L`Afrique maritime s`éveille à coups de milliards

Transcription

L`Afrique maritime s`éveille à coups de milliards
Revue internationale des affaires
et partenariats Nord-Sud
Transfert monétaire
La révolution
Immeubles de luxe
Marché lucratif
en Afrique
51
janvier - mars 2016
Afrique du Sud
Une culture qui sait
se vendre
L’Afrique maritime
s’éveille à coups
de milliards
Forum Africa 2015
À guichets fermés !
Canada / 4,49$
Zone CFA / 1500F
France / 3,50 €
États-Unis / $3.95
Autre Pays / $4 US
Sommaire
5
51
janvier - mars 2016
L’éditorial de Gerba Malam
Dossier
6-7
8-9
10-11
Révolution maritime en Afrique
Transport maritime Guerre portuaire pour un joyau
Complexes industrialo-portuaires Changer
le visage de l’Afrique
Dossier spécial
6
14-15
16-17
18-19
20-21
22-23
Forum Africa 2015 À guichets fermés !
Un menu diversifié qui séduit
Pays vedette Le Sénégal «open for business»
B2B Nombre record de rencontres personnalisées
Le Forum en images
Marchés africains
Des opportunités d’affaires
à
portée !
votre
24-25
26-27
28-29
30-31
32
24
Firme-conseil spécialisée en communication et
création de partenariats entre les entreprises
nord-américaines et africaines
L’immobilier de luxe a la cote en Afrique
Angola Le pari de la diversification économique
Algérie Des milliards à investir à l’étranger
Culture L’Afrique du Sud se vend et s’exporte
Le Maroc, champion de la lutte anti-terroriste
Perspectives
34-35
36-37
38-39
Ressources Les entreprises extractives à l’heure de la RSE
Comment conjurer la malédiction des ressources naturelles ?
RSE Les minières canadiennes à l‘œuvre en Afrique
Marchés nord-américains
40-41
42-43
La méthode « Google », un modèle pour tous
Réfugiés Le Canada prend le train de l’Allemagne
Mondialisation
44-45
Conseils stratégiques • Communication
• Organisation d’événements
entreprise.afriqueexpansion.com
4629, rue Louis-B.-Mayer, suite 201, Laval (Québec) CANADA, H7P 6G5
Téléphone : +1 (450) 902-0527
Fax : +1 (514) 393-9024
46
Fintech Ces startups qui révolutionnent
les transferts d’argent
Rendez-vous d’affaires
34
AFRIQUE EXPANSION • 51
3
Éditorial
Gerba Malam
OMC et agriculture
L’Afrique jouera-t-elle
enfin à armes égales ?
Au sortir de la 10e Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) le 19 décembre
dernier à Nairobi, au Kenya, on a tout entendu : autre
échec et impasse sur le cycle de Doha bloqué depuis
14 longues années, mais résultats « historiques » pour
l’Afrique et le monde. Alors, victoire ou défaite ? Comme
souvent, tout est question de point de vue et d’horizon.
Après la
suppression
des subventions
agricoles, les
pays africains
doivent maintenant livrer
la bataille
d’accès aux
marchés des
pays développés hautement
protégés par
les normes
techniques,
sanitaires et
phytosanitaires.
Depuis 2001 et la Conférence de Doha au Qatar, l’OMC
vise une profonde réforme du commerce international.
Elle cherche en fait une réduction significative des barrières commerciales, la révision des règles régissant
le commerce mondial, le tout devant comprendre des
bénéfices particuliers pour les pays en développement.
Intérêts divergents de ses 162 membres obligent, l’Organisation fait du surplace depuis une décennie et demie,
aucun progrès n’ayant été enregistré à la veille même de
cette Conférence de Nairobi qui devait être celle de la
dernière chance. Et alors qu’on parle d’un énième échec
dans une longue lignée, les mots « victoire », « nouvelle
ère » et « résultats historiques » se côtoient quand il est
question du domaine agricole.
« Il est temps que les États-Unis et l’Europe réduisent
les subventions à l’agriculture. À l’heure actuelle, ces
subventions sont plus élevées que la totalité de ce que
reçoivent les pays d’Afrique en aide au développement.
Ces subsides font baisser les prix et ferment effectivement la porte aux producteurs des pays en développement. »
Cette affirmation, qui pourrait avoir été prononcée en
décembre dernier à Nairobi, l’a plutôt été à Davos, en
2002, par le premier ministre canadien Jean Chrétien. Un
an plus tard, à la même tribune, le dirigeant canadien,
dont le pays était l’un des rares du G7 à avoir aboli ses
subventions agricoles, présentaient des chiffres ahurissants, voire révoltants. Alors que 50 milliards de dollars
étaient versés en aide publique au développement, 350
autres milliards allaient aux subventions américaines et
européennes sur les produits agricoles exportés (source :
Médias France Intercontinents).
Ces subventions, qui créent un déséquilibre sur le
marché international, frappent durement une multitude
de produits agricoles africains, du blé au maïs, de la
volaille au bœuf, sans oublier la farine, le coton ou le
sucre. Concrètement, pourquoi une mère de famille
africaine paierait-elle 2000 FCFA au marchand local pour
un poulet, quand elle en obtient un congelé et apprêté
pour la moitié du prix ? Le choix est vite fait, et à terme,
c’est toute la production locale qui finit par disparaître,
car elle ne peut rivaliser avec les prix scandaleusement
bas des produits importés.
Cette situation pénalise doublement l’Afrique : son
agriculture ne se développe pas comme elle devrait,
privant l’État de ressources et de moyens importants,
pendant que le continent importe massivement des produits pour lesquels il devrait être autosuffisant.
On comprend mieux maintenant pourquoi le directeur
général de l’OMC Roberto Azevêdo a déclaré, au terme
de la conférence de Nairobi annonçant la fin des subventions agricoles, que c’est le « résultat le plus important
obtenu en ce qui concerne l’agriculture » au cours des
20 années d’existence de l’Organisation. Le patron de
l’OMC faisait en particulier référence à une disposition
du « paquet de Nairobi » : l’engagement des membres développés à supprimer immédiatement les subventions à
l’exportation, sauf sur un petit nombre de produits agricoles, une échéance fixée à 2018 pour les pays en développement.
Demande de longue date de l’Afrique et d’autres pays
en développement, la suppression des subventions
agricoles est incontestablement une victoire après des
décennies de plaidoyers sans suite. Les produits agricoles africains vont enfin redevenir compétitifs. Mais
cela suffira-t-il? Car l’autre grande question qui demeure
est: comment avoir accès aux marchés des pays développés hautement protégés par les normes techniques,
sanitaires et phytosanitaires ? À cet égard, la bataille
commerciale qui a opposé le Canada aux États-Unis est
édifiante.
En 2008, malgré l’absence de barrières tarifaires avec
les États-Unis, le Canada avait vu ses exportations de
viandes porcines et bovines frappées d’un nouveau
dispositif d’étiquetage exigeant l’inscription du pays
d’origine des produits. Résultat, ses exportations de
porcs de boucherie avaient chuté de 58 %, alors que
celles de bovins à viande ont encaissé un recul de 49 %.
Le Canada avait saisi l’OMC de la cause et remporté la
bataille juridique en 2012, mais de multiples appels américains ont fait traîner les choses de nombreuses années
avant que les États-Unis n’annoncent que récemment
leur volonté de se plier au jugement. Les éleveurs canadiens, dont 40 % de la production étaient exportés chez
leurs voisins du Sud, n’en ont pas moins perdu des centaines de millions de dollars. Les Américains ont à la base
respecté leurs engagements, mais ont joué sur les barrières non tarifaires pour protéger leur marché intérieur.
La bataille qu’a dû mener le Canada, un pays développé
du G7, pour faire reconnaître ses droits, risque bien de
se propager à d’autres domaines agricoles. S’il semble
acquis qu’une puissance commerciale comme les ÉtatsUnis accepte l’abolition des subventions agricoles, rien
ne garantit qu’elle ne trouvera pas d’autres moyens pour
garder un avantage concurrentiel à l’échelle mondiale.
L’OMC et ses membres ont fait un pas important en
matière d’agriculture à l’occasion de cette 10e Conférence ministérielle de Nairobi. Mais la véritable portée de
ce pas ne se mesurera qu’à la lumière des résultats effectifs qu’il engendrera. Et si le passé est garant de l’avenir,
de nombreux désaccords et litiges légaux sont à prévoir
malgré toute la bonne volonté affichée et exprimée.
AFRIQUE EXPANSION • 51
5
Dossier
Jean-Nicolas Saucier
Révolution
maritime en
Afrique.
6
AFRIQUE EXPANSION • 51
Si historiquement les ports
d’Alexandrie, du Cap ou de
Dakar ont représenté des
plaques tournantes de
l’économie africaine, l’avenir
se construit désormais ailleurs.
Tanger Med, Lamu, Badagry,
Nqura, Kribi et autres Doraleh
sont autant de nouvelles places
maritimes où des milliards sont
injectés pour moderniser le
transport maritime sur
le continent.
Les experts estiment que
plus de 50 milliards de dollars
d’investissements sont déjà
prévus un peu partout sur
le continent, chaque endroit
ambitionnant de devenir un
incontournable hub maritime
et économique dans la
sous-région où il se trouve.
Portrait de ces nouvelles
portes d’entrée sur l’Afrique
qu’on connaît moins, mais qui
deviendront vite des plaques
tournantes du commerce
continental.
AFRIQUE EXPANSION • 51
7
Dossier
Jean-Nicolas Saucier
Transport maritime
Guerre portuaire pour
un joyau économique.
Toujours selon la BAD, alors que 92 % des
importations et exportations en provenance
ou à destination de l’Afrique se font par voie
maritime (environ 66 % pour l’Europe), la
situation frôle l’urgence, peut-on lire dans
un rapport. «Le volume de marchandises
transitant par les ports africains doit passer
«Sur une période de 30 ans,
la part des exportations
mondiales de l’Afrique sub
saharienne a fondu des
deux tiers. »
De Tanger au Cap, de Dar es-Salaam à Lagos, du nord au sud et d’est en ouest, l’Afrique
redessine sa carte maritime à grands coups de milliards. Alliant nécessaire rattrapage
et modernisation digne de la réalité économique du XXIe siècle, le continent est engagé
depuis quelques années dans un effort sans précédent pour se doter d’infrastructures
à la fine pointe technologique qui lui permettront de doper son commerce extérieur
et accompagner son formidable essor économique. Une guerre portuaire qui fera
des gagnants et des laissés-pour-compte.
Et cette volonté se chiffre et se quantifie.
Sur une période de 10 ans, entre 2007 et
2017, c’est plus de 50 milliards de dollars
qui auront été investis pour mettre l’Afrique
maritime à niveau, l’équiper de terminaux
modernes et automatisés, lui donner les
moyens de prendre toute la place qui lui
revient dans le transport maritime international. Car jusqu’ici, le portrait est plutôt
sombre et dire que l’Afrique occupe une
8
AFRIQUE EXPANSION • 51
place infime, pour ne pas dire négligeable
sur la carte maritime mondiale, est une triste
vérité. Quelques chiffres forts révélateurs
pour étayer ce propos.
Dif férentes études internationales
révèlent que l’Afrique, malgré son poids
grandissant dans l’économie planétaire,
ne pèse qu’un maigre 5-6 % du commerce
maritime mondial et 2-3 % du trafic conteneurisé international. Selon la Banque
africaine de développement (BAD), entre
1976 et 2006, sur une période de 30 ans, la
part des exportations mondiales de l’Afrique
subsaharienne a fondu des deux tiers. Aux
dires de l’organisation panafricaine, «si
cette part était restée constante pendant
cette période, cette région enregistrerait aujourd’hui des recettes d’exportation presque
10 fois supérieures à leurs valeurs actuelles».
de 265 millions de tonnes en 2009 à plus de
2 milliards de tonnes à l’horizon 2040. Or, la
mauvaise qualité des infrastructures coûte
chaque année deux points de croissance au
continent, soit environ 40 milliards $ et entraîne une perte de productivité des entreprises africaines de l’ordre de 40 %.»
Opportunités et actions
Les besoins sont donc énormes, réels,
connus et surtout coûteux. Alors que les
pouvoirs publics africains, sauf quelques
rares exceptions, ne disposent généralement pas des fonds nécessaires pour lancer
ces chantiers monstres de modernisation
des infrastructures, il n’est pas surprenant
de voir de grandes multinationales offrir
le financement colossal que commande ce
rattrapage maritime qui doit s’opérer en un
temps record.
Des entreprises comme Bolloré, Maersk,
Bouygues, Eximbank of China et autres
Dubaï Port World n’hésitent pas à allonger
des centaines de millions, quand ce n’est
pas des milliards, pour mettre à niveau les
places fortes maritimes de l’Afrique, alléchées qu’elles sont par la croissance annuelle moyenne de 7 % affichée depuis une
quinzaine d’années par les transports maritimes africains en tous genres. Et ce ne sont
pas les projets qui manquent, les nouveaux
chantiers se multipliant à un rythme effréné
depuis quelques années.
Eximbank of China investira 850 millions
de dollars dans la modernisation du port
autonome d’Abidjan qui doit être complétée en 2019. Transnet a signé des ententes
d’une valeur de 900 millions de dollars pour
bonifier les quais du port de Durban, le
plus achalandé du continent, et ajouter des
installations neuves et modernes à Nqura.
DP World a pris pour modèle son propre
port de Dubaï pour ajouter le terminal de
Doraleh au port de Djibouti pour quelque
300 millions de dollars. APM Terminals s’est
associé à Bolloré Africa Logistics pour investir un milliard de dollars dans l’extension
du port de Tema au Ghana afin de porter sa
capacité de traitement à 3,5 millions de
conteneurs par année. Et c’est sans compter
les 4 à 5 milliards investis par le gouvernement égyptien pour doubler en un temps
record de 12 mois la capacité du canal de
Suez entré en service l’été dernier.
Partout donc en Afrique, on s’active pour
doter les grands ports du continent d’installations qui répondent aux standards des
temps modernes. À Dakar, Lomé, Mombasa,
Cotonou, San Pedro, Luanda, Pointe-Noire
ou Alexandrie, les investissements pleuvent
et chaque autorité concernée lance son projet de développement pour conserver son
statut de hub dans la sous-région qu’elle
alimente grâce à ses infrastructures maritimes. Car si le transport sur mer représente
un joyau économique pour chaque pays
ayant un accès maritime, le marché dit de
l’hinterland n’en est pas moins un enjeu tout
aussi important.
Allez au-delà du port
Si les marchandises qui débarquaient dans
les ports africains ne voyaient généralement
que la côte du continent avant de repartir
vers d’autres coins du monde, l’essor économique et la montée en puissance de la classe
moyenne africaine ont profondément changé
la donne. Aujourd’hui, la mobilité des biens
et la facilité de transport sont ce qui dicte
le succès commercial des infrastructures
maritimes. Expert des ports africains ayant
fait carrière chez l’armateur danois Maersk,
le Français Emmanuel de Tailly confiait en
entrevue à lexpress.fr que les enjeux sont
désormais multiples.
«Pour les armateurs, il ne s’agit plus
seulement de contrôler le fret, mais de
maîtriser les flux. L’enjeu, c’est le corridor,
routier ou ferré, qui relie le port au client.
L’avenir appartient à celui qui propose une
offre intégrée. En clair, l’acheminement de
la marchandise débarquée à Limbé (Cameroun), Abidjan ou Lomé jusqu’au fin fond de
l’Afrique de l’Est», expliquait de Tailly.
Et toujours selon lui, pour obtenir du
succès dans pareil domaine, quelques critères bien précis dicteront la dominance
continentale dans les années et décennies à
venir. «D’abord, à l’heure des mastodontes
des mers, le tirant d’eau. Ensuite, la superficie disponible pour charger, décharger et
entreposer d’énormes volumes. Puis l’ampleur du marché régional que le pays-relais
est susceptible d’arroser. Enfin, la stabilité
politique.»
Le transport maritime en Afrique en est
donc à un tournant historique de son histoire.
Si la pluie de dollars permettra une modernisation optimale et des équipements de dernière génération, une panoplie d’autres facteurs, notamment l’importance du marché
intérieur et les infrastructures de transport
ou énergétiques, devront être considérés par
les autorités publiques pour maximiser les
retombées de ce joyau économique encore
sous-exploité. Et c’est dans la réponse que
fourniront conjointement secteur privé et
public que se mesurera le succès futur de
l’Afrique en la matière.
AFRIQUE EXPANSION • 51
9
Dossier
Jean-Nicolas Saucier
Complexes industrialo-portuaires
Changer le visage écon omique de l’Afrique.
