Dossier - Le Centre Spatial Guyanais
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Dossier - Le Centre Spatial Guyanais
Dossier Observer. Apparemment quantité négligeable comparée aux dimensions de l’Univers, l’Homme reste néanmoins un élément constitutif de ce grand Tout. Depuis la nuit des temps, toutes les civilisations ont levé leur regard vers les astres scintillants, y versant leurs espoirs et y puisant leur compréhension du monde. Sans doute la science la plus ancienne, l’astronomie vient du grec Αστρουμία, qui s ig nifie loi de s a s tre s . S a ns ce tte de rnière , le spatial d’aujourd’hui n’existerait purement et simplement pas. Déclarée Année Mondiale de l’Astronomie, 2009 brillera sous le thème “L’Univers, découvrez ses mystères ”. Alors première étape pour bien démarrer l’année : lisez puis levez les yeux et consultez l'agenda en dernière page ! © 2008 ESA-CNES-ARIANESPACE / Optique Video du CSG - L MIRA Voir loin... Dossier préparé par Karol Barthelemy et José Golitin 14 / LATITUDE 5 / N°83 / JANVIER 2009 L’astronomie désigne la science de l’observation des astres, cherchant à expliquer leurs origines, leurs évolutions, leurs propriétés physiques et chimiques. Si cette science a pris son essor avec les mathématiques, ses origines remontent à plus de 6000 ans d’histoire, bien que l’Univers lui-même ait plus de 13,7 milliards d’années ! Notre compréhension progressive de ce dernier relève des travaux de grands hommes, en commençant par Copernic (voir p. 21), qui comprit que nous évoluions dans un système héliocentrique. De tels grand hommes provoquent l’admiration de nombreux scientifiques, et notamment de l’astronome amateur José Golitin, Spécialiste Télémesure du CNES/CSG, qui s’en réfère au livre “Enfants du Soleil” d’André Brahic : «En l’absence de leurs découvertes basées sur l’observation, la description de nos origines était l’apanage des mythes de la création développés dans toutes les civilisations ». En osmose avec le cosmos Faites l’expérience : par un soir dégagé, levez juste les yeux vers la voûte céleste et observez. Très vite, vous verrez de plus en plus de points lumineux, plus ou moins colorés, plus ou moins distants. Ce que vous ne verrez en revanche plus, c'est passer le temps ! Partant de cette simple démarche personnelle, l’Année Mondiale de l’Astronomie (AMA) veut stimuler l’intérêt du public sous le thème “Univers, yours to discover”, traduit en France par “L’Univers, découvrez ses mystères”. L’AMA 2009 tend à impulser et à augmenter la conscience scientifique, en étendant l’accès à de nouvelles connaissances. L’accent se porte sur les zones et populations en difficulté, en commençant par le développement de l’observation. En effet, quelle meilleure date pour étudier les objets célestes que 2009, le 400ème anniversaire de l’utilisation de la lunette astronomique par Galilée ? © NASA-ESA-STScI/Aura Jetez-vous avec passion dans la spirale de l’astronomie, comme ici l’étonnante galaxie M74. De jeunes étoiles sont enchâssées dans les nuages d’hydrogène tandis que les zones roses traduisent un hydogène ionisé, c’est à dire qui a perdu ses électrons. (image d’Hubble) Le CSG, piste d’envol pour l’Univers Si la conquête spatiale n’a que 50 ans, dix de plus que le CSG, il en a fallu plus de 5000 avant de pouvoir envoyer un satellite dans l’espace… Des Chaldéens et Mésopotamiens aux ingénieurs du spatial d’aujourd’hui, il n’y a donc pas qu’un pas ! Si José Golitin s’extasie devant la magie de l’astronomie, «un mot bizarre, qui crée des déclics dans l’imaginaire », il reste avant tout un ingénieur : « mère de toutes les sciences, l’astronomie se base sur la méthodologie scientifique et donc sur la démonstration, induisant la notion de contraintes opérationnelles. Au cœur de notre activité et de nos outils, j’ai la chance de prendre concrètement conscience de notre Univers. » Effectivement, conditionnée par les lois de Keppler, la télémesure issue d’un lanceur est au cœur du sujet pour calculer les paramètres d’orbite des passagers d’Ariane. José nous fait remarquer que «d’un point de vue fondamental, tout commence pour le passager quand notre mission, celle du lanceur, s’achève. » Et pour cause : soit le lanceur place un satellite sur orbite, soit il envoie une sonde dans l’espace profond, le deep space. La trajectoire du satellite dépend de