la belle ouvrage

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la belle ouvrage
N° 95 - août 2012 - 3 €
la belle ouvrage !
Une couturière ! Quoi de plus surprenant
que d’être sollicitée pour réaliser un édito de
la revue l’Ormée, qui ne s’adresse pas aux
ouvrières et ouvriers en atelier mais plutôt à
celles et ceux qui ont fait des études.
Dans mes souvenirs militants, j’avais
entendu dire qu’il avait existé la République
des Ormistes à Bordeaux dont les réunions
se tenaient place Sainte-Eulalie. On a bien
fait taire les voix discordantes par rapport à
l’époque. Qu’en est-il aujourd’hui ? Après des
révoltes, des révolutions, violentes, armées ou
pacifiques et réfléchies, appuyées par les idées
d’émancipation et de liberté, on s’interroge
encore.
Couturière, qu’est-ce aujourd’hui ? Un
art ? Un artisanat ? Peut-être les deux.
Mon métier ? À l’âge de quatorze ans,
j’entre en apprentissage à Camblanes près de
Bordeaux. Bien sûr, pour les filles après le
« certif », c’est soit Commerce, soit Couture
avec l’idée : « Ça peut servir un jour si on se
marie… » Même pour ce métier, il fallait passer un concours ; puis trois ans pour le CAP
et deux ans pour le brevet, pour plus tard
entrer à l’usine. Tout d’abord chez Beauvais,
aujourd’hui disparu, puis Saint-Joseph où bon
nombre d’entre nous n’ont pu oublier la grande
lutte pour le maintien de l’emploi dans l’industrie manufacturière en France.
L’idéologie capitaliste dominante, et la prétendue solidarité de gauche, ont mis en avant
le concept : « À nous les Occidentaux, la haute
technologie : TGV, Airbus, pharmacie, informatique ! Au Tiers monde, la manufacture ! »
L’existence d’un individu, c’est d’être autre
chose qu’un anonyme disparu à Pôle emploi.
Je me souviens encore de mon bulletin de paie
lors de la reprise Saint-Jo en 1982 après plus
de cinq ans de chômage. Depuis, d’autres collègues ont continué la lutte.
Après avoir fait mes preuves dans une
boutique aujourd’hui disparue, j’ai décidé de
m’installer "Couturière", nom ringard s’il en
est ; aujourd’hui, on dit styliste, modéliste.
À l’heure des nouvelles technologies, ce mot
Couture flaire le sous-métier. Défendre la production française était synonyme de nationalisme. Est-ce que l’on a aidé les pays du Tiers
monde à se développer ? Qui a gagné ?
C’est ainsi que l’on a démoli les métiers
dits manuels et ça continue. Ainsi à l’Éducation nationale, la formation Bac pro est réduite
à trois ans.
Le savoir-faire, le tour de main, ce qui
semble magique, n’est pas écrit dans les livres.
L’informatique ne donne pas le « bien-aller »
d’un vêtement. Il faut de la technique et surtout ne pas oublier l’être humain qui n’est pas
qu’un client. Rendre quelqu’un beau quelle
que soit sa conformation (ou son âge ou sa
profession…) c'est enfin respecter l’autre. La
cliente, le client n’est pas qu’un porte-monnaie. L’élégance, le bien-être est un droit. Cela
redonne une fierté.
Qui de la main ? Qui du cerveau ?
Interpréter un dessin, réaliser un vêtement,
est-ce un art ? La même chose pour le théâtre.
Quelle en est la fonction ? S’habiller ou habiller un texte, une danse ?
L’habileté manuelle est conditionnée par
les acquis théoriques et visuels. Lorsque je
regarde quelqu’un entrer dans la boutique, je
vois déjà ce qui se dégage de la personnalité
dans l’instantané, puis je pose des questions.
Ma fonction est d’habiller, de retoucher, de
donner le goût de la beauté.