L’Afrique change, se
dynamise, se modernise.
Ce qui est une réalité tangible
dans une panoplie de secteurs l’est tout autant dans
le domaine maritime. Si l’histoire commerciale du continent a retenu, pour diverses
raisons, les ports d’Alexandrie, Alger, Fez, Dakar ou
Le Cap, le futur économique
maritime de l’Afrique se
dessine et s’érige ailleurs.
Autrefois considérés comme
de banals quais de pêche
et points de villégiature,
la marche économique
accélérée du continent les
transformera en complexes
industrialo-portuaires
appelés à jouer un rôle
crucial dans l’essor et le
développement africain.
Alors que les places fortes de l’Afrique
maritime investissent dans leur modernisation et mise à niveau, les choses bougent
d’une autre façon ailleurs sur le continent.
Armateurs, compagnies de shipping ou de
logistiques, importateurs et exportateurs
internationaux, multinationales minières
ou pétrolières et autres grandes banques
commerciales choisissent aujourd’hui
d’allonger elles-mêmes les milliards de dollars nécessaires pour la construction de ce
qu’on nomme aujourd’hui de gigantesques
«complexes industrialo-portuaires».
Tour d’horizon de ces nouveaux ports
appelés à transformer le visage
économique de l’Afrique.
Nqura, Afrique du Sud
Tanger Med, Maroc
On le décrit comme la plus récente perle africaine en matière portière. Imaginé au
tournant des années 2000 par le roi Mohammed VI, le port de Tanger Med est entré en
activité en 2007 et s’est rapidement imposé comme LA destination incontournable sur
la Méditerranée. Alors qu’il vient de ravir en 2015 la première place africaine à Durban
avec 3,5 millions de conteneurs EVP (équivalent vingt pieds) par année, l’entrée en
fonction récente de Tanger Med 2 augmentera sa capacité à 5 millions de conteneurs,
puis à 8 millions une fois la seconde phase de ce dernier complétée. Connecté à plus
de 120 ports dans 50 pays, son coût total dépasse les 2 milliards de dollars.
Bagamoyo, Tanzanie
La Tanzanie a lancé l’an dernier la construction de ce qu’elle
entrevoit comme le plus grand port d’Afrique de l’Est dans la
station touristique côtière de Bagamoyo. Au coût de 11 milliards
de dollars et financé en grande partie par un cabinet d’investissement chinois appartenant au gouvernement central, le port doit
pouvoir traiter 20 millions de conteneurs annuellement à l’horizon
2020. Situé à 75 kilomètres de la métropole Dar es-Salaam, il doit
positionner le pays de manière enviable et incontournable dans les
affaires et le commerce régional. Sa livraison est prévue pour 2017.
Kribi, Cameroun
Lamu, Kenya
Lekki et Badagry, Nigeria
Devenu l’an dernier la première économie d’Afrique, le Nigeria est appelé à devoir traiter
10 millions de conteneurs EVP à l’horizon 2025, contre 2 millions aujourd’hui, principalement autour de Lagos. Deux méga projets ont donc été lancés, les ports de Lekki et de
Badagry, qui s’érigeront à environ 100 kilomètres de la mégapole et coûteront plusieurs
milliards de dollars. Leur livraison n’est pas attendue avant 2018 alors que les plans
initiaux prévoyaient 2016.
10
AFRIQUE EXPANSION • 51
Inauguré en 2012 après 10 ans de travaux et plus d’un milliard
de dollars d’investissement, le port en eau profonde de Nqura est
le dernier joyau sud-africain en matière de transport maritime.
Sa capacité originelle de 1,2 million de conteneurs traités annuellement est passée à 2,8 millions avec l’ajout d’un quatrième
terminal. Il profite d’une situation géographique enviable à 20
kilomètres de Port Elizabeth et à mi-chemin entre Durban et Cape
Town, un emplacement qui lui assure un avenir occupé et très
rentable.
Ne voulant pas être en reste, le Kenya voisin a son propre projet
pharaonique prévu à Lamu et dont le coût pourrait atteindre 30
milliards de dollars en intégrant l’ensemble des composantes
prévues. Fer de lance du projet LAPSSET (Lamu Port Southern
Sudan-Ethiopia Transport), un corridor qui doit révolutionner le
transport de marchandises et de pétrole dans la région, le futur
port doit compter 32 terminaux. Le vaste projet englobe de nombreuses autres infrastructures, incluant des routes, des lignes
ferroviaires, des aéroports et des raffineries de pétrole, un oléoduc
et des câbles de fibre optique. Après de multiples retards, les autorités kenyanes prévoient l’entrée en service du port pour 2019.
Le port en eau profonde de Kribi et son complexe industriel
doivent booster l’économie camerounaise et desservir les pays
enclavés de la sous-région comme la Centrafrique et le Tchad.
Dans son ensemble, il comprend une première composante
portuaire qui comprendra une vingtaine de terminaux à l’horizon
2040, une seconde composante industrielle qui s’étendra sur
20 000 hectares et une troisième composante urbaine. Le méga
projet est évalué à environ 15 milliards de dollars. Les deux
premiers terminaux sont entrés en fonction l’an dernier et permettent d’accueillir des mastodontes marins de 70 000 tonnes.
AFRIQUE EXPANSION • 51
11
L'information économique sur
l'Afrique et l’Amérique du Nord,
c’est notre affaire!
Afrique Expansion Magazine se veut un outil d’information
de référence pour ceux qui s’intéressent au développement
des partenariats entre l’Amérique du Nord et l’Afrique.
Oui, je m’abonne à
Nom ____ ______ ______ _____________ _____________________ Prénom ____ ______ ______ _____________ ____________________
Entreprise ___________________________________________ Adresse ____________________________________________________
Code postal ____ __________ ___ Ville ____ _______________ _______ ______ _________ Pays _____ ____________ ________ _______
Téléphone (
)____ __________ _______ __ Fax (
Durée de l’abonnement
Tarifs 1 an (4 numéros) :
Canada 19,95 $ CAN
États-Unis 39,95 $ US
International 59,95 $ US
Édition numérique 9,95 $ CAN
1 an
)____ ____________ ______ __ Courriel _____ _______ __________________ __
Durée de l’abonnement
Tarifs 2 ans (8 numéros) Canada 29,95 $ CAN
États-Unis 59,95 $ US
International 99,95 $ US
Édition numérique 14,95 $ CAN
Paiement par carte de crédit et Paypal sur www.afriqueexpansion.com
2 ans
Afrique Expansion
Magazine
4629, rue Louis-B-Mayer
suite 201, Laval (Quebec)
Canada H7P 6G5
Tél. : + 1 (450) 902-0527
Fax : + 1 (514) 393-9024
[email protected]
www.afriqueexpansion.com
Dossier
spécial
Jean-Nicolas Saucier
Forum
Afric
a
20 15
À guichets
fermés !
Véritable pont économique
entre l’Amérique et le continent
africain, le Forum Africa 2015
a rempli ses promesses et
dépassé les attentes.
Pour cette 7e édition tenue au Centre Sheraton
de Montréal du 16 au 18 septembre derniers,
l’événement affichait complet avec plus de
500 acteurs ayant à cœur le développement
économique de l’Afrique et la célébration
de son formidable potentiel.
Politiciens de haut niveau des deux côtés
de l’Atlantique, dirigeants de grandes multinationales,
entrepreneurs à l’affut d’opportunités et panélistes
chevronnés venus présenter une « nouvelle » Afrique
aux investisseurs ; un gratin économique intéressé
et intéressant. Pays vedette de ce forum biannuel,
le Sénégal s’y est présenté avec une imposante délégation
qui a su en quelques jours faire miroiter les perspectives
propres à une des économies les plus florissantes
de l’Afrique de l’Ouest.
Retour sur un des événements économiques
touchant l’Afrique qui compte désormais parmi
les plus importants en Amérique.
14
AFRIQUE EXPANSION • 51
AFRIQUE EXPANSION • 51
15
Dossier
spécial
Vitraulle Mboungou
Forum Africa 2015 Un menu diversifié qui séduit !
les secteurs économiques et sociaux. La
Pour sa 7e édition, le Forum Africa a, une fois de plus, offert un menu éclectique en matière
de sujets débattus durant des différentes discussions et panels présentés lors de ce grand
rendez-vous économique organisé par Afrique Expansion. Placé sous le thème des « Investissements et opportunités d’affaires en Afrique », il a ainsi accueilli, du 16 au 18 septembre
derniers, plus de 500 personnes venues discuter de « la transformation industrielle du continent », de « l’accès à l’énergie en Afrique » ou encore de « la compétitivité des entreprises
africaines ». Retour sur les principaux thèmes et panels du Forum Africa 2015 !
Si l’on en croit les impressions recueillies
au sortir de la 7e édition du Forum Africa,
le programme proposé cette année a su
combler les attentes des quelque 500 participants présents durant les trois jours
qu’a duré l’événement. Et pour cause, le
comité organisateur a pris soin de sélectionner les principaux sujets qui intéressent les
hommes d’affaires et investisseurs des deux
côtés de l’Atlantique. Ainsi, le Forum Africa
2015 a débuté avec une table ronde sous le
thème de « La transformation industrielle
du continent » où les acteurs en présence,
dont l’économiste sénégalais Abdoulaye
LY et Hazem Fahmy, dirigeant de l’Agence
égyptienne de partenariats pour le développement, ont essentiellement échangé sur
la croissance africaine. Une croissance en
perpétuelle progression, signe d’une économie en pleine mutation qui a définitivement
amorcé son virage industriel avec toutes les
promesses offertes par le continent africain.
Différentes approches
Pour M. LY, à l›heure où les prix des matières
premières ne cessent de chuter, ne pas les
transformer équivaut à exporter des emplois
16
AFRIQUE EXPANSION • 51
à l’étranger, ce qui est un véritable « crime »
quand on connaît les besoins en la matière
de l’Afrique. Ce n’est pas tant les pays qui
regorgent de ces précieuses ressources qui
sauront le mieux tirer leur épingle du jeu,
mais plutôt ceux qui trouveront le moyen de
profiter du contexte en ajoutant les emplois
à valeur ajoutée qui vont avec, a insisté l’économiste avant de poursuivre : « La Chine a
lancé un plan appelé Going Global qui vise
à créer 85 millions d’emplois en Afrique
en 10 ans. Et pour attirer ces emplois, une
mutation doit être opérée et c’est ce que
le Sénégal s’emploie à faire. » Ainsi, avec
les immenses gisements découverts dans
les États voisins, le pays de la Teranga entend profiter des besoins en fournitures de
biens et services pour propulser sa propre
économie.
De son côté, l’Égypte a choisi de promouvoir son savoir-faire dans divers domaines,
tout en misant sur une stratégie agressive
visant à faire valoir son énorme marché et les
possibilités qui l’accompagnent. Quatre ans
après le Printemps arabe, le pays souhaite
effectuer un spectaculaire retour sur la scène
africaine. « Au-delà du support que nous
souhaitons offrir à nos frères africains, nous
voulons aussi créer et proposer, et c’est ce
que le forum économique annuel que nous
planifions entend faire. Il s’agira du premier
événement économique du genre complètement africain, par des Africains et pour les
Africains. Nous toucherons les domaines de
l’énergie, des infrastructures, du développement industriel, de la santé et des services »,
a expliqué M. Fahmy.
Autres grands thèmes de cette 7e édition du Forum Africa, l’accès à l’énergie et
« Comment faire des affaires en Afrique »,
deux sujets de prédilection des forums économiques consacrés au continent africain.
Concernant l’accès à l’énergie, les panélistes étaient tous d’avis qu’il constitue la
clé pour le développement du continent
du fait d’énormes potentiels et possibilités
qui se chiffrent en centaines de milliards de
dollars. Et pour cause, l’énergie touche tous
les domaines. « L’énergie améliore la qualité de vie en permettant l’implantation de
projets porteurs de développement et prospérité, et c’est vrai dans absolument tous
clé est de savoir maximiser les retombées
grâce aux partenariats, avec des approches
participatives qui tiennent compte des
populations locales. Car il y a une synergie
directe entre le développement économique
et l’énergie, personne ne peut le nier », a
affirmé Hamidou Mamadou Abdou, associé
et vice-président international chez CIMA+,
une entreprise québécoise multidisciplinaire
œuvrant dans les domaines de l’ingénierie et
des nouvelles technologies.
Mais cela ne serait se faire sans la collaboration des gouvernements africains, a souligné Ugo Landry, directeur des opérations
chez Windiga Énergie, entreprise canadienne
agissant comme producteur indépendant
d’énergie dans les énergies renouvelables.
« Tout est question de volonté politique,
de lois et de textes d’application, de lois
fiscales, tous des éléments qui sont entre
les mains des dirigeants gouvernementaux.
Une entreprise comme Windiga a besoin de
garanties gouvernementales pour assumer
les risques financiers, et ça peut prendre du
temps. Mais quand la volonté et les efforts
en ce sens y sont, le financement suit sans
problème », a-t-il insisté. En effet, depuis la fin de la colonisation en
Afrique, plusieurs modèles ont été essayés
en matière d’énergie, allant du monopole
public au libre marché complètement privé.
Aucun n’a toutefois réussi à régler durablement le problème. Aujourd’hui, nombreux
sont ceux qui mettent tous leurs espoirs sur
l’initiative Power Africa du président américain Barack Obama, qui prévoit 60 millions
de connexions et 30 000 MW de puissance
additionnelle avec 32 milliards $ en investissements divers. Dirigeant de Power Africa pour l’Afrique de l’Ouest, le Québécois
André Larocque est venu expliquer comment ce projet pourrait changer la donne
sur le continent africain. « Power Africa veut
agir à titre de point focal pour galvaniser la
collaboration des gouvernements, utilités
publiques, investisseurs privés et institu-
tions financières autour de la concrétisation
la plus rapide et la plus efficace possible des
transactions visant l’implantation de projets
de production, transport ou distribution
d’électricité. »
« L’Afrique est le nouveau marché de
l’énergie, très prometteur et attrayant pour
les entreprises spécialisées du domaine », a
ajouté Abel Didier Tella, directeur-général
de l’Association des sociétés d’électricité
d’Afrique. Invité très attendu de ce panel,
le ministre sénégalais de l’Énergie et du
Développement des énergies renouvelables,
Thierno Alassane Sall, est venu présenter le
plan de son gouvernement dans ce domaine.
« Je pense que l’énergie générée va amener
avec elle emplois et revenus, comme ce fut
le cas pour les télécommunications », a-t-il
souligné.
Business et… business !
« Faire des affaires en Afri que », voilà un autre
thème incontournable dans ce type d’événement ! En effet, si faire des affaires sur le
continent est devenu chose courante pour les
grandes multinationales occidentales, c’est
encore un défi pour les petites et moyennes
entreprises qui sont parfois hésitantes
et remplies de doutes. Des doutes qu’un
panel d’experts a tenté de dissiper lors du
Forum Africa 2015. Ainsi, pour Jean-Baptiste
Satchivi, président de la Chambre de commerce du Bénin et dirigeant du Regroupement des chambres de commerce de
l’UEMOA, il faut que les gouvernements
parviennent à créer un environnement
favorable à l’éclosion des affaires, à la prospérité. « L’entrepreneur prend le risque et
affirme sa détermination, mais les autorités
doivent pouvoir lui fournir les conditions
nécessaires à son succès », a ainsi conclu le
dirigeant de CDPA-Agrisatch, groupe leader
dans l’aviculture et le négoce alimentaire qui
a su gagner d’importantes parts de marché
dans toute la sous-région.
Par ailleurs, l’Afrique est l’une des régions
les plus dynamiques économiquement
avec une croissance soutenue qui dépasse
les 5 % depuis plus d’une décennie, faisant
du continent un endroit attrayant pour les
investissements, a rappelé Mountaga SY,
directeur-général de l’Agence d’investissement du Sénégal (APIX) avant d’ajouter :
« La stabilité politique est la clé, une clé qui
prémunit contre la corruption potentielle.