sa vitesse : couplée à la gravitation terrestre, une vitesse de 8 km/s injectée à un satellite crée un équilibre qui lui permet de rester sur une orbite. Injecté à 11 km/s, le satellite devient une sonde qui s’échappe à l’attraction terrestre et part “tout droit” dans l’espace, attirée par la force gravitationnelle des astres de l’Univers. Missions scientifiques d'observation du Système Solaire et de l'Univers lancées du CSG Nom Vol Date GIOTTO HIPPARCOS ISO CLUSTER XMM-NEWTON SMART-1 ROSETTA HERSCHEL PLANCK LISA PATHFINDER GAIA JWST EXOMARS BEPICOLOMBO SOLAR ORBITER LISA 14 33 80 88 119 162 158 188 188 Vega Soyouz Ariane Ariane Soyouz 02/07/1985 08/08/1989 17/11/1995 04/06/1996 10/12/1999 27/09/2003 02/03/2004 avril 2009 avril 2009 fin 2010 fin 2011 mi 2013 fin 2013 mi 2014 2017 2017 Mission Survol et observation des comètes de Halley et Grigg-Skjellerup Cartographie des étoiles dans le ciel Télescope spatial dans l'infrarouge Etude de l'interaction entre la Terre et le vent solaire (échec lanceur) Télescope spatial dans les rayons X Observation de la Lune et inventaire des éléments chimiques la constituant Observation et analyse d'échantillons de la comète Churyumov Gerasimenko Télescope spatial dans l'infrarouge (successeur de ISO) Cartographie du rayonnement cosmique fossile du ciel Détection des ondes gravitationnelles (étude de faisabilité de LISA) Cartographie des étoiles dans le ciel (successeur de Hipparcos) Télescope spatial dans le visible (successeur de Hubble) Observation et analyse du sol de la planète Mars Observation de la planète Mercure Observation du Soleil et de l'héliosphère Détection des ondes gravitationnelles LATITUDE 5 / N°83 / JANVIER 2009 / 15 © ESA-NASA-Peter ANDERS © JL DAUVERGNE Propager l’astronomie Comme un juste retour des choses, le Centre National d’Etudes Spatiales se fait fort d’assurer une large diffusion de la contribution du spatial à la connaissance de notre Univers. En Guyane, site idéal grâce à sa proximité de l’Equateur, le CNES/CSG accompagne des évènements exceptionnels. Nous aurons même une “Nuit des Etoiles en Guyane” en octobre ! La formation astronomie fut l’occasion pour le CNES/CSG de réaliser différents supports à destination des enseignants mais aussi de tous, disponibles sur la page consacrée à l’AMA 2009 du site Internet www.cnes-csg.fr. Un mini-clip vidéo invite tout un chacun à créer un club d’astronomie car «on peut vivre sans faire d’astronomie, mais ce serait un peu dommage ! ». Par ailleurs, propres à stimuler notre curiosité, six fiches techniques décrivent des expériences simples réalisées lors de la formation. Ainsi, une boule de polystyrène, une feuille de papier, un pic à brochette et une lampe suffiront à illustrer les saisons, la durée du jour et de la nuit, leurs effets sur le climat… En troquant le polystyrène contre un compas et une règle, l’effet d’optique dû au “mouvement rétrograde de Mars” n’aura plus de secret. Encore plus fort : sans aucun autre matériel que trois corps humains mis en scène dans une sorte de jeux de rôle, la différence entre jour solaire et jour sidéral deviendra éclatante ! Enfin, avis aux amateurs qui aimeraient se frotter à l’intensité de l’éclairement, aux cratères de la Lune ou encore à la photographie astrale, tout y est ! A 2,5 millions d’années-lumière et visible à l’oeil nu par un ciel très pur, la galaxie d’Andromède est très semblable à la nôtre. 16 / LATITUDE 5 / N°83 / JANVIER 2009 Dans un environnement turbulent de supernova, la bouillonnante galaxie NGC 1519 est une véritable nurserie d’étoiles, sculptée par de violents vents galactiques. (image d’Hubble) Bannières d’étoiles Une autre preuve de l’intimité entre l’homme et son Univers flotte au vent par tous temps : les drapeaux. Les 50 états américains, la Croix du Sud de l’Australie, la bannière étoilée de l’Union Européenne ou encore l’étonnant drapeau de nos voisins Brésiliens, tapissé de 27 étoiles autour d’un globe. Loin d’être aléatoire, la disposition des astres correspond à la voûte céleste vue à Rio le 15 novembre 1889, soir de l’indépendance du Brésil où le drapeau est né. Les 27 étoiles, représentant chacune un Etat fédéral brésilien, correspondent à huit constellations, dont la très symbolique Croix du Sud ; le 15 novembre 1889 présentait un alignement parfait entre l’axe majeur de la Croix du Sud et