autant, il ressort que les engagements des politiques ne sont pas à la hauteur des conclusions données par les experts sur le climat. On ne note guère d’avancées concrètes. 252 CdP 13 Bali (Indonésie) Du 3 au 14 décembre 2007 CRP 3 La CdP 13 marque l’amorce d’un processus de négociation pour les années post-2012, visant à trouver un nouvel accord sur la deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto (2013-2020) devant être ratifié en 2009 lors de la CdP de Copenhague. Le Plan d’action de Bali inclut un changement de formulation où les termes « pays de l’annexe I » et « pays non visés par l’annexe I » sont remplacés par « pays développés » et « pays en développement ». Le Plan d’action de Bali jette les bases des négociations pour un futur accord, s’appuyant sur quatre éléments : l’atténuation des émissions de GES dans tous les pays, dans le respect des réalités nationales du développement ; l’adaptation et la nécessité d’apporter un soutien technico-financier urgent aux pays les plus vulnérables aux changements climatiques ; le développement et le transfert technologique afin de faciliter l’accès des pays en développement aux technologies propres, à un prix abordable ; le financement des mesures d’atténuation et d’adaptation dans les pays en développement. Annexe CdP 14 Poznan (Pologne) Du 1er au 12 décembre 2008 CRP 4 Les Parties finalisent les modalités de financement des fonds d’adaptation permettant aux pays les plus pauvres de lutter contre les effets du changement climatique et approuvent un mécanisme incorporant la protection des forêts en tant qu’action de lutte contre les changements climatiques. La conférence est par ailleurs consacrée à poursuivre la préparation du nouveau protocole pour l’après-Kyoto. CdP 15 Copenhague (Danemark) Du 7 au 18 décembre 2009 CRP 5 La CdP 15 doit permettre l’aboutissement des travaux entrepris depuis Montréal pour convenir d’un nouveau protocole prolongeant le Protocole de Kyoto après son échéance en 2012. Les résultats obtenus ne sont pas à la hauteur des attentes et la conférence se solde par un accord non contraignant basé sur des propositions d’engagements volontaires en marge du processus officiel de la Conférence. L’Accord de Copenhague, conclu par les États-Unis, la Chine et une minorité des Parties, intervient la veille de la fin de la Conférence et n’est pas validé dans le processus formel de négociations de la CCNUCC. Les négociations pour le prolongement du Protocole de Kyoto sont reportées à la COP 16 de Cancun. La conférence de fait est perçue au niveau international comme un échec au processus. CdP 16 Cancún (Mexique) Du 29 novembre au 10 décembre 2010 CRP 6 La CdP 16 débouche sur un « ensemble équilibré » de décisions, favorablement accueilli par la communauté internationale. À cette occasion, les Parties s’entendent sur la mise à disposition d’un fonds vert sur le climat de 100 milliards de dollars par an d’ici 2020. Cette décision reprend les principes des fonds d’adaptation prévus par les conférences précédentes et s’inspire d’une des décisions de l’accord de Copenhague. Pour autant, les parties ne trouvent d’accord ni sur la façon de financer ces 100 milliards de dollars ni sur la prolongation du Protocole de Kyoto. d e P o i n t s CdP 18 Doha (Qatar) Du 26 novembre au 7 décembre 2012 CRP 8 L’adoption de « l’amendement de Doha » au Protocole de Kyoto y inscrit la deuxième période d’engagement. Celle-ci commencera le 1er janvier 2013 et s’achèvera le 31 décembre 2020. La date de son entrée en vigueur reste le libre choix des pays, même si la Décision de Doha les encourage à mettre en œuvre la deuxième période d’engagement avant de la ratifier. En août 2015, seules 38 Parties l’avaient ratifié, ce qui reste insuffisant pour permettre d’atteindre l’objectif des +2 °C. La CdP de Doha remet également au centre des négociations les questions sur le financement climat, notamment celui des mesures d’adaptation aux changements climatiques. Il est également décidé d’autoriser les Parties à utiliser et vendre des quotas d’émissions de CO2 lors de la deuxième période du Protocole de Kyoto. r e p è r e CdP 17 Durban (Afrique du Sud) Du 28 novembre au 9 décembre 2011 CRP 7 La CdP 17 lance le processus de négociation d’un accord unique dans le cadre de la CCNUCC, avec la création du Groupe de travail spécial sur la