Le métier manuel, c’est l’apprentissage
tout au long de la vie. Dans une entreprise
où le travail est parcellisé, on apprend avec
les collègues, avec le chef de ligne et surtout
avec le syndicalisme qui élargit le champ du
possible avec l’autre. L’échange devient un fil
conducteur avec les autres métiers, les autres
entreprises où la mise en commun des intelligences aboutit à un produit. C’est la collection
de mode, c’est la construction d’un avion, d’un
train, c’est la réalisation de costumes pour une
pièce de théâtre ou un film.
Un ouvrier, même s’il n’a creusé que
des tranchées, est fier d’avoir participé à la
construction du tramway. Il peut dire « J’y
étais !» Ce sera pareil pour le Pont levant à
Bordeaux. La pièce de théâtre jouée devant le
public, ce sera le même ressenti.
Dans tout ce parcours long et semé de difficultés, j’ai estimé que pour avoir un moral
en équilibre il fallait trois sortes de Couture,
une pour les moyens financiers, une autre pour
montrer le niveau de qualification et une troisième pour le plaisir. Et là j’ai pu rencontrer
les artistes, les comédiens, travailler avec le
metteur en scène, c’est se comprendre avec le
texte, avec la gestuelle, avec le décorateur et
le technicien lumière. J'interpréte un dessin
comme un musicien une partition. Ce grand
ensemble donne une ouverture sur la culture
et la créativité.
La Couture mène à tout, il suffit de projeter
le regard sur d’autres horizons, rendre la fierté
aux humbles en restant soi-même.
Marie-Claude Ruiz
Couturière à Bordeaux
carte blanche
Sciences, raison et culture,
une « nouvelle alliance »
Quelle part la Science devrait-elle avoir,
au XXIème siècle, dans la culture générale ?
C'est à cette question que l'Union Rationaliste
invite ses adhérents et ses amis à réfléchir, à un
moment où les interrogations sur le devenir de
la civilisation se multiplient.
La crise globale que nous vivons affecte
l'ensemble des activités humaines et alimente
les méfiances, voir les rejets à l'égard de la
science et des technologies rendues responsables, pour nombre de nos contemporains, de
la dégradation des conditions d'existence, vécue
et présentée comme une fatalité de l'Histoire.
Il est vrai que les progrès scientifiques et
techniques n’entraînent pas automatiquement
ceux de la société. Les moyens dont nous disposons aujourd'hui s'avèrent d'une puissance
considérable et permettent d'imaginer des possibilités d'action sur l'homme et son environnement peu concevables dans un passé récent.
Et pourtant, paradoxalement, les problèmes
cruciaux, ceux de la faim dans le monde, de la
protection de la nature, de la gestion des ressources naturelles, de la sauvegarde de la biodiversité et les nombreux défis auxquels nous
sommes confrontés aux niveaux local et global
s'aggravent et semblent même sans solution.
Cette situation nourrit la désespérance et favorise la montée des idées les plus rétrogrades, les
obscurantismes et les refuges vers l'irrationnel.
La réflexion proposée par l'Union Rationaliste s'inscrit dans ce contexte. Elle se donne
pour but d'apporter quelque éclaircissement
sur les raisons de cette situation et les moyens
de l'améliorer en s'appuyant sur sa propre histoire. En effet, l'Union Rationaliste a été fondée
en 1930 à l'initiative de personnalités scientifiques, de philosophes, d'écrivains humanistes
conscients de la nécessité de promouvoir la
Raison comme un des moyens privilégiés de
comprendre le monde et de le transformer en
ouvrant des perspectives de progrès et de prospérité pour le plus grand nombre.