le méridien passant à Rio de Janeiro. Big Bang, la théorie qui résiste Alors il fallait bien que l'on s'y frotte un peu à ce fameux Big Bang, pour le plus grand plaisir de José : «Il est indispensable en 2009 de savoir ce que représente le Big Bang. L'expression est née en 1950 au cours d’une interview à la BBC de l’astrophysicien Fred Hoyle pourtant opposé à cette théorie ! Le Big Bang est une “Méga-Explosion” qui a mis en mouvement, jusqu’à ce jour, tous les constituants de l’Univers primordial. Amorcée par Einstein en 1917, développée et confirmée par Georges Lemaitre en 1927, cette théorie est aujourd’hui vérifiée. » Nous ne citerons ici que les travaux d'Edwin Hubble en 1929 sur les galaxies en mouvement de fuite (redshift) qui confirment l’expansion de l’univers, et l'exactitude de la théorie de G. Gamow en 1948 sur la constitution de l’univers : 92% d’hydrogène, 7% d’Hélium, 1% d’éléments lourds. En clair, « c'est la seule réponse qui “ tienne scientifiquement la route ” aujourd'hui. » Remarquable ! Un groupe d'une vingtaine d'astronomes français sont parvenus l'an dernier à réaliser la première simulation numérique de la création de l'Univers. D'après les propos recueillis dans l'excellent hors série de Science & Vie de mars 2008, ce film virtuel de 13,7 milliards d'années est saisissant de réalité. © ESA-NASA-J. Hester & A. Loll © JL DAUVERGNE Selon notre astronome amateur, il reste aujourd'hui deux mystères pour les scientifiques : qu'y avait-il avant le Big Bang et quel sera le mouvement final de l'expansion de notre Univers ? Justement, Herschel & Planck arrivent ! (voir encadré ci-dessous) La comète de Machholz passant devant Les Pléiades Large de 6 années-lumière, la nébuleuse du Crabe résulte de l’explosion d’une supernova, estimée il y a 1000 ans. (image d’Hubble) © ESA-Medialab L’Univers n’a pas fini de nous émerveiller. Dans une quête de connaissance, à la recherche de civilisations extra-terrestres et de planètes pouvant abriter la vie, les missions scientifiques foisonnent et les grands états ne lésinent pas sur les budgets pour l’avenir. Tant de questions restent en suspend ! Par exemple, que diable est donc cette immatérielle Matière Noire dont l’existence n’est plus à contester ??? C’est sûr, si l’Univers est à nos origines, le spatial est plus que jamais un métier d’avenir ! 4 © ESA-JP Carreau Herschel & Planck Au printemps 2009, Ariane 5 ECA mettra sur orbite depuis le CSG deux missions scientifiques de l’ESA, Herschel et Planck. Ces deux télescopes spatiaux, opérés indépendamment l’un de l’autre, devraient rejoindre leur orbite finale autour d’un point virtuel situé à environ 1,5 millions de km de la Terre, le deuxième Lagrangien (L2). Suffisamment éloigné de la Terre et des variations de température induites par les radiations de notre planète, de la Lune et du Soleil, L2 constitue par sa stabilité un point idéal pour l’observation de l’Univers. Équipé d’un miroir de 3,5 m de diamètre, Herschel deviendra le premier observatoire spatial à réaliser de l'imagerie photométrique et de la spectroscopie dans le domaine du spectre lointain infrarouge et submillimétrique. Planck quant à lui contribuera à répondre aux questions fondamentales telles que : Quel a été l’élément déclencheur du “Big Bang” et quand a-t-il eu lieu précisément ? L’expansion observée de l’Univers va-t-elle continuer indéfiniment ou, au contraire, l’Univers collapsera-t-il vers un “Big Crunch” ? [Source ESA] 7,5 m de hauteur, 4 m de diamètre, 3,3 tonnes au lancement Herschel étudie la formation des galaxies et des étoiles, la chimie moléculaire liée aux planètes, les comètes et les atmosphères des satellites. 4,2 m de hauteur et de diamètre, 1,9 tonnes au lancement Planck a été conçu pour mesurer au millième de degré près les fluctuations de température du rayonnement fossile, ou Cosmic Microwave Background (CMB), présent dans tout l’Univers et qui constitue une empreinte directe du “Big Bang ”. CoRoT Satellite du CNES, CoRoT est LE chasseur d’étoiles. Mission : détecter des planètes extra solaires et sonder l’intérieur des étoiles. Atouts : capacité à collecter sur de longues périodes (150 jours) et à analyser les infimes variations de la lumière d’un grand nombre d’étoiles. Les derniers résultats attestent du remarquable potentiel de cet outil. LATITUDE 5 / N°83 / JANVIER 2009 / 17