La confection de luxe cherche des doigts agiles
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La confection de luxe cherche des doigts agiles
La confection de luxe cherche des doigts agiles OUEST FRANCE lundi 14 janvier 2013 – page 6 Pays de la Loire À gauche, Joseph Moreau, PDG de Getex, avec une formatrice et l'une des nouvelles recrues. En haut à droite, Nicole, 58 ans, licenciée au bout de quinze ans de confection, devenue buraliste et revenue à son premier métier. En bas, Tony Herblot, président de Socovet Sistem et président de Mode Grand Ouest. Enquête Il les montre avec fierté. De magnifiques blousons de cuir, matelassés avec du duvet intérieur... « Griffés avec des marques de luxe françaises, mais c'est top secret », confie Joseph Moreau, PDG de Getex. La société de confection de Challans redresse le col. En habit de luxe. Un virage accéléré quand des donneurs d'ordres ont commencé à rapatrier du boulot en France. Poussés par la crainte d'être pillés par des sous-traitants en Asie. Leurs modèles créés revenaient, avec quelques variantes, inonder le marché aux rayons moyenne gamme. « Il a fallu relever les manches » Getex, comme beaucoup d'entreprises du secteur, a réduit la toile pendant des années. « J'ai racheté l'entreprise en 1992. Il y avait 120 personnes. Nous étions sous-traitants d'un grand distributeur bas de gamme. Il nous a lâchés l'année suivante : 35 % du chiffre d'affaires était perdu. Il a fallu relever les manches, s'orienter vers le haut de gamme, créer une filiale en Tunisie, où sont faits des uniformes et des vêtements de travail. Sinon nous aurions disparu. » Getex commence à changer de rôle. Reçoit des croquis, crée des vêtements virtuels, les traduit en prototypes soumis aux grandes maisons avant de les produire. « Les grandes marques se sont recentrées sur deux métiers : design et marketing distribution », explique le PDG. Mais beau faire, l'effectif vendéen est tombé à une cinquantaine de personnes. Les vents sont redevenus peu à peu favorables à partir de 2007. Le souffle du luxe a été attisé par des nouveaux riches friands de Made in France, ici et là, dans le monde. La crise survient et ne brise pas l'élan. « Aujourd'hui nous créons 750 modèles par an dont une partie pour trois créateurs anglais et deux japonais qui assurent 15 % d'activité. » Le fruit de la ténacité. « J'ai fait sept ans le salon de Londres avant de décrocher un premier contrat », raconte le PDG. Qui, désormais, tente de pousser ses pions en Turquie. Et la situation s'inverse : il faut du monde. « Des artistes. Minutieuses. Capables de travailler en équipe sur des produits nobles. Avec des machines dernier cri », s'enthousiasme ce patron passionné qui, à 65 ans, vient de céder le volant à sa fille. « On trouve des stylistes, mais moins facilement des piqueuses. Nous avons organisé un recrutement par simulation avec l'aide de Pôle emploi et du Pôle mode Ouest. » Dix-sept embauches Dix-sept personnes ont été intégrées dont une partie en contrat de qualification. Des jeunes : esthéticienne, aide maternelle et autres jeunes femmes sans solution. Il y a aussi Nicole, 58 ans. Qui a décroché un CDI après quelques missions d'intérim. Elle redécouvre son premier métier. La confection à même d'offrir une bouffée d'oxygène en ces temps de chômage envahissant ? À Commequiers, à quelques kilomètres de Challans, Tony Herblot, président de Socovet Sistem, entreprise de 48 salariés, confirme. « Chez nous, la moyenne d'âge est de 47-48 ans. Dans les dix ans, 50 % de l'effectif part à la retraite. » Tony Herblot, président de Mode Grand Ouest, cite le cas d'autres collègues dans la même situation : « Ce métier a licencié, délocalisé par la force des choses. Il a mauvaise réputation alors qu'il n'est plus le même. » Thierry BALLU. Quatre cents emplois à pourvoir dans le grand Ouest 10 000 emplois En France, le secteur de la mode (chaussure, habillement, maroquinerie, textile, cuirs et peaux) représente 125 000 emplois, dont 60 000 pour la fabrication. Mode Grand Ouest, qui rayonne dans six régions (1), s’en attribue la moitié, dont environ 10 000 en Pays de la Loire. « Les effectifs ont été divisés par deux dans la période 1980-1990, par l’effet des délocalisations et la fin de l’accord international multifibres », indique Laurent Vandenbor, délégué général qui manage aussi l’Opcalia, fonds d’assurance formation. Transférer les compétences Des tâches qui reviennent en France et, surtout, des gens qui vont partir en retraite : « Un salarié sur quatre va quitter son entreprise dans les cinq prochaines années », prévient Laurent Vandenbor. Il a mis au point Trans-Faire, pour préserver les savoirs séculaires d’une profession de tradition orale, où les trouvailles et les acquis sont peu formalisés. A l’échelle de chaque entreprise, le recrutement peut apparaître minime : deux ou trois personnes par atelier. Mais sans relais, c’est toute la filière qui peu à peu se fragilise. Mode Grand Ouest et Opcalia ont radiographié les besoins dans les 76 entreprises des 24 bassins d’activités. 400 personnes sont à recruter dont 200 au moins dans les Pays de la Loire. Le plus gros effectif dans un rayon de 180 km autour de Cholet. Des recrutements de personnes sans qualification se font par le biais de tests de simulation : la sélection se fait au vu de l’habileté et sur la motivation. Les heureux élus bénéficient d’un stage de simulation de parcours professionnel avant de suivre une formation rémunérée d’un an. Elle est organisée au sein des entreprises. Métiers recherchés On ne manque pas de stylistes, mais plutôt de mécaniciennes en confection, de piqueuses, de monteurs de chaussures… On est payé un peu au-dessus du smic : 9,51 € de l’heure au minimum pour le salaire de départ. Pas le Pérou ? « Nous sommes en concurrence avec d’autres entreprises européennes, italiennes notamment. La baisse des charges permettrait de doper la filière », estime Joseph Moreau. Comme lui, Laurent Vandenbor s’applique à gommer la mauvaise image que véhicule la confection : « On travaille sur des produits de luxe, dans ce qui s’apparente de plus en plus à des petits ateliers de manufacture ». Plus d’infos www.observatoiremodetextilescuirs.com / pour en savoir plus sur les métiers de la filière mode et les formations ; contacts sur www.pole-mode.fr. La filière mode sera présente au 6e carrefour de l’orientation les 17, 18 et 19 janvier à Cholet. T.B. (1) Basse-Normandie, Bretagne, Pays de la Loire, Centre, Limousin et Poitou-Charentes. La vie des entreprises de l’Ouest sur : ouestfrance-entreprises.fr
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