Et une fois cela conforté, l’État peut et doit
jouer sur différents terrains afin de rendre
l’environnement attrayant. Les taxes et l’allégement des procédures administratives
sont, par exemple, des éléments importants
sur lesquels il a une emprise totale. Reste
ensuite à investir dans le capital humain pour
s’assurer d’une main d’œuvre qualifiée en
quantité suffisante. »
S’il est vrai que l’Afrique peut encore
faire mieux pour améliorer la compétitivité
de son climat des affaires, il n’en demeure
pas moins qu’elle a fait d’énormes progrès
depuis une dizaine d’années. Ce qui permet
le débat aujourd’hui sur la compétitivité des
entreprises africaines et des moyens qui
devraient être mis en œuvre pour la renforcer davantage. À ce propos, Pierre NDiaye,
directeur général de la Planification et des
politiques économiques du gouvernement
sénégalais, a expliqué qu’il en va de la
responsabilité de l’État qui doit garantir la
bonne gouvernance, la sécurité et la paix,
mais surtout des améliorations du cadre
réglementaire et législatifs ou l’allègement
des procédures bureaucratiques. Pour
Nathalie Chinje, directrice de l’agence
UpBeat Marketing en Afrique du Sud, il
est primordial que soit valorisé en Afrique
« un leadership de qualité, une mise en valeur des innovations et le développement
accru des compétences » afin d‘endiguer
le phénomène de fuite des cerveaux. Mais
surtout, selon elle, les pays africains doivent
permettre aux femmes de prendre plus de
responsabilités et occuper plus d’espace
dans le développement économique.
AFRIQUE EXPANSION • 51
17
Dossier
spécial
Vitraulle Mboungou
Forum Africa 2015
Pays vedette, le Sé négal
« open for business ».
de 3-4 %. Aziz Tall, ministre chargé du Suivi du Plan Sénégal Émergent a détaillé les
mesures prises pour s’assurer que le pays,
2e économie de l’Union Économique Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), retrouve
son niveau de 2012, lorsqu’il avait été classé
comme l’un des 17 pays ayant le plus amélioré leur climat des affaires en Afrique. Son
économie était alors l’une des plus compétitives de la sous-région grâce, entre autres,
à la volonté du pouvoir en place de faire du
Sénégal l’un des 10 pays les plus attractifs en
Afrique subsaharienne d’ici 2035.
Infrastructures,
énergie et mines
« Nous
sommes
venus ici à
la rencontre
d’investisseurs canadiens avec
l’intention de
leur présenter
tout ce que le
Sénégal a à
offrir comme
possibilités
économiques
et commerciales. Nous
avons senti un
vif intérêt et
sommes très
optimistes
pour la suite
des choses. »
18
Pays vedette du Forum Africa 2015, le Sénégal a été au cœur de toutes
les discussions et panels présentés lors de ce grand rendez-vous économique
organisé par Afrique Expansion. L’occasion pour le pays des Lions de la
Teranga de présenter toutes les opportunités d’affaires qu’il a à offrir
aux entreprises québécoises et canadiennes.
Comme c’est le cas depuis 2007, le Forum Africa a choisi
un pays vedette autour duquel s’organise un ensemble
de discussions, rencontres et démarchages pour promouvoir son potentiel économique et ses attraits.
Le Sénégal « joue un rôle de premier plan sur le continent et constitue un exemple de démocratie et de
stabilité politique en Afrique de l’Ouest », a fait valoir
Amina Gerba, présidente-directrice générale d’Afrique
Expansion.
Le pays s’est doté en 2014 d’un programme stratégique
appelé Plan Sénégal Émergent (PSE) qui vise la mise en
place d’un ensemble de projets structurants à fort contenu de valeur ajoutée pour lui permettre, comme beaucoup
d’autres pays africains, d’atteindre l’émergence à l’horizon 2035. Le Sénégal a ainsi dépêché une impressionnante délégation conduite par Amadou BA, ministre de
l’Économie, des Finances et du Plan du Sénégal, accom-
AFRIQUE EXPANSION • 51
pagné de plusieurs ministres et dirigeants de sociétés
d’État pour présenter ce vaste plan aux hommes d’affaires canadiens et québécois.
« Nous sommes venus ici à la rencontre d’investisseurs canadiens avec l’intention de leur présenter tout
ce que le Sénégal a à offrir comme possibilités économiques et commerciales. Nous avons senti un vif intérêt
et sommes très optimistes pour la suite des choses »,
a expliqué Khoudia Mbaye, ministre sénégalaise de la
Promotion des investissements, des Partenariats et du
Développement des télé-services de l’État lors de la
conférence de presse clôturant le forum.
Le pays de la Teranga a de ce fait profité de l’événement pour présenter son ambitieux PSE. Ministres et
autres directeurs stratégiques sénégalais ont ainsi énoncé les grandes lignes de cette stratégie qui vise à booster
la croissance sénégalaise qui tourne actuellement autour
Le Sénégal, à l’image de beaucoup d’autres
pays africains, fait face au problème du
manque d’infrastructures. Les pertes en
productivité occasionnées par ce déficit
se chiffrent à environ 40 % sur l’ensemble
du continent, qui s’est pourtant positionné
comme la deuxième zone de croissance
mondiale ces dix dernières années. Les
besoins de l’Afrique en infrastructures sont
ainsi estimés à 93 milliards de dollars par
an, mais à l’heure actuelle, elle ne parvient à
mobiliser qu’environ 45 milliards de dollars
annuellement. Rien de surprenant donc à ce
qu’un des principaux axes du PSE soit les
infrastructures, notamment routières avec
27 projets majeurs déjà en cours. Le secteur
des transports sera ainsi modernisé avec
l’amélioration de la mobilité urbaine dans
le Grand Dakar. Cela va se traduire, entre
autres, par la construction de nouvelles
routes, autoroutes et des centaines de kilomètres de chemin de fer, ainsi que la mise
en circulation de 300 minibus qui viendront
s’ajouter aux 1300 déjà en service, en plus
d’un train express entre le centre-ville de
Dakar et l’aéroport international Blaise
Diagne au coût de 800 millions de dollars.
Par ailleurs, toujours dans le souci de
développer les infrastructures, les autorités
sénégalaises se concentrent également sur
l’énergie en diversifiant ses sources, ce qui
permettra au pays de multiplier par quatre sa
production d’électricité. Géothermie, solaire
et éoliennes, hydroélectricité, les chantiers
sont nombreux, comme le soulignait au
Forum Africa Thierno Alassane Sall, ministre
de l’Énergie et du Développement des énergies renouvelables du Sénégal. « C’est un
plan ambitieux, tant en volume qu’en qualité.
Il y a bien sûr les hydrocarbures comme le
pétrole et le gaz, mais également les énergies renouvelables comme l’hydroélectricité, le solaire et l’éolien. Le Plan Sénégal
Émergent accentue grandement les besoins
d’énergie et nous souhaitons voir des investisseurs possédant l’expertise nécessaire
s’intéresser à ces nombreuses possibilités. » Le Sénégal, pays avec un riche potentiel
minier qui souhaite se poser comme véritable
hub régional en Afrique, mise également
beaucoup sur les entreprises extractives. Il
a ainsi signé un contrat de 700 millions de
dollars pour l’exploitation de l’or avec la
société québécoise Teranga. Par ailleurs, le
sous-sol sénégalais renfermerait des milliers
de tonnes de fer et de métaux lourds. Enfin,
ce PSE, qui se veut à la fois économique et
social, comprend de nombreux autres axes
comme l’innovation, la technologie et la
recherche, ainsi que le tourisme ou l’éducation avec la formation des jeunes.
Quelle place pour le Canada ?
« Le Canada possède des atouts intéressants que nous recherchons. Son expertise
est reconnue de classe mondiale dans de
nombreux secteurs clés comme les mines,
l’industrie extractive, l’énergie ou l’agriculture. Des secteurs sur lesquels le Sénégal
souhaite s’appuyer pour booster sa croissance et améliorer les conditions de vie de ses
citoyens. Et en ce sens, le Canada est appelé
à devenir et être un partenaire de choix, s’il
le veut vraiment », a signalé Mountaga SY,
Directeur-général de l’APIX. Rappelons que
le Canada est un partenaire de longue date
du Sénégal. Les deux pays ont d’importantes
relations bilatérales qui touchent un large
éventail d’activités et qui ne cessent de se
développer.
Selon des chiffres officiels, en 2011,
leurs échanges commerciaux totalisaient
29 millions de dollars, dont 28 millions en
exportations vers le Sénégal et 1 million en
importations. Tandis qu’en 2014, ils s’établissaient à 44,5 millions de dollars, dont
presque 41,5 millions d’exportations et 3
millions d’importations en provenance du
Sénégal. Plus d’une centaine d’institutions
et d’acteurs canadiens, incluant une soixantaine d’entreprises, étaient ainsi présents
sur le marché sénégalais en 2014. Le Plan
d’action du Canada sur les marchés mondiaux de 2013 a d’ailleurs désigné le pays
de la Teranga comme étant « un marché
émergent offrant des débouchés particuliers
pour les entreprises canadiennes ».
En 2012, l’ancien premier ministre canadien Stephen Harper a annoncé lors d’une
visite officielle à Dakar, la conclusion des
négociations en vue d’un accord sur la promotion et la protection des investissements
étrangers (APIE) entre les deux pays. Un
accord signé en novembre 2014 en marge
du Sommet de la Francophonie dans la
capitale sénégalaise. Une fois mis en œuvre,
cet accord doit faciliter le flux bilatéral des
investissements en contribuant, entre autres,
à la création d’emplois et à la croissance
économique. Selon le ministre sénégalais
de l’Économie et des Finances, Amadou BA,
le Canada a accordé en 2014, dans le cadre
du programme de coopération entre les deux
pays, 108 milliards de FCFA au Sénégal pour
la mise en œuvre du Plan Sénégal Émergent.
AFRIQUE EXPANSION • 51
19
Dossier
spécial
Nom du
Evachroniqueur
Medi
Forum Africa 2015 | B2B
Nombre record de
personnalisées.
L’année 2015 a été une année
record pour le Forum Africa
à Montréal. Plus de 500
personnes, venant de 20 pays
et représentant près d’une
centaine d’entreprises y ont
participé. Pour combler les
attentes grandissantes d’année
en année, Afrique Expansion
organise des rendez-vous B2B,
un volet incontournable
du Forum Africa.
C’est une occasion unique pour les entreprises, les institutions et
les gouvernements de rencontrer des partenaires de premier plan
ayant des intérêts communs. Cette année, le Forum Africa a battu
tous ses records de B2B alors que près de 350 rencontres ont été
organisées durant les trois jours qu’a duré l’événement. Le but était
de faire le plus de «matchmaking» possible entre les entreprises
canadiennes et africaines.
20
AFRIQUE EXPANSION • 51
rencontres
Certains domaines économiques étaient plus
en demande que d’autres. Notamment les
secteurs du bois, des mines, de la construction et de l’énergie, qui ont connu le plus
de succès côté canadien. Primeur de cette
édition 2015, la possibilité de s’inscrire pendant une journée au lieu des trois jours que
dure l’évènement. Cette nouveauté a suscité encore plus d’intérêt auprès des entreprises canadiennes, qui ont répondu présent
en grand nombre, surtout la journée du 17
septembre, dédiée à l’énergie et au développement des affaires en Afrique.
Côté africain, plusieurs entreprises cherchaient du financement et de l’expertise
canadienne dans leurs domaines respectifs. D’autres souhaitaient plutôt identifier
des partenaires d’affaires dans le domaine
de l’immobilier. Le but étant de trouver un
moyen d’exporter du Canada de l’immobilier
et quelques articles à bon prix.
Malheureusement, force est de constater qu’il y avait un manque considérable
d’entreprises dans le domaine touristique.
Quelques entreprises canadiennes auraient
d’ailleurs souhaité connaître les débouchés
de ce secteur dans plusieurs pays africains.
D’après un sondage mené auprès de plusieurs participants, 80 % des compagnies
ayant répondu, ont apprécié l’organisation
du Forum et des B2B, mais déplorent le
retard répété des entreprises africaines à
leur rendez-vous.
Ce même sondage nous a également
permis de préciser qu’il est encore tôt pour
confirmer la signature de partenariat entre
des entreprises africaines et canadiennes.
D’après un participant, «le partenariat est
comme une demande en mariage. Il faut
s’y préparer longtemps et prendre le temps
d’apprivoiser la relation». Signer une entente entre deux compagnies peut donc
prendre un certain temps afin de bien ficeler
l’alliance, parfois même quelques années.
AFRIQUE EXPANSION • 51
21
Dossier
spécial
Le Forum Africa 2015 a vu la participation
de personnalités diverses. Voici, en images,
quelques clichés et moments forts
de l’événement.
10
1
2
11
4
12
3
5
13
8
14
6
7
9
15
1 Inauguration de l’Espace Sénégal par le ministre sénégalais de l’Économie, Amadou BA (au centre)
2 M. Philippe Couillard, Premier ministre du Québec
3 M. Amr Kamel, Directeur des opérations bancaires, Afreximbank
4 Une rencontre B2B
5 M. Alain Carrier, Directeur à Export Québec et M. Jean Kacou Diagou, Président du Patronat ivoirien
6 Le musicien camerounais Manu Dibango, Honoré pour sa carrière
7 M. Jean-Philippe Prosper, VP., SFI (Banque Mondiale)
8 Aldéa Landry, ex vice-première ministre, Nouveau-Brunswick; Sheila Copps, vice-première ministre fédéral
9 L’architecte ivoirien Goudiaby Atépa et l’ex PM du Québec, Jean Charest
16
10 Mme. Mélanie Joly (PLC) M. Jean-Louis Roy, Président d’honneur du Forum Africa et Mme Hélène Laverdière (NPD)
11 Dr Mima S. Nedelcovych, President&CEO, IGD
12 M. Gerba Malam, Directeur de la Publication Afrique Expansion Magazine et Mme Sheila Copps
13 Mme Amina Gerba, Présidente du Forum Africa
14 M. Philippe Couillard, PM du Québec sur le podium
15 S.E.M. Ousmane Paye, Ambassadeur du Sénégal au Canada, Mme Khoudia Mbaye, Ministre de la Promotion des Investissements, des Partenariats
AFRIQUE EXPANSION • 51
et du Développement des téléservices de l’État, M. Philippe Couillard, PM du Québec et M. Jean-Louis Roy, Président d’Honneur du Forum Africa
16 Mme Leila Mokaddem, Représentante résident de la BAD en Egypte
17 M. Patrice Malacort, Directeur Ventes et Marketing Canada de Brussels Airlines, M. Hamidou Mamadou Abdou,
22
17
VP chez CIMA International et Karen A. Directrice des ventes d’Air Canada
AFRIQUE EXPANSION • 51
23
Marchés
Africains
Vitraulle Mboungou
L’immobilier de
luxe a la cote
en Afrique !
Une étude publiée début septembre par Lamudi, un portail
immobilier allemand, nous apprend que 12 pays africains
figurent dans le Top 20 des marchés où l’immobilier de luxe
est le plus abordable. Cette étude cherche à pointer les
endroits les plus propices à l’investissement dans ce secteur
et l’Afrique prend le haut du pavé en demeurant un des
endroits les plus rentables.
Le nombre de millionnaires ne cesse d’augmenter en Afrique.
De quoi favoriser un marché bien spécifique, celui de l’immobilier
de luxe. Et malgré son nom, qui laisse présager des prix exorbitants, le luxe est plutôt abordable dans la plupart des pays africains.
C’est du moins ce que nous apprend une étude du portail immobilier allemand Lamudi. Ce dernier a fait un classement réalisé sur
la base des prix moyens par mètre-carré (m²) issus de plusieurs
milliers d’annonces immobilières publiées sur le portail et portant
sur les 32 pays émergents où il est présent. Publié en septembre
dernier, ce classement révèle que 12 pays africains figurent dans le
Top 20 des marchés émergents sur la propriété de luxe à l’échelle
planétaire. Ainsi, une propriété immobilière de luxe coûte en
moyenne 396,58 euros m² en Éthiopie, pays en tête du classement.
La Côte d’Ivoire, pays en plein redécollage économique après une
crise politico-militaire, se positionne quant à elle à la deuxième place
avec un prix moyen de 427,65 euros/m2 tandis que la Tanzanie revendique la troisième place (486,03 euros le m²).
Avec un prix moyen de 850,54 euros/m2, le Kenya arrive en
6 e position, alors que le Nigeria le talonne (856,29 euros/m2). La
Tunisie (885,52 euros/m2) occupe la 9e position, juste devant le Ghana
(1035,75 euros/m2) où la découverte de pétrole s’est accompagnée
d’une augmentation de l’investissement immobilier pour répondre
à la demande prévue de travailleurs expatriés. Le Maroc (1144,25
euros/ m2) pointe au 12e rang devant l’Île Maurice (1484,49 euros/m2).
Enfin, l’Ouganda (1597,22 euros/m2) arrive en 15e position, devant
l’Algérie (1766,53 v euros/m2), alors que l’Angola (3965,52 euros/m2)
ferme ce Top 20. En août 2015 déjà, l’enquête annuelle du cabinet
Mercer sur le «Coût de la Vie» a classé Luanda, la capitale angolaise, comme la ville la plus chère dans le monde pour les travailleurs
expatriés pour la troisième année consécutive, dépassant ainsi des
villes comme Londres, New York ou Singapour.