Plateforme de Durban pour une action renforcée (ADP 56). Celui-ci a pour mandat de mettre en œuvre un « processus visant à élaborer un protocole, un autre instrument juridique ou un résultat convenu ayant force juridique, applicable à toutes les Parties », devant entrer en vigueur à partir de 2020. La Plateforme de Durban impulse une coopération à long terme qui implique tous les pays. 253 La transition énergétique : connaître et partager pour agir CdP 19 Varsovie (Pologne) Du 11 au 22 novembre 2013 CRP 9 Cette conférence, décevante au regard des enjeux, clarifie les modalités d’élaboration du projet de texte de négociation pour 2015 et du processus de soumission des Contributions prévues déterminées au niveau national (CPDN) des Parties à la CCNUCC. Les CPDN indiquent les efforts volontaires des pays en matière de changement climatique qui pourraient être inscrits dans l’accord de 2015. Le terme « contributions » adopté fait finalement l’objet d’un consensus au cours des dernières minutes des négociations de Varsovie. Il laisse toutefois en suspens des questions majeures, celle de la différenciation entre les pays selon leurs différents niveaux de développement ainsi que celles du soutien financier, du transfert technologique et du renforcement des capacités. CdP 20 Lima (Pérou) Du 1er au 14 décembre 2014 CRP 10 La CdP 20 a pour mandat principal de progresser sur le texte de base en vue de l’Accord de Paris 2015. Le GIEC insiste sur la nécessité d’agir en présentant la synthèse et les conclusions de son 5e Rapport d’évaluation, qui réaffirme avec une probabilité renforcée la responsabilité de l’Homme dans les changements climatiques. L’Appel de Lima pour l’action sur le climat pose les axes du nouvel accord international, bénéficiant d’un préambule favorable, avec une succession d’annonces politiques et d’engagements au cours des mois précédant la CdP. Un document de quatre pages servant de base officielle pour la négociation d’un nouvel accord à Paris est élaboré. Celui-ci insiste sur le contenu des CPDN (voir le chapitre 3). De grands enjeux restent néanmoins en suspens, notamment le financement, la question du genre, le contenu exact attendu des CPDN et la forme juridique de l’accord. P o i n t s d e r e p è r e CdP 21 Paris (France) Du 30 novembre au 11 décembre 2015 CRP 12 La CdP 21 marque l’adoption de l’Accord de Paris par les 195 États-Parties membres de la CCNUCC. Ce premier accord universel sur le climat est déjà historique, ne serait-ce qu’à ce titre. L’Accord de Paris contient des progrès notables, qu’il s’agisse du niveau d’ambition, de la place accrue de l’adaptation, de la confirmation du mécanisme de pertes et de dommages, du financement, autant d’enjeux majeurs qui connaissent des avancées significatives. On note néanmoins l’absence de mécanismes de contrainte réelle sur les Parties ainsi que le manque de mesures concrètes pour s’assurer de la réalité des moyens de mise en œuvre qui seront mis à la disposition des pays en développement. 254 CdP 22 Marrakech (Maroc) Du 7 au 18 novembre 2016 CRP 22 La CdP22 appelée également « la Conférence de l’action » a pour tâche de traduire les engagements pris à Paris en actions concrètes suivant les différents axes retenus dans l’Accord de Paris. Parmi les nombreux points à l’agenda on citera notamment ceux qui ont trait à l’adaptation, la transparence, le transfert de technologies, l’atténuation, le renforcement des capacités et les pertes et préjudices. d e P o i n t s Sites Internet – dernière consultation décembre 2015 Agence internationale de l’énergie : http://www.iea.org/topics/coal/ Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie tunisienne : http://www.anme.nat.tn/ index.php?id=3 Banque mondiale : http://www.banquemondiale.org/ Barefoot College : http://www.barefootcollege.org/ Cit’ergie, le label énergie-climat des communes et intercommunalités : http://www.citergie.ademe.fr/ Cités unies France : http://www.cites-unies-france.org Climate Action Tracker : http://climateactiontracker.org/indcs.html Convention des maires : http://www.conventiondesmaires.eu/actions/ sustainable-energy-action-plans_fr.html Energia : http://www.energia.org/ EMEC (European Marine Energy Centre) : http://www.emec.org.uk/about-us/waveclients/pelamis-wave-power/ ENERGIES 2050, ensemble pour un futur énergétique durable : http://energies2050.org/ ENERGIES 2050 – Projet neZEH : http://energies2050.org/nos-projets/ projet-europeen-nezeh/ Eurostat : http://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/File:Energy_ dependency_rate,_EU-28,_2003%E2%80%9313_(%25_of_net_imports_ in_gross_inland_consumption_and_bunkers,_based_on_tonnes_of_oil_ equivalent)_YB15-fr.png Fédération des agences locales de maîtrise de l’énergie et du climat : http://www.federation-flame.org/ Global Carbon Project : http://www.globalcarbonproject.org/ Global Reporting Initiative : https://www.globalreporting.org/languages/French/ Pages/default.aspx r e p è r e Bibliographie 255 P o i n t s d e r e p è r e La transition énergétique : connaître et partager pour agir 256 Greenfacts : http://www.greenfacts.org/fr/agriculture-developpement/index.htm ICLEI : http://deep.iclei-europe.org/ Initiative des Nations Unies « Sustainable Energy For All » : http://www.se4all.org/ INONEV : http://inovev.com/index.php/fr/analyses-list/1164-2013-42-4 Institut de la Francophonie pour le développement durable : www.ifdd.francophonie.org L’énergie éolienne en Wallonie : Cadre de référence, APERe : http://energie.wallonie. be/fr/l-eolien.html?IDC=6170 L’énergie éolienne en Wallonie : http://www.eolien.be La convention des maires pour une énergie locale durable : http://www.conventiondesmaires.eu/index_fr.html Land Matrix : http://www.landmatrix.org/en/ Le pacte mondial : https://www.unglobalcompact.org/languages/french/ Le site du Plan climat intégré de la région de Dakar : http://www.pctidakar.org/ Ministère des Affaires étrangères et du Développement international : www.diplomatie.gouv.fr Organisation internationale de la Francophonie : www.francophonie.org ONU – 2010 année internationale de l’énergie durable pour tous : http://www.un.org/fr/events/sustainableenergyforall/ Portail CEA, http://portail.cea.fr/comprendre/Pages/climat-environnement/ questions-sur-l-effet-de-serre.aspx?Type=Chapitre&numero=1 Portail de l’énergie en Wallonie – l’éolien participatif : http://energie.wallonie.be/ fr/l-eolien.html?IDC=6170 Portail de l’énergie en Wallonie : http://energie.wallonie.be/ Portail du projet NEZEH : http://www.nezeh.eu/home/index.html Projet Aspect 2050 : http://www.aspect2050.fr/ Réseau Régional Énergie Précarité Provence-Alpes-Côte d’Azur : https://sites.google. com/site/reseauregionalenergieprecarite/ Roadmap 2050 : http://www.roadmap2050.eu/ State Climate Office of North Carolina – explication de l’albédo : http://www.nc-climate.ncsu.edu/edu/k12/.albedo UN Energy : http://www.un-energy.org/about/overview United Nations Development Programme (Programme des Nations Unies pour le développement) : http://www.undp.org/content/undp/fr/home/sdgoverview/ post-2015-development-agenda.html United Nations Environment Programme (Programme des Nations Unies pour l’environnement) : www.unep.org Bibliographie d e P o i n t s Articles, notes, revues, guides, ouvrages, rapports Abhervé, M. 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Rassemblant, à ce jour, des citoyens, des experts et des partenaires d’une soixantaine de nationalités et mettant en œuvre des projets dans une vingtaine de pays, l’association travaille à la mise en place d’un nouveau modèle de développement résolument positif et solidaire afin de transformer les contraintes en opportunités d’actions. Aventure collective à la recherche d’un mieux-vivre ensemble, ENERGIES 2050 est engagée dans la mise en œuvre de la Grande Transition, qu’il s’agisse de la transition énergétique, des villes et des territoires durables ou de la mise en mouvement d’une société plus humaine, plurielle et solidaire, porteuse de paix et respectueuse des biens communs de l’humanité. ENERGIES 2050 organise ses activités selon 5 axes complémentaires : • Réaliser des projets de mise en œuvre démonstratifs et reproductibles accompagnés d’études techniques et d’actions de recherche pour témoigner des possibles ; • Organiser ou participer à des rencontres et à des conférences afin de démultiplier les opportunités d’échanges et de débats ; • Publier les résultats des recherches afin de mutualiser et de partager les savoirs ; • Éduquer, former et renforcer les capacités pour que chacun puisse comprendre, connaître et agir ; • Communiquer au plus grand nombre pour informer, mobiliser et fédérer les envies