Le contexte historique était inquiétant voire
dramatique. La grande crise de 1929 avait
provoqué souffrances et misères en jetant à la
rue des milliers de travailleurs dans les pays
industrialisés. La situation favorisait la montée d'idées conservatrices distillant l'obscurantisme et la haine, annonciatrices des horreurs
« brunes » terrifiantes qui allaient mettre le
monde à feu et à sang à la fin de la décennie. Il
est révélateur que parmi ceux qui ont lutté dès
1930 contre le fascisme, on retrouve bien des
fondateurs de l'Union Rationaliste comme le
physicien éminent Paul Langevin dont l'engagement en faveur d'une culture générale et d'un
enseignement novateur, notamment en matière
scientifique, a profondément marqué les avancées démocratiques de la France libérée. Il
défendait des conceptions révolutionnaires
pour l'époque, d'une présentation de la Science
qui s'inscrivait dans l'histoire d'une véritable
conquête de vérité faite de raison, de doute,
de confrontation et de critique, une démarche,
souhaitait-il, devant être largement connue des
citoyens.
Rappelons à ce propos ce que les responsables actuels de l'Union Rationaliste reprennent et lui doivent :
« Le véritable rationalisme n'a rien de commun avec certains excès de la rationalisation
industrielle ou administrative. Il n'a rien de
commun non plus avec une sécheresse logique
qui rejetterait tout ce que les individus et les
groupes portent en eux de richesses humaines.
Enfin, il ne se confond nullement avec le scientisme d'il y a un siècle qui croyait naïvement
que tous les problèmes humains, théoriques,
pratiques et sociaux, seraient résolus par le seul
progrès de la science...
L'humanité comprend qu'elle s'est lentement
dégagée de l'animalité par un effort technique,
scientifique, politique et culturel qui révèle une
capacité mentale d'adaptation, d'organisation,
d'expérimentation et de critique, qu'on appelle
la raison. La raison n'est pas tout l'homme ;
mais c'est en perfectionnant sa raison que
l'homme devient homme. Le rationalisme est
d'abord la reconnaissance du rôle fondamental
de la raison dans l'aventure humaine...
L'Union rationaliste ne repose sur aucun
dogmatisme doctrinal ou moral. Elle est ouverte à tous les esprits indépendants qui ne
se satisfont pas des idées toutes faites ou des
croyances incontrôlées. Elle lutte pour que
l’État demeure laïque, assume véritablement sa
fonction de protection des jeunes contre toutes
formes d'endoctrinement, et donne à l'école
publique indépendance et prestige. Elle lutte
contre toutes les formes de l'irrationnel, ancien
ou moderne. Elle lutte avant tout pour la liberté
dans le respect de la loi de la République. »
On devine là une volonté tenace de l'UR
d'inscrire la promotion de la Raison dans un
projet véritablement culturel associé à une
vision humaniste de la société, vision héritée
et adaptée des grandes avancées de la pensée
humaine et des idées de liberté (Renaissance,
Lumières, Révolution …).
Citons, pour conforter cette vision « moderne » d'une science vivante et humaine,
quelques extraits du chapitre III du William
Shakespeare de Victor Hugo consacrés à « l'Art
et la science », écrit pendant son exil en 1864.
« Le progrès est le moteur de la science (…)
c'est ce qui explique pourquoi le perfectionnement est propre à la Science (…). Le relatif
est dans la science … et (ce) relatif, qui la gouverne, s'y imprime et cette série d'empreintes
du relatif, de plus en plus ressemblantes au réel,
constitue la certitude mobile de l'Homme (…).
La science cherche le mouvement perpétuel. Elle l'a trouvé ; c'est elle-même (…). La
Science est continuellement mouvante dans
son bienfait. Tout remue en elle, tout change,
tout fait peau neuve, tout nie tout, tout détruit
tout, tout crée tout, tout remplace tout. Ce qu'on
acceptait hier est remis à la meule aujourd'hui.
La colossale machine Science ne se repose jamais ; elle n'est jamais satisfaite ; elle est insatiable du mieux, que l'absolu ignore. (…). Cette
agitation est superbe.