Kian Moini, co-fondateur et directeur général de Lamudi, explique :
«Lorsqu’il est question de propriétés de luxe, les marchés émergents
de Luanda, Dubaï et Doha sont des concurrents très sérieux pour
New York et Londres. Dans les marchés émergents à travers l’Asie,
24
AFRIQUE EXPANSION • 51
l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Amérique-Latine, il y a maintenant une
abondance d’offres de propriétés immobilières de luxe ouvrant le
marché de l’immobilier haut de gamme à la tranche à faible revenu.»
Et pour cause ! Ces dernières années, les programmes immobiliers
haut de gamme n’ont cessé de fleurir sur le continent africain.
Ainsi, en République démocratique du Congo, des investisseurs
privés se sont lancés il y a cinq ans dans la construction d’un quartier luxueux, sur les deux îles du fleuve Congo, près de Kinshasa.
La Cité du fleuve, projet censé faire naître le quartier nec plus ultra
de la capitale congolaise, claironne de belles promesses. Pour ses
promoteurs, il doit faire sortir de la terre un quartier ultramoderne
dans une zone marécageuse. Son emplacement est dit idéal car il
est situé entre une route menant à l’aéroport international de Ndjili,
le principal aéroport de la capitale congolaise, et le quartier à la fois
administratif, des affaires et résidentiel de La Gombe. Ce chantier
dont le coût était au départ estimé à plus d’un milliard de dollars,
n’est qu’à 10 % de sa réalisation aujourd’hui. Dans sa phase finale, la
Cité du fleuve comprendrait plus de 200 villas et 10 000 appartements
haut de gamme, 10 000 bureaux, un port de plaisance, des parcs
d’attractions, des cinémas, des restaurants, des salles de conférences et autres aménagements recherchés dans pareil endroit. Elle
sera reliée au reste de Kinshasa par deux ponts et des transports
Abdoulaye
Wade
Macky Sallelle
en commun. Autosuffisante en fourniture
d’eau
etet
d’électricité,
ambitionne également de devenir un lieu touristique et une villégiature de week-end.
Pays
1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9. 10. 11. 12. 13. 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. Prix du
mètre carré
(US $)
Éthiopie
Côte d’Ivoire
Tanzanie
Mexique
Colombie
Kenya
Nigeria
Indonésie
Tunisie
Ghana
Philippines
Morocco
Île Maurice
Pérou
Ouganda
Algérie
Sri Lanka
Qatar
Émirats arabes unis
Angola
447.87
482.96
548.89
763.03
854.87
960.54
967.03
983.34
1000.04
1169.70
1218.34
1292.24
1676.48
1709.04
1803.79
1994.79
2013.04
3985.35
4109.77
4478.38
Nombreux projets « luxueux »
Parmi les projets ambitieux qui voient le jour sur le continent, notamment en Afrique de l’Ouest et Centrale, celui de Waterfront, à Dakar
au Sénégal, retient l’attention. Ce projet luxueux de 31 000 m2 situé
sur la corniche ouest de la ville, pour plus de 623 millions de F CFA,
soit un peu plus d’un million de dollars, propose 150 résidences haut
de gamme avec terrasse ou jardin, vue sur la mer, piscine et jacuzzi,
à 1,4 million de F CFA (2300 $US) le m2, soit
50 % plus cher que les quartiers chics de
la capitale sénégalaise. De son côté, la
Côte d’ivoire n’a rien à envier au pays de la
Teranga, avec son projet de ville américaine
imaginé par la diaspora ivoirienne basée de
l’autre côté de l’Atlantique. Il s’agit de la Cité
World Partner’s (45 à 50 millions de F CFA,
soit un peu plus de 80 000 dollars le lot).
Située en banlieue d’Abidjan, elle fait suite
aux 150 résidences de la Riviera Beverly, dont
le prix d’un logement avoisine les 100 millions de F CFA (165 000 $US). La Riviera Palm
Beach, au bord de la lagune Ébrié, offrira de
son côté des lots évalués à environ 80 millions de F CFA (131 000 $US) contre 10 à 20
millions (16 500 à 32 000$US) dans certains
quartiers de la capitale ivoirienne.
Par ailleurs, toujours en Côte d’ivoire, le
groupe Yedcor International a annoncé en
juillet dernier qu’il allait construire un grand
complexe immobilier à vocation résidentielle, commerciale et touristique à Abidjan
sur une superficie de 10 hectares. Baptisé
Yedcor Valley Center et situé à Cocody, un
quartier de la capitale ivoirienne, il accueillera un centre commercial de 350 000 m2,
dont 76 000 m2 de surface commerciale avec
quatre supermarchés, 200 boutiques, deux
hôtels de 7 étoiles et 5 étoiles, 300 appartements de luxe et penthouses aux normes
internationales. Ajoutez à cela 50 000 m2
de bureaux, un aquarium géant, six salles
de cinéma, un musée des civilisations, une
fontaine dansante, des restaurants et une
salle de spectacles de 5000 places qui sont
également prévus. Les travaux de construction devraient démarrer en mars 2016 pour
s’achever en 2018.
Cependant, cet immense projet laisse
dubitatifs plusieurs connaisseurs et experts
du secteur immobilier en Afrique. D’abord
en raison de l’ampleur du projet. Le
Morocco Mall de Casablanca, l’un des plus
grands centres commerciaux africains, est
quatre fois plus petit. Mais plus que tout,
c’est la personnalité même de son promoteur, Desnos Toussaint Yed, qui intrigue.
Son associé Broll Group, filiale sud-africaine du groupe immobilier américain
CBRE Group et leader de la commercialisation d’espaces immobiliers en Afrique,
a confirmé à Jeune Afrique par l’intermédiaire de son président Afrique, l’existence
de contacts, tout en précisant que «rien
n’est définitif pour l’instant». De même, ses
références et ses réalisations, jusqu’aux
mystérieux centres commerciaux qu’il
aurait construits en Afrique du Sud, restent
plus que floues selon l’hebdomadaire
panafricain.
Enfin, au Maroc, la Compagnie générale
immobilière (CGI) a annoncé le lancement
de The Park-Anfa Condominium, une résidence urbaine de luxe à Casablanca, dont
la livraison des unités est prévue pour le
dernier trimestre 2016. Ce projet immobilier dont l’investissement initial s’élève
à 600 millions de dirhams (environ 74
millions de dollars) et qui occupera une
surface de 1,5 hectares, selon un communiqué du promoteur, comprend trois résidences privées composées d’immeubles
«disposés sous forme de remparts autour
d’un jardin central privatif», constitué d’appartements de 2 à 6 pièces aux superficies
(hors terrasses et jardins) variant entre 60 et
280 m2. Les futurs propriétaires «pourront
profiter de véritables terrasses végétalisées,
de jardins suspendus plantés, ainsi que de la
proximité d’un parc de 50 hectares», signale
le communiqué.
En résumé, l’Afrique semble prête à faire
face au nombre de plus en plus croissant
de millionnaires africains en anticipant,
entre autres, leurs besoins afin de mieux
y répondre. Cela d’autant plus que selon
une étude de New World Wealth publiée
en juillet dernier, depuis 2000, le nombre
de personnes avec des avoirs financiers
équivalant au moins à un million de dollars
a augmenté de 145 % sur le continent africain.
Un nombre qui pourrait encore croître de
45 % durant la prochaine décennie.
AFRIQUE EXPANSION • 51
25
Marchés
Africains
Marc Omboui / A. Naye
Angola
La difficile équation de la
diversification économ ique.
Eldorado et crise
L’Angola
affiche un
taux de
croissance
12 %
de
de son PIB,
l’un des plus
élevés du
monde.
26
Longtemps dépendant du pétrole, le pays d’Eduardo Dos Santos doit
se résoudre à diversifier son économie afin de faire face à la crise économique
due à la baisse des cours de l’or noir. En a-t-il les moyens ? Pourra-t-il tirer
son épingle du jeu là où d’autres pays ont rencontré d’énormes difficultés ?
La longue guerre civile qui a secoué l’Angola de 1975
à 2002 n’a finalement pas réussi à ébranler ce pays
lusophone au sein duquel plusieurs analystes prédisaient déjà le chaos. Il a en effet suffi que cessent les
hostilités pour que le pays commence à engranger de
sérieux points sur le plan économique. Au point de devenir en très peu de temps la 5e puissance économique
d’Afrique derrière le Nigeria, l’Afrique du Sud, l’Égypte
et l’Algérie. L’Angola affiche un taux de croissance de
12 % de son PIB, l’un des plus élevés du monde. Une
performance tributaire de l’exploitation pétrolière.
En effet, l’Angola est la deuxième puissance pétrolière
d’Afrique après le Nigeria. Le pays, dont la production
pétrolière s’est élevée à 1,7 million de barils/jour en 2014,
AFRIQUE EXPANSION • 51
avait atteint des pics de deux millions de barils/jour en
2007. L’industrie du pétrole, d’après les chiffres publiés
par la Banque mondiale, représente environ 46 % du
produit intérieur brut du pays et 96 % de ses exportations.
De même, 72 % des recettes de l’État angolais proviennent de la manne pétrolière. D’après les spécialistes,
l’essentiel des exportations de l’Angola est constitué des
produits pétroliers. Des produits qui ont pour destinations privilégiées les États-Unis et la Chine. En retour,
ces pays exportent vers l’Angola des biens et services,
notamment des produits chimiques, des avions et des
équipements divers.
Même si les ressources pétrolières sont
inégalement réparties, le pays respire.
Visiblement, l’Angola séduit et attire. De
nombreux étrangers aussi bien africains,
européens qu’asiatiques y accourent. Du
Portugal, l’ancienne puissance coloniale,
malmenés par la crise économique qui sévit dans leur pays, des milliers de jeunes
affluent, à la recherche d’un bien-être. Le
pays connaît un taux d’urbanisme poussé. Des gratte-ciels sont visibles partout et
symbolisent le dynamisme et la bonne santé
économique du pays. Sur le plan urbain, les
villes angolaises n’ont rien à envier aux villes
occidentales. Afin de désengorger Luanda la
capitale, une nouvelle ville, Kilamba Kiaxi,
voit le jour.
Mais l’effondrement des cours du pétrole
observé depuis deux ans semble durement
toucher l’économie angolaise. Sans oublier
la réduction temporaire de la production
pétrolière du fait des arrêts pour maintenance non programmés des gisements
pétroliers. D’après les spécialistes, la croissance du produit intérieur brut de l’Angola
devrait ralentir pour descendre à 4 % en
2016. La presse internationale observe que
la chute vertigineuse des cours du pétrole
entraîne de graves difficultés financières
en Angola. L’hebdomadaire portugais Expresso est quant à lui plus sentencieux. En
titrant « Tsunami économique en Angola »,
le journal estime que la baisse du prix du
pétrole ne peut que provoquer une crise économique dans ce pays.
Pour Yves Vincent Mballa Atangana, enseignant camerounais de sciences économiques et de gestion, cette situation ne devrait surprendre personne. Car, soutient-il,
lorsqu’on a une économie axée essentiellement sur les ressources naturelles qui sont
par essence épuisables, il faut s’attendre à
connaître ces difficultés. Il ne faut pas mettre
ses œufs dans un seul panier », affirme-t-il. Et
l’économiste d’ajouter : « lorsqu’on décide de
développer un seul secteur, on se met dans
une situation de dépendance vis-à-vis des
partenaires ».
Le pays paye ainsi le prix de sa dépendance à l’or noir et de son manque de prévisibilité. Les analystes soutiennent que
pendant les années de croissance à deux
chiffres, l’Angola n’a pas su investir dans
l’industrie. Le pays est réduit à importer tous
ses biens de consommation. L’on peut également ajouter un environnement peu propice
aux affaires, la faiblesse de la gouvernance
qui se manifeste par les sérieuses difficultés qu’éprouvent les pouvoirs publics à gérer
rationnellement les ressources générées par
le pétrole. De sérieux handicaps qui rendent
difficile une éventuelle sortie de crise.
État et diversification
Pour faire face à cette situation, les autorités
angolaises ont décidé de prendre des mesures qui visent essentiellement la réduction du train de vie de l’État. À cet effet, le
président Eduardo Dos Santos a demandé
au gouvernement d’interrompre temporairement les remboursements de la dette
extérieure et de revoir en urgence le budget de l’État à la baisse pour 2015 de près de
17 %. Dans le même temps, le transfert des
capitaux vers l’étranger et l’importation de
marchandises ont été gelés jusqu’à nouvel
ordre. Cette mesure concerne surtout les
biens de consommation produits, notamment
les produits agroalimentaires. Mais le déficit
sera difficile à combler étant donné que le
pays ne produit que 60 % de ses ressources
alimentaires. Le gouvernement compte aussi augmenter les impôts et suspendre les
recrutements dans la Fonction publique, tout
comme il s’apprête à licencier dans le secteur
des hydrocarbures.
Mais les experts pensent que ces mesures, bien que salutaires, ne peuvent pas
suffire à stabiliser le pays. Il faudrait donc
inventer d’autres solutions. Notamment la
diversification de l’économie pour sortir
définitivement de la dépendance pétrolière.
« Il est nécessaire d’accentuer les investissements dans d’autres secteurs, et je pense
pour ma part prioritairement à l’agriculture qui est un point de départ pour toute
économie solide », suggère Yves Vincent
Mballa Atangana. L’universitaire soutient
que les pays dits développés ont d’abord bâti
leur économie autour d’un produit phare.
Pour répondre à l’exigence de la diversification économique, l’Angola a mis de côté 80
milliards de dollars. Le défi à relever étant de
transformer son économie de rente en une
« économie entrepreneuriale compétitive ».
Le pays compte pour cela sur les investisseurs angolais et étrangers. Ces derniers
semblent d’ailleurs se bousculer aux portes.
Le gouvernement les invite à procéder à plus
de transfert de technologie et de savoir-faire.
Il est aussi question de faciliter l’accès aux
financements bancaires consacrés au développement de l’économie. Ces derniers ne
représentent actuellement que 28 % du PIB
et sont concentrés sur des investissements
non-productifs.
En clair, l’Angola veut, dans le cadre de
la diversification de son économie, exploiter d’autres ressources naturelles comme
l’or, le fer, la bauxite et l’uranium. Mais il
espère surtout mettre à contribution ses
vastes forêts, ses terres arables, ainsi que
ses eaux poissonneuses. L’État compte
aussi solidifier son industrie. Réussira-t-il
là où certains pays tels que le Gabon et la
Guinée équatoriale, eux aussi fortement
dépendants du pétrole, peinent à se frayer un
chemin ? Le gouvernement reste optimiste
et y croit fermement. Le quotidien Jornal de
Angola, proche du gouvernement, indiquait
au mois de janvier dernier que l’Angola a de
quoi vaincre la crise. Mais il faudra d’abord
vaincre certains manquements criants que
soulignent régulièrement les exégètes de
l’économie. Notamment la faiblesse de la
gouvernance, le manque de transparence
et la qualité approximative des ressources
humaines.
AFRIQUE EXPANSION • 51
27
Marchés
Africains
Marc Omboui
Algérie
Des milliards de
dollars à investir
à l’étranger.
Les compagnies
algériennes qui
remplissent
certaines conditions
fixées par la Banque
d’Algérie peuvent
désormais investir
à l’étranger
Tirant profit de ses énormes revenus pétroliers et voulant en même temps s’émanciper
de sa dépendance presqu’exclusive vis-à-vis de ceux-ci, l’Algérie a décidé de s’engager
dans les investissements à l’étranger. Objectif : passer de 80 millions de dollars aujourd’hui
à 2 milliards de dollars de recettes d’exportations hors hydrocarbures à l’horizon 2020.
Après une participation jugée réussie à une foire commerciale dédiée
aux produits algériens au Cameroun il y a quelques mois, l’entreprise
algérienne, Algerian for Export & Events Errowed (AFEEE), spécialisée
dans les services à l’export, a récemment décidé d’ouvrir un comptoir
commercial d’ici le début 2016 à Yaoundé, la capitale camerounaise. 28
AFRIQUE EXPANSION • 51
Cette décision est symptomatique d’un
changement de paradigme opéré dans la
politique économique de l’Algérie, notamment en ce qui concerne les investissements à
l’étranger. Jusqu’ici les rares entreprises algériennes ayant investi à l’étranger, dont notamment le géant pétrolier Sonatrach, ont obtenu
des autorisations spéciales suite à de longues
et laborieuses procédures administratives.