d’agir. Les thématiques d’intervention d’ENERGIES 2050 sont l’écodéveloppement et le développement durable ; les politiques climatiques, environnementales et énergétiques ; la transition énergétique ; le développement des sources d’énergies renouvelables ; le tourisme responsable et durable ; le bâtiment et le secteur de la construction ; les défis et les opportunités d’agir des territoires ruraux et urbains ; les villes durables ; les r e p è r e ENERGIES 2050 275 La transition énergétique : connaître et partager pour agir ressources naturelles et les biens communs de l’humanité ; l’économie de l’écologie et de l’environnement ; les dynamiques entrepreneuriales responsables et la performance des entreprises ; les stratégies de développement bas carbone ; le genre ; l’éducation à l’environnement ; les dynamiques sociales ; les changements de comportement et l’action citoyenne ; l’économie sociale et solidaire. Les activités d’ENERGIES 2050 s’inscrivent dans une vision permanente de solidarité et d’équité. ENERGIES 2050 plaide pour une implication de l’ensemble des citoyens du Monde dans la mise en place d’un nouveau modèle de développement partagé, à imaginer collectivement. Les actions et recherches d’ENERGIES 2050 s’inscrivent simultanément au niveau local, point d’ancrage de toute mise en œuvre et laboratoire des actions à élaborer, et au niveau global, car il s’agit de partager et de dupliquer les expériences réussies tout en bénéficiant des leçons tirées des échecs. P o i n t s d e r e p è r e ENERGIES 2050 8 avenue du Docteur Julien Lefebvre, 06270 Villeneuve Loubet [email protected] – www.energies2050.org +33 (0)9 82 54 82 15 276 www.ifdd.francophonie.org d e P o i n t s L’Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD) est un organe subsidiaire de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et son siège est à Québec. À l’origine dénommé Institut de l’Énergie des Pays ayant en commun l’usage du Français (IEPF), l’IFDD est né en 1988 peu après le IIe Sommet de la Francophonie, tenu à Québec en 1987. Sa création faisait suite aux crises énergétiques mondiales et à la volonté des chefs d’État et de gouvernement des pays francophones de conduire une action concertée visant le développement du secteur de l’énergie dans les pays membres. En 1996, l’Institut inscrit les résolutions du Sommet de la Terre de Rio-1992 comme fil directeur de son action et devient l’Institut de l’énergie et de l’environnement de la Francophonie. Et en 2013, à la suite de la Conférence de Rio+20, il prend la dénomina tion Institut de la Francophonie pour le développement durable (IFDD). Sa mission est de contribuer : • à la formation et au renforcement des capacités des différentes catégories d’acteurs de développement des pays de l’espace francophone dans les secteurs de l’énergie et de l’environnement pour le développement durable ; • à l’accompagnement des acteurs de développement dans des initiatives relatives à l’élaboration et à la mise en oeuvre des programmes de développement durable ; • à la promotion de l’approche développement durable dans l’espace francophone ; • au développement de partenariats dans les différents secteurs de développement économique et social, notamment l’environnement et l’énergie, pour le développement durable. L’action de l’IFDD s’inscrit dans le Cadre stratégique de la Francophonie, au sein de la mission D « Développement durable, économie et solidarité » et de l’Objectif stratégique 7 « Contribuer à l’élaboration et à la mise en oeuvre du Programme de développement pour l’après-2015 et des Objectifs du développement durable ». L’Institut est notamment chef de file des deux programmes suivants de la programmation 2015-2018 de l’OIF, mis en œuvre en partenariat avec d’autres unités de l’OIF : • Accroître les capacités des pays ciblés à élaborer et à mettre en oeuvre des stratégies régionales nationales et locales de développement durable, inclusives, participatives et axées sur les résultats, aux niveaux régional, national et local ; • Renforcer les capacités des acteurs francophones en vue d’une participation active aux négociations et décisions internationales sur l’économie, l’environnement et le développement durable, ainsi que leur mise en oeuvre. r e p è r e INSTITUT DE LA FRANCOPHONIE P O U R L E D É V E LO P P E M E N T D U R A B L E 277 