La Science est inquiète autour de l'homme ;
elle a ses raisons. La Science fait des découvertes, l'Art fait des œuvres. La Science est un
acquêt de l'homme, la Science est une échelle,
un savant monte sur l'autre. La poésie est un
coup d'aile... » (NB)
Cette science dont parle le poète n’a plus
que de lointains rapports avec celle que nous
connaissons aujourd’hui, affectée et contrainte,
pour une bonne part, par les logiques de marchandisation, de rentabilité à court terme, loin
des conceptions humanistes dont se réclamaient savants et poètes de l’époque.
Y a-t-il encore place pour une nouvelle
culture de réconciliation de la Science et des
Hommes ? C’est bien une des principaux défis
de notre temps.
Paul BROUZENG
Président de l'URAq
(Union Rationaliste Aquitaine)
NB : nous devons à notre collègue et ami Jean Marc
Lévy Leblond la publication de ces extraits dans
un ouvrage publié par Actes Sud en 1985. On lui
doit également d'avoir œuvré et initié le projet de
« mettre la Science en Culture ».
2 L’Ormée
Billets d'humeur
« Intime Conviction»
Bordeaux, dimanche 03 juin 2012
Le 25 mai 2012, dans l’après-midi je poste sur
Facebook : « Framboise Thimonier ne peut s'empêcher de penser que le milieu artistique tue aussi...
Gabi Farage mort aux champs d'honneur du travail
excessif. Bullshit !!!! »
Je lis et relis cette phrase peu enjôleuse, voire
même pas sympathique du tout. Pourquoi l’ai-je
écrite lorsque j’ai appris le suicide de Gabi Farage ?
Gabi était un grand homme, de ces humains qui
vous marquent et vous impressionnent. Il a laissé
des traces dans bien des villes, quartiers, rues qui
l’ont accueilli.
Plusieurs hypothèses s’enchevêtrent pour tenter
d’accepter, de comprendre un suicide. Les souffrances sont multiples et plusieurs facteurs interviennent dans le passage à l’acte. Pour ma part, je
suis intimement convaincue qu’une des explications
se situe dans la souffrance au travail. Gabi est un
suicidé du travail comme ces salariés de Renault,
France Télécom, La Poste…
Les analyses sur les suicides par pendaison
émettent comme signification que la personne qui
se pend se réfère symboliquement à la potence,
condamnation réservée essentiellement aux esclaves.
Ce geste, ce qu’il révèle à mes yeux, c’est le
symptôme des dysfonctionnements de notre secteur artistique et culturel, de la courses aux projets,
aux rendez-vous, se déplacer sans cesse pour être
présent où il faut, quand il faut, avec la nécessité
de réussir les productions, de boucler les budgets
prioritairement de manière équilibrée, ne pas être à
court d’idée, et puis recommencer un autre projet et
puis encore un autre…
Des métiers que nous choisissons, que nous
aimons, que nous exerçons avec passion ne peuvent
pas revêtir un caractère morbide. A priori.
Le milieu artistique est lui aussi mortifère. Il
tue comme d’autres secteurs professionnels. La disparition violente de Gabi Farage fait résonner cette
conviction intime.
Pourquoi ne changeons-nous pas les modalités
d’exercice de nos métiers, Pourquoi ne parlons-nous
quasiment jamais des suicidés de nos professions,
pourquoi n’admettons-nous pas que notre secteur
génère lui aussi des souffrances qui peuvent devenir inéluctables ?
Son geste soulève en moi ces questions.
Nous devons avoir le courage de les entendre.
Framboise Thimonier
Professionnelle du spectacle vivant, syndicaliste
HUMEUR
Et toi,
tu lis quoi ?
On le sait, le film de Benoît Delepine et Gustave Kervern, Le Grand Soir, a été tourné, pour
l'essentiel, sur le centre commercial Rives d'Arcins, à Bègles. Le compte-rendu du film dans Le
Monde (06.06.2012) parle de celui-ci comme de
lieux « conçus et financés par de grands groupes
privés (qui) sont en réalité assujettis jusque dans le
moindre détail à la logique de la consommation et
de la rentabilité ».