Le texte législatif de la Banque d’Algérie qui
vient changer la donne stipule que toutes
les entreprises de droit algérien peuvent
« transférer des capitaux » pour « la création
de société ou de succursale ; la prise de participation dans des sociétés existantes sous
formes d’apports en numéraires ou en nature ;
l’ouverture de bureau de représentation ».
Désormais, toutes les entreprises de droit
algérien peuvent convertir des dinars afin
d’investir à l’étranger. Un privilège jusque-là
réservé à l’entreprise nationale d’hydrocarbures Sonatrach. Les compagnies algériennes qui remplissent certaines conditions fixées par la Banque d’Algérie peuvent
désormais investir à l’étranger, selon un
règlement paru en novembre 2014 dans le
Journal officiel algérien.
Cette décision était réclamée depuis plusieurs années par les patrons algériens.
Même si d’aucuns estiment encore que
l’État a « fui ses responsabilités en choisissant de laisser l’initiative au privé au lieu de
créer un fonds souverain » avec une vision
stratégique qui permettra d’identifier les
secteurs à haute valeur ajoutée pour l’économie, la majorité soutient pour sa part que
l’Algérie devrait tirer profit de la crise économique mondiale à travers l’acquisition ou
des placements dans les entreprises étrangères en difficulté dans un contexte de crise
économique considérée à l’époque comme
une importante opportunité pour restructurer et diversifier l’économie nationale
et réduire de surcroît sa dépendance aux
hydrocarbures. La décision de la Banque
d’Algérie devrait permettre à certaines
entreprises privées comme Général Emballage, Benamor ou Cevital, de se développer
à l’étranger. Elle vise à booster les exportations hors hydrocarbures dans un contexte
de chute des cours.
Mohamed Laid Benamor, PDG du Groupe
Benamor et président de la CACI, a salué la
décision de la Banque d’Algérie, estimant
que celle-ci ouvre désormais la voie aux
entreprises algériennes pour investir et
réaliser leurs projets en dehors des frontières. L’Algérie compte particulièrement sur
des domaines clés comme l’agroalimentaire,
l’industrie pharmaceutique, l’électronique et
les services.
À la conquête du monde
Selon l’agence officielle brésilienne Agencia Brazil, Cevital, le plus important groupe
privé d’Algérie avec un chiffre d’affaires de
4 milliards de dollars en 2013, envisage de
lancer au nord du Brésil un projet de création
d’industries alimentaires. D’autres sources indiquent que Cevital s’apprête à investir également dans la sidérurgie. Une usine va bientôt
être installée dans ce pays, qui compte parmi
les 20 premières puissances économiques du
monde. Avant le Brésil, le groupe Cevital a
effectué des acquisitions en France, en Italie
et au Maroc. Le dernier coup d’éclat de Cevital, la reprise de Fagor Brandt, numéro deux
de l’électroménager en France. La société
algérienne veut également investir au Soudan
et dans d’autres pays d’Afrique.
Il faut dire que l’Algérie, qui compte une
cinquantaine d’entreprises exportatrices,
tire 98 % de ses recettes en devises de la
vente d’hydrocarbures. Craignant jusquelà de s’exposer au problème récurrent des
fuites de capitaux, les pouvoirs publics
étaient réticents à l’idée de permettre le
rachet des actifs industriels à l’étranger par
les opérateurs économiques de droit algérien. Les choses semblent donc avoir changé et le gouvernement algérien compte, en
favorisant les investissements algériens
à l’étranger, réenclencher la dynamique
industrielle en rendant les entreprises plus
performantes et plus compétitives.
Il faut cependant relever que la nouvelle
politique algérienne sur les investissements
à l’étranger est assortie de certaines conditions, à commencer par une autorisation
préalable du Conseil de la monnaie et du
Crédit. Ces investissements doivent être en
rapport avec « l’activité de l’opérateur économique concerné » et viser à « consolider
et développer cette activité ». L’investisseur
doit acquérir au moins 10 % du capital de
la société non résidente. Les transferts de
capitaux destinés à l’investissement à
l’étranger sont soumis à un plafond et
ne sauraient excéder le profil de la moyenne
annuelle des recettes d’exportations, rapatriées durant les trois dernières années
précédant la demande, indique le texte de
la Banque d’Algérie. Il a été également stipulé dans ce règlement signé par le gouverneur de la Banque
d’Algérie que l’opérateur économique de
droit algérien doit veiller à ce que le transfert
des fonds à opérer au titre de l’investissement
à l’étranger s’effectue en fonction des besoins
de financement de l’investissement projeté et
en cas de désinvestissement, il doit rapatrier,
sans délai, le produit de l’opération.
Enfin, les opérateurs doivent déposer à la
direction générale des changes de la Banque
d’Algérie un rapport d’activité annuel appuyé
des états financiers dûment certifiés par un
commissaire aux comptes ou tout autre organe habilité à cet effet dans le pays d’accueil
de l’investissement à l’étranger. L’Algérie dispose encore de richesses
naturelles considérables et diversifiées. Les
plus importantes d’entre elles sont constituées des hydrocarbures (pétrole et gaz
naturel notamment). Véritable géant énergétique, l’Algérie, forte de 50 % des réserves,
de 48 % de la production totale et de l’impressionnant taux de 94 % des exportations
de gaz naturel, n’a pas de rivale dans la
Méditerranée, où elle est classée premier producteur et exportateur de pétrole et de gaz.
Même si l’Algérie connaît ces derniers
temps des difficultés du fait de la chute des
cours du pétrole, l’État et ses opérateurs
économiques disposent encore d’importants
revenus qui peuvent lui permettre d’investir
à l’étranger, conquérir de nouveaux marchés
et sortir de la forte dépendance vis-à-vis des
hydrocarbures. Les entreprises algériennes
se sont déjà lancées dans cette aventure et,
apparemment, rien ne semble pouvoir les
arrêter.
AFRIQUE EXPANSION • 51
29
Marchés
Africains
Josianne Massé
Culture
L’Afrique du Sud se vend et s’exporte.
Leur album $ O $, lancé en 2009, a généré
265 000 $ de chiffre d’affaires. Le groupe
reçoit une proposition d’Interscope pour
produire leur album Ten$Ion, mais quand
l’entreprise veut adoucir la musique et les
paroles de Die Antwoord, le groupe préfère le sortir avec leur propre compagnie
de production, Zef Recordz. La vidéo de leur
premier simple, I fink u freeky, atteint plus de
75 millions de vues. Ten$Ion leur permet ensuite de récolter 297 000 $ alors que leur plus
récent album, Donker Mag, génère 465 000 $.
Ce dernier se classe même en 15e position du
palmarès canadien et #1 aux États-Unis dans
la catégorie dance/électro.
« Je ne me vante pas, mais nous sommes
le plus grand groupe au monde à provenir de
l’Afrique du Sud. Il y a Mandela, District 9 et
Die Antwoord. Voilà l’histoire de l’Afrique du
Sud », lance Ninja à ION magazine.
L’Occident est de plus en plus séduit par la culture sud-africaine, et ce,
de plus d’une manière. Cinéma et musique notamment, où s’entremêlent
passé culturel et modernité économique, se vendent aujourd’hui à coups
de millions partout sur la planète. Et ce n’est qu’un début !
Time a
nommé le
réalisateur
Neill Blomkamp comme
étant l’une
des 100
personnes
les plus
influentes
de 2009 et
le magazine
Forbes lui a
accordé la 21e
place sur sa
liste des célébrités les plus
puissantes en
provenance
d’Afrique.
30
Alors que de nombreux films à propos de l’Afrique du
Sud viennent de l’extérieur, peu de productions locales
sont connues à l’extérieur du pays à l’exception du film
de 1980, The Gods Must Be Crazy ou du plus récent Tsotsi
qui a remporté l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. Plusieurs musiciens de jazz connus sur la scène
internationale proviennent de l’Afrique du Sud, dont
Jonas Gwangwa et Miriam Makeba. L’Afrique du Sud a
également donné naissance au style de musique Kwaito, qui intéresse plusieurs producteurs américains, dont
Sony, BMG et EMI. Pensons notamment aux plus grands
succès de Brenda Fassie. Mais il y a aussi des groupes
innovateurs qui émergent du pays de Mandela et se
taillent une place enviable à l’international comme Die
Antwoord, Seether et la formation punk rock afrikaans
Fokofpolisiekar.
Die Antwoord, qui signifie « la réponse » en afrikaans,
est sans contredit le plus populaire du moment. Le
groupe de musique est originaire de la ville du Cap,
AFRIQUE EXPANSION • 51
issu du mouvement zef et composé des rappeurs trash
blancs Ninja (Watkin Tudor Jones) et Yolandi Visser.
En février 2010, le groupe connaît un tel succès sur
Internet que leur site explose avec trois millions de
visiteurs en quatre jours, un trafic inattendu expliqué
par l’intérêt de blogueurs américains sur Boing Boing et
Dlisted. Die Antwoord doit payer 3000 rands (391,10 $)
en pénalités à leur hébergeur pour suivre la cadence
effrénée. « Personne ne voulait nous engager depuis
longtemps. Soudain, en trois jours, on nous offre 50 000
rands pour un concert », déclare Ninja à Reuters. Avec
la demande grandissante, Die Antwoord entame alors
une tournée européenne et américaine. En avril 2010,
ils se produisent devant 40 000 personnes au festival
de musique Coachella. Ils jouent en plusieurs occasions
à guichets fermés et il est encore difficile aujourd’hui
de mettre la main sur une paire de billets dans certaines
villes.
Le 7e art
District 9 est le premier
long métrage du réalisateur sud-afro-canadien Neill Blomkamp
qui a profité d’une
association avec Peter
Jackson en tant que
producteur exécutif.
Distribué par une compagnie américaine, le film est rentabilisé dès
son premier week-end d’exploitation aux
États-Unis et récolte 210 millions de dollars
au box-office. Pour un film n’ayant coûté que
30 millions, on peut certainement parler d’un
grand succès.
Filmé dans le quartier Chiawelo de Soweto, District 9 est un long métrage adapté du
court Alive in Joburg de Blomkamp. L’histoire
s’inspire librement des évènements du District 6 sous le régime de l’apartheid et aborde
les thématiques d’humanité, de xénophobie
et de ségrégation raciale dans un univers de
science-fiction à Johannesburg. District 9 a
reçu un prix Saturne pour le meilleur film
international, une récompense remise par
l’Académie des films de science-fiction, de
fantaisie et d’horreur. En 2009, le film a été
retenu dans quatre catégories à la cérémonie
des Oscars (autant de nominations que Star
Trek), mais est reparti bredouille derrière les
gagnants The Hurt Locker (Les Démineurs),
Precious et Avatar.
En entrevue au blogue Hero Complex du
LA Times, Neil Blomkamp explique comment il arrive à faire des films à succès avec
d’aussi petits budgets en comparaison des
blockbusters contre lesquels il s’inscrit. «On
peut faire beaucoup pour moins [d’argent]
maintenant, explique-t-il. Tout revient au
processus. Si vous allez de l’avant en sachant
ce que vous voulez accomplir, vous pouvez
économiser de l’argent. Si vous vous lancez
en essayant de comprendre ce que vous
voulez, ça va coûter cher. L’autre aspect est
de réduire, comme pour un régime. Plutôt que d’avoir 2000 plans avec des effets
spéciaux, vous pouvez probablement en
avoir 1000. Ces sacrifices en valent la peine
si vous arrivez à faire quelque chose qui n’est
pas générique, d’aucune façon.»
Time a nommé Blomkamp comme étant
l’une des 100 personnes les plus influentes
de 2009 et le magazine Forbes lui a accordé la 21e place sur sa liste des célébrités les
plus puissantes en provenance d’Afrique. Le
réalisateur sud-africain vaudrait aujourd’hui
20 millions de dollars, selon le site Celebrity
Net Worth.
En 2013, Neill Blomkamp a écrit et réalisé Elysium, qui a rapporté 286 millions
au box-office et qui a coûté 115 millions à
produire. Le film aborde les sujets d’immigration, de surpopulation, de couverture
médicale, d’exploitation, de justice et de lutte
des classes sociales dans un environnement
futuriste mettant à l’avant-plan les acteurs
américains Matt Damon et Jodie Foster.
Plus récemment, en 2015, Neill Blomkamp
a réalisé Chappie, un long métrage inspiré
de son court métrage Tetra Vaal et pour
lequel il a fait des recettes de 102 millions au
box-office alors que le budget du film n’était
que de 49 millions. Pour ce film, Blomkamp
a donné des rôles de gangsters à Watkin
Tudor Jones (Ninja) et Yolandi Visser de
Die Antwoord en plus d’accorder une place
importante à leur musique et à leur personnalité artistique. Le film met aussi en vedette
l’actrice américaine Sigourney Weaver et
l’acteur australien Hugh Jackman. L’histoire
se déroule à Johannesburg, là où l’oeuvre a
été filmée, et se penche sur des thématiques
d’humanité, d’oppression et de violence.
Blomkamp doit aussi donner vie à Alien 5
avec Sigourney Weaver qui a accepté de revenir seulement si le réalisateur sud-afro-canadien qu’elle a connu sur Chappie, le
réalise. Or, le film qui en était à l’étape de
préproduction, a été mis sur la glace jusqu’à
ce que le tournage d’Alien : Covenant, la
suite de Prometheus, soit achevé puisqu’il
s’agit d’une oeuvre du réalisateur du premier
Alien, Ridley Scott. Ce dernier, qui est aussi
producteur d’Alien 5, a assuré aux cinéphiles
que le projet a été mis en pause, mais qu’il
ne sera pas annulé.
Dans tous ses films, Blomkamp embauche
le Sud-Africain Sharlto Copley qui est, en
quelque sorte, devenu son acteur fétiche.
Les deux amis se sont rencontrés alors que
Blomkamp n’avait que 16 ans, à Johannesburg. Copley tient le rôle principal dans
District 9 , il joue Kruger dans Elysium et il
prête sa voix au robot dans Chappie.
Décidément, l’Afrique du Sud séduit de
plus en plus les Américains. Même l’acteur
Samuel L. Jackson a dit récemment, dans
une émission télévisée animée par Jimmy
Kimmel, qu’il y déménagerait si Donald
Trump devenait le prochain président américain. Une déclaration à laquelle Brand SA
a répondu qu’il serait préférable de le faire
pour la richesse culturelle du pays.
AFRIQUE EXPANSION • 51
31
Marchés
Africains
Rudy Casbi
Le Maroc,
« champion »
de la lutte
anti-terroriste.
Les services secrets marocains se sont récemment illustrés pour livrer rapidement aux
autorités françaises de précieux éléments qui ont permis d’interpeller des djihadistes
s’apprêtant à commettre un attentat en France, le tout une semaine après les fusillades
du 13 novembre dernier qui ont fait 130 morts dans la capitale française. La lutte contre
le terrorisme, le Maroc en a fait l’une de ses prérogatives dans la perspective de
son développement économique.
Si le Maroc peut s’enorgueillir de la qualité de ses services de renseignements, c’est
également parce que la politique du royaume
chérifien s’appuie sur un réseau d’informateurs fiables sur le terrain. Une spécificité
qui a, une fois n’est pas coutume, fait ses
preuves le 24 novembre dernier. Un groupe
de terroristes avait été localisé à St-Denis, quelques jours après les attaques de
Paris. Ce groupe de djihadistes devait par la
suite se rendre dans un centre commercial
de la région parisienne pour y effectuer un
carnage. Mais le projet a échoué grâce à la
collaboration des services marocains. Même
s’il n’est pas aisé de donner davantage de
précisions sur le recrutement de ces femmes
/ hommes. Raison de confidentialité oblige.
Cependant, au-delà de la question des
effectifs, il n’en demeure pas mois qu’il
s’agit là d’un savoir-faire en la matière qui
ne souffre d’aucune contestation. Un élément par ailleurs indispensable pour assurer la sûreté de l’État qui n’a plus été victime
d’un attentat terroriste depuis cinq ans, dans
une région du monde toujours plus en crise.
La défense nationale,
un budget prioritaire
Même s’il est impossible de donner un
chiffre exact sur les investissements entrepris en matière de politique sécuritaire,
selon l’institut SIPRI (Stockholm International Peace Research Institut) dans une étude
32
AFRIQUE EXPANSION • 51
parue cette année, les dépenses en matière
d’armements ont fortement grimpé : + 144 %
entre 2014 et 2015.
À lui seul, le Maroc a dépensé plus de 8 milliards de dollars l’année dernière, classant
le pays à la 54ème place parmi les nations
les plus dépensières dans le domaine de la
sécurité intérieure et extérieure.