L’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) est une institution fondée sur le partage d’une langue, le français, et de valeurs communes. Elle rassemble à ce jour 80 États et gouvernements dont 57 membres et 23 observateurs. Le Rapport sur la langue française dans le monde 2014 établit à 274 millions le nombre de locuteurs de français. Présente sur les cinq continents, l’OIF mène des actions politiques et de coopération dans les domaines prioritaires suivants : la langue française et la diversité culturelle et linguistique ; la paix, la démocratie et les droits de l’Homme ; l’éducation et la formation ; le développement durable et la solidarité. Dans l’ensemble de ses actions, l’OIF accorde une attention particulière aux jeunes et aux femmes ainsi qu’à l’accès aux technologies de l’information et de la communication. La Secrétaire générale conduit l’action politique de la Francophonie, dont elle est la porte-parole et la représentante officielle au niveau international. Madame Michaëlle Jean est la Secrétaire générale de la Francophonie depuis janvier 2015. P o i n t s d e r e p è r e 57 États et gouvernements membres Albanie • principauté d’Andorre • Arménie • Royaume de Belgique • Bénin • Bulgarie • Burkina Faso • Burundi • Cabo Verde • Cambodge • Cameroun • Canada • Canada-Nouveau-Brunswick • Canada-Québec • République centrafricaine • Chypre • Comores • Congo • République démocratique du. Congo • Côte d’Ivoire • Djibouti • Dominique • Égypte • Ex-République yougoslave de Macédoine • France • Gabon • Ghana • Grèce • Guinée • Guinée-Bissau • Guinée équatoriale • Haïti • Laos • Liban • Luxembourg • Madagascar • Mali • Maroc • Maurice • Mauritanie • Moldavie • principauté de Monaco • Niger • Qatar • Roumanie • Rwanda • Sainte-Lucie • Sao Tomé-et-Principe • Sénégal • Seychelles • Suisse • Tchad • Togo • Tunisie • Vanuatu • Vietnam • Fédération Wallonie-Bruxelles 278 23 observateurs Autriche • Bosnie-Herzégovine • Costa Rica • Croatie • République dominicaine • Émirats arabes unis • Estonie • Géorgie • Hongrie • Kosovo • Lettonie • Lituanie • Mexique • Monténégro • Mozambique •pologne • Serbie • Slovaquie • Slovénie • République tchèque • Thaïlande • Ukraine • Uruguay ORGANISATION INTERNATIONALE DE LA FRANCOPHONIE 19-21, avenue Bosquet, 75007 Paris France Tél. : +33 (0)1 44 37 33 00 www.francophonie.org Nos sociétés modernes se sont développées en s’appuyant sur un système énergétique qui n’est tout simplement pas viable. Seule une profonce modification du modèle actuel permettra de répondre aux défis auxquels nous sommes tous collectivement confrontés. Dans un tel contexte, la transition énergétique est une véritable opportunité permettant notamment d’atténuer le réchauffement climatique et de maîtriser la pollustion atmosphérique, tout en contribuant à lutter contre le manque d’accès aux ressources énergétiques et en soutenant l’éradication de la pauvreté énergétique dans les pays du Sud. Afin de remplir ses objectifs, la transition devra s’appuyer sur une réorganisation totale de l’offre, mais également sur la gestion de la demande en énergie autour de trois objectifs principaux et complémentaires : sobriété énergétique, efficacité énergétique, développement des énergies renouvelables. Ce guide s’adresse volontairement à un public pluriel et composite : les décideurs politiques, mais aussi, plus globalement, l’ensemble des acteurs publics et privés et des simples citoyens. Il s’efforce d’exposer la situation de façon non technique et non théorique, tout en présentant un certain nombre de concepts nécessaires à la compréhension et à la description de la transition énergétique. La transition énergétique doit, au final, amener chacun d’entre nous à s’interroger sur le modèle de société que nous souhaitons voir émerger et que nous transmettrons aux générations futures. Alors que les questions climatiques et énergétiques, mais aussi les questions de solidarité et de gouvernance, sont de plus en plus au cœur des préoccupations de chacun, il nous faut désormais réussir à passer le cap entre prise de conscience et actes concrets. Institut de la francophonie pour le développement durable (IFDD) 56, rue Saint-Pierre, 3e étage, Québec (Québec) G1K 4A1 Canada L’IFDD est un organe subsidiaire de l’Organisation internationale de la Francophonie. www.ifdd.francophonie.org