Il serait sans doute malséant de rappeler que
ces lieux ont surtout été voulus, pour sa plus grande
gloire, par un grand humaniste, ardent défenseur de
l' « écologie politique » et contempteur zélé de la
surconsommation, un certain Noël Mamère...
G. L.-S.
Il avait paru, disparu, il revient avec le nom du
temps qui vient : L’Impossible*, vingt ans après la
disparition de l’autre journal. Je voudrais vous donner envie de lire ce mensuel dont chaque page me
fascine. Je déguste, je dévore. Il y a des mots justes,
des mots qui disent la vérité des choses, des mots
qui dérangent, qui font écho à nos bonheurs, à nos
souffrances, à nos espoirs. Il y a des photos plus
vraies que vraies.
Dans chaque numéro, à chaque page je voudrais partager quelques phrases, citer des noms :
Asmaa el-Ghoul, Aléxis Tsípras, Béatrice Leca,
Francis Marmande, Selim Nassib, Gaëlle Obiégly,
Aimé Césaire, Laurence Hubert…
Merci à Michel Butel. Nous étions sur un quai
de gare, orphelins de ces mots qui sont des traces,
qui parlent de ce qui a précédé leur venue. Merci
d’avoir inventé ce journal pas comme les autres.
Madau Lenoble
* L’IMPOSSIBLE, en kiosque, 5€
Directeur Michel Butel
10 rue des Bluets/75011 Paris- www.limpossible.fr
L’Ormée 3
Soutien aux artistes
tunisiens
Chers amis,
Nous pensons que vous avez suivi l’actualité
tunisienne, ces derniers temps. En voici un
bref récapitulatif :
Des agressions physiques à répétition à
l’encontre des artistes et des intellectuels
tunisiens ont été enregistrées dans
différentes régions du pays : mars 2012 :
une manifestation théâtrale réprimée par
des milliers de Salafistes en plein centre
ville de Tunis et des artistes agressés ; des
intellectuels attaqués lors de l’organisation de
conférence publiques ; mai 2012 : tentative de
meurtre et agression physique très grave
sur un professeur de théâtre et artiste, et
les membres d’une association artistique
au Kef… Tout ceci au vu et au su des forces de
l’ordre et sans qu’une position sérieuse ne soit
prise par le gouvernement afin de protéger les
artistes et de poursuivre les agresseurs !
Du 1er au 10 juin dernier, s’est tenue à
Tunis la 10e édition du Printemps des Arts.
Tout s’est parfaitement déroulé jusqu’au
dernier jour où un huissier notaire a pris des
photos de quelques œuvres exposées pour
les exhiber dans une mosquée tenue par
des extrémistes, affirmant qu’elles portaient
atteinte au sacré. Des pages Facebook proislamistes ont alors réalisé un montage de
quelques toiles jugées blasphématoires par
eux (la caricature d’un barbu, une installation
de bustes de femmes lapidées, des fourmis
sortant du sac à dos d’un élève pour former
la phrase « Gloire à Dieu », sachant que la
fourmi est un insecte privilégié dans le Coran)
et ajoutant des photos d’œuvres qui n’avaient
jamais figuré au Printemps des Arts ni même
en Tunisie. A partir de là, c’est l’effet boule de
neige : des fanatiques s’attaquent au Palais
Abdelliya qui a abrité l’événement, détruisant
et brûlant des œuvres d’art ; des appels au
meurtre des artistes sont lancés ; des
biens privés et publics sont incendiés ;
des confrontations ont lieu entre extrémistes
et policiers. On déplore des dizaines de
blessés et même un mort dans les rangs des
fauteurs de troubles
Salafistes… Au lieu
d’apaiser les tensions et de rétablir la vérité
au sujet des œuvres exposées, les membres du
Gouvernement accusent les artistes d’attaquer
les symboles de l’Islam. Nos gouvernants
ne font ainsi qu’entretenir la confusion dans
l’esprit du commun du peuple et participer à
sa scission. Et pour couronner le tout, notre
propre ministre de tutelle, M. Mehdi Mabrouk,
ministre de la culture, a contribué à cette mise
à l’index des créateurs et est allé encore plus
loin en décidant de fermer l’espace Abdelliya
et en portant plainte contre les organisateurs
du Printemps des Arts, jetant ainsi en pâture
les artistes à la vindicte populaire.