Affichant toujours une volonté de lutter
contre le terrorisme, le Maroc ne s’éloigne
pas pour autant de son plus son grand
objectif du moment. Dynamiser une économie qui se met progressivement sur les rails
entraînant de vastes changements démographiques et sociaux. Une nécessité pour cet
État du Maghreb qui compte devenir un pays
émergent à l’horizon 2030. Et pour mieux
anticiper les risques posés par le défi de la
lutte contre le terrorisme, Rabat a développé
un réseau de lobbyistes aux quatre coins du
globe, y compris aux États-Unis.
Lobbying contre terrorisme
Selon une source de nos confrères du
Huffington Post, les Sujets de Sa Majesté
ont dépensé près de 5 milliards de dollars
dans le renforcement des relations bilatérales avec Washington. Cela fait du Maroc
le 6 e plus gros investisseur dans les réseaux
de lobbying et de renseignements aux
États-Unis. Et c’est dans un contexte où
Rabat a favorisé en retour l’implantation
d’entreprises étrangères grâce à des « zones
d’émergences » partout dans le pays.
Pariant sur un faible taux d’imposition
et un coût d’implantation très avantageux,
les entreprises étrangères sont déjà nombreuses à implanter leurs bureaux sur le
sol marocain. C’est déjà le cas pour certains
opérateurs de téléphonie mobile français
comme Bouygues Télécom ou encore SFR.
En retour, les services de renseignements
étrangers collaborent avec les services
secrets marocains pour les prévenir d’un
risque éminent d’attaque majeure. Comme
ce fut le cas l’an dernier quand des services
étrangers ont averti les Renseignements
généraux marocains du risque d’une attaque
aérienne au-dessus de grandes villes du
pays. La crainte de voir des avions de lignes
originaires de Libye s’écraser sur des sites
stratégiques au Maroc avait déclenché le
déploiement de batteries anti-missiles le
long du littoral pour agir rapidement en cas
de menace avérée.
Preuve que le Maroc ne lésine pas sur
la question sécuritaire dans une région
secouée par différents groupes terroristes
qui ont su mener de sanglantes et meurtrières attaques ces derniers mois. Une approche autoritaire qui relève d’abord de la
Défense nationale, mais qui a une incidence
certaine sur la croissance économique
et l’attrait du royaume chérifien pour les
entreprises étrangères.
Perspectives
Roch Harvey
Ressources naturelles
L’Afrique est généreusement
pourvue en ressources naturelles.
Celles-ci dominent l’économie de
nombreux pays du continent,
représentent un important moyen
de subsistance pour les populations locales et constituent souvent
l’une des principales sources de
recettes publiques et de richesse
nationale. Leur exploitation est
un puissant moteur de développement à l’image de ce qu’elle fut
pour de nombreux pays développés où les industries extractives
ont été à la base de la croissance
économique et de la prospérité.
Comme au Canada, pays devenu un acteur de premier plan de
l’industrie extractive internationale. Les sociétés canadiennes
se tournent d’ailleurs de plus en
plus vers de nouvelles ressources
situées dans les pays en développement où elles sont confrontées
à des enjeux sociaux et environnementaux particuliers qui exigent
la mise en œuvre d’initiatives
de responsabilité sociale des
entreprises (RSE). Concept en
émergence, la RSE se manifeste
par des activités volontaires que
les entreprises réalisent au plan
économique, social et environnemental selon une approche
de développement durable. Ces
multinationales apportent ainsi
des contributions innovatrices au
développement dans leurs pays
hôtes et contribuent à contrer la
« malédiction des ressources naturelles » dont trop de pays africains
ont souffert dans le passé. Portrait
de cette empreinte canadienne
sur lecontinent africain et des
perspectives qu’elle offre dans les
territoires où elle est à l’œuvre.
34
AFRIQUE EXPANSION • 51
Les entreprises
extractives
à l’heure
de la RSE.
AFRIQUE EXPANSION • 51
35
Perspectives
Roch Harvey
RSE
Comment conjurer la
malédiction des ressources
naturelles ?
L’industrie minière devrait théoriquement permettre à plusieurs pays
africains de financer leurs efforts
en matière de développement.
Cependant, l’implantation de projets
miniers génère trop souvent des
impacts négatifs au niveau social
et environnemental, des impacts
qui font l’objet de dénonciations par
des organisations de la société civile
tant au Canada qu’à l’étranger. On
associe l’exploitation minière à la
misère des populations locales,
à la mauvaise gouvernance et à la
dégradation de l’environnement.
C’est ce « mal développement »
que des chercheurs et activistes
ont appelé la « malédiction des
ressources naturelles ». Pourtant,
de nouvelles initiatives tendent à
démontrer que cette malédiction
peut être conjurée, des initiatives
en lien avec une approche de
responsabilité sociale des
entreprises (RSE).
« La croissance
économique
durable
menée par le
secteur privé
est l’un des
moyens les
plus efficaces
pour éliminer
la pauvreté dans le
monde. »
36
AFRIQUE EXPANSION • 51
Lors du récent Sommet de l’ONU en septembre dernier,
les États membres ont adopté les Objectifs de développement durable (ODD) qui font suite aux Objectifs de
développement du Millénaire venus à échéance en 2015.
Ce nouveau programme, planifié jusqu’en 2030, comprend un ensemble de 17 objectifs mondiaux dont la
finalité est de mettre fin à la pauvreté dans le monde
et d’apporter des solutions durables aux changements
climatiques. Dans le cadre de sa plateforme électorale, le
Parti libéral du Canada, qui a récemment pris le pouvoir
à Ottawa, s’est montré clairement favorable à investir
dans la réalisation des ODD qui ne veulent rien de moins
que de « transformer » le monde pour le rendre meilleur.
Pour la communauté internationale de même que du
point de vue de la majorité des Canadiens, nul doute
que le Canada devrait jouer un rôle de premier plan
dans la mise en œuvre des ODD. Concernant la lutte à
la pauvreté dans le monde, héritage du gouvernement
conservateur, le ministère des Affaires étrangères, du
Commerce et du Développement du Canada (MAECD)
a donné au secteur privé une place prépondérante
dans sa politique d’aide internationale. Pour le MAECD,
« la croissance économique durable menée par le secteur
privé est l’un des moyens les plus efficaces pour éliminer
la pauvreté dans le monde ». Et quand on parle du secteur privé canadien sur la scène mondiale, sachant que
le Canada est le pays qui compte le plus grand nombre
de sociétés minières, ce sont les entreprises extractives
qui dominent le paysage dans plusieurs pays en développement, particulièrement en Afrique.
Pour le Canada, les bénéfices du déploiement des
entreprises minières à l’international sont évidents vu la
croissance importante des activités de ces sociétés et le
rapatriement des profits et ce, malgré les fluctuations et
le cycle baissier actuel du marché mondial des matières
premières. De plus, les activités des sociétés minières,
au pays comme à l’étranger, ont favorisé le démarrage
au Canada de plus de 2000 entreprises de biens et
services miniers.
Principale source de devises étrangères et de recettes
fiscales pour de nombreux pays africains, la présence
de l’industrie minière canadienne est cruciale dans la
mesure où ces entreprises mobilisent investissements et
technologie, génèrent des revenus et créent des emplois
dans des contextes nationaux où le chômage
est élevé, particulièrement chez les jeunes.
Cependant, malgré les retombées économiques positives de l’industrie minière, sa
réputation a été ternie à l’échelle mondiale
par un trop grand nombre d’impacts négatifs,
de mauvaises pratiques, de sites dégradés
ou d’accidents industriels désastreux. Cette
situation alarmante a suscité l’élaboration de
plusieurs conventions, pactes et protocoles
internationaux, ainsi que l’émergence d’une
multitude d’organismes de surveillance et de
normalisation. Les revendications sociales
prônées par la société civile, les syndicats
et les ONG ont contribué à un plaidoyer qui
conteste l’industrie et se porte à la défense
des populations qui se considèrent lésées
dans leurs droits. Les médias jouent également un rôle important dans la divulgation
des impacts négatifs et la détérioration de
l’image publique de l’industrie minière.
Contribuer sans
remplacer l’État
Face à cette pression croissante, de nombreuses entreprises minières ont développé de meilleurs pratiques en intégrant les
principes du développement durable et en
adoptant des approches de responsabilité
sociale ou sociétale (un concept plus englobant). L’approche stratégique de la RSE exige
des entreprises qu’elles tiennent compte des
impacts sociaux et environnementaux de
leurs activités et qu’elles intègrent les enjeux du développement durable dans toutes
leurs interactions avec les parties prenantes.
L’objectif est d’associer étroitement logique
économique, responsabilité sociale et durabilité environnementale.
En 2014, le gouvernement canadien annonçait une version améliorée de la stratégie en matière de RSE qu’il avait lancée
en 2009 à l’intention des sociétés extractives canadiennes présentes à l’étranger.
Cette politique gouvernementale démontre
clairement une préoccupation quant à l’image
du Canada véhiculée sur la scène internationale par les minières canadiennes, trop souvent accusées d’être de mauvais citoyens
corporatifs. Dans le cadre de cette politique,
le Canada s’engage à appuyer des initiatives
visant à renforcer la capacité des pays en
développement à gérer l’exploitation minière
afin de réduire la pauvreté. Les compagnies
minières sont également incitées à participer
activement à des processus de dialogue avec
les communautés et les autorités locales.
Le gouvernement canadien reconnaît ainsi
que l’industrie extractive est confrontée à
des enjeux sociaux et environnementaux
déterminants et encourage les entreprises
à mettre en œuvre des initiatives de RSE et
ainsi contribuer au développement durable.
On peut tout de même se questionner sur
les impacts réels de la RSE qui agit au niveau
« micro » face à un objectif aussi « macro »
que le développement durable de pays qui
comptent souvent parmi les moins avancés. Quel rôle peuvent jouer les entreprises
minières pour accompagner ce progrès
socio-économique global, sachant que ce
n’est ni leur mission ni leur expertise ?
Pour Claude Perras, consultant pour la
Société financière internationale du Groupe
de la Banque mondiale qui finance de nombreux projets miniers en Afrique, le concept
de RSE peut parfois engendrer une certaine
incompréhension entre les entreprises et les
communautés locales qui peuvent percevoir
la responsabilité de l’entreprise comme une
obligation philanthropique, une sorte de
« devoir de bienfaisance ». Souvent défavorisées au plan des services publics essentiels,
il arrive trop souvent que ces communautés
locales attendent de l’entreprise minière
qu’elle fournisse toute la gamme des services de base à la population, que ce soit en
matière de santé, d’éducation, d’accès à l’eau
ou d’assainissement.
Pour M. Perras, la responsabilité des entreprises n’est pas de jouer le rôle essentiel
qui revient à l’État. Les entreprises doivent
d’abord être rentables afin de générer du rendement pour les actionnaires. Elles doivent
également offrir de bonnes conditions de
travail à leurs employés, respecter les règles
de protection de l’environnement et engendrer des retombées économiques favorables
dans les communautés, par exemple en favorisant l’approvisionnement local.
Dans ce sens, les entreprises minières qui
intègrent une approche de développement
durable et prennent en considération de manière stratégique les enjeux économiques,
sociaux et environnementaux créent de la
valeur pour toutes les parties prenantes,
génèrent des écosystèmes en bonne santé et
favorisent le développement de communautés solides au plan socioéconomique. Il s’agit
alors d’une relation gagnant – gagnant entre
l’entreprise et la société dans son ensemble.
ISO 26000
La responsabilité sociale ou sociétale des entreprises est étroitement liée au développement durable qui couvre des objectifs économiques, sociaux et environnementaux.
Publiée en 2010 au terme d’un long processus de négociation entre un très grand
nombre de parties prenantes dans le monde entier, la norme ISO 26000 permet de clarifier
la notion de responsabilité sociétale, d’aider les entreprises et les organisations de la
société civile à traduire les principes en actes concrets et de faire connaître les meilleures
pratiques dans le monde entier. Il s’agit d’une norme qui contient des lignes directrices
et non des exigences. Elle ne se prête donc pas à la certification, contrairement à d’autres
normes très connues de l’ISO.
La norme ISO 26000 se structure autour de sept questions centrales :
• la gouvernance, les droits de la personne ;
• les relations et conditions de travail, l’environnement ;
• la loyauté des pratiques ;
• les questions relatives aux consommateurs ;
• les communautés et le développement local.
Elle est devenue le point de repère international de premier choix
de toute entreprise soucieuse de sa responsabilité sociétale.
AFRIQUE EXPANSION • 51
37
Perspectives
Roch Harvey
Responsabilité
sociétale des
entreprises Les
minières
canadiennes
à l’œuvre
en Afrique.
La responsabilité sociétale des entreprises (RSE) n’est pas qu’un concept
théorique, ni une simple expression
en vogue. C’est d’abord une orientation stratégique et un ensemble
de pratiques qu’une entreprise
décide d’adopter pour accomplir
sa mission de manière efficace. Les
entreprises extractives ont besoin
du consentement des principales
parties prenantes pour réaliser leurs
projets et les minières canadiennes
qui opèrent en Afrique ont compris
qu’agirconformément aux principes
de la RSE était bon pour les affaires.
Il faut dire que les bénéfices sont multiples pour les
entreprises qui s’y investissent sciemment. Il s’agit non
seulement d’un moyen de contribuer au développement
durable des pays où elles sont implantées, mais c’est
aussi une manière de s’assurer une place enviable dans
leur secteur économique. La conciliation entre exploitation minière et développement durable représente un
grand défi pour l’ensemble des parties prenantes et exige
une approche globale qui prend en compte les enjeux
économiques, sociaux, environnementaux et éthiques.
38
AFRIQUE EXPANSION • 51
Face à une pression croissante, l’industrie
minière s’est montrée active en matière de
responsabilité sociale depuis le début des
années 1990. Les initiatives desentreprises
ont porté sur l’intégration des principes de
développement durable et l’adoption des
bonnes pratiques. Plusieurs mécanismes
et démarches ont été mis en place, des fondations philanthropiques ont été créées,
des efforts ont été faits dans la gestion
des relations communautaires et on a davantage évalué et cherché à atténuer les
impacts sur l’environnement.
La Vision minière pour l’Afrique1 (VMA)
a été adoptée par les chefs d’État et de gouvernement d’Afrique en 2009. Elle considère
que les stratégies de responsabilité sociale
des entreprises ciblent peut-être trop souvent uniquement le développement social
dans les communautés. Les responsables
africains croient que ces stratégies ne
devraient pas se substituer aux responsabilités des États qui doivent fournir des
infrastructures de base à leurs citoyens. Ils
souhaiteraient plutôt que la capacité des
États de réaliser par eux-mêmes leurs priorités et de s’acquitter de leurs responsabilités soit renforcée. En retour, les gouvernements devraient pouvoir s’attendre à ce que
les entreprises accomplissent leurs obligations fiscales de façon juste et transparente
et paient des redevances équitables.
RSE et pouvoirs locaux
En matière de RSE en Afrique, un exemple
intéressant est le Projet de renforcement des
capacités des Communes Rurales de Boké
(PRCB) qui a été réalisé en République de
Guinée entre 2009 et 2012, une expérience
pilote de développement local durable dans
une région à fort potentiel minier. Ce projet
de partenariat public privé (PPP) a été mis en
œuvre par une ONG canadienne, le Centre
d’étude et de coopération internationale
(CECI), en partenariat avec la société minière
Rio Tinto Alcan (RTA). L’Agence Française
de Développement (AFD) agissait à titre de
bailleur de fonds du projet qui visait le
renforcement des capacités des élus locaux,
des services techniques et de la société
civile de trois communes rurales guinéennes.
Le bilan final de cette initiative démontre
que les responsables locaux ont acquis de
nouvelles compétences en matière de planification et de maîtrise du développement
local. Ils ont également développé de meilleurs mécanismes pour mobiliser et gérer
les recettes locales et ont acquis des compétences novatrices en matière de bonne gouvernance et d’administration communale.
D’ailleurs, en ce qui concerne la gouvernance locale, le bilan du projet fait mention
de l’émergence de certaines valeurs démocratiques dans les collectivités. Au plan de
la protection de l’environnement, le projet a
favorisé chez les acteurs locaux une appropriation d’outils de gestion et l’adoption de
comportements environnementalistes en
plus de susciter une véritable et nouvelle
dynamique locale de développement durable.