Le Syndicats des Artistes Plasticiens a
annoncé dans sa conférence de presse qu’il
portait plainte contre 3 ministres, dont celui
de la Culture.
Nous vous adressons cette lettre, chers
collègues, amis des arts et de la liberté,
afin que vous nous supportiez face à cette
nouvelle Inquisition. Nous vous demandons
de bien vouloir rédiger des communiqués
exprimant votre solidarité aux artistes
tunisiens.
Reçu à l’Ormée
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p. 4
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Dispensé de timbrage
Bordeaux Meriadeck
L’Ormée
15, rue Furtado 33800 Bordeaux
Déposé le : 08 08 2012
Pour avoir un impact fort et efficace, ce
communiqué doit être officiel et signé par un
maximum de syndicats et d’associations des
différents secteurs de l’Art (arts plastiques,
cinéma, danse, théâtre, musique…)
En vous remerciant à l’avance de votre
soutien.
Collectif tunisien pour l’art,
la culture et les libertés
www.lapetition.be/en-ligne/Appel-asoutenir-les-artistes-tunisiens-11611.html
Scénes d'été en Gironde
www.scenesdete.fr
Uzete musical
35e Hestejada de las Arts
8 L’Ormée
La belle ouvrage
Marie-Claude Ruiz
Science, raison et culture,
une "nouvelle alliance"
Paul Brouzeng
Billets d'humeur
Vincent Taconet
Soutien aux artistes tunisiens
Encart
Des responsables, comme l’Imam de la
Zitouna, ou des chefs de groupes Salafistes, Et le Josem à l'Huma
appellent carrément au meurtre de nos artistes. E.Fargeaut et N.Lescombe
Désormais, bon nombre d'artistes reçoivent Icono Photos N_VR
des menaces de mort tous les jours via les
réseaux sociaux, appels téléphoniques et SMS.
REÇU A L’ORMÉE
La manifestivité poïélitique
d’Occitanie océanique / du 18 au 26 août 2012
35e Hestejada de las arts dédiée à Allain Leprest
(poète, chanteur) Jef Gilson (musicien compositeur) et Roger Lafosse (fondateur du festival bordelais légendaire SIGMA).
La manifestivité transartistique poïélitique d’occitanie océanique qui tient sa renommée d’une
pratique consommée d’un art de l’improvisation (composition instantanée mult’immédiate)
« s’archipélisera » sur les communes d’ UZESTE,
MAZÈRES, POMPÉJAC, LIGNAN de BAZAS,
NOAILLAN, CAZALIS.
Pour cette 35 édition, l’archipélisation de l’événement s’imprime du désir de lire et d’interpréter
la partition environnementale locale (sociale historique écologique esthétique) riche de potentiel
poïélitique. La Cie Lubat, œuvrière artistique de
l’événement, sème la danse et invite aux agapes de
nombreuses personnalités des arts et des lettres.