RSE et philanthropie
En matière de RSE des entreprises minières
canadiennes en Afrique, une réalisation
exemplaire qui s’inspire d’un modèle de
type philanthropique est celle de SEMAFO
(la Société d’exploration minière en Afrique
de l’Ouest), une entreprise basée à Montréal
qui exploite la troisième plus grande mine
d’or au Burkina Faso depuis le tournant
des années 90. En 2008, cette entreprise a
mis sur pied la Fondation SEMAFO dont la
mission est de soutenir les communautés
dans les régions où la compagnie minière
est présente. Selon son cahier des charges,
les objectifs de la Fondation consistent à :
« assurer un leadership collectif en soutenant les valeurs locales et en favorisant la
création de partenariats locaux, dans le but
de satisfaire les besoins des communautés
et des individus et devenir un défenseur
efficace, en étant porte-parole des communautés qui ont besoin d’aide afin de leur
assurer une bonne qualité de vie aujourd’hui
et demain ».
La Fondation SEMAFO est née de l’activité et de la vision sociale du fondateur de
la compagnie, Benoît Lasalle, pour qui tout
commence par le respect de l’être humain
et de l’environnement. Sous sa présidence,
la compagnie minière canadienne a mis
un point d’honneur à conjuguer activités
commerciales et humaines dans le but de
contribuer au bien-être des habitants et du
pays. La Fondation SEMAFO soutient financièrement de nombreuses initiatives dans
le domaine de l’éducation, l’agriculture, la
santé et le développement communautaire.
Ce qui inclut, entre autres, la construction
d’écoles, l’appui à des groupements féminins de producteurs de beurre de karité et
de sésame, le forage de puits et des programmes de prévention des maladies.
Selon Charity Intelligence Canada (Ci),
la compagnie minière SEMAFO, principal
contributeur de la Fondation du même nom,
s’est engagée à donner 2 % de ses profits
annuels nets. La Fondation a adopté une approche participative qui assure l’acceptabilité sociale de chacun de ses projets qui sont
sélectionnés par les communautés locales,
en fonction de leurs besoins et de leurs
capacités, en accord avec les plans locaux
de développement et en partenariat avec
les services gouvernementaux et les organisations de la société civile. Cette approche
de concertation adoptée par la Fondation a
pour objectif de créer un réseau de développement économique dynamique et durable
qui n’aurait pas vu le jour autrement et qui
pourra se poursuivre après la fin des activités minières. En 2012, la Fondation aurait
consacré 44 % des déboursés de son programme en éducation, 24 % à l’agriculture,
2 % à la santé, 16 % au développement communautaire et 14 % à des dons de matériel
tel que des équipements médicaux et des
fournitures scolaires. Depuis juillet 2014, les
activités de la Fondation sont concentrées
au Burkina Faso suite au transfert de ses
actifs du Niger à une ONG nationale qui a
été mise en place avec les employés locaux
de la Fondation.
RSE et reddition de compte
Que ce soit selon une démarche de développement endogène basée sur le renforcement des capacités des autorités locales, ou
davantage en fonction d’une approche philanthropique dirigée vers l’amélioration des
conditions de vie des populations, la RSE
est de plus en plus populaire et appliquée
par les entreprises minières canadiennes en
Afrique qui souhaitent ainsi faire la preuve
de leur volonté et de leur capacité à agir en
bon citoyen corporatif.
Néanmoins, selon les experts en la
matière, il faudrait que les pays africains
eux-mêmes élaborent des cadres nationaux de RSE pour assurer la reddition de
comptes des entreprises par des processus
de consultation ouverts et larges, avec des
indicateurs d’évaluation d’impacts mis en
place par un grand nombre de parties intéressées. On peut donc encore faire mieux
sur le terrain, même si le mouvement
semble déjà bien enclenché.
1- http://www.africaminingvision.org/pr1-fr.html
AFRIQUE EXPANSION • 51
39
Marchés
nord-américains
Léopold Nséké
Milieu de travail
La méthode
« Google », un
modèle pour
tous !
Chez le géant américain des nouvelles technologies,
on fait les choses très différemment. Car derrière
les chiffres mirobolants se trouve une recette
« sociale » qui fait des employés et autres
collaborateurs de véritables machines à succès.
Le parallèle établit avec Ford pour l’automation
au début du 20e siècle en fait le modèle
du 21e siècle en matière de management.
Les entrepreneurs africains pourraient
s’en inspirer.
Il se dit et s’écrit désormais que Google n’est pas seulement l’une des
entreprises les plus valorisées de la planète, mais arrive en tête des entreprises au sein desquelles il fait réellement bon travailler. Un climat assez
léger règne dans ce groupe où ce sont les statistiques qui imposent ce qui
convient au mieux pour les salariés. On y trouve en action de nouvelles
méthodes de management qui chamboulent le marketing, les ressources
humaines, l’organisation ou encore la technologie. L’optimisation trouve tout
son sens dans les fameuses 12 méthodes révolutionnaires qui composent un
cadre conceptuel applicable à tout type de société.
La mathématique à l’œuvre
Dans son best-seller sur la réussite de cette compagnie, le consultant français
Bernard Girard est on ne peut plus explicite. La confiance dans les chiffres se manifeste
partout : la politique tarifaire, les prises de décision, les échanges entre ingénieurs
et les choix de développement des produits nouveaux. La puissance de calcul est mise au
service de la gestion la plus quotidienne. Les comportements des utilisateurs sont en permanence scrutés, analysés, traités. On ne se fie plus à l’intuition, mais aux données que l’on
fait parler, que l’on explore pour mieux comprendre mais aussi prédire les comportements
des utilisateurs. Les volumes importants de données manipulées permettent de segmenter
très finement la population, de découvrir des niches qui seraient invisibles sur des échantillons plus
étroits.Google invente ainsi un nouveau modèle de management selon le chercheur qui précise que parler
de révolution n’est pas excessif. On retrouve chez l’éditeur quelques-uns des traits qui font les grandes
révolutions industrielles : découverte d’un marché de masse, invention de produits, techniques de commercialisation
et gestion des hommes. Et comme toutes les grandes révolutions du management, celle-ci tire sa légitimité dans sa capacité
d’adaptation à un environnement économique, social et culturel qui a fortement évolué. La technologie est, naturellement,
au cœur de tout cela. Néanmoins, rarement une entreprise aura autant fait appel au « capital social ». Google est aussi la
première entreprise à avoir su tirer parti du développement de communautés de fans,
d’observateurs, critiques autant qu’évangélistes.
40
AFRIQUE EXPANSION • 51
Modèle économique
Le modèle économique de Google, poursuit Girard, est bâti sur la gratuité pour l’utilisateur. On retrouve
ce modèle sous diverses formes dans le monde économique. Dans tous les cas (médias, carte de crédit),
les prestations sont proposées à deux types d’acteurs, annonceurs et lecteurs, clients et commerçants.
Il s’agit alors de trouver le bon compromis entre le prix du produit et les ventes de prestations.
Google s’est par exemple interdit de vendre la publicité à un coût élevé, appliquant le principe
de la différenciation tarifaire de Jules Dupuit : « demander pour prix du service rendu non pas
ce qu’il coûte à celui qui le rend, mais une somme en rapport avec l’importance qu’y attache
celui à qui il est rendu ». C’est une première innovation capitale qui réduit le risque lié à
l’incertitude attachée à toute campagne publicitaire et qui permet à Google de toucher
de tout petits annonceurs. Chez Google, on ne recrute pas seulement les meilleurs, on
fait tout pour les garder. On fait donc confiance en la motivation intrinsèque des gens
(proximité avec le monde Open Source). A ainsi été réinventé le mécanisme basé sur
l’organisation du temps de travail des ingénieurs et développeurs, en place dans
les centres de recherche de 3M, décrit en 1998 dans Wired, un journal que Page
et Brin lisaient probablement, relève Girard :
Chez Google,
on ne recrute pas
seulement les meilleurs,
on fait tout pour
les garder.
• 80 % du temps de travail est consacré à la mission pour laquelle ils sont payés.
• 20 % du temps de travail est dédié à des recherches et initiatives personnelles.
On est alors dans la logique du salaire d’efficience (George Akerlof au début
des années 80) comme variante du potlatch (don contre don) analysé par
Marcel Mauss : les entreprises payent leurs salariés au-dessus du prix du
marché parce qu’elles savent que les salariés feront des efforts supplémentaires pour les remercier de leur générosité. Le temps que Google donne
à ses salariés lui est rendu sous forme d’informations, d’innovations et
de contacts (ces 20 % ne concernent pas les personnels administratifs).
Le mécanisme est basé sur un contrôle des pairs : proposer ses idées
à ses collègues. Il donne ainsi la priorité aux idées susceptibles d’intéresser l’entreprise qui travaillera sérieusement à leur réalisation. Cette
motivation intrinsèque met en œuvre un triple levier : reconnaissance,
système d’autocontrôle (si je suis bon, je peux dégager 20 % de mon
temps) et enjeu en termes de réputation (convaincre des collègues
respectés de la pertinence de ses idées). Dans le même esprit, le cadre
de travail mis à la disposition des salariés est un moyen de les faire
rester plus longtemps en leur apportant une hygiène de vie.
Le management africain comme projet
À un moment où le continent redevient le carrefour des mutations sociétales
et le relais de la croissance mondiale, les entrepreneurs africains devraient
y voir un exemple applicable. En Afrique, il est incontournable de relever
l’intégration absolue du groupe à toutes les activités. Ce modèle dans le
management s’apparente ainsi à une manifestation de l’essence de la société
qui pousse à certaines théories. On a souvent parlé des concepts « Ubuntu » ou
« Indaba » renvoyant à l’interconnexion qui régit les rapports sociaux dans la vie
des individus dans la société africaine, écrivent Anderson Konan Seny Kan et Suzanne
Marie Apitsa dans la Harvard Business Review. De ce concept, expliquent-ils, émerge une
diversité de principes de management africain que nous résumons en trois grandes catégories.
La première catégorie a trait aux rapports aux autres. Les processus décisionnels et
organisationnels sont la résultante d’une solidarité collective au travers de laquelle une personne
existe dans un groupe, et par extension un groupe de travail, que si elle valorise les personnes
de ce groupe. La deuxième catégorie porte sur le processus décisionnel. Les interactions évoluent
davantage par décisions collectives et consensuelles et non par confrontation d’idées. Ceci ne signifie
pas qu’il n’y a pas de jeux de contradictions faisant émerger des idées nouvelles, mais pour être efficace,
les points de vue divergents doivent être portés collectivement. Chez ces « hurluberlus » de la Silicon Valley,
tout est donc collectivement optimisé et dans l’équation, on retrouve deux variables interdépendantes : le bonheur
des employés et la rentabilité du groupe. L’idée étant d’organiser un environnement de travail dans lequel l’employé sera
le plus productif possible. Car chez Google, tout s’évalue à l’aune du bonheur de l’employé. On optimise les lieux de sociabilité,
on s’occupe du linge sale pour enlever au salarié un souci, on le teste pour savoir comment il se sent le plus récompensé.
Il ne faut pas aller plus loin pour trouver les réponses à ce succès qui est appelé à traverser les décennies.
AFRIQUE EXPANSION • 51
41
Marchés
nord-américains
Rudy Casbi
Crise des réfugiés
Le Canada prend le tr ain… de l’Allemagne
en marche !
La crise des réfugiés semble réveiller les consciences en Occident. Qu’en est-il des conditions
d’accueil de ces migrants au Canada et en Europe ? Les volontés engendrent des actions.
Mais à chacun sa méthode.
explique Bintou Sacko arrivée dans la région de
Winnipeg il y a 20 ans. Devenue directrice de
l’Accueil francophone du Manitoba, Bintou
Sacko, qui a grandi au Mali, accueille dans
son bureau 2000 à 3000 immigrants africains
par an qui viennent s’installer au Manitoba.
Des initiatives comme celles-ci, bien qu’elles
commencent à émerger dans le pays, sont
encore peu nombreuses.
L’Allemagne ouvre ses portes
25 000
réfugiés
syriens franchiront les
frontières
canadiennes
d’ici février
2016
42
AFRIQUE EXPANSION • 51
La photo du petit Aylan Kurdi originaire de Syrie, dont
le corps avait échoué sur une plage turque, a fait le
tour du monde. Aylan étant parti pour fuir la guerre
et rejoindre sa tante au Canada avec ses parents. Et
partout, ces mêmes couvertures de magazines et journaux dans le monde entier : « Réagissons vite ! »
Le Canada, lui, n’a pas tardé à prendre les premières
dispositions. Le nouveau gouvernement de Justin
Trudeau ayant annoncé récemment que 25 000 réfugiés syriens franchiront les frontières canadiennes
d’ici février 2016. Une initiative qui a d’ailleurs valu au
pays à la feuille d’érable les félicitations du Haut Commissariat pour les Réfugiés des Nations Unies. Si la
légitimé des migrations moyenne-orientales ne doit
pas être discutée, qu’en est-il de ceux qu’on qualifie
volontairement de « migrants économiques » ? – pour
ceux qui sont originaire du continent africain – pour
ne pas les nommer. Si le nouveau gouvernement
canadien n’a pas encore précisé les moyens qu’il
allait mettre en place pour les réfugiés syriens, le
flou autour de ces nouveaux arrivants originaires
du continent africain n’en demeure pas moins vaste.
À défaut de ne pas sentir l’émergence d’un plan gouvernemental sur cet accueil, même s’il est trop prématuré pour en juger, pour l’heure, ce sont les diasporas
elles-mêmes qui tentent de s’organiser sur le terrain.
« Tout n’est pas rose ici, dans le Manitoba. Il y a
encore beaucoup de défis et de choses à régler »,
En Europe, deux sortes d’initiatives sont
mises en place. Comme en France où les
gouvernements successifs ont pioché parmi le potentiel de ses anciennes colonies
pour reconstruire le pays après la Seconde
Guerre mondiale. Répondant ainsi par la
même occasion à une croissance économique qui frôlait les 5-7 % entre 1945 et 1970,
la France a accueilli par vagues successives
près de deux millions de personnes issues
du continent africain. À l’inverse, d’autres
États de l’Union européenne ont vu leur
population civile amorcée un mouvement,
puis prolonger par les gouvernements ensuite. L’Allemagne, désireuse de renouveler
sa population en relançant son taux de natalité
parmi les plus faibles du Vieux Continent (de
l’ordre de 8 naissances pour 1000 habitants,
selon l’agence nationale allemande Destalis),
accompagne les élans de solidarité civiques
en leur conférant un cadre juridique. C’est
avec cette ambition que certaines associations voient leur démarche appuyée et soutenue par l’État fédéral allemand en passant
par les diasporas déjà intégrées dans le pays.
À l’instar de l’association Pro Afrika, dirigée par les sœurs Kissassé, originaires de
Kisangani (République démocratique du
Congo). Déjà incérées dans la société allemande, il leur a été davantage aisé de remplir les formalités administratives pour la
réquisition d’un hôtel de cinq étages situé
à Schoneberg d’ici fin 2015. Ce lieu permet-
tra aux réfugiés issus du continent africain
d’accéder à des formations qualifiantes pour
faciliter l’accès à l’emploi. Environ 200 réfugiés y trouveront refuge, entourés de chefs
d’entreprises, de professeurs et d’une trentaine de travailleurs sociaux. « Ce centre
d’accueil leur permettra de s’intégrer dans
la société allemande et les formera aux métiers de conducteurs de bus ou de caristes
manutentionnaires », précise Irène Kissassé avant d’ajouter que « les nouveaux arrivants pourront valider leurs compétences et
apprendre également la gestion d’entreprises avec de jeunes startupers afin d’obtenir des levées de fonds ou encore présenter
un plan d’affaires ».
Pour les accompagner dans cette aventure, une dizaine de bénévoles se relaieront
au sein de l’Inter Kulturelles Aus Panafrika
d’ici fin 2016, année de l’inauguration du
centre d’accueil. D’ici là, le collectif Pro-Afrika espère réaliser une levée de fonds à hauteur de 10 millions d’euros avec les aides du
gouvernement fédéral et des plateformes
de financements participatifs.
À la pointe sur ces questions, les start-ups
aussi s’engagent pleinement en mettant sur
pied différents projets. Des start-ups composées essentiellement de jeunes, pour qui
cela représente leur premier engagement
politique concret. C’est dans cet esprit que
le Social Impact Lab a été l’un des précurseurs de ce mouvement à Berlin. Situé
dans un quartier populaire de Berlin Ouest,
ce réseau qui regroupe plusieurs entités
accueille, forme et permet l’intégration de
ces réfugiés. Appréciés pour leur attractivité et la diversité de leurs parcours, certaines
entreprises se rapprochent dorénavant
de ces starts-ups pour mieux apprécier le
potentiel de ses nouveaux arrivants.
« Dans mon hôtel, les meubles pourraient
provenir de la structure du Cucula – du nom
de la start-up – dans laquelle des Nigérians,
Maliens, Nigériens ou Libyens ont officié »,
expliquent la direction d’un hôtel du centre
de Berlin. Une insertion professionnelle
née d’un élan de solidarité citoyen appuyé
par l’État allemand qui cherche à assouplir
davantage la réglementation sur le droit
du travail pour les travailleurs immigrés.
Jusqu’au mois d’octobre dernier, le candidat au titre de séjour devait percevoir un
salaire supérieur à 44 000 euros brut l’année et
détenir un diplôme universitaire, selon la
législation allemande. Des conditions qui
devraient être revues à la baisse.
Mais cette politique d’accueil des migrants
n’est pas sans conséquence dans le pays,
une partie de la population n’hésitant pas à
montrer son hostilité sur ces engagements.
Le mouvement Pegida, proche des néonazis,
organisant souvent des marches à Dresde
pour dénoncer cette immigration en faisant
le lien entre l’origine ethnique des migrants
et leur appartenance religieuse. L’Islam est
ici pointé du doigt par cet organisme comme
une attaque contre leur « civilisation chrétienne ». La Chancelière, Angela Merkel, bien
que très populaire dans le pays comme le
prouve sa victoire aux dernières législatives
dès le premier tour, doit également composer avec ces voix dissidentes.
Mais l’extrême-droite reste pour l’instant
marginale. La victoire en octobre dernier
d’Henriette Reker à la course à la mairie
de Cologne, la 4 e ville d’Allemagne (980 000
habitants), avec 52 % est un symbole.
Henriette Reker, qui se présentait sans étiquette mais soutenue par Angela Merkel,
avait été poignardée par un membre de
l’extrême-droite en plein marché alors
qu’elle présentait le bilan de son action pour
l’accueil des immigrés en tant que maire
adjointe en charge de l’accueil des réfugiés.
AFRIQUE
AFRIQUEEXPANSION
EXPANSION••50
51
43
Dossier
Mondialisation
spécial
Jean-Nicolas
Nom du chroniqueur
Saucier
Dossier
Nom du chroniqueur
FinTech
Ces startups qui
révolutionnent
les transferts
d’argent.
Longtemps la chasse gardée d’une poignée d’acteurs majeurs, le secteur
des transferts d’argent internationaux vit une éclatante révolution sous
l’impulsion de jeunes pousses armées des toutes dernières technologies.
Ces « Fintech », qui chassent même sur le terrain des grandes banques
internationales, veulent faire les choses différemment : plus accessible,
moins cher et plus rapide ! Bienvenue dans le futur des services financiers
mondiaux.
« La start-up
TransferWise
basée à Londres
est aujourd’hui
valorisée à
1 milliard de
dollars. »
On connait tous aujourd’hui les TIC, medtech et autres
biotech, acronymes des plus récentes technologies à
s’imposer dans différents domaines, mais le prochain
sur la liste promet un impact direct et planétaire appelé
à forcer le changement. Les fintech (financial technologies, technologies financières) innovent et opèrent
une offensive remarquée dans la finance internationale,
notamment dans le très exclusif secteur des transferts
d’argent.
Cité par le Nouvel Obs en juin dernier alors qu’il inaugurait son incubateur Fintech dans le 8e arrondissement
parisien, Bernard-Louis Roques, directeur général et
co-fondateur du fonds de capital-risque Truffle Capital,
est convaincu du séisme à venir. « Le monde de la finance
va être bouleversé par les caractéristiques de l’économie
numérique : immédiateté, traçabilité, convivialité. »
Duopole sur un lucratif marché
fut transigée en ligne. Côté commercial, le domaine du
transfert d’argent des PME vers l’international est évalué
à plus de 5000 milliards chaque année, un pactole qui
attire l’intérêt de plusieurs jeunes entreprises qui s’attaquent aujourd’hui au duopole des sociétés spécialisées
Western Union et MoneyGram qui cumulent ensemble
66 % des transferts mondiaux et 20 % de la valeur du
marché (15 % pour le seul WU).
Ces opérations ont un coût et à l’échelle mondiale,
la moyenne est de 7,68 % des montants transférés, les
banques prélevant 10,96 % de la somme alors que les
deux géants se « limitent » à 6,59 %, toujours selon des
chiffres de la Banque mondiale. En Afrique, le coût est
encore plus élevé à environ 12 % des quelque 60 milliards
transigés, près du double de la moyenne internationale.
Et c’est précisément sur ce point que certaines startups Fintech ont choisi de s’appuyer pour investir un
marché qui manquait cruellement de concurrence…
et créativité !
« Les banques facturent des frais cachés sur les taux
de change, entre 4 et 5 %. Nous, nous pratiquons les frais
les plus bas possibles. Notre but c’est de permettre aux
particuliers à travers le monde d’envoyer de l’argent à
très bas coût et très rapidement, expliquait à l’ASP Taavet
Selon les estimations de la Banque mondiale, environ
600 milliards de dollars ont été transférés par des particuliers d’un pays vers un autre en 2014, un montant
que l’institution voit atteindre 640 milliards à l’horizon 2017. De ce marché, une part famélique de 5 %
44
AFRIQUE EXPANSION • 51
50
Hinrikus, dont la start-up TransferWise
basée à Londres est aujourd’hui valorisée
à 1 milliard de dollars. Nous sommes jusqu’à
9 fois moins cher qu’une banque [ sur certains marchés ] », précisait-il.
Autre entrepreneur fintech, même constat
dévastateur pour les géants du domaine,
qualifiés d’escrocs et de voleurs du continent africain par le Dr Ismail Ahmed, PDG de
WorldRemit et ancien conseiller des Nations
Unies, qui appelle depuis plusieurs années à
la fin de l’hégémonie des leaders historiques
du domaine.
« La grande escroquerie des transferts
d’argent, soulignée par M. Annan et le Rapport du Panel du Progrès de l’Afrique, a assailli les communautés les plus démunies
en Afrique depuis très longtemps. Western
Union et MoneyGram exploitent en duopole
les transferts d’argent dans de nombreux
pays, en imposant des frais exorbitants qui
absorbent des paiements vitaux pour les
économies en voie de développement. »
Avant d’ajouter : « Dans certains circuits de
transferts d’argent, les prix sont très élevés à
un tel point que près de 70 % du montant envoyé est perdu. Selon le rapport, un transfert
de 200 dollars vers l’Afrique Sub-saharienne
perd en moyenne 25 dollars soit 12 % du total
de la transaction. La réalité de cette situation est que de nombreux émigrés de cette
région envoient des sommes de moins de
200 dollars régulièrement et perdent ainsi un
pourcentage plus élevé de l’argent envoyé. »
Séduisante expansion
La stratégie de ces startups est à la fois claire
et simple : couper dans les marges astronomiques que se permettent les quelques
acteurs du marché en se servant d’un
modèle en ligne moins coûteux que celui des
agences reconnues du domaine. Modèle et
technologies réputés tout aussi efficaces que
ce qu’offre la concurrence, mais également
beaucoup plus rapides vu la quasi instantanéité du numérique. Et comme dans tous les
secteurs économiquement prometteurs, les
convoitises et prétendants sont nombreux
et ciblent tous les marchés internationaux.
La britannique TransferWise, qui connaît
une croissance annuelle de 15-20 %, emploie 400 personnes et transfère chaque
mois 700 millions d’euros dans 36 pays. Elle
a également attiré dans son giron d’investisseurs des personnalités comme Xavier
Niel et Richard Branson qui l’utilisent déjà
dans leurs affaires courantes, personnelles
comme professionnelles. Et il y en a d’autres,
de nombreuses autres, chaque compagnie
technologique importante voyant le potentiel énorme de ces fintech et les bénéfices
d’ajouter pareil actif au bouquet diversifié de
son empire numérique.
Le spécialiste du paiement en ligne Paypal
a ainsi racheté l’été dernier Xoom, entreprise
américaine spécialisée dans les transferts
d’argent internationaux, pour 890 millions
de dollars. Autre jeune pousse britannique,
Azimo, a plutôt choisi de s’allier à Facebook
pour ainsi offrir le transfert d’argent via
la populaire plateforme. Sa compatriote
WorldRemit, qui cible les migrants, notamment ceux issus du continent africain, vient
de lever 100 millions de dollars aux ÉtatsUnis pour financer l’expansion de son offre
et de ses services.
Le marché est si porteur, le besoin si manifeste et les possibilités d’innovations réelles
et concrètes que toutes les entreprises technologiques observent désormais d’un œil
attentif ce secteur de la finance. Un domaine
qui se veut d’ailleurs une porte d’entrée pour
éventuellement défier les grands groupes
bancaires de ce monde dans des créneaux
qu’ils croyaient à l’abri de toutes concurrences. C’est ce que croit Philippe Gélis de
Kantox, une plateforme numérique qui gère
déjà les comptes de plus de 1500 entreprises.
« Étant donné que tous les ingrédients
sont déjà réunis, ce n’est plus une question
de «si» mais une question de «quand» les
premières banques purement Fintech verront le jour. Elles seront flexibles, libres de
tout héritage et vierge de toute mauvaise
réputation, contrairement aux banques qui
traînent un nombre incalculable de casseroles. »
Dans le contexte actuel, difficile de ne pas
lui donner raison sur ce point. Et à bien y
penser, sur quelques autres aussi…
AFRIQUE
AFRIQUEEXPANSION
EXPANSION••50
51
45
Rendez-vous d’affaires.
• 6e Conférence sur la banque et la finance africaine
6-7 mars 2016, Accra, Ghana
La 6 e Conférence sur la banque et la finance africaine doit se tenir à Accra, au Ghana, les 6-7 Mars 2016 sous le thème : « Promouvoir l’inclusion
financière : Relier les gens aux services bancaires et financiers ». L’objectif de cet événement phare de 2016 est de recentrer la réflexion sur la
manière dont les institutions financières peuvent se développer en mettant l’accent sur la promotion de l’inclusion financière comme un élément
central de leurs stratégies commerciales, tout en fournissant aux clients des produits centrés sur le marché de masse. La conférence examinera
également la technologie financière nouvelle et innovante (FINTECH), des solutions qui rendent l’inclusion financière possible et rentable. Les
principaux intervenants comprendront des banques traditionnelles, des groupes spécialisés dans l’assurance, les ONG, les opérateurs télécoms,
les magasins de détail, les bailleurs de fonds, les investisseurs, les décideurs, les régulateurs et les institutions financières internationales.
Infos : http://aidembs.com/banking_conference/
• 1er Forum international d’investissements en Tanzanie (TIFI 2016) 9-11 Mars 2016, Dar es-Salaam, Tanzanie
Le premier Forum international des investissements en Tanzanie (TIFI 2016) aura lieu du 9 au 11 Mars 2016 sous le thème « Accroître la participation du secteur privé, des partenariats public-privé et l’intégration régionale ». Le TIFI 2016 sera le plus grand rassemblement de dirigeants de
l’industrie, de PME, de fonds d’investissement, de banquiers, de chefs d’établissement, de décideurs politiques et de représentants des médias
internationaux, réunis autour de l’histoire de la croissance de la Tanzanie, de son potentiel et de ses ambitions de devenir un pays à revenus
moyens d’ici à 2025. Les discussions porteront sur les opportunités d’affaires dans les différents secteurs de l’économie tanzanienne et l’intégration régionale. Avec la participation confirmée des investisseurs mondiaux et d’institutions de financement contrôlant plus de 200 milliards
de dollars d’actifs, le Forum international des investissements en Tanzanie constituera la plus grande assemblée du genre de l’histoire du pays.
Infos : http://www.tziforum.com/home
• CAPE VI - 6e Congrès et Exposition du Pétrole Africain
15-17 mars 2016, Abuja, Nigeria
CAPE VI, le 6 e Congrès et Exposition du Pétrole Africain, aura lieu du 15 au 17 mars 2016 à Abuja – République fédérale du Nigeria. L’événement
organisé entre autres par l’Association des producteurs de pétrole africains (APPA), le ministère des Ressources pétrolières du Nigeria et le
Royaume-Uni, réunira des délégations de haut rang des 18 pays membres producteurs de pétrole de l’APPA (Algérie, Angola, Bénin, Cameroun,
Congo, Congo RDC, Côte d’Ivoire, Égypte, Guinée équatoriale, Gabon, Ghana, Libye, Mauritanie, Niger, Nigeria, Afrique du Sud, Soudan et Tchad).
CAPE VI est une occasion pour les opérateurs du secteur investissant en Afrique de comprendre l’environnement politique et les principales
questions concernant le développement de l’industrie des hydrocarbures en Afrique, et de rencontrer les principaux décideurs politiques, économiques et institutionnels du continent africain. CAPE VI sera organisé en même temps que la 33e session ordinaire de la réunion du Conseil
des ministres de l’APPA, à laquelle assisteront les ministres des pays membres de l’APPA. L’événement sera également organisé simultanément
avec le Forum des dirigeants de sociétés pétrolières nationales africaines.
Infos : cape-africa.com
• Africa CEO Forum : le forum des grandes entreprises africaines
21-22 mars 2016, Abidjan, Côte d’Ivoire
Du 21 au 22 mars 2016 aura lieu le Africa CEO Forum, décrit par ses organisateurs comme le plus grand rendez-vous international des responsables
les plus influents de la finance africaine et internationale, ainsi que des dirigeants des grandes entreprises africaines du secteur privé. L’événement
se veut le lieu privilégié d’échanges sur les enjeux du développement économique des entreprises africaines dans un environnement de qualité,
propice aux rencontres d’affaires. Spécialistes de la banque, du capital-investissement, des marchés financiers ou représentants des institutions
financières internationales sont autant de personnalités qui participent chaque année à ce rendez-vous de référence. Au total, ce sont plus de
800 participants, dont plus de 500 PDG venus de l’ensemble du continent, 100 banquiers et financiers, ainsi que 200 personnalités africaines et
internationales de premier plan que devrait accueillir le Africa CEO Forum à Abidjan en Côte d’Ivoire. Infos : http://www.theafricaceoforum.com/fr/
4629, rue Louis B. Mayer, suite 201, Laval, Québec CANADA, H7P 6G5 • Téléphone : +1 (450)-902-0527 • Fax : +1 (514)-393-9024
• [email protected] • afriqueexpansion.com • Directeur de la Rédaction : Gerba Malam • Directrice générale :
Amina Gerba • Rédacteur en chef : Jean-Nicolas Saucier • Rédactrice en chef adjointe : Vitraulle Mboungou • Rédaction :
Josianne Massé, Jean-Frédéric Légaré-Tremblay, Aimie Eliot, Léopold Nséké, Marc-André Boivert • Correspondants / France :
Rudy Casbi, Isaac Ebwélé / États-Unis : Binta Camara / Cameroun : Marc Omboui, Badjang ba Nken, Parfait N. Siki / Gabon : Antoine Lawson, Alexis Koumba
/ Côte d’Ivoire : Jean Samuel Kondo / Sénégal : Mapote Gaye • AFRIQUE EXPANSION MAGAZINE est édité par GERAM COMMUNICATIONS INC • Président,
Directeur de la publication : Gerba Malam • Vice-Présidente : Amina Gerba • Marketing et Ventes : Jonathan Behem • Communications et événements
spéciaux : Eva Medi • Abonnements / Service à la clientèle : Josée Campbell • Design graphique : Luc Girouard (lucgirouard.com) Impression : Beloin
Graphique • Administrateur Web : Khadim Ndiaye • Distributeur : Messageries Dynamiques • Photos : Shutterstock, Luc Girouard et DR • AFRIQUE
EXPANSION MAGAZINE • Dépôt légal / Bibliothèque nationale du Québec / 2016 Bibliothèque nationale du Canada 2016 • ISSN 1488-0504 • Postes Canada
Convention no. 40033111 • AFRIQUE EXPANSION MAGAZINE est indexé dans le CANADIAN ADVERTISING RATES AND DATA CARD • Tous droits de
reproduction réservés pour tous pays. Reproduction interdite de tous articles sauf accord écrit de la Direction.
46
AFRIQUE EXPANSION • 51
DÉCOUVREZ LA
MAGIE DE L’AFRIQUE.
En collaboration avec Air Canada, Brussels Airlines offre d’excellentes
correspondances du Canada via Bruxelles vers 17 destinations africaines :
Abidjan, Banjul, Bujumbura, Conakry, Cotonou, Dakar, Douala, Entebbe,
Freetown, Kigali, Kinshasa, Lomé, Luanda, Monrovia, Nairobi, Ouagadougou
et Yaoundé.
Contactez votre agence de voyages ou Brussels Airlines au 1-866-308-2230.