Sommaire
30e Festival international
d'orgue de Bordeaux
12 juin au 16 octobre
Entrée libre
Organisé par MUSICA IN CATHEDRA
musica-in-cathedra.olympe-network.com
Pour nous contacter :
[email protected]
«L’Ormée»
05 56 25 38 46
[email protected]
www.cie-lubat.org
Publication du secteur culturel
de la Fédération de la Gironde du PCF
15, rue Furtado - 33800 Bordeaux - T. 05 56 91 45 06
Directeur de la publication : Michel Dubertrand
Rédacteur en chef : Natalie Victor-Retali
Abonnements : 1 an : 10 euros
de soutien : 20 euros, 50 euros
Tirage : 3 000 exemplaires
Composition et impression :
Les Nouvelles de Bordeaux et du Sud-Ouest
15, rue Furtado - 33800 Bordeaux
Email : [email protected]
CPP AP n° 0713 P 11493
Et le JOSEM à L’HUMA !
La venue du Jeune orchestre symphonique
de l'Entre-deux-Mers, alias le JOSEM, n’est
pas passé inaperçue auprès du public de la
Fête de L’HUMANITE en mai dernier !
À la baguette, le jeune chef Éloi Tembremande fit vibrer sa troupe orchestrale sous le
grand chapiteau d’une fête populaire adepte
de l’éclectisme musical ! La qualité du concert,
qui en étonna plus d’un dans l’assistance, n’en
reste pas moins le fruit d’un long travail et
d’une aventure qui ne date pas d’hier !
De jeune, l’orchestre en garde la composition, les musiciens mais, quand on a près
de 25 ans, il y a là l’expression d’une certaine
maturité et donc d’une réelle expérience de la
scène !
A l’origine, en 1988, le JOSEM est né de
l’engagement d’écoles de musique de l’Entredeux-Mers. Ces écoles étaient coordonnées
par le CRAC ou (centre rural d’action culturelle). Une structure associative qui, dans les
années 1980-1990 (années de la décentralisation mitterrandienne), fut particulièrement
active dans le social, l’économique, le culturel en zone rurale voire périurbaine entre
Garonne et Dordogne ! C’est un professeur
de musique de St-Quentin de Baron, Hervé
Fünfstück, devenu directeur, qui initia cette
formation. Il avait l’objectif de faire jouer
autant que faire se peut des jeunes musiciens
amateurs, dans un orchestre « classique »
parce que leur niveau et leur envie le leur permettaient. Au début, et la formule reste, il fallait dessiner une vraie formation, avec harpes,
alto, violons et instruments à vents coincés
entre le chef et les percussions. Le tout sur
la base d’un répertoire accessible à tous mais
exigeant !
Il est vrai que le terreau était et reste fertile dans la région, que des écoles de musiques
se trouvent dans tous les gros bourgs du territoire (Créon, Camblanes, Artigues, etc). Elles
sont généralement supportées par des municipalités conscientes de leur potentiel culturel et
politique sur ces secteurs « rurbains » en voie
de repeuplement depuis trente ans !
Comme les clubs sportifs, ces écoles ont
répondu à un besoin sociétal pour les jeunes
(et au-delà) et pour leurs familles venues
s’implanter hors la métropole bordelaise.
Le principe du JOSEM a toujours été
le travail autour de projets originaux et de
l’échange avec d’autres formations classiques
internationales ! En vingt ans, le JOSEM s’est
déplacé une quinzaine de fois en Europe tout
en accueillant, à son tour, des chorales, des
orchestres venus de Crète, Belgique, Espagne,
Hongrie, Allemagne ou encore du Brésil !
Cette ouverture s’est aussi faite en direction d’autres styles musicaux avec la collaboration de compositeurs venant du jazz (tel
Francis Mounier qui lui écrit le John C tutti
dance) ou de la scène rock-alternatif-punk
avec Bart Picqueur auteur de La Petite Symphonie Tzigane un peu punk. Ceci en souvenir du festival Musicalarue de Luxey, lieu de
perdition musical estival et landais dont le
JOSEM est devenu un habitué !
L’Artiste, Nicolas Lescombe
Dans cette aventure symphonique il faut
faire une place à part à Nicolas Lescombe,
maître d’œuvre, compositeur et chef du JOSEM qui vient de passer la main après une
expérience qu’il dit avoir été exceptionnelle.
« On m'a proposé de reprendre le JOSEM en
2005, lorsque Hervé a décidé d'arrêter. J'avais
jamais vraiment dirigé, mais je connaissais
bien le JOSEM (j'y avais œuvré douze ans en
tant que clarinettiste puis percussionniste), j'ai
accepté en échange d'une formation. Le JOSEM est un orchestre de jeunes dirigé par les
jeunes eux-mêmes. Il n'y a que 4 parents qui
siègent au Conseil d'administration. Plus qu'un
orchestre, c'est une véritable école de la vie,
où en plus de l'amitié et du bonheur d'accomplir un projet musical ensemble, les notions de
respect, de responsabilité sont très fortes. Le
fait que ce soient les jeunes eux-mêmes qui
décident, donne une énergie folle au projet. Je
blague souvent en disant qu'ils m'ont viré dès
que j'ai eu mon premier cheveu blanc. Mais ce
n’est pas si faux, la magie de cet orchestre c'est
sa jeunesse.
En 2005, il restait 25 musiciens... J'ai demandé alors à Musicalarue de bien vouloir
nous accueillir à nouveau. La sauce a pris et
chaque année 5 à 6 jeunes musiciens nous ont
rejoints. En 2006, nous avons participé aux
Eurochestries en Sibérie. Ça a été un moment
fort pour l'orchestre tout comme la rencontre
Supplément au N° 95 - août 2012
avec La Rue Ketanou. Un trio de chanson
française qui nous a fait confiance pour les
accompagner aux Francofolies de La Rochelle
à l'été 2009... J'ai continué de prendre des
cours de direction et d’arrangement avec Bart
Picqueur en Belgique. Ce compositeur, chef
d'orchestre m'a donné la force de diriger cette
boule de feu.
En dirigeant le JOSEM, j'ai vécu des
moments musicaux invraisemblables, j'ai
beaucoup ri, beaucoup pleuré. Je n'avais pas
le permis de conduire et on m'a laissé rouler
au volant d'une Ferrari pendant six ans. Quel
rêve !!! On ne m'en a même pas voulu lorsque
je frottais les rails de sécurité !
Alors oui, lorsque j'ai vu ce premier cheveu blanc, j'ai compris qu'il fallait que je laisse
la place pour que le rêve continue pour les
jeunes ».
D’autres projets en dehors de ton groupe
Sans additif ?
« En acceptant le fait que le JOSEM améliore le quotidien des adolescents qui le vivent,
j'ai réfléchi à comment apporter ce plaisir
à un maximum de jeunes Créonnais. C'est
comme ça que j'ai créé la « classe orchestre »
(qui a vu le jour en 2010 au collège de Créon,
ndlr). L'idée est de calquer ce modèle éducatif sur des classes de collège, afin d'aider
ces jeunes à mieux vivre leur adolescence, à
prendre du plaisir à jouer et à travailler ensemble. J'espère que d'ici trois ou quatre ans il
y aura des petits JOSEM au collège ».
Et la Fête L’HUMANITE, quel sens lui
donnes-tu ?
« Lorsque je suis arrivé à la fête de l'Huma
ce fameux dimanche, je me suis souvenu de
mon père me réveillant à 6 h du mat lorsque
j'avais 9 ans, je me suis souvenu de cette
vieille camionnette partant de Moulon. On
allait monter le stand de la cellule de Branne.
J'adorais cette ambiance. J'ai très souvent
participé à la fête de l'Huma. Cette fête est
conviviale, généreuse et agréable. Lorsque le
JOSEM a commencé à jouer, ça m'a mis les
frissons, il était tellement évident que le JOSEM avait sa place sous ce chapiteau teinté
d'humanité ».
Emmanuel Fargeaut & Nico Lescombe